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HUMA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des ressources humaines, du développement des compétences, du développement social et de la condition des personnes handicapées


NUMÉRO 044 
l
2e SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 24 février 2015

[Enregistrement électronique]

(1530)

[Traduction]

    Bonjour, mesdames et messieurs, bienvenue.
    Il s'agit de la 44e réunion du Comité permanent des ressources humaines, du développement des compétences, du développement social et de la condition des personnes handicapées. Nous sommes ici pour poursuivre l'exploration du potentiel de la finance sociale au Canada.
    Pendant la première heure, nous avons le plaisir d'accueillir M. Bruce Dewar, président-directeur général de LIFT Philanthropy Partners, qui aura une déclaration à faire. Bienvenue.
    Nous allons également entendre, par vidéoconférence de Montréal, M. Stephen Huddart, président-directeur général de La fondation de la famille J.W. McConnell.
    Enfin, par vidéoconférence de Calgary, nous entendrons M. Wayne Chiu, directeur général du Trico Group. Bienvenue, monsieur.
    Vous disposerez chacun d'un maximum de 10 minutes pour faire votre déclaration, après quoi nous passerons aux questions des membres du comité. Mesdames et messieurs, il s'agira de tours de cinq minutes, aujourd'hui, car nous recevons deux groupes de témoins, un pendant la première heure et l'autre, pendant la deuxième.
    Monsieur Dewar, voudriez-vous s'il vous plaît commencer votre déclaration?
    C'est un plaisir d'être ici pour m'adresser à votre comité.
    La finance sociale a un énorme potentiel parce qu'elle peut encourager l'innovation sociale, au Canada, en donnant aux investisseurs et aux organismes à mission sociale de nouvelles occasions de travailler en partenariat pour réaliser des projets innovateurs et faire passer leurs excellentes idées à un échelon supérieur, partout au pays. La finance sociale améliorera la situation sociale et économique des Canadiens et, fait plus important encore, des collectivités dans lesquelles ils vivent.
    Comme nous le savons tous, le Canada fait face à des problèmes économiques croissants et à des enjeux sociaux complexes de plus en plus graves. Notre population vieillit, les travailleurs prennent leur retraite, et nous devons répondre à une plus grande demande de travailleurs scolarisés et spécialisés. Les données du gouvernement fédéral sur le chômage font état d'une pénurie de compétences dans les régions et parmi les groupes sous-représentés, par exemple les Canadiens d'origine autochtone, les nouveaux immigrants et les adultes peu alphabétisés.
    De plus, la santé de notre population est menacée. L'inactivité physique mène à des maladies chroniques, à une augmentation du coût des soins de santé et à des pertes de production. L'inactivité physique représente en coûts annuels de soins de santé plus de 2 milliards de dollars. Le gouvernement pourrait obtenir des résultats différents et meilleurs pour les contribuables canadiens s'il se penchait sur de nouveaux modèles et de nouvelles façons de faire les choses. L'innovation sociale et la finance sociale peuvent faire partie de sa trousse d'outils.
    Passer de l'acceptation des possibilités de la finance sociale à la mise en oeuvre de projets représente un défi pour tous les gouvernements, pas seulement pour le gouvernement fédéral. Nous voyons qu'il en est ainsi pour les gouvernements provinciaux et partout dans le monde. Si nous examinons globalement la finance sociale, il est évident qu'il n'existe pas de solution unique et que les outils de la finance sociale prennent de nombreuses formes. Il est trop tôt pour faire des prédictions définitives ou formuler une conclusion sur les modèles les plus efficaces à l'échelle mondiale, car ils n'ont pas tous encore porté fruit.
    Il y a trois ou quatre ans, les gens parlaient des obligations à impact social, des investissements d'impact et de la rémunération au rendement, des modèles qui peuvent tous être utilisés au Canada. Je crois que nous pourrons proposer une solution canadienne, qui intègre les meilleurs éléments de ces principes, pour faire en sorte que les organismes à mission sociale puissent fournir des résultats pour les Canadiens.
    Au Royaume-Uni, on a reconnu que, pour que les investissements donnent des résultats, ils doivent être acheminés vers les organismes à mission sociale qui sont prêts à les utiliser. Il est essentiel de mettre en place un réseau d'organismes capables d'accepter et d'utiliser les outils de la finance, si l'on veut que le Canada réussisse de façon durable. Si ces organismes ont la capacité nécessaire et qu'ils sont autonomes, ils peuvent, lorsqu'ils mettent la main sur les outils d'investissement, agir à plus grande échelle et avoir un impact plus important en faisant fructifier davantage les deniers des contribuables.
    Pour déterminer si les organismes à mission sociale ou les organismes sans but lucratif sont prêts à s'intégrer à un réseau fondé sur l'approche de la finance sociale, les intervenants de LIFT croient que les éléments qui suivent sont essentiels à la réussite: une théorie du changement qui soit claire et dont les résultats ont été démontrés, un plan de croissance stratégique permettant d'obtenir les résultats souhaités, la capacité de faire ressentir l'impact à l'extérieur de la sphère de compétence et à l'échelle du pays, une efficience et une efficacité éprouvées, un outil de mesure et d'évaluation permettant de s'assurer que le rendement des investissements est bien le rendement escompté et des organismes prêts à avoir un impact et à tirer parti des investissements.
    Le gouvernement doit commencer à travailler avec des intermédiaires au moment de cerner les organismes dont les modèles ou les interventions donnent de bons résultats. Le gouvernement doit ensuite amener les intermédiaires à travailler de concert avec les organismes à mission sociale pour qu'ils consolident leurs capacités et les renforcent, pour qu'ils soient davantage durables et puissent plus efficacement produire des impacts sociaux mesurables. Les intervenants de LIFT croient également qu'un cadre pancanadien de projets prêts à utiliser les investissements et à avoir un impact aidera le Canada à montrer aux autres administrations comment apparier les besoins des régions et des collectivités et les priorités stratégiques du gouvernement dans un cadre de finance sociale générant des résultats mesurables. Il faudra que le gouvernement, les intervenants et l'ensemble des partenaires déterminent les résultats positifs. Il faut définir clairement l'objectif des interventions et chercher à savoir si l'intervention entraîne un résultat à elle seule ou en combinaison avec d'autres projets.
    Globalement, les organismes de philanthropie spéculative sont reconnus comme étant des acteurs clés qui aident les organismes à mission sociale à se préparer à recevoir des investissements et à avoir des impacts. Selon un rapport du G8, la collaboration à l'échelle mondiale est au coeur de la finance sociale et de l'innovation sociale. Les intervenants de LIFT sont fiers de faire partie d'une alliance axée sur les pratiques exemplaires aux côtés de trois autres organismes de philanthropie spéculative à l'échelle du monde: Impetus Private Equity Foundation, du Royaume-Uni; Social Ventures, en Australie; New Profit Inc., aux États-Unis. Nous soutenons les efforts déployés par le Canada pour mettre en place un réseau mondial. Ces trois organismes se sont intéressés directement ou indirectement à la question des obligations d'impact social et aux outils de finance sociale.
(1535)
    Les intervenants de LIFT croient qu'il est essentiel de définir des valeurs de référence, des paramètres de rendement et des processus d'évaluation de façon à pouvoir mesurer notre impact social au moment de cibler des populations et des régions. C'est pourquoi nous tenons à nous assurer que tous les projets comportent un élément de mesure et que la responsabilité est claire.
    Je remercie le comité de m'avoir donné l'occasion de prendre la parole. Je répondrai plus tard avec plaisir à vos questions.
    Merci beaucoup.
    Nous donnons maintenant la parole à M. Huddart.
    Permettez-moi de vous dire à quel point j'apprécie l'occasion qui m'est donnée de m'adresser à vous aujourd'hui. Il s'agit vraiment, pour nous, d'une précieuse occasion de travailler avec nos partenaires du gouvernement, du secteur privé et du secteur communautaire afin d'améliorer la vie des Canadiens de nos collectivités.
    Je suis président-directeur général de La fondation de la famille J.W. McConnell, qui a vu le jour à Montréal en 1935, ce qui en fait la deuxième fondation privée à être créée dans notre pays. Notre fondation est aujourd'hui la troisième en importance, au Canada, vu l'importance de ses actifs. Notre mission est de mobiliser les Canadiens pour créer une société innovatrice, inclusive, durable et résiliente. Mettre de côté une portion substantielle de sa fortune à des fins de philanthropie était peut-être une idée nouvelle, en 1935, mais il est certain qu'elle s'est répandue, dans notre pays. Le Canada compte aujourd'hui quelque 10 000 fondations privées et publiques qui gèrent des actifs d'environ 55 milliards de dollars. Conformément à la réglementation qui régit ces fonds, de 2 à 3 milliards de dollars environ sont investis et distribués chaque année dans des projets communautaires.
    Nous croyons que, si nous voulons sérieusement nous attaquer au problème que le témoin précédent, M. Dewar, a mis en relief — par exemple, les coûts croissants et insoutenables des soins de santé, le chômage élevé et chronique chez les jeunes, la viabilité des collectivités dépendantes d'une ressource en déclin ou dont le secteur manufacturier a déménagé dans le Sud —, il serait temps de dégager davantage de ces ressources et des actifs constitués par des dons pour les faire contribuer aux priorités communautaires et nationales. Je crois que c'est de cela que nous devons parler.
    Notre fondation a fait son premier investissement d'impact en 2007. Il s'agit d'un domaine relativement nouveau au Canada. Conformément à notre objectif philanthropique, l'amélioration de l'enseignement au premier cycle, nous avons consenti un prêt de 10 millions de dollars à un groupe qui désirait créer une université en adoptant un nouveau modèle pour l'enseignement de premier cycle, le modèle des cohortes. En conséquence, aujourd'hui, l'Université Quest, comme on l'appelle, arrive au premier rang des établissements d'enseignement de premier cycle au pays. En passant, le prêt nous a été remboursé avec intérêts en 2009, ce qui en fait notre investissement le plus rentable, sur les 600 millions de dollars de dons reçus cette année-là. C'était une année très difficile, sur le plan financier, comme vous vous en rappelez. Je le souligne parce qu'il est important de savoir que, lorsque nous parlons d'investissement d'impact et de finance sociale en ce qui concerne les fondations, nous supposons souvent que le rendement est inférieur à celui du marché; cependant, comme les investissements sont liés aux besoins de la collectivité et souvent soutenus par des gens en chair et en os, dans nos collectivités, ils ne sont pas liés au rendement du marché et peuvent souvent, surtout lorsque la situation économique est mauvaise, le dépasser.
    Donc, lorsque nous discutons avec les fiduciaires des fondations — nous parlons ici de l'obligation fiduciaire —, nous devons être clairs sur le fait qu'il est important, oui, de tenir compte des résultats sur les plans social et économique autant que du rendement des investissements; toutefois, nous pouvons également dire que, même s'il est acceptable d'accepter un rendement moins élevé que celui du marché, il n'est pas toujours nécessaire de le faire.
    À titre de pionniers du domaine de la finance sociale, nous pouvons attirer l'attention sur quelques initiatives clés auxquelles nous avons participé, entre autres le Groupe de travail canadien sur le financement social, dont le rapport, publié en 2010, proposait au pays un programme que nous appliquons aujourd'hui, je crois, vous et moi.
    C'est le ministre Flaherty qui avait distribué le rapport aux ministres des Finances des provinces, en leur recommandant d'y jeter un coup d'oeil. Et de fait, nous voyons partout au Canada que des progrès considérables se font à l'échelon des provinces, qui mettent en oeuvre des choses comme des sociétés d'intérêt communautaire en Colombie-Britannique ou un portail d'approvisionnement pour les entreprises sociales, comme ici, au Québec, entre autres initiatives. Je crois donc que nous sommes sur la bonne voie, mais je crois que, si nous regardons ailleurs dans le monde, nous constaterons que la croissance de ce secteur est plus rapide à l'étranger qu'au Canada.
    J'ai pris connaissance, l'autre jour, de statistiques selon lesquelles entre 2012 et la fin de 2014, la valeur mondiale des investissements d'impact a augmenté pour passer à 23 milliards de dollars. Pendant cette période, au Canada, ils ont augmenté, je crois, et sont passés de 2 à 5 milliards de dollars. Nous sommes devancés par le Royaume-Uni, les États-Unis, l'Australie et d'autres pays, qui accomplissent des progrès. Je crois qu'il est important pour nous de combler cet écart.
    Aujourd'hui, notre portefeuille d'investissements d'impact est d'environ 25 millions de dollars, et les investissements concernent toute une gamme de fonds et d'initiatives d'entreprise. Mais, en raison de l'absence de produits disponibles au Canada, la moitié environ de cette somme est en fait investie à l'étranger.
