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INST Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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37e LÉGISLATURE, 2e SESSION

Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le lundi 31 mars 2003




¹ 1530
V         Le président (M. Walt Lastewka (St. Catharines, Lib.))
V         M. Dan McTeague (Pickering—Ajax—Uxbridge, Lib.)

¹ 1535
V         Le président
V         James Rajotte (Edmonton-Sud-Ouest, Alliance canadienne)
V         M. Dan McTeague

¹ 1540
V         M. James Rajotte
V         M. Dan McTeague

¹ 1545
V         Le président
V         M. Geoffrey Kieley (attaché de recherche auprès du comité)
V         Le président
V         M. Serge Marcil (Beauharnois—Salaberry, Lib.)
V         M. Dan McTeague
V         M. Serge Marcil
V         M. Dan McTeague

¹ 1550
V         M. Serge Marcil
V         Le président
V         M. Stéphane Bergeron (Verchères—Les-Patriotes, BQ)

¹ 1555
V         M. Dan McTeague
V         Le président
V         M. Stéphane Bergeron
V         M. Dan McTeague
V         M. Stéphane Bergeron
V         M. Dan McTeague
V         M. Stéphane Bergeron
V         M. Dan McTeague
V         Le président
V         M. Larry Bagnell (Yukon, Lib.)
V         M. Dan McTeague

º 1600
V         Le président
V         M. Dan McTeague
V         M. Larry Bagnell
V         M. Dan McTeague
V         M. Larry Bagnell
V         M. Dan McTeague
V         M. Larry Bagnell
V         M. Dan McTeague
V         M. Larry Bagnell
V         M. Dan McTeague
V         M. Larry Bagnell
V         M. Dan McTeague
V         Le président
V         M. Brian Masse (Windsor-Ouest, NPD)
V         M. Dan McTeague

º 1605
V         M. Brian Masse
V         Le président
V         M. Brent St. Denis (Algoma—Manitoulin, Lib.)
V         M. Dan McTeague
V         M. Brent St. Denis
V         M. Dan McTeague

º 1610
V         M. Brent St. Denis
V         Le président
V         M. Brent St. Denis
V         Le président
V         M. Brent St. Denis
V         Le président
V         M. Brent St. Denis
V         M. Dan McTeague
V         Le président
V         M. André Bachand (Richmond—Arthabaska, PC)
V         M. Dan McTeague

º 1615
V         M. André Bachand
V         M. Dan McTeague
V         M. André Bachand
V         M. Dan McTeague
V         M. André Bachand
V         M. Dan McTeague
V         Le président
V         M. Dan McTeague
V         Le président
V         Mme Paddy Torsney (Burlington, Lib.)
V         Le président
V         Mme Paddy Torsney
V         Le président
V         Mme Paddy Torsney
V         Le président
V         M. Konrad von Finckenstein (commissaire à la concurrence, bureau de la concurrence, ministère de l'Industrie)

º 1620

º 1625

º 1630
V         Le président
V         M. Brian Fitzpatrick (Prince Albert, Alliance canadienne)

º 1635
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. Brian Fitzpatrick
V         Le président
V         M. Larry Bagnell
V         M. Konrad von Finckenstein

º 1640
V         M. Larry Bagnell
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. Larry Bagnell
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. Larry Bagnell
V         Le président
V         M. Brian Fitzpatrick
V         M. Konrad von Finckenstein

º 1645
V         Le président
V         M. Brian Fitzpatrick
V         M. Konrad von Finckenstein
V         Le président
V         Mme Marlene Jennings (Notre-Dame-de-Grâce—Lachine, Lib.)
V         Le président
V         M. Serge Marcil
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. Serge Marcil
V         Le président
V         M. Dan McTeague
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. Gaston Jorré (sous-commissaire principal de la concurrence, Direction générale des fusionnements, Bureau de la concurrence, ministère de l'Industrie)

º 1650
V         M. Dan McTeague
V         M. Gaston Jorré
V         M. Dan McTeague
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. Dan McTeague
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. Dan McTeague
V         Le président
V         M. Serge Marcil

º 1655
V         M. Gaston Jorré
V         M. Serge Marcil
V         Le président
V         M. Brian Masse
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. Brian Masse
V         M. Konrad von Finckenstein
V         Le président
V         M. André Bachand
V         Le président
V         Mme Judy Sgro (York-Ouest, Lib.)
V         M. Konrad von Finckenstein
V         Mme Judy Sgro
V         M. Konrad von Finckenstein

» 1700
V         Mme Judy Sgro
V         M. Peter Sagar (sous-commissaire de la concurrence, Direction générale de la politique de la concurrence, ministère de l'Industrie)
V         Mme Judy Sgro
V         M. Peter Sagar
V         Le président
V         Mme Judy Sgro
V         Le président
V         Mme Judy Sgro
V         Le président
V         M. Geoffrey Kieley
V         M. Konrad von Finckenstein
V         Le président
V         M. Konrad von Finckenstein
V         Le président
V         M. Dan McTeague
V         Le président
V         M. Dan McTeague

» 1705
V         Le président
V         M. Dan McTeague
V         M. Stéphane Bergeron
V         Le président
V         Mr. Stéphane Bergeron
V         Le président
V         M. Stéphane Bergeron
V         M. Dan McTeague
V         Le président
V         M. James Rajotte
V         Le président
V         M. Dan McTeague
V         Le président
V         Mr. Stéphane Bergeron
V         Le président
V         M. André Bachand
V         Le président
V         M. Dan McTeague
V         M. André Bachand
V         Le président
V         M. Dan McTeague
V         Le président
V         M. Dan McTeague
V         Le président
V         M. Serge Marcil
V         Le président
V         M. Larry Bagnell
V         Le président

» 1710
V         M. Serge Marcil
V         Le président
V         M. Serge Marcil
V         Le président
V         M. Stéphane Bergeron
V         Le président
V         M. Serge Marcil
V         M. Stéphane Bergeron
V         M. Serge Marcil
V         Le président
V         M. James Rajotte
V         M. Serge Marcil
V         Le président

» 1715
V         Le président










CANADA

Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie


NUMÉRO 033 
l
2e SESSION 
l
37e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 31 mars 2003

[Enregistrement électronique]

¹  +(1530)  

[Traduction]

+

    Le président (M. Walt Lastewka (St. Catharines, Lib.)): La séance est ouverte. Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous nous réunissons cet après-midi pour examiner le projet de loi C-249, Loi modifiant la Loi sur la concurrence.

    Même si l'avis indique que nous aurons de 15 h 30 à 16 h 30 pour effectuer ce travail, nous avons également reçu deux motions que nous examinerons à 17 heures. Je compte donc éliminer 15 minutes de chacun des deux segments pour être juste envers nos deux témoins. Par conséquent, la période prévue pour M. McTeague sera de 15 h 30 à 16 h 15, et celle pour M. Konrad von Finckenstein, le Commissaire de la concurrence, de 16 h 15 à 17 heures. 

    Nous allons d'abord entendre l'exposé liminaire de M. McTeague.

+-

    M. Dan McTeague (Pickering—Ajax—Uxbridge, Lib.): Merci, monsieur le président.

    Merci mes collègues du comité.

    Je ne sais pas si j'ai déjà été dans la situation de soumettre un projet de loi à l'examen d'un comité auquel je siège, mais je sais que je me trouve aujourd'hui en très bonne compagnie. Vu leur expérience, les députés ici réunis ne seront pas surpris de voir qu'encore une fois, on leur demande d'étudier un projet de loi qui apporte des modifications à la Loi sur la concurrence.

    Bien sûr, ce projet de loi existe depuis un bon moment. Au cours de la dernière législature, il s'agissait du projet de loi C-248. Il s'agit à présent du projet de loi C-249, projet de loi qui a été déposé en février 2001.

    Chers collègues, ce projet de loi est l'un des résultats du travail accompli par un groupe de libéraux, notamment auprès de l'industrie gazière, mais concernant la concurrence en général. Cela s'est fait au moment où la cause intéressant Superior Propane a été lancée—c'est-à-dire en août 2000—non, je me trompe, c'était dès l'été de 1998—et qu'on a commencé à examiner toutes sortes de questions de position dominante et d'exclusivité.

    Je vais donc vous entretenir spécifiquement du projet de loi, et comme vous le savez, monsieur le président, j'ai déjà soumis à votre examen un amendement à ce projet de loi. Ce travail est en train depuis un bon moment, et je vais justement revenir là-dessus dans quelques instants.

    Le projet de loi C-249 vise à empêcher une entreprise de faire valoir l'argument de l'efficience en vue de faire approuver par le tribunal une fusion qui a pour effet de créer un monopole ou un quasi-monopole et ce, aux dépens des consommateurs et d'une saine concurrence.

    Dans l'affaire de la fusion de Superior et d'ICG Propane—une division de Pétro-Canada, le Tribunal de la concurrence n'aurait jamais dû accepter l'argument de l'efficience avancé par les parties pour justifier la fusion proposée. Il est clair que le Tribunal n'aurait pas dû approuver une fusion qui accordait à une seule entreprise une part de marché de 70 à 80 p. 100, et donc une position dominante par rapport à l'ensemble de l'industrie du propane; selon toutes les analyses, cette mesure avait pour résultat de lui accorder un quasi-monopole et de donner lieu à des préjudices anticoncurrentiels dans plusieurs régions du pays.

    Je suis donc convaincu, monsieur le président, que nous devons à présent moderniser et renforcer la Loi sur la concurrence, relativement à cette question d'efficience, en modifiant les conditions dans lesquelles on peut faire valoir ce moyen de défense pour faire approuver une fusion. Les lignes directrices relatives à ce moyen de défense doivent être claires et concises, afin de garantir que toute fusion approuvée en fonction du moyen de défense de l'efficience ne nuise aucunement—et j'insiste là-dessus—au degré de concurrence qui caractérise le marché et ne porte pas préjudice aux consommateurs. Il ne faut pas que le moyen de défense de l'efficience puisse être invoqué pour faire approuver une fusion qui permettrait à une nouvelle entité de dominer complètement le marché, qui limiterait gravement la concurrence ou qui ferait en sorte que les petits concurrents de cette nouvelle entité en position dominante seraient à la merci de cette dernière. Bien sûr, ce genre de résultat n'aurait aucun avantage tangible pour les consommateurs.

    À cet égard, je vous rappelle l'objet de la Loi sur la concurrence, précisé à l'article 1.1:

La présente loi a pour objet de préserver et de favoriser la concurrence au Canada dans le but de stimuler l'adaptabilité et l'efficience de l'économie canadienne, d'améliorer les chances de participation canadienne aux marchés mondiaux tout en tenant simultanément compte du rôle de la concurrence étrangère au Canada, d'assurer à la petite et à la moyenne entreprises une chance honnête de participer à l'économie canadienne, de même que dans le but d'assurer aux consommateurs des prix compétitifs et un choix dans les produits.

    Dans ce contexte, monsieur le président, vous comprendrez que le projet de loi C-249 découle d'une prise de conscience car, dans l'affaire Superior Propane, nous avons compris que l'application de ces critères avait été gravement—mais de façon tout à fait crédible—mis à l'épreuve.

    Comme la Cour fédérale d'appel a fini par confirmer la décision initiale du Tribunal de la concurrence en faveur de la fusion de Superior pour des raisons d'efficience, il devient à présent d'autant plus important de clarifier les conditions dans lesquelles on peut recourir à ce moyen de défense et d'établir des lignes directrices claires pour empêcher son utilisation comme simple outil pour faire approuver une fusion.

    Je tiens également à vous signaler, monsieur le président, par rapport à l'amendement que je propose, et dont le greffier a déjà fourni une copie, si je ne m'abuse, à tous les membres du comité permanent, et que je vais vous lire dans quelques instants—que le projet de loi, modifié, garantira que le Tribunal de la concurrence aura à déterminer dans quelle mesure le projet de fusion est susceptible d'éliminer ou encore de réduire de façon importante la concurrence. Le Tribunal pourrait également tenir compte des facteurs précisés à l'article 93 de la Loi sur la concurrence et aura à déterminer dans quelle mesure les gains en efficience seront avantageux pour les consommateurs, en leur permettant de bénéficier de prix concurrentiels ou de choix de produits qui n'existeraient pas si la fusion ne se réalisait pas.

    Pour toutes ces raisons, monsieur le président, je voudrais aussi déposer l'amendement que je propose au projet de loi C-249 concernant les gains en efficience.

¹  +-(1535)  

    Au lieu de modifier les paragraphes 96(3) et 96(4), comme le prévoyait le projet de loi original, cet amendement modifie le paragraphe 96(1), et se lit ainsi:

96(1) Pour déterminer, aux fins de l'article 92, si un fusionnement réalisé ou proposé empêche ou diminue sensiblement la concurrence, ou aura vraisemblablement cet effet, le tribunal doit évaluer, outre les facteurs dont il peut tenir compte aux termes de l'article 93, si le fusionnement réalisé ou proposé a eu pour effet ou aura vraisemblablement pour effet d'entraîner des gains en efficience, notamment des prix concurrentiels ou un choix dans les produits, dont profiteront les consommateurs et qui ne seraient vraisemblablement pas réalisés si le fusionnement réalisé ou proposé n'avait pas lieu.

    Monsieur le président, je sais que bon nombre d'entre nous avons consacré beaucoup de temps à l'étude de la question de la concurrence. D'ailleurs, nous avons certainement passé du temps à examiner des activités que nous considérons comme étant répréhensibles. L'honorable député du Bloc québécois…

[Français]

le député de Verchères--Les-Patriotes, M. Bergeron, connaît très bien les lacunes de la Loi sur la concurrence en ce qui concerne les collusions; nous nous préparions à surveiller ces problèmes. Mais en attendant, nous ne devrions pas nous mettre dans une position où nous aurions comme jurisprudence, pour la première fois, avec le cas de Supérieur Propane, une question où il y a un manque, où il y a évidemment un cas célèbre et où nous permettrions, avec une défense d'efficience, qu'il y ait une capacité de nuire à la concurrence et de nuire aux consommateurs.

[Traduction]

    Si nous sommes si préoccupés par l'article 45, et de nombreux autres articles de la Loi sur la concurrence qui sont susceptibles d'empêcher les gens d'exercer des choix efficaces qui seraient conformes aux principes de la loi, à mon avis, il faut—et je compte travailler dans ce sens—que le moyen de défense de l'efficience que prévoit la loi soit nuancé suffisamment, grâce à la modification que je propose, pour permettre le respect des critères définis dans la loi.

    Monsieur le président, je n'ai que quelques autres très brefs commentaires à faire à ce sujet, et j'aimerais bien les faire en présence de mes collègues. Je pense que la plupart d'entre eux ont eux ont eu amplement le temps au moins d'examiner le projet de loi. S'ils ont des questions à poser au sujet de l'amendement, à mon avis, cela suffira. Je demande les conseils de tous les membres pour m'assurer que ce projet de loi permet vraiment d'atteindre ces objectifs et que nous pourrons éviter de causer un préjudice aux consommateurs ou de nuire à la concurrence au Canada à cause d'un précédent fort adaptable mais dangereux qui permettrait à une entreprise de faire approuver un fusionnement grâce à un certain moyen de défense, si bien que nous finirions par créer un quasi-monopole, ce qui serait tout à fait contraire à l'intérêt public.

