Étant donné que vous avez fait les présentations et que je crois savoir que nous disposons d'un temps limité — je vais présenter immédiatement mon exposé. J'aimerais néanmoins dire, au nom du président du Conseil, John Murphy, et des membres qui se sont réunis le week-end dernier à Québec, que nous vous remercions d'avoir invité le conseil à comparaître devant votre comité.
Le comité a bien choisi le moment d'examiner la question de la sécurité économique des femmes puisqu'il coïncide avec la publication récente du rapport du Comité des droits économiques, sociaux et culturels des Nations Unies. Le comité a exprimé de graves préoccupations au sujet de la pauvreté chez les femmes, en particulier chez les femmes seules, les travailleuses précaires, les femmes qui tentent de mettre fin à des relations violentes et les jeunes filles sans domicile fixe.
L'exposé que nous allons vous présenter aujourd'hui, et dont vous avez un exemplaire devant vous, comprend quatre parties : tout d'abord, un bref aperçu des indicateurs de la pauvreté; ensuite, un portrait de la sécurité économique des femmes ou plutôt de son absence, un aperçu du contexte politique et enfin, certaines recommandations pour l'avenir. Nous serons tous les trois heureux de répondre à vos questions.
Les premiers tableaux recensent certaines méthodes utilisées pour mesurer la pauvreté. Je n'irai pas dans les détails mais ils font ressortir trois idées principales. La première, que vous connaissez sans doute, est qu'il n'existe pas au Canada de seuil de la pauvreté officiel, il n'existe pas non plus de plans, de cibles ni de normes précises destinées à encadrer les efforts déployés pour réduire, prévenir ou supprimer la pauvreté.
La deuxième idée est que cette situation n'est pas due à un manque de données statistiques. Il existe plusieurs indicateurs de qualité très utiles. Vous voyez ici les seuils de faible revenu que l'on utilise depuis des années. Le seuil de faible revenu est une mesure utilisée par tous les pays, même si au Canada ce seuil est calculé de façon un peu différente, puisqu'il représente 50 p. 100 du revenu médian alors qu'en Europe, il est fixé à 60 p. 100. Le Québec a également retenu un seuil de 60 p. 100.
L'indicateur fondé sur le panier de consommation est intéressant. Il est fondé sur ce qu'il en coûte réellement d'acheter un panier de provisions. Il a été conçu au Canada par les gouvernements, fédéral et provinciaux, principalement en réaction à l'idée que ces indicateurs donnaient des résultats trop élevés et avaient tendance à exagérer la pauvreté.
La troisième idée, comme vous pouvez le voir, est qu'il n'y a pas beaucoup de différence entre ces divers indicateurs, comme on pouvait s'y attendre. Ils nous disent toutefois des choses différentes. Le Canada a participé... Il y a beaucoup de gens qui débattent de l'indicateur qu'il faudrait retenir. La plupart des pays, y compris le Royaume-Uni, ont conclu qu'il fallait en fait utiliser une série d'indicateurs; ils en ont choisi trois.
Un autre indicateur de la pauvreté consiste à suivre le nombre des demandes d'aide sociale. Au Canada, il n'y a que le Conseil national du bien-être social qui publie cette information dans ses rapports périodiques.
La section 2, qui contient le gros de notre exposé, présente une série de graphiques qui décrivent la sécurité économique des femmes. Il est triste de constater que la situation n'est pas bonne. Toute leur vie, les femmes risquent d'être plus pauvres que les hommes et elles font face à des types de risque différents, en particulier, elles paient un prix très lourd parce qu'elles ont élevé des enfants et se sont occupées d'autres personnes, et un prix économique élevé lorsqu'elles survivent à la violence et à la maltraitance dont elles font l'objet de la part des hommes.
Nous avons délibérément choisi d'axer notre exposé sur les femmes qui vivent seules, ou qui élèvent des enfants seules, parce que ce sont ces femmes qui risquent le plus d'être pauvres.