(1540)
    Si nous discutons de cette question, au Canada et ailleurs dans le monde, c'est en partie parce que le public, et en particulier les bénévoles et les donateurs, voudrait que les organismes de bienfaisance aillent au-delà des symptômes des problèmes systémiques et qu'ils s'attaquent réellement aux causes sous-jacentes en visant les résultats. Je crois que nous constatons que le secteur philanthropique communautaire prend ce virage, et je crois que, en partenariat avec les gouvernements et le secteur privé, nous sommes maintenant encouragés à faire certains changements très importants.
    En tant que donateurs, nous finançons la recherche et développement sur le plan social. Nous prenons les premiers le risque en cherchant à améliorer les résultats sociaux et nous créons les conditions nécessaires à de futurs investissements dans l'infrastructure communautaire et les programmes sociaux à l'aide, par exemple, d'investissements de capitaux patients, de garanties de prêt et de mécanismes de financement axés sur les résultats, par exemple les obligations à impact social et d'autres mécanismes touchant la santé, la justice, l'éducation, les personnes handicapées et le développement économique communautaire.
    J'aimerais explorer trois domaines qui offrent aux Canadiens, je crois, des possibilités considérables d'augmenter les activités que nous menons en partenariat avec les gouvernements et le secteur privé afin d'obtenir de meilleurs résultats sur le plan social.
    Parlons d'abord des investissements dans les collectivités et de l'intégration des buts sociaux, environnementaux et économiques. Je vais vous donner trois exemples.
    À Toronto, nous participons actuellement à l'initiative Evergreen CityWorks. Nous avons versé une subvention pour l'élaboration d'un plan d'activité touchant ce qu'on appelle le renouvellement des tours; il s'agit essentiellement d'un modèle de réaménagement environnemental de vieilles tours d'habitation du nord de la ville qui doit faire en sorte que les économies d'énergie réalisées compensent le coût initial de la rénovation énergétique. Mais nous parlons également de rénovation sociale. Selon certaines recherches, les gens qui vivent dans ces tours sont souvent seuls, et il y a un niveau de criminalité élevé, les gens font peu confiance à leur voisin, et ainsi de suite. En partenariat avec l'administration municipale, nous examinons la possibilité de modifier le zonage des terrains qui jouxtent ces tours pour y bâtir de nouvelles installations de faible hauteur en proposant d'autres types d'innovation sociale de façon à créer, en dehors de ces tours, une collectivité plus viable et plus dynamique.
    Mon prochain exemple est celui de Winnipeg. Nous travaillons en partenariat avec le Conseil pour la réduction de la pauvreté de Winnipeg, un regroupement de gens d'affaires; avec Centraide Winnipeg; avec la Fondation Winnipeg; et avec le gouvernement provincial pour faire changer les résultats sur le plan social dans le nord de la ville. C'est un quartier urbain très difficile qui compte une forte proportion de résidents d'origine autochtone et, selon les statistiques sociales, la situation y est franchement inacceptable dans un pays comme le Canada. Dans ce quartier, près de 25 % des enfants sont placés en foyer d'accueil avant d'avoir l'âge de 5 ans.
    Nous reconnaissons avoir pris un engagement qui s'étendra sur toute une génération et que nous pourrons soutenir par des subventions, la capacité de faire l'essai de nouvelles solutions, dans la collectivité et avec nos partenaires communautaires, mais nous reconnaissons également qu'il faudra un jour consentir des investissements beaucoup plus importants si nous voulons transformer le système. Nous nous intéressons entre autres aux capitaux réservés au Bon d'études canadien, une somme de 1,2 milliard de dollars qui n'est actuellement pas utilisée et qui était en fait conçue pour aider les familles à faible revenu à assurer une éducation postsecondaire à leurs enfants. Nous savons que, selon certaines recherches, pour des enfants de 4 ans seulement, le seul fait de savoir que de l'argent a été mis de côté pour leur avenir a un effet mesurable et positif sur l'assiduité à l'école, sur l'abstention d'actes de vandalisme et d'actes criminels, et ainsi de suite. Le fait de savoir que des dispositions ont été prises pour assurer son avenir donne à un enfant un élan formidable.
    Pourquoi ces fonds restent-ils inutilisés? Pourquoi ne nous sommes-nous pas donné le moyen de transférer cet argent dans une collectivité comme Point Douglas? Voilà le défi auquel nous faisons face et, pour parler franchement, si la collectivité pouvait recevoir des fonds de cette ampleur, nous devrions également penser à créer des entreprises sociales pour donner aux jeunes des possibilités d'emploi plutôt que de les laisser devenir chômeurs ou décrocheurs.
    Cette idée de réexaminer nos actifs et de les réaffecter en fonction de leur objectif original est, je crois, au coeur de certaines des réflexions les plus judicieuses au sujet du financement social, de nos jours. Il ne s'agit pas de créer de l'argent neuf. Il s'agit d'utiliser les fonds et les actifs existants à des fins meilleures et supérieures.
    Le prochain exemple que j'aimerais vous donner est celui de Montréal, où nous sommes en pourparlers avec l'administration municipale, des organismes philanthropiques partenaires, le secteur communautaire, le secteur de la haute technologie et le milieu universitaire, entre autres, au sujet d'une transformation communautaire et de notre vision de Montréal dans un avenir immédiat. Encore une fois, il faut pour cela que tous les intervenants se présentent à la table, c'est-à-dire les syndicats, les propriétaires d'entreprise et le secteur des finances. C'est en unissant nos forces que nous pourrons réellement obtenir des résultats très importants et différents.
(1545)
    Le deuxième domaine dont j'aimerais parler concerne les Autochtones. Comme M. Dewar l'a dit, ils représentent un de nos plus grands défis sur le plan social. Il représente également, ajouterais-je, l'un de nos meilleurs moyens de changer le monde.
    J'aimerais vous donner un exemple de projet auquel nous participons et qui a trait aux investissements d'impact. Nous avons conclu un partenariat avec la nation huronne de Wendake, au Québec, pour renforcer le modèle des propriétés foncières dans les réserves et pour l'appliquer ailleurs. Les Hurons ont adopté un modèle différent. Ils ont mis en place un fonds d'hypothèques, pour eux-mêmes, à partir du financement fédéral versé à leur collectivité. Ils ont organisé un référendum, et ce n'est plus le conseil de bande qui contrôle ces fonds, désormais. Un système de gouvernance indépendant a été créé, et c'est selon un modèle d'affaires que les hypothèques sont accordées aux membres de la collectivité. D'ailleurs, plus de 400 prêts hypothécaires ont été consentis, et le taux de défaut est inférieur à 2 %. Ils sont tous liés, d'ailleurs, à 7,5 %, et le fonds est solide au point d'attirer les investisseurs de l'extérieur. Ils voudraient que ce modèle soit diffusé...
    Monsieur Huddart, je dois vous demander de conclure, parce que vous avez déjà dépassé votre limite. Ce sont des exemples magnifiques, et j'aimerais que nous ayons plus de temps. Nous pourrions peut-être en apprendre davantage au moment des questions. Pourriez-vous conclure en une minute, s'il vous plaît?
    Certainement.
    Mon dernier point, en réalité, c'est l'initiative RECODE, assortie d'un budget de 10 millions de dollars, qui offre des possibilités d'entrepreneuriat social et d'innovation sociale aux étudiants de niveau postsecondaire du Canada. Nous avons la joie d'être, dans cette initiative, en partenariat avec le Trico Group, votre prochain témoin, qui y travaille avec nous. Et je crois que l'important, ici, c'est tout simplement de donner de la place à la prochaine génération de jeunes Canadiens qui manifestent un grand intérêt à y participer.
    Merci.
    Merci beaucoup. Comme je l'ai dit, il y a là beaucoup de sujets intéressants que nous aimerions explorer avec vous.
    Nous cédons maintenant la parole à M. Wayne Chiu.
    Merci de m'avoir invité à m'adresser à vous aujourd'hui.
    En plus d'être le PDG d'une entreprise privée, je suis le président de l'organisme Trico Charitable Foundation. Créé en 2008, l’organisme Trico Charitable Foundation vise à promouvoir l’innovation et le renforcement des capacités dans le domaine de l’entrepreneuriat social.
    Nous avons été honorés de participer, en 2014, au Comité consultatif national du Canada du Groupe de travail sur l’investissement social, créé par le G8 sous la présidence du Royaume-Uni. Aujourd'hui, nous réitérons les suggestions que nous y avons faites. Il y a deux mesures cruciales que le gouvernement fédéral peut prendre pour favoriser l’entrepreneuriat social. Il s'agit de permettre aux organismes sans but lucratif de faire des profits et de permettre aux fondations privées de financer des organismes sans but lucratif. Bien que nos recommandations portent principalement sur notre soutien à l’entrepreneuriat social plutôt qu’à la finance sociale comme telle, nous les voyons comme des possibilités en amont visant à accroître la réceptivité à l’investissement des organismes souhaitant accéder à la finance sociale à l'avenir.
    Puisqu'il s'est penché directement sur la finance sociale, nous aimerions féliciter le comité de ses efforts afin de déterminer comment le gouvernement peut encourager efficacement la croissance de la finance sociale au Canada, qui a commencé à se faire sentir à l’étranger. Je prends très au sérieux la combinaison des éléments suivants: « au Canada » et « qui a commencé à se faire sentir à l’étranger ». Il faut absolument apprendre des expériences à l’international, et pas seulement les copier, mais il faut également les appliquer d’une manière qui respecte le contexte unique du Canada et le met à profit.
    Ce sentiment correspond aux conclusions d’un nouveau rapport que j'aimerais recommander, et je remercie le gouvernement canadien d'avoir eu la vision et le leadership nécessaires pour le financer. Le rapport est intitulé Social Impact Investment: Building the Evidence Base et est publié par l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). On y dit que « … les mesures prises dans un pays ou une région peuvent ne pas être indiquées pour un autre pays ou une autre région. Les objectifs stratégiques, les expériences et le contexte local doivent être pris en compte ».
     J'aimerais en profiter pour appuyer les recommandations et les prochaines étapes énoncées dans le rapport. Selon le rapport, étant donné que l’investissement à impact social est un domaine naissant, il faut des preuves concrètes de ses effets. En particulier, des travaux plus poussés sont nécessaires pour démontrer les avantages de l’approche en matière d’investissement à impact social, par rapport aux modèles de prestation des services sociaux existants. L’OCDE recommande principalement de constituer une base de données probantes, notamment de s’entendre sur les définitions, de bâtir l’infrastructure nécessaire pour mettre en place des processus coordonnés de collecte de données, de favoriser les efforts sur la mesure des résultats sur la société et l’évaluation des politiques.
    D’après toutes les observations de la Trico Charitable Foundation, les besoins essentiels pour le développement de la finance sociale sont les suivants: renforcer les capacités de la « demande », aider à nourrir et à créer des entreprises prêtes pour l’investissement et l’impact social et constituer une base de données probantes, comme le décrit l’OCDE.
    Quand nous nous sommes penchés sur le renforcement des capacités de la demande, nous avons été ravis de travailler avec le ministère de l’Emploi et du Développement social du Canada afin d’aider à renforcer les capacités par l’intermédiaire d’Enterprising Non Profits Canada, un réseau national de sections régionales qui soutiennent les entrepreneurs sociaux dans la création d’entreprises solides et influentes. C’est grâce à des réseaux nationaux comme celui-là que nous pouvons nous concentrer sur le développement d’entreprises prêtes pour l’investissement. Dans nos récentes conversations avec des représentants du Royaume-Uni, nous avons appris que bien que les initiatives de finance sociale aient gagné en popularité, il reste encore du travail à faire pour que ce « réseau » d’organisations soit prêt à investir dans ces produits de finance sociale à l'avenir.
    Private Equity Foundation, un pionnier de la philanthropie spéculative au R.-U., a préparé pour le compte du Comité consultatif national du Royaume-Uni du Groupe de travail sur l’investissement social un rapport dans lequel il relève deux types de renforcement des capacités organisationnelles dont aurait besoin le secteur social. L’un est de développer des organisations solides et résilientes qui peuvent croître de façon durable. L’autre est de développer des organisations en mesure de produire des résultats sociaux valables, fiables et prévisibles, ultimement pour un grand nombre de personnes.
(1550)
    Ces deux types sont essentiels pour favoriser la croissance du marché de l’investissement social, mais ce dernier type a été négligé pour faire place au développement du marché.
