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CC35 Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité législatif chargé du projet de loi C-35


NUMÉRO 006 
l
1re SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 1er mai 2007

[Enregistrement électronique]

  (1530)  

[Français]

    Nous en sommes à la séance no 6. Selon l'ordre du jour, conformément à l'ordre de renvoi du mardi 27 mars 2007, le comité étudie le projet de loi C-35, Loi modifiant le Code criminel (renversement du fardeau de la preuve relativement à la mise en liberté en cas d'infraction mettant en jeu une arme à feu).

[Traduction]

    Comme témoins, nous accueillons M. Tony Cannavino et M. David Griffin, respectivement président et directeur exécutif de l'Association canadienne des policiers.

[Français]

M. Yves Francoeur, président de la Fraternité des policiers et policières de la Communauté urbaine de Montréal — je doute que ladite communauté existe encore, mais peu importe —;

[Traduction]

    Dave Wilson, le président de la Toronto Police Association, ainsi que Daryl E. Tottenham, sergent au Service de police de Westminster.

[Français]

    Nous recevons aussi, de l'Association canadienne des chefs de police,

[Traduction]

    Madame Amanda Connolley.
    Nous avons deux exposés. M. Cannavino nous présentera le premier. Vous avez la parole, monsieur le président.

[Français]

    Monsieur le président, membres du comité, bonjour.
    J'aimerais vous présenter les collègues qui m'accompagnent et qui sont membres du conseil d'administration de l'Association canadienne des policiers. Il s'agit de M. Yves Francoeur, président de la Fraternité des policiers et policières de Montréal; M. Dave Wilson, président des policiers et policières de Toronto; M. Daryl Tottenham, président des policiers de la Colombie-Britannique. M'accompagne également le directeur exécutif de l'Association canadienne des policiers, M. David Griffin. Je vais commencer la présentation. Par la suite, mes collègues seront disponibles pour répondre à vos questions.
    L'Association canadienne des policiers est heureuse d'avoir l'occasion de présenter ses observations au Comité législatif chargé du projet de loi C-35, Loi modifiant le Code criminel (renversement du fardeau de la preuve relativement à la mise en liberté en cas d'infraction mettant en jeu une arme à feu).
    L'ACP est le porte-parole national de 56 000 membres du personnel policier à la grandeur du Canada. Par l'intermédiaire de nos 170 associations membres, l'effectif de l'ACP comprend du personnel oeuvrant dans les services policiers d'un bout à l'autre du pays, desservant tant les plus petits villages que les grandes agglomérations urbaines au sein de services policiers municipaux et provinciaux, ainsi que dans la GRC, la Police des chemins de fer et la Police des Premières Nations.
    L'Association canadienne des policiers est reconnue en tant que porte-parole national du personnel policier en matière de réforme du système de justice pénale au Canada. Notre but est de travailler de concert avec les représentants élus de tous les partis afin de réaliser d'importantes réformes qui assureront la sécurité de tous les Canadiens et Canadiennes, y compris ceux et celles qui ont fait serment de protéger nos collectivités.

  (1535)  

[Traduction]

    La violence urbaine suscite une préoccupation de premier ordre au sein de notre association. Depuis plus d'une décennie, les associations de policiers préconisent la réforme de notre système judiciaire canadien, réclamant plus particulièrement des changements qui appuieraient les dispositions sur la détermination de la peine, la détention et la libération conditionnelle des contrevenants violents.
    Les récidivistes sont un problème sérieux, sachez-le. Les policiers le comprennent intuitivement, ayant régulièrement affaire à ces chevaux de retour. Les chiffres rendus publics par la brigade des homicides de la police de Toronto pour l'année 2005 le montrent bien. Sur 32 personnes accusées de meurtre ou d'homicide involontaire en 2006, 14 étaient en liberté sous caution au moment de l'infraction, 13 étaient en probation et 17 faisaient l'objet d'une ordonnance d'interdiction visant les armes à feu.
    En novembre 2006, d'après les chiffres de la police de Toronto, tout près de 1 000 crimes avaient été commis avec des armes à feu ou des armes à autorisation restreinte, dont près de 40 p. 100 avaient été perpétrés par des criminels qui étaient libérés sous caution, en liberté conditionnelle, en semi-liberté ou en période de probation. Nous affirmons que le phénomène de portes tournantes du système judiciaire canadien ne permet pas de prévenir les activités criminelles par les criminels violents récidivistes.
    Pour lutter contre la violence commise avec une arme à feu, il faut une démarche non partisane. Faire cesser la violence des gangs dans les grandes villes canadiennes est l'une des préoccupations des policiers et policières à la grandeur du pays. Il faut commencer par faire disparaître le phénomène des portes tournantes dans le système judiciaire canadien.
    Les policiers et policières du Canada ont perdu confiance dans ce système qui, régulièrement, remet en complète liberté des contrevenants violents. Nous devons restaurer des conséquences significatives et des moyens de dissuasion convaincants dans notre système judiciaire, en commençant par des peines plus sévères, une véritable incarcération et des politiques plus rigoureuses au sujet de l'admissibilité des contrevenants violents à la libération conditionnelle.
    Nous devons protéger les Canadiens et les Canadiennes contre les contrevenants qui commettent un crime à l'aide d'une arme à feu ou de toute autre arme. Nous appuyons le projet de loi concernant le renversement du fardeau de la preuve pour les personnes inculpées de graves infractions impliquant une arme à feu ou une autre arme à autorisation restreinte.
    Tous les partis doivent appuyer les mesures plus sévères visant à juguler la violence liée aux armes à feu. Lors des dernières élections fédérales, les trois grands partis ont promis de punir plus sévèrement les crimes impliquant des armes à feu. Le NPD s'était engager à majorer la peine minimale obligatoire pour possession, vente ou importation d'armes à feu illégales, dont les armes de poing, les fusils d'assaut et les armes automatiques, et à ajouter des peines minimales obligatoires pour les autres infractions liées aux armes, notamment une peine minimale de quatre années d'emprisonnement pour les infractions liées aux armes, dont le port d'une arme dissimulée.
    L'ancien premier ministre Paul Martin a promis de déposer de nouveau un projet de loi visant à réprimer les crimes violents et la violence des gangs en doublant les peines minimales obligatoires pour les principaux crimes commis à l'aide d'une arme à feu.
    Le jeudi 23 novembre, le premier ministre Harper, le premier ministre de l'Ontario, Dalton McGuinty, et le maire de Toronto, David Miller, tenaient une conférence de presse conjointe à Toronto, dans le but d'annoncer un nouveau projet de loi fédéral visant à resserrer les conditions de cautionnement pour les crimes liés aux armes à feu.
    Le premier ministre McGuinty préconise depuis longtemps des mesures plus sévères pour lutter contre les crimes liés aux armes à feu. Le 29 décembre 2005, à la suite du décès de l'étudiante torontoise Jane Creba, survenu le lendemain de Noël, il faisait parvenir une lettre ouverte aux chefs fédéraux concernant les crimes avec arme à feu. Il y proposait de nombreuses initiatives en réponse aux préoccupations suscitées par les crimes commis à l'aide d'une arme à feu : imposer une interdiction des armes de poing; imposer une peine minimale obligatoire de quatre ans pour possession illégale d'une arme de poing; imposer une peine minimale obligatoire plus longue pour tout crime relié à une arme à feu; créer deux nouvelles infractions au Code criminel avec des peines minimales obligatoires pour le vol avec intention de dérober une arme et pour l'introduction par effraction avec l'intention de dérober une arme à feu; imposer le renversement du fardeau de la preuve pour la mise en liberté, pour toute infraction commise avec une arme à feu; imposer une peine plus lourde pour le non-respect des conditions reliées à la mise en liberté.
    Le premier ministre McGuinty mentionnait qu'il était en faveur du projet de loi concernant le renversement du fardeau de la preuve car « lorsque vous prenez une arme à feu et que vous commettez un crime, vous perdez votre droit à la liberté ».
    En janvier 2006, le procureur général de l'Ontario, Michael Bryant, communiquait la stratégie ontarienne de lutte contre les armes à feu, laquelle faisait appel au renversement du fardeau de la preuve pour les cautionnements.

  (1540)  

    Le maire de Toronto, David Miller, appuie cette nouvelle mesure législative « parce que les armes à feu sont différentes de toute autre chose. Les témoins doivent savoir que, s'ils aident les policiers à appréhender un criminel qui utilise une arme à feu, il leur sera possible de témoigner sans peur car le criminel restera incarcéré ».
    Le chef du Parti libéral, Stéphane Dion, a promis que son caucus « était prêt à offrir aux conservateurs les voix nécessaires pour qu'ils puissent adopter un texte de loi prévoyant l'inversion de la charge de la preuve, ce qui rendrait plus difficile l'obtention de la libération sous caution pour ceux qui ont commis des infractions relatives aux armes à feu ». La stratégie libérale de lutte contre la criminalité dévoilée le 14 mars 2007 fait mention de l'engagement de continuer « d'appuyer l'inversion du fardeau de la preuve lors des enquêtes sur cautionnement des personnes arrêtées pour des crimes reliés aux armes à feu ».
    Les Canadiens et Canadiennes sont à bon droit préoccupés par le fait que notre système de justice pénale ne fournit aucune réponse adéquate à l'égard des crimes commis avec une arme à feu. Ils comptent sur le Parlement pour que ces promesses soient rapidement tenues.
    La violence des gangs constitue un problème majeur dans nombre de nos grandes villes comme nous avons pu le constater récemment à Toronto. Mais ne vous méprenez pas : la violence urbaine n'est pas un problème exclusif à Toronto. Statistique Canada confirme que Regina, Winnipeg, Abbotsford, Edmonton, Saskatoon et Vancouver ont des taux d'homicide plus élevés que Toronto, depuis 10 ans.
    La tragédie survenue dernièrement au Collège Dawson de Montréal rend encore plus urgente la nécessité de resserrer les contrôles sur la possession d'armes à feu par des civils au Canada. À notre connaissance, aucune nouvelle arme à feu n'a été ajoutée à la liste des catégories d'armes prohibées ou à autorisation restreinte au Canada depuis plus de 10 ans. Pourtant, de nombreuses nouvelles armes, satisfaisant certainement aux critères associés à ces deux listes, sont en vente au Canada. Certaines armes sont donc vendues légalement au pays malgré le fait qu'elles cadrent avec les critères actuels relatifs aux armes à feu prohibées ou à autorisation restreinte et constituent une importante menace à la sécurité publique.
    Les détaillants d'armes à feu comprennent et exploitent ces échappatoires, comme le démontre l'annonce figurant sur le site Web de Wolverine Supplies que vous trouverez dans notre mémoire. Nous maintenons que d'autres mesures doivent être prises pour bloquer les échappatoires en mettant à jour les catégories d'armes à feu prohibées et à autorisation restreinte, tout en n'oubliant pas de le refaire périodiquement.

