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IWFA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité spécial sur la violence faite aux femmes autochtones


NUMÉRO 006 
l
2e SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 6 février 2014

[Enregistrement électronique]

  (1800)  

[Traduction]

    Bonjour et bienvenue à cette réunion du Comité spécial sur la violence faite aux femmes autochtones.
    Aujourd'hui, nous avons le plaisir d'accueillir Mme Diane Redsky, qui est directrice de projet du Groupe de travail sur la traite des femmes et des filles au Canada.
    Simplement pour que tout le monde soit au courant, nous attendons un autre témoin qui semble avoir un contretemps.
    Madame Redsky, si jamais l'autre témoin ne pouvait se présenter, j'espère que vous pourrez rester pour l'heure complète, parce que nous aimerions avoir vos commentaires. Cela n'a aucune incidence sur votre temps de parole. Lorsque l'autre témoin arrivera, nous lui accorderons aussi 10 minutes.
    Merci beaucoup. Encore une fois, bienvenue au comité. La parole est à vous.
    Oui. Vos 10 minutes commencent maintenant. Nous avons tous un écouteur. Il n'est donc pas nécessaire que vous parliez fort si votre microphone est allumé. Plus tard, si quelqu'un s'exprime en français, vous n'aurez qu'à mettre votre écouteur pour entendre l'interprétation, mais vous n'avez pas à vous soucier de cela pour le moment.
    Bonsoir. Merci de me donner l'occasion de venir témoigner aujourd'hui.
    Tout d'abord, j'aimerais souligner que nous avons le privilège d'être en territoire Anishinaabe.
    J'aimerais aussi rendre hommage aux femmes qui ne peuvent être ici, car elles vivent dans la peur, elles n'ont pas voix au chapitre et elles croient que personne ne se soucie d'elles. Je cite une femme autochtone qui a dit quelque chose de très important pour nous tous, à mon avis. Elle a dit: « Efforcez-vous simplement de ne pas nous abandonner comme l'ont fait tous les autres. »
    Ce soir, je viens témoigner du travail de la Fondation canadienne des femmes. Mes messages clés sont les suivants: la collaboration; la redéfinition du problème; favoriser le leadership des femmes autochtones; les changements systémiques.
    Pour ceux qui ne le savent pas, la Fondation canadienne des femmes est une fondation publique nationale qui mise sur la force des femmes et les rêves des jeunes filles. Pour ce faire, nous recueillons des fonds pour mettre fin à la violence faite aux femmes, sortir les femmes de la pauvreté, favoriser l'autonomisation et la résidence des filles, grâce au financement, à la recherche et à la promotion de pratiques exemplaires. Je vous en fais part parce que la philanthropie joue un rôle important dans le financement des organismes, l'accroissement de la visibilité des problèmes qui touchent les femmes et la reconnaissance des occasions d'établir des partenariats pour favoriser un changement systémique.
    La Fondation canadienne des femmes concentre ses efforts sur l'aide aux femmes et aux filles qui en ont le plus besoin: les femmes et les filles autochtones au Canada. Nous parvenons à le faire en intégrant les femmes autochtones de partout au Canada dans tous les aspects de notre travail.
    Nous sommes très au fait des nombreux problèmes et obstacles auxquels sont confrontées les femmes autochtones au Canada. Nous sommes nombreux à connaître les recherches, les initiatives communautaires et les activités de défense des intérêts organisées par les dirigeants des Autochtones et des Premières Nations, les organismes communautaires et les organismes nationaux comme l'Association des femmes autochtones du Canada, les gouvernements et les fondations comme la Fondation canadienne des femmes.
    Nous savons tous que les choses ne vont pas en s'améliorant; en fait, la situation se détériore. Les causes fondamentales du problème sont profondes et complexes. Les causes fondamentales que sont la pauvreté, le racisme, le préjugé de classe, le sexisme et la dévalorisation des femmes autochtones sont très présentes.
    Parlons simplement de la pauvreté. Comme vous le savez, il existe une corrélation importante entre la pauvreté et la violence faite aux femmes. Chez les femmes autochtones, c'est-à-dire les femmes des Premières Nations, les Métisses et les Inuites, le taux de pauvreté est de 36 %. C'est un taux beaucoup plus élevé que la moyenne de 9 % chez l'ensemble des Canadiens.
    Le racisme est un élément très important, et la Fondation canadienne des femmes commence à en débattre en public.
    L'été dernier, la Fondation canadienne des femmes a fait preuve de leadership et a envoyé une lettre au premier ministre Stephen Harper. Elle a été rédigée par Mme Margot Franssen, une philanthrope qui est membre du conseil d'administration de la Fondation canadienne des femmes et qui préside le Groupe de travail national sur la traite de filles et de jeunes femmes au Canada.
    Voici une citation tirée de la lettre envoyée au premier ministre: « Si des centaines de femmes de race blanche avaient été assassinées ou avaient disparu, ne lancerait-on pas une enquête? Les noms et les photos de ces femmes ne feraient-ils pas les manchettes tous les jours jusqu'à ce que l'on ait des réponses? La communauté n'exigerait-elle pas que le gouvernement découvre les causes et trouve des solutions pour qu'aucune autre femme ne soit enlevée ou assassinée? Les femmes autochtones ne méritent rien de moins. »
    Cette lettre découle en partie du rôle de chef de file de la Fondation canadienne des femmes dans la lutte contre la traite des personnes au Canada grâce à un investissement initial de 2 millions de dollars provenant des coffres de la fondation dans le but de financer des organismes, mener des recherches et inviter 23 experts et des victimes de partout au Canada à participer au Groupe de travail national sur la traite de filles et de jeunes femmes au Canada. Le résultat sera une stratégie de lutte contre la traite de personnes établie pour la Fondation canadienne des femmes et le Canada, ce qui sera terminé d'ici l'automne 2014.
    Il existe de très graves et tragiques recoupements — dont font partie le meurtre et la disparition de femmes autochtones —, en particulier chez les femmes et les filles autochtones et des Premières Nations au Canada. Les formes les plus graves de racisme, de préjugé de classe et de sexisme ont pour conséquence la forme de violence la plus externe faite aux femmes autochtones: la traite des personnes à des fins d'exploitation sexuelle.
    En 2012 et 2013, la Fondation canadienne des femmes a consulté plus de 250 organismes canadiens et plus de 150 victimes de la traite de personnes, ce qui lui a permis d'apprendre que les filles et les femmes sont victimes de traite de personnes à des fins d'exploitation sexuelle au Canada, à destination du Canada et à l'extérieur des frontières canadiennes.
    Souvent, les filles et les femmes en provenance du Canada qui sont victimes de la traite de personnes sont les plus marginalisées, et les femmes autochtones sont en haut de la liste.

