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HEAL Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON HEALTH

COMITÉ PERMANENT DE LA SANTÉ

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 27 novembre 2001

• 1116

[Traduction]

La présidente (Mme Bonnie Brown (Oakville, Lib.)): La séance est ouverte.

Notre invitée, la docteure Lippman, va se présenter.

Mme Abby Lippman (professeur, Département d'épidémiologie et de biostatistique, université McGill, Réseau canadien pour la santé des femmes): Merci beaucoup.

[Français]

Bonjour. Merci.

[Traduction]

Je suis ravie de m'adresser au comité. J'avoue qu'en venant ce matin, je me disais que nous vivons actuellement la meilleure et la pire des époques. Je précise que c'était avant les problèmes de vidéoconférence et le déclenchement de la sonnerie de la Chambre. Comme je passais mon temps dans l'autobus à lire les titres des journaux, je me suis dit que cette séance était particulièrement opportune. Je vais vous dire tout de suite de quoi je n'ai pas l'intention de vous parler. Je ne vous parlerai pas beaucoup de clonage ni de cellules souches, bien que j'y ferai peut-être quelques allusions, un peu différentes de ce que vous avez entendu jusqu'à maintenant j'espère.

Je m'adresse aujourd'hui au comité à un double titre, et j'essaierai de vous prévenir quand je changerai. En effet, je représente le Réseau canadien pour la santé des femmes, dont je suis coprésidente du conseil d'administration. Mais je m'adresse aussi à vous en mon nom personnel, et je vous indiquerai quand ce sera le cas.

Je vous préviens aussi que, si je parle aussi bien le français que l'anglais, je parle les deux avec le même accent newyorkais.

Des voix: Oh!

Mme Abby Lippman: C'est d'ailleurs pour cette raison qu'il m'est déjà arrivé de dire que je suis une minorité audible de ce pays.

Le Réseau canadien pour la santé des femmes, si vous ne le connaissez pas encore, est un réseau national de personnes, d'organisations et d'institutions s'intéressant de manière générale à la santé des femmes. C'est un centre de distribution d'informations sur ce sujet. Depuis quatre ans et demi, nous sommes l'un des partenaires des centres nationaux d'excellence pour le consortium de recherche en politiques sur la santé des femmes. Le programme est financé par Santé Canada et nous faisons partie du comité directeur du programme des centres d'excellence.

Le Réseau canadien pour la santé des femmes est également une filiale, en quelque sorte, du Réseau canadien de la santé. Je vous fais grâce des sigles, j'ai moi-même peine à m'en souvenir.

Nous nous intéressons également de près à d'autres questions de santé, par le truchement de deux groupes de travail, l'un portant sur les femmes et la réforme de la santé, et je crois que vous avez rencontré certains de ses membres, et l'autre, sur les femmes et la protection de la santé.

C'est un groupe de volontaires auquel n'importe qui peut se joindre. Si vous êtes d'accord avec nos principes, vous serez les bienvenus. Je ne perds jamais de temps à solliciter des adhésions.

Le RCSF n'a pas préparé de déclaration officielle sur l'ébauche de projet de loi mais je peux vous dire qu'il y a certaines parties de ce texte qui concordent avec les positions que nous avons exprimées dans d'autres contextes. Voilà d'ailleurs pourquoi on m'a choisie pour vous présenter nos positions.

Le Réseau m'a également demandé d'exprimer ses positions pas seulement parce que je suis coprésidente du conseil, à l'heure actuelle, mais aussi parce que j'ai fait partie du Comité consultatif fédéral sur les nouvelles technologies de reproduction, dont j'ai démissionné en juin 2000.

J'ajoute que j'ai une formation en génétique et que je fais maintenant partie du Département d'épidémiologie. J'ai mené mes proches recherches et j'ai publié des articles sur des questions de génétique et de technologies génésiques, peut-être même alors que certains d'entre vous n'étaient même pas nés. Mes cheveux gris témoignent des difficultés que peuvent poser certaines de ces questions. Ce sont des questions difficiles. Que l'on soit pour ou contre, il n'y a là rien de facile. La plupart de mes recherches ont consisté à faire des études qualitatives auprès de femmes qui ont dû prendre des décisions sur l'utilisation de ces technologies. Mes opinions personnelles sont donc fondées sur ce que j'ai pu apprendre dans ce contexte.

• 1120

Comme vous ne semblez pas être encore tout à fait ennuyés, j'ajoute que je fais partie du comité d'éthique de la Faculté de médecine de McGill, ma base de travail. J'ai aussi fait partie du comité d'éthique de la Société des obstétriciens et gynécologues du Canada lorsqu'elle avait rédigé son énoncé de position sur divers éléments du projet de loi, notamment sur la maternité subrogatoire. C'est moi qui ait signé cet article pour la Société.

Vous savez donc maintenant qui je suis.

La présidente: Merci beaucoup, madame Lippman. Veillez à prendre un fauteuil confortable.

Mme Abby Lippman: C'était très agréable de témoigner aujourd'hui. Vos questions étaient vraiment très faciles.

La présidente: Bonjour, docteure Dalziel.

Mme Maureen Dalziel (présidente-directrice générale, Human Fertilisation and Embryology Authority (Londres, Royaume-Uni)): Bonjour.

La présidente: Je m'appelle Bonnie Brown et je suis présidente du Comité permanent sur la santé. Nous vous sommes très reconnaissants d'avoir accepté de passer un peu de temps avec nous ce matin. Je crois comprendre que vous avez une déclaration à faire, après quoi nous vous poserons des questions. Ça vous convient?

Mme Maureen Dalziel: Parfaitement.

La présidente: Dans ce cas, madame Dalziel, vous avez la parole.

Mme Maureen Dalziel: Merci. Je suis très heureuse de m'adresser à vous cet après-midi, heure de Londres.

La Human Fertilisation and Embryology Authority du Royaume-Uni a été créée le 1er août 1991 avec le mandat suivant: réglementer et accréditer les cliniques pratiquant la FIV; réglementer les dons de gamètes, y compris l'insémination, l'entreposage de gamètes et d'embryons, et les recherches sur les embryons humains; appliquer un code de pratique sur l'exercice des activités autorisées; tenir un registre des traitements dispensés et des enfants nés en conséquence; offrir des avis et des informations aux cliniques agréées, aux patientes et au public; surveiller l'évolution de ce domaine; et offrir des avis, sur demande, au secrétaire d'État à la Santé du Royaume-Uni.

J'ai pensé qu'il serait utile de consacrer quelques minutes à expliquer ces responsabilités. La plus grosse partie de notre fonction de réglementation, et de loin, concerne l'émission, la gestion et la révision de licences—de toutes les licences de recherche, de prestation de services, et d'activités que les organismes sont autorisés à exercer ou qu'ils peuvent exercer.

Avant d'accorder une licence, nos équipes inspectent les équipements du centre et s'assurent que le personnel possède la formation professionnelle et les normes de compétence correspondant aux techniques que le centre a l'intention d'utiliser. En règle générale, les licences de traitement sont valides pendant trois ans mais il arrive que cette période soit réduite et que des conditions supplémentaires soient imposées si l'on constate qu'un centre a enfreint le code de pratique.

Bien que l'on indique dans la loi les conditions générales d'octroi d'une licence et les activités pour lesquelles une licence peut être attribuée, on n'y indique pas en détail les techniques individuelles ni les compétences particulières requises des personnes qui les utilisent. Cela relève de la HFEA.

Toute demande de licence est jugée par un comité composé de membres de l'Autorité. Il arrive que les comités soient confrontés à des décisions difficiles, exigeant la contribution d'autres experts. L'Autorité revoit constamment sa liste d'experts pour être constamment en mesure d'évaluer les demandes techniquement complexes en faisant appel aux spécialistes des domaines voulus.

Si le comité d'octroi d'une licence se fonde avant tout sur le code de pratique de l'Autorité, il détient le pouvoir absolu d'octroyer des licences, de les modifier, d'y imposer des conditions ou de les révoquer, en vertu de la loi de 1990. Il est arrivé que certaines de ses décisions soient contestées au moyen d'une procédure d'appel intégrée au système. Les appels sont d'abord jugés par l'Autorité au complet, moins les membres du comité, bien que l'appelant et le comité aient le droit de se faire représenter devant l'Autorité.

Si le résultat de l'appelant est négatif, le centre possède un dernier recours, consistant à interjeter appel devant la Haute Cour sur une question de droit. Cette procédure garantit que toute décision de licence prise par l'Autorité ne pourra être arbitraire, incohérente ou injuste.

• 1125

L'application du code de pratique est l'une des principales fonctions imposées par la loi. Nous publions et entretenons ce code pour toutes les parties travaillant dans le secteur de la reproduction assistée, afin de les guider sur les activités pouvant être exécutées dans le cadre d'une licence. Bien que ce soit la cour qui exprime et interprète les dispositions exécutoires de la loi, la fonction principale du code est de traduire les exigences de la loi, notamment en ce qui concerne ce qui est acceptable ou adéquat, en une série de normes réalistes dont le but est de veiller à ce que les cliniques dispensent le meilleur service possible aux patientes.

En conséquence, ses objectifs sont d'assurer l'exécution de la loi et la prestation d'un service de qualité. Il ne s'agit pas d'une norme minimum, il s'agit de promouvoir le meilleur service possible.

L'Autorité s'est efforcée d'élaborer et d'améliorer ses structures, systèmes et procédures pour appuyer les meilleures décisions possible en matière de reproduction assistée, de façon à garantir que ses décisions, quelle qu'en soit la nature, soient bien fondées et bien prises. En revanche, ni le code ni l'autorité, de manière générale, n'ont pour but d'usurper le pouvoir de décision du personnel clinique et des patientes.

Un autre élément important est le registre qu'utilise l'Autorité pour conserver des informations détaillées sur toutes les FIV et tous les traitements d'insémination. Son but dans ce contexte est de pouvoir fournir certains détails aux enfants sur les circonstances de leur naissance une fois qu'ils atteignent l'âge de 18 ans ou qu'ils ont l'intention de se marier. Par exemple, le registre permettra à l'Autorité de dire aux personnes nées par l'utilisation de gamètes donnés si elles sont génétiquement reliées à la personne qu'elles ont l'intention d'épouser.

Ces données peuvent également servir à surveiller le rendement des cliniques en permettant à l'Autorité de se pencher sur les facteurs de rendement inférieurs à la normale. Cela a déjà permis à plusieurs reprises d'établir des dialogues utiles entre des cliniques et des équipes d'inspection.

Comme vous le savez, les FIV et les traitements connexes sont de plus en plus utilisés suite au progrès rapide des technologies. L'Autorité tient à veiller à ce que toute nouvelle technique qui est proposée ait été attentivement examinée du point de vue de la sécurité et de l'efficacité avant d'accorder une licence pour son application clinique.

Parmi les exemples récents de nouvelles techniques envisagées, mentionnons le diagnostic génétique pré-implantatoire, l'injection intracytoplasmique de spermatozoïdes et la congélation d'embryons. Avant qu'une technique soit examinée par la HFEA, des informations spécialisées sont demandées à des groupes d'experts, et des avis d'experts indépendants sont utilisés pour aider l'Autorité à déterminer si le centre concerné a démontré que la technique est sûre, que sa fiabilité a été prouvée, que des recherches précliniques adéquates ont été exécutées, que le centre possède les compétences requises, que des critères de sélection de patientes ont été établis et que des procédures appropriées d'information et de consentement sont appliquées.

Ce domaine est celui qui a causé le plus de difficulté à l'Autorité au cours des 10 dernières années. Il existe en effet toujours une tension entre le souci d'offrir des traitements nouveaux et efficaces et l'obligation pour l'Autorité de résister aux pressions exercées pour ne pas freiner le progrès. Au Royaume- Uni, on considère que l'Autorité fait généralement preuve de prudence en procédant à une évaluation minutieuse de chaque nouvelle demande.

Vous savez peut-être qu'il y a eu des débats à la Chambre des communes en janvier, lorsque de nouveaux règlements ont été ajoutés à la loi pour permettre certains des aspects les plus innovateurs et qui changent le plus vite dans le domaine de la génétique de reproduction. En janvier de cette année, de nouveaux objectifs ont été acceptés pour la recherche sur les embryons, notamment l'amélioration des connaissances sur le développement des embryons, sur les maladies graves ou sur l'application des connaissances dans la mise au point de traitements pour les maladies graves.

