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HESA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la santé


NUMÉRO 077 
l
1re SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 5 mars 2013

[Enregistrement électronique]

(1530)

[Traduction]

    Bonjour à tous et bienvenue au Comité de la santé. Nous sommes très heureux de vous recevoir aujourd'hui.
    Je veux souhaiter la bienvenue à M. Boulerice au sein de notre comité. Nous sommes ravis que vous soyez des nôtres aujourd'hui.
    Je tiens également à souhaiter la bienvenue aux invitées de Mme Sellah, Leah, Tasha et Sarah, qui sont, je crois, de l'Université de Toronto.
    Une voix: C'est bien cela.
    La présidente: Bienvenue à vous trois. Je suis très heureuse de vous accueillir à cette séance du Comité de la santé, l'un des plus fascinants qui soit, cela dit sans aucun parti pris.
    Vous aurez l'occasion aujourd'hui d'entendre deux formidables témoins, à savoir le Dr Pierre Meulien, président de Génome Canada et le Dr Aled Edwards, directeur et chef de la direction du Structural Genomics Consortium qui a une présentation PowerPoint pour nous. Bienvenue à tous les deux.
    Je vais demander à M. Meulien de commencer.

[Français]

    Merci, madame la présidente.
    Je remercie les membres du comité.
    Je ferai ma présentation en anglais, mais il me fera plaisir de vous répondre en français, si vous le voulez, lors de la période des questions.

[Traduction]

