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SDIR Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Sous-comité des droits internationaux de la personne du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international


NUMÉRO 046 
l
2e SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 27 novembre 2014

[Enregistrement électronique]

  (1300)  

[Français]

    Je vous souhaite la bienvenue à la 46e séance du Sous-comité des droits internationaux de la personne du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international, en ce jeudi 27 novembre 2014.
    Nous poursuivons notre étude sur la situation des droits de la personne au Honduras.

[Traduction]

    Nous recevons aujourd'hui par vidéoconférence depuis Vancouver, Rick Craig, qui est directeur exécutif de la Justice Education Society of British Columbia.
    M. Craig n'en est pas à sa première comparution devant notre comité, et nous sommes heureux de l'accueillir de nouveau.
    Bienvenue, monsieur Craig. Vous pouvez débuter votre exposé dès que vous serez prêt. Comme vous le savez, les membres du sous-comité vous poseront ensuite leurs questions.
    Merci.
    J'aurais quelques précisions à vous demander.
    Le comité m'a fait parvenir des questions. Je ne sais pas si vous voulez que je vous parle d'abord de ce que je sais par rapport à ces différentes questions, ou si vous préférez me les poser directement.
    Je ne sais pas de quelles questions vous parlez. Nous voulons que vous nous fournissiez le plus de renseignements possible. Est-ce que c'est un membre du comité qui vous a envoyé ces questions?
    Je l'ignore. Elles viennent du comité, mais je ne sais pas d'où elles proviennent exactement. On cherche à savoir ce qu'il en est des plus récentes mesures prises par le gouvernement au Honduras.
    Comme je me suis préparé en conséquence, je peux très bien articuler mon exposé de manière à vous fournir ces renseignements, mais je peux aussi répondre directement aux questions. C'est comme vous voulez.
    On vient de m'informer que ce sont en fait les notes d'information rédigées par nos analystes que vous avez reçues.
    Ainsi, les deux analystes qui travaillent pour notre comité préparent des notes d'information pour chacune de nos séances. On y retrouve notamment des questions que les membres du comité pourraient vouloir poser aux témoins. Certains députés s'en inspirent, d'autres pas. Ce sont généralement des questions du genre de celles qu'il faudrait poser pour nous permettre d'accumuler suffisamment d'information pour produire notre rapport.
    Ces questions vous donnent un aperçu des enjeux qui nous préoccupent, mais j'aimerais que vous nous parliez surtout de ce que vous jugez le plus important. Vous connaissez ce dossier beaucoup mieux que nous. Vous pouvez vous inspirer des questions qui vous ont été transmises, mais n'hésitez surtout pas à nous communiquer toute autre information que vous jugez pertinente. Laissez-vous donc guider par le souci de nous renseigner le mieux possible.
    D'accord, c'est ce que je ferai. Vous devez surtout vous intéresser aux mesures qui sont prises pour régler les problèmes de ce pays.
    Comme je vous l'indiquais lors de ma dernière comparution, nous sommes présents au Honduras depuis de nombreuses années. Nos efforts visent principalement à surmonter les obstacles qui empêchent de mettre sur pied un système de justice fonctionnel. Nous bénéficions pour ce faire de fonds canadiens provenant du ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement, et nous travaillons principalement dans le triangle du Nord de l'Amérique centrale depuis l'an 2000. Ainsi, nous sommes informés de ce qui se passe là-bas, non seulement dans l'optique du Honduras, mais aussi grâce à notre travail au Guatemala et au Salvador.
    On appelle donc cette région le triangle du Nord. Comme vous le savez, les problèmes avec lesquels le Honduras doit composer ne sont pas vraiment différents de ceux qui affectent les deux autres pays du triangle. Bien évidemment, nous sommes aux prises là-bas avec des problèmes graves découlant notamment de la croissance fulgurante des gangs, de la criminalité transnationale et des changements apportés au Mexique qui ont poussé l'organisation Los Zetas vers le Guatemala et transformé considérablement le mode de circulation des stupéfiants. Tous ces éléments ont des répercussions considérables sur les pays touchés qui n'ont jamais pu compter sur des institutions très solides.
    Il faut également savoir que ces problèmes surviennent à un moment où les trois pays apportent des changements majeurs à leur système judiciaire. La plupart de ces réformes se sont amorcées à la fin des années 1990 et au début des années 2000. Vous pouvez imaginer les défis associés à l'abandon d'un système judiciaire vieux de 500 ans et à son remplacement par un régime hybride.
    C'est en effet dans une large mesure un régime hybride que l'on s'emploie à mettre en oeuvre. On passe ainsi de ce qu'on appelle le modèle inquisitoire au modèle antagoniste ou, comme on le désigne là-bas, au modèle accusatoire. Dans ce contexte particulier, il y a assurément des questions à régler non seulement du point de vue des compétences techniques, mais aussi dans une perspective culturelle et historique. Nous essayons donc de composer avec tous ces enjeux.
    Tout cela émane de la violence qui sévit dans la région comme dans l'ensemble de l'Amérique latine où tous les pays qui avaient un régime inquisitoire passent maintenant à l'action. C'est ce que fait le Mexique, et on peut observer le même phénomène partout en Amérique du Sud. C'est la même chose en Amérique centrale. Chaque pays doit tenir compte des différents facteurs associés à sa conjoncture particulière. À ce titre, le Honduras vit une situation sans précédent pour ce qui est de la montée de la violence. Vous avez donc un pays faible aux prises avec une recrudescence incroyable de la violence qui essaie de faire la transition d'un régime qui n'était pas pris au sérieux du fait qu'il était axé sur le huis clos et la paperasserie vers un processus plus transparent qui exige toutefois de colliger des éléments de preuve dans une mesure que l'on n'a jamais connue auparavant. C'est dans ce contexte que nous devons travailler.
    Il faut aussi savoir comment procéder. À mon sens, la situation au Honduras est assez semblable à celle que j'ai pu observer au Guatemala. À certains égards, les choses sont encore pires, mais je crois qu'on en est à un stade de développement qui correspond à l'état des choses au Guatemala il y a 10 ans passés. On part vraiment de très loin pour amorcer la transformation requise. Tout le monde parle des différents facteurs pouvant influer sur l'administration de la justice dans un pays comme le Guatemala avec tous les problèmes de corruption et d'intimidation. Si l'on vous confie un dossier important, par exemple un crime violent associé aux stupéfiants, les risques de corruption sont bien réels, car on peut tenter de vous soudoyer ou encore de vous intimider en vous menaçant si vous n'acceptez pas le pot-de-vin offert.
    Le troisième élément, et celui qui nous intéresse bien sûr de plus près, est relié à la faiblesse des institutions dans ces pays. Il y a toute une série de considérations liées aux mentalités lorsqu'il est question de droits de la personne. Auparavant, la police relevait des forces militaires, puis il y a eu scission. C'est un autre élément qui s'inscrit dans le contexte culturel. C'est relié au régime d'inquisition qui a été en fin de compte très décrié parce qu'il était considéré comme injuste. Nous essayons donc de mettre en place les composantes nécessaires pour partir sur de nouvelles bases.
    Lors de ma dernière comparution, j'ai tenté de vous faire un survol des mesures que nous prenons à cet effet. Cette fois-ci, je vais essayer de vous donner un peu d'espoir en vous parlant de certains progrès importants que nous pouvons observer. Il ne faut pas trop s'emballer, car il y a des défis considérables à relever, mais je vois dans certaines des mesures prises de véritables pas en avant.