• 1130

Suite à ces nouveaux règlements, nous avons renforcé notre système de licences de recherche. Les candidats seront tenus de justifier pourquoi ils doivent utiliser des cellules souches embryonnaires plutôt que des cellules souches adultes ou animales. Ces informations seront nécessaires pour savoir en détail ce qui arrivera aux cellules souches dans le projet, pour fixer les paramètres du projet autorisé, et pour obtenir des rapports d'étape une fois tous les six mois.

La surveillance exercée dans ce domaine sera minutieuse et détaillée; toutefois, il s'agit là d'une expansion du rôle que joue l'Autorité depuis plus de 10 ans. Vous savez sans doute qu'un arrêt a été rendu la semaine dernière établissant que la définition d'un embryon dans le cadre de la Loi sur la fertilisation et l'embryologie humaines ne comprend pas les embryons créés par le remplacement du noyau cellulaire. À l'heure actuelle, la Chambre est saisie d'un projet de loi d'urgence destiné à mettre fin au clonage humain au Royaume-Uni afin d'éliminer le plus rapidement possible cette échappatoire.

Voilà ce que je voulais dire pour le moment. Merci de votre attention.

La présidente: Merci, madame Dalziel.

M. Preston Manning, critique de l'Opposition officielle, sera le premier à vous poser des questions.

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Alliance canadienne): Bonjour, docteure Dalziel. Je vous remercie d'être venue devant le comité.

Je voudrais d'abord savoir si l'Autorité doit rendre des comptes au Parlement. Nous essayons ici, au Canada, de mettre sur pied une autorité externe, et nous voudrions qu'elle soit relativement indépendante du gouvernement et du ministère. En revanche, nous tenons à ce qu'elle rende des comptes au Parlement et à la population.

Pourriez-vous donc nous dire exactement comment l'Autorité rend compte de ses décisions et actions?

Mme Maureen Dalziel: L'Autorité rend des comptes au secrétaire d'État, par le truchement du ministère de la Santé, lequel rend des comptes au Parlement. L'Autorité exerce les fonctions prévues par la loi et elle assume donc un large éventail de responsabilités au nom du Parlement.

Les membres de l'Autorité se réunissent en privé. Leurs discussions ne se tiennent pas en public, mais l'Autorité possède un site Web qui lui permet de tenir le public informé de ses décisions, à la fin de chacune de ses réunions.

L'Autorité se réunit en privé une fois par mois, sauf en décembre et en août, qui sont les deux mois de vacances. Les réunions du comité d'octroi de licences se tiennent complètement en privé. C'est seulement maintenant, suite à certaines suggestions du ministère de la Santé, que nous commençons à examiner la possibilité de rendre nos jugements beaucoup plus accessible au public.

C'est donc par le système habituel de responsabilité ministérielle que nous rendons des comptes à la Chambre des communes.

M. Preston Manning: Qu'en est-il des règlements? Est-ce que vos règlements doivent être approuvés par le Parlement, ou est-ce que le Parlement peut se pencher sur un règlement quelconque s'il estime qu'il n'est pas conforme aux objectifs de la loi?

Mme Maureen Dalziel: La loi britannique a été rédigée avec beaucoup d'attention. Il y a donc certaines difficultés d'ordre logistique dans sa mise en oeuvre quotidienne, par exemple en ce qui concerne la confidentialité. On a toujours considéré que la confidentialité était l'un des aspects les plus importants de la HFEA, ce qui veut dire que toute modification à ce chapitre exigerait une modification de la loi primaire, ce que le gouvernement britannique n'a pas encore été disposé à envisager.

• 1135

S'il y a certaines choses qui peuvent être modifiées par le truchement de la loi secondaire, la Chambre les envisagera de manière plus favorable. Le problème que poserait la modification de la loi primaire est que cela pourrait entraîner un débat sur la loi au complet.

Comme vous le savez, un projet de loi a été déposé à titre d'urgence sur le clonage humain. C'est un très petit projet de loi qui porte strictement sur cet aspect et sur rien d'autre.

Outre la loi et les règlements correspondants, certaines conditions peuvent être imposées, ce qui veut dire que l'interprétation de loi peut être légèrement différente de ce qui avait été envisagé à l'origine. Par exemple, si nous voulions nous assurer que les règlements relatifs à la recherche étaient interprétés d'une manière particulière, nous pourrions ajouter des conditions particulières dans les règlements secondaires de la loi.

Est-ce que tout ça est clair?

M. Preston Manning: Oui. Merci.

Vous avez parlé tout à l'heure des dispositions concernant les cellules souches embryonnaires. Pourriez-vous cependant faire un peu l'historique de cette question—depuis une dizaine d'années, disons—et de l'évolution de la réglementation du clonage thérapeutique dans le but de produire des cellules souches embryonnaires?

Selon nos informations, il y avait à l'origine des restrictions à ce sujet mais elles ont été modifiées. Aujourd'hui, il y a une controverse sur ce qui est autorisé et ce qui ne l'est pas. Pouvez-vous donc faire l'historique de votre réglementation du clonage thérapeutique, notamment dans le contexte de la reproduction par cellules souches embryonnaires?

Mme Maureen Dalziel: La loi a été rédigée avec beaucoup de minutie à une époque où le clonage thérapeutique n'était pas encore envisagé comme une possibilité. Il s'agissait essentiellement d'une loi visant à protéger le traitement de l'infertilité et la recherche sur l'infertilité. Toutefois, suite à la confiance accordée par les deux Chambres du Parlement, y compris la Chambre des lords, à la manière dont la HFEA appliquait la loi, et suite aux progrès de la génétique que l'on constate dans le monde entier avec les projets sur le génome, il est devenu évident que les cellules souches d'adultes et de tissu animal n'offraient pas en soi le potentiel des cellules souches embryonnaires—les embryons d'animaux ayant été le modèle qui a lancé le débat.

À l'heure actuelle, on estime que les cellules souches embryonnaires seraient plus à même de produire le type de cellules exigées pour la thérapie du futur.

Suite au débat qui se tient depuis environ quatre ans, le chef des services médicaux a réuni notre comité consultatif particulier pour examiner cette question. Le résultat de son rapport a fait l'objet d'un débat en Chambre. Suite à ce débat, il a été convenu d'étendre la portée de la loi pour aller au-delà de la recherche sur le traitement de l'infertilité. Autrement dit, on a voulu qu'elle s'applique aussi à la recherche sur des embryons qui pourrait être approuvée dans les buts suivants: accroître les connaissances sur le développement des embryons; accroître les connaissances sur les maladies graves; ou permettre l'application de ces connaissances pour mettre au point des traitements pour les maladies graves.

Vous savez que la Chambre des lords, plus tôt cette année, a aussi mis sur pied un comité consultatif à ce sujet. De ce fait, l'Autorité a décidé de ne pas aller de l'avant en matière de recherche impliquant le remplacement du noyau cellulaire, pour le moment, tant que le comité de la Chambre des lords n'aura pas produit son rapport.

• 1140

Il y a quelques jours, la ProLife Alliance a contesté la définition de «specified» dans la loi et a obtenu l'accord de la Cour sur l'idée qu'un embryon non fertilisé ne peut être désigné embryon. De ce fait, le projet de loi sur le clonage humain a été déposé devant les deux Chambres du Parlement. Cela laisse une lacune en ce qui concerne le remplacement du noyau cellulaire, qui n'est pas réglementé au Royaume-Uni, à moins que la cour d'appel ne renverse la décision du tribunal de première instance. Pour le moment, le ministère de la Santé examine avec ses conseillers juridiques la manière dont cette lacune pourrait être comblée, mais je pense qu'il a la conviction que la décision de la cour sera renversée en appel.

[Note de la rédaction: Inaudible]... sont vraiment considérés comme offrant un avantage thérapeutique, le Medical Research Council oeuvrant avec la Medicines Control Agency et avec la Human Fertilisation and Embryology Authority pour mettre sur pied un processus garantissant que l'esprit du Règlement soit conforme à l'intention du législateur.

La présidente: Merci beaucoup, docteure Dalziel.

J'aimerais poursuivre la discussion sur un aspect très concret. Vous avez parlé de l'utilisation thérapeutique des cellules souches et, puisque le Royaume-Uni accorde plus de liberté à ses chercheurs scientifiques dans ce domaine, je me demande si vous avez entendu parler de résultats très positifs dans le traitement des maladies concernées?

Mme Maureen Dalziel: Pour le moment, je pense que la meilleure conclusion à ce sujet consiste à dire que les scientifiques procèdent à l'élaboration de méthodes de traitement. Autrement dit, il n'y a pas encore de thérapie qui soit prête. Si l'on compare avec le projet du génome, d'aucuns affirment qu'il a démarré quand on a découvert l'ADN et qu'il a fallu 50 ans pour arriver au projet du génome dont vous et mois avons entendu parler au cours des 18 derniers mois.

À mon avis, avec les cellules souches, nous en sommes au point où l'on essaie d'extraire les cellules des embryons plutôt que de préparer déjà des thérapies qui permettraient de guérir certaines maladies, comme la maladie de Parkinson ou les maladies cardiaques. L'espoir est qu'on arrivera à mettre au point une méthode d'extraction de cellules pouvant être reproduites, lorsque les méthodes seront mieux élaborées, pour commencer à formuler des thérapies.

Quiconque connaît la recherche médicale sait qu'il faut environ huit ans pour faire approuver un médicament au Royaume-Uni ou en Europe. Je ne sais pas quelle est la situation au Canada et aux États-Unis mais je doute que cela aille plus vite.

Une fois qu'on aura commencé à faire de la recherche sur les méthodes et qu'on aura mis au point des méthodes scientifiquement plus solides, l'extraction de ces cellules devrait devenir plus routinière. À ce moment-là, il devrait être possible d'utiliser les cellules comme cellules de remplacement, que ce soit pour le cerveau, le coeur ou les muscles. Je pense que toute la procédure va probablement prendre une dizaine ou une quinzaine d'années.

À l'heure actuelle, on procède à la mise au point d'une méthode de culture des cellules. C'est sans doute quelque chose que les gens ont beaucoup de mal à comprendre mais, si l'on voit cela du point de vue d'une science sociale plutôt que de la biologie—et cela vaut pour tous les types de recherche—il y a toujours une recherche méthodologique parallèlement à une recherche de résultats. Généralement, la recherche méthodologique est en avance sur la recherche de résultats. À mon avis, nous en sommes au tout début du processus. Toutes les premières recherches ont porté sur la culture de cellules d'embryons excédentaires et je n'ai encore jamais entendu parler, pour le Royaume-Uni, de lignes cellulaires quelconques que l'on ait réussi à cultiver de cette manière.

• 1145

La présidente: Merci. J'ai maintenant des questions d'ordre plus quantitatif à vous poser, concernant l'octroi des licences. En effet, je me demande combien de licences actives ont été délivrées dans votre pays. J'aimerais aussi savoir combien vous avez d'inspecteurs pour faire l'inspection des centres agréés. Je me demande si les licences s'appliquent à un centre—c'est-à-dire, à une clinique—ou à un chercheur dirigeant une équipe. Autrement dit, sont-elles accordées à une personne, à un lieu ou à un projet associé à une équipe?

Mme Maureen Dalziel: Nous avons à l'heure actuelle 118 centres de traitement agréés. Depuis les 11 années que fonctionne la HFEA, plus de 175 cliniques ou centres ont obtenu une licence.

Le processus exige qu'une personne assume la responsabilité des opérations générales du centre. Il y a aussi des droits relativement minimes à payer, ce qui est notre position de repli au cas où quelque chose arriverait à la personne que nous appelons «la personne responsable».

Des licences sont accordées de manière tout à fait routinière pour les FIV, l'insémination par donneur et l'entreposage d'embryons et de gamètes. Il y a ensuite des licences spécifiques, dont le nombre a été multiplié par 180, pour des activités que je qualifierais de micromanipulation. Cette catégorie englobe des choses telles que le diagnostic pré-implantatoire, l'IIS, l'aneuploïdie. Tout cela découle des progrès de la génétique.

Il s'agit donc d'un ensemble de choses différentes. Il y a également des licences distinctes pour la recherche, dont une partie est cependant effectuée dans des centres de traitement. Là encore, cependant, une personne est désignée responsable de la licence de recherche.

