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INST Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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37e LÉGISLATURE, 2e SESSION

Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le jeudi 5 décembre 2002




¹ 1530
V         Le président (M. Walt Lastewka (St. Catharines, Lib.))
V         M. John Dillon (vice-président, Politiques et conseiller juridique, Conseil canadien des chefs d'entreprise)
V         Le président
V         M. Jayson Myers (économiste en chef, Manufacturiers et exportateurs du Canada)
V         M. Joseph Volpe (Eglinton—Lawrence, Lib.)
V         M. Jayson Myers
V         

¹ 1535

¹ 1540
V         M. Joseph Volpe
V         M. Jayson Myers
V         M. Nick Discepola (Vaudreuil—Soulanges, Lib.)
V         M. Jayson Myers

¹ 1545
V         Le président
V         M. David Bennett (directeur national, Santé, sécurité et environnement, Congrès du travail du Canada)
V         

¹ 1550
V         Le président
V         M. James Rajotte (Edmonton-Sud-Ouest, Alliance canadienne)
V         M. Jayson Myers

¹ 1555
V         M. James Rajotte
V         M. Jayson Myers
V         M. John Dillon

º 1600
V         M. James Rajotte
V         M. Jayson Myers
V         M. James Rajotte
V         Le président
V         M. James Rajotte
V         M. David Bennett

º 1605
V         M. James Rajotte
V         Le président
V         M. James Rajotte
V         Le président
V         M. David Bennett
V         M. James Rajotte
V         M. David Bennett
V         M. James Rajotte
V         M. David Bennett
V         Le président
V         M. Joseph Volpe
V         M. David Bennett

º 1610
V         M. Joseph Volpe
V         Le président
V         M. John Dillon
V         M. Joseph Volpe
V         M. John Dillon
V         M. Joseph Volpe
V         M. David Bennett

º 1615
V         Le président
V         M. Joseph Volpe
V         Le président
V         M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ)
V         M. Jayson Myers
V         M. Paul Crête
V         M. Jayson Myers
V         M. Paul Crête
V         M. Jayson Myers

º 1620
V         M. Paul Crête
V         M. John Dillon
V         M. Paul Crête
V         M. John Dillon
V         Le président
V         M. Jayson Myers
V         Le président
V         M. Serge Marcil (Beauharnois—Salaberry, Lib.)

º 1625
V         M. John Dillon

º 1630
V         M. Jayson Myers
V         Le président
V         M. Dick Proctor (Palliser, NPD)
V         M. Jayson Myers

º 1635
V         M. Dick Proctor
V         M. Jayson Myers
V         M. Dick Proctor
V         M. David Bennett

º 1640
V         Le président
V         M. Andy Savoy (Tobique—Mactaquac, Lib.)
V         M. John Dillon
V         M. Andy Savoy
V         M. Jayson Myers

º 1645
V         M. Andy Savoy
V         M. David Bennett

º 1650
V         Le président
V         M. Andy Savoy
V         M. John Dillon
V         M. Andy Savoy
V         M. John Dillon
V         Le président
V         M. Brian Fitzpatrick (Prince Albert, Alliance canadienne)

º 1655
V         The Chair
V         M. Jayson Myers
V         M. Brian Fitzpatrick
V         M. John Dillon
V         The Chair
V         M. David Bennett
V         Le président
V         M. Brent St. Denis (Algoma—Manitoulin, Lib.)

» 1700
V         M. Jayson Myers
V         M. Brent St. Denis
V         M. Jayson Myers
V         M. Brent St. Denis
V         M. John Dillon
V         M. Brent St. Denis
V         Mr. Nick Discepola
V         M. Brent St. Denis
V         M. John Dillon
V         M. Brent St. Denis
V         Le président
V         M. Brent St. Denis
V         M. Jayson Myers
V         M. Brent St. Denis
V         
V         M. John Dillon

» 1705
V         Mr. Brent St. Denis
V         Mr. John Dillon
V         M. Jayson Myers
V         Le président
V         M. David Bennett
V         Le président
V         M. Jayson Myers
V         Le président

» 1710
V         Mr. Nick Discepola
V         Mr. Jayson Myers
V         Mr. Nick Discepola
V         M. Jayson Myers
V         Mr. Nick Discepola
V         M. Jayson Myers

» 1715
V         Le président
V         M. David Bennett
V         Mr. Nick Discepola
V         M. David Bennett
V         Le président
V         M. John Dillon
V         The Chair
V         M. James Rajotte
V         M. John Dillon

» 1720
V         M. James Rajotte
V         M. John Dillon
V         Le président
V         M. Larry Bagnell (Yukon, Lib.)
V         M. Jayson Myers
V         Le président










CANADA

Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie


NUMÉRO 009 
l
2e SESSION 
l
37e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 5 décembre 2002

[Enregistrement électronique]

¹  +(1530)  

[Traduction]

+

    Le président (M. Walt Lastewka (St. Catharines, Lib.)): La séance est ouverte.

    Conformément au paragraphe 108(2), est à l'ordre du jour d'aujourd'hui la question des répercussions économiques de la mise en oeuvre du Protocole de Kyoto sur l'industrie canadienne. L'ordre du jour devrait se lire de 15 h 15 à 17 heures. Nous nous attendons à des votes, de sorte que nous commencerons sans tarder et entendrons les témoins.

    Je suis heureux d'annoncer que nous avons avec nous M. John Dillon, vice-président, Politiques, et conseiller juridique, Conseil canadien des chefs d'entreprise; M. Jayson Myers, économiste en chef, Manufacturiers et exportateurs du Canada; M. David Bennett, directeur national, Santé, sécurité et environnement, Congrès du travail du Canada.

    À moins que les témoins en aient décidé autrement, nous commencerons par M. Dillon, si vous voulez bien.

+-

    M. John Dillon (vice-président, Politiques et conseiller juridique, Conseil canadien des chefs d'entreprise): Je vous remercie infiniment, monsieur le président. J'ai un mémoire plus long, mais ma déclaration préliminaire sera brève.

    Je commencerai par souligner que les entreprises appuient pleinement les mesures dynamiques visant à réduire les émissions, non seulement de gaz à effet de serre, mais encore d'autres polluants comme ceux qui causent le smog urbain. Tel qu'il est maintenant structuré, le Protocole de Kyoto, toutefois, ne relèvera qu'inefficacement le défi des changements climatiques tout en n'étant pas adapté aux circonstances particulières du Canada.

    Je voudrais prendre quelques instants pour exposer nos préoccupations clés relativement au Protocole de Kyoto d'un point de vue canadien et les questions que nous nous posons au sujet de la position du gouvernement en faveur de la ratification. Je décrirai ensuite ce que les chefs d'entreprise canadiens considèrent comme une démarche plus productive qui profiterait tant au Canada qu'au monde entier.

    Depuis la conclusion du protocole il y a cinq ans, le gouvernement n'a toujours pas présenté de plan crédible montrant aux Canadiens comment, et à quel coût, la cible du Canada pourra être atteinte. En dépit de ces incertitudes et de l'absence de véritable consensus national au sein des gouvernements fédéral et provinciaux sur la meilleure stratégie pour le Canada, la Chambre sera appelée à voter sur la ratification du Protocole de Kyoto dans quelques jours.

    Il y a un certain nombre de raisons importantes pour lesquelles la mise en oeuvre du Protocole de Kyoto sera, au mieux, difficile pour le Canada. Pour atteindre la cible, les Canadiens devront réduire leurs émissions de 30 p. 100 d'ici les six à dix prochaines années. Cet objectif ne pourra être atteint sans transformation majeure de notre mode de vie. D'un point de vue purement pratique, la réaction aux récentes fluctuations des prix du gaz naturel et de l'électricité montre que ni les électeurs ni les chefs politiques ne sont prêts à appuyer des fluctuations de prix susceptibles de modifier le comportement des consommateurs pour assurer l'atteinte de l'objectif.

    Les émissions canadiennes continuent de croître à cause de nos exportations énergétiques et de biens à forte teneur en ressources. Ces exportations et leurs retombées constituent une bonne source de revenus et d'emplois dans toutes les régions du pays ainsi que de recettes fiscales qui servent à financer les autres priorités sociales du Canada. Nos émissions croissent en outre à cause de l'immigration. Plus de gens consomment de l'énergie, et le Canada est le seul pays signataire du Protocole de Kyoto ayant une cible de réduction dont la population est en croissance, mais le protocole fixe un plafonds aux émissions, quelle que soit la population.

    L'effet le plus immédiat de la décision de ratifier le Protocole de Kyoto se ferait sentir sur les investissements des entreprises, et non pas seulement sur les champs de pétrole. Le gouvernement fédéral a reconnu que les investissements sont essentiels à une hausse de la productivité et des revenus canadiens. Or, le Canada serait le seul pays de l'hémisphère occidental à accepter une cible, ce qui risque de détourner les investissements vers les pays n'ayant pas de cible à atteindre. Les Canadiens paieront le prix, mais le climat planétaire n'en profitera guère.

    La décision de ratifier le Protocole de Kyoto sans plan clair et détaillé de sa mise en oeuvre, risque, à notre avis, d'empirer les choses. À moins que les investisseurs canadiens et étrangers n'aient un portrait clair de la façon dont les règles toucheront les coûts des entreprises dans les années à venir, ils présumeront qu'ils seront élevés. Toute incertitude dans le plan de mise en oeuvre ajoute aux risques de faire des investissements au Canada et influera non seulement sur les nouveaux investissements, mais encore sur la cote de crédit des entreprises.

    Sous réserve de ces nombreuses lacunes, le Protocole de Kyoto pourrait être acceptable pour les Canadiens s'il offrait une solution réelle au risque de changements climatiques irréversibles. Malheureusement, ce n'est pas le cas. Compte tenu de la non-participation des États-Unis et du fait que les pays en développement n'auront aucune cible de réduction à atteindre, moins d'un tiers des émissions mondiales seront couvertes. Les émissions du reste du monde, notamment celles de pays en développement comme la Chine, l'Inde et le Mexique, continueraient d'augmenter plus vite que celles de tous les pays ayant une cible à atteindre. Un bon nombre des pays ayant une cible à atteindre, y compris des pays européens, ne sont pas en bonne voie d'atteindre leurs objectifs.

    Les chefs d'entreprise sont d'avis que tous les pays, toutes les entreprises et tous les particuliers doivent agir pour réduire les émissions. Même le ministre de l'Environnement du Canada, David Anderson, semble admettre que le Protocole de Kyoto n'est pas nécessaire pour pousser les gens à l'action. Dans un certain nombre de discours qu'il a prononcés récemment, il a parlé de mesures prises par le gouvernement fédéral et les États américains pour lutter contre les émissions de gaz à effet de serre malgré la décision du gouvernement Bush de ne pas ratifier le Protocole de Kyoto. Cela nous amène évidemment à poser la question de savoir si la ratification du Protocole de Kyoto est vraiment nécessaire ou si cela est le meilleur moyen d'inciter les gens à prendre des mesures intelligentes pour réduire les émissions de gaz à effet de serre et d'autres polluants.

    Le gouvernement fédéral a produit une ébauche de plan de mise en oeuvre du Protocole de Kyoto. Malheureusement, cette ébauche est loin de répondre aux attentes. Dans plusieurs aspects importants, elle propose davantage une liste de voeux pieux plutôt qu'une série de politiques soigneusement énoncées. Elle propose des objectifs louables comme la réduction d'une tonne d'émissions par personne, mais n'indique pas clairement la façon dont ces objectifs seraient atteints et laisse pas moins d'un quart de l'objectif canadien, soit quelque 60 millions de tonnes d'émissions, en suspens.

+-

     Bref, le gouvernement n'a pas répondu aux questions sur ce que coûtera la mise en oeuvre du Protocole de Kyoto et sur qui paiera.

    Avant de terminer, monsieur le président, je voudrais prendre quelques instants pour énoncer certains des principes qui, selon un certain nombre d'entre nous, du milieu des affaires, pourraient servir de fondements à la conception d'une stratégie de remplacement. Je me rends compte qu'il est un peu tard pour penser à cela, mais il est très certainement malheureux qu'au cours du débat, tant à la Chambre qu'au Sénat, la question des stratégies de remplacement n'ait pas été discutée davantage.

    Je commencerai par dire que le Canada n'a pas à rougir de l'évaluation de son dossier en matière de protection de l'environnement et de questions semblables. L'an dernier, évidemment, le Canada se classait quatrième dans l'indice de durabilité environnementale du Forum économique mondial. Outre le fait que nous nous sommes très bien classés en tant que pays, nos entreprises ont pris des mesures novatrices dans la réduction des gaz à effet de serre. Des centaines de millions de dollars ont été investis dans la recherche sur de nouvelles technologies, comme les piles à combustible, la capture et le stockage du carbone et les énergies renouvelables, et ce n'est qu'un début.

    À titre de très brève observation sur les solutions de rechange, je dirai d'abord que nous croyons que notre objectif en tant que pays devrait être de faire du Canada l'un des pays les plus économes en énergie dans le monde et un chef de file mondial dans le développement d'écotechnologies, stimulant ainsi la croissance économique et la création d'emplois pour les Canadiens. Poursuivant cet objectif, nous appuyons la négociation d'ententes entre les gouvernements et les secteurs industriels clés. Ces ententes comprendraient un régime de divulgation et d'application et se fonderaient sur des améliorations de l'intensité des émissions par unité de production.

    Dans le cadre de ces ententes sur le rendement, l'industrie et les gouvernements examineraient les technologies les plus prometteuses et les échéanciers qui maximiseraient la contribution de chaque secteur aux réductions globales. Elles pourraient de plus s'attaquer aux autres émissions contribuant à la pollution de l'air, de même que déterminer les technologies pouvant être exportées pour aider d'autres pays à réduire leurs émissions.

    Le développement et la commercialisation de technologies à faibles ou à zéro émissions constituent la seule méthode efficace à long terme pour lutter contre les changements climatiques tant à l'échelle du pays qu'à celle du monde. Par conséquent, nous voudrions que soit établie une stratégie nationale pour la conception, la mise à l'essai et la mise en oeuvre d'écotechnologies novatrices. Étant donné que les États-Unis ont également fait une priorité du développement technologique à long terme, il est clair que nous devons travailler en étroite collaboration avec notre principal partenaire commercial dans ce domaine.

    Le milieu des affaires reconnaît certes que cela fait partie d'une stratégie plus globale qui répond à la nécessité de régler les problèmes de la pollution atmosphérique, de l'urbanisme et des transports urbains, des pratiques forestières et agricoles ainsi que la consommation énergétique des particuliers. Il est d'avis que la plus importante contribution que puissent faire les Canadiens à l'avancement de l'intérêt commun consiste à montrer, en mettant en oeuvre notre volonté, nos connaissances et nos technologies, qu'il est possible de combiner la croissance et les possibilités avec les normes écologiques les plus strictes.

    Merci, monsieur le président. Il me tarde d'entendre vos questions.

+-

    Le président: Je vous remercie infiniment de votre exposé.

    Nous entendrons ensuite M. Jayson Myers, des Manufacturiers et exportateurs du Canada.

    M. Myers, vous avez la parole.

+-

    M. Jayson Myers (économiste en chef, Manufacturiers et exportateurs du Canada): Je vous remercie beaucoup, monsieur le président.

    En guise d'introduction, je dirai que les Manufacturiers et exportateurs du Canada souscrivent pleinement aux objectifs énoncés par M. Dillon.

    L'objectif consiste à réduire réellement les émissions de gaz à effet de serre au Canada. Nous partageons tout à fait les préoccupations de l'industrie au sujet du débat en cours et de la position actuelle du gouvernement sur le plan de mise en oeuvre du Protocole de Kyoto. Nous sommes également tout à fait d'accord sur ce qu'il faut faire pour réduire vraiment les émissions de gaz à effet de serre à l'aide de solutions technologiques, où l'industrie canadienne joue vraiment un rôle de chef de file dans le développement de nombre de ces technologies.

    Je pense que vous avez tous en main un exemplaire de mes transparents, et j'ai déposé notre rapport sur le Protocole de Kyoto qui a été publié au mois de février dernier, lorsque nous avons eu un aperçu de la façon dont le gouvernement abordait la question. J'ai également déposé l'étude réalisée par Industrie Canada sur la politique de réduction du carbone. Cette étude n'a pas encore été publiée, de sorte que vous ne l'avez peut-être pas vue.

+-

    M. Joseph Volpe (Eglinton—Lawrence, Lib.): Pensez-vous pouvoir l'obtenir pour nous? Nous éprouvons des difficultés à l'obtenir.

    Désolé pour l'interruption.

+-

    M. Jayson Myers: Les documents de certaines sources sont plus faciles à obtenir que ceux d'autres sources, mais c'est une analyse très intéressante d'Industrie Canada.

