Passer au contenu
Début du contenu

CHPC Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain
Passer à la navigation dans le document Passer au contenu du document






Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent du patrimoine canadien


NUMÉRO 019 
l
2e SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 29 avril 2014

[Enregistrement électronique]

  (1100)  

[Traduction]

    Bonjour à tous. Je déclare ouverte la 19e séance du Comité permanent du patrimoine canadien.
    Nous examinons actuellement l'industrie canadienne de la musique. Aujourd'hui, pour la première heure, nous allons entendre quelques témoins: Brian Hetherman, président de Cerberus Management and Consulting; J. Serge Sasseville, vice-président des Affaires corporatives et institutionnelles de Québecor Média, ainsi que son collègue Christian Breton, vice-président du Secteur Musique, Groupe Archambault. Enfin, nous recevons Steve Jordan, fondateur et directeur exécutif du Prix de musique Polaris.
    Les témoins des trois groupes auront huit minutes chacun pour leur exposé. Nous allons commencer par M. Hetherman.
    La parole est à vous.
    Pour commencer, je tiens à vous remercier de me permettre de m'exprimer devant le comité aujourd'hui.
    Au cours des 28 années que j'ai passées dans l'industrie de la musique, j'ai eu la chance de voir l'industrie sous bien des angles. J'ai passé 12 ans à travailler pour la grande maison de disque Universal Music. J'ai également passé 12 ans à la tête de ma propre maison de disque indépendante, Curve Music, et je possède ma propre maison de gérance d'artistes, Cerberus Artist Management.
    J'ai également été le premier directeur exécutif du Radio Starmaker Fund à ses débuts, en 2001. J'ai ainsi participé à la création du fonds, ainsi qu'à son administration les premières années. Plus récemment, j'ai été vice-président et gestionnaire général de FACTOR, la Foundation to Assist Canadian Talent on Recordings, mais je suis depuis retourné à mes propres entreprises.
    Je suis donc très bien placé pour vous parler en long et en large de la nécessité de financer les arts et la culture, compte tenu du climat de plus en plus difficile dans lequel évoluent les artistes et les entreprises du domaine de la musique. Je serai bien sûr heureux de répondre à toutes les questions que vous voudrez me poser, mais je juge essentiel de vous présenter un peu plus en détail la conjoncture difficile de l'industrie de la musique, particulièrement dans le paysage numérique actuel.
    Bien que l'apparition de services payants de webdiffusion de la musique semble limiter un peu le problème des téléchargements illégaux et rendre la musique accessible à bien de gens de façon immédiate, elle crée divers autres enjeux, dont le principal est de faire chuter la valeur d'une chanson et d'un enregistrement à quelques sous à peine.
    Lorsque les grandes maisons de disque ont commencé à élargir l'accès à leurs catalogues et aux nouveautés aux services de diffusion en continu comme Pandora et Spotify, elles ont négocié d'énormes avances, de l'ordre de millions de dollars, en leur faveur. Bien que ces grandes maisons de disque génèrent toujours le même profit net par écoute, contrairement à une maison de disques ou à un artiste indépendant, ni les maisons de disque indépendantes, ni les artistes ont vu la couleur de l'argent promis par les services de diffusion et dépendent uniquement des maigres paiements par flux de diffusion.
    Par exemple, un artiste avec qui j'ai déjà travaillé, du nom de Peter Katz, qui avait signé des contrats à la fois avec ma maison de disques et avec ma maison de gérance d'artistes de 2007 à 2011, m'a montré ses états financiers pour les six derniers mois de diffusion de son plus récent album, Still Mind Still. Entre septembre 2013 et février 2014, l'album de Peter Katz a été écouté 7 794 fois au moyen de divers services de diffusion. Il a reçu un grand total de 47,96 $ pour cela. Compte tenu du fait que l'album comporte 11 chansons, Peter a été payé 0,0006 ¢ par chanson de son album ou 0,006 ¢ pour l'album au complet. Comparez cela, si vous le voulez, aux 9,99 $ qu'il obtiendrait pour un album ou aux 0,99 ¢ qu'il obtiendrait pour une chanson sur iTunes.
    Pour ce qui est de l'édition, comme Peter est compositeur, il a écrit toutes les chansons de l'album. Tous ridicules ces chiffres soient-ils pour Peter, le compositeur qui n'aurait écrit que l'une des chansons de cet album n'aurait obtenu que 0,00006 ¢ du service de webdiffusion en droits d'auteur sur cet album. Vous comprenez bien que non seulement il est extrêmement difficile pour un auteur-compositeur-interprète de gagner sa vie de sa musique, mais que c'est pratiquement impossible pour la personne qui n'est que compositrice. À 0,006 ¢ par album, il faudrait diffuser des millions d'albums ne serait-ce que pour gagner sa vie décemment, faute de quoi on ne peut tout simplement pas vivre de sa musique de nos jours, et c'est la réalité de la plupart des artistes.
    On peut également prendre l'exemple de David Lowery, du groupe américain Cracker, qui a publié ouvertement sur sa page Facebook le montant des redevances qu'il a reçu de la webradio Pandora pour ses chansons. Il a reçu 16,89 $ pour plus d'un million de diffusions de la chanson phare du groupe de 1991, « Low », au cours des trois derniers mois de 2012. Lowery ne possède que 40 % des droits d'auteur de cette chanson, donc si l'on tient compte des autres auteurs, on obtient un grand total de 42,23 $ payés par Pandora à l'ensemble des auteurs. C'est gênant.
    Il faut creuser la question et essayer d'adopter une loi afin de veiller à ce que les artistes, les maisons de disque et les compositeurs soient payés équitablement pour l'utilisation de leur musique par des services numériques. C'est d'autant plus urgent que ces services font probablement déjà des millions de dollars de profits, ou cela ne saurait tarder.

  (1105)  

    Comme les artistes ne peuvent pratiquement plus compter sur les ventes de musique pour gagner leur vie, les tournées deviennent l'une des rares façons de faire progresser leur carrière et d'en vivre. Il est essentiel d'appuyer les tournées nationales et internationales. En fait, il y a très peu de spectacles qui permettent aux artistes de gagner leur vie grâce à une tournée au Canada seulement.
    Le plan, pour un artiste en tournée, doit comprendre tous les pays et territoires du monde, il doit en cibler le plus possible pour se bâtir une carrière viable, axée sur les tournées et la vente de musique. Les campagnes de promotion internationales et les tournées coûtent extrêmement cher. De même, si les coûts d'enregistrement diminuent, les coûts liés à la promotion des albums ne diminuent pas. N'importe quelle maison de disque ou artiste indépendant vous diront qu'ils doivent considérer le monde entier comme leur marché cible et doivent prévoir des tournées et des campagnes de promotion pour eux-mêmes et leur carrière à l'échelle internationale.
    Il faut trouver de nouveaux modèles de financement pour que les artistes et les maisons de disque puissent faire la promotion de leurs produits, au Canada comme à l'étranger. Il faut également bonifier les fonds destinés aux artistes prêts à exporter leur travail pour les aider à faire des tournées internationales. Enfin, il est essentiel de mettre à la disposition des missions commerciales culturelles du financement pour les artistes et les entreprises, afin qu'ils puissent présenter leur matériel à l'étranger.
    Merci.
    Très bien, merci beaucoup.
    Nous allons maintenant passer à nos amis de Québecor.
    Vous avez huit minutes.

[Français]

    Mesdames et messieurs les parlementaires, distingués invités, Québecor Média tient à remercier les membres du comité de lui offrir l'occasion de partager son expérience et d'échanger sur les enjeux touchant le financement de l'industrie canadienne de la musique.
    Je m'appelle Serge Sasseville et je suis vice-président principal des Affaires corporatives et institutionnelles de Québecor Média. J'ai aussi eu le privilège d'occuper auparavant le poste de président du secteur de la musique au sein du Groupe Archambault, où j'avais comme responsabilité, notamment, la supervision de l'ensemble des activités du secteur musical.
     Je suis accompagné de mon collègue Christian Breton, qui est vice-président du secteur de la musique du Groupe Archambault.
    Qu'il s'agisse de Québecor ou d'Archambault, notre passion pour la musique ne date pas d'hier.
    Québecor a fait ses premiers pas dans le domaine de la musique en 1976 en achetant la compagnie Distribution Trans-Canada, un des plus importants distributeurs de disques au Québec, qui avait commencé ses activités en 1958. Puis, en 1986, Québecor a fait son entrée dans la production et la vente au détail de disques en achetant Kébec-Disque. En 1995, notre présence dans le domaine musical a pris une nouvelle dimension avec l'acquisition d'Archambault.
    Fondée en 1896, l'entreprise Archambault se spécialisait à l'origine dans la vente de partitions et d'instruments de musique. Au fil des décennies, elle a étendu ses activités pour y inclure la production, la distribution et la vente de disques, entre autres produits culturels.
    C'est le regroupement de toutes ces forces qui fait aujourd'hui de Québecor Média et Groupe Archambault le plus important distributeur de disques indépendant au Canada, par l'entremise de Distribution Select. Cela en fait aussi le plus important détaillant de musique dans l'Est du Canada, par l'entremise des magasins Archambault et de leurs sites de vente en ligne. Cela en fait aussi la plus importante maison de disques au Québec, en l'occurrence Musicor, qui regroupe des artistes tels que Marie-Mai, Kaïn, Bruno Pelletier, Marie-Élaine Thibert et Francis Cabrel. Cela en fait aussi un joueur important en matière de production de spectacles musicaux de tous genres, par l'entremise de Musicor Spectacles.
     Enfin, nous ne pouvons passer sous silence le rôle que joue notre diffuseur, TVA, pour faire connaître de nouveaux artistes et faire valoir le patrimoine musical québécois en diffusant des émissions comme Star Académie et La Voix, dont la finale, plus tôt ce mois-ci, a attiré plus de 2,7 millions de téléspectateurs et a permis de recueillir une part de marché de plus de 60 %.
    Bref, Québecor Média est aujourd'hui un joueur incontournable du secteur musical au Canada.
    Malgré tous les succès remportés par nos artistes, il n'en demeure pas moins que l'industrie de la musique, que ce soit au Québec ou, plus généralement, au Canada, reste grandement dépendante de l'apport de fonds publics.
    À cet égard, nous tenons d'ailleurs à saluer la décision de l'actuel gouvernement de rendre permanentes les sommes attribuées au Fonds de la musique du Canada. Comme je vous le disais, ces sommes sont malheureusement encore essentielles au maintien de l'industrie musicale canadienne. Je dis bien « malheureusement », parce que le souhait de Québecor est que l'industrie musicale canadienne arrive un jour à se débarrasser des béquilles de l'aide publique et à former des joueurs assez solides pour voler de leurs propres ailes et faire concurrence aux joueurs étrangers. Hélas, il semble que ce jour ne soit pas encore arrivé.
    Au contraire, les joueurs canadiens doivent désormais faire face à des joueurs mondiaux qui sont plus puissants que jamais. Bien sûr, je fais ici allusion à Apple et aux autres plateformes internationales de vente numérique qui occupent de plus en plus de place dans le paysage musical canadien, créant de nouveaux enjeux pour les acteurs locaux.
    L'enjeu le plus criant, selon nous, est la discrimination en matière de prix dont sont victimes les détaillants de musique canadiens face à des détaillants comme iTunes, du fait que ces derniers ne sont pas tenus de facturer la taxe de vente. Prenons l'exemple d'une artiste comme Marie-Mai, dont les albums sont produits par notre maison de disques, Musicor, distribués par notre entreprise Distribution Select et vendus notamment dans nos magasins Archambault, ceux en brique et en béton. Si un Canadien souhaite se procurer une pièce de Marie-Mai, il a le choix de l'acheter sur iTunes au coût de 1,29 $, sans taxes, ou sur un site canadien, par exemple notre site archambault.ca, pour 1,29 $ plus les taxes, c'est-à-dire 1,48 $. On parle ici de 19 ¢ de plus. De toute évidence, il s'agit d'une concurrence artificiellement tendancieuse au détriment des détaillants canadiens, tant numériques que physiques.
    À terme, dans un marché qui est hautement concurrentiel et où les marges sont infimes, un tel désavantage ne peut que mener à la disparition des détaillants canadiens et à la consolidation de l'industrie autour de joueurs étrangers, avec toutes les pertes d'emplois et de revenus fiscaux que cela risque d'entraîner.
    Au-delà des répercussions financières, il est impensable pour Québecor Média de laisser la vente de musique filer dans des mains étrangères uniquement, et ce, pour la simple et bonne raison qu'à notre avis, les détaillants canadiens et québécois seront toujours plus en mesure de mettre en valeur nos artistes que les détaillants d'autres pays. En effet, ces derniers n'ont pas nécessairement les mêmes priorités ou les mêmes intérêts.

