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HEAL Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON HEALTH

COMITÉ PERMANENT DE LA SANTÉ

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 30 novembre 1999

• 1109

[Traduction]

Le président (M. Lynn Myers (Waterloo—Wellington, Lib.)): Mesdames et messieurs, je déclare ouverte cette séance du Comité permanent de la santé. Comme vous le savez, conformément à notre mandat aux termes du paragraphe 108(2) du Règlement, nous étudions aujourd'hui les instituts de recherche en santé au Canada. Vous êtes probablement également au courant que ce projet de loi a été renvoyé hier à notre comité.

Nous sommes très heureux de commencer nos audiences sur les IRSC. Vu les délais qui nous sont imposés, nous allons essayer d'aller aussi vite que possible, tout en tenant compte de l'importance de ce projet de loi non seulement pour les chercheurs dans tout le Canada, mais aussi pour l'ensemble des Canadiens.

Ceci dit, nous avons plusieurs témoins aujourd'hui. On me dit que chacun d'entre eux a des observations préliminaires à faire. Pour gagner du temps, je pense que nous allons demander à tous les témoins de faire leurs observations, puis nous passerons aux questions après que tous les témoins aient présenté leur point de vue.

Du Conseil pour la recherche en santé du Canada, nous avons avec nous son président, David Hill. Monsieur Hill, je me demande si vous seriez prêt à faire une ou deux observations préliminaires; nous passerons ensuite aux autres témoins.

• 1110

M. David Hill (président, Conseil pour la recherche en santé du Canada): Je vous remercie infiniment, monsieur le président.

[Français]

Bonjour, mesdames et messieurs. Je m'appelle David Hill.

[Traduction]

Je suis président bénévole du Conseil pour la recherche en santé du Canada. Je suis très heureux d'avoir l'occasion de comparaître devant vous ce matin pour parler du projet de loi C-13, Loi créant les instituts de recherche en santé du Canada, et je vous remercie de cette occasion.

Le Conseil pour la recherche en santé du Canada a été créé en 1993. Il regroupe la majorité des instituts canadiens de recherche en santé financés par le privé et plusieurs des principales organisations bénévoles qui oeuvrent dans le domaine de la santé et qui recueillent des fonds auprès du public pour la recherche en santé.

Notre conseil a pour mission de promouvoir la recherche en santé. Évidemment, le gouvernement fédéral a un rôle important à jouer dans la promotion et l'appui de la recherche en santé. Par conséquent, notre conseil s'emploie à maintenir le dialogue avec le gouvernement sur ce sujet.

Ces derniers mois, nous avons accueilli avec enthousiasme les initiatives du gouvernement fédéral dans le domaine de la recherche en santé, allant de la Fondation canadienne pour l'innovation, à la hausse du budget des conseils subventionnaires, en passant par la toute récente annonce de la création de 2 000 chaires, les chaires d'excellence en recherche du XXIe siècle, annoncée dans le dernier discours du Trône. Nous félicitons le gouvernement pour ces initiatives qui ont préparé la voie qui nous a menés où nous sommes aujourd'hui. Les instituts de recherche en santé du Canada sont une étape de plus dans le cadre de la nouvelle orientation donnée à la recherche en santé dans notre pays.

Je m'en voudrais de ne pas mentionner la dette que nous avons envers le Dr Henry Friesen, du Conseil de recherches médicales. En effet, c'est en 1997 que le Dr Friesen suggérait le concept des IRSC. Répondant à cette suggestion, le ministre de la Santé constitua alors un groupe de travail national pour étudier la question. Notre conseil était membre de ce groupe de travail. Ce dernier a recommandé que le concept des IRSC soit mis en pratique et, dans son budget de février 1999, le gouvernement fédéral a annoncé sa décision d'aller de l'avant avec la création des IRSC. Depuis, un conseil de direction provisoire s'emploie activement à finaliser les détails; il a, entre autres, participé à la rédaction du projet de loi que votre comité est maintenant chargé d'étudier.

Trois des membres de notre conseil font partie du conseil d'administration provisoire. Depuis le moment où le Dr Friesen a fait sa suggestion à ce jour, notre conseil a été intimement lié à la conception des IRSC et du projet de loi. Pour nous, la création des IRSC est l'aboutissement normal de notre raison d'être.

Les IRSC représenteront un bond en avant pour la recherche en santé dans notre pays. Ils aideront les jeunes chercheurs en début de carrière à envisager sérieusement la possibilité de travailler dans le domaine de la santé; ils contribueront à retenir les chercheurs en santé qui se heurtent à de nombreux défis dans leur profession; et j'ose le dire, ils encourageront à revenir au Canada les chercheurs formés ici qui ont quitté le pays pour des raisons professionnelles.

La promotion de la recherche en santé et la formation d'un plus grand nombre de chercheurs au Canada produiront des travaux de recherche dont les résultat aideront à diagnostiquer et à traiter les maladies. Il ne faut pas négliger non plus le fait que l'amélioration de l'infrastructure de recherche, les emplois générés par les activités de recherche et la commercialisation des produits de la recherche seront autant de moteurs de l'économie canadienne dans un secteur basé sur la connaissance qui contribueront à la croissance et à la prospérité économiques.

La recherche a besoin d'un financement stable et de prévisibilité. Les résultats de la recherche ne sont pas toujours immédiats et la nouvelle orientation du gouvernement, notamment avec les IRSC, sera, nous le croyons, l'occasion d'assurer un financement stable et adéquat pour la recherche en santé dans notre pays. Ainsi, la recherche produira de meilleurs résultats.

• 1115

Comme c'est le cas dans la plupart des entreprises, la qualité des IRSC dépendra des personnes engagées, notamment les membres du conseil de direction et ceux des conseils consultatifs des divers instituts. Nous sommes persuadés que le succès des IRSC sera vite déterminé par la compétence des personnes choisies. La présence des cerveaux les plus brillants et les plus respectés du pays dans l'infrastructure des IRSC sera non seulement garante de succès, mais également un puissant message pour le monde de la recherche qui y verra l'engagement du gouvernement à promouvoir la recherche en santé au Canada.

Notre conseil croit que ce qu'il faut rechercher dans le choix des candidats pour assurer le succès des IRSC est un heureux mélange de compétences. Nous recommandons fermement que ce mélange contienne un nombre important de véritables chercheurs praticiens qui travaillent en première ligne dans le domaine de la recherche en santé. Nous faisons entièrement confiance au gouvernement, qui s'est si résolument engagé dans cette direction, pour recruter les personnes les plus brillantes et les plus à même d'assurer le succès des IRSC. Nous ferons tout ce qui est en notre pouvoir pour l'aider dans cette tâche.

Monsieur le président, le Conseil de la recherche en santé du Canada n'a absolument aucune modification à recommander au projet de loi que vous étudiez. C'est une mesure habilitante, et, pour la plupart, les détails du fonctionnement des IRSC seront précisés dans le cadre législatif général. Nous aurons probablement des recommandations à cet égard pour le conseil de direction quand il abordera cet aspect, mais nous n'avons aucun amendement législatif à vous proposer.

Le concept des IRSC a rapidement franchi les étapes de la proposition, de l'étude et du développement pour aboutir à ce projet de loi. Nous vous exhortons, vous et vos collègues à l'appuyer et à voir à ce qu'il entre en vigueur le plus rapidement possible. Il est de la plus haute importance pour notre conseil que cette mesure législative soit mise en place dans les plus brefs délais afin que nous puissions commencer à bénéficier de cette initiative. La recherche évolue très vite et le Canada doit s'équiper rapidement afin de conserver la place qu'il occupe dans le monde en matière de recherche en santé, et ce, pour le plus grand bien des Canadiens et de l'économie du pays. Les IRSC nous en donnent les moyens.

Je vous remercie encore de cette occasion de prendre la parole devant vous ce matin. Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions quand le moment sera venu.

Le président: Je vous remercie infiniment, monsieur Hill. Nous vous savons gré de nous avoir consacré votre temps.

J'aimerais maintenant passer au Consortium canadien pour la recherche, qui est représenté par son président, le Dr John Service.

Dr John C. Service (président, Consortium canadien pour la recherche): Monsieur le président, je vous remercie, vous et les membres du comité, de cette occasion de m'adresser à vous aujourd'hui.

Je vais d'abord dire un mot du Consortium canadien pour la recherche, dont je suis président. Le consortium, qui existe depuis environ 25 ans, regroupe près de 25 organisations. C'est un regroupement d'organisations qui représentent les lettres et les sciences humaines, les sciences sociales, les sciences médicales et biologiques, ainsi que les sciences naturelles. Les membres des organisations membres sont des étudiants d'université, des universitaires, des chercheurs du gouvernement et des personnes qui travaillent dans le secteur privé. Citons, par exemple, des physiciens, des chimistes et des psychologues.

J'ai eu également le privilège d'être membre du groupe de travail du ministre qui a élaboré le cadre initial des IRSC. Tout ce processus représente un progrès remarquable qui va être d'une importance extrême pour la recherche en général et plus particulièrement pour la recherche médicale au Canada.

Le Consortium canadien pour la recherche pense que les IRSC vont en fait grandement revitaliser la recherche en santé au Canada, et ce, pour plusieurs raisons. Les chercheurs et les étudiants diplômés auront plus de débouchés au Canada. Les IRSC encourageront une plus grande coopération entre chercheurs, institutions et pays. Ils permettront l'établissement de réseaux hautement efficaces qui seront à la fois productifs et adaptés aux nouveaux besoins de la recherche. Ils appuieront des approches plus intégrées et plus thématiques en matière de recherche. Leur mandat sera large et inclusif comme le prouve, par exemple, le fait qu'on ne parle pas de recherche médicale, mais plutôt de recherche en santé. Nous croyons que cette nouvelle inclusivité est l'une des pierres angulaires et des éléments les plus enthousiasmants des IRSC.

Ce projet de loi est rédigé en termes généraux et, comme l'a dit mon collègue qui m'a précédé, c'est une mesure habilitante. Il précise les orientations et le cadre des IRSC, leur fonctionnement et leur développement pour l'avenir.

• 1120

Selon moi, c'est un exemple remarquable de consensus issu d'un groupe, je veux parler du monde de la recherche en santé. Je gagne ma vie en tant que directeur général de la Société canadienne de psychologie, donc, du point de vue professionnel, j'ai trouvé réellement fascinant de voir évoluer cette chose. C'est remarquable et je pense que cela répond parfaitement aux besoins disparates des membres de ce groupe. Je pense qu'on peut en juger sur le terrain d'après l'enthousiasme et sans doute la joie suscités par la création des IRSC, qui n'ont d'égal que la crainte et l'inquiétude concernant la façon dont ils vont évoluer à l'avenir. Je crois que ces sentiments sont également répartis au sein du monde de la recherche en santé et je puis donc dire que ça a été un très bon exercice pour ce qui est de l'établissement d'un consensus.

Il ne fait aucun doute qu'il reste encore beaucoup de choses à décider. Par exemple, les capacités actuelles de recherche du CRM et des programmes du CRHS et du CRSNG dans le domaine de la santé ont été et doivent continuer à être protégées pendant la période de transition. Nous ne pouvons pas ne pas faire ce que nous faisons bien. Nous devons continuer à le faire.

Les IRSC devront pouvoir demeurer souples. Il faudra qu'ils aient la latitude voulue pour cibler des questions stratégiques qui risquent de se poser plus tard et qui sont encore inconnues aujourd'hui. Pensons par exemple à ce qui s'est passé avec le sida. Il faut que, en matière de recherche, nous disposions d'une souplesse suffisante pour pouvoir nous attaquer rapidement à des sujets précis.

Il va falloir veiller à ce que l'inclusivité demeure une constante pendant toute la durée de vie des IRSC. Je suis convaincu qu'il en sera ainsi car la façon dont le projet de loi et les instituts eux-mêmes sont structurés, avec des comités consultatifs, va, je pense, le garantir dans la pratique.

Il y a un tas d'autres questions dont j'aimerais parler, et j'ai hâte de le faire dans le cadre du débat qui va suivre.

Je vous remercie de cette occasion de vous rencontrer ce matin. Nous sommes enthousiasmés par ce projet de loi et par les étapes suivantes qui vont consister à peaufiner cette initiative et à la mettre en oeuvre.

Je vous remercie, monsieur le président.

Le président: Je vous remercie infiniment, docteur Service. Nous apprécions également vos observations.

Passons maintenant à la Fondation canadienne de la recherche sur les services de santé. Nous avons aujourd'hui avec nous son directeur exécutif, M. Jonathan Lomas.

M. Jonathan Lomas (directeur exécutif, Fondation canadienne de la recherche sur les services de santé): Je vous remercie beaucoup, monsieur le président, de cette occasion de m'adresser à vous au sujet de cette initiative fascinante que sont les instituts de recherche en santé du Canada.

En plus d'être le directeur exécutif de la Fondation canadienne de la recherche sur les services de santé, je suis également membre du conseil de direction provisoire des IRSC.

C'est pour moi un privilège d'être associé à un concept aussi novateur que celui-ci, concept dont l'évolution est suivie avec un mélange d'envie et d'intérêt par les chercheurs en santé dans le monde entier. L'un de mes collègues étrangers m'a dit la semaine dernière: «Ça doit être fascinant d'être un chercheur en santé en ce moment au Canada.» Il avait tout à fait raison.

Au cours des prochaines minutes, je veux faire trois choses. Premièrement, je vais vous donner une brève description de la Fondation canadienne de la recherche sur les services de santé, de ce que nous faisons et de la raison pour laquelle nous le faisons. Deuxièmement, je parlerai de l'immense potentiel des IRSC du point de vue du monde de la recherche appliquée. Et troisièmement, je vais lancer un appel pour que les IRSC disposent de ressources suffisantes afin que leurs travaux profitent au maximum à la santé des Canadiens et à notre système de santé.

La Fondation canadienne de la recherche sur les services de santé est un organisme à but non lucratif géré par un conseil d'administration indépendant. Dans le spectre de la recherche, elle se situe du côté de la recherche appliquée. Elle oeuvre pour mettre la recherche et les chercheurs en contact avec la froide réalité du système de santé.

En cette ère de l'économie du savoir, on peut dire que nous sommes des courtiers du savoir à la recherche de façons de rapprocher la recherche du processus décisionnel. Nous faisons en sorte que les découvertes prometteuses faites dans les conditions idéales que constitue un environnement universitaire se révèlent tout aussi prometteuses dans la réalité quotidienne du système de santé. Autrement dit, nous avons pour mission de faciliter, dans le secteur de la santé, la prise de décisions fondée sur des preuves.

Nous consultons les décisionnaires qui travaillent dans le système de santé et nous déterminons leurs besoins en matière de recherche. L'une des conditions pour bénéficier de notre financement est que les chercheurs et les décisionnaires travaillent en collaboration à des projets de recherche sur des thèmes communs. Nous améliorons la manière dont la recherche est diffusée, non seulement par les chercheurs eux-mêmes, mais également par d'autres dont les médias. Par ailleurs, nous aidons les organismes prestataires de soins de santé à repérer et à appliquer la recherche à leurs décisions. Le dernier budget fédéral nous a confié la mission spéciale d'accroître la capacité de recherche des services infirmiers.

Passons maintenant au potentiel des IRSC. La réorganisation des systèmes de santé au cours des années 90 s'est faite en profondeur et a été douloureuse tant pour les patients que pour les prestateurs de soins. La conception du régime d'assurance-maladie a ses racines dans la situation qui existait dans les années 50 alors que les soins de santé étaient plutôt du genre artisanal. Administrer aujourd'hui les régimes de santé selon ce modèle serait comparable à un producteur de grains des Prairies qui n'aurait qu'un simple boyau d'arrosage et l'Almanack des fermiers. Le domaine de la santé était et est encore, dans une grande mesure, mal équipé pour absorber l'accélération de la technologie, la hausse des attentes et une gestion moderne, et pour s'y adapter.

• 1125

Les perturbations récentes dans le système de santé sont dues en majorité au fait que nous tentons de passer d'un seul coup, presque dans un vent de panique, d'une entreprise artisanale à un système géré et responsable, au lieu de procéder par étapes.

Le récent scandale de l'hépatite C illustre le problème. Premièrement, le système a attendu trop longtemps, après que la recherche ait produit un test de dépistage, pour l'appliquer au système d'approvisionnement en sang. Deuxièmement, les gestionnaires ne disposaient d'aucun système de suivi pour signaler rapidement l'existence d'un problème. Pour les systèmes de santé, la recherche est à la fois la source de nouvelles possibilités et le canari qui, dans une mine, signale l'imminence d'un problème.

Dans le cas de l'hépatite C, le système ne disposait ni d'un lien avec la recherche faite à l'extérieur et qui aurait pu fournir une solution, ni de la capacité de recherche interne lui permettant de repérer les problèmes rapidement. La difficulté au cours de la dernière décennie et même depuis plus longtemps vient en partie du fait que le monde de la recherche a été traité comme un magasin de détail, et de la croyance erronée que le robinet de la recherche peut être ouvert et fermé selon les besoins—que les équipes de recherche, les bases de données et l'équipement peuvent être démantelés et reconstitués à volonté. Quand les systèmes de santé ont besoin d'un ou deux kilos d'innovation en matière de traitement, ou d'un mode de prestation de service rentable, ils se présentent au magasin de recherche avec quelques dollars dans la poche et sont très surpris de ne rien trouver qui réponde à leurs besoins.