  (1805)  

    Au Canada, beaucoup de filles deviennent pour la première fois victimes de traite de personnes aux fins de l'exploitation sexuelle à l'âge de 13 ans.
    Associée à cette situation, particulièrement chez les femmes autochtones, est cette effroyable réalité: les femmes sont systématiquement ciblées par les trafiquants à l'adolescence ou au début de l'âge adulte, on exploite leur vulnérabilité et elles se retrouvent emprisonnées dans une vie de chaos absolu, de mauvais traitements et de violence extrême.
    Toutefois, cela ne s'arrête pas là. Lorsqu'elles n'ont plus de valeur pour un trafiquant, elles deviennent les femmes de l'industrie du travail sexuel à des fins de survie: elles ont 40 ans, elles sont pauvres et mourantes. Le corps des femmes n'est pas conçu pour résister aux traumatismes physiques et psychologiques découlant de l'exploitation sexuelle et de la traite de personnes, qu'elles résultent de circonstances ou de contraintes.
    Dans le cadre des travaux du groupe de travail de la Fondation canadienne des femmes, nous remettons aussi en question les théories relatives aux personnes qui en tirent profit et celles qui sont responsables. L'an dernier, en collaboration avec la firme Angus Reid, nous avons mené un sondage national qui a permis de découvrir les faits suivants: 78 % des Canadiens sont d'accord pour dire que les filles de moins de 16 ans ne se livrent pas à la prostitution par choix, et 67 % des Canadiens sont d'accord pour dire que les Canadiennes de moins de 16 ans sont recrutées et font l'objet de trafic de personnes à des fins de prostitution contre leur gré.
    Il semble que tout le monde est au courant et c'est ce qui se passe. Donc, que pouvons-nous faire à cet égard?
    L'une des choses dont s'occupe la Fondation canadienne des femmes, c'est la redéfinition de la question de la traite de personnes à des fins sexuelles. La question n'est pas de savoir pourquoi les filles se prostituent, mais de savoir pourquoi les hommes achètent des services sexuels des filles.
    Nous devons nous attaquer aux causes fondamentales, y compris la dévalorisation des femmes par ceux qui leur causent du tort. De plus, nous ne pouvons aller de l'avant sans une reconnaissance des systèmes qui créent et qui perpétuent les facteurs de vulnérabilité pour les femmes autochtones, la seule population confrontée à une discrimination systémique d'une telle ampleur dans la plupart des systèmes, notamment les services d'aide à l'enfance, l'éducation, etc.
    Je crois que seul le leadership des femmes autochtones permettra d'apporter des changements importants nécessaires à l'amélioration de la vie des autres femmes autochtones, de leur famille et des collectivités. En fait, nous voyons des exemples du leadership des femmes autochtones dans les collectivités, et c'est là-dessus que j'aimerais terminer mon exposé.
    Le courage, le leadership et la résilience remarquables des femmes autochtones peuvent être observés partout au Canada; en fait, même autour de cette table.
    Nos aînées de la nation Anishinaabe se lèvent et revendiquent leur rôle en tant que protectrices de nos collectivités, et c'est un mouvement qui prend de l'ampleur au Canada.
    Pour citer une des fondatrices de la Fondation canadienne des femmes, « Tant que nous n'aurons pas tous réussi, personne n'aura réussi. »
    Merci.

  (1810)  

    C'était tout simplement formidable. Merci infiniment.
    Nous passons maintenant aux questions.
    Nous allons commencer par Mme Ashton. Vous avez sept minutes.
    Madame la présidente, je vais partager mon temps de parole avec ma collègue, Mme Freeman.
    Madame Redsky, merci d'avoir pris le temps de vous joindre à nous aujourd'hui pour parler du travail important que vous faites et pour livrer un témoignage très important.
    J'aimerais d'abord parler d'un point que vous avez soulevé et qui a été soulevé par presque tous les témoins qui sont venus au comité, soit l'importance d'une enquête nationale. Qu'il s'agisse d'organismes nationaux, de femmes qui oeuvrent sur le terrain ou de familles de femmes autochtones disparues ou assassinées, nous avons entendu maints témoignages sur la nécessité d'une enquête, une enquête accompagnée de mesures concrètes, le genre de mesures que nous pourrions voir dans un plan d'action national.
    Seriez-vous d'accord pour dire qu'il faut à la fois une enquête et un plan d'action nécessaire pour mettre un terme à la violence faite aux femmes autochtones?
    Oui. En fait, c'est la position que la Fondation canadienne des femmes a exprimée sans réserve dans le cadre de ses travaux.
    En fin de compte, ce qui importe, c'est de découvrir les causes et de mettre en place les solutions. Peu importe le mécanisme choisi pour y parvenir, le genre d'enquête et de plan d'action national que nous souhaitons, c'est un mécanisme auquel participent les femmes, les femmes autochtones, leur famille, leur collectivité ainsi que divers acteurs. Nous savons pertinemment que la clé du succès, c'est un modèle et des travaux de ce genre.
    Ma question se rapporte directement à cela, en fait.
    Au comité, nous insistons notamment sur l'importance de l'action communautaire, la mise en oeuvre de solutions d'inspiration communautaire, y compris les plans de sécurité.
    Pourriez-vous parler du rôle que peut jouer le gouvernement fédéral pour appuyer les solutions d'inspiration communautaire? Quel devrait être ce rôle, comment devrait-il se refléter et de quelle façon pouvons-nous aider les gens sur le terrain à trouver des solutions et à les mettre en oeuvre?
    Les rôles sont multiples. Grâce au travail de notre groupe de travail national sur la traite des personnes... En fait, la vice-présidente du Plan d'action national de lutte contre la traite de personnes fait partie de notre groupe de travail, ce qui permet d'assurer ce lien. Le gouvernement a d'importants rôles à jouer en ce qui concerne les politiques, le financement et l'accessibilité à ces solutions pour permettre aux collectivités de se mobiliser par rapport à cet enjeu précis.
    Dans la même veine, les femmes autochtones hors réserve travaillent-elles à la préparation de ces plans? Peuvent-elles ou souhaitent-elles y participer? Quel genre d'appui et de financement leur offre-t-on pour les aider à élaborer ces initiatives?
    Nous voyons déjà, pendant notre tournée du pays dans le cadre de travail sur la traite de personnes, beaucoup de... Dans presque toutes les grandes villes du Canada, les femmes commencent à se regrouper, à la base, pour trouver des solutions. Je pense que cela découle du fait que nous sommes tous les partenaires financiers, de certaines décisions et d'occasions liées à l'aide offerte. Donc, nous jouons aussi un rôle d'appui envers les coalitions, les organismes et les organisations de femmes qui font le travail à l'échelle locale.
    Par l'intermédiaire du groupe de travail national, dans le cadre de notre recherche de faits durant la dernière année, nous avons notamment accordé des subventions. Lorsque nous accordons des subventions, nous le faisons en partenariat avec le gouvernement. Il existe des synergies et des occasions naturelles qui favorisent la collaboration du secteur privé et du gouvernement dans le but d'encadrer les femmes qui travaillent vraiment fort, de l'intérieur, pour essayer de sensibiliser davantage les gens, pour régler les problèmes systémiques et rebâtir leur famille et leurs collectivités.

  (1815)  

