INST Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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37e LÉGISLATURE, 2e SESSION
Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le mercredi 27 novembre 2002
¹ | 1530 |
Le président (M. Walt Lastewka (St. Catharines, Lib.)) |
M. Howard Wilson (conseiller en éthique, ministère de l'Industrie) |
¹ | 1535 |
¹ | 1540 |
Le président |
M. Ken Epp (Elk Island, Alliance canadienne) |
M. Howard Wilson |
¹ | 1545 |
M. Ken Epp |
M. Howard Wilson |
M. Ken Epp |
M. Howard Wilson |
Me Pierre Legault (avocat général principal, Services juridiques, Ministère de l'Industrie) |
M. Howard Wilson |
Le président |
M. Joseph Volpe (Eglinton—Lawrence, Lib.) |
¹ | 1550 |
M. Howard Wilson |
M. Joseph Volpe |
Me Pierre Legault |
M. Joseph Volpe |
M. Howard Wilson |
¹ | 1555 |
M. Joseph Volpe |
M. Howard Wilson |
M. Joseph Volpe |
M. Howard Wilson |
M. Joseph Volpe |
Le président |
Mme Jocelyne Girard-Bujold (Jonquière, BQ) |
º | 1600 |
M. Howard Wilson |
º | 1605 |
Me Pierre Legault |
Mme Jocelyne Girard-Bujold |
Le président |
M. Andy Savoy (Tobique—Mactaquac, Lib.) |
M. Howard Wilson |
º | 1610 |
M. Andy Savoy |
M. Howard Wilson |
Le président |
M. Brian Masse (Windsor-Ouest, NPD) |
M. Howard Wilson |
M. Brian Masse |
M. Howard Wilson |
º | 1615 |
M. Brian Masse |
M. Howard Wilson |
M. Brian Masse |
M. Howard Wilson |
M. Brian Masse |
Le président |
º | 1620 |
M. John Bryden (Ancaster—Dundas—Flamborough—Aldershot, Lib.) |
M. Howard Wilson |
M. John Bryden |
º | 1625 |
M. Howard Wilson |
M. John Bryden |
Le président |
M. John Bryden |
M. Howard Wilson |
º | 1630 |
M. John Bryden |
M. Howard Wilson |
M. John Bryden |
Le président |
M. Ken Epp |
Me Pierre Legault |
M. Ken Epp |
Me Pierre Legault |
M. Ken Epp |
Me Pierre Legault |
M. Ken Epp |
Me Pierre Legault |
M. Ken Epp |
Le président |
M. Ken Epp |
M. Howard Wilson |
º | 1635 |
M. Ken Epp |
M. Howard Wilson |
M. Ken Epp |
M. Howard Wilson |
M. Ken Epp |
M. Howard Wilson |
M. Ken Epp |
M. Howard Wilson |
M. Ken Epp |
M. Howard Wilson |
º | 1640 |
Me Pierre Legault |
Le président |
M. Larry Bagnell (Yukon, Lib.) |
M. Howard Wilson |
º | 1645 |
M. Larry Bagnell |
M. Howard Wilson |
M. Larry Bagnell |
M. Howard Wilson |
M. Larry Bagnell |
Le président |
Mme Jocelyne Girard-Bujold |
M. Howard Wilson |
Mme Jocelyne Girard-Bujold |
M. Howard Wilson |
Mme Jocelyne Girard-Bujold |
º | 1650 |
M. Howard Wilson |
Mme Jocelyne Girard-Bujold |
Le président |
Mme Jocelyne Girard-Bujold |
º | 1655 |
Le président |
M. Howard Wilson |
Le président |
M. Dan McTeague (Pickering—Ajax—Uxbridge, Lib.) |
M. Howard Wilson |
M. Dan McTeague |
M. Howard Wilson |
» | 1700 |
M. Dan McTeague |
M. Howard Wilson |
M. Dan McTeague |
M. Howard Wilson |
M. Dan McTeague |
Le président |
M. Brian Masse |
M. Howard Wilson |
M. Brian Masse |
» | 1705 |
M. Howard Wilson |
M. Brian Masse |
M. Howard Wilson |
Le président |
M. Brian Masse |
M. Howard Wilson |
» | 1710 |
M. Brian Masse |
Le président |
M. Joseph Volpe |
M. Howard Wilson |
» | 1715 |
M. Joseph Volpe |
M. Howard Wilson |
M. Joseph Volpe |
Le président |
M. John Bryden |
M. Howard Wilson |
» | 1720 |
M. John Bryden |
M. Howard Wilson |
M. John Bryden |
Le président |
M. Howard Wilson |
M. John Bryden |
M. Howard Wilson |
Le président |
M. Howard Wilson |
» | 1725 |
M. John Bryden |
Le président |
M. John Bryden |
M. Howard Wilson |
M. John Bryden |
Le président |
M. Joseph Volpe |
» | 1730 |
Le président |
M. Joseph Volpe |
Le président |
M. Joseph Volpe |
Le président |
CANADA
Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie |
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TÉMOIGNAGES
Le mercredi 27 novembre 2002
[Enregistrement électronique]
¹ (1530)
[Traduction]
Le président (M. Walt Lastewka (St. Catharines, Lib.)): La séance est ouverte.
Nous examinons aujourd'hui le projet de loi C-15, une loi modifiant la Loi sur l'enregistrement des lobbyistes.
Nous avons le plaisir d'accueillir des représentants du ministère de l'Industrie; je veux parler de M. Howard Wilson, conseiller en éthique, et de M. Pierre Legault, avocat général principal, Services juridiques.
Je propose que nous commencions par l'allocution d'ouverture. Nous passerons aux questions après.
Monsieur Wilson.
M. Howard Wilson (conseiller en éthique, ministère de l'Industrie): Merci, monsieur le président.
Je sais que vous aurez beaucoup de questions à poser au sujet du projet de loi C-15, qui propose des modifications à la Loi sur l'enregistrement des lobbyistes. Je vais donc m'en tenir à de brèves observations d'ouverture aujourd'hui. Et pour répondre à vos attentes, je parlerai des principaux détails du projet de loi.
[Français]
Mais d'abord, permettez-moi de vous présenter Me Pierre Legault, avocat général principal des Services juridiques d'Industrie Canada et du ministère de la Justice.
[Traduction]
La Loi sur l'enregistrement des lobbyistes a été grandement améliorée grâce aux recommandations du comité en 1995-1996. C'est une loi qui fonctionne bien. C'est aussi à cette conclusion qu'en est arrivé le comité lors de sa revue en 2001. La présidente avait dit, dans son avant-propos:
À ce chapitre, on s'entend généralement pour dire que la loi a donné de bons résultats: elle pourvoit exactement au genre de transparence envisagée au moment de son adoption, c'est-à-dire que les lobbyistes déclarent effectivement leurs activités. Aujourd'hui, en consultant le registre, on peut savoir qui fait du lobbying, auprès de quel ministère, et de quoi on discute exactement. |
Les amendements qui vous sont présentés pour examen reflètent les recommandations faites en 2001 par le comité. Même si le gouvernement propose bon nombre de modifications, en général, la plupart d'entre elles ont trait à trois changements importants. Premièrement, le projet de loi propose une définition plus claire du lobbying et vise à clarifier qui doit s'enregistrer. Deuxièmement, le projet de loi permet d'établir un système d'enregistrement simplifié. Troisièmement, il inclurait des dispositions renforcées en matière d'application de la loi. Permettez-moi d'aborder chacun de ces changements à tour de rôle.
Comme je viens de le dire, le premier changement vise à clarifier quel type de lobbying la loi englobe et qui doit s'enregistrer comme lobbyiste. La loi actuelle vise les lobbyistes qui, moyennant rémunération, tentent d'influencer les titulaires de charges publiques au gouvernement. Il ne s'agit donc pas de gens travaillant comme bénévoles ou de citoyens intéressés. Si je me fie à la transcription des discussions tenues lors de votre séance de la semaine dernière, je crois que certains ont proposé que ceux qui ne sont pas rémunérés, mais qui consacrent une part importante de leur temps à ces activités, soient également enregistrés. Comme je l'ai dit, la loi s'applique aux lobbyistes payés.
[Français]
La loi actuelle établit trois types de lobbyistes.
Le premier type est le lobbyiste-conseil. C'est une personne qui a des contrats pour effectuer du lobbying au nom des clients.
Le deuxième type est celui que la loi appelle un lobbyiste salarié (personne morale). Il s'agit d'un employé d'une entreprise dont une partie importante des fonctions consiste à faire du lobbying pour son employeur. Par exemple, un agent chargé des relations gouvernementales dans une société ou une association serait considéré comme un lobbyiste.
Le troisième type est celui que la loi appelle les lobbyistes salariés (organisations). Il s'agit d'employés d'organismes sans but lucratif au sein desquels un ou plusieurs employés font du lobbying.
Ces trois types de personnes doivent s'enregistrer comme lobbyistes aux termes de la loi, s'ils effectuent du lobbying. Mais la question clé est celle-ci: qu'est-ce qui définit le lobbying?
[Traduction]
Il y a quelques instants, j'ai parlé de ceux qui «tentent d'influencer un titulaire de charge publique» parce que c'est ainsi que la loi définit actuellement le lobbying. On craint que cette définition soit trop vague pour qu'il soit possible de bien la faire appliquer. On pourrait en effet se demander à quel moment une certaine forme de communication devient «une tentative d'influencer».
En fait, monsieur le président, votre comité s'est penché sur la même question durant son examen de la loi en 2001. Il a alors recommandé que le registraire des lobbyistes, le Bureau du conseiller en éthique et le ministère de la Justice se consultent à ce sujet. C'est ce que nous avons fait. Cela a permis de définir le lobbying comme étant une communication avec un titulaire de charge publique à propos de lois, de règlements, de politiques, de programmes, de subventions, de contributions ou de contrats. L'idée est de supprimer les zones grises, celles où on se demande s'il y a eu ou non tentative d'influencer une décision. Si vous communiquez avec un titulaire de charge publique au sujet d'une activité qui doit être enregistrée, vous êtes en train de faire du lobbying, selon les termes de ce projet de loi—sous réserve d'exceptions claires, bien sûr. Si vous cherchez uniquement à connaître des faits ou à obtenir des renseignements de base, vous n'êtes pas tenu de vous enregistrer.
¹ (1535)
Le projet de loi C-15 vise aussi à répondre à une autre recommandation formulée par votre comité lorsqu'il a examiné la loi actuelle. Le comité était alors d'avis que l'exemption qui s'applique quand le titulaire d'une charge publique amorce le contact devait être éliminée. Le projet de loi C-15 comprend ce changement. L'acte de communication portant sur les questions particulières dont je viens de vous parler serait considéré comme étant du lobbying. La personne qui communique ainsi serait donc tenue de s'enregistrer comme lobbyiste. Nous estimons que ces changements permettraient de clarifier ce qu'est le lobbying aux termes de la loi et à des fins d'enregistrement.
Deux des témoins entendus la semaine dernière ont exprimé des réserves à l'endroit de l'alinéa 4(2)c). Ils ont cru que cette disposition donnait la possibilité aux lobbyistes d'éviter de s'enregistrer. Nous ne sommes pas d'accord. Le nouvel alinéa stipule qu'il n'est pas nécessaire de s'enregistrer si la communication «se limite à une demande de renseignements». Nous croyons qu'il n'y a pas d'ambigüité.
Nous avons craint qu'en enlevant les mots «tentent d'influencer» nous aurions visé, par inadvertance, beaucoup d'activités réalisées de bonne foi. Nous avons été en mesure de vérifier que nous avions un taux élevé de conformité et qu'avec les changements proposés nous pourrions effectivement faire respecter la loi. Si nous constatons, par la suite, que l'alinéa 4(2)c) pose un problème, le directeur du registre pourra émettre un bulletin d'interprétation afin qu'il n'y ait pas d'abus à cet égard.
[Français]
La deuxième question importante qu'aborde le projet de loi C-15 est la proposition visant à créer un seul système d'enregistrement qui s'appliquerait également aux personnes morales et aux organismes sans but lucratif. Ce système serait complété par des exigences plus simples et plus strictes pour régir l'enregistrement et le désenregistrement.
En vertu de la Loi sur l'enregistrement des lobbyistes actuelle, il existe deux systèmes d'enregistrement différents: un pour les entreprises et l'autre pour les organismes sans but lucratif.
Permettez-moi de parler d'abord des règles courantes qui s'appliquent aux entreprises. Si un employé d'une entreprise consacre au moins 20 p. 100 de son temps au lobbying, il doit s'enregistrer. Notre expérience révèle qu'essentiellement, les membres du personnel chargés des relations gouvernementales et certains cadres supérieurs doivent s'enregistrer. Même si bon nombre de gens peuvent traiter avec le gouvernement, peu d'entre eux y consacrent l'équivalent d'une journée complète de travail chaque semaine.
Il existe un processus différent pour les organismes sans but lucratif. Pour eux, l'enregistrement dépend du temps total consacré par tout le personnel au lobbying. Si le temps consacré au lobbying par tous les membres du personnel correspond à au moins 20 p. 100 du temps de travail d'un seul employé, le cadre dirigeant du groupe doit alors s'enregistrer au nom de son organisation.