    Voilà. Je vous remercie, monsieur le président.

+-

    Le président: Très bien.

    Monsieur Rajotte.

+-

    M. James Rajotte (Edmonton-Sud-Ouest, Alliance canadienne): Merci, monsieur le président, et merci, monsieur McTeague, pour votre exposé.

    C'est drôle… je ne me rendais pas compte que vous vous intéressiez encore à la concurrence après tant d'années.

    J'ai bien reçu le texte de l'amendement que vous proposez au projet de loi, et je voudrais dans ce contexte parler de l'affaire Superior Propane, puisque c'est la décision judiciaire la plus importante que vous avez mentionnée. À mon avis, les parlementaires trouvent certainement que le moyen de défense de l'efficience est fort compliqué, et encore plus compliqué à faire valoir.

    Dans cette affaire en particulier, il a fallu quatre ans pour y voir clair, et le fait est que plusieurs tribunaux différents ont rendu des décisions différentes. Je pense que des opinions différentes ont été exprimées à l'époque par vous-même, le Commissaire de la concurrence, si je ne m'abuse, et au moins l'un des tribunaux concernés. Ma première question porte donc sur le règlement d'application actuel et la loi. À votre avis, la procédure d'examen des fusionnements est-elle devenue tout à fait dysfonctionnelle?

+-

    M. Dan McTeague: C'est une excellente question, monsieur Rajotte.

    À mon avis, nous n'avons pas eu suffisamment de temps jusqu'à présent pour évaluer les répercussions futures de la décision rendue dans l'affaire Superior Propane, mais je pense qu'il est clair que lorsque le Tribunal a déclaré que cette possibilité ne l'inquiétait pas, et que même si le fait de faire valoir la défense de l'efficience devait donner lieu à un fusionnement—ce dernier ayant admis, évidemment, au moment de rendre sa décision originale en 2000, une décision rendue par une majorité de deux contre un, et de réexaminer la question par la suite, qu'il serait possible d'invoquer les gains en efficience comme justification, en appliquant le critère de la rente totale… à présent, donc, dis-je, nous faisons face à un grave problème pour ce qui est de la façon dont le Tribunal définit l'efficience, malgré la décision de la Cour d'appel fédérale, et malgré le fait que tout cela m'est apparu très clairement bien avant que ce dossier ne soit soumis à l'examen du Tribunal, étant donné que j'ai proposé ce projet de loi à la Chambre dès le 7 février 2000.

    Il me semblait en effet que cet article du projet de loi correspondait davantage à une procédure pour autoriser la création de monopoles au Canada à la suite d'une simple demande. Je ne cherche pas à banaliser ni à simplifier à outrance la situation, mais à mon sens, les préoccupations que j'exprimais au départ, monsieur Rajotte, c'est-à-dire à cette époque-là, bien avant la première décision du Tribunal, et que j'ai réexprimées en public, notamment sur CTV ou à l'émission Canada A.M., sont devenues encore plus pertinentes maintenant, à la lumière justement de cette décision.

    Je vous rappelle les observations de McFetridge, qui disaient qu'à cause de l'affaire Superior Propane, ce moyen de défense fera désormais autorité, et qu'à cause du précédent qui a été créé, d'autres entreprises sont susceptibles de faire valoir ce même moyen de défense de l'efficience, qui est préjudiciable aux consommateurs, donnera lieu à un hausse des prix pour ceux qui se servent de ce produit—les clients ou les consommateurs—et qu'en définitive, cette décision aura peut-être pour résultat fort regrettable de réduire la concurrence—par exemple, au Canada atlantique—au point de l'éliminer complètement. Et d'autres entreprises concurrentes n'auront plus l'occasion de se rétablir sur ce marché.

    Donc, si vous me demandez si la décision judiciaire ou plutôt l'article concerné de la loi est dysfonctionnel, je vous dirais que oui. Est-ce que les décisions futures s'appuieront sur le jugement des tribunaux dans l'affaire Superior? À mon avis, oui. Mais, comprenez-moi bien : je ne veux pas qu'on jette le bébé avec l'eau du bain. C'est pour cette raison que l'amendement vise à ordonner au Tribunal, étant donné qu'il n'a pas été en mesure de le faire jusqu'à présent, de tenir compte de tous les éléments énumérés à l'article 93.

    Monsieur Rajotte, je sais que vous avez d'autres questions à poser. Si vous voulez, je pourrai vous énumérer tous ces éléments en répondant à une autre question plus tard.

¹  +-(1540)  

+-

    M. James Rajotte: L'une de nos inquiétudes à propos du projet de loi, et de l'amendement aussi, concerne la possibilité que nous accordions trop de pouvoir d'intervention et d'examen dans ce domaine au Commissaire de la concurrence. Dès lors qu'on parle d'«avantages sociaux» et des «coûts d'un fusionnement», et qu'on a pesé tous ces éléments par rapport aux gains en efficience, et si vous redéfinissez l'efficience, à mon avis, certains voudront savoir qui établit les définitions et comment on définira les termes «avantages sociaux» et «coûts d'un fusionnement». À votre avis, cela revient-il au Commissaire de la concurrence—j'imagine que vous me direz oui, mais cette personne, agissant seule, ou ce petit groupe de personnes, est-il suffisamment bien équipé pour être à même de déterminer l'équilibre qu'il faut entre les avantages sociaux et les coûts d'un fusionnement, et comment donc peut-on déterminer quel poids il faut donner à ces éléments, par rapport aux efficiences économiques certaines qui pourraient découler d'un fusionnement, comme le faisait valoir Superior Propane pour justifier sa demande?

+-

    M. Dan McTeague: Monsieur Rajotte, avant d'aborder ce point précis, je pense qu'il conviendrait de nous rappeler les observations faites en 1986 au moment où la loi a été modifiée. Certains prétendaient à l'époque que pour permettre au Canada de s'imposer et d'obtenir une plus grosse part du gâteau, on devrait accepter un certain préjudice anticoncurrentiel parce qu'ainsi, les entreprises canadiennes pourraient devenir plus fortes et mieux affronter la concurrence sur les marchés mondiaux. Si je me souviens bien, cette idée découlait de certaines interprétations de l'étude de la Commission Macdonald, mais le fait est que cela remonte à il y a 17 ans, et que l'économie a évolué depuis.

    Mais ce qui me semble plus important encore, avant qu'on demande au Commissaire de se prononcer sur la façon d'interpréter ces articles—et selon moi, le Tribunal continuera de détenir certains pouvoirs discrétionnaires dans les limites de ce qu'on peut considérer comme une bonne politique sur les fusionnements—c'est que le Parlement établisse, lui aussi, sa définition. Je ne crois pas que le Parlement aurait jamais donné raison à une entreprise ayant avancé des arguments aussi fallacieux—et je ne dis pas ça par méchanceté ou avec une intention particulière, je dis ça tout à fait respectueusement… Mais si vous donnez à ce point des pouvoirs à un groupe particulier qu'il sera désormais impossible de rétablir la concurrence ou les forces du marché qui existaient auparavant, il me semble que notre plus grande priorité dans ce contexte doit être de défendre l'intérêt du public. Là je ne parle pas de l'intérêt social du public. Donc, pour moi, le Parlement a tout à fait la capacité et le pouvoir de définir l'intérêt public.

    C'était une chose que de dire à l'époque, soit il y a plusieurs mois ou plusieurs années, que l'article 96 nous préoccupait, mais nous avons à présent la preuve qu'il pourra être utilisé d'une certaine façon, en fonction de certains critères, pour nuire aux consommateurs. Selon l'analyse du Tribunal, établie utilisant sa propre méthodologie, la valeur nette des gains en efficience sur 10 ans aurait été de 29 millions de dollars, par rapport à une perte de 48 millions de dollars pour les consommateurs—48 millions de dollars par année. Ce n'est pas une petite somme, et je pense qu'en tant que parlementaire, nous devons nous assurer d'un équilibre approprié—c'est-à-dire que nous devons nous assurer de favoriser l'efficience, mais non pas aux dépens de la concurrence ou des consommateurs. Malheureusement, l'affaire Superior Propane est un exemple parfait de ce qui se produit lorsque le Parlement n'exerce pas suffisamment de contrôle sur une assez longue période à l'égard d'une loi très importante.

¹  +-(1545)  

+-

    Le président: Merci, monsieur Rajotte.

    Excusez-moi; je devais demander à notre conseiller juridique de me fournir une explication de l'effet de l'amendement sur la motion, et j'ai oublié de le faire.

    Monsieur Kieley.

+-

    M. Geoffrey Kieley (attaché de recherche auprès du comité): Je suis convaincu que M. McTeague me corrigera si j'ai mal interprété ses amendements.

    Pour la gouverne des membres du comité, je voudrais vous expliquer très brièvement dans quelles circonstances on peut faire valoir le moyen de défense de l'efficience que prévoit l'article 96. Si le Tribunal détermine que le fusionnement proposé diminue sensiblement la concurrence et constitue donc un fusionnement anticoncurrentiel, il devrait normalement refuser de l'approuver. On peut donc, dans ce contexte, faire valoir que les gains en efficience que procure le fusionnement l'emportent sur les effets anticoncurrentiels, si bien que le fusionnement est approuvé. Voilà donc dans quelle situation on peut actuellement faire valoir ce moyen de défense.

    Si je comprends bien l'amendement de M. McTeague, il aura pour effet d'empêcher le Tribunal de tenir compte du facteur des gains en efficience. Il va essentiellement éliminer ce moyen de défense, si bien que les gains en efficience ne seront plus qu'un facteur parmi d'autres que le Tribunal devra prendre en compte en examinant les effets du projet de fusionnement sur la concurrence.

+-

    Le président: Monsieur Marcil, vous avez la parole.

[Français]

+-

    M. Serge Marcil (Beauharnois—Salaberry, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président. D'abord, on s'aperçoit que notre collègue le député McTeague a quand même fait un travail assez audacieux, qui a requis plusieurs d'heures de recherche et ainsi de suite.

    J'ai deux questions. Premièrement, lorsque vous avez proposé cet amendement par rapport au ministère de l'Industrie, le projet de loi C-249, est-ce que vous avez eu des échanges avec le ministère afin de voir comment cela pouvait s'appliquer?

+-

    M. Dan McTeague: Non. Je n'ai pas eu la chance de parler de la situation avec le ministère. Il est entendu que c'est une question sur laquelle je me suis prononcé à plusieurs reprises et qu'en l'espace de deux ans, il y a eu deux ministres, même trois. Je pense que cela a commencé au moment où le ministère était dirigé par le ministre Manley, avant que M.Tobin lui succède.

    Je pense que pour nous, comme députés, la situation présente l'avantage qu'il y a déjà eu un jugement de rendu. Au fil du temps, on a acquis des connaissances. Je me suis fié aux commentaires et aux ressources qui étaient là.

    Évidemment, il y a beaucoup de choses à faire. Il y a deux domaines. Il s'agit de la loi et, évidemment, de la position des avocats, des consommateurs et aussi des économistes. C'est une question qui est très difficile, mais je dois attirer votre attention sur le fait que la défense telle qu'elle existe à l'heure actuelle n'existe pas ailleurs dans le monde. Dans les autres pays où nous avons fait des recherches--et j'espère que M. Ross va venir comparaître devant le comité--, nous avons trouvé beaucoup d'exemples où il y a des exceptions à la défense d'efficience, et ces exceptions-là sont habituellement en faveur des consommateurs ou visent à assurer qu'on ne puisse pas avoir une fusion illégale, mais que l'on peut en même temps utiliser comme argument pour obtenir quelque chose de façon indirecte. C'est pour cela que nous avons tellement de difficulté à comprendre la situation. C'est parce que vraisemblablement, la question n'existe pas ailleurs.

+-

    M. Serge Marcil: Dans le cas de la cause de Supérieur Propane, comment l'application de l'amendement intégré dans le projet C-249 se présentait-elle?

+-

    M. Dan McTeague: Dans la cas de Supérieur Propane, l'amendement aurait obligé le tribunal à vérifier les autres conditions existantes, des conditions qui sont assez importantes, et à tenir compte de toute l'économie. Les barrières pourraient être là au départ, dans le marché qui est défini au début, pour enlever des... Si la fusion avait pour conséquence d'éliminer un concurrent vigoureux et efficace, le tribunal serait obligé de prendre cela en considération avant de trouver une façon économique. Au fond, il y a une dizaine de choses à considérer, mais la plus importante, c'est qu'il faut tenir compte de n'importe quel facteur qui a rapport au contexte de la concurrence dans un marché ou qui sera affecté par le « défusionnement ».

    Alors, je pense que l'amendement a évidemment comme conséquence de considérer les facteurs, de ne pas dire que l'efficacité existe et qu'elle existe comme exception à la concurrence. Il faut que les deux se mélangent, et c'est là vraiment le principe de mon amendement.

¹  +-(1550)  

+-

    M. Serge Marcil: Merci, monsieur le président.

[Traduction]

+-

    Le président: Monsieur Bergeron, bienvenue à nouveau au comité.

[Français]

+-

    M. Stéphane Bergeron (Verchères—Les-Patriotes, BQ): Merci, monsieur le président. Je dois vous dire d'entrée de jeu que ça me fait grand plaisir de me retrouver parmi vous. Je retrouve ici nombre de collègues qui ont parfois été des adversaires dans certains dossiers et qui, la plupart du temps, ont été d'excellents collaborateurs dans d'autres dossiers, mais qui, dans tous les cas, ont toujours été et sont toujours des amis. Alors, c'est pour moi un grand plaisir de me retrouver ici.

    Je voulais tout d'abord saluer notre témoin, M. le vice-président du Comité de l'industrie, des sciences et de la technologie. Je vous remercie de vos propos très élogieux à mon égard, mais je pense que vous les avez formulés en toute modestie, parce que des 301 députés qui composent actuellement la Chambre des communes, celui qui, à mon sens, est le plus érudit sur la question de la concurrence, c'est bel et bien vous, notre témoin d'aujourd'hui. Je tiens à vous remercier de tout le travail que vous faites depuis nombre d'années sur la question de la concurrence.

    Cela dit, mes collègues M. Marcil et Mme Jennings ne m'en voudront certainement pas, parce que je n'y suis pour rien, si nous parlons aujourd'hui de défusion. J'aimerais faire un commentaire et poser une question.

    Quant à mon commentaire, mes collègues ici, à ce comité, vont me reconnaître. C'est un côté de moi, cet aspect tatillon au niveau de la traduction française, qui, je l'imagine, me rend si attachant à leurs yeux. Je veux simplement porter à l'attention du vice-président du comité le fait qu'au niveau du sommaire, il y a une traduction pour le moins boiteuse en français à la dernière ligne, où on dit: «...si une position dominante dans un marché serait créée ou renforcée.» Alors, comme on dit à la petite école, les «si » détestent les «rais». On doit donc dire «...si une position dominante dans un marché était créée ou renforcée». Il faudra évidemment faire la modification en temps et lieu et en saisir les autorités compétentes.

