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NDDN Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent de la défense nationale


NUMÉRO 039 
l
1re SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 27 février 2007

[Enregistrement électronique]

  (0805)  

[Traduction]

    La séance est ouverte.
    Merci chers collègues. Nous avons un ordre du jour rempli ce matin, d'ici à 11 heures. De 8 heures à 9 h 30, nous accueillons M. Bernier; puis de 9 h 30 à 10 heures, je voudrais que nous passions à huis clos pour discuter des travaux futurs du comité; puis, à 10 heures, conformément à la motion adoptée le jeudi 1er février, des représentants des Nations Unies et de l'OTAN nous donneront une séance d'information. Dans la mesure du possible, nous allons essayer de respecter cet horaire.
    Tout d'abord, monsieur le ministre, bienvenue devant notre comité. Nous serons heureux d'entendre vos observations, puis nous passerons à un tour de questions.
    Monsieur le ministre, vous avez la parole.
    Merci monsieur le président.
    Merci à tous de votre présence d'aussi bonne heure.
    Honorables membres du comité, je vous remercie de m'offrir l'occasion de comparaître devant vous aujourd'hui pour parler d'une question importante: l'administration de la politique des retombées industrielles et régionales, qui est gérée par mon ministère, Industrie Canada.
    Je suis accompagné aujourd'hui de M. Richard Dicerni, mon sous-ministre, à ma droite, et de Tom Wright, à ma gauche, sous-ministre adjoint à Industrie Canada.
    Le nouveau gouvernement du Canada, comme vous le savez, s'engage à rebâtir la place de notre pays au sein de la communauté internationale. Cet engagement consiste, entre autres, à honorer ses obligations envers ses partenaires internationaux comme l'OTAN, notamment par des achats judicieux de matériel de défense pour remplacer le matériel vétuste.
    Aussi bien ici au pays que sur la scène internationale, les femmes et les hommes des Forces canadiennes font preuve de leur résolution à protéger le Canada, son peuple et les intérêts de notre nation. Par l'annonce de programmes d'acquisition de matériel militaire, notre gouvernement affirme son engagement envers ces braves soldats d'un dévouement sans bornes.

[Français]

    D'abord et avant tout, messieurs, mesdames, nous voulons nous assurer que notre personnel militaire dispose de modes de transport militaire adéquats pour son matériel et pour les troupes militaires, au moment où il en a besoin, au moment où il est appelé à rendre service pour le Canada, soit ici même au Canada ou à l'extérieur, à l'étranger.
    Nous avons besoin, comme vous le savez, d'équipement militaire pour assurer les déplacements internationaux de nos militaires canadiens, mais aussi pour répondre aux différents sinistres que pourraient subir les Canadiens ici même, au Canada.

[Traduction]

    Le nouveau gouvernement du Canada est par ailleurs fermement résolu à édifier une économie prospère et concurrentielle dont tous les Canadiens bénéficient. Afin d'atteindre ce but, je crois fermement que notre gouvernement s'est engagé sur la bonne voie pour créer un contexte propice qui encourage et récompense le travail acharné, stimule l'innovation et favorise l'essor de l'industrie canadienne.
    Nous dynamisons l'économie canadienne en offrant aux industries du pays l'occasion de prendre part à la mise au point des technologies de l'avenir et en leur procurant de nouveaux débouchés de qualité. Notre façon d'assumer l'administration de la politique des retombées industrielles repose sur notre engagement à favoriser la viabilité du secteur de l'aérospatiale et de la défense et la vitalité de l'économie canadienne.
    Les mesures officieuses qui ont été prises pour veiller à ce que l'industrie canadienne profite des retombées des achats de matériel militaire remontent aux années 70 et le gouvernement en a fait une politique officielle il y a 20 ans. Cette politique a pour objet de s'assurer, peu importe l'entreprise choisie pour fournir le matériel dont nos vaillantes troupes ont besoin, que l'industrie canadienne en profite également. C'est ce qu'on appelle souvent la participation industrielle ou les achats compensatoires, une pratique fort répandue adoptée par les gouvernements du monde entier.
    Notre politique favorise des activités de haute technologie de qualité à l'origine de retombées économiques durables pour le Canada, et c'est la raison pour laquelle je suis des vôtres aujourd'hui. Comme vous le savez, le secteur canadien de l'aérospatiale occupe le cinquième rang dans le monde pour ce qui est des ventes. Comme j'en ai été le témoin lors du Salon aéronautique international de Farnborough à Londres l'été dernier, les entreprises canadiennes sont des chefs de file mondiaux, en mesure de défier toute concurrence. Ce secteur contribue grandement à la vitalité de l'économie canadienne, car il représente environ 9,2 milliards de dollars — oui, 9,2 milliards — de notre produit intérieur brut.
    J'ai eu l'occasion de prendre connaissance d'une partie des témoignages que votre comité a déjà entendus. Comme on vous l'a dit, chaque fois que le gouvernement fédéral entreprend d'importants programmes d'achat de matériel de défense, trois ministères entrent en jeu. Le ministère de la Défense nationale précise les exigences auxquelles le matériel doit se conformer; Travaux publics et Services gouvernementaux Canada s'occupe des processus d'acquisition et de passation de marchés; et Industrie Canada élabore un régime des retombées industrielles en vue de s'assurer que l'industrie canadienne en retirera des avantages réels, stratégiques et de qualité supérieure.

[Français]

    Comme vous le savez, le 2 février 2007, notre gouvernement a annoncé l'achat de quatre appareils C-17 Globemaster III, au coût total de 1,8 milliard de dollars.
    Ce montant comprend aussi l'aménagement d'infrastructures à la Défense nationale et l'administration du programme par le gouvernement du Canada.
    La modernisation des infrastructures, la formation pour l'utilisation des appareils et l'administration par le gouvernement constituent des investissements directs dans notre économie et ne sont donc pas assujetties aux exigences en matière de retombées industrielles en vertu de notre politique.
    En ce qui concerne l'achat de biens d'équipement, la valeur des retombées économiques pour l'industrie canadienne dépassera le milliard de dollars. Une fois les appareils achetés, le gouvernement doit aussi octroyer des contrats de soutien en service et en entretien.
    À cet égard, une entente de soutien en service, évaluée à 1,6 milliard de dollars, a été signée avec la United States Air Force. Cette entente comporte deux volets. Dans le premier volet, les services exécutés par la United States Air Force, les forces armées américaines, ne sont pas visés par la Politique des retombées industrielles et régionales, puisqu'ils ne sont pas soumis aux exigences établies pour les manufacturiers étrangers.
    Le second volet a trait aux services d'une valeur approximative de 900 millions de dollars qui seront confiés en sous-traitance à la société Boeing. Cette dernière est visée par les exigences de la politique des retombées industrielles, de sorte que Boeing devra investir au pays une valeur égale au capital investi par le gouvernement du Canada.
    Il s'agit là du même genre de retombées industrielles qu'engendre l'achat des avions. Ces retombées, issues de contrats octroyés à Boeing, seront réparties sur plus d'une vingtaine d'années.
    Les fournisseurs qui obtiendront les contrats auprès de Boeing pourront les annoncer à mesure qu'ils les remporteront, au cours des prochaines semaines ou des prochains mois.
    Par le passé, il est arrivé qu'il faille deux ou trois ans pour finaliser des programmes d'achat, mais il me fait plaisir de préciser que nous avons réussi à conclure l'acquisition des achats de transport stratégique en l'espace de quelques mois et à obtenir pour le Canada des retombées industrielles d'une valeur totale d'environ 1,9 milliard de dollars aux chapitres de l'acquisition des appareils et de l'entretien.

  (0810)  

[Traduction]

    Les membres du comité sont au courant que le gouvernement a également annoncé l'achat d'hélicoptères, de navires, de camions et d'appareils de transport aérien tactique. Chaque programme d'acquisition sera également à l'origine d'importantes retombées pour l'industrie canadienne.

[Français]

    En vertu de la politique des retombées industrielles, chaque dollar qu'obtiennent les entreprises qui obtiennent les contrats à la suite de nos achats d'équipement militaire doit engendrer une activité économique équivalente au même montant au pays. Cette politique assure donc un retour sur l'investissement de 100 p. 100 sur la durée des contrats. Je tiens à vous dire que cette politique est non négociable.
    Plus encore, les entreprises qui obtiennent ces contrats doivent non seulement investir dollar pour dollar ici même au Canada, mais elles doivent également le faire de façon significative et durable dans de la haute technologie de pointe. L'objectif consiste à aider les entreprises canadiennes à s'intégrer aux chaînes d'approvisionnement mondiales, qui sont d'une importance considérable pour cette industrie, et à continuer d'en faire partie à l'avenir.

[Traduction]

    Cela signifie que l'industrie canadienne bénéficie de nos programmes d'acquisition, quel que soit l'endroit où se situe le siège social de l'entrepreneur retenu.
    De plus, les transactions doivent satisfaire à trois critères pour qu'Industrie Canada les juge acceptables. Tout d'abord, il doit s'agir d'un travail causal; le travail doit découler du programme d'acquisition. Le travail doit être exécuté pendant la période définie dans le contrat. Le travail doit respecter le principe de l'accroissement, selon lequel on peut se servir des relations d'affaires existantes, mais seulement le nouveau travail compte aux fins du respect de l'obligation.
    De plus, pour les C-17, nous précisons que 50 p. 100 des retombées doivent se retrouver dans les secteurs de l'aérospatiale et de la défense, et qu'au moins 30 p. 100 de celles-ci doivent cibler des technologies clés. Les technologies clés sont les suivantes: matériaux nouveaux et fabrication de pointe, systèmes d'avionique et de mission, communications et contrôle, gestion de la puissance et de la propulsion, sécurité et protection, capteurs, simulation, formation et environnement synthétique, espace, et systèmes de véhicules sans pilote.
    Nous exigeons aussi que 15 p. 100 des contrats de Boeing assujettis à la politique des retombées industrielles soient conclus avec des petites et moyennes entreprises. Comme vous le savez, les petites et moyennes entreprises sont d'une importance cruciale pour assurer la croissance et la viabilité du secteur de l'aérospatiale et de la défense, et de manière générale, les petites et moyennes entreprises sont les principaux moteurs de notre économie.

  (0815)  

[Français]

    Ultimement, la Politique des retombées industrielles et régionales a pour but de permettre aux entreprises du secteur canadien de l'aérospatiale et de la défense de faire la démonstration de leurs compétences et d'établir des relations d'affaires de longue haleine avec d'importantes sociétés étrangères oeuvrant dans ce secteur.
    La politique du nouveau gouvernement du Canada favorise ainsi la compétitivité des firmes canadiennes, l'accès aux marchés, la commercialisation et les investissements dans les secteurs de haute technologie pour notre industrie ici même, au Canada. Nous encourageons par le fait même les entreprises à établir des partenariats selon leur logique d'affaires, mais nous travaillons en étroite collaboration avec l'industrie canadienne pour qu'elle puisse saisir les occasions favorables et nous continuerons de le faire.
    En fait, le gouvernement s'est efforcé d'améliorer le processus des retombées industrielles pour qu'il s'intègre plus harmonieusement à l'ensemble des programmes d'acquisition, et il a mis l'accent sur les retombées stratégiques réelles pour l'industrie canadienne.

[Traduction]

    Par exemple, pour la première fois, l'Association des industries aérospatiales du Canada et l'Association des industries canadiennes de défense et de sécurité ont collaboré avec le gouvernement pour dresser la liste de neuf technologies clés à laquelle je faisais référence précédemment. Il s'agit de technologies qui, aux yeux de l'industrie, sont essentielles à son évolution future.
    De plus, nous travaillons en étroite collaboration avec les organismes de développement régional -- l'Agence de promotion économique du Canada atlantique, Diversification de l'économie de l'Ouest Canada, et l'Agence de développement économique du Canada pour les régions du Québec -- afin de repérer les entreprises canadiennes susceptibles d'être intéressées par les débouchés offerts sur le marché.
    Nous travaillons aussi directement avec les entreprises canadiennes pour cerner les occasions d'affaires à saisir correspondant à leurs secteurs de compétence, et nous collaborons avec les entrepreneurs pour souligner l'importance de leur participation pancanadienne. Nous mettons tout en oeuvre pour que les sociétés internationales prennent conscience de nos forces et de nos atouts ici au Canada, et pour qu'elles sachent que nous sommes fiers de l'industrie canadienne.

[Français]

    La politique des retombées canadiennes représente des obligations contractuelles sérieuses, et Industrie Canada exige des rapports annuels de vérification et des garanties d'exécution.
    Chaque année, les sociétés qui obtiennent nos contrats doivent rendre compte de ce qu'elles ont accompli à cet égard. Il peut même y avoir des conséquences financières pour la non-exécution des obligations contractuelles.
    Les fonctionnaires d'Industrie Canada continuent de collaborer avec Boeing pour cerner des partenariats favorables à la bonne marche des affaires de cette entreprise, assurer l'avancement des technologies clés retenues et procurer de véritables débouchés à notre industrie canadienne.

[Traduction]

    Notre façon d'aborder les retombées industrielles s'inspire de la démarche globale du gouvernement. Au cours de la dernière année, le nouveau gouvernement du Canada a pris d'importantes mesures pour renforcer l'économie nationale. Peu de temps après notre arrivée au pouvoir, nous avons présenté le budget de 2006, contenant des mesures destinées à améliorer notre qualité de vie en créant une économie dynamique en mesure de jouer un rôle de premier plan au XXIe siècle. Ces mesures visaient à accroître la compétitivité du régime fiscal canadien et à le rendre plus attrayant pour les investisseurs étrangers. Elles traduisaient notre engagement à réduire le fardeau réglementaire des entreprises, notamment en matière de formalités administratives, et à appuyer les sciences et la technologie au Canada.

[Français]

    L'automne dernier, nous avons présenté notre plan économique à long terme dans Avantage Canada: Bâtir une économie forte pour les Canadiens, qui encourage les particuliers et les entreprises à atteindre l'excellence et à faire du Canada un chef de file mondial.
     Nous continuerons de mettre tout en oeuvre pour que l'économie canadienne bénéficie pleinement des retombées industrielles engendrées par les achats d'équipement militaire dans le cadre de notre plan « Le Canada d'abord ».
    Nous poursuivons aussi notre travail avec l'industrie aérospatiale et de la défense pour qu'elle tire le meilleur parti des possibilités qui lui sont offertes actuellement.

[Traduction]

    Merci beaucoup.

[Français]

    Merci beaucoup.

[Traduction]

    Mes fonctionnaires et moi-même sommes à votre disposition pour répondre à vos questions.
    Merci monsieur le ministre.
    Nous allons passer au premier tour de questions. Lorsque le ministre comparaît, le temps de parole pour les questions et réponses du premier tour est de dix minutes.
    Nous allons commencer avec monsieur Coderre.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Monsieur le ministre, bienvenue à ce comité.
    Le désavantage pour vous, ce matin, c'est que lorsqu'on parle à tous les autres ministres, ça finit toujours par être de votre faute. Cela fait que the puck stops here. On va voir si vos réponses se tiennent.
    J'ai entendu beaucoup de mots dans votre discours, mais je n'ai pas beaucoup entendu parler d'investissements.
    Évidemment, il y a plusieurs éléments que j'aimerais aborder avec vous. En ce qui a trait à la question industrielle, mon collègue Scott Brison, qui est notre porte-parole en matière d'industrie, pourra en parler. Quant à mon collègue M. McGuire, il pourra parler plus spécifiquement de la question des régions, notamment. Mais entre-temps, il y a plusieurs autres questions que j'aimerais vous poser.
    Monsieur le ministre, est-il faux de prétendre que lorsque vous voyagez à l'extérieur du pays à titre de ministre, vous devez en aviser le bureau du premier ministre, qui autorise ou non le voyage planifié et son but?
    Vous n'êtes pas obligé de prendre des notes. Vous pouvez répondre.
    Quand vous voyagez, êtes-vous obligé d'avoir la permission du premier ministre? De plus, devez-vous dire exactement pourquoi vous voyagez?

  (0820)  

    Monsieur le président, je suis très heureux d'être ici et de répondre aux questions qui me sont posées par mon honorable collègue.
    Dans le préambule de votre question, vous avez parlé des bénéfices industriels. Vous avez laissé entendre que...
    Monsieur le président, j'invoque le Règlement.
    ... les bénéfices étaient très peu élevés. J'aimerais vous parler du contexte...

[Traduction]

    Non, monsieur Coderre, ce n'est pas un rappel au Règlement.

[Français]

    Monsieur le président, j'ai posé une question. J'espère que mon temps n'est pas compté, puisqu'il s'agit d'un recours au Règlement.
    Je dispose de 10 minutes et j'ai posé des questions précises. J'ai déjà été ministre et je sais comment gagner du temps.
    Monsieur le ministre, nous avons beaucoup de questions à vous poser et, avec tout le respect que je vous dois, je me permets de préciser que vous avez eu la possibilité de nous donner votre point de vue dans votre discours.
    Je veux une réponse toute simple: dites-moi oui ou non. J'ai une série de questions à vous poser. Est-ce que, oui ou non, lorsque vous voyagez, le premier ministre doit autoriser ce voyage? Est-il au courant des buts de ce voyage?
    Monsieur le président, j'aimerais avoir un renseignement. Les questions ne doivent-elles pas être pertinentes au sujet qui fait l'objet de la discussion, soit l'approvisionnement? Je m'interroge sur la pertinence de la question.

[Traduction]

    Vous avez raison.

[Français]

    Elle est pertinente. Il a rencontré des gens de Boeing avant la signature de ce contrat. Donc, monsieur Blaney, nous y reviendrons.
    Merci de votre précision.

[Traduction]

    Merci à tous deux de vos interventions. Je ne pense pas qu'il s'agisse de rappel au Règlement.
    Monsieur le ministre, vous avez la parole.

[Français]

    Merci.
    Cela me fait plaisir de répondre à la question. Auparavant, je souhaite faire une mise en contexte. J'ai bien pris note de votre question, monsieur Coderre.
    Ce que le gouvernement a fait en ce qui concerne les achats militaires est important. Nous avons annoncé l'acquisition des avions de transport stratégique. Je viens de dire dans mon discours d'ouverture qu'il y aura des retombées économiques de plus de 1,9 milliard de dollars. Dans le cas de l'achat des avions de transport tactique, dont nous avons fait l'annonce, il y aura des retombées économiques de plus de 3,6 milliards de dollars ici même, au Canada.
    L'hon. Denis Coderre: Monsieur le président...
    L'hon. Maxime Bernier: Nous avons également annoncé l'acquisition d'hélicoptères de transport moyen à lourd, dont les retombées économiques s'élèveront à 3,7 milliards de dollars.
    L'hon. Denis Coderre: S'il vous plaît, monsieur le ministre...

[Traduction]

    Monsieur Coderre, le ministre a la parole.

[Français]

    Monsieur le président, j'invoque le Règlement.
    Je trouve totalement inacceptable la réponse que nous donne le ministre aujourd'hui, et je sais où il s'en va. On a des questions précises à poser et un travail sérieux à faire.
    Monsieur le ministre, nous disposons d'une heure et demie. Si vous ne répondez pas maintenant, il y aura un scrum de toute façon et on va vous poser d'autres questions. Nous pouvons le faire également à la période des questions orales à la Chambre.
     Voulez-vous, s'il vous plaît, collaborer avec les membres du comité? Avez-vous eu, oui ou non, besoin de l'autorisation du premier ministre lorsque vous avez fait des voyages, notamment à Washington lorsque vous avez rencontré Jim Albaugh de Boeing et travaillé avec cette compagnie avant même la signature du contrat?

[Traduction]

    Monsieur le ministre, vous avez indiqué que vous aviez l'intention de répondre à cette question. Je vais vous donner le temps de le faire.
    Monsieur Coderre, pourriez-vous permettre au ministre de répondre? Il a indiqué qu'il souhaitait le faire.

[Français]

    Monsieur le président, j'aimerais qu'on laisse le témoin répondre. On ne peut avoir de réponses aux questions parce qu'on ne le laisse pas répondre.
    L'hon. Denis Coderre: C'est vrai, tu as raison. On n'a pas de réponses aux questions. C'est exactement ce que je veux savoir.
    M. Steven Blaney: Laissez-le répondre. Ayez un peu de respect pour le témoin, s'il vous plaît.
    L'hon. Denis Coderre: Vous avez raison, monsieur Blaney.