    J'aimerais simplement dire que l'industrie et les Canadiens ont tout à gagner en réduisant les gaz à effet de serre, notamment par le développement de solutions technologiques.

+-

     Le document d'information que j'ai fourni renferme certains renseignements qui sont plutôt des données de base. Je ne vais pas m'y arrêter longuement, parce que je suis certain que vous l'avez tous consulté. Le premier tableau fait tout simplement état des sources d'émissions de GES au Canada et illustre l'ampleur du défi qui nous attend si nous vous réellement atteindre l'objectif de Kyoto, qui est de réduire les émissions de 30 p. 100. Compte tenu que l'on pourrait éliminer toute l'industrie canadienne de fabrication et tout le secteur du pétrole et du gaz sans pour autant atteindre l'objectif de Kyoto, cela donne une idée de l'énormité de la tâche liée à l'atteinte de cet objectif dans un délai de huit ans. Nous croyons les ministres et le premier ministre sur parole lorsqu'ils disent que telle n'est pas l'intention visée ici, mais cela vous donne une idée de l'ampleur du défi qui nous attend.

    Je voulais aussi vous montrer où les progrès ont été accomplis dans la réduction des gaz à effet de serre, et faire ressortir le fait que la réduction des émissions de GES par l'industrie de fabrication compte pour une large part de la réduction totale depuis 10 ans. Les entreprises ont fait des progrès importants pour ce qui est d'en arriver à une plus grande efficience énergétique et de remplacer les combustibles fossiles, ce qui entraîne des réductions sensibles des émissions de gaz à effet de serre au Canada.

    Selon nous, il faut encourager les compagnies à prendre plus de mesures semblables; d'ailleurs, si elles prennent de telles mesures, c'est parce qu'il est dans leur intérêt économique de le faire. Comment encourager ces investissements, ces économies d'énergie? Comment encourager les compagnies à aller plus loin?

    Tout se résume à un grand nombre de prédictions économiques et, évidemment, les émissions sont étroitement liées à l'utilisation de l'énergie et aux émissions. Le tableau intitulé « Parce que les affaires continuent »—qui sert de fondement à l'analyse du groupe—prévoit une croissance économique d'environ 2,2 p. 100 à 2,5 p. 100 au cours des huit prochaines années. Or, au cours des 20 dernières années, la croissance économique a été associée à une réduction annuelle de 0,5 p. 100 du taux d'émission. Une réduction supplémentaire a été réalisée grâce aux économies d'énergie et parce qu'on a délaissé les combustibles fossiles. C'est ce qui a entraîné la réduction de 2 p. 100 des émissions dans le secteur de la fabrication, et c'est ce qui a entraîné une amélioration de 23 p. 100 de l'efficience énergétique au cours des dernières années.

    Toutefois, la projection renfermée dans le tableau intitulé «Pour que les affaires continuent» tient compte de tous ces changements. Elle tient compte du fait que, depuis 10 ans, on a enregistré une amélioration de 60 p. 100 de l'efficience énergétique en ce qui a trait aux sables bitumineux et de 50 p. 100 dans le cas de l'aluminium. Par ailleurs, l'industrie des produits chimiques a réduit ses émissions de 37 p. 100. On peut voir les autres gains réalisés par les manufacturiers depuis 10 ans pour ce qui est de réduire les émissions et d'augmenter les économies d'énergie

    Lorsque nous effectuons une évaluation économique de la situation, il est extrêmement important de savoir exactement ce que nous évaluons. Évaluons-nous les répercussions qu'aura le fait d'atteindre nos objectifs de Kyoto au cours des huit ou dix prochaines années, car l'analyse a largement porté sur cet aspect? Évaluons-nous le plan de mise en oeuvre du fédéral et les répercussions que celui-ci pourrait avoir? Évaluons-nous quelle devrait être la stratégie de réduction des émissions de gaz à effet de serre?

    Je pense que c'est là-dessus que le débat devrait porter. Qu'est-ce qui doit être fait pour réduire les émissions de gaz à effet de serre pour que les entreprises poursuivent leur bon travail?

    Vous connaissez le cadre d'exécution, l'objectif et l'échéancier du Protocole Kyoto, mais je veux vous montrer un graphique qui illustre le lien entre la croissance économique et les émissions de gaz à effet de serre, et ce qu'il faut faire pour atteindre l'objectif de Kyoto dans un délai de huit ans.

    On estime qu'entre maintenant et 2010, la croissance économique annuelle moyenne sera de 2,2 p. 100. Je peux vous dire qu'aucun économiste n'a le chiffre exact, mais cette estimation, cette moyenne est celle dont se sert le gouvernement.

    On estime que les émissions augmentent à un taux annuel d'environ 1,7 p. 100, en tenant compte du gain annuel de 0,5 p. 100 réalisé grâce aux progrès technologiques dans les économies d'énergie et la conversion à des sources autres que les combustibles fossiles. Par conséquent, pour atteindre l'objectif de Kyoto, il nous faut accélérer ce taux de croissance, ce progrès technologique par un facteur de neuf, afin de réduire à moins 2,5 p. 100 la croissance des émissions annuelles. Une telle mesure nous permettrait d'atteindre l'objectif de Kyoto et c'est la seule façon de l'atteindre sans détruire l'économie.

    La seule solution autre que l'accélération du progrès technologique par un facteur annuel de 800 p. 100 consiste à réduire l'activité économique, à moins conduire, à moins chauffer nos maisons et à réduire la production industrielle. C'est la seule solution autre que le progrès technologique, mais il faudrait, pour atteindre l'objectif fixé dans l'accord de Kyoto, accélérer de 800 p. 100 par année ce que l'industrie a fait.

¹  +-(1535)  

    La question qui se pose est celle-ci: Est-ce une cible qui peut réalistement être atteinte d'ici huit ans? Telle est notre préoccupation parce que même s'il existe des technologies et des solutions de rechange, même si nous savons que nous devons investir dans l'infrastructure et les transports, même si nous savons qu'un grand nombre de ces technologies existent, elles pourraient ne pas être commercialement viables et ne pas se traduire par l'atteinte de l'objectif d'ici huit ans. En fait, nombre d'entreprises n'obtiendraient même pas l'approbation réglementaire pour la mise en oeuvre de leurs projets d'infrastructure d'ici huit ans. J'estime donc que nous devons avoir un point de vue réaliste sur ce qui est faisable dans le contexte actuel.

    J'ai ajouté à mon évaluation un certain nombre d'études. Vous avez parlé à Mark Jaccard. Ce sont des études qui examinent les répercussions de l'atteinte de la cible de Kyoto par de vraies réductions des émissions de gaz à effet de serre au Canada. Elles supposent toutes, de manière optimiste peut-être, que nous ferons en fait quelque chose au Canada et que nous ne tenterons pas d'échapper au protocole en achetant des crédits et d'éviter ainsi d'avoir à atteindre notre cible de Kyoto.

    L'étude d'Industrie Canada est la meilleure que j'aie vue sur le plan macroéconomique. Elle a été examinée par les intéressés, contrairement à celle du gouvernement. C'est le seul modèle que j'ai vu qui tient compte des taux de rendement et des répercussions sur les investissements. C'est un excellent modèle et...

    Une voix: De quel modèle s'agit-il?

    M. Jayson Myers: Il s'agit de l'étude d'Industrie Canada que j'ai déposée.

    Elle suppose que le Canada devra atteindre ses objectifs de Kyoto uniquement par la réduction des émissions intérieures, mais à la page 14, tableau 5, on lit ce qui suit sur les effets: réduction de 20 p. 100 des investissements dans le fer et l'acier, de 34 p. 100, dans l'industrie pétrochimique, et de 41 p. 100, dans l'industrie de l'aluminium. On lit des pertes d'emplois de 12 à 21 p. 100, une diminution de 64 à 34 p. 100 de la consommation des ménages de produits pétroliers raffinés, notamment. On voit là les coûts énergétiques que prévoit aussi Industrie Canada.

    Je le répète, cette étude suppose simplement que nous allons faire quelque chose pour atteindre nos objectifs de Kyoto et tient compte du fait que nous ne pourrons sans doute pas le faire d'ici huit ans. C'est ainsi que s'explique le ralentissement prévu de l'activité économique.

    Notre rapport sur Kyoto dit que, même si on tient compte de ce que le gouvernement fédéral projette de faire en achetant des crédits d'émissions, nous aurons toujours un écart de 15 p. 100. Si nous comblons cet écart en diminuant la production, cela se traduira par la perte de 450 000 du secteur de la fabrication.

    Par exemple, de 1989 à 1991, la production manufacturière a diminué de 15 p. 100, et nous avons en fait perdu 480 000 emplois dans le secteur de la fabrication. Je ne pense donc pas que cette affirmation soit exagérée.

    Il y a une liste de questions liées à la compétitivité. Je ne vais pas en parler parce que John l'a déjà fait.

    J'ai ici deux graphiques que je présente dans tous mes exposés et qui montrent, d'abord, dans quelle mesure les flux de trésorerie, les bénéfices après-impôts, les investissements au Canada—si nous tentons d'encourager les investissements dans les nouvelles technologies— ne rendent pas plus coûteux le fait d'exploiter une entreprise au Canada, ne réduisent pas les taux de rendement des investissements, n'entraînent pas le déplacement des investissements à l'extérieur du pays. Ils constituent plutôt des incitatifs, des encouragements à d'autres investissements.

    S'il y en a qui croient que les entreprises n'examinent pas leurs résultats maintenant... c'est la seule façon dont nombre d'entreprises continuent d'exercer leur activité, particulièrement ces dernières années où les coûts de l'énergie sont montés en flèche en Ontario, en Alberta et en Colombie-Britannique.

    L'autre est tout simplement un lien assez évident entre les bénéfices et le chômage, dont je vous parlerais de toute façon, quel que soit mon exposé, parce que c'est un lien fort pertinent à mon avis.

¹  +-(1540)  

+-

    M. Joseph Volpe: Ces deux éléments sont de la même couleur. Lequel est lequel?

+-

    M. Jayson Myers: Je suis désolé. Dans le graphique portant sur les bénéfices et la création d'emplois, la ligne représentant les bénéfices après impôt est celle qui a grimpé récemment, puis qui a chuté.

+-

    M. Nick Discepola (Vaudreuil—Soulanges, Lib.): Commençons par la gauche. Quelle est la...?

+-

    M. Jayson Myers: À gauche, la ligne supérieure représente les bénéfices après impôt, exprimés comme un pourcentage du PIB. La ligne qui est légèrement en-dessous du 8 p. 100 correspond au taux de chômage.

    Si quelqu'un examine les gains à la Bourse de Toronto, soit le TSE—qu'on appelle le TSX ces jours-ci—qu'il jette un coup d'oeil au taux de chômage. Cela donne une assez bonne idée des gains auxquels peut s'attendre l'industrie canadienne. Le lien est assez étroit. Si vous examinez ces deux indices à chaque année, il est surprenant de voir à quel point le chômage talonne la rentabilité. Le message qui découle de cette situation est encore une fois qu'il faut des compagnies rentables pour créer des emplois. C'est la raison pour laquelle nous devrions essayer de faire en sorte qu'il soit plus facile de faire des affaires au Canada, et de faire en sorte qu'il soit plus facile pour les compagnies de prendre de l'expansion et de croître.

    John a traité du plan fédéral. La stratégie visant les gros producteurs d'émissions, qui suscite un grand nombre de préoccupations et beaucoup d'incertitude au sein de l'industrie, est un plan qui semble changer quotidiennement lorsqu'on parle aux représentants de RNCan et d'Industrie Canada. On ne parle jamais à qui que ce soit de Finances Canada, parce que ces gens n'ont tout simplement pas participé au débat. Mais le plan semble changer à chaque semaine. Il existe des questions extrêmement importantes et une grande incertitude relativement à ce qui serait réellement englobé par ce plan visant les gros émetteurs. Il existe un risque énorme en ce qui a trait aux coûts anticipés de l'achat des permis d'émissions internationaux. Cette question est extrêmement complexe. Personne ne s'est penché sur les coûts liés à l'observation ou à la mise en place de la technologie permettant de détecter les émissions. Si vous concevez quelque chose d'une manière inefficace, les résultats obtenus seront inefficaces.

    De nombreux représentants de RNCan nous ont dit bien franchement: «Ne vous en faites pas si vous ne pouvez investir davantage dans la réduction des émissions de gaz à effet de serre, parce que vous pouvez vous en sauver en payant 10 $ la tonne». Franchement, si une compagnie peut s'en sauver en payant 10 $ la tonne dans six à huit ans, pourquoi voudrait-elle investir maintenant? L'investissement serait probablement plus élevé pour la compagnie si celle-ci prenait des mesures pour réduire encore de 15 p. 100 les émissions de gaz à effet de serre, comme le gouvernement s'attend à ce que l'industrie le fasse.

    Pour autant que je puisse voir, l'évaluation économique faite par le gouvernement de toute cette question n'a aucune crédibilité. Le gouvernement suppose que ces mesures seront mises en oeuvre et il suppose qu'elles seront efficaces. On ne sait pas trop ce que sont ces mesures, particulièrement du côté du consommateur. Le gouvernement dit que le coût de ces mesures sera négligeable et que leur incidence sur le PIB sera par conséquent négligeable. Je pense qu'il n'y a personne qui croit cela. Il n'y a pas de rapport sur les coûts d'observation. Il n'y a pas de rapport pour les répercussions sur les décisions d'investissement. Il n'y a pas de rapport sur la provenance de l'argent et la façon dont ce dossier sera concilié avec les autres objectifs du gouvernement, notamment en matière de santé. Il n'y a pas d'estimations du coût des mesures ciblées, de la façon de faire pour que les consommateurs réduisent leurs déplacements motorisés de 10 p. 100, ou de la façon de s'y prendre pour améliorer de 20 p. 100 le rendement énergétique des foyers.

    Comme je l'ai dit, l'évaluation économique faite par le gouvernement n'a pas beaucoup de crédibilité aux yeux des groupes qui ont fourni des évaluations des incidences. Ce qui a émané de ce qu'on pourrait appeler la boîte noire de l'analyse d'un groupe de modélisation est un modèle économique qui ne tient aucunement compte des préoccupations de l'industrie.

    En résumé, et cela appuie très largement ce que John a déjà dit, si l'objectif est véritablement de réduire les émissions de gaz à effet de serre au Canada, fournissons donc aux entreprises et aux consommateurs des incitatifs à cet égard. Commençons d'abord par parler aux consommateurs et les inciter à économiser l'énergie. Fournissons le genre d'incitatifs présentés dans la stratégie sur l'innovation. Éliminons l'impôt sur le capital. Accélérons la dépréciation du capital, parce qu'il y aura beaucoup d'éléments d'actif délaissés si l'on fait appel à une nouvelle technologie. Par conséquent, commençons par là. Envisageons d'investir dans la commercialisation des piles à combustible, des piles à combustible Ballard.

    Où les produits découlant des investissements faits ici dans la recherche et le développement sont-ils commercialisés? À Chicago et au Japon, parce que leurs gouvernements ont investi dans la commercialisation. Par conséquent, nous allons perdre sur deux plans. Nous allons perdre parce que les prix de revient de nos entreprises sont extrêmement élevés, et nous allons perdre parce que les États-Unis et le Japon ont déjà fait des investissements importants dans la technologie. Ces pays vont être très en avance sur nous. Ce dont nous parlons—à savoir mettre en place une stratégie en vertu de laquelle nous achèterions des crédits d'émissions de la Russie—n'a absolument aucun sens.

    Je pense qu'on peut prendre un grand nombre de mesures. Adoptons un plan pour l'infrastructure de transport—non seulement l'infrastructure urbaine, mais aussi de meilleures routes. Je conduis de Guelph à Toronto à tous les matins et je me retrouve bloqué dans le stationnement qu'on appelle la 401. Cela n'a aucun sens.

¹  +-(1545)  

Il nous faut adopter au Canada une stratégie de modernisation des infrastructures et il nous faut prévoir des fonds pour vraiment la mettre en oeuvre. Il y a plusieurs façons d'aller de l'avant—nous pouvons informer les consommateurs, offrir des crédits d'impôt pour que les consommateurs investissent dans de nouveaux appareils, et ainsi de suite—mais nous devons avant tout tenir ce débat. Nous devons mener des consultations. Nous devons parler de ce que nous pouvons faire et nous devons le faire de façon constructive. Avant tout, je crois, il faut regagner la confiance qu'on a perdue dans tout ce processus de consultation.

Merci.

+-

    Le président: Merci beaucoup, monsieur Myers.

    Nous passerons maintenant à M. Dave Bennett, du Congrès du Travail du Canada.