    Merci beaucoup.
    Je redonne la parole à Niki, s'il reste du temps.
    Combien de temps reste-t-il?
    Vous avez trois minutes.
    Formidable.
    Madame Redsky, vous avez indiqué que la pauvreté est une cause fondamentale à tous égards. Pourriez-vous en dire plus à ce sujet?
    Nous avons accueilli des témoins — même si nous aurions souhaité en accueillir beaucoup plus — qui habitent dans les réserves et qui vivent dans la pauvreté. Nous avons aussi entendu des gens qui habitent dans les centres-villes nous parler de la pauvreté que vivent les femmes en milieu urbain.
    Je me demande si vous pourriez nous en dire davantage sur le lien entre la pauvreté et la violence faite aux femmes autochtones.
    La pauvreté augmente considérablement la vulnérabilité des femmes, et ce, à bien des égards. Elles n'ont pas assez d'argent pour se trouver un logement sécuritaire. C'est l'élément principal. Elles n'ont pas assez d'argent pour prendre soin de leurs enfants. Elles ont le sentiment de n'avoir d'autre choix que d'agir dans l'illégalité pour obtenir de l'argent. Cela les rend extrêmement vulnérables. Cela joue aussi un rôle dans le fait que les femmes se retrouvent dans des relations qui ne sont pas saines. Encore une fois, cela tient du fait qu'elles n'ont pas d'argent.
    L'important, en fin de compte, ce sont les occasions d'offrir aux femmes de l'aide pour sortir de la pauvreté, l'occasion d'avoir un salaire vital, la possibilité d'assurer elles-mêmes la subsistance de leur famille sans être obligées de vivre avec quelqu'un d'autre. Il existe des liens déterminants entre la pauvreté et la violence faite aux femmes. La pauvreté est l'élément sous-jacent de tous les facteurs de risque pour les femmes dans le continuum que constituent la violence faite aux femmes, la traite de personnes et l'exploitation sexuelle des femmes. C'est le problème sous-jacent à tous égards.
    Dans quels domaines le gouvernement pourrait-il jouer un rôle pour s'attaquer à la pauvreté, comme le logement ou l'emploi, par exemple? Que doit-on faire, à votre avis?
    Cela touche tous les aspects, de la possibilité pour les femmes d'avoir accès à des programmes de formation et d'emploi... La Fondation canadienne des femmes a consacré beaucoup d'argent à des projets de développement économique destinés aux femmes qui refont leur vie après avoir vécu de la violence. On parle d'investissements importants partout au Canada dans des projets où l'on offre aux femmes la formation nécessaire pour obtenir des emplois qui offrent un salaire vital. Il faut des ressources à cet égard. Il y a des politiques sur le logement, le taux de prestations d'aide sociale et le revenu des femmes.
    On pourrait presque dire qu'elles sont toujours laissées pour compte; les femmes sont toujours en difficulté. Elles vivent tout le temps au jour le jour. Beaucoup de femmes que nous avons rencontrées partout au pays dans notre travail sur l'exploitation sexuelle veulent simplement arrêter de le faire. Elles veulent prendre le dessus, elles veulent à tout le moins avoir une longueur d'avance un moment donné. Elles vivent littéralement au jour le jour. Quoi qu'elles fassent, elles sont perdantes. Il leur est extrêmement difficile de se sortir de ce cycle.
    Merci beaucoup.
    C'est maintenant votre tour, monsieur Dechert, pour sept minutes.
    Madame Redsky, je tiens à vous souhaiter la bienvenue et à vous remercier de votre présence ce soir.
    Je crois qu'en 2012, vous avez reçu le Prix Femmes de mérite du YMCA-YWCA de Winnipeg, avec la députée Joy Smith, pour le travail que vous avez accompli et que vous continuez d'accomplir dans la lutte contre la traite de personnes et l'exploitation sexuelle. Je tiens à vous féliciter et à vous remercier de tous vos efforts.
    Merci.
    Dans votre déclaration préliminaire, vous avez parlé des conséquences de la prostitution sur les femmes en général, et surtout sur les femmes autochtones, puisque c'est d'elles que nous parlons aujourd'hui. Pouvez-vous nous parler plus en détail du lien entre la violence faite aux femmes autochtones et la prostitution? Selon vous, quels sont habituellement les effets néfastes de la prostitution sur les femmes autochtones?
    À ce sujet, nous sommes tous au courant de la décision Bedford et nous savons que la Cour suprême a demandé au Parlement de proposer une solution de rechange dans la prochaine année. J'aimerais savoir ce que vous en pensez et par quoi, selon vous, devraient être remplacées les dispositions actuelles que la Cour suprême nous a demandé d'examiner et de remplacer.
    C'est une grande question.

  (1820)  

    Essayez de résumer.
    La traite de personnes et l'exploitation sexuelle sont axées sur le sexe, la race et la classe sociale. Les services doivent être fondés sur une approche centrée sur les femmes et une analyse sexospécifique de la violence faite aux femmes. Il y a donc des recoupements entre la traite de personnes et la prostitution.
    La traite de personnes, dans sa définition juridique, est la prostitution forcée lorsqu'il y a coercition, et la force en fait partie. Les services de police du pays nous ont dit qu'en raison des dispositions législatives sur la traite de personnes, les normes ou les critères auxquels est soumise la preuve sont élevés; bien souvent, lors d'une situation qui nécessite des mesures immédiates, les policiers ont recours aux dispositions sur la prostitution pour sortir une femme ou une fille très vulnérable de cette situation et la protéger.
    Nous savons que ce sont les femmes et les filles autochtones qui sont vulnérables dans ce pays. Tout dépend, encore une fois, de la région où l'on vit, mais en particulier dans l'Ouest canadien, ce sont les femmes et les filles autochtones. Ce sont elles que l'on voit dans l'industrie du sexe et qui sont victimes d'exploitation sexuelle dans les rues.
    Il nous faudra des stratégies uniques. Ce qu'il nous faut trouver, c'est une façon de créer des lois qui protégeront toujours les femmes et les filles vulnérables de l'exploitation sexuelle. Le groupe de travail de la Fondation canadienne des femmes se penche sur cette question; nous formulerons des recommandations à l'automne. Nous savons déjà qu'une importante réforme juridique est nécessaire en ce qui concerne les lois sur la traite de personnes et les aspects qui y sont associés. Les services policiers ont également besoin d'outils pour être en mesure d'intervenir au bon moment. J'aimerais qu'ils aient divers outils à leur disposition.
    Nous avons décidé de redéfinir le problème. Pourquoi les hommes achètent-ils les services sexuels des filles? Nos réponses et nos recommandations porteront sur la réforme de la loi, les services et la sensibilisation du public. Comment pouvons-nous changer cela? Notre groupe de travail vient d'entreprendre l'étape des recommandations; nous allons donc examiner cela ensemble.
    Quel est votre point de vue sur le soi-disant modèle nordique pour la prostitution?
    D'après vos commentaires, vous et la fondation que vous représentez considérez que la prostitution en général porte préjudice aux femmes et aux personnes vulnérables. Vous avez mentionné qu'il y a énormément de personnes qui n'ont pas choisi de se prostituer. Où cela nous mène-t-il? Croyez-vous qu'il faudrait la légaliser, ou pensez-vous que nous devrions essayer d'empêcher la prostitution d'une autre façon?
    Si j'avais fait cet exposé un mois plus tard, j'aurais pu répondre à cette question au nom de la Fondation canadienne des femmes, car c'est là où nous en sommes actuellement. Nous décidons quelles sont les recommandations à formuler après avoir tout examiné.
    Ce que nous savons, à ce moment-ci, c'est que les femmes vulnérables ne devraient pas être criminalisées. Nous savons qu'il y a une foule de raisons pour lesquelles la criminalisation des femmes vulnérables est une mauvaise idée et ne les aide pas à préparer leur avenir. Elles ne peuvent jamais avoir d'emploi. Il est encore plus difficile pour elles de reconstruire leur vie.
    Nous savons aussi qu'on n'accorde pas assez d'attention, même dans les mesures législatives sur la traite de personnes, à ceux qui achètent les services sexuels. Il n'existe aucune disposition criminelle pour eux. C'est une énorme lacune, et il n'y a pas suffisamment de gens qui en parlent. Nous voulons soulever cette question.
    Je pense que tous les parlementaires attendront avec impatience le rapport de la fondation à ce sujet.
    J'aimerais vous poser une question sur d'autres initiatives de la Fondation canadienne des femmes.
    Je crois comprendre qu'elle a participé au financement et à la mise sur pied de refuges d'urgence, de programmes de soutien et de suivi pour les femmes victimes de violence, et de programmes qui aident les femmes et les filles à échapper à l'exploitation sexuelle. Cela les a certainement aidées à gérer les situations de violence familiale.
    Pouvez-vous nous dire où, selon vous, se situe le lien entre la violence familiale à l'égard des femmes autochtones et ce qui les mène, disons, à la prostitution et à la traite de personnes?