[Traduction]

    J'ai donné la parole au ministre, c'est le ministre qui a la parole.
    Merci monsieur le président.
    Je voudrais prendre quelques secondes pour conclure ce que j'étais en train de dire, puis je répondrai à cette question. Je serai très heureux de répondre à cette question, car c'est une bonne question et je suis fier de ce que je fais à titre de ministre de l'Industrie. Si vous voulez bien patienter 30 secondes, je vais finir de répondre à cette question.

[Français]

    Je disais que notre gouvernement avait rendu publique son intention d'avoir des hélicoptères de transport moyen à lourd, ce qui va se traduire par des retombées économiques de 3,7 milliards de dollars, ainsi que des navires de soutien interarmées dont les retombées seront de 2,3 milliards de dollars.
    En 12 mois, ce gouvernement en a fait plus pour les retombées économiques que le précédent gouvernement en 12 ans. Ces retombées totalisent 12,6 milliards de dollars pour le Canada.
    Cela étant dit, pour répondre précisément à la question de mon collègue, je dirai que, comme ministre de l'Industrie, je dois rencontrer tous les joueurs de l'industrie canadienne de l'aérospatiale. J'ai rencontré la plupart de ces joueurs à Farnborough, comme je l'ai dit dans mon discours d'ouverture. J'ai rencontré les joueurs de l'industrie canadienne et de l'industrie internationale, les présidents de différentes compagnies, que ce soit Boeing ou d'autres.
    Mes fonctions m'ont également amené à participer à une rencontre à Washington, dont a fait état mon honorable collègue, dans le cadre du Partenariat pour la prospérité et la sécurité au Canada. Mes homologues des États-Unis et du Mexique et moi avons eu une journée fructueuse pour nous assurer que sur ce continent, il puisse toujours y avoir de la prospérité et de la sécurité dans les relations entre les différents pays.
    À cet égard, j'ai rencontré aussi...

  (0825)  

    Non, un instant s'il vous plaît.
    Toujours pour répondre à la question, je dois également dire que j'ai rencontré des gens de Boeing et d'autres entreprises dans le cadre de mes fonctions de ministre de l'Industrie.
    Je vous pose cette question parce que votre litanie de mots révèle qu'il y a eu une négociation au préalable, que tout avait été fixé, finalement. Le 22 juin dernier, je vous ai posé une question sur l'acquisition d'avions pour la Défense nationale. Le premier ministre avait affirmé à ce moment-là qu'aucun choix n'avait été fait, que le dossier suivait son cours, etc.
    Pourtant, ce même 22 juin, ce dossier recevait l'approbation finale du Conseil du Trésor, qui est un comité du Cabinet. Le premier ministre avait choisi d'escamoter la vérité afin d'éviter de rendre des comptes aux parlementaires sur ces questions, préférant de loin une tournée de marketing d'une semaine d'un océan à l'autre, démontrant son peu de respect pour les questions des parlementaires sur des achats de plus de 17 milliards de dollars, qui représentent presque 10 p. 100 du budget annuel du Canada; ce n'est pas rien.
    Ces choix étaient tellement déjà établis que vous aviez été dépêché à Washington une semaine plus tôt par le bureau du premier ministre pour entreprendre secrètement des pourparlers avec Boeing et Lockheed Martin. On voit que cela fonctionne. Vous dites que vous ne faites pas d'ingérence politique, mais on va donner un contrat à CAE pour l'entraînement. On parle des Chinook et des Hercules, par exemple, mais on ne parle pas...

[Traduction]

    Monsieur, j'ai un rappel au Règlement. J'aimerais que l'honorable député d'en face nous fournisse des preuves de ses allégations.
    Ce n'est pas un rappel au Règlement.
    Je ne suis pas sûr que ce soit un rappel au Règlement, mais, monsieur Coderre, voulez-vous poser votre question, s'il vous plaît?

[Français]

    D'accord, mais j'espère qu'on ne réduira pas mon temps.
    On sait que, de toute façon, en donnant le contrat à CAE... Comme vous ne faites pas d'ingérence, j'imagine que c'est le bureau du premier ministre qui en fait. On parle des Chinook et des Hercules, mais on ne parle pas évidemment des C-17, parce qu'on s'est fait berner à cet égard. Vous ne voulez rien faire, mais on s'est fait berner.
    Vous avez ainsi outrepassé toute l'expertise de la bureaucratie fédérale. C'est la première fois qu'on voit un ministre de l'Industrie négocier avant les gens de son ministère, ce qui est, selon moi, totalement inacceptable.
    Pour la première fois, le Canada n'effectuera pas en totalité l'entretien d'une de ses flottes d'avions, privant ainsi son industrie aéronautique de retombées industrielles significatives en matière de transfert technologique. La cerise sur le sundae, c'est qu'on n'a pas négocié les règlements ITAR. Si on veut qu'il y ait de l'entretien, on doit nécessairement obtenir la propriété intellectuelle. Il n'y a aucune espèce de propriété intellectuelle. Même si on voulait se battre pour obtenir des pourcentages au Québec, qui contrôle 60 p. 100 de l'industrie, vous avez négocié des peanuts. Vous avez fait un beau petit voyage à Washington qui n'a rien donné, si ce n'est que vous vous êtes peut-être fait de nouveaux amis.
    Vous devez être au courant, monsieur le ministre, que le gouvernement canadien a négocié les contrats de licence visant l'ingénierie et les données techniques pour permettre à des sociétés canadiennes de fournir l'entretien directement au ministère de la Défense, et non aux constructeurs.
    Pourriez-vous nous dire si c'est toujours le cas, et sinon, pourquoi? Comment se fait-il maintenant que ce soit des compagnies comme Lockheed Martin et Boeing qui géreront la façon dont on réalisera les bénéfices régionaux? Comment se fait-il que le gouvernement ne serve plus à rien? Finalement, quel est votre rôle au gouvernement? À quoi sert un ministre de l'Industrie sous le gouvernement conservateur, sauf à faire de petits voyages à Washington, s'il ne peut faire son devoir et aider les gens des régions, notamment au Québec, à obtenir le pourcentage auquel ils ont droit? Si vous voulez que l'industrie puisse fonctionner, il faut obtenir la propriété intellectuelle. Il faut qu'il y ait aussi de la recherche et du développement. On veut des retombées et pas seulement des compensations.

[Traduction]

    Monsieur le ministre, le temps est écoulé. Souvenez-vous de cette question, et lors des prochains tours, vous aurez la possibilité d'y revenir.
    Monsieur Bachand, vous avez dix minutes.

  (0830)  

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Je vais essayer de garder le débat à un niveau élevé, de ne pas descendre trop bas.
    D'abord, je vous souhaite la bienvenue. Je dois vous avouer, monsieur le ministre, qu'il s'agit d'un dossier extrêmement frustrant pour le Bloc québécois. Je vais essayer de vous dire pourquoi, selon nous, le Québec est victime de la façon dont vous octroyez ces contrats. Le gouvernement canadien investira 16 milliards de dollars dans l'industrie aérospatiale. On a analysé ces contrats, et il n'y aura pas beaucoup de retombées pour le Québec.
    Je veux vous expliquer pourquoi ma frustration a augmenté depuis le mois de juillet. Il y a d'abord eu les annonces, et on a demandé au ministre de la Défense, à la Chambre, si on allait vraiment avoir des avions C-17, des avions tactiques et des avions de recherche et sauvetage. Lors des derniers jours de la session, le ministre nous a répondu qu'on n'avait pris aucune décision. La semaine suivante, au moment où on fermait la Chambre, il s'est mis à parcourir le Canada pour annoncer tout cela.
    Le 7 ou le 8 juillet, j'ai ouvert mon ordinateur et je suis allé sur le site MERX de Travaux publics et Services gouvernementaux Canada. Je me suis aperçu que les contrats étaient déjà en ligne, en pleines vacances d'été. Vous avez fait référence à Farnborough. Effectivement, l'ensemble de l'industrie aérospatiale se trouvait en Angleterre, à Farnborough, pour le salon de l'aéronautique.
    Je ne pouvais pas laisser passer une telle chose. Le 31 juillet, j'ai décidé de rencontrer les gros joueurs de l'industrie aérospatiale à Montréal. Ils étaient un peu découragés et trouvaient que les choses allaient vite. L'appel d'offres fermait le 4 août. Ils m'ont demandé pourquoi il y avait 60 p. 100 de contenu aérospatial pour Boeing et 50 p. 100 pour Lockheed Martin. Pourquoi pas 100 p. 100 pour l'industrie aérospatiale?
    Je dois vous avouer que le Bloc québécois est actuellement le seul parti — et j'insiste là-dessus — qui défend l'industrie aérospatiale québécoise. Les autres partis ont des installations un peu partout au Canada et hésitent à défendre le Québec. Ici, je défends uniquement le Québec, et il s'avère que ce dernier a 60 p. 100 de l'industrie aérospatiale au Canada.
    J'ai ensuite rencontré des représentants de Boeing au Ritz Carlton, qui m'ont emmené rencontrer dans la suite royale, en haut, leurs responsables en retombées industrielles et régionales, ou RIR. Je leur ai dit que 60 p. 100 de l'industrie aérospatiale était au Québec, qu'il y avait 60 p. 100 de contenu canadien...
    Monsieur le président, est-ce que je peux finir? Pouvez-vous demander à mes collègues de se calmer un peu? Je sais que cela les chatouille, mais ce n'est pas grave.

[Traduction]

    Allez-y. Vous avez la parole.

[Français]

    J'ai donc dit aux gens de Boeing que 60 p. 100 de l'industrie aérospatiale était au Québec, que 60 p. 100 seraient dans les contrats d'aérospatiale, et qu'ils allaient par conséquent donner 36 p. 100 au Québec. Ils ont alors hésité et dit que cela ne fonctionnait pas comme cela.
    Par la suite, on a appris que votre gouvernement avait dit à Boeing qu'elle pourrait investir là où elle le voudrait. Je ne veux pas répéter mon histoire de la Camaro rouge et parler de la façon dont mon père m'avait expliqué comment négocier un contrat. Quoi qu'il en soit, quand je fais un chèque à un garage pour acheter une voiture ou n'importe quoi d'autre, je tiens à ce que cela se passe à ma façon puisque c'est moi qui paie. Or, ce n'est pas ce que vous avez fait. C'est sur ce point que j'aimerais vous entendre.
    Lors de votre dernière comparution devant ce comité, vous avez dit avoir signé le contrat de Boeing le 2 février. Avez-vous hésité un seul instant? Votre main a-t-elle tremblé au moment de signer ce contrat? Vous êtes-vous dit que vous étiez en train de mettre le Québec à sa place et qu'on laissait Boeing décider où l'argent serait investi? Vous êtes un ministre venant du Québec. Vous devriez normalement défendre votre lieu d'origine.
    Excusez-moi si ma frustration est sortie, mais comme c'est la première fois que vous êtes devant moi, je veux en profiter.
    Merci beaucoup. Vous êtes absolument pardonné.
    Je vais faire un bref historique, parce que vos propos et vos questions contenaient plusieurs sous-questions. Le 5 juillet dernier, nous avons publié un préavis d'adjudication de contrat sur le site Internet, vous avez absolument raison. Cela a été fait en toute transparence. Puis, les 16 et 19 juillet derniers, j'ai rencontré à Farnborough Boeing et des compagnies canadiennes. Au mois d'août, dans la foulée de l'annonce de janvier dernier sur le contrat de Boeing, mon collègue Michael Fortier, le ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, a fermé l'appel d'offres.
    J'aimerais remettre les choses en perspective. Avant de venir vous rencontrer, j'ai regardé les programmes des différents partis en ce qui concerne la défense. J'ai été estomaqué de voir que le programme du Bloc québécois accordait très peu d'importance à la défense. Investir dans les forces armées afin qu'elles aient des équipements modernes et de pointe n'est pas une de ses priorités. Je trouve un peu curieux que mon collègue du Bloc québécois soit très heureux qu'on fasse des annonces en ce qui concerne le domaine militaire et qu'il y ait en plus des retombées économiques pour le Canada.
    Avant tout, le rôle du gouvernement est d'acheter des équipements pour les forces armées. Le gouvernement précédent libéral a négligé les forces armées pendant 12 ans. J'ai lu les discours de campagne et de plateforme électorales de mes collègues libéraux qui faisaient la promotion des Forces canadiennes. Mais, dans les faits, aucun investissement n'a été fait dans ce secteur au cours des 12 dernières années.
    Donc, le but premier de cet exercice est de fournir de l'équipement aux Forces canadiennes au meilleur prix possible. Nous avons en plus une politique de développement industriel et régional, comme tous les autres pays du monde. En vertu de cette politique, on doit s'assurer que pour chaque dollar de contrat donné à un manufacturier étranger, le Canada ait un dollar de retombées économiques. Par « retombées économiques », nous entendons des retombées réelles assorties de transferts de technologie. C'est une chose à laquelle des entreprises multinationales comme Boeing, Lockheed Martin ou Airbus sont habituées, car tous les pays développés ont des politiques semblables en matière de bénéfices industriels.
    En tant que ministre de l'Industrie, mon rôle est de m'assurer, de concert avec la haute fonction publique et le ministère de l'Industrie, que ces entreprises respectent notre politique de développement industriel en procurant des retombées à l'industrie aérospatiale canadienne.
    Je suis député de la Beauce et ministre de l'Industrie. Je remercie le premier ministre de m'avoir fait confiance et de m'avoir donné le privilège de servir comme ministre de l'Industrie. En cette qualité, je dois servir l'intérêt général, l'intérêt canadien. J'ai décidé d'aller en politique non pas pour faire du patronage ou pour dire avec quelle entreprise privée nous devrions faire affaire, mais pour faire respecter les lois et les politiques canadiennes.
    Je suis très fier, comme je l'ai annoncé au mois de janvier dernier, que Boeing respecte notre politique. Je tiens même à dire au comité que le contrat négocié entre le gouvernement du Canada et Boeing prévoit des pénalités pécuniaires appréciables si cette entreprise ne respecte pas son engagement de procurer des retombées industrielles de haute qualité au Canada.
    Boeing a déjà signé des contrats avec le gouvernement canadien, lesquels étaient assortis d'engagements en matière de retombées économiques industrielles, et la compagnie a respecté ces engagements. J'ai bon espoir que Boeing respectera son obligation contractuelle.

  (0835)  

    Je vais commencer par répondre à votre affirmation sur la plateforme électorale du Bloc québécois. Il est évident, monsieur le ministre, que le Bloc québécois ne restera pas les bras croisés devant l'attribution de contrats. Il ne dira pas aux Canadiens que ces contrats ne faisaient pas partie de sa plateforme et qu'on peut donc les attribuer à n'importe qui. Je suis ici pour défendre le Québec et l'industrie aérospatiale du Québec.
     À vous entendre, monsieur le ministre, c'est la loi de la jungle. C'est inadmissible. Vous faites partie du gouvernement et vous devez dicter la façon de faire. C'est vous qui payez, avec les taxes des contribuables. C'est à vous de dire à une compagnie donnée de faire ce qu'on veut qu'elle fasse et que, dans le cas contraire, on ira ailleurs. Pourquoi n'applique-t-on pas la loi de la jungle au secteur de l'automobile? Si on accordait des contrats au secteur de l'automobile en disant qu'on les répartira dans toutes les régions du Canada, dont au Québec, qui est très important, l'industrie de l'Ontario resterait-elle les bras croisés?
    Vous avez toujours dit que la masse critique pour une industrie, ou les grappes industrielles, était importante. C'est important pour l'automobile et ce devrait l'être tout autant pour l'industrie aérospatiale. Or, il y a deux poids, deux mesures.
    Je reviens sur les 40 p. 100. Vous dites que 60 p. 100 des contrats vont à l'industrie aérospatiale. Que fait-on des 40 p. 100 restants? Les gens ont dit, comme je l'ai toujours dit également, qu'ils ne sont pas intéressés aux épinettes du Grand Nord pour les derniers 40 p. 100 et aux saumons sockeye de la Colombie-Britannique. Il s'agit d'investissements en aérospatiale, en haute technologie. Il faudrait que 100 p. 100 des retombées soient destinées à l'industrie aérospatiale.

  (0840)  

[Traduction]

    Excusez-moi, monsieur le ministre, il n'y a plus de temps. Il va falloir continuer.
    Madame Black.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur le ministre, merci de comparaître aujourd'hui, et merci à vos fonctionnaires également.
    Le ministre de la Défense nationale et le ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux ont comparu devant nous et ils ont tous les deux dit qu'ils n'étaient pas les ministres responsables de l'acquisition du matériel de défense. C'est très difficile de savoir quel ministre est chargé de ce dossier.
    J'aimerais savoir si vous estimez être le ministre responsable des retombées industrielles des régions.
    Après le contrat des C-17, pour chaque dollar dépensé pour leur entretien aux États-Unis, j'aimerais savoir combien de dollars seront dépensés au Canada. Peu importe à qui va cet argent aux États-Unis, que ce soit la U.S. Air Force ou l'industrie américaine, quelle proportion de cet argent sera dépensée au Canada, exactement?
    Voici ma dernière question, dans ce premier tour: Lorsqu'on a évalué les retombées industrielles régionales de ces contrats, quel rôle avez-vous joué personnellement? Pour ce contrat, l'Accord sur le commerce intérieur ne s'applique pas, car on a invoqué l'exception pour les contrats de sécurité nationale. C'est pourquoi je crois qu'il est encore plus important de comprendre exactement comment on a évalué les retombées économiques de ces contrats sur l'industrie des régions.

[Français]

    Je vous remercie. Votre question me permet de préciser quel est mon rôle, comme vous le demandez, et d'apporter des précisions sur certains pourcentages. Notre collègue du Bloc québécois a parlé de 60 p. 100, de 40 p. 100, etc. J'aimerais clarifier les choses. La politique du 100 p. 100 s'applique pour un manufacturier étranger. Lorsqu'on signe un contrat avec une telle entreprise, 100 p. 100 des sommes reçues pendant la durée du contrat doivent être réinvesties au Canada en retombées industrielles.
    Lors de mon discours d'ouverture, j'ai parlé de pourcentages, notamment de 50 p. 100, de 30 p. 100 et de 15 p. 100. J'aimerais expliquer ce qu'ils signifient. Cinquante pour cent constitue le minimum de retombées économiques dans le secteur de l'aérospatiale et de la défense. Trente pour cent représente le minimum de retombées économiques dans les technologies clés, comme je l'ai indiqué dans mon discours d'ouverture. Il s'agit des neuf domaines de technologies clés qui ont été, pour la première fois, identifiés suite à des analyses avec les gens de l'industrie de l'aérospatiale. Des représentants de mon ministère ont rencontré les gens de l'industrie aérospatiale pour savoir quelles sont les technologies clés de l'avenir dans le secteur de l'aérospatiale et de la défense, les technologies les plus importantes pour le développement de cette industrie. Ensemble, ils ont établi une liste de neuf technologies clés. Par conséquent, 30 p. 100 des contrats doivent se concrétiser dans les secteurs de technologies clés et 15 p. 100 de ceux-ci doivent l'être avec des petites et moyennes entreprises. Il est bien important de comprendre que ces pourcentages ne sont pas exclusifs. Ainsi, un contrat que Boeing peut conclure avec une entreprise peut faire partie de la catégorie du 50 p. 100, parce que c'est dans le domaine de l'aérospatiale et de la défense. Il peut aussi faire partie de la catégorie du 30 p. 100, parce qu'il s'agit d'une technologie clé, et de la catégorie du 15 p. 100, parce que c'est offert à une petite entreprise. Ces pourcentages ne sont pas mutuellement exclusifs.
     Cela étant dit, il est important de comprendre une chose relativement au pourcentage de 60 p. 100 dont nous avons parlé lors de la conférence de presse de Boeing. Avant la signature du contrat, celle-ci a identifié 60 p. 100 — c'est-à-dire 577 millions de dollars — d'un contrat de 869 millions de dollars en retombées industrielles au Canada qui respectent ces critères. Comme je l'ai dit durant la conférence de presse, et comme je le répète aujourd'hui, Boeing va faire l'annonce de ces contrats au cours des prochains mois.
    J'aimerais en profiter pour préciser certains chiffres. Nous avons annoncé l'acquisition de quatre avions C-17, pour un total de 3,4 milliards de dollars. Comment se répartissent ces 3,4 milliards de dollars? Un montant de 1,8 milliard de dollars sert à l'acquisition des avions, dont 869 millions de dollars serviront à l'achat direct de l'avion de Boeing. Il y aura 869 millions de dollars de retombées économiques — un dollar pour un dollar — puisque c'est un achat qui a été conclu avec un manufacturier étranger.
    Il y a aussi 660 millions de dollars qui serviront à l'aménagement d'infrastructures à la Défense nationale et à différents projets gérés par celle-ci. On parle donc de construction de hangars, etc. pour ces avions. Cet argent est dépensé directement au Canada, et la politique ne s'applique donc pas.
    Le troisième volet de ce 1,8 milliard de dollars est un montant de 271 millions de dollars qui servira à l'acquisition, auprès des forces armées américaines, d'équipement pour venir combler ces avions. Comme vous le savez, la politique ne s'applique pas à ce montant de 271 millions de dollars puisqu'il s'agit d'un achat de gouvernement à gouvernement. La politique s'applique seulement lorsqu'il s'agit d'un achat auprès d'un manufacturier étranger. Une partie de ce montant de 271 millions de dollars servira aux moteurs. Dans le cadre de ce contrat, les forces américaines vont travailler avec Pratt & Whitney pour s'assurer que les avions aient les moteurs nécessaires. Pour cette partie, la politique du un dollar pour un dollar s'applique. Il y aura 100 p. 100 de retombées industrielles, ce qui me permet de dire qu'en ce qui a trait à l'acquisition des avions et des moteurs, nous pouvons bénéficier de retombées de plus d'un milliard de dollars.
    D'autre part, du montant global de 3,4 milliards de dollars, il y a une autre partie de 1,6 milliard de dollars. Ce montant sera consacré aux services que nous avons acquis auprès des Forces armées canadiennes pour l'entraînement des pilotes. De ce montant de 1,6 milliard de dollars, 900 millions de dollars constitueront la portion que Boeing va recevoir de contrats des forces armées américaines et pour l'entretien de ces avions. Ces 900 millions de dollars sont assujettis à notre politique.