    M. Bennett, si vous le voulez bien.

+-

    M. David Bennett (directeur national, Santé, sécurité et environnement, Congrès du travail du Canada): Je tiens tout d'abord à vous transmettre les excuses du président du Congrès du travail du Canada, Ken Georgetti, qui n'a pas pu se présenter ici. Le comité comprendra que, comme deux énormes questions publiques sont à l'étude à l'heure actuelle, à savoir le Rapport Romanow et le Protocole de Kyoto, notre président doit partager son temps entre les deux.

    Je tiens aussi à présenter les excuses du congrès pour avoir employé dans son mémoire l'acronyme «LIEs» (MENSONGEs pour «large industrial emitters» (grandes sources d'émission industrielles). On exagère évidemment quelque peu en laissant entendre que la position fondamentale du milieu des affaires sur le Protocole de Kyoto constitue un mensonge.

    Le Congrès du travail du Canada appuie fortement la ratification hâtive et la mise en application de Kyoto, de même que la transition juste comme faisant partie intégrale du plan de mise en application. Nous sommes heureux d'avoir été invités par le comité pour nous prononcer sur la question des répercussions de Kyoto sur l'industrie. Aux fins de la présentation, nous traiterons brièvement de trois sujets d'importance: la relation entre Kyoto et les grandes sources d'émission industrielles; les petites et moyennes entreprises (PME) et les répercussions dans l'emploi, y compris la transition juste pour les travailleuses et les travailleurs déplacés par les mesures visant le changement climatique. Nous traiterons aussi de l'échange de droits d'émission dans ces contextes.

    Sous le plan pour le changement climatique au Canada (PCCC), les grandes sources d'émission industrielles considérées sont les industries du charbon, de l'huile et du gaz; les mines; la pulpe et le papier; l'industrie chimique; le fer et l'acier; la fusion et le raffinage; et les industries du ciment, de la chaux et du verre. Ces grandes sources d'émission industrielles sont responsables de 55 tonnes métriques (TM) du total de 240 TM de réductions de gaz à effet de serre requises pour le Canada, par l'entremise d'engagement avec une limite réglementaire, plus un échange de droits d'émission et des investissements stratégiques à coûts partagés [PCCC III C]. Cette partie du Plan est raisonnable.

    Les entreprises ont une flexibilité totale quant à leurs stratégies d'investissement pour la réduction des émissions et, lorsqu'elles refusent d'investir, elles peuvent considérer l'échange. La relation entre les engagements et l'échange d'émissions domestique est toutefois problématique. Si le résultat des engagements est moindre qu'un engagement exécutoire fort et si la limite imposée aux mécanismes d'échange d'émissions n'est pas assez restrictive, les objectifs d'émission ne seront pas rencontrés. Les industries les moins efficaces et les plus polluantes paieront pour se libérer de leurs engagements. Ce serait encore pire si le gouvernement achetait des permis internationaux d'émissions (PCCC III G) parce que (même si les permis étaient à leur tour vendus plutôt que donnés à des entreprises canadiennes) ceci signifierait encore une fois l'achat du droit de polluer au détriment de l'investissement productif.

    La nature insoluble du dioxyde de carbone à titre de polluant signifie que les émissions ne peuvent pas être contrôlées à la fin du tuyau de vidange ou de la cheminée industrielle. Les gaz à effet de serre ne peuvent pas être lavés à la brosse comme les gaz corrosifs. La seule façon dont ils peuvent être réduits par les grandes sources d'émissions est de changer la proportion du produit par rapport aux émissions (ex. augmenter l'efficacité industrielle) par l'entremise de la technologie et de changements dans le processus visant l'élimination du CO2 pour le remplacer par un processus complètement nouveau tels que les industries d'énergie de remplacement. Certains CO2 peuvent être capturés et séquestrés bien que cette façon ne soit pas efficace pour «réduire» les émissions. Le Plan pour le changement climatique au Canada propose ceci pour la production d'énergie à charbon épuré, mais ce n'est pas pratique.

    Il existe une preuve indirecte que cette approche de «prévention de la pollution» pour les émissions de gaz à effet de serre est toujours un investissement productif et efficace sur le plan monétaire. C'est l'expérience de la «Massachusetts Toxics Use Reduction Act» de 1989, où les contrôles, contrairement aux mesures de prévention, ne peuvent pas compter comme des réductions de l'utilisation de substances toxiques.

    L'étude approfondie par la ONG de New-York, INFORM, qui favorise les entreprises, a révélé que dans tous les cas d'efforts de prévention de la pollution, les bienfaits économiques de telles mesures efficaces l'emportent sur les coûts. Seule l'importance de l'investissement et le moment de la retombée varient dans chaque cas, avec des bienfaits durables sur les plans financier et environnemental. Il n'y a aucune raison de croire que les investissements nécessaires pour réduire les émissions, soient un fardeau pour l'industrie. Comme d'habitude, on doit demander aux entreprises de faire ce qui est en leur faveur en bloquant la propagande du monde des affaires contre les choses qui apportent un bénéfice aux industries concernées, ainsi qu'à l'économie et à l'environnement.

    Les petites et moyennes entreprises, telles que définies dans le plan pour le changement climatique, n'interviendront que pour une part relativement faible des objectifs de réduction des émissions. Toutefois, le même argument s'applique aussi bien aux PME qu'aux grandes sources d'émission industrielles. Une partie de plan appliqué aux PME fait intervenir des mesures visant à réduire le torchage et l'aération des gaz. Toutes les autres mesures à appliquer par les PME concernent l'efficacité et la conservation de l'énergie. Il n'y a pas de raisons de dire que ces mesures ne sont pas rentables ou qu'elles sont contre-productives, pourvu que les investissements ont fait l'objet d'une planification stratégique et que l'exécution a été appropriée.

+-

    

¹  +-(1550)  

    En ce qui a trait à l'emploi et à la transition, les prévisions font état d'une baisse de 0,4 p. 100 du PIB en 2010. Compte tenu de l'activité économique devant être générée par Kyoto par l'entremise d'investissements productifs, de mesures d'efficience énergétique et de la création d'industries entièrement nouvelles, anticiper une baisse du PIB semble absurde.

    Aux activités économiques des gros émetteurs industriels et des PME il faut ajouter les avantages liés aux programmes d'amélioration des édifices, l'expansion des réseaux de transport en commun--que Jayson va certainement utiliser--et bien d'autres. Par conséquent, il existe, au contraire, un potentiel énorme de création de nouveaux emplois environnementaux dont bénéficieront tant les travailleurs que l'industrie.

    Une meilleure modélisation doit être faite avant que les prévisions du gouvernement ne puissent être prises au sérieux; par ailleurs, on ne s'est pas penché sur la qualité et la composition du PIB. Toute l'activité économique liée à Kyoto est constructive. Fini les solutions fondées sur le système de traitement en aval, par exemple, et fini les gens qui conduisent des véhicules assoiffés pour se rendre au travail et qui gèlent dans le noir à la maison.

    La même logique s'applique à la projection selon laquelle on enregistrerait une perte nette de 60 000 emplois en 2010. La question des emplois créés ou perdus n'est pas du tout examinée. Selon une projection faite par le mouvement ouvrier, 16 000 emplois seraient créés dans le secteur de l'énergie pris dans son ensemble, tandis que 12 800 seraient perdus. C'est la raison pour laquelle le mouvement ouvrier a prôné un programme de transition équitable pour les travailleurs affectés par Kyoto, en commençant par le secteur de l'énergie. Cette initiative inclurait des emplois de substitution ou des emplois continus, le maintien des salaires et avantages durant la période de transition, et une aide relativement aux coûts de formation et de réinstallation.

    Le ministre de l'Environnement, l'honorable David Anderson, a déclaré à la Chambre des communes qu'il était prêt à travailler avec le mouvement ouvrier relativement à un tel programme, par l'entremise d'un comité gouvernemental-syndical qui se pencherait sur les questions liées à la transition et aux projections d'emplois, et qui ferait rapport dans un délai de 90 jours. Cette idée générale a été confirmée dans le plan du Canada sur les changements climatiques, mais il est désappointant de constater que la totalité des emplois ou des rajustements de compétences s'appliquerait dans les programmes de formation. Ceci ne reflète pas ce que l'honorable David Anderson avait déclaré à la Chambre.

    Tant le mouvement ouvrier que le ministre ont compris que la mise en oeuvre de Kyoto nécessiterait des mécanismes en sus des rajustements et des programmes de formation existants. Les déclarations faites relativement à l'emploi et à la transition équitable dans le plan sur les changements climatiques sont inadéquates et ne sont pas acceptables pour le mouvement ouvrier. Néanmoins, nous prenons la parole du ministre et nous avons confiance qu'il assurera une transition équitable, en tant qu'élément central de la mise en oeuvre de Kyoto.

+-

    Le président: Merci beaucoup. Nous allons maintenant passer aux questions.

    Je vais commencer avec M. Rajotte.

+-

    M. James Rajotte (Edmonton-Sud-Ouest, Alliance canadienne): Merci, monsieur le président et merci messieurs d'être venus ici aujourd'hui pour nous faire vos présentations.

    Premièrement, M. Myers, vous avez dit que le plan du gouvernement sur les changements climatiques n'a pas été examinés par des pairs. Comme vous le savez, le gouvernement, ou à tout le moins le ministre de l'Environnement, a complètement rejeté votre modélisation et votre plan. Donc, je veux tout simplement vous demander de commenter la modélisation qui sert de toile de fond au plan du gouvernement, et vous demandez ce que vous en pensez, en tant qu'économiste.

+-

    M. Jayson Myers: Ma foi, en tant qu'économiste, je sais qu'on peut construire des modèles économiques à partir de toutes les hypothèses qu'on veut et qu'on peut obtenir les résultats qu'on veut. Il est donc extrêmement important de soumettre des modèles économiques à l'examen de pairs.

    C'est sûrement ce qu'a fait Industrie Canada, car c'est toujours ce que le ministère fait pour ses publications. Il les soumet à l'examen de pairs. Ce document a été rédigé par des savants et il a été soumis à l'examen d'économétriciens de premier rang.

    Pour le groupe de l'analyse et de la modélisation, la modélisation économique repose en grande partie sur le modèle du consultant. Il est souvent employé par des groupes qui disent essentiellement qu'on peut dépenser un peu moins ici et un peu plus là sans que cela ne nuise le moindrement à l'économie. Franchement, je crois qu'on devrait remettre en doute une hypothèse comme celle-là. On utilise néanmoins ce modèle.

    On a critiqué nos statistiques, mais celles-ci reposent sur deux ou trois choses. Elles ne reposent pas sur un modèle, mais avant tout sur ce que nos employeurs nous disaient. Certains employeurs ont eu recours aux services d'un même consultant pour établir leurs données. C'est plutôt étrange que le rapport général ne tienne pas compte de ces données.

    Franchement, cette perte de 450 000 emplois repose simplement sur le rapport entre la croissance économique et les émissions, d'un côté, et, de l'autre, l'importance de recourir à un changement technologique pour réduire l'écart entre notre niveau d'émissions actuel et celui que nous devons atteindre conformément au Protocole de Kyoto. S'il s'agit d'un écart de 15 p. 100...le gouvernement fédéral envisage maintenant un programme d'échange de droits d'émission pour que l'industrie réduise un écart de 55 mégatonnes, mais il reste encore 25 p. 100 d'un écart de 60 mégatonnes que personne ne sait comment supprimer.

    Nous ne faisons que supposer qu'il s'agissait d'un écart de 15 p. 100. Si l'on tient vraiment à atteindre l'objectif de Kyoto, la seule façon de le faire est de réduire l'activité économique. Si l'on réduit la productivité industrielle de 15 p. 100, on perd 450 000 emplois. Le calcul est très simple.

    Voilà comment nous en sommes arrivés à nos données et, franchement, je ne suis pas sûr que nous ayons besoin d'autres modèles économiques. On peut vraiment en arriver aux données qu'on veut. Ce qu'il faut, c'est faire preuve de bon sens par rapport à la façon dont se font les affaires.

¹  +-(1555)  

+-

    M. James Rajotte: L'autre sujet que je tiens à aborder est toute la question du climat d'investissement. Il a été soulevé en relation avec le rapport de l'Association canadienne des courtiers en valeurs mobilières--à savoir s'il avait été envoyé ou pas au premier ministre. Mais cela soulève néanmoins la question générale du climat d'investissement.

    Je veux que vous me parliez de l'incidence de Kyoto sur le climat d'investissement, mais aussi de ce que j'entends le milieu des affaires et l'industrie dire de plus en plus, à savoir qu'il n'existe aucun réel plan de mise en oeuvre et que cela crée énormément d'incertitude sur le terrain, comme l'a même dit hier le membre du Pembina Institute, et que c'est ce qui préoccupe surtout les investisseurs. Je voudrais donc que vous me parliez de cela.

    Avez-vous pu remarquer, même jusqu'à maintenant, que le climat d'investissement est plus frileux parce qu'il n'existe pas de réel plan de mise en oeuvre?

+-

    M. Jayson Myers: Permettez-moi de dire tout d'abord que—et je crois que John est très versé là-dedans aussi—oui, l'incertitude pose un gros problème, et pas seulement à l'égard du plan de mise en oeuvre, mais aussi de la décision de ratifier ou pas le protocole. Car, dès qu'on aura ratifié le protocole et engagé le Canada à atteindre un objectif précis, les entreprises devront prévoir de faux frais et des éléments de passif possibles, et des éléments de passif pour des droits d'actifs délaissés qui risqueraientpar conséquent de surgir.

    Il se peut donc, au plan de l'information financière, que le prix des actions se ressente déjà des attentes, mais aussi de l'incertitude, du fait qu'on ne sait pas du tout ce qui sera fait. Va-t-on vraiment faire cela?

    Franchement, il n'est pas très réaliste de croire que le Canada atteindra vraiment ses objectifs de Kyoto en huit ans. Tout cela suscite donc vraiment des interrogations au sujet de la politique publique et des attentes quant à ce que les entreprises devront faire. Jetez un coup d'oeil au champ de pétrole, à l'heure actuelle, au grès bitumineux. Si vous voulez voir un refroidissement du climat d'investissement, c'est probablement là qu'il faut regarder à l'heure actuelle.

    À votre tour, John.

+-

    M. John Dillon: J'ajouterai seulement, je crois, que l'incertitude règne autour tant des mesures précises qui seront mises en oeuvre et des coûts que celles-ci susciteront. Comme l'a signalé Jayson, beaucoup d'évaluations reposent sur des hypothèses contestables, tel du carbone à 10 $ la tonne, alors que le ministre de l'Environnement, David Anderson, dit maintenant que nous n'achèterons pas de carbone russe à bon marché. Quel prix l'industrie risque-t-elle alors de payer?

    En outre, beaucoup de décisions et d'évaluations d'investissement ont cours à l'étranger. Les responsables, à New York, à Londres et à Tokyo, par exemple, ne sont pas vraiment capables ni désireux de comprendre le processus politique canadien. Ce qu'ils voient, c'est que nous prenons ce qu'ils croient être une décision exécutoire à propos de la ratification du protocole, avec l'intention d'atteindre l'objectif visé. Connaissant l'importance de l'écart à réduire, ils font inévitablement des hypothèses négatives quant à l'incidence que cela aura sur les principales industries grandes consommatrices d'énergie.

º  +-(1600)  

+-

    M. James Rajotte: Avez-vous établi ou vu des estimations internes de l'incidence présente ou future de Kyoto sur nos capacités d'exportation?

+-

    M. Jayson Myers: Encore là, il en est question dans le rapport d'Industrie Canada. Le tableau 5 donne un aperçu des réductions. Le rapport d'Industrie Canada offre une analyse unique, car on a consulté ou du moins écouté les entreprises, qui ont dit que, en matière d'exportations, nous sommes preneurs de prix et nous ne pouvons pas nous offrir le luxe de hausser nos prix en fonction des coûts, alors que nous pouvons peut-être faire cela un peu plus sur le marché canadien. J'ai tenu compte de cela, mais il faut quand même s'attendre à des réductions des exportations de 21 p. 100 dans l'industrie métallurgique et sidérurgique, de 24 p. 100 dans les industries de l'huile et du gaz, de 25 p. 100 dans le secteur canadien de l'aluminium, de 55 p. 100 pour les produits pétroliers raffinés et de 16 p. 100 dans l'industrie chimique. Ce sont là des réductions plutôt importantes du volume des exportations canadiennes.

    Je le répète, j'accorderais plus de crédit à l'analyse d'Industrie Canada qu'à toutes les autres analyses que j'ai lues. Dans certains cas, celles-ci disent ne pas reposer sur des données à jour, mais... Malheureusement, elles reposent sur l'hypothèse que nous tenons vraiment à respecter l'objectif de Kyoto en réduisant nos émissions. C'est leur hypothèse fondamentale.

