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PACP Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des comptes publics


NUMÉRO 070 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 12 juin 2023

[Énregistrement électronique]

  (1105)  

[Français]

    Je déclare maintenant la séance ouverte.
    Bienvenue à la 70e réunion du Comité permanent des comptes publics de la Chambre des communes.

[Traduction]

     Conformément à l'article 108(2) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le lundi 24 avril 2023, le Comité reprend son étude de la Fondation Pierre‑Elliott‑Trudeau.
    Avant que je présente les témoins, Mme Sinclair‑Desgagné veut prendre la parole.

[Français]

    J'invoque le Règlement, monsieur le président. J'aimerais obtenir une confirmation de votre part et de celle de Mmes les greffières à propos du passage suivant de La procédure et les usages de la Chambre des communes:
Normalement, les témoins qui comparaissent devant les comités de la Chambre n'ont pas à prêter serment. Il est généralement entendu qu'ils ont le devoir de dire la vérité, qu'ils aient prêté serment ou non. [...]

Bien que les témoignages présentés à des comités parlementaires soient protégés par le privilège parlementaire, si un comité établit qu'un témoin lui a menti ou qu'il l'a induit en erreur délibérément, l'affaire pourrait être renvoyée à la Chambre. Si la Chambre établit que le témoin a délibérément menti au comité, elle pourrait le reconnaître coupable d'outrage, qu'il ait prêté serment ou non.
    Est-ce bien exact?
    Les greffières me confirment que c'est exact, madame Sinclair‑Desgagné.

[Traduction]

    Je vous remercie.
    Je vous présente cinq témoins aujourd'hui.
    Mme Anita Biguzs est retraitée de la fonction publique fédérale. M. Graham Flack est présentement secrétaire du Conseil du Trésor du Canada et anciennement sous‑ministre de Patrimoine canadien. M. Daniel Jean est un ancien sous‑ministre. M. John Knubley est un ancien sous-ministre également et il se joint à nous par vidéoconférence. M. Morris Rosenberg est un sous‑ministre à la retraite.
    Merci à tous d'être parmi nous.
    Je crois que nous entendrons deux exposés de MM. Knubley et Rosenberg. Si d'autres témoins ont des exposés à faire, veuillez me le faire savoir, et je vous ajouterai à la liste avec plaisir. Veuillez vous en tenir à cinq minutes durant ces déclarations liminaires, mais vous verrez que je fais preuve de souplesse comme président et que je ne vais pas frapper le marteau si vous dépassez votre temps. Je n'aime pas interrompre les témoins.
    Je vais d'abord céder la parole à M. Knubley pour cinq minutes.
    Je vous remercie de m'accueillir aujourd'hui. On m'a avisé que je devais présenter un exposé, mais je serai bref.
    Je m'appelle John Knubley et j'ai été sous‑ministre au ministère de l'Innovation, des Sciences et du Développement économique de 2012 à 2019. Je vous parle bien sûr aujourd'hui à titre personnel, et non à titre de représentant d'un ministère ou du gouvernement. Je ferai de mon mieux pour vous aider d'après mes souvenirs.
    La fondation Trudeau était et demeure, je crois, un organisme faisant partie du vaste portefeuille du ministère. Durant mon mandat, la responsabilité du suivi de ses activités relevait du secteur ou de la direction générale des sciences, et je crois que c'est toujours le cas. Il me semble qu'on m'a toujours dit que la Fondation avait été conçue dès le départ, en 2001, comme une fondation indépendante et autonome, conformément à la Loi canadienne sur les organisations à but non lucratif.
    Le conseil d'administration a donc la responsabilité de superviser son propre fonctionnement, avec une responsabilité fiduciaire. Le secteur des sciences du ministère a pour mandat de surveiller la fondation Trudeau, de par son rôle visant à favoriser l'excellence des universités, des universitaires et des activités de recherche partout au pays.
    Je comprends que vous avez des questions sur une réunion qui a eu lieu entre des sous‑ministres et des universitaires de la fondation Trudeau au Bureau du Conseil privé en 2016. De mémoire, je me souviens d'y avoir été invité. Toutefois, je me souviens aussi d'avoir choisi de ne pas y participer, car j'avais d'autres priorités.
    Je répondrai à vos questions avec plaisir.
    Je vous remercie beaucoup.
    Monsieur Rosenberg, vous avez la parole.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    J'ai été sous‑ministre sous des gouvernements conservateurs et libéraux durant 15 ans aux ministères de la Justice, de la Santé et des Affaires étrangères. Depuis ma retraite de la fonction publique, j'ai été président de la Fondation Pierre-Elliott-Trudeau, ainsi que conseiller politique et membre de divers conseils d'administration.
    Je tiens à parler d'abord de ma présence, à titre de président de la Fondation, à une réunion avec des fonctionnaires en avril 2016 dans ce qui était l'édifice Langevin. J'ai entre autres choisi de travailler à la Fondation parce que je crois qu'il est dans l'intérêt public de renforcer les échanges entre les chercheurs universitaires et les décideurs. Les décideurs devraient connaître la recherche universitaire, et comme sous‑ministre, j'ai souvent pris contact avec des universitaires en plus de les rencontrer. Il est tout aussi important pour eux, d'ailleurs, d'être exposés aux réalités pratiques de la prise de décisions politiques.
    À la Fondation, l'un de nos membres et mentors avait entamé un projet au début de 2016 pour établir s'il y avait des avantages économiques à la diversité. Je savais que la diversité et le pluralisme étaient des priorités du gouvernement à l'époque et j'ai indiqué au sous‑secrétaire au Bureau du Conseil privé qu'une réunion avec des fonctionnaires donnerait l'occasion de débattre de divers points de vue sur cet enjeu.
    C'est la genèse de la réunion sur laquelle il y a eu des reportages dans les médias. Le Bureau du Conseil privé a invité les fonctionnaires pertinents. Les journalistes ont insisté sur le fait que la réunion a eu lieu à l'édifice Langevin. Ils y voyaient un lieu de rencontre inhabituel, parce que le Cabinet du premier ministre y est situé.
    Or, non seulement le Cabinet du premier ministre s'y trouve, mais le Bureau du Conseil privé, qui est un organe de la fonction publique, s'y trouve aussi. C'est un édifice central au centre‑ville où se réunissent les fonctionnaires et d'autres personnes. Il n'est pas inhabituel d'y inviter des gens qui ne font pas partie du gouvernement à des réunions. Ainsi, il n'y avait rien d'inhabituel du tout à propos de cette réunion d'avril 2016 dans l'édifice Langevin.
    Je veux maintenant parler de deux points soulevés en lien avec l'enjeu du don reçu en 2016. Il a été allégué que l'entreprise au nom de laquelle un reçu fiscal a été émis, Millennium Golden Eagle (Canada) Inc., est une société-écran. J'ai eu l'occasion d'examiner le Registre des entreprises du gouvernement du Québec, et il appert que cette entreprise est en activité dans le milieu des hôtels, des auberges et de l'investissement immobilier. Je peux vous fournir ce document.
    Par ailleurs, je voulais vous donner plus de contexte pour appuyer le point de vue exprimé par Alexandre Trudeau au comité permanent de l'accès à l'information, par Ted Johnson et moi‑même. Ce don doit être évalué sous l'angle des relations que nous avions avec la Chine à cette époque, qui étaient bien différentes des relations très négatives que nous avons de nos jours. Au milieu des années 2010, les universités, les entreprises et les gouvernements au Canada estimaient tous qu'il était dans leur intérêt de renforcer leurs liens avec la Chine. Je pense que le premier ministre Harper a bien saisi l'esprit qui régnait en 2013, lorsqu'il a accueilli deux pandas chinois à Toronto:
Durant les prochaines années, ces pandas nous aideront à en apprendre plus les uns sur les autres, tout en nous rappelant que l'approfondissement de nos relations se fonde sur le respect mutuel et une collaboration croissante.
    C'était une autre époque.
    Certains d'entre vous se sont dits très préoccupés qu'un des deux donateurs soit le président de la China Cultural Industry Association, en raison de ses liens avec le gouvernement de la Chine. C'était bien compris à l'époque où le don a été négocié. Lorsque cette association a été fondée, en 2013, l'ambassadeur du Canada en Chine a écrit à son président et à ses membres pour les féliciter. J'ai des copies de cette lettre, que je peux vous remettre, mais j'aimerais d'abord en citer trois passages brefs:
Il est heureux qu'à bien des égards, vos objectifs et vos efforts concordent avec les nôtres, à l'ambassade du Canada en Chine. En fait, l'année dernière, lors de la visite du premier ministre Harper, le Canada et la Chine ont convenu d'organiser une série d'activités culturelles dans les deux pays en 2013 et 2014, dans le but de renforcer notre engagement bilatéral.
    La deuxième citation va comme suit:
J'aimerais souligner notre profonde gratitude pour le généreux don de votre association à la Faculté de médecine de l'Université de Toronto par la création du Fonds Bethune.
    Enfin:
Compte tenu de votre engagement ferme envers la coopération et les échanges culturels, votre association fera assurément office de chef de file d'une collaboration culturelle accrue entre le Canada et la Chine. Nous nous réjouissons de travailler en étroite collaboration avec votre association au cours des mois et des années à venir.
    Nous sommes persuadés que notre représentant gouvernemental en Chine avait les intérêts du Canada à coeur lorsqu'il a rédigé cette lettre. La China Cultural Industry Association était perçue comme un collaborateur positif par le gouvernement Harper. C'était bel et bien une autre époque.
    Nous croyons que dans ce contexte de réchauffement des relations, les donateurs étaient mus par un sincère désir de rendre hommage à l'héritage de Pierre Elliott Trudeau et par leur volonté d'appuyer le programme de conférences politiques de la Fondation.

  (1110)  

    Les conférences qui ont eu lieu sur les répercussions de la montée de la Chine rejoignaient nos thèmes centraux, soit le Canada, le monde et les droits de la personne. Les donateurs n'ont pas eu leur mot à dire sur le contenu de ces conférences, et c'était une condition importante pour la Fondation.
    Nous n'avons jamais pensé qu'un don de 200 000 $ pour des conférences influencerait ou pouvait influencer un gouvernement. À aucun moment les donateurs n'ont demandé à la Fondation de les mettre en contact avec des représentants du gouvernement ou quoi que ce soit d'autre. La Fondation n'a jamais coordonné ses activités avec des élus, ni avant ni après les élections de 2015.
    Merci.
    Merci beaucoup, monsieur Rosenberg.
    Nous allons maintenant passer à notre première série de questions.
    Monsieur Brock, vous avez la parole pour six minutes, s'il vous plaît.
    Merci, monsieur le président, et merci à tous les témoins d'être ici aujourd'hui.
    Monsieur Rosenberg, c'est principalement à vous que j'adresserai mes questions aujourd'hui.
    Le 2 mai, vous avez comparu devant le comité de l'éthique, et une députée libérale membre de ce comité vous a demandé s'il y avait eu ingérence de la part du gouvernement et du premier ministre relativement au don en question.
    Votre réponse a été la suivante:
Je ne suis au courant d'aucune communication avec le premier ministre, son bureau ou d'autres organismes au sein de l'appareil gouvernemental sur cette question.
    Plus tard, cette même députée libérale... En fait, ce n'était pas cette députée libérale, mais un député du NPD. M. Green vous a posé la question suivante: « Mme Fournier a déclaré qu'elle se souvenait d'avoir examiné des courriels entre la directrice administrative, Élise Comtois, et le Cabinet du premier ministre. Étiez-vous au courant de ces courriels? »
    Votre réponse a été la suivante:
Je ne m'en souviens pas, mais je dirai, en rétrospective, que s'il y avait des courriels et des documents qui soulevaient des questions à ce sujet, pourquoi la direction de la Fondation ne m'a‑t‑elle pas appelé pour avoir au moins mon avis sur la question, pour que je puisse voir les documents et...
    Je veux simplement vous poser quelques questions au sujet de ces déclarations, parce que personnellement, je trouve incroyable que vous disiez au Comité que vous n'étiez au courant d'aucune communication entre la Fondation et le Cabinet du premier ministre, surtout que Pascale Fournier a indiqué qu'il y a eu de nombreux courriels entre la Fondation et le Cabinet du premier ministre.
    Selon l'organigramme, Mme Elise Comtois était alors directrice administrative et elle relevait directement de vous, puisque vous étiez le président de la Fondation. Est‑ce bien exact?

  (1115)  

    C'est exact.
    D'accord. Je regarde donc l'un de ces courriels, en date du 24 novembre 2016, d'Elise Comtois directement à Zita Astravaz, membre de l'exécutif du Cabinet du premier ministre. Il commence ainsi, je traduis:
Bonjour Zita,
Tel que demandé...
    Cela veut dire à la demande du Cabinet du premier ministre.
... veuillez trouver ci‑dessous les principaux faits que nous avons dévoilés aux médias qui ont communiqué avec nous au sujet du don de 200 000 $ de Bin Zhang et de Niu Gensheng:
    Vous nous avez dit, à nous, au Comité, comme vous allez probablement me le répéter maintenant, que vous n'étiez absolument pas au courant de cette communication en particulier.
    Je ne crois pas que cette communication se trouvait dans la documentation. Je n'étais assurément pas au courant de cela au moment où j'ai témoigné. Je crois avoir dit qu'il était possible qu'il y ait eu des communications, pour demander...
    Je m'excuse. Avec tout le respect que je vous dois, vous n'avez pas dit que c'était possible. Vous avez dit que vous n'étiez pas au courant, que vous étiez sous le choc et que vous vous demandiez pourquoi, s'il y avait eu des communications, elles n'avaient pas été portées à votre attention, alors je vous pose la question évidente que tout le monde ici se pose: en réalité, que se passe‑t‑il à la Fondation pour qu'une personne portant le titre de directrice administrative, qui relève directement de vous, communique directement avec le Cabinet du premier ministre?
    N'oublions pas que le premier ministre et son gouvernement ont déclaré à maintes reprises à la Chambre qu'il y avait un pare-feu en tout temps entre lui, le gouvernement et la Fondation. Cela va complètement à l'encontre de cette version des faits.
    Pourquoi cela s'est‑il produit, et pourquoi n'étiez-vous pas au courant?
    Premièrement, tout cela remonte à il y a huit ans.
    Deuxièmement, une partie de ma réponse était la suivante: s'il y avait des documents à la Fondation qui le prouvaient, pourquoi, dans les semaines qui ont précédé les démissions, personne n'a communiqué avec moi?
    Mme Fournier n'était pas à la Fondation lorsque ces événements se sont produits. J'y étais, pour ma part, mais je n'avais aucune idée de ce qui se passait à la Fondation, et j'aurais...
    C'est de la négligence pure et simple, monsieur. C'est absolument...
    Eh bien, c'est votre point de vue, mais je ne suis pas d'accord.
    J'étais à la Fondation à l'époque. Je pense qu'il aurait été utile que quelqu'un m'appelle, plutôt que de décider de démissionner — je ne sais pas pourquoi ils ont démissionné —, et me demande de venir en parler, parce que je pense qu'il y a des explications très innocentes à tout ce qui s'est passé relativement à ce don.
    D'accord, monsieur, je dois passer à quelqu'un d'autre. Merci.
    Pascale Fournier a témoigné devant le comité de l'éthique. Elle a dit que son prédécesseur, Morris Rosenberg, avait dit au National Post, en décembre 2016, que la Fondation ne considérait pas le don comme de source étrangère, parce qu'il avait été fait par une compagnie constituée au Canada.
    Elle a dit aux députés qu'il s'agissait d'une information figurant « dans le rapport annuel... alors qu'en réalité, le reçu délivré aux fins d'impôt mentionne la Chine ». Elle a dit: « Je pense que cela induit les Canadiens en erreur. »
    Grâce à la documentation que notre comité ou d'autres comités ont reçue de la Fondation, j'ai eu accès à un relevé bancaire du compte de la Fondation. Il vient de la Banque de Montréal et concerne le premier versement reçu le 25 juillet 2016. J'imagine que vous allez me répondre: « Eh bien, je suis président. Je n'ai pas vu ce relevé, donc j'ai cru sur parole qu'il s'agissait d'un don canadien », alors qu'il est clairement indiqué, monsieur Rosenberg, que le 25 juillet, il s'agissait d'un don international. Il est écrit noir sur blanc qu'il s'agit d'un crédit international pour un don de 70 000 $ versé à la Fondation par l'intermédiaire de la Banque de Montréal.
    Vous n'avez pas vu ce relevé bancaire, n'est‑ce pas, monsieur?
    Je n'ai pas vu ce relevé bancaire. Il me semble qu'il ne faisait pas partie de la documentation. Il y a une allégation selon laquelle le nom figurant sur le reçu émis aux fins de l'impôt et le nom inscrit dans le rapport annuel ne concordent pas, et on m'a essentiellement accusé d'induire les Canadiens en erreur pour cela. Quelle est la nature de la tromperie?
    Nous avons reconnu que deux riches hommes d'affaires chinois, au lieu de l'entreprise par laquelle ils ont fait le paiement, ont en fait joué un rôle important ici. Je pense que nous avons ainsi fait preuve de plus de transparence que si nous avions inscrit le nom de la société Millennium dans notre rapport. On peut lire sans équivoque dans le rapport annuel qu'il y a des donateurs chinois derrière le don...