  (1825)  

    Oui. Ce que nous avons constaté partout au pays, c'est qu'en général, la situation des femmes et des filles autochtones ne correspond pas à la définition de la traite de personnes, et cela signifie qu'elles doivent craindre pour leur sécurité. Souvent, les femmes autochtones ne craignent pas pour leur sécurité parce que les gens qui les exploitent sont leurs petits amis ou leurs maris. C'est très fréquent, et c'est un changement vers lequel les trafiquants se dirigent, car il n'y a alors aucun crime, et ils n'ont pas à craindre d'être accusés plus tard. Voilà où se rejoignent la violence familiale et la traite de personnes.
    Beaucoup de femmes se rendent dans les refuges. Il est encore plus difficile d'atteindre ces femmes quand elles ont développé un lien traumatique avec leur trafiquant. Cela nécessite une toute nouvelle série d'interventions, de services et de considérations quand nous voulons intervenir et les aider à long terme à rebâtir leur vie.
    Merci.
    C'est votre tour, madame Bennett. Vous avez sept minutes.
    Merci à vous et à la Fondation canadienne des femmes pour tout le travail que vous accomplissez. C'est très important.
    J'aimerais profiter de votre expertise sur la question de la traite de personnes et savoir comment cela rejoint la question des femmes autochtones disparues et assassinées. J'ai entendu dire l'an dernier que même lors de certaines manifestations du mouvement Idle No More, il y avait des affiches qui disaient qu'elles se rendent aux bateaux, puis disparaissent. Au cours de l'été, nous avons aussi entendu parler de l'accès à Duluth-Thunder Bay à ce sujet.
    La semaine dernière, on nous a dit qu'on ne peut avoir de plan d'action sans une enquête qui définit les problèmes, afin qu'ensuite on puisse les régler dans un plan d'action.
    Vous avez dit que vous aimeriez que l'on resserre les mesures législatives sur la traite de personnes.
    Peut-être pourriez-vous me dire ce que vous envisagez; il semble que la violence faite aux femmes, la traite de personnes, la disparition et l'assassinat de femmes, tout cela se recoupe. Quel portrait pouvez-vous faire de ces divers éléments? Qu'aimeriez-vous voir dans notre rapport qui nous permettrait de nous attaquer à ces problèmes?
    Et enfin, comment le plan d'action national fonctionne-t-il? Pensez-vous que nous avons toute l'information nécessaire pour travailler adéquatement, alors que tant de gens demandent une enquête publique nationale avant la mise en place d'un plan d'action national sur la disparition et l'assassinat de femmes autochtones?
    C'est aussi une question importante.
    Il y a de toute évidence des liens entre la traite de personnes et les femmes autochtones disparues et assassinées. Ce ne sont pas toutes les femmes disparues et assassinées qui ont été victimes de traite ou d'exploitation sexuelle, ou qui ont fait de la prostitution. Il y a clairement un lien au Canada. Il y a sans l'ombre d'un doute des femmes autochtones disparues et assassinées parce qu'elles ont été victimes de traite, d'exploitation sexuelle et de violence familiale. Un certain nombre d'éléments mobiles interviennent en même temps. Il n'est pas seulement question de ce que peut faire le gouvernement, mais aussi de ce que peut faire le secteur philanthropique, et de la façon dont ces deux acteurs peuvent ensemble soutenir les organisations qui travaillent sur le terrain.
    Depuis de nombreuses années, les organisations communautaires de femmes ont accompli beaucoup de travail partout au pays. Elles ont déjà des solutions à proposer sur ce qu'il faudra faire pour s'attaquer au problème de la disparition et de l'assassinat des femmes. Il est important que nous les écoutions tous, que nous les soutenions et que nous soyons organisés. S'il faut un plan d'action national pour le faire, alors j'aimerais que le secteur privé ait un rôle à jouer. C'est une chose que la Fondation canadienne des femmes prend très au sérieux. C'est suffisamment sérieux pour que nous prenions position sur cette question. Il faut que quelqu'un fasse quelque chose. Travaillons tous ensemble pour comprendre ce qui se passe. C'est inacceptable.
    En joignant ce leadership à celui du gouvernement, nous aurons de nombreuses possibilités de faire avancer les choses. Je pense que c'est une table commune qui donne l'occasion aux familles et aux femmes autochtones de participer également.
    Je sais que je ne réponds pas complètement à votre question. Cela a probablement davantage à voir avec le processus. La façon dont nous procédons est aussi importante que ce que nous accomplissons.

  (1830)  

    Il vous reste deux minutes et demie.
    Puisqu'il est 18 h 30, madame la présidente, si vous voulez donner la parole à Cindy...
    Je voulais demander à Mme Blackstock de prendre la parole tout de suite après vous. Préféreriez-vous utiliser vos deux minutes et demie après la déclaration de Mme Blackstock?
    Oui. Il y a toute la question de la fuite des foyers d'accueil. Donnons la parole à Cindy, après quoi je terminerai.
    Madame la présidente, puis-je prendre la parole?
    Oui, monsieur Dechert.
    Nous serions heureux d'entendre maintenant Mme Blackstock et nous pourrions tous lui poser des questions par la suite.
    Oui, cela fonctionnerait.
    Nous souhaitons la bienvenue à Mme Blackstock, directrice générale de la Société de soutien à l'enfance et à la famille des Premières Nations du Canada. Nous sommes ravis que vous soyez parmi nous. Je suis désolée de la confusion. Vous disposez de 10 minutes.
    C'est un honneur pour moi d'être ici, sur les terres de la nation algonquine, pour parler d'un sujet si important. En tant que parlementaires et citoyens, nous sommes confrontés à de nombreux problèmes dans ce merveilleux pays, et certains d'entre eux semblent impossibles à résoudre. Ils semblent se transmettre de génération en génération, et malgré la bonne volonté de l'ensemble du spectre politique, ils semblent toujours persister.
    Je suis ici pour vous parler d'un problème non seulement que nous pouvons régler, mais que nous devons régler et que nous avons l'obligation morale de régler en tant que Canadiens.
    Vous avez entendu les témoignages de personnes qui s'y connaissent beaucoup mieux que moi et qui sont plus au fait des risques que courent de nombreuses femmes autochtones dans ce pays; dans bien des cas, ces risques auraient pu être évités si les femmes avaient reçu les services appropriés au bon moment, dans leur enfance.
    Je vais vous parler un peu des faits qui démontrent que le meilleur investissement, pour un gouvernement, c'est dans les enfants, pas seulement pour mettre en place une société solide dont nous pourrons tous être fiers, mais aussi pour l'avenir économique. Ensuite, je vous parlerai du rapport avec la violence faite aux femmes autochtones. Enfin, je vous proposerai des solutions que vous pourrez examiner et appliquer.
    Comme vous le savez, les enfants n'ont qu'une seule enfance. Nous ne pouvons pas passer trois ou quatre cycles budgétaires à tenter de trouver une solution, car nous aurons alors manqué l'occasion de faire ce qui s'impose.
    Nous connaissons les statistiques. Les enfants des Premières Nations sont plus susceptibles d'être pris en charge par un organisme de protection de l'enfance. Ils sont pris en charge dans une proportion 12 fois plus élevée que les enfants non autochtones, principalement à cause de la négligence engendrée par la pauvreté, les mauvaises conditions de logement et la toxicomanie. Ce sont tous des problèmes que nous pouvons régler. Ils ne sont pas insolubles.
    Les taux d'obtention de diplôme sont d'environ 35 %, pas parce que les enfants ne veulent pas s'instruire, pas parce qu'ils ne sont pas intelligents, mais parce qu'ils n'ont pas les mêmes possibilités que les autres enfants canadiens. Il y a des statistiques sur la santé dont aucun de nous ici ne serait fier.
    Qu'est-ce que cela signifie pour ces enfants, pour ces adultes de demain? Je vous recommande fortement de lire le document intitulé Adverse Childhood Experiences Study, dont j'ai fourni la référence au greffier du comité. Il s'agit d'une étude d'expérience menée aux États-Unis auprès d'un échantillon de 20 000 Américains, dans laquelle on leur a demandé quelle incidence ont les événements de leur enfance sur leur vie adulte.
    On a constaté que plus un enfant vit des expériences traumatisantes — et je parle ici de maltraitance, de violence familiale, de suicide, de pauvreté — plus il risque, devenu adulte, de souffrir d'une maladie mentale, de développer des dépendances, de vivre dans la pauvreté. En outre, ces situations le prédisposent à de graves maladies comme le cancer, le diabète, la maladie pulmonaire. Toutes ces choses peuvent être évitées et, évidemment, elles coûtent très cher aux contribuables.
    Les coûts de la maltraitance des enfants au Canada sont très élevés. McKenna et Bowlus ont fait une excellente étude à ce sujet. Ils parlent du coût de l'inaction, parce que nous pensons, pour une raison ou pour une autre, qu'il est coûteux de faire quelque chose, d'investir plus de fonds, mais parfois, nous ne réfléchissons pas à ce qu'il en coûte de ne rien faire... Sur le plan des pertes de recettes fiscales, de la nécessité d'offrir plus de programmes d'aide sociale, et d'autres choses de ce genre, les coûts de la maltraitance des enfants au Canada en 2003, année où l'étude a été effectuée, s'élevaient à près de 16 milliards de dollars.
    Je suis sûre que si je vous annonçais aujourd'hui que vous aviez 16 milliards de dollars à investir dans d'autres choses qui intéressent les Canadiens, vous auriez tous quelques idées en tête. Nous pouvons y arriver en investissant tôt dans les enfants. Il est essentiel que nous nous attaquions aux facteurs qui contribuent à ces désavantages pour les enfants des Premières Nations: la pauvreté, les mauvaises conditions de logement et la toxicomanie. Comment faire?
    J'aimerais attirer votre attention sur l'un des programmes novateurs provenant des États-Unis. Depuis trop longtemps, les gens disent que la lutte contre la pauvreté est un défi trop difficile à relever, que cela ne relève pas de leur service, de leur ministère, des services d'aide à l'enfance. C'est de la naïveté, bien franchement, car la pauvreté est au coeur de nombreuses inégalités dans la société canadienne.