    Maintenant ma question. Je comprends, à la lecture de l'amendement que vous déposez et qui, je le présume, sera intégré au moment de l'étude article par article, quoique je ne sache pas trop à quel moment il sera étudié, que l'analyse qui est faite d'un gain en efficience pour la détermination d'une ordonnance par le Tribunal de la concurrence peut se faire au moment où le fusionnement est réalisé ou après coup.

    Je lis le paragraphe 1(5) que vous nous proposez dans le projet de loi:

(5) Le présent article ne s'applique pas lorsque, après que la transaction soit complétée, le fusionnement, réalisé ou proposé, résultera ou résultera vraisemblablement en la création ou au renforcement d'une position dominante dans un marché.
 

    Évidemment, tout ce projet de loi vise à faire en sorte que les gains en efficience n'affectent pas la concurrence et n'affectent pas ce que j'appellerais les droits des consommateurs.

    Cela dit, si on devait réaliser après coup que les gains en efficience ont un impact négatif sur la Loi sur la concurrence ou sur la concurrence elle-même, devrais-je dire, ou sur les avantages qu'en retirent les consommateurs, comment serait-il possible, outre un «défusionnement» ou une ordonnance de «défusionnement», de corriger, s'il n'y a pas eu d'ordonnance préventive? Appelons-ça ainsi. Puisque le débat actuel en Irak nous parle d'«attaque préventive», parlons d'«ordonnance préventive».

¹  +-(1555)  

+-

    M. Dan McTeague: Quand on aborde la question des affaires internationales, qui est un sujet sur lequel je suis tout à fait effacé, on sort de ma fameuse boîte de la concurrence. Quoi qu'il en soit, monsieur Bergeron, je vous remercie de vos commentaires et d'avoir ainsi attirer l'attention sur une erreur grammaticale. Bien que je ne sois pas très fort en français, j'ai bien reconnu le sens de votre intervention et j'en ai saisi l'essentiel. Je te remercie infiniment.

    La raison pour laquelle le paragraphe 1(5) existait peut être une question non seulement de problèmes qui existent ailleurs dans la loi, mais aussi une question de droit. Si par hasard quelqu'un a fait une transaction qui a crée un monopole ou si quelqu'un possède une très grande puissance dans le marché, c'est très difficile, à moins d'avoir recours à une mesure législative du Parlement, de retourner en arrière afin de briser ce monopole ou de diviser le marché visé.

    Alors, je ne pense pas, si nous trouvons une situation comme celle que j'ai expliquée ici... Je vais la lire en anglais:

[Traduction]

Le présent article ne s'applique pas lorsque, après que la transaction soit complétée, le fusionnement, réalisé ou proposé, résultera ou résultera vraisemblablement en la création ou le renforcement d'une position dominante dans un marché.

[Français]

    Cela veut dire que ça peut exister dans certains contextes, mais je l'ai enlevé. Cet amendement qui est maintenant souhaitable ne se trouve plus à être abordé, mais il n'est pas pris en considération dans le nouvel amendement que j'ai fait aujourd'hui.

[Traduction]

+-

    Le président: Il vous reste moins d'une minute; ayez donc l'obligeance de poser une dernière petite question, et je demanderais aussi au témoin d'écourter au maximum sa réponse.

[Français]

+-

    M. Stéphane Bergeron: Je suis désolé, monsieur McTeague, mais je ne suis pas sûr de bien saisir la réponse que vous avez donnée à ma question, en ce sens que vous m'avez lu un texte en anglais disant que la section ne pouvait être applicable à un fusionnement déjà réalisé. C'est ça?

+-

    M. Dan McTeague: Oui.

+-

    M. Stéphane Bergeron: Mais pourtant, si je prends le paragraphe 96(1) que vous nous proposez en amendement, vous dites: «Pour déterminer, aux fins de l'article 92, si un fusionnement réalisé ou proposé...», et au paragraphe 1(5), vous dites: «Le présent article ne s'applique pas lorsque, après que la transaction soit complétée, le fusionnement...»

    Il faut donc qu'on puisse porter un jugement après que le fusionnement ait été réalisé.

+-

    M. Dan McTeague: Il faut comprendre, monsieur Bergeron--et je vais le faire très vite--que le fusionnement, pour une raison ou une autre, a déjà été permis. C'est là, c'est acceptable, c'est légal. On ne peut pas, à un moment donné, soit deux, trois, quatre ou cinq ans après, dire qu'on a vu qu'on a fait une erreur et qu'on doit retourner en arrière. Ce serait une injustice envers la compagnie. Évidemment, il faut le faire dans un contexte où quelqu'un fait une demande de fusionnement. C'est pourquoi on indique que le temps pour le faire, c'est au moment où la demande est faite. Ça oblige les parties, le Bureau de la concurrence ainsi que le tribunal, à faire valoir la situation quand la demande est faite, et non quatre ou cinq ans après, quand on constate qu'il y a évidemment beaucoup de monopoles.

+-

    M. Stéphane Bergeron: On ne peut plus rien faire.

+-

    M. Dan McTeague: C'est ça.

[Traduction]

+-

    Le président: Merci beaucoup.

    Monsieur Bagnell, vous avez six minutes.

+-

    M. Larry Bagnell (Yukon, Lib.): Merci, monsieur le président.

    Je suis ravi d'avoir l'occasion cet après-midi de cuisiner mon collègue comme il l'a déjà fait à l'égard d'autres témoins qui ont comparu devant le comité, et comme d'autres l'ont déjà dit, je confirme mon entière confiance en lui, puisqu'il s'agit du député avec la plus grande expertise dans ce domaine. J'ai quelques questions à lui poser.

    Je voudrais m'assurer que les trois éléments qui sont ajoutés à la loi y sont encore—c'est-à-dire, le paragraphe 96(1), et ensuite les projets de paragraphes (4) et (5). Dois-je donc conclure que l'amendement que vous proposez au paragraphe 96(1) n'enlève rien au projet de loi?

+-

    M. Dan McTeague: Permettez-moi de vous expliquer clairement ce qui est proposé. Dans cet article-là, le libellé actuel du projet de loi C-249 a été entièrement remplacé par un nouveau texte concernant les gains en efficience, c'est-à-dire celui que je vous ai lu, à savoir «lorsqu'il détermine, pour l'application de l'article 92, si un fusionnement…» et ce texte-là se termine par les mots «fusionnement, réalisé ou proposé»; je crois qu'on vous a envoyé ce nouveau texte à vos bureaux vendredi. Donc nous ne parlons ici que du paragraphe 96(1).

    Les autres paragraphes dont je vous parlais relativement à l'article 96, c'est-à-dire les paragraphes (4) et (5), ne s'appliquent plus. C'est-à-dire qu'on en n'a plus besoin, parce que j'ai remplacé tout cela par un modèle différent.

º  +-(1600)  

+-

    Le président: Nous ne discutons ici que de la motion modifiée.

+-

    M. Dan McTeague: C'est exact. Je suis tout à fait disposé à vous expliquer pour quelles raisons j'ai voulu faire ça ou ce qui serait peut-être plus important, monsieur Bagnell, ce serait de vous dire pourquoi j'ai déposé ces textes il y a deux ans, dans le cadre du projet de loi C-248. J'avoue que ce travail a été fait à la hâte, mais il s'agissait à ce moment-là de réagir rapidement à la situation dramatique entourant l'affaire Superior Propane.

+-

    M. Larry Bagnell: Je veux simplement m'assurer de savoir de quoi on parle. Au projet de loi C-249, nous avons deux projets de paragraphes, soit le paragraphe (4) et le paragraphe (5) de l'article 96.

+-

    M. Dan McTeague: Il faut mettre de côté le projet de loi C-249, que j'avais proposé effectivement, puisque nous n'examinons plus que mon projet d'amendement.

+-

    M. Larry Bagnell : Très bien.

+-

    M. Dan McTeague: Monsieur Bagnell, si vous me permettez une autre précision, le fait est que nous avons beaucoup appris au cours des deux dernières années. Il m'a fallu un certain temps pour peaufiner ce texte, mais nous avons maintenant quelque chose qui est plus susceptible d'atteindre l'objectif que je me suis fixé.

+-

    M. Larry Bagnell: Très bien. Donc, si je comprends bien cet amendement, je dirais, à première vue, que le libellé est moins énergique que celui des projets de paragraphe 96(4) et (5). Est-ce bien votre interprétation?

+-

    M. Dan McTeague: Les projets de paragraphes 96(4) et (5) vont disparaître, monsieur Bagnell.

+-

    M. Larry Bagnell: Oui, je comprends; je vous dis simplement que la formulation me semble moins énergique.

+-

    M. Dan McTeague: L'effet de tout ça, parce que l'affaire Superior nous a justement permis de faire une bonne analyse… D'ailleurs, bon nombre de ces analyses laissent entendre que ce sur quoi nous devrions nous concentrer, ce serait de faire en sorte que le tribunal soit tenu d'examiner une série de facteurs, plutôt que rendre une décision pour des motifs que ce dernier juge approprié. Par exemple, il faudra que le tribunal se demande si les prix resteront concurrentiels après le fusionnement. On ne peut pas permettre d'approuver un fusionnement qui créera un monopole et fera augmenter les prix, sous prétexte que cela permet des gains en efficience. C'est peut-être une solution efficiente en théorie: «Je suis à la tête de deux entreprises qui ont fusionné. Nous sommes les seuls dans notre secteur d'activité. Mon fusionnement a fait en sorte que votre usine d'embouteillage a dû fermer ses portes…»—on peut évidement prendre toutes sortes d'autres exemples—«et grâce à ça, j'ai enregistré des bénéfices de 60 millions de dollars. Mais je répercute une hausse de prix d'une valeur de 80 millions de dollars sur les consommateurs. Évidemment, mes actionnaires vont être contents.» On voit qu'il s'agit simplement, grâce au monopole, de transférer la richesse des consommateurs aux actionnaires, alors que telle n'a jamais été l'intention du Parlement.

    Ce texte demande également au Tribunal de tenir compte de l'impact du fusionnement sur les consommateurs du point de vue du choix dans les produits. Et il laisse supposer qu'un fusionnement sera approuvé dans la mesure où il procure aux consommateurs de vrais avantages. Le concept que j'ai essayé d'incorporer dans cet amendement est celui de l'avantage mesuré—dans le contexte de l'analyse des arguments avancés relativement aux gains en efficience. Tout cela cadre parfaitement avec les mesures appliquées par nos partenaires commerciaux.

+-

    M. Larry Bagnell: Je suis d'accord à 100 p. 100 avec ce que vous faites. Je me demande simplement si cette disposition est suffisamment musclée. Comment sera-t-il possible de surveiller ou de contrôler…? Il est probable que les prix baissent, mais une fois que vous serez vraiment en situation monopolistique, vos prix resteront-ils vraiment faibles? Si vous avez rempli tous les critères—et c'est fort probable—établis par un conseil indépendant, qui n'exerce aucun contrôle sur votre entreprise, une fois que vous aurez établi un monopole, qu'est-ce qui vous empêchera à l'avenir d'augmenter vos prix ou d'éliminer vos produits?

+-

    M. Dan McTeague: Eh bien, voilà. Mes possibilités sont limitées et je dois me baser sur 1996. Je ne peux pas revenir en arrière à l'année 1992, pour changer ça, même si ce ne serait peut-être pas une mauvaise idée.

    Je ne veux pas que M. Rajotte ou quiconque soit mécontent de moi parce que j'essaie de modifier, encore une fois, la Loi sur la concurrence. Je pense que bon nombre d'entre nous serions bien heureux de passer à la prochaine série de recommandations.

    Mais lorsque le bureau détermine qu'un fusionnement diminue sensiblement la concurrence… Comme vous l'avez vu dans l'affaire Superior, lorsqu'il s'agissait de prendre une décision anticoncurrentielle et de reconnaître la présence de préjudices anticoncurrentiels, ils ont bien dit: «Écoutez, nous comprenons que cette décision va nuire à la concurrence»—et le fait est que dans certaines régions du pays, cette concurrence ne sera plus jamais rétablie, comme au Canada atlantique—«mais même si les consommateurs risquent de faire face à des prix plus élevés, nous avons découvert un modèle dans un résumé économique qui remonte à 1968, soit le modèle Kaldor-Hicks, et toutes sortes d'autres beaux concepts…»

    Je vois Dan Shaw, notre attaché de recherche, qui roule les yeux et qui doit être en train de se dire: «Je vais me venger».

    Donc, monsieur Bagnell, nous nous sommes efforcés essentiellement de trouver une solution qui satisferait tout le monde tout en cadrant avec la ligne de conduite de nos concurrents internationaux dans ce domaine.

+-

    Le président: Merci, monsieur Bagnell.

    Monsieur Masse, veuillez poser des questions concises.

+-

    M. Brian Masse (Windsor-Ouest, NPD): Merci, monsieur le président.

    Je voudrais obtenir des éclaircissements au sujet du remplacement des projets de paragraphe 96(4) et (5) en ce nouveau projet d'article. J'ignore l'historique de ces paragraphes et les effets des changements qui étaient proposés.

    Deuxièmement, pourriez-vous nous citer l'exemple d'un autre pays où des modifications semblables auraient été apportées à la loi, en indiquant si ces dernières cherchaient ou non à améliorer la situation des consommateurs?

+-

    M. Dan McTeague: D'abord, le projet de paragraphe 96(4) de l'ancien projet de loi disait simplement que les gains en efficience ne pourraient neutraliser les effets de la diminution ou de l'empêchement de la concurrence. Pour ce qui est du paragraphe 96(1), il dit ceci, et je cite:

Le Tribunal ne rend pas d'ordonnance prévue à l'article 92 dans les cas où il conclut que le fusionnement, réalisé ou proposé, qui fait l'objet de la demande a eu pour effet ou aura vraisemblablement pour effet d'entraîner des gains en efficience, que ces gains surpasseront et neutraliseront les effets de l'empêchement ou de la diminution de la concurrence qui résulteront ou résulteront vraisemblablement du fusionnement réalisé ou proposé et que ces gains ne seraient vraisemblablement pas réalisés si l'ordonnance était rendue.

    Je vous dis simplement que ce n'est pas juste. Ce que prévoit ce paragraphe, c'est que si une entreprise peut faire valoir qu'elle réalisera des gains en efficience, il est tout à fait normal que les prix augmentent et que les consommateurs paient davantage. Personne ne souhaite qu'il y ait des prix de type monopolistique. Nous savons fort bien ce que ça peut avoir comme conséquence. Eh bien, ce texte autorise justement ce genre de choses.

    Pendant 15 ans, cet article de la loi n'a pas été mis à l'épreuve et quand cela a fini par se produire, on a constaté que l'effet de cet article était justement celui qu'avaient prévu bien des gens. Cet article ne procurait aucun avantage aux consommateurs, mais l'entreprise avait tout de même réussi à faire valoir ses arguments en s'appuyant exclusivement sur le concept de la rente totale du consommateur. Mais si on exclut certains éléments, les effets deviennent alors minimes, comparativement aux gains d'efficience que réalisent les entreprises fusionnées.