[Français]

    En conclusion, l'une des préoccupations des policières et policiers canadiens est de faire cesser la violence des gangs dans les villes du pays, et pour débuter, il faut cesser le phénomène des portes tournantes dans le système judiciaire canadien. Les policiers et policières du Canada ont perdu confiance dans un système qui libère régulièrement les contrevenants violents et les retournent libres dans nos rues.
     Le projet de loi C-35 constitue une approche pragmatique pour régler la question de la période de détention avant procès pour les prévenus accusés de crimes graves commis avec une arme à feu ou toute autre arme réglementée.
    De plus, nous devons restaurer des conséquences significatives et des moyens de dissuasion convaincants dans notre système judiciaire. Cette restauration débute par l'imposition de peines plus sévères, par du temps d'incarcération vraiment passé en prison, par des interventions et des programmes de réhabilitation plus significatifs et constructifs, et par des politiques plus rigoureuses d'admissibilité à la libération conditionnelle pour les contrevenants violents. Il nous faut des peines minimales plus sévères pour les contrevenants qui commettent un crime à l'aide d'une arme à feu ou de tout autre genre d'arme.
    Le projet de loi C-35 constitue une composante positive s'insérant dans une stratégie intégrée pour combler les lacunes actuelles, plus particulièrement en ce qui a trait aux préoccupations suscitées par la violence perpétrée avec une arme à feu. Nous demandons au Parlement de promptement procéder à l'adoption du projet loi C-35.

[Traduction]

    Merci de votre attention, et nous répondrons volontiers à vos questions. Merci.

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur Cannavino.

[Traduction]

    Nous passons maintenant à l'Association canadienne des chefs de police, qui est représentée par M. Peter Cuthbert, directeur exécutif, et aussi par Mme Connolley, qui en est la conseillère juridique.
    Madame Connolley, vous avez la parole.
    Bon après-midi, honorables membres du comité. Je suis Amanda Connolley et je comparais au nom du Comité de modification des lois de l'Association canadienne des chefs de police.
    Précisons que je suis ici aujourd'hui au nom de Vincent Westwick, ancien coprésident de notre comité. Il n'a pu venir pour des raisons de santé.
    L'Association canadienne des chefs de police représente 950 chefs, chefs adjoints et autres membres de la direction de plus de 130 services de police du pays. Elle vise à modifier les lois relatives à la criminalité et à la sécurité communautaire.
    C'est un honneur et un plaisir de vous parler aujourd'hui de cet important projet de loi, le projet de loi C-35, qui vise à renverser le fardeau de la preuve pour les audiences de libération sous caution des personnes inculpées d'infractions commises au moyen d'une arme à feu.
    L'Association canadienne des chefs de police appuie tout simplement le projet de loi C-35. Les dispositions sont raisonnables et soutenables. Il n'est pas déraisonnable ni indûment ardu pour un accusé qui a commis une infraction grave impliquant une arme à feu d'assumer le fardeau de la preuve avant d'être remis en liberté dans la collectivité où ledit crime a été commis.
    Plus important encore, ces dispositions sont conformes à la position déjà présentée au gouvernement par l'ACCP, notamment celles qui se rapportent au principe des conséquences significatives pour des crimes graves. Il doit y avoir une corrélation directe entre les deux, pour bien dissuader les criminels mais pour aussi pour rendre au public sa confiance dans l'efficacité du système judiciaire afin de contrer la criminalité. C'est aussi vrai pour le milieu policier.
    L'ACCP a aussi insisté sur la façon dont est discrédité le système judiciaire aux yeux des services policiers et des collectivités de tout le pays. Trop souvent, on nous dit que les gens sont frustrés, qu'ils sont déçus et qu'ils n'ont plus confiance dans le système. On dit aussi que le système judiciaire déçoit les Canadiens. Des dispositions comme celles du projet de loi C-35 pourront contrer cette tendance négative et rétablir la confiance du public dans le système judiciaire.
    De l'avis de l'ACCP, une stratégie efficace de lutte contre les crimes commis avec des armes à feu doit avoir de multiples volets et des programmes proactifs et préventifs, notamment des dispositions comme celles du projet de loi C-35, permettant un travail policier raisonnable et assurant la sécurité de la collectivité.
    Voilà qui termine mon discours liminaire. Je répondrai certainement aux questions des membres du comité.
    Je fais toutefois cette mise en garde : on m'a demandé à la dernière minute de remplacer M. Westwick et il est possible que je ne puisse vous répondre de manière complète. Je pourrai toutefois fournir des réponses par écrit ultérieurement, si je ne peux vous répondre de vive voix aujourd'hui. L'Association canadienne des chefs de police ne voulait pas manquer cette occasion de formuler des observations sur ce projet de loi important.
    Merci.

  (1545)  

[Français]

    Merci beaucoup.

[Traduction]

    Je rappelle à mes collègues que le premier tour sera de sept minutes, et le deuxième, de cinq minutes.
    Nous commençons par M. Bagnell.
    Avant de poser ma question, j'aimerais formuler un commentaire à l'intention de M. Cannavino. Merci beaucoup pour les statistiques sur les libérations sous caution; nous avons eu du mal à en obtenir et je vous en reparlerai plus tard.
    Madame Jennings, je tiens à dire aussi que j'ai apprécié votre remise de prix au plus courageux du pays. Nous apprécions le geste que vous avez posé. Nous apprécions aussi votre appui aux demandes du Parti libéral au sujet d'une enquête sur le scandale du régime de retraite.
    Ma première question s'adresse à tous les témoins. Y a-t-il une chose sur laquelle vous vous ne vous entendez pas?
    Il est du Yukon.
    Qui veut prendre la parole?
    Je pense que nous devrions être presque des membres du comité, puisque nous sommes si souvent ici. Nous nous sentons en famille.
    Je pense qu'il sera difficile de poser des question sur ce projet de loi, puisque toutes les parties intéressées s'entendent, tous les témoins aussi, à l'exception d'un, que nous avons entendu ce matin.
    Les faits ont prouvé qu'une personne incarcérée est généralement pire à sa sortie de prison, après avoir été formée par des criminels endurcis. Je ne pense pas que ce soit un environnement souhaitable pour eux, étant donné les gens avec qui on y vit. Disons qu'ils pourraient trouver de meilleurs mentors ailleurs.
    Je présume que les témoins en conviennent.
    Le problème, c'est que, dans la plupart des cas, s'ils ne passent pas suffisamment de temps en prison, ils n'ont pas accès à des programmes visant leur réinsertion. Ils apprennent vite à profiter du système. Quand on parle de « temps mort », s'ils passent un an en prison, ça leur est compté double ou triple. C'est une stratégie employée actuellement par les criminels ou par les avocats de la défense. Ils n'accélèrent pas la tenue du procès et l'accusé passe plus de temps en détention préventive avant la détermination de la peine, du temps qui compte en double et, en certains endroits, en triple. Mais pendant qu'ils sont incarcérés, il n'y a pas de programme de réadaptation; il n'y a rien. C'est pour ça qu'ils appellent ce temps du « temps mort ».
    Nous nous réjouissons qu'il y ait ici un consensus, mais à nos yeux, ce projet de loi est important et suscite ce consensus parce que nous parlons de criminels violents. Ce sont eux qui commettent les crimes les plus horribles. Si on les libère en attendant leur procès — je pense que c'est une erreur. Maintenant, ce sera à eux de prouver qu'ils peuvent être libérés.

  (1550)  

    Je comprends. Mais si on s'écarte un peu du projet de loi, vous conviendrez que les délinquants sont pires à leur sortie de prison, n'est-ce pas?
    Le problème, c'est qu'ils n'y restent pas suffisamment longtemps. C'est ce que nous disions. Quand on parle de peines minimales obligatoires, nous insistons notamment pour qu'elles soient imposées à des criminels violents, afin que ceux-ci passent suffisamment de temps en prison pour profiter des programmes de réhabilitation. Mais dans les faits, ce n'est pas ce qui se produit.
    Yves Francoeur, nous avons eu de bonnes statistiques de Tony. Nous avons bien du mal à en obtenir de nombreux autres témoins; le ministère n'avait pas les chiffres. C'est une honte que les législateurs étudient un projet de loi sans avoir accès à des statistiques.
    Pourriez-vous nous donner des statistiques pour les crimes commis à Montréal par des personnes en libération sous caution, et des chiffres pour des crimes commis avec des armes à feu?