  (1835)  

    Ce que le gouvernement américain a fait — et je crois que vous conviendrez aussi qu’une telle somme est un investissement plutôt modeste pour ce gouvernement —, c’est qu’il a décidé de donner 15 millions de dollars aux intervenants en protection de l'enfance, car ses propres données lui indiquaient que 30 % des enfants américains qui sont confiés à ces services le sont principalement à cause de problèmes relatifs au logement. La situation n’est pas différente au Canada et, bien sûr, elle s’applique encore davantage aux enfants des Premières Nations.
    Les autorités ont dit qu’elles allaient remettre des bons de logement aux intervenants en protection de l'enfance afin qu'ils puissent travailler en collaboration avec des professionnels de l’immobilier pour assumer le premier et le dernier mois de loyer, ainsi que les coûts de chauffage, ou payer l’aménagement d’une salle de bain à l’intention d’un enfant handicapé.
    Au final, cet investissement de 15 millions de dollars a permis d’éviter à 7 500 enfants d’être placés dans des familles d’accueil et de faire économiser 131 millions de dollars aux contribuables américains, car il est beaucoup plus coûteux de placer un enfant en famille d’accueil que de le garder en sécurité à la maison. Je crois que vous serez tous d’accord avec moi pour dire que le meilleur endroit pour un enfant est auprès des siens.
    Il est possible de faire certains investissements en vue d'améliorer les choses.
    Nous savons que le gouvernement fédéral joue un rôle direct auprès des enfants des Premières Nations. L’éducation et les services de protection de l’enfance sont de compétence provinciale, mais les 163 000 enfants des Premières Nations relèvent de la compétence directe du gouvernement fédéral.
    Vous agissez comme tuteurs. Vous avez la chance d’agir directement sur le bien-être de ces enfants.
    À cette fin, vous pourriez entre autres, bien entendu, corriger les inégalités de longue date concernant la protection de l'enfance, l’éducation et la santé. Inutile de le nier. Tous les rapports indépendants — et même ceux du gouvernement — confirment ces inégalités.
    Ce qui a traîné ici, c’est la réaction des gens... Je m’explique. Une certaine dynamique a fait en sorte que les Canadiens en sont venus à accepter sans trop de difficulté que l'égalité ne vienne que progressivement aux enfants des Premières Nations. Je me souviens d’avoir lu un rapport qui posait la question suivante: est-ce que quelqu’un peut se hasarder à deviner en quelle année ou dans quel siècle nous commencerons à voir de réels progrès vers une parité en éducation pour les enfants des Premières Nations? Lorsque ce rapport a été écrit en 1967, j’avais trois ans, et il aurait pu faire le même constat au sujet des services de protection de l’enfance.
    Que pouvons-nous faire? Nous avons la possibilité de nous servir des solutions qui s’offrent à nous. Il ne s’agit pas de problèmes dont les coûts n’ont pas déjà été établis. Il existe des solutions fondées sur des données probantes qui pourraient être mises en oeuvre et du financement en ce sens, ce qui nous permettrait de savoir que l’argent va exactement où il doit aller. Toutefois, il faut un engagement du gouvernement et de tous les partis, à savoir que nous n’essaierons pas d’économiser de l’argent sur… que la discrimination raciale ne se traduira pas par une mesure de compression budgétaire.
    En ce moment, nous plaidons devant le Tribunal canadien des droits de la personne pour obtenir la parité dans le financement accordé aux Premières Nations concernant la protection de l’enfance. Je répète à qui veut l’entendre que ce qui est le plus choquant dans toute cette histoire, c’est le simple fait d’être contraint à plaider une cause pareille dans un pays aussi riche que le nôtre.
     J’aimerais revenir un instant sur le principe de Jordan. Un grand nombre d’entre vous était là en décembre 2007 lorsque la Chambre des communes l’a adopté à l’unanimité. Le principe de Jordan prévoit tout simplement que les enfants des Premières Nations devraient avoir accès aux mêmes services gouvernementaux que les autres enfants, partout où ces services sont offerts, et ce, selon les mêmes conditions. C’est le principe d’équité auquel souscrivent tous les Canadiens de toute allégeance politique confondue. C’est ce qui explique l’unanimité du vote.
    Cependant, le principe n’a pas été mis en oeuvre correctement. En fait, la Cour fédérale a récemment statué contre le gouvernement fédéral dans une affaire portant sur la mise en oeuvre; il s'agit de l’affaire opposant le Conseil de la bande de Pictou Landing et Maurina Beadle au procureur général du Canada. Cela s’est passé en Nouvelle-Écosse. Il est question d'une mère célibataire qui doit prendre soin de son fils atteint notamment de paralysie cérébrale qui a d'importants besoins particuliers. Elle s’est acquittée de sa tâche durant 15 ans avec peu d’aide des services sociaux, mais elle est un jour terrassée par deux puissants AVC qui l'empêchent physiquement de prendre soin de son fils. Tout ce qu’elle demande, c’est que l’on fournisse à son fils les soins de relève dont il a besoin en attendant qu’elle se remette sur pied et qu’elle soit en mesure de reprendre le collier.
    Une décision de la Cour suprême de la Nouvelle-Écosse, soit l’arrêt Boudreau, établit que les enfants qui sont dans la même situation que Jeremy doivent recevoir le niveau de soins dont ils ont besoin et non un niveau établi de façon arbitraire. Mais le ministère des Affaires autochtones a décidé de ne pas tenir compte de cette décision et d'accorder une valeur fixe pour les soins à Jeremy, valeur que des professionnels de la santé ont jugée insuffisante.
    Le ministère a expliqué à la mère qu’elle pourrait confier son fils à la protection de l’enfance ou à une institution et que le gouvernement en assumerait les coûts. En tant que parents, grands-parents, tantes ou oncles qui aimez vos enfants, vous conviendrez qu'une telle solution est inacceptable. La mère a donc poursuivi le gouvernement fédéral devant les tribunaux en alléguant que la non-application du principe de Jordan contrevenait aux dispositions de la Charte. La Cour fédérale a reconnu que le gouvernement fédéral avait commis une erreur en prenant la décision de ne pas offrir le niveau de service requis et lui a ordonné d’en assumer la facture.

