Bienvenue à la 93e réunion du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international de la Chambre des communes. La séance d'aujourd'hui se déroule sous forme hybride, conformément au Règlement. Par conséquent, les participants sont présents en personne dans la salle, ainsi qu'à distance au moyen de l'application Zoom.
J'aimerais faire quelques observations à l'intention des membres du Comité et des témoins.
Avant de prendre la parole, veuillez attendre que je vous nomme. Vous pouvez vous exprimer dans la langue officielle de votre choix. Des services d'interprétation sont disponibles. Bien que cette salle soit équipée d'un système audio puissant, il peut y avoir des retours de son pouvant être extrêmement dommageables pour les interprètes. Ils sont le plus souvent causés par un écouteur porté trop près d'un microphone.
En ce qui concerne la liste des intervenants, la greffière du Comité et moi-même ferons de notre mieux pour respecter l'ordre de parole de tous les membres, qu'ils participent virtuellement ou en personne.
Conformément à l'article 108(2) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le mercredi 8 novembre 2023, le Comité reprend son étude des capacités diplomatiques du Canada.
J'aimerais maintenant souhaiter la bienvenue à nos témoins. Nous accueillons l'honorable Mélanie Joly, ministre des Affaires étrangères. Elle est accompagnée de M. David Morrison, sous-ministre des Affaires étrangères, et de M. Antoine Chevrier, sous-ministre adjoint et dirigeant principal de la transformation. Nous vous sommes reconnaissants de votre présence.
Madame la ministre, je sais que ce sujet vous emballe. Nous sommes heureux de vous accueillir. Vous disposerez de cinq minutes pour faire votre déclaration liminaire, après quoi les membres du Comité vous poseront des questions.
La parole est à vous, madame la ministre.
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Je vous remercie, monsieur le président. Je suis heureuse de tous vous voir.
[Français]
Cela me fait plaisir de vous voir tous réunis ici.
[Traduction]
Le Canada traverse une crise de sécurité internationale de plus en plus grave. C'est indéniable.
Il y a quelques jours à peine, j'étais à Kiev pour transmettre un message clair aux Ukrainiens de la part de notre gouvernement: nous n'avons aucune intention de partir et nous serons là aussi longtemps qu'il le faudra. Le Canada continuera d'appuyer l'Ukraine dans sa lutte pour la liberté jusqu'à la fin de la guerre, mais aussi par la suite. C'est pourquoi le Canada et l'Ukraine ont lancé une coalition internationale visant à ramener les enfants ukrainiens chez eux. Nous voulons nous assurer que les enfants ne servent jamais de pions sur l'échiquier de la guerre.
Même après la guerre, l'Ukraine demeurera juste à côté d'un voisin très dangereux, la Russie. Nous savons que dans ce contexte, le Canada doit être en mesure d'aider l'Ukraine à se défendre et à prendre des moyens de dissuasion face au danger. C'est la raison pour laquelle j'étais là‑bas. Nous nous efforçons de faire progresser les engagements bilatéraux à long terme en matière de sécurité du Canada envers l'Ukraine afin de dissuader la Russie d'entreprendre toute nouvelle agression.
[Français]
Malheureusement, ce n'est pas le seul conflit dans le monde dont les Canadiens se préoccupent. Nous sommes tous bouleversés par les scènes dévastatrices provenant du Moyen-Orient, soit par l'attaque terroriste du Hamas menée contre Israël le 7 octobre dernier, que nous continuons à condamner fortement, soit du bilan de la crise humanitaire à Gaza, qui nous préoccupe tous de façon extrême.
Notre gouvernement soutient les efforts urgents qui sont déployés pour obtenir un accord de libération des otages. Cela pourra permettre d'offrir plus d'aide humanitaire à Gaza et obligera le Hamas à déposer ses armes. Nous espérons que cette entente mènera éventuellement à un cessez-le-feu durable ainsi qu'à une solution à deux États.