  (0845)  

    C'est ce qui nous permet de dire que, sur un contrat de 3,4 milliards de dollars pour les quatre avions C-17, il y aura des retombées économiques totales d'au moins 1,9 million de dollars, plus des achats directs au Canada de 660 millions de dollars. Je crois qu'il était important de mettre cela en contexte et je vous remercie de votre question puisque cela m'a permis de le faire.

[Traduction]

    Madame Black.
    Dans votre réponse, vous avez lancé beaucoup de chiffres et c'est difficile de s'y retrouver sur le coup.
    Ma question était très précise. En ce qui concerne le contrat des C-17, pour chaque dollar dépensé aux États-Unis en entretien, quelle que soit l'entreprise américaine choisie, combien de dollars seront dépensés au Canada, dans l'industrie canadienne?
    J'ai une autre question à ce sujet. En novembre, on a dit que ces contrats comporteraient des avantages industriels régionaux pour la Colombie-Britannique. J'aimerais que vous m'expliquiez quelles sont ces retombées, s'il vous plaît. Je suis d'accord avec ce que mon collègue du Bloc québécois a dit. Il a dit que le contribuable canadien finançait ces contrats et l'entretien du matériel et que les retombées économiques régionales de ceux-ci devraient profiter à tous les secteurs industriels du pays, y compris les secteurs de l'Ouest. Nous avons vécu une expérience terrible il y a quelques années, sous un autre gouvernement conservateur, avec les contrats des CF-18, lorsque Winnipeg a gagné le contrat et que l'Ouest n'en a jamais vu les retombées économiques.
    Donc, j'aimerais que vous nous disiez exactement qui profitera de ces contrats et quelle proportion de ces retombées ira à la Colombie-Britannique?

[Français]

    Je vous remercie de votre question. Premièrement, j'ai discuté avec plusieurs intervenants de l'industrie et plusieurs politiciens au Canada en ce qui a trait à ces acquisitions militaires. Chacun avait son avis à me donner. Je peux vous dire que le premier ministre du Manitoba était très heureux de la façon dont on procédait, car il s'inquiétait du prix que le gouvernement du Canada paie pour ses avions. Il voulait être certain que les contribuables canadiens en aient pour leur argent. C'est pourquoi nous avons adopté un processus ouvert et transparent, qui a permis d'acheter des avions à meilleur coût, et cela sans ingérence politique, sans dictature. Nous avons pu obtenir un très bon prix sans dicter à qui ce soit avec qui faire affaire.
    Cela étant dit, j'aimerais aussi préciser mon rôle. Vous avez posé une question par rapport au rôle du ministre de l'Industrie. Il s'agit d'une question très pertinente. Je l'ai dit un peu plus tôt, la gestion des appels d'offres revient à Travaux publics et Services gouvernementaux Canada. Le rôle du ministère de la Défense est d'établir les critères pour les acquisitions d'équipement puisqu'il est le mieux placé pour savoir ce dont les Forces canadiennes ont besoin. Mon rôle, en tant que dépositaire de la politique de développement industriel, est de faire en sorte que cette politique soit appliquée. C'est un rôle de facilitateur entre les entreprises et l'industrie. Je suis fier de vous dire qu'Industrie Canada, Boeing et Lockheed Martin ont fait plusieurs tournées de présentation, ont participé à plusieurs rencontres commerciales un peu partout au pays avec nos intervenants de l'industrie aérospatiale, tant dans l'Est que dans l'Ouest, pour s'assurer que l'ensemble des intervenants de l'industrie puissent être au fait des occasions d'affaires qui se présentent à eux. Il s'agit d'un rôle important parce que nous, d'Industrie Canada, voulons nous assurer que nous comprenons bien les préoccupations de l'industrie et que les industries comprennent bien aussi les occasions qui s'offrent à elles. C'est ainsi que nous avons pu définir une politique qui s'applique grandement et qui est respectée par l'ensemble des joueurs. L'industrie canadienne est très heureuse de voir qu'elle peut compter sur nous pour le développement, surtout en ce qui a trait aux neufs technologies clés dont j'ai parlé tout à l'heure.

  (0850)  

[Traduction]

    Merci, monsieur le ministre.
    Monsieur Hiebert, vous avez dix minutes.
    Merci monsieur le président.
    Merci, monsieur le ministre, de votre présence. C'est un plaisir de vous avoir parmi nous pour répondre à des questions qui ont été soulevées au cours de nos dernières réunions.
    Ma première question concerne l'exécution du contrat. Dans votre déclaration liminaire, vous avez mentionné les obligations relatives aux retombées industrielles et régionales que Boeing sera tenue de respecter, outre les autres clauses du contrat. Ma question se rapproche de celle de M. Bachand pour ce qui est de s'assurer que Boeing respecte ses engagements. Vous avez indiqué que, conformément aux dispositions du contrat relatives aux achats, qui doivent se faire dans les huit ans, Boeing se devait de participer pleinement au processus de retombées industrielles et régionales. Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur la façon dont Industrie Canada va s'assurer que Boeing respecte ses engagements au cours des huit prochaines années?
    Merci. C'est une excellente question.
    Les entreprises concernées, et Boeing dans le cas qui nous intéresse, doivent faire rapport chaque année à Industrie Canada. Industrie Canada effectue un examen des retombées industrielles et régionales ainsi que des réalisations découlant des engagements pris par Boeing et d'autres entreprises dans des contrats particuliers. C'est un examen minutieux qui nous permet de faire le suivi des retombées industrielles et régionales et des engagements pris par une entreprise en particulier. Nous avons un processus de vérification juste et transparent, et il décrit la politique des RIR s'appliquant aux contrats. Lorsque des fournisseurs signent un contrat avec le gouvernement du Canada, ils le savent et doivent respecter cette politique. Ils savent qu'Industrie Canada effectuera une vérification chaque année. Les entrepreneurs doivent conserver des registres et fournir des rapports d'étape annuels à mon ministère. Les responsables du gouvernement et les fonctionnaires effectuent un examen chaque année pour vérifier ces activités, et ils le font très sérieusement pour s'assurer que l'entrepreneur respecte ses obligations au contrat.
    C'est un processus qui est important pour nous et pour l'entrepreneur, car si ce dernier ne respecte pas ses obligations, nous pouvons toujours invoquer un préjudice pécuniaire. Il est généralement clairement stipulé dans le contrat que si l'entrepreneur ne respecte pas ses obligations, le gouvernement du Canada peut exiger des dommages-intérêts fixés à l'avance. Les entrepreneurs savent comment cela fonctionne et ils ont l'habitude de traiter avec notre gouvernement, ainsi que d'autres gouvernements dans le monde. Ils prennent des engagements, et comme je l'ai déjà mentionné, je suis fier de vous dire que Boeing a déjà signé un contrat avec nous auparavant, et tous les engagements pris relativement aux RIR ont été respectés.
    Je pense que c'est une bonne nouvelle, et cela illustre le fait que notre politique fonctionne très bien. C'est pour cela que l'industrie est satisfaite et fière de notre annonce et des mesures que nous prenons actuellement pour nos forces armées.

  (0855)  

    Lorsque le ministre de la Défense nationale a comparu, il nous a expliqué la façon dont les forces armées définissent leurs besoins. Ces besoins sont ensuite envoyés au ministre des Travaux publics, M. Fortier, et c'est ce ministère qui identifie le matériel, si possible disponible dans le commerce, qui répond à ces besoins. Les forces armées appellent cela un cahier des charges fondé sur les résultats.
    Si j'ai bien compris, Industrie Canada a ses propres critères d'exigence. Pourriez-vous nous décrire les critères appliqués au transport aérien stratégique utilisés par votre ministère pour évaluer la proposition en matière de RIR présentée par Boeing pour les C-17?

[Français]

    Merci beaucoup.
    Je vais demander à M. Tom Wright, de mon ministère, de vous donner des détails à ce sujet.

[Traduction]

    Cent pour cent de la valeur des acquisitions dans le contrat doit faire l'objet de RIR. Nous avons également exigé que 100 p. 100 de la part du contrat de maintenance de l'entrepreneur avec le gouvernement américain se traduise par des retombées industrielles et régionales.
    En plus de cela, nous avons également requis que 60 p. 100 des exigences soient fixées dès la signature du contrat. En outre, et il me semble que le ministre a déjà abordé ce point précédemment, 50 p. 100 de la valeur du contrat doit être investi dans les secteurs de l'aérospatiale et de la défense. De plus, 30 p. 100 des RIR doivent se faire dans les domaines technologiques clés. Le gouvernement a déterminé neuf domaines technologiques clés qui ont été inclus dans la DP. Et 15 p. 100 des investissements doivent se faire dans des petites et moyennes entreprises canadiennes.
    Voilà, en gros, les exigences relatives aux RIR pour le programme de transport aérien stratégique.
    Toujours sur le même sujet, cette approche sera-t-elle utilisée pour d'autres acquisitions, à savoir les exigences requises pour cet achat en particulier? Les mêmes exigences seront-elles appliquées aux acquisitions à venir?
    Le gouvernement adapte les exigences à chaque achat. Il est possible qu'il y ait des changements pour les prochaines décisions d'achats. Un des éléments constants de la politique est l'exigence de 100 p. 100 de la valeur du contrat. Le taux de 60 p. 100 a varié au fil des ans, et pourrait de nouveau être modifié à l'avenir. Pour autant que je sache, c'est la première fois qu'une liste de technologies a été utilisée. Il semblerait que les résultats soient positifs, je m'attends donc à ce qu'une telle liste soit utilisée de nouveau à l'avenir.
    De toute évidence, il est très avantageux pour le ministère de la Défense nationale d'avoir une industrie de défense solide au Canada puisque, je l'espère, à l'avenir, cela lui donnera l'occasion d'acheter son matériel auprès d'entreprises canadiennes. Pourriez-vous expliquer au comité dans quelle mesure les retombées industrielles que vous avez négociées offriront de nouveaux débouchés aux entreprises canadiennes de R-D?
    Merci.

[Français]

    Il est bien important pour nous de discuter avec des représentants de l'industrie. C'est pourquoi des gens de mon ministère, des représentants des secteurs canadiens de l'aérospatiale et de la défense ainsi que moi-même avons fait la liste des neufs technologies essentielles à ces secteurs. Il a été question de l'espace, du système de communications, etc.
    Pour l'industrie aérospatiale de même que pour la défense, ces technologies sont importantes en termes d'avenir. Les gens du domaine de l'aérospatiale devront être à la fine pointe sur le plan technologique pour être concurrentiels et continuer de gagner des contrats sur la scène internationale. C'était la première fois que nous établissions avec l'industrie des critères visant à assurer que les retombées seront réelles, avantageuses et de grande qualité pour l'ensemble de l'industrie aérospatiale.
    Comme je l'ai dit plus tôt, Boeing devrait faire des annonces d'ici quelques semaines en ce qui concerne ces contrats. Comme vous le savez, ce sont des contrats de nature privée, c'est-à-dire entre Boeing et ses fournisseurs. Ces annonces seront très appréciées de mes collègues car elles refléteront la diversité de notre industrie et la grandeur de notre pays. Boeing fait affaire avec des fournisseurs aussi bien au Québec qu'au Manitoba ou dans l'Ouest canadien.
    Boeing connaît très bien ses fournisseurs au pays. Les retombées devraient permettre à l'industrie canadienne de bien se positionner. Ça devrait être le cas également de l'industrie québécoise, qui est importante. Pour ce qui est des contrats et des occasions d'affaires que Boeing va générer par l'entremise des retombées industrielles, j'ai confiance en la capacité de l'industrie aérospatiale canadienne de bien se positionner et d'être concurrentielle sur la scène mondiale.
    Je ne suis pas pessimiste quant à l'avenir de l'industrie aérospatiale au Québec. Contrairement à mon collègue du Bloc québécois, je suis très optimiste et je crois que ces entreprises continueront à bien prospérer sur la scène internationale, surtout grâce à nos achats militaires. Cet apport financier de plus de 12,6 milliards de dollars sur plusieurs années représente un solide engagement envers nos forces armées, mais il représente aussi un engagement ferme envers l'industrie aérospatiale canadienne.

  (0900)  

[Traduction]

    Merci, monsieur le ministre.
    Cela conclut notre premier tour de questions de dix minutes. Nous allons passer à un tour de questions de cinq minutes. Nous commencerons avec l'opposition officielle, puis la parole sera donnée au parti ministériel, puis au Bloc.
    M. Brison commencera, puis ce sera au tour de Mme Gallant.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur le ministre, d'être des nôtres aujourd'hui.
    Le gouvernement libéral, dans son budget de 2005, a annoncé 13 milliards de dollars d'investissements nouveaux pour les Forces canadiennes. C'était l'investissement le plus important dans les Forces canadiennes depuis 20 ans, période au cours de laquelle, je tiens à vous le rappeler, il n'y a pas eu que des gouvernements libéraux, mais également des gouvernements progressistes-conservateurs.
    À la suite du budget, à titre de ministre des Travaux publics, j'ai activement participé à certaines décisions en matière d'acquisitions, et j'ai même étroitement collaboré avec l'ancien ministre de l'Industrie qui est aujourd'hui votre ministre du Commerce international. L'un des points sur lesquels il s'est battu en tant que ministre de l'Industrie à l'époque, et divers gouvernements successifs se sont battus sur ce point, était un contrat garantissant que la vaste majorité du soutien en service est effectuée par l'industrie aérospatiale canadienne. D'ailleurs, si l'industrie aérospatiale canadienne a pu développer une expertise mondiale en matière de soutien en service, c'est parce que des gouvernements successifs ont reconnu l'importance de protéger cela dans ces contrats.
    Votre gouvernement a décidé de changer d'approche et vous allez faire effectuer le soutien en service par l'équipementier. C'est une approche radicalement différente de celle du gouvernement précédent, et même des divers gouvernements successifs.
    Dans un article récent publié en février 2007 dans le magazine FrontLine Defence, on peut lire la chose suivante:
On va retirer aux entreprises canadiennes la possibilité d'appuyer directement et de façon indépendante le MDN dans le cadre de ces programmes.
    De plus:
Les années passées à construire cette composante de la base industrielle canadienne sont mises en péril à cause de la stratégie actuelle d'acquisition du SES qui va placer le secteur du SES aérospatial, de calibre mondial, entre les mains d'entreprises étrangères américaines... De manière générale, ce nouveau processus menace non seulement des milliers d'emplois canadiens, mais également la souveraineté et la sécurité du Canada, car il diminue notre capacité d'entretenir nos actifs militaires de façon indépendante.
    Je voudrais avoir votre avis à ce sujet. J'ai l'impression que c'est la plus mauvaise décision prise par le gouvernement pour le secteur aérospatial canadien depuis le torpillage de l'Avro Arrow par Diefenbaker.
    Monsieur le président, j'invoque le Règlement. Mon collègue pourrait-il me donner des précisions? Il a cité un magazine, et je me demandais s'il pouvait nous donner le nom de l'auteur de l'article.
    Cela n'est pas un rappel au Règlement.
    Ça ne me pose aucun problème. C'est un grand fournisseur canadien. Il est l'une des composantes de notre base industrielle.

[Français]

    Merci.
    Mon collègue a fait rapport et a confirmé qu'il s'agissait, depuis plusieurs années, d'investissements majeurs dans le domaine de la défense, pour nos militaires.
    Ces investissements majeurs se chiffrent à plus de 13 milliards de dollars. Il est important de souligner que le gouvernement libéral avait à l'époque annulé le contrat des hélicoptères EH101, ce qui avait coûté très cher aux contribuables canadiens. Or, je suis surpris de voir l'intérêt soudain de mon collègue pour l'équipement militaire. En effet, ce n'était pas du tout une préoccupation du gouvernement libéral à l'époque.
    Ce contrat annulé par le gouvernement libéral avait été octroyé en 1992. Les pénalités découlant de son annulation ont coûté au gouvernement plus de 570 millions de dollars. Voilà ce que nous a laissé le gouvernement précédent en matière d'achats militaires. Il a annulé des contrats et fait payer une note de 570 millions de dollars aux contribuables. C'est un peu décevant, mais ça reflète les préoccupations de l'ancien gouvernement.
    Je suis fier de confirmer que sur la somme de 1,6 milliard de dollars affectée au soutien en service, 90 millions de dollars vont à Boeing. Cette somme donnera lieu à des retombées industrielles. Il est important de savoir que notre gouvernement n'est pas le seul à traiter avec le manufacturier et le gouvernement américains. En effet, l'Australie et d'autres pays qui ont acquis de l'équipement militaire traitent avec le manufacturier et le gouvernement américains en matière d'entretien.
    J'ai parlé plus tôt de 90 millions de dollars, mais j'ai fait erreur. Ce sont 900 millions sur 1,6 milliard de dollars qui vont donner lieu à des retombées économiques.
    Nous avons agi comme l'auraient fait la plupart des grands pays industrialisés. Nous avons fait en sorte d'obtenir de l'équipement militaire au meilleur prix possible pour les Canadiens et nous nous sommes assurés que l'entretien soit effectué là où se trouvent des gens compétents en la matière. Les entreprises canadiennes bénéficieront de ces contrats.
     Nous avons agi comme la plupart des autres pays de l'OCDE, et nous n'avons pas imposé au gouvernement américain une condition voulant qu'on ait un centre d'entretien au Canada. Imaginez le coût que les contribuables auraient eu à payer.

  (0905)  

[Traduction]

    Monsieur le président, à ce sujet, ce que le ministre...
    Monsieur Brison, je crains que votre temps ne soit écoulé.
    Poursuivons avec Mme Gallant.
    Merci, monsieur le président.
    Par votre entremise, au ministre, plus tôt...
    Monsieur Hiebert.
    M. Hiebert veut être le premier intervenant du côté des conservateurs.
    Merci, monsieur le président.
    Je constate que M. Brison, le député de Kings—Hants, vient de vous poser des questions intéressantes, monsieur le ministre. Je me demandais si vous aviez des observations au sujet de la déclaration suivante:
Depuis 1997, j'ai appris que la politique peut devenir l'ennemi naturel des politiques publiques. En fait, pour des motifs politiques à très court terme, on prend parfois des décisions qui, à long terme, ont un impact néfaste sur les Canadiens. Il n'y a pas meilleur exemple de cas où l'on a sacrifié une politique publique sur l'autel de l'opportunisme politique que celui de l'annulation des contrats des EH-101 et des décisions prises par la suite, dont voici une liste partielle.

