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CHPC Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent du patrimoine canadien


NUMÉRO 018 
l
2e SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 10 avril 2014

[Enregistrement électronique]

  (1100)  

[Traduction]

    Bonjour à tous. La 18e séance du Comité permanent du patrimoine canadien est ouverte.
    Nous poursuivons notre examen de l'industrie canadienne de la musique. Pour la première heure, nous avons l'honneur de recevoir Pierre-Daniel Rheault, directeur général de la Société professionnelle des auteurs et des compositeurs du Québec, Mark Tetreault, directeur des services symphoniques de la Fédération canadienne des musiciens, et, par vidéoconférence, Luc Fortin, président de la Guilde des musiciens et musiciennes du Québec, qui est à Montréal.
    Nous allons commencer par M. Rheault. La parole est à vous, pour huit minutes.
    Bonjour à vous tous. Je remercie le comité de nous recevoir aujourd'hui. Je vais m'adresser à vous dans ma langue maternelle, si ça ne vous dérange pas trop. Compte tenu de l'état dans lequel je me suis réveillé ce matin, ma voix risque aussi d'être mal assurée par moment.

[Français]

    Un auteur ou un compositeur de chansons n'a généralement d'autre revenu pour son travail que les droits liés à la reproduction et à la diffusion de ses oeuvres selon le modèle traditionnel, que ce soit sur disque, à la radio ou à la télévision. Devant l'envahissement mal balisé du géant numérique, les redevances traditionnelles ont dramatiquement chuté au cours des dernières années.
    Pourtant, la diffusion de son travail n'a cessé d'augmenter. Devant cette augmentation de la diffusion des oeuvres par rapport à la diminution des revenus liés au mode de perception traditionnel, le soutien du gouvernement, faute de volonté claire à rectifier cette anomalie, devrait assurément atteindre des sommes beaucoup plus importantes.

[Traduction]

    Excusez-moi, monsieur. Pourriez-vous ralentir un peu?
    Oui, mais je n'aurai pas assez de huit minutes.
    Nous ne serons pas aussi stricts pour vous. C'est que nos interprètes n'arrivent pas à vous suivre.
    Merci.

[Français]

    Pour tout le Canada francophone, MUSICACTION a fourni l'année dernière une aide directe de 400 000 $. Ce montant a servi à rétribuer 380 créateurs de chansons. Nous savons tous compter et nous comprenons très bien qu'une moyenne d'un peu plus de 1 000 $ annuellement par créateur est loin d'être un soutien suffisant.
    Imaginons la situation suivante. Un député élu n'aurait aucun salaire de base, son principal revenu serait lié à la reproduction écrite de ses travaux de parlementaire et ses rapports seraient publiés dans un journal pour lesquels serait perçu, à l'opposé d'une taxe, un droit versé directement aux députés. Ces droits, sous forme d'exception, s'appliqueraient aussi à toute photocopieuse servant à diffuser les écrits privés.
    Imaginons maintenant ceci. Un jour, un journal serait détrôné par l'évolution des supports numériques qui remplaceraient rapidement, progressivement et massivement les journaux traditionnels, provoquant une importante chute des revenus de publication. L'impensable se produirait alors, ce serait la disparition pure et simple des imprimés.
    Imaginons la suite. Ces mêmes députés voteraient l'adoption d'une loi qui ne soumettrait pas ces appareils de la génération numérique — remplaçant donc les photocopieuses — à la Loi sur le droit d'auteur, éliminant du même coup la perception d'un droit lié à ces appareils. Combien de députés aurions-nous, quelques années après cette débâcle?
    Quand le gouvernement canadien a refusé de reconnaître les supports modernes, les téléphones intelligents, les PDA, les clés USB et tout autre machin à développer comme des outils capables de reproduire des milliers d'oeuvres et que, du même coup il a refusé qu'une compensation, comme la loi le prévoit, soit perçue pour ces appareils nouvelle génération, il a désavoué du même coup tous les gains durement acquis au fil des ans au chapitre du droit fondamental consenti aux créateurs.
    L'évidence d'une évolution technologique n'a malheureusement pas été prise en compte. Pire, elle a été désavouée et les conséquences sont déjà et seront désastreuses pour les créateurs porteurs de la diversité culturelle canadienne. Si rien n'est fait pour redresser rapidement la situation, les dégâts incommensurables seront irréversibles.
    Quand on parle de reconnaissance et de compensation pour le travail des créateurs de la part du gouvernement, elles sont passées, sur une échelle de 1 à 10, de 6 sur 10 à -2 sur 10.
    Je vous donne donc notre réponse à la question posée par le comité. Le soutien du gouvernement à l'endroit des créateurs est nettement insuffisant. Pour ce qui est du soutien aux entrepreneurs, qui est le second groupe de ce premier point, nous saluons le soutien renouvelé du gouvernement et sa volonté d'injecter des sommes importantes dans le volet numérique. Cette évolution prendra toute la place dans le monde de la reproduction et de la diffusion des oeuvres dans quelques années.
    Notons que les revenus traditionnels des entrepreneurs ont diminué, malgré l'augmentation effarante de la diffusion des oeuvres produites. Par conséquent, c'est aussi le cas des revenus des créateurs. Il faut agir pour redonner une valeur significative aux oeuvres de nos créateurs. La seule volonté politique affirmée de redresser la situation est, selon nous, le premier pas à faire.
    Concernant le soutien aux créateurs-entrepreneurs, nous soulignerons rapidement cette réalité croissante et relativement nouvelle qui mérite une grande vigilance, et ce, dès aujourd'hui. Cela devrait déboucher sur un accroissement des sommes consenties à cette catégorie, et ce, le plus tôt possible. Cette nouvelle génération de créateurs-entrepreneurs est à la fois le fournisseur de la matière première doublé de la réalité d'exploitant-investisseur dans son propre travail. C'est ce qu'on appelle un autoproducteur.
    Parlons du mode d'attribution des fonds du gouvernement. Je ne ferai qu'une très brève remarque à cet égard. Des sommes colossales sont mises à la disposition des grands joueurs liés à l'industrie. Cependant, les entrepreneurs exigent de plus en plus souvent que les créateurs cèdent non seulement leurs droits d'édition, mais qu'en plus ils agissent comme autoproducteurs de leurs projets. Cela veut dire que ces créateurs — ce sont souvent des auteurs, des compositeurs et des interprètes — investissent à la place des entrepreneurs ou conjointement avec eux tout en cédant les droits sur leurs oeuvres, dont les droits voisins. En nous basant sur cette nouvelle réalité, nous avons la certitude que le soutien du gouvernement aux entrepreneurs doit être assorti d'une forme de rétribution augmentée et destinée aux créateurs.
    Qu'on soutienne les entreprises est une bonne chose. Nous saluons cela. Cependant, il faut absolument imposer que soit développée et liée à ce soutien la preuve d'une rétribution équitable des créateurs.

  (1105)  

    Pour le moment, l'expression « atteindre des objectifs par son soutien » s'applique certainement davantage au groupe des entrepreneurs qu'à celui des créateurs. En ce qui concerne l'industrie ou les entrepreneurs, les sommes consenties par les gouvernements restent essentielles à l'atteinte de résultats. J'entends par là la production de disques et de spectacles. Mais encore une fois, pour ce qui est des créateurs, les sommes qui leur reviennent directement sont épouvantablement et dramatiquement insuffisantes.
    Si l'objectif ici est qu'un créateur retire de son travail en moyenne 1 000 $ par année, une somme directement liée au soutien gouvernemental, revenons à notre exemple d'un député travailleur autonome et, ironiquement, on pourrait dire que l'objectif est atteint. Vous comprendrez que je suis un peu amer en disant cela.
    En conclusion, le gouvernement doit reconnaître que les intervenants dans le domaine numérique ne contribuent pas tous de façon égale, légale et rentable à la vie économique des créateurs, que ce soit les manufacturiers ou les distributeurs.
    Une des initiatives que le milieu devrait considérer de toute urgence afin de contrer l'effet dévastateur de la dissémination illégitime de la musique serait de favoriser la production et la mise en disponibilité d'une trousse multimédia s'adressant aux 6 à 12 ans.
    Les nouveaux modèles légaux de musique numérique sont loin d'établir une valeur qui soit suffisante et équitable aux yeux des créateurs. Une plus grande reconnaissance de la valeur de la musique doit être établie et acceptée par tous en faveur des créateurs, afin que ces derniers soient véritablement rémunérés pour leur travail d'artisans. Le seul exemple d'une compensation liée à l'achat de tout support numérique pour les reproductions faites par ces supports serait un progrès significatif.
    Nous avons besoin que le gouvernement tienne compte de la valeur ajoutée que la musique apporte aux industries technologiques. Il faut donc que cette richesse soit partagée de façon plus équitable pour protéger la diversité culturelle canadienne dans le domaine de la chanson et que le gouvernement augmente de manière importante la rémunération des créateurs.
    Je vous remercie de votre écoute.

  (1110)  

    Merci, monsieur Rheault.

[Traduction]

    Monsieur Tetreault, vous avez la parole pour huit minutes.

[Français]

    Bonjour, je m'appelle Mark Tetreault. Je suis directeur des services symphoniques de la Fédération canadienne des musiciens.

[Traduction]

    Je suis aussi le premier tuba de l'Orchestre symphonique de Toronto depuis 1986.
    Je vous remercie de me donner l'occasion de vous parler aujourd'hui. Par chance, je suis à Ottawa pour un spectacle que l'Orchestre symphonique de Toronto donnait hier soir au Centre national des arts.
    La Fédération canadienne des musiciens, la FCM, est l'association professionnelle des musiciens au Canada. Elle est reconnue par la Loi sur le statut de l'artiste comme étant la seule à pouvoir négocier au nom de tous les musiciens au Canada.
    La FCM fait partie d'une association binationale. Nous formons la division canadienne de l'American Federation of Musicians of the United States and Canada. La FCM a son siège à Toronto. Elle compte 25 sections locales d'un océan à l'autre, et 17 000 musiciens en sont membres. Notre organisation veille à ce que les artistes ne soient pas payés que pour les spectacles qu'ils donnent, mais aussi pour les prestations télédiffusées ou diffusées par médias numériques. Nous offrons un excellent régime de retraite multiemployeurs aux musiciens.
    Je suis ici pour vous parler des préoccupations générales de la FCM, puis de mon secteur de l'industrie de la musique en particulier.
    La FCM endosse sans réserve le témoignage de la Recording Artists' Collecting Society de l'ACTRA, qui a demandé au comité permanent de recommander la modernisation du régime de copie pour usage privé, l'amélioration des méthodes de distribution des redevances relatives aux prestations qui sont diffusées et le rétablissement de l'étalement du revenu aux fins d'impôt en vertu des mesures fiscales canadiennes.
    Le resserrement de la Loi sur le droit d'auteur contribuera dans une très grande mesure à garantir aux artistes canadiens de continuer d'être payés équitablement pour l'utilisation de leur musique et d'avoir un niveau de vie raisonnable pour eux-mêmes et leur famille.
    La FCM pense fermement qu'elle peut offrir une contribution unique et précieuse aux importantes consultations et discussions sur le droit d'auteur et les redevances. La FCM demande aux députés de presser le gouvernement de signer et de ratifier le Traité de Beijing sur les interprétations et exécutions audiovisuelles de l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle. Le traité de Beijing énonce les normes mondiales qui reconnaissent le droit des artistes dont les interprétations ou exécutions sont fixées sur des supports audiovisuels d'être équitablement rémunérés pour leurs contributions créatives.
    La reconnaissance des droits moraux des artistes est tout aussi essentielle. Notre image d'artiste est au coeur de ce que nous sommes. Grâce au traité de Beijing, les artistes auront finalement la capacité de protéger leur image et leurs exécutions de toute utilisation qu'ils ne choisiraient ou n'accepteraient pas.
    Les orchestres canadiens constituent un élément essentiel des collectivités, petites et grandes, partout au Canada. Ce sont des moteurs économiques qui créent des emplois. Les orchestres canadiens ont dépensé plus de 175 millions de dollars en 2012-2013, dont plus de 70 % ont été versés en salaires et honoraires. Les orchestres sont les points d'ancrage artistiques de leurs collectivités; ils créent des occasions et enrichissent les moments de célébration et de reconnaissance communautaire, qu'il s'agisse d'événements sportifs ou de cérémonies du jour du Souvenir. Ils sont des partenaires culturels précieux qui collaborent avec d'autres organismes et établissements, et forment un élément important de nos infrastructures d'éducation. Les orchestres sont d'efficaces ambassadeurs du Canada dans le monde.
    Les musiciens d'orchestres symphoniques forment une main-d'oeuvre unique. Le musicien d'orchestre symphonique est un professionnel hautement qualifié. Son travail demande un niveau de concentration extrême, et l'investissement dans sa formation correspond à celui d'une formation en droit, en médecine ou en administration. Les musiciens d'orchestres symphoniques doivent se procurer et entretenir eux-mêmes des instruments très coûteux. Nous faisons partie des très rares industries où le travailleur doit fournir lui-même des outils très coûteux.
    Les musiciens d'orchestres symphoniques sont des athlètes d'endurance de haut niveau qui subissent souvent des blessures pendant leur carrière. Il est rare que nos emplois s'accompagnent d'un régime d'assurance-maladie complémentaire, et nous devons donc souvent assumer nous-mêmes les frais de la physiothérapie, des soins dentaires et des médicaments sur ordonnance.
    Malheureusement, les musiciens d'orchestres symphoniques canadiens sont généralement des travailleurs à faible salaire. Nous sommes pour la plupart forcés d'êtres des entrepreneurs culturels. Nous complétons nos revenus en travaillant comme professeurs de musique, en jouant dans d'autres ensembles classiques, en offrant nos services à l'industrie de l'enregistrement musical, en faisant de l'interprétation d'autres genres musicaux, en nous adonnant à d'autres disciplines artistiques et en travaillant dans d'autres secteurs, par exemple comme représentants syndicaux.
    Certains musiciens d'orchestres symphoniques sont obligés de recevoir des prestations d'assurance-emploi pendant la période morte. Les changements qui ont récemment été apportés à l'assurance-emploi concernant les travailleurs saisonniers produisent un effet très négatif sur ces musiciens. La FCM aimerait qu'on se penche de nouveau sur ces changements, en ce qui concerne les musiciens d'orchestres symphoniques.