    Quand deux entreprises qui détiennent 40 ou 50 p. 100 du marché fusionnent pour former un bloc, cela crée de graves problèmes.

    Pour ce qui est d'autres exemples à l'étranger, il y en a beaucoup. Certains sont mentionnés ici. Bien qu'il soit question de changements, le régime en Australie et au Royaume-Uni continue d'être fondé sur… je préfère vous citer directement le Livre blanc, où on dit que «les avantages pour les consommateurs» comprennent «des prix intérieurs, plus d'innovation, un plus grand choix et une meilleure qualité de produits ou de services», ces avantages devant se manifester dans un certain laps de temps.

    Aux États-Unis, si l'on détermine que le projet de fusionnement ne procure aucun gain en efficience ni aucun avantage aux consommateurs, alors que la concurrence risque d'être sensiblement compromise, l'accord de fusionnement sera considéré comme étant illégal… À ce sujet, Mr. Pitofsky pourra certainement vous éclairer davantage si vous l'invitez à comparaître, car il est nécessaire d'établir certains critères. Les avantages pour les consommateurs que prévoient de telles ententes peuvent comprendre une réduction des prix, une production accrue, et une meilleure qualité. Mais il doit, évidemment, s'agir d'éléments vérifiables.

    Autrement dit, vous devez être en mesure de prouver, si vous estimez que vous réaliserez ces gains en efficience, que même si ce que vous proposez risque d'avoir des effets négatifs, l'impact sur les consommateurs sera positif. Il ne suffit pas d'avancer des arguments purement hypothétiques qui s'appuient sur un raisonnablement socratique, disons—dans le genre, «en théorie, cela devrait marcher», alors que tous s'accordent à dire que cela ne peut pas marcher. L'effet sur les consommateurs ne peut être que punitif.

    Mais j'admets que le Tribunal a eu raison de présenter les arguments qu'il a avancés dans cette affaire.

    Monsieur le président, je vais en rester là. Il est fort probable que la décision rendue dans l'affaire Superior Propane donne lieu à une hausse des prix de 8 p. 100 ou plus, soit au moins 43 millions de dollars par année, qui influera surtout sur les petite et moyenne entreprises et les Canadiens à faible revenu ou ceux qui vivent en milieu rural où la demande de gaz naturel pour réchauffer et refroidir leur maison est relativement inélastique.

º  +-(1605)  

+-

    M. Brian Masse: Merci.

    Je n'ai plus de questions, monsieur le président.

+-

    Le président : Merci.

    Monsieur St. Denis.

+-

    M. Brent St. Denis (Algoma—Manitoulin, Lib.) : Merci, monsieur le président.

    Je voudrais tout d'abord vous remercier, Dan, pour cette initiative. Comme tous les députés, je suis un grand partisan des projets de loi d'initiative parlementaire. Mais cela ne veut pas dire que chaque projet de loi mérite d'être adopté ni que celui-ci ne devrait pas l'être.

+-

    M. Dan McTeague: Cela m'est déjà arrivé, d'ailleurs.

+-

    M. Brent St. Denis: Le fait est que très peu d'entre eux finissent par être adoptés.

    Ma question, Dan, vise à éclairer les membres du comité, comme moi, qui ne sommes pas là depuis le début. J'ai compris, d'après votre réponse à la question de Larry Bagnell, qu'il s'agit essentiellement de remplacer les paragraphes du projet de loi par cet amendement. Ai-je bien compris?

    M. Dan McTeague: Oui, c'est exact.

    M. Brent St. Denis: Je voudrais savoir dans quelle mesure vous nous demandez donc de changer d'orientation?

    Par rapport aux notions que sous-tendait votre projet de loi, s'agit-il d'un grand changement d'orientation que vous nous demandez là?

    Je vous demande de commencer par répondre à cette question-là, en utilisant des termes aussi simples que possible, car j'ai plusieurs autres questions à vous poser par la suite.

+-

    M. Dan McTeague: C'est une très bonne question. C'est un changement d'orientation qui vise essentiellement à établir un bon équilibre entre les deux. La première version que j'ai rédigée prévoyait qu'on ne pourrait pas approuver un fusionnement pour des raisons de gains en efficience à moins que les seuls bénéficiaires ne soient les consommateurs. Donc, cela éliminait complètement la possibilité de faire approuver un fusionnement pour obtenir des gains en efficience. Plusieurs personnes qui travaillent dans ce secteur d'activités ont d'ailleurs fait cette même observation.

    Mais j'ai pu bénéficier de l'analyse de l'affaire Superior Propane depuis, grâce surtout au comité. Si je ne m'abuse, monsieur le président, la recommandation 8 du comité que vous avez présidé portait sur les gains en efficience en établissant une comparaison entre différents pays du monde.

    Et des gains en efficience peuvent effectivement se justifier dans certains cas. Si les gains en efficience se traduisent par une plus grande innovation ou un meilleur choix de produits, ou s'ils prouvent d'une façon ou d'une autre, à cause de la nature du marché qui réalise ces gains en efficience, qu'il est très facile de s'implanter sur ce marché, eh bien, il est normal qu'il existe un certain équilibre. Plutôt que de réinventer la roue, j'ai examiné les facteurs déjà prévus à l'article 93 et dont le tribunal n'avait pas tenu compte en examinant la demande de Superior Propane. Mais il y a un argument encore qui est plus facile à justifier.

    Le propane revêt une grande importance dans votre circonscription électorale, monsieur St. Denis. Malgré ce qu'on disait dans la décision, à savoir qu'il y a d'autres solutions de rechange, c'est-à-dire,d'autres types de carburants pour chauffer les maisons ou, dans le cas des agriculteurs des Prairies, pour sécher les récoltes, le fait est que ce n'est pas une solution écologique que d'avoir à brûler du bois pour faire marcher son entreprise.

    Ce texte vise donc à établir un certain équilibre. J'espère que le comité aura aussi des observations à faire à ce sujet. Ce que je propose n'est certainement pas gravé dans la pierre et je pense que nous pourrons travailler ensemble à peaufiner la formulation, en nous appuyant sur le libellé actuel de la loi. Mais l'orientation que j'ai adoptée est la bonne, me semble-t-il, pour permettre d'établir cet équilibre.

º  +-(1610)  

+-

    M. Brent St. Denis: Pour éviter toute confusion, est-ce qu'on demande au comité d'examiner trois options—c'est-à-dire l'amendement, le projet de loi original, ou encore le statu quo? S'agit-il de choisir entre ces trois options ou est-ce qu'on laisse tomber complètement le projet de loi? J'ai l'impression qu'il s'agit maintenant de choisir entre deux possibilités : ne rien faire, ou adopter l'amendement.

+-

    Le président: Eh bien, pour que ce soit bien clair, nous examinons maintenant l'amendement.

+-

    M. Brent St. Denis: Et qu'arrive-t-il si le comité n'est pas d'accord avec l'amendement? Allons-nous reprendre l'examen du projet de loi à ce moment-là?

+-

    Le président: Non.

+-

    M. Brent St. Denis: Donc, le comité doit choisir entre ne rien faire ou adopter l'amendement.

+-

    Le président: C'est justement ça que M. McTeague nous a expliqué tout à l'heure.

+-

    M. Brent St. Denis: Très bien. J'aimerais obtenir des éclaircissements à ce sujet. Je vous pose la question en toute naïveté et innocence, en songeant à votre propre protection. Si cet amendement propose un changement très important, est-il toujours recevable? S'il représente un petit changement, on peut supposer qu'il est recevable. Je ne demandais si vous aviez cherché à déterminer si cet amendement est recevable ou non.

    J'ai essayé une fois de changer une motion, et on m'a dit: non, ce n'est pas possible, ce n'est pas recevable. Donc, je voulais vous poser cette question, en pensant un peu à votre propre protection.

+-

    M. Dan McTeague: Monsieur St. Denis, je suis déjà passé par là quand j'ai déposé des projets de loi qui n'étaient pas recevables. J'ai réussi à en faire adopter quelques-uns grâce à l'aide d'autres députés ici présents, y compris Mme Jennings.

    Le projet de loi apporte des modifications à l'article 96. Donc, à condition que l'amendement vise le même article du projet de loi et porte sur la même question de gains en efficience, ce que j'ai fait tout à fait à dessein, il me semble qu'il doit être recevable…et je ne crois pas qu'on contesterait sa recevabilité.

    La réponse fort simple et humble que je vous fais est que nous faisons face à un problème dont les conséquences sont apparues très clairement à nous tous au cours des deux dernières années, et duquel nous devons maintenant trouver une solution. Sinon, ce moyen de défense, ou plutôt le précédent de l'affaire Superior Propane, comme McFetridge et d'autres nous l'ont signalé, pourrait très bien être invoqué dans un avenir pas si éloigné pour justifier des monopoles qui sont dangereux et essentiellement illégaux et dont les conséquences pour la productivité de notre nation pourraient être fort négatives.

+-

    Le président: Merci beaucoup.

    Monsieur Bachand.

[Français]

+-

    M. André Bachand (Richmond—Arthabaska, PC): Merci beaucoup, monsieur le président.

    Comme le disait mon collègue du Bloc québécois, vous êtes effectivement le spécialiste en cette matière, ce que je ne suis pas. Alors, j'apprends.

    J'ai deux petites questions très rapides. N'ayant pas la chance d'être avocat, je ne comprends pas nécessairement la phraséologie de l'amendement ou même de certains articles de la loi. Plus tôt, on faisait une blague au sujet d'Air Canada; je vais y revenir plus tard. Lorsqu'une fusion est réalisée, on ne peut pas revenir en arrière. Il y a des contraintes légales, juridiques, qui empêchent la rétroactivité d'une loi.

    Mais que veut dire « fusionnement réalisé » par rapport à l'amendement?

+-

    M. Dan McTeague: Un fusionnement qui est déjà réalisé ne sera pas touché par l'amendement en quoi que ce soit. Ni ce projet de loi ni l'article en question n'ont de clause qui permette la rétroactivité. Je pense que c'est aussi une question de constitutionnalité. Je pense que personne n'aimerait être assujetti à cela.

    C'est simplement que quelqu'un qui se présente pour un fusionnement doit passer par le Bureau de la concurrence, à moins d'être en dessous d'un certain seuil. Si on parle de deux compagnies qui construisent des maisons et dont la valeur est de moins de 100 000 $ par année par exemple, il n'est pas question de fusionnement. C'est simplement une question d'entente dans les affaires. Mais quand ça concerne quelque chose qui déclenche une question visant 35 p. 100 du marché, d'habitude, les lignes de conduites qui sont établies en vertu de la Loi sur la concurrence, qui est dans le sommaire, présentent des étapes en vertu desquelles, s'il y a quelque chose qui pourrait être considéré comme anticoncurrentiel, cela demande l'intervention du Bureau de la concurrence. Si le Bureau de la concurrence trouve que cela entraînerait des conséquences néfastes dans la concurrence et dans les procès sur la concurrence, alors il serait question de déposer une objection devant le Tribunal de la concurrence, et c'est le Tribunal de la concurrence qui intervient en vertu des articles 100 à 110, je crois.

º  +-(1615)  

+-

    M. André Bachand: Donc finalement, la fusion réalisée n'est pas réalisée depuis plusieurs années; elle est en cours, si on comprend bien la phraséologie.

+-

    M. Dan McTeague: C'est ça.

+-

    M. André Bachand: Mais elle ne s'applique pas. C'est une question quand même très sérieuse. Air Canada, avec votre amendement...

+-

    M. Dan McTeague: ... ne sera pas touché par ça.

+-

    M. André Bachand: Non, mais j'aimerais savoir ce qui serait arrivé. Retournons dans le temps. Je suis une personne visuelle, j'aimerais comprendre très rapidement. Ce n'est pas une question catch 22. Je ne suis pas un spécialiste de la concurrence, mais selon vous, quel aurait été l'impact de cet amendement au niveau d'Air Canada ou d'un autre dossier, s'il y en avait eu un, pour qu'on puisse vraiment comprendre?

+-

    M. Dan McTeague: Si c'est une industrie qui est réglementée, elle ne peut pas être visée par la Loi sur la concurrence, au fond. L'article 94 fait une exception dans ce qui s'appelle les fusionnements sous une certaine section de la Loi sur les transports au Canada. Alors, c'est une exception.

    Vous vous souvenez qu'en 1998 ou en 1999, je crois, quand il était question d'un fusionnement entre Canadian Airlines et Air Canada, le Bureau de la concurrence n'avait pas une position directe. C'était plutôt le ministre des Transports qui avait, lui, à surveiller la concurrence dans son propre domaine. C'est une question qui est réglementée et à laquelle nous ne pouvons pas toucher. C'est la même chose avec les brevets pharmaceutiques; c'est un autre exemple.

[Traduction]

+-

    Le président: Nous avons dépassé le temps imparti.

[Français]

+-

    M. Dan McTeague: Le projet de loi ici ne peut pas viser des questions qui sont hors de portée de la loi, de ce qui est prescrit dans la loi. Merci.

[Traduction]

+-

    Le président: Merci beaucoup.

    Nous allons maintenant faire une pause de 30 secondes pour changer de témoin. Nous allons entamer tout de suite la deuxième partie de la réunion.

+-

    Mme Paddy Torsney (Burlington, Lib.): Avant la pause, serait-il possible d'examiner les motions déposées par M. McTeague en vue de changer l'accord conclu en comité mercredi dernier? Certains d'entre nous devons partir pour assister à d'autres réunions. Puisque c'est lui qui propose ces modifications, il me semble tout à fait normal que nous en discutions au cours de la période qui lui était réservée.

    Selon la pratique normale, les motions sont examinées au début de la réunion. Certains d'entre nous avons assisté à la réunion dans l'idée de faire ça.

+-

    Le président: Avons-nous le consentement unanime?

+-

    Mme Paddy Torsney: Le témoin devait comparaître au départ à 16 h 30, et je pense que nous pourrons donc faire adopter la motion d'ici 16 h 30.

+-

    Le président : C'est oui ou c'est non?

[Français]

+-

    Mme Paddy Torsney: Monsieur Bergeron, le témoignage était pour 16 h 30.

[Traduction]

+-

    Le président: Monsieur von Finckenstein, nous vous invitons maintenant à faire votre exposé.

+-

    M. Konrad von Finckenstein (commissaire à la concurrence, bureau de la concurrence, ministère de l'Industrie): Merci, monsieur le président.

    Je suis accompagné de deux collaborateurs: Gaston Jorré, Sous-commissaire principal de la concurrence, Direction générale des fusionnements, et Peter Sagar, Sous-commissaire de la concurrence.

    Je suis toujours heureux de comparaître devant le comité pour parler de la politique sur la concurrence. C'est donc avec plaisir que je participe à vos délibérations sur le projet de loi C-249.

º  +-(1620)  

[Français]

    J'aimerais profiter de l'occasion pour remercier le comité de son excellent travail lors de l'étude de la politique de la concurrence canadienne et surtout de son récent rapport au sujet de la modernisation du régime de la concurrence canadien. La prochaine ronde de modifications reflétera de très près les recommandations du comité et assurera que le Bureau de la concurrence a les outils nécessaires pour mettre en application et administrer efficacement la loi.