[Traduction]
Nous avons examiné minutieusement cette différence. La décision, qui fait partie du projet de loi C-15, suit le modèle actuellement en place pour les groupes sans but lucratif. Si le temps que les employés d'une entreprise consacrent au lobbying effectué auprès de titulaires de charges publiques correspond à au moins 20 p. 100 du temps de travail d'un seul de ces employés, l'entreprise doit s'enregistrer.
Dans ce contexte, il incomberait au premier dirigeant ou à une personne de niveau équivalent de s'enregistrer. Il est à noter que les personnes qui font le lobbying seraient aussi inscrites sur la liste des lobbyistes, mais la responsabilité légale des activités de lobbying demeurerait entre les mains des dirigeants.
Un autre changement dont j'aimerais parler est que le projet de loi C-15 exigerait que tous les lobbyistes, y compris les lobbyistes-conseils, mettent à jour ou renouvellent leur enregistrement au moins tous les six mois. Cette modification permettrait de concrétiser une des recommandations du comité et de garantir que le registre des lobbyistes est tenu à jour et que les données qu'il renferme sont exactes.
Avant de continuer, j'aimerais souligner que ce processus d'enregistrement n'est pas lourd. En fait, actuellement, 98 p. 100 du processus se déroule en ligne. Il n'est donc pas difficile pour les lobbyistes de se conformer à cette exigence. Ce système automatisé est quelque chose dont nous sommes très fiers, surtout parce qu'il est très facile pour quiconque de visiter notre site Web et d'obtenir des renseignements sur les lobbyistes enregistrés ainsi que leurs activités.
¹ (1540)
[Français]
Le dernier changement sur lequel je désire attirer votre attention est une toute nouvelle disposition. Elle vise les situations qui pourraient laisser supposer qu'a été commise une infraction à une loi. Le projet de loi C-15 exigerait que le conseiller en éthique informe les autorités policières si, dans le cadre d'une enquête sur une allégation d'infraction au Code de déontologie des lobbyistes, le conseiller en éthique a des raisons valables de penser qu'une infraction criminelle a été commise.
[Traduction]
Voilà donc les principaux changements au coeur du projet de loi C-15. Bien sûr, ce projet de loi renferme d'autres dispositions. La Loi sur l'enregistrement des lobbyistes est comme la plupart des autres lois. Au fil du temps, nous avons relevé des problèmes mineurs dans le libellé, qui n'affectent pas l'essentiel de la loi, mais qui devraient être corrigés. Nous avons aussi mis le doigt sur de petites incohérences entre les versions française et anglaise de la loi. Toutefois, aucun de ces problèmes n'appelle de changement important.
Ceci dit, je vous remercie de votre attention et je suis maintenant prêt, monsieur le président, à répondre aux questions des membres du comité.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Wilson.
Je cède la parole à M. Epp.
Monsieur Epp, soyez le bienvenu au comité de l'Industrie.
M. Ken Epp (Elk Island, Alliance canadienne): Merci beaucoup. Je remplace quelqu'un aujourd'hui, mais c'est avec beaucoup d'intérêt car M. Wilson et moi-même nous sommes côtoyés à maintes occasions au cours des cinq à huit dernières années. Permettez-moi de lui souhaiter aussi la bienvenue au sein du comité.
J'aimerais tout d'abord vous poser une question au sujet de l'enregistrement des lobbyistes. La nouvelle définition s'applique uniquement à ceux qui consacrent plus de 20 p. 100 de leur temps à ce type d'activités. Mais que se passe-t-il lorsque quelqu'un passe 95 p. 100 de son temps à préparer un exposé qu'il présente à un sous-ministre ou au ministre lui-même et finit par remporter un contrat de plusieurs millions de dollars, en partie grâce à sa présentation très persuasive et percutante? N'est-ce pas du lobbying? Il me semble bien que oui.
M. Howard Wilson: Dans le cas des lobbyistes-conseils, la règle des 20 p. 100 ne s'applique pas. Autrement dit, un simple appel téléphonique dans lequel ceux-ci manifesteraient l'intérêt de leur client pour obtenir un contrat serait suffisant pour exiger un enregistrement. Ce serait la même chose s'ils voulaient organiser une réunion. Cela concerne les lobbyistes-conseils.
Ces 20 p. 100 viennent du libellé de la loi où on parle d'une part importante des activités consacrées au lobbying. Au cours des années passées, le registraire avait déterminé qu'il fallait que 20 p. 100 du temps de travail d'un employé soit consacré à des activités de lobbying. En 1995-1996, ce comité avait adopté cette approche pour les associations de manière assez singulière.
Il avait dit que si l'ensemble des activités de lobbying du personnel d'une association—comme la Chambre de Commerce du Canada ou un syndicat—représentait plus de 20 p. 100 du temps de travail d'un employé, le dirigeant de l'association devait s'enregistrer et donner la liste de toutes les personnes qui consacrent une partie de leur temps à des activités de lobbying. Nous estimons que cela a très bien marché.
Cependant, le comité avait en même temps instauré un processus différent pour les sociétés. Il avait dit que pour qu'une société s'enregistre, il fallait que 20 p. 100 du temps de travail d'un employé soit consacré à des activités de lobbying. Si un employé atteignait ou dépassait ce pourcentage, il devait s'enregistrer comme lobbyiste. Nous avons éprouvé des difficultés. Un certain nombre de sociétés ne se conformaient pas strictement à cette règle; elles avaient déclaré que par souci de transparence elles s'enregistreraient ou enregistraient plusieurs de leurs employés.
Par ailleurs, nous avons laissé de côté plusieurs sociétés relativement importantes établies dans cette ville parce qu'elles avaient rapporté que les activités de lobbying ne représentaient que 16 ou 17 p. 100 du temps de travail d'un employé et qu'en aucun cas cela atteignait 20 p. 100. Compte tenu de notre expérience auprès des associations, nous avons imaginé une approche semblable pour les sociétés qui permettrait d'améliorer la qualité des renseignements fournis et autorisés par les dirigeants. Autrement dit, cela engagerait les pleins pouvoirs des dirigeants de sociétés.
Ainsi, nous croyons que si le comité approuve ce changement concernant les 20 p. 100, il n'y aura plus aucune possibilité de jouer sur le pourcentage comme par le passé.
¹ (1545)
M. Ken Epp: Est-il possible que certaines organisations se présentent et disent...? Je me demande pourquoi vous avez supprimé l'expression «tentent d'influencer». Avez-vous eu des problèmes avec des personnes qui vous auraient dit: «nous sommes allez les voir, mais nous n'avons aucunement tenté de les influencer; nous n'avons fait qu'échanger des renseignements»? Selon moi, le fait de supprimer ces mots lui enlèvera encore plus de poids puisque les gens ne pourront plus se cacher derrière ce prétexte.
M. Howard Wilson: En fait, nous n'avons jamais eu ce type de problème étant donné que nous ne nous sommes jamais retrouvés devant les tribunaux. En revanche, suite à une affaire que nous avons référée à la Gendarmerie royale au sujet des activités d'un individu, nous avons découvert que les procureurs du ministère de la Justice à Montréal en étaient venus à la conclusion que les mots «tentent d'influencer» constituaient un obstacle juridique très important à la condamnation d'éventuels responsables.
Nous avons jugé que ce qui est important, c'est que le lobbyiste soit payé pour ses activités ou qu'il ait établi des contacts conformément aux dispositions prévues dans la loi. On nous a dit que l'expression «tentent d'influencer» constituait l'obstacle le plus important et que le fardeau de la preuve—parce qu'il faut se mettre à la place des personnes visées—était très lourd. On nous a donc conseillé de procéder ainsi au risque de ne pas obtenir gain de cause advenant le cas où nous devrions nous présenter devant un tribunal pour démontrer qu'une personne aurait dû s'enregistrer, mais qu'elle ne l'a pas fait.
En retirant ces mots, nous mettons de nouveau l'accent sur la communication. Nous croyons qu'ainsi, il sera beaucoup plus facile d'appliquer la loi.
M. Ken Epp: J'ai une autre question pas mal difficile.
En tant que député de l'opposition, il peut arriver que des électeurs de ma circonscription ou d'ailleurs au Canada me demandent d'influencer les décisions dans un domaine particulier. Cela peut prendre la forme d'un vote sur des questions sociales, avoir trait à l'attribution d'un contrat ou quelqu'autre chose du genre. Ils pourraient me dire : «Pourquoi n'ai-je pas décroché le contrat du ministère de la Défense? Je répondais pourtant à toutes les conditions.» On me demande parfois d'intervenir en pareils cas.
Au cours des deux ou trois dernières années, il y a eu des affaires très médiatisées où des députés avaient tenté d'influencer des ministères ou des sociétés de la Couronne. Est-ce que les membres du Parlement sont aussi concernés? Y a-t-il un moment où nous devons nous enregistrer comme lobbyistes parce que nous représentons quelqu'un, nous essayons de promouvoir une cause ou nous tentons d'influencer une décision?
M. Howard Wilson: Non, je crois que l'un des rôles les plus importants d'un membre du Parlement est de représenter les intérêts de ses électeurs. Celui-ci est souvent appelé à défendre directement les intérêts de ses administrés auprès d'un ministère, à connaître les raisons pour lesquelles un contrat n'a pas été attribué, etc. Nous avons dû imposer certaines limitations aux ministres pour des activités réalisées pour le compte d'électeurs auprès d'organismes quasi judiciaires et, dernièrement, de sociétés de la Couronne, mais ces exceptions s'appliquent aux ministres.
Ainsi, non, en aucune circonstance—en fait, je crois que si on vous payait pour présenter des requêtes, vous seriez probablement...
Me Pierre Legault (avocat général principal, Services juridiques, Ministère de l'Industrie): Vous seriez probablement en conflit d'intérêts...
M. Howard Wilson: Et vous violeriez aussi le Code criminel.
Le président: Merci, monsieur Epp.
Monsieur Volpe.
M. Joseph Volpe (Eglinton—Lawrence, Lib.): J'aimerais en revenir à votre exemple. Le fait, pour un député d'être payé pour défendre les intérêts d'une société en particulier ne fait probablement pas partie des charges normales qui incombent à un parlementaire.
J'ai un exemple en tête. S'il s'agit d'une société établie à l'extérieur de la circonscription d'un député, on pourrait parfaitement prétendre que celui-ci ne défend pas les intérêts d'un électeur, mais ceux d'un particulier. Et s'il obtenait une rémunération en échange, cela sortirait du cadre des activités normales d'un député—je ne sais pas si en votre capacité de comptable ou d'avocat des exemples du genre vous viennent à l'esprit—, alors je vois pas pourquoi on ne pourrait pas demander à ce député de s'enregistrer comme lobbyiste?
¹ (1550)
M. Howard Wilson: Parce qu'à ce moment-là, il aurait enfreint le Code criminel. Vous vous souviendrez certainement de la situation dans laquelle s'était retrouvé le sénateur Cogger, il y a quelques années. Il avait été accusé de trafic d'influence—selon les arguments de la Couronne. Son affaire avait été jugée en première instance au Québec, puis par la Cour d'appel pour le motif que la Couronne n'avait pu établir l'intention criminelle. L'affaire s'était rendue jusqu'en Cour suprême, et les juges avaient statué à l'unanimité que l'intention criminelle n'avait en fait rien à voir avec l'infraction. À l'époque, le sénateur avait dit que tout ce qu'il avait fait était d'agir comme n'importe quel avocat qui représente les intérêts d'un client désireux d'obtenir une subvention ministérielle, que c'est ce qu'il avait fait avant de devenir sénateur et continué de faire après.
La Cour suprême a dit—et je le sais c'est parce que je dois écrire aux personnes nommées par le gouverneur en conseil et travaillant à temps partiel à propos des dangers auxquelles elles s'exposent—que si vous êtes un représentant officiel—et un sénateur est un représentant officiel, tout comme l'est un député—et que vous vous engagez dans une affaire avec le gouvernement du Canada, vous commettez une infraction criminelle. Il n'est pas nécessaire qu'il y ait une intention criminelle; il suffit que vous soyez un représentant officiel et que vous interveniez auprès d'un ministère pour garantir quelque chose à votre client.
Si vous vous retrouviez dans une situation pareille, j'imagine que vous devriez vous enregistrer, mais, en ce faisant, vous admettriez du même coup avoir commis une infraction.
M. Joseph Volpe: C'est donc superflu; c'est ce que cela signifie essentiellement.
Me Pierre Legault: Si je puis me permettre d'ajouter quelque chose à la réponse de M. Wilson, je dirais que la loi stipule que si le titulaire d'une charge publique a fait l'objet de pressions de la part d'un lobbyiste, ce dernier doit s'enregistrer. Ainsi, en théorie, vous devriez vous enregistrer pour être intervenu auprès de certains de vos collègues—et pour votre compte, dans un sens, si c'est dans votre propre circonscription—, ce qui donnerait lieu à certaines incohérences.
M. Joseph Volpe: J'imagine qu'il faut émettre des hypothèses pour mieux comprendre le projet de loi, mais la plupart des membres ici présents ne sont probablement pas en mesure d'effectuer une décision. Je le dis sans vouloir offenser aucun député d'aucun parti. Donc, s'ils ne sont pas en mesure d'effectuer une décision, ils feraient essentiellement du lobbying; ils ne prendraient pas de décision.