[Français]

    Je n'ai pas apporté de statistiques sur Montréal parce qu'elles ne précisent pas le nombre de gens qui sont remis en liberté en attente de leur procès. Par contre, Montréal a probablement les meilleures statistiques au Canada. Des gens m'ont dit la semaine dernière que seules Montréal et Toronto avaient des statistiques exhaustives. Entre autres, à Montréal, dans la rue Saint-Laurent, depuis le 1er janvier 2005, on a saisi 28 armes de poing dont 11 étaient directement reliées aux gangs de rue, le reste étant attribuable au crime organisé.
    Si le projet de loi C-35 avait été en vigueur, Basil Parasiris, le meurtrier du policier de Laval Daniel Tessier, n'aurait jamais été remis en liberté en attente de son procès. On parle de Basil Parasiris, mais à Montréal, on est souvent confrontés aux gangs de rue. On les arrête dans des autos, ils sont trois, ils ont des armes de poing. Si par malheur on arrête un membre de gang de rue qui n'a pas de dossier criminel parce qu'il ne s'est jamais fait prendre, il ira en enquête sur remise en liberté au tribunal et il sera relâché.
    Ce projet de loi doit être adopté intégralement. Par contre, il faut considérer la question des armes à feu de façon globale. Il y a le projet de loi C-10 et le registre des armes à feu, qui seront probablement ramenés sur le tapis bientôt.
    J'ai une sensibilité particulière par rapport au dossier des armes à feu. Le 6 décembre 1989, à 16 h 40, je patrouillais le boulevard Décarie, à Montréal, quand j'ai reçu un appel me disant de me rendre à l'École Polytechnique. Malheureusement, nous sommes arrivés trop tard; il y avait 14 victimes. Pendant 12 heures, j'ai gardé une scène de crime à peu près grande comme cette salle où six étudiantes mortes étaient étendues sur le sol. On pouvait voir une échelle en métal sur le mur arrière, laquelle menait à un soupirail. Ces demoiselles avaient essayé de se sauver et il y avait des éclats de chair partout.
    On constate à Montréal et dans d'autres grandes villes l'apparition du phénomène des armes à feu. J'ai été patrouilleur à Montréal de 1987 à 1998. À l'époque, on saisissait très peu d'armes de poing. On saisissait des armes tronçonnées, des armes prohibées, parce que les armes de poing n'étaient pas accessibles. Présentement, n'importe qui peut obtenir une arme de poing. Je suis policier à Montréal et je peux vous emmener dans une réserve indienne, à Châteauguay, et vous y faire acheter un calibre 357 ou un calibre 9 mm.
    Le projet de loi C-35 est un premier pas dans la bonne direction, mais c'est vous, les décideurs actuels, qui pouvez faire en sorte que les générations futures, nos enfants et nos petits-enfants, pourront vivre dans une société sans armes à feu. S'il vous plaît, il est important, dans un premier temps, d'aller de l'avant avec ce projet de loi.
    Merci.

  (1555)  

    Merci, monsieur Francoeur.
    Monsieur le président, M. Daryl Tottenham peut présenter des statistiques de la Colombie-Britannique.

[Traduction]

    Oui, si vous voulez nous fournir des statistiques, n'hésitez pas.
    Heureusement, malgré un très court préavis, j'ai pu obtenir des chiffres pour le Lower Mainland de la Colombie-Britannique, soit essentiellement la région qui va de Vancouver jusqu'à la vallée du Fraser et à Hope. Ce n'est pas un très grand territoire de la Colombie-Britannique, mais il est densément peuplé.
    En 2006, il y a eu 20 homicides impliquant une arme à feu, et 83 autres incidents de tentative de meurtre ou de lésions corporelles causées par des armes à feu. Nous avons aussi 268 incidents confirmés d'appels au sujet de tirs d'arme, pour cette seule région.
    En 2006 toujours, les agents de la GRC et des forces municipales de cette région ont saisi 447 armes à feu dans le cadre de leurs fonctions, pour une période d'un an, dans la grande région de Vancouver, soit une moyenne de 1,25 arme à feu par jour.
    Pour les 268 appels relatifs à des tirs d'arme à feu confirmés, 29 se trouvaient dans des secteurs résidentiels et 222 dans des lieux publics. C'est époustouflant, quand on songe à la sécurité publique. Nous sommes appelés sur les lieux et nous constatons qu'un véhicule a été mitraillé dans un lieu public très ouvert, par exemple, en plein jour dans un stationnement, et évidemment beaucoup de civils étaient sur les lieux et certains ont été touchés. Il y a eu des décès.
    Juste avant de venir ici hier soir, j'ai pu obtenir une autre bribe d'information. J'ai pris un territoire, celui d'Abbotsford, dans la vallée. Il y a eu un nombre élevé d'incidents de violence de gangs, au cous des dernières années, dans ce secteur. J'ai communiqué avec un de nos membres dans ce secteur et j'ai dit que je cherchais des renseignements sur les armes à feu et les demandes de libération sous caution. J'avais l'embarras du choix, il n'était pas difficile d'en trouver un.
    On m'a donné des renseignements sur un dossier récent, relatif à un projet de deux ans portant sur divers membres de gangs connus, mêlés au trafic de stupéfiants et d'armes, assez haut placés dans la hiérarchie. Au point culminant du projet, on a arrêté deux des quatre cibles, qui avaient en leur possession un nombre important d'armes à feu automatiques et semi-automatiques, des kilos de cocaïne et des piles d'argent comptant.
    Ils ont été libérés sous caution. Il y a eu trois autres incidents où ils ont été libérés, arrêtés, libérés à nouveau, avec encore des fusillades et des armes à feu. En ce moment, ils sont encore en libération sous caution, pour ces mêmes accusations, malgré de multiples fusillades et arrestations au cours des six derniers mois.
    Merci beaucoup.
     Monsieur Ménard.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Cannavino, monsieur Francoeur, bonjour. J'ai quelques commentaires à faire. Monsieur Francoeur, je vous remercie pour votre témoignage et, surtout, de nous faire prendre conscience de la contradiction qui existe dans le fait qu'un gouvernement veuille avoir des sentences plus sévères, mais ne se préoccupe pas de la libre circulation des armes. Vous n'aurez pas à déployer beaucoup d'énergie pour convaincre plusieurs d'entre nous.
    La mesure la plus importante pour contrer la criminalité m'apparaît de deux ordres. D'abord, le registre des armes à feu. Si j'étais nommé ministre de la Justice ou de la Sécurité publique, la première chose que je ferais serait de revoir les libérations conditionnelles. Je ne crois pas que ce projet de loi aura beaucoup de vertus par rapport au phénomène que vous décrivez.
    Monsieur Cannavino, cela vous fera plaisir de savoir que l'Association des avocats et avocates de la défense est d'accord sur le projet de loi. Elle nous a dit — voyez comme le bon Dieu est bon! — que dans la pratique, les magistrats, les juges de paix et les juges ne libéraient pas les gens qui avaient commis des infractions avec des armes à feu. Évidemment, chacun peut avoir sa propre idée là-dessus. J'ai déposé une motion sur les gangs de rue et j'espère que mes collègues du côté du gouvernement, dans un grand moment d'amitié trop peu commun depuis quelques années à ce comité, l'adopteront jeudi matin.
    Monsieur Cannavino, vous avez accompagné les parlementaires lors de leur étude des projets de loi C-84, C-24 et C-36. Vous savez combien, au Bloc québécois et ailleurs, on est préoccupés par le phénomène du gangstérisme et des gangs de rue. Des gens de Montréal et de Toronto, particulièrement votre collègue M. Robinette de Montréal, nous ont dit que le drive-by shooting n'était pas couvert par la définition d'organisation criminelle du Code criminel. Ne devrions-nous pas l'inclure dès maintenant? Lorsqu'on intercepte des gens, le drive-by shooting ne permet pas de prouver leur appartenance à un gang de rue et de porter des accusations. Bien sûr, on peut le faire pour un homicide et d'autres types d'infractions, mais c'est plus intéressant de le faire pour le gangstérisme, parce que cela retarde la libération conditionnelle, et les peines sont plus sévères.
    Si on doit choisir entre un projet de loi comme le C-35, qui nous apparaît consacrer une pratique qui existe déjà, et ne pas être plus vigilant par rapport au registre des armes à feu et ne pas changer la définition du Code criminel concernant les organisations criminelles, je souhaiterais qu'on bouge là-dessus.
    Je céderai ensuite la parole à votre collègue M. Francoeur, à vous-même ou à tout autre témoin qui voudra s'exprimer, mais je vous dirai d'abord que je trouve aberrant que le système actuel prévoie qu'on puisse purger le sixième de sa peine. Je peux comprendre le tiers. Toutefois, le phénomène des portes tournantes que vous décrivez ne m'apparaît pas tellement apparenté au projet de loi C-35, mais au fait qu'on peut purger six mois de prison pour une peine... Certains crimes admissibles au sixième de la peine sont pas mal plus graves que ceux-là. Le trafic d'armes, c'est préoccupant. Il y a des gens admissibles au sixième de la peine qui sont, à mon point de vue, beaucoup plus dangereux pour la société.
    J'aurais souhaité qu'on revoie la question du sixième de la peine et qu'on amende le Code criminel pour changer la définition d'organisation criminelle beaucoup plus que la mise en liberté par voie judiciaire pour des questions d'armes à feu, qui est une réalité à toutes fins pratiques consacrée, à en croire les gens qui oeuvrent sur le terrain.