    Nouveauté intéressante à la suite de ce rapport, annoncée en octobre 2014 par le Bureau du Cabinet: la création d’un fonds d’un peu moins de 3 millions de dollars canadiens visant d’abord et avant tout à ce que les organisations soient « prêtes à faire des investissements à impact social ». Gérés par le Social Investment Business pour le compte du Bureau du Cabinet, les fonds permettront à des entreprises sociales ambitieuses de recevoir des subventions qui les aideront à gérer leur rendement et à accroître leur impact social pour attirer davantage d’investisseurs. Des subventions de 35 000 $ canadiens à environ 300 000 $ canadiens seront offertes jusqu’à la fin de janvier 2015 pour aider les organisations à bâtir leur infrastructure et leur savoir-faire ainsi qu’à mettre de l'avant leur impact. Les responsables du fonds affirment que sans systèmes et connaissances adéquats, nombre de bonnes entreprises sociales peinent à démontrer comment leur impact peut être mesuré. Ce nouveau fonds vise à régler ce problème en leur offrant l’aide d’experts.
    Pour ce qui est de notre deuxième sujet, soit la constitution d'une base de données probantes, un examen récent de la Social Value Act (R.-U.) mené récemment a permis de relever trois obstacles à l’exploitation de son potentiel: la sensibilisation et le recours à la loi sont partagés, elle ne définit pas la « valeur sociale » et la mesure de la valeur sociale n’est pas pleinement définie.
    Tous ces problèmes seraient réglés par la constitution d'une base de données probantes, comme le recommande l’OCDE. Nous entendons souvent qu’il faut mettre en place de grands fonds sur la finance sociale — le domaine est prometteur —, mais il y a très peu de données rigoureuses sur leur impact social. Notre fondation s’est donc associée à la Banque de développement du Canada (BDC) pour mener des recherches sur l’impact de ce que nous appelons les « fonds nationaux ». Trico et la BDC cherchent à déterminer dans quelle mesure les fonds nationaux permettent de répondre aux besoins de financement des entreprises sociales, à partir de leur création et tout au long de leur cycle de vie. Les fonds nationaux sont des réserves d’argent importantes qui servent à investir dans des entreprises sociales. L’étude se propose d’examiner deux ou trois fonds nationaux en place au R.-U. et un fonds bien connu aux États-Unis. En outre, elle examinera quatre entreprises sociales canadiennes axées sur des fonds d’investissement. Nous espérons recevoir le rapport d’ici le 21 avril 2015 et serons heureux de le faire parvenir aux membres du comité lorsqu’il sera disponible.
    C’est au chapitre de la constitution d’une base de données probantes que le besoin est le plus grand; et actuellement, le gouvernement est bien placé pour faciliter les progrès à cet égard. Des avancées considérables dans le domaine de la finance sociale nous attendent si le gouvernement nous aide à créer une telle base de données, comme le recommande l’OCDE.
    Dans des conversations sur la finance sociale, on entend souvent des gens réclamer du financement gouvernemental, des incitatifs gouvernementaux ou encore que le gouvernement élimine les risques pour attirer les investissements dans la finance sociale. Nous soupçonnons que « l’argent » sert déjà à financer les possibilités d’investissement actuelles. Ce qu’il faut véritablement pour ouvrir de nouveaux débouchés, mobiliser encore plus les investissements et permettre au gouvernement de participer activement à la finance sociale, c’est renforcer les capacités des organisations et constituer une base de données probantes, à défaut de quoi les investissements resteront là où ils sont ou seront peu optimaux.
    Si le comité est tenté de participer à de telles activités, je l’exhorte une fois de plus à s’en tenir aux conseils de l’OCDE concernant le moment et la pertinence de la mise en place de politiques visant à soutenir l’investissement à impact social:
    Il est important que l’intervention politique soit bien ciblée, transparente et bien coordonnée avec les politiques existantes ainsi qu’avec le marché. Les politiques doivent également être cohérentes afin que les acteurs du marché à la fois comprennent les répercussions des politiques et sachent combien de temps elles peuvent être en place […] pour veiller à ce qu’elles procurent les résultats visés.
    Nous félicitons le gouvernement fédéral de son engagement soutenu à l’égard de l’entrepreneuriat social et de la finance sociale. Nous sommes heureux de pouvoir contribuer au dialogue. Nous croyons fermement qu’en portant une attention accrue à la propension à investir et à la création d’une base de données probantes, le Canada pourra devenir un leader mondial dans cette sphère d’activité.
    Merci, monsieur le président.
(1555)
    Merci, monsieur Chiu.
    Nous allons maintenant passer aux questions.
    La première série de questions est composée de tours de cinq minutes.
    Madame Sims, vous pouvez commencer.
    Je souhaite vous remercier tous les trois d'être venus et de nous avoir présenté votre exposé.
    Il s'agit d'un domaine que j'ai déjà étudié quand je siégeais à un autre comité: la finance sociale dans le contexte du développement et des projets internationaux. Je m'intéresse beaucoup à la participation de la population cible et à la création, à la conception, à la mise en oeuvre et à l'évaluation des projets puisque selon tout ce que j'ai lu à ce sujet, à moins que vous ne profitiez de ce genre de participation, votre projet a de nombreux obstacles à surmonter.
    Ma première question s'adresse à M. Dewar.
    Selon votre propre expérience ou selon les exemples internationaux que nous avons à notre disposition, les populations cibles participent-elles régulièrement à tous les aspects de la création d'initiatives de finance sociale?
(1600)
    Il ne fait aucun doute que, pour aller de l'avant avec la finance sociale, et même pour composer avec ces enjeux complexes, il faut travailler en collaboration. Il doit y avoir plusieurs intervenants autour de la table. Il est certain que la population cible doit participer. Il faut établir la base et l'entourer des bonnes ressources. Les projets qui ont vraiment du succès profitent d'une réelle collaboration. Les gens sont conscients de leur contribution, de là où se trouve la valeur ajoutée, et les critères d'évaluation sont établis à l'avance afin que chacun connaisse les critères selon lesquels il sera évalué — mais, de plus, peuvent-ils recueillir les données? Donc, il faut que cela soit établi depuis le début, au moment de la conception des projets.
    Pour ajouter à ce que M. Chiu a dit, c'est là que nous devons trouver des projets qui ont fait leurs preuves et les rendre prêts à recevoir des investissements. Il y a de grands projets dans notre pays qui doivent composer avec une diversité de problèmes et composer avec la cause fondamentale de ces problèmes. Il faut les débusquer et s'assurer que les projets sont prêts à recevoir des investissements et prêts à avoir un impact plus important; toutefois, vous avez raison, ils sont fondés, jusqu'à la fin du processus, sur la collaboration de la personne qui reçoit le service. Il faut qu'ils soient conçus ainsi.
    Ayant passé la majeure partie de ma vie dans le système scolaire en tant qu'enseignante, je reconnais certainement l'importance de la collaboration et de l'apprentissage coopératif, mais je me demande simplement: vu le milieu actuel que nous avons, quels genres de défis doivent être surmontés en matière de collaboration?
    Pour ajouter à cela, j'ai aussi entendu certains d'entre vous parler du besoin de prendre des décisions fondées sur des données probantes, et, pourtant, ce n'est pas un secret, nous avons un gouvernement qui est réellement allergique aux données et qui établit très peu de politiques fondées sur des données probantes. Donc, la question que je vous pose est la suivante: à qui devrait-il incomber la responsabilité de recueillir les données afin de mesurer la réussite des projets d'investissement à impact?
    La question m'est-elle destinée, ou souhaitez-vous que M. Chiu réponde?
    Je vais vous demander de répondre, puis je vais demander aux deux autres messieurs de me répondre rapidement aussi. Étant donné que je n'ai que cinq minutes, répondez de façon concise, s'il vous plaît.
    Une réponse concise, d'accord — le projet doit être conçu par tous les investisseurs ou partenaires qui y participent.
    Merci.
    L'un de vous souhaite-t-il ajouter quelque chose?
    Le gouvernement fédéral dispose d'une très grande quantité de données. Vous devriez être en mesure de recueillir une grande quantité de données provenant de différentes régions du pays afin de prouver que la finance sociale est un besoin et peut avoir un impact. Il y a de nombreux récits dans l'ensemble du pays que le gouvernement serait probablement en mesure de recueillir, et il s'agit d'une situation où le gouvernement peut démontrer son leadership d'une façon qui n'est pas onéreuse. Sans engager d'importantes dépenses, vous êtes probablement en mesure de raconter des histoires grâce à ces données probantes.
    Merci.
    Pourrais-je avoir une réponse rapide de notre autre invité?
    Si nous parlons de la mesure de l'impact d'un investissement, il est assez clair que nous avons besoin de définir des paramètres selon lesquels cela sera évalué. En même temps, il est important de souligner que, quand nous parlons de la finance sociale, nous parlons aussi d'innovation sociale, de faire les choses différemment, et nous devons faire attention de ne pas mettre en place des mesures qui vont à l'encontre de la nature itérative de l'innovation sociale fondée sur la collectivité. Parfois, vous avez fait la moitié du chemin et vous réalisez qu'il y a une meilleure occasion, qu'il y a une meilleure façon de faire les choses, et vous apprenez en chemin. Nous devons être en mesure de concevoir des initiatives avec ce genre de capacités. Le domaine naissant de l'analyse du rendement en est un auquel nous devons porter davantage attention au Canada au moment où nous construisons notre propre type d'écosystème pour ce genre de travail.
    Merci.
    Vous avez 10 secondes.
    Oh, 10 secondes — d'accord, je reviendrai à ma prochaine question d'une autre façon.
    Merci beaucoup.
    Nous allons passer à M. Mayes pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci aux témoins d'être ici aujourd'hui.
    Ce qui se dégage de cette étude, d'après ce que je peux constater, c'est le rôle du gouvernement fédéral et la façon dont nous pouvons être un partenaire et soutenir ces initiatives.
    L'une des choses que nous devons envisager est une structure des pratiques exemplaires et — je déteste dire cela — un cadre réglementaire pour que nous puissions nous assurer qu'il y a une certaine protection si l'argent des contribuables est utilisé, mais nous sommes réticents à l'idée d'établir un régime administratif qui va à l'encontre de l'objectif visé. Nous ne voulons pas que cela arrive.
    Nous avons besoin de champions comme vous pour faire cela, et je constate, en ce qui a trait au partenariat, qu'un bon côté de notre gouvernement est que nous avons toujours cherché à laisser les autres établir les priorités pour ensuite nous joindre à eux en tant que partenaire. Toutefois, nous devons avoir ce cadre et cette certitude concernant les finances, puisque nous sommes ici pour protéger les investissements des contribuables.
    En disant cela, j'aimerais simplement entendre les trois témoins sur la façon dont le gouvernement fédéral pourrait faire toutes ces choses sans constituer un obstacle, parce que ce serait voué à l'échec si le gouvernement commençait à représenter un obstacle et à agir de façon excessivement administrative dans le cadre de cette initiative.
(1605)
    Si je parle uniquement pour nous-mêmes, nous n'encourageons pas le gouvernement à nous fournir d'énormes sommes d'argent. Il y a certaines personnes au pays qui demandent au gouvernement fédéral d'envisager la création d'un super fonds ou d'un fonds national. Pour moi, ce n'est pas l'objectif. Actuellement, selon moi, au pays, il y a plus d'argent à investir qu'il n'y a de projets. Il n'y a vraiment pas beaucoup de projets à Calgary ou au pays dans lesquels nous pouvons investir actuellement en ce qui concerne la finance sociale.
    En ce qui concerne le gouvernement, comme M. Huddart l'a mentionné plus tôt, quand nous avons parlé de l'argent de la fondation, comment allons-nous débloquer l'argent de la fondation d'une façon qui permet à ces capitaux d'être investis dans le domaine de la finance sociale? Il y a une barrière concernant l'utilisation de cet argent. Toutefois, si nous étions en mesure d'abaisser les barrières afin de permettre à la fondation d'investir dans, disons, une entreprise à vocation sociale ou la finance sociale, le gouvernement en bénéficierait.
    Peut-être pourrais-je poursuivre. J'apprécie beaucoup la question.
    Tout d'abord, je crois qu'il serait très utile de clarifier le contexte réglementaire ici. Ce domaine évolue très lentement, puisqu'il y a beaucoup d'obstacles. Je vais en mentionner un, soit la règle des sociétés en commandite. Cette règle, je peux vous le dire, nous a empêchés de participer à un certain nombre d'initiatives très prometteuses ou de les voir se développer parce que les gens ne comprennent simplement pas, et ils ne peuvent pas se permettre de mettre sur pied la structure de fiducie obligatoire afin qu'un investissement important soit fait. Je suis certain que vous entendez d'autres personnes dire cela.