+-

    M. James Rajotte: J'ai une autre question à poser.

+-

    Le président: Je vous prie d'être bref.

+-

    M. James Rajotte: En fait, M. Bennett, vous voudrez peut-être y répondre en premier.

    Nous tenons pour acquis que cela sera adopté lundi. La ratification est presque une affaire faite. Il est davantage question ici de la mise en oeuvre.

    Hier, un économiste du ministère des Finances n'a pas pu me dire ici si le budget qui sera présenté en février traitera de l'une ou l'autre de ces questions et comment le ministère priorisait ces questions. Pour la réhabilitation thermique des maisons, va-t-on avoir recours à un crédit d'impôt, à une subvention? Comment va-t-on encourager les gens à conduire une voiture hybride? Au moyen d'un crédit d'impôt ou d'une subvention? Il n'a fourni aucune réponse au comité sur un plan de mise en oeuvre et des mesures qui seront prévues dans le budget, ce que voudraient bien savoir les partisans de Kyoto au nombre desquels se trouve votre organisation. Je voudrais savoir ce que vous en pensez. Cela vous préoccupe-t-il le moindrement? Le fait est que le ministère des Finances, qui devra mettre en oeuvre la plupart de ces mesures financières, certes au plus tôt, ne sait pas du tout comment il s'y prendra.

+-

    M. David Bennett: Je ne peux pas parler pour le ministère des Finances, mais, d'après mon expérience, ce ministère a fait obstacle à tout modèle financier qui se voulait progressiste ou alternatif,—par exemple ce que l'on appelle, chez les environnementalistes, la réforme fiscale écologique. Il est si profondément conservateur et réactionnaire que, si je réclamais des changements financiers dans ce pays, je ne me donnerais même pas la peine de le consulter, car il rejette d'emblée toutes les propositions, quelles qu'elles soient, qui visent à modifier le régime fiscal en place pour en accroître l'efficacité et le rendre aussi plus favorable à l'environnement.

    Pour ce qui concerne les crédits fiscaux et les subventions, je rappelle très fermement que la gauche sociale démocrate ou le mouvement écologiste n'ont jamais prétendu qu'il incombait aux contribuables ou au gouvernement d'assumer le fardeau financier de tout changement environnemental. Certains disent que le Protocole de Kyoto coûtera des milliards de dollars, laissant entendre que la note échoira au contribuable. Mais prenons le Toronto Atmospheric Fund, une petite organisation, certes, mais bénéficiant néanmoins et à fort juste titre du soutien de Paul Martin dans l'un des budgets qu'il a présentés il y a trois ou quatre ans de cela. Vous verrez que ce fonds n'est pas une subvention accordée aux consommateurs ou au grand public. Il s'agit d'un fonds d'investissement en vertu duquel on prévoit que tout investissement effectué en faveur d'un changement salutaire pour l'environnement sera récupéré dans un certain laps de temps, selon la nature et l'importance de cet investissement. Rien ne prouve que cet investissement est perdu ou encore qu'il est inefficace, ainsi de suite.

    Comment paie-t-on la réhabilitation thermique? L'idée n'est pas déconcertante. Dans le nord des États-Unis, où la politique dans le domaine de l'énergie est passablement avancée par rapport au Canada, que fait-on? Les compagnies d'électricité préconisent de réduire la consommation d'énergie. Pourtant, elles continuent de réaliser des bénéfices. Mais l'on accuse leurs administrateurs de faire du socialisme, ce qui revient, aux États-Unis, à les accuser de communisme.

    Mais comment s'y prennent-elles? Elles déterminent les besoins énergétiques d'une maison donnée. Elles en établissent le coût. Ensuite, elles calculent le coût de la réhabilitation thermique de la maison. Elles ont ainsi une idée précise du coût de l'énergie et du coût de la réhabilitation thermique. La note d'électricité reste fixée à un niveau donné, souvent identique à son ancien niveau. Ensuite, il est demandé au propriétaire de la maison de payer progressivement le coût de la réhabilitation thermique et de l'isolation de sa maison au moyen des crédits qui lui sont accordés au titre des taxes sur sa note d'électricité.

º  +-(1605)  

+-

    M. James Rajotte: Ainsi, la compagnie d'électricité prend à sa charge les dépenses initiales.

+-

    Le président: Monsieur Rajotte, je dois vous interrompre.

+-

    M. James Rajotte: Je voulais que l'on précise la réponse.

+-

    Le président: La réponse doit être brève, dans ce cas.

+-

    M. David Bennett: Je ne suis en train de protester contre le fait que la note est payée par telle ou telle entité. Je dis simplement qu'il n'y a pas de frais nets...

+-

    M. James Rajotte: Je veux savoir qui paie la note.

+-

    M. David Bennett: Le programme de réhabilitation thermique n'entraîne pas de coût net.

+-

    M. James Rajotte: Qui assume le coût initial de la réhabilitation thermique, les dépenses en immobilisations initiales?

+-

    M. David Bennett: Le fournisseur d'électricité ou le gouvernement.

+-

    Le président: Monsieur Volpe.

+-

    M. Joseph Volpe: Je vous remercie, monsieur le président.

    Je vous remercie, Messieurs.

    Monsieur Dillon, je vous présente mes excuses car je compte adresser mes questions aux deux autres témoins, puisque je n'ai pas pu assister à la première partie de votre exposé. Je ne veux pas donner l'impression de manquer de courtoisie à votre égard et de vous ignorer.

    Monsieur Bennett, votre réponse m'a fait penser à quelque chose que nous avons entendue lors des derniers échanges que nous avons eus au sujet du Protocole de Kyoto, et je voudrais que l'on m'éclaire. J'ai eu l'impression que les Américains étaient les mauvais dans ce dossier. J'ai vraiment eu cette impression. Pourtant, vous n'êtes pas le premier témoin à comparaître devant le comité, qui ait parlé en termes élogieux des initiatives prises par les Américains. Si les Américains avaient adhéré au Protocole de Kyoto, ils auraient été tenus de réduire leurs émissions de 7 p. 100. Pourtant, il semble qu'ils ne veuillent pas ratifier ce protocole. En fait, ils ont déclaré qu'ils ne voulaient pas en entendre parler, qu'ils ne comptaient pas le ratifier. Et ils ont cité tout un tas de raisons à leur décision. Que leurs raisons soient légitimes ou pas, il ne m'appartient pas d'en décider. Mais je ne comprends pas très bien pourquoi nous citons les Américains comme étant progressistes, novateurs et chefs de file dans le mouvement concernant le changement climatique, tout en affirmant que nous ne voulons nous faire leurs émules, que nous voulons faire mieux qu'eux et que nous devons signer le Protocole de Kyoto. Je suis sûr qu'un élément m'échappe, monsieur Bennett. Quel est cet élément?

+-

    M. David Bennett: La présidence accepterait-elle une réponse ouvertement politique?

    M. Joseph Volpe: Je vous en prie.

    Le président: Nous l'acceptons une fois par mois.

    M. David Bennett: D'accord.

    Cela s’explique du fait que les Canadiens ont une perception fondamentalement erronée des États-Unis. Il ne faut pas se contenter de voir ce qu'ont fait l’administration républicaine, à Washington, et la bande de grandes entreprises qui ont non seulement pillé leurs actionnaires, mais aussi sacrifié l’intérêt public et qui répandent cette idée voulant que le Protocole de Kyoto entraîne les États-Unis et la population américaine à leur perte.

    Il faut aussi voir ce quelles dispositions les administrations, aux niveau national, local et municipal, et les Américains ont effectivement prises et voir la façon dont ces gens dirigent leurs affaires. À bien des égards, ils sont les égaux de leurs contreparties canadiennes, aux niveaux provinciaux et municipaux, s'ils ne leur sont pas supérieurs. Les niveaux phénoménaux d’énergie, d'innovation, d'esprit d'entreprise et, dans certains cas, d'égalitarisme que l’on y observe sont véritablement étonnants.

    Mais, si l’on se fie au tableau brossé des États-Unis par les médias, les Canadiens suffisamment naïfs pour gober cela ont pour réaction de dire que tout ce que font les États-Unis est condamnable, que c'est contraire aux intérêts du Canada, de la démocratie, de l’égalité et de la société, ainsi de suite. Or, la réalité est tout autre.

º  +-(1610)  

+-

    M. Joseph Volpe: Je vous remercie de votre réponse, mais je parlais simplement des perceptions concernant les questions environnementales, et de rien d’autre.

+-

    Le président: Monsieur Volpe, M. Dillon voudrait répondre à ce commentaire. À vous, monsieur Dillon.

+-

    M. John Dillon: Je comprends votre question, monsieur Volpe. J’en ai fait brièvement parlé dans mon allocution d’ouverture.

+-

    M. Joseph Volpe: Je m’en veux de ne pas y avoir assisté.

+-

    M. John Dillon: Je vous comprends. Je tiens à préciser que nous ne croyons certainement pas, dans mon organisation, qu'il soit terriblement productif de diaboliser les États-Unis à ce sujet. Comme je l’ai expliqué dans mon allocution d’ouverture, M. David Anderson, le ministre de l’Environnement, disait précisément cela il y a quelques jours, à savoir que les États-Unis, particulièrement au niveau fédéral, en tout cas dans certains programmes fédéraux, sont des chefs de file pour ce qui est des actions qu’on mène dans ce pays en matière de changement climatique. C’est précisément cela que nous voulons dire, c'est-à-dire qu’il est possible de faire les deux. Il est possible de mettre au point d’excellentes stratégies, comme l’a proposé M. Myers, pour favoriser le succès économique et améliorer la technologie.

    Au niveau fédéral, les États-Unis investissent massivement dans le développement et la commercialisation de la technologie, comme le disait Jayson. C'est cela que nous voulons faire. Nous le croyons nécessaire du fait des liens économiques que nous avons avec les États-Unis et du fait que ce pays met au point, de toute évidence, de nombreuses technologies nouvelles qui s’avéreront, à long terme, cruciales pour la résolution de ce problème.

    Il est ainsi très trompeur de ne voir qu’un seul aspect des choses à la fois. Dans la réalité, des améliorations concrètes sont possibles et, comme nous le préconisons, il demeure possible de nous pourvoir des meilleures stratégies qui soient. Il ne s’agit pas de savoir si nous ratifierons ou pas le Protocole de Kyoto, car cette question n’a rien à voir avec le reste. Il s'agit plutôt de pourvoir le Canada de la meilleure stratégie qui soit en matière de changement climatique. Voilà la question qui doit nous préoccuper.

+-

    M. Joseph Volpe: Je vous remercie, monsieur Dillon.

    Je vais faire un bref commentaire, auquel vous pourrez peut-être répondre. Mais je ne tiens pas à faire de la petite politique.

    Dans votre présentation, que j’ai écoutée et que j’ai lue, vous avancez l’hypothèse que ces gens ont essentiellement tort, et que nous pourrions régler tous les problèmes de pertes d’emplois en examinant d'autres hypothèses. Je songe, par exemple, à une prévision selon laquelle on pourrait réaliser des gains plus substantiels, plutôt que de subir des pertes. Si nous mettions en place un programme de transition pour les travailleurs licenciés, nous nous en sortirions.

    Les législateurs ont déjà pris de telles dispositions auparavant. Ici, au Canada, par exemple, nous avons déjà entendu pareil argument, surtout chez les Canadiens de la région de l’Atlantique et les Canadiens vivant dans des régions éloignées. La question est de savoir vers quels emplois cette transition devra se faire, et vers quelle région il faudra envoyer les travailleurs.

+-

    M. David Bennett: Ce n'est pas une macro-projection concernant des emplois auxquels il faudra renoncer—c'est-à-dire des emplois qui auraient existé, n'eut été du Protocole de Kyoto. Les projections dont nous parlons prévoient des pertes et des gains réels au niveau de l'emploi dans le secteur de l'énergie. Ces projections annoncent la création de quelque 16 000 emplois sur 10 ans et la perte de 12 800 emplois. Ces emplois concerneront le secteur de l'industrie en général, et nous souhaitons que soit mis en place un programme de transition qui soit équitable et qui permette aux travailleurs d'accéder à de nouveaux emplois. Certains des travailleurs n'exerceront pas le même métier, ni la même activité. Certains auront un tout autre employeur et d'autres, comme vous le dites, devront s'établir dans d'autres régions du pays.

    Laissez-moi vous donner un exemple qui semblait fantaisiste il y a 10 ans et qui a bien fait rire de nous. Puisque leur industrie périclitait, nous avions proposé de confier aux travailleurs des mines de charbon de la Nouvelle-Écosse la construction d'éoliennes. L'idée a fait rire de nous, il y a dix ans. Aujourd'hui, nous proposons très sérieusement que les travailleurs des arsenaux maritimes de St-John's soient affectés à la construction des structures des éoliennes puisqu'ils ont à la fois les compétences et le matériel requis à cette fin. Pour que cela fonctionne, il faut, à mon avis, avoir une attitude différente, une perspective nouvelle de la planification des ressources humaines. Il faut pouvoir concilier le fait que l'on perd des emplois dans un secteur d'activité, mais que l'on en gagne d'autres ailleurs, dans d'autres secteurs.

º  +-(1615)  

+-

    Le président: Je vous remercie, monsieur Volpe.

+-

    M. Joseph Volpe: Vous me coupez la parole. Je ne comptais pas que poser une question à M. Bennett. J'imagine que vous permettrez de reprendre la parole.

+-

    Le président: Je le ferai.

    À vous, monsieur Crête.

[Français]

+-

    M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ): Merci, monsieur le président. Merci également pour les présentations.

    Je vais d'abord vous poser une question qui m'a été posée dernièrement par mon fils, qui est en secondaire IV. J'aimerais que vous me répondiez de façon globale. Il m'a demandé pourquoi on ne mettait pas autant d'énergie à régler la question environnementale qu'on en a mis à abattre Adolf Hitler.

    Ne croyez-vous pas que le problème environnemental mérite qu'on déploie autant d'efforts qu'on en a déployé au cours de la Deuxième Guerre mondiale pour retrouver la liberté?

[Traduction]

+-

    M. Jayson Myers: Vous demandez si...

[Français]

+-

    M. Paul Crête: Je me demande si l'effort que doit fournir toute la population, et plus particulièrement l'industrie, qui est responsable d'une large part de la pollution, ne devrait pas être assumé en tant qu'objectif global. Lors de la Deuxième Guerre mondiale, s'il avait fallu qu'on fasse l'étude d'un plan pendant deux ans pour savoir si, en fin de compte, on serait victorieux, on aurait probablement perdu la guerre.

    Considérez-vous le problème environnemental actuel aussi important que celui qu'on a eu à vivre pendant cette période?

[Traduction]

+-

    M. Jayson Myers: Si une entreprise envisage de faire des investissements et de prospérer, elle doit éviter de ne tenir compte que du résultat final, bien que le fait d'investir dans la technologie environnementale et l'économie d'énergie puisse s'avérer profitable. La plupart des entreprises adoptent une démarche générale. L'Alcan est exceptionnelle car elle recherche des possibilités diverses d'investissement dans l'environnement, qui lui rapporteront, certes, sur le plan commercial, mais qui bénéficieront aussi à la communauté dans son ensemble.

    C'est extrêmement important. En ce qui concerne cependant bien des entreprises, je suis d'accord avec M. Bennett, à savoir que, notamment chez les petites entreprises qui ont déjà du mal à tenir d'un jour à l'autre et à payer leurs employés, il est très difficile d'avoir le recul nécessaire pour se dire que l'adoption d'une simple stratégie de réduction de la consommation d'énergie pourrait leur faire faire des économies d'argent. Le fait est que ces entreprises pourraient réduire leur consommation d'énergie, mais que c'est difficile à faire quand on manque de ressources matérielles et humaines, de temps et d'argent.

    Il existe beaucoup de programmes d'aide. C'est ce que nous faisons. Nous aidons les petites entreprises à améliorer leurs méthodes de gestion et à envisager de telles solutions. Les investissements dans l'environnement permettent de réaliser d'importantes économies et il existe des technologies extraordinaires. M. Bennett a parfaitement raison de recommander que nous nous assurions que les investissements soient des éléments importants de la solution technologique et qu'ils permettent d'aider à la fois l'environnement et l'économie.

    C'est extrêmement important. Nous ne devrions pas l'oublier. Mais comment réussir sur les deux tableaux, sur celui de l'environnement et sur celui de l'économie à la fois? C'est du domaine du possible, mais je ne crois pas qu'on y parvienne en limitant la croissance économique. En fait, cette approche—la restriction de la croissance économique—se révélera sans doute improductive en bout de ligne et nous empêchera de faire avancer la cause de l'environnement.