  (1600)  

    Monsieur Cannavino, s'il vous plaît, répondez aux questions sur le projet de loi C-35.
    Oui.
    Monsieur le président, si vous voulez dire que je ne parle pas du sujet à l'étude, c'est raté. M. Cannavino est un homme ayant une culture générale, et je sais qu'il va faire les liens.
    Merci beaucoup, monsieur Ménard. J'apprécie ces compliments. Je devrais acheter des billets de loterie 6/49 aujourd'hui. Si je m'entends avec des avocats de la défense, je suis certain que je vais gagner le gros lot.
    Vous êtes sous une bonne étoile.
    Tout ça pour vous dire que sur des sujets importants comme le projet de loi C-35, nous avons tenu un bon nombre de discussions au sein de notre organisation, l'ACP. Dans le conseil de direction à lui seul, on compte 30 personnes provenant de toutes les régions du Canada. Nous avons essayé de trouver des solutions à vous présenter, à vous les législateurs, à savoir quelle serait la meilleure façon de combattre le crime et les criminels violents.
    Nous voulons trouver un moyen particulier de nous adresser aux criminels violents parce que nous faisons une distinction dans leur cas. Malheureusement, on n'a pas trouvé de panacée ou de solution qui engloberait tout. Ces dossiers vont vous demander beaucoup d'énergie, ainsi qu'à nous. Ils demandent des approches diverses. Il va falloir plus d'un projet de loi ou un seul qui comporte différentes facettes.
    Vous me parliez plus tôt des gangs de rue et des organisations criminelles. Le problème est que les corps policiers doivent en plus prouver que l'individu fait partie d'une organisation criminelle. Vous savez que faire la preuve de cela n'est pas toujours évident. Je me souviens de l'époque où je commençais à enquêter sur les Hells Angels. C'était facile : ils étaient tellement imbéciles qu'ils portaient leur emblème dans le dos et commettaient des crimes. On les photographiait, et tout était réglé. À un moment donné, ils se sont assagis et ont semblé changer d'approche. Lorsqu'ils se sont tous retrouvés en prison, ils se sont dit qu'ils n'avaient pas procédé de façon brillante. Ils ont donc changé leurs techniques et leur approche.
    Dans le cas des criminels violents, que doit-on faire? Vous avez parlé des frontières, et je suis entièrement d'accord avec vous à ce sujet. Nous disons depuis longtemps qu'il faudrait renforcer et protéger nos frontières. Il va falloir également protéger les ports. Par ailleurs, les organisations criminelles recrutent des jeunes et des individus qui ne font pas partie de ce genre d'organisations, mais qui commettent des crimes pour elles au moyen d'armes à feu. Les choses vont peut-être changer si ces gens apprennent que pour avoir commis un crime au moyen d'une arme à feu, la première chose qui va leur incomber va être de démontrer qu'ils ne sont pas des individus violents, sous peine d'être incarcérés, que des sentences minimales supérieures à celles qui s'appliquent présentement vont être imposées et que le principe du deux pour un ou du trois pour un va être aboli.
    Monsieur le président, j'établis ici un lien avec le projet de loi. On a annoncé une révision du système canadien des libérations conditionnelles, et nous allons intervenir très activement.  Pourquoi? On veut que la libération conditionnelle ne soit pas systématique, mais qu'elle se mérite. On veut rendre la tâche difficile à ceux qui ont commis un crime violent en leur laissant la responsabilité de prouver qu'ils ne sont pas des individus violents. On veut qu'ils comprennent qu'une fois rendus en prison, ils vont y rester longtemps, qu'ils vont devoir participer à des programmes de réhabilitation pour mériter une libération conditionnelle et qu'en plus, ils ne seront pas libérés après avoir purgé le sixième de leur peine. En effet, il s'agit là d'une pratique aberrante.
    Il faudra également inclure dans la liste des crimes l'importation et le trafic de stupéfiants. Ce crime, qui n'est supposément pas violent, cause par contre énormément de violence. Il est temps que l'on se penche sur ce problème de la bonne façon.
    C'est dans ce sens, monsieur le président, que je trouve ce projet de loi important.

  (1605)  

    Merci.

[Traduction]

    Je vais demander si l'Association des chefs de police a des commentaires à formuler.
    Monsieur Cuthbert.
    Je vous dirai d'emblée qu'une personne qui se sert d'une arme à feu pour commettre un acte criminel est bien différente des autres, et doit être traitée différemment, et le renversement du fardeau de la preuve... Quelqu'un qui entre armé dans un dépanneur et menace la vie d'un autre est bien différent de celui qui fait du vol à l'étalage. Le simple voleur est libéré, promet de comparaître, entre et ressort rapidement du système, puis doit se présenter devant les tribunaux. Mais celui qui est délibérément armé et qui ose entrer dans un commerce ou une habitation dans l'intention de s'en servir pour commettre un acte criminel doit être traité différemment des autres contrevenants.
    En outre, insistons sur le fait que ce contrevenant, s'il ne peut pas donner de raison de le libérer, pourra être évalué par les tribunaux et s'il est condamné, des programmes appropriés et un classement qui lui convienne seront choisis.
    Merci, monsieur Cuthbert.
    Monsieur Comartin, vous avez la parole.
    J'allais céder ma place, mais je vais poser une question. MM. Cannavino ou Wilson pourront peut-être y répondre.
    À la comparution du professeur Doob, ce matin, on a contesté la pertinence du chiffre que vous donnez souvent, soit que 40 p. 100 des actes criminels sont commis par des contrevenants en libération sous caution, en libération conditionnelle, en absence temporaire ou en probation. Je ne vais pas vous demander, monsieur Wilson, de nous parler des 1 000 actes criminels commis à Toronto, mais vous pourrez sans doute faire ce qui suit. Des 32 personnes accusées d'homicide involontaire et de meurtre en 2006, vous dites que 14 étaient en libération sous caution et 13, en probation. Pourriez-vous vous renseigner et dire au comité de quoi avaient été accusés ceux qui étaient en libération sous caution et de quoi avaient été reconnus coupables ceux qui étaient en probation? Je présume que vous ne pouvez pas me répondre tout de suite.
    À moins que Tony vous tire ces chiffres de son chapeau, moi, je ne peux pas vous répondre tout de suite.
    Ce n'est pas ainsi qu'il se sert des statistiques, monsieur Wilson.
    J'obtiendrai volontiers ce renseignement et je vous le transmettrai.
    Vous pouvez le transmettre au greffier du comité, merci.
    Je n'ai pas d'autres questions, monsieur le président.
    Monsieur Hanger, c'est à vous.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, madame et messieurs, de comparaître devant le comité.
    Je m'intéresse toujours aux propos des policiers. Je sais que les associations de policiers ne s'entendent pas toujours sur tout. Il y a des divergences régionales et des points de vue différents, d'une région à l'autre du pays. Malgré cela, nous pouvons constater facilement que vous êtes tout à fait en faveur de ce projet de loi.
    La plupart des arguments que le comité entend traduisent une réalité urbaine, mais il peut y avoir une différence pour les régions rurales. Il y a des fusillades dans les régions rurales, comme dans les centres urbains.
    Vous donnez des statistiques à la page 6, monsieur Cannavino, qui suscitent ma curiosité. Ainsi, quand vous parlez de 32 personnes accusées de meurtre ou d'homicide en 2006, dont 14 étaient en libération conditionnelle quand elles ont perpétré l'infraction, est-ce que vous laissez entendre que, dans chaque cas, une arme à feu était impliquée?

  (1610)  

    Je vais vérifier.
    Vous ne le savez pas, donc.
    C'est la question que M. Comartin avait posée, et nous vous fournirons les renseignements.
    Toutes mes excuses, je n'étais peut-être pas attentif quand M. Comartin a posé sa question.
    Revenons à ces arrestations et à ce projet de loi. Combien de contrevenants seront à votre avis touchés par un tel projet de loi?
    À mon avis, ils le seront tous, pour une raison. Actuellement, c'est au procureur de faire la preuve et aux policiers de prouver que ces contrevenants sont dangereux. Rappelons qu'un policier a été tué par balle à Brossard, il y a environ deux semaines. C'est un exemple de meurtre d'un policier. Or, le contrevenant est en libération sous caution, en attente de son procès.
    Cela signifie que, pour chaque acte criminel violent ou pas commis avec une arme à feu, ce régime sera imposé.
    À votre avis, dans ce projet de loi, qui est visé par le renversement de la preuve?
    Il ne ciblera pas —
    Donnez-moi des exemples.
    — tous les gangs de rue, par exemple. Vous savez comment fonctionnent les gangs de rue. Elles recrutent des personnes pour faire le sale travail. Eux aussi seront visés. Ce sera pour tous les crimes, tous les crimes avec violence commis avec une arme à feu.
    Il s'agit de personnes et vous voulez —
    Il y a le crime organisé. Il y a aussi la nécessité de prouver que cette personne fait partie d'une organisation criminelle. Avec un projet de loi comme celui-ci, la preuve incombe à l'accusé. Peu importe qu'elle fasse partie d'une organisation criminelle. Voilà pourquoi, pour nous, cet élément est si important.
    Monsieur, vous avez parlé de l'École polytechnique et de M. Lépine, si je me souviens bien de son nom, soit le responsable de cette tuerie. Il est très difficile d'évaluer quelqu'un comme lui, à moins qu'il ait fait l'objet d'un examen.
    Nous avons parlé du crime organisé. Nous savons sa propension à recourir à des armes à feu. Nous savons que le crime organisé est mêlé aux fusillades en voiture, aux fusillades en bande, au trafic des stupéfiants, etc. Nous le savons.
    Il y a un autre élément, associé à des motivations différentes, pour le recours aux armes à feu. Nous parlons d'une autre classe de gens, comme le disait M. Cuthbert. Celui qui vole dans un commerce, c'est une chose, mais nous parlons ici d'une autre catégorie de contrevenants.
    Je sais qu'il est difficile d'établir le lien entre ce projet de loi et un homme comme Lépine, qui est sujet à la colère et aux représailles. Mais quel lien peut-on faire avec ce projet de loi?