    S'il y a une chose que vous pourriez faire, ce serait de nous débarrasser de la règle des sociétés en commandite, mais d'observer de façon plus large nos règlements concernant la propriété et les profits qui sont générés par les entreprises à vocation sociale. Nous voyons là une possibilité de dégager la voie afin que beaucoup plus d'activités aient lieu. Le gouvernement peut aussi, de façon réaliste, être un coinvestisseur. Le gouvernement peut parcourir ses portefeuilles et voir à quels endroits des résultats sociaux sont financés, mais que le produit n'est pas livré. Ouvrons la voie. Ouvrons-la pour inciter les investisseurs à proposer des solutions différentes et plus profitables pour les Canadiens. Je crois qu'il s'agit d'un autre secteur à prendre en considération.
    Finalement, concernant le renforcement de la demande, ce domaine a besoin d'un renforcement de sa capacité. Nous avons un partenariat avec le gouvernement fédéral grâce au programme Innoweave, mais je crois que c'est quelque chose que nous pourrions élargir davantage.
    Pour ajouter à ce qu'ont dit les deux derniers intervenants, je crois que le gouvernement peut aider davantage concernant certains enjeux stratégiques, particulièrement concernant ce que M. Huddart vient de dire à propos des sociétés en commandite, des organisations sans but lucratif et de ce que les organisations peuvent et ne peuvent pas faire avec les actifs qu'elles possèdent. Elles sont assises sur d'importants actifs qu'elles pourraient utiliser dans le cadre d'une stratégie d'investissement. Le gouvernement peut définitivement jouer le rôle de coinvestisseur.
    Je crois qu'il faut aussi se pencher sur les subventions que vous offrez actuellement et les traiter comme des investissements. Commencez à les traiter davantage comme des investissements plutôt que de simples subventions. Mettez en place le mécanisme, mais dites-vous aussi que... Si vous regardez à l'échelle mondiale, les organisations et les gouvernements utilisent vraiment davantage d'intermédiaires. Donc, faites en sorte que le gouvernement comprenne le rôle d'un intermédiaire et le fait qu'il est correct d'en utiliser pour faire certaines choses à l'extérieur du gouvernement.
    Merci beaucoup. Cette série de questions est terminée.
    Monsieur Cuzner.
    Merci beaucoup aux témoins.
    Veuillez excuser notre arrivée tardive, monsieur Dewar.
    Cinq minutes peuvent s'envoler très rapidement ici, et je veux m'inspirer des questions de Colin. Je poserai les questions et, en quelque sorte, je me retirerai ensuite moi-même.
    La semaine dernière, des témoins ont mentionné qu'ils ne considèrent aucunement que le financement social remplacera le soutien du gouvernement. Vous le qualifiez maintenant de « coinvestissement » du gouvernement. Vous vous attendez encore à ce que le gouvernement fédéral soit un partenaire à l'avenir. J'aimerais entendre vos commentaires à ce sujet.
    De même, monsieur Chiu, vous avez mentionné les obstacles. Celui dont il a été question est la protection entourant les règles d'une société en commandite. Quels autres obstacles voyez-vous? J'aimerais obtenir vos commentaires à ce sujet.
(1610)
    Je parlerai en premier.
    Selon moi, lorsque les gouvernements viennent à la table pour la première fois afin d'analyser la finance sociale, ils pensent qu'il s'agira d'une réduction de l'investissement de fonds gouvernementaux. L'exercice peut mener à une réduction des fonds gouvernementaux à l'égard de certains projets parce que de nouveaux partenaires participent au coinvestissement ou parce que vous avez de nouvelles sources de capitaux. Par ailleurs, je pense que cela permet maintenant au gouvernement de choisir les organisations qui ont vraiment un impact sur les résultats. Il peut y avoir une organisation à laquelle vous accordiez 100 000 $, disons, qui produisait certains résultats. Vous pourriez maintenant constater, comme en font foi d'autres investisseurs qui se présentent à la table, qu'en investissant votre argent dans ces organisations, vous obtiendrez davantage de résultats parce que l'enjeu est plus important par rapport à ce qu'elles font maintenant.
    Alors, même si je crois que le gouvernement investit davantage dans des résultats qui s'avèrent, cela pourrait ne pas entraîner une réduction des dépenses; c'est simplement une approche plus stratégique et qui a une plus grande incidence.
    Monsieur Huddart, voulez-vous être le suivant, s'il vous plaît?
    Bien sûr, je continue avec plaisir.
    Un des aspects clés de cette relation avec les gouvernements, c'est que les investisseurs sociaux sont en mesure d'éliminer les risques associés à certaines situations. Notre intervenant précédent a mentionné qu'il faut protéger l'argent des contribuables. En faisant passer le risque du côté de l'investissement à impact, des fondations qui, après tout, distribuent l'argent à titre de bailleurs de fonds et ne s'attendent pas à le récupérer, je pense que nous avons un contexte qui nous permet de créer des structures de capital, pour ainsi dire, offrant des situations où les risques sont éliminés dans l'intérêt public et qui peuvent ensuite recevoir des investissements des secteurs public et privé. C'est une méthodologie vraiment opérationnelle que nous utilisons pour vérifier de nouvelles approches.
    Autre chose: le secteur privé est un acteur clé dans ce débat. Les représentants ne sont pas ici aujourd'hui, mais les fonds de pension, sans mentionner d'autres sources de dotation — universités, hôpitaux, et ainsi de suite —, s'intéressent aux résultats sociaux améliorés. Je pense que la politique du gouvernement est de créer l'environnement favorable — la langue, des modèles et un encouragement — qui permettra à ce domaine de prendre de l'expansion.
    Monsieur Chiu.
    Je pense que, pour le gouvernement, lorsque je regarde un cas dans lequel le gouvernement a coinvesti avec notre fondation dans un programme intitulé Enterprising Non-Profits Canada, il encourage essentiellement le renforcement des capacités avec les entrepreneurs sociaux.
    Grâce à l'argent du gouvernement, nous pouvons créer une affiliation nationale qui montrera au Canada que l'entreprise sociale et l'entrepreneuriat social peuvent être réels et réalisables. Les fonds publics en cause sont peu élevés, en réalité, mais ils permettent tout de même de donner le coup d'envoi au programme à l'échelle du pays pour sensibiliser le public à l'importance du renforcement des capacités dans le domaine de la finance sociale, également.
    Une minute.
    D'accord, je vais poser rapidement une question alors.
    À propos de la mesure de la valeur sociale et des paramètres pour lesquels des données sont nécessaires... Monsieur Chiu, je pense que vous avez mentionné que le Royaume-Uni semblait faire du bon travail à cet égard. Y a-t-il des exemples? Je pense que cela serait un défi important, mais y a-t-il des domaines où les choses sont bien faites actuellement?
    Le Royaume-Uni n'obtient pas d'aussi bons résultats. Le Royaume-Uni s'efforce toujours de trouver une façon de bien faire. Il a tenté d'établir la façon dont il va mesurer la valeur sociale et l'impact social. Je pense que les Britanniques apprennent encore, et nous attendons que le Royaume-Uni produise un rapport sur la question.
    Merci beaucoup.
    Nous passons à notre prochain intervenant, et je crois que c'est M. Butt.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Messieurs, merci d'être des nôtres aujourd'hui.
    Je pense que je vais commencer avec M. Huddart.
    Avant d'être élu et de me retrouver dans ce bel endroit, j'ai oeuvré dans le secteur du logement — développement de l'habitation, gestion immobilière, etc. — pour des coopératives d'habitation à but lucratif et sans but lucratif. Vous avez mentionné un projet résidentiel auquel vous avez participé. Pourriez-vous commenter un peu plus votre vision de la finance sociale dans le cadre d'un projet résidentiel à prix abordable?
    Je sais que nous passons beaucoup de temps à parler de ce que le gouvernement fédéral peut faire pour soutenir la finance sociale. En fait, ce que les gouvernements provinciaux et les administrations municipales peuvent faire, car, en matière de logement, je sais pertinemment que, si la municipalité n'est pas de votre côté, si la province n'est peut-être pas de votre côté, notamment pour offrir un supplément au loyer ou bien le genre de choses qui rend de tels projets viables, et si vous n'avez pas les trois ordres de gouvernement comme partenaires, ces projets ne fonctionnent pas.
    Vous pourriez peut-être nous faire part de votre point de vue sur le dossier du logement, monsieur.
(1615)
    Merci beaucoup, monsieur Butt.
    Je reviens simplement à la question autochtone dont nous avons parlé. Au printemps, nous allons commencer à bâtir des maisons dans quatre collectivités qui veulent adopter ce nouveau modèle auquel j'ai fait référence. Elles vont bâtir leurs propres maisons, elles en seront propriétaires et elles vont se consentir elles-mêmes des hypothèques. Nous mettons en place l'infrastructure financière dans ces collectivités afin qu'elles puissent gérer de façon responsable un fonds de placements hypothécaires. Nous avons constitué un fonds de 2 millions de dollars. En le faisant, nous avons découvert l'existence d'un fonds fédéral de garantie d'hypothèque pour les Premières Nations de 300 millions de dollars, grâce auquel on a pu construire 65 maisons en cinq ans.
    Le fait est que, lorsque nous obtenons un modèle éprouvé, nous voulons pouvoir l'appliquer à grande échelle, et nous avons besoin que les gouvernements collaborent avec nous pour cerner ces occasions.
    À l'échelle municipale, nous étudions actuellement quelques projets, dont un à Montréal portant sur le logement pour les personnes à faible revenu, dans le cadre d'un coinvestissement avec d'autres fondations. Nous avons investi dans une initiative à Vancouver, appelée New Market Funds, qui entreprendra des projets de construction dans l'ensemble du Canada. C'est un secteur formidable pour la participation de la finance sociale.
    Je pense que vous soulevez une question — un gain rapide, facile, important pour ce secteur — soit l'investissement dans le logement pour les personnes à faible revenu.
    N'êtes-vous pas tous d'accord: l'objectif réel de la finance sociale, de l'entreprise sociale, c'est le résultat social au bout du compte, non pas le rendement monétaire des investissements? La raison pour laquelle ces programmes fonctionnent, la raison pour laquelle ces modèles ont été établis, c'est le résultat social; peut-être même que des projets perdent un peu d'argent de temps à autre, ou qu'ils atteignent simplement le seuil de rentabilité, mais ils ont davantage un but social. Qui veut commenter ce point? Il me semble que l'objectif le plus important, finalement, c'est que le but social soit réalisé plutôt que la recherche, forcément, de résultats reluisants par l'organisation, ne croyez-vous pas?
    Je vais commencer.
    Le résultat social est sans aucun doute la priorité numéro un, mais comme l'a dit M. Huddart, vous pouvez maintenant étaler le risque, ce qui permet d'obtenir d'autres fonds, s'il y a un rendement potentiel des investissements provenant du secteur privé ou de particuliers. Là encore, vous pouvez maintenant étaler différents niveaux de risque pour obtenir plus d'argent et permettre ainsi aux investisseurs de réaliser ces rendements; en outre, vous pouvez également obtenir davantage de résultats. Je pense qu'il s'agit d'exploiter cette capacité des entreprises d'injecter de nouveaux dollars compte tenu du rendement, mais, en réalité, nous regardons les résultats sociaux, afin d'augmenter la cagnotte ou d'avoir de plus grosses parts pour aborder ces questions.
    Monsieur Chiu, voulez-vous commenter?
    Je suis constructeur de bâtiments. Trico Homes est mon entreprise. Nous avons deux programmes en cours. Un programme porte sur les logements locatifs abordables, et nous travaillons en collaboration avec le gouvernement provincial. De plus, nous avons un programme d'accessibilité au logement qui prévoit un versement initial de 5 % sans intérêt afin que le client puisse acheter une maison. Nous collaborons avec la SCHL afin que celle-ci approuve le programme.
    Dans cette optique, je pense que le programme de logement abordable, celui de l'accessibilité au logement, est beaucoup plus facile à gérer que le programme de logements dans la réserve. Essentiellement, la façon dont nous procédons, c'est que nous devons étudier la question et créer une valeur, un capital social, pour nous assurer de pouvoir en faire une initiative du secteur privé qui permet d'accorder un prêt de 5 % sans intérêt à l'acheteur, ce qui lui permettra d'acheter une maison. Pour ce faire, nous avons mis en place un organisme sans but lucratif, avec lequel nous ne sommes pas liés et qui mise sur la capacité du secteur public de verser ce montant initial. À cet égard, nous collaborons avec la SCHL, avec la banque et avec la fondation communautaire. Avec un peu de chance, nous pouvons faire progresser ces programmes. Au bout du compte, vous recherchez le rendement. Je ne pense pas que les bailleurs de fonds se préoccupent du rendement; ils s'intéressent à l'impact social. Par la même occasion, dans ce programme en particulier, les bailleurs de fonds espèrent qu'ils peuvent réserver leurs fonds, s'assurer que leurs fonds peuvent être réutilisés très longtemps, à l'avenir.
(1620)
    Merci beaucoup.
    Nous passons au deuxième tour de questions, et la parole est à Mme Groguhé.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins de leur présence parmi nous.
    Je voudrais me pencher sur deux dimensions, à savoir la réglementation et la question de la mesure des résultats. Je vais commencer par les questions concernant la réglementation.
    Monsieur Dewar, quel est le cadre réglementaire qui s'applique aujourd'hui aux produits de la finance sociale au Canada?