    Mesdames et messieurs les membres du comité, je suis très heureux de pouvoir contribuer, au nom de Génome Canada, à votre étude sur l'innovation technologique, et notamment sur les pratiques exemplaires en matière de soins de santé au Canada.
    Comme vous le savez sans doute, la génomique est la science qui vise à décoder et comprendre l'ensemble de l'information génétique de tous les organismes vivants. C'est donc une science fondamentale pour tous les travaux de recherche en biologie, car elle jette un éclairage révélateur sur un large éventail de questions à propos de la vie. La génomique est une science relativement récente dont le potentiel est rapidement exploité grâce aux nouvelles technologies, ce qui pourrait influer grandement sur les soins de santé et bien d'autres secteurs au Canada.
    Avant de vous présenter quelques-unes des applications et des implications de la technologie génomique au niveau des soins de santé, permettez-moi de vous dire quelques mots au sujet de Génome Canada. Nous sommes une organisation sans but lucratif qui se consacre au développement et à l'application de la science et de la technologie génomiques pour favoriser la prospérité et le mieux-être social des Canadiens. Nous travaillons en étroite collaboration avec six centres du génome régionaux ainsi qu'avec les gouvernements fédéral et provinciaux, le milieu universitaire et l'industrie.
    Nous finançons et dirigeons de vastes travaux de recherche et nous employons à concrétiser les découvertes sous forme de débouchés commerciaux, de nouvelles technologies, d'applications et de solutions dans les principaux secteurs de l'économie liés aux sciences de la vie. Il s'agit notamment des secteurs de la santé humaine, bien évidemment, mais aussi de l'agriculture, des pêches, de la foresterie, de l'environnement, de l'énergie et même des mines.
    Dans tous nos travaux, nous voyons en priorité à considérer les aspects éthiques, environnementaux, économiques, légaux et sociaux de la génomique — c'est ce qu'on appelle l'approche GE3LS. Nous cherchons ainsi à aider les décideurs publics et les autres intervenants à mieux comprendre les impacts globaux du travail scientifique de manière à accélérer son acceptation et la mise en application des innovations au sein de la société.
    Depuis 2000, le gouvernement du Canada a investi un milliard de dollars dans la réalisation de notre mandat, et nous avons su mettre à profit cette contribution pour obtenir un milliard de dollars supplémentaire en cofinancement afin d'appuyer notre travail au cours de la même période. Plus de 60 p. 100 du montant total de 2 milliards de dollars a été investi dans des applications et des travaux de recherche liés à la santé.
    Ces investissements ont déjà porté fruit comme en témoignent les découvertes canadiennes en génomique qui ont sauvé des vies, amélioré les traitements dispensés aux patients et réduit les coûts des soins de santé.
    Si la génomique a pu être un véritable agent de changement dans les soins de santé au Canada et ailleurs dans le monde, c'est principalement grâce aux progrès technologiques sans précédent qui nous permettent maintenant de lire l'ADN et de déchiffrer ainsi le code personnel de vie de chacun. Très bientôt, il devrait être possible pour chacun de nous de faire séquencer rapidement et à peu de frais son génome personnel à des fins d'analyse pour une vaste gamme d'examens de santé.
    Il a fallu des investissements de 3 milliards de dollars et le travail de milliers de scientifiques pendant toute une décennie pour parvenir une toute première fois à séquencer le génome humain en 2003. Moins de 10 ans plus tard, n'importe lequel des nombreux centres de séquençage génomique sur la planète — et il y en a trois de calibre mondial au Canada — peut faire le même travail en quelques jours à peine pour seulement 3 000 $, un coût qui diminue chaque semaine.
    Dans moins d'une décennie, on a ainsi pu diviser par un million le coût d'une opération importante, une évolution ultrarapide dont très peu d'autres domaines des sciences et de la technologie — voire aucun — peuvent se targuer.
    Il va de soi que les professionnels de la santé, les décideurs publics et les patients eux-mêmes s'interrogent beaucoup sur la façon dont cette technologie accessible depuis peu pourra être mise en application en milieu clinique. Qui analysera cette information et de quelle manière, à qui appartiendront les données et comment parviendra-t-on à intégrer ce nouveau concept de médecine au sein d'un système de santé déjà fortement mis à contribution?
    Pour répondre à ces questions, il nous faut d'abord comprendre ce que notre génome personnel peut nous dire ou non au sujet de notre état de santé et du risque que nous contractions certaines maladies à un âge plus avancé.
    La mesure dans laquelle nos gènes exercent une influence sur notre santé varie grandement selon le problème ou la maladie dont il est question. À une extrémité du spectre, on trouve les maladies déterminées par un seul gène dont certaines sont extrêmement rares et d'autres plus courantes, comme la fibrose kystique, certaines formes de troubles hémorragiques dont l'hémophilie, et la maladie de Huntington. La composante génétique est le facteur principal, voire le seul, à l'origine de ces maladies. Autrement dit, peu importe les facteurs environnementaux qui entrent en jeu, si vous avez la malchance d'avoir le gène défectueux qui cause l'une de ces maladies, vous allez fort probablement la contracter.
(1535)
    À l'autre extrémité du spectre, on retrouve les maladies chroniques, des problèmes beaucoup plus courants pouvant originer d'une sorte de conspiration entre plusieurs gènes pour accroître les risques qu'une personne soit touchée, mais qui ne peuvent se manifester qu'en présence de certains facteurs environnementaux.
    Le diabète de type 2 est le meilleur exemple que je puisse vous donner. Des facteurs génétiques complexes entrent en ligne de compte pour la plupart des personnes atteintes, mais la maladie se manifestera plus facilement chez celles qui, par exemple, ne font pas d'exercice régulièrement, se nourrissent mal ou consomment des quantités d'alcool anormalement élevées. Soit dit en passant, la fréquence des cas de diabète de type 2 tout particulièrement fait grimper les coûts des soins de santé à des niveaux inabordables dans la plupart des pays développés.
    Tout ça pour vous dire que le décodage de notre génome personnel joue un rôle important, quoique partiel, dans nos efforts pour lutter contre les maladies et relever les défis de notre système de santé.
    Alors, qu'est-ce qui se fait concrètement pour exploiter au mieux cette technologie? Nos autorités sanitaires ainsi que nos ministres provinciaux et fédérale de la Santé confrontent à juste titre les promoteurs de la technologie génomique pour savoir comment on pourrait l'intégrer de manière économiquement durable à notre système de soins de santé.
    C'est un défi que s'emploie à relever Génome Canada, en partenariat avec les Instituts de recherche en santé du Canada et les centres du génome régionaux. L'an dernier, la ministre de la Santé et le ministre d’État (Sciences et Technologie) nous ont appuyés conjointement lors du lancement d'une nouvelle initiative de recherche appliquée de grande envergure sur une approche personnalisée en santé qui est dotée d'un budget de 150 millions de dollars.
    Nous avons convié des équipes de projet de partout au pays à formuler des propositions visant une utilisation optimale des meilleures technologies disponibles dans le monde pour répondre à des besoins médicaux criants, tout en incluant une justification économique des motifs pour lesquels les autorités sanitaires devraient agir proactivement en adoptant ces nouvelles technologies. Autrement dit, les projets retenus devront établir les moyens mis en oeuvre pour servir au mieux les intérêts du système de santé dans son ensemble. Nous serons en mesure d'annoncer dans un avenir rapproché les résultats de cette demande de propositions.
    La génomique est déjà mise à contribution dans certains secteurs de notre système de santé. Elle aide notamment à décider du traitement approprié pour de nombreuses formes de cancer. Le Canada joue d'ailleurs un rôle de premier plan à l'échelle internationale à titre de coordonnateur du Consortium international de génomique du cancer.
    La recherche canadienne en génomique a aussi contribué à prévenir la mortalité infantile. Une étude financée par Génome Canada a permis d'isoler il y a plusieurs années un facteur génétique à la base de certaines formes du syndrome de mort subite du nourrisson. Les risques étaient liés à la consommation de codéine par les mères allaitantes. Dès que les résultats de cette étude ont été rendus publics, Santé Canada et la Food and Drug Administration aux États-Unis ont modifié l'étiquetage de la codéine pour en interdire l'utilisation au cours de la période postnatale.
    Le domaine des effets indésirables des médicaments est propice à des applications bien documentées s'appuyant sur une base génomique, car la composante génétique y est également dominante dans bien des cas. C'est un aspect non négligeable compte tenu des coûts de 7 milliards de dollars par année qu'entraînent les effets indésirables des médicaments pour le système de santé des Canadiens. Imaginez si l'on pouvait réduire ce chiffre ne serait-ce que de moitié.
    Il faut s'attendre à d'autres transformations importantes d'ici trois ou quatre ans alors que les progrès réalisés en génomique auront un impact sur le traitement de problèmes de santé aussi diversifiés que l'épilepsie, l'autisme, la schizophrénie, les maladies cardiovasculaires, le cancer et de nombreuses maladies inflammatoires.
    Et ce n'est qu'un début. Le Canada est idéalement positionné pour récolter les fruits de ces avancées technologiques, notamment grâce à la capacité de recherche de calibre mondial dont nous nous sommes dotés au cours de la dernière décennie. Les excellentes possibilités d'une intégration efficiente au sein du système de santé sont attribuables à une infrastructure de prestation des soins misant grandement sur la recherche et au fait que le Canada peut compter sur quelques-uns des meilleurs réseaux au monde pour la recherche clinique sur des maladies particulières.
    Cela étant dit, il y a assurément des difficultés d'ordre plus général, bien connues de votre comité, que le Canada doit surmonter afin d'établir et de maintenir un système de santé moderne et financièrement viable et de favoriser une intégration efficiente et efficace de la génomique. Cela doit passer notamment par le dossier électronique de santé; des systèmes provinciaux efficients, modernes et harmonisés pour l'évaluation des technologies médicales; des modules d'enseignement et de formation pour les professionnels de la santé en génomique avec les modifications correspondantes aux programmes d'étude des facultés de médecine; une interface plus évoluée entre la recherche en santé et la prestation des soins; et des partenariats de recherche productifs avec le secteur privé.
    En outre, les patients et leurs groupes de défense auront un important mot à dire dans la suite des choses, et chacun sera responsable du maintien et du suivi de son état de santé et de la modification de ses comportements au fil des ans. Malgré les difficultés qui s'y rattachent, ce concept de prise en charge individuelle sera primordial et le soutien financier du gouvernement sera nécessaire pour encourager les Canadiens à adopter de saines habitudes de vie.
(1540)
    Au nom de Génome Canada, je veux remercier le comité pour le temps que vous nous avez consacré et l'attention que vous apporterez à nos propos.
    Merci, pour cet exposé extrêmement intéressant. Le rythme de croissance de cette industrie est époustouflant.
    Merci encore une fois.
    Nous allons maintenant entendre M. Edwards qui a une présentation PowerPoint pour nous.
    Oui, il semble bien que l'on ne soit plus capable de prendre la parole sans ces présentations.
    Je m'inspire aujourd'hui des tactiques des politiciens. Je ne vais pas répondre à la question que vous avez posée, mais plutôt à celle que j'aurais aimé entendre.
    Je suis professeur à l'Université de Toronto et à Oxford, et je dirige ce partenariat public-privé entre le Canada et le Royaume-Uni auquel le Brésil se joindra bientôt. Nous intervenons aux premières étapes de la découverte de médicaments. Il s'agit de voir comment on peut accélérer les choses.
    J'aimerais vous expliquer les motivations de nos actions et le rôle que le Canada peut jouer en tant que chef de file — ce qui n'est pas chose courante — plutôt que de suivre la parade.
    Je crois que vous connaissez déjà les principaux problèmes que nous souhaitons solutionner. Alors que c'est la période de l'année où vous préparez des budgets, vous constatez certes que les coûts des soins de santé augmentent de 6 p. 100 par année — en tout cas, cela n'échappe pas à vos homologues provinciaux. Il n'y a pas beaucoup de marge de manoeuvre quant à la manière dont les sommes disponibles peuvent être dépensées. En outre, comme nous ne rajeunissons pas et que la moyenne d'enfants par couple diminue, le régime canadien se heurte à un obstacle d'ordre démographique.
    La création de nouveaux médicaments peut notamment se justifier du fait qu'ils sont plus rentables. Les médicaments efficaces permettent en effet de réduire les coûts pour le système de santé, mais l'industrie dans son ensemble — et c'est un phénomène mondial — n'invente malheureusement pas de nouveaux médicaments, surtout pour les maladies chroniques et celles qui touchent le plus grand nombre d'entre nous.
    Novartis, l'une des meilleures entreprises pharmaceutiques au monde, a cessé toute recherche sur la maladie d'Alzheimer sous prétexte que l'exercice était trop exigeant.
    En 2050, 25 p. 100 de la population canadienne sera âgée de plus de 65 ans. Au Japon, cette proportion atteindra 41 p. 100. Comme c'est à partir de cet âge que les maladies chroniques commencent à se manifester, nous avons vraiment un problème.
    Je ne serai jamais politicien, car je suis incapable de suivre mon texte. Je me placerais trop facilement dans l'eau chaude.
    Dans le contexte de la rationalisation de l'industrie, le Canada se retrouve parmi les perdants. Boehringer Ingelheim a fermé ses installations de recherche à Montréal. Merck en a fait tout autant. Le même phénomène se produit dans tous les pays occidentaux.
    Lorsque l'industrie ne crée pas de médicaments innovants, elle va s'installer dans les pays comme la Chine et l'Inde où les clients sont plus nombreux. Si vous n'avez rien de nouveau à vendre, vous essayez de vendre vos produits actuels à un plus grand nombre de personnes. Cette approche tout à fait logique du point de vue des affaires mine nos efforts pour contrer la maladie d'Alzheimer et tous les autres problèmes de santé qui vont nous toucher.
    Loin de moi l'intention de vous décourager outre mesure. Je pense qu'il est vraiment possible pour le Canada d'avoir un impact sur ces problèmes qui affectent également le reste de la planète. Mais qui va inventer les nouveaux médicaments? C'est l'une des grandes questions à se poser.
    L'industrie se demande maintenant pourquoi il n'est plus possible de créer de nouveaux médicaments. Autant l'industrie que les médecins et les professeurs comme moi convenons désormais que nous ne comprenons pas suffisamment la biologie humaine. C'est la raison principale. Il n'y a pas de crise de l'innovation. Il n'y a pas d'intentions cachées. Lorsque nous commençons à tester des médicaments sur des personnes, plus souvent qu'autrement les résultats ne sont pas au rendez-vous parce que l'hypothèse de départ n'était pas la bonne. On espérait que la prise d'un tel médicament fasse disparaître le diabète, mais on se rend compte que ce n'est pas le cas. Il est impossible de le prédire avant d'avoir effectué les tests.
    L'industrie se dit donc qu'il serait bon pour elle de collaborer avec ces brillants professeurs mais, comble de malheur, ils ne sont pas à la hauteur, pas plus d'ailleurs que le réseau planétaire de recherche.
    On a réussi à séquencer le génome humain. Nous avons 20 000 gènes, c'est notre code génétique. On peut toujours s'en réjouir en se demandant combien de travaux de recherche sont menés sur chacun de ces gènes. Pourquoi pas alors dessiner une jolie courbe?
    Le graphique présenté ici illustre les recherches menées à l'égard de 518 gènes importants. Mais qu'est-ce qui peut bien se passer? Pourquoi tout le monde s'intéresse aux mêmes gènes? C'est parce que nos professeurs trouvent leur récompense dans la reconnaissance de leurs pairs. Nous voulons que nos amis nous trouvent bons. Ce n'est pas l'argent qui nous motive; c'est la façon dont nous parvenons à nous démarquer dans notre domaine. On se vante d'être parmi les grands spécialistes, d'avoir publié tel et tel travail et de participer à toutes ces conférences. Si vous faites des recherches dans un domaine qui n'intéresse que vous, personne ne vous invitera à aller donner une conférence à Barcelone. Vous n'aurez droit à aucun prix de reconnaissance. Vous savez ce qu'il faut faire pour connaître du succès au sein du monde merveilleux des professeurs? Travaillez dans les domaines auxquels tout le monde s'intéresse déjà. Si vous parvenez à faire un peu mieux que les autres, vous aurez droit à une place de choix.
(1545)
    Si je me fais frapper par un autobus demain matin, le reste du monde n'en sera aucunement affecté, car il y en a 100 autres qui font les mêmes expériences que moi; c'est la triste réalité. Nous nous montrons extrêmement myopes dans nos recherches en raison du système en vertu duquel des pays comme le Canada, le Royaume-Uni et les États-Unis récompensent leurs professeurs en leur donnant leur permanence ou en leur accordant des subventions. Nous nous intéressons tous aux mêmes sujets.
    Malgré le travail accompli par l'organisation de Pierre pour nous donner accès au code génomique, notre comportement ne va pas changer, faute de motivations suffisantes.
    Voici ce qu'avait à dire ma mère qui enseigne en 1re année: « Je pensais que vous, les scientifiques, aimiez découvrir des choses ». Je lui ai répondu: « Je sais bien, maman. Ce n'est pas tout à fait cela. Nous aimons surtout être invités à Barcelone pour donner des conférences. »
    Pour quelqu'un qui se retrouve au sein de l'industrie, par exemple qui travaille pour Merck et souhaite trouver un traitement contre le cancer, le problème est de passer de la recherche fondamentale à la recherche appliquée. À qui faut-il s'adresser? Aux brillants professeurs de Harvard avec leur noeud papillon. Mais comment sont-ils devenus professeurs à Harvard? Eh bien, ils ont obtenu de bons résultats dans des recherches portant sur des thèmes qui intéressent tout le monde. Alors, ils vont dire au chercheur de Merck qu'il devrait s'intéresser à telle ou telle protéine, car elle est prioritaire. Les mêmes professeurs vont tenir exactement le même discours auprès de toutes les entreprises pharmaceutiques. Et ça donne quoi au juste? Tous les intervenants de l'industrie travaillent sur les mêmes protéines auxquelles nous nous intéressons. Il est difficile de s'imaginer plus grand dédoublement des efforts.
    À l'échelle de la planète, le Canada investit entre un et deux milliards de dollars dans la recherche biomédicale. Pour l'ensemble des pays, ces investissements atteignent les 100 milliards de dollars et ne visent que 10 p. 100 des sujets possibles. Et tous ces aspects de la biologie humaine échappent au radar des chercheurs. C'est ainsi que nous nous retrouvons devant un échec, faute d'en connaître suffisamment, lorsque nous testons auprès de patients un éventuel médicament pour l'Alzheimer. Si nous n'en connaissons pas assez, c'est parce que nous négligeons de chercher dans l'inconnu, vu que le système ne nous le permet pas. C'est le problème que j'ai constaté et que j'essaie de surmonter au sein de notre organisation.
    Vous devez aussi comprendre que les choses sont loin de s'améliorer. Si l'on met en parallèle la quantité de nos recherches et le nombre de gènes, on peut constater que le modèle n'a pas changé par rapport à ce qu'il était avant l'importante percée génomique de 2002, dans les cinq années qui ont suivi et lorsque j'ai procédé à cette analyse en 2009.
    Parmi tous les travaux publiés par des chercheurs, 65 p. 100 portaient sur les mêmes protéines auxquelles on s'intéressait déjà beaucoup en 1992. Nous sommes très lents à sortir de notre zone de confort. Les scientifiques aiment aller au fond des choses; lorsque nous nous attaquons à un sujet, nous ne lâchons pas prise facilement. Tout cela au détriment de bien d'autres thèmes de recherche.
    C'est la même chose dans plusieurs domaines, mais nous pouvons le quantifier ici parce que le code génomique est constitué de seulement 20 000 gènes, un nombre fixe.
    C'est donc ce qui explique la crise de l'innovation sur toute la planète, et pas seulement au Canada.
    En voici un exemple parmi tant d'autres. C'est un résumé de recherche qui dit essentiellement que deux gènes jouent un rôle important au chapitre du cancer. Regardez maintenant où se situent ces gènes sur l'échelle des activités de recherche.
    Voilà 40 ans que Nixon a déclaré la guerre au cancer et des sommes totales d'un billion de dollars ont été consacrées à la recherche en la matière. Si un de vos proches a été touché par la maladie, vous savez aussi bien que moi à quel point le cancer est difficile à traiter, et nous ne connaissions même pas l'existence de ce gène avant la publication de ces travaux l'an dernier. Comme s'ils avaient des oeillères les empêchant de voir ailleurs, tous les chercheurs se sont intéressés aux mêmes gènes.
    C'est un problème très grave.
    Et c'est là qu'intervient notre organisation. Si certains thèmes sont jugés trop risqués par l'industrie et par les universitaires — parce que le système ne leur permet pas de s'y intéresser — pourquoi tout le monde ne contribuerait-il pas à la création d'un nouvel outil? Notre organisation s'est donnée comme mission d'en apprendre plus long sur l'inconnu en essayant d'éclairer par ses recherches la face cachée des choses. Comme l'industrie et les chercheurs s'entendaient pour dire que l'on n'en connaissait pas suffisamment au sujet de la biologie humaine, c'est à ce chapitre que nous avons agi dans l'intérêt commun.
    Quelles sont les possibilités qui s'offrent à nous? Les résultats ne sont pas nécessairement toujours probants, mais nous pouvons compter au Canada sur des chercheurs extrêmement compétents; des gens très brillants. Malheureusement, ils s'intéressent généralement tous aux mêmes sujets.
    Quels moyens pouvons-nous prendre afin d'optimiser notre impact sur la planète en maximisant l'incidence de nos travaux sur les maladies chroniques et sur notre système de soins de santé?
(1550)
    Moi, je vous dis: pourquoi ne pas laisser les États-Unis, l'UE et la Chine se battre et se jouer du coude? Il peut y avoir un premier, et les autres suivent.
    Si nous avons un dollar à dépenser, pourquoi le dépenserions-nous à faire concurrence à l'UE, aux États-Unis et à la Chine, si nous pouvons prendre un risque? Le problème, c'est qu'il n'y a aucun avantage à travailler comme professeur, donc il faut inventer un nouveau système, parce que les gens sont promus en fonction de leur aptitude à rivaliser les uns contre les autres sous les feux de la rampe. Nous finançons les gens en fonction de leur aptitude à être compétitifs sous les feux de la rampe. C'est ainsi que le monde fonctionne, et nous n'y changerons rien. Vous savez, il y a des choses en politique qui n'ont pas de bon sens, mais on ne peut rien y changer. Il faut composer avec cela, un point c'est tout.
    Comment convaincre les gens de se lancer? Nous avons commencé par convaincre huit, puis neuf entreprises de donner de l'argent à l'organisation que je dirige. Nous avons quelques centaines de chercheurs à Toronto et à Oxford qui rendent leurs recherches publiques, sans brevet, simplement pour le savoir et la connaissance, pour lutter contre les pires problèmes de santé, c'est-à-dire pour comprendre davantage comment fonctionne le corps humain, comment fonctionne la maladie et pour que les sociétés pharmaceutiques fabriquent des médicaments qui fonctionnent, pour que les traitements contre l'Alzheimer ne se fonde pas sur de l'improvisation, mais sur des faits logiques.
    Il s'agit là d'un système d'appui de la recherche biomédicale totalement différent. Je crois que le Canada a une occasion en or à portée de main. Les États-Unis ne peuvent pas la saisir parce qu'ils sont trop axés sur les brevets et que toutes leurs universités veulent être l'université numéro un, pour pouvoir construire des édifices rutilants et être compétitives. L'UE ne peut pas la saisir. Elle doit obtenir 37 signatures de 37 ministres pour ceci ou cela, c'est à se pendre.
    Des voix: Ah! Ah!
    M. Aled Edwards: Je crois que nous pouvons être incroyablement plus agiles au Canada. Nous avons un plan pour y arriver. Il y a des sociétés de partout dans le monde, des directeurs de recherche de partout qui viennent au Canada pour cela. Nous venons de lancer un nouveau projet avec Génome Canada afin d'essayer de trouver des traitements pour les enfants atteints de maladies rares, une tâche vraiment très difficile. Nous le faisons dans un contexte préconcurrentiel, nous partageons toutes nos données, nous ne présentons pas de demandes de brevets, et l'industrie nous finance. Les IRSC, Génome Canada et la FCI nous aident tous.
    Dans le cadre d'un rassemblement incroyable qui aura lieu en juillet, six chefs de file de la R-D provenant d'entreprises de Tokyo et des États-Unis vont venir à Ottawa parler de la possibilité de créer un programme unique de découverte de médicaments, sans brevet, de l'idée de départ jusqu'aux essais chez les humains.
    Je pense que ce projet a le potentiel de transformer de A à Z le monde de la découverte de médicaments. C'est absolument nécessaire, et je suis persuadé que le Canada peut prendre le leadership. Si nous le faisons, il y aura certainement plus d'innovations efficaces dans le système de la découverte et plus de médicaments à coût abordable dans un horizon de 5 à 10 ans. Nous allons ramener les branches de recherche de la pharmacologie au Canada. Ils s'en viennent. Le chef de la R-D de Takeda, à Tokyo, va être ici en juillet. Le chef de la R-D de Glaxo, à Londres, va être ici en juillet. Nous allons pouvoir mettre l'accent sur la recherche de l'inconnu; c'est l'occasion pour le Canada de faire preuve de son leadership et de s'éloigner du chemin que tout le monde prend.
    Je m'excuse de ne pas vous avoir dit ce que j'étais censé vous dire, mais je pense que c'était amusant.
(1555)
    Docteur Edwards, c'est très rafraîchissant d'entendre cela. Vous êtes un expert du domaine, et c'est la raison pour laquelle vous comparaissez devant le comité aujourd'hui; vous êtes ici pour nous enseigner votre savoir. Nous vous en remercions infiniment.
    Je suis certaine que les membres du comité ont beaucoup de questions à vous poser, donc commençons sans plus tarder.
    À Mme Sellah de briser la glace.