En ce qui concerne le nombre d'inspecteurs de l'Autorité, voici la situation. Nous avons cinq inspecteurs-coordonnateurs qui couvrent l'ensemble du Royaume-Uni. L'un d'entre eux est chargé d'inspecter les activités de recherche et les autres s'occupent principalement des activités de traitement. Sur ces quatre autres, certains peuvent avoir des responsabilités particulières, concernant essentiellement les activités de micromanipulation. L'Autorité emploie également à l'heure actuelle jusqu'à 40 inspecteurs, c'est-à-dire des cliniciens, des scientifiques et des conseillers. Ceux-ci visitent les centres de traitement une fois par an et exécutent une inspection approfondie une fois tous les trois ans—et aussi si le comité d'octroi de licences, composé de cinq membres, a imposé des conditions particulières à une licence.

La situation est donc assez variable. Bien qu'il y ait un système régulier pour ce que j'estime être les aspects plus routiniers des licences de FIV et d'insémination par donneur, il y a des inspections plus intensives pour l'IIS, le DPI, l'aneuploïdie et pour des demandes particulières, par exemple de groupage HLA.

Cela répond-il en partie à votre question?

La présidente: Tout à fait. Merci beaucoup.

Je me demande aussi si le Parlement, dans le texte de loi ou dans les règlements correspondants, a fait certaines déclarations concernant la protection des mères éventuelles, disons, par exemple, quant au nombre de fois qu'une même personne peut utiliser des inducteurs d'ovulation. Il y a aussi la protection de l'embryon, avec le nombre d'ovules pouvant être fertilisés, et le nombre de fois où un homme peut faire don de sperme. Y a-t-il des règlements quelconques à ce sujet ou laissez-vous aux médecins le soin de prendre les décisions eux-mêmes?

• 1150

Mme Maureen Dalziel: Il n'y a pas de règlements sur ces questions. Nous pouvons exprimer des avis et inclure des recommandations dans le code de pratique. À l'heure actuelle, par exemple, nous y indiquons que pas plus de trois embryons devraient être réimplantés à la fois dans une femme. Depuis quelques mois, l'Autorité a décidé que la limite devrait être de deux embryons.

L'outil que nous utilisons pour régir ce genre de chose est le code de pratique, car nous pensons qu'il nous permet de nous adapter à l'évolution de la recherche et aux nouvelles informations issues de la pratique clinique. Autrement dit, le code nous permet d'adopter les opinions exprimées par les Collèges royaux des sages- femmes, des infirmières et des obstétriciens et gynécologues, ou par l'Association des embryologues cliniques.

La présidente: Mais c'est votre Autorité qui gère ce code de pratique, n'est-ce pas?

Mme Maureen Dalziel: Oui, cela fait partie de nos responsabilités. Idéalement, on devrait publier un nouveau code de pratique chaque année pour énoncer non pas des normes mais ce que nous nous attendons à voir dans les cliniques, en matière de traitement et de recherche. Je n'en ai pas apporté d'exemplaire avec moi mais je serais très heureuse de vous envoyer la dernière version, si cela peut vous être utile.

La présidente: Ça nous serait très utile.

Pouvez-vous abroger une licence si votre inspecteur constate que quelqu'un a enfreint le code de pratique?

Mme Maureen Dalziel: Abroger une licence n'est jamais simple car c'est une procédure judiciaire. Nous avons à l'heure actuelle l'exemple d'une clinique où nous avons constaté des infractions au code de pratique et à la loi. Nous avons lancé une procédure de révocation dans le cadre de laquelle nous avons déposé des preuves devant un comité de licences, composé de cinq membres de l'Autorité. Les preuves viennent de deux sources: de nos inspecteurs mais aussi de la personne responsable. Celle-ci a le droit de présenter également sa vision des choses.

Quand on décide de réviser une licence, il y a toute une procédure juridique à suivre. Il ne suffit pas de supposer qu'une infraction a été commise à l'égard du code de pratique ou de la loi. En résumé, donc, je peux vous dire qu'il y a une procédure à suivre, laquelle garantit que toute l'affaire sera traitée dans les règles.

La présidente: Merci.

Tous les membres du comité n'étaient pas encore arrivés quand nous avons commencé la séance, madame Dalziel, parce qu'il y avait un vote en Chambre. M. Manning et moi-même étions donc ici pour tenir le fort. Je constate maintenant que les autres membres du comité sont revenus et je vais donc leur demander s'ils ont des questions à vous poser.

Nous allons commencer par M. Merrifield.

M. Rob Merrifield (Yellowhead, Alliance canadienne): Merci.

Votre Autorité sur la fertilité humaine doit tenir compte de points de vue différents, par exemple du public, des scientifiques et des croyances. Comment cela est-il pris en compte? Pensez-vous que ces différents groupes sont représentés au sein de votre comité?

Mme Maureen Dalziel: Nous avons un très grand comité, composé de la présidente et de 20 membres. Ces membres sont des cliniciens, des scientifiques, des éthiciens et des représentants du public. Il y a une représentation proportionnelle pour veiller à ce que le comité ne puisse être dominé par les cliniciens et les scientifiques. Bien que le Royaume-Uni évolue actuellement vers plus de participation publique et que nous nous efforcions de faire participer aussi des groupes représentatifs des patientes, de manière plus informelle, la composition même du comité garantit que chacun de ces groupes est représenté.

• 1155

M. Rob Merrifield: Comme votre comité existe depuis déjà un certain temps, je suis sûr qu'il a évolué. Si vous deviez retourner au début, ou si vous décidiez de juger rétrospectivement comment il a évolué, quelles seraient à votre avis ses deux premières forces et ses deux premières faiblesses, et quels changements voudriez- vous y apporter, si vous le pouviez?

Mme Maureen Dalziel: Sa plus grande force est qu'il a démontré à la population britannique que la science dans ce domaine très délicat est réglementée de manière réfléchie, et que les principes d'éthique qui fondent les décisions sont aussi justes et opportuns que possible.

Son deuxième grand atout est qu'il a réussi à établir de très bonnes relations de travail avec les cliniciens et les scientifiques de ce secteur, ce qui veut dire que l'Autorité n'est jamais prise par surprise par les progrès de la science.

Sa faiblesse est probablement qu'il a été créé à une époque où l'on pensait que la FIV serait une activité très rare. Ce serait une procédure qui ne serait utilisée que par un très petit nombre de gens. On n'avait aucunement imaginé à l'époque les progrès de la génétique, et son infrastructure—que je vous ai décrite en parlant du nombre d'inspecteurs et d'inspecteurs-coordonnateurs—est relativement faible. Si le comité devait être mis sur pied aujourd'hui, dans le but de rassurer le public, je dirais que c'est cela qu'il faudrait renforcer.

M. Rob Merrifield: Merci. Je n'ai qu'une autre question à vous poser

Pourriez-vous nous indiquer quel est le budget annuel ou quelles sont les dépenses, et peut-être leur taux de croissance depuis quelques années, et nous expliquer aussi quelles sont les sources de revenu?

Mme Maureen Dalziel: Oui, je l'ai déjà expliqué. La HFEA est une organisation extrêmement efficiente. Son budget pour les 10 dernières années s'est élevé à 1,5 millions de livres, ce qui fait relativement peu de dollars canadiens par année quand on multiplie par trois. Il est d'ailleurs de plus en plus évident qu'il va falloir accroître considérablement ce budget si l'on veut être capable de gérer le processus d'inspection de la recherche de manière à la fois rigoureuse et sensible.

Pour ce qui est des sources de financement, ce sont en fait les cliniques de traitement. Et cela continuera d'être ainsi à l'avenir, mais nous aurons aussi des ressources provenant des organisations de recherche, qui, au Royaume-Uni, se trouvent essentiellement dans les universités. Nous discutons actuellement avec le ministère de la Santé et avec le ministère du Commerce et de l'Industrie pour voir quelle serait la meilleure méthode à cet égard, dans le but de veiller à ce que les droits que nous percevons sont justes considérant ce que nous faisons au nom du Royaume-Uni.

La présidente: Quelqu'un d'autre?

Monsieur Ménard.

[Français]

M. Réal Ménard (Hochelaga—Maisonneuve, BQ): J'aurais apprécié que vous nous attendiez avant de commencer, madame la présidente. Il y a eu un vote à la Chambre. Il est difficile de poser des questions quand on n'a pas entendu le début de l'exposé. On est allés voter. On a fait notre travail de parlementaires.

• 1200

[Traduction]

La présidente: Veuillez m'excuser, monsieur Ménard.

Monsieur Dromisky.

M. Stan Dromisky (Thunder Bay—Atikokan, Lib.): Vous avez probablement déjà traité de cette question quand nous étions en train de voter à la Chambre mais, considérant les développements les plus récents en matière de recherche sur les cellules souches, aux États-Unis, pouvez-vous nous dire quelle a été la réaction dans votre pays, notamment à la Chambre des communes?

Mme Maureen Dalziel: Un projet de loi a été déposé devant le Parlement. De fait, il est passé hier à la Chambre des lords et il doit passer jeudi à la Chambre des communes. C'est un très petit projet de loi qui garantira qu'il ne peut y avoir de clonage humain au Royaume-Uni. C'est un projet de loi qui a été proposé en urgence car, il y a quelques jours, la ProLife Alliance a réussi à faire accepter par la Haute Cour que la définition d'un embryon ne comprend pas la définition d'un embryon par clonage.

Toutefois, si la cour d'appel ne renverse pas cette décision, cela veut dire qu'il y aura une lacune dans la loi et que le remplacement de noyau cellulaire pourra se faire—ce qui est du clonage thérapeutique, pas du clonage de reproduction humaine. Le ministère de la Santé étudie actuellement le moyen de combler cette lacune, mais je pense qu'il a aussi la conviction que la cour d'appel renversera la décision.

En même temps, un comité de la Chambre des lords étudie une nouvelle réglementation de la recherche sur le remplacement du noyau cellulaire. Il doit produire son rapport à la fin du mois de janvier et la HFEA a décidé de ne pas accorder de licences de remplacement de noyau cellulaire jusqu'à ce moment-là, mais nous continuons d'appliquer la réglementation sur la recherche conformément à la loi.

Cela répond-il à votre question?

M. Stan Dromisky: Pourriez-vous nous donner un peu plus d'informations sur la recherche thérapeutique, la recherche sur les cellules souches?

Mme Maureen Dalziel: Grâce à sa réglementation de la recherche, le Royaume-Uni est bien placé pour accorder des licences de recherche lorsqu'il le juge approprié. Les conditions sont les suivantes: accroître les connaissances sur le développement des embryons; accroître les connaissances sur les maladies graves; ou permettre à ces connaissances d'être utilisées pour mettre au point des traitements des maladies graves.

J'ai déjà expliqué que les recherches scientifiques en sont encore à une étape tout à fait préliminaire. Pour le moment, on tente de mettre au point des méthodes d'extraction des cellules, mais pas encore de produire des thérapies à partir des cellules.

J'ai tenté de décrire la situation en comparant avec la découverte de l'ADN, il y a 50 ans, et le projet du génome qui vient de se faire. Je ne veux pas dire que la mise au point de thérapies prendra autant de temps cette fois, je voulais simplement indiquer qu'il faut normalement huit ans au Royaume-Uni ou en Europe pour faire approuver un médicament, c'est-à-dire huit ans d'essais cliniques, et je pense que ce sera probablement la même chose pour ce type de thérapie.

Autrement dit, pour le moment, aucune cellule souche n'a encore été produite au Royaume-Uni. Un certain nombre de chercheurs ont tenté d'extraire des cellules souches embryonnaires, dans le cadre de la réglementation existant en matière de recherche, mais sans succès. Le Medical Research Council tient beaucoup à favoriser le développement de cette science et il agit avec le ministère du Commerce et de l'Industrie pour encourager l'établissement d'une infrastructure qui permettra aux scientifiques de poursuivre cette recherche. Bien que nous ayons deux nouveaux candidats qui aient adressé une demande à l'Autorité, nous ne leur avons pas encore accordé de licence.

La présidente: Merci.

Madame Wasylycia-Leis.

• 1205

Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Nord-Centre, NPD): Merci.

Je voudrais revenir sur le projet de loi dont est saisi votre Parlement à l'heure actuelle. S'il est adopté, est-ce qu'il interdira le type de choses dont on a parlé hier au sujet du Massachusetts?

Mme Maureen Dalziel: Non. Il s'agit de clonage de reproduction humaine. Ce dont on a parlé aux États-Unis, c'est ce que j'appelle du clonage thérapeutique.

Mme Judy Wasylycia-Leis: Quelle est la politique actuelle du Royaume-Uni en matière de création d'embryons pour de la recherche?