[Traduction]

    M. Dewar n'avait pas son écouteur pour l'interprétation. Est-ce que l'un des deux autres témoins, M. Huddart ou M. Chiu, souhaite répondre à la question de Mme Groguhé?

[Français]

    Peut-être que M. Chiu voudrait répondre à cette question.

[Traduction]

    J'interviendrai avec plaisir. J'aimerais simplement dire que nous exerçons nos activités en vertu des règlements qui s'appliquent aux organismes caritatifs du Canada, la Loi sur l'aide aux organismes de charité. Même si elle est très restrictive à de nombreux égards, du point de vue de la propriété des actifs, de la capacité de participer à des sociétés en commandite et de la capacité de posséder des entreprises sociales — il y a des obstacles dans tous ces domaines — nous pouvons souligner une chose utile, c'est que le gouvernement a désigné les investissements liés à des programmes comme un secteur où les fondations sont susceptibles de perdre réellement de l'argent, mais où elles peuvent déclarer la perte comme un don de charité, comme une subvention, en fait. Cette modalité nous a permis, en réalité, de récupérer, à peu de choses près, notre argent et de déclarer cette perte comme une subvention afin de respecter notre limite des sorties de fonds requises au chapitre des subventions. Nous l'apprécions grandement. Cela s'est révélé très utile, mais je pense que nous recherchons de nouveaux progrès en matière de réglementation; c'est réellement important pour la croissance de ce secteur.

[Français]

     Si j'ai bien compris, il reste encore beaucoup de travail à faire pour simplifier cette réglementation. Est-ce bien le cas?

[Traduction]

    Oui, c'est exact.
    Des recommandations très claires viennent de l'Angleterre et des États-Unis sur la façon de le faire. Nous avons d'autres idées; comme M. Chiu l'a souligné, l'OCDE a également des suggestions.

[Français]

    D'accord.
    Je reviens aux propositions de l'OCDE et à celles d'autres pays.
     Quels choix ont-ils faits quant au cadre réglementaire qu'ils appliquent à la finance sociale? Est-il possible de nous fournir des exemples pour nous donner une idée de ce qui fonctionne dans ce cadre-là?

[Traduction]

    Oui. Je vais commencer à répondre, puis j'inviterai M. Chiu à prendre la parole.
    Le point clé consiste à autoriser l'existence d'une entité sociale; une société hybride, à but lucratif et sans but lucratif, qui peut avoir un capital social en ayant cependant un but social. C'est l'une des recommandations mises en place dans plusieurs pays. En effet, même au Canada, en Nouvelle-Écosse et en Colombie-Britannique, nous retrouvons ce type de société, qui est capable d'attirer des capitaux à des fins sociales. Ce serait un exemple. Nous pourrions certainement en mentionner de nombreux autres, mais je ne veux pas prendre trop de temps.

[Français]

    Monsieur Chiu, je n'ai plus beaucoup de temps à ma disposition, mais j'aimerais entendre ce que vous avez à dire au sujet de la mesure des résultats. Vous avez énoncé le fait que le gouvernement pouvait être...

[Traduction]

    Je pense que la mesure...

[Français]

    Vous avez énoncé le fait...

[Traduction]

    Je pense, finalement...
    Excusez-moi, mais comprenez-vous ma question en français?
    Monsieur Chiu, je pense que Mme Groguhé a commencé à poser une deuxième question après...

[Français]

    En effet.

[Traduction]

    ... celle à laquelle M. Huddart a répondu. Elle était en train de vous poser sa deuxième question. Revenons à Mme Groguhé.
    Reformulez le plus possible. Je vais vous accorder un peu plus de temps, et je demanderai ensuite à M. Chiu de répondre.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Chiu, je voudrais revenir à la question de la mesure des résultats.
    Vous avez mentionné le fait que le gouvernement pourrait être un leader dans ce domaine. Que vouliez-vous dire à ce sujet? De quelle façon voyez-vous les choses par rapport à la mesure des résultats?
(1625)

[Traduction]

    Quand nous parlons de la mesure des résultats, si je regarde...
    Pour revenir à l'industrie...

[Français]

    Oui.

[Traduction]

    ... il existe un résultat appelé la CSA, l'Association canadienne de normalisation. Lorsque nous construisons des choses, lorsque nous faisons des choses, il y a toujours des normes à respecter. Vous devez respecter les normes de la CSA avant de faire ceci ou cela. Actuellement, le Canada manque vraiment de mesures. Les organisations peuvent dire que c'est la façon dont elles mesurent leur impact. Mais l'élément clé ici, c'est de savoir si le gouvernement peut intervenir et se pencher sur la question.
    Nous avons une norme permettant de mesurer l'impact: « c'est A, B et C ». Si nous pouvons suivre ce type d'impact sans l'intervention du gouvernement fédéral, c'est plus facile pour l'organisation. Dans le cas d'une société sans but lucratif, ou d'un entrepreneur social, voire même de grandes sociétés, lorsqu'une grande part de leurs activités sont visées par la CSA, ces entités ont des normes à respecter. L'impact créé par le gouvernement fédéral, c'est que nous pouvons suivre un certain conseil de normalisation et être évalués par celui-ci. Si le gouvernement fédéral peut créer une mesure nationale quelconque, cela serait un gain pour les sociétés sans but lucratif, les entrepreneurs sociaux publics et les sociétés.
    Merci.
    Chers collègues, notre temps de parole s'écoule rapidement. Il me reste une période de plus, mais je vais utiliser ma prérogative pour poser moi-même quelques questions. Nous déplacerons cet intervenant au prochain tour, une fois que nous aurons accueilli le prochain groupe de témoins.
    En tant qu'ancien constructeur, je suis également très intéressé à approfondir les idées mises de l'avant par M. Huddart et M. Chiu.
    Monsieur Huddart, pourriez-vous clarifier quelque chose pour nous? Vous avez donné un exemple de projet auquel vous avez participé; vous avez financé le projet, et le projet devait produire certains résultats. Vous avez alors constaté que le gouvernement exploitait un fonds sensiblement parallèle — d'après vos commentaires — avec des sommes beaucoup plus élevées, et les retombées étaient beaucoup moins importantes par unité, à en juger par vos propos.
    Est-ce que je vous ai bien compris?
    Oui, c'est plus ou moins exact, monsieur.
    Je voudrais insister sur le fait qu'il s'agit vraiment d'une occasion de collaboration. Si le but du gouvernement est de soutenir la construction de logements dans les réserves, de façon responsable, ce serait donc une bonne idée d'avoir un centre d'échange ou un endroit pour unir ces initiatives.
    Vous avez également mentionné l'Université Quest dans votre exposé précédent. En toute franchise, je n'ai jamais entendu parler de l'Université Quest. Où est-elle située? Pouvez-vous décrire très brièvement cet établissement?
    Bien sûr. Elle est située à Squamish, en Colombie-Britannique, entre Vancouver et Whistler. C'est une université privée, établie par un ancien président de l'Université de la Colombie-Britannique, David Strangway.
    Avez-vous une idée du nombre d'étudiants qui la fréquentent?
    Je ne me souviens pas, exactement. C'est une petite université, mais très respectée, réputée à l'échelle internationale, et attirant des étudiants et des professeurs de grande qualité.
    Merci de cette précision.
    Merci aux témoins. C'était très intéressant de vous écouter, de comprendre votre vision de la finance sociale et son impact éventuel. Merci d'avoir pris le temps de venir nous parler. Notre comité vous remercie.
    Mesdames et messieurs les membres du comité, nous allons prendre une pause de quelques minutes avant d'accueillir notre prochain groupe de témoins, puis nous reprendrons les travaux.
(1625)