  (1120)  

    Avez-vous transmis ce document à l'ARC?
    Monsieur Brock, j'ai bien peur que votre temps soit écoulé.
    Monsieur Rosenberg, je crois que nous allons poursuivre dans la même veine. Je vous remercie.
    Nous allons maintenant passer à M. Sidhu.
    Monsieur Sidhu, vous vous joignez à nous virtuellement. Je suis heureux de vous voir. Vous avez la parole pour six minutes.
    Merci, monsieur le président, et merci à nos témoins de prendre le temps de se joindre à nous ce matin.
    Monsieur Rosenberg, j'aimerais commencer par vous remercier des services que vous avez rendus au Canada. Pour ceux qui nous regardent à la maison, il est important de souligner que M. Rosenberg a occupé des postes de très haut niveau, comme sous-ministre et d'autres postes de haut niveau dans des gouvernements dirigés par les conservateurs et les libéraux, y compris celui de sous-ministre des Affaires étrangères.
    M. Rosenberg a également reçu l'Ordre du Canada en 2015 pour son engagement envers notre pays, et je sais que de nombreux membres du Comité lui en sont reconnaissants.
    Monsieur Rosenberg, ma question s'adresse à vous. Comme vous travaillez au sein de la Fondation Pierre‑Elliott‑Trudeau depuis un certain nombre d'années, seriez-vous en mesure de fournir un résumé du mandat de la Fondation et de la façon dont son mandat et ses activités ont évolué au fil des ans? Je pense qu'il est important que les gens qui nous écoutent le sachent.
    La Fondation existe depuis le début des années 2000. Je crois que M. Johnson vous a dit lors de sa comparution la semaine dernière que la Fondation a investi plus de 90 millions de dollars dans des programmes de mentorat et de bourses doctorales. Il s'agit d'une initiative unique en son genre qui permet de mobiliser certains des universitaires les plus éminents dans le domaine des sciences humaines et sociales en même temps que des intervenants à l'extérieur du monde de l'éducation dans le cadre d'une véritable approche intergénérationnelle, intersectorielle et interdisciplinaire.
    Je pourrais vous parler de l'évolution de la Fondation… tout au moins pendant la période où j'étais présent. Il y avait bien sûr ces très généreuses bourses qui ont permis à des doctorants de mener à terme leurs études, mais j'estimais que l'aide de la Fondation était surtout précieuse du fait que ces jeunes avaient l'occasion d'interagir avec des gens de tous les milieux et de tous les horizons et d'apprendre à mieux connaître le Canada.
    Année après année, nous avons déployé des efforts considérables pour dépêcher des boursiers dans différents endroits isolés du pays pour qu'ils y rencontrent, non pas des universitaires, mais des Canadiens ordinaires, des gens d'affaires et des étudiants. Dans le cadre d'un de nos programmes, des chercheurs et des boursiers se rendaient dans les écoles secondaires pour parler aux jeunes de leurs travaux dans des termes qu'ils étaient à même de comprendre, une prise de contact qui permettait en outre à ces jeunes de rêver un peu à ce qu'ils pourraient peut-être eux-mêmes accomplir.
    Un grand nombre de nos boursiers venaient de milieux très défavorisés. Nous en avons eu un qui était sans abri et qui s'est presque retrouvé en prison. Il a repris sa vie en main pour devenir doctorant à l'Université de Toronto. Je crois d'ailleurs que son nom — Jesse Thistle — a été mentionné lors d'une de vos séances.
    Il y en a un autre dont la famille, extrêmement pauvre, a immigré en provenance du Ghana alors qu'il avait huit ans. Il a grandi dans des logements sociaux à Toronto. Il a finalement décroché un doctorat en histoire à Yale pour ensuite enseigner à Harvard, puis maintenant à McGill où il vient de remporter un prix à titre de professeur émérite.
    La Fondation est vraiment à l'origine d'histoires qui sont inspirantes. Je crois pour ma part qu'elle a accompli un travail remarquable.
    Nous voulions notamment nous assurer que nos boursiers comprennent le fonctionnement du gouvernement. Nous avons ainsi eu l'occasion de rencontrer des fonctionnaires et des gens de la Bibliothèque du Parlement. Nos jeunes ont ainsi pu apprendre comment interagir, par exemple, avec le Parlement en plus de bénéficier d'une expérience enrichissante à tous les points de vue.
    J'espère avoir répondu à votre question.
    Merci pour cette réponse très détaillée.
    Vous avez parlé de gens de tous les milieux et de tous les horizons. Lorsque des boursiers sont évalués par la Fondation, est‑ce qu'on tient compte de leurs allégeances politiques ou de leurs penchants idéologiques?

  (1125)  

    Aucunement.
    C'est bon à savoir.
    Combien d'étudiants ont pu bénéficier du merveilleux travail accompli par la Fondation?
    Je ne suis pas tout à fait sûr du nombre. M. Johnson aurait pu vous donner ces chiffres la semaine dernière. Je pense que c'est quelque chose comme 290, mais il faudrait vérifier.
    Merci.
    Est‑ce que le fonds de dotation de 125 millions de dollars est la principale source de revenus de la Fondation? Est‑ce qu'il y a d'autres sources de revenus?
    La principale source de revenus est effectivement le fonds de dotation. Il va de soi que la Fondation peut bénéficier de ce fonds uniquement si elle ne touche pas au capital. Elle doit financer ses activités au moyen des intérêts gagnés.
    À ce sujet, M. Johnson a mentionné la semaine dernière que le capital atteint maintenant quelque chose comme 147 000 $, si je ne m'abuse. Il faut ajouter à cela certains dons, même s'ils ne sont pas nombreux. Le don le plus important a été fait par la Fondation McCall MacBain aux environs de 2016.
    Merci.
    De quel montant était ce don?
    Je n'en suis pas certain, mais je crois qu'il se chiffrait en tout et pour tout à environ 3 millions de dollars.
    Ma dernière question porte sur la mise sur pied de la Fondation Pierre‑Elliot‑Trudeau. Est‑ce que tous les partis politiques ont appuyé la création de cette fondation?
    Je crois que tous les partis l'ont appuyée, sauf le Bloc québécois.
    Merci beaucoup.
    Merci, monsieur le président.
    Merci beaucoup.

[Français]

    Madame Sinclair‑Desgagné, vous avez la parole pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Bonjour à tous les témoins.
    Monsieur Rosenberg, vous souvenez-vous d'avoir signé des reçus fiscaux pour les dons, déposés en plusieurs versements, provenant de l'entreprise Aigle d'or du millénaire international?
    Je reconnais que je les ai signés, mais je ne me souviens pas des détails.
    Je vais passer à l'anglais pour vous fournir des explications.

[Traduction]

    Beaucoup de gens se demandent pour quelle raison l'alerte n'a pas été sonnée lorsque j'ai signé un reçu avec une adresse en Chine. D'après les documents diffusés en réponse à une demande d'accès à l'information, il semblerait que les employés n'aient soulevé aucune préoccupation en préparant les reçus en question et que je ne l'aie pas fait non plus par la suite. Comment donc cela est‑il possible?
    Disons d'abord et avant tout que la Fondation a mis en place des mesures de contrôle pour la signature des reçus, une fonction strictement administrative, et que je m'en remets à ces mesures. Par ailleurs, la façon dont les questions sont formulées donne presque à penser que j'aurais dû consacrer une période assez longue à l'examen des reçus relatifs à ce don. Bien que je ne me souvienne pas des circonstances exactes, il est fort probable que quelqu'un m'a présenté une pile de correspondance que je devais signer, et que je suis rapidement passé à travers en portant mon attention davantage sur le contenu des lettres que nous envoyions, que sur la teneur d'un reçu.

[Français]

    Monsieur Rosenberg, vous êtes avocat. Vous savez que vous ne pouvez pas signer un document sans l'avoir lu. C'est la base en droit.
    Je n'ai pas dit que je n'avais pas lu les documents. J'ai dit que, dans une organisation, on doit établir des priorités.
    Je reconnais que d'autres choses se passaient à ce moment-là. Est-ce que j'ai pris tout le temps nécessaire pour regarder chaque document en détail? Ce n'est probablement pas le cas.
    Ma prochaine question correspond exactement à ce que vous venez de dire.
    Selon le témoignage de Mme Fournier, il est très clair que les employés de la Fondation Pierre‑Elliott‑Trudeau recevaient des consignes leur indiquant à qui adresser les reçus. Est-ce que vous...
    J'ai vu cela dans les documents, et voici l'interprétation que j'en fais.
    On sait déjà qu'il y a un lien entre M. Zhang et la China Cultural Industry Association. Les employés de M. Zhang étaient des employés de cette association. Je pense qu'il s'agissait d'avoir quelqu'un qui était capable de traiter avec nous en anglais.
    Deux choses ont été faites. Premièrement, il y a eu une correspondance entre des employés de la Fondation et cette personne en Chine pour traduire la lettre de remerciement que j'ai envoyée au donateur. Deuxièmement...
    Vous l'avez envoyée en mandarin, d'ailleurs. Pourtant, cette personne parlait anglais.
    Vous est-il arrivé souvent, durant votre carrière, d'envoyer des lettres en mandarin?
    Ce n'est pas moi qui ai envoyé la lettre.
    Apparemment, c'est vous qui l'avez signée.
    Oui, je l'ai signée, parce qu'on m'avait assuré que le contenu de cette lettre était une traduction exacte de ce que nous avions rédigé en anglais. Il s'agissait de transmettre au donateur un document qu'il pourrait comprendre. Il ne comprend pas l'anglais. Il y a donc eu une correspondance à propos de la traduction ainsi qu'au sujet de l'adresse.

  (1130)  

    Monsieur Rosenberg, c'est pourtant une compagnie qui est bien canadienne et qui n'est pas une coquille vide, comme vous l'avez dit dans votre discours d'ouverture. Alors, pourquoi lui avoir écrit une lettre en mandarin? Si c'est une compagnie canadienne, normalement, on devrait s'adresser à elle dans la langue d'usage de la compagnie.
    Non. Je pense que le reçu a été envoyé à la compagnie. La lettre a été envoyée à Zhang Bin et Niu Gensheng.
    Nous sommes d'accord pour ce qui est des reçus fiscaux.
    Par contre, vous êtes en train de dire que le donateur est une personne qui parle seulement mandarin. Pourtant, le don a été fait par Aigle d'or du millénaire international. Je suis désolée, mais c'est très peu clair.
    Si c'est la compagnie canadienne Aigle d'or du millénaire international qui a fait le don, pourquoi avoir remercié une tierce personne qui ne parle que mandarin?
    Cette question a peut-être été soulevée dans l'autre comité où M. Alexandre Trudeau a témoigné.
    Ce que je comprends, c'est qu'il n'est pas inusité que quelqu'un demande à une compagnie qu'il contrôle de verser de l'argent. Je pense que c'est ce qui est arrivé.
    Je dois dire que je reçois beaucoup de questions sur l'adresse et sur l'identité des donateurs. Je ne suis cependant pas en mesure de vous dire exactement ce qui s'est passé. S'il y a des préoccupations à ce sujet, c'est exactement le genre de choses qui peuvent être examinées dans le cadre d'une enquête indépendante ou d'une enquête menée par l'Agence du revenu du Canada. Pour faire cela, il faut...
    Êtes-vous d'accord sur le fait qu'il devrait y avoir une enquête publique et indépendante?
    Je dois faire une distinction.
    D'une part, il y a toute la grande question d'une enquête publique à propos de l'ingérence étrangère.
    D'autre part, je pense que M. Blake Desjarlais a demandé à M. Johnson, l'autre jour, si la Fondation Pierre‑Elliott‑Trudeau devait être incluse là-dedans.
    Je vous ai posé une question très précise: êtes-vous d'accord? Vous venez de dire qu'il devrait y avoir une enquête publique et indépendante.
    Vous êtes avocat et vous avez travaillé pendant 34 ans dans la fonction publique, alors vous savez qu'une apparence de conflit d'intérêts est plus importante que le conflit d'intérêts lui-même. S'il y a apparence d'ingérence étrangère par l'entremise de la Fondation Pierre‑Elliott‑Trudeau, il faut faire disparaître ce doute pour s'assurer que la démocratie canadienne fonctionne bien.
    Alors, êtes-vous d'accord?
    Je vous laisse le temps de répondre, monsieur Rosenberg.
    Je suis d'accord, mais pas nécessairement sur le fait de tenir cette enquête dans le cadre de la grande enquête sur l'ingérence étrangère. Je vais vous expliquer mon point de vue.
    Je pense qu'il est important pour la Fondation Pierre‑Elliott‑Trudeau et pour sa réputation qu'une réponse soit obtenue dans un délai plus rapide que le temps qu'il faudrait pour organiser une enquête publique. Je sais que la Fondation a entamé des démarches auprès d'un cabinet d'avocats indépendant. Ce n'est pas à moi de prendre une décision, mais j'espère que les détails de cette situation pourront être résolus dans un avenir proche, parce que c'est vital pour la Fondation.