Mme Maureen Dalziel: La portée de la Loi sur la HFEA a été étendue le 31 janvier de cette année afin de préciser de nouvelles utilisations légales reliées à la recherche sur les embryons. Comme je l'ai dit, il s'agit d'accroître les connaissances sur le développement des embryons, d'accroître les connaissances sur les maladies graves, et de permettre l'utilisation de ces connaissances pour mettre au point des traitements des maladies graves.

Deux demandes ont été déposées devant l'Autorité, laquelle les étudie en ce moment, mais aucune licence n'a encore été accordée. Il y avait cependant des licences antérieures qui avaient été accordées au sujet de trois projets de recherche, conformément à la réglementation antérieure. Toutefois, aucune cellule souche ni aucune ligne cellulaire n'a été mise au point grâce à ces licences.

Mme Judy Wasylycia-Leis: Merci.

Dans quelle mesure la recherche exécutée dans ce domaine est- elle réglementée dans le secteur public? Autrement dit—puisque vous avez dit que la plupart des recherches se font dans les universités—quelle proportion est faite dans les sociétés des sciences de la vie et dans les compagnies pharmaceutiques, c'est-à- dire au-delà du champ de réglementation et de supervision par le gouvernement?

Mme Maureen Dalziel: [Note de la rédaction: Inaudible]... l'octroi de licences de recherche au Royaume-Uni comprend la recherche effectuée dans le secteur privé aussi bien que dans le secteur public. Jusqu'à présent, cette recherche, au Royaume-Uni, a été effectuée dans le secteur public et dans les universités. De plus en plus, toutefois, nos universités—et je ne sais pas si c'est la même chose au Canada—découvrent l'esprit d'entreprise, forgent des partenariats et créent des sociétés pour investir plus d'argent dans la recherche. Je sais qu'un certain nombre de sociétés privées ont exprimé le voeu d'appuyer la recherche effectuée dans ce domaine mais elles attendent de voir si la procédure d'octroi de licences sera simple ou compliquée.

Mme Judy Wasylycia-Leis: Merci.

Toujours sur cette question, comment traitez-vous le processus d'octroi de brevets et le développement de cellules humaines manipulées génétiquement? Je sais que c'est une question importante à l'échelle internationale et je me demande si vous avez adopté au Royaume-Uni une politique publique à l'égard des demandes touchant le brevetage des formes de vie.

Mme Maureen Dalziel: La HFEA n'a encore reçu aucune demande à cet égard mais je sais qu'il y a eu des discussions sur toute cette gamme de questions au ministère de la Santé et au ministère du Commerce et de l'Industrie. Je ne sais pas où en sont ces discussions à l'heure actuelle mais je sais qu'on commence à s'y intéresser sérieusement.

Mme Judy Wasylycia-Leis: La question que je vais poser maintenant a peut-être déjà été traitée, madame la présidente, mais j'aimerais aborder la question du financement public des services fournis en matière de fertilisation in vitro, d'insémination artificielle et d'autres technologies de reproduction. Quelles sont les procédures couvertes par l'assurance-santé publique et quelles sont celles qui ne le sont pas? Comment fonctionne vote système à cet égard?

Mme Maureen Dalziel: Selon le système actuel, dans certaines régions du pays la Santé nationale assume les frais des traitements de FIV, mais généralement pour pas plus de trois essais pour une même personne ou un même couple.

• 1210

Pour vous donner une idée générale, 75 p. 100 de ces procédures sont exécutées dans le secteur privé et seulement 25 p. 100 dans le secteur public. Le National Institute for Clinical Excellence étudie actuellement les données disponibles sur l'infertilité et décidera ensuite si les traitements devraient être couverts par le secteur public. J'ai l'impression qu'ils ne le seront probablement que si l'on peut démontrer que ce serait efficient. À l'heure actuelle, ça n'a pas encore été démontré.

Il existe évidemment un lobby de patientes stériles qui apprécieraient que le National Health Service dispense des services de traitement de la stérilité dans le cadre de ses activités normales mais, pour le moment, la plupart des gens doivent assumer les frais de cette procédure.

La présidente: Merci, madame Wasylycia-Leis.

Je donne maintenant la parole à M. Lunney.

M. James Lunney (Nanaimo—Alberni, Alliance canadienne): Merci, madame la présidente.

Quelle est la réglementation britannique sur la vente de gamètes? Par exemple, nous avons constaté qu'il peut y avoir des incitatifs financiers très généreux pour que des femmes fassent don d'ovules. Comment cela est-il réglé au Royaume-Uni?

Mme Maureen Dalziel: [Note de la rédaction: Inaudible]... je dirais qu'on ne paie pas plus de 10 livres pour ça.

M. James Lunney: Excellent.

Ma question suivante concerne la maternité subrogatoire rémunérée. Quels sont les paramètres en vigueur au Royaume-Uni, du point de vue de la perte de revenu ou de ce qu'on appelle des dépenses raisonnables?

Mme Maureen Dalziel: Ce n'est pas un domaine dont nous nous occupons. Ça ne relève pas de notre compétence. Cela s'explique parce qu'il y a plusieurs types de lois en jeu, touchant notamment le droit de la famille, le droit de l'enfance, etc. Honnêtement, je ne saurais vous dire où en est la situation aujourd'hui. Tout ce que je peux vous dire, c'est que la maternité subrogatoire n'est pas quelque chose qui soit vraiment—comment dire—bienvenu au Royaume-Uni. C'est tout ce que je peux dire à ce sujet.

M. James Lunney: Diriez-vous donc que c'est une procédure qui est découragée?

Mme Maureen Dalziel: Oui.

M. James Lunney: Excellent.

Une autre chose, concernant les dons. Autorisez-vous les dons anonymes ou prenez-vous des mesures pour vous assurer que les enfants nés de cette manière ont accès à des informations sur leurs parents génétiques?

Mme Maureen Dalziel: C'est une question très pertinente car cette situation est de plus en plus fréquente. Autrefois, les dons étaient privés. Nous conservions simplement dans notre registre une description des donneurs si ceux-ci souhaitaient que les informations soient communiquées aux enfants.

Il y a cependant deux facteurs à considérer. Il y a la législation sur les droits de la personne et l'opinion de plus en plus répandue, dans un certain nombre d'organisations appuyant les donneurs et les parents d'enfants issus de dons de gamètes, que l'on devrait être beaucoup plus compréhensif à l'égard de l'origine génétique de l'enfant. Le ministère de la Santé entreprendra bientôt des consultations publiques, sur une période de six mois, sur le type de renseignements qui devraient être rendus disponibles.

La Liberty Alliance, qui défend vigoureusement le droit des enfants à savoir qui sont leurs parents, a intenté plusieurs actions judiciaires pour obtenir que les informations concernant les donneurs soient rendues disponibles, premièrement, parce qu'il peut y avoir des questions de maladies qu'il serait utile de porter à la connaissance du donneur, deuxièmement, parce qu'il serait utile à l'enfant de connaître ses origines génétiques et, troisièmement, pour contester la législation. Voilà où en est la situation actuelle au Royaume-Uni.

• 1215

Mon opinion personnelle est qu'on peut s'attendre à ce que des informations plus complètes soient mises à la disposition des enfants à mesure qu'ils seront plus nombreux à apprendre qu'ils sont issus d'un don de gamètes. À mon avis, les recherches permettent de penser qu'il y a d'excellentes raisons de croire que les tribunaux finiront par penser que c'est une bonne idée. C'est tout ce que je peux vous dire là-dessus.

M. James Lunney: Merci beaucoup.

La présidente: Monsieur Manning.

M. Preston Manning: Je n'ai qu'une brève question à poser. Quelle est la relation entre l'Autorité et les autorités locales de la santé et les autres composantes du système, comme la Human Genetics Commission? Comme vous le savez, nous avons au Canada un régime fédéral, donc très différent du vôtre, et beaucoup de nos institutions ne relèvent pas du champ de compétence fédéral. J'aimerais savoir quelle est la situation chez vous.

Mme Maureen Dalziel: L'Autorité a normalement compétence sur l'Angleterre, le pays de Galles, l'Écosse et l'Irlande du Nord. C'est donc un organisme tout à fait national. Elle relève du ministère de la Santé, qui est également celui dont relève le NHS.

Comme vous pouvez le constater, nous réglementons des services de traitement dispensés dans des établissements du NHS et dans des cliniques privées. Nous n'avons donc de relations avec les bureaux régionaux ou avec les autorités régionales de la santé qu'en ce qui concerne des problèmes particuliers revêtant un intérêt plus large que celui du seul centre de traitement ou de recherche auquel nous avons accordé une licence. Je cherche un exemple. Ce serait le cas, par exemple, si nous trouvions du VIH ou une autre maladie contagieuse dans une clinique donnée. Dans ce cas, il se pourrait fort bien que nous traitions non seulement avec l'établissement concerné mais aussi avec l'autorité de la santé.

Il y a encore peu de temps, on aurait pu dire que l'Autorité agissait presque seule dans ce domaine, sans recours à d'autres organisations. Toutefois, sa présidente, Ruth Deech, est membre de la Human Genetics Commission, et j'assiste à toutes les réunions de cette Commission, et nous exécutons des consultations conjointes, la plus récente ayant porté sur le diagnostic génétique.

Dans le domaine de la génétique et de la science, nous avons probablement plus de relations stratégiques et de relations opérationnelles. Pour ce qui est du service de la santé, les organisations avec lesquelles nous sommes le plus susceptibles d'avoir des relations sont d'autres organismes de réglementation, comme la Commission for Health Improvement, et le nouvel organisme de réglementation, la nouvelle National Care Founders Commission, qui réglemente la pratique du secteur privé, plutôt que l'autorité de la santé, laquelle est responsable de la supervision des besoins de santé d'une population.

La présidente: Comme il n'y a pas d'autres questions, docteure Dalziel, je vous remercie très sincèrement d'avoir pris la peine de venir témoigner devant notre comité pour nous faire part de toutes vos connaissances.

• 1220

Nous en sommes encore à l'étape d'une ébauche de législation et nous espérons pouvoir adresser bientôt un rapport au ministre, dans l'espoir qu'un projet de loi sera ensuite déposé devant le Parlement. Nous aurons donc sans doute l'occasion de revenir sur ces questions et nous n'aurons donc pas fini tant que nous n'aurons pas fini, si vous voyez ce que je veux dire.

Merci beaucoup à nouveau. Nous avons beaucoup apprécié cette séance et j'espère que nous aurons l'occasion de nous rencontrer à nouveau, si nous nous rendons au Royaume-Uni ou si vous avez l'occasion de revenir au Canada.

Mesdames et messieurs, nous allons faire une pause de deux minutes avant d'entendre à nouveau la docteure Lippman.

• 1221




• 1226

La présidente: Nous reprenons nos travaux.

La docteure Lippman était suffisamment intéressée par cette séance pour venir à 11 heures, afin d'entendre Mme Dalziel, du Royaume-Uni. Comme Mme Dalziel n'était pas tout à fait prête, la docteure Lippman s'est avancée à la table et a déjà procédé à ce qu'elle appelle la partie facile de son exposé, c'est-à-dire qu'elle s'est présentée.

Croyez-moi, elle nous a donné une liste de titres extrêmement impressionnante, montrant qu'elle a beaucoup de connaissances dans le domaine qui nous intéresse—notamment du point de vue scientifique. Elle a également fait partie d'organismes canadiens chargés d'élaborer des politiques publiques dans ce secteur. C'est vraiment ce que j'appellerais un puits de science.

Je vais donc laisser Mme Lippman se présenter à nouveau et nous dire ensuite ce qu'elle pense du sujet qui nous intéresse.

Mme Abby Lippman: Je tiens simplement à préciser—et je l'indiquerai en cours de route, que je m'adresserai parfois à vous au nom du Réseau canadien pour la santé des femmes et, dans d'autres cas, en mon nom personnel. Le RCSF n'a pas préparé d'énoncé de position officiel sur toute cette problématique mais nous avons évidemment des opinions à exprimer sur tout cela.

Je vous remercie de m'avoir invitée. Comme je l'ai dit au début, considérant ce qu'on peut lire dans les journaux depuis deux jours, je ne sais pas si l'époque actuelle est la meilleure ou la pire que nous puissions connaître. En tout cas, elle est intéressante, c'est le moins qu'on puisse dire.

Je vais essayer d'aborder un certain nombre de questions et, si je vais trop vite—j'ai tendance à parler vite et à agir vite—j'espère que vous pourrez me poser ensuite des questions pour obtenir les précisions que vous souhaitez.

Je commencerai d'abord par des questions d'ordre général, avant d'aborder quelques questions très spécifiques...