  (1305)  

    Nous travaillons surtout à Tegucigalpa, mais aussi à San Pedro Sula et à La Ceiba. Lentement mais sûrement, nous étendons nos efforts à l'ensemble du pays. Nous collaborons avec les services policiers, les procureurs et l'appareil judiciaire. En mettant principalement l'accent sur les dossiers de meurtre, nous nous sommes efforcés de guider les intervenants aux différentes étapes du processus, de la cueillette des éléments de preuve jusqu'à leur présentation en passant par leur protection et leur mise en forme. Nous proposons pour ce faire différents cours qui peuvent généralement réunir policiers et procureurs ou procureurs et juges.
    Nous passons ensuite aux méthodes plus spécialisées d'établissement de la preuve comme la cueillette et l'analyse de preuves sur vidéo, l'analyse de renseignements criminels, et la cueillette et l'analyse de preuves balistiques. Ces mesures ne sont efficaces que si elles s'appuient sur de bonnes assises, ce qui nous oblige à apporter les correctifs nécessaires à un régime fondamentalement dysfonctionnel.
    Dans un pays comme le Honduras où les gens sont intimidés et ont peur de témoigner, les preuves matérielles en sont venues à prendre une importance capitale. La situation est la même au Guatemala où l'on a obtenu des résultats encourageants. Lorsque nous avons entrepris notre travail, le taux de résolution des meurtres était de 2 %; il atteint maintenant 30 %.
    Ce sont des pays où les assassinats sont fréquents. On en recense 50 par jour pour les trois pays du triangle du Nord. C'est au Honduras que la situation est la pire en proportion de la population. Comme vous le savez, c'est la pire au monde en dehors des zones de combat.
    On note toutefois une certaine évolution. Si nous considérons notre rôle, nous ne voulons pas perdre notre temps ni gaspiller les fonds canadiens qui nous sont consentis. Nous devons déterminer si les progrès sont réalisés, et nous avons des moyens d'en avoir le coeur net. Dans le cadre de cette analyse, il faut notamment chercher à voir si l'on est déterminé à apporter des changements nécessaires pour que le système devienne fonctionnel.
    Je ne sais pas si vous êtes au courant, mais deux procureurs ont été récemment assassinés à San Pedro Sula. Nous avons travaillé avec ces gens-là. Il s'agit de voir ici comment le gouvernement a réagi, tout au moins pour essayer... Ces deux procureurs ont été assassinés dans un contexte où bien des intervenants au sein du système judiciaire vivent dans la peur. Il faut donc se demander ce que fait l'appareil judiciaire pour protéger ses propres effectifs de telle sorte que l'on puisse aller de l'avant sans craindre pour sa sécurité.
    Vous savez sans doute qu'une nouvelle loi vient d'être adoptée au Honduras le 23 octobre dernier. On réagissait ainsi essentiellement aux événements récents de telle sorte que tous sachent bien que le meurtre d'un intervenant du système de justice, qu'il s'agisse d'un procureur, d'un policier ou d'un juge, entraînera une peine obligatoire d'incarcération à perpétuité. Ce n'est pas une mesure qui permet de protéger directement les gens, mais plutôt d'énoncer clairement les conséquences d'un geste semblable. C'est un exemple des mesures que l'État a commencé... À notre avis, cela ne règle pas le problème, mais on envoie certes ainsi un message pour que tous comprennent bien que l'État est sérieux. Selon nous, et c'est ce que nous ont dit également certains procureurs, il faut y voir un signe positif.
    Il faut maintenant voir ce que l'État essaie de faire. Il faut se souvenir que l'on ne dispose pas de ressources abondantes. C'est aussi un pays qui doit composer avec une conjoncture très violente. Comment l'État s'y prend-il pour protéger ses employés? On offre notamment des cours en droits de la personne et en autodéfense. Certains pourront juger cela insuffisant, mais c'est tout au moins un pas dans la bonne direction. On veut que les procureurs et les autres intervenants sachent comment réagir s'ils se retrouvent dans une situation périlleuse. On offre donc des cours dans tout le système afin que tous soient au fait des mécanismes mis en place pour assurer la sécurité des effectifs.
    C'est dans ce contexte que l'on procède à une véritable réorganisation, tout au moins au sein du ministère public. C'est l'environnement de travail des procureurs, celui que je connais le mieux. Il y a des équipes de soutien à la sécurité. On a mis sur pied une équipe d'intervention rapide si bien qu'un procureur qui se sent menacé peut composer un numéro de téléphone pour que des ressources de sécurité soient déployées.

  (1310)  

    Malheureusement, un pays comme le Honduras qui n'a pas beaucoup d'argent ni beaucoup de ressources doit composer avec de nombreux problèmes. Il s'agit donc en soi d'un progrès majeur, mais cela ne sera certes pas suffisant pour que tout le monde puisse se sentir en sécurité.
    Il faut surtout remarquer qu'il s'agit de nouvelles mesures prises cette année. Elles sont une indication, tout au moins pour les intervenants du système judiciaire, que de nouveaux efforts sont déployés pour les aider à faire leur travail. Nous avons en effet un véritable problème sur les bras, car ces gens-là croulent déjà sous les dossiers. Comme le fonctionnement du système est déficient au départ, si on y ajoute cette crainte, on a vraiment un problème grave à régler.
    Il faut tout au moins se réjouir que l'on agisse ainsi, comme on l'a fait au Guatemala en prenant des mesures lorsqu'un procureur a été violemment assassiné, ce qui a eu pour effet de rassurer ses collègues. Je trouve réconfortant de constater que des mesures de la sorte sont prises également au Honduras.
    Il me semble y avoir certains signes de progrès quant au bon fonctionnement du système. Vous savez sans doute que l'on a institué un fonds pour la sécurité en vue d'améliorer les choses à ce chapitre dans le système judiciaire. Je crois que l'on a ainsi rendu accessibles cette année quelque 96 millions de dollars au ministère de la Sécurité, au ministère de la Défense, à la Cour suprême, aux procureurs, ainsi que pour un programme de prévention. On s'attend à ce que les sommes disponibles atteignent près de 100 millions de dollars cette année pour ce programme qui a été lancé en 2012.
    Nos partenaires là-bas, les gens du ministère public, ont pu profiter de ce fonds. À la lumière de tous les rapports produits, on semble surtout se demander si le problème est lié à un manque de volonté, à une ingérence politique pour manipuler les choses ou à une fonctionnalité déficiente. Il va de soi qu'il peut s'agir d'une combinaison de ces différents éléments, selon l'enjeu en cause, mais je dirais que c'est plus souvent qu'autrement un problème de fonctionnement parce que la capacité d'enquête est insuffisante. On peut bien vouloir intenter des poursuites dans tous ces dossiers, mais en l'absence de preuve, comment va-t-on s'y prendre?
    Nous avons noté que la main-d'oeuvre est insuffisante, compte tenu du grand nombre de dossiers à traiter. Que faire en pareille circonstance? Il faut fixer des priorités. Si chaque procureur se voit confier 50 dossiers de meurtres simultanément, comment va-t-il s'en tirer, surtout dans un système où la loi l'oblige à diriger l'enquête? C'est vraiment problématique. Nous avons dû prendre des mesures dans certains cas parce que les procureurs au sein de ces systèmes judiciaires ont une formation en droit, mais n'ont pas appris à mener des enquêtes. Si l'on a opté pour un régime de la sorte, c'est que l'on n'estimait pas pouvoir faire confiance à la police.
    On a donc instauré un régime hybride dont les pièces maîtresses, les procureurs, ne disposent malheureusement pas des outils nécessaires pour bien faire leur travail. Cela fait partie des choses que nous essayons de régler. Mais il y a peut-être une lueur d'espoir, car les Honduriens vont lancer le 5 janvier 2015 une agence technique des enquêtes criminelles qu'ils appellent l'ATIC. Cette Agencia Técnica de Investigación Criminal relève du ministère public.
    Les enquêtes sont rendues difficiles dans ces pays en raison d'un dysfonctionnement des services policiers. C'est le cas au Honduras où il n'est pas facile pour les corps policiers de travailler main dans la main avec les procureurs aux fins des enquêtes. Si les procureurs ne peuvent pas compter sur des enquêteurs compétents, ils ne peuvent rien faire. C'est au coeur de la problématique dans bien des pays, comme on peut le constater partout en Amérique latine.
    Les solutions peuvent varier d'un pays à l'autre. Certains ont mis en place de solides unités d'enquête au sein de leurs corps policiers. D'autres ont retiré les enquêtes à la police pour les confier aux bureaux des procureurs. D'autres pays encore ont créé une police judiciaire indépendante des deux institutions. C'est cette troisième option qui a été retenue au Guatemala.
    Du côté du Honduras, dans une situation semblable à celle que nous avons connue il y a environ 10 ans au Guatemala, on a choisi de créer une force policière d'enquête qui est intégrée au service des poursuites du ministère public. Cette nouvelle force verra le jour le 5 janvier prochain. Elle pourra compter sur une centaine d'enquêteurs. Nous collaborons avec eux pour offrir la formation requise en espérant pouvoir continuer à le faire, si bien sûr notre financement est maintenu. Il y aura un total de 180 employés qui travailleront surtout à Tegucigalpa et à San Pedro Sula. Ils ont obtenu du financement à même le fonds pour la sécurité. Pour cette année, cela se limitera essentiellement à quelque 8 millions de dollars, mais c'est suffisant pour créer cette nouvelle unité.