  (1115)  

    Les compressions budgétaires à CBC/Radio-Canada ont produit des effets très négatifs sur le secteur des orchestres symphoniques. Nos concerts sont nettement moins nombreux à être enregistrés ou diffusés. Un diffuseur national solide représente des revenus importants pour les musiciens. Cela nous donne aussi la possibilité de montrer notre talent à tous les Canadiens, même les plus éloignés, de même qu'outre frontière, dans le nord des États-Unis.
    Les musiciens d'orchestres symphoniques n'ont en fait plus accès à des redevances pour la diffusion de leurs prestations parce qu'ils ne répondent pas aux exigences leur permettant de demander des paiements. Nous n'avons pas accès à un important montant d'argent composé des redevances pour la diffusion de nos enregistrements en raison du régime étrange et complexe que la Commission du droit d'auteur a établi. C'est pour nous très frustrant.
    Les orchestres symphoniques canadiens sont très actifs dans le secteur de l'éducation. Nous faisons des prestations pour les étudiants, que ce soit en salle de spectacle ou dans les écoles. L'une des idées neuves les plus réussies en éducation musicale est El Sistema, une initiative de formation orchestrale à l'intention des jeunes qui se fonde sur deux idées de base: la musique, c'est pour tous, peu importe les revenus et les antécédents, et une éducation musicale de qualité représente un bon départ dans la vie, ainsi qu'un modèle d'harmonie communautaire. Du Nouveau-Brunswick à Vancouver, des orchestres ont mis sur pied des programmes El Sistema dans le cadre desquels on offre tous les jours après l'école, souvent à des jeunes désavantagés, de l'encadrement et des répétitions menant à des prestations excitantes et suscitant de la fierté et un sentiment d'accomplissement.
    L'éventail des activités de rayonnement et d'éducation proposées par les orchestres canadiens est remarquable. Parmi les documents que je vous laisse, vous trouverez un article que j'ai rédigé pour le journal de notre association, l'International Musician, qui entre dans les détails de ces activités.
    Les orchestres canadiens sont reconnus pour leur excellence artistique à l'échelle du monde et font fièrement la démonstration des réalisations culturelles canadiennes. Nous sommes les ambassadeurs de ce qui se fait de mieux en culture au Canada. Moi-même, j'ai eu le privilège d'aller un peu partout dans le monde avec l'OST. Notre orchestre s'est associé avec des chefs d'entreprise qui souhaitent étendre leur marché ou attirer des investissements au Canada. Ces chefs d'entreprises voyagent avec l'orchestre et invitent des clients potentiels à nos concerts pour leur montrer l'excellence des artistes canadiens et pour prouver que les Canadiens se soucient de ce qui contribue à la qualité de la vie.
    Comme je l'ai dit précédemment, j'étais au Centre national des arts, hier soir. Être dans cet édifice me rappelle les célébrations de 1967 et l'enthousiasme des Canadiens devant notre art et notre culture. En 2017, nous soulignerons notre 150e anniversaire. Je pense que ce serait une excellente occasion de tenir des manifestations culturelles partout au pays et, ce faisant, de redynamiser la fierté bien justifiée que nous ressentons en ce qui concerne les arts canadiens. Les orchestres pourraient jouer un important rôle de premier plan dans de tels événements.
    Je vous remercie encore une fois de m'avoir donné l'occasion de vous parler. Je serai ravi de répondre à vos questions.
    Merci beaucoup.
    Notre prochain témoin s'adressera à nous par vidéoconférence, de Montréal.

[Français]

    Monsieur Fortin, vous avez la parole pour huit minutes.
    Je remercie le comité de m'accueillir aujourd'hui. Je salue aussi mes collègues de la Fédération canadienne des musiciens et de la SPACQ.
    Je suis président de la Guilde des musiciens et musiciennes du Québec, qui est aussi associée à la Fédération canadienne des musiciens. Nous avons aussi l'accréditation exclusive de représenter les musiciens sur le territoire du Québec en vertu de la loi provinciale sur le statut de l'artiste. Notre association compte 3 300 membres réguliers et près de 500 membres permissionnaires.
    Je vais essentiellement parler de la modernisation ou de la réforme du droit d'auteur à l'ère numérique, ainsi que des procédures d'attribution des subventions pour mieux soutenir nos musiciens.
    L'essor du numérique a révolutionné l'industrie de la musique. La musique est accessible de partout sur une panoplie d'appareils portables branchés sur des réseaux sans fil, le plus souvent sans que l'utilisateur n'ait quoi que ce soit à payer. Sur YouTube, par exemple, on peut écouter n'importe quoi sans payer un sou et sans que les musiciens ou ayants droit ne reçoivent quelque chose.
    Malheureusement, les structures qui encadrent l'industrie musicale au Canada ne se sont pas adaptées à l'évolution rapide de l'ère numérique. Les premières victimes sont les musiciens, les artistes et les créateurs.
    Si les producteurs se plaignent de la diminution de leurs revenus à la suite de cette révolution numérique, vous pouvez imaginer facilement l'impact dévastateur de cette diminution sur les artistes eux-mêmes qui, souvent, ne touchent qu'une infime fraction du prix de vente des phonogrammes et des albums.
    À la Guilde des musiciens et musiciennes du Québec, nous sommes régulièrement confrontés à la situation socioéconomique déplorable de nos membres. Sur nos 3 300 membres, on estime à un cinquième ceux qui peuvent vraiment vivre de leur musique de façon régulière. On inclut ici l'enseignement dans les sources de revenus.
    Les pertes ont été provoquées, entre autres, par le projet de loi C-32. Malheureusement, cela a tué prématurément la redevance sur la copie privée. Aujourd'hui, la copie privée est pratiquée par plus de Canadiens que jamais auparavant. On copie des oeuvres musicales sur des clés USB, des cartes SIM de téléphones intelligents, des iPad, des iPod, etc., et ce, sans que rien ne soit versé aux sociétés de gestion. C'est une injustice flagrante et le gouvernement canadien doit réparer cette erreur. Une redevance aux artistes n'est pas une taxe, et les Canadiens le comprennent très bien.
    De plus, les fournisseurs d'accès Internet doivent absolument contribuer parce qu'ils tirent des revenus substantiels des abonnements Internet et de la vente de bandes passantes, qui sont notamment attribuables à l'engouement incroyable des Canadiens pour le téléchargement et le streaming d'oeuvres musicales. Ces oeuvres diffusées sur Internet ne rapportent pourtant presque rien aux créateurs.
    Il est anormal que des oeuvres écoutées des milliers de fois, notamment sur YouTube, ne rapportent rien. Il est possible d'écouter gratuitement sur cette plateforme à peu près n'importe quelle oeuvre musicale. Souvent, elles sont mises en ligne par des internautes sans même que les auteurs soient consultés et que la vidéo n'y soit associée. Les gens font leur propre montage au moyen d'images. La Loi sur le droit d'auteur devrait absolument être modernisée afin que chacun puisse toucher sa juste part.
    Parlons maintenant de l'attribution des subventions. Les producteurs reçoivent de l'aide au fonctionnement et aux projets pour leurs activités d'entreprise. Les musiciens ne reçoivent pas ce genre d'aide, sauf dans le cas de projets précis de création de courte durée ou, encore, dans le cas du montage de certains spectacles de courte durée. La plus grande partie des subventions va aux entreprises privées de production. Par conséquent, nous devons cumuler plusieurs emplois et vivre de façon très précaire. Cela force souvent les artistes musiciens à abandonner leur carrière assez tôt. Nous sommes dépendants des entreprises de production et nous sommes souvent à la fin de la chaîne de rémunération.
    De nombreux programmes d'aide sont accessibles pour les entreprises de production, mais force est de constater que, malheureusement, cela ne permet pas à nos artistes de vivre de leur art. Les musiciens sont toujours payés à la fin.

  (1120)  

    Les entreprises subventionnées ont tout de même les fonds nécessaires pour embaucher des salariés, des comptables, des attachés de presse, des agents de communication, etc.
    Nous pensons que le gouvernement doit absolument prendre en considération le fait que les artistes aussi doivent gagner suffisamment de revenus pour se consacrer à leur art et en tenir compte dans les politiques d'attribution des subventions. À ce titre, je vous invite à visionner l'excellente série documentaire intitulée Arrière-scène. Elle a été produite par la télévision francophone ontarienne, TFO, et réalisée par Nicolas Boucher, un ancien membre de la Guilde devenu producteur de films. On y découvre le quotidien des musiciens canadiens qui expriment à la caméra les difficultés rencontrées dans l'exercice de leur métier et leur frustration devant le partage inadéquat des revenus de l'industrie.
    À titre d'exemple, je vous ferai remarquer qu'un album vendu 10 dollars sur iTunes, va rapporter peut-être, après le partage des revenus, 75 ¢ au collectif d'artistes et de créateurs qui figurent sur l'album. Vous comprendrez qu'avec le fractionnement des ventes, on ne peut à peu près pas tirer de revenus de ce genre de répartition sans qu'il y ait aussi des droits supplémentaires associés à la diffusion sur Internet.
    En ce qui a trait au financement des projets chez les entreprises, tous les projets d'album devraient assurer une rémunération régulière pendant toute la durée du projet. La politique selon laquelle un artiste commence à toucher des redevances seulement une fois les coûts de production couverts n'est pas acceptable. Les redevances devraient être versées dès la vente du premier album et les subventions accordées devraient en tenir compte. Je ne pense pas non plus qu'attendre d'avoir couvert tous ses frais de production soit une façon de payer ses fournisseurs. Les musiciens ne devraient donc pas être soumis à cette politique.
    Les associations d'artistes ont aussi établi des normes minimales de rémunération et les ententes collectives qu'on négocie garantissent un filet social de sécurité aux artistes et aussi une protection en cas de litige. Ces contrats devraient absolument être déposés dans les rapports d'utilisation des entreprises aux organismes qui les subventionnent.
    Comment s'assurer que les artistes et les musiciens ont été payés correctement si on n'exerce pas un contrôle à ce sujet? Le meilleur contrôle est le dépôt de contrats approuvés par les associations d'artistes. C'est un point essentiel qui devrait absolument être réglé.
    Je vous remercie de votre attention.

  (1125)  

    Merci.

[Traduction]

    Madame Mathyssen, vous aviez une question.
    Oui, merci, monsieur le président.
    Je me demande si les analystes pourraient produire un rapport provisoire des témoignages que nous avons entendus jusqu'à maintenant, car je regarde mes notes, et il y a là énormément d'information. J'ai pensé que, si nous avions un rapport provisoire avant de partir pour deux semaines, tout cela serait plus facile à gérer en fin de compte.
    Nous allons parler aux analystes et nous vous donnerons une réponse plus tard.
    Merci. Je vous en sais gré.
    C'est très gentil.
    Merci.
    Nous passons maintenant aux questions. M. Weston aura la parole pour sept minutes. Comme toujours, je vous prie de ne pas oublier notre témoin qui est avec nous par vidéoconférence. Merci.

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur le président.

[Traduction]

    Mark Tetreault, merci de votre présence, et merci à vous aussi, Pierre-Daniel et monsieur Fortin.
    Votre description des musiciens comme étant des athlètes de haut niveau m'a rappelé une histoire d'amour ratée alors que j'étais étudiant en droit. Ma copine était une violoncelliste renommée qui étudiait et enseignait à Juilliard. Ses parents, je m'en souviens, m'avaient mis sur la sellette à de nombreux concerts, ce qui m'a intimidé au point de me rendre compte que j'étais au mauvais endroit.
    Quoi qu'il en soit, merci de votre présence.