[Traduction]
Que ce soit à Khan Yunis, à Kherson ou même à Khartoum, le système fondé sur des règles qui a assuré la sécurité des Canadiens pendant des générations est en train de s'effriter. Nous sommes tous devant des défis modernes de plus en plus complexes — la désinformation, la montée de l'intelligence artificielle et la polarisation politique, y compris la montée des mouvements extrémistes et populistes, même ici au Canada.
Nous ne pouvons pas laisser des acteurs malveillants exploiter cette incertitude en toute impunité. Pour relever ces défis, j'ai dit clairement que la politique étrangère de notre gouvernement sera guidée par deux principes clés.
D'une part, nous devons absolument défendre la souveraineté du Canada. Nos intérêts nationaux l'exigent, et notre sécurité nationale en dépend. Nous devons rester fermes et défendre le système fondé sur des règles et les institutions qui assurent notre sécurité.
D'autre part, nous devons faire preuve de diplomatie pragmatique pour travailler avec des pays ayant des perspectives différentes afin de prévenir les conflits internationaux. Je ne crois pas à la politique de la chaise vide. Nous ne trahirons jamais nos valeurs et nos intérêts nationaux.
Étant donné ce que nous faisons sur la scène internationale pour assurer notre réussite, nous devons être présents à l'échelle mondiale et avoir des yeux et des oreilles sur le terrain. Nos diplomates doivent être diversifiés, bilingues, en bonne santé et bien outillés.
L'automne dernier, nous avons publié un plan détaillé visant à transformer Affaires mondiales Canada pour le préparer à l'avenir de la diplomatie. Il est plus important que jamais que ce plan soit mis en œuvre, et je remercie MM. Chevrier et Morrison d'y avoir participé activement.
Ce plan comporte quatre volets.
[Français]
Premièrement, nous avons besoin d'investir dans notre personnel, dans « notre monde », comme on dit. Cela comprend le recrutement d'un corps diplomatique représentatif du Canada dans toute sa diversité. Les francophones doivent pouvoir s'exprimer dans leur langue maternelle. Il faut aussi renforcer les connaissances des langues étrangères. Nous devons aussi apporter un plus grand soutien à notre personnel et à leurs familles à l'étranger.
[Traduction]
Deuxièmement, nous devons accroître notre présence là où c'est le plus important. Cela signifie qu'il faut renforcer notre influence dans les principales institutions multilatérales, y compris les Nations unies, bien sûr.
Nous devons également accroître notre présence diplomatique dans des régions clés comme l'Europe de l'Est, l'Afrique et l'Indo-Pacifique. Notre gouvernement a déjà commencé à le faire.
Troisièmement, nous devons améliorer notre expertise en politiques pour mieux anticiper et gérer les crises de longue durée comme les changements climatiques, ainsi que les enjeux de l'intelligence artificielle et du monde numérique.
Enfin, et surtout, nous devons avoir les outils et les processus nous permettant d'être efficaces et de mieux nous protéger contre les cybermenaces, qui sont actuellement une priorité pour nous tous.
[Français]
Je suis prête à répondre à vos questions.
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De toute évidence, l'Iran sait que nous considérons qu'il soutient le terrorisme. Nous avons pris les mesures les plus musclées contre l'Iran — par rapport au reste du monde —, et nous continuerons de veiller à ce que ce régime soit tenu responsable de différentes façons.
Dans ces dossiers, je dois dire que mon rôle de ministre des Affaires étrangères comporte deux volets.
Mon premier rôle est de m'assurer de renvoyer les diplomates qui font de l'ingérence étrangère, le cas échéant. Puisque nous n'avons pas de relations diplomatiques avec l'Iran, il n'y a aucun diplomate au Canada qui représente l'Iran dans le cadre de nos relations bilatérales. C'est le premier volet.
En deuxième lieu, nous devons faire preuve de transparence si nous apprenons toute information à l'avance. C'est ce que nous avons fait dans votre cas l'été dernier, monsieur Chong, lorsqu'il est devenu évident que la Chine avait essayé d'exercer des pressions sur vous et votre famille. Nous continuerons en ce sens, parce que vous et moi — et nous tous — savons de toute évidence que la question de l'ingérence étrangère est extrêmement importante. Nous ne tolérerons jamais rien de tel.