  (1110)  

    Le jour où le Canada perdra complètement le contrôle des plateformes qui diffusent de la musique canadienne, notre pays perdra aussi le contrôle du positionnement de sa musique et de ses artistes. Il ne faut pas être devin pour comprendre les conséquences catastrophiques qui en découleront pour nos artistes et pour une industrie qui, selon une étude de PricewaterhouseCoopers commandée par Music Canada, fait vivre environ 4 000 personnes et génère des revenus annuels de près de 400 millions de dollars.
    Par ailleurs, c'est une chose pour un artiste canadien que ses oeuvres soient disponibles sur iTunes ou sur toute autre plateforme numérique, mais encore faut-il que ses albums occupent la place requise sur les pages d'accueil pour que les consommateurs les achètent.
    L'accès à l'espace promotionnel sur les plateformes numériques est très difficile à obtenir. Malheureusement, la promotion sur ces plateformes ne fait actuellement l'objet d'aucun programme d'aide. Il est donc grandement temps, selon nous, que les programmes d'aide publique soient adaptés pour faire face à la réalité de la promotion dans l'ère numérique.
    Aussi, nous aimerions voir des sommes être débloquées pour permettre de numériser les plus vieux enregistrements de notre patrimoine musical, comme on le fait actuellement pour la littérature et le cinéma, de façon à rendre ces oeuvres accessibles sur les nouvelles plateformes numériques, assurant ainsi qu'elles seront disponibles pour les générations à venir.
    En terminant, permettez-nous d'émettre un dernier commentaire plus particulier, à propos cette fois du programme VEM de Patrimoine canadien.
    Nous déplorons, au nom de plusieurs artistes et producteurs qui nous en ont fait part, le fait que les artistes dont la maison de disques touche des sommes du VEM ne soient pas admissibles au programme d'aide à la tournée de Musicaction, même lorsque leurs spectacles ne sont pas produits par leur maison de disques.
    Pour plusieurs artistes, qu'ils soient déjà bien établis ou qu'ils fassent partie de la relève, c'est un choix déchirant que de devoir choisir entre recevoir de l'argent pour faire des spectacles et signer avec une maison de disques plus importante susceptible d'investir davantage de ressources dans leurs albums. Cette situation a un effet particulièrement plus pervers pour les artistes de la relève, qui se voient cantonnés dans des maisons de disques plus petites, alors qu'on devrait plutôt leur permettre d'atteindre les ligues majeures.
    En conclusion, nous croyons que la question principale à laquelle le comité doit répondre est la suivante: comment doit-on structurer l'aide gouvernementale afin de permettre aux acteurs de l'industrie de la musique de tirer leur épingle du jeu sur un échiquier mondial numérique de plus en plus contrôlé par des géants internationaux?
    Les suggestions que nous vous avons humblement présentées aujourd'hui vont dans ce sens.
    Je vous remercie de votre attention. Nous sommes disponibles pour répondre à vos questions.

  (1115)  

    Je vous remercie.

[Traduction]

    Écoutons maintenant M. Jordan, qui représente le Prix de musique Polaris. Vous avez huit minutes.
    La parole est à vous.
    Je vous remercie beaucoup de m'avoir invité à témoigner au nom du Prix de musique Polaris.
    Je sais qu'il est écrit dans les documents préparatoires de ne pas passer trop de temps à nous décrire et de passer directement au vif du sujet, mais si vous me le permettez, j'aimerais mentionner ceci:
    Nous sommes une organisation sans but lucratif qui honore, célèbre et récompense chaque année la créativité et la diversité de la production phonographique canadienne, en valorisant et en promouvant des albums faisant preuve d'une grande intégrité artistique, et ce, sans considération pour le genre musical, l'entourage professionnel ou les chiffres de vente. La sélection est confiée à un jury composé de plus de 200 critiques de musique triés sur le volet. On trouve parmi les gagnants des éditions précédentes Arcade Fire, Feist, Caribou, Karkwa, Patrick Watson, Godspeed You! Black Emperor et Owen Pallett. Bien d'autres artistes ont été mis en nomination, dont Metric, Neil Young, Ron Sexsmith, Tegan and Sara, K'naan, Sarah Harmer et Kathleen Edwards. Je voulais lancer quelques autres noms d'artistes, comme les deux autres témoins avant moi.
    Notre jury comprend des représentants des médias de toutes les régions du Canada, mais personne qui gagne sa vie en tant que musicien ou du travail de musiciens. Nous nous sommes inspirés à la fois du Giller Prize, pour les oeuvres littéraires du Canada, et du Barclaycard Mercury Prize, au Royaume-Uni, pour l'album de l'année. Il s'agit d'un prix récompensant strictement la qualité du principal travail artistique de l'oeuvre phonoartistique: l'album. Nous en sommes à notre neuvième année.
    Nous sommes basés à Toronto, où notre gala annuel se tient chaque mois de septembre. La saison Polaris commence en juin, où une liste de 40 titres est publiée. La courte liste des 10 albums retenus est annoncée en juillet. Nous choisissons 11 critiques de notre jury élargi pour choisir le gagnant le soir de notre gala de septembre. Il se tiendra cette année le 22 septembre, et vous y êtes tous invités.
    Notre prix est qualifié de « prestigieux » par le New York Times et la BBC. Le Chicago Tribune considère notre prix le « plus grand honneur de la musique au Canada ». Le Globe and Mail affirme que le Prix Polaris « compte sur la scène internationale ». Mais tout le crédit que Polaris en retire doit vraiment être rendu aux artistes eux-mêmes. Ils créent des oeuvres artistiques de calibre mondial.
    Vous avez déjà entendu beaucoup de choses dans le cadre de cet examen, et je suis sûr que vous allez entendre bien d'autres voix vous dire à quel point nos artistes connaissent du succès commercial dans le monde. Polaris est avant tout là pour célébrer la qualité de nos oeuvres musicales d'une manière qui attire l'attention du monde entier. Les Canadiens ont la réputation d'innover et d'explorer dans presque tous les genres musicaux. Je pense à des finalistes comme Drake et son producteur, Noah 40 Shebib, en hip hop, à Cirkut, en musique pop, ou encore à Owen Pallett, le premier récipiendaire du Prix Polaris, et à un autre gagnant, Will Butler d'Arcade Fire, qui a récemment été mis en nomination pour la meilleure trame sonore originale aux Oscars. Le Canada est connu pour la beauté naturelle de ses paysages et ses ressources, pour ses acteurs, ses auteurs, sa politesse et maintenant plus que jamais, pour l'excellence de ses musiciens, partout dans le monde.
    Nous croyons que c'est en partie grâce à notre appui politique de longue date à la culture musicale et aux musiciens, directement et indirectement, de sources comme FACTOR, le Conseil du Canada, le Fonds RadioStar et divers mécanismes d'aide aux talents que nos diffuseurs doivent adopter sous le régime du CRTC, sans mentionner les exigences de contenu canadien. C'est grâce à tout cela que nos artistes peuvent survivre à côté du mammouth culturel qui vit au sud de notre frontière et créer des oeuvres inspirantes qui survivent à l'épreuve du temps.
    Ce n'est un secret pour personne et d'autres l'ont mentionné avant moi: les ventes d'albums diminuent. Pourtant, l'album est toujours la pierre angulaire de la présence publique et commerciale de la plupart des artistes. L'album est le noyau de toutes les autres activités qui permettent à nos musiciens de gagner leur vie: les tournées, les produits dérivés, les subventions, l'édition, les redevances et les droits d'auteurs. C'est pourquoi Polaris choisit de célébrer l'album avant tout. C'est le summum de la créativité phonoartistique et ce dans quoi les artistes s'investissent généralement le plus.
    Il y a beaucoup d'effets positifs à figurer à la liste de présélection ou à la liste des finalistes, dont le plus évident est la hausse impressionnante des ventes et des écoutes numériques, bien souvent des mois après que les activités de promotion entourant le lancement de l'album soient terminées. Les artistes en retirent une visibilité accrue dans les médias internationaux, des contrats plus payants et plus d'offres de publicité. Mais ce n'est pas seulement pour ces avantages que nous estimons important qu'il y ait des célébrations de la musique comme la nôtre dans l'écosystème musical. Les célébrations et les prix sont source de motivation pour les artistes, ils stimulent la production artistique elle-même. À notre grande surprise et pour notre plus grand plaisir, nous entendons de temps en temps des artistes ou leurs gérants dire qu'ils se sont forcés pour produire de meilleurs albums dans l'espoir d'obtenir une nomination au Prix Polaris. En cette époque où les ventes fondent, nous sommes une source de motivation pour que les artistes enregistrent leurs oeuvres. Nous favorisons l'innovation et l'excellence.
    Nous croyons que les politiques et les programmes gouvernementaux actuels relatifs à l'industrie musicale canadienne permettent à nos artistes d'exceller dans l'art d'être eux-mêmes et de raconter des histoires canadiennes qui font leur bout de chemin dans le monde entier. Beaucoup d'articles positifs ont été publiés dans les médias américains et britanniques sur Polaris. J'aimerais résumer deux idées qui reviennent souvent: 1- Le Canada produit de la musique extraordinaire; 2- L'appui du gouvernement canadien à la musique est incroyable. Pour nous, le lien de cause à effet est tangible: un financement accessible et le fait d'oser appuyer les artistes les plus audacieux font de nous des leaders de la musique dans le monde. Cela crée véritablement la perception que le Canada est un chef de file dans le monde de la musique.

  (1120)  

    S'il y a une observation que nous pouvons faire, c'est que notre prix, comme d'autres célébrations et prix de la musique, sont jugés sur la base de critères un peu différents lorsque vient le temps de les financer. On a souvent tendance à nous coincer dans d'autres catégories de développement comme les conférences et les festivals, et nous ne sommes pas toujours admissibles à d'autres fonds parce que nous ne sommes pas titulaires de droits. Il y aurait lieu de revoir les critères afin d'établir un barème différent et plus pertinent pour les prix et les célébrations de la musique, ce qui serait plus efficace dans notre catégorie.
    J'aimerais également vous glisser un mot sur l'éducation musicale. Nous coordonnons toutes nos activités de bienfaisance avec l'organisme MusiCompte, qui donne des instruments aux écoles qui n'ont plus les moyens d'en acheter pour leurs élèves. Nous croyons que l'excellence que nous venons de décrire commence par une éducation musicale dès les premières années de la vie. Ses avantages sur le développement de l'enfant sont bien documentés, mais nous croyons qu'il ne faudrait pas négliger le développement de la musique canadienne. Nous appuyons vivement tout effort visant à nous doter d'une stratégie musicale nationale au coeur de laquelle on trouverait l'éducation musicale.
    Encore une fois, je vous remercie beaucoup d'avoir invité Polaris à se joindre à cette discussion, avec toutes les autres personnes ici présentes, et c'est avec plaisir que je vais répondre à toutes vos questions.
    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant passer aux questions. Nous entendrons d'abord M. Boughen pendant sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie tous les témoins de nous consacrer un peu de temps de leur horaire chargé. Nous vous en sommes reconnaissants.
    J'aurais besoin d'une clarification. Brian, je vous ai entendu, vous et Steve, dire deux choses différentes. Vous avez d'abord dit que l'on ne pouvait pas vivre de la musique, alors que Steve nous a dit qu'on pouvait gagner sa vie dans l'industrie de la musique.
    Qu'en est-il?
    Il y a bien sûr une certaine élite parmi les artistes qui réussit à gagner sa vie dans l'industrie de la musique, mais la réalité est telle que probablement 80 % des artistes ou plus n'arrivent pas à vivre seulement de la musique. Ils tirent des revenus secondaires de la location de chalets, par exemple, qui n'a rien à voir avec la musique. Certains travaillent même à temps partiel. En fait, la plupart des artistes que je connais — et vous pouvez intervenir quand bon vous semble, Steve — ont un emploi à temps partiel qui les empêche de bâtir convenablement leur carrière.
    Je peux peut-être essayer de préciser une chose. Je crois qu'il est pratiquement impossible de vivre de la vente de disques. J'essayais d'expliquer que les albums sont toujours le coeur du travail de l'artiste, mais la tendance s'est renversée.
    Je vais vous donner le meilleur exemple auquel je puisse penser. Les Beatles ont un moment donné cessé d'offrir des spectacles pour se concentrer sur l'enregistrement de disques. Évidemment, c'est peut-être un mauvais exemple, puisqu'il s'agit du groupe le plus populaire de l'histoire, mais ils pouvaient se permettre de le faire. On ne pourrait plus se le permettre de nos jours. On ne peut plus se permettre d'arrêter les tournées et se contenter d'enregistrer des disques, parce que l'argent qu'on en retire ne représente presque plus rien.
    À qui rapportent les disques alors? On paie pour en acheter. Où va cet argent s'il ne parvient pas aux artistes?
    Ce n'est pas que l'argent ne parvient pas à l'artiste. Cependant, les ventes de disques ont chuté à un point tel au profit des services de diffusion en ligne, qui sont de plus en plus populaires, qu'ils ne rapportent plus que quelques sous, comme Brian nous l'a expliqué.
    Je souligne qu'il existe des services au Canada comme ceux de Rdio et Deezer. Je ne connais pas en détail tout ce qu'ils ont à offrir, mais je présume — et il serait peut-être bon d'étudier la question plus en profondeur — que leurs paiements sont de cet ordre.
    Les redevances qu'on reçoit d'une maison de disques pour la vente de disques ou ce qu'on peut tirer d'une piste vendue sur iTunes ou d'un CD, puisque les CD font toujours partie du portrait, il faut le mentionner, restent beaucoup plus élevées que ce qu'on peut obtenir d'une webradio, mais les rétributions associées à ce modèle de diffusion, que les consommateurs utilisent de plus en plus à volonté, ne correspondent pas à ce que l'artiste obtiendrait de la vente de disques.