[Français]

    J'ai trois questions à poser.
     La première a trait au rôle des technologies et des droits. La deuxième a trait à l'éducation. Pour ce qui est de la troisième, je vais demander à chacun d'entre vous de nous donner des idées pour améliorer les lois qui touchent les créateurs au Canada.
    En ce qui a trait à la première question, nous avons entendu beaucoup parler de changements dans le monde des technologies. Monsieur Rheault, vous êtes très passionné relativement à la question du partage avec les créateurs. Pour ma part, il me semble que la plupart des problèmes ne sont pas liés aux droits, mais aux technologies d'aujourd'hui. Que pouvons-nous faire à ce sujet? Il y a des limites à ce que nous pouvons faire en tant que législateurs parce que ce sont des technologies qui changent.
    La deuxième question, qui porte sur l'éducation, est la suivante. Que pouvons-nous faire avec les enfants et la jeunesse d'aujourd'hui qui utilisent les nouvelles technologies? Avez-vous une idée à ce sujet?
     Monsieur Rheault, vous pouvez commencer.
    Je vais parler d'un sujet que j'ai survolé rapidement dans mon exposé, soit celui de l'éducation.
    En fin de semaine dernière, on me parlait de la façon dont les jeunes enfants de 12 à 15 mois se comportent avec un iPad.

[Traduction]

    Ils se le font donner. En cinq minutes, ils savent quoi faire. Ce qui se passe après, c'est que devant un vrai livre, ils essaient de tourner les pages en survolant la page seulement.

  (1130)  

[Français]

    C'est le réflexe de Pavlov.

[Traduction]

    Ils comprennent vraiment.
    Ce que j'aimerais dire, aussi, c'est que la technologie cache le criminel, si je peux m'exprimer ainsi.

[Français]

    La technologie cache la violation des droits. C'est tellement impersonnel. Quand on fait un téléchargement, personne ne voit la victime.

[Traduction]

    Il n'y a pas de sang.

[Français]

    Cela cause un énorme problème. Les gens qui me connaissent savent que je suis très optimiste, mais je ne pense pas qu'on puisse régler ce problème en amont. Il faudra vraiment adapter les dispositions législatives à ces technologies, comme on l'a fait en 1920 quand la première Loi sur le droit d'auteur a été adoptée. Évidemment, cela nous a peinturés dans le coin parce que les gens voyaient le

[Traduction]

    l'enregistrement comme étant l'acétate. Ils n'ont jamais rien vu venir. C'est évident.

[Français]

    Excusez-moi de vous interrompre, mais je veux donner l'occasion à M. Fortin de répondre.
    Je suis tout à fait d'accord avec M. Rheault.
    Les jeunes d'aujourd'hui sont le public du futur, soient les consommateurs de musique de 12, 13 ou 14 ans. Pour eux, il n'y a plus de CD, plus de cassettes. Il n'y a que le streaming ou encore la copie privée sur des appareils portables. De plus en plus, il n'y a que le streaming, le véhicule principal étant YouTube et iTunes. Pour eux, la musique n'a plus de valeur. C'est quelque chose qu'ils peuvent aller chercher gratuitement ou pour très peu d'argent. Comme ce sont souvent leurs parents qui paient, cela a encore moins de valeur pour eux.
    On achète une chanson pour 99 ¢. En plus, on n'achète pas beaucoup d'albums puisqu'on va faire du cherry picking. On choisit une ou deux chansons de l'album qu'on aime et le reste ne sera peut-être pas vendu. Même le concept d'album commence à disparaître.
    Un des moyens d'éviter une telle chose est de redonner une valeur à la musique en rapprochant les artistes de la population. Au Québec, on s'est rendu compte que les jeunes étaient beaucoup plus gênés de copier de la musique d'un artiste local qu'ils connaissent et qu'ils voient à la télévision régulièrement que celle d'un artiste étranger, parce que cela devenait plus personnel.
    Je vais vous interrompre. Je suis surpris que le problème ait plutôt trait à l'éducation qu'à la loi.

[Traduction]

    Monsieur Tetreault, avez-vous quelque chose à ajouter?
    Je conviens que le problème vient surtout de l'éducation, car nos jeunes n'apprennent pas la valeur de la propriété intellectuelle puisque tout est si facile à copier et à transférer. Ils semblent croire que nous créons un produit, puis qu'après, c'est fini et que nous ne nous attendons à aucun revenu ou aucune redevance. Il serait bon qu'on éduque les jeunes sur la façon dont les artistes sont payés — l'aspect des redevances —, et qu'on leur explique que l'accès gratuit à la propriété intellectuelle empêche les artistes d'avoir de l'argent dans les poches et de la nourriture à se mettre dans le ventre.
    Si chacun avait une idée à nous donner, quelle serait-elle?

[Français]

    Monsieur Fortin, vous pouvez répondre. Vous disposez de 20 secondes.
    Je pense qu'il faut absolument revenir au concept de copie privée au sens large, c'est-à-dire que tout support qui permet de copier une oeuvre musicale devrait être soumis à un régime de redevances. J'entends par « redevances » de l'argent qui va aux artistes. Ce n'est pas une taxe. De plus, les fournisseurs d'accès Internet devraient faire leur part comme s'il s'agissait d'un poste de radio ou de télévision.
    Merci.
    Monsieur Tetreault, voulez-vous ajouter quelque chose à ce sujet?

[Traduction]

    Je voudrais que le gouvernement appuie les initiatives éducatives qui permettent aux jeunes de bien comprendre comment les artistes sont rémunérés au moyen des redevances.

[Français]

    Bravo!
    Monsieur Rheault, voulez-vous ajouter quelque chose?
    Comme je l'ai dit brièvement plus tôt, il faut sensibiliser les jeunes. Ce sont des éponges; ils vont adopter le modèle qu'on va leur proposer sans le remettre en question. On ne peut pas arriver dans les écoles secondaires et dire à ces gens que tout ce qu'ils font depuis dix ans n'est pas bon.
    Il faut les habituer à ce sujet, comme eux-mêmes nous ont habitués à faire du recyclage. On ne peut plus mettre une boîte de conserve vide à la poubelle sans qu'un jeune dans la cuisine dise:

  (1135)  

[Traduction]

    « Non, non, papa. Ne fais pas ça. Mets ça dans le bac à recyclage. »

[Français]

    C'est une question de réflexe.

[Traduction]

    D'accord. Merci beaucoup.
    C'est maintenant le tour de Mme Mathyssen, pour sept minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci beaucoup pour vos témoignages, très éclairants. Nous sommes vraiment ravis d'être informés de la perspective des créateurs, des musiciens. Je dois dire que cela reflète très fidèlement ce que nous entendons depuis le début de notre étude, concernant la difficulté croissante pour les artistes, les musiciens et les producteurs de gagner leur vie grâce à l'incroyable musique que vous créez.
    J'ai trois questions à vous poser. Je vais les poser en rafale, tout simplement parce que je vais manquer de temps et que je veux tous vous entendre.
    Premièrement et avant tout, vous avez parlé de la transformation de la distribution de la musique et de la difficulté que cela représente pour vos membres. Quelles sont les recommandations les plus importantes que nous devrions inclure dans notre rapport sur ce plan. Deuxièmement, monsieur Tetreault, vous avez parlé de plusieurs choses très importantes, dont les compressions budgétaires à CBC/Radio-Canada et les incidences qu'elles ont sur le processus créatif — sans compter qu'il y a maintenant d'autres compressions. La situation va devenir très difficile. Ce l'est déjà, et ça va empirer.
    Vous avez mentionné les changements apportés à l'assurance-emploi, et vous avez dit qu'en tant qu'organisme représentant vos membres dans les négociations, vous devez constamment vous préoccuper des salaires, de l'assurance-maladie, de la qualité de vie. Vous avez aussi soulevé le traité de Beijing. Devrions-nous extraire des éléments de ce traité pour les inclure dans notre rapport?
    Enfin, un peu plus tard aujourd'hui, nous allons entendre les témoignages de Live Nation et Ticketmaster, et je me demande quelles questions vous aimeriez que nous leur posions en vos noms. Qu'est-ce qu'il nous faut savoir? Quelles sont vos préoccupations? Quelles sont vos questions à cet égard?
    Je sais que c'est beaucoup, mais j'aimerais vraiment que vous me donniez les réponses et les commentaires les plus complets possible.

[Français]

    Si cela vous convient, je vais d'abord m'exprimer en français.
    Je n'ai pas d'objection à parler de Ticketmaster. Cette entreprise suit un modèle auquel nous voudrions nous référer. Ces gens ne se gênent pas; ils font les choses légalement. Ils perçoivent des frais sur l'émission des billets que nous achetons pour les concerts et les pièces de théâtre. Il n'y a jamais eu de révolution ou d'émeute à ce sujet. Or on peut voir que le coût de l'acquisition en ligne de ces billets est parfois assez élevé.
    À mon avis, on pense trop pour les Canadiens. On les prend pour des simplets. Ils savent bien faire la distinction entre une taxe et un tarif lié à une forme d'utilisation.
    J'ai hâte d'entendre et de lire ce que ces gens vont vous mentionner cet après-midi.

[Traduction]

    Quelle était votre deuxième question?
    Concernant Ticketmaster et Live Nation, j'aimerais savoir ce que nous devrions leur demander en votre nom.
    Je vais laisser M. Tetreault parler en mon nom, ou Luc, qui aura peut-être des idées.
    C'est intéressant. Dans l'univers symphonique canadien, bien des orchestres adoptent en quelque sorte le modèle de Ticketmaster et s'occupent eux-mêmes de la vente des billets. Mon orchestre vend aussi ses services de vente de billets aux organismes artistiques de la collectivité. En fin de compte, c'est devenu une autre source de revenus pour les orchestres, et cela nous aide.
    En ce qui concerne l'Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle, ce qui nous préoccupe, c'est que l'argent est recueilli partout dans le monde pour la diffusion de nos spectacles, mais qu'il n'est pas distribué aux musiciens. Dans notre cas, c'est à cause des complications dans le processus. Si vous voulez être rémunéré pour un enregistrement, vous devez pouvoir dresser la liste de tous les musiciens participant à chaque pièce, et quand vous avez un orchestre complet... Nous avons deux premiers hautbois, deux premiers bassons, etc. Qui a joué sur cet enregistrement? Est-ce qu'il y avait des musiciens absents pour cause de maladie? Est-ce qu'il y avait des musiciens supplémentaires? C'est un vrai cauchemar. Les registres tenus au moment des enregistrements ne répondent pas aux exigences, pour se faire payer. L'argent reste donc là, et c'est très dérangeant.
    Nous aimons aussi que le traité protège notre musique de sorte qu'elle ne serve pas à des fins malveillantes ou qu'elle ne serve pas à représenter des idées qui ne correspondent pas à nos convictions ou à nos opinions.

  (1140)  

    Aimeriez-vous que cela soit inclus dans un rapport?
    J'aimerais que le gouvernement signe et ratifie le traité de l'OMPI qui est en suspens.
    D'accord. Merci.
    Monsieur Fortin, vous avez dit que les créateurs sont les derniers à être rémunérés avec l'argent qui vient de...

[Français]

    En effet, j'ai donné un bon exemple en mentionnant que les musiciens sont rémunérés après que les coûts aient été absorbés par les ventes. Autrement dit, les artistes commencent à être payés une fois que les coûts de production ont été remboursés par les ventes. Malheureusement, les albums ne se vendent pas beaucoup aujourd'hui. Les grosses ventes d'album sont plus rares.
    Le marché du Québec est particulier. La francophonie constitue un marché un peu plus restreint et on y trouve surtout des compagnies indépendantes. Les grandes compagnies ne produisent pas au Québec. Les producteurs locaux du Québec essaient surtout d'essaimer dans toute la Francophonie, la France, etc. Les projets d'album qui vendent beaucoup d'exemplaires sont plutôt rares. Souvent, le point d'équilibre budgétaire n'est pas atteint. Les artistes ne reçoivent donc à peu près jamais de redevances, ce qui est tout à fait inacceptable.
     L'autre point sur lequel je voudrais insister est qu'il est absolument important que dans tout ce qui touche les subventions gouvernementales à des entreprises de production, on exige d'avoir des preuves que les artistes ont été rémunérés selon les normes établies par leurs associations. À l'heure actuelle, on ne peut pas, hors de tout doute, démontrer qu'à la fin du projet tout le monde a été payé selon les meilleures pratiques, les normes établies et les ententes collectives qui assurent un filet social de sécurité et de protection. Cette question me semble capitale.
     Un créateur qui demande une bourse doit justifier toutes ses dépenses sans exception, à partir de l'avion jusqu'au cours de musique en passant par les dépenses de taxi et celles du studio. Je pense que ça devrait être la même chose pour tous les producteurs. ils devraient justifier tous les salaires et tous les avantages sociaux versés et devraient donner des copies des contrats qu'ils ont avec les associations d'artistes. Ça me semble très important.
    Merci.
    Monsieur Dion, vous disposez de sept minutes.
    Merci beaucoup monsieur le président.
    Monsieur Rheault, je pense que vous avez bien identifié le problème au début. Si le gouvernement doublait son aide, on passerait de 1 000 $ à 2 000 $. S'il le triplait, on passerait à 3 000 $. Je ne vois pas comment on pourrait convaincre le gouvernement de tripler une aide dans quelque domaine que ce soit en ce moment. Il faut trouver d'autres mécanismes, n'est-ce pas?