(1630)
    Bienvenue à nouveau, mesdames et messieurs.
    Nous venons juste d'être informés que nous devons voter à 17 h 30. La navette sera devant l'édifice à 17 h 15 exactement; nous pourrons donc monter à bord immédiatement et nous rendre sans problème à la Chambre des communes. Cela dit, l'horaire de ces exposés sera évidemment touché, et la période de questions encore plus.
    À moins que le comité ne s'y oppose, je vais donner aux témoins le temps qui leur est alloué pour présenter leur exposé, parce qu'ils sont venus pour prendre la parole. Nous aurons le plus grand nombre possible de séries de questions et nous les raccourcirons peut-être même à trois minutes ou à une question par membre afin de procéder le plus efficacement possible.
    Mais juste avant... j'espérais faire ceci à la fin. Chers collègues, comme vous le savez probablement, notre secrétaire parlementaire, Scott Armstrong a perdu son père la semaine dernière. C'est pourquoi Scott est absent, et Mme Goguen est ici pour le remplacer. J'aimerais vous dire, bien sûr, que nos pensées sont avec Scott et sa famille à cette occasion. Si vous souhaitez lui envoyer une note et que vous avez besoin de ses coordonnées, veuillez me les demander afin que vous puissiez lui transmettre vos sympathies.
    Bienvenue à nouveau, mesdames et messieurs.
    Nous poursuivons notre étude sur le potentiel de la finance sociale.
    Mme Cathy Taylor, directrice exécutive de l'Ontario Nonprofit Network se joint à nous.
    Nous recevons également M. Michael Toye, directeur général du Réseau canadien de développement économique communautaire.
    M. Michael Oster, président du Fonds d'emprunt communautaire d'Ottawa partagera son temps avec M. Toye.
    En dernier lieu, M. Jacques Charest, président de CAP Finance prendra la parole.
    Madame Taylor, voulez-vous commencer? Vous disposez de 10 minutes.
(1635)
    Merci beaucoup de m'avoir invitée à discuter avec vous aujourd'hui.
    Je m'appelle Cathy Taylor. Je suis la directrice exécutive de l'Ontario Nonprofit Network, dont le siège social se trouve à Toronto. Nous sommes un réseau qui regroupe 55 000 organismes sans but lucratif et oeuvres de bienfaisance de la province de l'Ontario, qui oeuvrent dans tous les secteurs: des groupes confessionnels, des groupes de sport et de loisirs, des troupes de théâtre, des groupes du domaine des arts et de la culture, des services sociaux, des services de santé et des groupes provenant de tout l'éventail du secteur sans but lucratif.
    Mes remarques aujourd'hui visent à vous présenter le point de vue des organisations sans but lucratif, et non celui des investisseurs.
    Vous savez peut-être qu'au Canada, il y a ce que nous appelons le secteur sans but lucratif de base — il ne comprend pas les municipalités, les universités, les commissions scolaires et les hôpitaux. Nous sommes un secteur très important. Nous générons 35,6 milliards de dollars, ou 2,6 % du PIB du Canada, et sommes l'un des secteurs économiques qui croissent le plus rapidement, avec un taux de croissance annuel de 7 %. En fait, depuis 2008, nous sommes l'une des seules industries au Canada qui croît à ce rythme.
    Contrairement à la croyance répandue, 61,5 % des revenus du secteur sans but lucratif de base proviennent d'un revenu gagné et de la vente de biens et services, et non du gouvernement ou d'autres activités de charité; 15 % de cette somme proviennent des droits d'adhésion. Les capitaux provenant des trois ordres de gouvernement comptent seulement pour 19,7 % des revenus des organismes sans but lucratif et des oeuvres de charité. Je crois qu'il s'agit d'une distinction importante quand nous parlons de la finance sociale et des entreprises à vocation sociale.
    Le secteur du bienfait d'intérêt public au Canada — nous disons souvent que les organismes sans but lucratif fournissent un bienfait d'intérêt public — n'attend pas d'aide financière du gouvernement ni d'aide philanthropique. En fait, c'est exactement l'opposé: le secteur sans but lucratif comprend des organisations indépendantes qui fournissent une contribution économique importante tout en poursuivant leurs missions sociales. Selon un sondage effectué récemment en Ontario, 88 % des entreprises à vocation sociale exerçaient leurs activités comme organismes sans but lucratif, et 4 % de plus étaient des organismes à but lucratif détenus intégralement par leur organisme sans but lucratif. Donc, quand nous parlons d'entreprises à vocation sociale et de la finance sociale, nous parlons principalement de la structure organisationnelle du secteur sans but lucratif.
    Les entreprises à vocation sociale réinvestissent de façon importante dans leur collectivité parce qu'elles emploient des gens qui ont souvent des vulnérabilités et des handicaps et qu'elles offrent des services publics au sein de leur collectivité. Le secteur sans but lucratif et des oeuvres caritatives est axé sur l'engagement de construire des collectivités fortes, résistantes et inclusives qui favorisent le mieux-être collectif, et non l'accroissement de la richesse privée.
    L'entreprise à vocation sociale est un outil puissant qui peut être utilisé dans les collectivités locales. Nous sommes convaincus que le gouvernement fédéral doit jouer un rôle dans la création d'un environnement favorisant la finance sociale et les entreprises à vocation sociale, qui ont le potentiel de pallier aux inégalités croissantes dans les collectivités et de jouer un rôle majeur dans l'établissement de collectivités résilientes et dotées des actifs nécessaires. Nous vous félicitons certainement de profiter de cette occasion d'en discuter.
    Nous aimerions faire les recommandations suivantes aujourd'hui afin que vous les envisagiez.
    Premièrement nous recommandons d'axer votre travail et vos efforts sur la création d'un environnement favorisant la finance sociale, et, plus précisément, les entreprises sociales qui misent sur la confiance du public envers le secteur sans but lucratif, lequel jouit de l'un des niveaux de confiance les plus élevés parmi tous les secteurs au Canada. À cette fin, nous croyons que toutes les entreprises à vocation sociale, peu importe leur structure ou leur source de revenus, devraient avoir une vocation publique et une mission, être exploitées pour le bien collectif et non pour le profit personnel, réinvestir leur excédent de revenus dans leur mission publique et garder leurs actifs dans le domaine public pour le bien collectif.
    Une partie de ce cadre habilitant, pour lequel le gouvernement fédéral a un rôle à jouer et une responsabilité, consiste à déterminer la définition d'une entreprise à vocation sociale. Et il y a là une occasion de l'harmoniser avec celle de nos gouvernements provinciaux.
    Deuxièmement, pour ce qui est du concept d'une législation à double but ou hybride concernant les entreprises, nous vous encourageons à attendre et à observer pour l'instant. Bien d'autres éléments seront beaucoup plus profitables par rapport au temps investi. De nouvelles lois régissant les entreprises à l'échelle fédérale s'appliquent au secteur sans but lucratif. De nombreux gouvernements provinciaux adoptent de nouvelles lois applicables au secteur sans but lucratif à l'échelle provinciale. Honnêtement, la dernière chose dont nous avons besoin actuellement est un autre texte législatif qui essaierait d'établir ce à quoi une législation à double but ou hybride ressemble.
(1640)
    Nous savons que la C.-B. et la Nouvelle-Écosse ont élaboré une telle loi. Nous ne disposons que de quelques exemples d'organisations qui l'ont utilisée, et nous devons voir comment elle fonctionne plutôt que d'être les premiers à mettre une autre loi en place. La législation applicable aux entreprises est assez flexible; nous devons voir comment elle évoluera.
    Troisièmement, nous vous invitons à réformer et à réinterpréter la Loi de l'impôt sur le revenu en ce qui concerne les organisations sans but lucratif, surtout celles qui fournissent un bienfait d'intérêt public, afin de leur permettre d'être rentables et d'accroître leurs revenus. L'interprétation actuelle de la Loi de l'impôt sur le revenu empêche les organisations sans but lucratif de générer des revenus — non pas de faire du profit, mais de générer des revenus qu'elles peuvent réinvestir dans leur mission dans le cadre de leur organisation — ainsi que de maintenir une réserve de liquidités.
    Comme vous le savez, toute entreprise doit avoir une réserve de liquidités aux fins de son exploitation. Il est impossible d'exploiter une organisation avec ce genre de limitations, et d'autant plus impossible d'exploiter une entreprise à vocation sociale ayant l'objectif d'être accessible et inclusive sans disposer de ces outils. Le revenu qui est réinvesti dans la mission de l'organisation ne constitue pas un profit. La réglementation concernant le secteur sans but lucratif et les oeuvres caritatives n'est pas en phase avec ce qui se passe sur le terrain et a désespérément besoin d'être modernisée.
    Quatrièmement, n'excluez pas les organisations sans but lucratif des programmes de soutien aux entreprises, et traitez les entreprises à vocation sociale exerçant leurs activités comme des organisations sans but lucratif et des oeuvres caritatives comme des petites ou moyennes entreprises dans le cadre des programmes qui sont déjà en place. Elles ont besoin d'avoir accès au même financement et au même soutien aux entreprises que les entreprises du secteur privé. De nombreux programmes gouvernementaux offrent du soutien et des capitaux aux petites ou moyennes entreprises. Permettez à ces programmes d'être aussi accessibles à des organisations sans but lucratif qui fonctionnement comme des entreprises à vocation sociale. Il s'agit d'une mesure assez simple qui peut être mise en place dans un très court délai et qui n'exige pas de nouvelles ressources.
    Actuellement, les organismes sans but lucratif sont souvent activement exclus et inadmissibles à recevoir du financement en recherche et développement ou du financement de démarrage dans le cadre de programmes de soutien à la planification des entreprises qui sont offerts aux petites et moyennes entreprises. Souvent, selon ce que nous entendons sur le terrain, les organisations commencent par s'ériger en organisations à but lucratif afin d'obtenir ces ressources de démarrage, puis deviennent des organisations sans but lucratif une fois établies.
    Cinquièmement, les entreprises à vocation sociale ont besoin d'un financement par emprunt créatif et qui répond à leurs besoins. Certains des intervenants précédents ont parlé de certains outils qui existent, comme l'« argent lent »; selon ce concept, une période de grâce est accordée avant que le prêt fasse l'objet d'un intérêt et doive être remboursé. Mentionnons aussi des faibles taux d'intérêt à long terme consentis pour les projets comme les logements sociaux et les projets d'investissement et du financement d'exploitation non garanti offert aux entreprises à vocation sociale, comme les marges de crédit pour les flux de trésorerie.
    Je ne crois pas que nous parlons nécessairement toujours d'outils complexes liés à la finance sociale qui doivent être en place. La majorité des organisations du secteur sans but lucratif et des oeuvres de charité sont des petites ou moyennes organisations, et elles ont besoin de certains outils financiers de base qui ne sont pas actuellement offerts à notre secteur. Les bailleurs de fonds ne connaissent habituellement pas bien le modèle des organisations sans but lucratif ou des entreprises à vocation sociale et reculent, même si c'est beaucoup moins risqué pour eux d'investir dans leurs initiatives. Le gouvernement peut jouer un rôle afin de permettre à ces institutions de fournir ces types de soutien.
    Les entreprises à vocation sociale ont souvent besoin de beaucoup de temps pour devenir lucratives, étant donné qu'elles comblent un vide qui n'a habituellement pas été comblé par une entreprise privée parce qu'il n'y a pas de marge de profit. Il n'est pas réaliste de s'attendre à ce que le secteur soit en mesure de fournir ce service estimant que, subitement, il y aura une marge de profit. Aidez-nous à comprendre comment nous pouvons fournir le service au prix coûtant, ce qui est notre rôle.
    La dernière recommandation est d'élaborer un plan d'approvisionnement à caractère social pour le gouvernement qui encouragerait des entreprises qui obtiennent des contrats du gouvernement à faire affaire avec des entreprises à vocation sociale dans le cadre de leur travail. Utilisez le pouvoir d'achat du gouvernement pour renforcer les collectivités. L'Écosse, nous le savons, est un chef de file à cet égard, et il y a de nombreux autres exemples de façons dont cela a été fait partout dans le monde.
    Merci beaucoup d'avoir écouté nos idées sur le renforcement de la finance sociale et de l'entreprise à vocation sociale. Nous avons un plan visant à soutenir les entreprises à vocation sociale en Ontario, que nous serons heureux de vous remettre, et nous attendons vos questions avec impatience.
(1645)
    Merci beaucoup.
    Monsieur Toye.
    Mesdames et messieurs, je vous remercie de me donner l'occasion vous présenter un exposé aujourd'hui.
    Si je comprends bien, il s'agit de la deuxième semaine de votre étude. La finance sociale est un très grand terme. Il peut être difficile, peut-être, de bien comprendre de quoi il s'agit; par conséquent, je souhaitais partager mon temps avec l'un de nos membres, le Fonds d'emprunt communautaire d'Ottawa, dont font partie certaines des personnes en première ligne qui effectuent le travail sur le terrain et qui ont un réel impact sur la vie des gens. Je vais parler de certaines recommandations de haut niveau, puis je laisserai la parole à Michael Oster.
    Mon organisation, le Réseau canadien de développement économique communautaire, est une association nationale de groupes communautaires, comme le Fonds d'emprunt communautaire d'Ottawa, qui travaille sur des approches intégrées pour le développement économique et social de leur collectivité. Nous comptons plusieurs centaines de membres dans chaque province et territoire.
    Comme, je crois, tous les témoins présents ici aujourd'hui, nous représentons le côté de la demande de la finance sociale, et non les investisseurs, les fournisseurs ou les intermédiaires. Nous représentons le côté de la demande de votre étude, les groupes communautaires, les entreprises à vocation sociale, les coopératives et les autres programmes et services de prestation visant à améliorer la situation socio-économique au sein des collectivités. Nous tentons de travailler de façon intersectorielle puisque nous constatons que les problèmes économiques et sociaux sont liés entre eux et qu'il ne suffit pas de traiter uniquement les symptômes.
    M. Butt a mentionné plus tôt que nous devons nous concentrer sur l'objectif social, et nous en convenons parfaitement.

[Français]

     Nos membres font face à de nombreux défis dans leur travail quotidien, mais l'accès à des sources de capitaux adaptées à leurs besoins est l'un des aspects les plus importants qui empêche la croissance de pratiques probantes. La finance sociale a émergé en partie comme une réponse à cette demande.
     Cependant, à l'extérieur du Québec, le Canada a pris du retard comparativement au Royaume-Uni et aux États-Unis. Nous avons donc cinq recommandations qui visent à contribuer à assurer notre rattrapage. Elles sont incluses dans les documents que nous vous avons remis. Comme l'a mentionné plus tôt M. Mayes, ils mettent l'accent sur le rôle du gouvernement fédéral. Je vais d'ailleurs dire quelques mots sur chacune d'entre elles.
     Premièrement, pour ce qui est de stimuler l'investissement, comme nous venons de le voir avec le gouvernement de l'Ontario et comme l'expérience de la Fiducie du Chantier de l'économie sociale nous le démontre, si le gouvernement est prêt à investir des capitaux de risque, cela peut servir de levier à des investisseurs privés, des institutions et des fondations.

[Traduction]