[Français]

    Merci, madame la présidente. Je vous remercie de votre mot gentil adressé à mes invités.
    Monsieur Meulien et monsieur Edwards, j'ai bien compris vos présentations. Je vous remercie de vous être déplacés pour venir nous expliquer ce qu'est la génomique, son importance et les impacts qu'elle a sur la santé des Canadiens.
    J'ai bien compris le message de M. Edwards en ce qui concerne la façon de faire des Canadiens afin d'être un leader et non un suiveur. Cela étant dit, il existe une préoccupation importante relativement à la génomique, soit la protection de la confidentialité et de la sécurité de l'information génétique, ainsi que le risque de discrimination fondé sur l'information génétique de la part des employeurs et des compagnies d'assurance-maladie.
    En 2008, les États-Unis ont adopté la Genetic Information Nondiscrimination Act pour protéger les personnes contre la discrimination sur les renseignements génétiques de la part des assureurs de soins médicaux et des employeurs.
    Pouvez-vous commenter les défis que soulèvent les brevets des découvertes génétiques et, à votre avis, le Canada devrait-il adopter une loi basée sur le modèle de la Genetic Information Nondiscrimination Act des États-Unis pour protéger ses citoyens contre la discrimination génétique?
    Je pense que la situation aux États-Unis et dans d'autres pays qui ont adopté une nouvelle loi concernant la discrimination génétique est très différente de celle qui prévaut ici, au Canada. Les citoyens canadiens sont selon moi bien protégés. Je sais que certaines personnes ne sont pas d'accord avec moi, mais je ne pense pas qu'on devrait changer la loi canadienne. Je pense que nous sommes protégés.
    La situation aux États-Unis est très différente, car des gens n'ont pas le droit d'avoir un système de santé financé par le gouvernement. Au Canada, ce n'est pas le cas. Au Canada, tout le monde a le droit d'être soigné par des systèmes de santé.

[Traduction]

    Je crois que la situation au Canada est très différente de celle qui s'observe dans les autres pays qui ont adopté une loi. Au Canada, le système de santé est exclusivement financé par le gouvernement. Les gens n'ont pas à s'inquiéter lorsqu'ils ont besoin de soins: ils vont être traités. Aux États-Unis, c'est complètement différent.
    Veuillez noter que la loi aux États-Unis ne prévoit pas d'assurance-vie. L'assurance-vie a été exclue de la loi. Elle ne protège que les gens qui ne peuvent pas subir de discrimination en raison de leur prédispositions génétiques lorsqu'ils ont besoin de soins, et ils doivent payer pour l'assurance-maladie.
    La situation au Canada est très différente de celle des autres pays qui ont adopté une loi. Je ne suis pas juriste, mais si c'est la Loi canadienne sur les droits de la personne qui protège le citoyen canadien, le citoyen canadien est bien protégé contre la discrimination génétique dans les services de santé, selon moi.
(1600)

[Français]

    Je vous remercie.
    Dans ce cas, le Canada a-t-il des lignes directrices sur le brevetage des découvertes génétiques?

[Traduction]