Nous allons mentionner ici l'importance que revêtent pour les couples les revenus gagnés par les femmes. Il y aurait beaucoup plus de familles pauvres si les femmes ne travaillaient pas à l'extérieur. Les femmes sont le principal soutien de famille dans plus d'un quart des ménages canadiens biparentaux. C'est bien souvent par défaut — dans le cas où le mari perd son travail ou est atteint, par exemple, d'une incapacité.
Le graphique 1 montre le taux de pauvreté au cours des 25 dernières années — ce sont les tendances qui importent dans ce domaine — pour les trois secteurs de la population que nous étudions.
Le graphique 2 fournit la même information pour les femmes. On constate une diminution très nette du taux de pauvreté chez les personnes âgées et une différence importante entre les chiffres de 1981 et ceux de 2004. Nous avons donc dû bien faire certaines choses.
Pour les personnes seules de moins de 65 ans, la situation est très différente, puisque la situation des hommes et des femmes est pire en 2004 qu'elle ne l'était en 1980. Il est évident qu'il y a là un problème qui s'aggrave.
Pour ce qui est des parents seuls, les différences entre les sexes sont importantes et les tendances pour les mères seules sont beaucoup plus erratiques pour les autres femmes. Il est évident qu'il s'agit là d'un problème qui perdure et que nous n'avons pas encore compris.
Les graphiques 3 et 4 montrent les taux de pauvreté après impôt.
Les graphiques 5 et 6 montrent que l'écart entre les femmes et les hommes âgés se rétrécit, ce qui est intéressant. Le graphique 6 montre l'effet de la pauvreté d'un parent seul sur ses enfants.
En 2004, pour vous citer un chiffre réel tiré de ces tableaux, le taux de pauvreté après impôt pour les femmes seules de moins de 65 ans était de 38,4 p. 100. Pour les parents seuls de sexe féminin, il était de 35,6 p. 100. Pour les femmes âgées, il était de 17 p. 100.
Le comité a manifesté de l'intérêt pour des catégories autres que celles qui sont basées sur le type de famille. Dans les graphiques 8 et 9, nous fournissons des renseignements sur les immigrantes, les femmes des minorités visibles, les femmes autochtones ou celles qui sont atteintes d'un handicap. Il est important de noter l'effet combiné que peut avoir le statut familial et l'appartenance à une minorité. En plus de ce que montrent les graphiques, le taux de pauvreté chez les mères autochtones vivant seules était en 1995 — cela date un peu, mais c'est l'information la plus récente que nous ayons— de 73 p. 100 contre 45 p. 100 chez les femmes seules non autochtones.
Le graphique 9 concerne la population des personnes âgées. Il y a lieu de noter ici que les membres des minorités visibles et les immigrantes âgées vivant seules ont un taux de pauvreté supérieur à leurs homologues plus jeunes. Il est possible que ces femmes n'aient pas eu la même possibilité que les autres, en raison du fait qu'elles sont arrivées au Canada plus tard et qu'elles n'ont pu contribuer au RPC, épargner, ou avoir droit aux prestations de la SV/SRG.
La situation que nous venons de décrire n'est pas reluisante, mais elle ne montre pas tout. Les graphiques qui suivent examinent de plus près la situation des personnes qui vivent sous le seuil de la pauvreté, et qui comprend de nombreuses femmes et leurs enfants qui vivent dans des situations de grande pauvreté. Imaginez votre situation si vous deviez vivre avec 6 000 ou 7 000 $ de moins que ce qu'il vous faut pour acheter la nourriture, payer le logement, les vêtements et combler les autres besoins fondamentaux que la plupart des Canadiens tiennent pour acquis. Comme les graphiques 10 et 11 le montrent, un grand nombre de Canadiennes se trouvent dans cette situation.
Les graphiques 12 et 13 présentent la réalité d'une autre façon; ils montrent comment les femmes se situent par rapport au seuil de pauvreté. Notez le cas extrême des femmes seules de moins de 65 ans qui se retrouvent soit bien au-dessus du seuil de la pauvreté, soit dans une pauvreté extrême.