Puisque nous parlons de l'avenir de la diplomatie et de l'appareil gouvernemental, j'aimerais m'attarder à un enjeu lié au gouvernement, à savoir les récentes atteintes à la sécurité qu'il y a eu au ministère.
L'été dernier, le gouvernement américain a annoncé que des pirates informatiques de la République populaire de Chine étaient à l'origine d'un piratage de courriels au département d'État américain. La semaine dernière, votre ministère a annoncé qu'il avait fait l'objet d'une cyberattaque qui a forcé le gouvernement à fermer une partie de ses systèmes informatiques. C'est la deuxième attaque majeure depuis la dernière du début de 2022.
Pouvez-vous nous dire si ce sont des acteurs étatiques ou non qui sont à l'origine de cette attaque?
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Pour être honnête, je n'ai jamais entendu parler de tensions entre ces entités. Le SCRS ou sa direction ne m'a jamais dit qu'il y avait apparemment un conflit entre eux. Je l'ai lu pour la première fois dans le
Globe and Mail.
Cela dit, je ne crois pas qu'il doive y avoir des problèmes. Au fond, ce programme, qui est chapeauté par Affaires mondiales et respecte la Convention de Vienne, est extrêmement important partout dans le monde.
Par ailleurs, je ne suis pas du tout d'accord avec les allégations selon lesquelles l'un des Michael pourrait être mêlé à cette affaire. Je défendrai toujours nos deux Michael, qui ont été détenus arbitrairement par la Chine. Notre gouvernement sera toujours de cet avis. Bien sûr, j'espère que c'est aussi le point de vue de tous les députés du Comité et de la Chambre.
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Merci, monsieur le président.
Madame la ministre, soyez la bienvenue à notre comité. Sur une note un peu plus personnelle, je vous remercie de l'empathie que vous avez démontrée à l'égard des femmes, des enfants et des civils qui ont été tués en grand nombre en Israël et à Gaza, ainsi que de vos efforts visant à rétablir la paix et la dignité humaine au Proche‑Orient.
Notre comité étudie les capacités diplomatiques du Canada. Nous vous avons invitée parce que vous étudiez, en ce moment, l'avenir de la diplomatie, une initiative que vous avez présentée, ce qui est tout à votre honneur.
Pourriez-vous expliquer à notre comité et aux Canadiens en quoi consiste l'avenir de la diplomatie pour vous et pour Affaires mondiales Canada?
Il s'agit d'un exercice extrêmement important, parce que nous sommes dans un monde nouveau, un monde où il y a plus de crises, plus de guerres, plus de nouveaux enjeux, comme ceux qui sont liés aux changements climatiques ou à l'intelligence artificielle. Nous devons donc avoir une diplomatie moderne et adaptée aux défis du XXIe siècle. À cet égard, le travail que M. Morrison, M. Chevrier et moi avons fait ensemble est colossal.
D'abord, nous devons investir davantage dans notre personnel. Essentiellement, nous offrons leur expertise et leurs services partout au monde. Je sais qu'ils sont très présents à Ottawa et partout au monde, et je veux les en remercier. Le travail de diplomate est vraiment une mission, et je sais qu'ils nous représentent très bien partout.
Nous devons aussi augmenter notre présence dans le monde. Il est fondamental qu'il y ait plus de Canadiens aux Nations unies et dans les organisations multilatérales, parce que, présentement, les règles sont testées par des pays autocratiques. Or de nouvelles règles sont en train d'être rédigées sur de nouveaux sujets, comme l'intelligence artificielle. Ainsi, si nous ne sommes pas présents et si nous n'investissons pas dans ces organisations, nous ne serons pas capables de défendre nos intérêts ni de les promouvoir. C'est pourquoi notre présence est importante.
Nous devons également augmenter notre expertise en matière de changements climatiques et d'intelligence artificielle. Enfin, en lien avec la réponse que j'ai donnée à M. Chong, nous devons augmenter nos ressources en matière de technologie de l'information.