  (1615)  

    Pour commencer, dans ces cas-là, c'est de prévention qu'il faut parler, particulièrement dans le filtrage des propriétaires éventuels d'armes à feu. Il ne s'agit pas seulement d'appliquer ce filtrage au moment de l'achat des armes à feu, comme c'est le cas actuellement. Que peut-on faire 10 ans ou 5 ans plus tard, ou au moment d'une rupture conjugale ou d'une crise familiale?
    Nous considérons qu'un des éléments essentiels du programme actuel de contrôle des armes à feu doit être une évaluation continue des propriétaires d'armes à feu, ainsi que la possibilité pour ceux qui vivent ou travaillent avec eux de communiquer tout problème au moyen d'une ligne d'urgence, en cas de menaces, par exemple. Il peut s'agir aussi d'un problème de santé mentale qui suscite des craintes, à cause de la présence d'armes à feu au domicile. Peut-être aussi que le propriétaire des armes à feu s'est comporté d'une manière inhabituelle, ce qui peut aussi susciter des craintes. Il faut avoir ce genre de freins et contrepoids.
    Il est vrai que nous ne pourrons pas prévenir ou solutionner chacun de ces types de tragédies. Mais il serait certes crucial que des renseignements à jour puissent être obtenus sur les armes à feu et leurs propriétaires, d'une manière non intrusive mais permettant une vérification policière.
    Y a-t-il d'autres commentaires?
    Vous avez la parole, monsieur Tottenham.
    Vous demandiez quel rôle pourrait jouer ce projet de loi, et j'ai un dossier ici dont je peux vous laisser des copies. C'est un exemple qui montre bien la valeur de cette mesure législative.
    Dans ce cas-ci, au moment des arrestations, les deux contrevenants auraient été maintenus sous garde s'il y avait eu renversement du fardeau de la preuve. Faute de cela, il y a eu cinq fusillades. Une personne a reçu neuf balles, pour 20 coups de feu, dans un centre commercial ouvert. Dans un autre cas, 15 coups ont été tirés, et un enfant de 10 ans a été touché par des grenailles. Dans un autre, une personne a été touchée et est presque morte sur les lieux. Un certain nombre de coups ont été tirés, 12 à 15, dans le stationnement d'un centre commercial. Tout cela, même le dernier incident, aurait été évité si ce projet de loi avait déjà été adopté et si ces contrevenants avaient été maintenus sous garde au départ.
    C'était il y a deux ans, et le procès n'a toujours pas eu lieu. Il serait toujours en prison, en attente du procès, et on aurait évité tout cela. Ce n'est qu'un exemple de conséquence prouvant la valeur du projet de loi. On empêche ces criminels de tuer ou blesser d'autres citoyens, ce qui est, je pense, très important.
    Oui, monsieur Wilson.
    En ce qui concerne la sécurité publique, les contrevenants qui se servent d'armes à feu jouent à la roulette russe avec la vie de citoyens innocents. Ils ont choisi de porter une arme. Une fois ce choix fait, ils ont décidé de se servir de leur arme. Un projet comme celui-ci est indispensable pour lutter non seulement contre les gangs, mais aussi contre l'ensemble des criminels qui sont prêts à jouer à la roulette russe avec la vie d'autrui. Voilà pourquoi ce projet de loi est si important.
    Merci.
    Nous passons à Mme Jennings.

[Français]

     Je vous remercie beaucoup pour vos présentations.
    Je dois avouer que j'aime le projet de loi C-35, même si ce n'est pas parce que je crois qu'il va amener de véritables changements à la sécurité publique des communautés et des Canadiens et Canadiennes. En effet, selon toutes les informations que nous avons reçues, la pratique veut normalement que dans le cas d'un individu accusé d'un acte criminel grave mettant en jeu une arme à feu, le juge considère la chose comme un fait aggravant. Dans de tels cas, l'accusé risque d'être gardé en prison en attendant son procès.
    Ce que j'aime dans ce projet de loi, c'est qu'au moment où l'accusé va rencontrer son représentant, son conseiller juridique ou son avocat, celui-ci ne lui dira pas, dans le cadre de l'enquête sur le cautionnement, que c'est à la Couronne qu'incombe la responsabilité de prouver hors de tout doute raisonnable qu'il constitue une menace et doit par conséquent être gardé en prison jusqu'à son procès. L'avocat va devoir dire à son client que c'est à lui de faire la preuve qu'il peut être remis en liberté. C'est là un changement de philosophie majeur. Celui-ci risque de frapper beaucoup plus les accusés que le processus actuel. À l'heure actuelle, l'accusé peut se délester du fardeau de la preuve, qui est malgré tout assez substantiel.
     J'ai lu le mémoire de l'Association canadienne des policiers. Une chose m'a réellement frappée, et c'est à la page 10 de la section intitulée « Le système judiciaire canadien a besoin d'un remaniement majeur ». Vous y dites ceci :
Nous maintenons qu’il est grand temps de réformer notre système de justice pénale. Une révision indépendante des systèmes de détermination des peines, des services correctionnels et des libérations conditionnelles, demeure une priorité primordiale pour l’Association canadienne des policiers.
    J'aimerais savoir si vous éprouvez une certaine frustration en voyant qu'au lieu de procéder à une telle réforme et de déployer des efforts pour tenir une enquête publique approfondie, autant sur le système de détermination de la peine, que sur le système correctionnel ou le système de libération conditionnelle, on se limite à de petites mesures ici et là.

  (1620)  

    Merci, monsieur le président.
    Madame Jennings, premièrement, en ce qui a trait à votre préambule, oui, on croirait que dans toute situation où il y a eu violence, le juge prendrait en considération ces faits et garderait l'accusé en détention. Ce n'est pas le cas. Un des exemples les plus criants est l'assassinat d'un de nos collègues à Brossard, où tout le monde est renversé de la décision. Quoi qu'il en soit, les procédures seront suivies. C'est un exemple flagrant où quelqu'un qui a tué est libéré en attendant son procès alors qu'on prétend déjà qu'il y a eu légitime défense. Laissons aux tribunaux le soin de trancher cette question! Qu'y a-t-il de plus violent qu'un assassinat? C'est un exemple, mais il y en a d'autres, qui sont moins connus parce qu'ils ne touchent un policier. Il y a de tels cas.
    L'autre question dont vous avez parlé est celle de la responsabilité. Il appartient à la personne qui a commis un crime violent de démontrer qu'elle peut être relâchée. C'est pourquoi nous disons que ce projet de loi s'inscrit dans une suite logique visant à envoyer un message clair : si vous voulez jouer ce genre de jeu, mettre en danger la sécurité de nos citoyens, vous allez en subir les conséquences.
    On a demandé depuis des années une révision du système correctionnel canadien, des libérations conditionnelles et de la détermination des peines. La semaine dernière, le ministre Stockwell Day a annoncé la révision du système correctionnel en mettant sur pied un comité appelé blue-ribbon panel. Le blue-ribbon panel aura un mandat.
    Nous serons très actifs, nous nous y ferons entendre, c'est certain. Je pense qu'il faut revoir l'ensemble des politiques, et non seulement des lois, le Code criminel. Il faut également revoir les politiques internes du système carcéral canadien, où il y a énormément d'aberrations quant à la façon dont on traite les détenus à l'intérieur des institutions.
    Les gens du Québec se rappelleront toujours du cas Conrad Brassard. Comment traite-t-on un psychopathe pour lequel un diagnostic a décrété que les chances de récidive étaient de 100 p. 100 et qui, à trois occasions, a commis des crimes, des agressions sexuelles, et tué de pauvres victimes? Il y a des aberrations là-dedans. Comment se fait-il qu'un individu considéré comme étant dangereux et incarcéré dans un pénitencier à sécurité maximum ait été transféré, en l'espace de quelques mois, dans une prison à sécurité moyenne, pour ensuite se retrouver dans une maison de transition? Cette personne n'a même pas purgé le tiers de sa sentence, n'a même pas suivi un programme de réhabilitation.
    Cela fait aussi partie du coffre d'outils. Je me plais à dire que j'ai besoin d'un coffre d'outils. Ceux qui me connaissent savent que je ne suis pas très bricoleur, mais j'ai besoin d'un coffre d'outils bien rempli pour composer avec les criminels. Il nous faut cela.

  (1625)  