Les graphiques 14 et 15 montrent que, contrairement à ce que l'on pense généralement, un bon nombre des personnes qui reçoivent de l'aide sociale sont également employées. Il n'est pas possible d'affirmer, comme on le fait souvent, que les gens reçoivent de l'aide sociale ou n'en reçoivent pas.
Le graphique 16 est très intéressant. Je vais y consacrer un peu plus de temps. Il donne une idée de la façon dont s'appliquent les régimes et les notions de sécurité du revenu au Canada. La première chose qui frappe — ou du moins, je l'espère — est l'insuffisance criante des prestations d'aide sociale provinciales.
Pour mettre un visage humain sur ces chiffres, le revenu de 6 000 $ et quelques sous représente ce que recevrait Marie, par exemple, une travailleuse âgée, si elle perdait son travail et n'avait pas droit à l'AE ou n'y avait plus droit. Dans la plupart des provinces, elle serait obligée de dépenser pratiquement tout l'argent qu'elle a épargné, et dans certaines provinces, elle serait même obligée de vendre la vieille voiture dont elle se sert pour aller au travail, ce qui limitera d'autant par la suite ses possibilités, parce qu'il n 'est pas permis de posséder des biens.
Disons que Marie avait alors 63 ans. Quelques années plus tard, après quelques anniversaires, elle a 65 ans. Même si les prestations maximales de la SV/SRG à laquelle elle aurait droit sont bien inférieures au seuil de la pauvreté, puisque ce montant représente le double de ce qu'elle recevait l'année dernière, elle ne pourra probablement pas racheter sa voiture.
Si Marie avait pu obtenir le montant maximum du RPC et de la SV/SRG, sa situation serait bien meilleure, comme vous pouvez le constater dans la colonne qui indique 22 000 $. Il faut toutefois signaler qu'en moyenne, les femmes reçoivent moins de 60 p. 100 du montant des prestations que reçoivent les hommes. Il est donc peu probable qu'elle reçoive un tel montant.
Prenons maintenant le cas de la jeune voisine de Marie, Sophie. C'est elle qui travaille et gagne le salaire minimum provincial moyen. Comme la plupart des Canadiens, elle pense que la meilleure sécurité est d'avoir un travail. Elle travaille à temps plein, toute l'année. Comme je l'ai dit, elle ne gagne que le salaire minimum, mais au moins elle reçoit 1 000 $ de plus que Marie, ou est-ce vraiment le cas? Et les cotisations de l'AE et du RPC qu'elle doit payer, le ticket d'autobus qu'elle doit acheter pour se rendre au travail tous les jours, les vêtements, les chaussures et les autres articles dont elle a besoin pour aller travailler? En fait sa situation est beaucoup moins bonne que le graphique l'indique.
Il y a encore l'assurance-emploi, le principal programme de sécurité du revenu alimenté par les travailleurs canadiens. Avec un taux de remplacement de 55 p. 100, un travailleur au chômage qui reçoit la prestation maximale s'en tire à peu près mais son revenu n'est guère supérieur au seuil de la pauvreté. N'oubliez pas que le nombre de femmes qui reçoivent la prestation maximale est plus faible que celui des hommes et qu'elles n'y ont même pas toujours droit.
En 2004, un peu plus de 40 p. 100 des chômeurs canadiens recevaient de l'AE, une forte diminution par rapport aux 80 p. 100 de 1990.
Pour gagner du temps, je vais présenter très rapidement les points suivants, mais ils sont extrêmement importants. Ils concernent des domaines que le comité connaît bien, je le sais.
Les études montrent que les femmes, en particulier les parents seuls et leurs enfants, vivent dans la pauvreté plus longtemps que les autres Canadiens. Il y a aussi le fait que le revenu n'est pas le seul indicateur de la pauvreté. La « pauvreté par manque de temps disponible » touche les femmes qui élèvent des enfants, les femmes atteintes d'une invalidité et celles qui s'occupent d'autres personnes qui ont une invalidité. C'est le fait que les femmes effectuent un travail non rémunéré qui les rend particulièrement vulnérables. Par conséquent, si les solutions retenues pour lutte contre la pauvreté ne tiennent pas compte de cet élément, elles ne donneront rien.