  (1840)  

    Le ministère des Affaires autochtones, par l'intermédiaire du ministère de la Justice, a décidé de porter sa cause en appel devant la Cour d'appel fédérale. Ce qui est le plus difficile à avaler, c'est que le ministère demande à Mme Beadle de payer les frais judiciaires. Je n'arrive pas à comprendre comment cela peut être dans l'intérêt des politiques publiques de quelque façon que ce soit.
    Pour ce qui est des solutions, nous les avons devant nous. Il faut appliquer intégralement le principe de Jordan. À cet égard, demandez-vous s'il est dans l'intérêt supérieur des Canadiens d'exiger d'une mère célibataire qu'elle assume les frais judiciaires, alors qu'elle se remet d'un infarctus et qu'elle doit prendre soin d'un enfant ayant d'importants besoins particuliers, ou s'il serait mieux de se servir des fonds pour garder Jeremy à la maison?
    Puis-je vous demander, madame Blackstock, de conclure le plus vite possible? Merci.
    Nos services de protection de l'enfance doivent être financés équitablement. Nous avons une occasion de le faire, puisque le premier ministre Selinger a demandé que la question de la protection de l'enfance pour les Premières Nations soit inscrite comme premier point à l'ordre du jour de la prochaine rencontre du Conseil de la fédération, ce qui est une excellente nouvelle. Cet événement servira de tribune politique où les gouvernements pourront discuter et collaborer. J'encourage le gouvernement fédéral à imiter ce geste.
    Nous devrions envisager quelque chose qui pourrait ressembler à une version canadienne de l'étude sur l'adversité durant l'enfance, parce que cela permettrait d'améliorer nos politiques ayant trait à l'enfance et que le sujet touche à de nombreux domaines où le gouvernement fédéral est actif. Une telle initiative pourrait en outre nous aider à prévoir les répercussions sur la santé, soit un domaine qui occupe une place importante dans le budget du gouvernement fédéral.
    Toutes ces mesures devraient être envisagées dans la perspective des fonds relativement dérisoires que nous obtenons. Il y aurait peut-être lieu d'envisager le programme d'unification des familles.
    Merci.
    Étant donné que nous avons pris plus de temps, je vais vous redonner la parole, docteure Bennett, pour les deux minutes et demie qui restent. Vous pouvez laisser le témoin terminer son exposé ou en faire ce que vous voulez.
    Comme nous avons très peu de temps, je préférerais que vous nous disiez ce qui vous ferait grand plaisir de voir dans notre rapport.
    Tout d'abord, Cindy, nous avons eu vent des terribles histoires entourant la route des pleurs. Êtes-vous au courant des raisons, y compris la violence, qui motivent les gens à quitter leur famille d'accueil?
    Nous entendons beaucoup d'histoires qui démontrent que les enfants qui ont été maltraités sont plus enclins à se retrouver dans des situations de violence à l'âge adulte. Il y a aussi le cas des femmes qui vivent de la violence familiale et qui se retrouvent dans une position difficile, car les autorités responsables de la protection de l'enfance exigent que ces écarts soient rapportés. La plupart des administrations considèrent que le fait d'être témoin d'actes violents constitue de la maltraitance, mais cela fait en sorte que de nombreuses femmes hésitent à aller chercher l'aide dont elles ont besoin par crainte de perdre leurs enfants. C'est un cycle qui est bien ancré.
    Voilà pourquoi il est sensé, sur le plan économique, d’investir dès le début dans les services à l'enfance et le soutien aux familles. Il serait en outre possible de prévoir les problèmes que ces femmes vivront au fil du temps, en fonction des événements violents qu'elles auront vécus en grandissant, et d’assurer la sécurité des familles, dans les cas où la violence fait partie de la réalité des femmes.

  (1845)  

    Diane.
    Selon les statistiques de Tracia’s Trust concernant le Manitoba, voici le profil des jeunes qui sont exploités sexuellement ou qui sont victimes de traite à caractère sexuel: des 400 jeunes exploités sexuellement qui sillonnent actuellement les rues de Winnipeg, 70 % sont des Autochtones, et 80 % sont des femmes. Les plus jeunes ont 13 ans, mais j'en ai déjà vu des plus jeunes encore. Environ 70 % d'entre eux sont des enfants qui sont confiés aux soins des services à l'enfance, ce qui constitue un autre facteur de risque très important. Environ 90 % d'entre eux ont vécu des traumatismes. Voici un autre aspect très important; la scolarité moyenne atteinte de ces jeunes ne dépasse pas la 7e année.
    De nombreuses choses peuvent être faites pour combler ces écarts et surmonter ces obstacles, surtout lorsqu'il s'agit de jeunes et de ce qui les rend vulnérables.
    Merci beaucoup.
    Merci beaucoup.
    Passons maintenant à Mme Brown. Vous avez sept minutes.
    Merci, mesdames, d'être là. Vous nous avez toutes deux donné de quoi réfléchir. Je crois que vous avez donné des éléments avec lesquels nous pourrons travailler.
    Lorsque nous avons entendu les familles des victimes — et je l'ai déjà dit la semaine dernière —, il y avait Bernadette Smith, dont la soeur est portée disparue. Elle nous a notamment demandé avec insistance de ne plus faire de rapports.
    Madame Blackstock, vous avez cité deux autres rapports ce soir pendant votre exposé. La semaine dernière, j'ai fait remarquer qu'il existait une quantité impressionnante de rapports sur le sujet. L'un des membres du comité a mis ma parole en doute, alors j'ai fait un peu de recherche entretemps. Seulement dans les 22 rapports que j'ai téléchargés, on cite 437 rapports universitaires. Et je n'en ai téléchargé que 22.
    Madame Redsky, l'un de ces rapports que j'ai ici avec moi a été rédigé par la Fondation canadienne des femmes. Ce seul rapport cite 66 études universitaires.
    Les études ont été faites. Le moment n'est-il pas venu de nous atteler à la tâche et de régler ces problèmes? Ne sommes-nous pas rendues à formuler des recommandations?
    Madame Redsky, l'un des rapports que vous citez a été préparé par Amnistie Internationale. Je vois ici que l'organisme a émis diverses recommandations, soit de veiller à ce que les femmes autochtones aient accès à la justice; d'améliorer la sensibilisation et la responsabilisation du public; de fournir un financement stable et adéquat aux organismes de première ligne qui fournissent des services adaptés sur le plan culturel; de s'attaquer aux causes profondes de la violence faite aux femmes autochtones; et d'éliminer les injustices qui entachent les services offerts aux enfants autochtones.
    Toutes ces questions vont dans le même sens que les éléments que vous avez soulevés ce soir.
    Si je me réfère à un autre rapport qui a été réalisé par Terre-Neuve-et-Labrador, 56 % des cas de violence contre des Autochtones sont commis par une personne connue de la victime. Et le rapport se poursuit en donnant des détails sur la violence en milieu familial.
    Si l'on connaît les causes de la violence — et vous avez dit qu'il serait temps de commencer à mettre au point des solutions —, ne serait-il pas temps de nous y attaquer?
    Je dirais oui, mais j'ajouterais que cela ne devrait pas exclure la recherche d'autres options ou l'élaboration de stratégies plus structurées. Je pense que vous risquez d'avoir des résultats fragmentaires si vous procédez à partir de diverses recommandations. Il est très important d'examiner ce que disent les différents rapports existants et de cerner les thèmes communs avant de se mettre au travail. La qualité de vie des femmes et des enfants concernés dépend du bon travail de votre comité.
    Cela ne ternit en rien la valeur d'une stratégie nationale ou d'une certaine forme de commission, si vous préférez, que de nombreux groupes réclament et qui mènerait à l'élaboration d'une stratégie nationale très globale pour intervenir et prévenir la violence à l'endroit des femmes autochtones.