Malheureusement, les commandes doivent être payées à l'avance et le processus de production et de livraison prend des années, comme c'est toujours le cas dans le domaine de la R et D. Tout comme une compagnie aérienne doit commander ses avions plusieurs années à l'avance, les systèmes de santé doivent prévoir l'avenir et investir aujourd'hui dans les besoins et la capacité de recherche de demain.

Heureusement, l'investissement prévu dans les IRSC signale un changement dans la façon dont les gouvernements voient la recherche en santé. Il annonce un traitement qui sera moins comme un système de livraison juste à temps et plus voisin d'un parc national qu'on entretient continuellement et qu'on préserve pour qu'il soit là quand on en a besoin et quand on veut s'en servir.

La structure proposée des IRSC reconnaît aussi l'importance de ce qu'on pourrait appeler la biodiversité, la nécessité d'une interaction entre les idées des spécialistes en recherche fondamentale qui travaillent dans leurs laboratoires, des spécialistes en recherche clinique qui essaient de nouveaux traitements avec les patients, des spécialistes en recherche sur les services de santé qui essaient de nouvelles façons d'organiser le système et des spécialistes en sciences sociales qui étudient la santé des populations. Dans le moment, ces divers types de recherche en santé sont tous financés et exécutés de façon indépendante. Leur intégration dans les IRSC créera un tout qui est plus grand que la somme des ses parties. La possibilité pour le Canada de devenir un leader mondial dans cette vision élargie de la recherche en santé est absolument immense.

Maintenant, ce que nous devons faire, c'est nous assurer que nous maximisons l'utilisation de la recherche effectuée par les ICRS. En d'autres termes, il faut financer le processus de recherche et non seulement les chercheurs. Les IRSC peuvent établir le lien entre la recherche et le système de santé de façon plus efficace qu'auparavant en donnant constamment accès aux travailleurs de la santé à de nouvelles idées qui ont été testées. Plus de restructuration pénible; on n'aura désormais qu'à suivre lentement mais sûrement le cours de la recherche.

Si le gouvernement fédéral plante cette graine dans les IRSC, les chercheurs, les cliniciens, les gestionnaires et les décideurs du système de santé seront heureux d'en assurer la croissance et d'en récolter les bénéfices pour une amélioration des services de santé. Ils leur faudra cependant autre chose que des fonds pour les chercheurs des ICRS s'ils veulent y arriver, car la recherche à elle seule, aussi valable qu'elle puisse être, suffit rarement à donner des résultats concrets. Il a fallu plus de cinq ans avant que les études de Sir Richard Doll établissant un lien entre le cancer du poumon et le tabagisme ne se traduisent par des mesures gouvernementales concrètes. Ce n'est que plus de dix ans après avoir découvert que les médicaments fibrinolytiques pouvaient sauver des vies après une crise cardiaque que l'utilisation de ces médicaments est devenue pratique courante dans les salles d'urgence. Enfin, près de 30 ans après que les infirmières praticiennes ont prouvé leur efficacité pour les soins de santé de première ligne, le recours à leurs services n'est toujours pas répandu dans le système de soins de santé au Canada.

Bref, la recherche a besoin d'aide pour un transfert rapide de la théorie à la pratique. En plus de financer les chercheurs, les IRSC devront financer ce transfert. Comment les IRSC peuvent-ils faire cela? En invitant les travailleurs de la santé à participer activement au processus dès les premières étapes afin de s'assurer que la recherche répond à leurs besoins.

Ils peuvent faire cela en étant en contact constant avec les décideurs pendant que la recherche s'effectue afin de les tenir au courant des progrès, de les renseigner sur ses applications possibles futures dans le système de santé et de les sensibiliser de façon générale à la valeur de la recherche et à la façon de l'utiliser dans leur travail. Ils peuvent le faire en vulgarisant les résultats de la recherche pour que les gens autres que les chercheurs puissent comprendre.

• 1130

Si les IRSC ne financent pas ces activités connexes, nous n'arriverons pas à récolter tous les bénéfices de la recherche effectuée par les IRSC et aussi à l'extérieur des IRSC.

Malheureusement, les conseils subventionnaires traditionnels n'ont pas vu cela comme faisant partie du processus de financement de la recherche, ou plutôt on ne leur a pas permis de le voir. On a eu tendance à confondre les ressources consacrées à l'évaluation des priorités, à la communication des résultats et à la mise en contact des chercheurs et des décideurs avec les dépenses administratives. On a donc, par inadvertance, éliminé le soutien nécessaire à ces activités au nom de l'efficience administrative.

Nous ne devons pas faire cela avec les IRSC. Les gouvernements provinciaux, les dirigeants des hôpitaux, les autorités régionales de la santé, les organismes communautaires, les autres fournisseurs de fonds pour la recherche et le public devront tous être partenaires si on veut exploiter le plein potentiel des IRSC.

La nécessité de développer, de maintenir et de favoriser ces partenariats fait aussi partie du processus de recherche, et cela nécessite des ressources. Le processus de recherche en santé va plus loin que les travaux effectués par les chercheurs eux-mêmes. C'est aussi l'évaluation des priorités. C'est la liaison et les échanges entre les partenaires. C'est la communication efficace et convaincante des résultats de la recherche et de la valeur de la recherche. Enfin, c'est l'assurance de la qualité des services de santé.

L'industrie pharmaceutique a compris cela depuis longtemps. Dans une interview diffusée en 1997 à l'émission Marketplace, Judy Erola, qui parlait alors au nom de l'Association canadienne de l'industrie du médicament, a montré comment presque 50 p. 100 des coûts de R-D d'un médicament servaient à communiquer les résultats de la recherche aux utilisateurs ou aux fournisseurs de fonds potentiels. Cela fait vraiment contraste avec l'analyse du financement de la recherche par le gouvernement fédéral effectuée par le Comité consultatif fédéral, provincial et territorial sur les services de santé en 1995. Cette analyse avait révélé que non pas 50 p. 100 mais moins d'un tiers de 1 p. 100 des fonds fédéraux affectés à la recherche en santé étaient consacrés à la communication et à la diffusion des résultats à ceux susceptibles de les utiliser. Il y avait clairement là un déséquilibre dans les efforts relatifs en vue du déploiement dans le système de santé des résultats de la recherche à but lucratif et de ceux de la recherche financée par l'État.

Le fait d'assimiler ces activités importantes d'assurance de la pertinence de la recherche et de communication de ses résultats aux coûts administratifs, de les diaboliser en les prenant pour de la bureaucratie ou pour des occasions ratées de financer des chercheurs universitaires, condamnera les IRSC à ne pas exploiter leur plein potentiel pour ce qui est d'améliorer la santé des Canadiens. Rien ne serait plus tragique que de financer les chercheurs mais ne pas financer les mécanismes qui maximiseront l'impact de leur travail sur la santé des Canadiens. Ce serait comme si une société pharmaceutique congédiait ses spécialistes du marketing et des communications et confiait cette tâche à ses chercheurs en laboratoire.

Les IRSC doivent se tailler une place sur le marché des idées en ne finançant pas seulement les chercheurs mais aussi les mécanismes visant à faire connaître les résultats de la recherche à ceux qui peuvent les utiliser.

Merci.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Lomas. Nous avons apprécié votre exposé.

Nous avons maintenant le directeur exécutif du

[Français]

Fonds de la recherche en santé du Québec, le docteur Pierre Boyle. Docteur Boyle, s'il vous plaît.

Dr Pierre Boyle (directeur général, Fonds de la recherche en santé du Québec): Merci, monsieur le président.

Le Fonds de la recherche en santé du Québec intervient dans la planification, le développement, la promotion et le financement de la recherche en santé au Québec. Notre investissement cette année s'élèvera à près de 70 millions de dollars, soit l'investissement le plus important par une agence provinciale de recherche en santé. Les commentaires que je vais faire aujourd'hui ont été élaborés en collaboration avec trois autres organismes, dont le Fonds pour la formation de chercheurs et l'aide à la recherche, le FCAR, qui soutient la recherche dans les campus universitaires, alors que le FRSQ soutient la recherche dans les centres de recherche des hôpitaux, où se fait la grande majorité de la recherche biomédicale au Québec. Le FCAR soutient la recherche universitaire; une partie de ses fonds sont affectés à la recherche en santé. Le Conseil québécois de la recherche sociale, dont à peu près 25 p. 100 de l'enveloppe vise à soutenir la recherche sociale qui est directement pertinente à la santé, y a aussi participé, ainsi que le Conseil d'évaluation des technologies de la santé, qui a pour mission de conseiller le gouvernement sur l'efficacité des technologies en santé dans le sens large et qui est un acteur de premier plan dans le transfert des connaissances aux pratiques cliniques, aux décideurs politiques et aux décideurs administratifs.

• 1135

Nos commentaires vont porter précisément sur le projet de loi C-13. Il va sans dire que l'idée de créer les Instituts de recherche en santé du Canada est accueillie partout comme un vent de fraîcheur dans un contexte qui a été caractérisé par une morosité aiguë au cours des dernières années, morosité liée au sous-financement chronique de la recherche en santé au Canada. Puisque l'idée de tels instituts est fort bien accueillie partout, nos commentaires ne porteront pas sur le quoi, mais bien sur le comment.

Dans un premier temps, nous appuyons entièrement la mission qu'on confie aux instituts de recherche. Il nous apparaît important que ce projet, tel qu'il est soumis, dans son caractère transformateur, bâtisse sur l'oeuvre du Conseil de recherches médicales du Canada et sur les acquis d'excellence scientifique du passé, tout en permettant de mieux adapter la recherche en santé aux défis de demain et en permettant à l'appareil de recherche et aux chercheurs de mieux répondre aux nouveaux défis qui se présentent.

Nous sommes fort heureux de voir que l'orientation du législateur permet à tous les chercheurs en santé au Canada de se trouver un créneau dans l'un ou l'autre des instituts qui seront créés par les IRSC. On comprend bien aussi que les IRSC vont miser fortement sur la collaboration entre les organismes et les individus pour accomplir leur mission. Cela nous apparaît très important.

Parmi l'ensemble des missions confiées aux instituts, il nous semble qu'une question mérite une attention prioritaire et immédiate, soit notre capacité de former, d'attirer et de retenir les meilleurs cerveaux et les expertises nécessaires à la poursuite de la recherche en santé sur une base de qualité et de pertinence au cours des prochaines années.

Il sera important de créer des environnements dynamiques qui vont permettre aux chercheurs méritoires de bénéficier d'une perspective de carrière à laquelle, pour le moment, même les plus brillants n'ont souvent pas accès.

Notre deuxième commentaire porte sur le financement. Il est évident que nous nous réjouissons du fait que les pouvoirs publics reconnaissent l'importance d'améliorer de façon importante et pressante le soutien financier à la recherche en santé. Il est clair pour nous que cet apport contribuera à à diminuer l'écart qui existe entre le Canada et les pays du G-7 à ce chapitre.

Par contre, si on considère que ceci constitue un investissement collectif et non pas une dépense gouvernementale, tout doit être mis en oeuvre pour maximiser la portée de cet investissement pour la collectivité. Nous sommes un peu préoccupés par la possibilité que les frais d'administration relatifs à la mise en place des instituts puissent avoir une importance exagérée. Rappelons-nous que l'objectif premier consiste à permettre, à court terme, d'accroître le nombre de chercheurs financés et le niveau de financement, et enfin de mettre en place les conditions nécessaires à un développement plus cohérent de la recherche en matière de santé.

Il nous apparaît souhaitable que le législateur fixe, dans la loi ou dans les règlements, un seuil au-delà duquel il ne serait pas acceptable de voir les dépenses d'administration s'accumuler. Un seuil d'environ 5 p. 100 nous apparaîtrait raisonnable, compte tenu de l'expérience des organismes nationaux et provinciaux à cet égard.

Notre troisième commentaire porte sur l'approche intégratrice, qui est tout à fait originale et rafraîchissante. Les IRSC intégreront à la fois les disciplines, les domaines et les régions dans un maillage d'expertises qui nous apparaît tout à fait prometteur pour l'avenir. Cette approche s'inscrit d'ailleurs dans un courant déjà amorcé de réseautage et de mariages interdisciplinaires et interuniversitaires des expertises dans divers champs d'application de la recherche en santé.

Les retombées d'une telle formule sont multiples. Elle permet l'enrichissement et la cofertilisation scientifique, qui est très importante, ainsi que la création d'une forme de guichet unique d'accès aux meilleurs cerveaux du pays dans un domaine donné et d'une vitrine de rayonnement scientifique pour les scientifiques canadiens à l'échelle internationale.

Cette approche visant l'intégration des cinq créneaux majeurs de recherche—la recherche biomédicale, la recherche clinique, la recherche sur les services et les systèmes de santé, la recherche populationnelle et la recherche sur les effets de l'environnement sur la santé, qu'on a ajoutée récemment—constitue un des facteurs de succès pour l'avenir.

• 1140

L'émergence de masses critiques de chercheurs dans des domaines ciblés pouvant couvrir un large éventail de questions et ayant la possibilité de faire interagir la recherche clinique, la recherche appliquée, ainsi que la recherche sociale et populationnelle, nous apparaît un élément extrêmement intéressant pour l'avenir. Les organismes québécois ont déjà commencé à appliquer cette approche dans les centres qu'ils soutiennent. On comprend aussi que cette approche intégratrice contribuera à tisser des liens entre les IRSC et les décideurs, c'est-à-dire ceux qui sont touchés par l'orientation, la gestion et la dispense des services et des programmes de santé au Canada.

La création d'un tel lien fonctionnel entre les IRSC et les éventuels utilisateurs des fruits de la recherche est capitale, bien que l'expérience des formules gagnantes pour réaliser cette mission soit encore un peu domaine peu développé. Nous devrons être novateurs dans notre façon de faire.

Dans les cinq créneaux identifiés, il y a des défis importants à relever. recherche fondamentale ou biomédicale est essentielle à une partie importante des activités de recherche en santé et en constitue, en quelque sorte, un créneau de premier plan. Il sera important que cette recherche puisse bénéficier d'un soutien important au cours des prochaines années et qu'on lui assure les conditions nécessaires à son essor.

Pour sa part, la recherche clinique est en véritable crise à l'échelle nord-américaine et particulièrement au Canada. On constate une perte de compétitivité du Canada à l'échelle internationale en matière de recherche clinique, et cela est préoccupant. Les conditions de travail des professionnels de la santé et des chercheurs cliniciens, qui consacrent une partie importante de leur temps à la recherche clinique, représentent une des embûches sur lesquelles il faudra travailler au cours des prochaines années si on veut accroître la capacité du Canada de participer à la recherche clinique novatrice, celle qui est essentielle pour amener les découvertes du laboratoire au chevet du patient et éventuellement en faire profiter toute la collectivité.

Dans le domaine de la recherche sur les services de santé et les systèmes de santé, malgré des acquis importants au cours des dernières années, les besoins dépassent très largement notre capacité d'y faire face. C'est un secteur où il faudra investir dans le développement des cerveaux et de notre capacité. Il faudra faire preuve d'ingéniosité dans les liens qu'on va tisser entre les utilisateurs et les producteurs de la connaissance.

Il sera important, à notre avis, d'éviter des dédoublements, notamment avec des organismes existants comme la Fondation canadienne de la recherche sur les services de santé.

Le domaine de la recherche sur la santé des populations et les aspects sociaux et culturels de la santé est considéré comme un domaine en émergence depuis fort longtemps. Il faut dire qu'au moment où on se parle, le Canada dispose d'une expertise de pointe reconnue mondialement dans ce domaine. Ce domaine a acquis une crédibilité scientifique d'une portée collective indéniable. Des organismes comme le Conseil de recherches en sciences humaines du Canada, le Conseil québécois de la recherche sociale et d'autres organismes ont été des acteurs de premier plan dans le développement de la recherche en sciences humaines et sociales, et nous espérons qu'en collaboration avec les instituts, ils continueront d'attirer et de former des chercheurs de calibre international dans ce domaine. Il est essentiel qu'on continue de soutenir ce créneau de recherche et même d'augmenter le soutien qu'on lui accorde.

Finalement, en ce qui concerne les questions de gérance et d'imputabilité, on ne saurait sous-estimer l'importance du choix des individus qui seront appelés à siéger au conseil d'administration des IRSC, de même que de ceux qui seront appelés à diriger les instituts thématiques. Ces personnes vont imprimer un style, une dynamique et une crédibilité à chacun des instituts, et leur choix devra reposer sur des critères d'excellence, de crédibilité et de rayonnement scientifique, mais aussi sur des qualités personnelles incontestables: ils devront être des leaders, des visionnaires et des mobilisateurs.

Il y a aussi la question de l'imputabilité. Nous sommes peut-être un peu préoccupés à cet égard. Il est important que les législateurs comprennent bien que l'obligation de rendre des comptes sur les retombées de la recherche doit comporter certaines limites. Presque tous les pays occidentaux s'intéressent actuellement à la façon de mesurer les retombées de la recherche. Je dois vous dire que c'est une question qui a des limites importantes en ce moment. Il ne faudrait pas s'attendre à pouvoir tout chiffrer à très court terme. C'est une question fort complexe, et la recherche est un processus lent, dont les résultats sont souvent issus d'efforts importants consentis sur de longues périodes.