Il existe une autre dimension que nous pourrions appeler la « pauvreté par manque de sécurité » qui vient du fait que les femmes sont livrées à la violence, en particulier à celle de leurs partenaires et ex-partenaires qui les maltraitent physiquement, psychologiquement et économiquement; c'est cela qui empêche ces femmes de profiter des possibilités économiques qui s'offrent à elles.
Les deux ou trois dernières pages sont davantage consacrées aux orientations. Vous avez déjà eu un aperçu de cela avec le graphique 16, mais je vais y revenir très brièvement. La couverture et les taux de remplacement d'AE sont faibles par rapport à la situation antérieure au Canada et par rapport à ce qui se fait ailleurs. Les prestations d'AE, de maternité et parentales sont difficilement accessibles aux mères qui en ont le plus besoin, même si les évaluations de l'AE indiquent que les travailleuses et les enfants qui y ont droit peuvent bénéficier de prestations très intéressantes. Le salaire minimum ne permet pas aux travailleuses d'avoir un revenu supérieur au seuil de la pauvreté. Il a des lacunes dans l'accès aux garderies. Il n'y a pas suffisamment de places pour tous à des prix abordables dans les garderies de qualité. Les régimes d'aide sociale, outre la faiblesse de leurs prestations, ont pour effet de dépouiller les bénéficiaires des biens dont ils ont besoin pour s'assurer un avenir et ils ne permettent pas aux parents seuls d'obtenir des prêts étudiants pour faire des études postsecondaires. Les bénéficiaires ne peuvent garder qu'une très faible partie de leurs gains, s'ils réussissent à trouver du travail. C'est donc un cercle vicieux.
La prestation fiscale canadienne pour enfants est un programme vraiment intéressant et très positif. Il vise à aider les familles à demeurer sur le marché du travail. La prestation est toutefois calculée en fonction du nombre d'enfants, et non pas en fonction du nombre des travailleurs dans le ménage, ce qui fait que ce programme est moins intéressant pour les parents seuls. À titre de comparaison, le supplément de revenu garanti destiné aux personnes âgées, que vous connaissez bien, attribue des montants différents aux célibataires et aux couples. En utilisant une formule de ce genre, la prestation fiscale canadienne pour enfant pourrait être plus accessible aux parents seuls.
L'assurance-emploi, l'aide sociale, la prestation fiscale canadienne pour enfants et les autres mesures de soutien du revenu ne tiennent pas compte du fait que les femmes qui sont victimes de violence éprouvent de grosses difficultés à travailler. L'effet principal du Régime de pensions du Canada et du Régime des rentes du Québec en matière de réduction de la pauvreté chez les couples et les personnes âgées vient du fait que les femmes travaillent. Cela est important, parce que si le nombre de femmes qui travaillent diminue, le niveau de pauvreté chez les personnes âgées augmentera.
Les prestations de la SV/SRG sont inférieures au seuil de la pauvreté, comme nous l'avons montré, et elles ne tiennent pas compte du coût de la vie réel, notamment des loyers exorbitants qu'il faut payer à Toronto.
La pauvreté coûte cher à la société et à tous les Canadiens. Nous avons apporté avec nous — et nous vous le remettrons plus tard — un document appelé The Cost of Poverty (Le coût de la pauvreté) qui montre qu'il n'y a pas seulement les gens qui vivent dans la pauvreté qui en paie le coût, c'est l'ensemble de la population. Voici des exemples de ces coûts : l'augmentation du coût des soins de santé, la désintégration sociale avec la criminalité qui en résulte, le potentiel inexploité et une baisse de la productivité des travailleurs.
Dans la dernière diapositive, pour conclure sur une note plus positive, il est important de souligner qu'il ne manque pas de recommandations concrètes, réalistes et rentables qui ont été faites, notamment tout récemment, par un groupe dont fait partie la Banque Toronto Dominion. Cela montre que même les grandes sociétés canadiennes commencent à reconnaître qu'il y a peut-être là un problème.