  (1315)  

    De notre point de vue, nous devons voir l'unité depuis le début jusqu'à son entrée en fonction. L'unité ne sera pas en mesure de traiter tous les dossiers, mais elle pourra s'occuper des cas à incidence élevée. Elle pourra prendre, enfin c'est ce que j'espère, certains des cas que nous qualifions d'affaires criminelles graves. Si elle peut le faire, et si elle peut bien le faire, cela deviendra alors le modèle pour l'ensemble du pays.
    C'est une partie d'un problème. Nous travaillons en étroite collaboration avec les deux personnes à la tête de cette unité, et nous les avons amenées avec nous au Guatemala pour qu'elles voient ce qui s'est fait là-bas pour mettre sur pied ce que nous appelons une unité d'enquête beaucoup plus intégrée, qui regroupe les procureurs et les policiers. J'estime que c'est le défi fondamental qui revient systématiquement au Honduras.
    Ce sont là des mesures positives pour l'avenir. Des questions ont été soulevées sur certaines affaires et, de toute évidence, sur la façon dont l'unité essaie d'intervenir dans certains cas. Au ministère public, qui est responsable de mener des enquêtes sur certaines violations des droits de la personne, on a pris des mesures cette année que je juge positives. Par exemple, on a désigné quatre procureurs pour travailler directement avec le Colegio de Abogados, le collège des avocats, pour mener des enquêtes concernant des agressions contre des avocats. C'est une initiative positive.
    Je sais que des gens dans le Nord ont été tués, où l'on était aux prises avec des problèmes territoriaux. Un grand nombre de ces affaires n'ont pratiquement pas progressé depuis 2011. Je crois savoir qu'au printemps dernier, deux nouveaux procureurs ont été chargés de gérer ces dossiers.
    Ce sont là des signes positifs de progrès. Il y a d'autres préoccupations. Il est à espérer que le recours à la police militaire dans les rues est temporaire. Comme vous le savez, on a demandé l'aide des militaires en 2011 pour aider à assurer la sécurité en raison des lacunes de la police. En 2013, on a alors créé une force militaire spéciale de maintien de l'ordre. Ce qui nous préoccupe dans le cadre de ces discussions, c'est que les militaires ne remplacent pas vraiment les policiers. On a notamment discuté avec les partenaires qu'il s'agit principalement de forces d'intervention rapide. Ils interviennent en groupe. Ils se rendent dans les collectivités où il y a des conflits. Ils ont fait l'objet d'allégations d'actes de violence et de violations des droits de la personne.
    Le problème, c'est évidemment que la police militaire n'assume pas les fonctions d'enquête, car une partie de la loi en 2013 prévoyait qu'elle travaille avec les procureurs et la magistrature. Le problème à l'avenir, c'est que si les services de police ne peuvent pas être renforcés, ils demeureront une force dans les rues. Une force policière et une force militaire essaieront alors de collaborer pour lutter contre la criminalité dans les rues. C'est quelque chose qui nous préoccupe.
    Nous avons discuté avec des gens et leur avons demandé s'ils allaient assumer des fonctions d'enquête ou s'ils allaient principalement agir à titre de force d'intervention rapide. J'ai reçu différentes réponses. On m'a répondu récemment qu'ils espèrent ne plus assumer des fonctions d'enquête dans l'avenir, surtout avec la création de l'ATIC. On s'inquiète entre autres de la faiblesse de la police, qui est très instable. Je sais qu'elle est sur le point de se livrer à un autre exercice d'élimination au Honduras, ce qui est très difficile. Les services de police ont habituellement recours au polygraphe dans ces cas-là. On se demande à quel point c'est efficace, et les résultats de ces tests polygraphiques déstabilisent une force policière déjà affaiblie. Bien entendu, cela nuit énormément au moral de la police.
    Nous en avons fait l'expérience dans notre travail. Nous avons formé environ 80 techniciens pour inspecter les scènes de crime, et nous en avons probablement perdu à peu près le tiers en cours de route. Par ailleurs, nous comprenons qu'ils ont besoin de faire le ménage pour renforcer leur force. C'est évidemment un défi de taille.

  (1320)  

    Je pourrais peut-être en rester là pour commencer et vous céder la parole pour vous permettre de poser des questions. Cela vous convient-il?
    Tout à fait.
    Nous allons entamer nos questions avec M. Schellenberger.
    Je vais allouer cinq minutes à chaque intervenant. Il peut arriver qu'on dépasse le temps un peu.
    Monsieur Schellenberger, allez-y, s'il vous plaît.
    Merci beaucoup de votre témoignage aujourd'hui. J'ai fait part à de nombreuses personnes de ce que vous avez dit lors de votre dernier témoignage au comité. Je me préoccupe énormément des progrès que vous faites dans votre enquête. Sauf erreur, je pense que vous avez dit la dernière fois que l'un des objectifs était d'apprendre à des membres de l'organisme d'application de la loi comment enquêter.
    Ai-je raison?

  (1325)  