• 1145

En terminant, je voudrais simplement souligner la tradition de complémentarité qui existe depuis plusieurs années entre le Conseil de recherches médicales du Canada, le FRSQ et les autres organismes subventionnaires provinciaux. L'interaction avec une multitude d'instituts peut rendre cette complémentarité plus complexe.

Dans notre cas, les efforts pour ajuster nos programmes à la perspective canadienne sont déjà amorcés, et nous souhaitons que les organismes provinciaux, notamment le FRSQ, soient considérés comme des collaborateurs de premier plan des Instituts de recherche en santé du Canada. Nous espérons pouvoir compter sur les acquis du passé pour enrichir les collaborations de l'avenir.

Nous souhaitons que les instituts s'engagent dans le développement de partenariats gagnants-gagnants avec des organismes de partout au Canada déjà engagés dans le soutien de la recherche en santé pour les Canadiens. Je vous dirai que près du tiers du marché de la recherche biomédicale, si on peut l'appeler ainsi, et de la recherche en santé dans son sens large est au Québec. Malgré le fait que le Québec ne compte que 24 p. 100 de la population canadienne, ses chercheurs se font la concurrence pour plus de 33 p. 100 des fonds du CRM actuellement.

Monsieur le président, je vous remercie de votre invitation.

Le président: Merci beaucoup, docteur Boyle.

[Traduction]

Merci beaucoup.

Nous allons maintenant passer à l'Association des universités et collèges du Canada, représentée par son président et directeur général, M. Robert Giroux. Monsieur.

[Français]

M. Robert J. Giroux (président-directeur général, Association des universités et collèges du Canada): Merci beaucoup, monsieur le président, et bonjour aux membres du Comité permanent de la santé. Je vous remercie de m'avoir invité à prendre aujourd'hui la parole au nom de l'Association des universités et collèges du Canada. C'est avec plaisir que j'ai accepté cette invitation, d'autant plus que le sujet dont vous discutez actuellement est très cher au coeur de nos établissements membres.

J'aimerais vous faire remarquer que l'Association des universités et collèges du Canada représente 90 membres, c'est-à-dire toutes les universités canadiennes ainsi que les collèges qui donnent des diplômes universitaires. La grande majorité de ces institutions s'intéressent beaucoup à la recherche en santé. Nous en avons 16 qui ont des facultés de médecine et plusieurs ont des facultés de sciences sociales et humaines et des facultés de sciences. Certains ont des facultés de médecine vétérinaire et d'autres, des facultés de nursing. Ils sont donc tous très intéressés à la recherche sur la santé au Canada.

Après un an d'attente, le projet de loi C-13, Loi portant sur la création des Instituts de recherche en santé du Canada, a été présenté à la Chambre des communes. Permettez-moi d'abord de vous rappeler que l'AUCC et ses établissements membres accueillent très favorablement la création des Instituts canadiens de recherche en santé. Ce projet des plus novateurs marque un tournant pour la recherche en santé au Canada. Ce projet, s'il connaît le succès escompté, deviendra sans doute un modèle à suivre partout dans le monde.

Les Instituts canadiens de recherche en santé sont une manifestation de l'engagement du gouvernement fédéral à faire de la recherche en santé l'un des moyens qui servira à améliorer la santé et le mieux-être des Canadiens, tout en participant à la formation de la prochaine génération de chercheurs en santé parmi les meilleurs et les plus brillants. Les instituts ont tout pour améliorer considérablement l'effort de recherche des universités canadiennes.

Le projet de loi C-13 contient des éléments essentiels pour assurer le succès de la mise en oeuvre et du fonctionnement ultérieur des instituts. Il fixe les objectifs ainsi que la mission des instituts. Il en établit également les fonctions et les domaines de responsabilité. Il présente la structure organisationnelle des instituts tout en établissant les responsabilités du président et du conseil de direction. Enfin, il présente la marche à suivre pour une transition en douceur entre le Conseil de recherches médicales et les Instituts canadiens de recherche en santé.

S'inspirant du texte de loi qui a créé les autres conseils subventionnaires de la recherche, le projet de loi C-13 est habilitant sans être trop normatif. Voilà, à notre avis, l'une de ses plus importantes qualités. Le projet de loi présente le cadre de fonctionnement des instituts, mais il laisse un marge de manoeuvre suffisante au conseil d'administration pour l'élaboration ultérieure du détail de la programmation.

• 1150

Chose encore plus importante, le projet de loi donne aux instituts la flexibilité dont ils ont besoin pour répondre aux transformations de l'environnement de la santé en leur permettant de rectifier le financement au gré des problèmes émergents de santé et de nouvelles occasions de recherche.

Le projet de loi est très englobant. Sous le parapluie d'instituts de recherche en santé, les chercheurs de tous les secteurs et de toutes les disciplines, dont celles des sciences sociales et humaines, se regrouperont dans le but de faire l'étude des multiples facettes de la santé.

Bien que le projet de loi n'établisse pas les instituts en les nommant, nous croyons savoir qu'ils supporteront la recherche biomédicale, la recherche clinique ainsi que la recherche sur les systèmes de santé, les services et toutes les autres dimensions que la santé peut revêtir.

Cette approche intégrée de la recherche constitue l'élément qui rend les instituts si différents des autres programmes de financement de recherche en santé.

Le projet de loi C-13 assure que les instituts seront autonomes face au gouvernement. Le conseil d'administration, sous la présidence du président des instituts, aura la liberté d'établir les orientations stratégiques, la responsabilité d'approuver le budget et tous les pouvoirs afférents à la gestion interne de l'organisme sans avoir à consulter préalablement le ministre.

Nous croyons que le conseil d'administration a besoin de cette latitude pour bien mener ses affaires et nous sommes reconnaissants au législateur d'avoir inscrit cette autonomie dans le projet de loi C-13.

Offrir de l'aide à la recherche par le biais de concours arbitrés par des pairs, sans considération partisane ou politique, est l'une des plus importantes caractéristiques du système canadien d'aide à la recherche. Cette façon de faire a bien servi le Canada et est perçue comme un modèle à suivre par de nombreux autres pays. Il est aussi l'une des raisons expliquant l'excellence internationale que nous avons atteinte en dépit d'un soutien financier beaucoup moins important que dans les autres pays industrialisés.

Détacher les instituts du gouvernement ne signifie aucunement que les instituts n'auront pas de comptes à rendre. Les instituts rendront compte par le truchement de leur conseil d'administration et de direction, lequel a la responsabilité de bien administrer les instituts et de voir à ce que les objectifs établis soient respectés à l'avantage et dans l'intérêt de la population canadienne.

Les membres du conseil d'administration nommés par le gouverneur en conseil. Ils proviendront par ailleurs de divers horizons et devront respecter les plus hautes normes en matière d'excellence scientifique. Les membres du conseil de direction pourront être nommés pour au plus deux mandats consécutifs, et au plus le tiers des membres du conseil seront remplacé à chaque année.

Cette disposition du projet de loi aidera à la cohésion du conseil d'administration et contribuera à la continuité de ses démarches.

[Traduction]

Nous aimerions, monsieur le président et membres du comité, faire quelques observations relatives à trois pouvoirs que le projet de loi C-13 confère aux IRSC, à savoir le pouvoir d'entreprendre des recherches, alinéa 4e), le pouvoir de commercialiser la propriété intellectuelle, alinéa 26(1)f), et le pouvoir de créer une société privée distincte, alinéa 26(1)c).

Comme nous l'avons mentionné précédemment, il s'agit ici d'une mesure législative habilitante. Elle vise à créer un cadre suffisamment large et souple pour permettre aux IRSC de s'adapter aux changements du milieu de la recherche.

Pourtant, ces trois pouvoirs en particulier justifient quelques commentaires. La législation actuelle du Conseil de recherches médicales lui confère déjà le mandat d'effectuer de la recherche. Dans ses 30 ans d'histoire, il n'a jamais fait usage de ce pouvoir. Nous espérons et sommes confiants que le conseil d'administration des IRSC exercera son pouvoir discrétionnaire de la même façon que l'a fait le CRM. La combinaison d'un mandat de soutien à la recherche et d'un mandat d'exécution de la recherche peut donner lieu à des situations de conflit d'intérêts, qu'elles soient réelles ou seulement perçues comme telles. De telles situations doivent être évitées.

L'alinéa 26(1)f) du projet de loi proposé habilite les IRSC à:

    rendre disponibles, notamment par cession ou octroi de licence, les brevets, droits d'auteur, dessins industriels, marques de commerce, secrets industriels ou titres de propriété analogues placés sous leur administration ou leur contrôle.

De plus, l'alinéa 26(1)c) habilite les IRSC à obtenir la constitution d'une personne morale ou encore à acquérir ou à aliéner des actions d'une personne morale.

La fonction première et prépondérante des IRSC sera de soutenir l'excellence en recherche, quel que soit l'endroit du pays où elle se fait. À ce titre, leurs politiques sur la propriété intellectuelle devront, selon nous, suivre celles du CRM et d'autres conseils subventionnaires en ce sens qu'ils ne réclameront pas de droits de propriété intellectuelle à l'égard des inventions résultant des recherches effectués à l'aide de leurs subventions. De plus, nous nous attendons également à ce que les IRSC encouragent les chercheurs à protéger et à commercialiser leurs inventions en partenariat avec leur université ou leur institut.

• 1155

Nous sommes convaincus que les IRSC se fonderont sur un récent rapport du Conseil consultatif des sciences et de la technologie du premier ministre pour toutes les questions de commercialisation des résultats de la recherche. Au printemps dernier, le Conseil consultatif des sciences et de la technologie a chargé un groupe d'experts d'examiner la commercialisation des résultats de la recherche universitaire au Canada. Il recommanda, entre autres, que le gouvernement investisse 50 millions de dollars additionnels dans les universités afin de renforcer leur capacité de commercialiser les résultats de la recherche. Il est à noter que le groupe d'experts n'a pas suggéré que les organismes subventionnaires fédéraux prennent part directement à la commercialisation de la recherche qu'ils appuient.

Les conseils subventionnaires ont joué un rôle catalyseur clé par le truchement de programmes qui appuient les partenariats université-industrie ou université-gouvernement et nous exhortons les IRSC à poursuivre cette tradition. Nous exhortons aussi le conseil d'administration des IRSC à exercer son pouvoir discrétionnaire relativement à l'acceptation de mandats de recherche de façon à éviter les chevauchements avec les efforts de recherche des universités ou d'autres organismes de recherche.

Enfin, nous nous attendons également à ce que le conseil d'administration des IRSC exerce son pouvoir de création de filiales seulement après des consultations et un examen publics exhaustifs.

En conclusion, monsieur le président, l'AUCC appuie fermement le projet de loi C-13 et recommande son adoption par le Parlement. La création des Instituts de recherche en santé du Canada est d'une importance fondamentale pour des milliers de chercheurs et d'établissements de recherche au Canada. Elle représente un tournant décisif dans l'histoire de la recherche en santé au Canada, une occasion pour les chercheurs dans diverses disciplines du domaine de la santé d'un bout à l'autre du pays de se rassembler pour collaborer à des projets de recherche communs.

Les IRSC peuvent faire une énorme différence en contribuant à améliorer la santé des Canadiens. Ne laissons pas cette possibilité nous échapper.

Merci.

[Français]

Le président: Merci beaucoup, monsieur Giroux.

[Traduction]

Merci pour cet exposé.

Passons maintenant à la Coalition pour la recherche biomédicale et en santé, qui est représentée par le Dr Barry McLennan, président de cette organisation.

Dr Barry D. McLennan (président, Coalition pour la recherche biomédicale et en santé): Merci, monsieur le président. Une copie de mon exposé a été distribuée aux membres du comité.

Je veux d'abord dire quelques mots au sujet de la CRBS. La Coalition pour la recherche biomédicale et en santé représente plus de 40 000 spécialistes de la recherche biomédicale, de la recherche clinique et de la recherche en santé au Canada. Notre organisation regroupe, entre autres, 16 facultés de médecine, la Société canadienne de recherches cliniques, les écoles de médecine vétérinaire, l'Institut canadien de médecine académique et le Collège royal des médecins et chirurgiens du Canada.

Notre coalition a vu le jour en 1992 et s'est donné deux objectifs simples: premièrement, sensibiliser davantage le public au domaine scientifique et, deuxièmement, favoriser l'augmentation du financement des activités de recherche biomédicale, clinique et en santé au Canada afin qu'on comprenne mieux la valeur de ces activités pour l'amélioration de la qualité de vie des Canadiens et le renforcement de notre économie et les progrès réalisés dans ce domaine.

Nous avons été étroitement liés à cette activité non seulement au cours de la dernière année mais bien depuis deux ou trois ans, car nous réclamons depuis longtemps ce genre d'organisation. C'est pourquoi nous sommes extrêmement heureux de voir où en sont les choses. En fait, monsieur le président, je dirais que nous sommes un peu trop proches de cette loi pour en saisir vraiment l'importance. Je crois que les livres d'histoire montreront que la création des IRSC sera aussi importante que l'introduction de l'accès universel aux soins de santé il y a 30 ans.

Je suis très excité par ce projet de loi. Je crois que c'est la chose la plus extraordinaire qui soit arrivée dans le milieu de la recherche en santé. Nous sommes donc très impatients de voir le comité approuver, le plus tôt possible, le projet de loi sous sa forme actuelle. C'est quelque chose que je tenais à dire tout de suite.

Comme certains de mes collègues l'ont mentionné, la création des IRSC marque un point tournant dans l'histoire de la recherche en santé au Canada. C'est un élément clé de la stratégie du gouvernement fédéral pour s'assurer que le Canada est à l'avant- garde de l'économie du savoir au moment où nous entrons dans le nouveau millénaire.

• 1200

Les IRSC et les Chaires d'excellence en recherche du XXIe siècle, programme annoncé il y a quelques semaines par notre premier ministre, permettront de transformer l'environnement canadien en un milieu favorisant l'importation des cerveaux et non leur exode. Ce matin, je lisais dans le Globe and Mail que le problème de l'exode des cerveaux est encore bien présent. L'article venait du Canada atlantique. J'ai déjà parlé de cette question au comité, mais je tiens à le dire clairement une fois de plus: le Canada perd cinq chercheurs en santé au profit des États-Unis pour chaque chercheur en santé qui revient chez nous. Et j'ajouterai que ceux qui font des statistiques ne comprennent pas toujours cela. Selon eux, on en perd un, on en embauche un; c'est un jeu à somme nulle. Ce n'est pas vraiment le cas parce qu'on perd quelqu'un qui est au sommet de sa carrière, qui est très productif, qui est très compétent et qui fait de la recherche active, alors que la personne qu'on embauche est nouvelle et inconnue.

Ce n'est donc pas un jeu à somme nulle, et cela coûte aux Canadiens plus de 560 millions de dollars par année. Nous devons régler ce problème, et les IRSC nous aideront à y arriver.

Certains d'entre vous ont peut-être vu l'émission diffusée au réseau Global TV lundi de la semaine dernière, où on interviewait un certain nombre de Canadiens qui étaient allés aux États-Unis pour poursuivre leur carrière. Au fond, tous ces Canadiens auraient préféré rester au Canada, mais pour pouvoir poursuivre leur carrière et profiter des possibilités, ils ne pouvaient pas se permettre de rester ici, alors ils sont partis. C'est une triste situation.

Comme d'autres l'ont dit, monsieur le président, les IRSC sont appuyés avec enthousiasme par une vaste coalition de partenaires de la recherche en santé au Canada. C'est quelque chose d'étonnant qui est arrivé très rapidement. Il a déjà été mentionné qu'on a rédigé cette mesure législative de manière à ce qu'elle soit habilitante et flexible. C'était délibéré. Le processus de concrétisation de la vision des IRSC a débuté il y un peu plus d'un an avec le groupe de travail national et se poursuit aujourd'hui avec le conseil d'administration provisoire.

Monsieur le président et membres du comité, en tant que président de la Coalition pour la recherche biomédicale et en santé, j'ai eu le plaisir d'être membre du groupe de travail national et du conseil d'administration provisoire. Je peux témoigner des longues et intenses discussions et du travail acharné de ce groupe de Canadiens dévoués et responsables. Je peux aussi témoigner de la détermination incontestable du CAP à partir du bon pied afin que les IRSC atteignent leurs objectifs.

Notre rôle en tant que membres du CAP, comme Jonathan Lomas l'a signalé, consiste à conseiller le ministre de la Santé sur la forme et la structure des IRSC. Nous travaillons en étroite consultation avec le milieu de la recherche en santé et avons mobilisé des centaines de personnes et d'organisations dans le processus de transformation du secteur de la recherche en santé au Canada.

La mission des IRSC—et je veux être clair—est très simple, et elle est précisée dans le projet de loi. Cette mission consiste à exceller, selon les normes internationales reconnues de l'excellence scientifique, dans la création de nouvelles connaissances et leur application en vue d'améliorer la santé de la population canadienne, d'offrir de meilleurs produits et services de santé et de renforcer le système de santé au Canada. En termes simples, mesdames et messieurs, nous voulons faciliter le transfert des résultats de la recherche du laboratoire au lit et à la collectivité afin d'aider à améliorer la qualité des soins de santé pour tous les Canadiens.