[Traduction]

    Monsieur Tetreault, vous avez parlé du traité de Beijing. Combien de pays l'ont signé? Combien l'ont mis en oeuvre? Qu'est-ce qui a changé, concrètement? Et en quoi est-ce différent de ce que nous avons ici, au Canada?
    Je ne sais pas combien de pays l'ont ratifié. C'est un traité qui a été conçu assez récemment. Je pense que le processus de ratification est essentiellement en cours dans les divers pays, comme c'est le cas au Canada.
    D'accord. Mais s'il était mis en oeuvre, qu'est-ce que ça changerait concrètement? Qu'est-ce qui changerait tant? Qu'est-ce que cela signifierait pour les politiques du gouvernement?
    Je pense qu'il serait alors possible de veiller à ce que les redevances soient distribuées, plutôt que retenues par les diverses organisations. Cela aiderait. Je ne sais pas si le gouvernement joue un rôle actif dans cette distribution, mais cela servira de cadre au contrôle de la distribution, et il y aurait un volet axé sur la résolution de conflits qui n'existe pas en ce moment.

  (1145)  

    Savez-vous si le gouvernement compte le ratifier?
    Je ne le sais pas.
    Vous n'avez pas posé la question.
    Mon expertise est liée à l'orchestre symphonique. On m'a demandé de présenter ceci.
    M. Dykstra nous donnera peut-être la réponse tout à l'heure.

[Français]

    M. Fortin a parlé de redevances. Messieurs Tetreault et Rheault, êtes-vous d'accord avec cette idée de redevances?
    Absolument.

[Traduction]

    Je suis fermement d'accord avec le principe des redevances sur la diffusion et sur les enregistrements.

[Français]

    On pourrait peut-être demander à M. Fortin de nous dire comment cela fonctionnerait concrètement.
    Monsieur Fortin, est-ce que vous m'avez entendu?
    Oui.
    Voulez-vous parler des redevances sur la copie privée pour la diffusion sur Internet?
    Expliquez-nous ce que vous avez en tête exactement.
    Dans le traité de Beijing, il est question de redevances et de droits sur la captation audiovisuelle. C'est un aspect important pour lequel nous ne touchons pas de droits actuellement.
    D'où proviendrait l'argent? Comment cela fonctionnerait-il concrètement? Quels mécanismes permettraient d'acheminer l'argent?
    Comme le disait M. Tetreault, ce traité remonte à un an ou deux. Une fois que les pays y auront adhéré, les sociétés collectives de gestion des droits d'auteur qui réclament des redevances pourront commencer à les distribuer. Ce sont des processus très complexes à l'échelle internationale. Plusieurs sociétés de gestion à travers le monde ont conclu des partenariats en vue de distribuer ces sommes.
    Il est important que le plus de pays possible adhèrent à ce traité. Notre pays pourrait commencer par donner l'exemple et peut-être même faire un lobby pour inciter d'autres pays à y adhérer également.
    Concernant les redevances sur les albums vendus, beaucoup d'argent dans la chaîne de rémunération est dépensé avant d'arriver à l'artiste, de sorte qu'à la fin, celui-ci se retrouve avec des sommes complètement ridicules. On parle de petits pourcentages. Quand un groupe de quatre musiciens reçoit 75 ¢ par album vendu...
    Je comprends quel est le problème. Toutefois, je voudrais maintenant qu'on m'explique comment la solution fonctionnerait concrètement. C'est ce que le comité a besoin de comprendre. Vous dites qu'une autre source de revenus viendrait des redevances. Comment cela fonctionnerait-il? Comment l'argent irait de A à B, soit du payeur au payé?
    Monsieur Rheault, qui est un spécialiste des sociétés de gestion, pourrait vous en parler plus que moi.
    Si on exigeait que la copie privée s'étende à tous les supports, il y aurait des droits perçus sur la vente de ces supports. Ces droits seraient redistribués aux ayants droit par l'entremise des sociétés de gestion. C'est un mécanisme bien connu qui a fonctionné pendant très longtemps.
    Aujourd'hui, la copie privée est à peu près morte parce qu'elle ne s'applique que sur les CD et les cassettes. On s'entend pour dire que ce dernier support est devenu complètement obsolète. Il faudrait moderniser ça.
    Monsieur Tetreault ou monsieur Rheault, vous voulez peut-être participer à la discussion. Auprès de qui ces droits seraient-ils perçus?
    Parlons clairement de la bête.
    M. Harper a créé un traumatisme il y a environ sept ou huit ans quand a été amorcée l'étude du projet de loi C-32. En effet, il a dit que jamais il n'allait imposer une nouvelle taxe aux Canadiens. Nous avons répondu qu'il ne s'agissait pas d'une taxe, mais d'un tarif, qui est infiniment plus petit que les montants dont on parlait plus tôt. Il est évident qu'on ne pourra pas quadrupler les sommes d'argent avancées par le gouvernement pour financer le milieu.
    Par ailleurs, prenons l'exemple des abonnements à Internet. L'Association des auteurs-compositeurs canadiens , qui n'est pas représentée ici aujourd'hui, a proposé une manière d'imposer ce qu'on appelle une provision mensuelle. On trouvera peut-être que ce n'est pas logique, mais je fais la comparaison avec le 411 du service téléphonique. À tous les mois, on reçoit un compte qui inclut les services du 411 ou du 911 ou tous les autres « 11 ». Ce sont des pinottes.
    Ma mère me disait toujours que c'est avec des pinottes qu'on fait des sacs de pinottes et que quand on a un gros sac, on va le vendre. C'est comme cela que fonctionne le droit d'auteur. On n'a jamais pensé qu'il fallait imposer des tarifs outranciers qui dépassaient le dollar, par exemple. On parlait de 5 $ à un moment donné parce que l'Association des auteurs-compositeurs canadiens voulait avoir

  (1150)  

[Traduction]

    une licence générale pour Internet.

[Français]

    Ce sera difficile à gérer, mais je suis convaincu que compte tenu de la complexité de ces procédés qu'on a instaurés, il va y avoir une place entre A et B pour mettre un A+ ou un B-. On suggère un régime d'utilisateur-payeur et un tarif qui va faire en sorte que l'utilisateur ne se sentira pas piégé.
    C'est aussi simple que cela. On pourrait mettre les utilisateurs à contribution. D'ailleurs, des études ont été faites il y a deux ou trois ans à ce sujet et une grande majorité des gens qui avaient été questionnés étaient favorables à l'imposition d'un tarif et non pas d'une taxe.
    Merci.

[Traduction]

    Monsieur Boughen, vous avez sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Permettez-moi de souhaiter la bienvenue à nos témoins. Je vous remercie d'être ici aujourd'hui et de nous faire bénéficier de votre expertise. Votre contribution est très utile dans le cadre de cette étude.
    J'ai quelques questions à vous poser. Vous avez parlé du droit d'auteur, et vous avez aussi évoqué la question de l'éducation. En ce qui concerne le droit d'auteur, selon vous, comment devrions-nous imposer ce tarif de façon à ce que l'artiste soit correctement rémunéré pour son oeuvre? Qu'en pensez-vous?
    Nous pourrions peut-être commencer par Mark.
    Au Canada, la Musicians' Rights Organization of Canada. recueille l'argent que versent les radiodiffuseurs chaque fois qu'ils diffusent des oeuvres afin de le distribuer aux artistes. On retrouve des organisations comme celle-là partout dans le monde. Elles sont censées répartir les fonds et les ressources et s'assurer que les artistes sont payés. Toutefois, il y a une réticence, principalement des pays de l'Europe, à même verser cet argent au Canada. Ils retiennent les fonds, sous prétexte que nous n'avons pas des méthodes de distribution adéquates. C'était un problème auparavant, mais nos méthodes s'améliorent.
    La MROC recueille les données des radiodiffuseurs afin de savoir tout ce qui a été diffusé. Malheureusement, il incombe aux musiciens de réclamer le paiement. Les fonds ne sont pas versés automatiquement aux artistes après chaque morceau joué. Les musiciens doivent donc s'adresser à la MROC afin de présenter une demande. Ils doivent dresser la liste de tous leurs enregistrements et de toutes leurs pistes ainsi que de tous les musiciens qui en ont fait partie. C'est donc assez décourageant pour de nombreux musiciens. Si vous êtes un petit groupe, c'est plus facile à faire, mais c'est rarement le cas.
    Nous avons donc de la difficulté à mettre la main sur l'argent que nous doivent les autres pays. Le traité de Beijing pourrait en grande partie régler ce problème en exerçant des pressions sur ces pays pour qu'ils versent l'argent aux personnes à qui il revient.
    Pierre, comment envisagez-vous la situation? Comment peut-on accroître la probabilité que les musiciens soient reconnus grâce au versement de droits d'auteur?
    Le droit d'auteur va avec l'éducation. Le droit d'auteur est un concept très abstrait pour tous ceux qui n'ont jamais fait partie du milieu des arts ou du spectacle. Je suis le seul à en faire partie dans ma famille et, après 35 ans aux côtés de la même femme, aucun de mes beaux-frères ne comprend encore ce que je fais. Ce n'est donc pas par hasard qu'on en est là aujourd'hui. C'est tellement abstrait. En fait, c'est d'ailleurs l'un des arguments qu'on invoque: la musique est là, alors pourquoi payer?
    Je suis assez vieux pour me souvenir des 33 tours. Sur l'étiquette, on pouvait y lire: « La reproduction ou l'utilisation non autorisée de tout matériel protégé par un droit d'auteur est strictement interdite ». Personne dans le monde réel n'a jamais compris le sens de cette ligne. Quand j'en ai discuté avec mes beaux-frères, ils m'ont dit « Oui, mais j'ai payé pour le CD ». Je leur ai répondu « Vous avez acheté le support, pas la chanson. La chanson appartient toujours au créateur. » Il faut faire quelque chose pour que les gens comprennent.
    Je sais que c'est un gros problème. À une certaine époque, les rois payaient pour cela et ce n'était pas un problème, mais ils ont tous fait faillite de toute façon.
    Je crois que nous devons avoir confiance que le public acceptera de payer quelques sous pour chaque utilisation, car c'est ce dont il s'agit ici.

  (1155)  

    C'est exact.
    Luc, qu'avez-vous à dire là-dessus? Monsieur Fortin?

[Français]

    Je suis tout à fait d'accord avec M. Rheault. Il est vrai qu'il y a une question d'éducation. On pourrait même commencer dès l'école primaire et l'école secondaire. Il faut que les gens comprennent qu'une oeuvre musicale n'est pas tombée d'un arbre. C'est le produit d'un travail qui implique beaucoup de gens, notamment le compositeur, l'auteur des paroles et les musiciens qui ont travaillé et ont interprété l'oeuvre. Il y a toute une chaîne de production complexe et cela vaut quelque chose. Ce n'est pas gratuit.
    Je sais qu'aujourd'hui les moyens de production sont quand même moins onéreux qu'il y a plusieurs années alors qu'on avait besoin d'enregistrer dans des studios ayant des appareils de 24 ou 48 pistes qu'il fallait louer à 250 $ ou 300 $ l'heure. Cette époque est maintenant révolue, parce que les gens ont accès à des technologies beaucoup plus simples et moins onéreuses. Par contre, il ne faut pas penser que la baisse des coûts de production enlève de la valeur à la musique comme telle. Une oeuvre musicale vaut quelque chose, autant pour ses créateurs que pour ses interprètes. Je pense que les gens sont prêts à payer un petit quelque chose pour cela.
    Comme je le disais plus tôt, au Québec, on a remarqué que les consommateurs étaient beaucoup plus réticents à copier de façon non autorisée une oeuvre d'un musicien québécois qu'ils connaissaient, qu'ils appréciaient et qu'ils entendaient à la radio que des oeuvres d'autres pays plus lointains ou d'une autre époque, parce qu'ils sentaient un lien avec leur réalité. Je pense qu'il faut mettre la musique dans la réalité quotidienne des gens et comprendre que lorsqu'on copie quelque chose, on affecte quelqu'un d'autre et on lui enlève quelque chose. Je parle de copier une oeuvre de façon non autorisée.
    Quand on paie son abonnement au fournisseur d'accès Internet, pourquoi une infime partie par mois ne pourrait-elle pas aller à un fonds pour soutenir la création et la rémunération des artistes? Comme je le disais, il faut que la copie privée touche tous les supports dont on se sert pour copier des oeuvres et non seulement les CD et les cassettes, qui sont disparus aujourd'hui.

[Traduction]

    Merci.

  (1200)  

    Nous avons terminé. Merci beaucoup. Nous n'avons plus de temps.
    Je tiens à remercier nos témoins de s'être joints à nous aujourd'hui. Merci de votre contribution à notre étude. Si vous avez d'autres recommandations à nous faire, vous pouvez nous les transmettre par écrit.
    Nous allons faire une brève pause.