  (1850)  

    Madame Redsky.
    La priorité doit être donnée à l'action. C'est la réponse claire que nous avons eue de la Fondation canadienne des femmes en juillet dernier. Nous devons agir. Nous devons savoir quoi faire. Nous devons cerner les causes et trouver les solutions. Nous devons prendre des mesures.
    D'après vous, avec ces 437 études universitaires et cette masse de références — et ce ne sont que quelques-unes de celles que j'ai téléchargées, car il en existe littéralement des milliers —, ne sommes-nous pas en mesure de commencer à mettre au point certaines solutions et de passer à l'action?
    Madame Blackstock, vous avez évoqué certaines solutions, et le tout débute à la maison avec les enfants. Il est inacceptable que des enfants aient à subir quelque forme de violence que ce soit à la maison. Ce n'est acceptable pour personne. Voilà l'une des suggestions. Est-ce qu'on pourrait commencer par cet aspect et essayer d'élaborer une solution? Avons-nous vraiment besoin de préparer d'autres rapports et de mener d'autres études avec tout ce qui existe déjà?
    En ce qui concerne les enfants des Premières Nations, nos travaux nous ont permis de cerner certaines choses qui pourraient être faites dès maintenant. Nous serons heureuses de vous en faire part comme bon vous semblera. Ces suggestions ne comportent pas que des avantages à court terme pour les familles des Premières Nations, mais elles s'attaquent également aux problèmes à plus long terme.
    Je crois que l'élément clé est de prendre la décision de passer à l'action, de convenir que nous allons entreprendre cette démarche. C'est notamment parce que les premières années sont les plus déterminantes pour un enfant. La prestation de tels services en bas âge est le meilleur moyen de prévoir les répercussions à long terme durant l'enfance, certes, mais aussi à l'âge adulte.
    Si l'on n'intervient pas immédiatement, si l'on remet à plus tard les mesures à prendre à cet égard, une autre génération d'enfants sera touchée. Il faut passer à l'action dès maintenant.
    C'est exact, et je dirais qu'il faut le faire d'une manière complète et courageuse.
    Je sais qu'il est difficile d'agir quand on fait face à des restrictions budgétaires, mais je tenais simplement à vous mettre au courant de ces faits. Une excellente étude a été menée par la fondation KidsRights. Cet organisme collabore avec des lauréats du prix Nobel afin de décerner le Prix international de la paix destiné aux enfants, que Malala a reçu l'année dernière. Les membres de cette organisation souhaitaient examiner le rendement des pays en matière de droits de l'enfant, par rapport à leur richesse. On ne s'attend pas à ce que des pays pauvres obtiennent des résultats aussi élevés que des pays riches comme le Canada. Ils ont classé les pays à l'aide d'une formule économique.
    En novembre 2013, ils ont découvert qu'à cet égard le Canada, une économie du G8, occupait la 60e position à l'échelle mondiale. Il est clair que nous sommes en mesure d'en faire plus pour favoriser les enfants et pour regagner une position qui cadre avec celle de notre économie, laquelle fait partie des huit premières de la planète.
    Vous venez juste de citer une autre étude.
    Madame la présidente, je sais que vous n'étiez pas présente la semaine dernière et que Mme Crowder a présidé la séance. J'aimerais présenter ces études afin qu'elles soient mentionnées dans le compte rendu parce que, la semaine dernière, mes paroles concernant le nombre d'études disponibles ont été remises en question. J'aimerais présenter les études au greffier.
    Je pense que nous pouvons accepter ces études. Vous pouvez les déposer dans le cadre de votre...
    Mme Lois Brown: Tout à fait. Merci.
    La présidente: Je vous remercie de votre contribution.
    Je vais permettre à Mme Duncan de tirer parti des cinq minutes d'intervention qui lui ont été accordées.
    Je vous remercie toutes les deux. Je suis certaine que tous tombent d'accord pour dire que nous avons besoin de vous entendre pendant une semaine, et non une demi-heure. Quoi qu'il en soit, je vous remercie toutes les deux de votre témoignage.
    Cindy, lorsque vous êtes entrée dans la salle — et aussi après avoir entendu l'excellent témoignage de Diane —, il m'est venu à l'esprit qu'en réalité il y a deux façons de procéder. La première survient après coup, après que les femmes et les enfants autochtones ont glissé entre les mailles du filet, ont vécu dans la pauvreté, ont eu recours à la prostitution, ont développé des dépendances, etc. Toutefois, il y a aussi l'autre façon de procéder, c'est-à-dire la possibilité de prévenir ces maux.
    Il me semble que bon nombre de ces études — y compris la présente qui porte sur les questions particulières de la traite des femmes autochtones, de leur prostitution et de leur pauvreté — examinent le problème après coup. Nous devons décider si nous allons continuer à nous pencher sur ces questions. Je ne dis pas qu'elles ne devraient pas être réglées... et très propres aux mesures stratégiques. Il semble que Diane ait vraiment réfléchi à bon nombre de ces questions, non pas que ce ne soit pas le cas de Cindy.
    L'autre approche consiste à participer à la prévention. J'aimerais vous entendre toutes les deux me dire si vous constateriez la valeur de...
    Selon moi, les hommes et les femmes autochtones demandent qu'on mène une enquête. Il s'agit davantage d'envisager de prendre des mesures stratégiques pour s'occuper des interactions entre les agents de police et les femmes ou les enfants autochtones, d'examiner le nombre de policiers qui sont vraiment affectés à ces endroits, et de déterminer si nous documentons convenablement les incidents, si nous identifions adéquatement les victimes et si nous prenons les mesures juridiques qui s'imposent, etc.
    L'approche dont vous avez parlé, Cindy, avait trait aux mesures stratégiques qui pouvaient être prises et qui l'ont été dans d'autres provinces.
    Je me demande si chacune de vous pourrait parler brièvement de ces façons de procéder. Pensez-vous que ces deux approches devraient être intégrées dans la stratégie, et qu'elles méritent d'être examinées attentivement dans un délai quelconque? En d'autres termes, « Voici quelques mesures stratégiques possibles. Mettez-les en oeuvre. »

  (1855)  

    Pour moi, c'est un peu comme la différence entre combattre un incendie et le prévenir.
    En ce moment, il y a déjà là-bas une génération de nourrissons et de jeunes enfants. Vous, les parlementaires, avez la possibilité d'avoir sur eux un effet bénéfique substantiel. Il ne s'agit pas seulement de la violence qu'ils vivront ou non à l'âge adulte, mais aussi de leur offrir une enfance saine. Vous pourriez réduire les taux de cancer, de diabète et d'incarcération. Ce sont toutes les préoccupations qu'ont vos divers électeurs partout au pays.
    En réalité, comme je le fais valoir souvent — et je pense que les faits le prouvent amplement —, la meilleure chose que tout gouvernement peut faire est d'investir dans les enfants, et non dans les gens de mon âge. Lorsqu'on investit des sommes d'argent dans l'enfance, cela rapporte énormément plus tard. Je pense que c'est également vrai des investissements dans la lutte contre la violence faite aux femmes et la violence dans les collectivités autochtones. Les investissements initiaux rapportent grandement.
    Selon moi, ce qu'il y a de complètement différent dans les mesures à prendre à l'avenir — et je crois effectivement que nous sommes à un important tournant de notre histoire —, c'est la voix des femmes expérientielles, la voix des femmes autochtones qui ont besoin de diriger. Il faut qu'elles jouent un rôle clé dans toute enquête menée en vue d'élaborer un plan d'action national. Je pense qu'en ce qui concerne les mesures à prendre dans les mois ou les années à venir, c'est la principale différence qui existe.
    Cela n'a vraiment pas été effectué de manière aussi approfondie que par le passé. Même dans le cadre de notre travail en collaboration avec le groupe de travail national sur la traite de personnes, nous faisons appel à des femmes et des survivants expérientiels. Nous avons rencontré des survivants des quatre coins du pays. En fait, nous avons participé à une table ronde nationale avec des survivants. Les gens qui sont les plus touchés doivent être assis à la table, avoir voix au chapitre et représenter la partie fondamentale du processus. Ils doivent être au coeur de tout ce qui se produit. Cela engendrera des mesures.
    D'après ce que je vous ai entendues dire toutes les deux, nous devons procéder des deux façons. Cependant, ces deux approches sont différentes. Il faut que des mesures soient prises immédiatement pour adopter ces deux approches, c'est-à-dire pour mener une enquête et pour entendre les personnes appropriées parler de ces problèmes. Nous devons également tâcher de protéger les enfants.
    Puis-je dire cela sans risquer de me tromper?
    Oui. Ce serait comme si vous choisissiez de financer les hôpitaux mais pas les vaccins contre la grippe. Cela n'a aucun sens. Allons là-bas, et procédons des deux façons. Si l'on investit dans les Autochtones pendant les premières années de leur vie, on aura moins besoin de réaliser les interventions graves et très coûteuses qui s'imposent à l'âge adulte. C'est ce qu'on espère, et c'est ce que les données semblent indiquer.
    Il vous reste environ 20 secondes.
    Bon sang. Je voulais accorder...
    Vous savez quoi? Allez-y.
    J'allais partager mon temps de parole, mais...
    Avez-vous une brève question à poser, monsieur Morin? Il ne reste plus beaucoup de temps.