M. Réal Ménard: Un rappel au Règlement.

Je voudrais m'assurer que nous avons une traduction car c'est difficile.

Mme Abby Lippman: Je n'en ai pas car je ne l'ai préparé qu'hier.

M. Réal Ménard: Oh.

Mme Abby Lippman: J'en laisserai un exemplaire au comité.

Je m'excuse. J'ai une disquette mais c'était trop tard.

[Français]

Je regrette.

[Traduction]

La présidente: Essayez de parler moins vite, sinon les interprètes ne pourront pas vous suivre.

Mme Abby Lippman: Veuillez m'excuser.

Commençons d'abord par quelques remarques sur le préambule. J'aimerais commencer en faisant quelques commentaires positifs sur le projet de loi. Fondamentalement, le RCSF est heureux de voir qu'il y a finalement quelque chose sur la table. Ça fait longtemps que nous réclamons un texte de loi, je n'ai pas besoin de vous le rappeler.

Cela dit, il est important que le public, autant que les praticiens et les chercheurs, sache bien, pendant que vous discutez de ce projet de loi, que si certaines choses sont interdites, ça ne veut pas dire que tout le reste est acceptable, qu'il suffit d'obtenir une licence pour aller de l'avant. Il sera donc très important de bien indiquer au public que l'absence d'interdictions au début de ce texte de loi ne signifie pas qu'il n'y aura pas d'interdictions plus tard ou que ce qui n'est pas encore interdit est acceptable.

• 1230

Pour ce qui est du préambule, nous sommes heureuses de voir qu'il établit le bon contexte pour la loi qui suit. Nous sommes ravies de constater que l'on mentionne les conséquences spéciales de ces technologies sur les femmes. Toutefois, nous aimerions que l'on ajoute quelques éléments.

Le premier consisterait à souligner la protection des personnes vulnérables. Le deuxième serait d'évoquer les engagements de la Charte en matière de droits à l'égalité, en précisant que les technologies de reproduction assistée ne doivent en aucun cas avoir un effet discriminatoire contre des groupes sociaux vulnérables, notamment les femmes et les personnes handicapées.

Nous aimerions aussi que l'on mentionne que tout ceci se produit dans le contexte général de la santé génésique et de la santé sexuelle. Cela permettrait au minimum à l'organisme de réglementation de mener le travail d'éducation qui lui revient.

J'aimerais faire quelques remarques particulières sur santé des femmes, de manière générale. Tout d'abord, je précise que le Réseau canadien pour la santé des femmes appuie, comme les autres organismes s'occupant de santé des femmes, ce qu'on peut appeler le principe de prudence. Quand il y a de l'incertitude au sujet d'une activité ou d'une procédure, ce sont les parties qui souhaitent la mettre en oeuvre qui devraient être obligées de démontrer qu'elle ne causera aucun mal. C'est évidemment le contraire de la théorie voulant qu'on laisse faire les choses jusqu'à ce qu'on constate que quelque chose ne va pas. Ce principe fondamental devrait s'appliquer à toute la législation.

Nous tenons aussi à souligner que, si le but de ce projet de loi est de régir le traitement de l'infertilité, le vrai problème, pour la plupart des gens, est en fait de prévenir l'infertilité. Il existe des approches éminemment non technologiques pour prévenir l'infertilité, comme le traitement des MTS et la réduction de fréquence des maladies transmises sexuellement. D'autres mesures, comme des changements structurels dans la manière dont les femmes vivent leur vie, leur permettraient d'avoir des enfants plus tôt dans la vie, ce qui préviendrait encore une fois la nécessité d'avoir recours à des traitements contre l'infertilité.

Il convient de réaliser aussi que, si l'on adopte l'approche de prudence et de prévention, certains des traitements proposés pour l'infertilité sont utilisés auprès de femmes en excellente santé mais qui ont un partenaire masculin qui est stérile. Il nous appartient donc de protéger la santé des femmes en bonne santé.

Je souligne entre parenthèses—et il y avait récemment un article dans le journal qui me l'a rappelé—que l'une des méthodes consistant à favoriser la fertilisation in vitro est d'en couvrir les coûts. Il coûte moins cher à beaucoup de femmes d'avoir une FIV que d'adopter un bébé. C'est quelque chose qu'il faut garder à l'esprit dans le contexte général. Des femmes risquent d'être incitées à avoir recours à certaines de ces procédures parce que certaines des autres méthodes qu'elles pourraient préférer pour fonder une famille ne leur sont tout simplement pas accessibles.

Pour changer de thème—comme je l'ai dit, ce sera un pot-pourri—nous avons la ferme conviction que le principe de choix et de consentement libres et éclairés est fondamental à l'égard de ces technologies. La procédure d'obtention du consentement est probablement aussi importante que le fait de voir une signature en bas d'un bout de papier. J'ai pu le constater moi-même en faisant partie d'un comité d'éthique institutionnel pendant quelques années.

Obtenir une signature sur un bout de papier est souvent une procédure très légaliste mais cela ne vous dit pas pourquoi la personne a donné son consentement. Considérant l'importance de cette question, nous aimerions que l'on précise dans la loi que la procédure de choix éclairé sera régie par des textes réglementaires, et qu'une procédure de supervision sera mise en oeuvre pour s'assurer que les choix sont faits sans aucune coercition.

Cela veut dire qu'il faudrait indiquer dans la loi que l'obligation d'obtenir les conseils de personnes désintéressées—c'est-à-dire sans conflit d'intérêts—serait une condition d'obtention du consentement éclairé de toute partie envisageant d'utiliser n'importe quelle technique reliée à la reproduction assistée.

Si je m'exprime maintenant comme scientifique et comme membre d'un comité d'éthique, je dois dire qu'il importe aussi d'obtenir le consentement éclairé en ce qui concerne l'utilisation à des fins de recherche scientifique des informations sur la santé qui seront recueillies, ainsi que de toute autre chose qui sera recueillie. J'y reviendrai plus tard.

Il y a dans le projet de loi une disposition, je crois que c'est la disposition 21(6)—je ne connais pas le jargon que vous utilisez pour désigner ces dispositions—où il serait peut-être approprié d'offrir aux gens le droit de refuser la réutilisation des renseignements qu'ils ont fournis au moment où on les a recueillis, si ces renseignements seront utilisés à des fins de recherche uniquement, et non pas de contrôle et de surveillance, ce que j'appuie pleinement. Je pense qu'il doit y avoir contrôle et surveillance mais, dans la mesure où il n'y aurait aucune ingérence à l'égard d'un système ouvert d'information sur les donneurs, que le RCSF et moi-même appuyons, on doit avoir le droit de refuser de participer à toutes sortes de recherches, même s'il s'agit uniquement de données démographiques.

• 1235

Ceci m'amène à une autre question concernant la divulgation de renseignements sur la santé. Je dois admettre que ma première lecture du projet de loi m'a beaucoup troublée, sans doute parce que mes connaissances linguistiques ne sont pas assez bonnes, ni en anglais ni en français. Il me semble en effet que l'on n'utilise pas les mêmes mots en anglais et en français et que «information biologique», qui est la manière dont je traduis le français en anglais, n'est pas la même chose que «information sur la santé génésique»—si c'était bien ça en anglais. Il faut assurer la cohérence des deux textes. En outre, je ne vois pas pourquoi on parle en anglais de «health reporting information». Pourquoi ne pas parler seulement de «health information»? Je ne saisis pas le sens de «reporting» ici.

Cela étant, il est important que des données soient recueillies, en particulier parce que nous ne savons rien sur la sécurité de nombreux médicaments et procédures utilisés pour stimuler la production d'ovocytes... On a entendu parler de tissu ovarien endommagé, de cancer des ovaires, de crises cardiaques, de stérilité ultérieure. C'est en particulier si l'on envisage d'obtenir des ovules de jeunes femmes qui n'ont pas encore fondé leur propre famille que l'on voudra éviter d'aider une femme infertile en en rendant une autre infertile.

Il est donc nécessaire de recueillir des renseignements et il faut que le système soit ouvert, comme c'est prévu.

Je vais maintenant parler de la maternité subrogatoire. Je dois reconnaître que, personnellement, je n'aime pas le mot «surrogacy» utilisé en anglais mais je ne suis pas sûre non plus que les autres expressions utilisées dans ce contexte, comme «entente préconception» ou «grossesse à contrat» soient préférables et je vais donc conserver «surrogacy».

Le RCSF appuie totalement l'interdiction de la maternité subrogatoire commerciale. Nous sommes cependant gravement préoccupées par la distinction que l'on fait dans l'ébauche de projet de loi entre les ententes commerciales et les ententes non commerciales, pour la simple raison que les mêmes préjudices sociaux valent dans les deux cas. Ces deux situations débouchent sur la marchandisation des enfants, sur l'exploitation des personnes vulnérables, et sur des risques du point de vue de la santé—par exemple, le risque de stérilité ultérieure des jeunes femmes.

En conséquence, toutes les femmes devront avoir l'assurance qu'il n'y a aucune coercition dans n'importe quelle grossesse à contrat. Or, il ne fait aucun doute que le risque de coercition existe dans les deux cas. Il pourrait s'agir de vulnérabilité économique, dans le contexte commercial, ou de pressions émotives ou autres, dans le contexte non commercial. De fait, il risque d'y avoir encore plus de préoccupations reliées au choix libre et éclairé dans le contexte non commercial que dans le contexte commercial.

Considérant ces préoccupations et le type de distinction arbitraire qui est fait entre le commercial et le non-commercial, nous pensons que les dispositions de l'ébauche actuelle du projet de loi sont trop généreuses en matière de grossesse subrogatoire non commerciale. Nous recommandons donc vigoureusement un moratoire à ce sujet, en tout cas jusqu'à ce que le système de réglementation soit pleinement opérationnel.

Sur une question particulière—et je ne veux pas parler de tous les articles du projet de loi—il semble y avoir une certaine contradiction entre deux dispositions, c'est-à-dire un alinéa de l'article 4 et un alinéa de l'article 10. L'un semble autoriser le paiement de dépenses, l'autre semble l'interdire. Il faudra corriger cela.

L'autre question concerne la définition de la somme payée. Je ne sais pas comment il faudrait la définir mais je pense que l'on devrait parler des dépenses, et seulement de dépenses de voyage et de stationnement, par exemple, mais pas des dépenses de la grossesse.

Comme je l'ai dit au début, il convient d'entreprendre dès maintenant la rédaction des textes réglementaires, et pas dans un an ou plus. Je vous lance ceci comme cri du coeur en fait—comme certains d'entre vous le savez probablement, j'ai fait partie du comité consultatif fédéral. J'étais l'une des personnes nommées au comité lors de sa création, il y a plusieurs années.

J'ai démissionné en juin 2000 en précisant que je ne démissionnais pas parce que j'avais perdu tout intérêt à l'égard de cette question mais parce que je ne pouvais plus participer à un processus qui avançait si lentement. Je me suis sentie obligée de partir parce que je considérais que ma propre intégrité était compromise, même si tout le monde travaillait fort—et je tiens à remercier sincèrement les gens de Santé Canada qui ont travaillé sur cette question car ils ont fait un travail héroïque, ou plutôt «héroïne-ique», dans ce domaine. Ils ont été magnifiques mais le comité a été coincé. Voilà, je n'ai pas d'autre déclaration politique à faire.

• 1240

En ce qui concerne l'instance de réglementation, nous recommandons, au lieu d'accepter les activités en cours maintenant, ce qui semble être implicite de par la disposition de droits acquis de l'article 43, qu'on impose un moratoire exécutoire sur toute procédure qui devra être examinée par l'instance de réglementation. Donc, si elle n'est pas interdite, il devrait y avoir un moratoire exécutoire, notamment en ce qui concerne deux de ces procédures. Si je ne peux faire accepter le tout, j'aimerais en signaler au moins deux, soit le diagnostic génétique pré-implantatoire et la grossesse subrogatoire non commerciale.

En outre, si je pouvais faire ce que je veux, je recommanderais que l'on interdise toute activité jusqu'à ce qu'on ait totalement fini son évaluation du point de vue de la sécurité. Tant qu'on ne sait pas que quelque chose est sûr et efficace—et j'emploie le mot efficace au sens usuel, pas au sens où on l'utilise dans les laboratoires—il ne faut pas l'autoriser.

Si l'on ne veut pas aller jusqu'à interdire tout ce dont on n'aura pas prouvé la sécurité, on devrait à tout le moins fixer une période très courte—pas plus de six mois, et 12 au maximum, mais ce serait vraiment beaucoup—pendant laquelle les personnes exécutant telle ou telle activité seraient tenues d'obtenir une licence pour pouvoir continuer. Autrement dit, on ne donnerait pas carte blanche aux gens pour ce qu'ils font maintenant.