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Madame Chatel, je tiens à vous dire à quel point j'ai été impressionnée et touchée par le travail de nos ambassadeurs. Je pense notamment à Larisa Galadza, qui était l'ambassadrice du Canada en Ukraine au moment de l'invasion, et à Natalka Cmoc, l'ambassadrice actuelle. D'ailleurs, j'étais avec cette dernière la semaine passée. Elle travaille dans des situations très difficiles, alors qu'il y a une menace constante de missiles sur Kiev. Aujourd'hui, une quarantaine de missiles ont été lancés par la Russie sur l'Ukraine, particulièrement sur Kiev.
Je pense aussi à Philip Lupul, ambassadeur du Canada à Khartoum, au Soudan. Il a dû gérer une situation extrêmement difficile, car la vie de diplomates et de Canadiens était en danger. Il a dû veiller à ce qu'on procède à une évacuation à partir du Kenya. David Da Silva, qui est à Ramallah, et Lisa Stadelbauer, qui est à Tel‑Aviv, ont aussi dû travailler à des évacuations. Chaque jour, leur travail pose un risque important pour leur sécurité, parce que le Hamas bombarde Israël et qu'il y a des bombardements à Gaza. On doit soutenir et protéger les Canadiens qui sont en danger.
Depuis que je suis ministre des Affaires étrangères, il y a eu trois guerres et trois évacuations. J'ai vu à quel point le personnel d'Affaires mondiales Canada travaillait dans des situations extrêmement difficiles, sous énormément de pression, mais de façon très professionnelle.
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Merci, monsieur le président.
Madame la ministre, je vais d'abord parler de l'utilisation du français à Affaires mondiales Canada. Votre plan sur l'avenir de la diplomatie prévoit ceci:
[...] les cadres supérieurs de l’ensemble du Ministère devraient être tenus responsables d’assurer l’utilisation égale du français et un milieu de travail bilingue, en plus de promouvoir la diplomatie francophone, tant à l’administration centrale que dans le réseau des missions à l’étranger.
Comme on peut l'imaginer, la tâche est immense. Pas plus tard que cette semaine, un sous-ministre adjoint s'est exprimé seulement en anglais lorsqu'il s'est adressé au Comité, même lorsqu'il a fait son allocution d'ouverture. Le premier ministre, lors d'événements à l'étranger ou devant les diplomates à Ottawa, s'exprime en anglais et utilise le français pour synthétiser ses propos, essentiellement. La gouverneure générale, qui représente parfois le Canada à l'étranger, ne parle toujours pas français. Enfin, certains hauts fonctionnaires, lors de conférences ou d'événements diplomatiques tenus à Ottawa, parlent en anglais et utilisent le français simplement pour les formules de politesse.
J'aimerais, madame la ministre, que vous répondiez à cinq questions quant à l'utilisation du français à Affaires mondiales Canada.
Premièrement, votre politique de transformation prévoit-elle des exemptions pour certains fonctionnaires en ce qui concerne le français, notamment pour les sous-ministres et sous-ministres adjoints? Seront-ils soumis à des examens?
Deuxièmement, une utilisation égale des deux langues officielles, comme l'indique votre document, s'appliquera-t-elle même à Ottawa, que ce soit pour le , pour vous ou pour les fonctionnaires lors des participations à des événements reliés à l'international?
Troisièmement, le mécanisme pour accéder à des hauts postes au sein d'Affaires mondiales Canada — Le Devoir a documenté à plusieurs reprises le caractère discriminatoire envers les francophones en ce qui concerne les promotions — est-il de l'histoire ancienne?
Quatrièmement, pouvez-vous nous parler de l'atout du français en matière de diplomatie et nous dire pourquoi cela devrait être une composante essentielle de notre stratégie?
Enfin, sur quels continents et dans quelles perspectives le français pourrait-il être utile en matière de diplomatie?
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Merci, madame Larouche.
Nous pouvons nous entendre toutes les deux sur le fait qu'on doit encore et toujours protéger le français. En ce qui concerne Affaires mondiales Canada, c'est certainement une de mes préoccupations, en tant qu'ancienne ministre des Langues officielles, fière francophone et fière Québécoise. J'ai eu l'occasion d'en parler à plusieurs reprises avec MM. Morrisson et Chevrier.