Les IRSC créeront de 10 à 15 instituts virtuels thématiques qui mettront en rapport les chercheurs d'un bout à l'autre du pays, de St. John's à Vancouver, pour trouver des cures et accélérer les nouvelles découvertes. Ils encourageront la formation de réseaux qui favoriseront la collaboration et l'innovation.

Le projet de loi fait clairement ressortir le fait que les IRSC amélioreront la coordination, le financement et l'organisation de la recherche en santé. Comme d'autres ont déjà parlé de cette question en détails, je n'en dirai pas plus long. Les IRSC élargiront la portée de la recherche en santé en se fondant sur la reconnaissance croissante de l'importance de comprendre les facteurs déterminants sous-jacents à la santé et à la maladie. La stratégie des IRSC, avec les quatre thèmes communs, est fondée sur une démarche d'intégration qui s'appliquera non seulement aux aspects biomédicaux et cliniques de la prévention et du traitement de la maladie, mais également à l'efficacité des systèmes de santé et aux facteurs sociaux, économiques et environnementaux qui sont associés à la santé et à la maladie.

Monsieur le président, ce qui est le plus important, c'est que le IRSC travailleront en partenariat avec les autres intervenants—le secteur bénévole, le secteur privé et le gouvernement—à la mise en place d'un programme amélioré de recherche en santé au Canada. L'un des principes directeurs du travail du CAP a été que tous ceux qui sont associés à la recherche en santé, peu importe leur discipline ou qu'ils travaillent dans une université, un hôpital ou un autre cadre de recherche, aient tout à gagner des IRSC. Non seulement les chercheurs auront accès à un financement accru, mais ils pourront également être en mesure d'établir des réseaux avec des collègues, de déterminer des possibilités de collaboration et de transmettre à d'autres les nouvelles connaissances ainsi engendrées. Comme d'autres l'ont dit ce matin, je prédis que les IRSC deviendront un modèle pour les autres pays.

• 1205

Ainsi, en investissant dans les IRSC, le gouvernement fédéral investit dans la mise en valeur de nouvelles connaissances qui accéléreront la découverte de nouveaux traitements et de nouvelles stratégies de prévention et amélioreront les soins de santé destinés aux Canadiens. Et, plus important encore, comme je l'ai dit plus tôt, grâce aux IRSC, nos plus brillants chercheurs pourront faire carrière ici et ceux de l'étranger seront attirés par les perspectives du Canada dans ce domaine. On assistera donc à un apport de nouveaux cerveaux plutôt qu'à l'exode de nos cerveaux. Les IRSC favoriseront le développement économique au Canada et la création et le maintien d'emplois de haute spécialisation au Canada.

La prochaine phase pour le conseil d'administration des IRSC consistera en la désignation des différents instituts. J'aimerais souligner qu'un document sur la conception des instituts a été déposé sur le site Web des IRSC. Il s'avérera certainement important à étudier et à évaluer au moment de décider de la désignation à donner aux instituts. Le CAP consulte présentement les Canadiens au sujet de la liste d'instituts à créer. Autrement dit, nous invitons les Canadiens à nommer ces 10 à 15 instituts. Nous avons reçu de nombreuses suggestions du genre «Mon institut préféré». Ce n'est pas assez. Nous recherchons une plus grande perspective. Proposez-nous 10 ou 15 noms qui permettront de bien présenter les objectifs des IRSC.

En terminant, la Coalition et les quelque 40 000 chercheurs et cliniciens que nous représentons ont travaillé sans relâche depuis plusieurs années afin de créer et de mettre en valeur un environnement propice à la recherche en santé au Canada. Nous croyons fermement que la création des ICRS permettra au Canada de commencer un voyage collaboratif et coordonné en vue d'assumer sa place légitime parmi les chefs mondiaux de la recherche en santé. Monsieur le président, je vous encourage fortement, ainsi que votre Comité, à faire tout ce qui est en votre pouvoir pour que le projet de loi C-13 soit adopté le plus rapidement possible et que les IRSC puissent entreprendre leurs mandats pour le bénéfice de tous les Canadiens.

Je vous remercie beaucoup.

Le président: Je vous remercie infiniment de vos commentaires docteur McLennan. Nous vous en sommes reconnaissants.

Nous entendrons pour terminer le directeur du laboratoire d'immunologie de l'Institut de recherches cliniques de Montréal, le Dr Rafik-Pierre Sékaly.

Docteur Sékaly je vous prie.

Dr Rafik-Pierre Sékaly (directeur du Laboratoire d'immunologie, Institut des recherches cliniques de Montréal): Je vous remercie, monsieur le président.

[Français]

Mesdames et messieurs les membres du Comité permanent de la santé, je représente aujourd'hui l'IRCM, l'Institut de recherches cliniques de Montréal, institut qui, comme son nom l'indique, tâche depuis plus de 30 ans d'amener les découvertes des laboratoires de recherche au chevet du patient. En ce sens, je me veux aussi un peu un représentant actif de la communauté des chercheurs et j'espère que d'autres chercheurs apporteront leur contribution à ce comité.

Je tiens tout d'abord à remercier le gouvernement du Canada, son ministre de la Santé et le Parlement d'avoir posé un geste aussi important pour développer ce qu'il est convenu d'appeler aujourd'hui l'économie du savoir en créant, par le projet de loi C-13, les Instituts de recherche en santé du Canada.

Depuis plusieurs années, la communauté des chercheurs canadiens ne cesse d'exhorter les différents gouvernements à intervenir pour enrayer l'exode des cerveaux vers des terres plus vertes ou encore la diminution de la compétitivité des chercheurs canadiens et, par conséquent, de la société canadienne à l'échelle internationale. Le geste posé aujourd'hui n'aura donc que des retombées positives et a déjà su s'allier le soutien de l'ensemble de la communauté des chercheurs.

Dans le cycle virtuel de la croissance économique, la recherche a pris une place importante qui est à la base de toute forme de progrès. Nous sommes très heureux de constater que le gouvernement fédéral a pris acte de ces faits et que la recherche médicale et en santé et sa croissance sont devenues maintenant une priorité.

L'essor de la recherche médicale et en santé ne pourra entraîner que des conséquences positives pour la société canadienne. Dans le cas particulier qui nous concerne aujourd'hui, la loi C-13 aura des retombées à court, moyen et long terme sur la santé des Canadiennes et Canadiens ainsi que sur leur prospérité économique.

À la première lecture du projet de loi C-13, on ne peut que se féliciter de l'ensemble puisqu'il vise à créer une nouvelle identité mobilisatrice et intégratrice que sont les IRSC, qui constitueront le nouveau véhicule de cet effort renouvelé en recherche.

Toutefois, il est nécessaire de clarifier dès le début toute ambiguïté qui entacherait l'efficacité de cette initiative. Les remarques que je ferai ici doivent être perçues comme des suggestions qui ne pourront que parfaire un ensemble déjà bien évolué et bien avancé.

• 1210

Ainsi, il me semble important de préciser autant que possible que cette loi vise avant tout un investissement en recherche médicale et en santé. Même si le but ultime de cette recherche est de favoriser la santé des Canadiennes et des Canadiens, il est essentiel, pour éviter toute ambiguïté, de préciser que cette loi doit permettre un investissement progressif et accru en recherche médicale et en santé.

Il est aussi essentiel d'insister, dès le préambule, sur la poursuite de l'excellence. Certes, il faut une recherche multidisciplinaire, mais elle ne doit pas se faire au détriment de l'excellence et, encore moins, de la curiosité scientifique. Il ne faudrait pas tomber dans le piège voulant que toute recherche soit axée vers des impératifs à court terme, car souvent nos recherches peuvent prendre une direction différente de celle anticipée au départ et mener vers de nouvelles pistes. On dit souvent en recherche qu'une réponse à une question ne fait que générer plusieurs nouvelles questions.

Il est aussi essentiel, à mon avis, que les termes «curiosité scientifique» et investigator-initiated research soient clairement mentionnés et valorisés dans le texte de cette loi. L'alinéa 4c) du projet de loi crée une ambiguïté parce qu'il parle de mettre sur pied un programme intégré de recherche. Certes, le but ultime est d'améliorer la santé des Canadiens, mais il ne faut pas, pour les motifs précités, que la route soit tracée d'avance et surtout que le programme soit coulé dans le béton. De par le fait même, la place accordée à la recherche fondamentale, qui aboutit aux découvertes et à la propriété intellectuelle, l'augmentation de la productivité et la création de nouveaux emplois doivent être raffermis.

Il est souvent fait mention de recherche biomédicale. À mon avis, il serait plus judicieux que le terme «recherche fondamentale et biomédicale» soit utilisé autant que possible. C'est cette recherche fondamentale qui a permis l'essor de la biologie moléculaire et qui a abouti à des découvertes essentielles dans la compréhension de tant de maladies: le cancer, le sida et les maladies génétiques. Il faut continuer à raffermir ce domaine, véhicule de tant de progrès.

Au Canada, nous n'avons pas une tradition importante de soutien des efforts de recherche internationaux, non pas parce que nous ne le désirions pas, mais parce que nous n'avons pas toujours disposé de ressources suffisantes. Plusieurs d'entre nous bénéficient de subventions américaines ou internationales. L'inverse n'est pas toujours vrai. Dans ce contexte, il est nécessaire, dans le cadre de la globalisation des marchés, que le Canada prenne une place de choix sur la scène internationale. Les IRSC sont certes un mécanisme de choix, puisque l'interlocuteur américain NIH joue un rôle de leader à l'échelle internationale en accordant des subventions de recherche à l'ensemble de la communauté internationale et en s'impliquant dans l'élaboration d'un agenda de recherche planétaire. Allons-nous disposer des ressources nécessaires pour livrer la marchandise? Quels sont les véhicules dont nous disposerons pour nous impliquer avec d'autres pays dans l'élaboration d'un agenda de recherche international?

Il me semble que l'un des mandats des IRSC et de leurs dirigeants est de recommander un budget aux autorités fédérales et de défendre ce budget. Ce budget, à notre avis, ne doit pas être coulé dans le béton. Il faut assurer un minimum pour ne pas que l'organisme passe par les crises que le CRM a vécues au cours des dernières années. Par contre, il faut qu'il y ait une marge de manoeuvre pour qu'on puisse augmenter les budgets chaque année.

Un mécanisme clair doit donc être mis sur pied. Qui défend les budgets des instituts? Est-ce le président des IRSC ou encore les directeurs de chacun des instituts? Comment les budgets sont-ils divisés entre les instituts? Aux NIH, tant le directeur des NIH que les directeurs d'instituts doivent justifier leurs budgets futurs, mais aussi les dépenses encourues au cours de l'année financière. Il faut donc non seulement approuver un budget, mais aussi participer à son élaboration et à sa défense auprès des autorités concernées.

Pour s'assurer que l'agenda des IRCS sert aussi bien que possible la communauté des chercheurs ainsi que la société canadienne, il est essentiel qu'une majorité des membres du conseil d'administration soient des scientifiques chevronnés, détenteurs eux-mêmes de subventions de recherche et encore bien actifs dans ce milieu. C'est le point 6.4. Aux États-Unis, le directeur des NIH est un prix Nobel, encore chercheur actif, qui dispose de son laboratoire. En France, le directeur de l'INSERM est aussi un chercheur actif. Ceci permet souvent l'établissement de liens plus concrets entre les chercheurs et leurs gestionnaires. Le processus de nomination des membres du conseil d'administration devrait être, à mon avis, clarifié.

Aux points 20 et 21, il est mentionné qu'un des mandats du conseil d'administration serait de recommander la fermeture d'un institut de recherche. Même si cet énoncé de principe est soutenu par une évaluation quinquennale de la performance de chacun des instituts, il serait souhaitable de ne pas en aboutir à une pareille mesure. La fermeture d'un institut pourrait s'avérer déstabilisatrice à plus d'un effet, tant au niveau de la démobilisation des chercheurs de cet institut qu'au niveau de l'image négative que ceci pourrait donner de l'ensemble du programme. La fermeture d'un institut engendrerait aussi un gaspillage de ressource humaines et financières. Il est donc essentiel, à mon avis, de faire un choix judicieux dès le départ afin de ne pas avoir à passer par de telles démarches. Il serait préférable de démarrer ce programme avec un petit nombre d'instituts, qui constituent un ensemble réel et non pas un regroupement artificiel, et d'en ajouter avec le temps plutôt que de céder aux demandes de tous et chacun, ce qui pourrait se terminer en queue de poisson. À cet égard, je ne peux que louer le processus de consultation important qui doit avoir lieu pour le choix de ces instituts.

• 1215

En terminant, il est essentiel de rappeler le rôle historique du Conseil de recherches médicales, qui a si bien servi l'ensemble de la communauté des chercheurs depuis sa création. Il faut aussi souligner le rôle prépondérant des chercheurs qui se battent depuis plusieurs années pour se faire reconnaître par les différents paliers de gouvernement. Finalement, il faut féliciter le gouvernement et son ministre de la Santé pour avoir élaboré cette loi.

Cette loi qui consacre la mise sur pied des IRCS est fondamentale pour l'avenir du Canada. Il est donc essentiel de lui apporter les quelques petits ajustements nécessaires pour que nous soyons assurés d'un départ positif qui permettra d'atteindre dans un proche avenir les objectifs ambitieux de ce nouveau programme. Merci.

[Traduction]

Le président: Merci beaucoup, docteur Sékaly. Je vous remercie de cet excellent exposé.

Nous aurons des questions pour vous dans un instant, mais auparavant, j'aimerais faire savoir à toutes les personnes présentes ici aujourd'hui, et particulièrement aux membres du Comité, que nous avons visité trois installations jeudi dernier. Nous nous sommes rendus à l'Institut de cardiologie d'Ottawa, au Loeb Health Research Institute et à l'Hôpital d'Ottawa. Nous avons trouvé très intéressant de pouvoir constater par nous-mêmes ce qui se passe dans ces installations de recherche.

J'aimerais bien sûr remercier M. Pierre Cadieux, le directeur exécutif du Conseil de la recherche médicale au Canada qui est parmi nous aujourd'hui, ainsi que Mme Rachel Grondin qui nous a beaucoup aidés. Ce fut une expérience très utile. Nous en sommes très reconnaissants.

L'autre chose que j'aimerais souligner, c'est que nous avons des sandwichs ici pour les membres du comité et toutes les personnes présentes. Comme c'est un déjeuner de travail, ne vous gênez pas pour vous servir quand vous en aurez envie.

Passons maintenant aux questions. Monsieur Elley, voudriez- vous commencer je vous prie.

M. Reed Elley (Nanaimo—Cowichan, Réf.): Je vous remercie, monsieur le président.

J'aimerais tout d'abord vous remercier tous de votre présence ici aujourd'hui. J'ai été heureux d'entendre les commentaires que vous avez formulés sur la mesure législative à l'étude et sur la création des IRSC. Il est assez rare que nous ayons l'occasion de tenir une manifestation de soutien à une mesure législative qui nous est présentée, mais il semble bien que ce pourrait être le cas aujourd'hui.

Le président: Pouvons-nous reprendre vos paroles ?

Des voix: Oh, Oh.

M. Reed Elley: Bien sûr vous le pouvez. Nous avons déjà dit que les réformistes sont très heureux que le gouvernement nous présente un projet de ce genre et nous sommes toujours prêts à féliciter le gouvernement quand il fait quelque chose de bien. Ce n'est pas souvent le cas.

Des voix: Oh, Oh.

M. Reed Elley: Toutefois,...

Une voix: Toutefois !

Des voix: Oh, Oh.

M. Reed Elley: Le proverbial toutefois.

Certains d'entre vous ont brandi des petits drapeaux rouges, que nous avions d'ailleurs déjà soulevés à la Chambre. Je pense par exemple au Dr Boyle à qui j'aimerais poser une question ainsi qu'à M. Lomas à qui j'aimerais également poser une question.

Nous avons bien sûr vu dans d'autres organisations qui font du bon travail que les coûts administratifs finissent par devenir de grandes préoccupations et vous avez soulevé la question sur ce point, docteur Boyle. Croyez-vous qu'il serait sage de modifier la loi pour préciser que les coûts administratifs ne devraient jamais dépasser 5 p. 100 du budget annuel ?

Dr Pierre Boyle: Il est certain que les chercheurs s'attendent à ce que la majeure partie des nouveaux investissements soient consacrés à la création d'IRSC afin d'appuyer directement la recherche. Il n'y a pas de chiffre magique, mais si nous nous penchons sur les coûts administratifs actuels des organismes national et provincial de financement de la recherche, nous constatons qu'ils varient d'un peu plus de 3 p. 100 à un peu plus de 5 p. 100. Pour la plupart d'entre nous qui travaillons à la gestion de ce genre d'organisme, 5 p. 100 semble être une proportion raisonnable.

Que le plafond soit établi dans la loi, dans le règlement ou dans toute autre forme de mesure administrative, je crois qu'il serait rassurant pour la communauté scientifique de reconnaître que cette protection existe et que compte tenu du caractère innovateur de ces instituts, nous ne nous engageons pas dans une aventure où le spectre des dépenses administratives risque d'entraver les bénéfices à venir des IRSC.