    Je crois que le Canada se situe à mi-chemin entre l'Europe et les États-Unis pour le brevetage de l'information génétique. Comme vous le savez, aux États-Unis, la Cour suprême a même été saisie d'affaires concernant le brevetage de gènes qui causent le cancer du sein, entre autres. Elle n'a pas encore rendu de décisions. En Europe, le brevetage des gènes est interdit. Il n'est pas permis de breveter des gènes en Europe.
    Au Canada, c'est un peu entre les deux. Nous favorisons un modèle d'accès très ouvert à toute l'information génétique que nous produisons dans le cadre des projets que nous finançons, donc je crois que plus nous avancerons, plus il y aura de données du domaine public pour les brevets au début de la chaîne de valeurs.
    Mon collègue ici présent a omis de vous mentionner que le Structural Genomics Consortium produit plus de 25 p. 100 de toute l'information connue dans le monde sur la structure des protéines cristallisées: 25 p. 100 des connaissances viennent de son groupe. Aucune de ses découvertes n'est protégée. C'est l'une des règles du Structural Genomics Consortium. Il ne fera breveter aucune découverte sur cette structure.
    Si les sociétés pharmaceutiques souhaitent rivaliser entre elles plus loin dans la chaîne des valeurs, elles le peuvent et elles vont le faire. Elles vont utiliser des connaissances à la disposition de tous et s'en servir à l'interne pour créer des produits avec leur technologie propriétaire.
    Je m'excuse. Je suis lancé.
    Non, c'est très bien. Je vous remercie, monsieur.
    Je vais simplement vous faire un petit signe quand nous prenons trop de temps, monsieur Meulien.
    Ne vous gênez pas.
    Nous allons maintenant entendre M. Lizon.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Pour être honnête, je ne sais pas par où commencer.
    Je vous remercie, messieurs, d'être venus comparaître devant le comité.
    J'aimerais d'abord vous demander, monsieur Meulien, si le fonds gouvernemental que vous avez mentionné est toujours en place. Est-il renouvelable au bout d'un certain temps?
    Celui sur la médecine personnalisée?
    M. Wladyslaw Lizon: Oui.
    M. Pierre Meulien: Ces 150 millions de dollars ont été amassés de diverses sources de financement, dont les IRSC. Les IRSC y ont investi plus de 20 millions de dollars, nous y avons mis 45 millions de dollars, et les gouvernements provinciaux y ont mis beaucoup d'argent aussi. Les sociétés pharmaceutiques y participent pour certains projets, donc il y a aussi de l'argent du secteur privé dans la cagnotte de 150 millions de dollars. Nous n'en avons pas encore dépensé un sou. Les projets vont bientôt démarrer. Ils vont être annoncés par la ministre de la Santé et le ministre de l'Industrie très bientôt.
    Vous verrez, quand ils seront annoncés, que chacun de ces projets va apporter quelque chose aux recherches sur une maladie particulière pour laquelle nous pouvons utiliser la génomique en contexte clinique, c'est-à-dire appliquer les connaissances des laboratoires universitaires en milieu clinique. Ce programme va s'étendre sur quatre ans. Nous espérons que le gouvernement fédéral va le refinancer ensuite pour que nous puissions le renouveler dans quelques années.
(1605)
    Vous avez mentionné dans votre exposé que l'application spéciale des découvertes de la génomique dans le milieu clinique va changer la façon dont on traite les gens. À votre avis, comment cela va-t-il fonctionner? Est-ce qu'un médecin pourra utiliser le code génétique pour évaluer les risques d'une personne en matière de santé, puis élaborer un plan de traitement?
    Oui, exactement.
    Nous sommes en train de comprendre que toutes les maladies, particulièrement les plus complexes comme le cancer, l'épilepsie, l'autisme et bien d'autres se divisent en plusieurs maladies. En fonction du génome, nous pourrons déterminer si la personne a le type 1, 2, 3 ou 4 de la maladie, quelle que soit la classification. Les médecins traitants pourront se fonder sur le profil moléculaire de la personne pour dire: « Vous savez, pour tel patient épileptique, la dernière chose à faire serait de prescrire tel médicament antiépileptique. C'est la dernière chose à faire parce qu'il ne peut que lui faire du tort. » Nous allons complètement réinventer, pour ainsi dire, la façon dont on prescrit les médicaments en fonction du profil individuel. Nous sommes tous très différents. Dans cette pièce, nous sommes tous très différents. Nous allons réagir différemment à différents médicaments. C'est ce que le génome nous dit.
    J'ai une autre question à vous poser, mais je vais vous la poser quand j'aurai plus de temps.
    J'aimerais poser une question au professeur Edwards.
    J'ai écouté avec beaucoup d'intérêt votre description des problèmes inhérents à la recherche en génomique. Quelle serait la solution idéale à votre avis? Quiconque ne connaît pas bien le problème se demanderait pourquoi tout le monde n'unit pas ses forces pour construire 20 000 laboratoires séparés, qu'on financerait, puis attribuer un gène à chacun. Est-ce que cela résoudrait le problème?
    Vous devriez être responsable du financement en santé.
    Des voix: Oh, oh!
    M. Aled Edwards: Je pense que ce serait le monde idéal, mais la réalité est autre, donc cela n'arrivera pas.
    C'est probablement utopique.
    Exactement.
    Il faut trouver des motivations communes. Nous avons réussi à attirer l'industrie pharmaceutique. Elle nous a donné 100 millions de dollars pour étudier l'inconnu et ne rien breveter du tout, parce que c'est la carotte qui va permettre aux universitaires de travailler à découvrir l'inconnu. La plupart d'entre nous nous lancerions volontiers si nous en avions les moyens, s'il y avait un mécanisme pour financer la recherche sur l'inconnu, mais nous avons l'usage d'attribuer le financement en fonction d'un examen par les pairs, une méthode plutôt conservatrice. Je crois qu'il y a un vif intérêt chez les dirigeants des sociétés pharmaceutiques, qui dépensent environ 30 milliards de dollars par année en R-D, à investir dans la recherche fondamentale à la bonne place.
    Monsieur, si l'on ne tenait pas du tout compte de l'industrie pharmaceutique et que l'on faisait de la recherche pour trouver les causes des maladies, nous n'aurions pas besoin des sociétés pharmaceutiques. Est-ce que la science peut nous permettre de les découvrir?
    Peut-être, mais malheureusement, l'industrie s'est développée de telle façon que les sociétés pharmaceutiques ont beaucoup de compétences que nous n'avons plus dans les universités. C'est ainsi que l'écosystème a évolué. Il a donc des problèmes qu'on ne peut résoudre que dans cette partie de la courbe, dans l'inconnu, par combinaison de nos forces: nos forces financières, nos forces intellectuelles et nos forces technologiques.
    Aux États-Unis, ce n'est pas possible parce que tout le monde va se demander à qui appartiendra le brevet. Ce sera ensuite une guerre d'avocats et il y aura de quoi se pendre. En Europe, on va se demander qui va faire quoi, puis la Lithuanie et tous les autres pays devront signer une entente commune qui va prendre des années. Nous pouvons être agiles et nous l'avons déjà été avant. Donc, si nous insistons pour que les sociétés pharmaceutiques financent la moitié de nos recherches, je pense que le Canada aurait l'occasion d'être un chef de file dans la découverte de précurseurs de médicaments, mais il nous faut de l'argent de l'industrie pour cela, et une absence de brevet. Le Canada va servir de pôle d'attraction pour la découverte de précurseurs de médicaments, j'en suis convaincu. Nous l'avons déjà fait. Il y a de nouveaux projets en démarrage avec Pierre. Je suis très optimiste.
(1610)
    Merci, monsieur Edwards.
    Merci infiniment. Vos réponses sont très éclairées.
    Écoutons Mme Fry.
    Merci, madame la présidente.
    Le scénario que vous nous présentez ne peut que nous mener à l'impasse. Si les sociétés pharmaceutiques fournissent 50 p. 100 de l'argent et que vous ne déposez pas de brevet pour travailler dans ces sphères de l'inconnu, quelles seront les conséquences involontaires de la contribution des sociétés pharmaceutiques, si elles mettent autant d'argent? Elles risquent de se considérer propriétaires de l'information et de ne pas la partager avec personne d'autre. C'est ce que je serais portée à craindre. Plutôt que de rendre l'information accessible à tout le monde, pour que tous puissent en profiter, nous n'allons que vendre l'information au plus haut soumissionnaire, qui va ensuite la breveter pour en devenir propriétaire.
    C'est là que le secteur public intervient de façon essentielle. Si les sociétés pharmaceutiques unissaient leurs forces, un peu comme les sociétés pétrolières collaborent en Alberta pour s'occuper des enjeux environnementaux sans participation du secteur public, qui sait ce qui pourrait ressortir de l'industrie? Notre consortium est un organisme à but non lucratif enregistré. Ces sociétés nous versent des dons de charité, et nous avons un conseil d'administration composé de représentants de Génome Canada, des CRN, de Wellcome Trust du Royaume-Uni, ainsi que des règles de gouvernance qui parent à cette éventualité. Nous nous sommes donc dotés d'une structure d'entreprise qui empêche totalement une telle situation de se produire et en fait, les sociétés pharmaceutiques sont bien souvent plus enclines à s'ouvrir sur leurs données que les professeurs.
    Pour poursuivre dans la même veine, si vous avez des règles qui empêchent les sociétés pharmaceutiques de le faire, qu'est-ce qui peut pousser l'industrie pharmaceutique à mettre la main à la pâte à hauteur de 50 p. 100?
    L'incitatif, c'est que les actions des sociétés pharmaceutiques ont baissé depuis 1950. Elles découvrent de moins en moins de nouveaux médicaments. Elles n'ont pas les compétences voulues pour étudier l'inconnu. Elles croyaient que cette responsabilité incombait aux professeurs. C'est donc une somme relativement faible pour cette industrie (10 ou 20 millions de dollars), qui leur permettrait de profiter des investissements des autres sociétés pharmaceutiques, de l'industrie. Chaque entreprise paierait 1 $ sur 10 $ pour obtenir de l'information totalement nouvelle et libre de droits. C'est la clé, parce que ces entreprises pourraient prendre l'information pour s'en servir à l'interne.
    Il serait important pour moi que nous nous penchions sur le système de gouvernance.
    J'aimerais revenir un peu à la question de la discrimination génétique. Vous avez fait valoir un argument important pour ce qui est de l'accès à l'assurance-médicaments ou à des services de santé. Au Canada, il n'y a pas de discrimination génétique parce que l'universalité, qui est un des cinq principes de base de l'assurance-maladie, dicte qu'aucune condition préexistante n'empêche une personne de recevoir des soins lorsqu'elle en a besoin. Certaines personnes peuvent toutefois craindre que ce principe ne s'applique pas dans un contexte d'assurance privée. Par exemple, en assurance-automobile, une personne peut avoir un accident et voir sa prime doubler, puis avoir un deuxième accident et voir sa prime tripler, puis avoir un troisième accident et ne plus être assurable. Les sociétés d'assurances privées qui offrent de l'assurance-vie, par exemple, font déjà de la discrimination: si l'on fume, la prime monte. Comment peut-on prévenir cela dans un pays comme le Canada, où le problème n'est peut-être pas tant l'accès à des services de santé mais à d'autres types d'assurance?
    C'est une excellente question. Je n'ai pas toutes les réponses, mais je sais que certains des avocats les plus chevronnés du pays y réfléchissent; certains se sont joints à nos projets. Chacun de nos projets — et c'est vrai pour les 17 projets que nous allons bientôt annoncer dans le cadre du concours sur la médecine personnalisée — intègre des sous-projets qui portent sur les questions éthiques, juridiques et sociales que soulève l'objet de nos découvertes.
    Al a mentionné un projet sur les maladies rares qui fait du Canada un pionnier mondial dans le domaine en ce moment. Lorsque nous procédons au séquençage génomique des personnes, des familles qui sont atteintes de troubles génétiques rares, nous arrivons très souvent à trouver le gène qui cause l'anomalie. Mais nous réussissons aussi à faire toutes sortes d'autres découvertes qu'on dit accidentelles. Il faut ensuite décider quoi en faire. Y a-t-il des mesures à prendre ou non? Ces découvertes sont-elles assez importantes pour que nous en fassions part à la famille ou non? Quelle est l'architecture juridique qui entoure tout cela? Que devrions-nous faire de ces informations? Des scientifiques sociaux et des humanistes se penchent sur ce genre de questions dans chacun de nos projets.
    À ce sujet, je sais que la commissaire à la protection de la vie privée du Canada se penche sur la question que vous soulevez. Je pense qu'elle vient tout juste de publier ou qu'elle va bientôt publier un rapport sur le sujet. Elle a mené une étude avec l'industrie de l'assurance sur ce sujet même. Je pense qu'elle va avoir des réponses à vous donner, mais que nous n'avons pas encore toutes les réponses.
(1615)
    Merci. J'ai une dernière question.
    Merci à vous deux d'avoir présenté ce qui me paraît être les exposés les plus innovateurs que nous avons entendus jusqu'ici. Je pense qu'une révolution est sur le point de s'opérer en médecine, dans la compréhension des maladies, etc.
    Toutefois, qui va payer ce nouveau mode de traitement fondé sur la génétique ou le génome? Présentement, nous n'avons pas de stratégie d'assurance-médicaments au pays. À l'hôpital, les médicaments sont fournis, mais s'ils coûtent 15 000 $ par année sur le marché, bien des gens que nous connaissons ne peuvent pas les acheter. Quels coûts entraîneraient les traitements de génomique essentiels pour le système de santé?
    Excellente question. C'est ce que nous avons demandé aux équipes de projets qui nous ont soumis des propositions pour le concours sur la santé personnalisée. Les équipes devaient indiquer pour quelles raisons économiques il faut réaliser des études génomiques sur le cancer, l'épilepsie, etc. Quel est l'avantage économique pour le système de santé? Nous rejetions les propositions qui n'étaient pas défendables sur le plan des affaires. Nous n'avons prêté attention qu'aux projets économiques et durables qui profitent au système de santé.
    Madame la présidente, je pense que mon temps est écoulé.
    Me reste-t-il du temps?
    Votre temps est écoulé. Merci beaucoup.
    Monsieur Lobb.
    Merci, madame la présidente.
    Ma première question s'adresse à M. Edwards. J'ai peut-être manqué un élément de votre exposé, mais depuis quand le consortium existe-t-il?
    Ça fait maintenant 10 ans. C'est le principal partenariat public-privé au monde pour la découverte de médicaments.
    Très bien.
    Pour nous donner une idée, M. Meulien a dit que, durant ce temps, vous avez fourni 25 p. 100 de toutes les nouvelles données...
    Dans un secteur, oui.
    Dans toute l'information que vous avez découverte, y a-t-il un exemple concret que vous pouvez...
    Oui, je vais vous donner un exemple très intéressant...
    C'est le médicament Gleevec. Certains cancers sont causés par la rupture d'un chromosome, qui se regroupe avec un autre, et la fusion de la moitié d'un gène avec la moitié d'un autre. Le résultat ressemble à une chimère monstrueuse qui ne peut pas s'arrêter et qui amène la cellule à se diviser encore et encore. Novartis a créé un médicament pour traiter la LMC, la leucémie myéloïde chronique, une maladie mortelle liée à une protéine unique en son genre dans le génome. Cette protéine n'existe pas chez nous tous, mais seulement chez les quelques personnes qui ont un chromosome défaillant. Novartis a inventé un médicament pour y remédier. Il aura fallu six ans entre la découverte de la molécule et les premiers traitements chez les patients.
    Par ailleurs, nous avons étudié une nouvelle protéine liée à un autre type de cancer qui provoquait le même phénomène. Les gens sont affectés à l'adolescence et meurent dans les six mois. Avec l'aide de Glaxo, nous avons examiné la possibilité d'arrêter le développement de la moitié de la protéine sur laquelle nous avons travaillé. GSK nous a présenté un médicament breveté de Mitsubishi pour poursuivre la recherche. Nous avons collaboré avec un chercheur de Harvard qui a traité ces patients et qui a publié 10 mois plus tard l'article sur l'agent chimique qui guérit le cancer chez les animaux et...
    En temps normal, la molécule serait brevetée et gardée secrète. Des fonds seraient recueillis. Toutes les étapes feraient l'objet de questions juridiques. Les avocats voudraient une part du gâteau. Mais nous avons donné ce composé à 250 laboratoires dans le monde. Deux chercheurs de New York et de Boston que nous ne connaissions pas ont démontré que le composé fonctionnait pour ce cancer, mais aussi pour deux autres. Les gens de GlaxoSmithKline en étaient très heureux. La compagnie n'a pas payé pour utiliser les données, qui était accessibles à tous, mais l'information a favorisé ses travaux internes. Trois ans plus tard, elle réalisait déjà son premier essai sur des patients atteints du cancer.
    Dans cette industrie, le temps, c'est de l'argent. Trois ans, c'est beaucoup d'argent pour un médicament qui, au bout du compte, représente un milliard de dollars. La société a investi 10 millions de dollars dans le consortium. Grâce à notre milieu dépourvu de brevets, la recherche s'est déroulée très rapidement et a pris trois ans au lieu de six.
(1620)
    C'est intéressant, parce que quel que soit le secteur, on entend toujours parler des nombreux vases clos qui nuisent à la collaboration.
    En effet.
    Votre approche va peut-être apporter un changement réel.
    J'ajoute que le Canada était en tête.
    Vous en avez déjà parlé un peu, mais je vous pose tout de même la question. Vous avez dit que les délais sont passés de six à trois ans. En quoi la technologie que vous utilisez pour faire ces découvertes change-t-elle? S'améliore-t-elle jusqu'à vous permettre de réaliser vos études en six mois au lieu de six ans? Comment la technologie évolue-t-elle?
    Oui, la technologie est un peu plus rapide, mais neuf femmes ne peuvent pas faire un enfant en un mois, n'est-ce pas?
    Des voix: Oh, oh!
    M. Aled Edwards: La biologie prend un certain temps.
    Nous pourrions essayer.
    Vous pourriez.
    Sauf votre respect, docteur, ça prend un homme pour faire ce genre de commentaire.
    En fait, c'est ma femme qui a dit cela en premier.
    Vous blâmez votre femme.
    Je pense que c'est brillant.
    La technologie accélère le travail, mais il faut du temps avant de savoir si la santé d'un patient s'améliore. Les tests de toxicologie exigent la prudence. Durant ces six ans, l'Institut de lutte contre le cancer Dana-Farber de Harvard et une société pharmaceutique ont négocié pendant deux ans. Ils ne parvenaient pas à s'entendre. Le chercheur a dû changer d'université pour réaliser l'expérience. La réduction des délais, qui sont passés de six à trois ans, ne résulte pas seulement de la paix, de l'amour, du partage, etc., mais ces facteurs y sont pour beaucoup.
    Je pense que, si cette approche était appliquée à grande échelle, les délais diminuaient énormément au fil du temps. Étant donné que nous partageons toutes les découvertes dès le départ, la compagnie ne peut pas vendre un médicament 100 000 $ au système de santé en raison des coûts engagés pour une bonne partie de la recherche. Nous connaissons les montants exacts qui ont été déboursés. Les payeurs uniques peuvent faire baisser les prix des médicaments, parce que nous réduisons le risque.
    J'ai une dernière question brève. Si j'ai bien compris, le composé est prêt. Au fond, vous pouvez fournir vos données à toutes les sociétés pharmaceutiques du monde.
    C'est ce que nous avons fait. Après les découvertes clés des deux professeurs, les sociétés ne vont pas utiliser notre composé. Elles vont facilement en inventer d'autres. Mais nous avons réalisé l'expérience clé qui montre qu'en bloquant la protéine, la santé du patient cancéreux s'améliore. Les compagnies entrent en concurrence à ce moment-là.
    Il vous reste une minute.
    J'ai une question, si vous avez terminé.
    Allez-y.
    Merci.
    C'est étonnant, parce qu'il s'agit de prévenir la maladie. Les soins de santé entraînent des dépenses importantes, et la population est vieillissante. Il faut tenir compte de tous les facteurs dont parlait le Dr Edwards.
    Rencontrez-vous de l'opposition concernant l'établissement de ce genre de cadre?
(1625)
    Oui, des professeurs s'y opposent. Ils se demandent pourquoi nous voulons travailler ainsi. Ils pensent que la recherche stimulante est réalisée par les sociétés de biotechnologie et que les brevets sont essentiels. Ils ne comprennent pas pourquoi nous n'en voulons pas. Certains représentants des sociétés pharmaceutiques ont aussi des réticences, mais l'industrie a changé d'avis. Les dirigeants des principales compagnies mondiales affirment que c'est une excellente idée. Ils ont collaboré avec nous une fois, puis nous leur avons présenté le projet CareforAir. Ils ont accepté et répondu qu'ils adoraient ce modèle. Nous devons plancher là-dessus au Canada, sinon nous allons nous faire doubler tôt ou tard.
    Qu'allez-vous faire? Vous allez participer à un grand congrès en juillet. Comment vous y prendrez-vous pour convaincre tout le monde ?
    Si notre leadership est vigoureux, nous ne devrions pas nous préoccuper de ce que les autres pensent. Nous n'avons qu'à convaincre quelques personnes importantes. J'ai convaincu les chefs de la R-D de Takeda et de Glaxo, les chefs de neurosciences de quatre compagnies et Alain Beaudet de l'IRSC. Il y aura beaucoup de réserve, mais nous devons en faire fi, car c'est une nouvelle manière de travailler. C'est lorsqu'on rompt avec l'ordre établi que l'on réalise des progrès.
    On va me rappeler à l'ordre, parce que j'excède le temps accordé. Le comité vérifie toutes les interventions.
    C'est moi qui n'arrête pas de parler.
    En fait, c'est votre travail qui est étonnant. Je suis si contente que vous soyez tous les deux ici aujourd'hui.
    Nous passons maintenant aux questions de cinq minutes.
    Merci, monsieur Lobb.
    Monsieur Morin.