[Traduction]

    Monsieur Desjarlais, vous avez la parole pour les six prochaines minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je veux aussi remercier nos témoins, et tout particulièrement M. Rosenberg, de leur présence aujourd'hui. Vous voudrez bien m'excuser de ne pas être sur place avec vous, mais j'ai été aux prises récemment avec un problème de sinus.
    Je veux poursuivre dans le sens des interventions de ma collègue du Bloc québécois. Elle a fait référence aux questions que j'ai posées à un de vos anciens collègues, Edward Johnson. Je suis persuadé que vous anticipez déjà certaines de mes questions quant à la tenue d'une enquête publique et à la nécessité qu'elle soit indépendante, comme j'ai été ravi de vous l'entendre recommander dans vos réponses à un de mes collègues. Je vais donc me concentrer notamment sur ce point.
    Monsieur Rosenberg, vous avez travaillé au sein de la fonction publique. Je vous suis moi aussi reconnaissant pour les services ainsi rendus aux Canadiens et aux Canadiennes. J'aimerais faire appel à votre expertise, à vos connaissances et à votre expérience pour savoir comment on peut contrer une telle impression d'ingérence étrangère. J'estime pour ma part qu'il faut tenir une enquête publique pour tenter de dissiper cette perception d'une démocratie affaiblie. Je pense que partout au pays les Canadiens sont un peu du même avis.
    Mes questions vont donc porter directement sur la nécessité de s'attaquer à l'ingérence étrangère, sur le rôle joué par la fondation Trudeau, ou tout au moins par les médias, pour altérer l'image que nous nous faisons de notre démocratie, et sur les moyens à notre disposition pour sortir de cette crise de façon crédible de telle sorte que les Canadiens puissent reprendre confiance dans notre régime démocratique. J'estime qu'il s'agit là d'un objectif important qu'il vaut la peine de chercher à atteindre, et que notre comité peut y contribuer.
    Pas plus tard que la semaine dernière, j'ai demandé à votre ancien collègue Edward Johnson s'il serait favorable à une intervention de la vérificatrice générale en vue d'une enquête sur la fondation Trudeau. Il m'a répondu par l'affirmative en me précisant qu'il avait même écrit à la vérificatrice générale à ce moment‑là pour demander un audit. Notre comité a reçu copie de cette requête ainsi que de la réponse de la vérificatrice générale qui a indiqué très clairement qu'il lui était impossible de le faire. C'est dans ce contexte que j'ai déposé une motion pour que l'on demande à l'Agence du revenu du Canada (ARC) d'entreprendre une enquête pour le Comité. Je suis heureux de pouvoir vous dire que cette motion a été adoptée. J'ai également été ravi d'entendre vos remarques à ce sujet.
    Êtes-vous toujours en faveur d'une enquête de l'ARC sur la fondation Trudeau?

  (1135)  

    C'est à l'ARC qu'il incombe de décider de ses propres activités. J'ai jeté un coup d'œil sur les témoignages des hauts dirigeants de l'ARC devant le Comité. Je pense que M. Johnson a en fait indiqué que si l'ARC souhaite se pencher sur la situation à la fondation Trudeau, ce serait sans doute une bonne chose à ce moment‑ci, car étant donné le chahut causé et toute l'encre qui a coulé à ce sujet, il faut faire le nécessaire pour tirer les choses au clair.
    Ceci dit très respectueusement, ce n'est pas un comité parlementaire qui va pouvoir s'en charger, car c'est une tribune où la partisanerie prend trop de place. Il faudra s'en remettre à un autre mécanisme.
    L'ARC est une possibilité, mais je ne dirais pas qu'elle exclut tout le reste. On pourrait y arriver aussi, comme la fondation Trudeau essaie de le faire actuellement, en confiant à une firme n'ayant aucun lien avec la Fondation le soin de procéder à un examen judiciaire indépendant. D'après ce que j'ai pu lire dans les journaux, les discussions se poursuivent entre les représentants des différents partis politiques quant aux mesures à prendre dans la foulée de la démission de M. Johnston.
    Je me demande bien, au vu de certains enjeux… Je ne suis pas en train de dire que le dossier de la fondation Trudeau ne mérite pas notre attention. C'est assurément le cas, mais il y a bien d'autres questions que nous devrions examiner pour ce qui est notamment de l'ingérence étrangère; de l'intimidation des ressortissants; de la diplomatie des otages; des sanctions commerciales; et des pressions qu'exerceraient les Instituts Confucius pour censurer certains sujets d'étude. C'est tout autre chose que ce que nous avons ici avec ce « don » permettant la tenue de conférences. Nous aurions très bien pu organiser une conférence portant sur la Place Tiananmen, et ces gars‑là n'auraient pu rien y faire. C'est plutôt étrange comme exercice d'ingérence, car ce sont en fin de compte les Chinois eux-mêmes qui se seraient retrouvés dans l'embarras.
    Ils voulaient au départ que l'on offre des bourses. On court beaucoup moins de risques avec des bourses qu'avec des conférences. Même si une conférence porte un titre qui semble inoffensif, je connais trop bien les gens de la fondation Trudeau. Ils n'auraient jamais fait de compromis sur les enjeux liés aux droits de la personne. Même chose pour le changement climatique. Les échanges auraient été très musclés, ce qui n'aurait pas été dans le sens de ce que les Chinois souhaitent entendre. Je croyais donc en fait qu'il s'agissait d'une proposition très favorable.
    Voilà qui est intéressant.
    Monsieur Rosenberg, ces considérations mises à part, je pense qu'il demeure important que l'on tienne une enquête publique indépendante… Vous avez recommandé une enquête indépendante, et je souscris tout à fait à cette proposition, mais il faut également que cette enquête soit publique.
    Lorsque j'ai posé la question à M. Johnston, il m'a répondu qu'il ne croyait pas pouvoir appuyer la tenue d'une enquête publique.
    Partagez-vous l'avis de M. Johnston à ce sujet?
    Je voudrais d'abord et avant tout que l'on agisse rapidement, peu importe la solution retenue, car j'estime que la fondation Trudeau a besoin d'un certain degré de certitude pour pouvoir aller de l'avant.
    Nous sommes en train de discuter de la question en public. Ce comité…
    Ceci dit très respectueusement, monsieur Rosenberg, les besoins de la fondation Trudeau ne sont pas nécessairement ceux des Canadiens. Votre appel pour que l'on agisse rapidement ne m'apparaît pas comme l'un des facteurs principaux pouvant étayer la justification d'une enquête publique.
    Je crois en l'importance d'une telle enquête, mais pas parce que la fondation Trudeau a besoin d'une solution expéditive pour pouvoir poursuivre ses activités. C'est important parce que les Canadiens doivent pouvoir faire pleinement confiance à leur système démocratique. C'est pour cette raison que je préconise une enquête publique indépendante.
    Je suis conscient du travail que M. Johnston a pu accomplir avec sa propre équipe, mais j'estime que la tenue d'une enquête publique demeure primordiale. Je vais donc vous demander encore une fois pourquoi vous estimez qu'une enquête publique est si différente d'une enquête indépendante, et pour quelles raisons vous n'êtes pas favorable à cette dernière solution.
    Merci, monsieur Desjarlais.
    Monsieur Rosenberg, si vous avez une brève réponse, je vais vous permettre de la donner.
    Je dois reconnaître que le député ne lâche pas prise facilement. Presque toutes les questions qu'il a adressées à Ted Johnson portaient sur cet aspect.
    Tout bien considéré, ce n'est pas la fondation Trudeau qui va décider de la suite des choses. Ce sont plutôt les représentants de tous les partis qui devront discuter pour déterminer la teneur d'une éventuelle enquête publique de grande envergure.
    Il faudra voir ce qui sera alors décidé. Si l'on opte effectivement pour une enquête publique, la fondation Trudeau devra s'adapter.

  (1140)  

    Merci beaucoup. Nous allons maintenant passer à notre prochain tour de questions.
    Monsieur Brock, vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Rosenberg, conviendriez-vous avec moi que la Fondation se targue de véhiculer les valeurs éthiques et morales les plus élevées qui soient?
    Oui.
    D'accord.
    Ne diriez-vous pas comme moi que cette perception a été quelque peu mise à mal au cours des dernières années? Il y a d'abord eu l'ingérence de Pékin avec ce don douteux à la Fondation. Plus récemment, une poursuite de 1,25 million de dollars a été intentée par une ancienne boursière de la Fondation à l'encontre d'un mentor.
    Vous conviendrez avec moi que c'est l'image globale de la Fondation qui en souffre.
    Il est bien certain que cela n'aide pas.
    Non.
    Monsieur Rosenberg, j'aurais quelques questions pour vous.
    Cette poursuite judiciaire a été intentée le 31 mars 2022. D'après ce que j'ai pu comprendre, la Fondation n'aurait pas encore présenté de défense.
    Est‑ce bien ce que vous avez pu comprendre également?
    Je ne suis pas certain; je ne fais pas partie des défendeurs dans cette cause.
    Je vois.
    À votre connaissance, est‑ce qu'une enquête criminelle est également en cours?
    Je l'ignore.
    D'accord.
    J'aurais maintenant quelques questions concernant le contenu de la demande introductive d'instance.
    Aux dires de la plaignante, elle aurait signalé le harcèlement aux dirigeants de la Fondation qui ont immédiatement remis en question sa version des faits.
    Je peux même vous rappeler, monsieur Rosenberg, qu'elle a porté l'affaire à votre attention le 11 juin 2018.
    Vous avez communiqué avec elle pour lui demander un entretien relativement à ses allégations. Vous lui avez parlé au téléphone le 22 juin. Lors de cet appel, vous auriez accusé la plaignante de monter les choses en épingle, et vous l'auriez questionné au sujet de l'incident signalé pour savoir si le prévenu l'avait empoignée de façon familière ou sexuelle ou s'il l'avait caressée.
    Vous souvenez-vous d'avoir tenu de tels propos?
    Êtes-vous en train de lire la déclaration de la plaignante?
    Exactement.
    On n'a pas encore présenté de défense.
    Je veux savoir si vous reconnaissez…
    Non, pas du tout.
    Reconnaissez-vous avoir parlé avec la plaignante…
    Oui.
    ... à peu près à cette époque‑là concernant ses allégations?
    Oui, mais je n'ai pas…
    Vous niez lui avoir dit que vous ne la croyiez pas, ou…
    Tout à fait.
    … ou avoir remis en doute ses allégations.
    Je lui ai posé la question, mais je n'ai certainement pas rejeté ce qu'elle me disait
    D'accord.
    Niez-vous que la Fondation, notamment par l'entremise de plusieurs membres de son conseil d'administration, a exercé des pressions sur la plaignante pour qu'elle signe une entente de non-divulgation, et ce, en deux occasions plutôt qu'une?
    Je ne saurais vous le dire, car cela se serait produit après mon départ de la Fondation.
    D'accord.
    Lorsque vous étiez président de la Fondation — car c'est bel et bien vous qui avez signé l'entente entre cette plaignante et son mentor —, je crois qu'aucune politique concernant le harcèlement sexuel n'était en place. Est‑ce exact?
    C'est exact. Il y avait alors de nombreuses organisations qui n'avaient pas adopté de politique en la matière. Lorsque nous avons commencé à prendre davantage conscience…
    Je ne parle pas des autres organisations.
    M. Morris Rosenberg: Oui. J'ai répondu...
    M. Larry Brock: Ceci dit très respectueusement, je parle de la fondation Trudeau—
    M. Morris Rosenberg: J'ai répondu à votre question.
    J'invoque le Règlement, monsieur le président. Ces questions sortent du cadre de notre étude. J'estime qu'il serait tout à fait inapproprié de permettre à notre collègue de poursuivre dans le même sens. Nous ne sommes pas au tribunal. C'est une séance de comité, et je pense qu'il est totalement inapproprié…
    Il pose des questions sur cette affaire de harcèlement sexuel
    Merci, monsieur Genuis.
    Madame Shanahan, les questions sont posées sans ménagement, mais de façon respectueuse. M. Rosenberg y répond à chaque occasion. Je vais permettre à M. Brock de poursuivre dans la même veine. Comme vous le savez, je laisse toujours aux membres du Comité toute la latitude voulue pour poser leurs questions, pour autant qu'ils fassent montre de respect.
    Monsieur Brock, vous pouvez continuer.
    Avant de me faire interrompre, monsieur, pour un rappel au Règlement qui n'en était pas vraiment un, je vous ai demandé de répondre à mes questions en vous concentrant sur la Fondation.
     Vous avez signé l'entente. Aucune politique concernant le harcèlement sexuel n'était en place pour la boursière et le mentor. Est‑ce exact?
    Il n'y avait pas de politique sur le harcèlement sexuel — c'est exact.
    Reconnaissez-vous que la Fondation fait tout ce qui est en son pouvoir pour empêcher que cette affaire soit entendue? La poursuite a d'abord été déposée auprès des tribunaux en Colombie-Britannique, puis à Terre-Neuve, où les faits allégués se seraient produits. Et maintenant, la Fondation dit que l'affaire doit être débattue dans la province de Québec. Reconnaissez-vous que la Fondation lui fait subir cela également?

  (1145)  

    Je n'ai pas travaillé pour la Fondation depuis 2018 et je ne suis pas au courant de toutes les stratégies qu'elle utilise.
    N'êtes-vous pas au courant des nouvelles au sujet de ces allégations, monsieur? N'en avez-vous pas pris connaissance?
    Eh bien, j'ai vu les reportages.
    Vous n'avez pas discuté de ces allégations avec les membres du conseil d'administration actuels.
     Non.
    D'accord.
     Pendant votre mandat, monsieur, il y a eu des activités douteuses entourant votre congédiement. Était‑ce lié à la mauvaise gestion de cette plainte?
    Puisque j'ai parlé de cette question devant l'autre comité, permettez-moi d'y revenir un instant, si vous le voulez bien, parce qu'il s'agit vraiment ici de ma réputation. À cet autre comité, on a laissé entendre que j'avais été congédié. Le président du comité a demandé à Mme Fournier si j'avais été congédié. Elle a répondu qu'elle n'en savait rien. Je pense qu'elle le sait très bien.
    Voici ce qui s'est passé. J'avais un contrat de quatre ans avec la Fondation qui se terminait en 2018. Je vivais à Ottawa et je faisais la navette. En avril 2017, plus d'un an avant mon départ, j'ai dit au président que je ne voulais pas renouveler mon contrat. J'ai eu de très bonnes évaluations tout au long de mon parcours et je lui ai donné un préavis de plus d'un an parce que je voulais que la Fondation puisse lancer le processus qu'il fallait pour trouver un successeur, ce qu'elle a fait, et elle a trouvé Mme Fournier.
     Mme Fournier et moi avons alors eu l'occasion de travailler en parallèle pendant plusieurs semaines afin qu'elle s'habitue à la Fondation. Je n'ai pas du tout été congédié. Une très belle fête a eu lieu pour souligner mon départ, un très beau cadeau de la part de certains des administrateurs...
    M. Garnett Genuis: [Inaudible]
    Monsieur Genuis, ce n'est pas nécessaire.
    M. Morris Rosenberg: Non. C'est un autre cadeau.
    Le président: Monsieur Rosenberg, je vous remercie de la réponse. Je suis sûr que nous y reviendrons.
    Je cède maintenant la parole à Mme Yip.
    La parole est à vous pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président. Merci à tous les témoins de leur présence.
     Monsieur Rosenberg, vouliez-vous finir de répondre à la question précédente?
    Je vous remercie de me le demander, car parfois, je ne peux pas finir de répondre aux questions qui me sont posées à la fin de l'intervention.
    La Fondation ne m'a pas congédié. C'est tout à fait faux. J'ai choisi le moment de mon départ et j'ai essayé de le faire de la façon la plus convenable possible.
    Dans votre déclaration préliminaire, vous sembliez mentionner qu'il y a eu un don dont nous parlons tous. L'intention semblait positive, soit d'établir réellement des relations avec le gouvernement canadien, qui était le gouvernement Harper à l'époque, en soutenant les études postsecondaires. Pourriez-vous nous donner votre point de vue à ce sujet et nous fournir la lettre que vous avez dit pouvoir nous donner?
    Oui, je fournirai une copie de la lettre. Je ne connais pas la procédure de votre comité à cet égard — je n'ai pas été autorisé à fournir des documents papier à l'autre comité —, mais je le ferai.
    La lettre provient du site Web de la China Cultural Industry Association. On trouve beaucoup de renseignements sur ce site. Beaucoup de lettres de félicitations ont été rédigées par des gens de partout dans le monde, y compris d'un certain nombre de personnes au Canada — du gouvernement du Québec, par exemple. Je n'ai pas la liste complète ici. Ils étaient bien connus et je ne nie pas qu'il y ait eu des liens avec le gouvernement chinois. Cependant, je pense que tout le monde a compris que nous avions affaire à un gouvernement communiste chinois.
     D'après ce que je comprends, qu'il s'agisse de sociétés d'État chinoises comme la CNOOC, qui a acheté Nexen Energy pour 15 milliards de dollars — il ne s'agit pas d'une société privée indépendante, mais d'une société contrôlée par le Parti communiste chinois —, tout le monde était ouvert à l'idée de faire des affaires avec la Chine. Cependant, nous pensions tous à l'époque que le jeu en valait la chandelle étant donné que la Chine était la superpuissance montante dans le monde.
     Je pense que lentement — et c'était lentement —, nous avons commencé à nous rendre compte que cette relation était très difficile. Au milieu des années 2010, on a commencé à voir des vols de propriété intellectuelle et des recherches à double usage et à se demander si les universités faisaient preuve de suffisamment de diligence dans l'examen de ces questions. En même temps, nous continuions à mener des activités culturelles avec la Chine, même en 2017.
    Dans le magazine Affaires universitaires, j'ai trouvé un article du recteur de l'Université d'Ottawa dans lequel il indique que tout le monde devrait faire de la recherche avec la Chine. En 2015, l'Université de la Colombie-Britannique a annoncé un grand projet de recherche avec la Chine.
     La prise d'otages des deux Michael nous a vraiment fait prendre conscience que nous étions dans un autre monde. Avec la diplomatie du loup guerrier, le traitement réservé aux Ouïghours, la façon dont on traite Hong Kong, ce n'est pas ce à quoi nous pensions avoir affaire. Je pense que cela a changé notre perception.