  (1125)  

    Si vous voulez que je vous explique le paiement en détail, il y a deux écoles de pensée. Selon la première, l'artiste signe un contrat avec une grande maison de disques. Sans entrer dans tous les détails financiers du contrat de départ, la formule de paiement est assez simple.
    Lorsque l'artiste récupère de l'argent, il touche peut-être 25 % des redevances, selon l'entente. Prenons l'exemple d'un téléchargement à un dollar sur iTunes, parce qu'il sera presque impossible de faire le calcul pour les maigres revenus associés à la webdiffusion. Mais prenons simplement un dollar pour un téléchargement unique sur iTunes, selon les termes classiques. Si l'artiste a récupéré le montant de ses dépenses pour l'enregistrement, il va toucher à peu près 25 ¢ par dollar.
    Le fait est qu'iTunes vend la piste un dollar. Soixante-deux sous retournent à la maison de disques, qu'il s'agisse d'une grande maison de disques ou d'une maison de disques indépendante. Ensuite, il y a une répartition 25:75 — 75 % va à la maison de disques et 25 % à l'artiste.
    Vous pouvez donc constater que même pour un album, si l'artiste touchait disons deux dollars au mieux par album, ce qui représente des redevances extrêmement élevées, il devrait tout de même vendre littéralement des centaines de milliers d'albums pour gagner sa vie exclusivement de la vente d'albums. Et c'est pratiquement impossible de vendre des centaines de milliers d'albums.
    Ce changement s'est fait graduellement, car il y a quelques années, les ventes d'albums et d'enregistrements simples gardaient les artistes occupés, n'est-ce pas? Quand j'étais jeune et que j'allais chez un disquaire pour écouter des disques et des albums dans un poste d'écoute, je me souviens que l'endroit était rempli de gens qui achetaient des disques et des albums. Cette époque est révolue, d'après ce que vous dites.
    C'était dans les années 1990, il y a 20 ans. Mais depuis l'an 2000, les ventes ont chuté très rapidement; il est maintenant très difficile pour un artiste de vivre de ses enregistrements.
    Merci, monsieur le président.
    Merci beaucoup. Il vous reste encore deux minutes, monsieur Boughen.
    D'accord.
    Voulez-vous poursuivre?
    Peut-être pourriez-vous nous dire ce qui se passe au Québec, car il semble que le Québec réussisse bien sur le plan des ventes et des revenus pour les artistes, les producteurs et tous ceux qui sont liés à l'industrie de la musique. Qu'en pensez-vous?
    Nous vendons plus de disques au Québec que dans le reste du Canada, mais la situation n'est pas idéale actuellement. Je vais demander à Christian Breton de vous en parler plus en détail.
    Oui, les ventes en magasin ont considérablement diminué au cours des dernières années. Elles ont beaucoup chuté.
    L'année dernière a été plus favorable. Toutefois, le problème, c'est que les ventes en magasin diminuent à un rythme plus rapide que les ventes numériques n'augmentent. Les ventes numériques ne compensent qu'en partie. Le problème que nous avons eu l'an dernier et que nous avons cette année, c'est que les téléchargements numériques et les ventes en magasin sont en baisse, non seulement au Québec, mais aussi dans l'ensemble du Canada.
    C'est donc un problème, sans doute attribuable aux services de diffusion en continu. Je pense que ce qui pose problème, sur le plan des redevances, c'est que pour la plupart de ces services de diffusion en continu offerts au Canada actuellement, on donne beaucoup de périodes d'essai gratuites, de très longues périodes d'essai. Elles ne sont pas seulement de six semaines ou de deux mois, mais de six mois ou d'un an, et les gens peuvent s'abonner, se désabonner et se réabonner. Voilà ce qui nous pose problème relativement à ces services. Votre pièce peut être écoutée 7 000 fois, mais si c'est presque toujours gratuitement, les revenus sont minimes. Voilà le principal problème en ce qui concerne les services de diffusion en continu.
    Merci beaucoup.
    C'est au tour de M. Nantel.

[Français]

    Vous disposez de sept minutes.
    Bonjour à tous. Je vous remercie beaucoup d'être ici.
    C'est une étude que tout le monde entreprend avec beaucoup de bonne foi. Il est merveilleux d'entendre les témoignages d'autant de gens sur une industrie aussi importante. Dans mon esprit et dans celui de plusieurs d'entre nous, cette industrie revêt une dimension patrimoniale. Je crois que le groupe de témoins d'aujourd'hui reflète bien cela. Leurs expériences se situent aux deux extrêmes.
    Il y a des gens qui ont vécu les belles années dont a parlé M. Boughen, alors qu'on retrouvait partout des magasins de disques vinyles. Les présentoirs étaient incroyables et mettaient en avant-plan notamment les albums des Bee Gees. C'était une époque où les gens achetaient de la musique parce que c'était la seule source de divertissement qu'ils contrôlaient.
    Ensuite est apparu le magnétoscope, et voilà qu'on s'est mis à contrôler d'une certaine façon ce que l'on voulait écouter, car on n'avait plus besoin d'avoir une table tournante qui faisait jouer les vinyles.
    Je fais allusion aux deux sandwichs de l'enjeu: l'aspect culturel et l'aspect industriel.
    Monsieur Hetherman, dans votre témoignage, vous avez souligné à quel point il était devenu complexe pour un artiste de vivre de son art.
    Monsieur Jordan, vous avez fait partie de ceux qui ont permis de galvaniser la notion du « son canadien ». Tous les artistes qui ont reçu des prix de votre organisme étaient des créateurs très pertinents. Ils brisaient vraiment les frontières artistiques, et c'était excellent.
    Il y a également ici des représentants d'une entreprise qui a décidé de se concentrer, d'aller chercher du talent, de le faire croître et de l'exploiter à l'échelle internationale. Ces gens parlent souvent de Marie-Mai, à juste titre. C'est certainement le plus bel exemple de réussite de Star Académie. Encore dimanche soir, on l'a vue et c'était fantastique. Nous avons pu assister à un moment de jonction entre la musique anglophone d'origine montréalaise, avec Adam Cohen, et celle de Marie-Mai.
    Je vous félicite tous pour ce que vous faites. Vous le faites bien et c'est absolument crucial. C'est d'ailleurs pour cette raison que nous voulons entendre vos commentaires.
    Ce qui m'anime surtout ce matin, c'est le point nouveau que M. Sasseville a soulevé concernant les taxes qui ne sont pas perçues par les services comme iTunes. Il faudra trouver une manière d'encadrer légalement ce genre de services.
    En fait, comme le disaient MM. Jordan et Hetherman, les services comme Deezer sont de plus en plus utilisés. Avant-hier, je naviguais dans mon compte Deezer et on m'a proposé de m'abonner pour la moitié du prix, à 5 $ par mois. À ce prix-là, il n'y a plus un chat qui va acheter un disque. Vous pouvez écouter votre musique tant et aussi longtemps que vous le souhaitez, et c'est même disponible pour les appareils mobiles.
    Ma question s'adresse à M. Sasseville.
    Vous avez évoqué les enjeux liés au programme VEM. J'aimerais que vous nous rappeliez à tous le choix auquel se trouve confronté un jeune artiste qui envisage la possibilité de signer un contrat avec une grosse étiquette de disques.

  (1130)  

    Avec votre permission, je laisserai Christian Breton répondre à votre question, puisque c'est maintenant lui qui traite de ce problème dans ses fonctions de patron du secteur de la musique.
    En fait, je vais vous répondre en prenant l'exemple d'un artiste établi. Je ne citerai pas de noms, mais la situation s'est produite deux fois au cours des six derniers mois.
    L'artiste nous approche pour obtenir une licence pour son album. L'album est prêt à être lancé, et l'artiste cherche une maison de disques pour faire sa mise en marché. Dans ce cas, l'artiste est admissible à une aide à la tournée. Pour notre part, nous n'avons rien à voir avec la tournée. Ce n'est pas nous qui faisons la production du spectacle. Par contre, en signant avec nous pour la production de son disque, l'artiste n'est plus admissible à l'aide à la tournée pour son spectacle. Pour l'artiste, ça représente une perte de 25 000 $. Avant, nous pouvions compenser la perte de ce montant en le récupérant autrement, mais cela n'est plus possible maintenant. Telle est la situation.
    Nous faisons aussi beaucoup de développement. Nous avons lancé une petite étiquette indépendante avec Musicor, qui s'appelle Ste-4, sous laquelle nous signons des groupes en développement. Cependant, ces petits groupes sont confrontés au même problème: leur survie dépend souvent de la subvention d'aide à la tournée, et actuellement, ils n'y ont pas accès s'ils signent avec nous.
    Encore une fois, cela indique que notre système réagit trop lentement. C'était peut-être vrai, il y a 10 ans, qu'un artiste qui signait avec une importante étiquette recevait du même coup une aide à la tournée. Aujourd'hui, même les artistes qui ont signé avec une importante étiquette ont absolument besoin de faire des tournées.

  (1135)  

    Je pense que la différence, c'est qu'il y a 10 ans, on se servait du spectacle pour faire la promotion du disque et faire mousser les ventes du disque. Aujourd'hui, le disque est souvent perçu comme un outil de promotion de la tournée. C'est là qu'on est rendu présentement.
     Je vous pose la question, et sentez-vous libres d'intervenir. Je pense que vous pourriez tous répondre à cette question.
    Notre étude porte sur les façons de venir en aide à l'industrie de la musique dans un contexte de médias qui changent. Au Québec, avec une organisation plus indépendante du reste des compagnies majeures internationales, nous avons réussi à nous tailler une place dans le marché du détail, dans le marché de la visibilité. Ce n'étaient pas seulement les règles américaines. Avec le temps, nous avons réussi à nous affranchir de règles internationales, à nous tailler une place et à prendre notre juste part du gâteau.
    Actuellement, compte tenu des services de diffusion en continu, nous devons trouver un plan de réaction pour que notre musique puisse atteindre et maintenir sa place dans cette conjoncture de concurrence internationale.
    Croyez-vous qu'on devrait intervenir dans le soutien à la mise en marché plutôt que dans la production, qui, elle, se porte bien?
    Il faudrait qu'il y ait des programmes qui soutiennent les agrégateurs qui, au nom de plusieurs maisons de disques, communément appelées « labels », placent les oeuvres de nos artistes dans les services de diffusion en continu.
    Veux-tu ajouter quelque chose, Christian?
    Ça revient à ce que l'on disait tout à l'heure. Concernant la diffusion en continu, nous avons négocié avec Sélect Digital pendant un an et demi pour obtenir de meilleures conditions. Notre contenu vient tout juste d'arriver sur Rdio et Deezer. En fin de compte, quand toutes les compagnies majeures embarquent dans l'arène, notre pouvoir de négociation reste minime.
    Que recommanderiez-vous? Y a-t-il quelque chose qui pourrait vous aider?
    C'est un peu difficile pour nous, car nous sommes un peu assis entre deux chaises. Nous gérons un service de diffusion en continu, ce qui est très difficile, parce que nous nous battons contre des géants. En même temps, nous essayons d'exploiter notre service pour donner de la visibilité aux artistes locaux et canadiens. Nous faisons également la promotion d'artistes internationaux. Il est très difficile de survivre.
     Actuellement, personne ne fait d'argent avec la diffusion en continu. C'est un problème. Les compagnies de diffusion en continu ne font pas d'argent elles non plus. Il faut trouver une solution pour que les compagnies qui offrent de la diffusion en continu réussissent à faire un peu d'argent et pour que les redevances à verser, bien qu'elles soient très minimes actuellement, ne soient pas trop élevées. Il faudrait légiférer sur les musiques qui sont diffusées gratuitement.
    Merci, monsieur Nantel.

[Traduction]

    Madame Jones, vous avez la parole pour sept minutes.
    Merci beaucoup.
    Je tiens à remercier les témoins de leurs exposés. C'est une discussion très intéressante.
    Dimanche, je me suis branchée à YouTube et j'ai pu écouter gratuitement les 40 meilleures chansons du palmarès du mois de février. On peut le faire n'importe quand, ce qui nous porte à nous demander comment ces artistes arrivent à gagner leur vie aujourd'hui. C'est la même chose partout. On assiste à un festival de blues ou de jazz, on revient à la maison et on peut aller sur YouTube pour trouver les chansons, la musique, les artistes, et on peut les écouter tout à fait gratuitement.
    Compte tenu de ce que vous dites ce matin au sujet de la diminution de 46 % des ventes de musique au pays depuis 2008, de la façon dont cela touche les artistes et du fait qu'ils peuvent apporter une contribution artistique au pays grâce à leur musique, je peux comprendre vos préoccupations.
    Il est très intéressant que vous veniez de parler de diffusion en continu en direct et du fait que personne n'en tire profit. La question que je voudrais vous poser ce matin est la suivante. Quelles recommandations, selon vous, le comité pourrait-il faire au gouvernement fédéral et quels changements pourrions-nous apporter dans ce pays afin d'assurer une certaine rentabilité aux artistes et aux gens qui font partie de l'industrie musicale?

  (1140)  