[Français]

    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Tout d'abord, je vous félicite pour vos questions. Elles sont très bonnes.
    Je tiens à dire que j'appuie les avancées technologiques génomiques. Je crois que l'avenir de la santé, autant au Canada que dans le monde, passe par là.
    Docteur Meulien, vous ne m'avez toutefois pas rassuré quant au problème qu'ont évoqué mes collègues Dr Fry et Dr Sellah. Elles ont abordé le problème de la discrimination génomique et le fait que, contrairement à d'autres pays développés, le Canada n'a pas de loi qui prévient la discrimination. Je suis content que Dr Fry ait abordé le cas des assurances privées, que vous n'aviez pas touché. C'est opportun d'aborder cette question.
    Ce matin, j'ai rencontré des représentants d'un regroupement d'organisations qui s'appelle Organismes caritatifs neurologiques du Canada. Ils m'ont dit à quel point, dans le cadre des conditions neurologiques dégénératives, leurs membres peuvent faire face à de la discrimination lorsque, par exemple, les membres d'une famille de quelqu'un qui a la maladie de Huntington veulent postuler pour un emploi et avoir accès à l'assurance de l'employeur.
    Ce genre d'examen génomique peut entraîner des cas de discrimination car non seulement la personne pourrait ne pas être acceptée par l'assurance privée, mais l'employeur pourrait dire que c'est légal. La majorité des gens ont une assurance privée pour couvrir plusieurs coûts qui ne sont pas payés par le système public. La personne pourrait être victime de discrimination pour des raisons génomiques. On ne voudra pas lui donner un emploi car, en définitive, on sait que sa condition médicale comporte des facteurs de risque, ce qui pourrait coûter très cher à l'employeur plus tard.
    Vous avez dit que plusieurs personnes ne sont pas de votre avis et ne pensent pas qu'on est bien protégés au Canada, mais vous ne me rassurez pas. Pouvez-vous me donner de meilleurs arguments sinon je serai encore très réticent.
    Tout ce que je peux vous dire est à peu près ce que j'ai dit en réponse à la première question. La discussion est toujours en cours concernant l'assurance privée. Il faut donc regarder cela de près avec le Conseil privé et le Commissariat à la protection de la vie privée du Canada et d'autres instances. On suivra ce débat de très près.
    J'étais plus sûr de ma position en matière de santé et de l'accès de...
    Il n'y a pas de problème à cet égard. Je vous comprends.
    Pour ce qui est de l'assurance privée, le débat est toujours...
    C'est le cas pour les employeurs aussi.
    Pendant que j'ai encore un peu de temps, je vous pose ma prochaine question.
    Tout à l'heure, vous avez évoqué des cas où les avancées génomiques pourraient aider, notamment des cas de diabète de type 2. Est-ce vraiment la chose la plus efficiente et la plus intelligente que de donner une pilule miracle aux diabétiques de type 2 en leur disant que cela va les aider? Ne devrait-on pas plutôt mettre l'accent sur les autres moyens de prévention, tels que l'exercice ou l'activité physique?
    Pour les maladies rares, je comprends mieux. Toutefois, pour le diabète de type 2, j'ai l'impression que des gens à la maison vont prendre leur médicament génomique en pensant que, même s'ils mangent mal et ne font pas d'exercice, cela va contrôler leur maladie chronique. Je me demande si on n'envoie pas le mauvais signal aux gens.
(1630)
    L'idée d'utiliser la génomique pour le diabète de type 2 n'implique pas du tout de prendre une pilule.

[Traduction]

    C'est clair que la prévention passe avant l'utilisation des données génomiques. Je pense que nous n'allons jamais... Si nous veillons avant tout à traiter les maladies chroniques avec de nouveaux médicaments sans faire de prévention, nous allons perdre le combat. Ce n'est pas une approche durable.
    Vous avez dit que la connaissance de certains gènes liés au diabète pouvait aider à trouver des médicaments à l'action plus ciblée.
    Non, ça peut aider à gérer...
    L'état de santé en général.
    ... toute la gamme des patients.
    J'ai parlé d'action ciblée concernant le traitement de l'épilepsie ou du cancer, des maladies multiformes. Tous les types de cancer se déclinent en une multitude de... C'est la même chose pour l'épilepsie et l'autisme. Si nous comprenons le profil moléculaire de chaque patient, nous pouvons bien sûr appliquer un traitement plus précis.
    Vous avez tout à fait raison. Je pense que nous devons concentrer nos efforts sur la prévention et l'adoption d'un meilleur mode de vie pour bon nombre de maladies chroniques.
    Merci beaucoup, messieurs Meulien et Morin.
    Madame Block.
    Merci beaucoup, madame la présidente. Tout comme mes collègues, je vous remercie tous les deux de votre présence. Nos discussions sont très enrichissantes et assez captivantes. J'aime beaucoup votre approche très terre-à-terre et vos commentaires sur votre travail.
    Je connais surtout Génome Canada par l'intermédiaire de Genome Prairie, en raison du soutien continu que vous donne le gouvernement de la Saskatchewan, d'où je viens.
    Monsieur Meulien, vous avez dit que Génome Canada a six filiales, si je ne m'abuse. Parlez-moi de votre relation avec elles, de votre collaboration ou de la coordination des projets de recherche et de vos liens avec le secteur privé.
    Ce ne sont pas des filiales. Génome Canada a une relation contractuelle avec six centres régionaux de génomique de la Colombie-Britannique aux provinces atlantiques. Ces centres doivent recueillir des fonds pour nos programmes, qui sont tous cofinancés. Nous investissons parfois la moitié ou le tiers des fonds, et les centres régionaux fournissent le reste à l'aide des gouvernements provinciaux, des régions ou d'autres bailleurs de fonds.
    Les centres régionaux ont aussi un rôle de surveillance, parce que tous les projets se font à grande échelle et visent de grands objectifs. Ils doivent surveiller de près les projets pour que toutes les équipes atteignent leurs objectifs. Nous avons annulé les projets au piètre rendement.
    Étant donné que nos projets ont une grande portée sur le plan scientifique, les centres doivent former des équipes qui se concurrencent. Par exemple, parmi les 146 demandes initiales examinées pour la médecine personnalisée, 17 projets ont reçu des fonds. Ça donne une idée du niveau de concurrence.
    Puis-je faire un commentaire? Pensez à ce qu'était la recherche avant la génomique. Nous connaissions un ou deux gènes, et toute la recherche était axée là-dessus. C'est comme si un astronome n'étudiait que deux étoiles. La génomique a révélé tous les gènes. Nous continuons d'étudier les deux gènes que je vous ai montrés, parce que nous les aimons. Mais la génomique nous permet d'explorer l'inconnu.
    Le Canada est unique en soi. J'ai voyagé partout dans le monde. Je passe bien sûr beaucoup de temps à voyager. Au Mexique, j'ai assisté à la conférence d'un scientifique brésilien. Dans ses 20 diapos, cinq portaient sur le Canada. Il a dit que ses données venaient d'ici, parce que la recherche financée par Génome Canada encourage les chercheurs à explorer l'inconnu. Lorsqu'on est premier, on est bien sûr en avance. Je n'avais même pas conscience de la position dominante de cette technologie dans l'élevage des bovins. Au lieu d'attendre sept ans avant de savoir si la viande est salubre, nous pouvons mener des tests génétiques plus rapides et moins coûteux. Nous sommes des chefs de file, selon le Brésil. J'étais impressionné. Le financement de ce genre de recherche scientifique ne concerne pas seulement la génomique et semble différent sur le plan culturel. Il nous permet de faire de la recherche unique au monde. À mon avis, c'est pourquoi notre travail est si important.
(1635)
    Il vous reste une minute.
    Allez-y.
    Par le passé, nous faisions appel au secteur privé pour des projets précis. Nous voulons maintenant nous pencher sur un programme ou un secteur comme l'agriculture. Nous aimerions tisser des liens plus étroits avec l'industrie des aliments et de la viande. Nous réalisons beaucoup de projets sur la salubrité des aliments et la traçabilité, une question très importante. Un de nos projets porte sur la bactérie E. coli, et un autre sur la listériose. Nous examinons aussi les caractéristiques du code-barre, la viande de cheval dans les galettes de boeuf haché et le genre de questions qui intéressent les médias.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Kellway.
    Merci, madame la présidente.
    Merci beaucoup, messieurs, d'être ici aujourd'hui.
    Monsieur Meulien, j'aimerais revenir à la question des effets de la prévention qui découle de vos découvertes. Au début, vous avez parlé d'un vaste éventail de maladies. Il y a les maladies rares d'un côté, et de l'autre, il y a les maladies complexes qui sont influencées par des facteurs environnementaux. Il me semble que lorsque nous tentons d'identifier certaines maladies qui sont influencées par des facteurs environnementaux, cela soulève toutes sortes de problèmes éthiques. Lorsque vous parlez de prévention, quels sont les éléments pratiques qui émergent de votre étude?
    Je ne sais pas si c'est vrai ou non, mais...
    Eh bien, vous n'êtes pas obligé de le dire si vous n'êtes pas certain.
    Non, c'est juste mon avis. Si les gens connaissaient la séquence de leur génome, et qu'ils apprenaient qu'ils sont prédisposés à une certaine maladie chronique — par exemple, un cancer, la maladie d'Alzheimer ou le diabète de type 2 —, je crois que certaines personnes, mais pas toutes, modifieraient leur mode de vie pour vivre plus longtemps et en santé. À mon avis, c'est un outil de prévention. Je considère qu'il s'agit plus de changements dans les comportements liés au mode de vie qu'autre chose.
    C'est ce qui est intéressant, à mon avis. Il me semble que lorsque j'examine des cartes de la ville — je viens de Toronto —, il y a une corrélation très élevée entre les régions pauvres de la ville et les cas de diabète de type 2. On peut donc se demander à quel point les gens contrôlent leur mode de vie et dans quelle mesure ils peuvent le faire. Ensuite, dans quelle mesure nous incombe-t-il de faire en sorte que ces gens soient en mesure de modifier leur mode de vie, etc.? Si nous reconnaissons, en tant que membres d'une société, que la pauvreté est l'une des conditions sociales ou l'un des facteurs déterminants du diabète, devons-nous nous interroger sur ce que cela signifie sur le plan éthique et sur l'intervention appropriée? Nous ne pouvons pas nous contenter de dire aux gens qu'ils ont un problème et qu'ils vont engendrer des coûts dans notre système de soins de santé et que par conséquent, ils doivent commencer à remplacer le pain blanc par du pain de blé entier, etc.
(1640)
    C'est une vaste question. Je crois qu'il y a un large éventail de facteurs et d'enjeux de société, et qu'il faut en discuter.
    Permettez-moi de vous parler de l'exemple du tabagisme. Je vivais en Irlande lorsque le pays est devenu le premier pays à interdire le tabagisme au travail. On a adopté une loi très sévère qui modifiait le comportement ou le mode de vie des personnes. Je peux vous dire que lorsque les gens parlaient de ce qui se passait en Irlande, ils étaient d'avis qu'il faudrait des années avant qu'on puisse constater les effets de cette mesure. Toutefois, le nombre de consultations dans les cliniques de maladies pulmonaires a commencé à diminuer six mois après l'entrée en vigueur de l'interdiction de fumer.
    Lorsque nous parlons d'alimentation et d'autres sujets connexes, je crois que la responsabilité incombe aussi à l'industrie alimentaire et à d'autres parties intéressées, et je serais pour l'adoption de mesures législatives ici. Tout le monde sait que le tabagisme est mauvais pour la santé et tout le monde sait que la consommation de grandes quantités d'aliments transformés est mauvaise pour la santé. Les quantités de sel, de sucre et de gras qu'on retrouve dans certains de ces produits transformés sont très néfastes pour la santé. Tout le monde le sait. Toutefois, je crois que nous devons adopter des lois à cet égard.
    J'ai une dernière petite question.
    Monsieur Edwards, très brièvement, vous réagissez à tous ces nouveaux renseignements sur le génome et vous mettez au point ces choses — je ne sais même pas de quoi il s'agit — que les sociétés pharmaceutiques peuvent utiliser pour en faire des médicaments.
    ... points de départ pour la mise au point de médicaments, après cela.
    D'accord.
    Êtes-vous en position de faire avancer ce processus, c'est-à-dire d'accélérer le processus de brevetage des médicaments, ou arrêtez-vous naturellement?
    Comme Pierre l'a dit, nous l'avons fait avancer en ce qui concerne les gènes humains, avec une société et ensuite trois sociétés, et maintenant, il y a neuf sociétés qui fabriquent un agent inhibiteur, et c'est un médicament primitif. C'est ce que nous faisons pour pousser les choses un peu plus loin. En juillet, il y a la discussion aux IRSC avec les six sociétés pharmaceutiques, ce qui pousse les choses encore un peu plus loin.
    Vous pouvez imaginer un monde où toutes ces découvertes seraient effectuées au grand jour, sans concurrence, et dans lequel les sociétés pharmaceutiques entrent en concurrence beaucoup plus tard, lorsque le risque n'est plus de savoir si le médicament va fonctionner. Le risque ne serait que commercial, c'est-à-dire que les sociétés chercheront à fabriquer un meilleur médicament que leurs concurrents.
    Cela changera tout le côté économique de la découverte de médicaments, et cela devrait diminuer...
    Merci, monsieur Edwards.
    Monsieur Brown.
    Une question que j'ai posée à nos différents groupes de témoins concernait le rôle du gouvernement fédéral dans la réglementation des produits médicaux. Les produits médicaux peuvent évidemment être un outil d'innovation. Selon votre expérience dans les milieux médicaux et scientifiques, quelle a été votre impression? Au Canada, le processus est-il lent, ou à votre avis, est-il juste et équilibré?
    De nombreux éléments dans le domaine des soins de santé échappent évidemment au contrôle du gouvernement fédéral, mais nous exerçons une gouvernance dans ce domaine précis. Des médecins ont comparu devant le comité. La semaine dernière, un médecin nous a dit que le processus était rapide et efficace et qu'il n'y avait aucun problème. Pourtant, deux semaines auparavant, deux autres médecins nous avaient dit que le processus était très coûteux et extrêmement frustrant.
    J'aimerais connaître vos impressions à cet égard, si vous avez eu affaire à ce processus.
    En tant que bailleurs de fonds, nous n'avons pas de liens ou de contacts directs avec les organismes de réglementation. Ce sont plutôt les sociétés qui participent à nos projets qui ont quelque chose à présenter aux organismes de réglementation.
    J'ai aussi entendu les deux côtés de l'histoire, et je n'ai pas vraiment d'opinion.
    Je pense que notre petit marché représente un autre facteur. Si j'ai une petite entreprise et que je veux vendre un produit, je ne vais pas me préoccuper d'abord du marché canadien; je vais plutôt aller vendre mon produit sur le marché américain, car il s'agit d'un énorme marché.
    Nous ne jouons pas un grand rôle dans le processus d'approbation. Je ne crois pas que de nombreux produits soient habituellement approuvés ici, et c'est uniquement pour des raisons commerciales, et non pour des raisons réglementaires, etc. Ce que je veux dire, c'est que c'est évident; il y a un énorme marché et un petit marché.
    Nos organismes de réglementation tendent à exercer une plus grande prudence dans l'approbation des médicaments. Ils ont beaucoup moins de ressources que leurs homologues aux États-Unis. Je crois que nous obtenons nos médicaments assez rapidement. Si on procède trop rapidement, il y a des risques, et il y en a aussi si on procède trop lentement. Nous avons probablement atteint le bon équilibre.
    Mais vous devez mettre les choses en perspective, n'est-ce pas? Le Canada ne sera pas souvent le point de lancement de l'une de ces technologies, et c'est uniquement parce que notre marché est trop petit.
(1645)
    Vous avez mentionné le diabète de type 2 à quelques reprises. Il y a environ six mois, des représentants de la FRDJ, une fondation de recherche sur le diabète de type 1, ont comparu devant le comité. Avez-vous eu des résultats de recherches sur le diabète de type 1?
    Nous avons financé certains projets à cet égard. Je ne connais pas les détails
    Leurs commentaires m'ont poussé à poser une question à certains témoins sur la collaboration internationale en matière de recherches. Y a-t-il une collaboration suffisante? Ils m'ont dit qu'ils faisaient des progrès rapides dans le cadre d'un projet de pancréas artificiel sur lequel ils travaillaient à Hamilton et Waterloo, ce qui était très intéressant. Le même projet avait été lancé en Australie, et les deux équipes collaboraient. C'était encourageant. Avez-vous constaté la même chose? Voyez-vous une grande collaboration à l'échelle internationale?
    Nous avons constaté qu'il y avait énormément de collaboration au Canada entre les chercheurs et à l'échelle internationale. La plupart de nos projets, en raison de leur envergure, ont des liens internationaux, parfois essentiels, parfois au sein d'un consortium moins rigide, mais parfois ils sont absolument essentiels. Au Canada, on collabore énormément, et nous sommes très chanceux de vivre dans ce type de culture. Absolument. C'est très fort.
    C'est l'un de nos avantages concurrentiels.
    Je me souviens lorsque la ministre de la Santé a comparu devant le comité. Elle a parlé des travaux que nous effectuons sur la maladie d'Alzheimer et sur la démence, et qu'il s'agissait d'une vaste étude qui faisait l'objet d'une grande collaboration. Évidemment, cela rend l'étude beaucoup plus rigoureuse.
    Je sais qu'on vous a déjà posé un grand nombre de questions sur des sujets similaires, mais y a-t-il des domaines dont nous n'avons pas parlé aujourd'hui et dans lesquels, à votre avis, le gouvernement pourrait améliorer l'appui qu'il offre à vos travaux?
    À mon avis, on a trop critiqué le Canada. Nous menons de brillantes recherches. Nos faisons plus que notre part de recherches, mais elles ne sortent pas du milieu universitaire. Nous avons besoin de faire tout ce que nous pouvons pour faciliter la transition vers la création de bons réseaux d'infrastructure clinique. C'est quelque chose, et ce n'est pas un sujet facile, car cela comprend des systèmes d'information et des dossiers médicaux électroniques dans le domaine de la santé. Il faut faire un grand nombre de choses différentes. Le gouvernement fédéral peut certainement s'en occuper.
    Merci beaucoup, monsieur.
    Bienvenue, monsieur Boulerice. Nous sommes très heureux de vous voir. Vous avez la parole.