Ceux qui rencontrent un député pour essayer d'influencer ou de faire modifier une décision le font probablement dans l'espoir de créer une masse critique, mais ce n'est pas parce que les gens autour de cette table vont modifier une décision que la personne qui fait une demande va en profiter.
D'après ce que vous savez du projet de loi, je me demande si le «titulaire de charge publique» dont on parle, au sens où je l'entends, qui peut être un député, ne désigne pas plutôt la personne qui prend la décision. Dans la plupart des cas, ce serait un fonctionnaire et peut-être un ministre du Cabinet. Est-ce que je me trompe?
M. Howard Wilson: Certes, si une personne fait du lobbying auprès d'un député qui est, disons, seulement député, cette personne exerce une activité de lobbying et doit s'enregistrer. Je pense que vous êtes un peu modeste. Vous n'êtes peut-être pas celui qui décide, dans le sens où ce n'est pas vous qui autorisez l'octroi de la subvention, mais vous pouvez influencer de façon assez importante la décision qui sera prise en bout de ligne par le ministère. Vous aurez probablement un rôle très important à jouer dans la façon dont un comité va examiner un projet de loi, et cela aura des répercussions importantes sur un certains nombre de dossiers.
Je sais que cette question a été soulevée lors des audiences que vous avez tenues en 2001, et je pense que l'organisme de lobbying que vous allez rencontrer demain a alors dit qu'il fait du lobbying sur la Colline, mais il est évident qu'il en fait également auprès des ministres et des ministères. Toutes ces activités entrent dans le champ d'application de la loi et obligent ceux qui les exercent à s'enregistrer.
¹ (1555)
M. Joseph Volpe: Je ne voulais vraiment pas lancer de débat ou de concours sur la valeur des députés, qu'on s'adresse à eux ou non. Je m'intéressais davantage à l'aspect concret de la question. Si on cible les décideurs, il faut dire que, même si les députés exercent peut-être beaucoup d'influence, quel que soit le parti auquel ils appartiennent, ce ne sont pas des décideurs. J'imagine que celui qui s'adresse à un député le fait dans l'espoir que son intervention donne un résultat.
Je dis cela parce que, dans votre exposé, vous avez parlé d'activités inoffensives. C'est peut-être un terme juridique que vous avez employé, mais il incite ceux qui ne sont pas avocats à croire que toutes les autres activités ne sont donc pas inoffensives par nature. Je ne sais pas si on pourrait les qualifier d'abjectes, mais c'est le mot qui me vient à l'esprit.
J'ai toujours pensé que toute activité qui amène un citoyen canadien à s'adresser à un député ou à un titulaire de charge publique était légitime.
M. Howard Wilson: En employant le mot «inoffensives» dans ce contexte j'ai pu, sans le vouloir, donner une autre impression.
Je réagissais au témoignage exprimé par MM. Conacher et Chenier devant le comité la semaine dernière. D'après eux, l'alinéa 4(2)c) , qui stipule qu'il n'est pas nécessaire de s'enregistrer si la communication se limite à une demande de renseignements, ouvrirait une brèche parce que les gens l'invoqueraient pour éviter de s'enregistrer. Nous ne croyons pas qu'il y ait de risque.
Pour nous, si on enlève les mots «afin de tenter d'influencer», celui qui entre en communication seulement pour demander des renseignements, sans essayer d'influencer d'aucune façon une décision, serait obligé de s'enregistrer pour exercer une activité qui n'était pas, jusqu'ici, considérée comme du lobbying.
Nous avons conclu qu'en excluant cette activité, nous évitions d'imposer indûment à ceux qui entraient en communication pour obtenir de l'information l'obligation légale de s'enregistrer. On voulait essayer de trouver un juste équilibre. Nous croyons avoir réussi. Il y a eu beaucoup de discussions à l'étape de la rédaction.
M. Joseph Volpe: J'ai une dernière question, monsieur Wilson.
D'après moi toujours, on oblige implicitement les titulaires de charge publique, dont les députés, à inscrire pendant combien de temps et, en fait, à quelle fréquence ils échangent avec les gens qui essaient d'influencer une décision en particulier. Est-ce l'intention du projet de loi?
M. Howard Wilson: Non.
M. Joseph Volpe: Non, ça ne l'est pas.
Merci.
Le président: Merci, monsieur Volpe.
Madame Bujold.
[Français]
Mme Jocelyne Girard-Bujold (Jonquière, BQ): Je vous remercie d'être là. Il y a longtemps que je voulais vous rencontrer.
Premièrement, si on adoptait toutes les modifications que contient le projet de C-15, comment cela simplifierait-il votre rôle de conseiller en éthique?
Deuxièmement, dans ce projet de loi, il y a beaucoup de catégories de lobbyistes. Cela me rend très perplexe. Vous savez qu'il est bien difficile, aujourd'hui, de définir les catégories de lobbyistes. Je pense que la loi est laxiste parce qu'elle ne couvre pas assez de gens; elle ne couvre pas certains qui en font. Vous savez que la façon de faire du lobbying a changé. Avec tous les moyens qu'on a à notre disposition, il ne s'agit pas seulement d'aller voir quelqu'un pour faire du lobbying; il y a d'autres façons de le faire. Je trouve que le projet de loi ouvre très grand la porte aux nouvelles façons de procéder qu'on connaîtra dans les prochains mois ou les prochaines années. Quand on fait un projet de loi, on le fait pour plusieurs années.
Donc, j'aimerais que vous me parliez de votre vision à court et à moyen terme quant à la façon de modifier le lobbyisme et que vous me disiez si vous pensez que ce projet de loi prévoit trop de catégories de lobbyistes. Ne pensez-vous pas qu'il devrait englober, dans une vision à long terme, de nouvelles façons de faire du lobbying?
º (1600)
[Traduction]
M. Howard Wilson: Pour ce qui est de mon rôle, je pense que vous savez que le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre étudie des propositions concernant la création du poste de commissaire à l'éthique, à qui il appartiendra de s'occuper du code de déontologie des parlementaires et de faire appliquer, comme je le fais, le code sur les conflits d'intérêts établi par le premier ministre. Je vais comparaître devant ce comité la semaine prochaine. Je pense qu'on sait aussi que j'ai indiqué au premier ministre que j'étais parfaitement heureux d'exercer mes fonctions actuelles jusqu'à ce que le nouveau poste soit créé, après quoi j'irai faire autre chose, quoi, je ne le sais pas.
Il y a un aspect qui entraînerait une modification corrélative de la Loi sur l'enregistrement des lobbyistes. En effet, actuellement c'est moi qui suis responsable des enquêtes effectuées en vertu du Code de déontologie des lobbyistes. Or, le projet de loi qu'examine le comité de la procédure et des affaires de la Chambre propose que cette responsabilité soit confiée au directeur de l'enregistrement. Nous allons peut-être indiquer la semaine prochaine qu'il vaudrait mieux attribuer cette fonction au futur commissaire à l'éthique. C'est parce qu'il faut occuper un certain niveau pour exercer les pouvoirs vraiment considérables qui sont liés à l'application du Code de déontologie des lobbyistes. Mais je pense qu'il en sera question dans les recommandations que le comité va présenter au Parlement.
Ensuite, il y a trois catégories de lobbyistes, et ce n'est pas nouveau. Les trois catégories existent, en fait, depuis le début de 1988. Mais les obligations visaient seulement la première catégorie de lobbyistes, celle des lobbyistes-conseils. La grande innovation de 1995-1996 a été d'imposer des exigences en matière d'enregistrement à ceux qui travaillaient pour le compte d'associations ou d'entreprises. Je pense que le milieu du lobbying comprend qu'il y a des distinctions. Dans deux cas, le lobbyiste est un employé, et dans le troisième cas, il est consultant. Vous pouvez être lobbyiste et avocat ou comptable mais, de toute façon, vous travaillez pour un client.
Pour ce qui est de ma vision à moyen et à long terme, j'ai le sentiment que l'application de la loi pose un problème actuellement. Il n'y a pas de problème pour ce qui est de l'observation de la loi parce que les gens s'enregistrent. Si nous pouvons régler le problème de l'application de la loi et simplifier l'enregistrement des entreprises, je crois que nous aurons un système très solide. Dans cinq ans, quand votre comité réexaminera la loi, je m'attends à ce qu'il n'y ait pas grand-chose à changer.
Nous mettons l'accent sur la communication, ce qui comprend la communication électronique. Il y a d'abord eu les rencontres formelles, puis les lettres et ensuite les fax, et on communique aujourd'hui par courriel. La loi englobe tous ces moyens de communication.
º (1605)
[Français]
Me Pierre Legault: Si vous me le permettez, j'ajouterai que les trois catégories de lobbyistes sont suffisamment larges pour englober toutes les professions ou toutes les formes que peut prendre le lobbying. Elles entrent dans ces trois catégories.
On sait que les techniques de lobbying peuvent changer avec le temps, et la loi demande aux lobbyistes d'enregistrer les formules qu'ils appliquent au niveau de la communication. Donc, quelle que soit la formule qu'on utilise, elle doit être rapportée, selon le texte actuel. On devra faire de même à l'avenir, quelles que soient les techniques qui seront offertes.
Mme Jocelyne Girard-Bujold: Permettez-moi d'être sceptique.
[Traduction]
Le président: Monsieur Savoy.
M. Andy Savoy (Tobique—Mactaquac, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président. Bienvenue, monsieur Wilson.
Le projet de loi vise à éliminer l'exemption prévue à l'alinéa 4(2)c). L'exemption s'applique quand un titulaire de charge publique communique avec des lobbyistes pour demander conseil. La semaine dernière, et malheureusement je n'étais pas là, des témoins ont dit être préoccupés par le fait que le nouvel alinéa 4(2)c) pourrait ouvrir une brèche à propos de ce qui constitue une demande de renseignements dans le cadre d'une activité de lobbying. Si j'ai bien compris, de leur côté, les ministères craignent que l'enregistrement soit exigé chaque fois qu'on veut faire une demande de renseignements, ce qui pourrait congestionner le système.
Pourriez-vous nous expliquer les deux points de vue et nous dire ce que vous en pensez?
M. Howard Wilson: D'un côté, on veut éliminer l'exemption, selon laquelle celui qui reçoit une demande écrite de la part d'un titulaire de charge publique n'a pas à s'enregistrer. Le comité a beaucoup discuté de la question avant de conclure qu'il y avait une brèche dans la loi et qu'il fallait l'éliminer. Le gouvernement en a convenu.
Le comité avait proposé cela en 1995-1996 parce qu'on lui avait fait valoir que certaines associations faisaient du lobbying seulement quand un fonctionnaire leur demandait leur avis. Nous doutions que ce soit effectivement le cas, mais les gens craignaient d'avoir un trop lourd fardeau administratif. Nous n'avions pas de données sur l'application de la loi par le truchement d'Internet. Nous en avons maintenant. On peut s'enregistrer par voie électronique très facilement; cela exige vraiment très peu de temps pour tout le monde, autant pour les associations que les particuliers. Nous sommes maintenant convaincus de ne pas imposer de fardeau administratif. Nous convenons, comme le comité, que cela semble constituer une brèche et qu'il est utile de la colmater. Cela ne va pas causer un fardeau inutile.
Or, la semaine dernière, deux témoins ont dit—ce qui nous a un peu surpris—que le nouvel alinéa 4(2)c) permettrait aux gens de ne pas s'enregistrer. Autrement dit, ils feraient du lobbying mais prétendraient, en invoquant cette disposition, qu'il s'agit seulement d'une demande de renseignements. Nous pensons que le libellé du projet de loi est très clair puisqu'il faut que la communication «se limite à une demande de renseignements». Selon nous, si l'enregistrement était obligatoire pour chaque appel téléphonique qui se limite vraiment à une demande de renseignements, cela pourrait causer un lourd fardeau aux ministères.
Je pense que c'est un problème qui touche non pas les ministères mais les lobbyistes. La loi s'appliquerait alors à celui qui ne fait pas de lobbying et qui établit la communication seulement pour demander un renseignement sans essayer d'influencer une décision d'une façon quelconque.
Pour ce qui est des craintes exprimées la semaine dernière par les deux témoins, nous pensons que le directeur pourrait publier un bulletin d'interprétation, comme le prévoit la loi, pour régler ce problème—si jamais cela devient un problème. Mais, d'après nous, la modification proposée a une portée restreinte.
º (1610)
M. Andy Savoy: Comme vous l'avez fait observer, les modes de communication se sont accrus depuis quelques décennies, ou années, en fait. Je comprends très bien qu'il n'est à peu près pas possible de faire du lobbying quand on demande des renseignements par écrit. Mais si on téléphone à un député pour lui demander un renseignement, il est très facile d'aborder d'autres sujets, même si le but premier de l'appel est d'obtenir de l'information. Je pense qu'il serait très difficile d'exercer un contrôle là-dessus. Pour les demandes d'information par voie électronique ou sur support papier, je trouve que c'est très logique. Mais dans le cas d'une conversation, je trouve que c'est un peu plus incertain. Mais je n'en dirai pas plus là-dessus.
J'aimerais parler d'autre chose très rapidement. Quand vous dites qu'il faut s'enregistrer quand le temps consacré au lobbying—dans le cas des trois catégories de lobbyiste-conseil, lobbyiste salarié et lobbyiste pour le compte d'une organisation—correspond à 20 p. 100 du temps de travail d'un employé, parlez-vous du temps consacré aux contacts personnels établis dans le cadre des activités de lobbying, ou au soutien logistique et administratif lié au lobbying? Comment définissez-vous cela?