    La partie manquante dans ce que vous avez recommandé, et pour laquelle vous vous battez depuis longtemps, c'est la partie portant sur la détermination de la peine?
    C'est la raison, madame Jennings, comme je le disais plus tôt, pour laquelle je viens ici tellement régulièrement depuis quelque temps. J'ai l'impression que nous faisons partie d'une équipe ou d'une famille.
    Étant donné qu'il y a différents projets de loi, si on suit un fil d'Ariane, l'objectif que l'on vise est fort clair: quelqu'un qui commet un crime sérieux en subira les conséquences. Il saura dès le départ que s'il se dirige dans cette voie, il n'y aura pas d'avocat de la défense expérimenté et magicien qui pourra le faire libérer facilement. S'il veut s'engager là-dedans, il y aura des conséquences.
    M. Ménard a soulevé un point. À l'époque, je m'en souviens, je faisais partie de la répression du banditisme au sein de l'escouade qui est devenue l'escouade Carcajou. On était aux prises avec les Hells Angels qui contrôlaient littéralement le quotidien des citoyens du Québec. Les gens pensaient qu'au Québec, les policiers et le gouvernement avaient lancé la serviette, qu'ils n'étaient pas capables de traiter ce dossier. Il a fallu une loi ayant du mordant, la Loi antigang, qu'on a exploitée au maximum parce que ces gens, à ce moment-là, n'avaient pas vécu devant les tribunaux les conséquences de la Loi antigang, ce qui nous a servi: on les a incarcérés pour longtemps.
    Mais les causes sont de plus en plus difficiles maintenant parce qu'ils exploitent le système, identifient les failles, poussent au maximum. C'est pourquoi, projet de loi après projet de loi, vous nous voyez ici répéter et enfoncer le même clou afin de vous demander de nous donner un coup de main. Il faudra plusieurs projets de loi.
    Merci, monsieur Cannavino.
    Nous passons maintenant à M. Petit, s'il vous plaît.
    Bonjour, messieurs. C'est vrai qu'on se voit régulièrement. Nous ne sommes pas une famille, mais nous sommes une bonne équipe.
    Nous sommes des petits cousins québécois.
    Oui, en effet.
    Je m'adresse précisément à vous, monsieur Cannavino.
    Lors de la présentation du projet de loi C-35, je me suis posé des questions. Comme vous l'avez mentionné tout à l'heure, actuellement, lorsqu'un individu est arrêté par la police, l'avocat se présente avec son client, et la Couronne se doit de démontrer qu'il y a dangerosité pour que le juge ne remette pas le prévenu en liberté. Naturellement, lorsqu'il s'agit d'un individu qui n'a aucun dossier judiciaire, même si vous avez des renseignements, ceux-ci ne peuvent pas vous servir pour demander qu'on garde l'individu en détention. Vous n'avez pas le droit de le faire, et la Couronne et le juge ne vous le permettront pas non plus.
    Je veux être sûr d'être bien compris. Dans le projet de loi C-35, on ajoute une douzaine d'infractions graves. On ne parle pas d'infractions mineures qui pourraient créer un trouble en disant qu'il faudrait chaque fois faire une preuve à l'inverse, qu'on appelle un renversement de preuve. Je comprends que la question que je vais vous poser, monsieur Cannavino, relève peut-être de la philosophie, mais elle est importante.
    Plusieurs gens, des personnes âgées, sont stationnaires devant la télévision à regarder des émissions à TVA, Radio-Canada, TQS ou sur une autre chaîne où tous les soirs, on montre quelqu'un qui s'est fait tirer dans la rue. Pour avoir travaillé dans ce domaine, je sais que le problème n'est pas la sécurité, mais le sentiment de sécurité. Cela ne vaut pas seulement pour les personnes âgées. Il peut s'agir de personnes de 50 ans qui ont peur; il y a des gens de 20 ans qui ont déjà peur.
    Le projet de loi C-35 fera en sorte que les gens seront amenés devant un juge et, comme Mme Jennings l'a mentionné tout à l'heure, ils devront faire la preuve qu'ils sont aptes à être remis en liberté. Est-ce que le fait de voir que l'individu n'est pas libéré immédiatement aura un effet sur le sentiment de sécurité des gens? La Couronne peut remettre le procès dans trois jours, comme on le fait présentement, et il peut y avoir un arrangement avec la Couronne sur divers points pour libérer l'individu.
    Est-ce que le fait qu'on ne libérera pas immédiatement l'individu, en vertu du projet de loi C-35 — je ne veux pas dire qu'il est coupable —, pourrait créer un sentiment de sécurité? J'appelle ça de la philosophie; vous en avez parlé tout à l'heure. Je ne veux pas parler du cas que vous avez cité où un de vos policiers a été tué, mais je l'ai vu à la télévision. On a tous été sonnés. Même moi, comme avocat de la défense, j'ai été surpris. Je voudrais savoir si le projet de loi C-35 répondrait à l'élément sécurité. La loi, c'est une chose; l'élément sécurité, c'est autre chose.

  (1630)  

    Vous touchez un excellent point en soulevant la question du sentiment de sécurité. Je dois vous dire que dans le cas présent, ça va un peu plus loin. Au fil de l'application de cette future loi, en plus de créer un sentiment de sécurité... Vous savez qu'il y a actuellement toute la question des pressions exercées dans certains quartiers, l'intimidation, etc. On demande la collaboration des citoyens pour dénoncer ces individus qui les menacent et les agressent. Malheureusement, on peut difficilement les convaincre de ne pas s'inquiéter, parce qu'on voit quotidiennement des agresseurs qui peu de temps après retrouvent leur victime dans une rue du même quartier et se moquent d'elle, font des menaces. Il y a donc une intimidation assez forte.
    Quand on parle du fardeau de la preuve, le mot « fardeau » est significatif. On ne peut pas démontrer facilement qu'on n'est pas dangereux. Ce n'est pas évident pour la Couronne de démontrer qu'un individu est dangereux. Alors, si le fardeau de la preuve revient à la personne qui a commis un crime haineux ou violent, il y a de fortes chances qu'elle soit détenue, ce qui va sécuriser les citoyens de plus en plus, car ils se diront que s'ils dénoncent une personne, cette dernière ne sera pas remise en liberté avant la tenue de son procès, qu'il y a des chances qu'elle soit emprisonnée pour un bout de temps. Les gens se diront qu'ils ont fait leur travail et qu'ils s'en sont débarrassé.
    Voilà quelles seront les conséquences de l'adoption de ce projet de loi. Je pense que c'est la pierre angulaire qui fait en sorte que vous traitez les individus violents très différemment d'une personne qui aurait peut-être commis un vol à l'étalage dans un magasin, par exemple, bien que je ne veuille pas banaliser les vols à l'étalage. On fait toutefois une différence entre les gens qui menacent des citoyens et ceux qui commettent un vol à l'étalage.
    Merci.
     Madame Freeman.
    D'abord, je vous remercie tous d'être présents aujourd'hui. C'est vraiment très intéressant.
    Depuis que nous étudions le projet de loi C-35, un seul témoin parmi ceux que nous avons entendus a émis un bémol; c'était ce matin. Tous y étaient favorables, sauf un. L'une des raisons pour lesquelles il était plus ou moins en faveur de l'application de ce projet de loi était que, selon lui, de facto la plupart des personnes qui commettent des infractions avec des armes à feu sont déjà incarcérées.
    J'aimerais savoir si vous avez des statistiques à cet effet. Vous en avez de Toronto et de Montréal. J'aimerais savoir quelle proportion de ces criminels est incarcérée en vertu des lois existantes. Nous étudions ce projet de loi, nous comprenons, sur le plan philosophique, la portée de ce que vous voulez nous faire comprendre, mais avez-vous des données à nous fournir?
    Comme le disaient mes collègues de Montréal et de Toronto tout à l'heure —
    Il serait bien que nous ayons des informations. Nous ne sommes pas capables de les obtenir ailleurs correctement. On en a eu de Statistique Canada, mais cela ne nous a pas éclairés beaucoup.
    La raison pour laquelle j'ai le plaisir d'être accompagné de mes collègues de Vancouver, Toronto et Montréal est que nous voulions vous démontrer un peu comment les choses se passent dans ces villes et dans ces régions. On peut tenter de vous donner des statistiques. On pourrait vous les faire parvenir.
    Ce serait extrêmement intéressant et important pour le comité. Jusqu'ici, on revient toujours là-dessus, et personne n'est capable de nous fournir des statistiques, pas plus Statistique Canada que d'autres. Si vous étiez capables de nous alimenter un peu, cela nous aiderait.

  (1635)  

    Depuis quelques années, on collige de plus en plus d'informations.
    Tout à l'heure, vous parliez de l'impact des révisions, entre autres, du système carcéral et des libérations conditionnelles. Vous parliez aussi du projet de loi et du jour où le temps ne comptera plus en double. S'il n'y avait que cela, on aurait des problèmes.
    Oui.
    Mais cela fait partie d'une suite logique. On sait qu'on va se rendre à un point où ils n'engorgeront plus les tribunaux, il n'y aura plus de sempiternelles remises de procès. Pourquoi? Parce qu'ils ne gagneront pas à rester derrière les barreaux avant le prononcé de leur sentence. Ils vont être incarcérés, le temps purgé avant le prononcé de la sentence ne comptera plus en double.
    Selon vous, cela aura pour conséquence de désengorger le système.
    Ce sera beaucoup plus expéditif. Il n'y aura pas d'accumulation de causes et de procès pro forma.
    D'accord.
    Je voudrais poser une question à M. Francoeur. D'abord, je vous remercie de votre témoignage. Étant donné que je suis de la région de Montréal, pour moi aussi le drame de l'École Polytechnique a été —
    Dans votre allocution, vous avez mentionné qu'il y avait une libre circulation des armes, qu'il était possible de s'en procurer. Vous avez parlé de Châteauguay et de Kanawake, qui sont des municipalités situées dans ma circonscription. Il semble qu'on peut aller y chercher des armes facilement. Étant donné qu'on est en train de parler des crimes commis avec des armes à feu, pouvez-vous nous parler du problème du libre accès à des armes à feu? Tout cela s'inscrit bien dans l'étude du projet de loi C-35. Il y a une logique dans tout cela. Il faut être logique et cohérent. Quand on veut faire des lois semblables et qu'on ne se préoccupe plus du registre des armes à feu, selon moi, il n'y a pas de logique. On en est rendu à la circulation des armes. Pouvez-vous me parler de ce qui se passe?
    C'est très connu dans le milieu policier. Elles entrent par Châteauguay. La plus grande réserve indienne par où elles entrent, c'est Akwesasne. C'est connu de réputation, effectivement. Si vous êtes dans la région de Châteauguay, vous savez que les policiers de la Sûreté du Québec n'interviennent pas de leur propre chef, c'est-à-dire que s'ils reçoivent un appel ou s'ils ont un doute, ils demandent au conseil de bande s'ils peuvent se rendre à une telle adresse. C'est ainsi que ça fonctionne.
     C'est pour cela qu'on vous dit que le projet de loi C-35 fait partie d'un ensemble de mesures. Il y a aussi le resserrement des frontières. J'aimerais en parler, mais je ne veux pas déraper.
     Comme Tony l'a mentionné tout à l'heure, ce sont des statistiques que nous n'avons pas précisément à Montréal parce qu'il n'y a pas de relevés statistiques. Il y a de nombreuses statistiques sur presque tout, mais pas sur le nombre de crimes commis par des gens qui sont en liberté.
    Un sergent-détective qui travaille chez nous m'a dit qu'il était à l'escouade de renseignements dans le cadre d'un programme fédéral payé par le fédéral. Il supervise 18 policiers au Québec dans le dossier des armes à feu. Dernièrement, ils ont saisi trois armes à feu à Montréal, ou au Québec, qui provenaient de la même adresse au Wisconsin. Lorsqu'ils s'en sont rendu compte, ils ont demandé aux policiers américains d'intervenir. Ils se sont rendus à l'adresse de l'individu au Wisconsin pour le rencontrer. Il s'agissait d'un camionneur qui traversait à Vancouver une fois par semaine. Aux États-Unis, les gens sont obligés d'enregistrer leurs armes à feu, mais ils ne sont pas obligés de renouveler leur permis. Cet homme avait 750 armes à feu enregistrées à son nom, toutes des armes de poing. L'enquête a permis d'en retracer 250, et il en manque toujours 500 présentement. Ce n'est pas de la fabulation. Le sergent-détective René Comtois pourrait venir vous en parler dans les moindres détails. C'est la réalité. Comme je l'ai dit, cela servira dans d'autres dossiers, et je pense que c'est important de le savoir pour le bénéfice de tous.
    Merci, monsieur Francoeur.
    M. Dykstra, s'il vous plaît.