[Français]

    Merci beaucoup, madame la présidente. Je vous remercie de votre accueil en cette première visite. J'espère que ce ne sera pas la dernière.
    En effet, nous avons eu aujourd'hui des présentations réellement fascinantes de nos deux invités. Je les remercie beaucoup d'être ici.
    Monsieur Edwards, je dois avouer que je suis dans la même position que votre mère. Je pensais que les scientifiques cherchaient des choses qui n'étaient pas encore découvertes et que la terra incognita était encore un moteur important du travail des scientifiques. Par contre, on voit bien, avec votre graphique, que tout le monde s'amuse à la même petite fête.
    Je comprends très bien que vous poussez pour que le Canada prenne davantage de risques relativement à cet ensemble de gênes qui sont plus ou moins délaissés pour l'instant. On voit, dans votre graphique, que les États-Unis, la Chine et l'Union européenne s'occupent des 50 ou 100 premiers gênes les plus populaires et que le Canada, à lui seul, s'occupe de tout le reste. Ne trouvez-vous pas que c'est un peu large sur nos épaules?

[Traduction]

    Pas maintenant. Nous pourrions nous en occuper.
    Oh, d'accord. Ce n'est pas encore fait.

[Français]

    Monsieur Meulien, partagez-vous l'analyse faite par M. Edwards quant à notre manque d'audace ou de risque? Que peut faire votre organisation pour pallier cela?
(1650)
    Il est évident que ce que présente M. Edwards est fidèle à la réalité. Que pouvons-nous faire? Nous pouvons être plus ouverts à certaines études qui ne font pas partie du même jeu de gênes.
    Il revient à nous, en tant que subventionneurs de la recherche, de revoir nos systèmes de revue par les pairs, lesquels peuvent être jugés comme étant plus prudents. Donc, c'est à nous de changer quelque chose.
    Nous revoyons constamment la façon de faire notre revue par les pairs. Alors, je pense qu'il y a des choses à faire à cet égard.
    En effet, il semble assez clair qu'il y a des choses à faire, surtout quand on considère ce que vous avez dit au départ. On a de la difficulté à innover à cause d'un manque de connaissances sur la biologie humaine. Si on ouvre la porte plus large, on augmente les possibilités de guérir les gens ou de prévenir certaines maladies. Cette frilosité ou ce conservatisme a des impacts sur le système de santé et la vie des gens.
    J'espère que vous continuerez d'agir en conséquence.

[Traduction]

    L'industrie le sait et nous le savons aussi. Les budgets de recherche en santé n'augmenteront pas beaucoup, alors pourquoi ne pas y ajouter l'argent de l'industrie? Nous pouvons utiliser les fonds publics pour encourager les intervenants de l'industrie à dépenser de l'argent au Canada. Nous pouvons leur communiquer nos règles. Nous partageons toutes les données, et l'industrie viendra. Elle a d'ailleurs déjà commencé.
    Je pense que nous pouvons obtenir de très gros investissements au Canada de la part des industries de partout dans le monde en ce qui concerne les découvertes avant concurrence en terra incognita, comme vous dites.

[Français]

    J'ai beaucoup aimé la présentation de la médecine en quatre « P », incluant la prévention et une médecine plus participative. Je pense que, depuis la Seconde Guerre mondiale, on a eu une médecine beaucoup axée sur la prise de médicaments une fois que la maladie était déclarée. On a parlé de diabète, de maladie d'Alzheimer et de cancer.
    Selon vous, quelles sont les possibilités de progrès en utilisant le génome humain et la génomique pour les maladies dégénératives.
    Il y a un potentiel énorme parce que des gens seront susceptibles ou non d'avoir ce genre de maladies. Il faut les connaître plus tôt dans la vie. Il ne faut pas attendre d'avoir 70 ans pour comprendre cela. Selon moi, cela veut dire qu'on peut beaucoup mieux gérer notre vie en sachant ça. Je pense qu'il y a un potentiel incroyable sur le plan de la prévention.
    Combien de temps me reste-t-il?

[Traduction]

    Il vous reste 30 secondes.

[Français]

    C'est le temps que j'ai pour poser une question pendant la période des questions à la Chambre.
    Rapidement, est-ce que le gouvernement canadien...

[Traduction]

    Il vous reste maintenant 15 secondes.

[Français]

    Que peut-on faire de plus pour améliorer le modèle canadien?

[Traduction]