M. Howard Wilson: Cela ne comprend pas le temps de préparation.
M. Andy Savoy: Cela tient compte uniquement de l'activité proprement dite.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Le président: Monsieur Masse.
M. Brian Masse (Windsor-Ouest, NPD): Merci, monsieur le président.
Pour revenir à ce dont on a discuté tout à l'heure à propos des ministres qui outrepassent leurs pouvoirs et touchent des honoraires et du fait que c'est une infraction criminelle que de faire du lobbying pour obtenir un contrat à quelqu'un, est-ce différent si une contribution à leur association de circonscription ou à leur campagne a été faite ou pourrait l'être pour qu'ils fassent leur travail?
M. Howard Wilson: J'aimerais revenir en arrière un instant. J'ai dit que présenter des observations au nom d'un électeur est l'une des plus importantes fonctions du député, et qu'aucune restriction ne doit être imposée à ce sujet.
Nous avons dû imposer des contraintes aux ministres en raison du pouvoir décisionnel qu'ils exercent auprès des tribunaux quasijudiciaires. Les mesures à ce sujet ont été prises au milieu des années 1990 parce qu'il pouvait y avoir apparence de partialité de la part d'un ministre qui présente des observations au CRTC ou à la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. Le Cabinet a décidé expressément que cette restriction ne s'appliquerait pas aux secrétaires parlementaires; que, même si le secrétaire parlementaire exerce plus de pouvoirs au sein de son ministère, il est plus important qu'il puisse représenter ses électeurs.
Nous avons appliqué les restrictions aux sociétés d'État, mais seulement pour les ministres. Je ne sais pas si une raison financière...
M. Brian Masse: Si quelqu'un cherche à obtenir un contrat, on a dit qu'il serait répréhensible qu'un ministre outrepasse ses pouvoirs ou, comme M. Volpe l'a indiqué, qu'il touche de l'argent, sous forme d'honoraires ou autrement. Mais si le ministre a reçu une contribution pour sa campagne ou pour l'association de sa circonscription, ou s'il est susceptible d'en recevoir une plus tard, est-ce que la restriction s'applique?
M. Howard Wilson: Je suis d'avis que le financement électoral est un élément essentiel du processus politique et que la ligne de conduite générale adoptée au Canada en est une de transparence. Je sais qu'hier soir le premier ministre a annoncé que la Chambre serait saisie la semaine prochaine d'un nouveau projet de loi pour encadrer plus que jamais auparavant les courses à la direction des partis et les activités de financement des associations de circonscription entre les élections. Mais je pense qu'avec les reçus et la transparence... À moins que vous pensiez qu'il ne devrait pas y avoir de campagne de financement, je pense qu'elles sont un élément très important du processus politique. Les ministres qui se présentent à la direction du Parti libéral ont des règles à respecter parce que les fonds qu'ils recueillent ne sont pas destinés au Parti libéral ni à leur association de circonscription, mais à eux-mêmes.
C'est donc dire que, s'ils savent quelle entreprise a versé une contribution, ils devront s'assurer de ne pas être associés, en tant que ministres, aux décisions qui pourraient avoir une influence sur les intérêts de cette entreprise, et c'est la raison pour laquelle les fonds recueillis par les ministres sont en grande partie déposés en fiducie sans droit de regard et divulgués à la fin.
º (1615)
M. Brian Masse: Si on se met à la place des contribuables, nous sommes rémunérés pour remplir nos fonctions de parlementaire. Il faut recueillir des fonds pour se représenter aux élections, mais quelle différence y a-t-il entre recevoir quelques milliers de dollars pour faire son travail et le faire après avoir reçu une sorte de rémunération ou contribution, qui pourrait être plus importante si, encore une fois, ce n'est pas dans le cadre de nos fonctions et responsabilités? Je ne vois pas vraiment la différence entre les deux, mais qu'en pensez-vous?
M. Howard Wilson: Ce n'est pas vraiment une question qui est de mon ressort. Le Parlement aura l'occasion de discuter des propositions du gouvernement quand le projet de loi sera déposé la semaine prochaine, et il faudra alors peut-être poser la question au comité compétent.
D'après moi, le principe de transparence sur lequel repose en grande partie le financement électoral, avec la publication de toutes les listes par Élections Canada, sert l'intérêt public et établit un juste équilibre. Il faut des fonds pour assurer le fonctionnement du régime politique, mais la transparence existe; au moins, il n'y a pas de secrets à ce sujet.
M. Brian Masse: On a fait un commentaire intéressant au sujet des changements proposés. On a dit que l'on continue d'imposer une obligation aux lobbyistes, mais que c'est le Parlement qui doit défendre la confiance du public.
À partir de quel moment devons-nous intervenir si nous faisons l'objet de pressions soutenues? Devons-nous, à un moment donné, dire que nous avons fait l'objet de pressions soutenues pour ou contre telle mesure? Avons-nous un rôle à jouer dans le système d'enregistrement, et ne pouvons-nous pas signaler les cas où les personnes ne sont pas enregistrées adéquatement? Est-ce que l'intérêt public ne serait pas ainsi mieux servi?
M. Howard Wilson: Ce n'est pas la première fois que nous examinons la question. Nous l'avons fait en 1995-1996 et en 2001. On a proposé que les titulaires de charges publiques établissent des listes, et que ces listes soient rendues publiques.
Nous avons pensé que cette mesure nuirait aux échanges légitimes soutenus qui doivent avoir lieu entre les personnes qui font des propositions au gouvernement du Canada. Le comité s'est prononcé l'idée d'établir un registre. Toutefois, nous avons un registre des personnes qui font du lobbying auprès des ministères, et dans quel domaine. Ces renseignements sont disponibles sur Internet. Nous avons largement dépassé les attentes du comité en 1995-1996, puisque nous avons réussi à mettre sur pied le service en moins d'un an—cela vous montre à quel point Internet est un outil efficace. Donc, ces renseignements sont disponibles.
M. Brian Masse: Merci, monsieur le président.
Le président: Monsieur Bryden.
º (1620)
M. John Bryden (Ancaster—Dundas—Flamborough—Aldershot, Lib.): Je faisais partie du comité qui a fait cette recommandation en 1995-1996. Je suis content de voir qu'on aborde la question de nouveau, parce que j'ai eu l'occasion d'en apprendre beaucoup, depuis ce temps, sur la Loi sur l'enregistrement des lobbyistes.
À un moment donné, j'ai fait des recherches pour savoir quels étaient les lobbyistes qui avaient convaincu le gouvernement d'apporter des changements importants au projet de loi sur la cruauté envers les animaux. Je n'ai aucune difficulté à cerner les lobbyistes et les ministères qui ont fait l'objet de lobbying, mais je n'ai pas réussi à savoir quels fonctionnaires ont été pressentis. J'imagine que, compte tenu des progrès qu'a connus l'Internet au cours des sept dernières années, les fonctionnaires—je m'intéresse davantage aux fonctionnaires qu'aux politiques dans ce contexte—ne devraient avoir aucune difficulté à prendre note des lobbyistes qui les appellent et à inscrire leur nom sur une liste qui pourrait être communiquée non seulement aux députés, qui aimeraient bien avoir l'information parce que cela fait partie du processus décisionnel, mais également au grand public.
Croyez-vous qu'on devrait réexaminer la question?
M. Howard Wilson: Nous avons essayé, au cours des 15 ou 20 dernières années, et je ne suis pas le seul à avoir abordé la question, de faire en sorte que le gouvernement soit vraiment à l'écoute des Canadiens ou de leurs représentants, pour qu'il y ait une bonne communication entre les fonctionnaires et le public. Certains de mes collègues ne sont pas toujours doués pour cela. On avait peur que cela crée une certaine réticence, que les personnes refusent de voir leur nom figures sur certaines listes, qu'elles n'acceptent pas de rencontrer les fonctionnaires avec qui elles doivent faire affaire dans le cadre de leurs activités.
Le comité, après s'être penché là-dessus, a décidé que seuls les cadres dirigeants s'enregistreraient. Un des membres a fait valoir que le gros des efforts de lobbying se faisaient surtout à un niveau inférieur, c'est-à-dire au niveau opérationnel. Le comité a donc décidé, avec raison, que nous devons savoir qui fait du lobbying et à quelles fins, et que cette information doit être aisément disponible.
Je continue de croire que le meilleur exemple qu'on puisse citer à cet égard est celui d'Onex, des Lignes aériennes Canadien international et d'Air Canada, un dossier qui a suscité beaucoup d'intérêt au sein du public. À l'époque, les participants—qu'il s'agisse d'Onex, du Canadien international ou d'Air Canada—recrutaient tous les lobbyistes-conseils qu'ils pouvaient trouver dans cette ville.
Nous avons reçu deux appels des médias au cours de cette période—on faisait état tous les jours des conseils qui avaient été recrutés—et les deux portaient sur des questions très techniques. Ils ne nous demandaient pas... Ils voulaient des renseignements de base; ils voulaient s'assurer que les personnes intéressées s'occupaient du dossier. Or, je pense que les attentes et les exigences du comité, en 1995-1996, ont été largement dépassées et que cette mesure a contribué à assurer la transparence du débat, puisqu'on l'information était aisément disponible.
M. John Bryden: Eh bien, monsieur Wilson, ce ne sont pas les cades supérieurs qui posent problème, mais plutôt les cadres intermédiaires. Les lobbyistes ne viennent pas ici pour faire du lobbying auprès des politiciens, dont l'influence sur les événements est discutable. Je sais que nous ne sommes pas tous d'accord là-dessus. Toutefois, ce sont ces personnes invisibles qui élaborent les politiques qui posent problème.
Je voudrais vous poser une question. Nous avons maintenant la possibilité, grâce à Internet et aux banques de données établies par les responsables du système d'enregistrement, de savoir très rapidement quels sont les organismes qui font du lobbying. Ne pouvons-nous pas demander aux cadres intermédiaires qu'ils établissent une liste des personnes qui communiquent avec eux, des lobbyistes dont le nom figure dans le registre? Je ne parle pas ici des cadres, mais des lobbyistes qui entrent en contact avec eux—on devrait certainement pouvoir établir une telle liste afin d'avoir une idée de ce que se fait au niveau intermédiaire, non pas au niveau supérieur, avec les politiciens. Ne serait-il pas utile d'avoir une telle liste, ou est-ce quelque chose qu'on ne peut attendre des cadres intermédiaires?
º (1625)
M. Howard Wilson: Nous avons essayé, et le Parlement aussi, de parvenir à un juste équilibre. Nous avons la possibilité, à l'heure actuelle, d'avoir accès à une foule de renseignements. Nous pouvons très bien dire que les formalités administratives vont être réduites du fait que tout va se faire de façon électronique. Toutefois, si nous exigeons de tous les fonctionnaires qu'ils établissent une liste des personnes qui communiquent avec eux—un registre—il sera de plus en plus difficile pour ces personnes de communiquer avec ces fonctionnaires, chose que nous ne voulons pas.
Toutefois, si vous jetez un coup d'oeil sur les lobbyistes qui sont enregistrés, les lobbyistes qui sont embauchés par une entreprise comme Bombardier, par exemple, ou par une banque—et cela va vous permettre de savoir quels sont les dossiers, les ministères qui les intéressent—vous allez constater qu'ils font du lobbying à tous les niveaux.
M. John Bryden: Je tiens à vous dire, monsieur Wilson, que j'ai reçu, la semaine dernière, à la maison, un appel du groupe Animal Alliance of Canada. Il sollicitait des fonds pour poursuivre sa lutte contre le projet de loi sur la cruauté envers les animaux, projet de loi que le Sénat est en train d'examiner. Fait intéressant, j'ai appris, au cours de la conversation, que le groupe se vantait non seulement d'avoir encouragé le gouvernement à présenter ce projet de loi, mais également d'avoir participer à sa rédaction. Je peux vous dire que le doute s'est installé dans mon esprit, surtout que j'avais présenté des demandes d'accès à l'information sur cette question. On semble avoir exercé une influence indue sur les cadres intermédiaires dans ce dossier particulier.
Je vais m'en tenir à cela pour l'instant, monsieur le président. Ai-je le temps de poser une autre question?
Le président: Oui.
M. John Bryden: J'aimerais en savoir un peu plus sur la règle de 20 p. 100. Est-ce que ce 20 p. 100 représente le temps qu'une entreprise consacre au lobbying, ou existe-t-il une autre règle à ce sujet?
M. Howard Wilson: La règle de 20 p. 100 s'applique à un employé, non pas à une entreprise en tant que telle. Le 20 p. 100 représente le temps qu'un employé, et non une entreprise, consacre au lobbying.
On voulait, par ce moyen... en ce qui concerne les lobbyistes salariés, la loi fait allusion à «tout employé d'une personne morale ou physique dont les fonctions, pour une partie importante, comportent la communication... avec le titulaire d'une charge publique». On s'est demandé ce qu'on entendait par une «partie importante». Le registraire, à l'époque, a répondu que cela correspondait à 20 p. 100 du temps de travail qui était consacré au lobbying. Nous ne changeons rien au libellé. Toutefois, d'après le projet de loi, le président-directeur général d'une entreprise devra maintenant s'enregistrer, au nom de l'entreprise, si le temps consacré au lobbying par tous les membres du personnel correspond à au moins 20 p. 100 du temps de travail d'un seul employé.