Il ne manque pas d'exemples, venant de différentes régions du Canada, de différents pays, d'initiatives qui ont donné de bons résultats. Il y a également beaucoup de bonnes intentions, mais il y a quelque chose qui manque, et je crois que c'est la volonté politique. Ce qu'il faut vraiment d'après le conseil, c'est un plan antipauvreté avec des objectifs clairs qui ait pour but de réduire les facteurs de pauvreté, d'augmenter le niveau de vie de ceux qui vivent dans la pauvreté la plus profonde et la plus persistante et de faire en sorte que ces personnes soient désormais traitées avec dignité. Il faut associer à ce plan des cibles, des indicateurs pour mesurer les résultats, répartir les responsabilités et y affecter les ressources nécessaires.
L'analyse fondée sur le sexe est bien sûr un élément essentiel des mesures visant à lutter contre la pauvreté et cette lutte est un élément également essentiel qui favorise l'égalité entre les sexes. L'analyse fondée sur le sexe veut dire qu'il faut étudier les diverses situations que vivent les femmes au cours de leur vie.
Merci.
:
Bonjour et merci de nous avoir invités.
Le Conseil consultatif national sur le troisième âge a pour mandat de conseiller le ministre de la Santé sur toutes les questions touchant le vieillissement de la population canadienne et la qualité de vie des personnes âgées.
Depuis plus de 25 ans, le CNTA s'efforce de faire connaître au gouvernement fédéral et à la population du Canada la question du vieillissement de la population. Le conseil élabore ses recommandations en se fondant sur les études les plus récentes mais également en consultant les personnes âgées, parce que cela lui paraît important.
Le conseil a acquis, au cours des années, de l'expertise au sujet de la situation économique des personnes âgées. En 2005, le CNTA a publié un rapport intitulé Vieillir pauvre au Canada. Ce rapport examine les questions qui touchent la vulnérabilité économique des personnes âgées, recommande des politiques visant à améliorer la situation économique des personnes âgées. De plus, nos bulletins, dont un sera publié au cours des prochaines semaines, abordent les problèmes que pose la situation économique des personnes âgées.
Pour ce qui est de ces questions, nous avons constaté une nette amélioration dans la situation économique des Canadiens âgés depuis les années 19080, tant en termes absolus que par rapport au reste de la population. Cette période de rattrapage est néanmoins terminée. Un nombre important de personnes âgées, bien souvent des femmes, continuent à vivre dans des conditions économiques très difficiles. On présente souvent le régime canadien de retraite public et privé comme une grande réussite, mais il n'est pas rare que les femmes âgées vivent dans la pauvreté. Un bon nombre de femmes âgées n'ont aucun espoir d'avoir une retraite confortable.
Par rapport aux hommes âgés, les femmes âgées sont beaucoup plus nombreuses à vivre au-dessous du seuil de faible revenu. En 2004, 3,5 p. 100 des hommes âgés et 7,3 p. 100 des femmes âgées avaient un revenu inférieur au seuil de faible revenu. Près de 20 p. 100 des femmes âgées seules vivaient en-dessous du seuil de faible revenu.
Statistique Canada estime que 219 000 personnes âgées vivaient en-dessous du seuil de faible revenu en 2004. Plus de 60 p. 100 de ces personnes étaient des femmes âgées seules.
Pour les femmes âgées, les prestations de la sécurité de la vieillesse et de supplément de revenu garanti constituent d'importantes sources de revenu. Près de la moitié des femmes de plus de 80 ans dépendant du supplément de revenu garanti.
La SV et le SRG ne suffisent pas. Malheureusement, il arrive que la SV et le SRG ne permettent pas aux personnes âgées qui reçoivent les deux, en particulier à celles qui sont seules, de vivre au-dessus du seuil de faible revenu. En 2003, une personne seule, qui recevait uniquement la SV et le SRG, avait un revenu annuel moyen de 12 031 $, un montant bien inférieur au seuil de faible revenu dans les régions urbaines, où le coût de la vie est élevé.