  (1155)  


  (1200)  

    Je déclare de nouveau ouverte la 18e séance du Comité permanent du patrimoine canadien.
    Pour la deuxième heure, nous allons entendre Mike Tanner, directeur des opérations de North by Northeast, suivi de Riley O'Connor, président de Live Nation Canada, et de Ken Craig, promoteur. Pour terminer, Patti-Anne Tarlton, de Ticketmaster Canada, se joindra à nous par vidéoconférence depuis Dallas, au Texas.
    Je cède maintenant la parole à M. Tanner pour huit minutes.
    Je suis très heureux de voir que le comité s'intéresse à ce dossier. Je me suis exprimé haut et fort à l'échelle provinciale et municipale. Je suis ravi de voir que le plus haut niveau de gouvernement est disposé à entendre le point de vue de l'industrie et à travailler avec elle.
    Je suis le directeur des opérations de North by Northeast, ou NXNE, un grand festival de musique qui se déroule chaque année à Toronto. Je travaille pour NXNE depuis 2007. J'ai été témoin de sa métamorphose. Le NXNE a pris naissance comme festival local mettant en vedette des artistes locaux, puis est devenu l'un des principaux festivals de musique en Amérique du Nord. En partie grâce au soutien du gouvernement provincial de l'Ontario, par l'intermédiaire du ministère du Tourisme, le festival a eu un impact croissant sur la ville et sur la province ainsi que sur l'industrie du tourisme en général, y compris des retombées économiques dans différents secteurs.
    J'aimerais donc vous parler des festivals en général et aussi de la façon dont l'industrie des concerts, si elle bénéficie d'un bon soutien, peut faire croître considérablement le tourisme partout au Canada.
    Au Canada, qui dit tourisme dit environnement naturel. C'est compréhensible. Je suis un ancien musicien professionnel et j'ai parcouru le Canada. Tout comme moi, vous avez sans doute remarqué, sur l'autoroute transcanadienne, que notre identité nationale se reflète même sur nos plaques d'immatriculation, que ce soit les beautés de la Colombie-Britannique, les roses sauvages de l'Alberta, les cieux vivants de la Saskatchewan ou le paradis maritime du Canada atlantique.
    Il y a 25 ans, j'ai quitté la Colombie-Britannique pour aller m'établir en Ontario. Toutefois, ma migration n'avait rien à voir avec la nature. Je me suis rendu à Toronto pour me rapprocher de la scène musicale. Tous les artistes et les événements y étaient regroupés, et il y avait toute la frénésie qui règne dans les districts comme la rue Queen Ouest, la rue College, l'Annex et le marché Kensington. Je crois que cette même industrie peut stimuler le tourisme à l'échelle internationale.
    Nous aimons tous le plein-air, mais je demanderais au comité de reconnaître qu'au Canada, nous n'avons pas suffisamment exploité nos forces uniques dans les industries culturelles, particulièrement dans l'industrie des concerts. Nous parlons encore des champs de blé et des baleines. Nous ne nous sommes pas mis au diapason des autres pour ce qui est de l'expérience urbaine. Si je ne m'abuse, nous sommes passés du 7e au 18e rang sur la liste des destinations les plus visitées dans le monde au cours des 10 dernières années. Selon les statistiques, le tourisme emploie 600 000 personnes, ce qui est plus que dans le secteur pétrolier. Nous évaluons à 85 milliards de dollars l'activité économique que génère le tourisme, ce qui est plus que l'agriculture, les pêches et les forêts réunies.
    Selon mon expérience, je peux vous affirmer que les concerts sont déjà un puissant moteur économique puisqu'ils poussent des milliers de personnes à franchir la frontière pour venir y assister. Des festivals de renommée mondiale se tiennent partout au pays. Nous avons des festivals folk à Vancouver, à Edmonton, à Regina et à Winnipeg. Il y a l'Ottawa Bluesfest qui se déroule ici. Au Québec, il y a le Festival de Jazz de Montréal, le POP Montréal, le M pour Montréal et Osheaga. Dans les Maritimes, on retrouve le festival Halifax Pop Explosion. Je n'ai que huit minutes, alors je ne pourrai pas vous énumérer tous les événements qui ont également lieu à Toronto.
    J'aimerais souligner que chacun de ces événements s'est en grande partie développé par ses propres moyens. Grâce aux médias sociaux, chaque festival attire une vaste clientèle. Chacun d'entre eux est rentable et a une incidence croissante. Toutefois, avec un peu d'aide au niveau national, cette industrie est appelée à prendre de l'expansion.
    Imaginez une campagne de publicité, un partenariat public-privé dans le cadre duquel le gouvernement fédéral s'associerait aux principaux festivals partout au Canada afin d'amener les amateurs de musique américains, par exemple, à venir parcourir le Canada en train pour assister au festival Osheaga de Montréal, au festival Folk de Regina et à celui d'Edmonton, et tout ça, en moins de 10 jours. Ce serait merveilleux.
    C'est possible, et nous pouvons vous aider à mettre ce plan en marche.
    L'industrie de la musique ne s'attend pas à avoir un chèque en blanc, parce que nous savons tous à quel point il est noble de soutenir les arts.

  (1205)  

    J'encouragerais le comité à reconnaître que de tels événements offrent un RCI très élevé. Mon propre événement, North by Northeast, bénéficie d'un programme intitulé Fêtons l'Ontario offert par le ministère du Tourisme. On nous donne entre 300 000 $ et 400 000 $ par année, dont nous tirons profit pour établir des partenariats avec les secteurs privés. Nous organisons des spectacles gratuits au croisement des rues Yonge et Dundas. Nous fermons le secteur et nous y accueillons une grande foule. Cet événement, à lui seul, pourrait avoir un rendement du capital investi de plusieurs millions de dollars et des retombées massives pour l'économie locale. Le soutien à l'industrie des concerts fait rouler l'économie du pays, aide les musiciens en les faisant connaître et contribue au rayonnement de cette industrie essentielle.
    Par conséquent, je recommande au gouvernement de recenser et de soutenir les festivals, les événements, les lieux de spectacle, les promoteurs et les autres intervenants qui contribuent directement à l’organisation de concerts partout au pays. Si vous organisez un événement, le public sera au rendez-vous. Tout est une question de programmation. C'est ce que nous voyons avec mon festival. Si nous organisions un grand concert gratuit en plein-air avec une bonne tête d'affiche, nous pourrions accueillir 50 000 personnes en une journée. Nous connaissons notre public. Nous savons que probablement 30 % des gens viendraient de l'extérieur de Toronto et 20 % de l'étranger. Nous savons aussi que la plupart d'entre eux seraient âgés entre 19 et 34 ans, car c'est le public qu'attire ce type de musique. Beaucoup d'entre eux n'auraient pas d'emploi à temps plein ni même de voiture ou de maison. Certains pourraient même squatter chez quelqu'un pendant le festival, mais ils dépenseraient tous de l'argent dans les bars, les restaurants, les taxis et les commerces. Ils repartiraient tous avec un T-shirt et des souvenirs mémorables de notre pays. Et ils reviendraient.
    Ces jeunes touristes qui voyagent pour assister à nos concerts, par opposition aux orchestres symphoniques, à l'opéra et au ballet, ne sont pas suffisamment visés par les campagnes de publicité traditionnelles. On voit des champs de blé, des baleines, des vignobles et des parcs d'attraction, mais on ne voit pas ce qui se passe sur la rue Queen un samedi soir.
    J'ai visité Austin à plusieurs reprises et j'ai vu de mes propres yeux à quel point sa marque, c'est-à-dire la capitale mondiale des concerts, a animé non seulement la ville, mais tout l'État du Texas. On a comptabilisé 57 000 nuitées réservées dans des hôtels locaux seulement dans le cadre du festival South by Southwest. J'ai vu comment la ville a su tirer parti de son industrie de la musique pour accroître de façon considérable les investissements dans le tourisme et d'autres retombées. On trouve beaucoup de renseignements sur Austin dans ce merveilleux rapport rédigé par Music Canada intitulé « The Next Big Bang ». Le Canada ne doit pas se contenter d'envier Austin puisqu'il a déjà l'une des scènes musicales les plus diversifiées, dynamiques et uniques dans le monde avec des artistes incroyablement talentueux, des lieux emblématiques, des districts historiques et des amateurs de musique passionnés. Nous avons même l'appui des médias.
    Cela dit, nous avons besoin que le gouvernement fédéral favorise davantage la croissance de ce secteur déjà dynamique. Notre industrie commence finalement à avoir une voix plus cohérente. On parle d'une association nationale en préparation. L'industrie des concerts peut aider le gouvernement à mener des études servant à fixer des priorités, de créer des programmes qui lui sont destinés et de s’assurer que les mesures d’aide sont fournies à ceux qui peuvent le plus les faire fructifier afin de favoriser le tourisme, la création d'emplois, la productivité économique, tout en aidant les musiciens et l'industrie de la musique que nous avons tant à coeur.
    Je demanderais donc au comité de recommander que l'industrie des concerts soit un élément clé de l'industrie de la musique et de l'inclure davantage afin d'en apprendre plus sur ce qui existe en 2014, et de travailler avec nous à l'élaboration d'un plan stratégique visant à mettre l'accent sur les atouts du secteur culturel et à profiter de son potentiel largement inexploité.
    Merci de votre écoute. Je suis impatient de vous en dire davantage.

  (1210)  

    Merci beaucoup, monsieur Tanner.
    Je suis désolé. Je sais que vous vouliez passer en deuxième.
    Je vais maintenant céder la parole à MM. O'Connor et Craig de Live Nation Canada.
    Vous pouvez vous répartir les huit minutes.
    Je suis le président de Live Nation Canada. Je suis dans le milieu depuis 1977 en tant que promoteur. J'ai commencé ma carrière à Vancouver. J'ai travaillé auparavant comme machiniste au Forum de Montréal, et je suis électricien de métier.
    Ce que je voulais souligner aujourd'hui, malgré le court préavis... J'irai dans le même sens que Mike; je vais vous donner un aperçu général de l'incidence du secteur de la musique commerciale et de ce qu'il représente réellement pour l'économie du Canada.
    Je vous remercie, monsieur le président et membres du comité. Je suis heureux d'avoir l'occasion de vous parler aujourd'hui de l'industrie des concerts.
    Les artistes qui font de la musique sont une source de bien-être pour notre société. Ils nourrissent notre sentiment d'appartenance et nous inspirent tous — les gens de métier, les professionnels, les entrepreneurs et même nos politiciens. Les concerts sont également une ressource et ont des retombées économiques pour la main-d'oeuvre, les biens et services et le tourisme.
    J'ai récemment pris part à un déjeuner d'affaires organisé par la Chambre de commerce d'Edmonton, auquel participait une délégation commerciale islandaise. La directrice de la culture et du tourisme de la ville de Reykjavik, Mme Konradsdottir, a dit quelque chose qui m'a étonné. Lorsqu'on lui a demandé ce que sa ville faisait de plus important, elle a répondu qu'elle faisait la promotion de leurs artistes et de leur culture. Elle a dit que c'est ce qu'ils sont et c'est tout ce qu'ils font. C'est également quelque chose que nous faisons tous les jours à Live Nation Canada. C'est aussi quelque chose que le gouvernement canadien devrait promouvoir activement.
    L'industrie des concerts est une réussite économique au Canada. Nous jouons dans la cour des grands sur la scène internationale. Nous divertissons le monde entier grâce à nos musiciens, nos entrepreneurs et nos techniciens. En outre, le Canada est une mecque qui accueille énormément d'artistes nationaux et internationaux. L'industrie des concerts est vitale pour nos musiciens.
    Notre entreprise, Live Nation Canada, gère et produit plus de 1 200 concerts chaque année, d'un océan à l'autre. Nous sommes actifs dans plus de 40 collectivités par année. En 2013, 3,6 millions de personnes ont assisté à nos concerts. Nous avons généré un chiffre d'affaires de plus de 285 millions de dollars. Nous avons produit 7 festivals importants au Canada, auxquels ont participé près de 200 000 personnes. Nous avons dépensé plus de 14 millions de dollars seulement dans les médias canadiens. L'an dernier, nous avons produit 360 concerts dans un aréna et employé plus de 145 000 personnes.
    Ces chiffres ne représentent pas tout le marché de l'industrie canadienne des concerts. Il est évident que les musiciens et leur talent unique ont des retombées économiques importantes qui permettent de créer des emplois dans de nombreux domaines.
    La musique touche tout le monde et rassemble les gens. Nous pourrions célébrer davantage notre patrimoine musical. La musique est un outil qui contribue au développement des aptitudes cognitives et qui encourage les étudiants à élargir leurs champs d'apprentissage. La musique et nos musiciens devraient être considérés comme une ressource nationale, et non pas comme quelque chose de marginal. Les artistes musicaux devraient avoir les mêmes possibilités de réussite que dans toute autre plate-forme économique qui favorise la croissance économique.
    Nous avons un vaste réseau de centres des arts et d'arénas communautaires au Canada, mais ces installations sont négligées et vieillissantes et ne profitent pas des services les plus modernes. Nous avons ici l'occasion d'attirer des artistes de partout et de compléter leur travail comme nous l'avons fait pour l'industrie cinématographique. Tous ces services sont un atout pour notre milieu des artistes, que ce soit pour leur travail, des projets collaboratifs ou le perfectionnement de leurs aptitudes. Des installations des arts du spectacle modernes attirent non seulement une clientèle canadienne, mais aussi des touristes de l'étranger. Nous devrions mettre en place une stratégie nationale de tournées destinée aux artistes canadiens dont l’oeuvre a dépassé l’étape du développement. Plus les artistes canadiens connaîtront du succès, plus les retombées seront grandes pour les différents secteurs à l'appui de nos artistes.
    Je suis donc venu ici pour vous offrir mon aide afin d'établir une stratégie nationale sur les tournées de spectacles.
    Merci.