    Le premier élément à examiner concerne le financement actuel; l'évaluation de la réussite concorde généralement avec les ventes de disques. Je ne peux pas parler au nom de Musicaction, mais pour ce qui est de FACTOR, l'évaluation de l'efficacité du financement porte généralement sur les ventes, et ce n'est plus vraiment une mesure utile. Je pense que l'on peut se fonder sur le nombre de visionnements sur YouTube, sur les données relatives aux diffusions en continu, si les services acceptent de les divulguer — mais je ne suis pas sûr que ce soit même possible —; j'ai essayé pour les nominés du prix Polaris, mais je n'ai pas connu beaucoup de succès. Je crois qu'il faut réfléchir davantage à la façon d'évaluer le succès des projets et des artistes qui sont actuellement financés et qui le seront dans l'avenir.
    Le deuxième élément a été abordé aujourd'hui. Il est maintenant très clair dans l'esprit de la plupart des gens de l'industrie, je crois, que les enregistrements ne servent essentiellement qu'à titre de dépenses promotionnelles, et que la véritable voie à suivre pour la réussite économique, ce sont les tournées et les apparitions. Nous pouvons aussi parler des redevances touchées quand une pièce est utilisée dans un message publicitaire, une émission de télévision ou un film, de ce type de revenus également. Voilà des choses qui peuvent soutenir ces efforts et favoriser davantage cette voie sans, comme je l'ai déjà dit, perdre de vue que les artistes continuent à faire des albums. C'est encore leur contribution artistique. C'est leur principale réalisation, la raison pour laquelle ils font des tournées. C'est ce qui les pousse à aller de l'avant en tant qu'artistes. On ne peut donc pas laisser les albums et les enregistrements de côté, mais la mesure du succès et la voie à suivre pour la réussite économique dépendent de tous les autres éléments que nous avons mentionnés et que d'autres personnes mentionneront sans doute.
    Le fait est qu'actuellement, nous sommes au beau milieu d'une période de transition. Je pense que tout le monde cherche le bon modèle opérationnel. Il y a quelques années, nous pensions que ce serait les téléchargements. Ce n'est pas le cas. Ce pourrait être les services de diffusion en continu, ou peut-être pas. L'important, c'est que le financement public permette aux artistes et aux maisons de disques du Canada de se positionner sur ce qui constitue de plus en plus un marché mondial. Il nous faut des programmes de financement adaptés à la situation actuelle.
    Je pense que les gens n'ont jamais autant aimé la musique qu'actuellement. C'est ce qui est le plus ironique dans tout cela. La musique n'a jamais été aussi présente dans la vie des gens qu'elle ne l'est en ce moment. Le problème, c'est que bien peu de gens en tirent un profit. Il faudra beaucoup de temps avant que les artistes et les détenteurs de droits gagnent suffisamment pour poursuivre leur travail. Voilà la pierre d'achoppement: nous devons déterminer comment nous pouvons arriver à ce résultat. Tout le monde a fait de très bonnes suggestions, du moins comme point de départ.
    Vouliez-vous ajouter quelque chose, Christian?
    M. Christian Breton: Non, je pense que j'ai fait suffisamment d'observations.
    Mme Yvonne Jones: Bien.
    Je pense que l'objectif, c'est de déterminer comment nous pouvons obtenir la visibilité et la reconnaissance tant à l'échelle nationale qu'internationale, et comment nous pouvons en tirer des revenus. Je crois que nous sommes tous d'accord. Je partage votre avis. Nous sommes dans une période de transition, cela ne fait pas de doute.
    Mais sur un horizon de cinq ans, que doit faire le gouvernement fédéral pour renforcer l'industrie canadienne de la musique et pour accroître cette visibilité dans les marchés nationaux et internationaux? Quelle orientation devrions-nous adopter? Selon vous, quelle voie devrions-nous suivre dans ce processus afin de prendre les meilleures décisions et d'adopter les meilleures politiques pour renforcer l'industrie?
    Je crois qu'au départ, nous devons inciter les bailleurs de fonds à concentrer leurs efforts sur... Je ne dis pas qu'ils devraient consacrer tous les fonds aux tournées, car ils ne pourraient pas continuer à faire les enregistrements qui sont la source de tous les autres éléments dont nous parlons. Je pense qu'actuellement, le financement pour les tournées est extrêmement difficile à obtenir et qu'il devrait être plus accessible. L'un des éléments clés dont j'ai parlé dans mon exposé, c'est la préparation à l'exportation des talents. Certains artistes peuvent connaître du succès à petite échelle au Canada, mais ils doivent être prêts à exporter leurs talents. Ils doivent pouvoir aller à l'étranger.
    Je passe beaucoup de temps à l'extérieur du pays dans le cadre de mon travail pour la Semaine de la musique canadienne. J'assiste au MIDEM, à l'Eurosonic, au PrimaveraPro, à tous ces événements en France, en Hollande, en Espagne, où des artistes canadiens présentent leur travail et collaborent avec des sociétés étrangères, et où des artistes étrangers présentent leur travail dans d'autres pays également. Si l'artiste n'est pas prêt à exporter son talent, alors tout cela n'a pas de sens. Personne ne sera intéressé. On passera rapidement à autre chose. Mais si l'artiste est prêt — et bon nombre des artistes dont Steve a parlé aujourd'hui l'ont été à divers moments de leur carrière — et qu'il fait la transition vers l'étranger pour se faire connaître... Il nous faut trouver des moyens de consacrer une partie du financement aux tournées.
    Actuellement, les organismes de financement traversent une période de transition. Compte tenu des dépenses directement liées à la promotion et au marketing, quel financement est nécessaire pour que ces enregistrements aient lieu et soient commercialisés? Comment déterminer quels artistes sont prêts à exporter leurs talents? C'est une question épineuse.

  (1145)  

    Je l'aborderais sous un angle un peu différent. Je crois que nous devons accepter le monde numérique et mettre en place des mesures et des programmes qui nous permettront de nous tailler une place dans l'univers numérique. D'abord, le catalogue doit être numérisé. Une partie importante du catalogue des chansons canadiennes n'a pas encore été numérisée et n'est donc pas disponible dans le monde numérique.
    Ensuite, il faut soutenir nos services canadiens, qu'il s'agisse de téléchargement ou de diffusion en continu. Il faut veiller à ce qu'ils puissent rivaliser à armes égales avec leurs concurrents, ce qui n'est pas le cas actuellement, comme je l'ai expliqué, à cause de la situation fiscale. Un Canadien qui s'abonne à une plate-forme canadienne et qui y achète une oeuvre d'un artiste canadien paie davantage que sur une plate-forme étrangère à cause de la situation fiscale. Au bout du compte, comme je l'ai dit, si toutes les plates-formes canadiennes sont fermées, nous n'aurons plus d'emprise sur le positionnement de notre musique, car elle sera offerte en totalité sur des plates-formes étrangères. Nous devons donc veiller à ce que...
    Excusez-moi, mais je vais devoir vous interrompre. Nous avons largement dépassé le temps imparti.
    Nous allons donner la parole à M. Hillyer, pour sept minutes.
    Avant que le comité ne formule une recommandation à l'intention du gouvernement, je tiens à m'assurer que nous comprenons bien le rôle que doit assumer le gouvernement dans tout projet, que ce soit par rapport à l'industrie musicale ou non. Nous parlons de patrimoine culturel; nous parlons aussi de soutien financier. De nos jours, le gouvernement intervient dans toutes ces choses.
    Mais je voudrais vous poser quelques questions pour savoir si... Nous parlons du fait qu'il est plus difficile pour les artistes de gagner leur vie. Ma première question est la suivante. Pourquoi les artistes qui touchent quelques cents ou une somme dérisoire par flux musical concèdent les droits d'utilisation de leur musique à ces gens. Si ce n'est pas avantageux, pourquoi le font-ils?
    Ils estiment que s'ils ne le font pas et que tous les grands artistes le font, ils ne peuvent pas rivaliser. Comme je l'ai dit, notre catalogue est disponible à Rdio et Deezer au Canada depuis cette semaine. Le service Rdio va publier un communiqué de presse pour annoncer qu'il a maintenant notre catalogue. Cependant, nous savons qu'il ne paie pas beaucoup; les artistes le savent aussi, mais ils nous appelaient pour nous demander pourquoi ils n'y étaient pas et nous dire qu'ils voulaient y être.
    Il s'agit de promotion. Comme je l'ai dit, c'est comme l'enregistrement du CD et ce que nous disions tout à l'heure au sujet des tournées. Les CD sont maintenant des articles promotionnels. Cela leur rapporte presque rien, mais ils seront là et ils auront la visibilité. C'est essentiellement pour cela qu'ils y tiennent.

  (1150)  

    Certains artistes internationaux  — les Rolling Stones, AC/DC, des groupes historiques — ne rendent pas leurs enregistrements disponibles pour ces services de diffusion en continu, mais ils ont la chance de pouvoir les leur refuser. Certains d'entre eux ont également refusé pendant plusieurs années que leur musique soit disponible sur iTunes.
    Le problème, pour les artistes en développement ou établis, c'est que cela ne fait pas augmenter leurs ventes dans d'autres secteurs. Autrement dit, si l'on refuse sa musique à un service de diffusion en continu, on ne vendra pas automatiquement plus ni même autant de CD ou de téléchargements numériques. En somme, ces ventes diminuent de toute façon, que la musique soit jouée sur un service de diffusion en continu ou non.
    La plupart des gens le font. En tant que dirigeant d'une maison de disques, j'étais réticent au départ à rendre ma musique disponible par l'entremise des services de diffusion en continu, surtout après avoir reçu le premier rapport sur les redevances. Mais si elle n'y est pas, cela veut dire qu'on ne comprend pas la façon dont les gens consomment de la musique de nos jours.
    En ce qui concerne YouTube, je sais qu'il y a probablement 80 % des gens qui découvrent les artistes avec qui je travaille sur YouTube ou un autre service semblable, dont je reçois un montant minimal ou presque rien. Mais cela contribue à établir le profil de l'artiste dans l'espoir qu'un jour, lorsque les conditions idéales seront réunies et que nous aurons un succès à la radio ou qu'une de ses chansons passera au canal de vidéos, les diffusions en continu sur YouTube seront...
    Avant, il fallait payer pour cette visibilité. Maintenant, on nous paie 0,0001 ¢ pour cette visibilité; je ne sais pas si on peut dire qu'ils ne sont pas assez payés et qu’il faut prendre des mesures pour remédier à cela. Les artistes y trouvent leur compte.
    Je crois qu'il faut veiller à ce que les contrats soient respectés et à ce qu’on ne force pas les artistes à diffuser leur musique sur ces plates-formes; il faudrait mettre en oeuvre des règlements pour interdire certains services comme Napster, qui téléchargent de la musique alors que les artistes n’y ont jamais consenti. Mais si c’est une chose pour laquelle nous devions auparavant payer, je ne sais pas si nous voulons vraiment prendre les mesures pour veiller à ce que...
    Ce que vous dites n’est peut-être pas clair: c’est une chose pour laquelle ils devaient payer.
    Eh bien, la publicité...
    Oui, mais c’est aussi important de souligner qu’il y a 10 ou 15 ans, il fallait dépenser 40 000 ou 50 000 $ pour réaliser un vidéoclip, ce qui était une dépense assez importante. Par contre, on vendrait des centaines de milliers d’albums; c’était donc beaucoup plus facile de récupérer les frais.
    Pour les vidéoclips, par exemple, MuchMusic, CMT ou les autres chaînes de musique payaient un tarif par écoute. À une certaine époque, CMT payait 150 $ pour chaque diffusion d'un vidéoclip, jusqu’à 15 000 $, je crois. Les titulaires des droits et les maisons de disque pouvaient ainsi récupérer leur investissement dans le vidéoclip. Je crois que MuchMusic continue de payer ce tarif… C'est beaucoup moins qu’avant. Avant, il y avait des incitatifs; il y avait la valeur promotionnelle et les incitatifs financiers pour diffuser les vidéos sur ces chaînes. Aujourd’hui, on fait un clip pour 5 000 ou 1 000 $ et on obtient des redevances minuscules pour sa diffusion sur YouTube.
    Mais le rapport n'est plus le même. On peut tirer profit des possibilités et des poussées promotionnelles, mais on n’obtient pas de ventes en retour comme c’était le cas avant. Ce sont des pommes et des oranges, si l'on veut; il n'y a plus de lien direct comme avant.
    Le principal, c’est que les moyens de promotion d’aujourd’hui étaient jusqu’à tout récemment la principale source de revenus des artistes. C’est là le problème.
    On considère cela comme de la promotion aujourd'hui, mais elle a aussi remplacé la consommation payante. C’est là la principale différence, je crois.
    Je suppose que nous connaissons une période de transition, comme nous l’avons dit. Dans le bon vieux temps… le violon, c'est notre musique traditionnelle. Un sénateur présente un projet de loi sur la « Journée du violon »; à part Stéphane Grappelli, Natalie MacMaster et Ashley MacIsaac, on ne connaît pas beaucoup de gens qui gagnent leur vie à jouer du violon. Il y a quelques violonistes dans chaque ville qui jouent dans les orchestres symphoniques. Je jouais dans celui de Lethbridge, et je n’ai jamais été payé. J’aimais cela, mais on joue et on a toujours joué le violon pour l’amour de la musique.
    J'aimerais être payé pour jouer du violon. J’aimerais être payé pour jouer au hockey, mais nous savons que seul un petit pourcentage de gens sont payés pour cela. Je conviens que le gouvernement a pour mandat de promouvoir le patrimoine; doit-il également veiller à ce que les gens puissent gagner leur vie à promouvoir ce patrimoine, plus qu’au hockey, par exemple?

  (1155)  

    Monsieur Hillyer, je vais devoir vous interrompre.
    Je crois que beaucoup d'entre nous aimeraient être payés pour jouer au hockey, mais si je regarde autour de la table, je ne crois pas que ce soit possible.
    La parole est maintenant à M. Nantel. Vous avez trois minutes, monsieur.

[Français]

    Merci beaucoup.

[Traduction]

    Mon collègue Kennedy Stewart a beaucoup de questions à vous poser, monsieur Jordan. Je ne prendrai qu'une minute. Veuillez l'excuser.
    Des voix: Oh, oh!

[Français]

    J'ai une question pour vous. Vous avez parlé de règles du jeu équitables. Au-delà du fait que des services de l'étranger comme iTunes et Netflix n'ont pas à payer de taxes, croyez-vous que ces règles du jeu équitables que vous évoquez pourraient comprendre d'autres engagements à l'égard de la visibilité de nos produits canadiens?
    Je n'irais pas jusqu'à réglementer en la matière en imposant à ceux qui viennent au Canada un pourcentage donné de visibilité. Ce n'est pas une question d'absence de contenu, mais de visibilité sur les plateformes. Je n'irais pas jusqu'à imposer une réglementation.
    En fait, l'idée n'est pas de réglementer tout ce qui se passe sur le Web, mais de s'assurer que les Canadiens qui se lancent dans l'aventure Web bénéficient des mêmes conditions que les joueurs étrangers.
    Merci.