    Je crois que nous devrions créer un bassin de fonds pour financer la recherche fondamentale en partenariat avec l'industrie et avoir l'argent nécessaire pour attirer les milliards de dollars que les sociétés pharmaceutiques veulent dépenser dans le milieu universitaire. Elles cherchent un peu partout dans le monde. Elles veulent dépenser leur argent à Harvard, mais c'est compliqué. Au Canada, si nous leur présentons nos règles et que nous leur expliquons notre façon de fonctionner, je suis certain que nous pouvons accroître la recherche publique tout d'abord avec l'aide financière du gouvernement, et ensuite inviter les intervenants de l'industrie à se joindre à nous. Je crois que Génome Canada est prêt à faire cela.
    Merci beaucoup.
    C'était de très bonnes questions. Merci.
    La parole est maintenant à M. Wilks.
    Merci, madame la présidente.
    J'aimerais aussi remercier les témoins d'être ici.
    Monsieur Meulien, vous avez dit que nous étions tous très différents. Cela expliquerait probablement pourquoi ma mère a toujours dit cela à mon sujet et pourquoi je suis enfant unique.
    Monsieur Edwards, j'ai aimé vos interventions. Nous nous comprenons bien. J'ai pris ma retraite de la GRC, mais j'ai gardé l'habitude d'envisager les choses en fonction des bons et des méchants.
    Examinons les choses sous cet angle. Lorsque je pense aux gènes — il y en a 20 000 —, je présume qu'il y a de bons gènes et de mauvais gènes. Est-ce exact? Savons-nous si c'est le cas?
(1655)
    Je dirais que c'est vrai en partie, car lorsque certains gènes sont modifiés, ils peuvent causer des maladies. Certains gènes pourraient donc être mauvais lorsqu'ils sont différents. Toutefois, nous ne savons pas à quoi servent la plupart des gènes.
    Nous ne savons pas à quoi ils servent, mais nous savons que certains d'entre eux seraient probablement très importants si on pouvait les identifier.
    Exactement.
    Je vais poser la même question que mon collègue, M. Lauzon; je ne comprends pas pourquoi on ne dit pas à M. Edwards: « Vous allez étudier le gène 16386. Voici les fonds nécessaires, et ne vous éloignez pas de l'étude de ce gène. »
    Y a-t-il suffisamment d'occasions au Canada pour qu'on puisse s'éloigner du... vous avez dit que nous étions actuellement entre 200 et 300. Avons-nous la capacité de dépasser ce cap?
    Il y a des gens aussi intelligents ici que n'importe où sur la planète. Nous n'avons pas les ressources pour tout faire, mais nous pouvons amorcer un changement de culture dans la façon dont les médicaments sont découverts. Le monde suivra, mais je veux être le premier, car les premiers obtiennent les plus grosses récompenses sur les plans économique et scientifique.
    Il s'agit de modifier la culture qui accompagne la découverte des médicaments. L'industrie s'en occupe et nous faisons beaucoup d'argent, et le monde universitaire s'occupe des recherches sans but pratique. Mais lorsque cela est arrivé, les intervenants de l'industrie travaillaient sur la même chose et ceux du monde universitaire aussi, et on ne découvre aucun médicament. Nous pouvons changer la culture. Nous ne découvrirons pas tout nous-mêmes, c'est évident.
    J'aimerais faire référence, monsieur Meulien, à votre plan stratégique 2012-2017 pour Génome Canada. Il y avait une partie sur l'innovation qui laissait entendre que l'innovation n'est pas toujours fondée sur la science et que la recherche et l'innovation sont deux domaines distincts. On donnait l'exemple d'Apple Corporation, qu'on reconnaît comme l'une des sociétés les plus innovatrices des États-Unis, même si elle se classe 82e au chapitre des dépenses en recherche et développement.
    Pourquoi est-il important pour Génome Canada d'accentuer la différence entre la recherche et l'innovation?
    C'est une excellente question.
    La recherche concerne surtout la découverte de nouvelles choses et la création de nouvelles connaissances. L'innovation doit pouvoir être mise en pratique. Au Canada, on a beaucoup écrit au sujet de l'innovation, et il nous manque des choses à ce sujet, au sujet du continuum de l'innovation. Nous menons ces excellentes recherches qui sont confinées aux établissements universitaires, et nous n'avons pas les outils nécessaires pour les mettre en pratique.
    C'est ce que nous essayons de faire dans notre petit domaine de la génomique. Nous essayons de le faire non seulement dans le domaine de la santé humaine, mais dans le domaine agricole et agroalimentaire, dans les pêches et dans les activités de foresterie. Nous collaborons avec les utilisateurs de cette technologie dans tous ces domaines pour tenter de favoriser l'innovation réelle. En effet, l'innovation doit être mise en pratique.
    À votre avis, comment les deux concepts sont-ils liés?
    Eh bien, vous ne pouvez pas avoir d'innovation sans mener quelques nouvelles recherches, n'est-ce pas? Vous pouvez appliquer l'innovation aux connaissances qui existent déjà, évidemment, mais vous pouvez aussi l'appliquer à de nouvelles connaissances. C'est comme une réaction en chaîne: il y a un flot ininterrompu de nouvelles découvertes issues du milieu universitaire et nous pouvons les mettre en pratique très rapidement, par l'entremise de n'importe quel modèle, c'est-à-dire le modèle d'innovation ouvert ou d'autres modèles.
    Merci beaucoup.
    La réunion a été fascinante. Nous avons appris beaucoup de choses. Merci.
    La parole est à M. Carrie.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    J'aimerais remercier les témoins. Je pense que la réunion d'aujourd'hui est très intéressante.
    Monsieur Meulien, vous avez dit qu'au Canada, nous menons de brillantes recherches et que l'innovation doit pouvoir être mise en pratique. Nous avons plusieurs différents témoins qui nous ont dit, essentiellement, qu'au Canada, nous étions les enfants de choeur du monde, et pour de nombreuses raisons. Nous menons de très bonnes recherches primaires, mais nous ne les commercialisons pas.
    Ce qui me préoccupe, c'est que le gouvernement pourrait investir beaucoup d'argent sans que cela génère de profits. J'aimerais que vous nous expliquiez un peu comment le gouvernement a établi certains partenariats avec Génome Canada. Pouvez-vous nous dire si cela crée des emplois pour les Canadiens?
(1700)
    Certainement. Nous devons parler de quelques éléments.
    Tout d'abord, nous avons déjà aidé 24 jeunes entreprises grâce à la recherche de Genome Canada. Ce sont des entreprises qui ont reçu du financement au tout début. Il s'agit habituellement de financement universitaire. Ensuite, de nouvelles entreprises ont été créées. Il y en a eu 24 dans cette situation. Certaines génèrent maintenant des recettes et embauchent des Canadiens hautement qualifiés. Ce n'est qu'un des volets.
    Ensuite, nous collaborons avec le gouvernement du Canada pour créer de nouveaux programmes qui favorisent vraiment les partenariats entre le milieu universitaire et l'industrie. Nous sommes sur le point de lancer un programme de partenariat sur les applications génomiques, qui créera de nouveaux partenariats entre le milieu universitaire et les utilisateurs de technologies, peu importe où ils sont.
    Qu'il s'agisse de généticiens forestiers, de gens du secteur de l'aquaculture, d'agriculteurs, d'entreprises pharmaceutiques ou d'entreprises qui fabriquent du matériel médical, nous voulons collaborer avec eux, et nous établissons le programme ensemble.
    Si possible, j'aimerais continuer à parler de la question d'attirer des partenaires privés. On nous a dit également que lorsque des partenaires privés investissent, ils font habituellement des vérifications et veulent augmenter les chances de réussir.
    Pouvez-vous nous dire comment le gouvernement pourrait faire en sorte que cela se produise plus souvent, à votre avis? Je sais que cela semble se produire un peu plus dans votre domaine de recherche que dans d'autres. De quelle façon pourrions-nous rendre cela plus courant?
    Je crois que c'est vraiment une question de concevoir des programmes et de cibler des domaines. De plus, je sais que le gouvernement souhaite beaucoup mettre plus d'argent dans le capital de risque. C'est très important. Cependant, le Canada est un pays un peu trop prudent. C'est un fait culturel. Je pense donc que nous devons prendre plus de risques. Ainsi, qu'il s'agisse de la BDC ou d'un autre produit d'investissement de risque, il faut faire des investissements plus risqués qu'auparavant.
    Ensuite, dans le programme de partenariat sur les applications génomiques, nous collaborerons étroitement avec le PARI, qui examine l'industrie sous un angle formidable que nous ne recréerons certainement pas. Collaborer avec ces gens sera très avantageux. Cela n'a pas tant à voir avec les changements structurels; il s'agit des gens sur le terrain, de concevoir de nouveaux programmes et d'amener les gens du milieu universitaire et de l'industrie à collaborer. Cela fera une grande différence
    Je sais qu'il y a quelques bons exemples d'incubateurs pour lesquels nous essayons de réunir le milieu universitaire, le gouvernement et l'industrie. Vous avez parlé d'intégrer les universitaires au milieu clinique. Dans l'optique d'intégrer la recherche à la médecine personnalisée dans le milieu clinique, comment cela pourrait-il être meilleur pour les consommateurs de services de santé? On personnalise les traitements et on n'aurait pas à procéder par essais et erreurs, qui a pour effet parfois d'aggraver la situation du patient.
    Je pense que ce sont d'excellents exemples. Les exemples des effets indésirables des médicaments sont importants. Voici un phénomène — il s'explique à 90 % par la génétique. Nous devrions avoir nos génotypes. Nous devrions avoir nos génomes, et les pharmaciens devraient nous dire que nous ne devrions pas prendre tel médicament parce que nous avons un gène qui se transformera en quelque chose de dangereux. Comme je l'ai dit dans ma déclaration préliminaire, les effets indésirables des médicaments coûtent 7 milliards de dollars par année au système de santé canadien. Nous savons que nous pouvons jouer un rôle à cet égard. C'est une façon de faire des économies de coûts.
(1705)
    Merci beaucoup.
    Docteure Fry.
    Merci, madame la présidente.
    Je veux poursuivre sur ce que disait le Dr Carrie. Je pense qu'en fait, on a essayé de prendre la recherche fondamentale et de la commercialiser. J'ai consulté un ancien sous-ministre de l'Industrie. Nous l'avions fait dans le cadre de Partenariat technologique Canada, où la recherche biomédicale était liée au secteur privé. C'était géré par un organisme indépendant, et il y avait des fonds de contrepartie. Cela a fonctionné. C'était un projet de 10 ans. Il a été annulé en 2007, ce qui est malheureux, car le capital de risque investi était très important. Tout le secteur privé et toute l'industrie voulaient contribuer à la mise en marché. C'est un modèle qui s'est révélé fructueux au cours des 10 années et on peut encore y recourir.
    Je veux parler d'un sujet très différent. Tout le monde parle du « petit Canada » et du rôle majeur que nous pouvons jouer. Le Canada a un atout important dans ce type de recherche du fait que c'est le seul pays au monde avec une population aussi diversifiée dont tous les renseignements sur les patients sont à un endroit, qui est l'administration publique provinciale. Aux États-Unis, en raison des lois relatives au respect de la vie privée, on ne peut pas transférer cela à partir du privé. Nous avons ici la capacité unique de faire de la recherche translationnelle. Nous devrions en tirer profit, car cela nous donne un avantage, non seulement parce que cela montre toute notre intelligence, mais aussi en raison de notre population de base et de notre réseau public de soins de santé.
    Nous devrions être réalistes, par contre. Medco, un assureur important aux États-Unis, s'occupe d'un nombre de personnes qui équivaut à la population du Canada. On entend des choses similaires au Royaume-Uni, qui a un système à payeur unique. La Suède a un système.
    Vous avez donc raison, mais nous ne nous démarquons pas par rapport au reste du monde, et si nous voulons attirer des investissements du secteur privé dans ce domaine de recherche, il nous faut être concurrentiels dans ce domaine et dans une foule d'autres domaines. Nous serons donc prudents.
    Je suis plus optimiste que lui.
    Oui, et moi aussi, en fait.
    Je me donne une note de 11 sur 10 pour ce qui est du degré d'optimisme. On ne peut pas l'être plus que cela.
    D'autres choses tracent la voie pour attirer une partie de la recherche translationnelle. Vous avez donné des exemples qui, à mon avis, sont très importants. De plus, il y a ces excellents liens entre les chercheurs et les cliniciens au Canada.
    Nous pouvons faire ce qu'on appelle des essais cliniques fortement axés sur la recherche, et nous devrions être en mesure de les faire mieux que n'importe quel autre pays. Je pense qu'avec le système à payeur unique et les données que nous avons sur les familles — auxquelles, soit dit en passant, le groupe sur les maladies rares attache beaucoup d'importance, car nous avons les meilleurs taux de réussite au monde pour ce qui est de résoudre des cas de maladies rares, grâce à nos données générationnelles. Nous avons le phénotypage clinique. Nous avons également les données génomiques. C'est très impressionnant. C'est très difficile pour les pays d'avoir tout cela.
    Je suis donc plus optimiste que lui.
    Toutefois, en ce qui concerne les maladies rares, j'ai appelé six dirigeants en R-D de sociétés pharmaceutiques partout dans le monde. Je leur ai dit « vous devez venir rencontrer ce groupe ». Ils sont tous venus. Ils vont tous investir exactement en raison de ce que vous venez de dire. Donc, oui, cela fera une différence, mais nous ne devrions pas être trop complaisants face à cela, n'est-ce pas?
    Non, non. Je pense seulement que c'est un avantage...
    Tout à fait.
    ... qui va au-delà du fait que nous sommes le « petit Canada ». Nous avons cet atout, soit la capacité de faire de la recherche translationnelle.
    Vous avez parlé un peu de cette capacité d'analyser les renseignements et de les communiquer. Il y avait une question, et encore une fois, nous en sommes aux conséquences imprévues. Il existe une telle chose qu'on appelle la communication de renseignements.
(1710)
    Il ne vous reste que 30 secondes pour en parler.
    Comment communiquer les renseignements gratuitement et être des enfants de choeur tout en faisant en sorte que ce soit avantageux? Pourriez-vous nous donner une réponse brève?
    En ce qui concerne la communication des renseignements, sur le plan opérationnel, c'est qu'on a des bases de données en commun, et le processus de collaboration donne une longueur d'avance sur le plan intellectuel. Tout le monde est libre de prendre cette longueur d'avance et d'entrer dans la compétition, et c'est ce qui se fait, mais les connaissances fondamentales sont communiquées de sorte que tout le monde soutient la concurrence avec son cerveau. Les sociétés pharmaceutiques croient qu'en participant, elles observent et apprennent plus de choses et font face à la concurrence, mais selon des règles équitables, et elles en sont satisfaites.
    Merci.
    Docteure Sellah

[Français]

    Merci, madame la présidente.
    Ma question s'adresse au Dr Edwards.
    Vous êtes le coauteur d'un article intitulé « New approaches to rewarding pharmaceutical innovation ». Dans ce document, vous avez énuméré certaines lacunes du système de brevetage des médicaments, comme les coûts élevés associés à la découverte d'un médicament et la chute des recettes de ventes, ainsi que des priorités mal orientées pour la recherche qui favorisent les changements progressifs aux thérapies médicamenteuses efficaces qui existent au détriment d'efforts pour développer des thérapies pour les maladies rares. Je sais que vous étiez plutôt favorable à un financement public de la recherche fondamentale, à des essais cliniques et à un régime de redevances axées sur la récompense. S'il y a un financement public, selon vous, les médicaments innovés vont-ils coûter moins cher au public?

[Traduction]

    Tout à fait, et nous serons capable de quantifier cela, de négocier avec la société pharmaceutique et de dire que nous ne payerons pas tel montant parce que ce n'est pas ce que cela a coûté.

[Français]

    C'est une bonne réponse brève. Je vais continuer.
    Quelles pourraient être les répercussions de vos suggestions sur l'innovation médicale?

[Traduction]

    Si je comprends bien la question, vous voulez savoir quelles répercussions un plus grand financement public de la recherche aurait sur l'innovation, c'est bien cela?
    Oui.
    Je pense que si le milieu universitaire est financé par le public, nous n'innoverons pas autant que les industries touchées et, par conséquent, que nous devons le faire dans le cadre d'un partenariat où nous avons à la fois l'impulsion donnée par le milieu universitaire et ce que nous retirons de l'industrie. Cela ne se fait nulle part dans le monde. Notre projet le fait. Je pense que c'est le juste équilibre et la façon de découvrir plus rapidement de nouveaux médicaments, ce qui cadre parfaitement avec la volonté du gouvernement et de tous les partis de collaborer avec le secteur privé pour intégrer des découvertes plus rapidement dans le milieu clinique.
    Il y a donc l'échange de renseignements et les affaires.