    En ce qui concerne les changements réglementaires ou relatifs aux programmes visant à soutenir les entreprises à vocation sociale, nous vous demandons instamment de miser sur ce qui fonctionne déjà.
    Comme Cathy vient de le dire, il y a de nombreux petits exemples et modèles qui ont prouvé leur efficacité. L'un d'entre eux est le Fonds d'investissement en développement économique communautaire de la Nouvelle-Écosse. Au cours des 15 dernières années uniquement, 48 FIDEC ont mobilisé 7 500 investisseurs — des personnes souhaitant investir leurs économies dans des projets qui profiteront à leur collectivité — et ont généré plus de 56 millions de dollars en investissements. De nombreux autres fonds pourraient être créés afin d'étendre les occasions d'investissement et de développement aux collectivités dans l'ensemble du Canada.
    Certains de nos membres laisseraient entendre que les nouveaux modèles de rémunération et les nouveaux contrats axés sur le rendement ont reçu une attention disproportionnée dans le débat concernant la finance sociale jusqu'à maintenant. Vous avez déjà entendu des témoins dire qu'ils ne peuvent pas remplacer le financement du gouvernement et que ces modèles ont une utilité quelque peu limitée dans le large éventail des services communautaires. Dans les situations où ils sont appropriés, ils présentent des avantages importants. Mais ils ne sont pas une panacée; donc, dans votre rapport, je vous encouragerais à les analyser tout en tenant compte du large éventail d'outils disponibles pour la finance sociale.
    À mesure que l'approvisionnement en capital de la finance sociale s'accroît, la capacité des organismes sans but lucratif, des oeuvres caritatives et des entreprises à valeurs combinées devra aussi être soutenue afin d'accroître la demande. Stephen Huddart a mentionné plutôt l'absence d'un produit disponible à des fins d'investissement. Wayne Chiu a aussi mentionné le besoin d'accroître la capacité du secteur social.
    En particulier, les entreprises à vocation sociale sans but lucratif et les coopératives devraient avoir un accès égal aux outils de renforcement de la capacité des entreprises qui sont déjà en place et qui sont financées par le gouvernement — ici, je répète le très bon conseil de Cathy —, ainsi qu'à des débouchés à ce chapitre. Il s'agit de programmes qui existent déjà; ils ne coûteraient pas plus cher et favoriseraient de façon importante le renforcement de la capacité.
    Finalement, pour ce qui est de ma dernière recommandation concernant la question précédente de Mme Sims, peu importe ce que le gouvernement entreprend, je mettrais l'accent sur le fait que l'élément le plus important est la façon de le faire. Il faut qu'il s'agisse d'un modèle de collaboration en partenariat avec les institutions du secteur privé et les groupes communautaires, puisqu'une approche axée sur la finance sociale reconnaît qu'aucun secteur ne peut relever ces défis par lui-même.
    Nous aimerions féliciter Emploi et Développement social Canada d'avoir mis sur pied une table ronde d'intervenants qui font exactement cela, et nous préconisons son maintien au moment où le paysage de la finance sociale évolue.
    Je vais maintenant céder la parole à Michael.
(1650)
    Monsieur le président.
(1655)
Je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de présenter mon point de vue au comité. Je suis très heureux d'appuyer le Réseau canadien de développement économique communautaire, l'ONN et d'autres organisations du secteur des services sociaux qui comparaissent devant le comité.
Mike m'a demandé de prendre quelques minutes pour présenter des exemples réussis de finance sociale et de faire le point sur le Fonds pour les projets pilotes d'entrepreneuriat social de l'Ontario.
Je suppose que le comité connaît déjà le Groupe d'étude canadien sur la finance sociale, qui travaille sous l'égide du MaRS Centre, et les rapports qu'il a publiés en décembre 2010 et décembre 2011. Je me limiterai à exprimer mon appui général aux recommandations du groupe d'étude: investissements axés sur la mission des fondations, création par le gouvernement fédéral, de concert avec les provinces, d'un fonds d'investissement d'impact, établissement d'un groupe de travail sur la fiscalité et, comme l'a déjà mentionné Mike, un accès plus facile des entreprises sociales aux programmes de développement des PME financés par les gouvernements.
D'après le site anglais de Wikipedia:
La finance sociale est une approche de gestion de l'argent qui assure un dividende social et un rendement économique… La finance sociale comprend l'investissement communautaire, la microfinance…
… comme ce que mon organisation fait depuis 15 ans…
… les obligations à impact social…
Nous avons présenté des mémoires à ce sujet à la Commission ontarienne des valeurs mobilières, à EDSC et à d'autres.
La finance sociale est liée « à l'entreprise durable et au crédit aux entreprises sociales », domaine dans lequel nous sommes sur le point de devenir des chefs de file.
La finance sociale comprend en outre:
Des subventions philanthropiques axées sur les résultats et des investissements liés aux programmes, qu'on appelle parfois la philanthropie à risque…
Mon premier exemple de finance sociale, c'est la douzaine — peut-être plus — de fonds d'emprunt communautaire qui existent au Canada, dont le Fonds d'emprunt communautaire d'Ottawa que je dirige depuis l'automne 2011, après avoir pris ma retraite du secteur privé. Créé en 2000, le FECO a organisé près de 300 prêts d'environ 3 millions de dollars en capital accessible à l'intention d'emprunteurs qui ne pouvaient pas obtenir de financement bancaire, mais dont les antécédents et les aspirations méritaient notre appui. Avec notre aide, ces emprunteurs ont amélioré leur vie, ont réduit leur dépendance par rapport aux services sociaux et aux fonds publics, ont trouvé des emplois pour eux-mêmes et pour d'autres ou ont réussi à décrocher de meilleurs emplois.
Ces avantages sociaux et d'autres ont été mesurés entre autres par le Centre Carleton d'innovation communautaire.
Comme deuxième exemple, je dirai que le FECO a reçu un investissement à impact de 57 000 $ en 2012 par l'entremise de la Fondation communautaire d'Ottawa. Avec des fonds de contrepartie provenant de Citoyenneté et Immigration Canada et de la Fondation Trillium de l'Ontario, nous avons lancé une nouvelle initiative, les programmes d'immigrants partenaires. Nous avons créé un nouvel atelier sur le crédit, contribuant ainsi au renforcement de la littératie financière à Ottawa. En l'espace de 13 mois, nous avons offert cet atelier à plus de 700 immigrants. Parmi ceux qui ont participé à un sondage, 45 % avaient pris une ou plusieurs mesures concrètes pour améliorer leur cote de crédit et leur comportement par rapport à l'endettement, comme le fait de payer à temps la facture de leur carte de crédit, d'éviter les prêts sur salaire, de réduire le nombre de leurs cartes de crédit et, dans certains cas, de commencer à se servir du carte de crédit qui, bien utilisée, leur permet d'établir leur crédit et de s'adresser plus tard à une banque afin d'obtenir un prêt pour acheter un appartement, une maison ou une voiture ou pour lancer une entreprise.
Il y a déjà 26 immigrants qui ont obtenu des prêts du FECO l'année dernière, et nous nous attendons à ce que 50 autres prêts soient accordés en 2015. L'investissement à impact de 57 000 $ rapporte d'importants dividendes sociaux et assure des emplois plus nombreux et de meilleure qualité. Les immigrants peuvent ainsi mieux exploiter leurs talents, ce qui contribue à réduire la pénurie de compétences. De plus, cela améliore les niveaux de service dans notre collectivité tout en diminuant les pressions qui s'exercent sur les services sociaux. Bien entendu, tout cela est mesurable.
Mon troisième exemple porte sur un projet que nous élaborons et qui portera le nom de Fonds durable de financement social. Nous envisageons des investissements à impact et d'autres genres d'investissements afin de constituer un bassin de capital d'un million de dollars, avec injections annuelles de 100 000 $ pour financer les opérations et d'éventuelles pertes sur prêts. Nous avons déjà réussi à obtenir du financement de la Fondation communautaire d'Ottawa, de Centraide Ottawa et d'autres, avec investissements de contrepartie du Bureau pour l'entreprenariat social de l'Ontario, en vue de fournir des services et du financement à des entreprises sociales en démarrage ou aux premiers stades de développement.
Par suite du succès de nos programmes d'immigrants partenaires, nous nous attendons à avoir besoin de capitaux supplémentaires d'ici le milieu de 2015. Un groupe de travail formé de membres de notre conseil d'administration s'occupe activement de ce projet. Parmi les options envisagées, il y a celle d'une obligation communautaire qui servirait à récompenser des partenaires de formation en vue d'un niveau amélioré de création d'emplois pour les immigrants et d'autres résidents marginalisés du Canada et d'Ottawa. Un soutien fédéral à ce chapitre serait évidemment le bienvenu.
L'autre question qu'on m'a demandé d'aborder est celle du Fonds pour les projets pilotes d'entrepreneuriat social dont s'occupe le Bureau pour l'entreprenariat social du ministère ontarien du Développement économique, de l'Emploi et de l'Infrastructure. mesdames et messieurs, je suis honoré d'être parmi vous aujourd'hui.
    Je suis désolé, monsieur, vous allez devoir conclure dans les 30 prochaines secondes environ, s'il vous plaît.
    D'accord.
    Jeudi dernier, la première ministre Kathleen Wynne a annoncé les 11 projets gagnants, dont le nôtre, qui se partageront 4 millions de dollars sur deux ans et qui profiteront d'une autre tranche de 6 millions de dollars en investissement privé. Nous sommes très heureux de diriger ce consortium visant à soutenir les entreprises à vocation sociale qui pourraient être des sociétés à but lucratif, sans but lucratif, et des coopératives, ce qui est cohérent avec la stratégie de l'Ontario.
    En conclusion, je remercie une fois encore le comité de son sincère intérêt envers la finance sociale, et je vous souhaite bonne chance dans l'élaboration de vos recommandations, qui sont si essentielles pour accroître la prospérité dans l'ensemble du Canada.
    Merci bien.
    Merci, monsieur.
    Nous allons maintenant passer à M. Charest.

[Français]

     Je vous remercie de m'avoir invité à témoigner devant le comité.
    Je suis Jacques Charest, président de CAP Finance, soit le Réseau de la finance solidaire et responsable. Ce réseau vise à promouvoir la finance solidaire et le capital de développement au Québec. Dans mon travail de tous les jours, je suis directeur général de la Fiducie du chantier de l'économie sociale, qui est un fonds d'investissement créé spécifiquement pour les entreprises d'économie sociale. D'ailleurs, je vais vous en parler brièvement vers la fin de ma présentation. Je vais toutefois tenter d'être le plus bref possible pour que les membres du comité aient le temps de me poser des questions.
    Qu'est-ce que CAP Finance? CAP Finance a été créé il y a quelques années, soit vers 2010. il regroupe la grande majorité des institutions financières et des organismes de financement de la finance responsable au Québec.
    Qu'est-ce que la finance responsable? La première chose à dire à ce sujet, c'est de déterminer ce dont il est question lorsqu'on parle de finance sociale, de finance responsable, de capital de développement et ainsi de suite. Pour notre part, nous séparons le capital de développement et la finance sociale.
    En ce qui a trait au capital de développement, ce sont des institutions financières qui font du capital de risque pur, mais en ayant des objectifs socioéconomiques précis. Elles veulent, évidemment, que leur investissement rapporte, mais elles veulent en même temps créer des emplois et contribuer au développement régional et local. Cela est gouverné par des intervenants associatifs. Dans ce cas-ci, on parle de création d'emplois au niveau local.
    Parlons maintenant de la finance solidaire, qui est au coeur de notre discussion. La finance solidaire fait intervenir des institutions financières, des organismes sans but lucratif, des coopératives de crédit et des caisses qui investissent presque exclusivement dans des entreprises d'économie sociale et dans le développement local ou communautaire. Leur mandat est de fournir, entre autres, du financement et de nouveaux outils d'investissement aux entreprises d'économie sociale.
    Notre organisme regroupe presque tous les intervenants. Je ne vais pas les énumérer ici car cela prendrait trop de temps, mais vous pouvez consulter notre document à ce sujet.
    En 2013, de concert avec la professeure Margie Mendell et son équipe, CAP Finance a commandé une étude à ce sujet parce que les données étaient insuffisantes. Nous voulions savoir quelle était la situation au Québec et ce que l'ensemble des intervenants au Québec avaient investi dans le capital de développement et la finance responsable.
    Prenons la question du placement responsable. Je ne parle pas d'investissement direct en entreprise, mais de l'achat de produits financiers responsables, de fonds responsables, de fonds éthiques et ainsi de suite. En 2010, le placement responsable se chiffrait à 161 milliards de dollars. En 2013, il se chiffrait à 274 milliards. Quant à l'investissement responsable, il était de 13 milliards de dollars en 2010 et de 18 milliards de dollars en 2013.
    Passons maintenant à ce qui touche les actifs de la composante de l'investissement responsable. Au Québec, l'investissement en capital de développement est de 17 milliards de dollars. En 2013, l'investissement en finance solidaire, c'est-à-dire dans des entreprises d'économie sociale et dans le développement local, a été de 1,4 milliard de dollars, ce qui représente une augmentation de 40 % par rapport à 2010.
    Le marché est là et il y a des investissements. Toutefois, il faut le faire de façon correcte. Il faut travailler autant du côté de l'offre que de la demande. Si on a réussi à investir à ce point, c'est parce qu'on a travaillé autant sur l'offre que sur la demande. Il faut qu'il y ait des intermédiaires pour ce qui est des fonds d'investissement. Nous parlerons plus tard des pistes de solution que pourrait utiliser le gouvernement à ce sujet. Il est important que des intervenants soient sur le terrain pour travailler tout autant sur l'offre que sur la demande de financement, et ce, afin d'éviter qu'il y ait de très bons produits mais pas d'entreprises, ou l'inverse.
    La situation est donc vraiment passée du placement à l'investissement dans les entreprises. En matière de financement social, il est important de distinguer les entreprises qu'on pourrait qualifier de privées et les entreprises à but non lucratif, soit les entreprises collectives. Les unes ne sont pas meilleures que les autres; c'est un choix que les gens font. Pour notre part, nous avons choisi les entreprises collectives, les entreprises d'économie sociale, mais il est important de faire cette distinction parce qu'elles n'ont pas toutes besoin des mêmes outils financiers.
(1700)
     Ceux de l'entreprise privée sont assez présents. Lorsqu'on veut s'adresser aux entreprises d'économie sociale, il faut tenir compte de certaines différences. Il faut voir le type de financement qui est possible. On doit voir cela comme un grand tout. Il ne s'agit pas de répondre aux besoins de l'une et de l'autre, mais de considérer les besoins qui sont spécifiques à chacune des clientèles.
    Quelle pourrait être l'apport du gouvernement du Canada à ce sujet? À cet égard, je parlerai plus tard de sa contribution à la fiducie.
    Comme cela a été mentionné précédemment, il est important d'appuyer les intermédiaires du marché, soit par l'entremise de fonds spécialisés ou centraux, soit par un fonds qui pourrait alimenter d'autres fonds ou encore par des fonds servant au rehaussement du crédit. Il s'agit de savoir s'il s'agit de subventions dont nous avons besoin. C'est en effet le cas dans certaines situations. Parle-t-on de premières pertes ou de garanties de prêt? C'est peut-être le cas, mais ce sont des solutions qu'il faut considérer pour déterminer la façon de faciliter le développement de la finance sociale au Québec.
    En outre, il faut rendre le capital de développement accessible à nos intervenants, c'est-à-dire les fonds institutionnels, soit des fonds de travailleurs, des fonds de retraite, des fonds de pension ou de fondations et diminuer les barrières à l'investissement. M. Huddart y a d'ailleurs fait allusion. De notre côté, nous travaillons de concert avec des entreprises et des fonds. Or il y a des problèmes et des barrières, et ce, simplement parce que ces gens ne peuvent pas investir dans une société en commandite. Il faut donc que nous essayions de contourner cela.
     Comme Cathy Taylor l'a mentionné plus tôt, la méthode la plus simple consiste à nous considérer comme des entreprises, donc à couvrir l'ensemble des produits et des mesures de soutien à l'investissement destinées aux entreprises privées. Dans un programme, nous voyons souvent qu'il est destiné  à des entreprises de catégorie 1. Pourquoi ne s'agit-il pas d'OBNL ou de coopératives? C'est parce qu'il en est ainsi. Il y a aussi des programmes qui touchent les capitaux et les actions d'une compagnie, mais comme il n'y en a pas pour ce qui touche une entreprise d'économie sociale, il faut trouver un équivalent.
     Comme je l'ai mentionné plus tôt, il faudrait dans certains cas établir des structures mixtes. Il faudrait déterminer comment les lois peuvent être modifiées de façon à se diriger vers des entreprises mixtes. On parle soit d'entreprises de type B ou d'actifs immobilisés. Il s'agit de voir comment une troisième ou une quatrième forme d'entreprise peut être présente et s'assurer qu'on parle vraiment de finance sociale et d'entreprises sociales. Qu'elles soient à but lucratif ou incorporées, il faut que les actifs immobilisés restent dans les entreprises.
    Il y a des pistes de solution que je voudrais mentionnées. Je peux vous faire part de deux projets sans pour autant parler de mes propres entreprises. Il reste que c'est un bel exemple.
    La Fiducie du Chantier de l'économie sociale a été créée au début de 2007 à l'aide d'une subvention de l'État. La capitalisation se chiffre à 53 millions de dollars. Au départ, le gouvernement fédéral a fourni une subvention d'environ 20 millions de dollars, ce qui nous a permis d'obtenir, de la part de fonds de travailleurs et du gouvernement du Québec, 30 millions de dollars d'investissements et de prêts. À partir de là, nous avons pu, depuis 2007, investir 45 millions de dollars dans 127 entreprises du Québec. Cela a généré près de 2 500 emplois, 400 postes d'insertion et 265 millions de dollars en investissements. En outre, selon notre scénario, ces chiffres vont doubler sur une période de 15 ans. On parle donc d'une subvention qui a contribué à démarrer le mouvement et qui a apporté beaucoup à la fiducie. Nous avons fait des investissements à l'échelle du Québec.
    Enfin, à titre de dernier exemple, je vais vous parler de l'un de nos projets qui est en cours présentement. Nous avons créé un fonds pour les OSBL impliqués dans le milieu de l'habitation et destiné à la rénovation des logements. Cela se fait dans le cadre d'un programme fédéral. Nous visons ceux qui ont besoin d'aide pour arriver avant la fin de la première hypothèque, mais qui n'ont pas l'argent nécessaire pour faire face à des hausses de coûts. Nous avons donc travaillé de concert avec nos partenaires, soit des investisseurs privés et des fonds fiscalisés. Le but était d'amasser 31 millions de dollars et de prêter de l'argent à ces gens, selon les mécanismes dont ils avaient besoin.
     Dans ce cas-ci, les ententes avec la SCHL fonctionnent très bien. Il s'agit de s'assurer que ces nouveaux types de produits financiers passent la rampe dans le cadre des programmes et qu'ils nous permettent d'investir.
(1705)
     Avec un projet de 31 millions de dollars, nous allons pouvoir rénover 1 200 unités de logement. Dans ce cas-ci, il ne s'agit que de modifier un programme. En matière d'habitation, l'hypothèque n'est pas toujours le meilleur moyen de financement.