Bien sûr, ma collègue de Saint John a parlé plus tôt des frais d'annulation de 800 millions de dollars. Il y a aussi les coûts de mise à niveau et d'entretien des Sea King, soit 600 millions de dollars; le programme d'hélicoptères de recherche du Canada, 790 millions de dollars; le soutien en service à long terme pour ce programme, 1,7 milliard de dollars; le projet des hélicoptères maritimes, 2,9 milliards de dollars; et, dans ce cas aussi, le soutien en service à long terme qui coûtera 1,7 milliard de dollars. Le coût total atteindra environ 8,5 milliards de dollars, comparativement au coût des EH-101 qui aurait été de 4,3 milliards de dollars. Même en calculant à la manière des libéraux, on voit bien que tout cela est insensé.
    Il s'agit d'un extrait tiré du hansard du 1er mars 2001, une citation du député de Kings—Hants.
    Monsieur le ministre, avez-vous des commentaires à formuler au sujet des milliards de dollars qui ont été gaspillés dans le cadre du contrat des EH-101, sous le gouvernement libéral précédent?

[Français]

    Le premier commentaire que je dois faire porte sur ce que les Canadiens savent actuellement de notre gouvernement. Nous avons pris un engagement en campagne électorale. Comme vous le savez, notre gouvernement respecte ses engagements et ses promesses envers les Canadiens.
    Cet engagement consistait à doter les militaires de l'équipement nécessaire pour qu'ils puissent oeuvrer sur la scène internationale et faire leur travail. Nous nous sommes engagés, lors de la dernière campagne électorale, à faire des acquisitions militaires, et c'est ce que nous faisons.
    Contrairement à la politique du gouvernement libéral précédent, qui parlait beaucoup des achats militaires mais qui n'agissait pas, notre politique consiste à faire des acquisitions, des achats militaires et non à annuler des contrats. Nous ne voulons pas annuler des contrats; nous voulons plutôt que les forces armées aient les équipements nécessaires pour effectuer leur travail.

  (0910)  

[Traduction]

    J'invoque le Règlement, monsieur le président; en 2005, le gouvernement libéral a fait son travail en procédant à la plus importante acquisition militaire des 20 dernières années, à hauteur de 13 milliards de dollars.
    Ce n'est pas un rappel au Règlement, monsieur le président.
    Ce n'est pas un rappel au Règlement.
    Aviez-vous terminé, monsieur le ministre? Aviez-vous terminé votre commentaire?
    Oui.
    Très bien.
    Revenons à la question; il vous reste deux minutes.
    Je cède le reste de mon temps à M. Calkins.
    Merci, monsieur Hiebert, et monsieur le président.
    Monsieur le ministre, merci beaucoup d'être devant nous aujourd'hui. J'apprécie votre franchise.
    Ces derniers temps, nous avons entendu de nombreux termes qui circulaient. Pouvez-vous préciser pour notre comité et les Canadiens qui pourraient être à l'antenne ou lire les médias, au sujet de ce processus, quelle est la différence entre les retombées industrielles directes et indirectes?

[Français]

    Merci bien.
     Comme vous venez de le dire, la politique fait appel à des bénéfices industriels directs et indirects.
     Il est question de bénéfices directs lorsque le gouvernement, dans le cas de Boeing, peut faire l'acquisition d'un avion dont certaines parties pourraient provenir de fournisseurs canadiens. Nous pouvons alors parler de bénéfices directs.
    Quant aux bénéfices indirects, ce sont des bénéfices qui seront octroyés au gouvernement du Canada par l'entremise de contrats autres que celui du gagnant de l'appel d'offres.
    Voici un exemple pratique. L'industrie aérospatiale canadienne nous demande beaucoup de bénéfices indirects, surtout en ce qui concerne le projet du 787, le nouvel avion que Boeing est en train de fabriquer et qui devrait être sur le marché d'ici à quelques années. De la haute technologie ou des matériaux composites sont nécessaires pour plusieurs différentes parties de cet avion ou pour les ailes.
    Selon notre engagement à acquérir des avions militaires de Boeing, une des contreparties et des bénéfices que Boeing procurera aux industries canadiennes, c'est la possibilité d'avoir des contrats par rapport à leur projet de 787. C'est ce que nous demande l'industrie canadienne. Si cette industrie travaille à un nouvel avion qui va voler pendant un vingtaine d'années, cela lui permettra d'être bien positionnée pour l'avenir. Voilà un exemple de bénéfices indirects.

[Traduction]

    Merci, monsieur le ministre.
    Nous allons poursuivre avec M. Bachand, et revenir à M. Blaney.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Je ne dirais pas que c'est déplorable. Cependant, je trouve qu'il y a un important débat sur l'imputabilité ministérielle à faire ici, ce matin. Le ministre est devant nous. Au moment où l'on se parle, c'est lui qui est responsable des quelque 20 milliards de dollars provenant des contribuables canadiens qui regardent leur téléviseur le soir et qui constatent qu'il est question de 20 milliards de dollars. Les gens se disent qu'il s'agit de 20 milliards de dollars, mais je leur dis que cela correspond à 20 000 millions de dollars.
    Aujourd'hui on questionne le ministre. Son plan d'attaque n'est pas négligeable. On constate qu'il s'est préparé. Si le Bloc québécois pose une question qui va un peu trop loin, il rétorque que ce qu'on a fait n'était pas dans notre programme. De plus, le ministre parle de l'histoire: on reproche aux libéraux des paroles qui ont été dites alors que certains d'entre eux étaient ministres.
    Néanmoins, cela ne règle pas la question dont nous sommes actuellement saisis. Je demande au ministre de faire face à ses responsabilités ministérielles et de défendre les chiffres qu'on nous présente.
    Je ne veux pas relater l'histoire des guerres de 1914-1918 et de 1939-1945, et me faire demander si mon père est allé en Hollande pour défendre le pays, pour avoir à répondre qu'en effet, il y est allé, car ce n'est pas ça, la question. Il faut que nous nous concentrions aujourd'hui sur ce dont nous sommes saisis.
    Or, je demande justement au ministre de s'y attarder. J'ai deux questions à lui poser. Après, il pourra prendre le reste du temps pour y répondre.
    Premièrement, vous avez parlé d'obligations assorties de pénalités sévères. Ne pensez-vous pas, monsieur le ministre, que Boeing s'en fout complètement?
    Soit dit en passant — je ne sais pas si vous le savez —, en ce qui concerne l'hélicoptère maritime Sikorsky, on vient de vous dire que sa livraison sera retardée, que les pénalités sont de 100 000 $ par jour, et imaginez que la réponse de votre gouvernement a été de dire que ce n'était pas grave, qu'on ne les ferait pas appliquer. Par conséquent, ne venez pas nous dire qu'il y a des obligations assorties de pénalités, parce que l'exemple de Sikorsky n'en est pas un bon.
    Deuxièmement, en ce qui concerne l'hélicoptère Chinook, il reste 4,7 milliards de dollars à venir; pour le Lockheed Martin, 4,9 milliards de dollars; pour l'avion de recherche et sauvetage, 3 milliards de dollars. Avez-vous l'intention de changer votre approche, de prendre vos responsabilités et de dire à ces compagnies que c'est vous qui signez le chèque? Allez-vous faire une répartition des RIR qui corresponde à l'importance de l'industrie et dire à ces compagnies que 60 p. 100 des retombées économiques doivent aller au Québec? Dès lors, vous passeriez pour un héros au Québec, monsieur le ministre. Peut-être que sur le plan politique, ce serait très bien pour vous. Maintenant, en raison de la loi de la jungle et du laisser-faire, les gens sont un peu dépités quand ils voient ce qui passe au Québec quant à la façon dont les contrats sont répartis.
     Avez-vous l'intention de continuer dans la même veine? Il n'est pas trop tard pour vous. On laisse peut-être passer 3,4 milliards de dollars, mais il y a un autre montant de 10 milliards de dollars au moins, peut-être 12 milliards de dollars, qui s'en vient. Il n'est pas trop tard pour changer d'alignement. J'aimerais vous entendre à ce sujet.

  (0915)  

    Merci bien.
    Vous avez fait état des retombées industrielles et régionales dont l'industrie aérospatiale pourra bénéficier. Je l'ai dit plus tôt: il s'agit de plus de 12,6 milliards de dollars. Ce sont des sommes importantes. Par conséquent, nous nous assurons qu'il pourra y avoir une participation de l'industrie aux projets de haute technologie, comme je l'ai dit plus tôt.
    Cependant, il est important de savoir quelque chose. J'aimerais revenir sur mon discours d'ouverture. J'ai dit que, pour juger de l'opportunité ou de la plus-value des retombées industrielles que nous offrent les entreprises comme Boeing, le gouvernement se base sur plusieurs critères que voici.
    Premièrement — c'est important —, il faut que ce soit en lien direct avec l'achat que nous faisons. C'est tout à fait normal.
    Deuxièmement, il faut que les retombées industrielles arrivent après la signature du contrat. C'est-à-dire que nous n'acceptons pas les contrats que Boeing aurait conclus avec ses fournisseurs avant la signature du contrat. Il faut que ce soient de nouvelles retombées industrielles.
    Troisièmement, il faut que les obligations respectent notre politique de retombées industrielles. C'est-à-dire que, comme je le disais plus tôt, il faut avoir des transferts de technologies, et il faut que ce soit important pour les petites entreprises. Voilà tout ce dont mon ministère et moi, en tant que ministre, nous nous assurons.
    Je peux ajouter que je suis fier de gérer cette politique de concert avec la fonction publique, puisque nous allons pouvoir faire en sorte que l'industrie canadienne aérospatiale bénéficie de contrats qui seront très importants pour elle, afin qu'elle soit bien positionnée pour d'autres contrats qu'elle pourra conclure avec d'autres joueurs internationaux.

[Traduction]

    Merci, monsieur le ministre.
    Nous allons poursuivre avec M. Blaney et revenir à M. McGuire.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Monsieur le ministre, je vous souhaite la bienvenue ainsi qu'à vos représentants.
    Ce matin, j'ai trois raisons de vous féliciter. La première, c'est que M. Watson, qui enseigne l'économie à l'Université McGill, vous félicite d'avoir sorti des rivalités régionales la gestion des contrats militaires. De cette manière, on s'assure que les contribuables en ont pour leur argent et qu'on est équitable.
    La deuxième, c'est parce que vous avez réussi à faire cela en respectant les délais. On voit clairement que, dans le cas du contrat d'acquisition des C-17, le processus a été rapide et transparent.
    La troisième, c'est parce que vous êtes venu nous voir ce matin. On est contents que vous soyez présent.
    Monsieur le ministre, cela fait un an que vous êtes en poste. J'aimerais savoir ce que vous avez fait pour l'industrie aérospatiale et l'industrie de la défense à ce jour. On a vu que le précédent gouvernement avait en quelque sorte abandonné tout ce qui concernait l'approvisionnement en termes d'équipements militaires. Depuis un an, qu'avez-vous fait comme ministre pour l'industrie de la défense et celle de l'aérospatiale?

  (0920)  

    Merci.
    En 12 mois, nous en avons fait plus que le précédent gouvernement en 12 ans.
    On m'a posé des questions tout à l'heure concernant la distribution régionale des contrats, et j'aimerais revenir sur le sujet.
    En ce qui concerne les CF-18, il s'agit d'un contrat du précédent gouvernement. J'ai des questions à poser à mes collègues du Parti libéral, qui n'ont pas fixé de minimums régionaux dans les contrats, et qui n'ont pas dicté aux représentants de Boeing où faire affaire.
    Dans le contrat de CF-18 du précédent gouvernement, aucun minimum régional n'avait été imposé au gagnant de l'appel d'offres. Aujourd'hui, ces mêmes personnes sont devant nous, au comité, et nous demandent d'imposer des minimums régionaux alors qu'ils ne l'ont pas fait lorsqu'ils étaient au pouvoir.
     En ce qui concerne la distribution régionale des contrats dans le cadre du programme d'acquisition d'hélicoptères maritimes développé par le précédent gouvernement libéral, le Québec avait obtenu seulement 22 p. 100 des retombées. Je peux vous assurer que les entreprises aérospatiales du Québec et du Canada vont en bénéficier et vont se positionner adéquatement dans le cadre de ces contrats.
    Je suis très fier de vous annoncer que Pratt & Whitney, une entreprise québécoise, a reçu la plus grande contribution du programme Partenariat technologique Canada depuis sa création, à savoir 350 millions de dollars. L'automne dernier, mon collègue Michael Fortier a annoncé à Montréal cette contribution servant à faire de la recherche et développement, afin de s'assurer que la compagnie continue d'être compétitive sur la scène internationale.
    Ce sont des faits concrets. C'est ce que nous faisons pour l'industrie aérospatiale québécoise et canadienne. Ce n'est qu'un début, puisqu'il y aura des retombées économiques de plus de 12,6 milliards de dollars de l'ensemble des achats militaires. Je suis certain que toutes les entreprises, d'un bout à l'autre du Canada, seront en mesure de bien se positionner pour aller chercher ces contrats.
    Êtes-vous en train de nous dire que la politique voulant que, quand on fait un achat militaire, il doit y avoir des retombées directes et indirectes, est une politique appliquée par le nouveau gouvernement mais qui n'était pas nécessairement appliquée de la même manière par le gouvernement précédent? Est-ce bien cela?
    Dans les faits, en ce qui concerne les CF-18, à l'époque du gouvernement libéral, Boeing avait accepté qu'il y ait 75 p. 100 de la valeur du contrat en retombées industrielles et régionales. C'était un gouvernement libéral qui était à la barre des négociations à l'époque. Quant à nous, notre politique est très claire: il doit y avoir 100 p. 100 de la valeur du contrat octroyé à un manufacturier étranger en retombées.
    Vous parliez des retombées directes et indirectes. Dans votre présentation, vous avez mentionné qu'un montant correspondant à 15 p. 100 avait été alloué pour les petites et moyennes entreprises. C'est intéressant, parce qu'on sait que les chiffres d'affaire des petites entreprises ne sont pas les mêmes. Vous avez parlé de près de 2 milliards de dollars. Il faut dire que 15 p. 100 de 2 milliards de dollars, c'est une somme considérable, et cette somme sera injectée dans les petites entreprises, qui sont un moteur de l'économie.
    Pourriez-vous nous renseigner davantage sur la façon dont ces sommes seront attribuées?

[Traduction]

    Merci, monsieur Blaney. Vous n'avez plus de temps.
    Nous allons poursuivre avec M. McGuire, puis Mme Gallant terminera.
    Merci, monsieur le président.
    Je voudrais simplement rappeler à M. Blaney que grâce à la politique économique du gouvernement précédent, il y a de l'argent pour procéder à des acquisitions militaires et à d'autres acquisitions. Ce processus avait déjà été entrepris bien avant que nous ne voyions les ratés actuels.
    Monsieur le ministre, j'ai deux questions. Premièrement, selon le Globe and Mail de ce matin, il semble qu'un contrat a été attribué à CAE Inc. de Montréal pour procéder à la formation des équipages des forces aériennes sur les nouveaux Hercules et les hélicoptères Chinook. Le contrat pour ces aéronefs n'a même pas encore été attribué. Je me demandais qui d'autres étaient candidats pour ce contrat de formation.
    Deuxièmement, comment attribuez-vous réellement les retombées régionales? Tenez-vous compte de l'aide fournie par le gouvernement dans l'industrie aérospatiale, dans ce cas-ci? Comme vous le savez, le gouvernement soutient beaucoup l'industrie aérospatiale, tout comme l'industrie automobile, et bien d'autres. Tenez-vous compte de tous ces aspects lorsque vous décidez quelle région doit obtenir quoi? Comment cela fonctionne-t-il?
    Voilà donc mes deux questions: au sujet du contrat de formation qui semble avoir été attribué, et de la façon réelle dont vous divisez les retombées industrielles et régionales.

  (0925)  

    Merci.
    Je vais demander à mon sous-ministre, Richard Dicerni, de répondre à la première question, puis je répondrai à la seconde.
    Je crois que l'article publié ce matin fait référence à un processus entrepris par le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux. Le ministère a publié l'équivalent d'une demande de propositions. Dans ce cas-ci, on parlait d'une lettre d'intérêt. Je crois qu'un certain nombre d'entreprises ont répondu. Le processus s'est terminé la semaine dernière, je crois, et est actuellement examiné par les employés qualifiés de Travaux publics.
    Cela semble être un changement soudain dans le processus d'acquisition. Pourquoi avoir changé soudainement le processus d'acquisition dans le cadre de ce contrat?
    Je pourrais peut-être vous communiquer la réponse de mes collègues de Travaux publics. Ce sont eux qui font les acquisitions. J'en ai suffisamment à faire à Industrie Canada.
    Nous refilons donc la responsabilité à d'autres.
    Allez-y monsieur le ministre. Il ne nous reste que quelques minutes.
    Au sujet de la valeur du contenu canadien, je vous remercie de votre question, parce qu'elle est très importante.
    Ce que l'on a ici, ce sont des travaux réalisés ici au Canada, dans notre pays. Par exemple, supposons que Boeing, aux fins des retombées industrielles et régionales, accorde un contrat à Pratt & Whitney, mais que la valeur du contrat est de 100 millions de dollars. Pratt & Whitney a peut-être, dans le cadre de ce contrat, du travail réalisé à l'extérieur du Canada, à hauteur de 20 millions de dollars. Nous ne compterons pas les 20 millions de dollars. Nous ne compterons que les 80 millions de dollars de la valeur du contrat de 100 millions de dollars, parce que le travail n'a pas été effectué au Canada. C'est important. Nous calculons le contenu canadien de façon très précise, et nous veillons à ce que les sous-traitants, comme Pratt & Whitney dans mon exemple, réalisent 100 p. 100 du travail ici, au Canada. Si le travail est réalisé à l'étranger en partie, nous ne le calculons pas dans la valeur canadienne.
    Quels sont les véritables avantages pour le pays, si les dimensions intellectuelles de ces contrats sont en fait données aux Américains, et que nous acceptons tout ce qu'ils offrent comme compensation? Comment pouvons-nous réellement bénéficier de cette façon d'attribuer les contrats?

[Français]

    Il importe de souligner les transferts de technologie qui surviennent lorsqu'une entreprise comme Boeing reçoit un contrat. Elle fait affaire avec différents fournisseurs au pays qui ont accès à de la technologie de pointe. C'est pour cela qu'ils nous ont demandé de leur fournir une liste des neuf technologies de pointe. Les gens de l'industrie nous ont dit que l'on devrait exiger d'eux que les retombées économiques soient acheminées vers ces neuf secteurs de technologie de pointe, puisque ces entreprises veulent bénéficier de travaux importants pour l'avenir de l'industrie aérospatiale dans le monde. Cela leur permet de travailler sur des technologies d'avenir.

[Traduction]

    Merci, monsieur le ministre.
    Il ne nous reste que quelques minutes pour conclure. Madame Gallant, vous avez la dernière intervention.
    Merci monsieur le président.
    Tout d'abord, monsieur le ministre, je voudrais vous féliciter de la rapidité avec laquelle vous avez rempli votre rôle dans le cadre des acquisitions. Plus les hommes et les femmes des forces armées reçoivent leur équipement rapidement, plus la situation est positive et plus ils sont en sécurité.
    En outre, la façon dont vous avez distribué les retombées industrielles et régionales partout au Canada est très appréciée. L'industrie aérospatiale à l'extérieur du Québec est en pleine croissance. Dans ma circonscription seulement, il y a Arnprior Aerospace, qui a la possibilité de créer des emplois supplémentaires, au moment où les fermetures d'usines privent de nombreuses personnes de travail. Il s'agit d'un nouveau domaine émergeant de l'aérospatiale. Hypernetics va plus loin, et E.T.M. Industries ainsi que Haley Industries vont encore plus loin. Votre travail est donc grandement apprécié et les retombées industrielles et régionales répondront à leurs objectifs.
    Plus tôt, nous avons entendu parler du contrat des EH-10 et des frais d'annulation de 500 millions de dollars. Les contribuables font maintenant face à une autre poursuite judiciaire à hauteur d'environ 100 milliards de dollars, en raison d'une allégation d'ingérence politique. En plus des frais d'annulation et de la poursuite possible, quelles retombées industrielles et régionales ont été perdues?