[Français]

    Je vous remercie de vos réponses.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Pour la prochaine intervention, le Dr Carrie et M. Lizon se partageront le temps de parole.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Monsieur Edwards, nous avons beaucoup d'expérience dans les études politiques, mais vous avez parlé d'études de recherche. Notre système semble avoir été conçu de sorte que nous avons un préjugé inhérent. Nous avons un système d'évaluation par les pairs. Il semble que le même groupe d'universitaires fait bouger les choses et évalue ces études.
    C'est comme cela partout dans le monde. Ce n'est pas un problème canadien, n'est-ce pas?
    Je suis d'accord avec vous. Comment pouvons-nous nous sortir de cette situation? Avez-vous des conseils à nous donner?
    En toute honnêteté, j'ai exactement la même opinion que votre collègue de droite, qui a dit que nous avions besoin de nous y attaquer. Le génome a un nombre limité de gènes. Il n'en a que 20 000. C'est tout à fait logique. Allons-y. Il n'y a aucun incitatif pour les professeurs, mais l'industrie peut offrir cet incitatif monétaire. En tant que membres de la population, nous disons « super — pourvu que nous le partagions ». Nous pouvons faire des recherches novatrices en faisant participer le secteur privé, qui nous poussera vers l'inconnu. Voilà la grande différence. Personne au monde ne sait comme s'y prendre, parce que chaque fois qu'une société pharmaceutique intervient, on se demande comment partager ces richesses imaginaires que nous ferons. Il y a ensuite des avocats, et rien ne se produit. Ce modèle, dirigé par le Canada, est un modèle opérationnel logique qui inclut la communication de renseignements, et il nous amènera vers l'inconnu.
    Y a-t-il une façon de faire en sorte que ces investissements restent au Canada? Pour l'essentiel, n'importe quelle entreprise peut prendre ces connaissances et faire le travail ailleurs. Et nous payons pour cela.
    Je pense que nous pouvons faire en sorte que les essais se fassent au Canada, mais j'hésiterais beaucoup à m'ingérer dans le marché et à dire qu'il faut que ce soit ici parce que cela ne fonctionnera pas. Nous devrions pouvoir soutenir la concurrence avec notre intelligence et notre entrepreneuriat. Faire collaborer le client est toujours une meilleure façon de faire des affaires, car on comprend le client. C'est pourquoi nous avons tellement d'entreprises dans le secteur des sables bitumineux. Si nous pouvons attirer les clients au Canada, et ils ne sont pas ici présentement, nous aurons un système beaucoup plus innovateur dans la découverte de médicaments.
(1715)
    Merci beaucoup.
     Ma question porte sur un sujet que je ne connais pas assez: la génétique. Veuillez pardonner mon ignorance, mais si l’on a le code génétique d’une personne et que l’on sait que certains gènes sont défectueux ou que le code indique que cette personne aura une maladie quelconque à long terme, serait-il possible d’améliorer le code génétique, de le modifier ou de trouver un code parfait pour cette personne? Je sais que c’est probablement de l’utopie, mais est-ce que les scientifiques y travaillent? Si l’on découvre qu’une personne a des gènes défectueux, est-ce qu’un code peut être modifié en quelque sorte et les gènes peuvent-ils être remplacés? S’agit-il d’un des volets étudiés?
    Ce domaine s’appelle la thérapie génique. On fait des expériences au Canada en milieu clinique, pour un gène précis, une étape à la fois. Modifier le code de tout le monde, pour un grand nombre de gènes, c'est vraiment très difficile. Nous n’en sommes pas là, mais pour certaines maladies des yeux, par exemple, des essais cliniques ont lieu au Canada. On a guéri des chiens aveugles grâce à la thérapie génique.
    Je peux donc supposer que si nous faisions le travail sur ces 20 000 gènes et que nous avions tous les renseignements et les liens entre les gènes, ce serait possible à long terme.
    Oui. Encore une fois, pour un grand nombre de gènes, c’est très délicat, parce que pour les yeux, quand cela fonctionne, on peut injecter le gène dans certains tissus oculaires. Pour modifier chaque gène, dans le corps de chaque personne, dans chaque cellule… C’est très délicat.
    Merci.
    En fait, c'est rassurant dans une certaine mesure.
    Docteure Fry, vous pouvez intervenir de nouveau.
    Merci.
    Je disais que nous parlons de génie génétique, mais parlons d’ingénierie en génomique. On recrée de tout nouveaux êtres humains à partir de ceux qui ne sont pas jugés en assez bonne santé. C’est de la science-fiction.
    Tout ce dont vous parlez est vraiment important. Ce qu’il faut déterminer, c’est ce que nous faisons maintenant au Canada? Le Dr Edwards a parlé de ce groupe qu’il a établi, mais je crois que le Canada peut aller plus loin, en tant que gouvernement fédéral, pour favoriser le partenariat académique public-privé après le partenariat tripartite, dans le cadre duquel le milieu universitaire collabore non seulement avec les sociétés pharmaceutiques, mais avec tous les secteurs de l’industrie pour permettre la commercialisation d’un produit ou d'une nouveauté. Je sais que lorsque cela a été fait il y a environ six ou huit ans, le montant total, incluant les contributions privées et publiques, était d'environ 10 milliards de dollars. Si l’on voulait refaire la même chose, pensez-vous que ce serait suffisant pour permettre au Canada de se retrouver de nouveau dans la position qu’il occupait habituellement en R-D parmi les pays du G8, c’est-à-dire d'être le numéro un? Nous sommes au septième rang.
    Comment procéder? Quelles sont les vraies mesures? Imaginons que vous êtes au gouvernement. Vous prenez un risque. Que faites-vous?
    Je suis d'accord avec ce qui vient d'être dit: l'industrie ne dépense pas son argent au hasard et, lorsqu'elle le fait, c'est avec diligence raisonnable. Si nous réduisions les critères régissant les fonds de contrepartie tout en tenant compte de l'intérêt de la population et de la compétitivité, et si nous pouvions créer une réserve de fonds de sorte que chaque professeur pourrait proposer à une entreprise: « Vous donnez 10 millions de dollars à l'Université de l'Alberta, et le gouvernement accordera des fonds de contrepartie que tous les intervenants devront partager. » Et les professeurs ayant de l'initiative pourraient dire aux entreprises étrangères: « Venez vous établir et investir au Canada. En neuf mois, le gouvernement canadien vous accordera des fonds de contrepartie avec un processus accéléré d'examen par les pairs. » Nous pouvons être proactifs et obtenir beaucoup de fonds privés. Nous comptons sur d'excellentes organisations qui savent comme administrer le tout. Moins les fonds de contrepartie seront assujettis à des règles et plus la recherche sera effectuée par l'industrie, nous obtiendrons alors davantage d'investissements pour tous les secteurs et non pas uniquement pour celui de la santé.
(1720)
    Dans le domaine de l'agriculture, etc...
    Tout à fait... et dans celui du pétrole et du gaz ainsi que dans celui de l'environnement.
    Très bien, dans tous ces domaines.
    Combien de temps me reste-t-il?
    Il vous reste environ une minute et demie.
    Je vais revenir à une question que j'ai déjà posée. Selon vous, il y a un critère qui permet de tenir compte du coût et de l'intérêt public découlant de la modification dans la prestation des soins de santé. Ce qui m'inquiète encore beaucoup, c'est que les nouvelles façons de traiter les maladies pourraient coûter davantage que les façons actuelles. Je veux parler des coûts supplémentaires et non des répercussions à long terme sur les soins de santé. Combien cela coûterait-il pour que nous passions à cette nouvelle façon de soigner les maladies? A-t-on procédé à une analyse coût-avantage?
    Oui. Une telle analyse est effectuée par des économistes de la santé. Dans le concours La génomique et la santé personnalisée, nous avons insisté pour qu'un économiste de la santé soit intégré à chaque équipe dont le projet est évalué. Beaucoup d'études sont effectuées. Elles diffèrent selon qu'il s'agit d'une maladie neurodégénérative ou du cancer. Cela sera fait essentiellement au cas par cas, mais toutes ces études sont effectuées.
    Je suis convaincu que nous aurons un tableau très clair de la valeur réelle pour le système de santé. Si nous ne pouvons le faire pour un domaine particulier, nous n'insisterons pas. Je ne crois pas que le système de santé ait les moyens d'implanter des changements dans un domaine où nous ignorons totalement si cela sera utile. Nous commencerons par les domaines sûrs, puis lorsque la valeur des changements aura été prouvée indubitablement, les autorités de la santé commenceront à promouvoir la technologie d'une façon plus proactive.
    Merci beaucoup, madame Fry.
    Je voudrais simplement savoir si nous pouvions connaître la liste des économistes de la santé parce que nous effectuons une étude sur...
    Oh! Pourriez-vous faire parvenir cette liste à la greffière, monsieur Edwards, pour que nous puissions la distribuer aux membres du comité?
    Certainement.
    Merci de vos excellentes questions, madame Fry.
    J'ai la possibilité de poser une question parce que c'est à nous de prendre la parole. J'ai donc toutes les minutes auxquelles j'ai droit.
    J'en remercie beaucoup les ministériels. Nous sommes tous des collègues, mais nous appartenons à des partis politiques différents à la Chambre. Je tenais à le préciser.
    Vous nous avez dit aujourd'hui que nous avions 20 000 gènes. Vous avez ajouté que les scientifiques explorent leurs problèmes, c'est-à-dire qu'ils étudient les gènes qui les intéressent. Nous n'avons donc qu'une très petite partie du tableau, n'est-ce pas? Vous avez créé une infrastructure qui me semble fort prometteuse et qui est censée avoir de nombreux débouchés.
    Vous avez évoqué deux variables: la prévention et le traitement des maladies en fonction du bagage génétique de chacun. Vous avez mentionné deux cancers, le diabète de type II et les maladies neurologiques dans une certaine mesure. Cela étant dit, cette infrastructure vous pose un énorme problème à certains égards. Vos propos d'aujourd'hui nous ont beaucoup enthousiasmés. J'ai été ravie d'entendre que le Canada est un chef de file dans ce domaine, car j'estime que nous avons les spécialistes les plus brillants au monde, ce qu'on a beaucoup sous-estimé. Cependant, le Canada devient un tel chef de file, et nous vous en remercions.
    Vous avez proposé de faire de l'industrie un partenaire. J'aime cette idée parce que c'est une réalité. La population canadienne vieillit. Nous n'y pouvons rien, peu importe ce qu'on nous dit. Les gouvernements de toute allégeance politique n'ont pas suffisamment de fonds pour s'attaquer à tous les problèmes. Nous devons donc sortir des sentiers battus, ce sur quoi met l'accent notre étude sur l'innovation technologique.
    À la suite de tout ce que vous nous avez dit aujourd'hui, pourriez-vous me préciser quelle est votre priorité? Est-ce la prévention? Est-ce le traitement? Est-ce moitié-moitié? Quelle est votre priorité, compte tenu du fait que vous ne pouvez résoudre tous les problèmes, n'est-ce pas? Pourriez-vous donc nous indiquer quelle est votre priorité?
(1725)
    Voici comment nous choisissons les projets, car vous avez tout à fait raison, nous ne pouvons pas tout faire: nous examinons tous les projets, de la prévention, à la détection précoce et au traitement. Nous n'avons pas établi nos priorités. Nous traitons toutes les demandes. Nous avons établi des critères d'évaluation, qui sont parfois très rigoureux... Il faut obtenir l'appui des autorités sanitaires et des cliniciens. Une fois que nous avons établi les justifications économiques, nous choisissons les projets en fonction notamment de leur valeur scientifique et des besoins cliniques. Nous n'avons jamais affirmé que nous allions nous concentrer sur le cancer ou les maladies neurodégénératives. Nous nous sommes intéressés aux projets qui, dans n'importe quel domaine, prouvaient que le système de santé s'améliorerait en relativement peu de temps.
    Merci.
    Je m'adresse maintenant à M. Edwards. Il me reste peu de temps.
    Monsieur Edwards, y a-t-il un programme ou une initiative qui vous permettra de réaliser vos rêves et d'insuffler cet esprit d'entreprise aux autres scientifiques qui ont l'habitude d'explorer les problèmes, comme vous l'avez dit, à si juste titre. Des esprits très brillants ne réalisent pas leur potentiel parce qu'ils ne sortent pas des sentiers battus. Leur offrez-vous un moyen de le faire?
    Je ne pense pas que les scientifiques craignent le risque. Le système en place dans le domaine de la recherche est réfractaire à l'innovation.
    C'est également mon opinion.
    Si le gouvernement canadien veut attirer les investissements des sociétés pharmaceutiques étrangères dans le domaine de la recherche, il pourrait, par l'intermédiaire d'IRSC ou de Génome Canada, créer un programme, dans le cadre duquel il offrirait des fonds de contrepartie et où il n'y aurait presque pas d'obstacles au financement. Si l'industrie investissait dans nos universités et la recherche, le gouvernement offrirait des fonds de contrepartie et des conditions avantageuses.
    J'essaie de trouver une image pour vous faire comprendre. Supposons que les Prairies regorgent de pétrole et que tous convergent vers Leduc pendant que les universités de la région de Boston conçoivent de meilleures plateformes de forage pour extraire davantage de pétrole. Supposons maintenant que vous êtes seul et que vous devez soutenir la concurrence de tous. Si vous autorisiez le partenariat dans le financement, les sociétés pharmaceutiques nous épauleraient et nous obtiendrions des fonds. On a simplement besoin d'avoir l'heure juste, et on s'occupera du reste.
    Merci infiniment. Nous n'avions que deux témoins aujourd'hui, mais ils ont constitué l'un des groupes les plus dynamiques que nous avons reçus. Nous avons accueilli des témoins remarquables, mais vous avez été aujourd'hui des plus intéressants, et le temps s'est envolé.
    Je vous remercie d'avoir comparu. Je remercie mes collègues d'avoir posé des questions fort pertinentes.
    La séance est levée.
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