Le débat d’urgence / Motion d’ajournement – le débat d’urgence

Interprétation de l'article du Règlement sur la tenue des débats d'urgence; observations du Président faisant suite à une discussion à la Chambre

Débats, p. 6463-6464

Contexte

Les 4 et 5 février 1992[1], M. David Dingwall (Cape Breton—Richmond ­Est) signale à la présidence qu'il souhaite invoquer le Règlement afin de faire part à la Chambre de certaines réflexions concernant le fonctionnement de l'article 52 du Règlement, la disposition permettant de tenir des débats d'urgence. La présidence convient d'entendre le rappel au Règlement le 6 février, immédiatement après les affaires courantes. Durant ses remarques du 6 février, M. Dingwall présente les arguments suivants : depuis que des changements ont été apportés aux heures de séance de la Chambre, les débats d'urgence ne nuisent plus aux travaux de la Chambre, le rapport du Comité McGrath a recommandé de tenir un plus grand nombre de débats spéciaux, et le fait de procéder ainsi permettrait à tous les députés de débattre davantage des questions qui les préoccupent. Il demande au Président de tenir compte de ces arguments lorsqu'il rendra des décisions sur les demandes de débats d'urgence. M. Nelson Riis (Kamloops) prend ensuite la parole et soutient que l'élargissement de la définition d'une urgence permettrait aux députés de prendre davantage la parole sur les questions qui intéressent les parlementaires et le public et donnerait à la Chambre une chance de réagir aux questions d'actualité importantes. Le secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre (M. Albert Cooper) soutient que les travaux au moyen des outils habituels que constituent les discussions et négociations entre partis continuent à se révéler efficaces pour créer des occasions de débats, et il maintient qu'il ne serait pas prudent de s'écarter de ces voies habituelles et de demander au Président de réinterpréter l'article 52 du Règlement. M. Peter Milliken (Kingston et les Îles) fait remarquer que les députés avaient peu souvent l'occasion de débattre de questions publiques urgentes, mais que ce mécanisme était essentiel au fonctionnement du Parlement[2]. Le Président profite de l'occasion pour répondre aux questions soulevées. Ces remarques sont reproduites ci-dessous.

Décision de la présidence

M. le Président : J'ai écouté attentivement la question soulevée par le député de Cape Breton-Richmond-Est, ainsi que les commentaires du député de Kamloops, du député de Kingston et les Îles et du secrétaire parlementaire qui, par le passé, s'est toujours intéressé de près aux ordres de la Chambre et à certaines étapes de la réforme de ces ordres.

Je dirais tout d'abord aux députés que je ne considère pas cette intervention et cette discussion comme une critique des anciens Présidents ou de leurs décisions, ni comme une critique à mon égard. Je veux que l'on comprenne bien cela.

Je pense aussi que les députés et le public qui nous regarde doivent bien comprendre également que nous sommes parfois critiqués parce que nous ne nous conduisons pas de façon civilisée. Nous avons eu, ce matin, un exemple de délibération on ne peut plus civilisée.

Je suis au courant des arrangements particuliers conclus, comme l'a dit le secrétaire parlementaire, « par les voies habituelles », et mentionnés par les intervenants des deux côtés, pour permettre de donner aux députés du temps supplémentaire pour parler de la sérieuse question de la Constitution. Je dois dire, en tant que Président, que les observations faites par les deux côtés pour défendre cela sont justes et méritent d'être appuyées.

La difficulté devant laquelle se trouve la présidence, c'est que tant qu'une recommandation appuyée par les députés ne sera pas venue du Comité de la gestion et des services aux députés, tant qu'il n'y aura pas une interprétation différente du mot « urgent », la présidence sera liée par la définition actuelle.

Cela dit, il y a beaucoup de choses qui traversent l'esprit du Président lorsqu'il essaie de déterminer s'il s'agit vraiment d'une urgence ou si les circonstances évoluent quotidiennement vers une urgence ou au contraire vers un dénouement. Le député de Cape Breton-Richmond-Est en a justement parlé.

On a fait remarquer qu'il y a eu des cas où, par le biais des voies habituelles que mentionnait le secrétaire parlementaire, ce qui n'était peut-être pas une urgence au sens strict et étroit pour un débat d'urgence, a néanmoins été accepté par les deux côtés de la Chambre, parce que l'on estimait, en général qu'il était dans l'intérêt du public qu'un débat ait lieu dans cette enceinte.

Je suis également conscient du fait, mentionné par le secrétaire parlementaire et les députés de Cape Breton- Richmond-Est et de Kingston et les Îles, que suite aux recommandations du Comité de réforme-acceptées partiellement seulement-, le vieux dilemme du Président, qui devait décider s'il fallait perturber l'Ordre du jour pour accorder un débat d'urgence, est maintenant disparu. C'est du passé. Et on a souligné avec raison qu'un débat d'urgence aurait lieu après le dernier point de l'Ordre du jour, sauf le vendredi.

Je crois maintenant que le mieux que je puisse faire, c'est de réfléchir sérieusement à ce qui a été dit. On crée une situation très difficile en demandant à un Président de modifier les règles unilatéralement. Il reste qu'un Président doit examiner un certain nombre de choses en déterminant ce qui constitue une urgence. Ainsi, ce qui, à un certain moment, ne constitue pas une urgence, peut en être une plus tard, et une situation qui est en train de devenir une urgence ne doit pas nécessairement être abordée comme une urgence pour plusieurs raisons, notamment, parce qu'il est possible que les choses prennent une nouvelle tournure ou parce que le sujet pourra être abordé à un autre moment. La présidence doit tenir compte de tous ces facteurs et de bien d'autres.

Sachez que je vois l'échange de ce matin comme un échange très constructif et j'espère que je pourrai prendre une décision aussi sage que vous le souhaitez tous.

De toute évidence, si la règle était changée, d'autres facteurs entreraient en ligne de compte. Il pourrait être plus facile d'accepter les débats d'urgence. Il faut opposer à cela la voie préconisée par le secrétaire parlementaire qui correspond aux voies normales, aspect très important du fonctionnement de la Chambre des communes.

J'étudierai attentivement ce qui a été dit, et il se pourrait très bien que nous discutions plus en profondeur de la question à un autre moment.

J'ajouterai encore-et je sais que le député de Cape Breton-Richmond­ Est le comprendra-que cette requête est un peu inhabituelle, car elle ne constitue pas un rappel au Règlement dans le sens où nous l'entendons habituellement. Peut-être pas. Son intervention n'était pas motivée par quelque chose qui vient de se produire à la Chambre ou qui s'est produit pendant la période des questions, mais portait sur notre Règlement, l'une de nos règles et son interprétation. Les arguments ont été exposés brièvement et de manière fort courtoise, ce qui, à mon sens, facilite les choses.

F0818-f

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1992-02-06

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[1] Débats, 4 février 1992, p. 6338; 5 février 1992, p. 6437-6438.

[2] Débats, 6 février 1992, p. 6458-6463.