Quand on lit les titres de journaux, comme on a pu le faire hier et aujourd'hui, on a le sentiment qu'on parle de ces choses pour voir jusqu'où on pourrait aller mais qu'on ne sait pas vraiment ce qui se passe en coulisses et qu'on risque donc fort de voir apparaître d'un seul coup, comme un coup de foudre, des choses tout à fait nouvelles, parce qu'il ne s'agit pas ici de techniques qu'on peut mettre au point du jour au lendemain. S'il y a une chose dont vous n'avez pas encore entendu parler, vous devriez supposer qu'elle se fait déjà et qu'elle sera bientôt annoncée. Je n'arrête pas de le dire depuis 20 ans mais personne n'a voulu me croire. Peut-être va-t-on me croire maintenant.

Autre question: si on ne dispose pas d'informations de longue durée sur une procédure, celle-ci devrait être réglementée comme étant de la recherche et non pas un service. De cette manière, on ne sera pas obligé d'essayer de savoir de quoi il s'agit vraiment, quand personne n'en sait vraiment rien. Considérons que c'est de la recherche. Obligeons les parties concernées à faire la preuve de la sécurité et de l'efficacité de la procédure, puis imposons-lui une réglementation provisoire de façon à pouvoir délivrer une licence conditionnelle, par exemple, sauf dans un contexte de recherche. C'est là une tactique que vous pourriez envisager.

Outre l'instance de réglementation... et je ne parlerai pas des diverses conditions sur lesquelles tout le monde semble s'entendre, en matière d'indépendance, de transparence et d'accessibilité—j'aimerais en rester là.

J'ai été très surprise d'entendre Mme Dalziel déclarer que la HFEA tient ses réunions à huis clos. J'espère que ce ne sera pas le cas ici et je vous invite vivement à vous en assurer. Il faut non seulement que les réunions soient ouvertes au public mais aussi que les procès-verbaux soient publiés, que des sites Web soient créés—même si tout le monde n'a pas accès au réseau Internet. Il faut que ces réunions fassent l'objet de procès-verbaux, ce qui est apparemment le cas de vos propres audiences. Ces questions sont beaucoup trop importantes pour qu'on laisse de petits groupes de gens décider à huis clos. Ce sont des questions d'intérêt public considérable.

En outre, et je reviendrai là-dessus plus tard s'il me reste du temps, il importe que l'on prévoie des fonds pour que l'instance de réglementation puisse jouer un rôle d'éducation et d'expansion des connaissances. Il existe certains modèles très intéressants de consultations publiques qui ont été mis sur pied en Angleterre, en particulier—et je songe ici aux jurys de citoyens et à des choses telles que des collèges scientifiques, qui ne sont pas des collèges au sens où nous l'entendons mais des lieux où les citoyens peuvent se réunir pour formuler des recommandations sur des questions d'intérêt public, et même parfois des recommandations exécutoires. Voilà des activités qu'une instance de réglementation devrait encourager.

Je ne saurais conclure sans dire quelques mots du clonage. J'espérais pouvoir y échapper mais je pense que ce sera impossible.

J'espère que le Canada se joindra à la plupart des autres pays en imposant une interdiction immédiate du clonage, génésique et non génésique, sans attendre que le reste de ce projet de loi soit prêt. Je m'exprime ici en mon nom personnel. Des propositions ont déjà été soumises au Parlement à ce sujet et il est plus que temps que le législateur agisse.

Le clonage d'embryons humains devrait être interdit si l'objectif est de s'en servir comme ressource pour faire des expériences médicales ou pour produire des enfants. La vie humaine et ses diverses composantes et caractéristiques ne sont pas de simples outils de recherche ni des produits manufacturés. De plus, cette pratique ne ferait qu'encourager la commercialisation du corps des femmes et offrirait des incitatifs contraires à l'éthique pour que des femmes subissent des traitements hormonaux ou des opérations chirurgicales préjudiciables à leur santé.

Il conviendrait donc d'élargir la définition du clonage à l'alinéa 3d), de façon à interdire la création d'embryons à des fins non génésiques, et nous devons absolument limiter, non, faire cesser la bio-industrialisation croissante de la vie par le comité scientifique, dont je fais partie, et par les sociétés des sciences de la vie. Je n'en reviens pas de constater que des embryons humains clonés sont déjà brevetés comme étant des inventions.

• 1245

Il était intéressant d'entendre Mme Dalziel dire que la recherche en Grande-Bretagne est effectuée par des sociétés privées. Comme elle est effectuée par des sociétés privées, il y a déjà des brevets qui ont été obtenus aux États-Unis pour l'utilisation de cellules souches. Je pense qu'il serait particulièrement naïf de croire, si l'on met au point des traitements, que ceux-ci bénéficieront à d'autres parties qu'aux sociétés qui les auront fabriqués, dans l'avenir proche et peut- être à plus long terme.

Je vais relier cela à quelques remarques que je vais faire au sujet de la recherche sur les cellules souches embryonnaires.

J'ai remis au greffier du comité un document provenant des États-Unis. Il n'existe malheureusement qu'en anglais. Vous y trouverez, comme dans d'autres documents, des informations indiquant que la recherche qui a été effectuée jusqu'à présent sur des cellules souches embryonnaires a porté presque uniquement sur des animaux, essentiellement des souris.

On nous promet depuis 20 ans que toutes sortes de maladies pourront être guéries grâce à ces recherches animales. Or, aucune de ces promesses n'a encore été satisfaite. Il est certes beaucoup plus facile de travailler sur des souris, c'est certainement plus conforme à l'éthique, à moins que vous ne soyez membre de la PETA, ce qui est une autre histoire

Si l'on estime que la recherche sur des souris est conforme à l'éthique, ce qui est mon cas, pourquoi devrions-nous soudainement croire les nouvelles promesses qui nous sont faites? On nous raconte énormément d'histoires en faisant toutes sortes de promesses qui ne seront jamais tenues.

Selon Stuart Newman, aucune étude scientifique n'a été publiée au cours des 20 dernières années sur de nouvelles méthodes de guérison, et moins d'une demi-douzaine ont porté sur une amélioration quelconque de la santé des souris en utilisant des cellules souches embryonnaires de souris.

En réfléchissant à toutes ces promesses non tenues, souvenez- vous qu'il y a eu également beaucoup d'échecs, jusqu'à présent, avec l'utilisation de la «thérapie» génique et de la transplantation de tissu foetal. Rien de tout ça n'a encore marché. Je pense qu'il est donc très important de garder son calme.

Je participais il y a une dizaine d'années à une conférence d'obstétrique où j'ai ramassé beaucoup de documents, notamment une photographie que j'ai accrochée dans mon bureau. Elle représente un enfant adorable qui tient ce qu'on pense être un jouet—ou peut- être une souris d'ordinateur—avec le message suivant: «Une science qu'on peut embrasser». Cette photo était distribuée par une société qui publiait des livres contenant toutes les informations que l'on pouvait rechercher sur des donneurs de sperme. Je pense que c'est dans cette voie qu'on s'en va, pas vers la guérison de maladies.

Je pense qu'on a largement exagéré les bienfaits de la sélection de cellules embryonnaires et je ne pense pas que l'on ait besoin de créer des embryons pour produire des cellules souches embryonnaires maintenant. Nous pouvons utiliser le... Je n'aime pas employer le mot «extra», et je parlerai donc des embryons qui ont été créés pour des FIV. Si les gens consentent par écrit à ce qu'on s'en serve pour faire de la recherche, très bien. Les autres n'ont pas vraiment marché.

Même si l'article qui a été publié hier sur Internet... Comprenez qu'il s'agit d'un article qui n'a pas été vérifié par les pairs, si ce n'est par ses propres personnes internes. L'organisation avait son propre comité d'éthique interne examinant ces choses-là. Je pense qu'il faut prendre un peu de recul et dire que, oui, on nous a montré que ces choses-là se font mais on n'a pas été beaucoup plus loin.

Je passe rapidement à la sélection sexuelle, car je suis sûre qu'on va bientôt devoir me couper la parole.

Il faut étendre la portée du projet de loi. À l'heure actuelle, il porte uniquement sur le tri des spermatozoïdes mais on peut faire de la sélection sexuelle avec le diagnostic génétique pré-implantatoire, et c'est la raison pour laquelle je m'y oppose. Vous devez donc à mon avis envisager sérieusement d'étendre la portée de la loi à la sélection sexuelle, pour la création ou l'implantation d'embryons choisis strictement selon le sexe.

Pour ce qui est du diagnostic pré-implantatoire, comme je l'ai déjà mentionné, je pense que c'est actuellement une activité dangereuse. Elle fait l'objet d'un débat au Royaume-Uni où un sondage d'opinion a montré que le public semble l'approuver. Je n'ai pas vu les questions qu'on a posées dans ce sondage et j'aimerais bien les voir avant d'affirmer que le public est vraiment en faveur de ça.

Il est très difficile de distinguer les conditions médicales des conditions non médicales. Qu'est-ce qu'une condition médicale quand on fait un diagnostic pré-implantatoire? Si on ouvre cette porte, est-ce une technologie adéquate pour des gens qui ne sont pas infertiles mais qui demandent une FIV spécifiquement pour pouvoir évaluer la condition de l'embryon avant son implantation? Voilà ce qu'on fait déjà. Je pense qu'il faut être prudent à ce sujet.

• 1250

Finalement, je pense que l'instance de réglementation a un rôle crucial à jouer en matière de consultation et d'éducation. Elle devrait être financée pour pouvoir faire vraiment participer le public à un débat honnête, franc et démocratique—pas à une consultation où des gens comme moi sont entourés de représentants de l'industrie et doivent se battre pour se faire entendre, à de vraies consultations.

La dernière question concerne le financement et la gestion.

Il est décevant de voir qu'il n'y a rien dans le projet de loi sur la manière dont les activités seront financées—celles qui seront agréées. Je crois qu'on doit engager un débat public sur ce qui sera couvert par l'assurance publique et ce que les gens devront éventuellement payer eux-mêmes. Si les services doivent être payés par les personnes qui les utilisent, cela pose de sérieux problèmes d'inégalité d'accès. Si l'on pense que ces choses valent la peine d'être faites, tout le monde ne devrait-il pas y avoir accès? Je crois aussi que cela accélérera le mouvement de privatisation du système de santé pour les soins génésiques—quelque chose que nous rejetons absolument.

J'ai également certaines réserves, comme d'autres personnes, sur l'utilisation de mécanismes de recouvrement des coûts pour financer le régime, car je pense que cela ne fera probablement qu'encourager la privatisation. Je crois que la position du RCSF serait qu'il y ait une assurance médicale pour toute activité dont on a prouvé la sécurité et l'efficacité; sinon, cette activité ne devrait être exécutée que dans le cadre d'un protocole de recherche qui a été approuvé du point de vue scientifique et éthique.

Je vais m'arrêter là. J'ai sans doute parlé plus que vous ne l'auriez voulu, et je m'en excuse mais j'ajoute que, même si j'aimerais vous reprocher vivement d'avoir pris tant de temps, comme gouvernement, pour produire ceci, je reconnais que ce ne sont pas des questions faciles. Ça fait 20 ans que je m'en occupe et 20 ans que je trouve ça très compliqué. Je sais que vous êtes confrontés à une problématique particulièrement difficile mais, en contrepartie, vous devez comprendre aussi qu'il y a beaucoup de femmes et d'enfants qui seront exposés à des risques si vous n'agissez pas judicieusement et rapidement. Il vous appartient de veiller à ce que les procédures soient sûres, efficaces et bien réglementées. Le sort de beaucoup de gens est entre vos mains.

Merci.

La présidente: Merci beaucoup, docteure Lippman. Vous avez abordé beaucoup de questions différentes qui nous préoccupent beaucoup, et nous vous en sommes très reconnaissants.

Je dois vous présenter mes excuses personnelles car le greffier et moi-même devons aller ailleurs pour obtenir un budget afin que notre comité puisse continuer d'entendre des témoins comme vous. Je vais donc demander à mon vice-président de prendre ma place pour la période des questions. Je vous remercie à nouveau de votre témoignage.

Mme Abby Lippman: Merci.

Le vice-président (M. Reg Alcock (Winnipeg-Sud, Lib.)): On distribue les questions au poids, dans ce comité.

Monsieur Manning, je suppose que vous avez une question.