La Loi sur les langues officielles s'applique à tous les ministères, dont Affaires mondiales Canada. Cette loi a été renforcée à la suite du livre blanc que j'ai publié à l'époque, lorsque j'étais ministre, et du projet de loi que j'ai déposé et que ma collègue Ginette Petitpas Taylor a pu mener à terme. D'ailleurs, je l'en remercie énormément.
Cependant, pendant trop longtemps, la Loi sur les langues officielles n'abordait pas assez la question des relations internationales. C'est pourquoi nous avons voulu réformer la Loi pour rectifier le tir à cet égard et y inclure une reconnaissance de l'importance de la Francophonie internationale.
Je suis d'accord avec vous: le fait que nous sommes membres de la Francophonie internationale nous permet d'avoir accès à des dizaines de pays avec lesquels nous pouvons avoir des relations diplomatiques très constructives, particulièrement en Afrique et au Moyen‑Orient, un peu en Asie, également, et certainement au sein de l'Union européenne.
Alors, pour répondre à votre question, oui, c'est un atout. Est-ce une force que nous devons exploiter davantage? Oui, absolument. Est-ce que cela nous rend extrêmement fiers, les gens d'Affaires mondiales Canada et moi, comme ministre? Oui, absolument.
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D'accord, merci. Je sais que ma question était longue. Je vais essayer de vous en poser une plus courte, mais j'en ai plusieurs à vous poser.
J'aimerais vous parler maintenant des nominations partisanes, madame la ministre. Au cours de l'étude, nous avons reçu plusieurs témoins qui ont exprimé des inquiétudes sur ce qu'on peut appeler des nominations partisanes au sein des représentations étrangères du Canada, nuançant parfois leurs propos en expliquant le besoin de nominations de confiance pour des postes très précis et stratégiques.
Plus récemment, le Hill Times expliquait que le premier ministre, Justin Trudeau, se classait au troisième rang parmi les premiers ministres canadiens ayant nommé le plus d'anciens ministres du Cabinet, seulement dépassé par les premiers ministres Chrétien et Trudeau père. On apprenait récemment que le premier ministre avait proposé à son ancien ministre de la Justice un poste en Espagne; Marc Garneau, quant à lui, a refusé un poste en France; Stéphane Dion est utilisé à toutes les sauces; Bob Rae est à l'ONU; et John McCallum était en Chine avant de démissionner. D'anciens députés libéraux sont régulièrement affectés à des représentations.
Votre document explique ceci: « Affaires mondiales Canada devrait promouvoir et récompenser la créativité, les réalisations et l’esprit d’initiative et créer une culture qui encourage une prise de risque judicieuse. »
Alors, quelle stratégie poursuivez-vous lors de la nomination de personnes du monde politique?
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Nous pouvons être fiers d'avoir de très bons ambassadeurs qui proviennent de notre réseau diplomatique, que ce soit à Washington, à Pékin ou à Brasilia.
Nous pouvons aussi être fiers d'avoir un très bon réseau diplomatique de façon générale. En effet, ce sont des gens qui ont beaucoup d'expérience et qui sont très respectés, que ce soit au Quai d'Orsay ou à l'Élysée, à Paris, ou au 10, Downing Street, en Grande‑Bretagne.
Nous avons aussi une nouvelle ambassadrice au Danemark, pays qui est lié au Groenland. On sait que la relation avec les Inuits est une question très importante au Groenland, et Mme Bennett a beaucoup d'expérience en matière de relations avec les communautés autochtones, y compris la communauté inuite. C'est pourquoi je pense que c'est une très bonne nomination.
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Je vais vous poser trois questions, madame la ministre, après quoi je vous donnerai du temps pour y répondre.
Je vais poser quelques questions sur le Moyen-Orient, en commençant par nos ventes d'armes à Israël. J'ai posé des questions inscrites au Feuilleton, et j'ai reçu des réponses tout à fait inadéquates. Je sais que les médias sont très mécontents. Ils obtiennent des réponses différentes à divers moments.