  (0930)  

    La valeur du contrat était de 4,4 milliards de dollars, et le montant des retombées industrielles et régionales perdues par le Canada était peut-être d'environ 3,8 milliards de dollars, ce qui fait que je suis d'accord pour dire qu'il s'agit d'une grosse perte pour le pays. Il ne s'agit pas seulement d'une perte par rapport aux retombées industrielles et régionales, il s'agit également d'une perte de l'argent des contribuables et d'une perte de plus de 500 millions de dollars en pénalités que le gouvernement a dû payer après l'annulation de ce contrat. C'était beaucoup d'argent pour les contribuables.
    Je vous pose la question parce que les partis d'opposition ont clairement indiqué qu'ils tenteraient d'annuler le contrat des C-17.
    Pendant cette décennie noire, il y a également eu l'acquisition des sous-marins. Je crois que deux d'entre eux sont finalement aptes à prendre la mer et que nous pouvons nous en servir. Étant donné qu'on met tant l'accent sur les retombées industrielles et régionales dans le cadre des acquisitions du gouvernement actuel, dans le cadre de cette acquisition en particulier, pouvez-vous nous donner la valeur des retombées industrielles et régionales dans le cadre de l'acquisition des sous-marins.
    La valeur des retombées industrielles et régionales était nulle. À ce moment-là, le gouvernement précédent n'a pas demandé de retombées industrielles et régionales. C'est peut-être parce qu'il s'agissait d'un achat fait par le gouvernement fédéral d'alors auprès d'un autre gouvernement, mais il a eu l'occasion d'apporter des retombées industrielles et régionales à l'industrie canadienne et n'a pas fourni de retombées industrielles et régionales après la signature du contrat. Je crois que c'est quelque chose que nous pouvons remettre en question à l'heure actuelle, mais c'est quelque chose que le gouvernement précédent a fait.
    Si je comprends bien, en plus des retombées industrielles et régionales directes, il existe des retombées industrielles et régionales indirectes. Afin que toutes les entreprises dans nos différentes circonscriptions puissent avoir la chance de partager les retombées de ces acquisitions, pourriez-vous décrire les critères d'admissibilité aux retombées industrielles et régionales utilisés par votre ministère lorsque vous évaluez une demande de retombées industrielles et régionales présentée par l'entrepreneur principal d'un contrat d'acquisition militaire?
    Il ne vous reste qu'une minute, monsieur le ministre.
    Merci.
    Pour nous, il est important de fournir une grande qualité et une grande valeur technologique à l'industrie canadienne. C'est l'un des principaux critères. Nous voulons également être certains que ce sera utile et que l'entreprise pourra se servir de cette technologie pour obtenir d'autres contrats à l'avenir, auprès d'autres clients étrangers.
    Nous en sommes fiers, parce que nous avons travaillé avec l'industrie pour la première fois et avec les neuf listes de technologies. Nous avons créé des listes et nous avons simplement demandé à Boeing de les suivre. C'était important pour l'industrie, pour nous, et je crois que cela nous permettra de contribuer à l'industrie aérospatiale ici au Canada, et de continuer à le faire.
    Merci, monsieur le ministre.
    Voilà qui conclut cette partie de notre séance. Nous allons nous interrompre pendant quelques minutes et poursuivre à huis clos, afin de pouvoir étudier les travaux futurs.
    [La séance se poursuit à huis clos.]

    


    

    [La séance publique reprend.]

  (1015)  

    Nous reprenons nos travaux.
    J'aimerais souhaiter la bienvenue à Christopher Alexander, représentant spécial adjoint du secrétaire général pour l'Afghanistan, ainsi qu'à James Appathurai, porte-parole du Secrétariat international de l'OTAN. Nous tenons aujourd'hui une séance d'information sur les missions de l'ONU et de l'OTAN en Afghanistan.
    Nous avons terminé notre étude sur l'Afghanistan il y a quelque temps. Nous travaillons actuellement à la rédaction du rapport. Nous étudions maintenant les acquisitions, mais nous vous souhaitons la bienvenue. Nous sommes impatients d'entendre ce que vous avez à dire, et si le temps le permet, nous tenterons de diviser le temps qui reste équitablement pour les questions. Sinon, nous sommes intéressés à entendre ce que vous avez à dire.
    Allez-y, la première personne à parler.
    Chris a commencé il y a une heure, et c'est maintenant mon tour. J'espère que nous pourrons tous nous en tenir à 10 aux 15 minutes, ce qui laissera du temps pour les questions. Je serai bref.

[Français]

    Laissez-moi pour commencer vous remercier de nous avoir invités. C'est un grand plaisir de vous rencontrer. Pour moi, c'est une première expérience. J'espère qu'en 45 minutes, nous pourrons évoquer un peu un sujet qui est devenu pour l'OTAN la priorité numéro un.
    Il y a cinq ans, il n'y avait que des plans des Balkans dans mon bureau. Tout à coup, on s'est mis à recevoir chaque matin des renseignements sur l'Afghanistan et l'Asie du Sud. On a beaucoup changé. Chaque jour, le Conseil de l'Atlantique Nord reçoit une page indiquant tous les progrès réalisés en matière de développement et de reconstruction.
     Pour l'OTAN, c'est complètement nouveau. Nous devenons super intéressés à tout ce qui est reconstruction et développement. Nous reconnaissons que sans sécurité, il n'y aura pas de développement, et que sans développement à long terme, il n'y aura pas de sécurité. Ce sont les deux côtés de la même médaille. À l'OTAN, nous avons une approche intégrée complètement nouvelle.

[Traduction]

    Selon moi, il y a essentiellement trois questions que nous devons nous poser au sujet de cette mission. Premièrement, est-il toujours dans l'intérêt national du Canada, et des 37 autres pays, de poursuivre cette mission et de la poursuivre à long terme?
    Comme je viens de le mentionner, je suis revenu en arrière pour savoir qui était en Afghanistan en 2001, en gardant en tête que c'était en fait il y a cinq ans -- en d'autres termes, du point de vue politique, hier. En 2001, l'Afghanistan était un sanctuaire pour les groupes extrémistes de près de 24 pays, qui s'entraînaient dans des camps terroristes bien financés et bien gardés. Bien entendu, Al-Qaïda comptait 3 000 combattants, provenant d'au moins 13 pays arabes. Les talibans hébergeaient également des groupes extrémistes islamistes de la Russie, du Pakistan, de la Chine, de la Birmanie, de l'Iran, de l'Asie centrale et de plusieurs pays de l'Extrême-Orient, qui combattaient tous pour les talibans tout en menant des opérations dans leurs propres pays. Ce sont les mêmes personnes que nous souhaitons conquérir encore une fois.
    Je crois donc qu'il faut indiquer clairement qu'en rétrospective, l'intérêt national du Canada à se trouver là-bas, comme pays et comme organisation internationale -- en fait il y a deux organisations internationales -- est absolument essentiel. L'Afghanistan était une plaque tournante du terrorisme et pourrait le devenir encore, puisque les extrémistes entrent et ressortent mieux entraînés et mieux financés.
    La deuxième question est de savoir -- et je crois qu'il s'agit de la question qui est posée dans un grand nombre de nos pays -- si on peut l'emporter et si nous l'emportons actuellement? C'est la question que me posent les journalistes d'au moins 37 pays contributeurs de troupes. En regardant les actualités quotidiennes, on peut se poser des questions, parce que les médias ne veulent certainement pas couvrir, et ne couvriront certainement pas, sauf dans les circonstances les plus extrêmes, les avancées positives. J'ai rencontré personnellement les médias à Kandahar et à Kaboul à deux reprises ces trois derniers mois pour leur demander ce qu'il fallait que je fasse pour qu'ils couvrent la construction d'une école ou d'une route. Ils ont été très clairs: ils ne le feront pas. Ils le feront seulement si l'école est ravagée par un incendie. C'est ce qu'on m'a dit lors de rencontres privées. C'est ainsi que vont les choses. Il est très difficile de convaincre les médias -- et je le dis en respectant mes collègues des médias -- de rédiger des histoires positives, ce qui fait qu'il s'agit d'un défi.
    C'est là que réside l'histoire positive. Je vais laisser le soin à Chris, qui bien entendu dirige cet effort en Afghanistan du point de vue de la reconstruction et du développement, en parler, mais laissez-moi vous dire ceci. Il y a aujourd'hui 17 000 projets de reconstruction et de développement en Afghanistan, selon les statistiques de l'OTAN, dont 1 000 sont réalisés directement par les équipes provinciales de reconstruction de l'OTAN. Chris pourra vous donner plus de détails au sujet des autres indicateurs de développement.
    Je peux vous dire que du point de vue de la sécurité, l'Armée nationale afghane a connu une grande croissance ces cinq dernières années, passant de 0 à environ 30 000 soldats. Nous visons 70 000. Ils sont déployés et combattent dans tous les pays. Les pays de l'OTAN leur ont donné des dizaines de milliers d'armes légères, des millions de munitions, 110 véhicules blindés de transport de troupes ainsi qu'une douzaine d'hélicoptères. Nous avons des équipes de liaison et de mentorat opérationnelles au sein de l'Armée nationale afghane. C'est une institution qui vient tout juste d'être créée. Elle connaît des difficultés pour ce qui est des salaires, des difficultés pour ce qui est du maintien des effectifs, des difficultés pour ce qui est du recrutement, mais nous faisons des progrès dans tous ces domaines. Il s'agit de notre stratégie de sortie, à titre de communauté internationale; nous aidons les forces de sécurité nationale afghanes à se préparer à mener leur propre combat, puis nous pourrons nous retirer et jouer davantage un rôle de soutien.
    La Police nationale afghane est une institution qui doit faire l'objet de plus de travail. Je crois qu'elle accuse un peu de retard par rapport à l'Armée nationale afghane. L'Union européenne s'est engagée à augmenter son soutien à la force de police, mais cela demandera un effort à très long terme, et nous pouvons en parler plus en détail si vous le souhaitez.

  (1020)  

    La deuxième question — je pense qu'elle intéresse particulièrement le comité — est de savoir si nous avons suffisamment de forces et si les autres alliés assument leurs responsabilités? C'est une question politique, je le sais. La réponse de l'OTAN est tout à fait claire: nous n'avons pas encore tout à fait atteint le nombre de soldats souhaité en Afghanistan.
    Bien entendu, vous entendrez rarement dire un responsable de l'OTAN qu'il estime avoir suffisamment de soldats. On peut toujours faire mieux avec plus. Mais en général, oui, nous avons ce dont nous avons besoin. On peut toujours ajouter un peu plus, mais en général, ça va. Et de manière générale, les autres alliés assument leurs responsabilités, étant donné les considérations politiques propres à chaque pays.
    Depuis la tenue du sommet de Riga il y a trois mois, 7 000 nouveaux soldats sont venus grossir les rangs. La plupart d'entre eux proviennent de pays signataires du Pacte. Les États-Unis sont, bien entendu, les principaux contributeurs avec la 10th Mountain Division et la 173rd Airborne. Comme vous le savez, le Royaume-Uni vient juste d'annoncer l'envoi de 1 500 nouveaux soldats en plus des 500 annoncés précédemment.
    Il s'agit là des plus gros renforts, mais la Norvège va envoyer ses forces spéciales, ainsi que d'autres pays qui ne l'ont pas annoncé publiquement. Les Danois pensent renforcer leur contingent, et on s'attend à ce que les Australiens doublent leur contribution avec 500 soldats de la force régulière et 250 soldats des forces spéciales, transport compris. Il est fort probable que le Bundestag allemand approuve le déploiement de six Tornados accompagnés d'environ 500 soldats pour la reconnaissance, ainsi que plus d'UAV, plus de C-130, etc.
    Dans le sud, région qui intéresse particulièrement le Canada, le nombre de soldats est passé de 1 000 à environ 12 500 au cours des 18 derniers mois. En l'espace d'un an et demi, notre présence a été multipliée par 12 grâce à la contribution de huit ou neuf pays qui collaborent et s'appuient mutuellement dans la région. Il est donc faux de penser que le Canada est seul dans le sud. L'idée selon laquelle d'autres pays ne contribuent pas ou ne renforcent pas leur contribution ne correspond pas à la réalité puisque le nombre de soldats dans le sud a été multiplié par 12. Évidemment, 2 500 d'entre eux sont canadiens, mais les autres proviennent d'autres pays.
    J'ajouterais également que le Canada n'est pas le seul pays à déplorer des pertes. La semaine dernière encore, le secrétaire général a adressé ses condoléances aux Espagnols qui ont perdu plus de 20 des leurs et aux Britanniques, qui en ont perdu bien plus; ils en ont perdu encore deux la semaine dernière. Plus d'une dizaine de pays de l'OTAN ont subi des pertes importantes. Je puis vous dire que notre drapeau est régulièrement en berne devant le QG de l'OTAN.
    Je veux simplement souligner le fait que ces sacrifices sont consentis par tous, dans toutes les régions, que ce soit au nord, à l'ouest, dans la capitale, à l'est et au sud. Les États-Unis ont, bien sûr, subi plus de pertes que quiconque. Je crois qu'environ 350 des leurs ont payé de leur vie.
    Nous progressons également dans l'élimination des conditions, c'est-à-dire les restrictions géographiques qui s'appliquent au déploiement des forces. Je puis vous assurer que le ministre O'Connor et le général Hillier ont été des porte-parole énergiques au cours des réunions privées de l'OTAN. Grâce à cela, à Riga, les 26 pays de l'OTAN se sont engagés à permettre à leurs troupes de se rendre où que ce soit en situation extrême et urgente pour porter secours à un allié de l'OTAN. Il y a deux semaines, des chasseurs Mirage français, qui avaient été déployés et qui ont fait feu dans le cadre d'un appui aérien rapproché des Forces canadiennes, ont tué beaucoup d'insurgés qui menaçaient nos soldats. Donc, ce cas de figure s'est présenté, l'engagement a été tenu, et c'est une bonne chose. Nous avons progressé dans ce domaine.
    Je voudrais encore aborder deux points avant de conclure.
    Quelles améliorations restent à apporter? Chris vous en parlera de façon plus détaillée, mais je pense qu'il s'agit de la gouvernance et de l'élimination de l'aide aux insurgés en provenance du Pakistan. Nous devons coopérer avec les Pakistanais. Ils représentent un élément de solution. L'OTAN s'y emploie par le biais de la Commission trilatérale, mais il faut, bien entendu, porter une attention particulière à cette question à un niveau élevé à l'échelon politique.
    Il est évident que les stupéfiants nourrissent l'insurrection talibane. Les talibans, comme toute mafia, prennent leur part de profits et l'utilisent. Il est donc dans notre intérêt, pour garantir la sécurité, de régler ce problème. Ce n'est pas insurmontable. Dans les années 70, le Pakistan était le plus gros producteur de stupéfiants, d'opium, au monde; 70 p. 100 de la production provenait de ce pays. Il en produisait 9 000 tonnes par an. En 1997, le Pakistan ne produisait plus que 24 tonnes, et en 1999, seulement deux tonnes. C'est le pays voisin. C'est un problème qui peut être réglé, comme cela a été fait en Thaïlande et en Turquie, et je pense qu'il faut vraiment s'y atteler.
    D'ailleurs, c'est ce que souhaite le gouvernement afghan. Il veut éradiquer les stupéfiants du pays, qui encouragent la corruption et alimentent les talibans. Nous devons appuyer cela.

  (1025)  

    Enfin, permettez-moi de partager avec vous les résultats de quelques sondages, car on peut parfois lire dans la presse que les Afghans rejetteront les forces étrangères comme ils l'ont toujours fait par le passé, ou encore qu'ils appuient les talibans.
    Trois grands sondages ont été effectués en Afghanistan ces dernières années: Altai Consulting, Asia Foundation, et la BBC. En moyenne, 75 p. 100 des Afghans appuient pleinement la présence de forces étrangères. Et cela, cinq ans après le début des hostilités. Deuxièmement, 80 p. 100 d'entre eux appuient leur gouvernement élu, et 3 p. 100, ce qui correspond à la marge d'erreur, souhaitent le retour des talibans. Ce sont des sondages actuels. Ce sont des chiffres très encourageants. La population nous appuie. Nous aidons les Afghans dans leur lutte, et cela fonctionne malgré toutes les difficultés auxquelles nous faisons face. C'est une situation encourageante à mon avis.
    Chris.

  (1030)  

[Français]

    Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, je vous remercie de nous accueillir aujourd'hui.
    Je vous remercie également de votre sérieux et de l'attention que vous avez portée au dossier de l'Afghanistan. Le moment était propice mais également crucial pour le sort de ce pays. Il s'agit en Afghanistan d'une transition entre un quart de siècle de conflit et un avenir plus prometteur, plus susceptible d'évoluer sous le signe de la paix et de la stabilité.

[Traduction]

    C'est un grand plaisir pour moi, à titre de Canadien qui travaille pour les Nations Unies et qui suis en Afghanistan depuis maintenant trois ans et demi, de comparaître devant votre comité au côté de mon collègue de l'OTAN, James Appathurai.
    L'Afghanistan ne met pas seulement à l'épreuve le peuple afghan et son courage, sa volonté de lutter contre les spectres du passé, représenté par les talibans et d'autres groupes terroristes. L'Afghanistan met également à l'épreuve la capacité de la communauté internationale de se rassembler, grâce à ses institutions nationales et à ses organisations internationales, autour d'un projet commun de reconstruction d'une nation qui mérite toute l'attention qui lui est donnée, mais qui n'est malheureusement pas aussi bien compris qu'il devrait l'être par tout le monde.
    Notre défi consiste à vous aider à communiquer aux Canadiens et à la communauté internationale ce qui se passe réellement aujourd'hui en Afghanistan. Il y a des réussites, et j'en mentionnerai certaines, mais le conflit continue. Je souhaiterais décrire ce conflit et donner un aperçu des principaux défis auxquels James a déjà fait allusion.
    Je voudrais tout d'abord rendre hommage à tous mes collègues au sein du gouvernement afghan et de la communauté internationale qui travaillent sans relâche pour réaliser les objectifs inscrits dans le Pacte pour l'Afghanistan. Soixante-dix pays et organisations internationales souscrivent à ces objectifs et les appuient. Ces objectifs, avant tout, traduisent les aspirations et les espoirs du peuple afghan.
    Si des progrès ont été accomplis, c'est parce qu'il y a des gens exceptionnels sur le terrain en Afghanistan. À titre de Comité permanent de la défense nationale, vous devez savoir que les soldats, sous-officiers, officiers, membres de l'état-major général et officiers généraux canadiens qui ont servi en Afghanistan n'ont pas seulement été des représentants exceptionnels de leur pays, mais comptent parmi les meilleurs à avoir servi en Afghanistan.
    Le général Grant, commandant actuel à Kandahar, le général Fraser, qui était son prédécesseur, le général Leslie, et le général Hillier, tous ont fait montre d'un leadership exemplaire à la tête de la FIAS et des efforts internationaux visant à sécuriser l'Afghanistan. Les soldats et les sous-officiers qui ont servi sous leurs ordres ont fait preuve d'un courage et d'un professionnalisme qui, malgré une grande couverture médiatique au Canada, demeurent peu appréciés ici au pays. Ils ont combattu contre un ennemi et lutté pour la sécurité au moment opportun pour permettre un avenir meilleur à l'Afghanistan, en tant que pays et en tant que société.
    Permettez-moi de vous donner quelques-unes des statistiques principales pour rappeler à tous l'importance de nos succès.
    En l'espace de cinq ans seulement, on a mis sur pied un système de soins de santé qui était pratiquement inexistant sous les talibans et qui, aujourd'hui, permet à 85 p. 100 de la population d'avoir accès à des services de soins de santé de base. Cela signifie que 85 p. 100 des Afghans ont accès à une clinique où à un hôpital lorsqu'ils en ont besoin, et qu'ils ont accès à des vaccins et des traitements médicaux de base qui n'étaient pas disponibles auparavant.
    Jusqu'à maintenant, 7,3 millions d'enfants ont été vaccinés; 5,4 millions d'enfants vont à l'école, ce qui est un record pour l'Afghanistan, et 34 p. 100 d'entre eux sont des filles.
    En 2002, le PIB était de 4 milliards de dollars — j'ai donné un chiffre un peu différent à l'autre comité car il provenait d'une autre organisation internationale, mais l'ordre de grandeur est le même. Le PIB, qui était de 4 milliards de dollars en 2002, est désormais de 8,9 milliards de dollars. La croissance économique a été exponentielle en Afghanistan, et on ne parle ici que de l'économie légitime, non pas de l'économie du pavot, qui, selon les estimations, a connu une forte croissance, mais pas aussi forte que l'économie légitime.
    Quatre millions de réfugiés sont rentrés en Afghanistan. La politique monétaire a été réformée, la devise est forte et son cours se maintient. L'inflation reste basse, et le budget afghan est équilibré.
    Quelle incidence tout cela a-t-il sur la vie des Afghans? Permettez-moi de vous donner quelques exemples.