M. Preston Manning: Oui, quelques-unes.

Je vous remercie de votre témoignage. Je constate que nous sommes d'accord sur beaucoup de choses, notamment sur le clonage et sur la réglementation des cellules souches embryonnaires.

J'ai deux brèves questions. La première concerne ce que vous avez dit au sujet du choix éclairé, du consentement, et de la nécessité de réglementer la procédure, pas seulement les documents. Plusieurs témoins nous ont remis des formulaires que l'on utilise pour obtenir le consentement mais je me demande si vous avez songé à un modèle de procédure qu'on pourrait employer pour obtenir le consentement éclairé. Y a-t-il quelque chose que quelqu'un aurait déjà préparé à ce sujet et que l'on pourrait inclure dans une loi?

Mme Abby Lippman: Hélas, non. Je ne connais aucun modèle à ce sujet.

Ce qui est crucial, en fait... Je serais prête à faire confiance aux gens qui dispensent les conseils, à l'avance, s'ils ne faisaient pas eux-mêmes partie du processus. Si vous vous rendez dans une clinique de fertilité et que l'infirmière vous en parle, c'est une chose. Ça fixe certaines limites. À mon avis, il faut que ces conseils viennent de personnes qui n'ont pas de conflit d'intérêts en la matière. Je n'ai pas vraiment réfléchi aux détails de la procédure qu'on pourrait employer mais je pourrais le faire plus tard, si vous le voulez. Je ne veux pas faire perdre de temps au comité aujourd'hui.

M. Preston Manning: D'accord.

• 1255

Considérant vos réserves sur la grossesse subrogatoire altruiste, ou soi-disant altruiste, pourquoi ne pas interdire les deux formes, altruiste et commerciale?

Mme Abby Lippman: Je ne suis pas sûr qu'il faille interdite la grossesse subrogatoire altruiste. Je songe à des groupes de femmes autochtones. Il y a des cas où donner des bébés à quelqu'un d'autre fait partie de leur comportement. Je ne voudrais pas voir ça.

Je m'exprime uniquement en mon nom personnel à ce sujet. À certains moments, je voudrais que la grossesse subrogatoire commerciale soit totalement interdite. Comme les deux formes sont parallèles, la conclusion logique est qu'il faudrait réglementer les deux. Si l'on ne réglemente que la forme commerciale, je crains que le message ne soit pas assez fort.

Je reconnais que ma position peut paraître incohérente quand je dis qu'il faudrait interdire la forme commerciale. Toutefois, comme je ne voudrais pas que des femmes innocentes soient piégées, je suis prête à ce qu'on réglemente rigoureusement la forme non commerciale. Je ne parlerais pas dans ce cas de forme altruiste, et j'ai d'ailleurs changé les termes pour éliminer cette notion d'altruisme. Il s'agirait de grossesse subrogatoire non commerciale très réglementée.

M. Preston Manning: Très bien, merci.

Le vice-président (M. Reg Alcock): Merci.

Mme Sgro était la suivante mais nous allons maintenant passer tout de suite à M. Ménard.

[Français]

M. Réal Ménard: Merci. J'ai deux questions, si vous me le permettez.

Vous dites que vous souhaitez qu'on mentionne clairement dans le préambule que l'on entend respecter les valeurs de la Charte des droits de la personne. Je vous donnerai comme exemple le témoignage que nous avons entendu hier de l'Association des mères lesbiennes, qui souhaiterait qu'il y ait dans le préambule une mention du fait qu'on ne devrait pas avoir de pratiques discriminatoires en raison de l'orientation sexuelle et envers les mères célibataires. On nous a expliqué que les femmes hétérosexuelles qui sont seules, qui n'ont pas d'homme dans leur vie, sont privées du droit de recourir aux cliniques de fertilité. Ma première question est la suivante. Est-ce que vous souhaitez qu'on inscrive une chose comme celle-là dans le préambule?

Deuxièmement, je veux être sûr de bien vous comprendre. Dans le cas où une personne vit un cycle de stimulation ovarienne dont plusieurs ovules résultent et décide librement, en toute conscience, de donner ses ovules surnuméraires afin qu'ils puissent servir à la recherche, je comprends qu'il n'y a pas de difficulté, que cela peut se faire. Quand vous dites qu'il ne faut pas que l'embryon serve à des fins de recherche, j'imagine que vous n'excluez pas un scénario comme celui-là.

Mme Abby Lippman: Est-ce que je peux répondre en anglais?

M. Réal Ménard: Oui.

[Traduction]

Mme Abby Lippman: Vous n'étiez pas ici quand je disais que j'étais une minorité audible. Je parle les deux langues avec le même accent newyorkais.

Pour ce qui est de la première partie de votre question, la réponse est oui. C'est pourquoi j'ai évoqué la Charte. Il peut y avoir d'autres catégories que les lesbiennes ou les mères seules qui voudraient avoir accès aux technologies, et je pense que ce serait légitime. En ce qui concerne la rédaction même de la loi, au lieu de parler des deux catégories, je pense qu'il serait préférable de faire référence aux droits énoncés dans la Charte, ce qui engloberait tout.

Cela répond-il à votre question?

Ma deuxième remarque est que je m'oppose vigoureusement à la création d'embryons uniquement pour faire de la recherche. Si une femme a donné son consentement libre et éclairé—elle a été stimulée pour produire des ovules pour son propre traitement, il y a des ovules excédentaires et elle choisit de les donner pour de la recherche éthique et scientifiquement approuvée—je l'accepte. Par contre, elle ne devrait pas être stimulée simplement pour produire des ovules destinés à la recherche, si elle n'aura pas d'abord été stimulée pour produire des ovules dans son propre intérêt, parce que c'est trop dangereux. À mon avis, aucun comité d'éthique ne l'autoriserait. Cela reviendrait à mettre en danger la santé d'une femme en pleine santé pour obtenir du matériau avec lequel on pourra jouer dans un laboratoire.

Cela répond-il à votre question?

[Français]

M. Réal Ménard: Ce que vous dites est intéressant. Vous répondez exactement à ma question.

Si on pousse le raisonnement plus loin, lorsqu'une personne suit un traitement, sa motivation première est de donner naissance à un enfant. Si elle a plusieurs ovules et veut contribuer à la recherche, vous n'avez pas de difficulté face à cela. J'imagine que vous partez d'une valeur éthique selon laquelle l'embryon doit d'abord servir à la naissance d'un enfant. C'est d'ailleurs ce qu'avait écrit le ministre Rock dans le communiqué qu'il nous a remis lorsque nous avons commencé nos travaux. Cela ne me pose pas de problème.

• 1300

Mais que répond-on aux chercheurs qui nous disent qu'en ce moment, les embryons surnuméraires ne permettront pas de répondre aux besoins de la recherche et qu'ultimement, la recherche qui pourrait découler de cela pourrait améliorer de façon significative la condition humaine sur le plan des cardiopathies, de la maladie de Parkinson, de la maladie d'Alzheimer et d'autres maladies dégénératives?

[Traduction]

Mme Abby Lippman: Si je vous ai bien compris, je dirais que non, du point de vue de ma connaissance de cette science. Je ne suis pas tous les jours dans un laboratoire.

Nous n'avons pas été assez exigeants pour savoir ce qu'on peut faire des cellules qui sont déjà là, soit d'adultes, soit de foetus. En fait, quelqu'un disait récemment que l'on peut obtenir des cellules du liquide amniotique lorsqu'une femme fait une amniocentèse, et que l'on peut amener ces cellules à se comporter comme des cellules souches. C'est un peu effrayant.

Je ne pense pas que l'on va arrêter le progrès scientifique en disant que l'on va travailler avec les cellules qu'on a déjà, sans créer d'embryons pour en obtenir d'autres. Si les choses avancent lentement, tant pis. Je suis prête à dire que c'est regrettable. À mon sens, il n'y a rien d'injuste à ralentir les choses jusqu'à ce qu'on puisse faire des travaux scientifiques de manière rigoureuse, saine et éthique, sans causer plus de mal que de bien.

Le vice-président (M. Reg Alcock): Merci, monsieur Ménard.

Madame Wasylycia-Leis.

Mme Judy Wasylycia-Leis: Merci, monsieur le président.

Il y a tellement de choses intéressantes dans votre mémoire que je vais devoir me concentrer sur un petit nombre de questions dont je pense que nous n'avons pas encore assez parlé.

L'une d'entre elles concerne ce qui se fait au Canada en matière de diagnostic génétique pré-implantatoire. Si j'ai bien compris, en fait, il existe des cliniques privées où des gens se rendent précisément dans le but que vous avez indiqué. Ce n'est pas pour des raisons médicales mais pour créer des bébés sur commande.

J'aimerais savoir si ce type de service est relativement répandu au Canada. En outre, pensez-vous que ce projet de loi, tel qu'il est rédigé, permettra d'interdire de telles procédures et de fermer ces cliniques?

Vous avez parlé de brevet pour la manipulation génétique de cellules humaines, question sur laquelle notre comité ne s'est pas encore vraiment penché. Je suppose que cela s'explique en partie parce que le Bureau des brevets relève probablement du ministère de l'Industrie, et nous savons que de nombreuses demandes ont été adressées au Bureau canadien des brevets pour faire breveter différentes manipulations génétiques de cellules humaines.

Que pouvons-nous faire, dans ce projet de loi ou autrement, pour interdire le brevetage des formes de vie et pour bloquer cette tendance vers une civilisation génétique commerciale? Les choses semblent avancer dans cette voie dans tous les domaines, et l'absence de législation y contribue, à l'évidence.

Mme Abby Lippman: Merci. Je crains d'être obligée de donner des réponses très faibles à vos deux questions.

Je ne peux rien dire sur le nombre de cliniques privées qui font actuellement du diagnostic génétique pré-implantatoire. Je ne le sais pas. J'en ai entendu parler mais je ne sais pas si c'est très répandu.

Je sais que cette technique est utilisée dans certains centres universitaires pour des maladies particulières. Elle peut être utilisée dans d'autres contextes mais on ne le sait pas vraiment. C'est quelque chose qui n'a pas vraiment commencé ici.

Le Royaume-Uni est en avance sur tout le monde dans ce domaine. L'agence qui délivre les licences a allègrement octroyé des licences pour toutes sortes de choses. Je ne pense pas que le diagnostic génétique pré-implantatoire soit encore allé très loin chez nous, à l'heure actuelle, mais ça existe peut-être.

Pour ce qui est des brevets, j'aimerais bien connaître la réponse à votre question. Quand j'écoutais Mme Dalziel parler des discussions en cours avec le ministère de l'Industrie et du Commerce, en Grande-Bretagne, ça m'a fait froid dans le dos. Je ne pouvais m'empêcher de penser que cela déboucherait sur la commercialisation du matériau.

Je ne sais pas comment indiquer dans la loi que ces choses-là ne seront pas brevetées. Il est certain que, si elles sont produites ici, je n'aurais pas la naïveté de croire qu'elles ne pourraient pas être transférées ailleurs. Beaucoup de ces activités pourront se faire de l'autre côté de la frontière. On pourra y avoir accès en traversant la frontière.

Je crains que certaines des dispositions de l'ALENA ne nous obligent à autoriser l'ouverture de cliniques privées chez nous.

• 1305

Il y a donc tout un faisceau de facteurs à prendre en considération entre le ministère du Commerce, ce qui se fait du point de vue du développement économique, et ce qui se fait en technologie génésique. Je ne pense pas qu'on puisse réglementer tout ça avec un seul texte de loi. Voilà pourquoi je crois qu'il faut que le projet de loi soit aussi rigoureux que possible en ce qui concerne la commercialisation.

L'autre aspect de cette question est que le projet de loi est essentiellement axé sur les techniques et activités concernant la reproduction assistée. Il y a toute une foule de questions reliées au progrès de la génétique qui ne devraient probablement pas être touchées par ce projet de loi mais qu'on ne peut pas vraiment séparer des autres.

Comment peut-on donc régir ces deux séries de choses qui se passent en même temps? Vous allez avoir d'une part les ICRS qui vont faire des pressions en faveur de la recherche et de la génétique, en insistant pour qu'on crée des partenariats avec le secteur privé, mais on aura de l'autre côté ce projet de loi qui tentera de freiner cette tendance. Si l'on réussit à limiter la commercialisation des technologies de reproduction assistée, je pense que c'est à peu près tout ce qu'on pourra faire avec cette loi. C'est un objectif bien modeste, qui ne règle certainement pas tous les problèmes. C'est sans doute pour ça que je ne suis pas députée, car je ne connais pas les solutions.