  (1150)  

    Les communautés de la diaspora sont stigmatisées injustement dans le cadre de ce débat, car les gens confondent les Canadiens d'origine chinoise et la RPC.
     Que pouvons-nous faire pour établir une distinction claire... et nous assurer que nous protégeons tous les Canadiens?
    Je suis d'accord avec vous: c'est un problème.
    Tout d'abord, ces personnes doivent pouvoir raconter leur histoire. Quel que soit le processus qui résultera des négociations, j'espère vraiment que les communautés de la diaspora pourront s'exprimer. Je sais qu'une association de gens originaires de Hong Kong s'est beaucoup fait entendre.
     Cependant, c'est également vrai pour des citoyens iraniens et peut-être des citoyens indiens, et même des Russes expatriés. Toute personne dont la famille est restée dans un État autoritaire est susceptible de subir du harcèlement en raison de ce qu'on peut faire à sa famille. Il faut comprendre ces éléments et les examiner.
    Nous voulons également trouver des moyens de les protéger. Nous les protégeons en agissant peut-être de façon un peu plus proactive qu'auparavant, par exemple, sur la question des postes de police chinois. Le gouvernement a commencé à agir, à expulser ces gens et certains diplomates. Nous devons nous défendre.
     J'aimerais que vous répondiez tous à ma prochaine question. Pendant que vous étiez à la Fondation, est‑ce d'autres pays étrangers ont fait des dons, et comment cela a‑t‑il été géré?
    Je ne pense pas que l'un des autres témoins ici présents était à la Fondation. Je vais donc peut-être répondre à la question.
     Eh bien, il y a eu d'autres... Tout d'abord, il ne s'agissait pas d'un don étranger, bien que nous débattions de cette question. Le don étranger le plus important a été fait par le président de la Fondation McCall MacBain, soit John McCall MacBain, un Canadien vivant à Genève. Sa fondation est basée en Suisse. Il y a eu d'autres dons plus modestes, mais rien de cette ampleur. Il n'y a certainement pas eu d'autres dons chinois...
    Merci.
    Nous allons nous arrêter ici, car vous avez répondu à la question et le temps est écoulé. Nous pourrons y revenir.

[Français]

    Madame Sinclair‑Desgagné, vous avez la parole pour deux minutes et demie.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais revenir sur mes questions précédentes.
    Il y a une différence majeure entre votre témoignage et celui de Mme Fournier. Au moins, vous le reconnaissez; c'est déjà une première étape.
    Mme Fournier indique qu'il y a eu des communications entre des personnes basées en Chine et la Fondation sur ce qu'il fallait inscrire sur les reçus fiscaux. Êtes-vous au courant de cela?
    Oui, je suis au courant, parce que, dans les 160 pages, certains documents donnent...
    À l'époque, étiez-vous au courant de cela?
    Non.
    Vous étiez le PDG, mais vous n'étiez pas au courant que vos employés recevaient des consignes de Pékin.
    Non, je n'étais pas au courant. Comme je l'ai dit, des personnes à la Fondation étaient responsables de tout le processus relatif aux dons et aux reçus. À mon avis, nous n'avons pas eu ces discussions. On peut d'ailleurs remarquer, dans les documents, que les courriels ne m'ont même pas été envoyés en copie conforme.
    Normalement, vous devriez savoir ce que font vos employés. C'est la base, quand on est président-directeur général.
    Quand il y a eu...
    Je me fie à mes employés pour réaliser leur part du mandat de la Fondation. Si on est le directeur général d'une organisation qui n'a pas nécessairement beaucoup d'employés et qu'on a énormément de travail, on doit décider où on va mettre son énergie et on se fie à ses employés.
    C'est parfait.
    Le don a été fait à partir de Pékin au nom de deux donateurs, mais c'est un nom différent qui a été inscrit sur le reçu fiscal. Vous n'étiez pas au courant de ce que faisaient vos employés, mais, si vous l'aviez su à ce moment, auriez-vous trouvé cela acceptable?
    Pour être franc, je n'ai pas eu l'occasion d'y penser à ce moment. Pour moi, l'essentiel, c'est que le reçu a été remis à la personne morale qui a fait le don. C'est seulement cette personne...
    Vous trouvez acceptable d'inscrire un nom différent sur le reçu fiscal même si c'est condamnable par l'Agence du revenu du Canada?

  (1155)  

    Laissons l'Agence du revenu du Canada nous dire s'il y a quelque chose qui ne marche pas.
    C'est la loi et vous la connaissez. On ne peut pas recevoir un don d'une personne et remettre le reçu fiscal à une autre personne.
    En tant que PDG, auriez-vous condamné vos employés pour de tels gestes?
    De ce que je comprends, le reçu a été donné à la personne qui a fait le don, soit à la filière canadienne de l'entreprise Millenium Golden Eagle International.
    Pourtant, ce sont des donateurs en Chine qui ont fait le don.
    Votre temps de parole est écoulé, madame Sinclair‑Desgagné. Merci beaucoup.

[Traduction]

    Monsieur Desjarlais, vous avez la parole pour deux minutes et demie. Allez‑y, s'il vous plaît.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
     J'aimerais également poursuivre sur un point, monsieur Rosenberg, que vous avez mentionné précédemment concernant les relations que la Fondation avait avec la Chine à l'époque où vous étiez chef de la direction et la nature des intentions du gouvernement à l'égard de la Chine. Vous avez donné deux exemples qu'il me semble juste de mentionner. Le premier est l'intention de l'ancien premier ministre Harper d'accueillir des pandas comme symbole de bonne volonté et de resserrement des relations. Vous avez également parlé, bien sûr, de l'achat d'actifs pétroliers canadiens sous le même régime des conservateurs. Ce sont là deux exemples, sous le gouvernement conservateur, qui démontrent bien sûr la volonté, tant des conservateurs que du gouvernement en place, et leur intention de renforcer les relations entre le Canada et la Chine.
     Vous avez bien entendu mentionné que la situation des deux Michael avait tout changé. Cela a bien sûr été dévastateur pour les Canadiens, et peut en fait avoir été dévastateur pour de nombreuses personnes au sein de la fonction publique. En vous fondant sur votre expérience, en particulier lorsque vous étiez chef de la direction de la Fondation, vous avez dit que cela faisait partie de la culture, disons, du gouvernement et que la Fondation Trudeau participait à cette culture qui consistait à essayer de bâtir des liens avec la Chine. Au cours de la première série de questions, vous avez également mentionné que lorsque la Fondation Trudeau a accepté le don, elle aurait pu organiser une conférence portant sur la place Tiananmen, par exemple. C'est quelque chose que vous avez dit pendant votre témoignage.
    Dans ce contexte, cela ne serait‑il pas suffisant, du moins dans le cas de ce projet, pour que, après avoir constaté la tenue d'une telle conférence, les Chinois refusent de faire des dons à la Fondation Trudeau à l'avenir? Cela n'aurait‑il pas en quelque sorte mis en péril la réalisation des objectifs de la Fondation, en particulier dans la culture de l'époque?
    C'est une question très hypothétique, et je ne le sais pas, mais je peux vous dire que j'imagine que le titre d'une conférence aurait probablement été plus neutre. Nous le faisions avec la Faculté de droit de l'Université de Montréal. On s'intéressait beaucoup à la primauté du droit. Supposons que nous organisions une conférence sur la primauté du droit, un type neutre de...
     Mais vous avez aussi parlé des Ouïghours, monsieur Rosenberg. Je ne comprends pas très bien. Ce que vous dites maintenant semble être un peu différent de ce que vous essayiez de dire tout à l'heure.
    Puis‑je expliquer?
    Vous pouvez expliquer, mais j'aimerais que vous expliquiez la différence entre les deux points.
    Je dirai qu'on peut tenir une conférence qui porte un titre inoffensif, mais qu'il est impossible... Je connais les gens de la Fondation Trudeau, et s'ils se penchent sur la primauté du droit, la question des droits de la personne sera soulevée. La situation des Ouïghours sera soulevée. Il sera question de toutes sortes de sujets, et le résultat sera le même. Si quelqu'un en Chine a pensé que c'était une bonne idée d'établir la marque chinoise au Canada, de payer pour ces conférences, je pense qu'il s'est trompé. Je pense que le résultat serait bien différent.
    Merci beaucoup. Le temps est écoulé.
    Nous passons maintenant à M. Genuis.
    Vous disposez de cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
     Je pense qu'il est important de souligner tout d'abord la raison de notre présence ici. C'est parce qu'une grande partie du public est préoccupée. L'opposition officielle est profondément préoccupée par le fait que la Fondation Trudeau a un problème de gouvernance qui a fait en sorte qu'elle a été ciblée comme moyen d'influencer le gouvernement Trudeau.
    Il est bien connu que le ministre de l'Industrie ainsi que la famille Trudeau avaient la capacité de nommer des membres à la Fondation, que cette fondation est définie comme une institution publique dans diverses lois et que les dons étrangers ont connu une hausse marquée après l'arrivée du gouvernement Trudeau au pouvoir. Il est difficile de croire qu'il s'agit d'un accident qui n'a aucun rapport avec le fait que la Fondation porte le même nom que la personne qui occupe les fonctions de premier ministre, ou avec le fait que le premier ministre figure toujours sur la liste des membres dans le rapport annuel de la Fondation, bien qu'on y mentionne qu'il est un membre inactif.
    Je souhaite en particulier examiner en profondeur la question de la réunion qui s'est tenue au bureau du premier ministre.
    Monsieur Rosenberg, vous nous avez dit qu'il n'y avait rien d'inhabituel à propos de cette réunion. Il y a toujours des réunions dans le bureau du premier ministre. Cela ne pose pas de problème.
     Je vais vous laisser répondre, mais le « Bureau du premier ministre », c'est en fait le nom de l'édifice. Il s'appelle « Bureau du premier ministre » et une réunion avec la Fondation Trudeau y a eu lieu. Vous avez dit que le Bureau du Conseil privé a également des bureaux et que le bâtiment est situé au centre-ville. Je connais assez bien le bâtiment. Le Bureau du premier ministre est un édifice de quatre étages. Il comprend le bureau privé du premier ministre, ainsi que d'autres bureaux. La branche politique du bureau du premier ministre utilise la majeure partie de ce bâtiment. Il y a quelques bureaux pour le Bureau du Conseil privé, mais le bâtiment est adjacent à l'édifice Blackburn, bâtiment de 10 étages qui, d'après ce que j'ai compris, abrite tous les bureaux du Bureau du Conseil privé.
     Même si la réunion devait avoir lieu quelque part entre les rues Sparks et Wellington, il y a 10 étages et, probablement, des salles de réunion sur chacun d'entre eux dans l'édifice Blackburn, et un étage est utilisé par le Bureau du Conseil privé au Bureau du premier ministre. Si l'on dit « eh bien, toutes les salles de réunion de l'édifice Blackburn étaient occupées, il n'y avait pas d'espace ailleurs au centre-ville d'Ottawa, et le seul endroit disponible était le bureau du premier ministre », c'est tout simplement de la foutaise, n'est‑ce pas? Vous deviez savoir qu'en y tenant la réunion, on envoyait un message, et vous deviez avoir l'intention d'envoyer un message, monsieur.
     Dites-moi pourquoi aucune des salles de réunion de l'édifice Blackburn ou du centre-ville d'Ottawa n'était disponible, et pourquoi vous avez estimé que c'était l'endroit qui convenait le mieux pour tenir la réunion.