[Français]

+-

    M. Paul Crête: Mais notre problème actuel, monsieur le président, ne vient-il pas justement du fait que depuis 50 ou 60 ans, nous avons un modèle de développement qui n'évalue que la rentabilité économique des choses sans tenir compte de leur impact sur l'environnement et, par le fait même, sur la société?

    Les choix que nous avons aujourd'hui sont de rester dans cette situation et de continuer à vivre dans un environnement pollué jusqu'à ce que la planète meure, ou de changer les choses. C'est la raison pour laquelle je vous demande si, à votre avis, le problème environnemental que nous connaissons sur la planète est aussi important que pouvait l'être la situation engendrée par le nazisme.

[Traduction]

+-

    M. Jayson Myers: En tant qu'économiste, je suis d'accord avec vous. Je reconnais que nous ne savons pas comment mesurer ces choses. Nous savons pas évaluer l'effet de l'assainissement de l'environnement. Nous ne savons pas non plus en déterminer la valeur économique. Je pense qu'il nous reste beaucoup à faire encore dans ce domaine.

º  +-(1620)  

[Français]

+-

    M. Paul Crête: Y a-t-il d'autres commentaires à ce sujet?

[Traduction]

+-

    M. John Dillon: Pour commencer, j’imagine qu’il faudra envisager la chose sous l’angle du problème posé par le changement climatique. Viennent ensuite tous les autres problèmes environnementaux. Certains y sont étroitement liés. Cela ne fait aucun doute. Il s’agit, en fait, de savoir comment nous allons faire face au changement climatique, comment nous allons régler le problème de la pollution de l’air, celui de la consommation, ainsi de suite. Il s’agit d’opérer un changement notable sur plusieurs décennies. Vous avez parfaitement raison là-dessus. L'effort à fournir est important. Il se compare à celui qui a été fourni après la Seconde Guerre mondiale, ou à tout projet que vous voudrez, qui soit d’importance nationale et qu’il nous faudrait entreprendre.

    En ce qui a trait aux émissions de gaz à effet de serre, n'oublions pas qu'il s’agit d’un phénomène qui se produira sur les 50 ou 100 prochaines années. Nous devons trouver la solution d'ici là. Quelles que soient les initiatives que nous prendrons au Canada, notre contribution demeurera mineure. La communauté mondiale ne réussira à régler ce problème qu’en adoptant une toute nouvelle génération de technologies qui amélioreront la qualité de la vie, tant au Canada que dans les pays en développement. Ces technologies atténueront aussi et considérablement les conséquences de notre consommation d’énergie et de la pollution.

[Français]

+-

    M. Paul Crête: Les pays les plus avancés ne devraient-ils pas justement être ceux qui contribuent le plus à donner l'exemple au reste du monde? Même si le Canada n'a pas une population très importante, il jouit d'une renommée internationale, et il s'agit là d'un des volets qu'il pourrait développer.

    Des coûts sans avantage: Le Canada et le Protocole de Kyoto est le titre du document que voici. C'est, à mon avis, un titre très choquant parce qu'il donne l'impression que la situation actuelle est acceptable, ce qui me paraît plutôt surprenant. À la page 14 d'une section consacrée à l'électricité, on peut lire:

Atteindre l'objectif de Kyoto pourrait d'abord affecter la production de l'électricité alimentée au charbon. Le coût de l'électricité thermique alimentée au charbon est prévu d'augmenter de 50 p. 100.

    Ne faudrait-il pas faire disparaître la production de l'électricité alimentée au charbon? J'ai vu à Beijing que ça tue les gens par milliers. Ne faut-il pas, comme société, faire ce genre de choix et en assumer le coût?

[Traduction]

+-

    M. John Dillon: Ce document n’est pas le mien. Je ne sais donc pas à quoi au juste vous faites référence. Mais c'est précisément du niveau des émissions en Chine et dans les pays en développement, surtout les émissions causées par le charbon, que nous parlons. La densité démographique est très forte en Chine et en Inde. Ces pays ont besoin de beaucoup plus d’énergie, et ils doivent en produire davantage pour nourrir et vêtir leurs populations respectives, leur fournir du travail et leur permettre de gagner des revenus. En tant que membre de la communauté internationale, le Canada doit trouver un moyen plus sain pour produire de l’énergie dans le monde.

    D'après nous, le Canada dispose de certaines capacités dans le domaine de la technologie relative à la production d’énergie avec du charbon et au captage et à l’entreposage du dioxyde de carbone, et il devrait développer ces capacités. On a avancé des idées à ce sujet, que nous devrions intégrer à notre plan, car, en bout de ligne, ce qui compte, ce n’est pas tant ce que fera le Canada, comme ce qu'il pourra contribuer aux actions qui seront menées dans le monde.

+-

    Le président: Monsieur Myers, souhaitez-vous répondre? Sinon, il me faudra passer au prochain intervenant.

+-

    M. Jayson Myers: Nous ne savons pas, et c’est là une de nos grandes incertitudes, si les pays en développement, dont les émissions prennent de plus en plus d’ampleur, participeront à la deuxième période de réduction des émissions prévue dans le Protocole de Kyoto. Nous ne savons pas s’ils y participeront.

    Mais je suis d’accord avec vous… Quand je suis allé en Chine récemment, il m’a suffi de deux jours pour attraper une mauvaise bronchite, après une séance de footing à l’extérieur, à Tianjin. Il s’agit d’une ville où l'on ne voit pas le soleil avant midi à cause de la fumée de charbon.

    Ce n’est pas nécessairement un problème avec la qualité de l’air et le smog, mais le potentiel de réduction des émissions et d’amélioration de la qualité de l'air ambiant y est énorme. Nous avons les technologies appropriées. Ce débat ne serait pas du tout le même si, au lieu de parler de la ratification du Protocole de Kyoto, nous parlions plutôt de ce que nous pourrions faire pour promouvoir l'adoption de solutions mondiales s'appuyant sur des technologies canadiennes, si nous préconisions de mettre en place des programmes de financement qui aideraient les entreprises canadiennes à s'établir en Chine, si nous parlions du potentiel de l’énergie nucléaire et si envisagions d’exporter de cette énergie nucléaire. Nous n’en parlons pas au Canada, mais c'est là une alternative à la production de carburant fossile. Nous devons en discuter, à mon avis.

    Il existe différentes solutions. J'estime que le débat serait très différent si nous parlions en fait de ce que nous pourrions faire pour promouvoir ces idées, au lieu de nous demander si nous devrions ratifier ou ne pas ratifier un accord qui risque de nous créer des obligations irréalistes à long terme.

+-

    Le président: Je vous remercie.

    À vous, monsieur Marcil.

[Français]

+-

    M. Serge Marcil (Beauharnois—Salaberry, Lib.): Bonjour. Merci beaucoup de vous être présentés à ce comité.

    J'essaie de voir la comparaison avec certains pays qui l'ont déjà ratifié. Est-ce qu'ils se sont posé les mêmes questions que nous nous posons au Canada, en termes d'impact sur l'économie? Si oui, pourquoi l'ont-ils signé quand même? Est-ce parce qu'ils ont décidé de s'inscrire dans une démarche non polluante?

    Ça suppose qu'il faut investir dans de nouvelles technologies et donc modifier notre façon de faire.

    Pour ma part, je suis plus dans le domaine de l'éducation que dans celui des affaires. J'ai également travaillé dans des pays africains dans le secteur de l'éducation. Aujourd'hui, les grands pays, la Banque mondiale et les agences de développement international dans le domaine de l'éducation, autant l'ACDI que d'autres, veulent quasiment obliger les pays en voie de développement à investir en éducation, parce qu'on pense que c'est par l'éducation qu'on va régler le problème de la pauvreté et enclencher le développement économique.

    Dans les pays francophones d'Afrique, même si on investissait la totalité des budgets de chacun des pays en éducation, on ne réussirait jamais à faire en sorte que tous les enfants puissent aller à l'école. La raison est simple: c'est tout simplement parce que le système d'éducation qu'ils essaient de financer est un système de la colonie mère. C'est un système français qui ne répond absolument pas aux besoins de ces pays d'Afrique, et il en coûte une fortune pour le maintenir. Donc, la solution au problème de l'éducation pour tous les pays francophones d'Afrique serait de mettre la hache dans le système d'éducation français et de développer, un peu comme les pays africains anglophones l'ont fait, des systèmes d'éducation en fonction des besoins des Africains.

    Ces pays ont développé de tels systèmes d'éducation parce que la colonisation britannique de l'époque ne visait pas l'assimilation culturelle des peuples; c'était davantage une colonisation basée sur l'économie. Donc, les Britanniques ont laissé la population s'organiser, et dans la plupart des anciennes colonies britanniques, les gens ont développé des systèmes d'éducation en fonction de leurs besoins, des systèmes d'éducation africains, et non pas des modèles européens qu'on a essayé d'implanter en Afrique, comme on en voit au niveau de l'Afrique francophone actuellement. Donc, la solution, qui coûterait bien moins cher, serait de réorganiser l'éducation en fonction des besoins des Africains.

    Je fais une certaine analogie avec notre système économique, avec le système de production que nous avons chez nous. Je me pose une question. Pour atteindre les objectifs de Kyoto, qui sont quand même assez serrés, l'industrie canadienne ne devrait-elle pas changer totalement son modèle de production? C'est évident que si on veut maintenir notre façon de faire, on ne pourra pas atteindre les objectifs.

º  +-(1625)  

[Traduction]

+-

    M. John Dillon: Pour répondre à la première partie de votre question, je peux vous parler de ce que les autres pays font et vous dire s'ils étudient ou non la possibilité pour eux d’atteindre les objectifs, avant de ratifier le Protocole de Kyoto. Je ne suis pas qualifié pour passer en revue tous les pays, et nous manquerions de temps pour cela, mais permettez-moi de vous faire part de quelques observations à ce sujet.

    Premièrement, on n’a pas fixé d’objectifs pour la plupart des pays qui ont ratifié le Protocole de Kyoto n'ont pas d’objectifs. Mais on en a fixé pour les pays d’Europe et pour le Japon. Je vous ferai remarquer que plusieurs pays dont les économies sont semblables à celle du Canada—l'Australie, la Norvège et la Nouvelle-Zélande—ont des objectifs plus souples que les nôtres. Même les pays de l’Union européenne ont pris des arrangements qui leur sont propres et en vertu desquels le fardeau est réparti sur l’ensemble des secteurs. Certains pays d’Europe peuvent même augmenter considérablement le niveau de leurs émissions, tout en étant crédités pour les réductions déjà opérées, notamment l’Allemagne et le Royaume-Uni, et cela pour des raisons historiques non liées au changement climatique.

    La plupart des pays d’Europe ont ratifié le protocole. Ils l'ont également ratifié en tant que communauté. À l'exception possible de l'Allemagne, du Royaume-Uni et des Pays-Bas, je ne crois pas que ces pays aient procédé comme nous. Mais ces trois pays, dont je connais la situation, ont mis en place un processus fort complexe d’accords, de négociations et de pourparlers avec leurs secteurs industriels respectifs.

    Vu de l’extérieur, on pourrait penser que tout marche comme sur des roulettes. Mais il suffit de parler aux représentants des industries dans ces pays pour se rendre compte que les discussions ne sont pas faciles. Ces gens se demandent sérieusement si leurs pays pourront atteindre des objectifs qui sont relativement ambitieux. Ainsi, bien que l’Allemagne ait déjà réduit ses émissions, du fait de la fermeture d'entreprises industrielles inefficaces en Allemagne de l’Est après la réunification avec l’Allemagne de l’Ouest, il demeure qu'on a fixé très poussés pour ce pays. Nombre d’entreprises allemandes s’en inquiètent. Des analyses ont été faites et les discussions ont eu lieu. Mais cela varie beaucoup d'un pays à l'autre.

    À vrai dire, je pense qu’on a fixé aux autres pays européens des objectifs très généreux. En autant que je sache, on ne parle pas beaucoup, dans ces pays, de la façon dont ils vont s’y prendre pour réaliser ces objectifs.

º  +-(1630)  

+-

    M. Jayson Myers: Je pourrais peut-être passer au deuxième élément que vous avez abordé, notamment le modèle que le Canada devrait adopter. Il faut comprendre que la situation du Canada est très spéciale à cet égard. L'Europe a réduit le niveau de ses émissions en bonne partie, d’abord, d’une part, grâce à la fermeture de centres de production industrielles frappés d’obsolescence, en Allemagne de l’Est et ailleurs en Europe de l’Est, et, d’autre part, grâce à l’abandon de nombreuses centrales thermiques, pour la production d'énergie électrique, au profit d’autres formes de production d'électricité.

    Au Canada, la production d'énergie au moyen de centrales thermiques n'est pas très importante. Notre production dans ce domaine est déjà relativement faible, et notre capacité à réduire nos émissions s’en trouve passablement limitée de ce fait. Notre territoire est très vaste. Nous n’avons pas beaucoup d’autres choix que celui de conduire des voitures, sans compter que le climat est très froid au Canada. Beaucoup de facteurs nous incitent à croire que nous aurions lieu d’adopter un modèle qui nous est propre et qui nous permettrait de réduire nos émissions—notamment prendre des dispositions qui permettront au Canada de réduire effectivement ses émissions de gaz à effet de serre—et renforcer les initiatives déjà prises par l’industrie et par les consommateurs. Cela me paraît extrêmement important.

    Nous avons aussi beaucoup à apprendre, essentiellement des Européens. Je crois comprendre que les Japonais ne pourront pas, eux non plus, atteindre leurs objectifs, même s'ils ont ratifié le Protocole de Kyoto. Ils ne pourront tout simplement pas les atteindre. Nous avons beaucoup à apprendre des entreprises japonaises et européennes pour ce qui est des meilleures pratiques à adopter et pour ce qui concerne les moyens à mettre en œuvre pour réaliser des économies d’énergie, maximiser ces économies et en tirer des revenus qui seront investis dans d’autres technologies productives.

    Si nous cessions de parler du Protocole de Kyoto, pour parler plutôt d’innovation et évaluer nos performances par rapport à celles obtenues ailleurs dans les principaux pays industrialisés, notamment les États-Unis, qui sont des chefs de file, comme le disait Dave, en matière d’amélioration de l'investissement et de la productivité, nous constaterions que le Canada tend à se classer au dernier rang pour l’investissement dans les technologies nouvelles, la recherche et le développement, et la commercialisation. Je crois que nous avons beaucoup à apprendre des meilleures pratiques adoptées dans d'autres pays industriels, et je crois aussi que nous avons beaucoup à faire pour encourager le type d’investissement productif qui nous favorisera sur les plans économique et environnemental à la fois.

    Les études théoriques que nous avons analysées révèlent qu'il faudra faire des investissements considérables dans la technologie et que les économies d’énergie ne suffiront pas à elles seules pour rentabiliser les investissements envisagés par quelque secteur que ce soit en vue de remplacer la technologie existante. On en a conclu qu'il faudra trouver d’autres moyens de réaliser des gains en améliorant la productivité ailleurs, à la condition d’investir dans une technologie nouvelle. Voilà dans quoi il nous faudra investir, si nous voulons aller de l’avant. Nous devons nous pourvoir d’un modèle adapté au Canada et faire ce qui convient le mieux pour nous. Nous avons beaucoup à apprendre des autres pays et nous devons nous pencher sur ce qui fonctionne et ce qui favorise l’innovation.

+-

    Le président: Monsieur Proctor, soyez le bienvenu au Comité de l’industrie.

+-

    M. Dick Proctor (Palliser, NPD): Je vous remercie, monsieur le président.

    Je vous prie d’excuser mon léger retard.À la suite de votre dernière réponse, vous avez dit que, en matière d’innovation et de recherche et de développement, le Canada venait pratiquement au dernier rang. Le Protocole de Kyoto me semble présenter de bonnes possibilités pour nous sur le plan technologique et sur notre capacité à exporter des technologies nouvelles. Et je me demandais ce qui préoccupait l’Association des manufacturiers et des exportateurs du Canada. Nous venons de dire que nous ratifierons le Protocole de Kyoto. Or, cela a été fait en 1997. Avez-vous observé des changements, au cours des cinq dernières années, dans les industries qui…?

+-

    M. Jayson Myers: Oui. L'industrie de la technologie de l’environnement est très dynamique au Canada et nous avons de nombreuses entreprises technologiques qui sont membres de notre association. Nous investissons aussi beaucoup dans la recherche et le développement. Le défi à relever est énorme, car il s’agit de faire en sorte que cet investissement soit consacré à la technologie et qu’il débouche sur la commercialisation et la vente de produits.