Le vice-président (M. Reg Alcock): Madame Wasylycia-Leis.

Mme Judy Wasylycia-Leis: J'apprécie beaucoup vos réponses. Ce n'est pas une question dont nous avons encore beaucoup entendu parler pendant ces audiences. Or, c'est probablement l'une des plus importantes si nous voulons présenter un projet de loi vraiment efficace sur toute la question des technologies génésiques.

Voici ma dernière question. Vous avez clairement réclamé l'interdiction immédiate du clonage, que ce soit pour la recherche ou pour la création de formes de vie ou de bébés. Comment faire? Comment convaincre ce gouvernement d'agir rapidement là-dessus? C'est un problème auquel on réfléchit depuis de nombreuses années et qui fait déjà l'objet d'un consensus au Parlement et dans la population. Pourquoi traîne-t-on? Que pourrait-on faire pour forcer le gouvernement à agir?

Mme Abby Lippman: Mon sentiment est que vous avez actuellement une fenêtre d'opportunité—je m'exprime ici vraiment comme une ex- Brooklynite. Je pense que la question suscite assez d'intérêt dans la population pour que celle-ci vous appuie si vous décidez d'agir. Je pense que vous auriez vraiment la population derrière vous au sujet du clonage.

Ce qu'il faut, c'est faire comprendre clairement ce qu'est le clonage non génésique, en soulignant bien qu'il s'agit d'une activité commerciale et non pas d'une activité de traitement des maladies. Même si vous faisiez du clonage non génésique maintenant, ce serait peut-être seulement mes petits-petits-enfants qui pourraient en bénéficier—et encore. Adoptez une loi de temporisation en disant que tout le monde a besoin d'un temps de réflexion. Je sais que ce n'est peut-être pas la meilleure expression à employer en ce moment, à cause de l'autre projet de loi, mais vous ne m'avez pas invitée ici pour parler du projet de loi C-36. Pourquoi ne pas adopter une loi de temporisation? Cela interdirait le clonage génésique et non génésique dans l'immédiat et vous pourriez revoir la question dans trois ans. Cela permettrait à tout le monde de bien y réfléchir. C'est une idée.

Le vice-président (M. Reg Alcock): Madame Beaumier.

Mme Colleen Beaumier (Brampton-Ouest—Mississauga, Lib.): Je n'ai qu'une très brève question. On sait qu'il y a dans les pays du tiers monde des activités telles que le prélèvement de reins, pour la vente. Pensez-vous que nous devrions inclure dans ce projet de loi des dispositions interdisant l'importation? S'il y a de l'argent à faire quelque part, nous le savons bien, c'est probablement beaucoup plus facile d'utiliser des femmes pour produire des ovules excédentaires, afin de produire des embryons, que de les amener à faire don de leurs reins. Devrions-nous envisager ça dans le projet de loi—interdire l'importation d'embryons?

Mme Abby Lippman: Je le pense. En fait, même si j'ai parfois des difficultés à comprendre le jargon des textes de loi, je crois avoir vu une disposition qui interdirait l'achat ou la vente... Il serait interdit de payer de l'argent pour acheter des ovules ou du sperme mais, une fois que ceux-ci se trouveraient dans une banque, il serait possible de les échanger avec quelqu'un d'autre. Il y aurait donc une activité de tierce partie qui serait autorisée par le projet de loi.

Je n'aurais pas de problème avec ça. En fait, j'y serais très favorable. Si cela ne doit rien rapporter à la personne qui a fait le don, pourquoi une banque d'organes devrait-elle soudainement avoir le droit de vendre les produits ailleurs, ou de les importer pour quelque chose d'autre?

Dans la première version de mon mémoire, je parlais de l'utilisation en aval ou secondaire de matériau accumulé antérieurement. Je pense que c'est une question très sérieuse qu'il faudrait revoir attentivement.

Le vice-président (M. Reg Alcock): Merci.

Monsieur Lunney, je pense que vous êtes le dernier nom sur ma liste.

• 1310

M. James Lunney: Merci, monsieur le président.

Vous avez clairement dit qu'il ne faut pas qu'il y ait d'incitation à la grossesse subrogatoire. Nous avons très clairement perçu ce message, et la plupart d'entre nous sommes d'accord avec vous.

Pour ce qui est des cellules souches embryonnaires, vous avez aussi clairement déclaré qu'après 20 ans de promesses, les résultats sont tout à fait pitoyables—vous avez dit qu'on nous a raconté beaucoup d'histoires—et qu'il n'y a eu que des échecs. Je suis très heureux que vous ayez présenté cet argument, étant donné tout ce qu'on raconte actuellement à ce sujet.

Vous avez brièvement abordé cette question en réponse à M. Ménard mais, pour replacer la recherche sur les cellules adultes dans son contexte, que se passe-t-il actuellement à McGill, en particulier, avec les précurseurs cutanés, par exemple? Quelle est votre position, du point de vue de l'épidémiologie médicale, suite à toutes ces années d'encouragements considérables en matière de recherche sur les cellules souches adultes?

Mme Abby Lippman: Oui. Très honnêtement, ma réponse, en un seul mot, c'est oui. Je ne pense pas qu'on aurait pu prévoir ce qu'ils découvrent aujourd'hui. Comme je l'ai dit, oui.

Je ne pense pas qu'on ait prêté assez attention à tout ça. Toutefois, pourquoi ne pas privilégier ce secteur et le faire avancer aussi vite que possible, avant que l'on dise qu'on est obligé d'avoir ces cellules souches embryonnaires? Je ne pense pas qu'on ait beaucoup de temps à perdre. Si des gens prétendent que le Canada est un pays de deuxième catégorie à cause de ça, c'est stupide. Nous ne voulons pas être un pays de deuxième niveau, nous faisons de la recherche qui est saine et qui est bonne.

M. James Lunney: Diriez-vous donc que les promesses dont on nous parle au sujet des cellules souches embryonnaires ont probablement beaucoup plus de chance d'être tenues avec des cellules souches adultes?

Mme Abby Lippman: Je n'aime pas parier, je n'ai jamais acheté de billets de loterie dans ma vie, mais je pense que ça vaudrait la peine d'essayer sérieusement. Vous savez, mon domaine, c'est la biologie, même pas la génétique. Et la génétique, ce n'est pas de la biologie. La biologie est un domaine fascinant car elle nous apprend ce que peuvent faire les cellules et comment elles le font. On nous a raconté tellement d'histoires.

Il y a quelques années, j'ai inventé un mot qui a maintenant fait l'objet de plusieurs thèses, malheureusement, la «généticisation». J'emploie ce mot parce que je pense que nous essayons de voir tout ce qui se passe dans le monde comme une question de génétique, que ce soit la maladie, la santé, l'alimentation—n'importe quoi.

Encore une fois, prenons du recul et comprenons que la génétique, c'est très petit. L'ADN joue un rôle très mineur dans tout ça. Ce sont toutes les choses que font les cellules qui comptent. Dans ce sens, ça pourrait être encore plus dangereux que les cellules souches embryonnaires. La première chose que j'ai apprise au sujet des cellules souches embryonnaires, quand je commençais mes études en génétique, c'était que ce sont les cellules qui provoquent ce qu'on appelle le tératome. Je ne sais pas si vous avez déjà entendu parler du tératome mais c'est lorsque des poils, de la peau et des ongles se mettent à pousser dans votre estomac parce qu'il y a des cellules souches qui ont mal tourné et qui ont fait ce qu'elles sont censées faire. Ce sont des cellules cancérigènes. Il faudra peut-être jouer encore un peu plus en laboratoire avec les cellules souches adultes avant qu'elles deviennent des cellules cutanées ou... Mais, dans un sens, du point de vue biologique, je me sentirais beaucoup plus à l'aise si l'on essayait de travailler avec des cellules adultes.

M. James Lunney: Si l'on stimulait la recherche sur les cellules souches adultes et qu'on imposait un moratoire à la recherche sur les cellules souches embryonnaires, il serait intéressant de voir où cela mènerait le Canada.

Merci.

Le vice-président (M. Reg Alcock): Madame Wasylycia-Leis.

Mme Judy Wasylycia-Leis: Je n'ai que deux brèves questions.

Le vice-président (M. Reg Alcock): Je vous en donne une.

Mme Judy Wasylycia-Leis: Vous êtes l'une des rares personnes à avoir recommandé que l'on ajoute au projet de loi une disposition rendant obligatoire la consultation d'une partie désintéressée. Savez-vous où l'on devrait inclure cette disposition—et vous pourrez y réfléchir pour nous répondre plus tard—et comment pourrions-nous nous assurer que...? J'entends déjà ceux qui diront que ça n'a rien à voir avec ce projet de loi. J'essaie donc de trouver le moyen...

Mme Abby Lippman: Il faudrait peut-être laisser l'organisme de réglementation s'en charger. Je crois que ce serait assez difficile à légiférer. On pourrait voir plus tard comment ça devrait se faire, mais je pense que ça devrait se faire.

Mme Judy Wasylycia-Leis: Mais pensez-vous que cela devrait figurer dans le texte même de la loi?

Mme Abby Lippman: Je ne peux vous répondre car je ne sais pas jusqu'à quel niveau de détail vous voudrez aller, et il y aura probablement beaucoup d'autres choses. Si vous prévoyez la consultation dans le cadre du processus de consentement éclairé, et si c'est dans la loi...

Mme Judy Wasylycia-Leis: Mais est-ce qu'on y attache assez d'importance dans la loi? Je me demande si l'on devrait... C'est probablement l'un des mécanismes les plus clairs que nous ayons pour éviter que des femmes ne soient utilisées comme des machines à produire des ovules de recherche.

Mme Abby Lippman: Ce que je ne vous ai pas dit, quand je lisais mes notes, c'est que, même du point de vue de l'organisme de réglementation, je ne pense pas que l'on devrait nommer qui que ce soit qui puisse avoir un conflit d'intérêts—autrement dit, qui puisse tirer un gain financier de son appartenance à l'organisme de réglementation.

Cela ne veut pas dire qu'on ne puisse pas s'adresser à des cliniciens ou à des chercheurs pour obtenir leur contribution, étant donné qu'ils ont les compétences voulues. Mais je ne pense pas que qui que ce soit devrait toucher de l'argent en faisant ça. Si on impose ce principe à l'organisme de réglementation, on peut ensuite l'imposer à toute la hiérarchie de façon à ce que toute personne concernée soit obligée de déclarer qu'elle n'est pas en conflit d'intérêts et qu'elle divulgue toutes les informations pertinentes.

• 1315

Le vice-président (M. Reg Alcock): Judy.

Mme Judy Wasylycia-Leis: Dernière question. Sur cette question de génétique et de diagnostic génétique pré-implantatoire, devrions-nous interdire clairement toute utilisation de techniques d'eugénisme à des fins non médicales? Je ne sais pas si ma formulation est bonne. Est-ce que cela englobe toute la question de la sélection du sexe et de l'utilisation des nouvelles procédures pour essayer de fabriquer des bébés correspondant à certaines caractéristiques?

Mme Abby Lippman: Si je veux être cohérente avec tout ce que j'écris depuis 20 ans, je ne peux accepter ce mot, même si je vois où vous voulez en venir, pour la simple raison que j'ai perdu beaucoup d'amis et gagné beaucoup d'ennemis depuis 20 ans en disant publiquement, par écrit, que même la simple utilisation de l'amniocentèse est une forme d'approche eugénique de la vie.

Je suis favorable aux examens prénatals pour diverses raisons, dans diverses circonstances. Mais, depuis que j'ai fait ce commentaire, je me suis fait accuser d'avoir parlé à ce sujet de pratiques eugéniques. Donc, même si j'étais en faveur de ce que vous dites, je n'irais pas jusqu'à introduire ce type d'interdiction dans la loi. Cela pourrait s'appliquer à trop de choses de manière inappropriée. Je pense que la formulation devrait être un peu plus nuancée. J'aimerais dire oui mais je ne peux pas.

Mme Judy Wasylycia-Leis: Si vous avez une formulation à recommander, le comité vous en serait extrêmement reconnaissant.

Le vice-président (M. Reg Alcock): Allez-y, professeure Lippman.

Mme Abby Lippman: Je vous remercie et je présente mes excuses aux interprètes. Je sais que je suis vraiment pénible. Je vous remercie d'avoir toléré ma vitesse d'élocution.

Merci à tous.

Le vice-président (M. Reg Alcock): C'est nous qui vous remercions.

La séance est levée.

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