º (1630)
M. John Bryden: Donc, l'entreprise est un lobbyiste.
M. Howard Wilson: C'est le cadre dirigeant qui s'enregistre et qui indique combien d'employés consacrent du temps à cette activité. Il va maintenant y avoir une liste de personnes.
M. John Bryden: Merci.
Monsieur le président, merci.
Le président: Monsieur Epp.
M. Ken Epp: Merci beaucoup.
Je voudrais poser une question de détail à M. Legault. Il doit se sentir négligé parce que personne ne s'est adressé à lui.
Me Pierre Legault: C'est toujours un plaisir que d'écouter M. Wilson.
Des voix: Oh, oh!
M. Ken Epp: Voici la question. Si le code de déontologie proposé dans le nouveau projet de loi est adopté, il n'y aura plus de conseiller en éthique. Ce dernier sera remplacé par le commissaire à l'éthique qui, d'après ce qui est proposé, n'aura pas à s'occuper des lobbyistes. Or, il est question dans le projet de loi du conseiller en éthique. Est-ce que le comité devrait modifier le projet de loi avant d'en faire rapport à la Chambre?
Me Pierre Legault: Le projet de loi sur le commissaire à l'éthique propose des modifications à ce projet de loi-ci qui corrigeraient le problème que vous venez de signaler.
M. Ken Epp: Donc, on peut présumer que...
Me Pierre Legault: L'autre comité va se pencher là-dessus.
M. Ken Epp: Autrement dit, le projet de loi, s'il est adopté, serait immédiatement modifié par l'autre projet de loi, s'il est adopté.
Me Pierre Legault: Oui.
M. Ken Epp: D'accord.
Je voulais tout simplement vous faire intervenir dans le débat. Autrement, les contribuables se demanderaient pourquoi ils vous versent un salaire. Ils se demandent déjà pourquoi ils nous en versent un.
Le président: Attention à ce que vous dites.
Des voix: Oh, oh!
M. Ken Epp: La question suivante s'adresse à M. Wilson. Est-ce que le conseiller en éthique, qui s'occupe des questions éthiques au sein du gouvernement, devrait être responsable de la Loi sur l'enregistrement des lobbyistes? Est-ce qu'il est plus avantageux de regrouper toutes ces fonctions au sein d'un même bureau, ou de les séparer?
M. Howard Wilson: Nous avons constaté qu'il est plus avantageux de regrouper les fonctions, pour plusieurs raisons. D'abord, puisque tout est maintenant automatisé, seuls deux employés dans mon bureau s'occupent des activités de lobbying. Si on confiait cette responsabilité à un organisme indépendant, il faudrait alors embaucher des employés supplémentaires pour les tâches administratives, ainsi de suite. Toutefois, le bureau, dans son ensemble, est en mesure de faire le travail.
Ensuite, il y a le code de déontologie des lobbyistes. Je suis responsable avant tout du Code régissant la conduite des titulaires de charge publique en ce qui concerne les conflits d'intérêts et l'après-mandat, code qui s'applique aux ministres et aux hauts fonctionnaires de l'exécutif—les personnes mêmes qui vont faire l'objet d'un lobbying intense. Toutefois, quand j'ai à régler des dossiers qui portent à la fois sur les conflits d'intérêts et les lobbyistes, je trouve qu'il est utile d'avoir accès à des spécialistes qui connaissent les deux domaines.
Duff Conacher, du groupe Democracy Watch, a laissé entendre que le lobbyiste qui fait du lobbying auprès d'un ministre en particulier et qui participe en même temps à la campagne à la direction de celui-ci porte atteinte à la disposition du Code de déontologie des lobbyistes qui traite de l'influence indue. C'est lui, en fait, qui a abordé le sujet. J'ai examiné la question, et je me suis rendu compte qu'il revient non pas au lobbyiste, mais au ministre de prendre les mesures qui s'imposent. Si le ministre tient à ce que cette personne fasse partie de son équipe, il doit prendre ses responsabilités.
Je me suis rendu compte que le fait de pouvoir examiner le problème sous tous les angles constitue, en fait, un avantage. J'espère avoir quelque chose à proposer, la semaine prochaine, sur la question de l'influence indue, sur le fait que cela ne s'applique pas.
º (1635)
M. Ken Epp: Compte tenu des changements que propose le nouveau projet de loi sur le commissaire à l'éthique—il n'a pas encore de nom ou de numéro—et des changements que propose ce projet de loi-ci, ne risque-t-on pas de perdre quelque chose? J'ai l'impression qu'on est en train de séparer davantage les deux fonctions. Il y a déjà quelqu'un, en dehors de votre bureau, qui s'occupe de l'enregistrement des lobbyistes. Votre rôle, en fait, consiste à veiller à l'application du code de déontologie des lobbyistes, n'est-ce pas?
Si le Parlement approuve ces projets de loi, le bureau du conseiller en éthique se verra retirer un plus grand nombre de tâches.
M. Howard Wilson: Peut-être, mais pas nécessairement.
Le premier ministre, quand il a déposé son projet, en juin, a parlé de crééer deux postes. Il y aurait un jurisconsulte qui s'occuperait du code parlementaire, et un conseiller en éthique, dont le poste serait créé par voie législative. On a décidé, au cours de l'été, de combiner les deux postes, mais de ne pas changer les responsabilités, de sorte que le nouveau titulaire serait chargé d'assurer l'application du code du premier ministre régissant les conflits d'intérêts.
Je ne vois pas pourquoi cette personne ne s'occuperait pas du code de déontologie des lobbyistes. Je crois, en fait, que ce serait une bonne chose. Elle disposerait de l'autorité voulue, du personnel de soutien nécessaire. Je vais en faire la suggestion au comité, la semaine prochaine.
M. Ken Epp: Ma dernière question est d'ordre numérique. Pouvez-vous dire au comité combien de fois vous avez eu à enquêter sur un conflit d'intérêts ou une infraction au Code de déontologie des lobbyistes?
M. Howard Wilson: J'ai reçu plusieurs plaintes, et je n'ai encore jamais eu de motifs raisonnables de croire qu'une violation avait été commise. Je dois arriver à cette conclusion avant de pouvoir exercer tous les pouvoirs qui me sont conférés. Il y a des dossiers qui font toujours l'objet d'une enquête.
En fait, cela ne m'étonne pas. Le Code de déontologie des lobbyistes a été élaboré en étroite collaboration avec plusieurs personnes qui sont spécialisées dans d'autres domaines. Les règles établies sont des règles que respecterait toute personne qui dit agir de façon professionnelle.
M. Ken Epp: Et, bien entendu, ce code est relativement nouveau, n'est-ce pas?
M. Howard Wilson: Oui, il date de 1997.
M. Ken Epp: Avez-vous confié des dossiers à la GRC?
M. Howard Wilson: J'ai confié un dossier à la GRC. Il s'agissait d'un cas de non-enregistrement. C'est ce qui a permis de mettre à jour le problème que posait le libellé de la loi.
Quand elle a comparu devant le comité, en 2001, la registraire a déclaré que, lorsque les journaux font état d'une personne qui fait du lobbying alors qu'elle n'est pas enregistrée, ou lorsque quelqu'un communique avec notre bureau, elle ne confie pas automatiquement le dossier à la GRC. Elle communique plutôt avec les personnes concernées et discute avec elles. De deux choses l'une: soit les deux parties s'entendent pour dire que la personne visée ne fait pas du lobbying, soit les deux parties s'entendent pour dire que la personne visée fait du lobbying et qu'elle doit donc s'enregistrer. Nous mettons l'accent sur la transparence. Nous servons l'intérêt public en diffusant cette information sur notre site.
M. Ken Epp: Est-ce que des sanctions sont prévues dans ces cas-là? Par exemple, supposons que je suis au volant de ma voiture, que la GRC m'arrête et qu'elle constate que je n'ai pas de permis de conduire. Elle me dit d'en obtenir un, ce que je fais. Est-ce que le dossier est clos? Non. Habituellement, il faut payer une amende. Donc, qu'arrive-t-il si une personne fait du lobbying et qu'elle n'est pas enregistrée? Est-ce qu'elle fait tout simplement s'enregistrer, et ensuite le dossier est clos?
M. Howard Wilson: Soyons clairs. Compte tenu du libellé actuel de la loi, l'affaire ne sera jamais portée devant un tribunal. Aucun procureur ne voudra s'occuper du dossier. Voilà pourquoi on met l'accent sur le fait qu'une personne doit s'enregistrer. Ce n'est pas la même chose que le fait d'avoir un permis de conduire. La loi met l'accent sur la transparence. Il n'est pas nécessaire d'avoir un permis pour faire du lobbying auprès du gouvernement. Toutefois, si vous faites du lobbying, il est dans l'intérêt public d'avoir un système d'enregistrement qui explique ce qu'est le lobbying. Voilà pourquoi nous avons dit qu'il est dans l'intérêt du public et du Parlement d'avoir un système d'enregistrement.
Si le comité et le Parlement appuient ce changement, nous n'aurons aucune difficulté à faire appliquer la loi. Nous indiquerons tout simplement à la personne concernée qu'elle est un lobbyiste salarié et qu'elle a établi des contacts, et que si elle refuse de s'enregistrer, les tribunaux seront saisis de l'affaire.
Je tiens à ajouter—si je puis me permettre—qu'on connaît très bien, à Ottawa, à Montréal et à Toronto, les obligations qu'impose la loi. Ce n'est pas la même chose ailleurs au Canada, où les dispositions de la Loi sur l'enregistrement des lobbyistes ne sont pas aussi bien connues. Donc, si on estime que la personne peut s'enregistrer rapidement, sans problème, l'intérêt du public sera servi.
º (1640)
Me Pierre Legault: Mais la loi prévoit des sanctions si une personne refuse de s'enregistrer.
Le président: Merci beaucoup.
Monsieur Bagnell.
M. Larry Bagnell (Yukon, Lib.): Merci. Je trouve cela effectivement intéressant. Je me demande pourquoi nous avons une loi si elle ne pourra jamais être appliquée.
Fondamentalement, je suis d'accord avec la plupart des modifications, sauf que je ne suis pas convaincu au sujet de celle qui concerne l'appel téléphonique visant à demander des renseignements. Je pense que tout le monde dans cette salle peut penser à quelqu'un qui pourrait les appeler et qui aurait un effet du seul fait d'avoir appelé, sans qu'il soit nécessaire d'ajouter un seul mot sur l'organisation ou son influence.
Je dois dire que je suis d'accord avec mon collègue, M. Bryden, au sujet de la gestion intermédiaire. Ayant travaillé dans la fonction publique, je sais que les cadres supérieurs n'écrivent pas les lois, ne rencontrent pas les groupes d'intérêts, ne comparent pas les lois dans le monde. Les cadre supérieurs gèrent les cadres intermédiaires qui, eux, traitent vraiment avec les gens qui s'intéressent à une loi.
Ma question vise simplement à obtenir une clarification. Au dernier paragraphe de la page 2 de votre présentation, on peut lire:
Le comité était alors d'avis que l'exemption actuelle qui s'applique lorsqu'un titulaire de charge publique amorce le contact devrait être éliminée. Le projet de loi C-15 comprend ce changement. L'acte de communication portant sur les questions particulières dont je viens de vous parler consisterait en du lobbying. |
Je voudrais être sûr de bien comprendre. Alors, si j'appelle un ami—et, comme vous dite, le reste du pays ignore l'existence de cette loi—et que je lui parle d'une subvention, d'un programme ou d'un règlement, cette personne devra s'enregistrer même si elle n'était pas au courant. Est-ce bien ce qu'on veut dire, si l'exemption est éliminée?
M. Howard Wilson: Le but de cette exemption était d'apaiser un certain nombre d'associations qui avaient dit que le seul temps où elles faisaient du lobbying auprès du gouvernement du Canada, c'était lorsqu'un titulaire de charge publique leur écrivait pour demander leur avis sur quelque chose que le gouvernement avait l'intention de faire. Leur point de vue, c'est que c'est là la seule occasion où elles font des représentations, le seul et unique cas.
Certains d'entre nous ont eu certains doutes. J'ai passé la plus grande partie de ma carrière dans la fonction publique à traiter de questions de politique commerciale et, à l'occasion, j'écrivais à des associations, souvent sur la côte Ouest, sur la côte Est ou ailleurs, pour leur demander ce qu'elles pensaient de telle ou telle question. Oui, je recevais une réponse, et une semaine plus tard, je recevais autre chose, et un mois plus tard, je recevais d'autres informations et alors, on a eu des craintes que cela pourrait constituer une faille dans le système. Et je pense que le problème que nous avons eu, comme je l'ai dit plus tôt, en 1995-1996, c'est que nous ne pouvions pas donner de réponse au comité qui craignait que l'on impose un fardeau administratif à certaines associations de plus petite taille.
Lorsque le comité est arrivé à cette conclusion..., car ce n'était pas notre idée, c'était la recommandation de votre comité, avec laquelle nous sommes tombés d'accord. Nous pouvons maintenant dire, avec une certitude totale, que nous pouvons le faire d'une manière qui ne constituera pas un fardeau administratif pour une petite association, peu importe où elle se trouve.