  (1035)  

    Parfois, le vendredi, lorsque nous réussissons à nous libérer du travail sans relâche qu'il y a à faire à Kaboul, nous allons nous promener à la campagne, à environ une heure de route de la ville. Récemment, j'ai eu le plaisir de faire une promenade de cinq heures dans une vallée avec un collègue qui y était déjà venu en 2001, juste après le retrait des talibans.
    En 2001, cette vallée était remplie d'édifices publics, d'écoles et de maisons qui ont tous été détruits, brûlés par les talibans. À l'époque, il avait fallu faire l'inventaire des biens non détruits. Aujourd'hui, tous ces bâtiments ont été reconstruits, repeints, et dans bien des cas restaurés.
    Une microcentrale hydroélectrique, financée par le gouvernement coréen, se trouve au fond de la vallée et fournit de l'électricité à 2 000 foyers dans la vallée, des foyers qui n'avaient jamais eu d'électricité avant. Le réservoir qui alimente la microcentrale hydroélectrique sert également à irriguer la vallée.
    Un programme de solidarité nationale, programme de développement rural financé principalement par le Canada, a été mis en oeuvre dans tous les villages de cette vallée. On trouve des écoles ouvertes tous les deux kilomètres. Ces écoles sont nouvelles. Il y a aussi deux cliniques dans la vallée.
    Ces changements ont transformé la vie des habitants du district. Il est vrai que c'est l'un des districts les mieux desservis d'Afghanistan; la situation n'est pas la même partout dans ce pays, mais cet exemple illustre les réalisations découlant d'efforts internationaux concertés, et le Canada a joué un rôle central dans ces efforts.
    Cependant, le conflit continue. Quelle est la nature de ce conflit? Pourquoi l'insurrection s'est-elle exacerbée en 2006? Pourquoi se poursuit-elle en 2007? L'Accord de Bonn n'était pas un accord de paix, et cela se ressent aujourd'hui. Plusieurs partis qui avaient joué un rôle important au sein de l'histoire afghane ces 25 dernières années, et même au cours de ce conflit, ont été exclus des pourparlers de Bonn. Le Mullah Omar et d'autres dirigeants talibans n'ont, bien entendu, pas été retenus comme représentants des talibans; ils ont été chassés d'Afghanistan, et ils ont été exclus des pourparlers à l'origine de l'Accord de Bonn qui a mené aux élections et à la création des nouvelles institutions en Afghanistan. Gulbuddin Hekmatyar, chef d'un des partis jihadistes les plus puissants pendant le conflit, le parti jihadiste le plus puissant dans les années 80, n'a pas participé aux discussions de Bonn en novembre et en décembre 2001. Jalaluddin Haqqani, l'un des principaux commandants jihadistes des années 80, a aussi été exclu.
    Ces groupes se sont reconstitués, et ce sont eux qui mettent en péril l'ordre constitutionnel, les espoirs et les attentes des Afghans aujourd'hui. Et, dans une certaine mesure, c'est un échec de la part de l'Afghanistan et de notre part de ne pas avoir reconnu que cette menace existait encore, et qu'elle aurait une incidence sur la transition en Afghanistan, comme nous avons pu le constater, et que cela n'a fait que perpétuer et empirer le conflit. Cela dit, très franchement, certains voisins de l'Afghanistan n'ont pas brillé, en particulier le gouvernement du Pakistan, lorsqu'il s'est agi de lutter contre les structures dirigeantes des talibans.
    Vous vous rappellerez que dans le temps, le Pakistan estimait qu'il était dans son intérêt national d'appuyer les talibans. Le président Musharraf l'a écrit noir sur blanc dans ses mémoires, ainsi que d'autres hauts responsables pakistanais, et d'ailleurs, personne ne nie cela aujourd'hui. Existe-t-il encore des groupes et des courants au Pakistan qui ont intérêt à appuyer les talibans, à offrir un refuge à leurs dirigeants? Probablement. La force probante de la preuve est en faveur du poursuivant dans ce cas-ci. Très honnêtement, pour ceux d'entre nous qui souhaitent défendre l'Afghanistan, les intérêts afghans, et qui souhaitent sécuriser l'Afghanistan, cela doit être une priorité.
    Pour appuyer ce point de vue, permettez-moi de vous faire remarquer que plus personne désormais ne rejette cette idée. Il y a quelques semaines, alors qu'il comparaissait devant une commission du Congrès, le général Eikenberry, dernier commandant du Commandement des forces multinationales en Afghanistan, a déclaré que nous ne pouvions remporter seuls le conflit en Afghanistan, et il a dit: « ...je souligne que la présence de dirigeants d'al-Qaïda et des talibans en territoire pakistanais reste un problème important qu'il faut régler si nous souhaitons réussir en Afghanistan... ».
    Ce consensus est partagé par l'OTAN, les Nations Unies, et la plupart des capitales préoccupées par l'avenir de l'Afghanistan. Très franchement, ce problème doit se régler par le biais de la coopération, grâce à un soutien, à un dialogue positif qui se renforcent mutuellement, un dialogue qui garantira une meilleure situation en matière de sécurité dans la région et dans le monde.

  (1040)  

    Toutefois, la sécurité en Afghanistan est un objectif qui ne pourra être atteint par les seuls moyens militaires. L'équation de sécurité dans ce pays aujourd'hui comprend bien d'autres éléments et bien d'autres défis outre la campagne contre les talibans et autres groupes terroristes.
    Le ministère de l'Intérieur et le rôle de la police en Afghanistan restent une priorité pour la communauté internationale et pour le gouvernement afghan. Il importe de comprendre que de grands projets ont été réalisés, surtout en 2006 et en 2007, et ce, après plusieurs années de négligence pendant lesquelles l'application de la loi en Afghanistan n'a peut-être pas reçu toute l'attention qu'elle méritait.
    Quatre étapes de sélection, d'approbation fondée sur le mérite et de concours ont été mises en place pour faire en sorte que le ministère de l'Intérieur, qui était dominé par l'intérêt des différentes factions et, surtout, par les intérêts de l'Alliance du Nord, soient dorénavant régies par le principe du mérite et dirigées par des agents de police qui seront les plus compétents du pays. La première étape de la réforme, qui touchait la haute direction du ministère, a eu lieu au début de 2006. Les deuxième, troisième et quatrième étapes, qui toucheront jusqu'au niveau des majors et lieutenants-colonels, sont en voie de parachèvement. Cette réforme s'accompagne d'une réforme de la rémunération et des grades semblable à celle qui a été mise en oeuvre au sein de l'Armée nationale afghane. Ainsi, pour la première fois, le ministère de l'Intérieur sera composé d'un effectif de professionnels et les officiers pourront mieux résister à la tentation de la corruption, du trafic de drogues et des affiliations aux différentes factions qui ont dominé ce ministère trop longtemps.
    Le travail est loin d'être terminé. Les finances et l'administration restent les points faibles du ministère et il reste à consolider les cadres de reddition de comptes. L'administration civile, qui relève aussi du ministère de l'Intérieur -- c'est-à-dire, l'administration au niveau des provinces et districts -- n'a pas encore eu droit à la même attention que la police et nous, de l'ONU, invitons tous les donateurs intéressés à accorder un peu plus d'attention à ce domaine. Nous espérons que les ressources canadiennes dont on a annoncé hier qu'elles serviraient à la reconstruction, au développement et à la mise en place d'institutions en Afghanistan serviront aussi à relever le défi de la gouvernance, ce qui sera le cas, selon ce qu'on nous a dit.

[Français]

    De quoi parle-t-on avec les gens de ce ministère de l'Intérieur? Je vais vous donner un exemple. L'été passé, il y a eu une émeute à Kaboul à la suite d'un accident survenu dans le nord de la ville. Un camion de la coalition avait écrasé plusieurs personnes, des citoyens afghans.
    À la suite de cette émeute, que la police de Kaboul avait eu beaucoup de difficulté à contenir, un nouveau chef de police a été nommé. Il n'avait aucunement les qualifications requises pour occuper ce poste. La communauté internationale a été très déçue de cette décision du président Karzaï. Il l'avait prise dans des circonstances très difficiles. En effet, une émeute dans une ville comme Kaboul est de nos jours un événement déstabilisant.
    Par la suite, on a entamé une réforme non seulement du processus de sélection du chef de police de Kaboul, mais de tous les chefs de police des provinces les plus importantes de l'Afghanistan. Le 13 janvier, nos espoirs à cet égard se sont réalisés. Le président Karzaï a rendu une décision voulant que 40 nouveaux chefs soient nommés à divers postes, y compris à la tête de la police de Kaboul. Il s'agissait dans tous les cas de professionnels représentant l'ensemble de la diversité ethnique, politique et professionnelle de la police afghane.
    Je peux vous dire très honnêtement que pour la première fois, aucun chef dont le rang était supérieur à celui d'un colonel n'a été choisi autrement qu'en fonction de son mérite. Il s'agissait là d'un message très important que recevaient la population afghane dans son ensemble et la communauté internationale. Ce sont des faits qui prouvent notre capacité de réformer les institutions afghanes et de leur donner un fondement professionnel.

  (1045)  

[Traduction]

    Monsieur le président, je n'aborderai pas tous les points dont je souhaitais traiter, car je préfère que nous ayons du temps pour une discussion, mais j'aimerais tout de même faire mention de quelques domaines où d'importants progrès ont été réalisés.
    Le désarmement en Afghanistan est une histoire remarquable. Financé en grande partie par le Canada, le désarmement était le complément nécessaire et inévitable à l'émergence d'une armée et d'une police professionnelle, ce qui est amorcé, comme l'a souligné James.
    Par ailleurs, la création d'institutions de sécurité chargées de la sécurité et du renseignement en Afghanistan a été remarquable. À la fin de 2006 et au début de 2007, ces organismes ont réussi à démanteler de dangereux réseaux qui facilitaient les attentats suicides à la bombe à Kaboul, à Khowst et, ce qui est le plus important pour les Canadiens, à Kandahar. Nous espérons que ce succès se poursuivra en 2007.
    Enfin, l'Armée nationale afghane demeure une institution essentielle qu'il faut renforcer si nous voulons que les Afghans soient ceux qui assurent la sécurité en Afghanistan. Je demande donc au Canada d'examiner sérieusement toutes les formes d'appui qu'il pourrait accorder à l'Armée nationale afghane. L'Armée canadienne a déjà établi un partenariat très réussi avec l'ANA, mais on pourrait faire plus. On pourrait adopter des approches novatrices, car tout ce que nous pouvons faire pour aider l'Armée nationale afghane fera en sorte que les investissements militaires et dans la reconstruction qui ont été faits si généreusement par le Canada et d'autres pays ne seront plus nécessaires.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci beaucoup.
    Si on veut que tous les députés aient l'occasion d'intervenir, il va falloir faire preuve de concision. Pour ce tour, vous n'aurez qu'environ trois minutes chacun, donc soyez précis pour que le plus grand nombre de personnes possible puissent intervenir. Merci beaucoup.
    Allez-y, monsieur Coderre.
    Ça va être court car ma question est simple. Il y a sans doute une réponse compliquée à cette question, mais je compte partager mon temps avec mon collègue M. McGuire.
    Les choses semblent bien aller, mais j'aimerais savoir ce que vous pensez du rapport allemand car, d'après ce rapport, les progrès sont lamentablement lents. Nous souscrivons au triple-D. Non seulement faut-il régler la question pakistanaise, nous devons davantage miser sur nos efforts diplomatiques. Peut-être faudrait-il tenir compte de cela. Que pensez-vous du rapport allemand?
    Nous avons beaucoup parlé du Pakistan. Et qu'en est-il de l'Iran? Y a-t-il un problème? Existe-t-il des cellules d'al Qaïda? Je crois connaître la réponse, mais cela mérite peut-être notre attention.
    Pour conclure, que pensez-vous de la détention? On parle de faire un transfert, par l'entremise des Nations Unies, au gouvernement afghan -- mais il est question de torture, entre autres. J'imagine que vous avez une opinion là-dessus. Vous savez qu'il y a une enquête qui est en cours ici et qu'on examine la question, alors j'aimerais savoir ce que vous en pensez.
    Soyez très précis.
    En ce qui concerne la question de la détention, je vais m'en remettre à mon collègue des Nations Unies. Je dirai simplement qu'en vertu de la politique de l'OTAN, une personne peut être détenue pendant un maximum de 96 heures avant d'être remise aux autorités afghanes. Alors, selon l'OTAN, le processus de détention ne comporte pas de lacunes.
    Je pense qu'on peut parler de « bien aller » et « lamentablement lent » dans une même phrase tout en étant cohérent sur le plan intellectuel. Les progrès sont lamentablement lents, mais il s'agit de véritables progrès qu'on est capable de mesurer.
    Il s'agissait d'un des cinq pays les plus pauvres dans le monde, sinon le plus pauvre, et qui a été anéanti par la guerre, et qui fait face à de nombreux problèmes, dont certains problèmes régionaux. La vie des gens s'améliore. Ils ont plus d'argent, un meilleur accès aux soins de santé, leurs enfants sont à l'école -- pas tous, mais petit à petit, on fait des progrès.
    À mon avis, c'est la seule façon d'interpréter la situation. Si vous ne vous en tenez qu'aux problèmes, vous allez être découragés. Mais si vous tenez compte des progrès réalisés, c'est quand même rassurant. À l'OTAN, nous croyons fermement que nous continuons à faire des progrès. De toute évidence, les Nations Unies abondent dans le même sens.
    Chris aura peut-être plus à dire au sujet de l'Iran. Je peux vous dire par contre que l'Iran a collaboré avec l'OTAN sur le plan purement technique relativement à la question de l'espace aérien et ne nous a pas brouillé les pistes. Nous n'avons pas de renseignements laissant entendre que l'Iran joue un rôle négatif sur le plan de la sécurité. Et c'est beaucoup dire, à mon avis.

  (1050)  

    Il ne vous reste plus de temps, monsieur Coderre, je suis désolé.
    Passons à M. Bachand.
    J'invoque le Règlement, monsieur le président. Vu que nous avons commencé un petit peu en retard, je me demandais si vous auriez l'obligeance de demander à nos invités s'ils sont en mesure de rester jusqu'à 11 h 30.
    Ce n'est pas un rappel au Règlement. Il y a un autre comité qui siège ici après.
    Ce n'est pas à nous de décider. Il y a un autre comité ici à 11 heures. Nous avons un programme très serré.
    Monsieur Bachand.

[Français]

    Je voudrais en profiter, monsieur le président, pour déplorer la situation. Nous recevons deux personnages très importants et nous ne disposons que de trois minutes pour poser nos questions et entendre les réponses. Ça n'a pas de sens. On pourra en reparler.
    J'ai six questions, mais je ne vous demande pas de répondre. J'aimerais que vous m'envoyiez vos réponses par écrit, parce que cela m'apparaît important.
    Vous nous parlez de reconstruction. Nous, les députés, recevons des informations contradictoires. Avec l'OTAN, je suis allé à Faizabad et je n'ai pas vu beaucoup de reconstruction. Je suis allé à Kandahar avec le Comité permanent de la défense nationale et, pour des raisons de sécurité, on nous a interdit de sortir du camp et d'aller voir ce qui se passait dans les faits. J'aimerais savoir s'il y a vraiment de la reconstruction en Afghanistan et, si oui, où cela se passe. J'ai beaucoup de difficulté à croire qu'il se fait beaucoup de reconstruction dans le coin de Kandahar, mais j'aimerais que vous nous l'indiquiez sur une carte, que vous nous disiez à quel endroit cela se passe.
    Parlons du sondage. Vous avez mentionné des pourcentages un peu plus tôt. Je veux savoir ce que vous pensez des déclarations du général Richards, qui dit depuis quelques mois déjà que s'il n'y a pas un changement d'attitude ou de mandat de la mission, 70 p. 100 des Afghans vont se retourner vers les Talibans.
    Ma prochaine question s'adresse à M. Appathurai . Vous avez dit un peu plus tôt qu'il était important que les organisations internationales s'entendent entre elles. Je reviens de Bruxelles et je m'explique mal que l'OTAN et l'Union européenne soient incapables de s'entendre et soient incapables de tenir une réunion sur un sujet aussi important que l'Afghanistan. J'aimerais que vous m'expliquiez, par écrit, pourquoi vous pensez que cela se passe comme cela.
    On parle des services de santé qui ont évolué. Par contre, le Conseil de Senlis vient de dire que l'hôpital de Kandahar est un véritable mouroir, que c'est un endroit où les gens meurent systématiquement. Vous nous dites que cela semble s'améliorer, mais cela ne semble pas être le cas. C'est une autre information contradictoire.
    J'aimerais, monsieur Alexander, que vous nous parliez de l'amnistie. Présentement, le président Karzaï est aux prises avec une décision du Parlement qui vise à amnistier beaucoup de bandits alors que la communauté internationale s'objecte à cela. J'aimerais avoir les dernières nouvelles, savoir comment cela va fonctionner. Il se pourrait même que le mollah Omar puisse être amnistié et qu'on lui dise que, s'il abandonne les affaires, il fera maintenant partie de la grande société afghane. Il y a des choses que je m'explique mal.
    Parlons enfin de l'approche 3D. On s'est fait confirmer qu'à Kandahar, il y a 2 500 soldats, 6 représentants des Affaires étrangères et 6 représentants de l'ACDI. Il me semble qu'il y a vraiment un déséquilibre dans le mandat de la mission. J'aimerais connaître votre opinion là-dessus.
    J'ai entendu le cadran sonner. J'attends vos réponses par écrit au cours des prochains jours.

[Traduction]

    Seriez-vous prêt à faire cela?