  (1200)  

    Je voudrais dire un certain nombre de choses en réponse à votre question.
    Tout d'abord, je crois que, bien que cet édifice porte maintenant le nom de... Je ne sais pas exactement quoi. Qu'il s'appelle « Bureau du premier ministre » ou...
    On l'appelle le « Bureau du premier ministre ».
    ..., je pense, « Bureau du Conseil privé »...
    On l'appelait auparavant « l'édifice Langevin ». L'édifice portait le nom de M. Langevin...
    Oui, mais à quel moment cela a‑t‑il changé?
    Il a toujours s'agit du « Bureau du premier ministre ».
    Monsieur Genuis, vous êtes un peu… Pourquoi n'écoutons-nous pas la réponse de M. Rosenberg pour le moment?
    Je pense qu'à l'époque… C'était avant… Il y avait un problème avec le nom de l'édifice. Je pense que cela avait quelque chose à voir avec l'héritage d'Hector Langevin, peut-être relativement aux pensionnats autochtones. Je n'en suis pas sûr. On a décidé de changer le nom de l'édifice, mais je pense qu'il s'appelait encore l'édifice Langevin lorsque j'y étais.
    Deuxièmement, j'ai travaillé au Bureau du Conseil privé et cet organisme utilise deux étages. Au troisième étage se trouve le bureau de la greffière, du sous-secrétaire à la planification et du sous-secrétaire aux opérations. Le bureau du conseiller en matière de sécurité nationale est ailleurs. Tout cet étage est occupé par le personnel du Bureau du Conseil privé. Au quatrième étage, il y a deux très grandes salles de réunion et plusieurs salles plus petites qui sont constamment utilisées par les membres de la fonction publique.
    Troisièmement, voici comment tout cela a commencé. J'ai parlé à un sous-secrétaire — je crois qu'il s'agissait du sous-secrétaire à la planification. Je pense qu'il m'a dit qu'il ne pouvait pas organiser une réunion au Bureau du Conseil privé. Je lui ai répondu qu'il s'agissait de renseignements dont son organisme souhaitait certainement prendre connaissance et il a répondu que dans ce cas, il allait organiser une réunion. Où les sous-secrétaires à la planification organisent-ils des réunions? Ils les organisent au Bureau du Conseil privé, et ils ont tendance à utiliser les salles de réunion du quatrième étage de l'édifice Langevin.
    Je dois vous interrompre, car il me reste seulement 30 secondes.
    Ces salles de réunion sont largement utilisées par le personnel du premier ministre, qui a la priorité pour les réserver.
    C'est peut-être vrai aujourd'hui, mais ça ne l'était pas à l'époque.
    Cela a toujours été le cas. L'édifice Blackburn a 10 étages. De plus, vous avez accès à d'autres édifices.
    Les fonctionnaires savent très bien que les réunions qui se déroulent dans le bureau du premier ministre ont une signification particulière. Si vous voulez faire passer le message que cette fondation est étroitement liée au premier ministre et que, par conséquent, le premier ministre est reconnaissant des dons effectués à cette fondation, une excellente façon d'y arriver est de tenir la réunion dans l'édifice relativement petit qu'on appelle « le bureau du premier ministre ».
    Je vous remercie, monsieur Genuis.
    Ce n'était pas formulé comme une question.
    Monsieur Rosenberg, si vous pouvez répondre brièvement, je vous donnerai…
    Je suis profondément en désaccord avec ce point de vue. Le Bureau du Conseil privé l'utilise tout le temps. Je ne pense pas que cela ait une signification particulière, et nous ne sommes pas les seuls qui ont eu l'occasion d'y aller.
    Je vous remercie beaucoup.
    Madame Shanahan, vous avez la parole.
    Je vous remercie, monsieur le président. Je vois bien l'objectif.
    Cette étude, soit dit en passant, a pour objectif d'examiner la fondation Trudeau précisément parce qu'elle a été créée avec 125 millions de dollars du gouvernement de l'époque. Je comprends que tous les partis n'étaient pas d'accord, mais à mon avis, la campagne de dénigrement de la fondation Trudeau qui se déroule actuellement est une vraie honte.
    J'aimerais aborder la question des réunions qui ont eu lieu au Bureau du Conseil privé.
    Tout d'abord, pouvez-vous nous expliquer brièvement la différence entre le bureau du premier ministre et le Bureau du Conseil privé, monsieur Rosenberg?
    C'est la fonction publique. C'est le ministère du premier ministre, mais il est rempli de fonctionnaires qui ont généralement travaillé ailleurs pour acquérir une expérience plus vaste. Ils passent un certain temps au Bureau du Conseil privé, ce qui les aide généralement à avoir accès à des postes plus élevés dans la fonction publique.
    Par exemple, j'étais sous-secrétaire aux opérations au Bureau du Conseil privé avant de devenir sous-ministre de la Justice. Avant cela, j'étais secrétaire adjoint, Politique du développement économique et régional, un poste que j'ai d'abord occupé au sein d'un gouvernement conservateur, vers la fin des gouvernements Mulroney et Campbell.

  (1205)  

    Vous avez parlé des conservateurs. L'embauche au Bureau du Conseil privé dépend-elle de critères liés à l'appartenance à un parti ou à l'autre?
    Non. En fait, l'une des choses très intéressantes à cet égard, c'est qu'un grand nombre des personnes qui sont devenues sous-ministres au sein d'un gouvernement libéral avaient été membres du personnel politique d'un gouvernement conservateur, et ces personnes font partie des meilleurs sous-ministres. J'ai toujours été un fervent partisan de l'embauche de membres du personnel politique. Au sein des deux gouvernements, j'ai embauché du personnel politique de l'autre parti.
    Pourquoi est‑ce une bonne chose, selon vous?
    J'ai constaté que le personnel politique privilégiait les aspects pratiques, ce qui n'est pas toujours le cas des fonctionnaires.
    C'est une observation très intéressante.
    Puis‑je vous poser une question sur la réunion qui a eu lieu en 2016? Dans quel contexte la Fondation Trudeau a‑t‑elle été mentionnée?
    Eh bien, il n'a pas été question de la fondation Trudeau. Il a plutôt été question de... En réalité, on se concentrait sur le lancement d'un projet mené conjointement avec le Centre pour l'innovation dans la gouvernance internationale de Waterloo — ou le CIGI — sur la question de savoir si l'innovation entraîne des retombées économiques.
    Nous voulions collaborer avec le gouvernement et donner à ces chercheurs la possibilité de communiquer leurs renseignements à certains responsables des politiques au sein du gouvernement. Un an plus tard, une étude axée sur la situation dans chaque industrie a été réalisée, car il y avait des différences réelles entre les industries. Cette étude est accessible en ligne. Je pourrais vous l'envoyer, mais vous pouvez également la trouver.
    Je vous remercie, monsieur Rosenberg.
    J'aimerais poser une question à M. Flack. Je crois que vous étiez présent à cette réunion, à l'époque. Pouvez-vous nous parler de cette réunion sur la fondation Trudeau? De plus, pouvez-vous nous dire s'il y a eu d'autres réunions au sujet de la fondation Trudeau et nous parler des sujets de discussion qui ont été abordés lors de ces réunions?
    J'ai été invité à cette réunion à titre de sous-ministre du Patrimoine canadien, car mon mandat concernait notamment le pluralisme. Je me souviens qu'il s'agissait d'une réunion avec des universitaires sur un projet concernant le pluralisme.
    J'aurais probablement communiqué avec les intervenants du ministère pour leur demander si nous suivions ce dossier, car il existe de nombreux projets sur le pluralisme. En effet, le ministère travaille avec la Fondation canadienne des relations raciales et le Centre mondial du pluralisme.
    Voilà tout ce dont je me souviens au sujet de cette réunion.
    Y a‑t‑il eu des discussions sur les relations avec la Chine, sur un traitement préférentiel envers la Chine, sur des recherches menées par des universitaires chinois ou sur d'autres questions de cette nature?
     Je ne me souviens d'aucune discussion sur ces sujets. Par contre, je me souviens d'un projet universitaire sur le pluralisme, un peu comme ceux que nous avons réalisés avec le Centre mondial du pluralisme au Canada. Cette réunion a eu lieu il y a sept ans. Je pense que je m'en souviendrais si on avait abordé des questions liées à la Chine, mais je ne me souviens de rien de tel. Il s'agissait plutôt d'une sorte de conférence universitaire conventionnelle dont on nous avait parlé et à laquelle le ministère s'intéressait.
    D'accord. J'aimerais maintenant poser une question à M. Knubley au sujet d'Industrie Canada.
    Quel est le mandat d'Industrie Canada en ce qui concerne la fondation Trudeau?
    Comme je l'ai mentionné dans ma déclaration préliminaire, la fondation Trudeau fait partie d'un portefeuille d'organismes du ministère, qui comprend notamment la Banque de développement du Canada, le Conseil national de recherches du Canada, l'Agence spatiale canadienne et les conseils de subventions. Il s'agit donc d'un large éventail d'organismes.
    Dans le cas de la fondation Trudeau…
    Je suis désolé, mais votre temps est écoulé. C'est ce qui termine notre deuxième série de questions.
    Monsieur Genuis, vous avez la parole. Vous avez cinq minutes.
     Je vous remercie, monsieur le président.
    Ce qui m'étonne, c'est qu'une personne qui a occupé des fonctions aussi importantes dans la fonction publique puisse penser que le public et les membres du Comité sont idiots au point de croire qu'il s'agissait seulement d'une discussion intéressante sur le pluralisme et la croissance économique. Ce n'était qu'une discussion intellectuelle, ouverte et stimulante, à laquelle participaient justement six sous-ministres et qui, par hasard, se déroulait dans le bureau du premier ministre.
    Dans notre pays, de nombreux groupes de réflexion font un excellent travail et ils étudient probablement ces questions de manière plus approfondie que le fait la fondation Trudeau, mais ils ne sont pas en mesure de réunir six sous-ministres dans le bureau du premier ministre. Il est si étrange que personne n'ait pensé que cela avait une signification particulière que je suis surpris que nous entendions une telle chose dans le cadre d'un témoignage.
    J'aimerais revenir sur la question très sérieuse des allégations d'agression sexuelle et de harcèlement qui ont été portées à l'encontre de personnes liées à cette fondation. Mon collègue, M. Brock, a soulevé ces questions avant qu'une députée libérale tente de le faire taire en invoquant le Règlement, et il est troublant de constater que les libéraux ne veulent pas entendre ces questions. Ils parlent abondamment de féminisme et de responsabilisation, mais ils n'ont même pas voulu laisser M. Brock terminer sa série de questions, et je tiens donc à revenir sur ce sujet.
    Monsieur Rosenberg, dans l'affaire concernant Cherry Smiley, avez-vous témoigné en février dernier pour appuyer la demande de la fondation Trudeau de transférer cette affaire à Montréal?

  (1210)  

    J'ai témoigné en février, mais pas à l'appui de cette demande. Leurs avocats m'ont demandé de témoigner, mais mon témoignage était…
    Quels avocats vous ont demandé de témoigner?
    Les avocats de la Fondation m'ont demandé de témoigner, mais mon témoignage, si je me souviens bien, portait simplement sur des questions factuelles, par exemple sur l'endroit où j'aurais signé l'entente relative à la bourse de Mme Smiley, sur l'endroit où Mme Smiley a fait ses études et sur l'endroit où les événements se sont déroulés, c'est‑à‑dire à Terre-Neuve. Je n'ai fait qu'apporter un témoignage factuel. Je ne défendais personne.
    Manifestement, à titre de témoin, votre rôle n'était pas de défendre qui que ce soit, mais est‑il raisonnable de présumer que, si les avocats de la Fondation vous ont demandé de témoigner, c'est parce qu'ils estimaient que votre témoignage pourrait appuyer leur demande consistant à déplacer le lieu de l'affaire au Québec?
    Oui, je présume que c'est ce qu'ils avaient en tête. Toutefois, je ne suis pas sûr qu'ils aient trouvé mon témoignage très utile.
    D'accord. À votre avis, la Fondation a‑t‑elle traité Mme Smiley de manière appropriée?
    Je ne peux pas me prononcer là‑dessus. Je ne le sais pas, car je n'étais pas là. La plus grande partie de cette affaire, si j'ai bien compris — et si je me fonde sur la déclaration —, traite de questions qui ont été soulevées après mon départ de la Fondation.
    D'accord, mais ils ont demandé à maintes reprises un changement de lieu. À première vue… Je ne peux pas parler des détails relatifs à sa déclaration, mais les efforts répétés pour déplacer l'affaire dans un endroit où ces événements n'ont pas eu lieu et où elle ne pouvait pas se rendre facilement... Ne pensez-vous pas que cela n'encourage pas vraiment les survivants à se manifester et à raconter leur histoire?
    Monsieur Genuis, je ne vais pas me prononcer sur les stratégies utilisées par les gens en cas de litige.
    Ma prochaine question concerne un enjeu structurel pour la Fondation dans le cas de questions juridiques comme celle‑ci. Qui paie pour les litiges qui se produisent? D'où vient l'argent utilisé par la Fondation, plus précisément dans le cas du litige qui nous occupe?
    Je présume qu'il provient des budgets d'administration de la Fondation.
    S'agit‑il de l'argent des donateurs? S'agit‑il des intérêts générés par la dotation?
    Je ne pense pas qu'il s'agisse de l'argent des donateurs, mais pour être honnête, je n'en suis pas certain. Vous pourriez demander ces renseignements à la Fondation.
    J'aimerais maintenant utiliser le temps qu'il me reste pour m'adresser brièvement à M. Knubley.
    Le ministre de l'Industrie est responsable de la nomination des administrateurs de la fondation Trudeau. Pourriez-vous nous parler un peu du processus suivi par les sous-ministres de ce ministère pour les nominations à la Fondation Trudeau?
     J'ai plusieurs commentaires à formuler à cet égard.
    Tout d'abord, en 2013, on m'a informé de changements qui avaient été apportés au rôle du ministre en ce qui concerne les nominations. En effet, en 2013, sous le gouvernement Harper, la Fondation a modifié son processus de nomination pour tenir compte du fait que les ministres ne nommeraient pas les directeurs. Ce changement, si j'ai bien compris, même si…
    Je suis désolé, mais mon temps est presque écoulé.
    Je me suis peut-être mal exprimé. Je parlais de la nomination de « membres » à la Fondation. Selon le dernier rapport annuel, le ministre conserve le pouvoir de nommer des membres à la Fondation.
    Êtes-vous au courant de cela et pouvez-vous nous parler du processus par lequel le ministre prend ces décisions?
    Oui, c'est cela, il s'agit de la nomination de membres.
    Je n'ai participé à aucune nomination. Si j'ai bien compris — et je crois que j'ai raison sur ce point, même si je encore une fois, je me fie à ma mémoire —, aucune nomination n'a été faite par les ministres Paradis, Moore ou Bains.

  (1215)  

    Je vous remercie beaucoup.
    Monsieur Fragiskatos, vous avez la parole. Vous avez cinq minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Monsieur Rosenberg…
    Pourrais‑je utiliser 30 secondes de votre temps pour répondre à une question soulevée par M. Genuis?
    M. Peter Fragiskatos: Certainement.
    M. Morris Rosenberg: Il a indiqué que six sous-ministres avaient participé à cette réunion. Ils sont tous ici. Je pense que le seul sous-ministre qui a assisté à cette réunion — il n'y avait pas six sous-ministres, pour commencer — est M. Flack. Je ne crois pas que M. Jean était là. Je ne crois pas non plus que Mme Biguzs et M. Knubley y étaient.
    En ce qui concerne l'influence de la Fondation quant à la présence de sous-ministres à certaines réunions, je peux vous dire que si j'avais reçu une telle invitation à titre de sous-ministre, je n'y serais probablement pas allé non plus. Les sous-ministres sont des gens très occupés et ils ont tendance à envoyer des subalternes.
    Je suis désolé, mais je tenais simplement à le souligner.
    Je vous remercie d'avoir apporté ces éclaircissements, monsieur Rosenberg.
    Cette réunion dure depuis plus d'une heure. Nous avons eu plusieurs discussions et entendu de nombreuses déclarations. J'aimerais vous donner l'occasion de conclure en précisant deux ou trois points importants que devraient retenir les membres du Comité et qui, selon vous, sont indispensables pour comprendre toutes les facettes de cette affaire.
    Bref, revenons à l'essentiel.
     Si nous parlons de toutes les facettes de cette affaire, parlons-nous des dons? J'ai plusieurs choses à dire à ce sujet.
    En ce qui concerne les éléments essentiels en question, je vous laisse le soin d'arranger ça.
    Je voudrais réaffirmer deux ou trois choses.
    Le don n'a permis aucun gain d'influence. Comme je l'ai dit, nous n'avons jamais cru que le don de 200 000 $ influencerait un gouvernement.
    Comme je l'ai dit, le don n'aurait pu transformer la Fondation en porteur de message pro‑Chine, mais il aurait été susceptible de susciter des conférences, ce dont les Chinois ne voulaient pas entendre parler. Ça en dit beaucoup sur notre motivation, c'est‑à‑dire que nous pensions ne pas devoir nous en soucier. Nous n'avons pas vu comment il nous influencerait. Je trouve franchement absurde l'idée que 200 000 $ puissent influencer un gouvernement, mais, à ce sujet, les avis divergent.
    Ensuite, sur le sort de la quittance, c'est tellement contraire aux intérêts de la Fondation d'agir de manière à compromettre son statut d'organisme de bienfaisance. Soit nous agissions de la bonne façon... sinon, l'Agence du revenu du Canada devrait nous en prévenir. Mais, pour autant que nous soyons concernés, ce don a été fait par une compagnie, et le reçu lui a été remis.
    Nous avons déjà traité de l'écart entre les rapports annuels et les reçus.
    Nos rapports avec les personnes avec qui nous transigions étaient motivés par le fait que nous les connaissions. Elles ont fait des dons à l'Université de Toronto. Elles étaient en relation avec celle de Montréal depuis longtemps... C'est l'ambassadeur canadien en Chine qui a présenté l'Université de Montréal à M. Zhang.
    Nous avons cru avoir fait preuve de diligence raisonnable. Le don concordait avec nos priorités et nous permettait à nous et à nos érudits de nous instruire sur ce qui est peut-être la question géopolitique majeure des 30 dernières années, l'ascension de la Chine et ses conséquences.
    Monsieur Rosenberg, les conservateurs continuent d'essayer de dépeindre l'organisme comme une sorte de canal par lequel la Chine essayait d'accroître son influence sur le gouvernement canadien.
     Je n'ai pas vu et je ne crois pas qu'aucun membre du Comité ou aucun parlementaire n'en ait vu des indices. Mais, comme vous le savez bien, la perception, c'est tout, non seulement en politique, mais en ce qui concerne la perception du public sur ces questions.
    Aujourd'hui, vous avez vanté l'excellent soutien de la Fondation aux étudiants et à la recherche, et, l'autre jour, M. Johnson l'a fait également. Croyez-vous que la Fondation survivra?
    Je l'espère.
    Elle vit un moment de grandes tensions. Pour répondre à la démission d'un président et à celle de plusieurs membres du conseil d'administration, elle a du pain sur la planche.
    Voilà pourquoi, en réponse à la question de M. Desjarlais, j'espère vraiment que nous pourrons clarifier la situation. Il s'est lancé beaucoup d'allégations, il s'est répandu beaucoup de fumée. Honnêtement, je crois que la Fondation agissait de bonne foi et qu'elle n'a subi aucune influence, mais je comprends les perceptions du public.
    La Fondation ne peut attendre deux ou trois ans pour mettre les choses au clair. Elle doit agir plus vite.

