Le programme quotidien / Affaires courantes

Présentation de pétitions : délai dans la présentation des pétitions après qu’elles aient été certifiées; députés autres que celui ayant spécifiquement demandé la certification autorisés à présenter des pétitions

Débats, p. 6500-6501

Contexte

Le 23 mars 1987, M. Doug Lewis (secrétaire parlementaire du vice-premier ministre et président du Conseil privé) invoque le Règlement au sujet de la présentation de pétitions par des députés néo-démocrates. Son rappel au Règlement comprend deux volets. Tout d’abord, il s’interroge sur le délai qui existe entre la certification des pétitions par le greffier des pétitions et leur présentation en Chambre par certains députés. Il dit avoir remarqué que des députés présentent des pétitions longtemps après que celles-ci aient été certifiées. À son avis, cette pratique retarde le redressement des griefs exposés dans les pétitions, discrédite la Chambre et va à l’encontre du droit fondamental qu’est celui de soumettre des pétitions à la Couronne et au Parlement. Le second volet du rappel au Règlement a trait à la certification de pétitions pour un député et présentées par un autre. Selon M. Lewis, en distribuant à d’autres députés des pétitions qu’ils auraient fait certifier, des députés induisent le Parlement en erreur en donnant l’impression que l’inquiétude au sujet d’un problème est répandue puisque les pétitions sont présentées par des députés de différentes circonscriptions. D’autres députés interviennent également sur ce rappel au Règlement. Après avoir fait quelques remarques préliminaires, le Président prend la question en délibéré[1]. Le 28 mai 1987, il rend sa décision. Celle-ci est reproduite intégralement ci-dessous.

Décision de la présidence

M. le Président : Le secrétaire parlementaire du vice-premier ministre et président du Conseil privé attend patiemment, depuis assez longtemps, que la présidence se prononce sur une question qu’il a soulevée le 23 mars dernier. Le secrétaire parlementaire du vice-premier ministre a soulevé un rappel au Règlement pour remettre en question la pratique qui prévaut actuellement à l’égard de la présentation des pétitions. Il a plus particulièrement signalé un certain nombre de cas où des pétitions certifiées par le greffier des pétitions n’ont été présentées à la Chambre que quelques semaines ou quelques mois plus tard. Il a prétendu qu’un délai prolongé entre la certification d’une pétition et sa présentation à la Chambre refusait aux Canadiens pétitionnaires la chance d’obtenir rapidement satisfaction à leurs griefs. Il a en outre soutenu qu’une telle pratique empêche aussi le gouvernement de répondre rapidement.

Pour la gouverne de tous les députés et du public, je précise que le Règlement de la Chambre exige que le gouvernement réponde dans un délai prescrit à chacune des pétitions que les députés présentent au cours d’une intervention à la Chambre ou qu’ils déposent sur le Bureau. Il est important que ce soit bien compris par tous les députés et par le public parce que c’est un élément essentiel dans cette affaire.

Le secrétaire parlementaire présente ici un grief tout à fait légitime. Les pétitionnaires ne s’attendent pas à ce qu’il s’écoule plusieurs mois entre la date où ils ont signé la pétition et la réponse à cette pétition. Bien qu’il faille plusieurs semaines pour recueillir les signatures, expédier la pétition à Ottawa, la faire certifier par le greffier des pétitions, la présenter à la Chambre et recevoir la réponse du gouvernement, la plupart des Canadiens trouveraient difficiles à expliquer les retards de sept ou huit mois que le secrétaire parlementaire a signalés.

Le deuxième point soulevé par le secrétaire parlementaire concernait la présentation de pétitions par des députés autres que celui qui les a fait certifier. Les députés savent qu’ils doivent faire certifier une pétition par les greffiers avant de la présenter. Le secrétaire parlementaire a soutenu que cette pratique pourrait être trompeuse car, lorsque des députés de tout le pays se trouvent à présenter des pétitions on peut en déduire qu’une question en particulier intéresse beaucoup plus les Canadiens que ce n’est peut-être vraiment le cas.