    Comme vous le savez, le Bureau de la concurrence fait la promotion et voit au maintien d'une concurrence juste pour que les Canadiens et les Canadiennes puissent bénéficier de bas prix, d'un choix dans les produits et de services de qualité. Notre travail est bénéfique pour les consommatrices et les consommateurs et contribue à une économie saine et robuste. La Loi sur la concurrence a un rôle vital dans ce processus.

[Traduction]

    Le projet de loi C-249 est tout à fait conforme à ses objectifs. Le projet de loi veut assurer que nous ne laissons pas de côté les consommateurs lorsque nous examinons les fusionnements impliquant des gains en efficience. Il devrait aussi sauvegarder la concurrence et ce, au profit des consommateurs et de l'économie canadienne.

    Avant de parler du projet de loi lui-même, j'aimerais décrire brièvement le contexte de l'examen d'une demande de fusionnement au Canada.

    Je m'excuse d'avance, monsieur le président, de vous faire un exposé liminaire un peu long, mais c'est une question complexe, et il ne m'est vraiment pas possible de bien expliquer la situation en moins de temps.

    En général, les fusionnements sont perçus comme des stratégies commerciales positives qui visent à augmenter la compétitivité. Toutefois, le Bureau examine attentivement les fusionnements qui empêcheraient ou diminueraient sensiblement la concurrence dans les marchés pertinents.

    En examinant les fusionnements, nous prenons en considération plusieurs éléments différents, y compris le niveau de concentration économique dans le marché pertinent et les parts de marché des parties au fusionnement. Le Bureau examine aussi des facteurs tels que la mesure dans laquelle la concurrence étrangère assurera une concurrence réelle dans les marchés pertinents; si l'une des parties au fusionnement est en faillite; la mesure dans laquelle seront disponibles des produits ou services de remplacement; l'existence et les effets de barrières à l'entrée sur le marché; la mesure dans laquelle il y aurait encore de la concurrence réelle dans les marchés pertinents; la possibilité que le fusionnement puisse entraîner la disparition d'un concurrent dynamique et efficace, et, le rôle des innovations sur les marchés pertinents. Nous tenons compte de tous ces facteurs.

    Après avoir examiné de tels facteurs, le Bureau décide s'il contestera un fusionnement ou permettra que celui-ci aille de l'avant. Nous n'interdisons pas les fusionnements; nous passons devant un tribunal pour lui demander d'empêcher qu'un fusionnement se réalise.

    Dans la plupart des cas, lorsque nous avons des préoccupations concernant une transaction, nous pouvons remédier au problème en travaillant avec les parties. Les parties au fusionnement présenteront souvent une proposition de modification. Si elles choisissent de réaliser le fusionnement malgré nos objections, nous le contestons devant le Tribunal de la concurrence. C'est alors au Tribunal de la concurrence de trancher l'affaire.

    Pendant les procédures devant le Tribunal, les parties au fusionnement peuvent faire valoir le moyen de défense dit des gains en efficience en vertu de l'article 96 de la Loi sur la concurrence. Pour que ce moyen de défense puisse déboucher sur une décision positive, les parties doivent convaincre le Tribunal que le fusionnement proposé permettra de réaliser des gains en efficience qui surpasseront et neutraliseront les effets anticoncurrentiels du fusionnement. Les termes clés dans ce contexte sont «surpasseront» et «neutraliseront».

    Depuis 1998, le Bureau de la concurrence a examiné plus de 1 300 propositions de fusionnement. Dans la plupart des cas, quand nous avions des préoccupations, nous avons été en mesure de résoudre ces difficultés sans devoir recourir aux procédures judiciaires. Très peu de transactions ont mené à des procédures en justice. Une d'entre elles était le fusionnement proposé de Superior Propane et d'ICG Propane.

[Français]

    Nous avons contesté le fusionnement parce qu'il résulterait en une diminution ou un empêchement sensible de la concurrence dans un grand nombre de marchés à travers le pays. Il mènerait aussi à la création de monopoles ou de quasi-monopoles dans 16 marchés locaux, et donnerait à Supérieur Propane une part du marché national de 70 p. 100. Le Tribunal de la concurrence a accepté à l'unanimité notre évaluation. Cependant, on a permis au fusionnement d'aller de l'avant parce que le Tribunal de la concurrence a conclu que les gains en efficience surpasseraient les effets anticoncurrentiels.

[Traduction]

    Je mentionne en passant que je trouve opportun que nous discutions aujourd'hui des gains en efficience, parce que le Bureau a décidé de ne pas faire appel de la dernière décision de la Cour fédérale d'appel dans l'affaire Superior Propane. Nous émettrons aujourd'hui un avis d'information à ce sujet. Après de longues procédures judiciaires, nous estimons que d'autres actions en justice ne permettraient aucunement de tirer au clair les conditions dans lesquelles on peut faire valoir ce moyen de défense. Seule une solution législative donnera les résultats escomptés.

    Je n'ai pas l'intention aujourd'hui d'entrer dans les détails de la demande de fusionnement de Superior Propane. Toutefois, je peux vous dire que le résultat est inacceptable, du point de vue de la politique sur la concurrence, pour deux raisons précises : d'abord, un fusionnement anticoncurrentiel survivra s'il permet de réaliser suffisamment de gains en efficience, même s'il pose de graves préjudices aux consommateurs. Prenons l'exemple des propriétaires de maisons dans les régions rurales du Yukon. Ces propriétaires seront les otages d'une entreprise qui a le monopole du produit dont ils se servent pour chauffer leurs maisons. Le gaz naturel et le mazout domestique ne sont pas des produits de remplacement acceptables pour les utilisateurs de gaz propane.

    Ma seconde objection est liée à l'interprétation donnée à l'article 96, qui est que la Loi sur la concurrence autorise la création de monopole. Selon nous, ce serait un effet tout à fait pervers si l'application de la Loi sur la concurrence faisait en sorte de sanctionner la création de monopoles. Il est clair que l'objet de la loi est de favoriser la concurrence, et non pas de créer des monopoles.

    Les gains en efficience sont évidemment un élément important de toute économie prospère, mais il est préférable que ces derniers se réalisent dans un marché concurrentiel qui permet non seulement de réaliser des gains en efficience, mais de favoriser un choix de produits plus vaste et l'innovation. Nous devons favoriser une économie concurrentielle qui augmente les occasions de participation du Canada dans des marchés mondiaux.

    En ce qui concerne le projet de loi C-249, lorsque la loi a été modifiée en 1986, le Parlement avait été saisi du rapport de la Commission d'enquête sur l'union économique et les perspectives de développement du Canada, c'est-à-dire le rapport de la Commission Macdonald, qui avait noté entre autres, l'urgence d'ouvrir les marchés canadiens et de permettre à l'industrie canadienne de mieux affronter la concurrence à l'échelle internationale. À l'époque, il était bien connu que les entreprises canadiennes faisaient face à un défi de taille en cherchant à s'adapter à un nouvel univers concurrentiel et les discussions concernant la Loi sur la concurrence traduisaient cette opinion-là. Cela apparaît clairement à l'article 96 de la loi qui non seulement fait mention des gains en efficience mais met l'accent, au paragraphe 96(2), sur l'augmentation des exportations et la substitution des produits nationaux à des produits étrangers.

º  +-(1625)  

[Français]

    Mais l'économie du Canada a changé de façon significative depuis 1986 à cause de la mondialisation, à cause de l'Accord de libre-échange entre le Canada et les États-Unis et à cause de l'Accord de libre-échange nord-américain. L'économie d'aujourd'hui est dynamique et basée sur le savoir. Nous avons une perspective grandement différente de l'importance de la concurrence comme étant un élément moteur du développement de notre économie.

    Mais nous avons une législation qui n'a pas changé et qui mène à des résultats incohérents avec la nouvelle réalité.

    Le projet de loi C-249 limiterait la mise en application de l'exception des gains en efficience afin d'assurer que les consommateurs en profitent. Ceci ne pourrait être réalisé pour protéger un fusionnement qui aurait pour effet d'éliminer complètement la concurrence.

[Traduction]

    Je sais qu'un amendement au projet de loi C-249 a récemment été proposé par le député parrain de ce dernier. Si je comprends bien, l'amendement proposé aurait pour objet de remplacer l'actuel paragraphe 96(1) par ce qui suit :

Pour déterminer, aux fins de l'article 92, si un fusionnement, réalisé ou proposé, empêche ou diminue sensiblement la concurrence, ou aura vraisemblablement cet effet, le Tribunal doit évaluer, outre les facteurs dont il peut tenir compte aux termes de l'article 93, si le fusionnement, réalisé ou proposé, a eu pour effet ou aura vraisemblablement pour effet d'entraîner des gains d'efficience, notamment des prix concurrentiels ou un choix dans les produits, dont profiteront les consommateurs et qui ne seraient vraisemblablement pas réalisés si le fusionnement réalisé ou proposé n'avait pas lieu.

    Donc, comme vous le constatez clairement, au lieu d'avoir à choisir entre les gains en efficience et les effets anticoncurrentiels, les gains en efficience potentiels seraient examinés dans le cadre de l'évaluation générale du fusionnement. Cet amendement garantirait que le Tribunal de la concurrence tiendrait compte des gains en efficience seulement lorsque ces derniers procurent des avantages aux consommateurs, qui pourraient prendre la forme de prix concurrentiels ou d'un meilleur choix de produits, et seulement quand les gains en efficience ne seraient vraisemblablement pas réalisés en l'absence du fusionnement.

    Le projet de loi C-249, dans sa forme actuelle, et l'amendement proposé cadrent tout à fait avec le traitement des gains en efficience dans d'autres pays. C'est une question importante, surtout dans un contexte multijuridictionnel, parce que toute différence de traitement en ce qui a trait aux critères retenus pour l'examen d'un projet de fusionnement, peut nuire à la capacité des entreprises de bien affronter la concurrence internationale. Aux États-Unis, la politique de concurrence vise à protéger les intérêts des consommateurs. Ainsi l'affirmation d'une entreprise selon laquelle elle réalisera des gains en efficience n'est prise en considération que si les prétendus gains ne risquent aucunement de donner lieu à des prix plus élevés pour les consommateurs. Au Royaume-Uni, une nouvelle loi qui entrera bientôt en vigueur permettra à l'« Office of Fair Trading » de tenir compte d'affirmations claires et quantifiables de gains en efficience qui seraient réalisés par suite d'un fusionnement lorsque ces derniers sont censés procurer aux consommateurs des avantages tangibles, soit des prix inférieurs, plus d'innovation et un plus grand choix de produits. Ces deux pays examinent les gains potentiels en efficience dans le contexte précis de la diminution de la concurrence qui pourrait en résulter, ce qui serait le cas du Canada s'il adopte les changements que propose le projet de loi C-249.

    Vous trouverez d'autres renseignements sur le traitement des gains en efficience dans d'autres pays dans une étude indépendante commandée par le gouvernement dans le cadre de sa réponse au huitième rapport du comité. Cette étude est disponible sur notre site Web.

    En principe, le projet de loi C-249 représente, dans la mesure où on apporte certaines modifications mineures à la formulation, une solution de rechange raisonnable par rapport au statu quo. L'annexe 1 présente une modification possible du projet de loi C-249, avec les changements mineurs de formulation dont je viens de parler. Donc, vous avez la possibilité d'adopter le projet de loi C-249, si vous le souhaitez, en y incorporant les quelques changements de formulation présentés à l'annexe 1. Cependant, même s'il s'agit là d'un modèle raisonnable, je préfère le changement proposé par le député qui parraine ce projet de loi, et que je viens de vous lire, puisqu'il permettra d'assurer un meilleur équilibre entre la protection des intérêts des consommateurs et l'importance qui sera accordée aux gains en efficience dans le cadre de l'examen d'une demande de fusionnement. Ainsi il vient compléter les critères d'évaluation précisés à l'article 93 tout en étant parfaitement conforme aux objectifs de la Loi sur la concurrence. Il permet également de prévoir une méthode de traitement des gains en efficience au Canada qui se rapproche davantage de celle adoptée par nos homologues internationaux.

    Avec la permission du comité, je voudrais proposer deux changements de pure forme à l'amendement que le député parrain propose d'apporter au projet de loi C-249, pour qu'il cadre davantage avec la formulation de l'article 93, et pour que les versions française et anglaise soient équivalentes. Je propose donc, dans la version anglaise, de remplacer le mot «shall» à la troisième ligne par «may», et d'ajouter le mot «and» à la sixième ligne, avant le mot «that». Ainsi les versions anglaise et française seront équivalentes. De même, dans la version française, je propose que vous remplaciez le mot «doit» par le mot «peut» à la troisième ligne.

º  +-(1630)  

[Français]

    En terminant, je voudrais rappeler que l'article 96 de la Loi sur la concurrence a besoin d'être modifié afin de clarifier la façon dont on devrait examiner les gains en efficience. Le but est de donner aux Canadiennes et aux Canadiens des dispositions sur l'examen des fusionnements comparables aux dispositions qu'on trouve à l'échelle internationale. L'autre but est de protéger les consommatrices et les consommateurs contre des augmentations de prix à un niveau anticoncurrentiel et une diminution des choix et de la qualité qui seraient le résultat des monopoles.

[Traduction]

    Merci, monsieur le président, je suis prêt à répondre à vos questions.

+-

    Le président: Monsieur Fitzpatrick, vous avez cinq minutes.

+-

    M. Brian Fitzpatrick (Prince Albert, Alliance canadienne): J'ai quelques brèves remarques à faire avant d'en venir à mes questions. Il semble que c'est seulement dans des pays comme le Canada qu'on valorise les monopoles et la concentration du pouvoir et qu'on arrive à trouver des arguments pour justifier ce genre de choses en parlant de gains en efficience et de valeur sociale. Je pense qu'on peut conclure que Karl Marx ou du moins certaines de ses idées sont encore bien admises dans le monde d'aujourd'hui.

    En ce qui concerne l'argument relatif aux gains en efficience... je ne suis pas économiste et j'ai du mal...

    Une voix: Karl Marx en était un, je pense.

    M. Brian Fitzpatrick: ... à l'accepter, mais il me semble que ce qui permet de vraiment assurer l'utilisation efficace des capitaux , etc., c'est un marché concurrentiel, parce que si vous faites mal les choses et que vous êtes inefficace, vous allez faire faillite, alors que votre concurrent va réussir.

    Dans ce contexte, je me demande si le Tribunal et vous, étant donné votre façon d'analyser les demandes de fusionnement, etc., ne cherchez pas en quelque sorte à déterminer vous-même la composition du marché en décidant qui seront les gagnants et les perdants, ce qui soulève nécessairement une question d'équité?

    Pour ma part, je suis convaincu que dans un système de marché, si vous prenez trop d'expansion et que vous cessez d'être efficace, parce que votre administration est hypertrophiée, à ce moment-là un autre concurrent va vous faire disparaître. Songez aux exemples de GM, d'IBM et de Xerox; il y a toute une liste d'entreprises qui se trouvaient justement dans cette catégorie mais si leur situation a changé ce n'est pas à cause d'un Bureau de la concurrence; c'est le marché qui a fait baisser leur cote.