[Traduction]

    Je vous remercie de votre présence aujourd'hui. La conversation a été fort intéressante.
    Je n'ai qu'une petite question; il ne reste que quelques minutes, mais nous réussirons peut-être à y répondre.
    Pourquoi est-ce que certains artistes émergents réussissent et d'autres non? Disons que ce n'est pas à cause de la musique qu'ils créent; disons que leur musique est bonne. Selon votre expérience, pourquoi certains musiciens ont-ils réussi à vivre à temps plein de leur musique tandis que d'autres, tout aussi talentueux, n'y arrivent pas?
    On peut faire un tour de table et entendre vos réponses, d'après vos observations.
    J'ai été A&R, Artists and Repertoire, pendant près de 20 ans; en d'autres termes, j'étais responsable de trouver des artistes. Si je connaissais la réponse exacte à cette question, je serais millionnaire. Mais je comprends où vous voulez en venir.
    Je crois qu'un des facteurs importants, dont j'ai parlé il y a quelques minutes, c'est la tempête parfaite; c'est quelque chose qu'on ne peut pas forcer. Par exemple, vous envoyez une chanson aux stations de radio. Elles commencent à la jouer en ondes en même temps que le vidéoclip est diffusé. Au même moment, 10 000 ou 100 000 jeunes téléchargent la chanson sur YouTube. Vous êtes en nomination pour le prix Polaris ou vous faites des apparitions dans certaines émissions de télévision ou encore, vous êtes en tournée au même moment. C'est très difficile de créer ces occasions, surtout en même temps. C'est parfois même très difficile de créer une seule de ces occasions. Lorsqu'elles se réalisent toutes à un moment donné, en règle générale, on a créé une parfaite tempête musicale qui permet à l'artiste de passer au niveau suivant.
    Les gens s'attachent à la musique. Oui, ils achètent encore des disques, mais pas autant qu'avant. Ils achètent 10 000 exemplaires au lieu des 100 000 qu'ils achetaient auparavant. Mais 10 000, c'est mieux que rien. Ces gens paieront peut-être 20 $ pour un billet de spectacle ou pour un t-shirt. Quoi qu'il en soit, les gens adoptent la musique, et tout s'enchaîne. La nouvelle se propage, et l'artiste est ainsi élevé à la plate-forme suivante.
    Selon mon expérience, à mes débuts dans le domaine de la musique, je crois qu'un artiste sur 10 connaissait du succès. C'était vos chances, il y a plusieurs années. Maintenant, je crois que les chances sont moins élevées, peut-être qu'une personne sur 45 réussit.
    Très bien. Ce sera tout, monsieur Stewart, mais merci.
    Je remercie également nos experts d'avoir contribué à notre étude. Si vous avez d'autres renseignements à nous transmettre, veuillez le faire par écrit le plus tôt possible. Merci.
    Merci beaucoup. Nous allons suspendre la séance un bref instant.

  (1155)  


  (1200)  

    Nous reprenons les travaux. Il s'agit de la 19e réunion du Comité permanent du patrimoine canadien. Pour la prochaine heure, nous recevons Mark Monahan, du RBC Ottawa Bluesfest. Nous recevons aussi par vidéoconférence Greg Klassen, président-directeur général de la Commission canadienne de tourisme. Également avec nous ici à Ottawa, nous recevons David Goldstein, président-directeur général de l'Association de l'industrie touristique du Canada.
    Vous disposerez chacun de huit minutes; nous commençons par vous, monsieur Monahan.
    Vous avez la parole.
    Je vous remercie beaucoup de m'avoir invité à témoigner devant vous aujourd'hui. Pour être franc, j'ai été surpris de recevoir votre appel, mais je suis heureux de vous présenter mon point de vue sur divers sujets, et je tenterai de respecter les huit minutes qui me sont accordées.
    Le premier sujet que j'aimerais aborder — un sujet chaud depuis quelques années —, c'est l'effondrement de l'industrie du disque et ses conséquences sur l'industrie du spectacle. Ce que j'ai constaté, c'est que depuis l'effondrement de l'industrie du disque, les spectacles se sont multipliés plus que jamais, ce qui est étrange parce qu'on entend souvent parler de l'accès gratuit à la musique. Les gens téléchargent la musique et n'achètent plus de disques. Si on se fiait au rapport habituel entre l'offre et la demande, cette tendance donnerait lieu à la diminution de la création musicale. Or, c'est le contraire qui s'est produit. On crée plus de musique. Les gens regardent et écoutent plus de musique, et sortent voir les spectacles. C'est un peu étrange. À mon avis, l'effondrement de l'industrie du disque, c'est l'effondrement de l'industrie des producteurs et non de la musique en soi, et 95 à 99 % des musiciens créent toujours autant.
    Pourquoi la musique est-elle de plus en plus populaire? Je dirais que c'est entre autres en raison des nombreux événements, et je vais vous parler aujourd'hui des événements musicaux à but non lucratif, puisque c'est le domaine que je représente. Le RBC Bluesfest est un événement sans but lucratif, tout comme la plupart des festivals au Canada. Il y a une grande différence entre ces événements et les événements à but lucratif. Il y a cinq ou dix ans, le marché a changé, et nous sommes passés des spectacles à ce que j'appelle les événements musicaux de destination. Ce sont des événements musicaux à grande échelle qui attirent les touristes et un grand nombre de personnes dans diverses collectivités.
    Je dirais que le Festival de jazz de Montréal, le RBC Bluesfest et le Festival d'été de Québec sont des événements musicaux de destination. Ils ont remporté un énorme succès au cours des 10 dernières années, pour plusieurs raisons. C'est notamment parce qu'ils sont financés en grande partie par le gouvernement, mais aussi parce qu'on s'intéresse beaucoup à la musique et que ces événements entraînent d'énormes répercussions. Nous sommes membres de FEEM, Festivals et événements majeurs du Canada. L'organisme compte 15 membres, et la liste s'allonge, mais les festivals des membres actuels entraînent des retombées économiques de l'ordre de 1,1 milliard de dollars. Ces organisations ont une grande influence.
    On pourrait se demander ce qu'ont d'important les événements sans but lucratif et pourquoi ils méritent d'avoir l'appui des divers ordres de gouvernement. Une des principales raisons, c'est que nous encourageons la diffusion de la musique non commerciale. Par exemple, le Festival de jazz de Montréal ou le Festival d'été de Québec dépensent probablement 1 million de dollars pour des événements ouverts. Le public y a accès gratuitement, et ces spectacles sont souvent les plus populaires. Le Festival d'été vend un passeport pour l'événement de 10 jours, donnant accès à quelque 200 spectacles, pour environ 70 $. Pour ce prix, vous pouvez non seulement aller voir Metallica et Bon Jovi, mais aussi des artistes canadiens incroyables, des artistes ethniques et culturels et des artistes de rue. Le festival vend des centaines de milliers de passeports, parce que c'est une très bonne affaire. Il utilise les fonds publics pour réaliser des activités qui laisseront une marque.
    Nous dépensons 200 000 $ pour la promotion d'artistes locaux. Ce ne sont pas eux qui font vendre les billets pour l'événement, mais ils offrent une grande contribution à la collectivité. Pour les entreprises à but lucratif, l'objectif général consiste à maximiser la valeur pour les actionnaires. Les entreprises à but non lucratif ne font pas cela: elles maximisent la valeur pour les collectivités; c'est la différence entre ces deux types d'entreprises. Nous engageons de nombreux artistes locaux, des artistes non commerciaux, qui se produisent aux côtés d'artistes commerciaux et qui ont accès à un plus grand auditoire.

  (1205)  

    En fin de compte, la question est la suivante: que doit faire Patrimoine canadien pour appuyer l'industrie du spectacle au Canada? Je dirais qu'il est temps de faire l'inventaire et de savoir où va l'argent. Je crois que les entreprises sans but lucratif ont une grande influence, mais elles doivent également rendre des comptes.
    On ne parle donc pas seulement de la musique pour le plaisir. Quelle est l'incidence de ce financement et que fait chaque organisation des fonds reçus? Il faut rendre des comptes sur l'argent que nous recevons et sur les répercussions de nos événements sur la collectivité. Tout cela a également une grande incidence sur le secteur du tourisme et sur l'industrie.
    Ce sont les arguments que je voulais faire valoir aujourd'hui. Je serai heureux de répondre à vos questions, et je vous remercie de m'avoir invité.

  (1210)  

    Très bien, merci beaucoup, monsieur Monahan.
    Nous allons maintenant à Vancouver, par vidéoconférence.
    Monsieur Klassen, vous avez la parole pour huit minutes.
    C'est un plaisir de m'adresser à vous aujourd'hui, même si j'aurais préféré vous rencontrer en personne. Je vous suis très reconnaissant de m'avoir invité, et je remercie votre comité de tenir compte du point de vue de l'industrie touristique dans le cadre de cette importante étude.
    Si vous le permettez, j'aimerais dire quelques mots sur l'organisme que je représente, la Commission canadienne du tourisme, et vous expliquer un peu comment nous intégrons la musique, les festivals et les manifestations culturelles d'ici dans nos initiatives de marketing touristique et pourquoi c'est important.
    Je précise d'abord que la Commission canadienne du tourisme est l'organisme national de marketing touristique du Canada. À titre de société d'État, elle dirige l'industrie dans sa promotion du Canada en tant que destination touristique quatre saisons de premier choix.
    Nous savons que le voyage et le tourisme forment l'un des secteurs les plus florissants au monde. Il s'agit d'une industrie de 84 milliards de dollars au sein de l'économie canadienne, mais la concurrence est très féroce dans ce marché.
    Avec nos initiatives de marketing touristique et nos activités commerciales dans 12 pays, nous en faisons vraiment beaucoup pour attirer les voyageurs étrangers au Canada, ce qui, par ricochet, nous permet de soutenir plus de 170 000 entreprises, surtout des PME, dans les moindres recoins du pays.
    Notre modèle repose sur les partenariats. Nous collaborons avec le secteur privé canadien, des hôteliers et des chefs aux centres de ski et à l'industrie culturelle, pour tirer le maximum de chaque dollar et doubler la portée de nos initiatives de marketing. Nous travaillons aussi avec les professionnels de voyages étrangers en établissant des liens entre les acheteurs étrangers et les vendeurs canadiens. Nous avons une division distincte chargée des réunions et des congrès qui s'appelle Événements d'affaires Canada. Sa mission est de promouvoir le pays comme une destination de choix pour tenir des conférences internationales. Nous savons que c'est excellent pour les hôtels, les centres culturels et les restaurants et que cela permet de faire venir des gens très importants au pays. C'est comme un grand voyage de familiarisation avec le Canada. Les voyageurs investissent dans les endroits qu'ils visitent, envoient leurs enfants étudier ici et achètent peut-être même des produits canadiens. Nous savons que les répercussions à long terme sont considérables.
    De plus, nous travaillons évidemment avec les intervenants du secteur public, les spécialistes du marketing touristique des provinces et des territoires, afin de maximiser leurs investissements.
    Nous avons toujours le regard tourné vers l'avenir, vers un horizon de 5, 10 ou 20 ans, pour savoir sur quels avantages concurrentiels miser. Une des occasions à saisir se rapporte à l'industrie canadienne de la musique et, bien entendu, à certains consommateurs très importants qui aiment vraiment la bonne musique — je pense que c'est le cas de tout le monde —, c'est-à-dire les jeunes.
    Nous savons que les jeunes voyageurs forment un marché aussi vaste que lucratif. À l'échelle internationale, on parle de 187 millions de voyageurs, ce qui représente environ 20 % de ceux qui arrivent au Canada. C'est la part de marché qui se développe le plus rapidement.
    Au pays, nous mettons l'accent sur les jeunes parce qu'ils présentent un grand potentiel pour le tourisme interne. On compte 5,2 millions de Canadiens âgés de 19 à 29 ans, ce qui représente environ 15 % de la population. Les jeunes Canadiens qui voyagent au pays dépensent environ 1 400 $ lors d'un séjour de 14 nuits, ce qui se compare pratiquement au montant dépensé par les voyageurs étrangers qui parcourent de longues distances.
    Les festivals et les manifestations culturelles sont d'importants facteurs de motivation pour les jeunes voyageurs et font donc partie intégrante de la stratégie de développement du tourisme jeunesse mise en oeuvre par la CCT.
    Bien qu'elle soit encore en cours d'élaboration et qu'elle dispose seulement d'un financement de démarrage, notre stratégie jeunesse met l'accent sur la promotion des festivals et des manifestations culturelles canadiennes pour attirer cette catégorie de voyageurs. Nous avons formé un conseil sur les jeunes voyageurs, et nous sommes très heureux que Festivals et événements majeurs Canada y soit représenté, car, comme l'a dit M. Monahan, c'est un joueur clé pour nous aider à préparer des plans efficaces visant à favoriser le mouvement du tourisme jeunesse.
    Cet été, nous prévoyons déployer deux programmes axés sur les jeunes et la musique pour sensibiliser les personnes influentes. Ces programmes s'articuleront autour du Festival Musique et Arts OSHEAGA de Montréal et du Pemberton Music Festival qui a lieu ici en Colombie-Britannique.
    Nous mettons également à l'essai dans les marchés de nouveaux concepts d'initiatives jeunesse liés aux festivals de musique et aux concerts, et l'analyse des résultats obtenus sera terminée d'ici la fin du printemps. Nous faisons un peu de recherche dans le domaine.
    Nous nous inspirons de l'industrie canadienne de la musique dans le cadre de nos activités de marketing. L'été dernier, nous avons demandé aux Canadiens de nous aider à créer un hymne pour le Canada. Nous avons réalisé la vidéo intitulée 35 millions de regards, qui est une des vidéos de tourisme visionnées le plus souvent dans le monde. La trame sonore est signée par le groupe canadien Yukon Blonde, que nous avons été en mesure de promouvoir au pays et à l'étranger.
    Nous mettons l'accent sur un ensemble d'expériences touristiques exceptionnelles, qui sont liées à d'importantes manifestations culturelles, y compris le Stampede de Calgary, le Festival de jazz de Montréal, le Festival de blues du Nouveau-Brunswick et la Fête de la musique celtique du Cap-Breton.
    Bref, l'industrie touristique compte vraiment sur la culture et le secteur de la musique pour diversifier l'expérience touristique qu'offre le Canada. Notre pays est réputé pour ses grands espaces et ses belles villes. Nous devons maintenant soutenir davantage la culture, et la musique joue un rôle crucial en la matière.
    Nous appuyons grandement cette industrie et nous aimons beaucoup collaborer avec ses intervenants dans le but d'inciter les voyageurs étrangers à se rendre au Canada.
    Merci.

  (1215)  

    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant passer à M. Goldstein de l'Association de l'industrie touristique du Canada.
    Vous avez la parole pour huit minutes.