  (1215)  

    Très bien. Merci beaucoup.
    Nous nous dirigeons maintenant vers Dallas (Texas) pour entendre Patti-Anne Tarlton, chef des opérations de Ticketmaster Canada.
    Bienvenue à vous.
    Merci, monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du comité, de m'avoir invitée à participer à cette discussion sur l'industrie de la musique en direct.
    C'est un honneur pour moi de représenter cette industrie dynamique et extrêmement diversifiée à laquelle j'ai participé à l'échelle nationale tout au long de ma carrière. Je suis née à Montréal et j'ai grandi à Vancouver pour ensuite vivre et travailler dans différentes régions du pays. Je connais très bien les risques et les récompenses associés à la production de spectacles. Dans mes années au Air Canada Centre, j'ai pu directement constater à quel point les investissements dans les infrastructures peuvent servir de catalyseurs à la croissance économique. Je supervise maintenant les activités de Ticketmaster pour les événements de toutes tailles tenus un peu partout au Canada.
    Si j'ai bien compris, votre comité a pour mandat d'examiner et d'analyser la perception et le soutien du gouvernement à l'égard de l'industrie de la musique. Dans le contexte actuel du secteur de la musique en direct, une entreprise de billetterie a pour rôle d'établir la connexion entre les artistes et leur public. Ainsi, Ticketmaster investit plus de 100 millions de dollars par année dans le développement de produits afin de suivre le rythme de l'évolution technologique et de continuer à répondre aux attentes du public, des artistes et de leurs marques de commerce.
    Les gens ont désormais accès, littéralement au creux de leur main, à toute une série d'expériences comme les découvertes musicales, les spectacles en direct et les commentaires diffusés sur les différents médias numériques qui permettent de revivre ces expériences. Dans un contexte où le public voudrait toujours que des billets soient disponibles, notre objectif est donc d'établir, malgré les fluctuations de l'offre et de la demande, ce lien entre l'artiste et ces gens qui lui vouent une affection particulière, de la manière la plus conviviale possible.
    Au moment où les modes de distribution de la musique évoluent à un rythme sans précédent, les gouvernements doivent s'adapter à la réalité du XXIe siècle en amorçant un virage dans leur stratégie à l'égard du secteur de la musique en direct. Les gouvernements ont toujours dirigé une grande partie de leur aide financière vers les créateurs indépendants et la mise en marché de leur musique, en assurant notamment sa diffusion à la radio. Ils ont également ciblé les investissements dans les infrastructures culturelles, comme les salles de spectacle pour les orchestres symphoniques, le ballet et l'opéra, mais n'ont jamais suivi la croissance de l'industrie de la musique commerciale.
    Mike vous a déjà parlé du document « The Next Big Bang » de Music Canada qui décrit on ne peut mieux l'évolution qu'a connue le monde musical dans notre pays. Je dirais que les orientations gouvernementales devraient emprunter cette même vague sur laquelle nous surfons tous, car c'est ensemble que nous pourrons y parvenir. Les décideurs doivent emboîter le pas à l'industrie dans cette optique actualisée, et j'estime que le travail de votre comité est un grand pas dans la bonne direction. Je vous laisse imaginer les progrès exponentiels que nous pourrions réaliser en priorisant ces enjeux avec la collaboration de tous les ordres de gouvernement et de l'ensemble de l'industrie. Vous n'avez qu'à penser à ce qui a été accompli dans l'industrie cinématographique il y a quelques dizaines d'années.
     Les recherches montreront également que l'enseignement de la musique et le dynamisme du secteur en milieu urbain procurent à notre industrie un avantage concurrentiel très important à l'échelle planétaire. Nous savons que nous pouvons compter au Canada sur une scène musicale aussi vaste que diversifiée, mais cet atout n'est pas pleinement exploité. Il est essentiel pour nous tous que nous puissions maintenir notre position sur les marchés mondiaux, et notre industrie musicale peut servir de catalyseur à cette fin.
    Tous les ordres de gouvernement doivent être encouragés à consentir les investissements nécessaires. Pour éviter que le Canada ne perde du terrain sur le plan numérique, il faut absolument miser sur des mesures stratégiques qui favorisent l'enseignement de la musique et le développement durable de la scène musicale partout au pays.
    Les professionnels du secteur technologique qui ont reçu une formation musicale dans leur enfance sont plus créatifs dans leur travail. Nous constatons qu'ils réussissent mieux à régler les problèmes, qu'ils sont plus disposés à collaborer et qu'ils possèdent les compétences non techniques essentielles au sein de l'économie numérique actuelle. Les gouvernements et les organisations comme la nôtre qui appuient le développement d'un milieu culturel riche sont mieux aptes à s'assurer le concours d'entreprises et de travailleurs. Le secteur de la haute technologie offre aux citoyens canadiens des emplois spécialisés bien rémunérés.
    L'enseignement de la musique en bas âge peut être à l'origine d'un intérêt pour les spectacles musicaux qui persistera toute la vie durant. Les écoliers continuent de s'intéresser à la musique une fois adulte, ce qui les aide dans leur carrière professionnelle, même si elle n'a aucun lien avec le monde musical. Il suffit d'apprendre aux musiciens comment mieux se débrouiller en affaires et de montrer aux gens d'affaires comment ils peuvent apprécier la musique et en faire eux-mêmes, et tout le monde s'en portera mieux. Les villes où la scène musicale est dynamique, tant pour les spectateurs que pour les artistes, font en sorte que les meilleurs travailleurs et les gens qui ont à coeur le sort de leur communauté décident de s'y installer.
    D'après moi, toutes les recommandations à considérer devraient s'articuler autour de la nécessité d'éliminer les obstacles à la croissance économique de l'industrie de la musique en direct au Canada. Le cas de l'industrie cinématographique qui en a fait une priorité voilà quelques décennies montre bien que l'on peut grandement faciliter les choses en établissant ainsi un dialogue entre l'industrie et les gouvernements.

  (1220)  

    En se donnant comme principe directeur la volonté de faire en sorte qu'il soit plus facile de présenter des spectacles de musique au Canada, l'objectif visé demeure de faire de notre pays un terrain plus propice pour les amateurs de musique, les artistes et l'industrie.
    Pour un musicien, le contexte doit se prêter à l'apprentissage, au jeu et au perfectionnement. Les politiques qui favorisent l'enseignement de la musique et l'accès aux installations contribuent grandement à instaurer de telles conditions.
    Quant au public, l'accès aux spectacles pour les résidents comme pour les touristes est également primordial.
    Les politiques touchant les visas de travail ou de touriste et, ce qui nous intéresse tout particulièrement, les lois sur la revente des billets figurent parmi les éléments susceptibles de stimuler le dynamisme du milieu.
    Du point de vue des affaires, tant pour les résidents que les non-résidents, nous pourrions nous pencher sur les politiques en matière de création d'emplois. Les infrastructures ont été financées principalement par le secteur privé et nous devons maintenant nous demander comment éliminer les obstacles à la croissance de l'industrie, notamment pour ce qui est des taxes et des permis. Le tourisme culturel et les efforts de marketing que cela exige, comme l'indiquait Mike, sont aussi une pièce importante du puzzle.
    Une démarche de collaboration s'amorce au sein de notre industrie. Nous allons déjà de l'avant, et nous voyons grand. Des premiers cours de musique jusqu'à l'industrie de la tournée, les musiciens doivent miser sur le spectacle plus que jamais auparavant.
    Nous parlons donc d'un cycle de vie complet débutant avec l'enseignement de la musique, une activité primordiale. Nous voyons en outre un rôle à jouer pour le gouvernement fédéral en la matière. Il y a quelques semaines à peine, nous avons d'ailleurs pu discuter avec la ministre Glover dans le contexte des prix Juno.
    Il a été question à cette occasion d'un programme de type ParticipAction pour la musique. À l'origine, ce programme visait à promouvoir l'activité physique. C'est une approche qui est aussi envisageable pour la musique.
    Il faut bien comprendre que la musique a le pouvoir de transformer les choses. Elle ouvre les esprits. Elle nous rend mieux aptes à collaborer et elle change des vies, non seulement parmi les musiciens mais aussi chez ceux qui les écoutent et participent au processus. L'enseignement de la musique n'a pas pour seul but de former de futurs récipiendaires des prix Juno. Les compétences acquises sont tout à fait transférables dans d'autres secteurs.
    Nous pouvons former des amateurs de musique qui en deviendront des consommateurs. Et ce sont ces consommateurs qui achètent les billets. Ils remplissent les salles de spectacle qui procurent de l'emploi à des citoyens de tout le pays. Leur ferveur pour la musique fait en sorte que les spectacles se multiplient. Si le marché musical se dynamise de cette façon, les promoteurs seront incités à prendre le risque de tenir deux spectacles, plutôt qu'un seul. Ils pourront ainsi réaliser certaines économies d'échelle qui leur sont d'un grand secours, comme Riley l'indiquait tout à l'heure.
    Il s'agit en fait pour nous de fidéliser notre clientèle en ajustant quelques politiques et en collaborant à l'élaboration d'une stratégie.
    En terminant, je tiens à féliciter le gouvernement d'avoir commandé cette étude. J'estime que la réussite est tributaire de la collaboration entre tous les ordres de gouvernement, et nous sommes tout à fait disposés à faire notre part à titre de chef de file de l'industrie.

  (1225)  

    Merci beaucoup. Nous passons maintenant aux questions des députés.
    Monsieur Dykstra, vous avez sept minutes.
    Patti, je vais commencer avec vous, car notre président nous rappelle sans cesse de ne pas oublier de poser des questions aux gens qui témoignent par vidéoconférence.
    Je ne voudrais pas que l'on s'éternise sur le sujet, mais il y a une chose qui m'intéresse tout particulièrement. Lorsque nous étions plus jeunes, on nous a amenés à une certaine prise de conscience lorsque nous achetions un album, un vinyle ou un CD. Ainsi, nous nous demandions quelle proportion du prix allait au créateur.
    Il arrive que certains se plaignent des frais additionnels perçus par Ticketmaster lorsqu'ils achètent un billet de spectacle. Cela nous amène à réfléchir à ce virage vers les spectacles en direct et au fait que la promotion et le maintien de ce genre d'événements est primordial pour que les musiciens puissent continuer à vivre de leur art.
    Je me demandais si vous pouviez nous donner une idée de la manière dont ces sommes sont réparties. Je voulais vous poser la question samedi lors de la table ronde des prix Juno, mais pourriez-vous nous indiquer maintenant ce qu'il advient de ces sommes qui transitent notamment via Ticketmaster et ce que reçoit l'artiste au bout du compte?
    Nous voulons surtout qu'il soit bien clair que c'est l'artiste lui-même qui décide du prix du billet. Nous sommes tous au service de l'artiste et cherchons à optimiser l'impact économique de sa carrière dont les retombées se font ensuite ressentir dans toute l'industrie.
    Bien des gens soutiennent que les prix des billets sont trop élevés, mais il faut bien comprendre que les frais de production associés à ces spectacles sont nettement supérieurs à ce qu'ils étaient auparavant. Quant aux frais de service perçus sur la vente d'un billet, ils ne sont qu'un élément du prix global. Dans une perspective à long terme, vous pourrez constater que nous collaborons afin de générer des revenus pour le compte de l'artiste. Que ces sommes soient incluses dans le prix du billet ou dans les frais de service, ou même dans la facture du traiteur, par exemple, ce sont autant de dépenses qui visent à générer un revenu pour l'artiste.
    C'est toujours l'artiste qui se taille la part du lion des revenus d'un spectacle. Je dirais que plus de 90 % des sommes générées par un spectacle vont à l'artiste.
    Merci.
    Vous avez également parlé d'éducation musicale. Tous les témoins qui ont comparu devant nous ont soutenu qu'il fallait intensifier les efforts en la matière. Le problème vient bien sûr du fait que ces questions, tout au moins du point de vue de l'éducation, relèvent des gouvernements provinciaux.
    Quel rôle peut jouer le gouvernement fédéral pour ce qui est de l'éducation? Peut-être que tous nos témoins pourraient répondre brièvement.
    Il pourrait assurer une certaine cohésion. C'est un fil conducteur qui se dégage de nos interventions. Nous en faisons déjà beaucoup à ce chapitre. Il s'agit en fait simplement de veiller à ce que ces efforts se poursuivent. L'organisme de bienfaisance MusiCompte offre déjà un programme, par l'entremise des prix Juno, qui vient combler le vide créé par les coupures dans les programmes d'enseignement en milieu scolaire. On ne demande même pas au gouvernement de financer un programme national en formation musicale; on veut seulement qu'il en favorise le développement dans le cadre du programme d'études, plutôt que de dissuader les efforts en ce sens. C'est dans ce contexte que le concept de ParticipAction m'a beaucoup intéressée. Je crois qu'un effort de réflexion s'impose pour dégager une approche applicable dans tout le pays, ce qui nous permettrait ensuite de faire valoir cet atout pour le Canada sur la scène internationale.