º  +-(1635)  

+-

    M. Dick Proctor: Et comment expliquez-vous cela?

+-

    M. Jayson Myers: Dans une bonne mesure, cette commercialisation se fait lorsqu’il y a des capitaux de disponibles. Le problème vient donc d’un manque de capitaux. Pourquoi les piles à combustible Ballard sont-elles mises au point et commercialisées pour les véhicules de transport en commun à Chicago? C'est parce que la municipalité de Chicago a beaucoup investi dans ses programmes d’acquisitions pour devenir le leader mondial dans le domaine des véhicules de transport en commun urbain fonctionnant avec ces piles. Aucune municipalité canadienne n'a pris les devants avec ce genre d'initiative. L’État du Michigan s'est donné pour objectif de devenir le leader mondial dans le domaine du développement des piles à combustible, pour être en mesure de travailler avec le secteur automobile.

    Le développement et la commercialisation prendront forme s'il y a des capitaux de disponibles. Dans le secteur privé ou public, nous ne réussissons pas à faire ce genre d’investissement stratégique. La réglementation en place nous en empêche de même que la fiscalité, ainsi que l’absence de pools de capitaux.

    Au nombre des propositions très intéressantes que j’ai entendues, on a recommandé d’envisager de constituer des pools de capitaux qui seront consacrés à l'investissement dans des technologies très lucratives. Pour améliorer la situation à cet égard, nous devons envisager de constituer des pools de capitaux qui aideront les entreprises à vendre de la technologie à des pays en développement comme la Chine. Mais nous n'arrivons pas à nous organiser en ce sens et nous semblons prendre beaucoup de retard à cet égard. Nous en parlons depuis cinq ans. En fait, l'ACDI songe depuis 25 ans déjà à mettre en place un institut de financement et elle n’a toujours pas réussi à donner suite à ce projet.

    Il y a beaucoup de choses que nous pouvons faire. Au lieu de parler de la ratification de cet accord international, nous ferions mieux d’étudier des moyens de mettre en place des pools de capitaux pour faciliter la commercialisation, transférer au secteur privé la recherche universitaire, et renforcer la capacité du secteur privé à mettre à profit cette technologie. Dans l'état actuel des choses, la technologie est développée chez nous, les travaux de recherche et de développement que nous menons sont excellents, mais ce sont les États-Unis, le Japon ou l’Europe qui en retirent tous les bénéfices. À mes yeux, cela montre que notre stratégie d’innovation ne donne pas tout à fait les résultats escomptés.

+-

    M. Dick Proctor: Merci.

    Monsieur Bennett, vous avez fait allusion à certaines difficultés concernant le programme de transition que vous préconisez, tout comme d’ailleurs votre filiale, le Syndicat canadien des communications, de l'énergie et du papier. Vous semblez avoir obtenu un engagement du ministre de l’Environnement. Pourriez-vous nous dire un peu ce qu’il en est?

+-

    M. David Bennett: Le mouvement ouvrier a mis dix ans à obtenir l'adoption d'un programme de transition équitable à l'intention des ouvriers pour la période de changements environnementaux devant permettre de répondre aux objectifs politiques et c'est maintenant chose faite. Comme vous l'avez dit, bon nombre de syndicats, et tout particulièrement le Syndicat canadien des communications, de l'énergie et du papier, ont fait des pressions à cet égard auprès des ministères fédéraux et auprès du ministre lui-même, l'honorable David Anderson.

    La première réaction a été un discours prononcé à la Chambre par le ministre Anderson qui a félicité le président du CTC, Ken Georgetti, et le président du SCEP, Brian Payne, d'avoir attiré l'attention du public sur le sort des travailleurs qui perdront leur emploi en raison des mesures adoptées à l'égard des changements climatiques. Le ministre a promis devant la Chambre de mettre sur pied un programme de transition équitable en vue de trouver une solution aux divers problèmes tels l'emploi continu, l'emploi de substitution, le maintien des salaires et des avantages sociaux et l'aide au niveau de la réinstallation et de la formation. Il a affirmé que le gouvernement se pencherait sur ces questions et que le mouvement ouvrier jouerait un rôle dans la mise en oeuvre du Protocole de Kyoto, tout particulièrement au chapitre de la transition équitable.

    Nous avons ensuite rencontré le ministre—c'est-à-dire que les partenaires du CTC ont rencontré le ministre—à Toronto le 14 novembre pour confirmer cette approche. Ce dernier a annoncé la création d'un comité mixte patronal-syndical qui se pencherait sur la question de la transition juste et qui étudierait les perspectives d'emploi réelles plutôt que de s'en remettre aux balivernes que nous avons entendues aujourd'hui, soulignant que ce comité se rapporterait à lui-même et à son collègue l'honorable Herb Dhaliwal dans 90 jours. Nous avons entrepris des discussions sur les perspectives d'emploi et nous espérons la mise sur pied de ce comité pour bientôt.

    Il est triste de constater que le principe de la juste transition n'a pas été reconnu à sa juste valeur dans le plan canadien sur les changements climatiques. On n'en a parlé qu'une seule fois et on a souligné qu'en fait, s'il y avait des problèmes au chapitre de la transition, on pourrait avoir recours aux mécanismes actuellement en cours au gouvernement fédéral pour la rééducation professionnelle et la rémunération. J'aimerais préciser que ce n'est pas ce que le ministre a dit. Ce n'est pas là ce que le ministre et les membres du mouvement ouvrier ont convenu et nous nous attendons à ce que le dossier du programme de transition équitable et des perspectives d'emploi soit étudié de façon sérieuse et engagée. Nous espérons obtenir des résultats positifs. Nous avons confiance que c'est ce que le ministre fera.

    Certaines pressions sont exercées au sein du gouvernement afin de minimiser ce dossier et je reconnais que c'est une question de politique. À notre avis, le ministre a pris un engagement, et c'est tout à son honneur. Il n'a pas promis de résultats, mais il a promis de s'engager et nous le prenons au mot. Nous verrons au cours des trois premiers mois s'il y aura des résultats tangibles à ce chapitre.

º  +-(1640)  

+-

    Le président: Je vous remercie beaucoup.

    Je vous remercie M. Proctor.

    Nous passerons maintenant à M. Savoy.

+-

    M. Andy Savoy (Tobique—Mactaquac, Lib.): Je vous remercie beaucoup, monsieur le président.

    Je vous souhaite la bienvenue au comité de l'industrie messieurs.

    Je n'ai malheureusement pas pu entendre les exposés que vous avez fait plus tôt. Je m'excuse d'être en retard, mais si j'ai bien compris par les commentaires que vous avez formulés sur certaines questions, vous êtes d'avis que les objectifs de 6 p. 100 au-dessous des niveaux de 1990, fixés par Kyoto d'ici 2012, sont très sévères, mais les spécialistes internationaux—en fait 1 800 scientifiques faisant partie du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat—ont plutôt demandé une réduction des émissions de CO2 de l'ordre de 60 p. 100. L'objectif de 6 p. 100 qui est fixé ici n'est donc pas si important.

    Si nous comprenons bien la portée des modifications que nous devons apporter pour lutter contre les changements climatiques, les mesures que nous prenons dans le cadre de l'accord de Kyoto sont très mineures. Je m'inquiète donc de constater que l'accord de Kyoto est considéré comme un pas énorme pour la réduction du CO2 et toute la question des changements climatiques en général.

    Si nous devions présenter une situation hypothétique dans laquelle nous considérerions les changements climatiques et la réduction du CO2 comme des problèmes et que nous voulions travailler de concert avec l'industrie et avec tous les niveaux de gouvernement et obtenir votre participation en vue d'une modeste réduction des émissions de CO2 et des gaz à effet de serre sur une période de dix ans, quelle serait votre réponse?

+-

    M. John Dillon: Je vous remercie. Il est dommage que vous ayez manqué nos exposés, mais voici quelques réponses rapides à vos commentaires.

    Tout d'abord, en ce qui a trait à l'importance modeste de l'objectif fixé, disons que la raison pour laquelle nous sommes ici, c'est que nos membres considèrent qu'il s'agit là d'une question qui devrait être traitée à long terme. Je ne saurais dire si nous devons réduire les émissions de 50, de 60 ou même de 75 p. 100 à l'échelle mondiale. Je n'ai pas les connaissances voulues pour me prononcer. Toutefois, comme je l'ai dit plut tôt, c'est un problème qu'on doit évaluer sur 75 ou même sur 100 ans.

    La seule façon possible pour que la planète—et je dis bien la planète et pas seulement le Canada—réduise les émissions de gaz à effet de serre de 50 ou de 60 p. 100 sera de modifier radicalement notre façon d'utiliser l'énergie et d'adopter une toute nouvelle génération de technologies.

    Ce que nous disons c'est—et Jason a un tableau qui démontre clairement comment les profits peuvent correspondre aux investissements dans le domaine de la technologie—assurons-nous que nos entreprises et nos industries sont en mesure de faire des investissements dans ces technologies qui donnent vraiment des résultats, et prévoyons ces réductions à long terme.

+-

    M. Andy Savoy: Autre chose?

+-

    M. Jayson Myers: Pour répondre à votre question sur notre disposition à vous écouter et à prendre des mesures, je voudrais rappeler encore une fois que l'industrie a fait beaucoup jusqu'à maintenant pour réduire sa consommation énergétique et ses émissions de gaz. Pour ce qui est des sables bitumineux, nous avons réduit de 60 p. 100 notre consommation, mais cette réduction a été compensée par l'augmentation de la demande au niveau du pétrole tiré des sables bitumineux. Si l'on tient compte de la demande et de la croissance enregistrée, on constate que le type de technologie visée par les sables bitumineux est plutôt révolutionnaire. Il ne s'agit pas uniquement de créer une nouvelle technologie, il faut également la rendre commercialement rentable.

    La semaine dernière, la compagnie Nissan a annoncé la production de 30 voitures munies d'une pile à combustible. Le coût de chacune de ces voitures est de 40 fois supérieur au coût d'un véhicule semblable fonctionnant à l'essence. Il faudra donc du temps avant que cette technologie soit commercialement rentable.

    John a raison. Nous devons aller au-delà du délai fixé arbitrairement à 2010. Les technologies permettant d'atteindre ces améliorations révolutionnaires existent peut-être, mais il faudra prévoir des investissements et une stratégie à long terme.

    C'est de là que viennent l'incertitude et les problèmes. Il est difficile d'obtenir des résultats à très court terme. Si nous voulons réellement respecter l'objectif fixé dans l'accord de Kyoto—il y a d'autres façon de faire, mais si nous voulons réellement y arriver—cela causera beaucoup d'incertitude et de préoccupations dans l'industrie parce qu'il n'est pas réaliste de croire que nous puissions y arriver en huit ans.

    Pour ce qui est de savoir si nous sommes disposés à collaborer et à nous asseoir à la table, je rappelle que nous sommes en contact quasi constant avec les gens du gouvernement depuis 1997. Depuis la rencontre de Rio, alors que nous parlions de stabilisation des émissions de gaz à effet de serre, nous avons toujours été là. Nous avons participé activement au programme de Ressources naturelles Canada visant l'industrie dans le domaine des économies d'énergie intitulé «  Mesures volontaires et Registre ». Bon nombre de gens sont d'avis que ce programme n'a aucun effet, mais il suffit de se pencher sur le nombre de programmes d'améliorations dans le domaine de l'efficacité énergétique adoptés volontairement par les entreprises pour voir que ce n'est pas le cas.

    Nous poursuivons bien sûr le dialogue et nous espérons que cela se fera de façon constructive. Je crois que nous voulons nous assurer que le débat est constructif, que nous travaillons à trouver des solutions et que nous n'en reviendrons pas au principe que la seule solution à tout cela est de réduire l'activité économique parce que cela ne nous mènera à rien. Très franchement David, si c'est là l'option retenue, cela entraînera un nombre encore bien plus important de pertes d'emplois.

º  +-(1645)  

+-

    M. Andy Savoy: J'aimerais donner suite à ces propos, si c'est possible.

    Avez-vous des commentaires à faire à ce sujet, David?

    M. David Bennett: Si je peux me permettre.

    M. Andy Savoy: Oui, bien sûr.

+-

    M. David Bennett: La position des entreprises sur la réduction des émissions de CO2 pour l'industrie lourde est basée sur la notion de la réduction de l'intensité énergétique de la production. Elles considèrent les investissements dans ce domaine comme étant inefficaces, ce qui est à mon avis tout à fait faux. Mais cela signifie également que loin de s'objecter aux objectifs de Kyoto, l'industrie dit en fait que quels que soient les objectifs fixés, elle compte bien agir au niveau de l'intensité énergétique. En réalité, il faut se rendre compte que s'il est possible de réduire l'intensité énergétique d'une industrie, en accroissant le nombre de sources utilisées, les gains qui avaient été réalisés sont annulés et tout objectif fixé est réduit à néant.

    Il faut bien sûr tenir compte de l'intensité énergétique, mais il faut également créer d'autres sources. Si l'on veut remplacer les pertes occasionnées au chapitre de la production, il faut remplacer ces sources par d'autres ressources produisant beaucoup moins de CO2 et faisant tout particulièrement appel aux industries qui utilisent de l'énergie renouvelable. Les économistes et tous les gens d'affaire qui affirment que malgré l'immense activité économique, le PIB diminuera et que le nombre d'emplois perdu sera astronomique, me désespèrent vraiment. Ils ne se préoccupent généralement pas des problèmes reliés aux pertes d'emplois, à moins qu'ils aient un lien direct avec leur propre fâcheuse situation.

    Je ne comprends tout simplement pas où l'entreprise veut en venir. Je crois qu'ils ont perdu le contrôle politique sur le programme des activités commerciales. Ils doivent s'en remettre au gouvernement, au public et ainsi de suite, et ils n'aiment pas qu'on leur dise quoi faire.

º  +-(1650)  

+-

    Le président: Une question et une réponse courtes, je vous prie.

+-

    M. Andy Savoy: Très rapidement donc, en jetant un coup d'oeil objectif —je suis ingénieur et j'ai de l'expérience dans le domaine des affaires—je considère que nous nous fixons un objectif très modeste, en nous disant que nous allons l'atteindre, que nous allons nous engager dans ce sens à l'échelle internationale et que nous demanderons de l'aide pour mettre au point un plan de mise en oeuvre impliquant tous les intéressés. Je ne vois pas ce qu'il y a de mal à cela. Avez-vous des commentaires sur ce que je viens de dire?

+-

    M. John Dillon: Je suis d'accord avec M. Rajotte. Je ne sais pas exactement comment nous allons procéder.

+-

    M. Andy Savoy: Croyez-vous que nous irons de l'avant sans consultation dans la mise en oeuvre de ce processus?

+-

    M. John Dillon: Soyons clairs. Vous décrivez un objectif modeste. Ce que nous avons essayé de dire, c'est que cela correspond à une réduction de 30 p. 100, pas seulement pour les entreprises, mais pour tous les Canadiens, et ce sur une courte période de temps. Il ne s'agit pas uniquement des investissements que les entreprises canadiennes doivent faire dans les techniques permettant de réduire les émissions de gaz. On parle de tous ces investissements que les Canadiens doivent faire pour modifier leurs habitudes et réduire leur consommation.

    Le gouvernement dit que tous les Canadiens devraient réduire leur consommation de 20 p. 100. Je présume qu'il compte acheter le reste à l'échelle internationale. Je ne suis pas certain de la façon de le faire. Mais il convient de se demander, en tant que Canadiens et en tant que société, comment nous pourrons réduire les émissions de gaz, alors que notre population grossit, que les gens achètent de plus gros véhicules, qu'ils construisent de plus grosses maisons et qu'ils se servent davantage de leur véhicule, et où les Canadiens feront ces investissements?

    Il ne faut pas se leurrer. Si les Canadiens doivent réduire leur consommation d'énergie de 20 p. 100, ou de tout autre pourcentage prévu par le gouvernement, cela signifie qu'il faudra investir de l'argent, pas seulement pour calfeutrer les fenêtres et installer des thermostats programmables, mais également pour acheter de nouveaux appareils ménagers qui coûteront 1 500 $ chacun, de nouvelles fournaise qui coûteront 3 000 $ et de nouvelles fenêtres dont le coût pourra varier de 5 000 à 8 000 $. Ce sont toutes là des choses très coûteuses pour lesquelles les gens devront dépenser de l'argent. C'est ce que tout cela implique. Nous devons discuter de la question et mettre au point un processus de mise en application et nous ne l'avons pas fait encore.

+-

    Le président: Je vous remercie beaucoup

    Je vais donner la parole à M. Fitzpatrick. J'aimerais vous rappeler que vous avez droit à environ six minutes, Je vous demanderais donc de présenter brièvement votre question et je suis persuadé que les témoins répondront également de façon concise.