    C'est l'une de nos fonctions de base essentielles.
    D'accord. Je sais que vous y avez fait allusion dans vos remarques, mais pour ce qui est de former les policiers et les enquêteurs, estimez-vous que vous êtes rendus là où vous pensiez être dans vos progrès en ce moment?
    J'aurais aimé que nous soyons rendus beaucoup plus loin que nous le sommes à l'heure actuelle. J'estime que l'instabilité qui règne au Honduras ressemble, comme je l'ai dit, à la situation au Guatemala il y a 10 ans. D'énormes progrès ont été réalisés au Guatemala. Nous ne sommes pas encore là où j'aimerais que nous soyons rendus. Je pense que nous avons accompli des progrès à certains égards. Par exemple, de nombreuses équipes d'enquêteurs ont été mises sur pied qui se rendent, par exemple, sur des scènes de meurtre et rassemblent des preuves adéquatement. Elles recueillent des preuves matérielles. Elles les traitent de façon appropriée. Ces équipes fonctionnent bien. C'est une importante réalisation, à mon avis.
    Nous éprouvons des difficultés pour assurer le suivi en raison de la faiblesse de la police causée par un manque de ressources. C'est pourquoi nous croyons que la création de l'ATIC nous permettra d'apporter des améliorations à cet égard. Les services de police ont tendance à procéder à une rotation des enquêteurs, à qui l'on retire parfois leurs fonctions. Cette façon de faire n'a pas permis de créer la stabilité dont les services de police ont besoin pour mener des enquêtes dans ce pays. Le ministère public a donc répondu ceci: « Si nous ne pouvons pas procéder de la sorte, alors nous allons le faire de cette façon. »
    Le Guatemala a été confronté au même problème, comme je l'ai dit, il y a 10 ans, lorsque les services de police ont dit qu'ils devaient renforcer les fonctions d'enquête. Je trouve encourageant qu'ils ont maintenant des fonds et qu'ils ont embauché des gens. Ils ont tous été approuvés. Nous travaillons avec eux. Ce sont avec eux que nous collaborons pour créer ce système.
    J'espère qu'à compter de janvier, les enquêtes seront menées beaucoup plus efficacement. Les services de police se sont tournés vers le Canada pour les aider à former ces personnes. Nous avons déjà formé certaines d'entre elles, et nous avons bien entendu communiqué avec elles sur les prochaines étapes à suivre.
    Je répondrais donc non à votre question au sujet des enquêtes: nous ne sommes pas encore là où nous devrions être, mais je pense que maintenant que les circonstances sont en train de changer, nous pourrons accomplir plus de progrès en ce sens.
    Merci.
    Après avoir renvoyé de façon arbitraire quatre juges de la Cour suprême en 2012, le Congrès a adopté des mesures législatives pour s'accorder le pouvoir de destituer les juges et le procureur général. À votre connaissance, le gouvernement actuel du Honduras continue-t-il de s'en tenir à sa décision, et quel effet cela a-t-il, d'après vous, sur le système judiciaire au Honduras?
    Nous avons traité avec la magistrature et le ministère public à cet égard. Nous travaillions avec l'ancien procureur général, qui a été renvoyé. Nous avons ensuite collaboré avec l'équipe de transition que le gouvernement a imposée, puis il a créé un nouveau poste de procureur général.
    Quant à savoir si l'État va intervenir, encore là, je ne le sais pas. Bien des gens estimaient que ce que le gouvernement a fait n'était pas correct, que c'était inconstitutionnel. Le gouvernement soutenait qu'il a dû agir de la sorte parce que les systèmes ne fonctionnaient pas. C'était certes différent dans le cas des juges, mais dans le cas du ministère public, c'est ce que le gouvernement a fait valoir. Je ne sais pas si oui ou non... Je trouve que ce qu'il a fait est déconcertant. Ce que je peux vous dire, c'est que nous collaborons de près avec le nouveau procureur général et nous trouvons qu'il y a une ouverture pour essayer de mettre en oeuvre certains des changements qui s'imposent.
    Il faut comprendre que dans ces cas, il y a toujours de grands affrontements au sujet de l'argent. Les fonds sont insuffisants. Lorsqu'on a créé conjointement l'équipe chargée de l'analyse de vidéos judiciaires, par exemple, une partie du problème était que les services de police devaient embaucher des gens au sein de leurs effectifs, mais nous avons dû leur dire qu'ils devaient les payer adéquatement. Bien entendu, le problème ici était qu'on ne réglait pas les aspects techniques, mais plutôt les questions opérationnelles dans un cadre où les ressources sont très limitées. Dans ces cas-là, nous nous sommes aperçus qu'ils étaient disposés à le faire. Autrement, nous formons des gens qui quitteront leur emploi parce qu'ils ne sont pas assez bien rémunérés.
    Je suppose que le problème avec lequel vous êtes aux prises, c'est que vous parlez d'une question politique, et je ne sais pas quoi vous répondre, sauf pour vous dire que ce qui est arrivé est troublant et que nous espérons que cela ne se reproduise plus.

  (1330)  

    Monsieur Marston, s'il vous plaît.
    Bon retour, monsieur Craig.
    Lorsque vous avez parlé de 50 meurtres par jour, je ne suis pas très fort en mathématiques, mais c'est 1 700 meurtres par année. Le Honduras compte combien d'habitants?
    Les 50 meurtres par jour ne visaient pas seulement le Honduras. Pardonnez-moi, j'essayais de montrer la région. Environ 16 meurtres par jour sont commis au Honduras. Le taux de meurtres au Honduras fluctue. Au Canada, c'est 1,8 par 100 000 habitants alors que c'est généralement aux alentours de 90 par 100 000 habitants au Honduras. C'est environ 45 à 50 fois plus élevé qu'au Canada.
    À cet égard, quel est le taux d'arrestations et le taux de condamnations par rapport à ces meurtres?
    Nous croyons que la plupart des arrestations et des condamnations sont pour des crimes moins graves, que l'on qualifie de flagrancia. Nous n'avons pas les données, mais je m'attends que les taux sont sans doute inférieurs à 5 %, voire 2 %.
    C'est donc complètement disproportionné par rapport aux systèmes judiciaires que nous avons en Amérique du Nord.
    Considérez-vous l'ATIC comme étant une forme de FBI ou quelque chose de semblable? Le FBI a été créé aux États-Unis principalement pour lutter contre le crime organisé et les crimes entre États. Je me demande simplement si c'est l'impression qu'on a.
    Pas vraiment, parce que ce n'est pas réellement une force policière, bien que la différence entre le Honduras et ce que le Guatemala faisait, c'est que les enquêteurs de l'ATIC seront armés et pourront procéder à des arrestations. Ils assumeront donc des fonctions policières. Mais c'est un modèle différent, car il est principalement dirigé par le bureau des poursuites, ce que nous trouverions très étrange. Les enquêteurs relèvent de ce bureau.
    En fait, la loi stipule que les procureurs doivent diriger toutes les enquêtes. Le véritable problème qui se pose dans ces pays, c'est de déterminer comment mener des enquêtes fonctionnelles. Si l'on a une force policière suffisamment bonne, alors il est possible d'établir une bonne entente. Autrement dit, il faut former les procureurs sur la façon de diriger les enquêtes et former les enquêteurs sur la façon de collaborer avec les procureurs. En l'absence d'une force policière fonctionnelle, on doit envisager un autre modèle, et ce qui s'est fait ici...
    Si les procureurs sont en charge des enquêtes, n'y a-t-il pas un risque qu'un procureur trop zélé essaie de diriger une enquête vers une issue particulière?
    Oui.
    C'est une réponse inquiétante.
    Eh bien, nous avons essayé de régler un certain nombre de problèmes. Il y a des problèmes techniques, n'est-ce pas? Nous avons discuté avec les forces policières au sujet du modèle de gestion des enquêtes. Nous avons adapté le modèle de gestion des cas graves de la GRC, et nous avons demandé comment un modèle comme celui-là, qui est conçu pour éviter d'avoir une vision trop étroite des choses, pourrait s'appliquer à l'Amérique latine, où les enquêteurs relèvent du procureur. Le procureur dirige l'enquête, le procureur chargé de l'affaire, qui est en fait au sommet de la pyramide. Si l'on a un enquêteur, un gestionnaire de cas et un organisateur de dossier, deux d'entre eux seront liés aux procureurs, et le troisième sera un enquêteur. S'ils utilisent ce modèle, il faut leur demander comment ils l'adapteront à leur pays. C'est ce que nous avons essayé de faire.
    Dans le cadre de l'ancien système, on menait les enquêtes, puis on faisait rapport à un juge d'instruction. Ce sont maintenant les procureurs qui en sont responsable. Mais nous devons leur demander comment ils procèdent. C'est ce sur quoi nous avons mis toute notre énergie. Il y a quelques éléments à examiner. Il y a l'aspect technique visant à savoir comment on met sur pied l'équipe, quelles sont les étapes à suivre, à quelle fréquence elle doit se rencontrer, comment assurer son bon fonctionnement et quels types de preuves on réunit. Il y a aussi l'aspect culturel. Il y avait dans le passé un manque de respect à l'égard des procureurs. Ils sont plus haut placés dans la hiérarchie que les policiers, si bien qu'ils donnent des directives aux enquêteurs. Bien entendu, nous disons qu'ils doivent travailler en équipe. Il faut également examiner l'aspect culturel.
    Dans le cadre de nos travaux, nous nous sommes également penchés sur un problème lié à la mentalité. Dans un système inquisitoire, les gens sont présumés coupables jusqu'à preuve du contraire. Ils sont désormais présumés innocents jusqu'à preuve du contraire. Toute la question de savoir comment on aborde ces cas et comment on traite et présente les preuves pour mener des contre-interrogatoires est tout à fait étrangère à la majorité des gens dans ces systèmes. Ce que nous essayons de dire, c'est qu'il faut se pencher sur la question de la mentalité à adopter pour mener des enquêtes appropriées.
    Nous pensons que si nous enseignons seulement les compétences techniques dans un cadre culturel où les gens ne sont pas habités à penser comme nous, ce que nous présumons, alors nous nous retrouvons avec des problèmes. Ils finiront par faire ce que nous appelons de la justice procédurale, où ils ne font que cocher les cases et disent avoir suffisamment de preuves apparemment pour procéder à une condamnation. C'est une partie du problème que nous essayons de régler, et nous espérons y parvenir avec l'ATIC.