[Français]

    Monsieur le vice-président, membres du comité, c'est vraiment un plaisir pour moi d'être parmi vous aujourd'hui dans le cadre de cette importante étude. C'est une suggestion qu'a faite le président lors de sa comparution devant le groupe parlementaire du tourisme. Nous apprécions l'occasion qui nous est offerte de discuter avec vous des répercussions de la musique et des festivals de musique sur l'industrie touristique.

[Traduction]

    Permettez-moi de me présenter à nouveau. Mon nom est David Goldstein, et je suis président-directeur général de l'Association de l'industrie touristique du Canada. L'AITC représente l'ensemble du secteur canadien du tourisme et des voyages, qui organise d'importants festivals de musique tels que le Festival international de jazz de Montréal, le Bluesfest d'Ottawa, le Festival folklorique de Winnipeg, ainsi que des concerts dans de nombreux bars, restaurants et autres établissements.
    Notre secteur génère des revenus annuels de 84 milliards de dollars et emploie plus de 600 000 personnes dans toutes les circonscriptions du pays. Nous vous avons d'ailleurs remis aujourd'hui des renseignements concernant les retombées dans vos circonscriptions respectives. Ce qui est le plus remarquable, c'est que parmi les personnes employées, 204 000 ont moins de 25 ans, ce qui veut dire que notre secteur est celui qui emploie le plus grand nombre de jeunes Canadiens. Avec des revenus de 17,4 milliards de dollars l'année dernière, l'industrie des voyages demeure le plus important secteur d'exportation de services au Canada.
    La mission de l'AITC est de rendre le Canada plus concurrentiel sur l'échiquier mondial des destinations touristiques. Plus précisément, nous voulons stimuler le taux de croissance des voyageurs étrangers au pays, qui se situait à 1,5 % en 2012, pour qu'il atteigne le taux moyen de 5 %. Une étude récente de Deloitte révèle qu'une hausse de 1 % des visites internationales se traduit par une hausse générale des exportations de 817 millions de dollars, ce qui veut dire que notre objectif de 5 % équivaudrait à une augmentation de 1,4 milliard de dollars des exportations.
    Comment pouvons-nous atteindre ce 5 %? Dans le cadre de la stratégie fédérale en matière de tourisme, l'AITC s'affaire à surmonter les obstacles stratégiques, notamment en ce qui a trait au financement du marketing, à l'accès aux investissements et aux produits touristiques tels que les concerts. Nous nous efforçons également d'attirer chez nous un plus grand nombre de visiteurs, en particulier des Américains, qui sont de grands adeptes des festivals de musique canadiens. D'ailleurs, une récente étude des chiffres sur l'Ontario démontre que près de la moitié des visiteurs américains dans cette province s'y sont rendus pour assister à des manifestations artistiques et culturelles.
    Les manifestations culturelles, y compris les concerts et les festivals de musique, sont un attrait majeur pour les touristes en visite au Canada. En 2012, 3,5 millions de visiteurs étrangers ont pris part à une manifestation culturelle. Ils ont dépensé en moyenne 768 $ pendant leur séjour, ce qui signifie que ce genre d'activités injecte au moins 2,6 millions de dollars par année dans notre économie. Tout cela s'ajoute aux dépenses intérieures et à l'effet d'entraînement.
    Les membres de votre comité peuvent facilement saisir l'ampleur des avantages économiques d'un grand festival comme le Festival international de jazz de Montréal, qui génère quelque 72 millions de dollars en revenus de tourisme, ou de l'excellent festival de Mark ici à Ottawa. Or, même les festivals de moindre envergure peuvent avoir des retombées considérables. Aussi, les festivals qui prennent de l'ampleur au fil du temps deviennent autant d'occasions de mettre en valeur et de financer la musique canadienne.
    Music Canada, dont les représentants ont déjà comparu devant votre comité, affirme que la taille limitée du marché intérieur canadien fait en sorte que c'est à l'étranger que l'on trouve certaines des plus importantes possibilités de croissance et de développement. Le même constat s'applique au secteur canadien du tourisme et des voyages. On observe toutefois une croissance modeste d'un trimestre à l'autre qui dissimule une dépendance très inquiétante envers notre marché intérieur. À l'heure actuelle, 80 % des revenus générés par le secteur des voyages proviennent de Canadiens qui se déplacent à même le pays. Cette proportion se situait à 65 % il y a à peine 10 ans.
    Les visiteurs américains sont particulièrement friands de la scène culturelle canadienne. En effet, près de 2,5 millions d'entre eux ont pris part en 2012 à nos différentes manifestations culturelles, une hausse de 13 % par rapport à l'année précédente. Lorsqu'on compare ces données au taux de visite global, qui est seulement de 2,5 %, il devient évident que la musique et la culture sont des éléments importants pour attirer des visiteurs américains.
    Depuis 2002, le nombre d'Américains à avoir passé une nuit au Canada a diminué de 3,5 millions. On a heureusement levé une grande partie des contraintes structurelles du marché américain, et les conditions sont donc idéales pour solliciter à nouveau ce marché. La valeur du dollar canadien se stabilise et demeure inférieure à celle du dollar de nos voisins du Sud, et le nombre d'Américains détenteurs d'un passeport a doublé pour atteindre 120 millions. La frontière s'amincit, l'économie américaine se redresse et ils sont plus nombreux à se rendre à l'étranger.
    Ce constat me ramène à la question de départ, à savoir de quelle façon les concerts peuvent contribuer à faire passer à 5 % le taux de croissance du nombre de visiteurs. L'AITC a une approche axée sur l'ensemble du gouvernement pour accroître la compétitivité du Canada sur le plan touristique, notamment en amenant le gouvernement à soutenir davantage la promotion touristique, l'accès au pays et les produits du tourisme. Les festivals de musique s'avèrent un produit touristique parmi les plus attrayants au Canada pour stimuler la croissance économique dans toutes les régions du pays. Par conséquent, l'AITC recommande au Comité d'appuyer le financement des festivals en partenariat avec l'industrie et les autres ordres de gouvernement, le tout dans la perspective plus large d'amener le Canada à renouer avec le marché d'ici 2017. Nous aimerions également ajouter qu'une telle initiative devrait se faire en partenariat avec le secteur privé. Il faudrait entre autres voir à ce que le nombre de visiteurs étrangers au Canada augmente progressivement.

  (1220)  

    Comme je l'ai dit, je vous suis très reconnaissant de m'avoir donné l'occasion d'être ici. Le président et M. Dykstra se souviennent de mon ancienne carrière dans le domaine de la radiodiffusion alors que je passais beaucoup de temps à comparaître devant le Comité du patrimoine. Il y avait longtemps que je n'avais pas témoigné, et je suis heureux d'être de retour, notamment parce que c'est un sujet d'un grand intérêt non seulement à l'échelle locale, mais également sur la scène nationale.
    Merci beaucoup, monsieur Goldstein.
    Nous allons maintenant passer aux questions en commençant avec M. Weston, pour sept minutes. J'aimerais rappeler aux députés que M. Klassen est également présent par vidéoconférence. Je vous prie de ne pas l'oublier.
    Monsieur Weston.
    Monsieur Klassen, en tant que député de West Vancouver—Sunshine Coast—Sea to Sky Country, je vous assure que je ne vais pas vous oublier à Vancouver.
    Merci, David. Selon les chiffres que vous nous avez remis, ma circonscription arrive au deuxième rang pour ce qui est des employés qui travaillent dans cette industrie au Canada, tout juste après Niagara Falls. Nous voyons certainement des choses semblables dans le domaine du sport étant donné que nous avons été l'hôte des Jeux Olympiques et Paralympiques en 2010. Whistler tient beaucoup au tourisme. C'est bien d'avoir de bonnes nouvelles après une suite de discussions qui laissaient peu d'espoir aux musiciens.
    Monsieur Monahan, j'aimerais juste vous dire que le cadeau d'anniversaire que nous avons remis à mon fils la semaine dernière est un bracelet pour le Bluesfest d'Ottawa. Les gens présents peuvent donc être certains que c'est un bon produit. Les jeunes adorent cela. Il a 17 ans, et c'est vraiment ce qu'il voulait. C'est donc une bonne chose.
    M. Goldstein a parlé de la différence entre les revenus intérieurs et les revenus étrangers. C'est le sujet d'une étude que l'on fait actuellement dans ma circonscription. En fait, des gens que vous connaissez travaillent ensemble là-dessus: Berrett Fisher, le dirigeant de l'Office du tourisme de Whistler, Stuart McLaughlin et moi.
    J'aimerais vraiment savoir sur quoi le gouvernement devrait se concentrer selon vous. Devrait-il miser sur les dollars étrangers ou sur les consommateurs du pays à qui l'on doit selon vous, David, 80 % des revenus.
    Nous pourrions peut-être commencer avec vous, Greg. Je vous serais reconnaissant de ne prendre qu'environ une minute pour répondre afin que nous puissions faire un tour de table.
    Nous sommes évidemment très intéressés par ce que le marché étranger peut offrir au Canada. C'est important, car il nous aide à diversifier notre approche trop axée sur le marché intérieur. Nous sommes de grands voyageurs, et le reste de la planète l'a compris et exerce une vengeance axée sur le marketing, en commençant par les Américains.
    Je crois qu'il est important de riposter et de promouvoir plus vigoureusement le Canada à l'étranger, aux États-Unis et ailleurs dans le monde, pour attirer ici des voyageurs internationaux. Ils dépensent beaucoup d'argent, visitent bon nombre d'endroits et contribuent à toutes les facettes de notre économie. C'est important pour nous.
    Oui, il faut miser davantage sur les visiteurs étrangers. David, avez-vous des observations à ce sujet?
    Nous aimons tous les consommateurs, mais les gens d'ici ne font que faire circuler des dollars canadiens au pays.
    En 2002, nous arrivions au 7e rang pour ce qui est des visiteurs étrangers. Nous sommes maintenant au 16e. C'est le plus grand défi auquel fait face notre industrie, le plus grand écart non seulement pour ce qui est du nombre de visiteurs, mais également en ce qui a trait aux sommes qu'ils dépensent. C'est comme n'importe quel portefeuille, monsieur. Nous voulons qu'il soit le plus équilibré possible, et nous dépendons actuellement beaucoup trop des consommateurs canadiens.

  (1225)  

    Est-ce que je peux vous demander à quel point les accords sur l'ouverture de l'espace aérien sont importants pour qu'un plus grand nombre de touristes étrangers viennent dépenser leur argent au Canada dans l'industrie de la musique?
    Greg?
    Nous aimons que les voyageurs du monde entier accèdent librement au Canada. Le transport aérien a des répercussions importantes sur les consommateurs qui viennent assister à nos festivals de musique ou à d'autres manifestations culturelles. Nous voyons donc d'un bon oeil l'accès sans entrave.
    Je me fais une joie à l'idée de m'adresser au Comité sur les transports.
    Mais dans cette optique, ce n'est qu'un des rouages. Comme vous vous en doutez, toutes les destinations courues conjuguent trois éléments clés: le marketing, l'accès et le produit lui-même. L'élément marketing doit pouvoir compter sur le développement de l'accès — ici, l'accès par avion —, mais le produit doit aussi être au rendez-vous. La présence simultanée de ces trois éléments est essentielle au succès qu'aura une destination. Donc, oui, c'est un aspect important, mais ce n'est pas le seul.
    Comment mesurez-vous le produit d'exploitation marginal? Marc, j'aimerais avoir votre point de vue à ce sujet. Comment pouvez-vous dire qu'un investissement supplémentaire de 100 000 $ dans un festival de musique générera des revenus de 1 million de dollars pour les Canadiens? Comment en arrivez-vous à ces conclusions?
    C'est en fait assez facile à mesurer avec les études d'impact économique. La présence des visiteurs — la vente de billets, le nombre d'entrées et ainsi de suite — est mesurée avec la technologie dont nous disposons maintenant. Nous savons exactement d'où viennent les visiteurs.
    Greg, voulez-vous ajouter quelque chose à cela, le rapport entre les revenus marginaux et les dépenses en marketing?
    Nous procédons exactement de la même manière. Nous faisons ce que nous appelons des études de conversion. Nous établissons combien nous avons investi dans un programme de marketing donné, puis nous évaluons le nombre de personnes que le programme a permis de joindre et le nombre de personnes qui sont venues à cause de cela. Nous pouvons ainsi avoir une idée précise du rendement du capital investi dans nos campagnes de marketing. Nous connaissons l'impact que nous avons.
    Souhaitez-vous ajouter quelque chose, Dave?
    J'irais tout à fait dans le même sens que ces messieurs. Je me contenterais d'ajouter que la méthode exposée par M. Klassen pour calculer le rendement du capital investi est reconnue par le Conseil du Trésor. C'est donc une méthode efficace.
    Très bien. J'ai 30 secondes et je vais les partager avec Rick.
    David, j'aimerais revenir sur quelque chose qui a été dit. Nous voulions avoir des gens de l'industrie touristique pour parler de la situation actuelle. Comme les présentateurs précédents nous l'ont dit, les gens qui, de nos jours, décident d'aller dans ce domaine se contentent, au premier chef, de pouvoir en vivre. L'industrie n'est plus axée sur le nombre de copies vendues, sur vos chansons. Il faut maintenant être disposé à s'exposer, à partir en tournée et à s'autopromouvoir. Vous répétez que vous souhaitez attirer les Américains ou des visiteurs d'autres régions du monde au Canada. Cette responsabilité est celle de l'industrie touristique, et je comprends cela.
    Mais du point de vue de la musique, c'est une question à plusieurs facettes. Nous voulons que les Canadiens consomment la musique d'ici pour deux raisons. Nous voulons d'abord qu'ils voient à quel point notre musique est formidable, puis nous souhaitons appuyer les gens de l'industrie, au Canada.
    J'aimerais vous entendre sur toute cette dynamique. Mark l'a très bien expliqué dans le contexte des festivals, notamment en ce qui concerne l'orientation qui doit être préconisée. Je ne sais pas si cela signifie qu'il faut s'associer à Music Canada. Je ne sais pas comment il serait possible de mousser l'aspect festival de l'industrie, mais pouvez-vous nous en dire un peu plus sur la nécessité d'amener les Canadiens à consommer la musique canadienne?
    Rappelons tout d'abord que c'est 80 % du marché. Ensuite — et je crois que Mark a abordé la question —, les spectacles vedettes ont la part du lion, mais ce sont eux qui permettent aux spectacles plus modestes de tourner. C'est grâce à cela s'ils peuvent se faire connaître des Canadiens, mais aussi des auditoires étrangers.
    Vous avez raison de dire que ce sont les tournées et la visibilité qui comptent, et que ces artistes ne seraient pas en mesure de joindre ces auditoires par la technologie numérique. En fait, ils ne seront pas en mesure de se promouvoir par le biais des médias numériques sans ces importants festivals.
    Je suis d'accord avec M. Dykstra. Nos auditoires canadiens sont importants, mais tous ces dollars qui entrent dans l'économie canadienne ne sont pas importants que pour l'industrie touristique. Ce sont eux qui donneront de la visibilité aux spectacles phares, certes, mais aussi à tous les artistes émergents qui sont dans la mêlée.
    Je vois les choses globalement. Lorsque l'on tente de mobiliser la communauté, je crois que l'affirmation de David se vérifie. Les auditoires des spectacles vedettes se composent de Canadiens dans une proportion de 70 à 80 %, mais c'est la prolifération de ce genre de spectacles qui attire le public local et les touristes tout autant, et qui contribue à la santé de toute l'industrie. C'est bon pour l'industrie de la musique, c'est bon pour l'industrie du tourisme. À vrai dire, c'est bon pour l'économie canadienne dans son ensemble.