Alors, nous avons éliminé une faille et, oui, cela aura pour effet d'augmenter le nombre d'enregistrements. Cela répondra plus clairement aux objectifs de la loi, mais ne créera pas de fardeau administratif.
º (1645)
M. Larry Bagnell: Je peux comprendre cela et je vois votre point. Et c'est un bon point. On pourrait utiliser la faille pour faire du lobbying en se reportant indéfiniment à la lettre initiale.
Mais j'ai du mal à voir comment nous allons appliquer la loi quand le gouvernement, comme il le fait souvent, envoie 500 lettres à toutes les petites entreprises leur demandant si elles ont des points de vue à exprimer sur telle nouvelle taxe ou telle nouvelle exemption qu'il propose et, qu'ensuite, toutes ne réalisent que si elles répondent à cette lettre, elles doivent s'enregistrer en vertu de la Loi sur l'enregistrement des lobbyistes.
M. Howard Wilson: Il se peut très bien qu'elles n'arrivent jamais au seuil de 20 p. 100.
M. Larry Bagnell: Le nouveau seuil, c'est 20 p. 100 du salaire d'une personne.
M. Howard Wilson: Si la seule chose que les entreprises font, c'est répondre à une lettre qui vient d'un ministère, il est très peu probable qu'elles atteignent ce seuil de 20 p.100.
M. Larry Bagnell: D'après ce que la petite entreprise nous dit, elle reçoit beaucoup plus qu'une lettre de la part des ministères publics. Mais je laisser tomber.
Le président: Je suis heureux que vous le fassiez.
Madame Bujold.
[Français]
Mme Jocelyne Girard-Bujold: Monsieur Wilson, pour améliorer l'éthique et la transparence, ne devrait-il pas y avoir, dans le projet de loi qui est devant nous, le C-15, un article qui obligerait les lobbyistes à divulguer les montants qu'ils dépensent pour exercer leur rôle? On sait en effet qu'il y a toutes sortes de façons de faire du lobbying, à des degrés d'intensité différents. Ne devrait-il pas également y avoir un article selon lequel le lobbyiste et la firme qu'il représente devraient divulguer les contributions financières qu'ils versent à un parti politique ou à un individu?
[Traduction]
M. Howard Wilson: Cela fait maintenant deux fois que le comité examine la question des dépenses. En 1995-1996 et en 2001. En 2001, le comité nous a demandé de réexaminer cette question, mais n'a pas formulé de recommandation expresse à cet égard.
Notre point de vue, c'est qu'il existe certaines difficultés administratives très importantes lorsqu'il s'agit de définir qu'est-ce qui constitue une dépense. Nous avons examiné ce qui se fait aux États-Unis; on y exige une déclaration en termes de ban, ce qui n'est pas très informatif. Il y aurait de sérieuses difficultés du point de vue de l'application et probablement qu'on ne parviendrait pas à en extraire beaucoup plus d'information. Les entreprises de plus grande taille dépenseront plus d'argent. Vous avez probablement une assez bonne idée de la quantité d'argent dépensée par ceux qui s'opposent au projet de loi sur la cruauté envers les animaux.
Nous en sommes venus à la conclusion que cela n'ajouterait pas beaucoup à la connaissance publique.
[Français]
Mme Jocelyne Girard-Bujold: Quelle est votre réponse à ma deuxième question au sujet des partis politiques, à savoir le dévoilement des contributions qui sont faites aux partis politiques ou aux individus?
[Traduction]
M. Howard Wilson: Je pense que l'on peut résoudre plus directement la question des contributions politiques en nous assurant qu'il n'y a pas de faille dans le système actuel.
Le Directeur général des élections a rédigé un rapport dans lequel il affirme qu'il devrait y avoir certaines règles régissant les courses à la direction des partis politiques. Il s'est dit préoccupé par les associations de comté pour différentes questions. Je ne suis pas au courant des détails, mais le gouvernement a annoncé qu'il ferait effectivement des propositions et le premier ministre a dit que cette législation serait présentée la semaine prochaine.
Une des choses que j'ai remarquées, cependant, c'est qu'une fois que ces renseignements tombent entre les mains d'Élections Canada, les journalistes et, je suppose, votre propre personnel de recherche, n'ont aucune difficulté à établir le lien entre les deux.
[Français]
Mme Jocelyne Girard-Bujold: Premièrement, cela simplifierait le travail de bien du monde.
Deuxièmement, vous avez dit tout à l'heure que tout individu peut le demander. Tout parlementaire peut demander au conseiller en éthique de faire enquête sur un ministre ou quelque chose. Mais, vous dites aussi que vous pouvez interrompre votre enquête selon les circonstances.
Quelles sont ces circonstances qui peuvent vous amener à interrompre votre enquête? Comme vous l'avez dit, il y a des fois où n'importe quel parlementaire peut vous demander de faire une enquête sur tel ou tel ministre. Vous pouvez accepter la demande et la mettre à exécution, mais à un moment donné, dans certaines circonstances, vous pouvez l'arrêter. J'aimerais savoir quelles circonstances vous permettent d'arrêter votre enquête.
º (1650)
[Traduction]
M. Howard Wilson: Je crois qu'il y a ici une double confusion.
La question a été soulevée en ce qui a trait au code régissant les lobbyistes: N'y a-t-il pas de pénalités pour les infractions au code? En d'autres mots, si j'ai des raisons suffisantes de croire que l'une des règles du code a été violée, je suis investi des pouvoirs d'un juge d'une cour supérieure d'archives, il y aura citation à comparaître, il y aura une enquête, il y aura un rapport et ce rapport sera déposé au Parlement. Mais en 1995-1996, le comité a décidé qu'il n'était pas nécessaire d'avoir une sanction plus importante; en d'autres termes, un rapport déposé au Parlement disant que quelqu'un a manqué à l'éthique dans ses activités de lobbyiste constitue une pénalité suffisante.
Le comité a entendu certaines préoccupations à ce sujet et le gouvernement a répondu en disant que si, au cours d'une enquête réalisée en vertu du code de déontologie des lobbyistes, on découvrait des indices qui donnent à penser qu'un acte criminel pourrait avoir été commis, le conseiller en éthique doit alors remettre immédiatement l'information aux autorités policières et mettre fin à son enquête, parce qu'il faudra alors procéder à une enquête criminelle.
L'autre question qui a été soulevée en juin, c'est lorsque le premier ministre a dit que si un député avait une plainte de conflit d'intérêts concernant un ministre ou un secrétaire d'État, il pouvait m'adresser sa plainte et j'aurais l'autorité pour faire enquête. Il s'agit d'une question différente qui n'a rien à voir avec ce que nous faisons ici.
[Français]
Mme Jocelyne Girard-Bujold: D'accord, merci.
[Traduction]
Le président: Avez-vous terminé? Vous avez encore du temps si vous le voulez.
[Français]
Mme Jocelyne Girard-Bujold: Si j'avais encore du temps, ce serait parfait.
Monsieur Wilson, aujourd'hui, tout a l'air d'être en ordre, selon vous, et je trouve ça particulier parce qu'on entend, dans le public, beaucoup de plaintes au sujet de tout ce qui touche au lobbyisme et à votre rôle également, en ce qui concerne l'éthique ou la transparence qu'on n'a pas présentement et que la population est en droit d'avoir.
Vous dites dans votre exposé--je l'ai lu en diagonale, car je suis arrivée un peu trop tard pour pouvoir vous entendre le lire--, qu'il y a bien des bonnes choses, que les problèmes sont minimes, mais que cette loi sur le lobbying est toujours ouverte, que cela ne réglera pas tout, mais que cela fera évoluer le dossier du lobbying. C'est, grosso modo, ce que j'ai lu. Mais je pense qu'on ne parle pas de la même chose; je pense que la population nous dit qu'il y a un manque d'éthique et de transparence dans tout ce qui touche à la politique.
On dit toujours que les politiciens ont une cote de crédibilité moins élevée qu'un vendeur d'autos. Vous, vous avez un rôle extrêmement important à jouer pour rehausser cette cote-là, et je trouve que ce projet de loi sur les lobbyistes ne va pas assez loin pour permettre aux gens de dire qu'enfin, il va y avoir quelque chose de positif. Vous dites le contraire. J'aimerais donc que vous me convainquiez que votre point de vue est meilleur que le mien et que celui de la population en général.
º (1655)
[Traduction]
Le président: Et une courte réponse.
M. Howard Wilson: Mes responsabilités sont assez étendues. Nous ne parlons ici que de la question du lobbyisme.
J'aimerais faire une déclaration sur la façon dont le climat en ce qui concerne le lobbyisme a changé à Ottawa et dans l'opinion publique dans ce pays. Vous vous rappelez sans doute de la raison qui est à l'origine de la Loi sur l'enregistrement des lobbyistes: on avait porté des accusations dans les années 80 selon lesquelles certains amis du premier ministre de l'époque pouvaient obtenir une rencontre avec n'importe quel ministre au pied levé. Ce fut une question très controversée qui a culminé par l'adoption en 1989 de la première Loi sur l'enregistrement des lobbyistes. Et il ne s'agissait pas d'un très bon texte de loi. Il était très difficile à comprendre et ne donnait pas beaucoup d'information.
Avant les élections de 1993, il y a eu une entente entre tous les partis au sujet de changements très importants. Ces changements ont été repris par le comité de l'industrie. Ensuite, un comité spécial a été créé, sous la direction de Paul Zed, qui a fait beaucoup de propositions très intéressantes. Le comité est allé au-delà de ce que le gouvernement avait en tête. Mais c'était très controversé à l'époque. Nous avons apporté les changements et des choses sont alors devenues accessibles. La transparence, qui a été rendue possible grâce à Internet, a changé le débat, de sorte que cette démarche, qui a eu lieu en 2001, a eu pour effet, essentiellement, de retirer cette question de l'actualité. Les gens étaient rassurés du fait que l'information était effectivement disponible. Nous ne recevons que très peu d'appels, comme je l'ai dit, et pourtant, on trouve tous les jours des articles au sujet de personnes dont les services ont été retenus pour faire des représentations sur une question ou sur une autre auprès de tel ou tel ministère. Vous pouvez les lire dans le National Post, le Globe and Mail ou La Presse. Tout est là.
Il me semble que la confiance du public a augmenté grâce à l'information. En d'autres mots, la crainte que quelque chose puisse se dérouler derrière des portes closes a été dissipée. Du moins, si on peut dire, ces débats n'alimentent plus les médias qui rendent effectivement compte de ce qui s'est passé. Et je pense qu'il s'agit là d'un changement très important et très positif.
Le président: Merci beaucoup.
Monsieur McTeague.
M. Dan McTeague (Pickering—Ajax—Uxbridge, Lib.): Monsieur le président, merci.
Évidemment, merci monsieur Wilson.
[Français]
Monsieur Legault, merci d'être venu ici aujourd'hui. J'ai trois questions. Je vais aller vite parce que je sais qu'il y a d'autres députés qui veulent encore poser des questions.
[Traduction]
Monsieur Wilson, je suis intéressé de connaître votre opinion sur le conflit potentiel qui pourrait survenir dans une situation où vous déterminez que quelqu'un a enfreint le projet de loi que nous étudions alors que le directeur de l'enregistrement des lobbyistes pense le contraire, ou vice versa. Pouvez-vous entrevoir ce genre de situation, bien qu'il s'agisse d'une question hypothétique? Le projet de loi fait en sorte qu'il est possible d'obtenir l'autorisation dans un cas et dans un autre, qu'il y ait objection de votre part ou de la part du directeur.
M. Howard Wilson: Je ne suis pas sûr de comprendre.
M. Dan McTeague: Si quelqu'un s'est conformé et s'est enregistré en vertu de ce projet de loi, et que le directeur a de toute évidence accepté l'idée qu'en fait c'est correct, mais que vous, dans votre rôle, déterminez qu'en fait, ce n'est pas correct, qu'arrive-t-il?
M. Howard Wilson: Eh bien, ce genre d'opposition n'existe pas. La décision revient au directeur, qui doit en répondre devant moi. Mes responsabilités, outre l'administration générale du bureau, sont très particulières en ce qui a trait au Code de déontologie des lobbyistes, dont on peut accuser un lobbyiste d'avoir enfreint une des règles.
Par exemple, une des règles dit que les lobbyistes ne doivent pas divulguer de renseignements confidentiels, à moins d'avoir obtenu le consentement éclairé de leur client, de leur employeur ou de leur organisation, ou que la loi ne l'exige. C'est le genre de principe que vous retrouvez dans des codes à valeur juridique, et ainsi de suite. S'il y a allégation d'infraction et qu'il y a des indications que c'est effectivement le cas, par le fait de cette décision, je suis investi de ces pouvoirs et une enquête est entreprise, etc.
Alors, ce n'est pas une question de savoir si la personne est ou non lobbyiste. C'est une donnée. La question, c'est de savoir si la personne a respecté les normes établies dans le Code de déontologie des lobbyistes.
» (1700)
M. Dan McTeague: J'avais prévu, bien sûr, ce que vous avez laissé entendre en réponse à d'autres questions concernant un projet de loi qui serait peut-être déposé la semaine prochaine, par le biais de notre travail au sein du comité de la procédure et des affaires de la Chambre.