  (1220)  

    Merci beaucoup.
    Merci.

[Français]

    Madame Sinclair‑Desgagné, vous avez la parole pour deux minutes et demie.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais poursuivre les questions que je posais à M. Rosenberg.
    Nous en étions à dire que vos employés auraient commis un acte qui, selon la Loi sur l'Agence du revenu du Canada, pourrait faire perdre à la Fondation Pierre‑Elliott‑Trudeau son statut d'organisme caritatif.
     Je n'ai pas dit cela.
    Non, c'est moi qui le dis.
    Je ne suis pas nécessairement d'accord.
    Vous n'êtes pas d'accord sur le fait que la Fondation n'avait pas le droit de recevoir des dons d'une personne et d'envoyer le reçu fiscal à une compagnie.
    C'est la compagnie qui a fait le don, alors le reçu fiscal a été fait au nom de la compagnie. S'il y a de la confusion à cet égard, cela pourrait être examiné par quelqu'un d'indépendant ou par l'Agence du revenu du Canada.
    Je vous le demande à vous, monsieur Rosenberg.
    M. Johnson nous a dit qu'il nous enverrait les documents, par exemple les relevés bancaires montrant la réception des dons et les montants des dons, ainsi que les reçus fiscaux. Si vous pouviez insister pour que ces documents nous soient fournis dans les plus brefs délais, cela pourrait clarifier un peu plus ce qui s'est passé.
    C'est à M. Johnson, comme président du conseil d'administration, de le faire. Moi, je n'ai pas accès aux documents de la Fondation.
    Oui, je comprends cela. Au moins, vous êtes d'accord pour que nous puissions les regarder.
    Je répète que, ce qu'on a constaté, c'est que les dons reçus avaient été faits précisément par des donateurs en Chine, mais que le reçu fiscal, lui, avait été envoyé à Aigle d'or du millénaire international, conformément à des consignes très claires en provenance de Pékin données aux employés de la Fondation Pierre‑Elliott‑Trudeau. C'est ce qui est présumé jusqu'à présent.
    Il y a deux façons de voir cela: on peut penser qu'il s'agit d'une conspiration, ou bien on peut considérer que c'est une pratique normale. Malheureusement, je pense qu'il y a beaucoup de confusion sur cette question, et il faudra se pencher sur les documents et demander une expertise en fiscalité pour déterminer ce qu'il en est.
    Vous pouvez bien parler d'une théorie du complot, si vous le voulez, mais il y a quelque chose qui s'appelle la loi, et vous la connaissez bien, puisque vous êtes avocat. Il est interdit...
    Je ne suis pas fiscaliste.
    Non, mais la loi dit clairement que le nom inscrit sur le reçu fiscal doit être le même que celui du donateur. C'est assez simple à comprendre. C'est écrit noir sur blanc. On ne peut pas parler de théorie du complot, ici. D'ailleurs, je me retiendrais de parler de théorie du complot quand il y a de telles allégations envers vous.
    Maintenant...
    Votre temps de parole est écoulé, madame Sinclair‑Desgagné.

[Traduction]

    Monsieur Desjarlais, vous disposez de deux minutes et demie.
    Merci beaucoup, monsieur le président. Je remercie également les témoins de leur apport.
    Monsieur le président, pourriez-vous m'éclairer — et je ne suis pas certain que vous me remettiez mon temps. Combien de fois avons-nous le droit de parole?
    Je pense que votre tour reviendra encore une fois.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Monsieur Rosenberg, en réponse à nos amis les libéraux, vous avez révélé la nature de certaines de vos opérations, quand vous étiez président-directeur général de la fondation Trudeau et, bien sûr, quand vous étiez sous-ministre, notamment en réponse à la question sur l'esprit de parti de fonctionnaires conservateurs et libéraux. Vous avez dit que les membres de ces deux partis avaient l'aptitude d'être fidèles au gouvernement, même quand leur parti n'était pas au pouvoir et que vous les embauchiez quand même.
    Dans le cadre de notre enquête sur la Fondation, j'estime important d'aborder certaines pratiques culturelles des organisations. Avec mes yeux de nouveau député, je constate une grande différence dans les cultures de nombreux partis. Par le passé, j'ai eu connaissance de la tradition, chez les libéraux et les conservateurs, de voir des membres du personnel — notamment ceux qui avaient l'esprit de parti — faire la navette entre les deux partis et souvent entre des organismes auxquels ils étaient également affiliés.
    Pendant que vous étiez président-directeur général de la Fondation, avez-vous également embauché des membres du personnel qui appartenaient au parti libéral ou conservateur?
    À ma connaissance, non. Ce n'est pas que je ne l'aurais pas fait, mais non parce qu'ils étaient libéraux ou conservateurs. Autant que je sache, le personnel de la Fondation était assez apolitique.
    Quand vous étiez sous-ministre, vous avez précisé que l'embauche de libéraux et de conservateurs était une question de crédibilité. Si on comprend que...
    La tâche est différente. Il s'agit de la crédibilité de l'administration publique…
    En fait, la tâche n'est pas différente. Vous venez d'entendre des témoignages — ici, en ce moment même, au Parlement — dans le cadre d'une enquête sur l'ingérence étrangère et la participation de la Fondation Pierre-Elliott-Trudeau.
    Il n'est pas exclu ni déraisonnable de demander pourquoi ou comment des membres de la Fondation et membres de ces partis sont en relation. Affirmer qu'ils sont apolitiques, particulièrement quand vous venez de témoigner du fait que, en votre qualité de sous-ministre, vous avez...
    Monsieur Rosenberg, permettez‑moi d'insister. J'espère que vous vous rendez compte du sérieux de la situation. Malgré votre sourire, actuellement, j'ai besoin de m'assurer de la crédibilité de vos observations pour comprendre comment la Fondation, sa culture et ses liens avec l'esprit de parti au Canada, au point que l'ingérence étrangère pourrait exister... J'ai besoin de votre réponse à cette question. Si vous ne savez pas...

  (1225)  

    Merci, monsieur Desjarlais. Je laisse M. Rosenberg répondre.
    Je ne suis même pas sûr de ce qu'était la question. Est‑ce que vous me demandez si le personnel de la Fondation était affilié à un parti politique? À ma connaissance, non.
    Merci.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Kram, vous disposez de cinq minutes.
    C'est mon tour.
    Je suis désolé, monsieur McCauley.
    Toutes mes excuses. Vous disposez de cinq minutes.
    Merci, monsieur le président. Je remercie également les témoins.
    Monsieur Rosenberg, pour faire suite rapidement aux observations de M. Desjarlais sur l'esprit de parti, à part Chuck Strahl, combien de conservateurs ont travaillé, à votre connaissance, pour la Fondation ou en étaient membres?
    Michael Fortier était mentor. Bill Davis a fait partie du premier conseil d'administration. Je devrai faire des recherches. Il y avait également des membres du NPD.
    C'est assez peu, en comparaison. En fait, je ne crois pas que personne ne considère... Eh bien, personne n'est venu du Bloc, mais je ne crois pas que personne ne qualifiera la Fondation d'absolument impartiale.
    Revenons au don, à l'origine. À l'arrivée des 140 000 $ — deux versements de 70 000 $ — la Fondation savait qu'une partie provenait directement de Chine, n'est‑ce pas?
    Non. La Fondation savait que le chèque — peu importe ce dont il s'agissait — avait été déposé à la Banque de Montréal par une société canadienne, Millennium Golden Eagle International (Canada).
    Personne n'était au courant d'un lien avec la Chine ou la République populaire de Chine.
    Si quelqu'un... Je crois que ceux qui regardaient le...
    Dans ce cas, alors, quand la Fondation l'a‑t‑elle su?
    Toute la question de ce lien avec la République populaire de Chine... Nous savions que nous avions affaire à des Chinois, mais que, également, le... Voilà qui explique toute cette confusion. D'après ce que j'ai compris, des donateurs se servent de sociétés pour faire des dons en leur nom. Ils les dirigent et ils décident de s'en servir, quelle que soit la raison.
    Je le reconnais. Est‑ce qu'il y avait des soupçons, des hésitations ou une impression que quelque chose ne...?
    Nous n'avions aucun soupçon. En partie, je suppose, parce que nous ne croyions pas que c'était assorti d'une demande que nous fassions quelque chose de fâcheux. Comme je l'ai dit, nous avons essentiellement toujours eu pleine liberté de l'emploi de cet argent.
    Personne ne s'était encore avancé pour demander d'envoyer le reçu des 140 000 $ en Chine. Ce n'est arrivé qu'après...
    Personne n'a vraiment pigé. Les documents vous montreront la correspondance entre deux employés de la Fondation sans que moi ou même le directeur soyons mis en c.c.
    Pendant les quatre années vous avez occupé ce poste, avez-vous eu l'impression que ça sentait mauvais?
    Non, en raison de la manière par laquelle on nous a présentés à ces gens, de leurs dons antérieurs à l'Université de Toronto, du fait que notre ambassadeur les connaissait, des conférences... Le seul droit qu'ils possédaient était que les conférences porteraient leurs noms. Ils n'avaient pas voix au chapitre sur la teneur des conférences.
    Après coup, croyez-vous que vous ayez été naïf ou, peut-être, volontairement aveugle?
    Vous savez, je ne crois pas.
    Je sais qu'il y a différentes... On a évoqué les perceptions. Je comprends et je m'en veux, parce que la Fondation a tellement été salie. Mais, dans l'ordre du monde, parmi tout ce que nous faisions, ça ne représentait pas grand-chose pour la Fondation. Nous étions en train d'organiser ces conférences majeures. La plus grande partie de notre énergie y était consacrée et non à réfléchir à ce détail.
    Il y a eu une cérémonie, ce qui était inhabituel, mais c'était à la demande de l'Université de Montréal, qui y tenait, et nous avons décidé qu'il conviendrait qu'Alexandre Trudeau y assiste. C'était seulement une façon de faire un peu différente.

  (1230)  

    Pendant que vous avez été en fonction, l'Agence du revenu du Canada a‑t‑elle effectué des vérifications, en raison du statut d'organisme de charité de la Fondation?
    Je crois qu'oui et je pense que l'Agence y a répondu alors que j'étais là.
    Non, elle ne l'a pas fait. Elle a très clairement fait savoir qu'elle ne répondrait à rien.
    Cher commissaire Hamilton, si vous entendez, vous êtes visé.
    Vous avez parlé de la citation... Vous avez dit que vous ne compromettriez pas le statut d'organisme de bienfaisance. Après coup, visiblement, il y a le don. Mais il y a également les exigences du Réseau canadien sur la reddition de comptes des entreprises, qu'on n'a pas respectées depuis des années, ainsi que les obligations en matière de décaissement, apparemment non remplies. Peut-être est‑ce attribuable à un désaccord sur les méthodes comptables qu'on aurait dû employer?
    Autant que je sache, les obligations en matière de décaissement... Parlez-vous ici du pourcentage? Pendant que j'étais en fonction, je crois que nous nous y sommes conformés.
    Je ne veux pas faire le difficile, mais...
    J'en suis assez certain, mais sans pouvoir l'assurer absolument, faute d'avoir les documents.
    Merci beaucoup.
    La parole est à Mme Bradford.
    Vous disposez de cinq minutes.
    Merci, monsieur le président. Je remercie également les témoins de leur temps.
    Comme M. Rosenberg a focalisé l'attention, je tiens à faire en sorte que les autres témoins ne soient pas venus pour rien.
     Madame Biguzs, vous étiez fonctionnaire fédérale. Vous êtes à la retraite. Il a été peu question, aujourd'hui, de la participation des fonctionnaires, mais... Depuis quand êtes‑vous retraitée?
     Depuis juin 2016.
    Quelle y était votre rôle?
    Mon dernier poste a été celui de sous-ministre de l'immigration. Ce serait la raison pour laquelle on m'a invitée à venir témoigner aujourd'hui.
    Pendant ma carrière de 35 ans dans la fonction publique fédérale, je suis passée dans un certain nombre de ministères, mais, également, deux organismes centraux, le Bureau du Conseil privé et le Secrétariat du Conseil du Trésor.
    Pendant ce temps, avez-vous eu des relations avec la Fondation Pierre-Elliott-Trudeau?
    Non.
    D'accord. Vous avez donc dû vous poser des questions sur les motifs de votre comparution.
    À la lecture de l'invitation de la greffière, j'ai cru comprendre que c'était à cause d'une réunion qui a eu lieu en avril 2016, deux mois avant mon départ à la retraite, il y a sept ans. C'est mon ministère ou moi qui était invitée. Je ne me rappelle pas d'y avoir même assisté. Il se peut que j'aie délégué la tâche à un subordonné. Comme je n'ai pas accès aux dossiers... J'ai fait des vérifications auprès d'anciens collègues — mon chef de cabinet ou mon sous-ministre adjoint — au cas où ils se seraient rappelé ma présence ou celle d'un délégué.
    Pour autant que je sache, je ne conserve aucun souvenir réel de la réunion.
    Merci.
    Monsieur Flack, quel rôle le Bureau du Conseil privé joue‑t‑il pour faciliter les discussions entre les ministères et les organismes qui demandent du financement pour la recherche et d'autres initiatives dans l'éducation postsecondaire?
    Normalement, ce n'est pas le Bureau du Conseil privé qui essaie d'obtenir du financement pour les organismes, ou qui apporte son aide à cet égard. Le rôle du Bureau du Conseil privé, particulièrement en ce qui concerne la planification — le Secrétaire adjoint s'occupe de la planification —, est de se concentrer sur les grands enjeux auxquels le pays est confronté. La pratique courante est de réunir des intervenants externes — du milieu des affaires ou du milieu universitaire — pour discuter de ces questions avec des hauts fonctionnaires.
    Vous n'avez pas participé à l'organisation de la réunion qui a eu lieu en 2016.
    C'est le Bureau du Conseil privé qui a organisé la réunion.
    Monsieur Knubley, comment les ministères collaborent-ils avec des organismes comme la fondation Trudeau pour fournir des subventions au niveau postsecondaire pour la recherche et pour d'autres fins?
    Je m'excuse. Pouvez-vous répéter la question?
    Comment les ministères collaborent-ils avec des organismes comme la fondation Trudeau pour fournir des subventions au niveau postsecondaire pour la recherche et pour d'autres fins?
    Je ne suis pas certain de connaître la réponse à cette question.
    Ce que je peux dire, c'est qu'il y a une relation entre le ministère de l'Industrie, ou ISDE, et la fondation Trudeau. La Fondation fait partie des organismes du portefeuille — il y en a beaucoup — du ministère. D'autres ministères, comme le ministère du Patrimoine, ont d'importants portefeuilles comme celui d'ISDE. La fondation Trudeau fait évidemment partie de ce portefeuille parce qu'elle fait la promotion de bourses et de l'excellence dans les activités universitaires, ce qui, comme je l'ai mentionné dans ma déclaration préliminaire, est une priorité pour le département des sciences du ministère.
    Une entente conditionnelle entre le ministère et la Fondation précise certaines des questions qui doivent être abordées. La principale, qui a été évoquée, est de s'assurer que la fondation Trudeau n'utilise que les intérêts perçus pour financer ses activités.