  (1230)  

    Merci beaucoup.
    Nous allons donner la parole à Mme Mathyssen, pour sept minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
     Merci, monsieur Klassen, monsieur Monahan et monsieur Goldstein, de votre présence. Je crois que vous avez apporté une dynamique nécessaire et très intéressante à cette étude car, comme vous l'avez si bien dit, tous ces aspects constituent un tout. Lorsqu'il s'agit d'appuyer nos collectivités, il n'y a pas de cloisonnement, pas d'isolation, puisque tout est interrelié: l'industrie touristique, le jeune qui essaie d'obtenir un emploi dans un parc près de chez lui ou l'artiste — l'artiste de grand talent — qui produit de la musique magnifique.
    J'ai un certain nombre de questions et j'espère que vous vous sentirez tous libres de répondre.
    Je vais commencer par vous, monsieur Monahan, en ce qui concerne le financement et le soutien. J'ai l'impression que vous aimeriez une assurance en matière de financement, que vous tenez à savoir que, quoi qu'il arrive, il y aura toujours cette base, ce financement assuré à long terme.
    J'ai l'impression que vous avez proposé de multiplier les sources de financement pour les événements dont on attend des résultats, et que vous souhaitez, à tout le moins, que les subventions augmentent. Pouvez-vous nous dire dans quelle mesure cela est important pour l'avenir de l'industrie?
     Tout d'abord, je tiens à vous dire qu'il s'agit là d'une très bonne question.
    La politique actuelle de financement du gouvernement fédéral comporte une lacune et c'est l'absence de focalisation sur le développement économique. Présentement, Patrimoine canadien consacre de l'argent à diverses priorités. Il se peut que certaines d'entre elles soient axées sur le développement économique dans une certaine mesure, mais en ce qui concerne la présentation des arts au Canada, les autres offres de financement possibles n'accordent pas vraiment la priorité au développement économique et au tourisme entourant ces événements de musique de choix. Et c'est ce qui manque. Sur le plan provincial, l'Ontario, le Québec et d'autres provinces disposent de fonds à cet égard. Mais à l'échelon du gouvernement fédéral, personne ne pose la question: qu'allez-vous faire pour nous, pour que cela change quelque chose au Canada? Et je pense notamment aux organismes sans but lucratif qui organisent ces événements de musique. Nous avons besoin de cet appui pour être en mesure de faire ce que nous tentons de faire, c'est-à-dire organiser des événements gratuits pour le public, de garder les coûts bas. Tous ces événements attirent un nombre formidable de touristes, mais ils permettent aussi de créer des événements de plus grande envergure, et c'est ce qui nous manque actuellement pour concurrencer les autres pays. Nous ne sommes pas en mesure de tirer notre épingle du jeu. Nous devons être en mesure de faire face à une industrie hautement compétitive. Nous devons développer l'industrie et nous avons repéré les leaders. FAME a cerné 15 festivals générant 1,1 milliard de dollars. Ce sont eux les gagnants, et vous devez vous associer aux gagnants. C'est en finançant les gagnants que l'on obtiendra l'impact optimal.
    Vous parlez d'édifier les capacités.
    C'est exact.
    Et je comprends cela.
    À London, en Ontario, nous avons deux festivals des plus intéressants. Il y a le Sunfest, tout juste après le 1er juillet. London compte 365 000 habitants. Or, durant ce long week-end, le Sunfest attire plus de 200 000 personnes. Et ça augmente d'année en année. Et, bien entendu, il y a le Home County, qui met en vedette un grand nombre d'artistes locaux de très grand talent.
    Or, les organisateurs du Sunfest affirment que le fait de ne pas demander de prix d'entrée les empêche de recevoir de l'argent du gouvernement fédéral. Ils disent que le festival serait admissible si l'accès au parc était payant. Je ne comprends pas. Pouvez-vous éclairer ma lanterne à ce sujet? Pourquoi le gouvernement fédéral n'appuie-t-il pas ce très populaire festival qui arrive à attirer près d'un quart de million de visiteurs dans une ville de taille moyenne? Et ces visiteurs dépensent des sommes colossales.
    Je ne saurais vous expliquer pourquoi le festival n'arrive pas à obtenir du financement. Je ne vois pas pourquoi on leur en refuserait. Le fait demeure qu'un événement gratuit de la sorte doit être appuyé. Si le festival a une telle incidence sur l'économie locale, on devrait l'appuyer sans réserve. S'il arrive à attirer si bien la collectivité, on devrait le financer.
    Oui, je suis tout à fait d'accord. Et j'ai écrit des lettres pour demander ce type d'appui car, avec ses 20 ans d'existence, le festival est devenu l'événement phare de l'été.

  (1235)  

    Mais comme vous pouvez le constater, il n'y a aucun fonds à l'échelon fédéral pour promouvoir le développement économique associé à la musique. S'il y en avait un, les organisateurs de Sunfest pourraient obtenir du financement.
    D'accord. Alors, ce fonds doit être créé.
    Exactement.
    D'accord.
    Monsieur Goldstein, j'ai été très intéressée par votre observation sur le problème du taux de croissance des visites de l'étranger au Canada. Ce taux est de 1,5 % comparativement à 5 % à l'échelle mondiale. A-t-il toujours été aussi bas, ou si l'érosion découle de l'attentat du 11 septembre, du renforcement des contrôles frontaliers ou d'autre chose encore? Je me demandais si les restrictions relatives à l'obtention des visas avaient quelque chose à voir là-dedans, car c'est un autre problème qui m'est constamment signalé. Certaines personnes aimeraient tellement recevoir les leurs pour des événements à caractère familial, mais elles ne le peuvent pas. Il y a cet obstacle qui semble dissuader beaucoup de familles. Est-ce un problème important?
    Oui, et j'aimerais bien en discuter un jour avec le comité sur l'immigration. En fait, nous leur en avons déjà parlé. Vos collègues du Comité de la citoyenneté et de l'immigration viennent tout juste de préparer un rapport exhaustif à ce sujet, et nous attendons une réponse du gouvernement.
    Comme je l'ai dit, nous plaçons les mesures pour faciliter l'accès des visiteurs — comme l'obtention des visas et l'accès aérien — sous la même rubrique « accès ». On en revient donc aux trois volets nécessaires: le marketing, l'accès et le produit. Et l'on a vraiment affaire à un phénomène qui s'étend sur 10 ans. Au centre de la question, on pourrait dire que tout a commencé avec les attentats du 11 septembre, mais il y a eu d'autres événements depuis, que ce soit la crise du SRAS ou le ralentissement économique. Mais le vent est en train de tourner.
    Ensuite, pour vous donner une perspective mondiale, rappelez-vous qu'il y a 10 ou 15 ans, il y avait certains endroits sur la planète où l'on ne pouvait pas se permettre de voyager, voire où il était interdit de voyager. Mais comme les choses ont changé, il y a une quantité énorme de personnes qui se sont mises à voyager. Comme M. Klassen ou moi l'avons dit, c'est ce qui explique pourquoi, à l'échelle internationale, ce secteur est au quatrième rang de ceux qui se développent le plus vite. Alors, c'est le moment ou jamais de passer à l'action. Si nous arrivons à bien aligner le marketing, l'accès et le produit, nous deviendrons une destination extrêmement concurrentielle.
    Alors, le mouvement est amorcé et nous devrions être prêts à grimper à bord. D'accord.
    Merci beaucoup.
    La parole est maintenant à Mme Jones, pour sept minutes.
    Voilà qui est très intéressant.
    Je trouve un peu inquiétant d'apprendre que les Canadiens constituent 80 % du marché actuel et qu'il n'y a que 20 % des visiteurs qui viennent de l'extérieur du pays. Je crois que le fait d'obtenir de la visibilité et d'être en mesure d'attirer les visiteurs de l'étranger avec ce que nous faisons en tant que pays est très profitable pour nous.
    Certains ont proposé qu'on organise une campagne de marketing internationale publique-privée dans le but d'améliorer la visibilité de l'offre canadienne en matière de festivals, et de se servir de cela pour susciter plus d'intérêt et multiplier le nombre de touristes étrangers. Comme vous l'avez dit, Mark, une telle campagne pourrait faire des merveilles à l'égard des possibilités économiques associées au travail que vous faites.
    J'aimerais savoir ce que vous pensez de cette initiative et de la façon dont elle devrait être menée pour appuyer le travail que vous faites.
    Il y a une initiative particulière sur laquelle FAME travaille et que nous appuyons. Mais je vais laisser Mark vous en parler.
    La première réponse à votre question, madame Jones, est qu'une bonne partie de ce travail de collaboration se fait déjà par l'entremise de la Commission canadienne du tourisme. La commission et nous avons présenté une proposition au gouvernement, intitulée Connecting America, qui vise spécifiquement le marché américain. Nous proposons un coinvestissement du gouvernement fédéral et du secteur privé à hauteur de 35 millions de dollars par an pour les trois prochaines années afin de stimuler ou, si vous préférez, de ranimer le marché américain. Le grand axe de cette initiative sera la programmation des festivals, notamment les festivals de musique et les événements sportifs.
    Cette proposition est actuellement entre les mains du ministre Bernier. Des discussions se déroulent à l'échelle du gouvernement et nous aimerions pouvoir compter sur votre appui.
    Merci.
    Nous appuyons sans réserve la Commission canadienne du tourisme et nous lui donnons tout ce qu'il lui faut pour attirer plus de gens au Canada. Nous savons qu'il faut livrer le produit, comme c'est le cas avec les événements musicaux phares. Nous ne sommes pas des experts en marketing: notre savoir-faire consiste à créer le meilleur produit possible pour attirer le plus de gens possible. Nos efforts visent cet objectif et c'est pour nous aider à l'atteindre que nous souhaitons obtenir un appui.

  (1240)  

    Merci.
    Monsieur Klassen, avez-vous quelque chose à dire à ce sujet?
    Bien sûr. Merci beaucoup.
    Vous avez tout à fait raison. Ce que je tiens à rappeler, c'est que nous sommes toujours un partenariat public-privé. Nous travaillons en étroite collaboration avec d'autres ordres de gouvernement et avec le secteur privé afin de coinvestir nos dollars dans 12 pays d'un peu partout dans le monde.
    Nous croyons que le moment et les conditions sont désormais propices à une offensive beaucoup plus soutenue pour tenter de marquer des points sur le marché américain, du jamais vu depuis l'épisode du SRAS. Il y a toujours ce renforcement des contrôles frontaliers. Le dollar canadien a perdu beaucoup de sa valeur, ce qui devrait aider un peu; nous voyons arriver beaucoup plus de passagers du transport aérien en provenance des États-Unis au Canada. Alors, nous entrevoyons un potentiel énorme.
    Nous avons aussi des statistiques qui nous indiquent que 60 % des Américains sont disposés à voyager pour assister à un festival de musique et que près de 20 % affirment que ce serait leur principale raison de voyager.
    Le Canada a ses festivals de musique de grande renommée, et certains autres dont la réputation n'est pas encore tout à fait là ou qui sont sur le point d'accéder à cette notoriété, et qui ne demandent qu'à être découverts par les voyageurs étrangers. Au risque de me répéter, le fait qu'un artiste canadien de haut calibre soit découvert par les Américains ou par des gens d'ailleurs est probablement la meilleure façon d'accroître la notoriété de cet artiste dans d'autres marchés du monde, surtout que l'on peut maintenant compter sur cet outil d'une puissance inouïe que sont les médias sociaux.
    Merci.
    Ai-je le temps de poser une autre question?
    Il vous reste environ deux minutes et demie.
    Je me demande notamment quelque chose, et peut-être que les autres en sont déjà au courant... Nous avons dit que les artistes peuvent gagner des revenus et avons mentionné à quel point les maisons de disques sont devenues à bien des égards des moyens de promotion pour eux.
    En ce qui concerne vos événements, y a-t-il un pourcentage des revenus provenant de la vente de billets qui est remis aux maisons de disques, aux artistes, aux producteurs, aux créateurs ou à toute autre personne qui joue un rôle? Le cas échéant, comment le tout est-il négocié? Pourriez-vous nous dire quelques mots à ce sujet?
    En gros, pour ce qui est d’un festival comme le nôtre, environ la moitié de nos revenus globaux servent à payer les frais des artistes. Cet argent est versé à des centaines d’artistes ou de groupes différents. Honnêtement, pour les artistes de renom, nous négocions vraiment avec les agents. Par exemple, si nous négocions en vue de faire venir Lady Gaga, comme nous l’avons fait cette année, ce n’est pas de tout repos, mais on finit par conclure une entente.
    Nous avons ensuite un autre groupe d’artistes — soit la majorité en fait — qui ne nécessite pas vraiment de négociations. Nous réservons un budget pour ces autres artistes, et nous faisons venir les artistes qui, selon nous, intéresseront les gens et susciteront un certain engouement. Enfin, nous avons un troisième groupe d’artistes, qui sont des artistes canadiens ou locaux et qui ne sont pas vraiment invités à se produire sur scène, parce que nous pensons qu’ils nous aideront à vendre des billets. Ils sont là, parce que nous les considérons comme des artistes importants qui auront un grand effet sur les spectateurs. Comme vous l’avez mentionné, les maisons de disques font maintenant office de meneuses de claque; elles ne sont plus le moteur de l’industrie. Nous ne nous attardons pas sur le nombre de disques vendus, parce qu’on n'en vend plus. Nous examinons la prestation sur scène des artistes, à savoir si les spectateurs présents en auront pour leur argent, parce que nous faisons la promotion de prestations musicales.
    Vouliez-vous ajouter quelque chose, monsieur Klassen?
    Je suis tout à fait d’accord avec son commentaire. C’est l’engouement qui nous aide à vendre des billets au Canada et à l’étranger.
    Merci, monsieur le président.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Falk, vous avez sept minutes.
    Merci, monsieur le président. Merci aux témoins de leur présence.
    J’essaye toujours de suivre l’argent dans tout, et il me semble qu’il y ait de l’argent au sein de l’industrie, mais on dirait que certaines parties de l’industrie se portent très bien, alors que d’autres éprouvent de la difficulté. Nous entendons sans cesse dire que les artistes, les musiciens et les compositeurs ne reçoivent pas leur juste part ou qu’on ne reconnaît pas financièrement leur travail.
    Monsieur Monahan, vous avez fait des commentaires intéressants au début de votre exposé, à savoir que vous n’avez jamais vu une telle croissance dans l’industrie de la musique et qu’environ le même nombre de musiciens vivent de leur art et que leurs revenus sont assez stables.
    Pourriez-vous nous en dire davantage sur le sujet? Que constatez-vous sur le terrain? Sur quoi basez-vous cette affirmation?