    Je me demande si ce rôle appartient vraiment au Bureau de la concurrence, et s'il est normal que le Bureau cherche à déterminer comment le gâteau sera réparti au moment d'examiner un projet de fusionnement.

    Ma deuxième question, qui concerne les conséquences de l'affaire Superior Propane, est celle-ci : ne pensez-vous pas que toute cette procédure d'examen est dysfonctionnelle à présent, vu la résultat dans l'affaire Superior Propane, et ce après quatre ans de procédures judiciaires?

º  +-(1635)  

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Premièrement, personne n'applique le critère des gains en efficience que nous avons à l'article 96 de la loi. Les assises théoriques de ce critère sont tout à fait logiques. Si deux compagnies fusionnent et réalisent des gains en efficience, il est possible que le coût unitaire du produit baisse tellement à un moment donné qu'il serait normal que l'entreprise fusionnée baisse ses prix, puisqu'elle pourra ainsi vendre davantage et accroître ses bénéfices.

    Donc, d'un point de vue purement théorique et logique, on peut certainement conclure qu'il serait possible que deux entreprises qui fusionnent puissent éventuellement baisser leurs prix. Je dis «d'un point de vue purement théorique», mais dans la pratique, le résultat serait justement celui que vous venez de décrire. Le fait est que lorsqu'on permet la création d'un monopole ou d'un quasi-monopole, l'entreprise qui se trouve en situation monopolistique ne cherche plus à être efficace, devient moins sérieuse et donc inefficace.

    Vous dites que notre travail consiste à déterminer la répartition du gâteau entre tous les intervenants. Mais ce n'est pas du tout ce en quoi consiste notre travail. Notre rôle consiste plutôt à nos assurer que le marché est concurrentiel, en permettant aux forces du marché de déterminer qui seront les gagnants et les perdants. Voilà ce que nous nous efforçons de faire. C'est pour cela que lorsque deux entreprises veulent fusionner mais que cette concentration leur donne trop de pouvoir, puisqu'elles sont en position dominante, nous devons intervenir pour leur dire: non, vous ne pouvez pas faire ça.

    Voilà ce que nous avons cherché à faire dans le cas de Superior Propane. Nous avons réussi à convaincre le Tribunal et tout le monde que ce fusionnement donnerait lieu à une diminution sensible de la concurrence. Normalement, le tout se serait arrêté là, mais il s'agissait d'un des rares cas où les parties décidaient l'invoquer l'argument des gains en efficience. Nous avons contesté leur analyse et nous avons longuement débattu de la manière de calculer ces gains et la mesure dans laquelle les prétendus gains en efficience neutralisaient les effets anticoncurrentiels. Pour nous, il était clair que les effets anticoncurrentiels ne seraient pas neutralisés. Mais le Tribunal était de l'avis contraire, et donc c'est eux qui ont eu gain de cause.

    Nous avons donc interjeté appel de cette décision. Le Tribunal était d'avis que les critères utilisés n'étaient pas appropriés et a suggéré qu'on les applique différemment. Nous avons donc refait notre analyse en les appliquant différemment. Mais nous avons toujours obtenu le même résultat. Nous étions d'avis que leur interprétation n'était pas la bonne. Nous sommes donc passés devant la Cour d'appel. La Cour d'appel a, elle aussi, dit non, c'est la bonne interprétation.

    Alors j'estime qu'il faut maintenant mettre un terme aux procédures judiciaires. Ce critère est si difficile à appliquer et d'un point de vue purement conceptuel, il n'est pas du tout approprié en ce qui nous concerne. Il est de loin préférable de prévoir un critère, comme le fait le projet de loi C-249, selon lequel les fusionnements ne seront approuvés que lorsqu'ils procurent aux consommateurs des avantages tangibles. Et dans la deuxième partie du projet de loi C-249, on dit aussi qu'il ne faut pas que les fusionnements donnent lieu à la création d'un monopole.

+-

    M. Brian Fitzpatrick: Mais comment serez-vous en mesure de contrôler ce genre de choses?

+-

    Le président: Merci beaucoup, monsieur Fitzpatrick.

    Monsieur Bagnell.

+-

    M. Larry Bagnell: Je suis très heureux de vous revoir, Konrad. Nous travaillons ensemble depuis une vingtaine d'années, et je suis donc content d'apprendre que vous êtes favorables à l'adoption de ce projet de loi. J'ai juste quelques questions à vous poser.

    D'abord, je suis ravi que vous ayez cité l'exemple du Yukon, car il prouve bien ce qui ne va pas dans la loi actuelle. À cause de l'affaire Superior Propane, il existe à présent un monopole au Yukon. Il existe de nombreuses cabanes et d'habitations hors piste où les gens n'ont pas accès au gaz naturel ni même au mazout. Ils n'ont donc plus beaucoup de choix, puisqu'ils sont devenus les otages d'une entreprise qui a maintenant le monopole. Rien n'empêchera cette dernière de beaucoup hausser ses prix. Il y a déjà eu des hausses importantes, et ces gens-là sont forcément les victimes de ce genre de pratique. Je sais que vous avez contesté ça et que nous nous sommes battus collectivement pour empêcher que cela se réalise, mais nous avons perdu. Alors, comme vous dites, il faut maintenant modifier la loi.

    Est-ce que l'amendement proposé par M. Dan McTeague ou même les changements qu'il a proposés au départ aurait permis à votre avis d'obtenir un résultat différent dans l'affaire Superior Propane, ou aurait-il au moins aidé?

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Oui, absolument. Il est tout à fait clair que la loi, telle qu'elle était rédigée au départ, notamment au paragraphe 96(5), ne prévoit absolument pas la création de monopoles ou de quasi-monopoles, si bien qu'il n'aurait pas été possible de réaliser ce fusionnement au Yukon.

    Le nouvel amendement prévoit qu'un fusionnement ne pourra pas être approuvé si l'on constate que ce fusionnement diminuera sensiblement la concurrence. Autrement, on pourra faire une première analyse pour tout examiner, y compris les gains potentiels en efficience et toutes sortes d'autres facteurs positifs dont il pourrait être question. Mais pour prendre votre exemple du Yukon, où ce fusionnement aurait créé un monopole, il n'aurait pas été suffisant d'avancer l'argument des gains en efficience pour faire approuver ce fusionnement au Yukon. Dans l'un ou l'autre cas, ça ne marcherait pas.

º  +-(1640)  

+-

    M. Larry Bagnell: C'est formidable. On peut donc faire l'analyse en fonction d'une région particulière. C'est-à-dire que si les entreprises sont d'envergure nationale, on peut les empêcher de fusionner dans une petite région du pays comme le Yukon.

+-

    M. Konrad von Finckenstein: L'un des juges de la Cour fédérale a émis une opinion dissidente dans le cas de cette dernière décision. Il a justement fait valoir cet argument qu'il aurait fallu faire l'analyse en fonction de chaque marché, si bien que dans ces marchés où un monopole ou un quasi-monopole serait créé, la demande serait refusée. Dans d'autres marchés où la concurrence aurait continué de s'exercer, même en étant grandement diminuée, il aurait été possible d'approuver la demande. Le tribunal aurait donc pu orienter sa décision de cette façon. Mais il n'a pas cru bon de le faire.

+-

    M. Larry Bagnell: Cela représente donc un excellent précédent pour les consommateurs.

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Non, c'était une opinion dissidente, ce qui veut dire que la majorité des juges n'ont pas été de cet avis, mais il est clair que ce juge avait exactement les mêmes interrogations et préoccupations que moi. Il n'est tout simplement pas approprié d'avoir recours à la Loi sur la concurrence pour créer un monopole ou pour faire fonctionner par voie judiciaire la création de ce monopole. Il me semble que l'objet de la loi est tout à fait l'inverse. La loi vise à maintenir et à favoriser la concurrence, et non pas à la détruire.

+-

    M. Larry Bagnell: C'est très bien. Je suis bien content de savoir que nous tenons compte de plus en plus de la situation de marchés spécifiques, parce que les petits marchés du nord et du Canada rural, et peut-être même dans l'est et l'ouest, risquent d'être laissés pour compte, par rapport à l'ensemble des consommateurs, si l'on considère le Canada comme un seul immense marché—ou même si on ne tient compte que des intérêts de la majorité des consommateurs. Je suis donc très content de savoir que cet amendement sera si utile, parce que les gens du Yukon ont connu une situation très difficile.

    Je peux concevoir que la situation serait la même pour d'autres types de fusionnements, et que des marchés éloignés ou ruraux auraient énormément de mal à se défendre en l'absence d'un tel changement.

+-

    Le président: Merci beaucoup, monsieur Bagnell.

    Monsieur Fitzpatrick.

+-

    M. Brian Fitzpatrick: J'ai juste une question complémentaire. Si l'argument des gains en efficience est admis—et je suppose qu'il l'a été dans le cas de Superior Propane—et donc, si on peut prétendre que le fusionnement proposé sera bénéfique aux consommateurs et à la société en général, quel genre de mécanisme de surveillance ou de contrôle existe-t-il à l'heure actuelle pour nous permettre de réexaminer la question et de prendre d'autres mesures si les prétendus avantages ne se concrétisent pas?

    Je trouve qu'il est facile de prétendre, un peu dans le vide, que toutes sortes d'avantages suivront l'approbation d'un fusionnement et que tout le monde va y trouver son compte, mais l'expérience démontre que bon nombre de fusionnements échouent sur ce plan-là, puisqu'ils ne donnent pas les résultats escomptés. Il suffit de voir le nombre de catastrophes qu'ils ont connus sur Wall Street au cours des cinq ou six dernières années pour s'apercevoir que les fusionnements peuvent parfois être désastreux. Que faire donc si l'on s'aperçoit que les avantages promis ne se sont pas réalisés? Comment faire pour réexaminer la situation?

+-

    M. Konrad von Finckenstein: C'est justement pour cette raison que nous étions si opposés, parce qu'on part du principe que le fusionnement se réalisera, que ce sera une réussite et que les gains en efficience promis se concrétiseront. Mais si jamais ils ne se concrétisent pas, vous aurez approuvé la création d'un fusionnement qui est anticoncurrentiel. Le Tribunal était d'avis que ce fusionnement serait anticoncurrentiel, et les prétendus gains en efficience qui devraient neutraliser les effets anticoncurrentiels ne se concrétiseront peut-être jamais.

    Il peut aussi arriver que les gains en efficience se réalisent, mais qu'arrive-t-il, par exemple, si l'entreprise est sous contrôle étranger? À ce moment-là, il s'agit d'un fusionnement anticoncurrentiel, puisque les prix augmentent au Canada, mais ce sont des actionnaires vivant à l'étranger qui profitent des avantages, sans nécessairement les réinvestir dans l'économie canadienne. Par conséquent, l'argument économique classique, selon lequel un dollar est un dollar et tout gain en efficience finit par être répercuté sur l'économie et par créer des emplois dans une usine quelque part, n'est pas forcément valable.

    L'article 96, tel qu'il est actuellement formulé, pose toutes sortes de problèmes. C'est pour ça qu'à mon avis, l'amendement proposé, qui prévoit que les gains en efficience ne pourront pas être considérés comme ayant le potentiel de neutraliser les effets anticoncurrentiels, me semblent valables. Il ne convient pas de les voir sous cet angle-là. Il est préférable de considérer d'éventuels gains en efficience comme un facteur parmi tant d'autres.

    C'est pour cette raison que j'ai voulu prendre le temps au début de mon exposé liminaire pour mentionner les huit facteurs dont nous tenons compte en décidant ou non d'approuver un fusionnement. Et à notre avis, il convient d'y ajouter un neuvième, c'est-à-dire l'éventuel impact du fusionnement sur l'efficience des entreprises concernées. Là il s'agirait de faire exactement ce que vous proposez. Il faudrait se poser des questions comme celle-ci : Est-il probable que ce fusionnement soit une réussite? Quel est le bilan de cette industrie et des entreprises qui font la demande, etc.? Ce serait évidemment une considération très importante.

º  +-(1645)  

+-

    Le président: Monsieur Fitzpatrick.

+-

    M. Brian Fitzpatrick: J'ai un dernier commentaire à faire. Toutes sortes de fusionnements se sont réalisées dans d'autres secteurs d'activités, entre autres, l'industrie du transport aérien, et selon l'analyse faite par quelqu'un aux États-Unis, il semblerait que sur 18 ou 19 fusionnements dans l'industrie du transport aérien, 18 d'entre eux, selon lui, ont été un échec total. Cela m'a rappelé le fusionnement qui s'est réalisé au Canada, et je suppose qu'à l'époque, quelqu'un avait dû faire valoir les mêmes arguments relatifs aux gains en efficience: nous allons fusionner les entreprises et créer un monopole, et tout ira pour le mieux dans le meilleur des mondes. Mais regardons la situation actuelle.

+-

    M. Konrad von Finckenstein: En réalité, cet argument n'est pas souvent avancé. Les parties ne font valoir cet argument que dans un cas comme celui-ci, où le fusionnement proposé semble à première vue anticoncurrentiel, si bien que vous devez avancer l'argument des gains en efficience pour le faire paraître sous un jour favorable et démontrer que ce dernier permettra de réaliser des gains qui ne semblent pas évidents de prime abord.

    Mais vous avez raison : la majorité des fusionnements ne sont pas une réussite. Voilà justement ce qu'ont démontré de récentes études menées par la FTC.

+-

    Le président: Merci, monsieur Fitzpatrick.

    Madame Jennings.

+-

    Mme Marlene Jennings (Notre-Dame-de-Grâce—Lachine, Lib.): Oui, monsieur le président.

    Le député d'en face a posé la question que je voulais poser, et donc, ça va pour moi.

+-

    Le président: Monsieur Marcil.

[Français]

+-

    M. Serge Marcil: Merci beaucoup, monsieur le président.

    Ce que vous proposez de changer dans la version française ou même dans la version anglaise, au paragraphe 96(1), c'est le mot «doit», qui devrait être remplacé par le mot «peut», à la troisième ligne.

    Quelle est la raison que vous alléguez pour ce changement? Est-ce que «doit» suppose que c'est une obligation? «Peut» n'est pas nécessairement une obligation, donc ça peut être oui ou non, mais il doit y avoir une raison juridique.

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Sans doute. Si vous regardez l'article 93 de la loi actuelle, on y utilise le mot «peut»: «...le Tribunal peut tenir compte des facteurs suivants:», de a) à h). La modification suggérée ajoute à ces facteurs-là que vous pouvez considérer aussi l'efficience.

    Pour être conforme à l'article 93, on doit dire «peut» au lieu de «doit».

[Traduction]

+-

    M. Serge Marcil: Merci beaucoup. Merci, monsieur le président.

+-

    Le président: Monsieur McTeague.

+-

    M. Dan McTeague: Merci, Commissaire, de votre présence. Je vous remercie non seulement pour les observations que vous avez faites aujourd'hui, mais parce que je sais que ce processus a dû vous sembler très long et pénible.