Ma deuxième question a déjà été soulevée dans le passé, et porte sur la différence entre lobbyiste rémunéré et lobbyiste non rémunéré. Est-ce que vous avez un problème avec les personnes qui font des représentations et qui, sans avoir d'intérêts pécuniaires dans cette activité, l'exercent néanmoins? Par exemple, on peut penser à quelqu'un qui fait du lobbying au nom de la légion, quelqu'un qui fait du lobbying à titre d'ancien employé d'une entreprise pour qui il n'y a pas vraiment d'intérêt financier ou autre.
M. Howard Wilson: Je pense que la distinction est absolument essentielle. Si vous enlevez le critère de la rémunération, alors il n'y a plus de fondement pour distinguer le citoyen canadien qui fait des représentations tout simplement en son propre nom et je pense que cela serait retiré du système... ce serait impossible à gérer.
Nous avons une certaine crainte dans le cas des personnes, des organismes très en vue qui disent qu'ils ne sont pas payés. Nous les avons questionnés à ce sujet et ils nous ont fourni des preuves qu'effectivement ces gens n'étaient pas payés, alors nous avons laissé tomber. Nous avons fait des recherches sur ces points, mais si on éliminait ce critère, cela aurait l'effet potentiel de faire entrer dans le système tous les Canadiens adultes.
M. Dan McTeague: C'est une préoccupation que j'ai exprimée au cours de la dernière réunion devant certains témoins.
Pour aider le comité, pour clarifier un peu plus les choses, disons que je suis un employé à la retraite d'une entreprise particulière, d'une entreprise oeuvrant dans le domaine de l'énergie, que je reçoive une pension de cette entreprise et que le point que je veux faire valoir porte spécifiquement sur un projet de loi qui touche ce secteur d'activité particulier. Est-ce que cette situation ne produirait pas, dans votre esprit, un doute quant à un conflit potentiel ou réel?
M. Howard Wilson: Non, je ne le pense pas. Je pense que notre expérience démontre que la plupart des entreprises sont assez satisfaites des obligations prévues par ce projet de loi. Du point de vue administratif, les choses sont simples. Il y a un certain nombre de situations où, en fait, c'est le contraire qui arrive, lorsque quelqu'un a été engagé pour fournir des conseils et que, dans son contrat, il est clairement stipulé qu'il n'aura pas à se livrer à des activités de lobbying, et que cette personne s'enregistre quand même.
Pourquoi s'enregistre-elle? Parce qu'elle craint que si elle se retrouve dans une réception et qu'elle parle de son contrat avec un titulaire d'une charge publique, elle pourrait être perçue comme ayant enfreint la loi. Alors, pour une simple question de prudence, elle s'enregistre.
Nous avons reçu une bonne collaboration. De temps en temps, vous trouverez une personne qui, pour une question de principe, ne veut pas être engagée. Quelques lobbyistes-conseils nous disent qu'ils ont des clients, souvent des clients étrangers, qui préfèrent ne pas être enregistrés. Je pense que vous entendrez ce commentaire demain de la part de l'Institut de relations gouvernementales du Canada. Ces gens sont en faveur de dispositions très sévères en matière d'application, parce qu'ils savent que de cette manière, ils peuvent être certains que des personnes qui pourraient être tentées de ne pas s'enregistrer, ne prendront pas ce risque.
M. Dan McTeague: Merci, monsieur le président.
Le président: Monsieur Masse, aviez-vous d'autres questions?
M. Brian Masse: Merci, monsieur le président.
Combien en coûte-t-il à l'heure actuelle pour faire fonctionner le système d'enregistrement, le personnel, la structure et les services?
M. Howard Wilson: Nous avons deux employés à plein temps. Si vous vous enregistrez par voie électronique, nous n'exigeons pas de frais, mais nous exigeons 150 $ si vous le faites par copie papier. Cette mesure a été adoptée pour inciter les gens à s'enregistrer par voie électronique. Environ 99 p. 100 des gens utilisent cette méthode. Monsieur le président, je vous donnerai un chiffre précis sur cette question. Mais ce n'est pas très élevé.
M. Brian Masse: Pourrait-on songer maintenant à imposer des frais pour une inscription par voie électronique? Étant donné que 99 p. 100 des enregistrements se font de cette manière, il est évident que c'est là la plus grande partie du travail à faire et la raison pour laquelle vous avez besoin de deux employés. Prévoit-on changer cela?
» (1705)
M. Howard Wilson: Nous ne le croyons pas. Nous voulons continuer d'encourager l'enregistrement électronique plutôt que par télécopieur. Cela change le type d'employés dont nous avons besoin. Si l'on reçoit des documents papier, et beaucoup de bureaux trouvent toujours que la télécopie est un moyen facile de s'enregistrer, il faut entrer les données nous-mêmes. Je devrais donc affecter une personne à la saisie des données. Je n'ai pas besoin de cela. J'ai un employé, Gaëtan Champagne, qui travaille avec moi et qui a pour mandat de vérifier les données envoyées. C'est une responsabilité très différente. Il travaille en ligne avec la personne et vérifie que son enregistrement est complet et exact. Dès qu'il autorise l'enregistrement et appuie sur un certain bouton, celui-ci devient réalité. Il me faudrait embaucher du nouveau personnel et je ne suis pas prêt à prendre ce risque.
M. Brian Masse: Il y a une chose qui m'inquiète en tant que contribuable. Cela ne me semble pas être une très bonne affaire, en ce sens que les lobbyistes prennent le temps du personnel que je paie, ils ont une influence sur les politiques publiques et cela se répercute sur mes impôts. En même temps, ils pourraient laisser tomber certaines activités, comme des soupers ou des événements, qui leur occasionnent des frais aussi, puis au bout de la ligne, je finis par payer pour que l'ensemble de l'infrastructure ait certains comptes à rendre pour leurs actes. Nous avons déjà parlé de systèmes utilisateurs-payeurs. Pourquoi imposer ce fardeau aux contribuables ordinaires quand en fait, ce ne sont que leurs fonds qui sont visés? Pourquoi ne pas imposer ces frais aux utilisateurs du système?
M. Howard Wilson: Ce que je dis, c'est que pour parer à ces coûts potentiels, je devrais embaucher au moins un autre employé, ce qui n'est pas nécessaire. Le tout va coûter entre 40 000 $ et 50 000 $ en coûts directs, en plus de la rémunération du personnel de soutien. Je pense que les chiffres que je vais vous donner vont vous montrer que c'est une organisation très rentable. Je pense que tout ce qui peut empêcher les gens de nous envoyer des télécopies, c'est...
Le président: Je vois où vous voulez en venir, monsieur Masse, mais vous vous apprêtez à nous parler du budget principal et des principaux coûts des groupes d'intérêt plutôt que du projet de loi lui-même. Peut-être pourriez-vous faire le lien avec le projet de loi un peu plus pour m'aider.
M. Brian Masse: Cela change la question, monsieur le président, mais c'est d'accord.
L'un des intervenants affirmait qu'aucun procureur n'allait accepter de défendre notre cause. À quoi sert ce projet de loi s'il ne nous permet pas, en bout de ligne, de tenir quiconque responsable? Vous avez indiqué qu'il y avait, auparavant, un examen et un rapport au Parlement et qu'il n'y aurait aucune sanction supplémentaire. Je suppose que les contribuables vont absorber tous les coûts de cet examen. Avez-vous songé à aller plus loin? Que pensez-vous de la responsabilité, en bout de ligne? Je pense que c'est ce que les gens veulent plutôt que d'avoir honte.
M. Howard Wilson: Pierre aura quelque chose à ajouter là-dessus. Il n'y a aucune sanction autre qu'un rapport déposé sur le code des lobbyistes. Nous nous exposons toutefois à des sanctions considérables si nous ne nous enregistrons pas ou si nous faisons consciemment une fausse déclaration ou une déclaration trompeuse. Si l'on ne s'enregistre pas, l'amende imposée peut aller jusqu'à 25 000 $. Pour des déclarations fausses ou trompeuses, s'il y a déclaration de culpabilité par procédure sommaire, la peine peut aller jusqu'à 25 000 $ ou un emprisonnement pour une période maximale de six mois ou les deux. Par voie de mise en accusation, l'accusé peut se voir imposer une amende maximale de 100 000 $ ou être condamné à un emprisonnement pour une période maximale de deux ans. Ce sont des sanctions très importantes.
Ce qui nous pose problème, c'est qu'il faudrait savoir exactement ce qu'une personne a en tête pour pouvoir prouver hors de tout doute raisonnable que l'enregistrement a été effectué afin de tenter d'influencer, ce qui est pratiquement impossible, comme les procureurs du ministère de la Justice nous l'ont bien dit. La GRC a également quelques arguments très vrais à nous donner à ce propos.
Si l'on supprime «afin de tenter d'influencer», on se trouve à dire que le lobbying est une forme de communication relative à l'un ou l'autre des éléments énumérés, ce qui fait qu'il faut toujours prouver certaines choses. Il faut présenter au tribunal des preuves «hors de tout doute raisonnable». Il faut prouver qu'on est payé et que les communications portent sur l'un des éléments énumérés. Or, c'est en fait très facile pour la GRC d'obtenir des preuves pour nous.
Je ne m'attends donc pas à ce que nous soyons souvent appelés à comparaître en cour, parce que si quelqu'un est vraiment déterminé à nous dire non, nous n'avons pas grand-chose à faire, et ce fait reconnu, ce sera évidemment beaucoup plus facile pour eux de s'enregistrer.
» (1710)
M. Brian Masse: Merci, monsieur le président, et merci à vous, monsieur Wilson.
Le président: Monsieur Volpe.
M. Joseph Volpe: Je vous remercie beaucoup, monsieur le président.
Monsieur Wilson, j'aimerais réagir à vos réflexions sur—j'utilise le terme de façon non péjorative—l'aspect «porte tournante» de certaines sociétés d'État ou de certains organismes. Laissez-moi m'expliquer, parce que j'aimerais savoir ce que vous en pensez et que vous établissiez le lien avec ce projet de loi, tant en ce qui concerne l'enregistrement que les éventuelles interactions avec d'autres projets de loi que nous attendons sur les conflits d'intérêts.
Certains organismes s'apprêtent à recruter des candidats spécialisés dans le domaine des compétences. Pour n'en mentionner qu'un, sans aucun préjudice, le CRTC en est un exemple, et vous avez mentionné la CISR. La nouvelle tendance semble être d'embaucher des personnes qui travaillent déjà dans le domaine ou qui ont des connaissances juridiques quant aux applications dans le domaine. Ainsi, ceux qu'on pourrait appeler des décideurs au sein d'une société ou d'une industrie se font offrir des postes de décideurs dans une société d'État, puis retournent généralement dans cette même industrie ou dans cette même société à la fin de leur mandat.
Ce projet de loi, tel qu'il est proposé et que nous l'examinons, prévoit-il que ces personnes soient tenues, d'une manière ou d'une autre, de se conformer à cette loi ou, je suppose, à la prochaine? Y a-t-il possibilité de conflit, selon vous?
M. Howard Wilson: À mon avis, ce n'est vraiment pas une question qui se pose dans le contexte de la Loi sur l'enregistrement des lobbyistes en tant que tel, mais elle n'en demeure pas moins très importante, et mon bureau y consacre beaucoup de temps. Il s'agit surtout du Code régissant les conflits d'intérêts et l'après-mandat s'appliquant à la fonction publique et plus particulièrement à tous les fonctionnaires nommés à temps plein par le gouverneur en conseil. Ce code touche tout le personnel du CRTC et tous ceux qui siègent à la Commission de l'immigration et du statut de réfugié.
Je pense que l'une des grandes politiques publiques traditionnelles à laquelle nous serons toujours confrontés reste la nécessité de veiller à la participation d'experts aux tribunaux spécialisés. Il est très commun, lorsque le gouvernement recrute pour la CISR, que beaucoup de candidats ayant de l'expérience en matière d'immigration aient déjà représenté des immigrants dans des audiences devant la CISR ou, s'il recrute pour le CRTC, que bon nombre de candidats aient participé à des dossiers de télécommunications et de radiodiffusion. Ces deux organismes ont dû mettre en place des mécanismes internes pour veiller à ce que des conflits avec d'anciennes associations ne placent pas des fonctionnaires dans une position biaisée lorsqu'ils examinent des enjeux publics.
Les dispositions de ce code sur l'après-mandat dictent les limites de ce qu'une personne peut faire dans l'année après avoir quitté son poste. En aucun cas ces personnes ne peuvent représenter un client devant le CRTC, par exemple, ou la Commission de l'immigration et du statut de réfugié au cours de l'année qui suit.
De plus, ces personnes ne peuvent accepter d'emploi, de contrat ou d'affectation de toute sorte d'un organisme avec lequel elles entretenaient d'importants rapports directs durant l'année précédant la fin de leur mandat. Dans le cas du CRTC, cela signifie qu'il faut vérifier de quels dossiers la personne a été saisie au cours de la dernière année. En effet, les anciens employés ne peuvent accepter de contrat d'aucun de ces organismes, il existe donc une protection de l'intérêt public. Il faut toutefois que des experts siègent à ces conseils, et les gens, lorsqu'ils entrent au service du gouvernement, ne veulent pas se voir complètement interdire de tirer parti des connaissances qu'ils ont acquises et de les appliquer dans leur futur milieu de travail.