• 1220

M. Reed Elley: Je vous remercie. Je sais que le Conseil de recherches médicales a un très bon dossier à cet égard. Toutefois, je m'intéresse à vos réactions à cet égard.

Ma deuxième question s'adresse à vous, monsieur Lomas. Vous avez soulevé un point très intéressant en ce qui a trait à la nécessité de faire passer la recherche au niveau pratique. Quelqu'un d'autre en a parlé. Je crois que c'était le Dr McLennan. Et bien sûr, du point de vue du Canadien moyen, c'est ce que nous espérons voir se réaliser. Nous ne nous contenterons pas de dépenser de l'argent pour mener des recherches qui ne bénéficieront pas en fin de compte aux Canadiens. Toutefois, il peut arriver dans le cours du processus de recherche que des problèmes surgissent et il y a parfois des dépenses qui sont faites et qu'on ne pourra jamais récupérer.

Croyez-vous que les IRSC proposés pourrons faire ce que vous prévoyez ou y a-t-il quelque chose d'autre qui doit être fait à cet égard?

M. Jonathan Lomas: Je vous remercie beaucoup de me donner l'occasion de parler de mon sujet préféré.

Il est évident que les IRSC disposent de certains des outils nécessaires. Ils auront toutefois besoin de ressources.

J'aimerais dire quelques mots sur la question que vous avez posée à mon collègue Pierre Boyle. La question des limites à imposer, comme les 5 p. 100 pour les frais administratifs, a entraîné toutes sortes de confusions sur ce qui doit être considéré comme des coûts administratifs. Ainsi, par exemple, dans le cadre des budgets actuels des conseils de recherche, il n'est pas clair que ces derniers ont le droit de financer certaines de ces activités de transfert en raison des structures précédentes qui ont été conçues il y a vingt ou trente ans.

Ils doivent maintenant se rendre compte que cela prend du temps pour mettre les recherches en pratique. Cela ne se fait pas tout seul. D'autres outils seront donc nécessaires. On a eu tendance à confondre cela avec les dépenses administratives. Il n'en est rien. C'est un message que nous tentons très clairement de faire passer. Il ne s'agit pas de dépenses administratives. C'est une activité secondaire qui permet de garantir que les recherches effectuées auront des répercussions réelles en pratique.

Toutefois, pour en revenir à votre question principale, je dois dire qu'il est impossible qu'un seul organisme puisse entreprendre la tâche isolément. Cela fait clairement partie de l'esprit de partenariat des IRSC. Les systèmes provinciaux de soins de santé se situent à des points névralgiques au Canada. Ces systèmes provinciaux doivent collaborer de près avec les IRSC dans le cadre plus large des recherches médicales pour que les patients ainsi que les gestionnaires qui administrent ces systèmes puissent en retirer quelque profit.

Nous devons également établir des partenariats importants avec certains des plus importants fournisseurs de savoir dans notre système canadien de santé, c'est-à-dire les médias, ces gens qui, à l'heure actuelle, tendent à viser particulièrement les victimes évidentes, soit les résultats de recherche porteurs. Toutefois, ces résultats, comme ceux dont j'ai parlé précédemment en rapport avec les infirmières praticiennes et l'offre de soins de premier contact, retiennent peu l'attention des médias à l'heure actuelle. Aussi, nous devons également,—et la Fondation canadienne de la recherche sur les services de santé l'a fait pour sa part—travailler de près avec les médias pour qu'ils deviennent des fournisseurs de savoir mieux informés dans le domaine de la recherche médicale en général et moins sélectifs dans les sujets dont ils traitent.

Enfin, les principaux intervenants des systèmes de santé en général doivent effectuer des investissements importants. À mon avis, il est peu reluisant qu'à la fin des années 90 et à la veille du XXIe siècle, nous ayons au Canada des organismes régionaux de soins de santé qui coûtent des milliards de dollars et dont les budgets ne prévoient rien au chapitre des travaux de R-D. Les organismes qui pourraient utiliser ces recherches doivent s'engager dans des projets réciproques. Ils doivent être en mesure d'obtenir les renseignements dont ils ont besoin pour effectuer eux-mêmes les recherches et devenir des consommateurs avertis des recherches sur la santé effectuées dans les IRSC.

Ainsi, pour être en mesure de transférer de façon efficace les activités de recherche dans la pratique, il est très important que nous établissions des partenariats avec d'autres secteurs du savoir et avec ceux qui s'occupent de communications et des partenariats et des programmes de formation avec ceux qui transmettent les connaissances tirées de ces recherches à ceux qui peuvent les utiliser et que ceux qui sont en mesure de prendre les décisions affectent des ressources à ces programmes.

Le président: Je vous remercie beaucoup.

[Français]

Avez-vous des questions, monsieur Ménard?

• 1225

M. Réal Ménard (Hochelaga—Maisonneuve, BQ): Monsieur le président, j'ai toujours des questions. Vous savez que j'aime la vie. Comme nous avons entendu des exposés intéressants, j'en poserai quatre ou cinq en rafale.

Premièrement, j'aimerais que vous nous expliquiez votre compréhension de l'autonomie de fonctionnement des instituts. Quand on lit le projet de loi, on constate que beaucoup de pouvoirs son dévolus au conseil d'administration. Comment percevez-vous son autonomie ainsi la division du travail entre le conseil d'administration et les différents instituts qui seront créés et qu'on ne définit pas comme des instituts mais plutôt comme des divisions dans le projet de loi?

Deuxièmement, quelle est votre compréhension de la façon dont se fera l'allocation des ressources? Je pense que c'est le Dr Sékaly qui en a parlé. Il est important d'y revenir.

Troisièmement, je voudrais vous rappeler que, s'agissant du Québec, il y a présentement un enjeu très particulier, qui est l'élaboration d'une politique scientifique. Je ne veux pas passer sous silence le fait que le Québec a investi, dans son dernier budget, 406 millions de dollars sur deux ans dans la recherche, ce qui est considérable puisqu'on parle de 500 millions de dollars pour tout le Canada. J'aimerais que le Dr Boyle nous fasse voir les forces du Québec et nous dise comment il peut s'inscrire dans cette dynamique.

Voici ma dernière question. S'il y a des infrastructures nouvelles à créer, à partir du moment où on crée des thématiques et où il y a des chercheurs qui sont en réseau, comment atteindra-t-on l'équilibre et comment fera-t-on les arbitrages liés à la création de nouvelles structures? Comprenez-vous que dans le mandat des instituts pourrait leur permettre de créer de nouvelles infrastructures? Je voudrais connaître votre point de vue à ce sujet.

Si on a du temps, j'aimerais aussi que le Dr Sékaly de l'Institut des recherches cliniques de Montréal me donne son point de vue sur la nécessité d'avoir un institut précis sur le sida. Souhaite-t-il plutôt que cela soit inscrit dans quelque chose de plus large?

Le président: Merci beaucoup.

Docteur Boyle, s'il vous plaît.

Dr Pierre Boyle: Je vais vous parler des forces du Québec ainsi que de la façon dont le Québec voit son interaction dans le domaine de la recherche.

Bien sûr, le Québec travaille à la mise au point d'une politique des sciences et de l'innovation, dans laquelle on abordera un certain nombre de préoccupations que tous partagent, notamment la propriété intellectuelle, le transfert technologique et d'autres.

Le Québec avait une particularité au cours des 30 dernières années. Les organismes subventionnaires comme le FRSQ ont surtout investi dans des infrastructures de recherche et dans le développement des cerveaux, et beaucoup moins dans le financement direct de projets de recherche, ce qui nous a permis de mettre en place une vingtaine de centres de recherche de pointe dans les centres hospitaliers à caractère universitaire.

Plus récemment, le Québec s'est doté de réseaux thématiques de recherche, un peu à l'image du modèle des IRSC, réseaux visent à développer non seulement des collaborations, mais aussi des infrastructures communes et des plates-formes technologiques pour la réalisation de la recherche qui puissent servir à l'ensemble des chercheurs, quelle que soit leur université, quel que soit leur milieu de pratique, qu'il s'agisse du sida, de la santé mentale, de la réadaptation ou du vieillissement, pour ne mentionner que ceux-là. Ces réseaux thématiques sont fondés sur les priorités de la politique de santé et de bien-être du Québec. Ils visent, à toutes fins pratiques, à créer des maillages entre les chercheurs pour qu'ils puissent participer à l'effort de recherche de façon collective, lorsque c'est approprié, en tenant pour acquis que la concurrence doit se faire davantage entre les chercheurs du Québec et ceux de Boston, de Stanford ou de Düsseldorf, plutôt qu'entre les chercheurs de l'Université Laval, de l'Université de Sherbrooke, de McGill et de l'Université de Montréal. Cette concurrence est certes saine, mais elle est contreproductive dans certains cas.

Notre expérience des réseaux thématiques de recherche, malgré des difficultés de démarrage, s'est avérée jusqu'à maintenant extrêmement positive, et nous nous réjouissons de voir qu'une approche similaire est proposée au niveau des Instituts de recherche en santé du Canada.

• 1230

Une chose nous pousse à revoir la façon de soutenir la recherche. Nous pensons que le caractère novateur du projet des IRSC, qui permet de rassembler des gens des domaine social, culturel, épidémiologique et de la recherche fondamentale dans un maillage réel, bien que virtuel, est extrêmement prometteur. Cela a entraîné au cours des derniers mois, au Québec, une réflexion des organismes subventionnaires. Par exemple, on s'est rendu compte que dans notre réseau thématique de la réadaptation, il y avait très peu de gens des sciences sociales mais aussi très peu de gens du génie, par exemple. Des gens qui travaillent dans les facultés de génie font de la recherche sur des applications qui sont extrêmement pertinentes pour la réadaptation des patients. Ces chercheurs ont été plutôt isolés jusqu'à présent. Le genre de maillage que le projet des IRSC propose est certainement un pas dans la bonne direction, et déjà cette idée commence à transformer la façon dont la recherche s'exécute.

Pour ce qui est de la question de l'autonomie des instituts et des chercheurs, quand on parle de recherche orientée et de recherche libre, la création même des instituts sur une base thématique donne déjà une certaine orientation. Il est toutefois souhaitable qu'à l'intérieur de chacun des instituts, un maximum de ressources soient consacrées à la recherche libre, parce que la recherche se bâtit d'abord sur l'expertise des chercheurs et que cette expertise, comme vous le savez, est très longue à acquérir.

On ne change pas de costume parce que la mode est différente. Les chercheurs ne changent pas leur expertise parce qu'il y a un agenda de recherche différent. J'espère que cet agenda de recherche va rester assez large et qu'on ne cédera pas à la tentation d'établir une liste d'épicerie qu'on va proposer aux chercheurs d'un institut. Si tel était le cas, ce serait une catastrophe. La recherche pousse comme une fleur: elle doit être nourrie par en-dessous; ce n'est pas en tirant dessus qu'on la fait pousser. Cette image peut être appliquée à chacun des instituts.

[Traduction]

Le président: Monsieur McLennan et docteur Sékaly, avez-vous quelque chose à ajouter ?

Dr Barry McLennan: J'aimerais répondre à certaines des questions qui ont été posées par M. Réal Ménard. Je crois que le Dr Doyle a répondu au moins en partie à la question qui porte sur l'autonomie, mais j'aimerais rappeler au comité les objectifs primordiaux des ICRS. Il ne s'agit pas pour nous de poursuivre nos activités courantes, mais bien de mettre au point des activités de recherche conjointes et innovatrices.

Il est vrai que les instituts sont virtuels, mais les chercheurs eux sont bien réels. Les directeurs des instituts resteront dans leur secteur d'attache et je crois qu'un bon nombre d'entre eux seront installés au Québec. Comme vous l'avez expliqué, les activités de recherche qui ont été menées là dans le secteur de la santé sont plutôt admirables.

Toutefois, il reste des objectifs qui sont primordiaux pour les ICRS et il appartiendra à mon avis au conseil d'administration de voir à ce que les instituts les respectent. Autrement dit, les instituts devront voir à respecter les quatre thèmes qui visent la réduction des coûts, à réunir les services biomédicaux, cliniques et de santé et ainsi de suite.

J'aimerais vous donner un exemple simple. J'ai fait des recherches sur le cancer dans le domaine des sciences biomédicales et c'est un aspect important de la recherche sur le cancer. Mais il y a également une partie importante qui s'adresse aux cliniciens.

Si nous pouvions persuader les jeunes Canadiens de ne pas commencer à fumer, nous pourrions réduire instantanément les taux de morbidité et de mortalité attribuables au cancer. Qu'est-ce que cela signifie ? Cela relève des sciences du comportement. C'est la raison pour laquelle nous voulons réunir tous ces chercheurs pour étudier ce problème et plusieurs autres également. Voilà l'élément d'intégration qui doit être respecté et mis en «oeuvre dans ce programme.

Pour ce qui est des fonds alloués, j'aimerais souligner que le principe fondamental des ICRS sera de récompenser l'excellence dans le domaine de la recherche. Autrement dit, chacun des chercheurs se verra remettre des fonds dans le cadre d'un processus d'évaluation par des pairs. Ces mêmes chercheurs devront identifier un ou plusieurs instituts avec lesquels ils voudraient travailler. Le financement de ces instituts sera donc effectué en tandem. Je crois qu'une bonne partie de tout cela sera fait à l'instigation de l'investigateur. Deuxièmement, au fur et à mesure que les instituts se développeront et mettront leurs programmes sur pied, ils pourront demander des fonds pour des initiatives ou des programmes particuliers. Le financement se fera donc de deux façons.

Je crois que vous avez également parlé de révision par les pairs. J'ai souligné que le processus d'évaluation par les pairs se ferait de façon centralisée. Les instituts n'auront pas tous un comité d'évaluation. Le processus se fera au niveau du comité d'administration. Je crois que c'est essentiel que cela fonctionne ainsi. C'est à mon avis très important pour que le processus d'évaluation par les pairs puisse toucher tout le secteur de la recherche.

• 1235

Si je peux me permettre, j'aimerais, monsieur le président, répondre à une question posée par M. Reed Elley en rapport avec les coûts.

Lorsque nous avons commencé à parler de tout cela, nous nous sommes dit qu'il fallait faire preuve de modération et consacrer la majeure partie de fonds dont nous disposions à la recherche. L'objectif de 5 p. 100 est louable, mais comme l'a souligné Jonathan Lomas, nous ne pouvons nous contenter de poursuivre nos opérations courantes. Nous voulons réunir les divers intervenants de la recherche. Nous voulons nous assurer en mettant sur pied une médecine basée sur la recherche au pays que nous tirons profit des résultats de la recherche à tous les niveaux. Des résultats de recherche qui restent sur les tablettes ne servent à rien.

Il faut donc tenir compte des coûts qui seront engendrés pour la diffusion de la recherche et l'intégration des résultats. À mon avis, ces dépenses font partie du processus de recherche et elles ne doivent pas être considérées comme des coûts administratifs.

L'objectif de 5 p. 100 est donc acceptable, mais il ne faut pas oublier toutefois qu'il s'agit d'une nouvelle façon de faire. Je crois qu'en fin de compte les coûts seront moins élevés pour les Canadiens qu'ils ne le sont à l'heure actuelle selon notre fonctionnement individuel.

Enfin, si je peux me permettre, j'aimerais rappeler l'importance de la centralisation de tout ce processus. La révision par les pairs en fait partie, tout comme le transfert du savoir. Je ne sais pas si vous avez eu la chance de regarder tous les documents de travail. Tout cela ne fait pas partie de la mesure législative, mais bien des documents de travail. Je peux vous assurer que nous avons passé un grand nombre d'heures à essayer de déterminer comment nous pourrions nous y prendre pour y arriver. Il y a quatre grands thèmes communs ainsi que plusieurs processus centralisés, soit la révision par les pairs, la diffusion du savoir, les partenariats et, élément très important, le développement des entreprises. Ce sont également là les principales activités du conseil d'administration.

Je vous remercie.

Le président: Je vous remercie de ces commentaires.

Docteur Sékaly, aviez-vous quelque chose à ajouter ?

[Français]

Dr Rafik-Pierre Sékaly: Pour répondre à la question sur l'institut de recherche sur le sida, ma démarche personnelle a été un peu ambiguë dans un certain sens, et je l'ai un peu indiqué dans mon exposé initial.

Je crois que l'important est de démarrer avec des instituts qui soient basés sur des acquis et non pas avec des instituts qui soient un méli-mélo de beaucoup de choses. Il est important de mentionner que la communauté de recherche sur le sida a toujours fonctionné de façon multidisciplinaire. Le but des IRCS est d'avoir des institutions qui vont fonctionner dans une thématique multidisciplinaire. C'est quelque chose que la communauté de recherche sur le sida fait depuis 15 ans. Elle le fait très bien. Cela se fait à différents niveaux, tant au niveau de la dissémination des connaissances qu'à celui de la recherche. C'est une recherche intégrée, etc.

D'un autre côté, il ne faut pas multiplier le nombre d'instituts et faire en sorte que chaque groupe d'intérêt ait son petit institut. C'est là que cela devient un peu ambigu.