    Avant d'en arriver aux changements que vous proposez au texte, peut-être pourriez-vous nous dire s'il est possible, à votre avis, qu'on ait recours à l'avenir au précédent établi dans l'affaire Superior Propane. Je sais que plusieurs calculs et modèles économiques ont été utilisés dans ce contexte. Certains d'entre nous connaissons ces modèles, mais étant donné que ce moyen de défense des gains en efficience pourrait causer du tort aux consommateurs, il serait peut-être bon que vous nous disiez si la possibilité existe, selon vous, qu'on ait recours au précédent établi dans l'affaire Superior Propane pour justifier un fusionnement à l'avenir?

+-

    M. Konrad von Finckenstein: C'est justement ça que nous craignons—que les secteurs d'activités qui ne comptent plus que deux ou trois acteurs pourront désormais invoquer l'argument des gains en efficience pour justifier un fusionnement, alors que dans ce contexte, la situation est déjà loin d'être idéale. Il s'agirait à ce moment-là d'industries bien établies qui sont en pleine maturité.

    Mon collègue, M. Jorré, qui est responsable de la Direction générale des fusionnements, pourrait sans doute vous donner de meilleurs exemples.

    Gaston.

+-

    M. Gaston Jorré (sous-commissaire principal de la concurrence, Direction générale des fusionnements, Bureau de la concurrence, ministère de l'Industrie): Je pense qu'il est préférable que je ne parle pas d'un secteur d'activités en particulier. Après tout, il est bien possible qu'on reçoive des demandes d'approbation venant de ces secteurs-là. Mais comme vous l'a déjà indiqué le commissaire, pour les secteurs d'activités où il existe déjà un degré élevé de concentration et où les conditions s'y prêtent—parce qu'il faut effectivement examiner tous les faits avant de déterminer en quoi consistent les gains en efficience et les effets potentiellement anticoncurrentiels—il y a certainement le risque que l'analyse globale des faits relatifs à d'autres secteurs d'activités nous mène à conclure, à supposer qu'on invoque le précédent de l'arrêt Superior Propane, qu'une transaction anticoncurrentielle puisse éventuellement être approuvée. Une telle conséquence ne serait bénéfique ni pour les clients, ni pour les consommateurs, et voilà justement ce que nous craignons.

º  +-(1650)  

+-

    M. Dan McTeague: Monsieur le commissaire, monsieur Jorré et monsieur Sagar, étant donné qu'on n'a accordé aucun poids à la possibilité, dans un scénario comme celui de Superior Propane, que les actionnaires, plutôt que les consommateurs, soient avantagés, est-ce qu'il a été question jusqu'à présent de ce qui se produirait si certains de ces actionnaires sont des entités étrangères, encore une fois dans un contexte où la richesse des consommateurs ou encore les gains en efficience serait transférée à un autre pays, peu importe lequel—l'Australie, le Royaume-Uni, ou les États-Unis—alors qu'on n'aurait jamais approuvé le fusionnement sous prétexte de gains en efficience qui seraient réalisés si cela devait en être la conséquence? Est-ce que cette question a été examinée dans le cadre de votre travail?

+-

    M. Gaston Jorré: Non, la question ne s'est jamais posée, et le critère actuel, retenu dans l'affaire Superior Propane, est tout à fait neutre pour ce qui est des actionnaires.

    J'ajouterais qu'on a un peu tenu compte de la question du transfert de la richesse dans la décision finale, mais on y a accordé très peu de poids, et cela n'a donc pas influé sur le résultat final.

+-

    M. Dan McTeague: Je comprends.

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Comme vous le savez certainement, dans le cadre de l'administration et de l'application de la Loi sur la concurrence, on ne tient pas compte de la propriété et de facteurs de ce genre. Nous nous intéressons surtout à la question de la concurrence et de l'effet de ce qui est proposé sur le marché canadien. Qu'une société soit sous contrôle canadien ou étranger n'a absolument aucune importance.

    Mais comme je l'indiquais dans mon exposé liminaire, ou encore en réponse à une question qui m'a été posée, cette question devient tout à fait pertinente dans le contexte où une entreprise fait valoir l'argument des gains en efficience, étant donné surtout ce que prévoit actuellement l'article 96.

+-

    M. Dan McTeague: J'ai une question concernant le changement de formulation que vous proposez. Dans la version anglaise, vous recommandez de remplacer le mot «shall» à la troisième ligne par le mot «may».

    Je sais que cette formulation-là est celle qu'on retrouve à l'article 93, où on dit ceci: «Lorsqu'il détermine […] si un fusionnement […] empêche ou diminue sensiblement la concurrence […], le Tribunal peut tenir compte des facteurs suivants […]» Mais selon moi, et mon interprétation est peut-être dépassée, le mot «may» semble laisser une grande latitude au Tribunal, si bien que ce dernier pourrait très bien décider de ne pas tenir compte de ces facteurs. À ce moment-là, nous risquerions de nous heurter au même problème que nous avons connu dans l'affaire Superior Propane, où on n'a attaché aucune importance aux effets du fusionnement sur les consommateurs.

    Pourriez-vous m'expliquer pourquoi nous devrions opter pour le mot «may», plutôt que le mot «shall»? Pour moi, c'est un peu contraire à notre objectif, puisque le Tribunal aura toute latitude pour décider, en fin de compte, qu'il n'est pas nécessaire de tenir compte de facteurs qui sont essentiels pour établir un équilibre entre des intérêts potentiellement contradictoires.

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Eh bien, si vous gardez le mot «shall», comme le prévoit votre projet d'amendement, cela voudra dire que vous devrez, dans chaque cas, déterminer si le fusionnement peut donner lieu à des gains en efficience. Donc, le tribunal devra examiner ce facteur qu'il le veuille ou non, et que les parties aient invoqué ou non cet argument-là. Comme la question des gains en efficience n'est pas pertinente dans la plupart des cas, nous estimons que cela ne tient pas debout.

    L'article 93 prévoit actuellement qu'on peut tenir compte de certains facteurs qui sont ensuite énumérés. À ce moment-là, c'est-à-nous, si nous contestons le bien-fondé d'un fusionnement, de présenter des éléments de preuve relatifs aux facteurs qui nous semblent pertinents, et à l'autre partie, de présenter sa contre-preuve.

    Si l'autre partie a l'intention d'invoquer les gains en efficience pour justifier sa demande, nous voudrons certainement produire des preuves qui démontrent dans quelle mesure ces gains en efficience sont pertinents ou non. Il est normal que cela se fasse, encore que tout dépend de la preuve présentée par les parties devant le Tribunal.

    Si vous gardez le mot «shall», comme dans votre proposition, ce facteur devra être pris en compte chaque fois qu'il y a contestation d'un fusionnement. À mon avis, telle n'était pas votre intention. Vous voulez plutôt vous assurer que le Tribunal tiendra compte de ce facteur selon le contexte, et à mon avis, l'amendement que nous proposons atteindra cet objectif-là, si vous acceptez de remplacer le mot «shall» par le mot «may.

+-

    M. Dan McTeague: J'étais convaincu de l'importance de ce mot-là, et je vous remercie donc pour cette précision.

    Si le mot «may» à l'article 93 m'inquiétait aussi, c'est tout simplement parce que…mais dans ce cas, il faudrait un autre projet de loi d'initiative parlementaire. Je n'ai certainement pas l'intention d'imposer un autre fardeau au comité. Mon mandat de vice-président pourrait non seulement devenir particulièrement pénible et désagréable, mais être gravement écourté.

    Monsieur le président, je crois savoir que M. Marcil voudrait poser une question, et je suis donc tout à fait décidé à lui céder ma place.

+-

    Le président: De toute façon, votre temps était presque écoulé.

[Français]

+-

    M. Serge Marcil: Merci, monsieur le président.

    Je reviens au même sujet. À l'article 93, on dit: «...le Tribunal peut tenir compte des facteurs suivants:», et il y en a une série, c'est-à-dire qu'il peut tenir compte de certains de ces facteurs comme il peut tenir compte de l'ensemble des facteurs, comme il peut aussi ne pas en tenir compte.

    Dans le cas de la cause de Supérieur Propane, si on avait eu, à la place de «peut», «...le Tribunal doit tenir compte des facteurs...», est-ce que vous pensez--je sais bien que c'est une question hypothétique--que les conclusions du Tribunal de la concurrence auraient été différentes?

º  +-(1655)  

+-

    M. Gaston Jorré: La preuve ayant été la même et le raisonnement présumé du Tribunal de la concurrence et de la Cour d'appel ayant été le même, je ne vois pas comment le résultat aurait pu être différent. L'effet principal de mettre «doit» serait que même dans les cas où les parties à la transaction ne soulèvent pas des questions d'efficacité, il faudrait quand même étudier la question. C'est beaucoup plus simple de dire «peut», pour que ça s'applique uniquement aux cas où c'est soulevé.

+-

    M. Serge Marcil: Merci, c'est clair.

[Traduction]

+-

    Le président: Très bien.

    Monsieur Masse.

+-

    M. Brian Masse: Je veux m'assurer d'avoir bien compris. Le danger que j'entrevois avec cette formulation-là, c'est que cela permettrait, je suppose… par exemple, dans un cas semblable à celui de Superior Propane, serait-il possible qu'un tribunal décide de ne pas tenir compte du mot «may» et donc de ne pas tenir compte de certains facteurs sans être tenu de répondre de cette décision? Serait-il possible que le tribunal décide de ne pas tenir compte de certains facteurs sans avoir à expliquer pourquoi?

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Quand une affaire passe devant le Tribunal, l'une des parties présente sa preuve, et l'autre, présente une contre-preuve. Le Tribunal doit ensuite porter un jugement sur quels faits et arguments lui semblent pertinents. Il peut décider de ne pas tenir compte de certains faits ou arguments. Il est peu probable qu'il l'ait fait dans un cas comme celui de Superior Propane, où toute la preuve s'articulait autour de cette question de gains en efficience, puisqu'un très grand nombre de témoignages et d'éléments de preuve portaient là-dessus.

    Mais on ne peut absolument pas obliger le Tribunal à faire certaines choses. Si on dit «may» dans le texte, le Tribunal pourra décider de ne pas en tenir compte. Par contre, si vous dites «shall», cela voudra simplement dire que le Tribunal devra examiner cet aspect-là, mais pas nécessairement sous un angle précis.

    Le point le plus important dans tout cela est celui qu'a soulevé Gaston tout à l'heure, à savoir que dans chaque cas, il serait nécessaire de tenir compte du facteur des gains en efficience même si aucune des parties ne le souhaitaient et n'avaient présenté une preuve à ce sujet, ce qui ferait nécessairement perdre beaucoup de temps au tribunal.

+-

    M. Brian Masse: Je n'ai jamais assisté aux audiences d'aucun de ces tribunaux, et c'est pour cela que je vous pose la question, pour être sûr. On dirait que ce serait possible, encore que ce serait peu probable, à moins que des arguments substantiels soient présentés à ce sujet par…

+-

    M. Konrad von Finckenstein : C'est exact.

+-

    Le président: Monsieur Bachand, voulez-vous intervenir?

[Français]

+-

    M. André Bachand: Non, merci.

[Traduction]

+-

    Le président: Madame Sgro.

+-

    Mme Judy Sgro (York-Ouest, Lib.): Merci, excusez-moi d'arriver à la fin de votre témoignage, mais je me permets de préciser que j'ai tout de même bien suivi les discussions à ce sujet.

    Vous avez parlé des ressources qui ont dû être consacrées au dossier de Superior Propane… Je présume que vous, comme tous les autres, n'avez pas des ressources illimitées pour effectuer ce genre de travail, surtout que ça dure depuis un moment…je pense qu'il a fallu deux ans pour régler cette question, n'est-ce pas?

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Oui, plus que ça.

+-

    Mme Judy Sgro: Donc, qu'allez-vous faire à l'avenir, pour être en mesure d'examiner ces questions en disposant des ressources nécessaires? Ce serait une raison de ne pas continuer; vous auriez tout simplement besoin de trop de ressources pour effectuer ce travail.

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Ce sont deux excellents arguments.

    Nous manquons effectivement de ressources. D'ailleurs, vous le savez déjà. J'ai déjà fait cette observation devant le comité. Le comité a aussi reconnu cette réalité dans son dernier rapport. Nous ne disposons pas de moyens suffisants pour bien faire notre travail. Ça, c'est tout à fait clair. J'espère qu'on finira par résoudre ce problème un de ces jours, et je serais très reconnaissant envers le comité de l'aide qu'il pourrait nous fournir à cet égard.

    Cela dit, comme tout organisme chargé d'appliquer la loi, il faut établir ses priorités et répartir ses ressources en fonction de ses priorités. À notre avis, il fallait absolument tirer au clair cette question des gains en efficience, et nous avons trouvé tout à fait normal de nous battre pour contester le droit d'une entreprise de tirer profit d'un effet pervers de l'article 96 de la loi. Nous avons donc participé à quatre procédures judiciaires différentes pour contester les décisions qui avaient été prises.

    Nous avons malheureusement perdu, et pour nous, il est clair que notre interprétation de cet article et de la façon dont il devrait s'appliquer ne correspond absolument pas à l'opinion du Tribunal à cet égard. Soit. Le Tribunal a rendu sa décision, et nous devrons nous y conformer. Mais le gouvernement a toujours la possibilité de modifier la loi s'il est d'accord avec le Bureau pour reconnaître que ce résultat n'est pas souhaitable, et c'est justement ce que nous espérons.

    Mais à notre avis, des décisions comme l'arrêt Superior Propane sont forcément des décisions qui établissent un précédent. Il faut donc les contester, et nous trouverons les ressources nécessaires pour le faire, parce qu'il est essentiel qu'on tire au clair ces questions-là.

»  +-(1700)  

+-

    Mme Judy Sgro: Vos collègues voudraient-ils ajouter quelque chose?

+-

    M. Peter Sagar (sous-commissaire de la concurrence, Direction générale de la politique de la concurrence, ministère de l'Industrie): À mon avis, des affaires comme celle de Superior Propane occasionnent l'utilisation de tellement de ressources, et donc, de tellement de dépenses, du moment qu'il est question d'établir un précédent, ne serait-ce que pour les études économétriques et pour le recrutement d'experts et d'avocats externes. De plus, cela représente une charge massive pour l'économie, car Superior Propane a dû évidemment utiliser autant de ressources pour se défendre. C'est très bien pour le barreau, bien entendu, et j'ai beaucoup d'amis avocats que j'estime beaucoup, mais je dirais que cela ne correspond sans doute pas à la meilleure utilisation ni de nos ressources, ni des leurs.

    Pour moi, l'amendement qui est proposé sera extrêmement utile s'il permet de tirer au clair cet aspect-là de la loi, parce que nous n'aurons plus à ce moment-là à contester continuellement des décisions de ce genre qui reposent sur des études économétriques fort techniques. Donc, dans ce sens-là, c'est une bonne initiative.

+-

    Mme Judy Sgro: Donc, vous êtes favorable à l'amendement et à l'initiative qui est prise à cet égard.

+-

    M. Peter Sagar: Oui.

+-

    Le président: Merci, madame Sgro.

+-

    Mme Judy Sgro: Est-ce que mon temps est écoulé?