[Traduction]

    Pourriez-vous conclure, monsieur? Nous avons dépassé le temps imparti.
    Merci beaucoup.
    Merci beaucoup. J'ai pensé qu'il s'agissait peut-être du bon moment, puisque vous veniez de nous donner l'exemple.
    Je vais limiter le temps à trois minutes par question. Il est probable que nous ne pourrons faire qu'un seul tour.
    Les votes auront lieu à 17 h 45, donc la sonnerie sera fera entendre 30 minutes avant, et non 15 minutes comme je l'avais mentionné.
    Madame Morin.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Je vais briser la glace en posant la première question, qui est d'ordre technique. Elle s'adresse à Mme Taylor.
    À titre d'information, qu'entendez-vous exactement par le terme « entreprise hybride »?

[Traduction]

    C'est une excellente question.
    En Ontario et dans d'autres administrations, certains estiment que nous avons besoin d'un nouveau type d'organisation qui serait ni une organisation sans but lucratif ni une entreprise, mais qui se situerait dans le milieu, une organisation qui a une sorte d'objectif social, mais qui peut aussi faire un profit. Cela s'appelle un hybride. Aux États-Unis, ils peuvent être appelés « B corporations ». Vous avez peut-être entendu cette expression. « Entreprises à mission sociale » est une autre expression. En fin de compte, ces entreprises peuvent générer un profit, mais elles ont aussi un impact social.
    Certaines entreprises aimeraient faire cela, particulièrement avec la nouvelle génération de jeunes personnes qui veulent lancer des entreprises, qui sont intéressées par l'idée d'avoir une vocation sociale tout en générant un revenu. Les organisations sans but lucratif sont limitées en ce qui a trait au revenu qu'elles peuvent générer, donc, il s'agit d'une sorte de structure intermédiaire.

[Français]

    Merci.
    Vous avez également parlé de la Loi de l'impôt sur le revenu qui vous nuit beaucoup. Pouvez-vous nous en parler davantage?

[Traduction]

    La Loi de l'impôt sur le revenu, plus particulièrement en ce qui a trait au secteur sans but lucratif, n'a pas été mise à jour depuis des décennies. L'une des dispositions de la Loi de l'impôt sur le revenu que l'Agence du revenu du Canada étudie actuellement, par l'entremise d'un projet appelé le Projet de détermination du risque lié aux organismes sans but lucratif, est le fait que la Loi de l'impôt sur le revenu ne permet pas aux organismes sans but lucratif de générer un revenu, un profit, ou un excédent quelconque.
    Quand ils disent « quelconque », ils veulent dire aucun. Ils veulent dire zéro; il est donc très difficile d'être un organisme sans but lucratif. Bien sûr, cela nous encourage à avoir des budgets équilibrés. Nous ne pouvons pas générer un profit, mais, si nous avons une entreprise à vocation sociale, si nous offrons une formation, par exemple, à de jeunes personnes ayant des handicaps, et qu'il y a des frais pour ceci ou pour cela, et qu'à la fin de l'année, nous avons un revenu plus élevé que ce que nous avons dépensé, cette somme devrait pouvoir être reportée au budget de l'année suivante afin d'être réinvestie dans le service. Le fait que nous ayons le droit ou non de faire cela tient à quelques détails techniques.
(1710)

[Français]

    Je vous remercie beaucoup.
    Madame Taylor, tout comme M. Charest, vous avez suggéré que l'on permette aux entreprises d'économie sociale d'avoir accès aux mêmes programmes que les PME. Ne craignez-vous pas qu'on mette de côté la spécificité d'une entreprise d'économie sociale et qu'on la traite carrément comme une PME alors qu'il y a quand même une certaine différence?

[Traduction]

    Pourrions-nous avoir une réponse provenant d'une seule personne?

[Français]

    Une entreprise d'économie sociale ou une coopérative peut faire de la recherche-développement. Pourquoi, alors, ne peut-elle pas avoir accès à ces crédits d'impôt? Souvent, les coopératives sont à but lucratif. Elles sont à propriété collective, mais elles sont à but lucratif. Pourquoi ne peuvent-elles pas avoir accès aux crédits d'impôt? Comme elles n'y ont pas accès, la seule façon pour elles d'équilibrer les choses est de demander une subvention. On leur dit de demander des subventions. Elles répondent en demandant qu'on leur donne accès à ce type d'outil et qu'elles le feront au même titre que les autres. Ce sont des entreprises.
    Pour ce qui est de l'utilité sociale et de ce qui doit être pris en charge, comme dans le cas des entreprises d'insertion, c'est autre chose.
    Je regrette, mais il n'y a pas assez de temps à ma disposition pour en parler davantage.
     Je vous remercie beaucoup, monsieur Charest.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Monsieur Boughen.
    Merci, monsieur le président.
    Laissez-moi souhaiter la bienvenue à nos témoins et les remercier beaucoup d'être avec nous cet après-midi.
    Peut-être Michael pourrait-il répondre à quelques questions que je me pose. Premièrement: pourriez-vous nous expliquer avec un peu plus de détails les enjeux liés aux obligations à impact social? Le financement de toute l'organisation m'intéresse. Pendant que vous nous expliquez cela, peut-être pouvez-vous nous expliquer pourquoi, en tant qu'investisseur, vous voudriez investir dans cette entreprise en particulier, étant donné qu'il y a des tonnes de possibilités d'investissements différents sur le marché. Qu'est-ce qui fait en sorte que les gens en arrivent à se dire: « je vais investir dans la finance sociale »?
    Je pense qu'en ce qui a trait aux défis entourant les obligations à impact social ou les modèles axés sur la rémunération au rendement, mon commentaire précédent concernant l'attention disproportionnée dont ils font l'objet est qu'il s'agit d'un nouvel outil attirant, donc, qui attire beaucoup d'attention. Toutefois, comme vous l'ont dit des témoins précédents, les secteurs ou les types précis de problèmes où ils peuvent être utilisés sont assez limités. Ce ne sont pas tous les aspects — les services sociaux ou les impacts qu'ont les groupes communautaires — qui peuvent avoir des résultats mesurables à court terme. Donc, quand il est question des types d'intervention dans les groupes cibles, et du degré d'évaluation, de la mesure — qu'il s'agisse d'essais randomisés avec groupe témoin ou d'autre chose — lorsqu'il faut prouver l'impact généré, il y a d'énormes coûts d'évaluation qui peuvent être intégrés. Je crois que c'est l'un des avantages qui se présentent dans les situations où ces modèles fonctionnent.
    Une obligation à impact social est à peu près le seul outil auquel je peux penser qui financerait réellement le type d'évaluation qui permettrait d'évaluer l'impact. Mais alors, même si la réussite est démontrée — d'après ce que je comprends, certaines fondations aux É.-U. le contestent — cela devient une recette pour intervenir. Elle ne peut pas toujours être transférée d'un environnement à l'autre, être utilisée dans chaque réalité dans différentes administrations.
    L'autre défi tient souvent au fait que les économies réalisées ne vont pas à un seul ministère. Elles peuvent aller à plusieurs ministères, à divers ordres de gouvernement. Par conséquent, devoir rassembler un certain nombre d'investisseurs pour créer l'obligation est le travail d'un intermédiaire, et c'est un travail extrêmement compliqué. De notre point de vue, il y a de nombreux programmes à petite échelle et bien établis qui pourraient avoir un impact immense au-delà des obligations à impact social elles-mêmes.
    Pour répondre rapidement à votre dernière question, comme l'a dit M. Huddart plus tôt, il y a en fait une somme importante de capital philanthropique qui pourrait être mobilisée utilement. Nous ne voyons pas autant le problème du côté de la demande. Si nous leur offrons un placement sécuritaire, il y aura sans doute un intérêt. Il ne suffit vraiment pas, pour combler la demande, de trouver les bons investissements.
    Merci beaucoup.
    Nous allons conclure maintenant, parce que je suis certain que la sonnerie va se faire entendre très bientôt.
    Je souhaitais vous remercier énormément d'avoir pris le temps d'être ici avec nous aujourd'hui. C'est un secteur très intéressant. L'époque actuelle est très excitante, selon moi, avec certaines des innovations que nous observons et certaines des suggestions et idées dont nous font part des témoins comme vous. Merci d'avoir partagé votre expertise avec nous aujourd'hui.
    Mesdames et messieurs, la séance est levée.
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