  (1335)  

    Merci, monsieur Marston.
    Avant de passer au prochain intervenant, j'aimerais obtenir des précisions sur une des questions que M. Marston vous a posées, monsieur Craig.
    Il a parlé des deux étapes du processus d'inculpation des meurtriers. Vous avez dit qu'il y avait un taux de 2 %, mais je n'ai pas bien compris. S'agit-il d'un taux de condamnation de 2 % pour l'ensemble des meurtres commis?
    Je n'ai pas réussi à obtenir les chiffres exacts. Quand nous avons commencé notre travail il y a environ six ou sept ans, la plupart des rapports indiquaient que l'on prononçait surtout des condamnations dans les cas de flagrancia, où les meurtriers étaient pris en train de commettre l'acte. Un cas de violence domestique, par exemple, ayant donné lieu à un meurtre est facile à régler, mais lorsqu'une enquête était nécessaire, qu'il fallait porter une accusation et prononcer une accusation, selon l'information que j'avais lorsque j'ai commencé mon travail au Honduras il y a environ six ou sept ans, le nombre de condamnations pour meurtre était pratiquement nul.
    J'ignore ce qu'il en est à l'heure actuelle. Nous n'avons pas réussi à obtenir cette information, qui est nécessaire.
    Merci.
    Allez-y, madame Grewal.
    Monsieur Craig, je vous remercie de nous accorder du temps aujourd'hui.
    Je vous suis très reconnaissante de nous faire profiter de votre expertise en matière de justice et de droits de la personne. Depuis que votre organisation participe au projet du Triangle Nord visant à renforcer le système de justice et la lutte contre la criminalité, quel est le degré d'efficacité du projet? Comment choisissez-vous ceux qui reçoivent la formation, et dans quelle mesure leurs efforts ont-ils eu des répercussions au Honduras?
    Le projet prendra fin en juin, mais il est en cours depuis un certain temps. Nous sommes maintenant à la deuxième étape, ce qui veut dire que nous travaillons dans certains de ces pays depuis environ six ou sept ans. Nous sommes au Guatemala, où nous nous étions déjà rendus, au Salvador et au Honduras.
    Nous recueillons beaucoup de résultats tangibles. Différents moyens sont mis en oeuvre à cette fin. C'est au Guatemala que nous avons obtenu les meilleurs résultats, car c'est là que nous sommes le plus avancés. Le taux de condamnation dans ce pays, qui était entre 2 et 5 %, est maintenant de 30 %. Nous avons toutes ces données. Nous rassemblons les résultats de différentes façons, non seulement en compilant des statistiques, mais également en essayant de déterminer si la formation que nous donnons est utile dans le cadre d'affaires portées devant les tribunaux, et si ces affaires entraînent des condamnations.
    Pour ce qui est des données balistiques, nous déterminons le nombre de cas dans lesquels les analyses ont permis d'obtenir des preuves qui ont été remises aux procureurs et qui ont servi dans un procès. C'est ainsi que nous évaluons notre travail. De temps à autre, nous prenons connaissance d'une affaire dans laquelle des preuves balistiques ont été utilisées. Nous pouvons ainsi justifier nos efforts et démontrer que ces preuves étaient utiles.
    En ce qui a trait aux résultats obtenus, le Guatemala dirait que le Canada est son partenaire privilégié et que notre contribution dans le cadre de ce processus est probablement, à mon avis, la plus importante. Je crois que les choses progressent. Parmi ces trois pays, le Guatemala, le Salvador et le Honduras, le Honduras est celui qui pose le plus grand défi, car il y règle un climat d'instabilité avec lequel nous avons dû composer.
    Cela dit, de nombreux exemples d'éléments de preuve nous permettent de démontrer notre contribution. Je pense que nous ne sommes pas là où nous devrions être. Le Honduras n'est pas le bon endroit. À mon avis, il faudra attendre encore au moins cinq ans pour consolider nos objectifs en matière d'enquêtes, qui devront ensuite, cela va de soi, être appliqués à l'ensemble du pays. Le problème, c'est qu'il y a beaucoup d'intervenants. Dans un pays comme le Honduras, il y a probablement autour de 600 procureurs, et ils doivent tous recevoir une formation. Il y a aussi les techniciens de même que tous les autres intervenants. Il faut également collaborer avec la magistrature.
    Je crois que notre travail est reconnu à l'échelle internationale comme étant très efficace, mais il y a toutefois beaucoup à faire.

  (1340)  

    Quel devrait être l'objectif du Honduras en matière de justice au cours des 10 prochaines années? Quelle est la prochaine mesure concrète qui doit être prise pour atteindre cet objectif? À votre avis, quel sera le rôle joué par votre organisation?
    Au bout du compte, une volonté politique doit s'ajouter au soutien technique. Le Honduras a donc besoin de certains champions, idéalement au sein de la classe politique et de la classe dirigeante.
    En revanche, dans certains pays comme le Honduras, où il y a 600 procureurs, nous constatons qu'ils sont nombreux à être profondément engagés et à risquer leur vie. Nous collaborons avec eux. Ce sont eux qui nous donnent espoir, car ils veulent que leur société soit sécuritaire, et c'est pour cette raison que je suis optimiste.
    Nous nouons ce genre de relations. Nous apprenons à connaître les gens. De toute évidence, ce sont les forces vives du pays, ceux qui devront en bâtir les institutions. Notre travail consiste entre autres à collaborer étroitement avec eux pour savoir quelle est la meilleure façon de procéder.
    À mon avis, l'ATIC doit connaître du succès. Il faut ensuite créer d'autres agences semblables, car même avec 100 enquêteurs, elle pourra seulement traiter les dossiers importants provenant des deux grandes villes. L'agence enquête sur 21 crimes, mais elle ne sera pas en mesure d'en faire davantage sans prendre de l'expansion.
    Le modèle d'enquête doit être consolidé, comme on le fait actuellement avec le modèle pour les scènes de crime. Je pense qu'il faudra ensuite améliorer la mentalité adoptée pendant les procès. Si c'est possible...
    À mon avis, dans 10 ans, le Honduras aura un système de justice qui comprend ce que nous voulons dire par présomption d'innocence et qui comprend beaucoup mieux comment procéder à un examen accusatoire de manière dynamique. Ce n'est pas encore le cas, mais j'espère que cela deviendra réalité.
    L'autre chose que nous devons comprendre est que... Je parle beaucoup des meurtres, mais pour le peuple, le problème le plus grave est celui de l'extorsion, qui prend parfois la forme d'enlèvements spontanés. Ce sont surtout les pauvres et les membres de la classe moyenne qui sont constamment victimisés par les gangs. À l'exception des craintes pour leur propre vie, le plus grave problème de la plupart des gens est de devoir payer un montant pour avoir la vie sauve.
    Par conséquent, en plus de consolider leur système de justice, ils devront démanteler les gangs. Il faut qu'ils le fassent.
    Pour y arriver, ils devront acquérir certaines compétences. C'est un aspect que nous avons surtout abordé au Guatemala, où il faut... Dans un barrio, un gang peut être contrôlé par, disons, la Mara Dieciocho ou la Mara Salvatrucha, qui sont des groupes criminels très violents. Ils prennent possession du territoire. La principale raison qui incite des jeunes à fuir le Honduras, le Guatemala et le Salvador est la crainte de se retrouver dans un gang. C'est le problème auquel font face les États-Unis, qui comptent 60 000 de ces jeunes.
    Je reviens tout juste de ce coin-là. J'ai parlé à un chauffeur de taxi qui m'a dit qu'il envoyait ces enfants à l'étranger. Je lui ai demandé de quelle façon, et il m'a répondu que ce serait par des canaux clandestins. Je lui ai demandé pourquoi, et il m'a dit que les gangs l'ont pris pour cible. C'est un grave problème. Ils doivent démanteler ces gangs. Nous devons rendre la région plus fonctionnelle, mais également la doter d'une capacité stratégique.
    C'est ce qui se passe actuellement au Guatemala où, par exemple, les autorités ont démantelé une clika de 20 membres qui étaient responsables dans un barrio du meurtre de 32 personnes en deux mois. Ils extorquaient de l'argent et tuaient ceux qui ne pouvaient pas payer. Les autorités ont établi des liens entre tous ces meurtres et démanteler la clika.
    La situation au Honduras est loin d'être aussi grave, mais en plus de rendre le pays plus fonctionnel, il faut le doter de cette capacité d'analyse, car, autrement, on ne pourra jamais démanteler les gangs. Cela fait également partie de nos objectifs.
    Dans 10 ans, j'espère que ces pays seront plus fonctionnels, qu'ils auront démantelé certaines de ces organisations criminelles et qu'ils seront plus sécuritaires.