  (1235)  

    Je vous remercie.
    Monsieur Rosenberg, je ne veux pas vous ignorer.
    Pendant que vous travailliez pour la Fondation, avez-vous été témoin de tentatives d'obtenir du favoritisme politique ou d'exercer une influence par l'entremise de dons accordés à la Fondation?
    Non.
    Votre temps est écoulé, madame Bradford.
    Nous allons essayer de faire un autre tour de questions.
    Monsieur Kram, vous avez la parole pour cinq minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Monsieur Rosenberg, vous avez été nommé PDG de la Fondation en 2014, puis, en octobre 2015, vous vous êtes retrouvé à travailler pour une fondation qui portait le même nom de famille que le nouveau premier ministre. Pouvez-vous faire part au Comité des mesures que vous avez mises en place pour limiter les dons qui pourraient représenter un conflit d'intérêt, ou du moins être perçus comme tel?
    Je dois d'abord vous dire que les derniers contacts de M. Trudeau avec la Fondation remontaient à une période qui précédait ma nomination à titre de président. De plus, il avait envoyé une lettre en décembre 2014, si ma mémoire est bonne, pour dire, en gros, qu'il se récusait. Il annonçait qu'il avait créé une sorte de fiducie sans droit de regard et qu'il ne participerait pas aux activités de la Fondation durant sa carrière politique.
    Aucune politique n'a été mise en place, si c'est ce que vous voulez savoir. Par contre, comme son frère l'a affirmé lorsqu'il a témoigné devant le Comité de l'accès à l'information, nous faisions bien attention de ne pas travailler avec lui. Même son propre frère tâchait de respecter cela.
    D'accord, mais deux directeurs de la Fondation sont nommés par la famille Trudeau, n'est‑ce pas?
    C'est la structure qui a été mise en place au moment de la création de la Fondation et de la mise sur pied de l'entente de financement.
    Vous avez dit plus tôt que vous ne pensiez pas qu'un don de 200 000 $ ou de 160 000 $ pouvait servir à acheter de l'influence. Y a‑t‑il des limites établies pour les dons qui peuvent être octroyés à la fondation Trudeau?
    Je ne pense pas que nous ayons déjà reçu un montant qui nous aurait permis de l'essayer.
    Le don le plus important que nous ayons jamais reçu provenait de la Fondation McCall MacBain. Comme je l'ai dit, John McCall MacBain, qui est probablement l'un des plus grands philanthropes au Canada, a donné 200 millions de dollars à l'université McGill, 100 millions de dollars à l'université Oxford et nous a donné 3 millions de dollars. C'est de loin supérieur à tout ce que nous n’avons jamais obtenu.
    D'accord. Savez-vous quels sont les plafonds des contributions qui peuvent être versées aux politiciens en campagne électorale?
    Non, je ne le sais pas.
    C'est moins de 2 000 $ au Canada, alors je suis un peu surpris que vous puissiez laisser entendre que 200 000 $ ne suffiraient pas pour exercer de l'influence dans le système politique canadien, étant donné que lorsque les députés autour de cette table se présenteront aux prochaines élections, ils ne pourront pas accepter... En effet, c'est moins de 2 000 $.
    Il est troublant que ces freins et contrepoids ne soient pas en place à la fondation Trudeau.
    J'ai l'impression que c'est un peu comme comparer des pommes et des oranges, non? Les contributions individuelles aux campagnes des candidats aux élections sont plafonnées. Un don de 200 000 $ à la fondation Trudeau, qui s'ajoute à un fonds de dotation de base de 125 millions de dollars, qui est en croissance, ce n'était pas si grave.
    D'accord, mais si une personne veut faire une contribution de 200 000 $ à la campagne électorale de Justin Trudeau et découvre sur‑le‑champ que l'on ne peut donner que moins de 2 000 $, je pense qu'il serait tout à fait possible que cette personne fasse une recherche sur Google pour trouver un moyen de faire un don à un organisme qui porte le même nom de famille que le premier ministre pour acheter de l'influence. N'êtes-vous pas d'accord pour dire que la Fondation Trudeau apparaîtrait assez rapidement après une recherche sur Google?

  (1240)  

    En toute franchise, je ne le crois pas. Je ne pense vraiment pas que les 200 000 $ allaient permettre d'exercer de l'influence sur nos activités ou celles du gouvernement, pour toutes les raisons que j'ai mentionnées. Si vous voulez étudier l'influence exercée sur le gouvernement, examinez d'autres ententes plus importantes. Quinze milliards de dollars... et je ne veux pas m'en prendre au gouvernement Harper, mais ces ententes ont été conclues...
    Des députés: Oh, oh!
    M. Morris Rosenberg: Je ne...
    Le président: Silence, s'il vous plaît.
    Un député: Ce n'est qu'une coïncidence.
    M. Morris Rosenberg: Eh bien, ce sont des faits, d'accord? Si vous voulez parler de...
    Un instant, monsieur Rosenberg. J'invoque le Règlement.
    Monsieur le président, le témoin essaie simplement de terminer son intervention. Pouvez-vous lui permettre de le faire, par souci de décorum?
    C'est ce que j'essaie de faire.
    Monsieur Rosenberg, vous avez la parole. Il vous reste 40 secondes.
    Ce dossier est très politisé. Certains d'entre vous parlent de la fondation Trudeau financée par Pékin. Mais il ne s'agit pas de la fondation Trudeau financée par Pékin.
    Je pourrais parler de l'entente sur l'achat de Nexen financée par Pékin. Je ne sais pas. Honnêtement, je ne pense pas qu'un montant de 200 000 $ soit très important dans l'ensemble.
    Je vais conclure très rapidement.
    Avant que Justin Trudeau ne devienne premier ministre, on parlait beaucoup de ses honoraires d'allocution lors de différentes activités de bienfaisance.
    Est‑ce que la Fondation Trudeau a déjà payé des honoraires d'allocution à Justin Trudeau?
    Pas à ma connaissance. J'en serais très surpris.
    J'ai bien peur que votre temps soit écoulé.
    Nous allons maintenant passer à M. Sidhu, qui est en ligne.
    Vous avez la parole pour cinq minutes. Allez‑y, s'il vous plaît.
    Ma collègue, Mme Shanahan, prendra la parole.
    Merci, monsieur le président, et merci, monsieur Sidhu.
    Monsieur Rosenberg, j'aimerais revenir sur une déclaration que vous avez faite plus tôt à propos des signes inquiétants des intentions de la Chine dans les années 2010.
    Pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet?
    Oui. Je vais essayer de le faire.
    Les gens se souviennent peut-être des déclarations que l'ancien directeur du SCRS a prononcées en 2010 au sujet de l'ingérence étrangère qui pouvait, en partie, être exercée par la Chine. Ces déclarations ont provoqué un tollé. Chose certaine, les libéraux, qui faisaient partie de l'opposition à l'époque, étaient très mécontents. Je crois même que M. Fadden a comparu devant le Comité. Il ne s'est pas excusé d'avoir prononcé ces déclarations. Avec le temps, nous nous sommes rendu compte qu'il avait raison. Le gouvernement d'alors s'est excusé auprès de M. Fadden, et M. Fadden a fait une très bonne carrière par la suite. Il connaît sur le bout des doigts tout ce qui se rapporte aux questions de sécurité nationale.
    À l'époque, je ne pense pas que quiconque ou qu'un nombre suffisant de personnes prenaient cette situation très au sérieux. Puis, il y a eu, par exemple, cette lettre qui a été envoyée à la China Cultural Industry Association. Il y avait beaucoup de campagnes de relations publiques, non seulement au Canada, mais partout dans le monde. Nous traversions une période où les relations avec la Chine s'amélioraient. Ensuite, certains événements se sont produits. Les gens ont commencé à se rendre compte que la Chine ne jouait pas franc jeu. Elle faisait partie de l'Organisation mondiale du commerce, mais elle utilisait toutes les brèches à son avantage.
    Le commerce avec la Chine n'est pas nécessairement un commerce loyal. Certains critiquaient des accords conclus avec la Chine et s'inquiétaient, par exemple, qu'un accord douanier lui aurait donné accès à trop de renseignements commerciaux de nature délicate, si elle souhaitait s'approprier certains de nos renseignements.
    Je pense qu'au début, les préoccupations concernaient davantage l'aspect commercial, l'aspect économique, et le double usage de la technologie. En ce qui concerne les utilisations militaires possibles de la technologie, sur lesquelles des chercheurs d'universités canadiennes travaillaient en collaboration avec des chercheurs chinois, il nous a fallu un certain temps pour comprendre ce qui se passait. Je crois que ce n'est que tout récemment que les universités ont modifié leurs politiques à cet égard, avec l'encouragement des conseils subventionnaires.
    Monsieur Rosenberg, comment décririez-vous la réponse du gouvernement à l'époque? Diriez-vous que le premier ministre Harper faisait preuve de naïveté?
    Non. Pour vous prouver que je n'ai pas de parti pris, je vous dirais qu'à l'époque, tout le monde pensait agir pour l'intérêt supérieur du Canada. Le monde entier courtisait la Chine, qu’il s’agisse des entreprises, des établissements universitaires ou des gouvernements. Par conséquent, lorsque le gouvernement du Canada a conclu une entente sur les douanes et une entente sur la protection des investissements étrangers avec la Chine, il pensait que cela servait les intérêts du Canada. Lorsque l'ambassadeur a écrit une lettre à cette association culturelle, il pensait agir dans l'intérêt du Canada.
    Faisions-nous preuve de naïveté? Je ne sais pas.

  (1245)  

    Je vous remercie.
    J'aimerais maintenant m'adresser à M. Jean.
    Monsieur Jean, vous avez été conseiller à la sécurité nationale. Pouvez-vous nous parler de cette époque et de l'évolution de la réponse du Canada?
    Je serai heureux de le faire, et je pense pouvoir ajouter quelques faits intéressants.
    En 2012, nous avons signé l'Accord sur la promotion et la protection des investissements étrangers avec la Chine. Nous n'avons pas ratifié cet accord avant 2014. La ratification n'a pas suscité une vive controverse. L'accord n'a pas été ratifié avant 2014 en raison, entre autres, de questions liées à l'environnement, au respect des droits des travailleurs et aux entreprises d'État. En ce qui concerne la vente de Nexen, il ne faut pas oublier qu'elle nous a obligés à élaborer une politique.
    En 2014, la Chine — nous avons attribué cela à la Chine — a attaqué le Conseil national de recherches. Quelques mois plus tard, le régime chinois a procédé à l'arrestation arbitraire de deux Canadiens, Kevin et Julia Garratt. Ils ont été détenus pendant plusieurs mois.
    Plusieurs mois plus tard, le premier ministre Harper s'est rendu en Chine pour annoncer l'accord économique, mais aussi pour avoir des conversations difficiles sur certains éléments que nous n'aimions pas au sujet de la Chine. Pour revenir à la cyberattaque contre le Conseil national de recherche du Canada, n'oubliez pas que nous l'avions attribuée à la Chine la veille de la rencontre entre le ministre John Baird et son homologue à Pékin.
    La description du contexte qu'a donnée M. Rosenberg est tout à fait juste. Ce n'est pas qu'ils étaient naïfs ou que nous sommes naïfs. Avec le temps, nous nous sommes rendu compte que sous Xi Jinping, nous avions affaire à un pays avec lequel il était extrêmement difficile de transiger.
    La sécurité économique, les technologies de nature délicate et la recherche, dont M. Rosenberg a parlé, sont des points très importants. Nous avons été l'un des premiers pays à investir massivement dans la protection de ces éléments.
    En ce qui concerne la Loi sur Investissement Canada, les transactions montraient des investissements dans ces domaines chaque année. Nous travaillions aussi avec d'autres pays pour examiner ces questions. C'est une situation qui évolue.
    Lorsque j'ai témoigné devant le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, j'ai dit que l'ingérence n'était pas quelque chose d'intermittent, ou qui apparaissait du jour au lendemain. Cette réalité s'est révélée au fil du temps.
    Merci beaucoup.
    Des députés des banquettes ministérielles et de l'opposition officielle m'ont fait signe que la sonnerie se fait entendre. Je suis au courant.
    Les députés adorent faire des rappels au Règlement qui n'en sont pas. Ceci est un rappel au Règlement, alors je vais le faire maintenant. N'importe qui aurait pu faire ce rappel au Règlement à n'importe quel moment.
    Il nous reste 19 minutes avant le vote. Si nous entendons nos quatre derniers intervenants, cela prendra 15 minutes. Avons-nous le consentement unanime pour continuer?
    Des députés: D'accord.
    Le président: Je vous remercie.
    Si vous ne m'interrompez pas, je suppose que c'est parce qu'il y a consentement unanime, mais vous êtes évidemment libre d'invoquer le Règlement.

[Français]

    Madame Sinclair‑Desgagné, vous avez la parole pour deux minutes et demie.
    Merci, monsieur le président.
    Je vais récapituler.
    D'après vos dires, monsieur Rosenberg, les deux personnes qui ont fait les dons, soit MM. Niu Gensheng et Zhang Bin, ne parlaient pas très bien anglais. Vous avez même été obligé de les remercier en mandarin.
    Pensez-vous que ces deux personnes se souciaient à ce point des boursiers et de l'objectif si noble de la Fondation Pierre‑Elliott‑Trudeau qu'ils ont fait un don au Canada par l'entremise de la fondation portant le nom de cet ancien premier ministre? Pensez-vous qu'ils ont fait ce don simplement parce qu'ils se préoccupaient du bien-être des boursiers?
    C'est ce que nous avons cru, parce que c'est ce qu'ils avaient fait à l'Université de Toronto en l'honneur de Norman Bethune.
    Ce n'est pas parce que d'autres personnes commettent des actes répréhensibles qu'il faut que vous le fassiez aussi. Ce n'est pas une bonne explication.
    À ce moment, vous auriez dû réagir et ne pas signer, pour ces dons, de reçus qui allaient être envoyés à une autre entreprise, en fin de compte. Je répète que la Loi de l'impôt sur le revenu l'interdit. Comme l'ont dit les représentants de l'Agence du revenu du Canada venus témoigner devant le Comité permanent des comptes publics, c'est un acte qui pourrait faire perdre à la Fondation son statut d'organisme de bienfaisance.
    De toute façon, j'ai une autre question pour vous.
    Vous avez été PDG pendant quatre ans. Considérez-vous qu'un organisme de bienfaisance qui utilise 41 % de ses revenus pour rémunérer ses dirigeants, alors que la moyenne au Québec est de 14 %, alloue correctement ses ressources à des buts caritatifs?
    Je n'ai pas les chiffres devant moi.
    Je viens de vous les donner: c'est 41 %, comparativement à la moyenne de 14 % au Québec.