Notre première recommandation est d'augmenter le montant du supplément de revenu garanti pour que le total des prestations de la SV et du SRG soit égal ou supérieur au seuil de faible revenu, tel que défini par Statistique Canada.
L'écart entre le revenu des hommes et des femmes est encore très prononcé. En 2004, le revenu moyen des femmes de plus de 65 ans représentait 67 p. 100 de celui des hommes. La différence de revenu entre les hommes et les femmes en 2004 était de 10 800 $, pratiquement inchangée par rapport à 2000.
Les femmes âgées ont en général des revenus plus faibles que les hommes parce qu'elles sont moins nombreuses à avoir travaillé et que, lorsqu'elles travaillaient, elles gagnaient, en moyenne, moins que les hommes. En 2004, une femme âgée sur cinq environ n'avait jamais travaillé à l'extérieur. De plus, étant donné que les femmes vivent plus longtemps, elles risquent davantage d'épuiser les sommes qu'elles ont épargnées au cours de leurs vies.
Les femmes divorcées ou séparées disposent d'un revenu de retraite bien inférieur à celui des célibataires et des veuves, étant donné que la plupart des femmes divorcées ne réclament pas une partie de la pension de retraite de leur ancien conjoint, même si elles ont le droit de le faire. Les femmes célibataires se consacrent davantage à leur carrière et bénéficient ainsi de revenus de retraite supérieurs. De nombreuses veuves ont hérité de leurs maris et ont droit à des prestations de survivant.
Notre deuxième recommandation consiste à proposer que la pension de retraite de l'ancien conjoint soit partagée de façon systématique avec l'épouse, ce qui aurait pour effet d'améliorer la sécurité économique des femmes âgées. Le CNTA estime qu'il est important d'améliorer le revenu des femmes divorcées et séparées et reprend la recommandation qu'il a faite en 1993 dans laquelle il demandait au gouvernement de mettre en place un système de partage automatique et obligatoire des droits à la pension aux termes du RPC, du fonds de pension de l'employeur et des régimes d'épargne-retraite, en cas de divorce ou de séparation légale.
Le logement est un autre problème. Malgré une augmentation moyenne du revenu de 20 p. 100 des personnes âgées entre 1980 et 2000, les difficultés dues au manque de logements abordables n'ont diminué que de 1 p. 100 entre 1981 et 2001 chez les personnes âgées. En 2001, les besoins essentiels en logement de près de 50 p. 100 de toutes les femmes âgées seules louant un logement n'étaient pas comblés, alors qu'elles représentent le type de ménage le plus fréquent. Nous recommandons aux gouvernements provinciaux de rétablir les politiques de contrôle des loyers dans le but de favoriser les personnes âgées locataires et financer de nouvelles unités de logement, notamment les logements supervisés.
Il est probable que les problèmes mentionnés aujourd'hui ne touchent pas uniquement les personnes qui prennent leur retraite aujourd'hui. Un bon tiers des Canadiennes âgées de 45 à 59 ans estiment qu'elles n'auront pas des ressources financières suffisantes pour prendre leur retraite. De plus, il est prévu que les inégalités économiques entre les personnes âgées vont s'aggraver, étant donné que les régimes de prestation de retraite prévus par le RPC et la SV vont prendre de l'ampleur et que les sources supplémentaires de prestations de retraite auxquelles ont accès les personnes âgées varient en fonction de leurs régimes de pension de retraite privés et de leurs REER. Cette dernière forme d'épargne est plus accessible aux travailleurs ayant des revenus élevés.
Le pourcentage des femmes qui cotisent à des régimes de pension privés se rapproche progressivement de celui des hommes. La différence n'était que de 0,7 p. 100 en 2002, alors qu'elle était de plus de 8 p. 100 en 1991. Les femmes reçoivent néanmoins des revenus de retraite inférieurs à cause de la différence de salaire entre les hommes et les femmes et parce que ces régimes ne prévoient aucune indemnité supplémentaire pour les femmes qui doivent s'absenter pour élever leurs enfants ou s'occuper des membres de leur famille qui sont malades, aspect qui touche généralement davantage les femmes.