  (1230)  

    Il me reste très peu de temps et j'ai encore une question à poser, mais j'aimerais que vous nous disiez brièvement ce que vous en pensez.
    Je vais essayer d'être bref.
    Je suis d'accord avec Patti. Parfois, la valeur ajoutée ne vient pas tant des sommes qui sont versées par un gouvernement X à une institution Y que des efforts déployés pour opérer un virage culturel et créer une identité nationale fondée sur la musique et son enseignement. Le même phénomène est observable dans le domaine des sports. Nous nous considérons comme un pays de hockey. Partout au Canada, les différents ordres de gouvernement font la promotion de cette image, ce qui fait qu'il y a toujours des garçons et des filles qui veulent s'inscrire pour le hockey dans toutes les régions du pays. Cet attrait est en partie attribuable à la perception que nous avons de nous-mêmes. On pourrait en faire autant avec la musique.
    Permettez-moi d'ajouter quelque chose.
    Je veux faire écho aux commentaires de mes collègues, y compris les derniers témoins du groupe précédent, en soulignant que l'éducation musicale amène aussi le respect. Et ce respect fera en sorte que les gens seront plus hésitants à télécharger de la musique sans payer parce qu'ils sentiront qu'ils font partie intégrante d'un processus, un peu comme pour les cours de mathématiques... On a l'impression que la musique est toujours la première victime des coupures; personne ne songerait à supprimer les mathématiques. C'est une question de respect. C'est une question d'apprentissage à toutes les étapes du processus. Selon moi, c'est ainsi que les choses en viendront à changer tout naturellement.
    Je sais que c'est une question de compétence provinciale, mais le gouvernement fédéral pourrait peut-être imprimer une certaine orientation en s'employant à dégager un consensus plus clair entre les provinces.
    Merci.
    C'est excellent.
    J'aimerais poser brièvement une dernière question en vous invitant tous à y répondre.
    Mike, vous avez parlé du tourisme musical au Canada et des moyens à mettre en oeuvre pour en faire la promotion. Je me demandais donc comment nous pourrions nous y prendre dans le reste du monde. Quel rôle pourrait jouer le gouvernement fédéral dans ce processus?
    À titre d'exemple, nous avons tous entendu parler du succès obtenu par le festival tenu à Austin (Texas). C'est devenu un événement de très grande envergure qui génère des millions de dollars en revenus pour Austin et l'État du Texas. J'aimerais savoir quel message nous devrions, selon vous, envoyer au reste du monde et comment le gouvernement fédéral pourrait jouer un rôle dans ce processus.
    C'est une très bonne question et il n'est pas facile d'y répondre brièvement.
    Je pense que le processus doit s'enclencher...
    Peut-être que notre président vous accordera un peu plus de temps.
    Le processus doit s'enclencher exactement dans l'optique de ce que nous faisons aujourd'hui.
    À Toronto, nous avons pu faire avancer un peu les choses en amorçant le dialogue avec les représentants élus et les fonctionnaires de la ville, et il en a été de même au niveau provincial, surtout avec le ministère du Tourisme de l'Ontario. Le processus a débuté exactement de la manière dont nous procédons ici. Nous avons un échange d'information, une cueillette de données, une mise en commun des points de vue et l'expression d'une volonté de travailler ensemble pour façonner les priorités et les messages et pour créer des programmes et des initiatives qui vont dans le sens des priorités de l'industrie et des citoyens que vous représentez tous.
    Je ne veux pas vraiment dire que le gouvernement fédéral devrait nécessairement investir des millions de dollars dans des campagnes de publicité en Europe, en Asie et dans le reste du monde pour faire valoir que notre pays est une destination privilégiée pour les spectacles musicaux. Mais si nous en faisons une priorité collective, un objectif auquel pourrait contribuer le gouvernement fédéral en raison de son influence omniprésente, je pense que ces choses-là s'intégreront naturellement à bien des initiatives du secteur privé. Il arrive souvent que le rôle du gouvernement se limite à la mise en place d'une voie de transmission que les intervenants de l'industrie privée vont emprunter et animer.
    Permettez-moi de vous donner brièvement un exemple. À Toronto, nous venons tout juste de signer une alliance musicale avec la ville d'Austin. Bien des gens se demandent à quoi sert cette signature de deux maires sur un bout de papier. J'y vois ce canal de transmission dont je vous parlais. Maintenant qu'une alliance officielle a été conclue entre les deux hôtels de ville, c'est à l'entreprise privée d'en tirer parti en se concertant pour mettre en commun les pratiques exemplaires de telle sorte que les artistes puissent présenter leurs spectacles dans une ville comme dans l'autre. Tout cela devient plus facile.

  (1235)  

    Monsieur Tanner, je suis désolé, mais nous devons maintenant passer à M. Stewart qui voudra peut-être en savoir davantage.
    Monsieur Stewart, vous avez la parole.
    Merci à tous nos témoins de leur présence aujourd'hui.
    Notre discussion m'a ramené 20 ans en arrière. Mike et moi parlions justement de ce musicien avec lequel nous avons joué chacun de notre côté dans les années 1990 alors que nous étions très présents sur la scène musicale de Vancouver. Je me souviens avoir présenté l'un de mes premiers spectacles au Commodore avec Barney Bentall. Lorsque j'ai vu l'inscription Ticketmaster sur le talon du billet, je me suis dit: « Ça y est, j'ai réussi! »
    Des voix: Oh, oh!
    M. Kennedy Stewart: Mais pourquoi diable suis-je devenu politicien? Je l'ignore. J'aurais dû rester dans la musique. Mes collègues d'en face semblent d'ailleurs acquiescer.
    Une voix: Vous pouvez toujours y retourner.
    Des voix: Oh, oh!
    M. Kennedy Stewart: C'est un grand plaisir pour moi d'être ici aujourd'hui. Tout cela me rappelle les moyens que nous envisagions pour générer des revenus dans les années 1990. Il fallait un peu de chance pour un jeune groupe comme le nôtre qui voulait enregistrer un CD, car c'était très dispendieux. Nous avons pu obtenir de la FACTOR quelques subventions qui nous ont été d'un grand secours.
    Il semblerait que le modèle ait beaucoup évolué comme en témoigne l'expérience de mon frère qui a participé l'an dernier au festival South by Southwest et qui fait maintenant une tournée en Europe. Ses sources de revenus sont bien différentes de celles que nous envisagions. Mon frère me dit que ce sont les spectacles qui lui rapportent surtout de l'argent, et c'est là où vous intervenez. On a plus ou moins renoncé à tirer des recettes des enregistrements. L'industrie a maintenant besoin d'une aide plus soutenue, et je suis ravi que vous soyez ici pour en discuter.
    J'aimerais en savoir davantage au sujet des festivals et des tournées ainsi que de cette idée plus générale de vouloir changer notre perception de nous-mêmes. J'ai été surpris d'entendre la semaine dernière ou au début de cette semaine un témoin nous dire qu'il avait tout déménagé à Nashville parce que c'est l'endroit où il faut être. Peut-être pourriez-vous nous en dire plus long sur les moyens à prendre pour que le Canada devienne une véritable mecque de la musique en direct et sur les répercussions possibles pour les artistes émergents qui essaient d'assurer leur subsistance.
    Je vous demande une réponse précise, car nous devons produire un rapport pour le Parlement. Si vous avez des idées concrètes quant à la façon d'y parvenir, cela nous serait très utile.
    Au festival North by Northeast, en particulier, il y a environ 1 000 artistes qui se produisent chaque année sur une période d'environ une semaine. Certains sont les vedettes internationales qu'on voit sur nos affiches, mais la plupart d'entre eux sont des artistes émergents. Les artistes émergents en sont à un stade plus précoce de leur carrière. Ils cherchent de la visibilité. Ils veulent faire du réseautage. Il y a des conférences interactives. Mais comme il s'agit d'un grand événement, et comme il y a d'autres festivals d'envergure comme ceux de Sled Island et d'Osheaga, il attire beaucoup l'attention des médias.
    Vous avez raison de dire que le paradigme a énormément changé. Il fut un temps où la tournée n'avait pour but que d'attirer le public pour mousser la vente du produit, soit l'album ou le CD. C'est totalement l'inverse aujourd'hui. Plus personne ne déplace des piles et des piles d'unités de musique enregistrée. Il n'y a plus de Steely Dan, qui s'enferme dans un studio et se contente de vendre des disques.
    Les artistes émergents qui se produisent pendant notre festival en tirent directement avantage, sur le plan de la visibilité dans l'industrie et les médias, en apparaissant à la même programmation que de grands artistes mieux connus. Vous vous rappelez probablement du temps où vous étiez heureux de vous faire offrir une première partie et même de partir en tournée pour profiter de toute l'attention et l'effervescence qui entourent les séries de festivals, d'événements, d'activités de promotion et les sites emblématiques.
    Vous avez parlé de Nashville, mais pensez un peu à Massey Hall, à Toronto. Il n'y a aucune raison pour que cette salle ne soit pas aussi connue dans le monde que l'auditorium Ryman. Elle a une histoire aussi longue et un avenir tout aussi long devant elle.
    Nous créons une culture dans laquelle le monde va venir à nous pour entendre de la musique en direct et profiter de toute cette animation, cette l'énergie, pour vivre des expériences inoubliables.
    Merci.
    Y a-t-il d'autres témoins qui ont des idées sur ce que nous pourrions faire pour que le Canada devienne une sorte de mecque internationale de la musique?
    En fait, nous sommes déjà une mecque. Toronto est numéro trois sur le marché nord-américain des concerts. Le Canada est l'un des plus grands pays de tournée en raison de sa superficie et de sa population de 35 millions d'habitants. Je pense, pour revenir à la question du tourisme, que nous pouvons changer d'angle d'approche.
    Je siège au conseil d'administration de Tourisme Toronto. Au cours des trois dernières années, nous avons inclus la musique à notre programme lorsque nous participons à des foires internationales pour attirer les conventions à Toronto, afin que les gens sachent qu'il y a beaucoup d'activité dans la ville et qu'on peut y faire bien plus que de se promener et d'aller au restaurant. Je pense que nous pouvons changer notre façon de nous présenter à l'étranger aussi.
    Pour ce qui est des tournées, je pense qu'il était temps de commencer à songer à nous doter d'installations à usages multiples. C'est que nos arénas de hockey ne sont pas que des arénas de hockey. Elles sont le coeur de leur ville, ce sont des centres de concerts et de congrès. Chaque ville au Canada qui construit une nouvelle installation connaît une croissance économique. À London, il y a le Centre John Labbatt; à Kelowna, il y a la Place Prospera. Ces installations sont dorénavant le coeur même de leur ville de par leur vocation multiculturelle, puisqu'on peut y tenir toutes sortes d'événements aux que les activités sportives.

  (1240)  

    J'aimerais ajouter une chose. Nous sommes très à l'aise de dire que nous sommes un pays de hockey, mais chaque fois que nous nous définissons par le hockey, nous devrions parler aussi du dynamisme de notre industrie musicale. Cela pourrait faire partie de toutes nos missions commerciales, comme Riley l'a mentionné, pour attirer une attraction ou un artiste quelconque. C'est la clé du succès, comme l'illustrent divers exemples en Amérique et en Europe. Les musiciens et l'industrie entrent dans l'équation.
    Très bien, merci.
    Comment pouvons-nous y arriver? Suffit-il de modifier le contenu de nos publicités? Y a-t-il des mesures qui aideraient, comme de nouveaux crédits fiscaux, de nouvelles bourses ou je ne sais quoi d'autre? Je sais que l'un des plus grands défis est de garder ces sites fonctionnels. Quand je jouais de la musique moi-même, il y en avait partout, mais il n'en reste plus que quelques petits ici et là. Je suis certain que c'est essentiel à la tenue de n'importe quel festival, ils doivent se tenir quelque part. Avez-vous des idées de façons dont on pourrait favoriser cela, ou devrions-nous simplement laisser le marché faire son oeuvre?
    Eh bien, comme Riley l'a dit, le marché fait généralement assez bien son oeuvre. Il ne s'agit pas de réinventer la roue au complet, mais de changer de cap, comme nous l'avons tous dit.
    D'anciens programmes administrés par le gouvernement fédéral n'existent plus. Il y a eu l'étoile filante éphémère du PMTR, le Programme des manifestations touristiques de renom. Il avait un horizon de deux ans, puis s'est terminé aussitôt. Il y a également ce qu'on appelait le programme Routes commerciales administré par Patrimoine canadien. Je crois que PromArt relevait du MAECI, et il y avait aussi Culture.ca. Ils sont tous disparus. Le programme FACTOR existe toujours, et beaucoup d'artistes s'en prévalent; ils ont accès à des prix pour les meilleurs maquettes de nouveaux talents, ainsi qu'à videoFACT.
    Nous croyons que ces programmes sont disparus parce que pour une raison ou une autre, ils n'animaient pas l'industrie comme je viens de le décrire, ils ne mettaient pas l'argent et les outils entre les mains des promoteurs, n'aidaient pas les salles de spectacle, ceux qui gèrent les scènes où l'artiste peut se produire. Je pense que ce serait la façon la plus simple pour le gouvernement fédéral de faire sa part. Il faudrait rétablir le dialogue qui pourrait mener à la création de programmes adaptés et des mécanismes de soutien ciblés.
    Merci beaucoup.