  (1245)  

    Encore une fois, je me fonde sur mes conversations avec des dirigeants de l’industrie du disque. Je suis dans l’industrie depuis maintenant environ 30 ans, et je considère de manière générale que les gens se plaignaient que les artistes ne faisaient pas d’argent il y a 20 ans, parce que la majorité des artistes ne gagnaient pas un rond. Les maisons de disques accordaient, par exemple, un contrat de 0,5 million de dollars à un artiste, et l’artiste n’avait dans bien des cas plus rien en fin de compte, parce que tous les fonds étaient engloutis dans la commercialisation, la création, la production, etc.
    Par le passé, les maisons de disques disaient aux artistes qu’elles produiraient un disque et que le disque ne leur servirait qu’à gagner de la notoriété en vue de leur permettre de se produire sur scène et de gagner un revenu. Eh bien, la donne n’a pas changé. C’est encore la réalité. L’artiste ne gagne toujours pas d’argent. Il gagne des revenus lorsqu’il se produit sur scène.
    À mon avis, c’est vraiment ce que je veux faire valoir. Ce n’est pas l’argent que gagnent les artistes qui motive la diffusion de la musique. C’est plutôt le désir de créer de la musique. La croissance du nombre de personnes qui écoutent de la musique ne porte pas sur l’achat de disques; c’est lié à leur intérêt à vouloir en écouter. Bref, ce n’est pas vraiment motivé par l’argent.
    C’est un concept intéressant.
    J’aimerais que les autres témoins nous expliquent exactement comment ils perçoivent leur organisme, la promotion et l’encouragement des musiciens et des artistes au moyen de ce qu’ils font. Je pose ma question à MM. Klassen et Goldstein.
    Eh bien, l’organisme de M. Klassen s’occupe de la promotion. Je lui laisse donc le soin vous répondre à cet égard.
    Notre travail est vraiment de conclure des partenariats entre les secteurs public et privé pour faire du Canada une destination concurrentielle. Pour reprendre ce qu’a dit plus tôt M. Klassen, il s’agit en majorité d’organisations de festivals sans but lucratif, et tous ces festivals ont des partenariats avec le secteur privé, ce qui permet de multiplier les fonds. Donc, chaque dollar investi, provenant des secteurs public ou privé, joue un rôle dans cette multiplication. Prenons l’exemple des étages d’un sandwich club. Plus il y a de viande, ou plus la participation des investisseurs est grande, et plus cela entraîne une augmentation des investissements.
    Parfait. Merci. Je compléterai la réponse.
    Premièrement, comme je l’ai dit, nous sommes présents dans environ 12 pays dans le monde. Nous participons à des salons commerciaux, nous nous occupons de la commercialisation et nous organisons des activités de relations publiques dans tous ces pays. Nous sommes souvent accompagnés d’artistes canadiens en vue de leur permettre de se produire et de prendre part aux divers événements, parce qu’encore une fois les coins du triangle que forment les gens au Canada et la géographie du pays sont habilement arrondis lorsque nous parlons de la culture du Canada, et nous avons besoin de plus de dynamisme à cet égard.
    Comme nous l’avons mentionné, FAME représente les 15 principaux festivals et événements. Il s’agit des plus connus et de ceux qui ont le plus de chances d’attirer des voyageurs étrangers, et nous nous servons de ces 15 festivals et événements pour inciter les gens à venir au Canada. Cela nous permet d’inciter des gens à venir pour la première fois au Canada et à découvrir des festivals et des artistes canadiens, mais aussi c’est aussi possible que ces touristes reviennent d’une année à l’autre, en particulier les voyageurs américains. Nous profitons donc encore une fois de cette occasion pour attirer des voyageurs étrangers au Canada et mettre l’accent sur ce groupe.
    Le troisième aspect est que nous faisons en fait venir un artiste pour créer sur commande des oeuvres musicales ou liées de près à la musique, comme un poème avec de la musique. Nous avons fait appel à Shane Koyczan. Nous avons créé une ode au Canada qui a été utilisée depuis sur la scène olympique et à bien d’autres occasions. Nous avons eu l’occasion de présenter Shane à des milliards de gens dans le monde, et nous avons aussi connu beaucoup de succès. Nous aimerions trouver d’autres artistes comme Shane et répéter l’expérience.
    D’accord. Nous sommes certainement reconnaissants de votre travail en la matière.
    Vous avez brièvement parlé du développement économique, mais il manque une pièce du casse-tête. Décrivez-nous un peu ce que vous entendez par cela.

  (1250)  

    En ce qui a trait aux festivals?
    Je crois que vous avez dit que nous ne mettions pas l’accent sur le développement économique et qu’il y avait des lacunes en la matière.
    En effet.
    Il y a quelques années, Patrimoine Canada offrait du financement par l’entremise de divers programmes qui mettaient grandement l’accent sur la diffusion de la musique, le soutien aux artistes, etc. Par contre, ses programmes ne mettaient pas vraiment l’accent sur les évènements et la manière dont ces évènements peuvent stimuler le développement économique par la musique.
    Ce que j’essaye de faire valoir, c’est que nous avons brièvement mis un tel accent durant deux ans avec le programme des manifestations touristiques de renom, qui a permis la création et la promotion de certaines initiatives très importantes. Cependant, nous n’avons pas été en mesure de les soutenir, parce que dans bien des cas nous n’avions pas eu l’occasion d’attirer suffisamment de commandites privées et d’autres sources de revenus gagnés pour soutenir de manière continue ces initiatives. Le programme a été de trop courte durée. Il s’agissait d’un programme de développement économique qui est arrivé et qui est reparti. C’est vraiment ce que je recommande. Si l’on se penche sur un programme futur, il faut qu’il perdure et il faut investir des fonds sur plusieurs années, parce qu’à l’instar de tout autre projet on ne peut pas faire des investissements sur une ou deux années et espérer que l’entreprise puisse tout simplement maintenir la même cadence par la suite.
    Combien de temps me reste-t-il, monsieur le président?
    Il vous en reste un peu.
    Je ne comprends pas encore vraiment ce que vous entendez par un investissement dans le développement économique. Pourriez-vous nous en parler davantage? Est-il question de sites de spectacles et des prestations?
    La beauté de la majorité des festivals de musique comme le nôtre ou le Festival de jazz de Montréal, c’est que nous n’avons pas besoin d’infrastructure. Nous ne demandons pas de construire un système léger sur rail. Nous parlons de créer des idées et des évènements éphémères. Donc, l’investissement requis n’est pas le même que lorsqu’il est question d’un programme d’infrastructure de 1 milliard de dollars. Un investissement de 1, 2 ou 3 millions de dollars pour un évènement peut mener à la création d’une nouvelle série. Nous avons organisé des activités gratuites à l’extérieur pendant 10 jours dans le marché à Ottawa dans le cadre du programme des manifestations touristiques de renom. Ces projets ont coûté, dans certains cas, 1 ou 2 millions de dollars, mais ils ont généré des millions de dollars en avantages économiques.
    Les organismes sans but lucratif vous permettent de vraiment obtenir d’énormes avantages, parce que nous avons la capacité de transformer immédiatement ces investissements en projets. Il n’est pas question d’essayer de construire une infrastructure qui entrera en service dans des années. Nous pouvons créer d’ici 12 mois quelque chose qui aura un effet immédiat.
    Merci, monsieur le président.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Nantel, allez-y.

[Français]

     Vous disposez de cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.

[Traduction]

    J’invite les témoins à utiliser leur oreillette pour l’interprétation. En particulier, monsieur Klassen, si je parle français, entendrez-vous l’interprétation?

[Français]

    Oui, je comprends bien. Merci.
    Merci.

[Traduction]

    Vous avez parlé de FAME et du rôle important que l’organisme joue en vue d’attirer beaucoup de spectateurs aux grands évènements, de faire venir des artistes dans les collectivités et d’également donner l’occasion aux artistes peu connus de se faire découvrir et de monter sur scène.

[Français]

    La semaine dernière, j'ai assisté à un événement organisé par le Conseil des relations internationales de Montréal, soit le CORIM, où il y a eu une conférence intitulée « L'avenir des festivals à Montréal: renouvellement et rayonnement international ». On est en plein dans le bon sujet.
    J'étais le seul député fédéral sur place. J'ai été abordé par le porte-parole du Regroupement des événements majeurs internationaux, le REMI, qui est le pendant québécois de FAME. Ce porte-parole me disait avoir constaté que, d'après le chiffre d'affaires cumulé des membres du REMI, le financement avait diminué de 22 à 18 %, baisse qui est attribuable à la fin du Programme des manifestations touristiques de renom. En 2010, la contribution du fédéral représentait 12,4 %; aujourd'hui, elle n'est que de 4,4 %.
    Voyez-vous une incohérence entre l'importance accordée à vos événements et ce retrait du financement fédéral?
    Messieurs Klassen, Goldstein et Monahan, vous êtes tous touchés par cela.
    Je vais commencer.
    Allez-y.

  (1255)  

    C'est une question d'équilibre.
    Je vais commencer par mentionner un fait important. Selon les sondages, le Canada est l'une des premières destinations de choix des voyageurs étrangers. Les festivals sont l'une des raisons pour lesquelles ils décident de venir au Canada. On s'entend tous pour dire que c'est grâce à l'investissement du gouvernement fédéral, des provinces et du secteur privé.
    Lorsque le Programme des manifestations touristiques de renom a pris fin, il y a eu une diminution du financement. Comme M. Monahan l'a dit, on espère qu'il y aura un autre programme de ce genre. Il est important qu'un tel programme fasse partie d'une stratégie touristique globale. Le Programme des manifestations touristiques de renom était l'un des programmes sous le

[Traduction]

    programme de relance.

[Français]

    Maintenant, il y a une stratégie touristique fédérale. On veut avoir un programme de ce genre non seulement pour les grands festivals, mais pour tous les festivals partout au Canada.
    Merci, monsieur Goldstein.
    Monsieur Klassen, espérez-vous que le gouvernement agira plus vite à cet égard?

[Traduction]

    Je vous répondrai en français.
    Cela revient partiellement à ce à quoi M. Goldstein a fait allusion en ce qui concerne le produit. Nous savons que les festivals représentent une part importante des produits que nous vendons. Nous essayons de faire la promotion de ces produits partout au Canada, qu’il s’agisse de festivals, d’évènements ou de divers types d’expérience que les voyageurs étrangers peuvent vivre. Nous essayons de souligner les meilleurs produits.
    Nous avons regroupé le tout dans ce que nous appelons la collection d’expériences canadiennes, et bon nombre de festivals en font partie. Nous en faisons ensuite la promotion sur la scène internationale. Nous ne disposons pas des fonds nécessaires pour promouvoir directement ces festivals, mais nous essayons de convaincre les voyageurs étrangers que le Canada est une destination de choix pour les festivals et les évènements de manière à mettre en valeur l’aspect culturel du triangle dont j’ai parlé plus tôt.
    Bref, il est extrêmement important de disposer des fonds pour ce faire et de conclure un partenariat exhaustif avec l’industrie des festivals, comme nous le faisons dans le cas de FAME. C’est très important et c’est l’élément essentiel qui contribuera à notre succès à tous.
    C’est exact.
    Merci beaucoup, monsieur Nantel.

[Français]

    Votre temps de parole est écoulé.

[Traduction]

    Je tiens à remercier nos témoins de leur présence. Merci de votre contribution à notre étude. Ce nous sera utile. Le tourisme occupe une grande place dans l’industrie. Si vous avez d’autres éléments à nous communiquer, veuillez nous en faire part par écrit.
    Sur ce, la séance est levée.
Explorateur de la publication
Explorateur de la publication
ParlVU