Personnellement, je vois très, très bien la création d'un institut de recherche sur le sida et autres maladies associées parce que, comme on dit en anglais,

[Traduction]

Vous en tirerez le meilleur rendement.

[Français]

parce qu'il y a déjà quelque chose qui fonctionne très bien. Si jamais on mêlait cela à quelque chose de plus grand, on risquerait de perdre cette intégrité.

Le président: Merci beaucoup.

[Traduction]

Jackson, vous avez une question à poser.

M. Ovid L. Jackson (Bruce—Grey, Lib.): Je vous remercie, monsieur le président.

Tous ces commentaires sont très intéressants. Je crois que c'est une étape importante que vous franchissez. J'aimerais féliciter chacun d'entre vous pour ce que vous apportez à votre pays et à votre collectivité.

C'est un processus que tous les ministères devraient probablement suivre, mais vous avez tout un défi à relever. Je pourrais imaginer par exemple le Vérificateur général se pencher sur vos dossiers et conclure que tout cela est inutile. Comme les gens n'y comprennent pas grand chose aux sciences et que vous vous savez ce que vous avez à faire à titre de chercheurs, il est très important que nous n'en venions pas à des conclusions hâtives ou prématurées.

Je me rappelle d'un petit-déjeuner réunissant des personnalités auquel j'ai assisté récemment. L'un des scientistes, qui avait recours aux virus dans la lutte contre le cancer, a rapporté qu'un de ses étudiants avait fait cette expérience à l'envers. Il lui a demandé de ne pas le faire, mais ce dernier a insisté pour continuer et il a ainsi obtenu des résultats qui ont soulevé toutes sortes de controverses. Le scientiste lui a alors demandé de recommencer. Il s'est en fait rendu compte qu'il s'agissait de quelque chose d'important dans le domaine de la recherche sur lequel il se penchait.

• 1240

Je pense que c'est notre bon ami M. Elliott qui a dit qu'il vous donnerait une tape dans le dos, mais j'aimerais vous rappeler qu'il n'y a pas loin entre une tape dans le dos et un coup de pied au derrière.

Des voix: Oh, Oh.

M. Ovid Jackson: J'ai trouvé intéressantes les réflexions de M. Lomas sur les médias. C'est probablement plus sexy de parler d'un homme de 120 ans qui fait encore l'amour, alors on va le trouver et on lui demande comment ça se fait qu'il soit encore en vie à 120 ans et en bonne santé. Il répond: «Vous savez, je bois du vin, jamais d'eau.» On lui demande: «C'est pour ça que vous êtes encore en vie?» Ce à quoi il répond: «Oh oui, mon corps est en acier et l'eau fait rouiller l'acier.»

Je suis sûr qu'en tant que chercheur, vous aimeriez mettre la main sur ses gènes, les ajouter à votre patrimoine génétique et faire en sorte que tout le monde vivent jusqu'à 120 ans.

J'ai deux questions, je pense.

Le président: Nous sommes prêts.

M. Ovid Jackson: Premièrement, un organisme comme le vôtre doit se développer, et la seule façon dont ce soit possible est avec un apport de talents nouveaux et d'argent. En dépit du fait que vous allez dépenser vos fonds de recherche, et peut-être faire profiter les chercheurs et les universités de cet argent, je pense qu'il devrait en partie revenir dans ce fonds et que le fonds devrait croître sous votre direction et sous la surveillance... Je ne veux pas vous dire comment utiliser votre argent et tout ça. Je pense que c'est important. Vous avez décidé entre vous que c'était quelque chose que vous pouvez faire.

Mais à moins de faire fructifier cet argent—au lieu de vous contenter d'attendre qu'il vienne du gouvernement—je ne pense pas que vous aurez beaucoup de succès car tout dépendra de qui est au pouvoir, de ce que le gouvernement veut faire, de son budget, si c'est un bon ou un mauvais budget. En tant qu'organisme scientifique—et il y a du bon là-dedans—je pense qu'une partie de la solution est que vous devriez utiliser une partie de votre argent pour assurer votre croissance dans la direction de votre choix—et je ne sais pas comment on pourrait y parvenir.

L'autre partie de ma question concerne la diffusion de l'information. L'exemple que j'ai donné du vieillard de 120 ans est beaucoup plus attrayant pour les médias, mais essayer de faire passer le message que fumer des cigarettes va vous tuer et qu'il existe un lien direct entre la cigarette et le cancer du poumon... comment s'y prendre?

Telles sont les questions que je voulais vous poser.

Le président: Eh! bien, qui veut commencer?

M. Greg Thompson (Nouveau-Brunswick-Sud-Ouest, PC): Pourrai-je poser la première question à M. Jackson?

Combien coûte ce vin par bouteille et où peut-on...?

Des voix: Oh, oh!

Le président: Docteur McLennan, voulez-vous répondre?

Dr Barry McLennan: Je vais essayer, monsieur le président.

La question de savoir comment en avoir pour son argent, qui est je pense ce que vous vous demandez, est légitime. Nous en sommes tous conscients, ayant traversé une période très difficile pendant laquelle nous avons été témoins de l'érosion de la base de recherche de notre pays... Permettez-moi de féliciter le gouvernement d'avoir tourné la page il y a un an en mettant sur la table un nouveau programme, la FCI, qui porte sur l'infrastructure, et maintenant les IRSC, pour la recherche. Ce sont des initiatives formidables qui révèlent l'engagement et la résolution du gouvernement de créer des conditions propices à la recherche en santé dans la collectivité.

Ceci dit, on n'en a jamais assez, n'est-ce pas? Je pense qu'il incombe au conseil d'administration de penser à diverses façons d'établir des partenariats avec d'autres secteurs, entre autres, le secteur privé et les organismes caritatifs oeuvrant dans le domaine de la santé, en vue d'utiliser cet argent comme levier financier. C'est un débat que nous avons déjà engagé. En réalité, ce genre de partenariat existe déjà dans le cadre des programmes du CRM. L'idée n'est pas nouvelle. On la retrouve dans le partenariat entre le fédéral et les provinces. Si les deux ordres de gouvernement contribuent au financement, le programme fonctionne. On la retrouve également dans le secteur universitaire. C'est une question tout à fait légitime.

M. Ovid Jackson: Si vous me le permettez, je serai bref. Vous avez découvert une technique grâce à laquelle une personne qui s'est cassé la cheville n'a pas besoin de radiographie. Est-ce que vous touchez quelque chose à chaque fois qu'un médecin l'utilise? Pourriez-vous toucher 5 $ ou quelque chose du genre, que vous réinvestiriez dans l'institut? C'est ma première question. La deuxième, comment diffuser l'information afin qu'on ne fasse pas tout plein de radiographies alors que vous avez déjà trouvé un moyen...

Dr Barry McLennan: J'ai eu cette discussion avec des économistes de la santé. Bien entendu, nous leur disons que s'ils investissent dans le recherche en santé, ils obtiendront de meilleurs traitements ou un meilleur système pour faire les choses, ils réduiront le coût des soins de santé. Ils disent qu'ils n'arrivent jamais à déterminer les coûts, à trouver où passe l'argent, mais il est là, bien sûr. Dans notre pays, la maladie coûte plus de 5 000 $ par an à chacun d'entre nous. Les personnes en bonne santé travaillent. Elles créent de la richesse. Elles font des choses dans leur localité. Les malades ne font rien de tout cela. Donc, réduire le fardeau de la maladie est une mesure d'économie. Peu m'importe si les gratte-papier n'arrivent pas à trouver où passe l'argent. Il tombe sous le sens que si les gens sont en meilleur santé, ils travaillent, ce que ne peuvent faire les gens en mauvaise santé.

Le président: Je vous remercie beaucoup.

Monsieur Giroux avez-vous quelque chose à ajouter à cette discussion?

Et vous, ensuite, monsieur Lomas?

• 1245

M. Robert Giroux: Je vous remercie, monsieur le président.

J'aimerais ajouter que, de notre côté, nous voyons bien entendu les avantages immenses des IRSC. Ils ont avant tout comme objectif primordial d'améliorer la santé des Canadiens. C'est un objectif important car, si on considère le coût élevé des soins de santé dans ce pays, on sait que les améliorations qui résulteront de la recherche contribueront grandement à réduire l'ensemble des coûts et, par conséquent, les pressions sur le gouvernement fédéral et sur les provinces.

Le deuxième gros avantage, bien entendu—je pense que M. Jackson y a fait allusion—est probablement les retombées de la commercialisation. Nous croyons qu'il est important de commercialiser les résultats de la recherche. Nous croyons qu'ils doivent être commercialisés de façons à ce que les Canadiens en bénéficient.

Mais ce qui est réellement plus important que ce qui pourrait se révéler n'être que des dividendes minimes... notre expérience de la commercialisation dans les universités est que les dividendes pour ces dernières ne sont pas substantiels. Les dividendes sont beaucoup plus significatifs si on encourage l'industrie canadienne à s'établir au Canada, à exploiter les résultats de la recherche, à les développer, à les commercialiser et à les vendre à l'étranger. De la sorte, on crée des emplois. On renforce la collectivité elle-même. Pour nous, c'est ça qui est très important.

Évidemment, c'est l'un des aspects des effets de l'investissement dans la recherche que le gouvernement fédéral veut développer, et à juste titre, mais il faut que ce soit fait en ayant recours au dynamisme qui existe dans les institutions et parmi les chercheurs, ainsi qu'à la capacité de ces institutions de commercialiser les résultats de la recherche.

Je tiens à souligner ces deux énormes dividendes de la création des IRSC.

Le président: Je vous remercie beaucoup.

Monsieur Lomas.

M. Jonathan Lomas: Ces questions sont évidemment liées. Vous les avez d'ailleurs posées de cette façon: la diffusion et la nécessité d'aller chercher d'autres fonds.

J'ai deux choses à dire. Premièrement, il existe déjà suffisamment d'obstacles qui empêchent le produit de la recherche de parvenir au stade de l'application, et je ne voudrais pas qu'on ajoute d'autres obstacles financiers à ce processus. Si on songe à ne financer que certaines des activités de diffusion et de transfert alors que d'autres bénéficient de partenariat ou d'un effet de levier, ou si on fait payer une redevance comme dans l'exemple du protocole d'Ottawa concernant les blessures à de la cheville que vous avez donné—je vois que vous avez déjà sorti votre carte de votre portefeuille—nous allons faire payer et ne donner accès qu'à ceux qui ont les moyens d'acheter en gros ou autre. Je pense que nous devons éviter de ne rajouter des obstacles au processus de diffusion.

M. Ovid Jackson: Ce n'est pas là que je voulais en venir. L'une des choses qui nous manque au Canada je crois... Si on regarde les universités de la Ivy League, comment s'y sont-elles prises? Au début, elles étaient toutes petites. Puis, elles ont attiré beaucoup de gens brillants. Elles ont tout un système de recrutement. Elles sillonnent le monde, choisissent les meilleurs et leur offrent des bourses—et les gens qui veulent étudier dans ces universités y vont de toutes façons.

Je ne veux pas casser du sucre sur le dos des chercheurs, mais parfois ils ont la tête dans les nuages et ils oublient la réalité. La réalité, c'est que le gouvernement n'a pas toujours d'argent à leur donner. Donc, en partie, ce que vous devez faire, c'est trouver de l'argent. Avec le genre de choses que vous avez, vous pouvez générer des fonds. Vous devriez réfléchir. Vous savez que si vous investissez davantage, vous obtiendrez plus de résultats. En dépit du fait qu'un chercheur peut mettre très longtemps avant de faire une découverte, ce que nous avons du mal à comprendre... et que les gens trouvent que c'est du temps perdu, vous, vous savez que c'est important.

Je ne veux pas enlever ça aux chercheurs, mais je pense que, en tant qu'organisation, vous devez croître. Et en partie, il faut que vous trouviez le moyen de le faire.

M. Jonathan Lomas: C'était mon deuxième point, c'est-à-dire l'idée que nous devons développer notre institution. Il faut que nous fassions très attention à la façon de nous y prendre, car si nous allons seulement là où se trouve l'argent... à l'heure actuelle, dans notre pays, la majorité des fonds disponibles pour augmenter le financement de la recherche se trouve dans le secteur privé. Oui, il est vrai que c'est formidable de pouvoir établir des partenariats avec le secteur privé, et je ne suis certes pas opposé à une commercialisation bien faite, mais par ailleurs, je vous mettrais en garde car dès que le secteur privé est mêlé de près ou de loin au processus de recherche, il y a des problèmes.

Le premier est que le secteur privé a, en recherche, des objectifs très différents de ceux du secteur public. Je vais vous en donner deux exemples récents.

L'une de mes anciennes collègues de McMaster—je faisais moi- même de la recherche sur le services de santé avant de venir à Ottawa grossir les rangs de la bureaucratie de la recherche en santé—a récemment vécu une expérience extrêmement désagréable. Elle faisait partie d'une équipe qui essayait de démontrer qu'il existait dans une certaine classe de médicaments des produits qui étaient tout aussi efficaces et ne coûtaient pas aussi chers que le médicament de choix. La compagnie pharmaceutique propriétaire du médicament de choix lui a intenté un procès et a essayé de l'empêcher de publier le résultat de ses recherches.

• 1250

Nous sommes tous au courant de l'affaire Nancy Olivieri à l'hôpital des enfants de Toronto. Il existe toute une série d'exemples de ce genre; une fois qu'on fait appel au secteur privé comme bailleur de fonds et pour siéger au conseil d'administration d'organismes comme les IRSC, on se trouve confronté à de graves questions de brevet qui ne sont pas très compatibles avec l'approche collective du financement public que nous avons choisie, entre autres, pour les IRSC.

J'appuie entièrement votre idée. Oui, nous avons besoin de plus d'argent. Dans ma propre organisation, avec un budget annuel de 9 millions de dollars, nous sommes arrivés à aller chercher 6 millions de plus, pour un budget annuel total de 15 millions de dollars, mais c'est surtout par le biais d'une collaboration de type non-interventionniste, sans lien de dépendance, avec d'autres organismes publics qui peuvent utiliser le résultat de nos travaux.

M. Ovid Jackson: C'est un défi pour votre conseil d'administration d'éviter de vendre votre âme au diable.

M. Jonathan Lomas: Exactement.

Le président: Monsieur Jackson, vous avez eu votre tour. Je pense que M. Hill aimerait pouvoir intervenir. Peut-être pourriez- vous mettre un peu d'eau dans le vin de M. Jackson.

M. Ovid Jackson: Je ne suis pas certain que ce soit une bonne idée. Je ne refuserais pas un verre de vin, monsieur le président.

Une petite mise en garde. C'est très bien d'établir des partenariats avec le secteur privé, et je pense que les chercheurs le savent, mais il existe aussi la possibilité pour le gouvernement de faire des économies dans le domaine des soins de santé, sans pour autant commercialiser une invention. C'est d'ailleurs l'une des questions qu'a soulevées M. Jackson. Il a parlé du protocole d'Ottawa concernant les blessures de la cheville qui a été mis au point à l'Institut Loeb pour la recherche médicale. Il permet d'économiser le prix des radiographies qu'on n'a pas à faire, ce qui se traduit pour le gouvernement par une diminution des coûts de soins de santé, mais il n'assure pas un revenu régulier à son inventeur. Les sommes ainsi économisées sont équivalentes à l'ensemble du budget annuel de l'institut Loeb; elles représentent le prix des radiographies de la cheville qu'on n'a pas eu à faire dans l'est de l'Ontario.

La recherche peut donc produire des dividendes énormes sans pour autant qu'on ait à former un partenariat avec une entreprise commerciale pour vendre un produit. Les économies peuvent être de deux sortes, et il ne faut pas l'oublier.

Il y a un autre exemple qui s'envient, le tout nouveau protocole d'Ottawa concernant les blessures du genou. Je n'ai pas encore de chiffres là-dessus, mais les économies pour le gouvernement peuvent être considérables quand on applique les résultats de la recherche aux soins de santé.

Le président: Monsieur Hill, pourriez-vous mettre ces protocoles à la disposition du comité?

M. David Hill: Bien entendu.

Le président: M. Thompson a fait preuve de beaucoup de patience. Monsieur Thompson, vous avez la parole.

M. Greg Thompson: Je vous remercie, monsieur le président.

J'aimerais remercier ma collègue néo-démocrate de m'avoir permis de passer avant elle. Je dois partir après avoir posé mes questions. J'écouterai quand même les réponses.

Généralement, le comité est très nerveux quand il y a plus de spécialistes qui viennent témoigner que de membres du comité, ce qui est le cas aujourd'hui. Je dois dire que ce n'est pas parce que ça ne nous intéresse pas, mais plutôt à cause du programme fou de cet endroit qui ne nous permet pas d'être tous ici pour écouter des dépositions de valeur comme les vôtres.

Sans vouloir trop présumer, monsieur le président, je pense pouvoir dire que dans l'ensemble le projet de loi jouit d'un grand appui de la part de tous les partis politiques à la Chambre des communes. Évidemment, l'objectif aujourd'hui est en quelque sorte de vous sonder et de détecter les failles du projet de loi, ou ce que nous pourrions voir comme des failles.