  (1250)  

    Je ne le sais pas. Vous parlez d'une moyenne. Ce taux est plus élevé pour certaines organisations et plus bas pour d'autres. En ce moment, je ne peux pas dire si c'est justifié dans le cas de la Fondation Pierre‑Elliott‑Trudeau. C'était une petite organisation quand j'y travaillais, et je ne sais pas si la situation a changé depuis que je l'ai quittée.
    Monsieur Rosenberg, il ne me reste que 30 secondes. J'aimerais vous poser une dernière question. Vous sembliez patiner un peu au sujet de la rémunération, alors je vais revenir à la question du don.
    Je ne sais pas si vous vous êtes posé des questions. Si vous avez pensé que les objectifs des deux personnes qui voulaient remettre un don étaient nobles, pourquoi ne pas vous être interrogé un peu plus à cet égard? N'était-ce pas votre travail, en tant que PDG, de vous assurer que la Fondation allait préserver une certaine réputation et n'allait pas accepter de dons provenant de personnes qui, de toute évidence, utilisaient le nom de Trudeau pour influencer le premier ministre nouvellement élu?
    Vous avez dit que c'était une évidence, mais je ne suis pas du tout d'accord là-dessus. Étant donné la nature du don et le fait qu'aucune condition n'avait été imposée quant à la nature des conférences qui devaient avoir lieu, sans compter que l'ambassadeur du Canada à Beijing connaissait ce donateur et l'avait présenté à M. Lefebvre, de l'Université de Montréal, nous avons pensé que c'était une bonne chose à faire.
    Votre temps de parole est écoulé, madame Sinclair‑Desgagné. Merci beaucoup.

[Traduction]

    Monsieur Desjarlais, vous avez la parole pour deux minutes et demie.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je veux adresser mes questions à M. Jean.
    Une trame narrative se dégage de votre témoignage précédent et des faits que vous avez présentés. Il s'agit du récit d'une expérience que vous et bon nombre des témoins ici présents avez été en mesure de nous raconter, et c'est un élément important qui nous aide à comprendre la question de l'ingérence étrangère, en particulier de la part d'acteurs étatiques comme la Chine, mais même de la part d'autres acteurs étatiques comme la Russie.
    D'après votre expérience, monsieur Jean... Je sais que vous avez été conseiller au renseignement auprès du premier ministre à une époque où ces politiques évoluaient peut-être très rapidement. Vous avez parlé d'une situation volatile. M. Rosenberg nous a expliqué comment même la société civile... La Fondation Pierre‑Elliott‑Trudeau cherchait à obtenir ces dons de la Chine et à trouver des moyens d'améliorer sa relation avec ce pays. À titre d'exemple, M. Rosenberg a dit que lorsqu'il était PDG, le gouvernement gardait des pandas et d'autres choses du genre pour essayer de tisser des liens.
    Pendant votre mandat, à cette époque, avez-vous pensé qu'il s'agissait d'un risque qui était pris assez au sérieux pour demander la tenue d'une enquête publique? Pensez-vous que c'est ce que les Canadiens voulaient à l'époque?
    J'ai donné beaucoup de détails à ce sujet lors de ma comparution au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre des communes. Nous commencions à peine à voir des signes préoccupants. Nous voyions beaucoup plus de signes sur le plan de la sécurité économique. J'en ai parlé il y a quelques minutes, alors je vous épargne la répétition.
    Par exemple, à l'été 2015, quand j'étais sous-ministre des Affaires étrangères, et tout juste quelques mois avant les élections, nous avons transmis une note diplomatique à toutes les missions diplomatiques, pour les prévenir qu'elles ne devaient pas intervenir lors des élections — sachant qu'elles auraient lieu bientôt —, au titre de la Convention de Vienne. Nous avons été durement critiqués, un peu comme M. Fadden l'avait été en 2010. Quelques personnes nous ont reproché d'avoir agi ainsi. Elles ont trouvé que c'était grossier. Nous percevions des signes indiquant que certaines personnes de pays étrangers tentaient d'intervenir à l'échelle locale — pas dans la mesure décrite dans les fuites que vous avez vues, mais suffisamment pour affirmer qu'il valait mieux prévenir...
    Nous avons publié un document diplomatique. Nous l'avons fait. Nous avons travaillé très fort sur les questions de sécurité économique. Je vous en ai déjà parlé. Il y a d'abord eu une attaque contre l'Agence mondiale antidopage en 2016, au Canada. Trois mois plus tard, le même agent du GRU a mené une attaque dans le cadre des élections américaines.
    Comme c'est souvent le cas dans notre société, ce sont les objets qui brillent qui font les manchettes. L'ingérence étrangère attirait une bonne partie de l'attention. Nous avons énormément travaillé, et c'est ce qui a mené à bon nombre des mécanismes que vous examinez dans le cadre de vos travaux. Nous avons beaucoup travaillé pour dire qu'il y avait possibilité d'ingérence étrangère dans le monde numérique et physique, et qu'il fallait se prémunir contre elle dans les deux cas.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Genuis, vous avez la parole pour cinq minutes. Je serai strict quant à votre temps et celui pour le dernier tour de questions du gouvernement. Allez‑y.
    Merci, monsieur le président.
    Je pense qu'il est important d'inscrire au compte rendu que le gouvernement Harper était extrêmement prudent face à la Chine. Après l'acquisition de Nexen, il a imposé des restrictions supplémentaires sur les investissements. Pendant les années Harper, les libéraux, alors dans l'opposition, exerçaient des pressions pour que le gouvernement soit moins prudent et aille à toute vapeur.
    À mon avis, on peut certes discuter des aspects de ces politiques qui auraient pu être différents, mais ce n'est pas comme s'il n'y avait pas de différence entre la position des libéraux et celle des conservateurs à l'époque. Les conservateurs ont adopté une approche très différente, une approche bien plus prudente. Quand les libéraux sont arrivés au pouvoir, ils parlaient non seulement de libre-échange avec la Chine, mais aussi d'un traité d'extradition. C'était après la détention arbitraire des Garratt, de Huseyin Celil et d'autres. Je suis heureux que la détention des deux Michael ait fini par entraîner une prise de conscience. Honnêtement, ce n'était pas le premier — et ce ne sera malheureusement pas le dernier — cas de détention arbitraire. Le gouvernement libéral, en arrivant au pouvoir en 2015, aurait dû le savoir.
    Monsieur Rosenberg, vous avez parlé de l'ambassadeur en Chine qui a présenté ces donateurs à la fondation Trudeau. Pourriez-vous dire de quel ambassadeur il s'agissait et quand ces présentations ont eu lieu?

  (1255)  

    D'abord, il a présenté le donateur au vice-rectorat aux partenariats internationaux, à l'Université de Montréal. C'est l'Université de Montréal qui a approché la fondation Trudeau.
    De quel ambassadeur s'agissait‑il?
    C'était l'ambassadeur Guy Saint-Jacques.
    Merci.
    Nous savons que des donateurs ont assisté à un événement de financement « argent contre accès » en présence du premier ministre Trudeau peu avant que ce don soit effectué. Saviez-vous que ces donateurs avaient participé à cet événement de financement libéral?
    Je n'en avais aucune idée.
    Cela vous aurait‑il fait réfléchir, si vous l'aviez su?
    Peut-être.
    D'accord.
    D'autres personnes à la Fondation étaient-elles ou auraient-elles dû être au courant — comme le frère du premier ministre — du fait que ces personnes étaient présentes?
    Le frère du premier ministre a indiqué dans son témoignage, je crois, que le premier ministre et lui ne parlaient pas de politique, alors je ne crois pas qu'il ait été au courant non plus. C'était...
    Si je me souviens correctement, il savait qu'ils étaient dans l'assistance — en tous cas, il était au courant quand il a témoigné.
    Vous ne semblez pas vouloir confirmer ou non le fait que ces donateurs ont participé à une activité de financement « argent contre accès » juste avant de donner cet argent... Vous ne semblez pas vouloir confirmer que cela vous aurait fait réfléchir ou...?
    Eh bien, écoutez, nous ne le savions pas à l'époque. Si quelqu'un m'avait dit que cela s'était produit, je pense que cela m'aurait fait réfléchir. Nous aurions certainement enquêté davantage. Je ne dis pas que cela aurait tout fait échouer.
    Sachant ce que vous savez maintenant, il semble que l'entreprise était destinée à tenter d'exercer une influence. Est‑ce exact?
    Je regrette. Je ne suis pas d'accord avec vous à ce sujet, et je vais vous dire pourquoi...
    Ils assistent à cet événement de financement et font un don peu de temps après.
    ... parce que ce don avait été négocié bien avant cette activité de financement.
    M. Garnett Genuis: Il a été finalisé...
    M. Morris Rosenberg: Il était prêt à être annoncé en septembre 2015. Il ne l'a pas été en raison d'un problème technique de la part de l'Université de Montréal, alors je...
    Il y a beaucoup de problèmes techniques — c'est commode, non? —, comme la pénurie de salles de conférences dans l'édifice Blackburn, comme le fait que c'est par hasard que le donateur s'est trouvé à cet événement de financement et que cela a été commode de finaliser le don juste après. Je ne crois pas que cela soit le moindrement crédible.
    Avec le temps qu'il me reste, j'aimerais revenir à M. Knubley.
    Je m'intéresse au fait qu'après avoir été sous-ministre, vous avez travaillé pour McKinsey. J'aimerais savoir s'il y a eu une période de restriction entre vos fonctions gouvernementales et celles chez McKinsey. J'aimerais aussi savoir si McKinsey a déjà travaillé pour la fondation Trudeau.
    Navré; sur ce dernier point, je n'en ai aucune idée. Je ne sais pas ce que McKinsey a fait avec la fondation Trudeau et il n'est pas approprié de parler des clients.
    Je commencerai par une déclaration que j'ai respectée depuis que j'ai quitté le gouvernement...
    Excusez-moi. Il serait approprié que vous en parliez, puisqu'on vous pose la question dans un comité parlementaire. Si vous ne le savez pas, vous ne le savez pas, mais vous devez répondre à la question si vous connaissez la réponse.
    Je viens de dire que je ne savais pas.
    D'accord. Merci.
    J'allais dire que j'ai suivi toutes les règles relatives à la Loi sur le lobbying et à la Loi fédérale sur la responsabilité, tel qu'exigé, dans toutes mes activités d'expert-conseil. Je me suis joint à McKinsey à titre de conseiller principal en septembre 2020, plus d'un an après mon départ du gouvernement en 2019. Il s'agit d'une exigence. Je ne peux pas...
    Avez-vous conseillé McKinsey sur la manière d'obtenir des contrats du gouvernement du Canada, monsieur?

  (1300)  

    Votre temps est écoulé, j'en ai peur.
    Je passe maintenant la parole à notre dernière intervenante.
    Non, je ne l'ai pas fait et je veux dire que j'ai passé 5 % de mon temps comme consultant à travailler avec McKinsey et...
    Madame Yip, je crois que vous avez les cinq dernières minutes.
    ... la raison pour laquelle j'ai quitté McKinsey en septembre 2022 est...
    Monsieur Knubley, c'est terminé. Merci beaucoup.
    Mme Yip a la parole pour cinq minutes.
    Merci.
    Monsieur Knubley, si vous voulez terminer votre phrase, allez‑y, je vous prie.
    Oui, je veux simplement dire deux choses.
    D'abord, dans mes activités d'expert-conseil, à titre de conseiller principal, une proportion d'environ 5 % de mon temps était consacrée à McKinsey, et je suis parti parce qu'il n'y avait pas de travail.
    Merci. J'aimerais maintenant retourner à notre sujet d'étude.
    Monsieur Rosenberg, Edward Johnson nous a parlé des mesures de gouvernance en place à la Fondation. Pourriez-vous nous parler des procédures en place pendant votre mandat? Y a‑t‑il eu des drapeaux rouges soulevés par les comptables ou les vérificateurs au sujet des dons?
    À ma connaissance, c'est PricewaterhouseCoopers qui était le vérificateur de la Fondation. Je ne me souviens d'aucun drapeau rouge à ce sujet.
    Vous avez mentionné que vous saviez qu'une vérification juricomptable était en cours. Que révélerait un tel exercice?
    Je sais que... Ce que je vous dis se fonde sur ce que j'en ai entendu de M. Johnson, alors vous en savez peut-être autant que moi sur le sujet. Je crois que vous feriez mieux de poser votre question sur le contenu à M. Johnson ou aux vérificateurs eux-mêmes.
    Vous avez affirmé aujourd'hui que les problèmes de la Fondation devaient être examinés très rapidement. Pourriez-vous parler davantage des répercussions, si l'on ne s'en occupait pas rapidement?
    Eh bien, je suis inquiet, à ce stade‑ci. La Fondation doit se trouver un nouveau président, et je crois que ce sera difficile de le faire tant que ces enjeux ne sont pas éclaircis. Il en va de même, à mon avis, pour les nouveaux membres du conseil d'administration. Pour cette raison, il faut procéder rapidement. Comme M. Johnson, il serait difficile pour moi de voir le bon travail de la Fondation — elle a fait un travail fabuleux au cours des 20 dernières années — ne pas être en mesure de se poursuivre en raison de ces enjeux.
    Cela aurait certainement une incidence sur les bénéficiaires.
    Absolument.
    De quelle manière les Canadiens peuvent-ils soutenir la Fondation?
    Je dirais les choses autrement. La Fondation a différentes manières d'appuyer les Canadiens; j'en ai parlé brièvement. La Fondation, pendant mon mandat et pendant celui de Mme Fournier, dans une certaine mesure, a œuvré encore davantage à envoyer ses membres dans les collectivités, non seulement pour en apprendre sur ce qui se passe véritablement, mais aussi pour que les Canadiens en apprennent sur le travail de la Fondation et pour permettre à des jeunes, qui n'y auraient peut-être autrement jamais pensé, d'avoir l'occasion de rêver de mener des activités du genre, eux aussi.
    Puisque nous en sommes presque à la fin, y a‑t‑il d'autres remarques ou commentaires que vous aimeriez faire?
    Non. Je pense que j'en ai assez dit.
    Merci beaucoup.
    Merci, madame Yip, d'avoir cédé votre temps. Cela donnera aux membres quelques secondes supplémentaires pour aller voter.
    Je remercie tous les témoins d'avoir été présents aujourd'hui et d'avoir répondu à la demande de comparution du Comité. En particulier, merci à M. Rosenberg d'avoir répondu aux nombreuses questions d'aujourd'hui.
    Je vais maintenant lever la séance.
    Nous nous reverrons jeudi.
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