[Français]

    Je vais tâcher d'être bref.
    Madame Blackstock, ma question s'adresse à vous.
    Les communautés autochtones ont toujours été exclues de la vie économique et de la société en général. J'ai voyagé partout au Canada, et c'est la première chose que j'ai remarquée. J'avais 17 ou 18 ans et je voyais que tout un pan de la société vivait comme s'il provenait d'une autre planète, comme s'il était constitué d'étrangers. Serait-ce une des sources du problème? Toutes les disparitions ainsi que les problèmes liés à la prostitution et à la toxicomanie ne seraient-ils pas simplement des conséquences de ces prémisses?

  (1900)  

[Traduction]

    Je vais vous accorder à peu près 30 secondes pour répondre à la question.
    Je connais un excellent livre intitulé « L'Égalité c'est mieux ». Je vous recommande tous de le lire. Le livre démontre que, si un gouvernement souhaite que, sur son territoire, une grande confiance règne, que les taux d'incarcération soient faibles, que les taux de scolarisation soient élevés et que les habitants jouissent d'une grande longévité, la seule chose qu'il doit faire, c'est de réduire les inégalités sur son propre territoire.
    Je pense qu'en accordant la priorité à cet investissement, le gouvernement fédéral observerait de bons résultats dans tous les domaines, et cela réglerait bon nombre des questions que vous soulevez.
    Merci beaucoup. Mesdames Redsky et Blackstock, j'aimerais vous remercier toutes les deux d'être venues aujourd'hui et de nous avoir consacré du temps ce soir. Nous vous en sommes très reconnaissants. Nous allons suspendre nos travaux pendant une minute afin de poursuivre la séance à huis clos.
    Madame Ashton.
    Je sais gré à Mme Brown des renseignements qu'elle nous a communiqués pour donner suite au rappel au Règlement que mon collègue a fait la semaine dernière. Je me demande si la liste de rapports universitaires — en fait, je ne suis pas certaine de savoir en quoi consiste un rapport universitaire — pourrait être distribuée aux autres membres du comité.
    Nous ne pouvons les distribuer que s'ils sont présentés dans les deux langues officielles. Je crois comprendre que nous pouvons les recevoir, mais non les distribuer. Est-ce exact?
    Oui.
    Nous avons consenti à les recevoir par l'entremise du comité. Peut-être le comité pourrait-il s'assurer qu'ils sont traduits. J'ai conscience que Mme Brown les a fournis à notre demande. Le chiffre auquel elle avait fait allusion la semaine dernière était 120 000. Je suis étonnée de constater que ce chiffre s'élève aujourd'hui à 435, mais nous aimerions tout de même voir cette liste.
    Madame la présidente, j'ai téléchargé 22 rapports pour donner au comité un exemple du nombre d'études accessibles. Lorsque j'ai présenté les rapports, j'ai indiqué que 437 rapports universitaires étaient cités dans les quelque 22 études en question. Nous pourrions télécharger chacune d'elles, et je suis certaine que l'effet cumulatif du nombre d'études accessibles devrait convaincre Mme Ashton qu'un énorme nombre d'études ont été menées.
    Selon moi, il est probable que la présentation d'études par Mme Brown visait plutôt à prouver leur grand nombre qu'à demander qu'elles soient traduites et prises en considération.
    Je pense que Mme Brown n'avait pas l'intention que nous tenions compte de ces études dans notre rapport. Elle cherchait plutôt à faire valoir le fait que de nombreuses études ont été menées. Je crois que nous pouvons tous le reconnaître.
    Je suis désolée, mais je ne peux reconnaître cela, et Mme Brown demande si je suis... La question n'est pas de savoir si j'approuve les actions de n'importe quel député ici présent. Des interventions inscrites dans le compte rendu mentionnent 120 000 rapports, 435 rapports et 22 rapports, et ces renseignements sont brandis comme des vérités.
    Je veux m'assurer que le nom de Bernadette Smith ou de toute autre personne renvoyée aux rapports n'est pas cité de manière inappropriée dans le témoignage de quelqu'un. Madame la présidente, les renseignements en votre possession sont utilisés pour appuyer l'argumentation de Mme Brown. Je suis préoccupée par le fait que nous ne sommes pas en mesure d'examiner les faits qui vous sont communiqués, en votre qualité de présidente. Je serais assurément très inquiète d'apprendre que ces renseignements sont fournis aux analystes alors que le reste des membres du comité ne savent même pas s'ils sont vrais ou non.
    Comme je l'ai indiqué, ce n'est pas le cas.
    Cela concerne des rapports que je ne crois pas que vous déposiez. Ai-je raison?
    Ils n'ont pas besoin d'être déposés.
    Vous ne voulez pas qu'ils soient pris en considération dans le rapport. Je tiens seulement à faire valoir qu'en très peu de temps, il a été en mesure... De toute façon, étant donné que ces rapports ne sont pas disponibles dans les deux langues officielles, nous n'en tiendrons pas compte dans le rapport.
    Madame la présidente, je n'ai aucune idée de ce qui se passe. Soit ces rapports sont déposés, soit ils ne le sont pas. En règle générale, les articles scientifiques existent dans les deux langues officielles.

  (1905)  

    Vous faites valoir un excellent argument...
    Encore une fois, je ne comprends pas ce que fait la députée. Si ces rapports ne sont pas analysés, comment pouvons-nous savoir ce qu'ils disent? Qui les a analysés? Comparativement aux 120 000 rapports dont elle parlait la semaine dernière, je crains qu'il s'agisse là d'une forme de camouflage des renseignements inexacts qu'elle nous a fournis la semaine dernière, et je ne suis pas certaine que nous souhaitions être complices de cela. Elle essaie de prétendre que presque tous les témoins que nous avons entendus ont parlé de la nécessité de mener une enquête publique nationale et d'établir un plan d'action national, et que cela constitue un geste. Cette manoeuvre accompagnée d'une foule de documents ne trompera aucun de nous.
    Pour répondre à votre question, ces études ne sont pas en train d'être déposées; nous ne les recevons pas, et nous ne les prendrons pas en considération. Je vous les rends volontiers parce que c'est le cas. Je ne crois pas que cela constitue un problème, et je ne veux pas à empiéter sur le temps que nous avons besoin de passer à huis clos pour rédiger des directives.
    Je vais encore une fois remercier les témoins d'être venus, et nous allons suspendre nos travaux pendant une minute afin de nous préparer pour la prochaine partie de la séance.
    [La séance se poursuit à huis clos.]
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