  (1345)  

    L'autre élément très important à retenir dans ce cas-ci, c'est que lorsque l'on vit dans un pays où le système de justice ne fonctionne pas, les gens ne s'attendent pas à autre chose. Une partie de notre travail est donc de leur faire croire qu'il peut fonctionner, comme ici. Quand on croit que c'est possible, on fait de son mieux et cela fonctionne, mais, si 50 affaires de meurtre sont en attente d'un procès, et qu'on sait qu'une seule d'entre elles donnera des résultats, eh bien, quel est l'effet sur la confiance et l'attitude des gens? Ce troisième point m'intéresse beaucoup. C'est très important pour nous d'y donner suite.
    Merci.
    Monsieur Cotler, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Je m'excuse, car je devrai partir après ma question. Je dois être de retour à la Chambre juste avant la période des questions pour remplir d'autres obligations.
    Monsieur Craig, merci d'être avec nous.
    J'aimerais commencer mon intervention en faisant allusion au témoignage d'Henri-Paul Normandin, le directeur général de la Direction générale de l'Amérique latine et des Antilles du ministère des Affaires étrangères, qui a comparu devant notre comité le 6 novembre. Il a lui aussi passé en revue certaines des préoccupations dont vous nous avez fait part aujourd'hui au sujet de la culture de corruption et de l'impunité et des cas d'intimidation et de violence, y compris de meurtre, dont ont été victimes des défenseurs des droits de la personne, des journalistes et des intervenants du secteur judiciaire. Il a mentionné deux réformes éventuelles, et c'est de cela dont je veux discuter avec vous, ainsi que d'une troisième, si le temps le permet.
    Il a d'abord parlé de la volonté du gouvernement de collaborer avec des institutions multilatérales des droits de l'homme, y compris en invitant le haut-commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme à ouvrir un bureau au Honduras.
    À votre avis, cela témoigne-t-il de leur volonté d'aller au-delà du haut-commissaire des Nations Unies en nouant des liens avec des institutions des droits de l'homme en Amérique latine ainsi qu'avec d'autres organismes multilatéraux ailleurs dans le monde?
    Je ne sais pas jusqu'où ils sont prêts à aller. Je sais que cela signifie qu'ils sont préoccupés par leur image et — du moins à en croire les gens avec qui je parle constamment — par le fait qu'ils doivent prendre des mesures pour résoudre ces problèmes liés aux droits de la personne.
    Vous savez, il est difficile pour moi de répondre à cette question. Je ne peux que répéter ce que les gens me disent, y compris ceux qui travaillent au sein du système de justice. Au moins, ce que j'entends est encourageant.

  (1350)  

    Ma deuxième question porte sur ce qu'il a dit au sujet de l'adoption par le gouvernement du Honduras de mesures de protection des défenseurs des droits de la personne, des journalistes, des communicateurs sociaux et des magistrats. Il a toutefois dit craindre que ces mesures soient inefficaces si elles n'étaient pas accompagnées de ressources suffisantes et de volonté politique, des éléments auxquels vous avez vous-même fait allusion le 30 avril 2013 devant notre comité. À l'époque, vous avez même parlé des graves lacunes des forces policières et des tribunaux du Honduras en matière d'enquêtes criminelles.
    Cette récente mesure législative prévoit-elle suffisamment de ressources pour atteindre l'objectif visé?
    Je ne sais pas. Je n'ai pas suivi ce dossier. Je sais qu'il y a un problème lorsqu'ils adoptent des lois sans prévoir de fonds, n'est-ce pas? Nous avons parfois assisté à l'adoption à des fins politiques de lois ne pouvant pas être mises en oeuvre.
    Compte tenu de l'accent qui est mis sur la création de ces nouveaux programmes, je crois qu'ils sont issus de la tasa de seguridad, le fonds qu'ils ont créé. Il s'agit selon moi de la mesure la plus positive ayant été prise jusqu'à maintenant. Certaines des questions dont vous parlez sont d'ailleurs visées par ces programmes, dans la mesure où notre travail est concerné.
    Je pense qu'il y a plus de ressources financières qu'avant. Rappelez-vous que ce fonds en particulier n'a été créé qu'en 2012. Si je ne m'abuse, 170 millions de dollars ont été versés depuis le 31 octobre 2012. C'est un engagement important. Cette année, le montant sera de 96 millions de dollars. Vous devez toutefois comprendre que, bien entendu, de nombreux intervenants se partagent cette somme.
    Je crois qu'il s'agit vraisemblablement du plus important engagement pris à ce jour.
    Pour terminer, des témoins ayant comparu devant notre comité, y compris une représentante d'Amnistie internationale, ont parlé comme vous aujourd'hui de la culture de l'impunité au Honduras. La témoin d'Amnistie internationale, Esther Major, nous a dit qu'il était important que le président du Honduras condamne lui-même publiquement le meurtre de défenseurs des droits de la personne, de journalistes et d'intervenants du système judiciaire. Elle a fait valoir que de mentionner au plus haut échelon que ces actes ne seraient pas tolérés serait important pour lutter contre cette culture de l'impunité.
    Avez-vous pris connaissance de déclarations du président Hernández condamnant le meurtre de défenseurs des droits de la personne, de journalistes et de fonctionnaires du système judiciaire du Honduras?
    J'essaie de voir. Je ne sais vraiment pas. Pas à ma connaissance. Je sais qu'il y a eu certaines affaires importantes, des affaires emblématiques. Le gouvernement a déployé des efforts pour faire comprendre qu'une enquête rigoureuse serait menée et qu'il avait prévu des ressources supplémentaires à cette fin. Quant à savoir s'il a fait ou non une telle déclaration, je ne sais pas.
    Je crois que ce serait une bonne chose. Je pense qu'ils devraient le déclarer à maintes reprises.
    Merci, monsieur Craig.
    Merci, monsieur.
    Nous allons maintenant passer à M. Sweet.
    Monsieur Craig, vous êtes comme un ange tombé au beau milieu d’une situation très inquiétante, au Honduras. Par conséquent, je vous remercie infiniment du travail que vous accomplissez.
    Pour donner suite à la question de M. Cotler à propos des déclarations qui appuient votre travail, vous avez mentionné le besoin d’avoir des champions politiques. Observez-vous l’apparition de certains de ces champions au Honduras?
    Il y a deux types de champions, soit les champions politiques et les champions du leadership. Si nous rencontrons les représentants du procureur général actuel, que nous leur demandons s’ils sont disposés à passer à l’action et qu’ils répondent que cette idée est pleine de bon sens et qu’ils sont disposés à affecter les ressources nécessaires pour la mettre en oeuvre, selon moi, cela signifie qu’ils font ce qu’ils doivent faire.
    Il reste à savoir s’ils le font avec le genre de vigueur... En fait, la championne que je respecte le plus vient du Guatemala. Elle s’appelle Claudia Paz y Paz, et elle est très célèbre. Elle a vraiment dit au monde entier qu’ils allaient aller de l’avant à un rythme incroyable. C’est intéressant parce que, lorsque j’examine le travail de son institution, je constate que ses paroles, à elles seules, ont un effet très bénéfique sur la volonté des gens.
    Je n’ai pas encore observé ce genre de phénomène au Honduras. Je pense que ce serait formidable si nous pouvions être témoins de cela au Honduras.
    Il y a des champions au niveau opérationnel. Ce sont des gens qui, selon moi, sont allés beaucoup plus loin que ce à quoi on pouvait s’attendre et qui sont simplement déterminés. C’est en eux que nous fondons nos espoirs.
    Cela dit, les champions du niveau opérationnel ont besoin d’être appuyés par des champions politiques. Je crois qu’ils ont besoin d’être encouragés à faire preuve de plus de vigueur. Je le pense vraiment.
    Je ne sais pas si cela répond suffisamment à votre question.