[Traduction]

    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Francoeur, vous avez parlé plus tôt de ce dont vous aviez été témoin. Parfois, on oublie que votre travail exige de vous que vous soyez dur, que vous agissiez de sang-froid, sans émotions. Mais vous êtes ici non seulement à cause de ce que vous pensez, de manière non émotive, vous êtes aussi ici parce que vous voyez des choses, vous les vivez. Je pense que cela vous donne beaucoup de crédibilité, et que cela nous aide à faire avancer le dossier.
    Je tenais simplement à dire que vos sentiments sur cette question sont bien entendus et appréciés.
    J'ai quelques questions. L'une se rapporte aux observations de Tony et aux données qu'il a fournies.
    Nous n'avons pas parlé ici des victimes, chez qui les craintes sont vives quand leur agresseur peut être libéré sous caution. Avez-vous des commentaires à formuler là-dessus?

  (1640)  

    Ce que vous venez de dire est très important. Comme j'en parlais plus tôt, nous demandons aux citoyens de nous aider à dénoncer les responsables de ces crimes. Nous avons besoin d'aide. Il faut que les gens participent en aidant les policiers à arrêter ces contrevenants.
    Mes collègues pourront vous en parler aussi, ce qu'on entend chaque jour, ou très souvent, c'est ceci : « Savez-vous quoi? Si je vous aide, demain il sera libéré, il nous menacera, il me regardera en souriant et en riant du fait qu'il est déjà sorti. »
    On le constate dans votre collectivité. Allez n'importe où au Canada, c'est toujours ce qu'on entend : « Comment pouvez-vous me protéger? Si je dénonce ce criminel, comment allez-vous me protéger? Nous savons qu'il sera sorti en moins de 24 heures. »
    Voilà pourquoi nous pensons que ce projet de loi est si important. Je le répète, nous parlons de criminels violents, de gens qui ont perpétré des crimes graves. S'ils sont convaincus que —
    Il faudra quelques mois, peut-être même un an, pour que les citoyens comprennent qu'ils seront protégés. Mais désormais, on nous dira : « Si je le dénonce, il aura un procès, il restera derrière les barreaux jusqu'à son procès, puis on lui affligera une peine. Il ne sera pas dans le voisinage avant longtemps, c'est certain. » Ça se saura, et rapidement. Nous aurons l'appui de la collectivité, et les gens diront : « Il faut aider les policiers, et les criminels ne sortiront pas en 24 heures. »
    Madame Connolley, est-ce aussi la position des chefs de police?
    Me donnez-vous un instant, s'il vous plaît?
    Permettez-moi de répondre. En réponse à Mme Jennings et à M. Petit, on peut dire que le système judiciaire a perdu la confiance du public. Nous avons eu l'an dernier un grand débat à St. John's, Terre-Neuve, avec le ministre de la Justice, des avocats de la défense et des procureurs ainsi que des citoyens. Le débat a duré deux heures, et on y a présenté le point de vue des professionnels et des citoyens. Les gens sont craintifs et ne font pas confiance à la justice.
    Pour l'ACP et l'ACCP, c'est un outil de plus. Nous en avons une panoplie pour travailler à rétablir la confiance du public dans la justice pénale. C'est devenu ridicule, malheureusement. Chaque jour, dans les journaux, on apprend la libération d'un criminel après la perpétration d'une infraction, impliquant peut-être une arme à feu. Ils sont libérés avant l'enquête policière. Le ruban est toujours en place, mais les coupables sont libérés. Voilà pourquoi nous estimons que ce projet de loi est utile.
    Monsieur le président, puis-je poser une courte question encore?
    Oui.
    Merci.
    Mme Freeman a parlé d'un témoin de ce matin, M. Doob. J'aimerais avoir votre réaction à ses propos :
    À mon sens, ce projet de loi est préoccupant, non pas pour ses effets directs sur les rouages du système pénal, mais plutôt en raison des messages clairement erronés qu'il transmet aux Canadiens sur les liens qui existent entre la criminalité et le droit pénal, de même que sur le fonctionnement du système de justice pénale.

  (1645)  

    Pour commencer, j'ai du mal à comprendre cette déclaration. Comment peut-on s'opposer à ce projet de loi qui se concentre sur certains crimes, tous violents? Où serait la logique, s'il n'y avait pas de conséquences, dès qu'on est arrêté? Je n'arrive pas à comprendre, je suis désolé.
    Merci.
    Les membres du comité devraient comprendre le niveau de frustration des officiers de police. Ils ont une grande expérience des enquêtes qu'ils mènent au sein de nos brigades des homicides. Dans bien des cas, ils savent qui a commis le crime mais ils ne peuvent porter aucune accusation contre le meurtrier parce que personne n'accepte de témoigner. C'est ce qu'on nous a répété à maintes et maintes reprises. Ils connaissent l'auteur du crime, mais ils ne peuvent rien prouver et ils n'ont aucun motif valable pour le traduire en justice. Si l'on met en place quelque chose qui garantisse la confiance, nous serons plus souvent en mesure de mettre ces meurtriers derrière les barreaux.
    Merci.
    À vous, monsieur Murphy.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Tout d'abord, je voudrais vous remercier, monsieur Francoeur, pour votre témoignage. Cela me touche beaucoup. C'est la raison pour laquelle nous avons un profond respect non seulement pour les policiers, mais aussi pour les chefs de police. Comme ancien maire, je sais qu'il y a une différence entre les deux, il y a différents éléments.

[Traduction]

    En outre, les témoignages que nous avons recueillis sur le projet de loi C-35 — que nous appuyons — étaient généralement favorables, mais on nous a soumis différents points de vue sur la façon dont il allait s'appliquer. Entre autres, la Criminal Lawyers' Association nous a dit que le projet de loi C-35 avait essentiellement pour effet de codifier ce qui se passe en cas de crimes très graves.
    Il est difficile d'obtenir la mise en libération sous caution pour les récidivistes endurcis. Cela nous ramène à nos premières discussions sur les questions de justice; un bon magistrat ou un bon juge est investi de pouvoirs discrétionnaires. Je pense que le projet de loi C-35 ne dit rien de plus. Avec le renversement du fardeau de la preuve, qui peut parfois menacer la liberté individuelle — c'est donc une question importante —, je suis certain qu'un régime d'aide juridique adéquatement financé va garantir la représentation de l'accusé, et qu'un juge bien choisi et bien formé prendra la bonne décision sur les trois motifs de libération sous caution ou sur la mise en liberté provisoire. Je suis donc totalement favorable au projet de loi C-35.
    Ce qui m'inspire une certaine inquiétude, c'est que, d'après certains témoins, le renversement du fardeau de la preuve est automatique et que, dans tous les cas, l'accusé va bénéficier d'une décision judiciaire de mise en liberté provisoire. Il ne faudrait pas donner à la population l'impression que ce sera effectivement le cas. En réalité, le changement rend l'incarcération plus probable. Je pense que nous devrions tous nous mettre d'accord là-dessus, au lieu de donner l'impression que les criminels vont automatiquement rester en — Tout dépend toujours du pouvoir discrétionnaire du juge, et je suis parfaitement conscient sur ce point.
    Nous en avons déjà discuté et nous sommes allés à Toronto pour écouter le chef de police de cette ville. Je pense que l'argument principal qu'on nous présente — M. Cannavino et M. Griffin sont d'ailleurs de vieilles connaissances et on devrait leur donner une médaille d'assiduité —, c'est l'importance des armes à feu, sur laquelle nous devrions concentrer notre attention. Les gens comme vous nous ont souvent parlé des armes à feu, mais comment aborder le problème? Il existe un registre des armes à feu.
    L'actuel ministre de la Justice dit aux Communes qu'il veut cibler les criminels, et non pas ceux qui vont à la chasse au canard. Moi, je vais à la chasse au canard et j'ai des fusils de chasse enregistrés. J'ai toujours eu des activités de plein air et j'ai appris le maniement d'armes responsable. Je n'ai pas besoin de la protection du ministre de la Justice. Je ne pense pas qu'il ait jamais possédé une arme à feu. Ce genre d'hyperbole me fatigue.
    Comme l'ont dit certains témoins, il s'agit véritablement de savoir si ceux qui possèdent une arme à feu vont l'utiliser. C'est ce qu'a dit M. Wilson. On peut utiliser légalement une arme à feu. Il y a des gens qui considèrent qu'avec un pistolet, on peut tirer sur autre chose que sur des êtres humains.
    Moi, je n'ai pas grandi dans cette culture, mais je pense qu'il faut tenir un débat culturel. Je suis convaincu qu'il y a une différence entre le Canada rural et le Canada urbain. Dans certains cas, il peut y avoir une différence entre l'ouest et les autres parties du Canada. M. Bagnell a dit la même chose du nord. Je pense qu'il y a là un élément culturel.
    Y a-t-il des modèles efficaces de contrôle des armes à feu qu'on pourrait appliquer efficacement ici, sous réserve de ressources suffisantes en matière de détection, de prévention, d'éducation, etc.?