Vos deux collègues, je veux parler des témoins experts qui se trouvent immédiatement à ma gauche, ont soulevé une ou deux questions sur lesquelles j'aimerais des précisions, monsieur le président. M. Sékaly a mentionné en passant l'absence de lien de dépendance entre les instituts et le gouvernement, peut-être parce qu'il se demande comment les choses vont fonctionner. M. Service pourrait sans doute en dire plus à ce sujet car je crois qu'il a participé de plus près à l'étape de l'élaboration que M. Sékaly. Je pense que la question est légitime. C'est un sujet sur lequel je me suis longuement expliqué lors de la dernière réunion du comité.

Ce qui m'inquiète évidemment, c'est que le président des IRSC est choisi par le premier ministre du Canada. Chaque membre du conseil d'administration est également choisi par le premier ministre du Canada. À son tour, le conseil d'administration nomme les membres des conseils consultatifs. Je trouve que tout le processus mérite quelques explications, car il est problématique.

• 1255

À la page 2 de son mémoire, M. Lomas a dit que gérer le système aujourd'hui selon le modèle ancien était «comparable à un producteur de grains des Prairies qui n'aurait qu'un simple boyau d'arrosage et l'Almanack des fermiers.» C'est une boutade pleine d'humour, Jonathan, mais je dirais pour ma part que le processus de nomination est comparable au premier ministre du Canada qui se tiendrait au milieu d'un champ de blé, son livre de promesses électorales dans une main et une masse dans l'autre. Ayant été témoin de ce qui se passe à Santé Canada et dans d'autres organismes quand le gouvernement impose sa volonté, je mets en doute l'indépendance de la structure et de son édification.

La semaine dernière, quand le Dr Friesen et les autres ont comparu, j'ai fait remarquer—et je pense avoir raison—que le modèle sur lequel les IRSC sont calqués est celui des Instituts nationaux de la santé aux États-Unis. J'ai mentionné que les nominations ne s'y faisaient pas comme elles se feront pour les IRSC. Autrement dit, si c'est le modèle que nous suivons, nous ne sommes pas aussi fidèles au modèle américain qu'on me l'avait laissé entendre jeudi dernier.

Dans le système américain, le directeur est nommé par le président des États-Unis sur la recommandation du Secretary of Health and Human Services. Il y a une différence importante dans ce cas-là. En ce qui concerne la composition des conseils consultatifs aux États-Unis, les noms des candidats sont soumis par les membres du Congrès, les universités, des compagnies privées, et je suppose que dans le cadre du système américain, on peut se nommer soi-même. Les noms sont ensuite mis dans une base de données informatisée. Lorsqu'on a besoin d'un membre du conseil, les compétences nécessaires sont inscrites dans cette base de données et on se met en rapport avec tous les candidats compétents. En d'autres termes, les Américains ont un processus très perfectionné.

Dans la loi, telle que je la lis, je ne peux pas vraiment être rassuré par ce processus. Je pense que le Dr Sékaly soulève une question très importante en ce qui concerne l'indépendance du nouvel organisme par rapport au gouvernement.

Je pense que je vais m'en tenir là. Nous pourrions peut-être avoir un débat ouvert là-dessus, monsieur le président.

Il y a un autre point que je voudrais souligner, monsieur le président, si le temps me le permet, et M. Giroux pourrait peut- être donner son opinion là-dessus. Je ne sais pas au juste quelle latitude le président va m'accorder, mais il a été très généreux jusqu'à maintenant.

À la page 5 de votre mémoire, monsieur Giroux, vous dites:

    Il est à noter que le groupe d'experts n'a pas suggéré que les agences de subventions fédérales prennent part directement à la commercialisation des recherches qu'elles soutiennent.

J'essaie d'abréger, monsieur Giroux et je sais que c'est très difficile. Vous parlez particulièrement de l'alinéa 26(1)f) et vous dites:

    La législation actuelle du CRM lui confère déjà un mandat pour effectuer de la recherche. Dans ses 30 ans d'histoire, il n'a jamais fait usage de ce pouvoir. Nous espérons et sommes confiants que le conseil de direction exercera son pourvoir discrétionnaire de la même façon que l'a fait le CRM. La combinaison d'un soutien à la recherche et d'un mandat de performance en recherche peut [...]

Je ne lirai pas tout le passage. Je pense que vous soulevez une question tout à fait légitime dans le cas présent et je me demande simplement si vous pensez que nous devrions envisager d'apporter un amendement à ce projet de loi pour modifier les points que vous soulevez.

Monsieur le président, je pense qu'il y a peut-être une erreur dans le mémoire de M. Giroux. Je n'en suis pas certain, mais je veux simplement voir si j'ai raison.

• 1300

Il y a une erreur dans votre mémoire en ce qui concerne les dispositions. Vous parlez d'une disposition et je pense qu'il est question, à tort, de l'alinéa f) à deux reprises alors que ce devrait être un autre alinéa.

M. Robert Giroux: Ce devrait être l'alinéa c).

M. Greg Thompson: Oui, c'est ça.

Quoi qu'il en soit, monsieur Giroux, si le temps vous le permet, vous pourriez peut-être parler de cela, ainsi que M. Sékaly ou le Dr Service, et nous partirons de là. Merci.

Le président: Monsieur Giroux, pourquoi ne pas nous faire part tout d'abord de votre point de vue et nous nous pencherons ensuite sur la question plus large du processus de nomination.

M. Robert Giroux: Je ne recommande pas d'apporter un amendement à la loi, monsieur le président. Je pense qu'il s'agit d'une mesure habilitante que nous appuyons, car nous bâtissons une chose qui va durer pendant les 10 ou 15 prochaines années. Il est donc important de prévoir la plus grande souplesse possible.

Je vais également signaler que tous ceux qui siégeront au conseil d'administration seront surveillés très étroitement par l'Association des universités et collèges du Canada ainsi que d'autres organismes, car nos institutions seront beaucoup influencées par les activités des IRSC et y participeront activement.

Je voulais signaler cependant que nous avons établi des pratiques auxquelles nos chercheurs sont habitués dans le cadre de leurs activités. Nous ne faisons que préciser que nous nous attendons à ce que les pouvoirs en question ne soient utilisés qu'avec la plus grande réserve, seulement de façon justifiée, si le besoin se fait sentir, sans conduire un chevauchement des activités et en respectant le monde de la recherche qui fonctionne, selon nous, très bien. Nous voulons nous appuyer sur ses points forts sans commencer à nous immiscer dans son fonctionnement.

C'est fondamentalement là où je voulais en venir, monsieur Thompson, à ce sujet.

Vous avez tout à fait raison, à la page 4, nous parlons de l'alinéa 26(1)f) et ensuite, nous devrions parler de l'alinéa 26(1)c).

Le président: Nous nous assurerons de corriger cela en conséquence.

Le Dr Service et ensuite le Dr Sékaly.

Dr John Service: Je suis tout à fait d'accord avec vous pour dire que l'autonomie des IRSC est tout à fait essentielle. Nous croyons que l'autonomie est essentielle dans tout le processus. Il faut notamment prévoir un excellent contrôle par les pairs. Ce contrôle doit être indépendant et les décisions doivent être prises en fonction du bien-fondé du projet sur le plan scientifique. Je suis persuadé que Barry et Jonathan, qui ont participé encore plus étroitement aux discussions les plus récentes touchant les IRSC, vont répondre à cette question plus clairement. Cependant, nous nous attendons à ce que les recommandations touchant le conseil d'administration viennent du monde scientifique, à ce qu'elles soient examinées de près et à ce que des suggestions soient transmises au gouvernement. J'espère que cela va se poursuivre. On va utiliser un modèle qui sera semblable, je le suppose, aux organismes subventionnaires également, et je pense que ce régime nous a très bien servi.

De plus, dans l'établissement du conseil d'administration, il faudra parvenir à un équilibre sur les plans linguistique et régional et en ce qui concerne les groupes d'intérêt sociaux, scientifiques, biomédicaux et de défense des consommateurs. La composition du conseil va être complexe et il faudra tenir compte de tout cela alors que les recommandations seront examinées de près.

M. Greg Thompson: Pardonnez-moi cette interruption, monsieur le président. Y a-t-il une disposition, docteur Service, que nous pourrions inscrire dans la loi pour préciser cela plus clairement, car si j'examine le libellé exact des dispositions sur les nominations de tout le processus...? Est-ce une chose que vous avez envisagée et dans l'affirmative, que pourrions-nous envisager?

Dr John Service: Je vais répondre à cela très rapidement. Le CCR n'a pas examiné cela en détail; il s'est penché sur les structures de régie et d'administration relativement au gouvernement et a constaté une similarité avec ce qui se faisait auparavant. Si l'expérience passée est un bon indice d'un comportement futur, nous pensons alors avoir confiance dans ce système.

Je pourrais demander à Jonathan ou Barry, qui ont participé plus directement à tout cela, de répondre plus précisément.

Le président: Docteur McLennan.

Dr Barry McLennan: Merci.

Je vais simplement signaler, même si je ne suis pas avocat, que le processus en place pour les nominations est semblable à celui qui est utilisé pour les trois organismes subventionnaires existants. Je pense que le monde de la recherche est certes très satisfait de ce processus. Le CRM, le CRSNG et le CRSH fonctionnent très bien et s'acquittent de leur mandat au mieux de leur capacité.

En ce qui concerne les IRSC, je crois que le processus a été élargi encore davantage. En fait, pour vous rassurer, monsieur Thompson, je tiens à préciser que les documents de travail qu'on retrouve sur le site Web précisent clairement qu'il y aura des invitations.

• 1305

En fait, je pense qu'au cours des prochains jours, une invitation sera lancée à la communauté pour choisir non seulement le nom des instituts mais également pour proposer des candidatures au poste de président-directeur général et aux 19 autres postes de sages qui composeront le conseil d'administration permanent. Ainsi, je pense que nous sommes rassurés quant au processus de nomination au conseil.

Il est vrai que la loi dit clairement, à juste titre selon moi, que c'est le gouverneur en conseil qui prend la décision en dernier recours. Cependant, cela ressemble aux autres processus auxquels la communauté scientifique est habituée et je pense que nous sommes persuadés, du moins c'est mon cas, que si la communauté scientifique est consultée et si elle soumet une liste de candidats, on respectera ses suggestions.

Le président: Eh bien, c'est rassurant, car je pense que c'est un point troublant, chose certaine pour M. Thompson, et il est donc bon d'entendre cet éclaircissement.

M. Greg Thompson: C'est embarrassant seulement lorsqu'on siège dans l'opposition.

Le président: Nous compatissons certes avec vous, mais pas trop.

Monsieur Lomas.

M. Jonathan Lomas: Brièvement, je tiens à dire qu'il s'agit en effet d'un processus beaucoup plus ouvert qu'auparavant. On prévoit, à la mi-décembre, un processus de nomination pour les membres du conseil d'administration. On fera une annonce, on invitera les gens à présenter leur candidature pour le poste de président des IRSC. Le processus de sélection ne sera pas un processus gouvernemental interne isolé, mais fera appel à un comité de gens de l'extérieur du gouvernement également. Je veux donc dire...

M. Greg Thompson: Il est rassurant d'entendre cela, monsieur le président, car il est évident que cela n'est pas précisé dans le document.

Le président: Je sais que vous êtes maintenant rassuré et nous sommes donc très heureux au comité.

M. Greg Thompson: Monsieur le président, nous devons également examiner les questions en nous rappelant qu'un jour, nous pourrions former à nouveau le gouvernement.

Le président: Cela est également bien noté.

Madame Wasylycia-Leis. Je ne peux croire que vous ayez été aussi patiente, mais vous l'avez été et c'est maintenant votre tour.

Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD): C'est très inhabituel, n'est-ce pas?

Le président: En effet.

Mme Judy Wasylycia-Leis: Merci beaucoup, monsieur le président. Je pense que je paie pour mon retard. C'est le prix à payer.

J'ai trois questions dont certaines ont été abordées. Dans cette ronde et la ronde précédente, certains des témoins qui ont comparu devant nous ont dit craindre qu'on aille trop loin pour ce qui est de mettre l'accent sur des partenariats entre les secteurs public et privé. Je pense que c'est M. Hill qui a parlé de la nécessité absolue d'autonomie dans tout le domaine de la recherche.

Lorsque j'entends ces observations, je suis quelque peu surprise qu'on ne se préoccupe pas davantage de certaines dispositions du projet de loi. Selon moi, et je pense que nous allons en entendre parler au fur et à mesure que le débat se prolongera, on s'inquiète de l'importance considérable accordée à la commercialisation qu'on met pratiquement sur le même pied que l'intérêt public, au lieu qu'il soit question d'une chose qui provient de la recherche et qui est dans l'intérêt public.

Je pense que Jonathan a fait allusion à l'affaire Anne Holbrook et à l'affaire Nancy Olivieri, qui nous rappellent toutes deux, selon moi, que lorsque nos universités deviennent tellement dépendantes du financement privé et de l'appui des compagnies pharmaceutiques, il risque d'arriver qu'on sacrifie l'intérêt public aux intérêts du secteur privé, ce qui n'est pas bon pour la population en général.

En fait, les universitaires et les chercheurs parlent sans cesse de leurs sentiments à l'égard des pressions exercées par les sommes énormes versées par le secteur privé au niveau universitaire. Ils ont de plus en plus le sentiment qu'ils se livrent à l'inceste ou se prostituent, et je pense que c'est une préoccupation tout à fait légitime.

Quelques-uns d'entre vous ont abordé cela, mais ne devrions- nous pas être un peu plus prudents en ce qui concerne notre libellé relativement à la commercialisation? Je vais me rapporter plus particulièrement non pas à la disposition dont a parlé M. Giroux, mais bien à l'alinéa 4i) qui fait allusion précisément à la mise en marché de la recherche, et comparer cela au document de travail du CAP où on dit clairement que les IRSC doivent s'assurer que leurs priorités en matière de recherche sont indépendantes d'intérêts commerciaux. Je ne vois pas comment cette exigence est respectée dans le projet de loi et je lance donc le débat là-dessus.

Le président: Le Dr McLennan sera le premier à répondre à cela.

Dr Barry McLennan: Merci. J'allais formuler une observation sur la commercialisation, je veux simplement exprimer un léger désaccord avec mon collègue, Jonathan Lomas.

Il ne faut pas interpréter de façon trop étroite la «mise en marché». Permettez-moi simplement d'en parler. À titre de vice- doyen à la recherche du collège de médecine de l'Université de la Saskatchewan, je participe continuellement à l'approbation de protocoles pour des contrats de recherche et des essais cliniques. Il est vrai que des cas comme celui qui a été mentionné, l'affaire Nancy Olivieri, font les manchettes, mais ils ne constituent qu'un petit nombre par rapport aux centaines de cas où les choses se déroulent bien.

• 1310

Je me préoccupe également de ce que le document du comité d'experts sur la commercialisation soulève des craintes dans le monde universitaire, car on y laisse entendre que les seuls projets que nous devrions appuyer sont ceux qui sont commercialisables; ce sont des inepties. Sur une centaine des projets de recherche dans le secteur de santé, un ou deux peut-être conduiront à des découvertes pouvant être commercialisées ou faire l'objet d'une licence.

Pourquoi ne devrions-nous pas, en tant que Canadiens et en tant que pays, profiter de cela? Des chercheurs viennent me voir pour déposer un brevet pour des travaux qu'ils effectuent. Cela n'a rien à voir avec le secteur privé. Ce sont leurs propres innovations et leurs propres découvertes et nous devons récompenser cela. Il faut accélérer ce processus. Il est insensé de laisser d'autres pays exploiter cela. Nous devrions créer cette richesse pour le Canada. Pour en revenir à la question de M. Jackson, nous aurions alors une source de revenus pour aider à financer la recherche au départ.

Je vous prie donc de ne pas interpréter de façon trop étroite l'expression «mise en marché». Cela a un sens très large.

En ce qui concerne le secteur privé, en toute déférence, l'affaire Nancy Olivieri ne se serait jamais produite si on avait appliqué les règles habituelles du processus d'approbation. En tant qu'administrateur au sein d'une université, je sais que les chercheurs deviennent tout à fait furieux, car ils doivent obtenir trois signatures pour chaque projet de recherche: une du chef de département, une du bureau du doyen et une du président de la recherche de l'université. Ces contrôles sont là pour une raison. Ils visent à s'assurer que le travail entrepris est défendable du point de vue de la communauté universitaire et que les chercheurs ne vont pas signer un contrat qu'ils vont regretter, comme cela s'est produit dans le cas de Nancy Olivieri.

Je dis simplement que nous pouvons faire des affaires dans le secteur de la recherche en santé avec le secteur privé, mais nous devons comprendre clairement les objectifs du secteur privé et inversement, ce dernier doit comprendre les nôtres. Si nous ne pouvons nous entendre sur certaines règles, nous ne devons pas alors nous engager.

Le président: Merci.

Le Dr Boyle et ensuite M. Giroux.

Dr Pierre Boyle: Quand on pense à des partenariats avec l'industrie, on pense généralement à des partenariats commerciaux. Il y a d'autres formes de partenariats dans lesquels nous pouvons nous engager.