  (1355)  

    Oui, c’est bon. Je ne veux pas devancer les paroles que le président pourrait prononcer, mais vous pourriez peut-être transmettre les éloges de notre comité à ces gens qui risquent quotidiennement leur vie pour tenter de rendre justice et de donner espoir à la population. Je ne peux pas imaginer ce que ce serait d’être procureur au Honduras dans une telle situation. Nous leur sommes grandement reconnaissants du travail qu’ils accomplissent.
    J’ai écouté très attentivement votre témoignage, mais il se peut que la réponse à ma prochaine question m’ait échappé. Par conséquent, pardonnez-moi si ma question vous semble répétitive. Vous avez longuement parlé de la formation relative aux enquêtes et aux compétences en matière de poursuite. D’autres forces de police ou des agents de police d’autres nations contribuent-ils à cette formation?
    Oui. Cette contribution change, mais les Américains y participent. L’USAID offre des programmes de soutien, et d’autres programmes de ce genre sont également mis en œuvre. La DEA organise des programmes de soutien qui portent sur la gestion des causes liées à la drogue. Les Américains sont donc présents, et ils jouent un rôle à cet égard.
    Dans ce domaine en particulier, c’est surtout nous qui avons joué le rôle d’acteur principal, mais les Américains ont appuyé nos efforts. Dans le passé, l’Espagne a collaboré avec nous et nous a apporté de l’aide, mais j’ignore où cette initiative en est aujourd’hui. Les Espagnols se sont toujours intéressés à nous, mais leurs budgets ont, bien entendu, été radicalement réduits en raison des problèmes économiques qui sévissent en Espagne. Par conséquent, nous ne les avons pas croisés, et nous ne leur avons pas parlé au cours des dernières années.
    Un comité se réunit pour parler de l’aide internationale, et nous assistons à ses réunions. Toutefois, en règle générale, les acteurs dans ce domaine ne sont pas très nombreux.
    Vous avez parlé d’un cadre culturel. Je suppose que vous entendiez cela un peu dans le sens d’une paralysie qui empêche les gens de changer de conceptions.
    Cela mis à part, l’attitude des gens envers le changement est-elle généralement positive? Vous parliez du système archaïque que vous deviez gérer et des efforts que vous avez déployés pour tenter d’amener les gens à joindre le XXIe siècle. En général, l’attitude des gens à l’égard du changement est-elle positive, de sorte qu’ils aient le cœur au ventre pour lutter contre ce cadre culturel?
    J’ai toujours été grandement réconforté par le fait que ces systèmes comptent à la fois des gens qui ont travaillé de l’ancienne façon et un grand nombre de nouveaux employés, de jeunes gens. Lorsqu’on examine ces postes d’enquêteurs, on constate que bon nombre d’entre eux sont occupés par de jeunes gens, qui sont probablement dans la vingtaine.
    Nous remarquons que ces gens se soucient de leur société. Elle leur tient tous profondément à cœur. Ils n’aiment pas ce qu’ils observent, et ils sont très déterminés. Nous venons juste de découvrir chez eux une énorme ouverture d’esprit.
    Nous ne leur imposons jamais quoi que ce soit. Il ne serait pas correct de le faire, étant donné qu’il ne s’agit pas de notre société. Nous tentons plutôt de leur parler de ce qui a du sens, compte tenu de leur culture et de leur système. Nous tentons de leur signaler les problèmes, et nous leur demandons comment nous allons les régler. Nous nous efforçons de les exposer à des compétences ou à des pratiques exemplaires, et nous leur suggérons de les adapter.
    Nous observons simplement un énorme enthousiasme. Bien entendu, le problème, c’est que nous disposons seulement d’une certaine quantité de ressources, et c’est la raison pour laquelle nos interventions ont tendance à être limitées. Vous comprenez?
    Comme je le dis toujours, trois dynamiques entrent malheureusement en jeu. Premièrement, les ressources sont limitées. Deuxièmement, nous opérons au sein d’une société dont le degré de violence est immense selon nos normes. Et, troisièmement, nous avons affaire à un nouveau système de justice qui évolue encore. En combinant ces trois éléments, on obtient un défi de taille.
    Certains problèmes ne leur sont pas imputables. Les problèmes liés aux crimes transnationaux sont engendrés par les événements survenant au Mexique qui déteignent sur le Guatemala et changent le Honduras. Ils participent à des moments de l’histoire, mais, en même temps, ils y font face.
    Vous pouvez imaginer quelle serait notre charge de travail si les actes de violence étaient 45 fois plus nombreux, et ce chiffre ne tient compte que des meurtres. Nous mettons l’accent sur les meurtres parce que c’est la violation des droits de la personne la plus grave. Cependant, le nombre d’extorsions est astronomique, et ces extorsions touchent tout le monde. Il faut s’occuper de ces extorsions. Nous faisons en fait ce travail parce que les gens nous inspirent.

  (1400)  