+-

    Le président: Oui, vous aviez cinq minutes, et de toute façon, nous avons déjà examiné cette question-là.

+-

    Mme Judy Sgro: Je vous présente mes excuses.

+-

    Le président: Je vais permettre à notre attaché de recherche en droit de poser une question d'un maximum de 30 secondes et d'obtenir une petite réponse, et ensuite nous allons suspendre les travaux.

+-

    M. Geoffrey Kieley: Monsieur le commissaire, certains laissent entendre que si nous faisons passer le facteur des gains d'efficience à l'article 93, plutôt que de le laisser à l'article 96, cela suppose une analyse qualitative. À votre avis, l'analyse continuera-t-elle d'être quantitative, dès lors qu'il est question de gains en efficience?

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Le texte qui est proposé prévoit qu'on tienne compte du facteur des gains en efficience, et pour moi, cela ne peut se faire qu'au moyen d'une analyse quantitative. Il s'agit donc d'essayer de déterminer dans quelle mesure le fusionnement peut occasionner des gains en efficience et dans quelle mesure ces derniers seront répercutés sur les consommateurs qui bénéficieront alors de prix plus faibles.

    Cet article repose sur toutes une série d'hypothèses, mais l'argument qui le sous-tend est tout de même logique et rationnel. Ce n'est pas un argument d'ordre qualitatif.

+-

    Le président: Encore une fois, merci infiniment d'avoir accepté de comparaître devant le Comité de l'industrie. Nous nous remettrons certainement en rapport avec vous si nous avons besoin d'éclaircissements.

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Merci.

+-

    Le président: Nous abordons maintenant la dernière question prévue à l'ordre du jour de la réunion d'aujourd'hui, à savoir les motions.

    Nous sommes saisis d'une motion déposée par M. McTeague.

    Je vous invite à nous l'expliquer brièvement.

+-

    M. Dan McTeague: Merci, monsieur le président.

    C'est la semaine dernière, si je ne m'abuse, dans le cadre d'un débat sur la priorisation des différentes études à inscrire au calendrier, que le comité a pris une décision que je juge malheureuse. Ainsi il semblerait que la question que le comité a convenu, en mai de l'année dernière, d'examiner dans les plus brefs délais, soit celle des injonctions automatiques, ait été rejetée en novembre dernier. Elle a été soulevée à nouveau une semaine plus tard, mais la semaine dernière encore, l'étude de cette question a été reléguée à une période ultérieure, c'est-à-dire en juin, alors que tous s'attendent à ce que nous ne soyons plus là.

    Quoi qu'ait pu motiver cette décision, je voudrais maintenant proposer la motion suivante, et après discussion avec bon nombre de membres du comité—non pas tous les membres, mais un bon nombre de membres différents—nous croyons avoir trouvé une solution intermédiaire qui satisfera tout le monde.

    Je vais donc vous lire la motion et je vais demander à M. Marcil de présenter sa proposition concernant les témoins qui ne seront pas retenus, si bien que trois jours seraient consacrés à ce qui suit, et dont il est question dans la motion que je propose: Le 29 avril, ou une date qui conviendrait au comité—et là je demande à M. Rajotte de nous dire ce qu'il en pense—Industrie Canada; le 30 avril, Santé Canada; et le jeudi 1ermai, une séance à huis clos. Il n'y aurait pas de témoins ce jour-là. Ainsi le comité pourrait discuter des témoignages reçus de la part de ces deux ministères et au moins examiner toute l'information que nous avons réunie concernant une question qui inquiète de plus en plus de gens, étant donné que les faits démontrent que les consommateurs perdent des centaines de milliers de dollars chaque année en raison d'une disposition que le Parlement n'a peut-être pas l'intention d'adopter. Voilà donc la motion que je vous propose :

Que le Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie de la Chambre des communes examine dès que possible le règlement d'application de la Loi sur les brevets en ce qui a trait à l'injonction automatique et aux avis de conformité.

    Je suis désolé, ce n'est pas la bonne version. Il devrait y avoir une date. Je propose donc que les mots «dès que possible» soient remplacés par «le 29 avril».

+-

    Le président: Donc, vous dites que cela pourrait se faire les 29 et 30 avril, ainsi que le 1er mai...

+-

    M. Dan McTeague: C'est exact.

»  +-(1705)  

+-

    Le président: ... et que nous recevions donc le 29 avril, les représentants de Santé Canada, pour entendre leur point de vue; le 30 avril, les représentants d'Industrie Canada, pour entendre leur point de vue; et le 1er mai, nous nous réunirions à huis clos.

    Monsieur Bergeron.

+-

    M. Dan McTeague: C'est exact; la réunion du 1er mai se tiendrait à huis clos.

[Français]

+-

    M. Stéphane Bergeron: Monsieur le président, sauf tout le respect que je dois à M. McTeague, il apparaît que la motion dont il nous fait part maintenant n'est pas celle qui a été déposée dans le délai de 48 heures. Alors, je voudrais qu'on s'en tienne à celle qui a été déposée dans les 48 heures et qui ne précise pas de date.

[Traduction]

+-

    Le président: Avez-vous la motion du jeudi 27 mars sous les yeux?

+-

    Mr. Stéphane Bergeron: Oui.

+-

    Le président: Donc, proposez-vous de ne pas accepter son amendement?

[Français]

+-

    M. Stéphane Bergeron: Ma proposition, monsieur le président, c'est que conformément aux règles de ce comité, nous étudiions la motion qui a été déposée dans le délai de 48 heures, c'est-à-dire celle du 27 mars, et non pas celle que vient de nous soumettre M. McTeague.

[Traduction]

+-

    M. Dan McTeague: Monsieur le président, je suis tout à fait prêt à accepter cela.

    Je me contente simplement de présenter à M. Bergeron, et aux membres de son parti qui, de toute évidence, n'ont pas hâte de faire cette étude, la possibilité… Autrement dit, dès qu'il le pourra, je voudrais qu'on discute de ces dates-là. Je sais aussi que pour M. Rajotte, ces dates représenteront peut-être un conflit, en raison de l'étude sur le Protocole de Kyoto. Mais là aussi, je suis prêt à faire preuve de souplesse.

+-

    Le président: Très bien. Y a-t-il d'autres questions ou commentaires?

+-

    M. James Rajotte: Est-ce que sa proposition vient modifier une ordonnance déjà établie, monsieur le président? Je crois que c'est justement la question que vous a posée M. Bergeron.

    Et est-ce que c'est M. McTeague qui a proposé l'amendement?

+-

    Le président: Eh bien, si on veut faire cela dès que possible, se serait…

+-

    M. Dan McTeague: Je vais laisser les mots «dès que possible» dans ma proposition. J'aurais voulu qu'on y inscrive les dates, mais je suis prêt à accepter d'autres dates également.

+-

    Le président: Nous examinons à présent le projet de loi C-249, et nous avons prévu que ces jours-là seront consacrés… Cette semaine et la semaine prochaine...

+-

    Mr. Stéphane Bergeron: Oui, mais il vient de laisser tomber son amendement.

+-

    Le président: Permettez-moi donc de finir. Je ne veux pas ouvrir un débat sur la question.

    Nous avons encore à terminer notre examen du projet de loi C-249 et à préparer notre rapport final, ce qui va se faire cette semaine et la semaine prochaine. Nous aurons ensuite deux semaines d'ajournement. Après cela, la première occasion que nous aurons d'entamer une nouvelle étude sera le 29 et le 30. Et nous devons à ce moment-là commencer à examiner le Protocole de Kyoto.

    L'amendement prévoit que ce travail se fasse «dès que possible», ce qui voudrait dire les 29 et 30.

+-

    M. André Bachand: Non.

+-

    Le président: C'est ça que prévoit l'amendement ou plutôt la motion.

+-

    M. Dan McTeague: Excusez-moi, monsieur le président, mais j'invoque le Règlement. La motion prévoit que «Le comité commence cette étude…»

[Français]

+-

    M. André Bachand: J'ai juste une chose à dire, monsieur le président. Selon ma lecture de cela, non, parce que la semaine dernière, on a adopté une motion avec un calendrier. Donc, la motion du calendrier a la préséance.

    Ce que cette motion-ci dit, c'est que nous allons faire notre possible. Mais la semaine passée, on a adopté une motion avec un calendrier, donc celle-ci n'a pas préséance, parce qu'il n'y a pas de date.

[Traduction]

+-

    Le président: Quel est votre rappel au Règlement?

+-

    M. Dan McTeague: La motion que j'ai déposée en bonne et due forme le 27 mars se lit ainsi: «Le comité commence cette étude immédiatement après son étude du projet de loi C-249».

+-

    Le président: Très bien. Est-ce que tout le monde a une copie de la motion?

[Français]

+-

    M. Dan McTeague: «Le comité commence cette étude immédiatement après son étude du projet de loi C-249».

    C'est là, en noir et blanc.

[Traduction]

+-

    Le président: Donc, la motion est recevable, et le bout de phrase «dès que possible» veut donc dire après l'étude du projet de loi C-249. C'est ainsi que j'interprète la motion.

[Français]

+-

    M. Serge Marcil: J'aurais une question au sujet du Règlement en ce qui concerne la question de M. Rajotte. Est-ce qu'on peut amender une proposition qui a été déposée dans le délai de 48 heures? Elle est déposée, et aujourd'hui, elle est lue. Est-ce que quelqu'un peut proposer un amendement, ou faut-il le consentement unanime?

[Traduction]

+-

    Le président: Oui. La réponse est oui, vous pouvez le faire. Nous pouvons voter sur l'amendement d'abord, et ensuite, sur la motion principale.

    Monsieur Bagnell.

+-

    M. Larry Bagnell: J'allais vous dire la même chose. Commençons par discuter de la motion, et ensuite, Marcil ou quelqu'un d'autre pourra proposer un amendement.

+-

    Le président: Très bien. Est-ce que tout le monde comprend la motion dont nous sommes actuellement saisis? Cela correspond au texte que vous avez sous les yeux.

    Quelqu'un voudrait-il proposer un amendement à cette motion?

    Monsieur Marcil.

»  +-(1710)  

[Français]

+-

    M. Serge Marcil: Monsieur le président, si on vote sur cette motion présentée par M. McTeague, j'aimerais d'abord modifier le titre du calendrier qui a été proposé la semaine dernière, parce que le titre porte à confusion.

    Deuxièmement, on avait un calendrier en vertu duquel on rencontrait les gens de Santé Canada, puis les brand companies, les fabricants de produits de marque déposée, et les generic companies, les fabricants de produits génériques. Ensuite, on faisait un rapport, et c'était fini.

    Je voudrais que si on accepte cette proposition-là, on précise qu'on se limite à Santé Canada, Industrie Canada et qu'ensuite, on travaillera à huis clos. Après, on verra ce qu'on fera.

[Traduction]

+-

    Le président: Donc, votre amendement consiste à ajouter quelque chose à la motion. Si je comprends bien, vous proposez que nous recevions les représentants de Santé Canada le 29 avril, ceux d'Industrie Canada le 30 avril, et que nous nous réunissions à huis clos le 1er mai. C'est bien ça?

[Français]

+-

    M. Serge Marcil: Je préférerais qu'on rencontre Industrie Canada le 29 avril et Santé Canada après.

[Traduction]

+-

    Le président: J'essaie de prendre des notes, pour ne pas me tromper.

    Monsieur Bergeron.

[Français]

+-

    M. Stéphane Bergeron: Monsieur le président, encore une fois, avec tout le respect que je vous dois, ce que j'ai compris, c'est que M. Marcil n'a pas présenté un amendement mais un souhait. Il a exprimé le souhait que, une fois la motion adoptée, nous établissions le calendrier de telle sorte que, contrairement à ce qui avait été prévu au départ, nous ayons une rencontre avec Industrie Canada, avec Santé Canada et ensuite une séance à huis clos pour déterminer la suite du processus.

    Je pense, monsieur le président, encore une fois avec tout mon respect, que vous avez interprété la pensée de M. Marcil en établissant des dates pour les différentes rencontres qui pourraient avoir lieu. Il n'a exprimé, à mon sens, que le souhait qu'une fois la motion adoptée, nous établissions le calendrier de la façon dont il l'a décrit.

[Traduction]

+-

    Le président: Les membres du comité sont-ils d'accord?

[Français]

+-

    M. Serge Marcil: Je ne voudrais pas me contredire. J'en fais un amendement.

+-

    M. Stéphane Bergeron: Qui se lirait comment?

+-

    M. Serge Marcil: Il se lirait ainsi: Que le Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie se réunisse dès que possible, que le comité commence cette étude immédiatement après son étude du projet de loi C-249, en précisant qu'on rencontre strictement Industrie Canada, Santé Canada et qu'ensuite, on aura un huis clos.

[Traduction]

+-

    Le président: Monsieur Rajotte.

+-

    M. James Rajotte: J'ai une question à poser à M. Marcil.

    Si nous acceptons cet amendement, nous ne pourrons pas convoquer des témoins, tels que les représentants du Bureau des brevets, à comparaître devant le comité pour discuter de cette question. C'est bien ça?

[Français]

+-

    M. Serge Marcil: Ce qui a toujours été mon objection depuis le début, c'est que cela a été présenté comme si on faisait un procès à une industrie par rapport à une autre. Donc, les gens mentionnent qu'il y a un problème. Moi, je dis qu'il y a des gens qui doivent venir nous convaincre qu'il y a un problème, et ce sont Industrie Canada et Santé Canada.

    Suite à leurs commentaires, je pense qu'on devra voir s'il y a matière à poursuivre ou s'il y a uniquement matière à faire un rapport au ministre de l'Industrie, et que ça s'arrête là. S'il y a réellement un problème, on en jugera ensemble. Je ne peux pas présumer que le dossier va se poursuivre. Je veux juste que l'ensemble des députés comprennent la problématique. J'ai l'impression qu'il y a une confusion actuellement. Si on se limite uniquement à voir ce qu'Industrie Canada a à nous dire--parce qu'ils ont des choses à nous dire, semble-t-il--et ce que Santé Canada a à nous dire, je pense qu'ensuite, à huis clos, on pourra décider ensemble, suite à la recherche que nos recherchistes auront faite sur les deux exposés, si on fait un rapport au ministre ou non. Il est possible qu'il n'y ait pas de problème. Des gens disent qu'il y en a, et d'autres qu'il n'y en a pas. Alors, on verra. S'il n'y en a pas, on s'arrêtera là, et s'il y en a, on pourra faire un rapport au ministre.

    À mon avis, ça ne donne absolument rien d'inviter ici des industries qui sont en compétition les unes par rapport aux autres. On connaît déjà leur position, d'une façon ou d'une autre. Je sais exactement ce que chacune d'elles va venir nous dire.

[Traduction]

+-

    Le président: Donc, tout le monde a bien compris?

    (L'amendement est rejeté.)

    (La motion est adoptée.)

»  -(1715)  

-

    Le président: Nous devrions maintenant examiner la motion de Mme Girard-Bujold, mais elle n'est plus là. Nous allons donc reporter à plus tard l'examen de cette motion.

    Puisqu'il n'y a plus de questions à débattre, la séance est levée.