  (1055)  

    Bien sûr.
    Je vous en remercie.
    Merci, monsieur Bachand.
    Madame Black.
    Merci beaucoup.
    À l'instar de mes collègues, je suis consternée de ne pouvoir entrer dans les questions de fond, mais j'ai trouvé très intéressant ce que vous avez dit, monsieur Appathuai, sur les médias qui ne disent pas tout. C'est un fait que les journalistes canadiens et la plupart des journalistes des entreprises médiatiques internationales sont intégrés aux forces armées et nous disent dans le reportage ce que l'armée leur permet de dire, que ce soit objectif ou non.
    J'ai été troublée de vous entendre dire que d'autres pays ont subi plus de pertes que le Canada, car cela ne me console pas de savoir qu'il y a eu plus de victimes étrangères que canadiennes. Ce genre de comparaison me trouble.
    J'aimerais savoir si vous êtes souvent allé dans la région de Kandahar où sont les Canadiens à l'heure actuelle, plus particulièrement dans les camps de personnes déplacées ou, d'après ce que nous montrent les médias -- et c'est une chose que nous ont montrée les médias --, les secours alimentaires sont manifestement insuffisants. Il est évident que l'aide alimentaire ne se rend pas jusque là. Peut-être que monsieur Alexander pourrait répondre. Pourquoi la nourriture et l'eau potable ne se rendent-elles pas jusqu'à ces camps de personnes déplacées en quantité suffisante?
    Vous avez aussi parlé du Pakistan. Vous, comme bien d'autres, avez soulevé cette question, mais il faut trouver des solutions, il faut trouver des façons d'empêcher les insurgés de traverser cette frontière. Il ne suffit pas de signaler le problème, il faut trouver des solutions.
    J'aimerais aussi aborder la question des détenus. Peut-être que M. Alexander pourrait aussi répondre à cette question. Si vous n'avez pas suffisamment de temps, vous pouvez m'envoyer votre réponse par écrit.
    Quelles sont les conditions qui prévalent dans les prisons afghanes? Vers quoi renvoyons-nous les détenus? On a fait mention de torture. On a laissé entendre que les conditions étaient atroces. J'aimerais que vous nous donniez une idée des conditions dans lesquelles sont détenus les prisonniers que nous remettons aux Afghans.
    Nous savons que les autorités canadiennes enquêtent là-dessus. Nous savons que l'entente qu'a signée le général Hillier n'est pas aussi exigeante que celle qu'ont signée les Néerlandais et les Britanniques pour ce qui est du traitement des prisonniers au sein du système afghan et de la possibilité qu'ils soient remis à d'autres pays. Nous en savons très peu sur ce sujet, et c'est très inquiétant.
    Enfin, en ce qui concerne le nombre de nos soldats qui sont dans le sud de l'Afghanistan, j'ai tenté d'interroger notre ministre et les hauts fonctionnaires sur les liens qui existent entre la mission de l'OTAN et l'opération Liberté immuable, qui est toujours en cours. Il y a encore un grand nombre de soldats américains dans le sud de l'Afghanistan qui ne participent pas à la mission de l'OTAN. On ne nous a rien dit sur les liens qui pourraient exister entre ces opérations.
    Nous savons toutefois que les membres de la police auxiliaire afghane n'ont que deux semaines de formation avant d'être envoyés sur le terrain. C'est très inquiétant. Vous avez reconnu que la formation de la police accuse du retard. Quand nous sommes allés en Afghanistan, on nous a dit que la formation de la police était de sept à dix ans en retard par rapport à la formation de l'Armée nationale afghane, ce qui ne constitue pas un progrès et n'est pas non plus ce que la communauté internationale espérait.
    Ce sont là mes observations et mes questions. Je suis désolée que nous n'ayons pas plus de temps pour une discussion.
    Merci, madame Black.
    J'espère que vous avez pris des notes. Nous vous ferons aussi parvenir la transcription de cette séance. Avez-vous une idée du temps qu'il vous faudra pour répondre aux questions qui viennent de vous être posées?
    Je pourrais en trois minutes répondre rapidement à certaines des questions.
    Voulez-vous commencer?
    Permettez-moi de terminer avec le gouvernement, avec Mme Gallant, pour trois minutes, et ensuite on essaiera.
    À mon avis, M. McGuire souhaite poser une question afin que vous puissiez y répondre par écrit.
    Merci, monsieur le président.
    Si vous allez fournir des réponses à ces questions au comité, pourriez-vous les fournir à tous les membres du comité? Je commencerai avec une question qui intéressera mon collègue du Québec, un des nombreux Québécois qui forment une nation au sein d'un Canada uni, et qui siège aussi au comité parlementaire pour l'OTAN.
    Monsieur Alexander, vous nous avez parlé de nombreux et excellents projets d'infrastructure mis en place et les avantages de notre présence pour les citoyens Afghans.
    Monsieur Appathurai, vous avez fait référence à la raison originale. Vous avez fait allusion au fait que le terrorisme était la raison originale pour notre présence en Afghanistan.
    Maintenant je veux parler de l'OTAN. Lors de la création de l'OTAN, comme vous le savez, les pays se sont réunis en réponse à la guerre froide. Nous nous tenons plus prêts, en tant que groupe réactionnaire stable, et c'est seulement depuis peu que nous sommes devenus un corps expéditionnaire. Comme vous l'avez aussi mentionné, nous avons subi des pertes, et tous les pays de la coalition, y compris des pays qui ne font pas partie de l'OTAN, font le plus grand des sacrifices. Nous avons vu là-bas des soldats de la Jordanie et d'autres pays qui souhaitent appartenir à l'OTAN, et pourtant, chaque fois que des dépouilles sont rapatriées au Canada dans un cercueil recouvert d'un drapeau, cela devient un enjeu politique et l'on parle de retirer nos troupes de l'Afghanistan.
    Voici ma première question. Si l'OTAN devait quitter l'Afghanistan avant la fin de la mission, quel serait l'impact sur l'OTAN en général ainsi que sur son avenir? Nous savons que l'Union européenne a ses propres forces, alors il y a peut-être des intérêts conflictuels. Je me demande pourquoi la France s'y oppose. C'est très important ici au Canada, parce que le chef de l'opposition a, à l'heure actuelle, la double citoyenneté, et tout est possible en politique.

  (1100)  

    J'invoque le Règlement pour dire que c'est honteux. C'est lamentable.
    Il est un citoyen français, entre autres, donc j'aimerais savoir quelle est l'historique et la position du pays.
    Finalement, le conseil Senlis a comparu devant notre comité et ils ont montré des diapos dont lesquelles on donnait à manger aux talibans et à leurs familles. Je me demande ce...
    Un rappel au Règlement, s'il vous plaît.
    Au sujet du rappel au Règlement, s'il vous plaît
    La question de la double citoyenneté est encore une fois complètement dépourvue de pertinence. J'aimerais que vous lui demandiez...

[Français]

retirer ses paroles. Faire de la petite politique comme cela est inacceptable. Cela n'a pas sa place. On a trop de questions sérieuses à poser. Si elle ne peut poser de questions sérieuses, on lui en fournira, mais je lui demande de retirer ses paroles sur la question de la double citoyenneté.

[Traduction]

    Ce n'est pas un rappel au Règlement, monsieur Coderre, et vous n'êtes pas sans le savoir, sans doute.
    Selon le Conseil Senlis, ils distribuaient de la nourriture aux talibans. Je me demande quel est l'impact sur le travail que vous faites en Afghanistan.
    Madame Gallant , votre temps est écoulé.
    Nous avons dit que nous donnerions quelques minutes à ces gens pour terminer, et puis M. McGuire aimerait poser une question dont la réponse peut être donnée par écrit. Alors, prenez quelques minutes, s'il vous plaît, et essayez de répondre à quelques questions. Je vous demanderais de répondre par écrit aux questions que vous n'aborderez pas.
    Je vais répondre aux questions sur l'OTAN.
    Le Général Richards a déclaré qu'une bonne partie de la population ne sait quel camp appuyer. Les gens ne savent pas trop qui gagnera.
    Les Talibans sont des Afghans, ce que nous ne sommes pas. Il est donc important que nous continuions non seulement à prendre des engagements à long terme mais à les exprimer clairement. Les Afghans ne veulent pas que les Talibans dirigent le pays; ils souhaitent que leur pays soit dirigé par un gouvernement élu démocratiquement. Nous devons donc prouver que nous sommes là pour les aider à long terme. C'est un message très important. Les Afghans nous appuieront s'ils sont convaincus que c'est dans leur intérêt, mais aussi s'ils sont convaincus que nous les aiderons à long terme.
    Vous n'entendrez jamais l'OTAN se dire satisfaite des relations avec l'Union européenne en ce qui concerne les discussions qui ont eu lieu. Je pourrais vous expliquer en détail pourquoi cela ne marche pas, mais il est certain que nous aimerions que cela marche.
    Quand nous sommes allés en Afghanistan il y a trois semaines, le président Karzai a informé le secrétaire général à ce sujet. Le président Karzai collaborera avec les leaders parlementaires pour s'assurer que le projet de loi qui lui a été présenté reflète la loi afghane, la constitution de l'Afghanistan et le droit international tel qu'il figure dans la constitution afghane. Il est très conscient des vues de la communauté internationale à ce sujet et il s'assurera, en collaboration avec les autres dirigeants du pays, que cette loi reflète bien le droit national et international.
    Pour ce qui est de la couverture médiatique, c'est précisément parce que les journalistes sont intégrés aux forces armées qu'ils peuvent faire des reportages que nous appelons « cinétiques ». Les journalistes accompagnent les soldats et se déplacent avec eux. Il est beaucoup plus difficile pour eux d'aller voir ce qui se fait en matière de reconstruction. Les reportages cinétiques sont plus vendeurs. C'est aussi un problème, puisque c'est ça qui est plus attirant. C'est tout un défi pour moi et mes collègues de convaincre les journalistes de s'intéresser aux autres aspects de la mission, mais nous tentons de le faire.
    Au sujet des pertes, j'ai fait mention des victimes des autres pays, mais nullement pour dénigrer les pertes subies par le Canada. Je suis Canadien et ces victimes sont mes collègues. Mais on semble croire, comme le montrent les médias, que le Canada est seul en Afghanistan, qu'il est le seul pays à assumer le fardeau. Je l'ai vu à bien des reprises, et ce n'est tout simplement pas vrai. Ce que je voulais dire, c'est que tous nos alliés essuient des pertes dans le cadre de cette mission, comme nous.
    J'aimerais terminer sur deux choses. Si l'OTAN quittait l'Afghanistan aujourd'hui, ce serait absolument dévastateur pour ce pays. Les Afghans ne peuvent se défendre seuls. Nous pouvons en ce moment donner à l'Afghanistan une force de l'OTAN qui a fait ses preuves dans les combats, qui a une haute interopérabilité et qui est une force efficace pour les Nations Unies. Il y a en ce moment 55 000 personnes postées un peu partout dans le monde dans le cadre d'une mission de l'ONU. Nous donnons du muscle à l'ONU dans le cadre d'une mission de l'ONU. Pour les Canadiens, c'est absolument primordial. Nous devons câbler sur ces efforts et ces réussites et non pas les gaspiller, mais cela signifie une contribution active.
    Enfin, en ce qui concerne l'Opération liberté immuable et l'OTAN, l'Opération liberté immuable n'existe plus comme structure, mais il y a encore 8 000 soldats américains sur place. La plupart dispensent de la formation et aident à équiper l'Armée nationale afghane. Un petit groupe d'entre eux poursuivent les opérations ciblées de renseignements avec l'aide des Nations Unies et du gouvernement afghan. Nous avons une structure de commandements en place et cette opération est donc bien distincte de celle de l'OTAN. La mission de l'OTAN est d'assurer la sécurité et de créer les conditions propices à la reconstruction et au développement. Nous avons notre propre structure de commandements, notre propre sous-commandant qui prévient les conflits entre les deux missions. Au besoin, surtout dans les situations extrêmes où les soldats d'une mission sont en graves difficultés, nous prêtons main forte aux autres. Essentiellement, ce sont deux missions différentes, deux mandats différents et nous avons une structure de commandements qui permet d'éviter les conflits mais aussi, quand c'est indiqué en cas d'urgence, l'entraide.
    Chris, je vous laisse le soin de répondre aux autres questions.

  (1105)  

    On a demandé ce qui arriverait si le Canada et d'autres pays retireraient leurs troupes de la mission de l'OTAN en Afghanistan. Comme James vient de le dire, l'Afghanistan serait replongé dans la guerre civile. Les investissements et les succès des cinq dernières années seraient oubliés, presque certainement: Je parle de ce que nous avons accompli du point de vue des institutions, du régime électoral et du développement. Ce serait l'échec de la principale mission de l'OTAN, dont la crédibilité serait gravement entamée. Ce serait aussi un échec pour l'une des principales missions des Nations Unies, dont la crédibilité serait aussi minée, avec toutes les conséquences qu'on peut imaginer pour son influence future sur les affaires du monde. Plus tragique encore, aucun de nous ici ne saurait expliquer aux familles des 44 Canadiens qui ont perdu leur vie en Afghanistan quelle était la raison de ce sacrifice.
    Monsieur McGuire allait...
    J'invoque le Règlement: vous parlez comme si le retrait se faisait maintenant.
    Oui, je croyais que c'était là la question.
    Au sujet de l'incidence des photos de Talibans distribuant des aliments, manifestement quelqu'un était...
    Il s'agit du Conseil de Senlis qui distribuait des aliments aux Taliban. Vous ne les avez pas vus.
    Je ne suis pas au courant de cette affaire, et je ne peux donc me prononcer sur son importance.
    Nous sommes pour un débat sur l'insurrection et les politiques en matière de drogue, mais les Nations Unies n'accepteront pas la légalisation de la culture du pavot en Afghanistan, ni ailleurs. En l'absence de primauté du droit, cela n'a jamais marché. La priorité pour l'Afghanistan, c'est de rétablir la primauté du droit et non d'appliquer des politiques qui n'ont été efficaces que dans des démocraties arrivées à maturité, des sociétés à maturité où règne depuis longtemps la primauté du droit.
    Quelles mesures concrètes faut-il prendre au sujet du Pakistan? Il y en a beaucoup. Il faut partager les évaluations de ce qui se passe des deux côtés de la frontière et en discuter. Il faut demander au Pakistan des mesures concrètes au sujet de certains chefs et de certaines structures qui nous préoccupent tous. Il faut mettre à jour la résolution 1267 du Conseil de sécurité de l'ONU pour tenir compte de la réalité actuelle du pouvoir taliban. Je parle de la liste faisant état de certaines sanctions contre des chefs talibans et des chefs d'Al-Qaïda. Il faut donner un soutien supplémentaire, et le Canada aurait un rôle important à jouer en ce sens, pour le rapatriement des réfugiés des deux côtés de la frontière, en créant un effet d'attraction en Afghanistan et en favorisant un environnement favorable au Pakistan, pour aider ce pays à résoudre ce problème. Il ne faut pas oublier le contexte régional, qui comprend non seulement le Pakistan, mais aussi l'Iran, l'Inde et bien d'autres pays.
    Il faut aussi envisager des mesures visant à rebâtir la confiance entre les deux pays. Les Nations Unies se sont démenées pour renforcer le dialogue politique entre ces deux pays, et l'une des idées que nous favorisons, dans le cadre de ces dialogues, c'est la création de jirgas entre les deux pays, pour permettre aux sociétés civiles de chaque pays de présenter son point de vue sur les mesures qui ramèneront la sécurité non seulement en Afghanistan, mais pour toute la région.
    Quel est le rôle de l'Iran? En gros, il est extrêmement positif: une aide de 250 millions de dollars offerte en temps utile et avec rigueur pour reconstruire des routes, pour appuyer les services d'éducation et pour amener l'électricité à la ville de Herat. Avec 59 autres pays, les Nations Unies sont un donateur important qui a fait beaucoup pour aider à la transition de l'Afghanistan.
    Les services carcéraux préoccupent beaucoup les Nations Unies. Les conditions de détention en Afghanistan dans les établissements gérés par la direction nationale de la sécurité sont relativement bonnes. Elles font l'objet d'un suivi rigoureux par le Comité international de la Croix-Rouge et la commission indépendante des droits de la personne de l'Afghanistan. Notre mission s'intéresse de plus en plus à ce domaine et les conditions de détention sont une de nos priorités dans le cadre de nos activités de suivi des droits de la personne.
    Il reste encore beaucoup à faire pour le système carcéral afghan. La prison nationale de Kaboul, Pul-i-Charkhi, a été en partie rénovée et les normes y ont été grandement améliorées, mais il reste encore beaucoup à faire dans les établissements provinciaux. Je suis fier de dire que le conseiller correctionnel de la UNAMA est un professionnel des Services correctionnels du Canada et que nous voyons du progrès de ce côté. Il va de soi qu'on n'obtiendra pas des résultats instantanés.
    James a parlé de l'Opération liberté immuable et on a fait allusion à la lenteur du développement. De toute évidence, le développement n'est pas aussi rapide qu'on le voudrait. Demandez à n'importe quel Afghan et sa réponse sera certainement qu'il faudrait en faire plus. Beaucoup d'Afghans ont vécu à l'étranger et savent ce qui est une vie meilleure et voudraient l'avoir chez eux.
    Mais cette lenteur se compare à quoi, au juste? Le niveau de vie en Afghanistan est lent à rejoindre celui de l'Europe occidentale et de l'Amérique du Nord. Ce sont là des objectifs lointains, mais nous avons certainement pu rapidement favoriser la croissance économique de l'Afghanistan, un pays qui a trop longtemps souffert de dépression et de ralentissement économique.
    Je conteste donc le rapport allemand et quiconque déclare que rien n'a été fait. Il est très difficile pour les Occidentaux de comprendre comment on peut vivre avec 150 $ par an par personne, et combien la vie se trouve améliorée quand le revenu grimpe à 300 $ par année par personne. Il ne faut pas minimiser les progrès obtenus, non plus le fait que ce n'est pas un petit groupe de Kabouls composés de fonctionnaires gouvernementaux qui en profitent, mais l'ensemble de la population, grâce à des programmes parrainés par le gouvernement et financés par des pays comme le Canada, des programmes qui ont rejoint l'ensemble du pays et jusqu'aux deux tiers des collectivités rurales. Je rappelle que 80 p. 100 de la population vit en milieu rural. C'est le centre de gravité de la population afghane pour lequel nous avons déjà changé des choses.

  (1110)  

    Voilà pourquoi l'espoir des Afghans continue de se porter vers nous. Il n'en sera peut-être pas toujours ainsi. Nous devons continuer de fournir des résultats régionaux, en Afghanistan. Pour le moment, toutefois, nous pouvons être fiers de ce que nous avons fait. Il importe de reconnaître ces réussites si nous voulons justifier d'autres investissements qui sont actuellement encouragés, d'où qu'ils viennent.
    Monsieur McGuire.
    Merci, monsieur le président.
    J'ai quelques questions qui découlent de notre récente visite en Afghanistan ainsi que des témoignages reçus à cette occasion. Le plus important se rapporte au fait que, compte tenu de l'engagement supplémentaire de 200 millions de dollars annoncé hier, très peu d'argent se rend chez l'Afghan moyen. L'argent passe entre les mains des fonctionnaires gouvernementaux, des gouverneurs, etc. En fait, on ne se rend pas très bien compte parce qu'il n'y a pas de véritable comptabilité. Personne ne rend de comptes quant à la façon dont l'argent de l'aide publique est vraiment dépensé.
    Il n'y a qu'à voir le ravissement des Afghans au sujet du programme de salaire contre travail offert par les militaires canadiens. C'était la première fois qu'ils recevaient de l'argent comptant depuis longtemps. Tous ces milliards de dollars n'aboutissent pas chez les Afghans, parce qu'il n'y a pas de comptabilité et qu'on ne demande pas que des comptes soient rendus. On dirait qu'on envoie l'argent aveuglément, en les laissant faire ce qu'ils veulent, sans que ce soit vraiment efficace.
    Par ailleurs, les gens ne tiennent pas tant que cela aux écoles et aux hôpitaux, pour commencer. Ce qu'ils veulent, c'est avoir à manger, et ils n'ont rien à manger. Ils ne reçoivent pas de nourriture. C'est ce qu'ils nous ont dit.
    Troisièmement, la soit disant armée nationale afghane est en fait une armée du nord qui essaie de mener des opérations à Kandahar et dans la province Helmand, sans avoir de crédibilité parce qu'aucun des gens du coin ne fait partie de cette armée nationale. On envoie les gens pour formation à Kaboul, mais ils ne se rendent pas. Vous essayez maintenant d'imposer une armée nationale à une région du pays qui est la plus tendue des 34 provinces. Il n'y a pas de recrue de cette région qui pourrait faire de cette armée un instrument de politiques nationales plus acceptable.
    Pourriez-vous répondre à mes questions?