    Passons à M. Benskin, qui sera notre dernier intervenant.
    À certains moments de votre témoignage, je me suis senti découragé pour vous, mais je crois que nous avons tous perçu dans bon nombre de vos réponses l’espoir que vous avez mentionné et la volonté que vous semblez avoir d’escalader cette montagne. Je vous félicite de vos efforts.
    Nous avons commencé par parler des aspects techniques des mesures qui sont prises pour contribuer à changer le Guatemala, de la formation des enquêteurs, etc. Ensuite, la discussion a semblé se transformer en un dialogue truffé de mots comme « espoir », « contexte », « mentalité », et d’autres mots de cette nature qui, en eux-mêmes, sont plutôt intangibles.
    J’imagine qu’en ce moment, je donne suite à la question de M. Cotler. Qu’est-ce qui est fait, ou qu’est-ce qui peut être fait? Et, selon vous, d’où ces actions doivent-elles provenir pour encourager les gens comme le président Hernández et d’autres chefs politiques du Honduras à vraiment crier sur les toits que nous devons introduire ces changements et pour commencer à modifier l’attitude culturelle et à engendrer un sentiment d’espoir chez les Honduriens, afin qu’ils mettent en pratique les compétences techniques qui leur sont inculquées en vue d’utiliser la preuve pour condamner les bonnes personnes?
    Ce que vous dites est intéressant. Je fais ce travail depuis pas mal de temps maintenant et, lorsqu’on fait ce genre de travail, on découvre que l’on n’a pas conscience de son propre contexte culturel, que l’on présume simplement certaines choses et que l’on voit les choses d’une certaine façon. Dans de nombreux pays du monde où nous parlons des droits de la personne, les gens envisagent ce concept d’un point de vue différent parce que la vie qu’ils ont vécue est différente. Lorsque nous avons affaire à des systèmes de justice, nous devons en partie nous assurer qu’ils s’épanouissent. Ils doivent prouver qu’ils fonctionnent et commencer à régler les problèmes, car c’est de là que proviendra la détermination.
    En ce qui a trait aux enquêtes, nous devons nous assurer de créer un modèle qui fonctionnera, qui donnera des résultats. Alors, les gens mettront leur espoir dans le modèle, et cet espoir engendrera la passion et des ressources. Puis ils reproduiront le modèle. Nous croyons que c’est la seule façon de faire ce travail.
    Nous remarquons en partie que lorsque nous parlons aux gens, ils ne saisissent pas les termes de la même façon que nous. Les termes ont une autre signification pour eux. C’est seulement en mettant les choses en marche que nous pouvons vraiment cerner ces différences, et c’est ce que nous tentons de faire. Si nous souhaitons que les choses fonctionnent, elles doivent être claires et pertinentes sur le plan culturel. À mon avis, c’est là une importante pièce du puzzle. Je pense que la plupart des gouvernements de ces régions comprennent que la sécurité est probablement la première préoccupation de leur population. Ils le savent; ils en entendent parler, et ils vivent eux-mêmes cette inquiétude. Ils vivent derrière des clôtures; ils sont enfermés. Tout le monde emploie des gardes de sécurité. Leur société n’est pas saine. Ils craignent pour leurs enfants. C’est une expérience réelle pour eux.
    Nous devons les aider à admettre que, manifestement, ils sont dépassés par les événements. Il va falloir qu’ils agissent à plusieurs niveaux. Ils doivent s’attaquer au problème des stupéfiants et au problème des gangs. Ils doivent également régler le problème de fonctionnalité. En général, je constate qu’ils ont le désir de régler ces problèmes. Cependant, souvent, lorsque nous abordons des questions avec eux, c’est comme si nous leur présentions des idées auxquelles ils n’ont jamais pensé auparavant. Nous devons alors tenter de leur expliquer les raisons pour lesquelles ces idées sont pertinentes et bien adaptées à leur milieu. Nous devons même le faire pour des concepts comme le contre-interrogatoire. Le contre-interrogatoire, tel que nous le concevons, n’existe pas dans de nombreux pays. Il découle de l’histoire des droits de la personne, parce que l’ancienne idée d’appeler une victime à la barre, conformément au modèle inquisitoire, et de mettre la victime et d’autres témoins vraiment à l’épreuve leur est presque étrangère. Cette notion découle de notre culture, de notre histoire et de notre système juridique qui a évolué pendant plus de 500 ans. Quand ils s’engagent dans cette direction, nous devons nous employer à clarifier ces concepts pour eux. Je pense que nous pouvons réussir et que ce processus est en cours, mais, au bout du compte, il faut que le processus donne des résultats. Si c’est le cas, je crois que le processus ira de l’avant.
    Je pense que la volonté politique est cruciale. Il faut qu’ils déclarent que c’est leur priorité absolue et qu’ils feront tout en leur pouvoir pour changer la situation. Ils doivent aussi affecter des ressources supplémentaires à cette initiative.
    Je ne veux pas vous donner des réponses trop compliquées. J’espère qu’elles conviennent.

  (1405)  

    Non, ça ne pose pas de problème.
    Une autre question m’était passée par la tête, mais elle a disparu maintenant. Je vais donc céder les quelque 30 secondes qu’il me reste.
    En fait, il vous reste seulement une seconde. C'est très bien.
    Merci, monsieur Benskin.
    Merci, monsieur Craig. Votre témoignage a été une fois de plus très instructif. La dernière fois, vous nous avez envoyé une vidéo que j'ai eu l'occasion de regarder et dont je vous suis particulièrement reconnaissant. Cela m'a fourni un contexte très utile qui m'a aidé à mieux comprendre les observations que vous avez formulées au cours de votre dernière comparution et qui a replacé dans leur contexte les paroles que vous avez prononcées aujourd'hui. Je le répète, je vous suis très reconnaissant de l'excellent travail que vous accomplissez au Honduras et ailleurs.
    Chers collègues, je vais vous demander de rester ici après le départ du témoin afin que nous puissions régler certaines questions de régie interne.
    Merci, monsieur Craig.
    Je vous remercie de m'avoir entendu.
    Chers collègues, M. Marston avait...
    Une voix: Devrions-nous poursuivre la séance à huis clos?
    Le président: Non.
    Monsieur Marston.
    Pour donner suite aux témoignages de Mme Tintori et de Jared Genser à propos de Leopoldo López, de sa détention et d'autres prisonniers d'opinion, nous sommes saisis de la motion de M. Cotler. J'aimerais la présenter au nom de M. Cotler. Elle a été distribuée. Par conséquent, tous les membres connaissent son existence.
     Sommes-nous tous d'accord?
    J'aimerais juste mentionner quelque chose. J'approuve le contenu, mais… Je sais que le mot « Venezuela » est mentionné à plusieurs reprises, mais il n'y a pas une seule... Je sais que la motion aura probablement pour en-tête « Gouvernement du Canada » lorsque nous l'enverrons. Ne devrait-elle pas mentionner le Sous-comité des droits internationaux de la personne du comité canadien des affaires étrangères? Le mot « canadien » ne figure pas dans la motion. Je ne vois pas ni le mot « Canada », ni le mot « canadien » mentionné nulle part.
     Si vous me le permettez, monsieur le président, je tiens à préciser que la motion sera envoyée au Comité des affaires étrangères. Nous n'allons pas répondre à cette motion. Une fois adoptée, elle leur sera transmise. Si j'ai bien compris, c'est ainsi que la motion sera traitée. Ensuite, elle sera envoyée à la Chambre où elle fera l'objet d'une motion d'adoption, conformément au concept original.
    Ce n'est pas nécessairement ce que j'avais compris.
     Une voix: Nous allons simplement la publier.
    M. Gary Schellenberger: Je pensais que nous allions simplement la publier.
    Cela me convient.
    Du point de vue de la procédure, il s'agit là d'une motion que nous publions. Ce n'est pas un rapport. Un rapport serait renvoyé à la Chambre. La présente motion sera simplement publiée. Bien entendu, l'en-tête indiquera qu'elle émane du sous-comité du Comité des affaires étrangères de la Chambre des communes du Canada. Cette mention figurera sur la page, mais non dans la résolution elle-même.

  (1410)  

    Oui, je comprends cela. En même temps, j'aimerais que le mot « Canada » figure ailleurs que dans l'en-tête.
    Pouvons-nous dire que la motion est adoptée à condition que toute erreur technique soit corrigée par les analystes? En outre, je pense qu'elle doit être présentée dans les deux langues officielles.
    Oui, nous allons devoir présenter la motion dans les deux langues officielles. Elle contient quelques erreurs techniques mineures. Par exemple, il y a une faute d'orthographe à un endroit.
    Une voix: Oui, contentez-vous de rectifier la motion.
    Une voix: Donc, sommes-nous d'accord à cet égard?
    Quelqu'un devrait avoir la courtoisie de le mentionner à M. Colter.
    Nous le ferons également.
    Cela ne me pose pas de problème.
    Fort bien. Sommes-nous tous d'accord?
    (La motion est adoptée. [Voir le Procès-verbal])
    Le président: Voilà qui est excellent. Merci, chers collègues.
    Chers collègues, comme nous sommes en retard, la séance est levée.
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