C'est toujours une question d'équilibre, mais nous y consacrons énormément de temps. Je crois que l'intérêt public est plutôt bien protégé à cet égard.
» (1715)
M. Joseph Volpe: Si je vous comprends bien, toutefois, s'il y avait déséquilibre, on ne s'en occuperait que si un citoyen déposait une plainte. Dans une telle éventualité, il n'existe aucun véritable mécanisme de surveillance indépendant pour traiter la plainte d'un citoyen ou d'une partie qui s'est sentie lésée.
M. Howard Wilson: Je n'en suis pas certain. Lorsque ces personnes sont nommées au CRTC, par exemple, elles doivent déclarer à mon bureau tous leurs biens, tous leurs intérêts et toutes les activités auxquelles elles ont participé. C'est confidentiel. Puis, il faut prendre des mesures pour que ces personnes n'aient plus de contrôle direct sur ces biens. Selon la réglementation du CRTC, je sais que les employés ne peuvent avoir d'intérêts dans des entreprises de télécommunications. En d'autres termes, même si nous interdisons à ces personnes d'avoir un contrôle direct sur des valeurs en bourse, exception faire des fonds fiduciaires sans droit de regard, la réglementation va plus loin et dicte que personne ne siégeant au CRTC ne peut avoir d'intérêts financiers dans une société de télécommunications. Pour une raison obscure, la réglementation n'impose pas les mêmes restrictions quant aux intérêts en radiodiffusion.
Le Parlement a tenté, en établissant ces organismes, de protéger activement plutôt que fortuitement l'intérêt public. En d'autres termes, ces personnes doivent faire des démarches précises, mais ne peuvent faire certaines choses.
M. Joseph Volpe: Je tiens à vous remercier pour la confiance que vous nous manifestez en nous répondant, monsieur Wilson.
Je suis content que vous jugiez ces protections adéquates, même si le doute persiste dans mon esprit. Je veux vous remercier pour votre réponse.
Le président: Merci, monsieur Volpe.
Madame Bujold, avez-vous d'autres questions? Rien? D'accord.
Monsieur Bryden, vous avez une question, je crois.
M. John Bryden: Merci, monsieur le président.
Dans ma circonscription, il y a un petit contracteur de la Défense qui s'est plaint amèrement à moi d'avoir perdu un contrat important pour lequel il croyait bien être dans la course, mais qui a été donné à une autre société par l'entremise d'un lobbyiste anciennement titulaire d'une charge publique. Malheureusement, je n'ai rien pu y faire, parce que je n'avais aucun moyen de savoir qui cet ancien titulaire de charge publique avait contacté pour conseiller au contracteur de ma circonscription d'exercer des pressions sur cette même personne.
À tout le moins, si je dois y aller progressivement, ne serait-il pas juste et dans l'intérêt du public que les bureaucrates sur qui les anciens titulaires de charge publique exercent des pressions soient tenus de nommer ces anciens titulaires et de donner leur nom aux personnes qui s'occupent de l'enregistrement des lobbyistes? Ne serait-ce pas juste?
M. Howard Wilson: Laissez-moi vous décrire le fonctionnement actuel, cela pourrait être utile. Je crois que vous avez reçu des témoins la semaine dernière, qui se sont exprimés sur les titulaires de charge publique à la Défense nationale qui quittaient leur poste, puis qui étaient immédiatement embauchés par un contracteur de la Défense.
Je siège actuellement à un comité, auquel siègent également le chef d'état-major de la Défense et la sous-ministre de la Défense nationale, et qui examine le cas de chaque employé quittant le service, qu'il s'agisse d'un colonel ou d'un plus haut gradé, de n'importe quel employé civil du ministère, d'un directeur général ou d'un autre cadre supérieur. Ce comité ne se réunit pas vraiment. Nous faisons notre travail sur papier. Le comité applique les dispositions du Code régissant les conflits d'intérêts et l'après-mandat s'appliquant à la fonction publique. Il ne fait aucune exception, ce qui fait qu'il est interdit à tout ancien employé, dans l'année qui suit la cessation de ses fonctions, d'accepter un emploi dans une société avec laquelle il a eu des rapports officiels importants au cours de l'année ayant précédé la fin de son mandat. La deuxième disposition du Code prescrit qu'on ne peut exercer des pressions sur quiconque à la Défense nationale ou sur les Forces pendant une période d'un an.
» (1720)
M. John Bryden: Monsieur Wilson, c'est tellement insuffisant, et il ne s'agit pas seulement de la Défense. Ces gens partent et continuent d'exister pendant de nombreuses années. C'est un problème de transparence qui mine vraiment la confiance des gens qui font des affaires avec le gouvernement et qui constatent la présence dans leur milieu d'anciens titulaires de charge publique, qu'il s'agisse de bureaucrates ou de politiciens. Nous savons que lorsque ces personnes forment des groupes ou des cabinets de lobbying après coup, c'est parce qu'elles ont des avantages et des contacts que les gens et les lobbyistes ordinaires n'ont pas.
Tout ce que je veux dire, c'est que je ne nie pas leur droit de gagner leur vie à titre de lobbyistes, mais bon sang, mon pauvre contracteur de la Défense... Et cela ne s'applique pas qu'à la Défense, ce problème existe dans bien d'autres domaines. À tout le moins, il est clair que nous pourrions exiger que les gens avec qui ces personnes communiquent, qui les connaissent, admettent avoir été contactées et que ces personnes sont des lobbyistes, puis qu'elles en donnent le nom. Je ne comprends pas pourquoi on ne peut pas le faire.
M. Howard Wilson: Je crois que vous rejetez trop rapidement les changements apportés et la façon dont ils sont administrés.
La première fois que je me suis penché sur la question remonte à 1994. La façon dont les politiques s'appliquaient au ministère de la Défense nationale était très différente. Les règles alors permettaient aux anciens employés d'exercer des pressions sur n'importe quelle ramification de la Défense nationale, sauf celle pour lesquelles ils avaient travaillé. Autrement dit—et c'est un exemple très commun—si vous travailliez au Bureau de liaison avec Washington, la disposition qui s'appliquait à vous en tant qu'employé du ministère vous autorisait à exercer des pressions dans toutes les Forces canadiennes et partout au ministère de la Défense nationale, sauf au Bureau de liaison avec Washington. Ni moi ni le chef d'état-major de la Défense d'alors ne jugions cette mesure appropriée à l'époque, puis les règles ont changé.
S'ils sont enregistrés, vous allez voir leurs noms. Je pense que...
M. John Bryden: Je suis désolé, monsieur le président, excusez-moi...
Le président: Laissez M. Wilson terminer.
M. Howard Wilson: Eh bien, on revient toujours au fait que les noms de ces personnes devraient être ajoutés à la liste. Je doute que la situation de la Défense nationale soit un grand mystère à cet égard.
M. John Bryden: Vous n'avez toujours pas répondu à ma question. Je veux savoir pourquoi ces bureaucrates, à la Défense ou ailleurs, refusent de reconnaître qu'un ancien titulaire de charge qu'ils connaissent a exercé des pressions sur eux.
C'est un problème de perception. Je ne doute pas un instant que la situation s'est améliorée, mais la perception. c'est tout. Je peux vous dire que dans ma circonscription, la perception de cette situation particulière et d'autres situations est tout simplement terrible, parce que les gens croient qu'il y a copinage.
Je crois qu'une période d'un an est beaucoup trop courte. Elle devrait être de 10 ans. Si vous voulez procéder ainsi et ne pas divulguer qui a été contacté, alors fixons cette durée à 10 ans.
Je ne sais pas si vous voulez toujours répondre à cela, parce qu'il y a autre chose dont je voudrais vous parler.
M. Howard Wilson: J'aimerais donner une courte réponse.
Le président: J'ai bien peur que nous nous éloignions du projet de loi C-15.
M. Howard Wilson: Permettez-moi de faire une très courte observation. Je vous ai fait part d'une préoccupation que je vais simplement répéter très rapidement.
Je m'inquiète au sujet de l'identification des titulaires de charge publique, plus particulièrement les cadres intermédiaires; à savoir que cela figerait ce qui devrait être une relation très ouverte, contrairement à ce que le gouvernement a très positivement construit moi.
Mais l'une des choses que ce comité pourrait vouloir faire, s'il en a le temps, comme il s'agit du comité de l'industrie, et cela a trait à un changement qui a été apporté en 95-96: dire que nous ne devrions pas verser d'honoraires conditionnels. Il avait été recommandé d'éliminer les honoraires conditionnels. Nous avons répondu que le gouvernement du Canada n'a pas l'autorité de le faire, que cela incombe aux provinces.
Nous avons dit que nous ne pouvons intégrer des conditions de ce genre dans les contrats, mais que nous pourrions le faire dans les contrats gouvernementaux. Par conséquent, le Conseil du Trésor a élaboré des règles selon lesquelles si vous représentez quelqu'un, une petite entreprise, dans un contrat avec le gouvernement, vous ne pouvez toucher d'honoraires conditionnels.
J'ai vu et écrit une lettre à ce sujet au sous-ministre de l'Industrie et au Conseil du Trésor pour leur signaler que, selon mes renseignements, cela peut avoir un effet pervers. Un certain nombre de petites entreprises qui s'attendraient ordinairement à obtenir des contrats du gouvernement fédéral ne sont pas prêtes à verser des honoraires fixes à un lobbyiste pour les représenter. Certains lobbyistes seraient prêts à travailler provisoirement à raison de 5 à 10 p. 100, mais ils n'ont pas le droit de le faire. Voilà qui risque d'avoir un effet tout à fait pervers et inattendu. Pour votre petite entrepreneur d'un contrat de défense, il s'agit peut-être de son salut: avoir quelqu'un qui est aussi compétent que cette autre personne.
» (1725)
M. John Bryden: Il s'agit là d'une suggestion constructive, mais je sois désolé, je crois que la transparence... à tout le moins dans ce cas bien circonscrit.
Est-ce que je peux poursuivre et poser une autre question, monsieur le président?
Le président: Vous avez dépassé le temps qui vous était imparti. Comme vous êtes le dernier à poser des questions, je vous accorde encore une minute.
M. John Bryden: Je vois. Nous avons deux ou trois minutes. C'est bien.
Le président: Je vous accorde une autre minute.
M. John Bryden: Merci.
L'autre question que je veux poser porte sur les diverses définitions de lobbyiste; ne pourrait-on pas proposer une nouvelle définition de «lobbyiste salarié», une organisation dont l'activité principale est le lobbying?
La raison pour laquelle j'aimerais qu'on définisse cette catégorie dans la mesure législative c'est que cette distinction n'y figure pas à l'heure actuelle. Ce qui me fruste entre autres dans le processus de formulation des politiques c'est qu'il y a des groupes qui passent le plus clair de leur temps à tenter d'influencer les décideurs; c'est-à-dire, des organisations qui consacrent tout temps à défendre des intérêts. Il pourrait s'agir d'une entreprise ici à Ottawa qui exerce cette activité dans un but lucratif, mais il y a de nombreux autres organismes à but non lucratif qui exercent constamment des pressions auprès de Santé Canada, d'Environnement Canada ou que sais-je encore. J'aimerais que ces organisations soient définies comme des organismes dont la principale activité est le lobbying de sorte que lorsque je consulte la Loi sur l'enregistrement des lobbyistes et que je vois que ces organismes communiquent avec Santé Canada, j'ai une meilleure idée de ce qui se passe.
M. Howard Wilson: J'aurais cru que nous aurions pu les enregistrer tous. À la fin de l'exercice, nous avions enregistrés 357 organismes.
M. John Bryden: Là n'est pas la question; il s'agit de les identifier. Le registre que je veux vraiment n'est pas un registre des lobbyistes occasionnels mais des lobbyistes permanents; l'organisme qui est là seulement pour exercer des pressions, ce qui peut avoir un effet néfaste sur la prise de décisions des cadres intermédiaires. Par conséquent, si c'était utile, j'aimerais que cela se fasse.
Le président: Merci.
Je vous remercie, monsieur Legault et plus particulièrement monsieur Wilson de tous le temps que vous avez consacré aux activités du comité de l'industrie au cours des dernières années. Nous avons toujours eu de bonnes discussions. Certaines ont été plus animées que d'autres, mais il est toujours agréable de vous recevoir pour nous expliquer les divers projets de loi. Je tiens donc à vous remercier tous les deux de votre présence aujourd'hui.
Je rappelle aux membres du comité que la réunion de demain commencera à 15 h 15 et non à 15 h 30 et qu'elle se terminera à 17 heures.
Monsieur Volpe.
M. Joseph Volpe: J'aimerais vous aviser que demain j'aimerais soulever une question concernant la planification de nos travaux. J'ai l'intention de me limiter à environ deux minutes, mais j'aimerais le faire au début de la réunion avant que nous fassions entrer nos témoins.
» (1730)
Le président: Vous voulez que nous nous réunissions à huis clos?
M. Joseph Volpe: Je le préférerais.
Le président: Peut-être préféreriez-vous que nous le fassions à la fin de la réunion?
M. Joseph Volpe: Faites pour le mieux, monsieur le président.
Le président: Merci beaucoup.
La séance est levée.