Le processus décisionnel / Consentement unanime

Utilisation présumément abusive : retrait d’un ordre émanant du gouvernement et des amendements s’y rattachant

Débats, p. 14509-14510

Contexte

Le 18 octobre 1990, la Chambre termine le débat sur la motion émanant du gouvernement no 16 (invasion du Koweït par l’Iraq) ainsi que sur l’amendement et le sous-amendement qui y sont rattachés. Conformément à un ordre adopté plus tôt dans la journée, les votes par appel nominal sont différés jusqu’au 23 octobre 1990[1]. Le 19 octobre 1990, M. Albert Cooper (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes) obtient le consentement unanime pour que soit retirée la motion du gouvernement, l’amendement et le sous-amendement, de façon à introduire une nouvelle résolution et à y appliquer l’ordre du jeudi 18 octobre 1990 concernant le vote par appel nominal différé[2].

Le lundi 22 octobre 1990, M. Marcel Prud’homme (Saint-Denis) invoque le Règlement pour protester contre la décision prise le vendredi précédent. M. Prud’homme soutient qu’il y a là un abus du processus parlementaire puisque les députés seront appelés à consigner leur vote sur une motion qui diffère de celle sur laquelle ils se sont prononcés. D’autres députés prennent également part à la discussion[3]. Le Président rend immédiatement sa décision. Celle-ci est reproduite intégralement ci-dessous.

Décision de la présidence

M. le Président : Le député de Saint-Denis, un des plus anciens députés de la Chambre, a pris la parole sur une question qui est appuyée par le député de Burnaby—Kingsway (M. Svend Robinson) et qui est vraiment très sérieuse. Je pense qu’elle est sérieuse parce qu’il y a eu un débat sur une motion, le vote a été différé et les députés s’attendaient à voter sur la motion dont on a parlé. Pour des raisons sur lesquelles nous n’avons pas à nous étendre, la motion a été modifiée par consentement unanime. Cela signifie que les députés voteront sur une motion différente de celle dont on a parlé. Je regrette beaucoup cette situation.

Le député de Saint-Denis a déclaré qu’un abus par consentement unanime reste néanmoins un abus. Nous sommes à une période où le pays surveille notre institution très étroitement. Une bonne partie de ce que le pays voit ne lui plaît pas. Nous allons tous devoir faire un effort beaucoup plus grand pour donner un exemple beaucoup plus conforme à son histoire et plus conforme à la place que nous voudrions que cette institution occupe dans le cœur et l’esprit des Canadiens.

Le député de Burnaby—Kingsway faisait remarquer tout à fait justement que cette Chambre peut faire ce qu’elle veut par consentement unanime. La raison pour laquelle il en est ainsi c’est que, en fin de compte, c’est l’endroit où la population canadienne nous a envoyés pour faire ce que nous jugeons être dans le meilleur intérêt de la nation. Si la Chambre est d’accord et s’il y a consentement unanime, quelles que soient les autres règles ou les autres traditions, nous pouvons y passer outre et faire ce que la Chambre désire.

Il y a peut-être eu, et il pourrait y avoir, de bonnes raisons pour certains de penser qu’il était dans l’intérêt national de modifier la motion. Je ne voudrais pas m’aventurer dans cette partie du débat. Ce que je voudrais dire aux députés, c’est que, à mon avis, ce qui s’est produit n’est pas correct et constitue un abus. Je ne suis pas en mesure de le modifier, mais je considère cela comme une question très sérieuse. Je voudrais que les députés sachent, et je voudrais que le public sache, qu’il y a eu consentement unanime et que cette décision nous lie tous. J’espère que nous n’aurons pas avant très, très longtemps, une situation qui force des députés comme le député de Saint-Denis, le député de Burnaby—Kingsway ou d’autres, à prendre la parole pour se plaindre d’une situation qui, bien que correcte sur le plan de la procédure, n’aurait pas dû, à mon avis, se produire.

Post-scriptum

Le 23 octobre 1990, immédiatement suivant la prière, le Président déclare à la Chambre que ses propos concernant le rappel au Règlement soulevé par M. Prud’homme ne visaient aucunement à critiquer la Chambre ou ses leaders parlementaires. Il admet être allé un peu loin et il rappelle aux députés que la Chambre peut faire ce qu’elle veut moyennant le consentement unanime[4].

F0415-f

34-2

1990-10-22

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[1] Journaux, 18 octobre 1990, p. 2132-2133.

[2] Journaux, 19 octobre 1990, p. 2138.

[3] Débats, 22 octobre 1990, p. 14507-14509.

[4] Débats, 23 octobre 1990, p. 14553.