  (1115)  

    Avant que vous répondiez, je constate que personne ne semble vouloir de notre salle. Je sais qu'il y a beaucoup d'intérêt pour le sujet dont nous traitons. Devrions-nous mettre fin à la séance ou pouvons-nous continuer jusqu'à 11 h 30? Je m'en remets à la décision du comité.
    Il faudrait demander à nos témoins.
    Je sais que vous avez eu une heure avec l'autre comité, et une heure avec nous. Je présume qu'il y avait une raison à cela. Avez-vous d'autres engagements?
    Nous devons être ailleurs à 11 h 45.
    Cela nous conviendrait. Après M. McGuire, ce sera autour de M. Martin, puis de nouveau du côté du gouvernement et enfin, le Bloc vous posera des questions.
    Veuillez répondre à la question de M. McGuire.
    Vous avez tout à fait raison, il y a lieu de discuter de l'efficacité de l'aide donnée, et cette discussion doit avoir lieu, mais il ne faudrait pas que quiconque en déduise que rien n'a été fait. Bien franchement, ceux qui ont fait des dons axés sur des principes, qui ont choisi des mécanismes de mise en oeuvre efficaces, passant surtout par le gouvernement, qui n'ont pas choisi la voie des structures parallèles mais qui ont recouru au budget gouvernemental comme principal moyen de coordination des politiques sont ceux qui ont été très efficaces. Il y a eu reddition de comptes et des résultats prouvent ce qui a été fait.
    Prenons l'engagement du Canada envers le programme de solidarité nationale. Des subventions globales ont été accordées à 17 000 villages pour des projets choisis par eux, par les shuras de village, soit des conseils de village composés à la fois d'hommes et de femmes, mais parfois aussi des shuras d'hommes ou des shuras de femmes. On a ainsi rejoint la moitié des villages du pays. Chaque étape a été documentée et il y a eu une comptabilité très stricte de ce programme et d'une demi-douzaine d'autres programmes nationaux auxquels le Canada a beaucoup contribué.
    Il est vrai qu'il est très utile de voir des Canadiens financer des programmes vivres-contre-travail à Kandahar, mais bien franchement, il y avait dès 2002 et 2003 un programme d'emploi national d'urgence, sous l'égide du gouvernement, et qui faisait ce travail très efficacement partout au pays.
    Il ne faut pas oublier que nous voulons guérir et stabiliser l'ensemble de l'Afghanistan et non pas seulement une province ou certains villages. Certains membres de l'OTAN ont actuellement tendance à définir le problème par eux-mêmes en fonction de l'emplacement de leurs équipes de reconstruction provinciale, ou de leurs troupes, dans une province. L'une des grandes réussites de l'aide publique au développement du Canada, en Afghanistan, c'est d'avoir choisi des mécanismes de mise en oeuvre nationaux et aux Nations Unies, nous affirmons que ce sont là les plus efficaces.
    Oui, les gens veulent des vivres, particulièrement dans les provinces du sud. L'insurrection a particulièrement nui aux réseaux de distribution des vivres en Afghanistan méridional, où beaucoup de collectivités sont confrontées à une vulnérabilité alimentaire et à une pénurie de vivres habituellement comblée par les marchés et par la vente de leur travail sur le marché, quand il y en a. Trop souvent, de nos jours, le marché est celui de la récolte de stupéfiants.
    Une grande quantité de vivres a été livrée par le Programme alimentaire mondial, avec l'appui du Canada et d'autres pays, cette année. La distribution n'a pas été uniforme. Nous reconnaissons qu'il y a encore des zones de vulnérabilité en Afghanistan et c'est pourquoi l'ONU espère renforcer sa capacité de coordination humanitaire en dépêchant sur le terrain huit nouveaux professionnels qui seront situés à des endroits comme Kandahar et qui s'occuperont de ce genre de problème. Le gouvernement de la Norvège nous aide à cet égard.
    Est-ce que la composition de l'armée est peu représentative? Peut-être, mais bien moins qu'il y a deux ou trois ans. Il y a maintenant du recrutement partout au pays. Le corps des officiers est plus ou moins équilibré d'une province à l'autre, mais il y a là un problème historique. Le président Karzai et d'autres qui connaissent l'Afghanistan d'avant les conflits, l'Afghanistan des années 60 et 70, savent qu'il n'y avait pas non plus à cette époque beaucoup de recrues des provinces de Kandahar, Helmand et Oruzgan. Dans cette région, les gens préféraient le service au sein des structures traditionnelles, comme la police, pour éviter d'aller à Kaboul et rester près du foyer et des affiliations tribales si fortes dans cette région.
    Il ne s'agit donc pas simplement de surmonter les obstacles créés par la victoire de l'Alliance du nord de 2001. Le problème remonte à bien plus loin dans l'histoire afghane et l'un des outils pour le surmonter, c'est la police auxiliaire nationale. Ce n'est pas encore un succès avéré, mais on déploie de bons efforts de recrutement local, dans le secteur de la sécurité, en imposant les genres de discipline, de commandement et de contrôle qui conviennent le plus pour assurer la sécurité à Kandahar, Helmand, Oruzgan et Zabol.

  (1120)  

    Merci.
    Puis-je ajouter quelque chose? Je suis d'accord avec Chris sur tout ce qu'il a dit.
    Vous avez parlé, monsieur, du fait que les militaires donnaient de l'argent contre du travail et que c'était efficace. Je peux vous dire qu'à l'OTAN, ce dont nous nous sommes aperçus de la manière la plus nette, et ce que j'ai compris de mes nombreux voyages en Afghanistan et de mes consultations régulières auprès des militaires, c'est que c'est là quelque chose de très précieux, qui a un effet positif incroyable et dont l'absence aurait un effet négatif.
    Je sais qu'il y a des discussions avec le Canada à ce sujet, mais en tant que tiers, je vous encourage certainement à mettre de l'argent dans les mains des militaires que vous envoyez là-bas tout de suite après la reconstruction. C'est une idée précieuse et que votre comité devrait envisager.
    Merci.
    Monsieur Martin, c'est à vous.
    Merci, monsieur le président.
    Merci pour tout votre travail, MM. Alexander et Appathurai. Vous mettez votre vie en jeu pour ce projet, et les Canadiens ne l'oublient pas; nous vous remercions beaucoup pour tout ce que vous avez fait et ce que vous faites.
    J'ai deux ou trois choses à dire. Premièrement, nous savons que l'insurrection s'intensifie. La production ouverte aussi. Les chiffres sur la mortalité maternelle, l'indicateur le plus sensible de la santé des populations, sont encore les plus bas au monde, malgré ce que vous avez dit et malgré votre bon travail.
    Je voudrais parler de trois choses. D'abord, l'opium. Pourquoi donc détruit-on les cultures d'opium, ce qui ne pourra avoir pour effet que de pousser les paysans démunis dans les mains des talibans? Ce sera un désastre certain pour nos troupes, cela ne fera qu'accroître leur insécurité. Pourquoi ne pas acheter cet opium pour en faire des narcotiques de qualité pharmaceutique, un produit dont ont un besoin important le monde en développement?
    Deuxièmement, l'insurrection. Nous savons que la base des talibans est à Quetta, au Pakistan. Vous savez comme moi qu'on ne peut vaincre une insurrection dont les bases sont à l'étranger. Ne pensez-vous pas qu'il faudrait pour régler le problème de l'insurrection, créer un groupe de travail régional composé de l'Iran, du Pakistan, de l'Inde et de l'Afghanistan?
    Enfin, question calendrier, pourriez-vous nous dire s'il faudra maintenir sur le terrain les troupes de l'ISAF pendant quelques années ou une génération? Il va de soi que vos réponses seront prises en compte dans nos calculs, au Comité de la défense.
    De votre côté, vous devez poursuivre vos efforts. Nos ambassades et nos hauts-commissariats ont un équivalent, le fonds canadien, qui est la méthode la plus efficace d'offrir de l'aide au développement, même si c'est la plus sous-exploitée. Maintenez vos efforts, pour les raisons que vous avez données, monsieur Appathurai, et continuez de demander une loya jirga pour ramener dans le giron les groupes qui l'ont quitté depuis l'accord de Bonn, ce serait très apprécié. J'apprécierais vos commentaires sur l'un ou l'autre de ces sujets.
    Merci.
    Monsieur Appathurai.
    Au sujet de l'opium, je suis d'accord avec vous, comme nombre de militaires: la simple destruction des cultures poussera les fermiers vers les talibans, mais le gouvernement afghan a été très clair sur l'élimination des stupéfiants de son pays. Et cela, parce qu'il estime que cela va tout à fait à l'encontre de l'Islam. C'est un pays démocratique et nous devons donc appuyer cette opinion.
    Deuxièmement, si cela se fait dans le cadre d'une stratégie globale, assortie d'autres types d'activités économiques, d'application efficace de la loi, de justice efficace et d'un système carcéral, c'est possible et c'est ce que veulent les Afghans. Je dirais comme vous que si c'est mal fait, on obtiendra l'effet dont vous avez parlé, et c'est la raison de notre extrême prudence. Si les choses sont bien faites, on peut tarir la source de 90 p. 100 de l'héroïne qui circule en Europe. Voilà pour votre première question.
    Deuxièmement, nous convenons tous qu'il faut lutter contre cela en partenariat avec les Pakistanais. Ils doivent faire partie de la solution. C'est très complexe. Nous pourrions avoir un entretien, vous et moi, en aparté, pour que je vous explique ces complexités, mais il reste que c'est très complexe.
    Au sujet du calendrier pour les troupes de l'OTAN, j'en ai déjà parlé. Je m'arrêterai ensuite. Il faut y voir un engagement à long terme. Nous avons le même intérêt à être en Afghanistan maintenant qu'il y a cinq ans. Le problème n'est pas disparu. Notre type d'engagement peut évoluer, bien entendu, et c'est une décision que doit prendre le gouvernement, mais il faut être là à long terme. Quand les Forces de sécurité nationale afghanes seront formées et équipées, nous pourrons un jour prendre un peu de recul.
    Je peux vous dire que l'Armée nationale afghane n'a pas froid aux yeux, lorsqu'il s'agit de combattre. Elle lutte pour son pays et est exposé aux balles. Dans cette force armée, il n'y a pas de lâches. Ces soldats feront leur travail. D'ailleurs, très souvent, nous devons leur dire que le courage, ce n'est pas de se précipiter vers l'ennemie, mais d'attendre une semaine pour avoir de bonnes ressources de tir d'appui direct. C'est une institution qui peut certainement grandir, et nous pourrons alors nous retirer un peu, mais notre intérêt sera le même dans dix ans que maintenant.
    Je crois donc que sans donner de date, il faut y voir un engagement à long terme et qu'un retrait ne ferait qu'encourager ceux qui, au Pakistan, croient qu'il leur faut appuyer les talibans. Cela favoriserait les talibans tout en rendant les Afghans très nerveux à l'idée qu'un jour, nous partirons, et que les talibans reviendront. Si nous ne donnons pas toujours le même message, nous ne donnons pas le bon message.

  (1125)  

    Une courte réponse, s'il vous plaît, puis nous terminerons.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    J'écoutais attentivement vos paroles. Je voudrais vous remercier de venir nous rencontrer ce matin et de jeter un regard réaliste et constructif sur la situation en Afghanistan et sur la mission. Vous nous avez aussi fait part des difficultés, des enjeux, de la mission. Comme on est en train de compléter un rapport sur l'Afghanistan, vos recommandations sont bien prises en note et vont sûrement nous aider en ce sens.
    Vous venez de mentionner un sujet, monsieur Appathurai, qui est extrêmement important, à mon avis. Cela touche l'engagement, et c'est souvent la même situation en toutes choses. Vous avez démontré, finalement, les effets négatifs d'une remise en question de la mission à cause des bénéfices à moyen et long terme qu'on pourrait en tirer, comme vous venez de l'expliquer. J'aimerais entendre également M. Alexander à ce sujet.
    Un élément ressort. Je suis allé en Afghanistan, à Kandahar, au mois de janvier, avec des membres du comité. Il est vrai qu'on a de la difficulté ici, au pays, à constater quels sont les progrès réels accomplis en Afghanistan. C'est une difficulté, un défi que de bien expliquer et de faire comprendre les progrès de la mission là-bas. Vous nous en avez donné des exemples ce matin.
    Il y a aussi l'aspect diplomatique. Vous avez été très clair à ce sujet également. Vous avez indiqué que la solution n'était pas simplement militaire, mais qu'il y avait aussi d'autres voies. J'aimerais vous entendre en ce qui concerne les voies diplomatiques. Y a-t-il des pistes sur le plan diplomatique qui ont été envisagées auprès des factions les plus susceptibles de négocier? J'aimerais vous entendre brièvement à ce sujet.
    Merci, monsieur le président.
    Merci.
    Concernant la diplomatie dans le cas de l'Afghanistan, et comme instrument pour résoudre et surmonter les enjeux auxquels ont fait face, il y a un grand rôle à jouer pour tous les partenaires clés de l'Afghanistan. On a besoin d'un dialogue renforcé sur la sécurité non seulement avec le Pakistan, mais avec tous les grands acteurs régionaux, y compris l'Inde, l'Iran, les pays de l'Asie centrale, la Russie, la Chine et autres. Nous avions ce dialogue de façon plus structurée pendant la période du régime des Talibans, qui s'appelait le groupe des « Six plus deux », qui se réunissait surtout à Genève, mais qui incluait les six voisins de l'Afghanistan. Il nous faudrait peut-être un autre format maintenant, mais on a bien sûr besoin de ce dialogue, surtout avec le Pakistan, mais aussi avec les autres pays.
    Nous avons également besoin de diplomatie concernant les enjeux économiques de la région. Il y a eu, à l'automne 2006, une conférence à New Delhi concernant la coopération économique vis-à-vis de l'Afghanistan. Il a été question de l'élaboration de liens dans le domaine de l'énergie, de la construction d'infrastructures pour relier les réseaux de transport de tous les pays voisins de l'Afghanistan, et aussi des échanges commerciaux ainsi que des conditions favorisant le renforcement des investissements en Afghanistan. La Banque mondiale, la Banque asiatique de développement et d'autres joueurs sont très actifs dans ces domaines, et vous serez probablement surpris de constater à quel point il y a eu des progrès. On a du mal à s'expliquer dans quels domaines on a fait des progrès, mais il y en a eu.

  (1130)  

[Traduction]

    Pour revenir très brièvement à la question de l'échéancier, aux Nations Unies, nous estimons qu'un échéancier semblable à celui qui avait été adopté pour les Balkans est probablement indiqué pour l'Afghanistan. Personne ne veut donner une date précise ou s'engager dans un débat sur la question de savoir combien de temps cela prendra. Nous n'avons aucun contrôle sur les facteurs qui causent l'insécurité. Nous tentons désespérément de mieux les comprendre et de les maîtriser. Toutefois, nous pouvons nous fonder sur les études qui ont été faites. La Société RAND a fait une étude exhaustive de toutes les insurrections et contre-insurrections qui ont éclaté depuis la Deuxième Guerre mondiale. On a conclu qu'en moyenne, il faut 14 ans pour perdre une contre-insurrection et 17 ans pour gagner.
    Mais de toute évidence, comme l'a indiqué James, le principal défi que nous devons relever aujourd'hui est de prouver notre détermination, de montrer notre bonne volonté et notre unité. Si nous nous précipitons vers la sortie, si nous prenons des raccourcis, si nous montrons des signes de faiblesse dans notre engagement à atteindre les objectifs établis par le pacte de l'Afghanistan, nous allons donner foi aux propos des ennemis de la transition. Nous pourrions aussi miner les efforts en cours en vue de stabiliser l'Afghanistan.
    Personne ne s'imagine que la simple éradication du pavot influera de façon importante sur l'industrie. La stratégie antidrogue nationale compte huit piliers dont l'éradication n'est qu'une seule. L'éradication ne peut réussir, si jamais elle réussit, que si elle se fait de pair avec les autres mesures. Ce n'est tout simplement pas le cas dans le sud de l'Afghanistan à l'heure actuelle. Aux Nations Unies, nous continuerons de plaider pour une approche plus exhaustive dès que toutes les mesures nécessaires auront été mises en place. On ne peut toutefois pas se décharger de ce produit sur le marché international des pharmaceutiques. S'il y avait légalisation, on constaterait une montée en flèche. On verrait les Afghans abattre leurs arbres fruitiers pour faire place à la culture du pavot pour satisfaire à la demande du marché légal et illégal et, dans ce pays, où la règle de droit n'est pas encore bien établie, le marché illégal continuerait probablement sa croissance astronomique.
     En ce qui concerne Quetta, quelle est la bonne tribune pour ces questions? Honnêtement, peut-être que votre comité devrait être la tribune pour cette discussion. Peut-être que certains des intervenants régionaux travaillant à la transition en Afghanistan, travaillant à la sécurité en Afghanistan mériteraient de participer à vos discussions. Nous tentons activement de communiquer avec le plus d'intervenants possibles au Pakistan et nous en parlons franchement à tous ceux qui pourraient exercer une influence sur cette situation. Mais les divergences d'opinion persistent.
    Le président Karzai affirme que le Mullah Omar habite à Quetta ou dans les environs. Le président Musharraf a répété à maintes reprises au cours des six ou huit derniers mois que le Mullah Omar va très bien et qu'il habite juste à l'extérieur de Kandahar. Il est dans notre intérêt à tous d'aller au fond des choses et d'établir les faits.
    Nous disposons de différents outils, notamment la résolution 1267 de l'ONU. Mais il faudra débattre de cette question en toute franchise et de pas camoufler les faits sur la structure de commandement des talibans dans les mois qui viennent.
    Monsieur Bouchard, vous disposez d'un peu de temps. Voulez-vous faire une brève intervention?

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie de votre présence et de vos précieuses informations.
     Vous nous avez dit que nous ne pouvions pas remporter la bataille seuls et qu'il fallait résoudre ce problème. J'ai cru comprendre que certains membres de la communauté internationale songeaient peut-être à se retirer. Si c'est le cas, pour quels motifs, selon vous, ces pays songent-ils à se retirer de cette mission en Afghanistan?

  (1135)  

    Cette question me touche beaucoup parce qu'en tant que porte-parole, je suis responsable de la promotion de l'appui des populations et des parlements de tous les pays qui contribuent à la mission. Je suis donc très sensible à cette question. Nous avons un grand défi, et on l'a déjà mentionné.
    Les gens, la population et les parlements veulent qu'il y ait du progrès, mais ils n'en voient pas. Il nous est difficile d'expliquer et de montrer les progrès. Plus nous démontrerons qu'il y a des progrès sur le plan de la qualité de vie et qu'il y a des espoirs d'amélioration, plus nous conserverons l'appui des gens. Ils veulent continuer à le faire. Je pense que l'avantage de cette mission est qu'elle s'explique très facilement, sur le plan de la sécurité et sur le plan des droits de l'homme. Si, en plus, nous pouvons démontrer que nous obtenons des résultats, l'appui de nos populations et de nos parlements va augmenter. Ils vont vouloir que nous restions et que nous tenions le coup.
    Il y a quelques jours, j'étais au barrage de Kajaki. Pour moi, ce que nous y faisons représente véritablement ce pourquoi nous sommes en Afghanistan. J'ai invité des journalistes pour le leur montrer. Ils étaient absolument fascinés. À l'heure actuelle, nous sommes en train de protéger la construction d'une route pour acheminer une turbine. Une fois que l'installation sera faite, il y aura de l'électricité pour près de deux millions d'Afghans avec tous les bénéfices industriels qui vont en découler: des emplois permanents pour 2 000 personnes et de l'irrigation pour les fermiers aux alentours.
    Évidemment, les Talibans ne veulent absolument pas que l'on installe cette turbine. Ils nous tirent donc dessus chaque jour. Nous employons des paramilitaires qui protègent les opérations. Cela va prendre deux ans. Après cela, nous aurons des résultats. Qu'est-ce que cela indique? Nous ne sommes pas là pour tuer des Talibans: ce n'est pas le but de la mission. Nous sommes présents pour protéger la reconstruction et le développement. Il y aura des bienfaits pour les Afghans à la fin de ce processus. Par la suite, ils soutiendront le gouvernement. Il faut qu'on montre ces projets. C'est difficile. Pour y aller, on avait besoin de deux hélicoptères Chinook, deux hélicoptères Apache et deux avions F-16 pour nous protéger. Ce n'est pas facile de montrer ces progrès, mais c'est ce que l'on doit dire.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Vous avez eu très peu de temps pour nous présenter toutes ces informations qui sont d'un grand intérêt pour nous tous, et nous vous savons gré d'être venu. Nous vous transmettrons le procès-verbal de la réunion qui vous rappellera les questions qui vous ont été posées et auxquelles vous n'avez peut-être pas eu le temps de répondre. Si vous pouviez nous transmettre ces réponses par écrit, nous vous en serions reconnaissants.
    Allez-y.

[Français]

    La question que M. Bouchard a posée est très importante, et il faut en comprendre la réponse. Les gens ne sont pas en train de se retirer et de partir. Les pays sont en train de se rallier à cette cause. Il ne faut pas confondre la situation de l'Irak et celle de l'Afghanistan. Aux yeux des Nations Unies, la différence est très claire. Elle l'est également aux yeux des Canadiens et des Canadiennes. La France est de notre côté en Afghanistan; sa présence est très forte à Kaboul. En plus du Canada, des États-Unis et du Royaume-Uni, le Danemark, l'Estonie et l'Australie sont dans le sud de l'Afghanistan. D'autres pays pourraient être présents, surtout si on peut montrer les bonnes choses qui se passent là-bas. Le momentum dont nous jouissons maintenant est vraiment très positif. Il ne faut en aucun cas sous-estimer le niveau de consensus international qui continue à exister sur la question et le défi de l'Afghanistan.

[Traduction]

    Merci beaucoup, mesdames et messieurs.
    La séance est levée.