Pour répondre à ces deux arguments, permettez-moi de citer d’abord l’article 106(1) du Règlement qui se lit comme il suit :

Avant leur présentation, le greffier des pétitions examine toutes les pétitions qu’il doit juger correctes quant à la forme et au contenu pour qu’elles puissent être présentées.

Cet article n’exige nullement qu’une pétition soit présentée dans un délai particulier. Il prévoit uniquement que les pétitions doivent être jugées correctes avant leur présentation. La présidence a consulté le rapport présenté en juin 1985 par le comité McGrath qui a recommandé l’adoption de cet article du Règlement afin de déterminer s’il contenait la moindre indication au sujet de la limitation possible du temps écoulé entre la certification d’une pétition et sa présentation, mais elle n’y a rien trouvé pour se guider.

Pour aller un peu plus loin, on lit, dans le commentaire 691 de la cinquième édition de Beauchesne :

On ne peut contraindre un député de présenter une pétition. Dans une cause subséquente, le tribunal a statué qu’une personne désireuse de présenter une pétition à la Chambre n’avait pas le droit d’obliger un député à présenter sa pétition, et qu’aucune accusation ne peut être portée contre le député qui refuse de le faire.

Si rien n’oblige un député à présenter une pétition, faut-il exiger qu’une pétition soit présentée dans un délai prescrit après avoir été certifiée? Le 23 mars 1987, le député d’Ottawa—Vanier (M. Jean-Robert Gauthier) a signalé que diverses raisons pourraient empêcher un député de présenter rapidement une pétition certifiée. Il n’est pas nécessaire de laisser passer plusieurs mois entre la certification d’une pétition et sa présentation dans la plupart des cas. Je reconnais cependant avec le député de Churchill (M. Rod Murphy) que le Règlement actuel n’impose aucune restriction particulière.

Au sujet du deuxième point soulevé par le secrétaire parlementaire, permettez-moi de citer l’article 106(4) du Règlement, où l’on peut lire que :

Tout député qui désire présenter une pétition de sa place à la Chambre peut le faire […] à l’appel de la Présentation de pétitions.

Cet article du Règlement ne précise pas que le député qui présente la pétition doit être celui qui l’a fait certifier ou même qu’il doit représenter la circonscription des pétitionnaires. article ne prévoit aucune restriction, il prévoit simplement que « tout député » peut le faire.

Après une lecture attentive des articles pertinents du Règlement et après en avoir fait une interprétation stricte, je ne puis rien trouver qui oblige le député qui a fait certifier une pétition à la présenter lui-même. En fait, comme l’a signalé le député d’Ottawa—Vanier, il est précisément question, dans les commentaires [689 et 690 de la cinquième édition] de Beauchesne, de députés qui présentent des pétitions au nom d’autres députés.

Comme les articles actuels du Règlement qui ont trait aux pétitions sont provisoires et ne sont en vigueur que depuis quelque temps, et comme le Comité permanent des élections, des privilèges et de la procédure étudie en ce moment les divers articles provisoires du Règlement, il serait peut-être opportun de suggérer aux membres du Comité de se pencher particulièrement sur les articles du Règlement qui régissent la présentation des pétitions si, comme l’a soutenu le secrétaire parlementaire, les articles en question suscitent des inquiétudes.

Vu le texte actuel des articles provisoires en question, je ne peux exiger que le député qui a fait certifier une pétition la présente lui-même à la Chambre. Je n’y trouve non plus aucune disposition qui limite le délai entre la certification et la présentation d’une pétition.

Néanmoins, je crois que le secrétaire parlementaire a eu raison de soulever ces questions, car elles portent sur le droit de tous les citoyens de présenter des pétitions à la Chambre des communes et d’obtenir une réponse rapide. J’invite tous les députés à examiner cette question attentivement, et je les remercie de leurs interventions.

F0328-f

33-2

1987-05-28

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[1] Débats, 23 mars 1987, p. 4428-4434.