+-

    M. Brian Fitzpatrick (Prince Albert, Alliance canadienne): Certaines de ces questions sont plutôt complexes, monsieur le président, et j'aimerais m'assurer d'avoir bien compris.

    Je suis d'avis que l'établissement de prévisions sur la base d'un modèle relève d'une science bien peu exacte. Nortel Networks pourrait certainement en témoigner. Je suis persuadé que la vérificatrice générale pourrait aussi en témoigner en se basant sur le dossier de l'enregistrement des armes à feu. En analysant mon portefeuille de placement, je pourrais certainement me dire aussi que le modèle que j'utilise a bien besoin d'être revu. On peut donc dire qu'à bien des égards, cela équivaut souvent à un lancer du dé.

    À mon avis, il y a deux choses qui manquent dans ce modèle et j'aimerais dire quelques mots là-dessus. Dans quelle mesure l'accord de Kyoto régira-t-il de Canada? Puis, il y a la question des liens commerciaux que nous entretenons avec les États-Unis et que je ne voudrais pas minimiser ici. Toute une série de pays s'engageront à respecter le Protocole de Kyoto, mais les Américains resteront à l'écart. Personne ne peut me dire que dans dix ans, si cet accord prend forme et que les États-Unis exportent des biens sur ces marchés, il n'y aura aucune répercussion commerciale à ce chapitre. Nous ne faisons pas partie de la communauté européenne. Nos échanges avec les pays qui en font partie sont plutôt réduits. Nous faisons surtout des affaires avec les Américains. Nous nous engageons dans un processus économique avec lequel nous n'avons pas réellement de liens commerciaux. Nous nous engageons dans un processus dont il sera difficile de nous extraire.

    J'ai lu le Protocole de Kyoto ce matin. Je m'en suis fait une obligation. D'ici 2005, nous devons commencer à faire des progrès remarquables dans ce sens. On y prévoit que la réduction des émissions de gaz à effet de serre et l'enlèvement des puits de carbone devront faire l'objet de rapports et de vérifications d'ici 2005 et non 2012. L'article 13 porte sur la réduction certifiée des émissions. Cela doit être certifié. L'article 5 prévoit que chacune des parties devra avoir mis sur pied, au plus tard un an avant le début de la première période d'engagement, un système national permettant d'évaluer le niveau des émissions de CO2. Le paragraphe 2 de l'article six prévoit que des procédures de vérification doivent être en place dans ce but. L'article 7 prévoit que nous devons préparer un inventaire annuel et le soumettre à la conférence. Le deuxième paragraphe de l'article 7 prévoit qu'on doit faire la preuve du fait qu'on s'est acquitté de ces engagements. L'article 8 crée des équipes d'experts qui commenceront à effectuer des vérifications au Canada dès 2005, si j'ai bien compris, pour s'assurer que nous faisons bien ce que nous devons faire. L'article 10 exige que l'on élabore des programmes en vue de l'approbation des données et des modèles que nous utilisons, et l'article 11 précise que le Canada devra adopter des mécanismes prévoyant un développement propre.

    Je ne peux voir comment une bonne partie de ces choses pourraient être réalisées sans une importante participation du gouvernement. J'aimerais simplement rappeler aux gens qu'il ne s'agit pas là d'un point négligeable. J'ai entendu des gens dire en 1995 que l'enregistrement des armes à feu ne causerait pas vraiment de problèmes et que le gouvernement n'aurait pas à y investir beaucoup de temps ou d'argent. Nous savons tous où cela nous a menés. Il y a quelques années, le président des États-Unis a affirmé que l'époque des gouvernements imposants était révolue. Je n'en suis pas persuadé. J'ai l'impression que cela revient.

    Il se pourrait bien que la participation du secteur public soit beaucoup plus importante que prévue dans ce domaine et que nous ayons de gros problèmes avec notre principal partenaire financier, c'est-à-dire les États-Unis. L'un ou l'autre de ces modèles économiques en a-t-il tenu compte? Quels en seront les coûts?

º  +-(1655)  

+-

    The Chair: Il y avait là quatre questions. Vous pouvez maintenant répondre à ces questions.

+-

    M. Jayson Myers: Très brièvement, je crois que vous avez raison en ce qui a trait à la structure bureaucratique. Certains des modèles économiques se penchent sur cette question et sur le nombre de fonctionnaires supplémentaires qui seraient nécessaires pour gérer ce programme et disons que c'est là que nous prévoyons des gains au chapitre de l'emploi. Nous avons toutefois besoin d'un bon modèle qui précisera comment on compte financer tout cela. On n'en tient compte nulle part. On ne tient pas compte non plus des coûts engendrés par le respect des objectifs, par la paperasserie administrative, par le contrôle, la rédaction de rapport et la mise au point de toute cette infrastructure bureaucratique. En résumé, non, on n'en tient pas compte.

+-

    M. Brian Fitzpatrick: Monsieur Dillon.

+-

    M. John Dillon: Tout d'abord, je suis heureux d'apprendre qu'il y a quelqu'un d'autre que moi qui lit le Protocole de Kyoto le soir avant de s'endormir.

    Les Nations Unies mettent sur pied toute une organisation bureaucratique. Toutefois, nous ne sommes pas obligés de transmettre des rapports et il y a déjà des systèmes en place à Environnement Canada pour l'établissement de rapports sur notre inventaire des émissions. C'est loin d'être une mince tâche, mais nous nous y employons.

    Je crois que ce seront les consommateurs qui devront en fin de compte supporter la charge la plus importante et la moins bien définie. Il y aura une certaine organisation bureaucratique, et elle est actuellement en préparation, pour ce qui est des émissions industrielles. Mais je crois que la vraie question pour le gouvernement réside au niveau des dépenses qui seront engagées par les consommateurs. Non seulement serons-nous forcés d'engager un certain nombre de gens pour administrer ces programmes, mais nous devrons également soit établir des règlements, ce que je ne crois pas que nous ferons, ou prévoir certaines mesures incitatives pour stimuler le genre d'activités dont nous avons parlé.

+-

    The Chair: Monsieur Bennett.

+-

    M. David Bennett: Il y a effectivement toujours un danger de voir de grosses administrations bureaucratiques être crées pour résoudre un problème relativement simple. Je vais vous donner un exemple très simple. Il existe déjà un programme, l'Inventaire national des rejets de polluants, auquel toutes les industries qui émettent de nombreux polluants doivent se conformer, parce qu'aux termes de cet inventaire, elles sont considérées comme des pollueurs. Il serait donc très simple d'ajouter le dioxyde de carbone à la liste des polluants.

    Mais les entreprises nous en empêchent parce qu'elles s'opposent à cette façon très simple de mesurer les émissions des gros pollueurs. Et comment cela se fait-il? Ils le font déjà en effectuant ce que l'on appelle—et les ingénieurs doivent savoir de quoi il s'agit—un calcul du bilan massique. Il ne s'agit pas d'envoyer des gens prendre des mesure avec des chaudières et des thermomètres et ainsi de suite. Il s'agit en fait de calculs plutôt simples à réaliser. Je crois qu'il est plutôt ridicule de prétendre que cela imposera une lourde charge aux entreprises.

+-

    Le président: Monsieur St. Denis.

+-

    M. Brent St. Denis (Algoma—Manitoulin, Lib.): J'aimerais obtenir des précisions sur ce document, M. Myers. À la page 12, sous la rubrique des initiatives américaines, on souligne que les États-Unis s'engagent à réduire l'intensité des gaz à effet de serre de 18 p. 100 au cours de 10 prochaines années. Quelle est l'année de référence? J'ai regardé, mais je ne l'ai pas vu. Ce n'est sûrement pas l'année 1990.

»  +-(1700)  

+-

    M. Jayson Myers: Non. Cela faisait suite à l'initiative du président Bush et aux annonces qui ont été faites en février dernier.

+-

    M. Brent St. Denis: Mais 18 p. 100 des émissions actuelles.

+-

    M. Jayson Myers: Oui, pour 2002.

+-

    M. Brent St. Denis: Pour 2002. D'accord.

+-

    M. John Dillon: On pourrait se baser sur l'année 2000.

+-

    M. Brent St. Denis: Savez-vous à quoi correspondent ces chiffres par rapport à la réduction de 8 p. 100 sur les chiffres de 1990 à laquelle ils s'étaient engagés?

+-

    Mr. Nick Discepola: Si vous lisez certaines des phrases du document, on parle de 2002.

+-

    M. Brent St. Denis: Comment peut-on comparer cette réduction de 18 p. 100 à la réduction de 8 p. 100 à laquelle ils s'étaient engagés au moment où ils avaient accepté de ratifier l'entente? En avez-vous une idée? Pardon, je voulais dire une réduction de 7 p. 100.

    Je me demande si cette réduction de 18 p. 100 peut correspondre à 2 p. 100 du 7 p. 100 ou 3 p. 100. Mais, vous n'êtes pas certain...

+-

    M. John Dillon: Si l'on compare cela à une réduction de 7 p. 100 par rapport aux niveaux de 1990, c'est nettement positif. Cela mènerait la quantité totale de leurs émissions à un niveau très supérieur à ceux de 1990, mais je ne peux vous donner de chiffres exacts.

+-

    M. Brent St. Denis: D'accord.

+-

    Le président: Pouvez-vous obtenir ce genre de renseignements pour pouvoir répondre à la question?

+-

    M. Brent St. Denis: J'aimerais tout simplement établir un rapprochement avec le pourcentage de 18 p. 100 par rapport à 2002, dont mon collègue a parlé. Un simple rapprochement entre ce pourcentage et la réduction de 7 p. 100 par rapport aux chiffres de 1990, serait très utile.

+-

    M. Jayson Myers: Nous pouvons le faire. Mais vous pouvez le calculer aussi. Si l'on établit à 2 p. 100 par année l'augmentation du PIB aux États-Unis, on en arrive à un taux de croissance d'environ 45 p. 100 de l'activité économique. Une réduction de 18 p. 100 nous ramène donc à une augmentation d'environ 32 p. 100 par rapport aux chiffres actuels au cours des 20 prochaines années. Je ne suis pas certain de ce que cela pourrait signifier pour 2010. Mais il s'agirait d'une augmentation importante. Sur une période de 20 ans, on ne réduirait que de .... On augmenterait en fait toujours nos émissions d'environ 2 p. 100 par année.

+-

    M. Brent St. Denis: Il serait probablement relativement facile de faire correspondre les chiffres.

+-

     J'aimerais toutefois savoir une chose. Le gouvernement de l'Alberta, et tout particulièrement l'industrie pétrolière, a beaucoup travaillé à la préparation d'un plan canadien. Je crois que mon ami monsieur Savoy allait dire quelques mots à ce sujet. Après cela, je me demandais si l'un d'entre vous, ou les trois, pourraient m'expliquer ce qu'il y a de différent dans ce plan canadien vu par...d'autres que le gouvernement. M. Chrétien prétend que la solution avancée par le gouvernement est également une solution canadienne. Il semble donc y avoir deux scénarios canadiens.

    Je me demande si quelqu'un pourrait mettre en regard le plan préparé par l'industrie et l'Alberta et celui que l'on retrouve dans l'initiative présentée par le gouvernement.

+-

    M. John Dillon: Je vais essayer de le faire. Je crois que plusieurs groupes, y compris le gouvernement de l'Alberta, ont parlé d'une solution entièrement canadienne. Et ils ne disent pas exactement la même chose, ce qui signifie qu'il n'est pas facile de dire que c'est là le plan de Kyoto...

»  +-(1705)  

+-

    Mr. Brent St. Denis: Il y a plusieurs solutions canadiennes.

+-

    Mr. John Dillon: Il y a probablement plusieurs solutions canadiennes. On peut bien dire qu'il n'est plus très utile de parler d'un plan purement canadien puisqu'il semble que le gouvernement fédéral a également adopté cette terminologie.

    J'ai vu une émission à la chaîne anglaise de Radio-Canada dans laquelle on avançait que le terme avait en fait été utilisé pour la première fois en 1997 par l'honorable Preston Manning, mais je ne peux pas le prouver.

    Quoi qu'il en soit, il n'en reste pas moins que l'approche dont nous parlons est fondée, comme nous l'avons dit, sur l'intensité des émissions. Toutefois, elle est également fondée sur le fait que nous ne disons pas que nous faisons face à un objectif arbitraire qui a été établi en 1997 en nous fondant sur ce à quoi d'autres pays s'étaient engagés, et tout particulièrement sur ce à quoi les États-Unis s'étaient engagés, et que nous nous étions donc sentis obligés de nous en rapprocher. On n'avait tenu alors aucun compte de ce qui était réalisable. Nous parlons donc d'un processus qui prétend analyser ce qui est réalisable, ce qui est logique et ce qui est acceptable pour les divers secteurs de l'économie, et nous incorporons tout cela dans un plan canadien.

    L'industrie ne peut pas dicter aux autres ce qu'ils devraient faire. Ce que nous avons dit, c'est que les grands secteurs veulent se rencontrer et discuter de ce que devraient être les objectifs de rendement pour leur secteur, selon les capacités technologiques, le rendement de l'industrie, la situation économique de l'industrie, la disponibilité actuelle des technologies et la possibilité que certaines d'entre elles qui sont à l'étude à l'heure actuelle, pourraient s'appliquer d'ici cinq ou dix ans, et travailler en collaboration avec les gouvernements fédéral et provinciaux pour mettre un tel programme sur pied.

    Nous ne pouvons certainement pas établir un objectif pour le pays en entier, parce qu'en tant qu'entreprise, nous ne pouvons pas préciser quelle devrait être la contribution des consommateurs, de l'industrie et des agriculteurs. À notre avis, cela devrait être établi de concert avec ces groupes.

+-

    M. Jayson Myers: J’aimerais souligner que les ministres Rock et Stewart ont été les hôtes du sommet national de l’innovation qui s’est tenu la semaine dernière à Toronto. Les participants se sont principalement demandés ce que nous pouvions faire pour commercialiser la technologie, promouvoir les investissements dans les nouvelles technologies et promouvoir la rotation des capitaux? C'est sur ces points que nous devrions nous pencher.

    Je crois que la solution canadienne dont nous parlons devrait être en partie de nous pencher sur le dossier de l’innovation et d’insister davantage sur l’aspect de l’investissement dans l’infrastructure urbaine. Pour ce qui est des consommateurs, je dirais qu’il faut intéresser le public à ce que nous pouvons tous faire individuellement. Cela n’a jamais été fait.

    Tout au cours de ces consultations, nous nous sommes entretenus avec Industrie Canada, Environnement Canada et Ressources naturelles Canada. Le ministère des Finances n’a jamais participé aux discussions et il ne s’est jamais engagé à nous fournir de l’argent ou des ressources financières. Si nous voulons que notre processus de consultation soit le moindrement significatif, je crois qu’il est très important que nous puissions faire reconnaître la priorité qui devrait être accordée à ce dossier dans le budget.

+-

    Le président: Je vous remercie.

    Monsieur Bennett, aviez-vous quelque chose à dire à ce sujet?

+-

    M. David Bennett: Oui. Je dirais très brièvement que tout le concept de la mise sur pied d’une solution canadienne au problème des changements climatiques est rempli de mythes et de mensonges. Tout programme que le Canada adoptera constituera une solution purement canadienne, tout simplement parce que le Protocole de Kyoto laisse à tous les participants l’entière liberté de décider de la façon dont ils réduiront leurs émissions. Toutes les solutions qui pourraient être adoptées seront donc des solutions canadiennes. Aucun plan ne peut prétendre constituer une solution canadienne plus qu’un autre parce que l’accord de Kyoto ne fait que définir les objectifs. Il définit certaines des règles sur la façon de calculer les émissions, mais il ne précise pas comment l’objectif doit être atteint.

    Il y a trois grandes orientations qui sont prévues précisément par Kyoto. La première vise l’échange international de droits d'émission, la deuxième la mise sur pied d’un mécanisme de développement «propre» qui permet au Canada d’obtenir des crédits pour les développements enregistrés dans les pays qui ne figurent pas à l’annexe un, et la troisième porte sur une mise en œuvre mixte qui nous permet de partager nos objectifs de réduction avec d’autres pays figurant à l’annexe un.

    Tout ce débat sur une solution purement canadienne est réellement pernicieux. Nous devons nous en tenir loin parce qu’il est complètement dépourvu de sens et qu’il n’a rien à voir avec Kyoto. Lorsque les gens disent qu’ils veulent une solution purement canadienne, ce qu’ils veulent réellement dire c’est qu’ils n’aiment pas le Protocole de Kyoto et les objectifs qu’il contient. Si c’est ce qu’ils pensent, il faut les laisser dire.