L'insécurité en matière d'emploi, qui est bien souvent le lot des femmes, a un effet considérable sur les revenus de retraite. Les travailleurs indépendants, à temps partiel ou les travailleurs qui ont connu de longues périodes de chômage éprouvent davantage de difficulté à épargner de l'argent en vue de leur retraite. Les travailleurs à temps partiel cotisent au RPC mais les prestations ne remplacent qu'un pourcentage relativement faible du revenu des travailleurs au moment où ils prennent leur retraite. En outre, la plupart des travailleurs à temps partiel ne cotisent pas au régime de retraite de l'employeur.
Enfin, j'aimerais remercier le comité permanent d'avoir invité le CNTA à présenter son point de vue sur les femmes âgées et la pauvreté. Le conseil invite instamment le gouvernement fédéral à prendre immédiatement des mesures pour répondre aux préoccupations mentionnées de façon à ce que la pauvreté chez les femmes âgées ne perdure pas.
Je vous remercie.
:
Je vais demander à John de vous parler de ces questions, parce qu'il est en train de préparer un rapport sur les Autochtones pour le conseil.
Il est tellement difficile d'examiner ce domaine. Il n'est pas facile non plus d'essayer de comprendre les tendances, parce que nous disposons de données très limitées. Il est important de savoir qu'il n'est pas toujours possible de comparer la population autochtone à la population non autochtone à l'aide des indicateurs dont nous disposons. Lorsque les Autochtones vivent dans une réserve, ils sont assujettis à un régime fiscal différent. Si on examine le SFR avant ou après impôt, on obtient des chiffres différents.
L'autre aspect qu'il est vraiment essentiel de comprendre est que les arrangements familiaux et la répartition selon les tranches d'âge des Autochtones est très différente de celle de la population non autochtone, de sorte qu'il faut effectuer un grand nombre d'analyses et regrouper des données éparpillées. Je demanderais à John de vous en dire davantage à ce sujet, s'il le souhaite.
Je voulais dire quelques mots de l'absence de seuil de pauvreté officiel et de la façon dont nous analysons les choses. Vous remarquerez, par exemple, que nous vous avons remis un graphique qui montre un certain nombre d'indicateurs de la pauvreté. Certains s'appliquent mieux à certaines situations qu'à d'autres. En fait, pour effectuer une analyse de la situation, il est bon de disposer de plusieurs indicateurs. Certaines gens disent que les SFR constituent un indicateur relatif, qu'ils sont trop élevés, et qu'ils ne sont pas vraiment logiques; nous voulons savoir ce qu'est vraiment la pauvreté et c'est là un indicateur relatif et artificiel, qui n'est pas facile à comprendre pour la plupart des gens.
On a créé l'indicateur fondé sur le panier de consommation — malheureusement, il n'existe que depuis un an, même si je sais que l'on est en train de préparer deux autres années — pour essayer de montrer que sur certains points, ces seuils sont trop élevés, et que pour vivre et subvenir aux besoins essentiels, un revenu inférieur à ce seuil est suffisant. On s'est aperçu que le coût de la vie réel montrait que ce n'était pas le cas du tout.
L'indicateur fondé sur le panier de consommation, ou quelque chose du genre, pourrait constituer une bonne cible si l'on veut réfléchir à l'augmentation des prestations d'aide sociale. C'est un aspect que les provinces devraient examiner.
Dans notre publication — nous vous en avons remis des exemplaires — Profil de la pauvreté que nous diffusons régulièrement, nous examinons toute une série de facteurs. La plupart des informations que l'on trouve ici proviennent du travail que Cathy a effectué pour le Profil de la pauvreté. Cette publication examine la gravité et la persistance de la pauvreté. Elle contient également des données provenant de Statistique Canada qui donnent une perspective longitudinale.
Il existe donc beaucoup de données, beaucoup d'information au-delà des seuils de la pauvreté, qui peuvent servir à analyser la situation; mais tant que les gouvernements et la population n'arriveront pas à s'entendre sur une série d'indicateurs qui décrivent ce que nous entendons par pauvreté, qui précisent les niveaux de pauvreté et ce qu'il faut faire pour... Peu importe ces niveaux ou la façon dont nous les mesurons, il faut commencer à les réduire. C'est là l'aspect essentiel.