Permettez-moi de vous signaler un grave problème qui se pose. À l'heure actuelle, l'industrie fait certes partie du problème et on peut espérer qu'elle participera à la solution. Il y a des domaines de recherche, et je vais en nommer trois—la pharmacoéconomique, la pharmacoépidémiologie et la nouvelle science de la pharmacocinétique—qui sont d'une importance primordiale pour l'industrie. À l'heure actuelle, nos universités ont beaucoup de mal à établir une masse critique dans ces domaines, car sitôt qu'un nouveau chercheur devient très connu, l'industrie attire cette personne avec un salaire qui est au moins le double de celui que les universités peuvent lui offrir, et cela compromet notre capacité d'établir une masse critique et des compétences dans des domaine où l'industrie et la communauté peuvent en profiter. Il me semble que c'est un domaine dans lequel nous pourrions songer à des partenariats pour nous attaquer à un problème sans qu'il y ait nécessairement un aspect strictement financier ou directement financier.

Pour ce qui est de l'autre question, je voudrais souligner le point que vient de mentionner le Dr McLennan. Les scientifiques canadiens s'en sortent bien pour ce qui est de publier et tous les indicateurs internationaux vont dans ce sens. Le Canada est vraiment en haut de la liste des pays où les scientifiques sont le plus souvent cités, avec les plus importants facteurs d'impact et le reste.

En ce qui concerne la capacité du Canada d'innover et de transférer les produits de la recherche dans les domaines pertinents, y compris de les commercialiser, nous nous en sortons très mal et il n'y a aucune raison que cela continue. Il n'y a pas de raison que les Américains commercialisent des découvertes faites par des savants canadiens avec des fonds canadiens. Cela ne peut pas continuer.

Nous devons donc élaborer des stratégies et faire savoir aux milieux de la recherche que c'est légitime mais,

[Français]

il faut avoir des balises.

[Traduction]

Ce ne peut être une opération en roue libre. Cependant cela peut en soi contribuer à améliorer non seulement la santé mais aussi le bien-être et la richesse collective des Canadiens.

• 1315

Le président: Je vous remercie pour ces commentaires.

Monsieur Giroux.

M. Robert Giroux: Merci, monsieur le président.

Je voudrais très brièvement faire remarquer que l'important dans tout cela, c'est la contribution du gouvernement à la recherche fondamentale ou la recherche à des fins intellectuelles et le financement qu'il accorde à la recherche. Ce sont là les points à la base de ce dont nous parlons et il faut voir à les soutenir, les maintenir et les accroître.

J'ai vu dans les statistiques l'autre jour que l'augmentation budgétaire d'un an accordée au National Health Institute aux États- Unis, autrement dit l'augmentation des fonds affectés à la recherche sur la santé, est de la taille de l'effort de recherche actuel de nos trois conseils directeurs. Bien sûr, les États-Unis sont très forts pour commercialiser les produits de la recherche, mais ils n'ont pas oublié que l'autre facteur de l'équation, est de soutenir la recherche fondamentale grâce à un financement public solide.

À notre avis, les principaux objectifs derrière cette initiative du gouvernement seraient premièrement d'améliorer la santé des Canadiens et, deuxièmement—je suis d'accord là- dessus—dans la mesure où les produits de la recherche peuvent être commercialisés, d'encourager leur commercialisation au Canada et à partir du Canada afin d'augmenter les avantages économiques pour notre pays et par suite les fonds consacrés à la recherche.

C'est donc un cercle très positif.

Le président: Merci beaucoup.

Dernière question, monsieur Charbonneau.

[Français]

M. Yvon Charbonneau (Anjou—Rivière-des-Prairies, Lib.): Je vous remercie tous d'avoir donné votre point de vue et de l'avoir préparé aussi soigneusement. Étant donné l'heure et la teneur de votre propos, il n'y a pas lieu que je vous questionne de manière détaillée. J'aimerais que nous parlions de deux préoccupations.

Dans le mémoire que vous avez présenté, monsieur Giroux, vous faites état de trois préoccupations. Je voudrais revenir sur la première des trois. Je sais que vous en avez discuté quelque peu avec mon collègue Thompson, mais je voudrais mieux comprendre ce qui vous inquiète. C'est à la page 4 de votre mémoire.

Dans un passage en anglais de votre mémoire, vous dites:

[Traduction]

«à savoir le pouvoir d'entreprendre des recherches (4 (e))»

Et vous dites ensuite que

    Bien que la loi actuelle confère déjà au CRM le pouvoir d'entreprendre des recherches, le CRM n'a jamais exercé ce pouvoir en 30 ans.

[Français]

Je voudrais que vous soyez plus explicite. Quel est le problème dont vous voulez nous entretenir? Ils ont le pouvoir, ils ne l'ont jamais exercé et vous souhaitez que les choses restent comme cela?

[Traduction]

Le pouvoir d'appuyer la recherche conjugué à celui d'entreprendre des recherche peut donner lieu à des conflits d'intérêts.

[Français]

J'aimerais que vous nous expliquiez ce point.

J'aimerais aussi poser une question à M. Sékaly sur le même sujet. Si j'ai bien compris, vous suggérez que les membres du conseil d'administration soient eux-mêmes des chercheurs chevronnés ayant des contrats de recherche, des chercheurs actifs.

Dans ma perspective, vous parlez de réalités qui sont assez voisines, monsieur Giroux et monsieur Sékaly. L'un souhaite que le conseil ne fasse pas de recherches mais se contente de les subventionner, et l'autre souhaite que le conseil d'administration soit composé de gens qui soient en train de faire de la recherche. Conflit d'intérêts, conflit d'intérêts... J'aimerais comprendre ce que vous dites au juste, l'un et l'autre.

J'ai aussi une question pour M. Boyle. J'aimerais que vous répétiez plus lentement les chiffres que vous nous avez donnés sur le pourcentage des budgets de recherche au Québec par rapport à la population. Évidemment, j'aurais aimé poser cette question en présence de mon collègue du Bloc québécois.

[Traduction]

Le président: Merci, monsieur Charbonneau.

Docteur Boyle, si vous voulez dire ce que vous avez à dire, nous passerons ensuite la parole à M. Giroux.

[Français]

Dr Pierre Boyle: Je disais que le Québec compte 24 p. 100 de la population du Canada et que les chercheurs québécois, en compétition, se méritent 32 ou 33 p. 100 des fonds octroyés par le Conseil de recherches médicales du Canada. Dans le cas du Conseil de recherches en sciences humaines, c'est 28 ou 29 p. 100. Donc, la part des chercheurs québécois dépasse largement le poids démographique du Québec.

• 1320

J'estime qu'on devra tenir compte de cette dimension lorsqu'on envisagera la composition du conseil d'administration. Une formule au prorata de la population me semblerait peu équitable compte tenu de l'effort de recherche actuel des différents milieux.

M. Yvon Charbonneau: Monsieur le président, nous avons entendu au moins une douzaine de discours à la Chambre, hier et la semaine dernière, nous disant qu'au Québec, les budgets de recherche étaient de 12 ou 14 p. 100 alors que la population était de 24 p. 100. Nous entendons aujourd'hui de la part de sources éminemment bien informées, qui ne sont pas en politique, des chiffres sur lesquels il faudra revenir en temps utile, un peu plus tard.

[Traduction]

Le président: Monsieur Charbonneau, en tant que secrétaire parlementaire du ministre de la Santé, je ne doute pas que vous ferez valoir ces arguments à la Chambre en temps utile. Vous l'avez en tout cas fait ici, et nous vous en remercions.

Monsieur Giroux et docteur Sékaly, pouvez-vous nous éclairer sur le point qu'a soulevé M. Charbonneau?

[Français]

M. Robert Giroux: Je voudrais aussi ajouter, monsieur Charbonneau, que la part du Québec de la Fondation canadienne pour l'innovation est aussi très forte à cause des initiatives qui ont été prises par les chercheurs du Québec. C'est un ajout. Je n'ai pas les chiffres, mais on peut vous les obtenir.

M. Yvon Charbonneau: Avez-vous un ordre de grandeur?

M. Robert Giroux: Je pense que c'est 28 ou 29 p. 100.

Il y a autre chose. Ce n'est pas nécessairement une préoccupation, mais nous voulions quand même vous faire observer que vous avez aujourd'hui un réseau dont les acteurs ne travaillent pas nécessairement très bien ensemble et qui peut être harmonisé. On peut établir une meilleure coordination et une meilleure collaboration. Vous avez les universités, les hôpitaux qui sont rattachés aux universités, des instituts de recherche, des laboratoires de recherche et toutes sortes de secteurs.

Nous voudrions que le conseil d'administration, avant de dire qu'on doit faire telle recherche, s'assure que cette recherche n'est pas déjà effectuée. Toutes ces infrastructures qui sont en place sont le résultat de beaucoup d'investissements des gouvernements antérieurs. Il faut maximiser cela.

Vous avez raison de dire que nous avons une petite crainte. Si le Conseil de recherches médicales de recherche, en 30 ans, n'a pas vu le besoin de le faire, eh bien, il faut faire attention avant de se dire qu'on va faire soi-même sa propre recherche. Il faut s'assurer=1352=] qu'une telle recherche n'est pas déjà effectuée.

Les Instituts de recherche en santé du Canada constituent une nouvelle approche, un nouveau moyen de faire les choses. Il se peut bien qu'ils identifient des secteurs, que ce soit la politique de recherche ou certaines autres choses, qu'il n'est pas possible de mettre en place en ce moment parce que le système actuel n'a pas la possibilité de le faire, et décident de consacrer un peu d'argent à cette recherche. Ce serait légitime, mais, à mon avis, ces pouvoirs devant être octroyés au conseil d'administration ne devraient pas aller plus loin.

Dr Rafik-Pierre Sékaly: Ce qui est important, c'est d'avoir au conseil d'administration des gens à qui le système de recherche est familier, qui ont déjà fait et qui font de la recherche actuellement, non pas des gens qui soient subventionnés par le conseil d'administration, mais des gens qui font une recherche active.

La dernière chose à avoir serait un conseil d'administration composé en majorité de fonctionnaires ou d'administrateurs. Il est important d'avoir des gens qui sentent le pouls de la communauté des chercheurs. Tel était le sens de mon intervention.

M. Yvon Charbonneau: Monsieur Sékaly, allez-vous nous remettre vos notes écrite?

Dr Rafik-Pierre Sékaly: Oui, je vais en donner des copies à...

M. Yvon Charbonneau: D'accord. Vous avez énoncé une série de suggestions, mais je n'avais pas de document écrit.

Dr Rafik-Pierre Sékaly: On m'avait demandé d'en apporter deux copies; j'aurais dû en apporter quatre.

M. Yvon Charbonneau: Peut-être ai-je manqué quelques suggestions.

[Traduction]

Le président: Nous ferons faire des copies et les ferons distribuer à chacun.

[Français]

M. Yvon Charbonneau: Vous avez émis une préoccupation à propos de la fermeture éventuelle de certains instituts. Vous n'aimeriez pas que certains instituts soient fermés. Vous avez parlé d'un article, mais vous alliez assez vite. Vous avez entrevu la possibilité...

Dr Rafik-Pierre Sékaly: Aux points 20 et 21, il est mentionné que le conseil d'administration pourrait fermer des instituts. Je pense que ce ne serait vraiment pas souhaitable. Il faudrait que, dès le départ, les gens réfléchissent bien. Je pense que le processus de consultation que le Dr McLennan a mentionné est très, très important. On aura des instituts qui seront voulus par une grande majorité des chercheurs et il ne sera donc pas nécessaire de fermer des instituts. Comme je l'ai dit, si jamais on fermait des instituts, ce serait démobilisateur pour les chercheurs et pour le programme lui-même. Donc, au départ, il faut bien...

• 1325

M. Yvon Charbonneau: Selon le développement des secteurs et l'évolution de la science, voyez-vous une possibilité de remoduler les instituts? S'il y en a 15, on pourra, sept ou dix ans plus tard, se dire qu'il y en a deux qui sont moins pertinents et en profiter pour se réorienter dans d'autres domaines qui ne semblent pas importants maintenant, plutôt que de procéder seulement par ajouts. Si on ne fait qu'en ajouter, il n'y en aura pas 12 ou 15, mais 22 ou 25. Tout le monde a de bonnes raisons d'en ajouter.

Dr Rafik-Pierre Sékaly: Le but de mon intervention était de vous faire comprendre qu'il faut bien démarrer, avec un nombre d'instituts limité et non pas avec une quinzaine d'instituts, et que ces instituts doivent être le mieux justifiés possible, le plus désirés possible par l'ensemble de la communauté des chercheurs. Quand viendra le temps d'en ajouter, eh bien, il faudra en ajouter. La fermeture d'un institut créerait, à mon avis, une dynamique négative, qui n'est pas la dynamique souhaitée dans le cadre du programme.

M. Yvon Charbonneau: De toute façon, nous sommes loin de la perspective de fermer les instituts; nous sommes en train de les créer, monsieur le président. Ne nous alarmons pas prématurément.

[Traduction]

Le président: Très bien. Merci beaucoup.

J'aimerais, monsieur Hill, quelques clarifications. Pour ce qui est du protocole d'Ottawa concernant les blessures de la cheville dont vous avez parlé il y a un instant, l'Institut Loeb pour la recherche médicale n'a-t-il pas fait la promotion de ce protocole dans d'autres pays? Ou bien est-ce que je trompe?

M. David Hill: Vous ne vous trompez pas, ce protocole est connue à l'étranger comme le protocole d'Ottawa et si vous vous présentez à Paris, en France, avec une fracture de la cheville, on va se fonder sur la politique d'Ottawa pour déterminer si vous avez besoin d'une radiographie.

Le président: Comment a-t-on encouragé l'application de cette politique, c'est là ma question.

M. David Hill: Par l'intermédiaire du réseau de chercheurs. C'est un réseau fantastique qui fonctionne à l'échelle internationale. Les choses n'ont pas été faites de façon vraiment officielle mais ce protocole est maintenant connu dans le monde entier. Le prochain protocole à venir sera celui concernant les blessures du genou.

Le président: Vous attendez-vous à ce que les IRSC procèdent d'une autre manière ou bien de la même façon?

M. David Hill: Je ne sais pas. C'est une question très intéressante à laquelle il est trop tôt pour répondre. Il faudrait en discuter davantage.

Le président: Nous aimerions peut-être bien le savoir à un moment donné.

Monsieur Lomas.

M. Jonathan Lomas: Je voudrais seulement préciser qu'en fait beaucoup d'argent a été investi dans la promotion du protocole d'Ottawa concernant les blessures de la cheville. L'Institute for Clinical Evaluative Sciences, à Toronto—un investissement du gouvernement provincial—qui veille à ce que genre de recherche sur les services de santé soit inclus dans le système a investi une somme dépassant largement les 100 000 $ pour aider non seulement à compléter le financement de la recherche mais aussi à diffuser et à produire la documentation.

Cela démontre un point important, à savoir que souvent financer la recherche et les chercheurs ne suffit pour qu'un protocole comme le protocole d'Ottawa concernant les blessures de la cheville ait un impact généralisé.

Le président: Merci beaucoup. Je voudrais qu'on me précise rapidement un autre point.

Plusieurs témoins ont parlé du groupe de travail national à l'origine de la création des IRSC. Quelqu'un peut-il me dire très rapidement pourquoi ce groupe a été créé, qui l'a fait et quel était au juste son mandat? Je veux seulement que le processus soit bien clair.

Docteur Lennan.

Dr Barry Lennan: En 1990, lorsque qu'il a été constitué à l'origine à la demande du ministre de la Santé, le groupe s'appelait le groupe de travail sur les IRCS. Ce groupe a fonctionné jusqu'en février 1999. Quand le gouvernement a présenté son budget en février 1999, il a créé le Conseil d'administration provisoire, qui a alors remplacé le groupe de travail. J'ajouterai qu'il comptait plus de membres.

Permettez-moi, puisque nous parlons de la composition du Conseil d'administration provisoire, de rappeler que l'idée des IRSC est de profiter à toutes les régions du Canada. Nous parlons du Canada tout entier, d'un océan à l'autre.

Je crois que nous devons lire avec la même attention la première et la deuxième phrase du paragraphe 7(4) dont vous parlez et qui dit, à la première phrase:

    Le gouverneur en conseil nomme au conseil d'administration des femmes et des hommes capables de contribuer à la réalisation de la mission d'IRSC [«]

Et, à la deuxième phrase:

    [«] des femmes et des hommes reflétant les normes les plus élevées de l'excellence scientifique et des femmes et des hommes représentant les divers milieux et disciplines visés.

Ce paragraphe a été formulé avec le plus grand soin.

Les chercheurs vous diront probablement qu'ils veulent que les 19 membres du Conseil soient des chercheurs. Je ne pense pas que cela sera. Le gouverneur en conseil ne l'a pas non plus suggéré pour des raisons évidentes. Cependant, comme plusieurs personnes l'ont dit aujourd'hui, j'espère que feront partie de ce conseil une juste proportion de femmes et d'hommes qui sont d'actifs chercheurs ou qui comprennent bien ce que sont les IRSC.

• 1330

Le président: Merci beaucoup.

Je regrette que nous ayons pris autant de temps aujourd'hui, mais il me semble, compte tenu des questions et des commentaires, que c'était important. J'espère que nous ne vous avons pas causé trop de dérangements. Au nom du comité, je vous remercie pour la discussion très instructive que nous avons eue. Nous espérons expédier les choses aussi vite que possible. Merci beaucoup.

La séance est levée.