[Français]

    Monsieur Dion, vous avez la parole pour sept minutes.
    Merci, monsieur le président.

[Traduction]

    Monsieur Tanner, monsieur O'Connor, monsieur Craig et madame Tarlton, je ne voudrais pas que vous répétiez le diagnostic que vous avez déjà posé, mais j'aimerais que chacun d'entre vous nomme une, deux, au maximum trois mesures très concrètes que nous pourrions inclure dans notre rapport, dans nos recommandations au gouvernement.
    Vous pouvez peut-être commencer, monsieur Tanner.
    J'aimerais recommander dans ce rapport que le gouvernement entreprenne une étude en collaboration avec l'industrie pour examiner les principaux éléments de l'industrie, les intervenants actuels, afin d'établir quels sont les besoins et quelles seraient les possibilités de collaboration, pour la création de programmes destinés à répondre à ces besoins et leur administration de manière pertinente et adéquate, afin que ceux qui en ont le plus besoin y aient accès sans trop d'obstacles, bien honnêtement.
    Avez-vous des idées de programmes en tête?
    Non, mais je pourrais m'asseoir avec vous après la séance pour vous aider à élaborer un plan de travail.

  (1245)  

    M. O'Connor ou M. Craig.
    Je pense qu'il y a trois éléments. Je ferais écho à Mike, j'aimerais que Music Canada... Les artistes de spectacle du Canada commencent à peine à s'exprimer, à se réunir et à collaborer pour attirer l'attention sur cet aspect qui nous semble fondamental sur la scène économique canadienne. Je pense que ce serait un gros plus que le gouvernement s'efforce d'établir le dialogue avec l'association Music Canada.
    Ensuite, je crois beaucoup en notre infrastructure, aux installations construites au Canada. Ce sont nos cathédrales de la scène musicale, il ne faut pas les oublier. Je sais que l'infrastructure est un grand enjeu lorsque vient le temps de dépenser l'argent du gouvernement fédéral, mais je pense qu'il faut en tenir compte. Il ne faut pas les laisser se détériorer et enlaidir nos villes.
    Que voulez-vous dire par infrastructure?
    Je parle des centres de spectacles que constituent nos arénas, parce que ce sont les principaux endroits à contribuer à notre essor économique.
    Enfin, il y a l'éducation, pour faire changer la perception générale de la musique, pour que les gens prennent conscience de son importance réelle. Les Canadiens sont par nature des pionniers en la matière.
    Merci.
    Madame Tarlton.
    Je vous recommanderais de vous inspirer de l'industrie cinématographique; on a créé tout un élan dans le milieu il y a quelques dizaines d'années quand on a décidé d'en faire un secteur prioritaire. Si les différents ordres de gouvernement voyaient les avantages et l'importance des concerts pour le tissu social et en faisaient une priorité, il serait beaucoup plus facile de discuter de tout ce que nous réclamons, parce que le mur qui nuit au dialogue tomberait.
    Je crois que c'est l'affaire de divers ordres de gouvernement et ministères. Par exemple, pour faciliter la vie à un musicien, il y a toute la question des visas de travail pour entrer au Canada. Lorsqu'un touriste culturel nous vient d'un autre pays, il peut lui falloir de deux à trois mois pour obtenir un permis de visiteur au Canada. Si nous pouvions faciliter l'accès au Canada aux musiciens qui veulent venir jouer ici et aux gens qui veulent venir les écouter, nous aurions de belles années devant nous.
    Vous avez l'impression que ce n'est pas déjà une priorité?
    Nous avons l'impression qu'il y a du positif, mais que si nous nous en faisions un priorité stratégique, nous aurions de 5 à 10 fois plus de succès encore.
    Vous allez nous entendre dire que notre entreprise privée se porte plutôt bien, mais imaginez tout ce que nous pourrions faire de plus s'il n'y avait plus de friction du tout et qu'on faisait vraiment valoir l'idée que la musique fait partie de l'essence même du Canada.
    Merci infiniment.
    Tout commence par l'éducation, et le reste suit.
    Monsieur O'Connor, vous avez lancé l'idée de nous doter d'une stratégie nationale sur les tournées de spectacle. Pouvez-vous nous expliquer un peu ce que vous avez en tête?
    C'est assez général. Je jongle avec l'idée depuis un certain temps. J'aimerais qu'il y ait une forme de reconnaissance des spectacles canadiens en tournée au Canada. Les tournées coûtent très cher. Beaucoup d'artistes ne tirent de revenus que de leurs prestations musicales sur les scènes canadiennes, et ils ne devraient pas dépenser tout leur argent à financer la tournée, mais plutôt trouver des moyens de bâtir leur capital afin de pouvoir aller se produire à l'étranger et d'avoir accès à un marché plus vaste.
    Je pense que la solution passe par l'éducation. Il y a une multitude d'ateliers sur l'entrepreneuriat au Canada, qui essaient d'enseigner aux musiciens les compétences dont ils ont besoin pour réussir financièrement au Canada. Je pense aussi qu'il pourrait peut-être y avoir des incitatifs fiscaux pour les tournées de spectacles dans un grand nombre de villes canadiennes. Il devrait y avoir une forme d'incitatif pour que les artistes en tournée n'aient pas à payer les mêmes frais de transport que tout le monde. Je pense que ce serait encourageant.
    Par exemple, à une certaine époque, en Ontario, les musiciens canadiens avaient droit à des avantages fiscaux pour leurs prestations en direct. Ils ont disparu avec la restructuration de la TVH. Il serait donc encourageant de nous doter d'une quelconque stratégie sur les tournées de spectacles. Je pense que c'est aussi lié aux endroits où les artistes aiment jouer: les centres de spectacles. Si l'on pouvait favoriser la technologie dans ces salles, on encouragerait du même coup divers artistes internationaux à venir enregistrer chez nous, à y tourner des films, etc. Nous deviendrons une mecque attirante à l'échelle internationale.
    C'est un peu ce à quoi je pense quand je parle d'une stratégie sur les tournées de spectacles.

  (1250)  

    Merci beaucoup.
    Merci.
    Nous allons maintenant donner sept minutes à M. Falk.
    Je remercie tous les membres de ce groupe de témoigner ici cet après-midi. Je l'apprécie.
    Par vocation, je suis dans le milieu du gravier et des agrégats. J'ai donc besoin d'une ressource. Je dois la trouver quelque part et m'assurer d'y avoir accès. Je dois la protéger. Je dois l'exploiter. Vous êtes en affaires. Votre ressource est l'artiste et le musicien. Nous avons entendu dire pendant notre étude que selon votre ressource, il n'y aurait pas d'argent. Que répondez-vous à cela?
    Je peux tenter une réponse.
    Quand nous négocions, pour organiser un festival et en élaborer la programmation, nous transférons l'argent que nous tirons de la vente de billets — Patti en a parlé — par nos partenariats d'affaires et par les mécanismes d'aide gouvernementaux directement aux artistes. Les artistes sont payés pour donner leurs spectacles. Ils tirent aussi avantage de tous les bénéfices qui découlent de leur présence sur scène devant un grand public, dans un grand événement.
    Nous parlons avec les artistes. Nous leur parlons tout le temps très directement. Plus il y a de spectacles, de dates, plus il est facile de planifier la tournée. On ne peut pas venir de la Colombie-Britannique à Toronto pour un seul spectacle. Il faut constituer un réseau. On ne peut pas venir des États-Unis pour donner une seule prestation, puis rentrer chez soi. Il est très important de dynamiser tout l'écosystème au pays pour en développer chaque composante et pour les artistes qui s'y produisent. Comme nous l'avons tous souligné, ce dynamisme rayonne sur beaucoup d'autres pans de l'industrie.
    Allez-y, monsieur O'Connor ou monsieur Craig.
    Je ne suis pas certain d'avoir bien compris la question. Disiez-vous qu'il n'y avait pas d'argent pour les artistes?
    C'est un thème récurrent de notre étude, on nous dit qu'il n'y en a pas beaucoup. Nous avons entendu le témoignage de certains artistes qui ont quelques chansons connues, mais qui vivent dans le sous-sol de leur belle-mère avec leurs quatre enfants, simplement parce qu'ils ne peuvent pas gagner suffisamment leur vie dans l'industrie pour s'offrir un mode de vie décent.
    J'aimerais faire une certaine distinction pour expliquer où il peut y avoir un écart, parce que quand un artiste se produit sur scène, il est payé. Il n'y a pas un artiste qui travaille avec moi qui ne se fait payer, je peux vous le garantir. C'est peut-être le cas du compositeur qui n'interprète pas sa musique. Celui-là ne profite peut-être que des enregistrements, et il y a probablement des problèmes à cela.
    Il y a de l'argent. Tous les artistes qui passent par l'une de nos organisations, qui jouent dans des festivals ou participent à des tournées au Canada, dans les petits clubs comme dans les grands stades, sont payés. Il faut agrandir le réseau, en favoriser l'expansion, plutôt que de choisir ici et là en fonction du coût.
    Il y a une tarte à partager, et je pense qu'il faut faire une distinction entre l'artiste qui ne fait que composer de la musique et celui qui va la jouer sur scène. Ce sont deux mondes différents.
    M. Dion vous a posé des questions très pointues sur les recommandations que vous feriez, et vous en avez donné quelques-unes. Je vous en remercie.
    Il y a une autre question que j'aimerais vous poser à tous, sur la façon dont le gouvernement peut avoir un effet accélérateur sur l'industrie. Est-ce que nous l'exerçons au bon moment et au bon endroit, à votre avis?
    C'est la première fois que je témoigne devant un comité gouvernemental. Nous sommes actifs depuis quelques années à l'échelle provinciale, mais c'est nouveau.
    Le milieu de la scène ne sonne pas l'alarme, il ne demande pas d'aide. Je suis dans le milieu depuis 1977 et je n'ai jamais demandé un sou à une source gouvernementale, donc ce n'est pas vraiment ce que je cherche. J'essaie simplement d'établir le dialogue.
    J'appuie tout ce que Patti-Anne vous a dit, et j'ai mentionné dans la brève allocution que j'ai présentée que le modèle qui s'est créé dans l'industrie cinématographique au Canada connaît énormément de succès. Il a créé du vrai travail, des emplois concrets dans des studios, du travail contractuel, il encourage même les artistes sur le plan artistique, afin que les techniciens deviennent de véritables agents de changement technologique, compte tenu de tout ce qui se passe grâce à la technologie, pour les effets spéciaux et tout le reste. La même chose est possible dans l'industrie de la musique. Je souhaite ouvrir la porte à cela, que nous créions un environnement propice.

  (1255)  

    Les temps changent, et l'industrie des concerts n'est pas si différente des autres, elle suit la règle des 80-20: les 20% qui sont au sommet génèrent 80 % des revenus. Mais jusqu'ici, les revenus que gagnaient les autres 80 % leur permettaient de bien vivre; les musiciens qui touchaient 20 % des revenus pouvaient avoir un bon niveau de vie, une vie de famille de la classe moyenne, si l'on peut dire. Encore une fois, leurs revenus d'enregistrement comptaient pour beaucoup.
    Comment peut-on subvenir aujourd'hui aux besoins des 80 % de musiciens qui font 20 % de l'argent? Comment stimuler leur dynamisme pour qu'ils courent le risque de rester en musique, parce qu'il y en a beaucoup qui décident de se trouver un emploi de jour et de ne jouer que pendant leurs temps libres, parce qu'ils n'arrivent tout simplement pas à en vivre.
    Oui, et avez-vous une solution à proposer?
    Je pense que c'est justement ce dont nous sommes en train de parler. Nous pourrions mettre l'accent sur ce que nous pouvons faire pour que ces artistes puissent se produire un peu partout en tournée. Nous parlons de construire un écosystème convivial et sans frictions, qui leur permettrait de partir en tournée de Vancouver à Terre-Neuve ou même de l'île de Vancouver à Terre-Neuve, pour qu'ils puissent poursuivre une carrière viable. Plus il y a d'endroits où ils peuvent jouer, plus ils vendent de billets et plus ils auront les moyens de rester en tournée.
    Pour que ce soit bien clair, à l'heure actuelle, vous n'avez pas vraiment de mal à trouver des artistes et des musiciens pour garnir votre programmation.
    J'organise 1 200 spectacles par année.
    Nous permettons à 1 000 groupes de monter sur la scène en une semaine.
    D'accord, très bien.
    Merci, monsieur le président.
    Merci beaucoup. Je remercie tous nos témoins d'être venus ici aujourd'hui contribuer à notre étude. C'est très apprécié. Si vous avez d'autres idées à nous soumettre, n'hésitez pas à nous les envoyer par écrit.
    Nous allons interrompre brièvement nos travaux avant de poursuivre nos délibérations à huis clos pour nous pencher sur les travaux du comité.
    [La séance se poursuit à huis clos.]
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