+-

    Le président: Monsieur Myers, vos commentaires s'il-vous-plaît.

+-

    M. Jayson Myers: Si nous voulons parler d’un plan et d’une approche en particulier, il faut également parler de mesures concrètes. En 1998, nous travaillions de concert avec l’industrie chilienne pour enregistrer nos investissements dans le domaine du reboisement et des puits forestiers. Nous ne pouvions pas le faire ici au Canada parce nous n’avions pas de registre. Tout était enregistré aux États-Unis.

    Les compagnies canadiennes sont parmi les principaux investisseurs dans le domaine des crédits de pollution grâce à leurs investissements dans les activités reliées aux puits et à l’utilisation des terres par exemple. Tout cela se fait aux États-Unis, pas au Canada. Nous avons des compagnies qui se rendent aux Pays-Bas pour tirer profit des groupes d’investisseurs qui y ont été mis sur pied. Ils ne le font pas au Canada parce que cela n’existe pas ici. Cela fait partie du problème, sans compter les questions portant sur la commercialisation de la technologie et tout ce que nous ne faisons pas et qui nous permettrait de tirer profit des technologies produites au pays.

    Une bonne partie de tout cela consiste à faire quelque chose de réellement constructif de façon à assurer que tout cela soit intégré à la stratégie d’innovation. Assurons-nous que tout cela mènera à une vraie stratégie en matière d’émission de gaz à effet de serre plutôt qu’à un plan qui nous permettrait de nous sortir d’une obligation.

+-

    Le président: Monsieur Discepola.

»  +-(1710)  

+-

    Mr. Nick Discepola: Merci, monsieur le président.

    Monsieur Myers, j’aimerais que vous me précisiez certaines choses. On en a parlé à plusieurs reprises et je voudrais être certain d’avoir bien compris.

    M. Savoy nous dit que les objectifs fixés sont minimes et que nous devrions probablement les augmenter. Je crois vous avoir entendu dire à quelques reprises en réponse à une question qui vous avait été posée que vous ne croyez même pas que nous soyons en mesure d’atteindre les objectifs actuels. Est-ce bien vrai?

+-

    Mr. Jayson Myers: C'est exact.

+-

    Mr. Nick Discepola: Croyez-vous réellement que ce soit le cas. Votre industrie se contentera-t-elle d’accepter cela et de dire qu’elle est incapable de respecter ces objectifs? Quelles conséquences cela pourra-t-il avoir pour le Canada si nous devons ratifier une entente que les industries que vous représentez ne croient pas vraiment être en mesure de respecter?

    J’aimerais que vous me donniez une réponse à ce sujet. L’autre chose qui m’a étonné, c’est que vous avez fait un commentaire qui m’a semblé fondamental. Vous avez dit que nous devions rétablir la confiance qui a été perdue dans tout ce débat. C’est très important pour moi et j’aimerais que vous nous disiez ce que vous pensez de ces deux sujets.

+-

    M. Jayson Myers: Tout d’abord, pour ce qui est des objectifs, comme j’ai essayé de l’expliquer au début de ma présentation, l’industrie a fait des gains considérables au niveau de la réduction des émissions en adoptant des programmes d’efficacité énergétique qui permettent de réduire l’intensité de leurs émissions de carbone. L’industrie continuera de le faire, en grande partie parce qu’il est très logique de le faire, c’est-à-dire d’économiser de l’argent au chapitre de l’énergie et d’investir dans de nouvelles technologies pour améliorer la productivité. Ce sont là des mesures très logiques pour l’industrie. Il y a bon nombre de choses que nous pouvons adopter pour encourager cela et l’industrie continuera d’aller dans ce sens.

    À mon avis, l’industrie se préoccupe tout principalement du fait que nous devons faire face à des objectifs plutôt imposants et probablement bien peu réalistes. Soit que l’objectif soit peu réaliste compte tenu du délai de huit à dix semaines fixé, soit que le délai soit irréaliste compte tenu des objectifs établis. Ce sont là les grandes lignes de nos préoccupations en ce qui a trait à Kyoto à l’heure actuelle.

+-

    Mr. Nick Discepola: Sur quoi vous basez-vous pour dire cela?

+-

    M. Jayson Myers: Pour ce qui est des liens entre la croissance économique et les progrès que nous réalisons déjà, ce que je voulais dire ici, c’est qu’on a fait certains progrès importants au chapitre de ces investissements dans le domaine de la technologie, de l’efficacité énergétique et de la réduction de l’intensité des émissions de carbone, et dans le cas du secteur manufacturier, on parle rarement de la possibilité de réduire de 2 p. 100 les émissions de gaz à effet de serre par rapport à 1990, mais c’est tout de même très important.

    Même avec tout ce qui est prévu, il n’en reste pas moins que les écarts au niveau des émissions au Canada seront toujours de 240 mégatonnes, c’est-à-dire qu’on en sera toujours à 40 p. 100 au-dessus des objectifs fixés à Kyoto, même avec les progrès qui sont réalisés.

    Si nous voulons vraiment réduire, comme l’a dit John, nos émissions de 30 p. 100, nous devrons utiliser 30 p. 100 moins d’énergie, de combustible fossile s’entend, au cours des huit prochaines années pour pouvoir y arriver. C’est là à mon avis que résident les plus gros points d’interrogation.

    S’il y avait quoi que ce soit dans ce plan qui précise les mesures que nous pouvons prendre pour accélérer les progrès technologiques—par exemple éliminer l’impôt sur le capital, faciliter les approbations réglementaires, investir dans le domaine de l’acquisition et de la commercialisation de technologies, accélérer le recours à l’énergie nucléaire au pays, accélérer les investissements dans les piles à combustible—alors peut-être aurions-nous une chance de nous approcher sensiblement des objectifs fixés à Kyoto. Mais il n’y a rien de tel dans les plans de mise en œuvre et je me demande bien comment l’industrie pourrait croire que l’on pourrait multiplier le rendement actuel par deux. C’est beaucoup demander dans un délai de huit ans, mais lorsqu’on pense qu’il faudra accélérer les progrès technologiques de 800 p. 100 par année au cours des huit prochaines années, c’est alors que l’industrie devient un peu sceptique et que les incertitudes se manifestent.

    Pour ce qui est de rétablir la confiance, je crois que l’industrie comme bon nombre de groupes, environnementaux et syndicaux, ont grandement participé à un processus de consultation mené de concert avec le gouvernement sur la meilleure façon de réellement réduire les émissions de gaz à effet de serre au Canada. Nous y avons participé de 1998 à 2000. Ce qui s’est dégradé réellement, à mon avis du moins et John pourrait ne pas être d’accord avec moi, c’est qu’au cours de la dernière année, si des consultations ont eu lieu, on n’a pas écouté beaucoup. Il en a résulté un plan unidirectionnel menant à la ratification et à une série de changements qui ont en fait contredit bon nombre des recommandations que des groupes de gens d’affaires mais aussi de consommateurs et autres, avaient faites au gouvernement relativement à la mise en œuvre.

    En conséquence, on s’est beaucoup interrogé sur la crédibilité des modèles économiques établis et sur le peu de confiance qu’on pouvait accorder aux plans du gouvernement.

    M. Nick Discepola: À ce rythme, je n'aurai pas le temps de poser une autre question.

»  +-(1715)  

+-

    Le président: Je suis persuadé que monsieur Bennett tentera d’être bref.

+-

    M. David Bennett: Oui, je serai bref.

    Pour ce qui est de la confiance, je crois que c’est une question trop vaste pour que nous en traitions ici.

+-

    Mr. Nick Discepola: Il faudrait peut-être laisser toute partisanerie politique de côté.

+-

    M. David Bennett: D’accord, cela réduira encore mon intervention.

    Si nous pouvons mettre sur pied un projet national, ce à quoi Kyoto nous engage, notre meilleure façon de réaliser des progrès au chapitre économique tout en respectant les objectifs de Kyoto est de ratifier cet accord et de nous pencher par la suite sur l’important aspect de sa mise en œuvre et de le faire le plus rapidement possible, parce que si nous décidons que cela n’est pas acceptable pour le Canada, nous nous retrouverons avec un grand nombre de programmes positifs et facultatifs sur les bras. Nous savons par expérience que les programmes facultatifs sont moins efficaces au niveau de la société et des consommateurs que les projets nationaux qui prévoient des objectifs, des règlements, des investissements ciblés, des pressions exercées sur les consommateurs pour qu’ils achètent des appareils plus éconergétiques et ainsi de suite.

    La meilleure façon pour nous de réaliser des progrès importants à l’égard des objectifs fixés dans le cadre de l’accord de Kyoto est de ratifier cet accord et de le mettre en œuvre par la suite. Les autres solutions ne donneront aucun résultat.

+-

    Le président: Je m’excuse, mais les cloches sonnent.

    Monsieur Dillon, pourriez-vous nous donner votre réponse.

+-

    M. John Dillon: Je n’ai que quelques points à soulever en réponse à la question de M. Discepola.

    Tout d’abord, Jayson a très éloquemment décrit les difficultés que présente cet objectif dans l’optique des entreprises, mais il s’agit d’un objectif national. Nous sommes d’avis que ce sera difficile parce que nous n’avons aucune indication du fait que le gouvernement pourrait avoir prévu quoi que ce soit pour réduire de 30 p. 100 les émissions attribuables aux consommateurs et nous savons bien qui devra en fin de compte régler la note pour tous ces programmes.

    L’autre problème, un problème fondamental qui porte sur la question de la confiance, c’est que ces domaines relèvent en bonne partie de la compétence des provinces. À l’heure actuelle, il y a huit provinces sur dix qui ne sont pas du tout satisfaites du plan de mise en œuvre du gouvernement fédéral. Il y a toute une question de confiance et de rétablissement du processus au chapitre des liens entre le fédéral et les provinces.

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    The Chair: Monsieur Rajotte.

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    M. James Rajotte: J’aimerais poser une question sur les crédits d’échange de droits d’émission. On ne comprend pas très bien comment ce système pourrait fonctionner—plusieurs chiffres ont été avancés, allant de 10- à 50 dollars la tonne—et quels sont les coûts qui pourraient y être reliés. J’aimerais que vous nous donniez brièvement votre avis à ce sujet.

    L’une des préoccupations qui a été soulevée a trait bien sûr à l’achat de tels crédits d’un pays comme la Russie et au fait de ne pas utiliser par la suite ces crédits à des fins de technologies propres ou autre. Dans le plus récent plan sur les changements climatiques, le gouvernement souligne que s’il achète des crédits de la Russie, il peut assurer que ces crédits serviront au programme d’assainissement de l’air. Mais comment peut-on le garantir? Peut-on le faire dans le cadre d’un système d’échange?

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    M. John Dillon: Je vais essayer de le faire, M. Rajotte.

    En premier lieu, j'estime important de signaler que le Protocole de Kyoto comporte un programme international d'échange de droits d'émissions sur lequel les États-Unis ont vraiment insisté, bien qu'ils aient maintenant retiré leur appui à l'accord.

    Tous les devis élaborés par le gouvernement ou par d'autres intervenants, particulièrement les devis peu élevés, reposent sur l'hypothèse que les crédits d'émissions viendront en grande partie de la Russie et des pays d'Europe de l'Est parce l'économie de ces pays s'est effondrée depuis 1990. Ces États ont des crédits excédentaires parce que le Protocole avait prévu pour eux des cibles généreuses. En outre, comme les États-Unis ne sont plus dans la course et n'achèteront pas ces crédits, ces pays offrent un bassin de crédits équivalent à la demande combinée du Canada, du Japon et des pays européens qui ne peuvent atteindre les cibles qui leur ont été fixées.

    Les intervenants soutiennent une hypothèse déterminante selon laquelle le prix du CO2 sera de 10 $ canadiens la tonne ou moins. Or, nous n'avons pas la moindre idée de la valeur de cette hypothèse. En réalité, il n'y a pas de marché et le marché qui se développerait en vertu du Protocole de Kyoto serait nettement différent de tout commerce expérimental ayant présentement cours.

    En deuxième lieu, il faut se demander pourquoi les Russes voudraient vendre leur soi-disant crédits d'émissions à meilleur marché. Si ce sont eux qui, en définitive, contrôleront le marché, il ne fait aucun doute que des économistes de Harvard sont déjà sur place pour leur dire comment le gérer. Quant à l'idée que ces crédits seront bon marché, cela soulève de sérieuses questions.

    En troisième et dernier lieu, comme je l'ai indiqué précédemment, M. Anderson affirme que le Canada n'achètera pas de crédits d'émissions de la Russie. Je ne suis pas vraiment certain de comprendre ce que le ministre veut dire par là. D'après son plan, le gouvernement fédéral doit acheter des crédits équivalant à 10 millions de tonne d'émissions. Je ne sais pas si le ministre affirme simplement que le gouvernement fédéral n'achètera pas de crédits d'émissions de la Russie ou qu'il essaiera d'en empêcher le milieu des affaires, si nous participons au programme d'échange de droits d'émissions.

»  -(1720)  

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    M. James Rajotte: Selon ce que je comprends, le plan prévoit que le Canada participera, à condition d'avoir l'assurance que les crédits seront utilisés pour développer des technologies d'assainissement de l'air. Toutefois, je ne sais pas comment il est possible d'avoir une telle garantie lors de l'échange d'un crédit.

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    M. John Dillon: Nous pouvons tenter de le faire. Encore une fois, si le gouvernement décide d'investir l'argent des contribuables pour acheter des crédits, ce serait une des façons d'atteindre l'objectif d'ensemble. Le gouvernement devra néanmoins montrer, pour lui-même et pour la vérificatrice générale, qu'il s'est acquitté de sa tâche de façon appropriée. S'il essaie d'empêcher le milieu des affaires...s'il tente d'imposer des obligations au milieu des affaires, et essaie également de contrôler ce qu'il est possible d'acheter, je ne vois pas comment il est possible de réaliser un tel programme dans le marché actuel.

    Ainsi, le gouvernement du Canada peut conclure avec le gouvernement de la Russie une entente prévoyant que le Canada achètera un nombre donné de tonnes de crédits d'émissions de GES. Toutefois, en retour, le Canada exige qu'on lui prouve que l'argent qu'il paie à la Russie est réinvesti dans des projets qui améliorent l'efficience énergétique et réduisent les émissions de GES, en Russie même. Il s'agirait d'une entente intergouvernementale. Si les gouvernements le voulaient, j'imagine qu'un tel accord serait possible et qu'il pourrait être satisfaisant.

    Pour les gens d'affaires, la question est de savoir si le gouvernement essaiera de limiter la capacité des entreprises, parce que cela entraînerait une hausse considérable du prix qui dépasserait 10 $ la tonne.

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    Le président: M.Bagnell, je vous permets de poser une question. Les témoins peuvent peut-être combiner leurs réponses.

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    M. Larry Bagnell (Yukon, Lib.): Je pose une seule question brève à M. Myers.

    Avez-vous effectué une étude sur les possibilités commerciales, particulièrement dans le secteur des exportations, qu'offrent entre autres les dispositifs, les processus et les véhicules visant l'efficience énergétique? De toute évidence, certaines de nos technologies vont nous permettre de devancer les États-Unis ou d'autres pays. De plus, parce que nous aurons pris une longueur d'avance par rapport aux autres joueurs, qui vont finir pour nous emboîter le pas, nous pourrons peut-être vendre nos technologies.

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    M. Jayson Myers: Oui, nous avons effectivement réalisé une étude qui s'inscrit dans l'examen des répercussions sur l'emploi qui est effectué ici.

    Il faut se rappeler qu'au Canada, le secteur de l'environnement compte environ 65 000 travailleurs et qu'il offre des possibilités considérables. Néanmoins, j'estime qu'il faut inciter les industries canadiennes à investir pour que les consommateurs achètent vraiment les technologies au Canada. Il est également impératif de s'assurer que les technologies élaborées au Canada sont commercialisées au Canada, mises sur le marché au Canada et fabriquées au Canada.

    Les nombreuses questions et préoccupations concernant l'approche retenue par le Canada à l'égard de la mise en oeuvre du Protocole de Kyoto portent précisément sur cet élément parce qu'à cet égard, notre bilan n'est pas vraiment très remarquable. À ce jour, les investissements et la commercialisation se sont faits ailleurs.

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    Le président: Je regrette, nous devons conclure parce que le timbre se fait entendre.

    Je remercie les témoins. J'ai énormément apprécié le caractère exhaustif des interventions. Je suis certain que grâce aux témoignages entendus aujourd'hui, nous pourrons désormais mieux cerner la question.

    Je rappelle que nous allons siéger la semaine prochaine, à 15 h 30, mardi, et à 15 h 15, mercredi.

    La séance est levée.