  (1650)  

    Il y a bien des choses à faire dès le départ.
    J'espère qu'on va commencer par protéger nos frontières. Le problème, actuellement, c'est que des agents de la GRC doivent faire la police dans les municipalités. J'estime que c'est aux polices municipales de s'en occuper. Les agents de la GRC devraient patrouiller nos frontières et s'occuper de nos ports. C'est là qu'arrivent les armes à feu qui entrent en contrebande au Canada. Commençons par là. Il faut fermer la porte. C'est la première mesure à prendre pour apporter notre contribution. Ensuite viendront toutes les autres améliorations.
    Lorsqu'on a un gros trou dans les murs, on ne résout pas le problème en poussant le chauffage. La première chose à faire est de réparer le mur. On va ainsi conserver la chaleur à l'intérieur, le chauffage va coûter moins cher et on aura moins de problèmes. C'est comme cela qu'il faut procéder.
    Ce qu'il nous faut, c'est une première étape. Il faut faire en sorte que les Américains n'aient pas l'occasion d'échanger des armes à feu contre notre bonne marijuana cultivée au Canada. Voilà les problèmes qu'il faut résoudre en priorité. Ensuite viendront les améliorations.
    Deuxièmement, il faut faire une mise à jour sur les armes à feu à utilisation restreinte. La dernière remonte à plus de 10 ans, et rien n'a été fait depuis. On trouve quotidiennement des armes qui devraient être interdites ou à utilisation restreinte. Comme je l'ai dit dans l'exposé, des sociétés commerciales exploitent la situation. Elles indiquent dans leur site Web qu'on peut acheter légalement tel pistolet ou tel fusil parce qu'il n'est pas visé par la loi.
    Voilà donc pour les premières étapes.
    Merci, monsieur Cannavino.
    Nous passons à M. Moore.
    Merci à tous nos témoins.
    Ce qu'on nous a dit aujourd'hui et qu'on avait déjà entendu lors de l'étude d'autres projets de loi, c'est que, même si le projet de loi C-35 a pour conséquence de refuser la mise en liberté sous caution à un ou deux criminels parce qu'à cause du renversement du fardeau de la preuve, le juge, exerçant ses pouvoirs discrétionnaires, va préférer garder en détention quelqu'un qui, sinon, aurait été mis en libération sous caution —
    Des témoins nous ont dit qu'à Toronto et dans d'autres villes, les problèmes étaient le fait d'un petit nombre d'individus, des récidivistes, des membres de gangs; lorsqu'ils ne sont plus dans la rue, qu'on les a mis en prison, les policiers et les juges constatent une nette diminution de la criminalité dans le secteur. Un chef de police de Toronto nous a dit qu'il suffisait d'appréhender quelques individus dans un quartier pour y faire baisser sensiblement le taux de criminalité. Est-ce que vous pouvez nous en parler?
    Je suis convaincu que personne ne tient à ce qu'on emprisonne n'importe qui. Il faut se concentrer sur les récidivistes qui, dans le système actuel, ne perçoivent pas le bon message. Ils continuent à faire des victimes. Ce sont eux qu'il faut viser d'une façon très cohérente et stratégique; il faut leur faire savoir que, s'ils ne veulent pas comprendre le message concernant la justice pénale et les victimes canadiennes innocentes, on va leur interdire la rue et les mettre en prison. À cela doivent s'ajouter des ressources supplémentaires pour la police et des mesures de prévention. Mais nous avons là un projet de loi très précis qui fait partie de notre démarche législative. Est-ce que vous pouvez me dire ce que vous savez de ceux qui commettent des crimes et de ce qui se passe quand on les prive de liberté?

[Français]

    Monsieur Cannavino.

[Traduction]

    Eh bien, le projet de loi C-35l'indique parfaitement, car il traite des crimes violents et des criminels violents, ceux qui commettent des crimes violents. Il est donc bien ciblé.
    Je pense également que M. Wilson a très bien évoqué les effets de cette mesure législative en parlant de la crainte ressentie dans les collectivités. Avec le renversement du fardeau de la preuve, c'est au criminel de prouver qu'il n'est pas dangereux. Les conséquences du changement sont considérables. Évidemment, le juge peut discrétionnairement le remettre en liberté, mais je pourrais vous donner... Nous avons dit que le projet de loi aurait pour conséquence... Par exemple, il y a une semaine, l'un de nos collègues s'est fait abattre. L'auteur du meurtre aurait dû rester en prison. Si la loi avait été en vigueur, il aurait été plus facile pour le procureur de la Couronne d'apporter des preuves. Lorsque le criminel s'applique à prouver qu'il n'est pas dangereux, s'il s'agit d'un trafiquant de drogues, qu'il est armé jusqu'aux dents et qu'il tue un officier de police, comment se fait-il qu'il puisse être mis en liberté sous caution? Comment se fait-il qu'on le libère? Si le projet de loi C-35avait été en vigueur, il serait encore en prison.

[Français]

    Monsieur Francoeur.
    Si vous me le permettez, j'aimerais ouvrir une petite parenthèse pour répondre à la question de M. Murphy au sujet des armes longues, des armes de chasse. Premièrement, la majorité des policiers qui ont été tués au cours des 10 dernières années au Canada l'ont été avec des armes longues, dont ceux à Mayerthorpe.
    Lorsqu'on parle d'armes longues, on pense à la violence domestique ou la violence conjugale. Je peux vous donner un exemple. À la fin de l'année 2006, une dame a été victime de violence conjugale à Montréal. Excusez l'expression, mais elle en a « mangé toute une ». La dame a été transportée à l'hôpital. Le monsieur n'avait pas de dossier criminel, mais la dame était effrayée parce qu'elle savait que son mari possédait plusieurs armes de chasse. Cependant, elle ne savait pas s'il en avait deux, dix ou douze. Les policiers et les enquêteurs ont consulté le registre des armes à feu : 16 armes à feu étaient enregistrées au nom du monsieur. Ils ont fait une perquisition et ont saisit 16 armes et 45 000 balles. Il s'agissait d'un dossier domestique.
    Après les événements du collège Dawson, dans la région de Montréal, trois illuminés d'un peu partout ont fait des menaces. On a consulté le registre et, dans deux des trois cas, on a été en mesure de saisir immédiatement des armes de chasse aux domiciles occupés par ces individus.
    On ne parle pas de crime organisé. Ce sont des choses qui sont vécues au quotidien. À Montréal, les 1,3 million d'appels de service par année ne sont pas seulement le résultat de coups de feu. Il doit y avoir 50 000 ou 100 000 cas de violence domestique par année. On parle du quotidien des gens, des citoyens.
    Merci.

  (1655)  

[Traduction]

    Monsieur Lee, vous avez une question à poser; une question courte et sans préambule, si possible.
    Sans préambule. Je voudrais remercier... C'est un préambule, ça? Excusez-moi.
    Je voudrais remercier le témoin, M. Wilson, d'avoir évoqué cette conséquence indirecte attribuée au projet de loi, à savoir que les citoyens auront davantage confiance en l'aptitude de la police à les protéger s'ils portent une accusation. C'est un élément important.
    Êtes-vous prêt à reconnaître également que ce n'est pas un filet de sécurité à toute épreuve, qu'il ne va donner des résultats du jour au lendemain, mais qu'il va permettre à la police et aux tribunaux d'agir de façon plus ciblée grâce à de meilleures munitions juridiques.
    À propos de munitions, ce filet de sécurité ne risque-t-il pas d'englober théoriquement le nigaud qui a quelques balles dans sa poche et qui essaie de les vendre? C'est une question très théorique, mais n'est-il pas vrai qu'on a inclus dans cette réforme des dispositions qui pourraient s'appliquer à celui qui a des munitions dans sa poche et qui essaie de les vendre? Ce n'est pourtant pas ce genre d'individu que nous essayons de cibler. J'aimerais donc que vous reconnaissiez que le filet est de portée assez vaste, même si certains souhaiteraient qu'il soit de portée encore plus vaste, mais qu'il faut aussi veiller à ce que nos tribunaux, nos policiers et nos agents de l'aide juridique soient au moins informés de la situation, de façon que cet article ne soit pas utilisé à mauvais escient.

[Français]

    Monsieur Cannavino, vous avez le mot de la fin.

[Traduction]

    Très brièvement, je ne pense pas que le nigaud dont vous parlez soit ciblé, car les 12 actes criminels énoncés dans le projet de loi soient des actes très graves.

  (1700)  

    Évidemment, c'est très bien de viser toutes les infractions graves et tous les mauvais garçons, mais le filet en question englobe également la possession et la vente de munitions, même pour celui qui n'a pas tiré un seul coup de feu, qui ne possède pas d'armes. C'est ce que je vous demande de reconnaître.
    Monsieur Lee, comme nous l'avons dit, ce n'est pas obligatoire. C'est toujours au juge qu'il appartient de déterminer si l'accusé doit bénéficier d'une mise en liberté sous caution ou non.

[Français]

    Je remercie beaucoup les témoins.

[Traduction]

    Avez-vous quelque chose à ajouter?
    Je crois que M. Tottenham voudrait ajouter quelque chose.
    Excusez-moi, je ne vous ai pas vu lever la main. Monsieur Tottenham.
    Ce sera très bref.
    Je comprends l'argument que vous avancez, et je pense qu'il faut admettre que, dans tout projet de loi, il faut tenir compte du facteur humain lorsque la police intervient dans l'application de la loi et dans la procédure de mise en liberté sous caution avec le juge. Nous avons évidemment des renseignements, nous savons à qui nous avons affaire et nous pouvons déterminer s'il s'agit d'un criminel endurci qui constitue de toute évidence une menace à la sécurité publique, ou au contraire un naïf qui s'est laissé piéger avec quelques balles dans sa poche. Je pense donc que ce facteur humain est notre garantie ultime, car évidemment, nous voulons nous aussi éviter tout abus et nous ne souhaitons pas que celui qui relève de cette catégorie soit arbitrairement pénalisé. Voilà, je pense, comment la loi devrait s'appliquer.
    Merci de l'avoir dit officiellement.

[Français]

    Je remercie beaucoup les témoins de l'Association canadienne des policiers ainsi que ceux de l'Association des chefs de police du Canada pour leur comparution de cet après-midi.

[Traduction]

    Merci.
    La séance est levée.