Vouliez-vous ajouter quelque chose...?
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Merci, madame la présidente.
Je voudrais remercier les témoins pour leurs exposés. Nous avons appris beaucoup de choses aujourd'hui, et cela nous sera très utile. J'aimerais certainement que ce groupe de témoins revienne, parce que nous n'aurons pas suffisamment de temps aujourd'hui.
J'ai enseigné pendant 22 ans au niveau du premier cycle de l'enseignement secondaire. Un bon nombre de mes étudiantes — en fait, il y en avait un grand nombre, un nombre excessif — se sont retrouvées enceintes parce qu'elles étaient assez âgées et que, si elles avaient un enfant dans notre province, elles avaient droit à un logement. On leur donnait un appartement. Bien sûr, c'était le programme d'aide sociale de la province qui s'occupait d'elles.
Il y a une chose qui m'a toujours frappée comme professeure — j'ai enseigné les mathématiques et les sciences — c'est que lorsqu'on enseigne à des étudiants, lorsqu'on s'adresse aux jeunes, et qu'on les forme, il est très important de leur fournir de l'information. Notre comité vient de découvrir qu'il y a un grand nombre de femmes âgées qui ne savent pas ce à quoi elles ont droit, ce qui fait qu'elles ne demandent rien. Je sais qu'il y a beaucoup de jeunes qui commencent à travailler et qui ne connaissent pas les REER, et ce qu'il faut faire. Ils ne commencent pas à planifier leur retraite au moment où ils se mettent à travailler, ce qui est, comme nous le savons, ce qu'il faudrait pourtant faire.
Je me demande si le Conseil national du bien-être social a déjà lancé une initiative visant les écoles, en commençant, en particulier, avec le premier cycle des études secondaires, pour demander que les écoles secondaires offrent des cours aux étudiants qui traitent des sujets suivants: voici ce qu'est la réalité, voici ce qu'il en coûte pour vivre, voilà ce qui arrive lorsque vous faites certains choix et que vous êtes une mère célibataire, voici ce qui se passe, si vous faites certains choix et devez quitter votre maison pour une raison ou une autre ou sivous la quittez parce que vous voulez le faire, pour habiter avec des jeunes de votre âge. Ces cours parleraient des choses pratiques de la vie, des réalités de la survie et de la façon dont on forme un ménage.
Lorsque nous parlons de pauvreté, nous hochons la tête et disons : « Voilà un problème terrible et il faut absolument y remédier. » Nous essayons de mettre en oeuvre des mesures qui vont aider à le faire. Mais avons-nous déjà pensé à cibler les jeunes avant qu'ils ne commencent à travailler, pour qu'ils aient les outils nécessaires et comprennent un peu ce à quoi ils devront faire face, lorsqu'ils commencent à travailler?
Il y a dans le système scolaire public et privé toute une population que... Je peux vous dire, pour avoir enseigné pendant 22 ans, que ce que vous dites en classe peut faire une grande différence. Je me demande, lorsque je regarde ces graphiques inquiétants, si l'on ne devrait pas en fait viser les écoles.
Je sais que c'est une compétence provinciale mais la Condition féminine s'occupe également d'effectuer des paiements de transfert aux provinces pour l'éducation postsecondaire. Quand ils arrivent aux études postsecondaires, je crois qu'il y a un chevauchement dans ce domaine, comme il y en a toujours. Lorsqu'on parle de logements abordables, et de choses de ce genre, c'est deux relations symbiotiques. Les paiements de transfert sont versés aux provinces et les provinces prennent ces décisions.
Il ne faudrait donc pas se contenter de faire de grandes déclarations générales, mais viser des buts précis. J'aimerais beaucoup savoir s'il existe une initiative concertée qui va dans ce sens ou si nous pourrions réfléchir à faire quelque chose de ce genre, dans toutes les provinces canadiennes.