C'est ma première question. Pour que les choses soient claires, le Canada a‑t‑il envoyé et envoie‑t‑il des armes à Israël — qu'elles soient militaires ou non, technologiques, létales ou non, ou à double usage?
Je pose cette question en raison de l'enquête de la Cour internationale de justice, ou CIJ, selon laquelle il y a plausiblement un génocide en cours, auquel le Canada pourrait être complice. Je crains que le Canada ne soit complice d'un génocide si nous continuons à vendre des armes.
La deuxième chose que je voulais vous demander est la suivante. J'ai dit très clairement avoir été horrifiée par la décision de votre gouvernement de cesser de financer l'Office de secours et de travaux pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient, ou UNRWA — j'étais absolument horrifiée. Nous savons que c'est la seule organisation qui peut offrir un soutien vital à des enfants innocents à Gaza. C'est très clair.
Vous avez rendu votre décision. La CBC affirme maintenant que les responsables canadiens n'avaient aucune information lorsqu'ils ont pris cette décision. Elle reposait uniquement sur des renseignements que vous aviez reçus d'Israël. Cela me préoccupe énormément. Pourriez-vous nous expliquer brièvement comment vous justifiez votre décision et à quel moment nous pouvons nous attendre à ce que cette interruption soit levée afin que les enfants innocents de Gaza ne fassent pas les frais des actes terroristes du Hamas?
Cela m'amène au Hamas. Je dois dire...
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Je suis désolée, madame McPherson, mais je vais poursuivre.
J'en ai parlé avec mon homologue parce que nous convenons tous que l'aide humanitaire doit être acheminée vers Gaza. Nous sommes tous d'accord pour dire que la violence doit cesser. Nous nous entendons tous pour dire que nous devons parvenir à une entente pour libérer les otages, qui finira par mener à un cessez‑le‑feu durable, qui finira par mener, nous l'espérons, à une solution à deux États. C'est la position du Canada. J'espère que c'est également celle des personnes présentes ici et des membres de tous les partis à la Chambre des communes.
À propos de l'Office de secours et de travaux des Nations unies, je suis d'accord pour dire que nous devons fournir une aide humanitaire. Nous nous entendons tous là‑dessus. On mène actuellement une importante enquête aux Nations unies. On l'a confiée à mon ancienne collègue, Catherine Colonna, l'ancienne ministre française des Affaires étrangères. C'est une enquête importante, car les allégations sont graves. Cela dit, pendant ce temps, nous devons absolument continuer d'offrir une aide humanitaire par l'entremise de différentes organisations. Le en est responsable.
En ce qui concerne les armes, car vous m'avez posé la question, nous connaissons tous notre système d'échange d'armes. C'est un des plus robustes au monde. Je peux vous dire et dire aux personnes qui nous regardent comment il fonctionne. Les entreprises canadiennes demandent des permis d'exportation au gouvernement, et ce n'est donc pas le gouvernement du Canada qui envoie des armes: ce sont les entreprises qui s'adressent à nous.
Ce que je peux vous dire, c'est qu'aucune arme n'a été envoyée sous ma gouverne au cours des dernières années, et aucune depuis le 7 octobre. Cependant, je...
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Merci, monsieur le président.
Madame la ministre, merci d'être ici cet après-midi.
Michael Spavor prétend que le Programme d'établissement de rapports sur la sécurité mondiale, ou PERSM, est en partie responsable de sa détention illégale. Le rapport de l'Office de surveillance des activités en matière de sécurité nationale et de renseignement a conclu que le PERSM est conforme à la Convention de Vienne sur les relations diplomatiques. Il n'y a toutefois aucune directive juridique, aucune évaluation des risques, aucun protocole de sécurité ni aucune formation adéquate pour s'assurer que les plus de 30 agents d'Affaires mondiales Canada qui s'occupent du PERSM mènent leurs activités conformément au droit international. Ce rapport date de 2020.
Quelque chose a‑t‑il changé à cet égard? Les conclusions du rapport sont-elles exactes dans une certaine mesure?
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Merci, monsieur le président. Madame la ministre, merci d'être ici aujourd'hui.
Il se passe tellement de choses dans le monde en ce moment. Je sais que votre travail est extrêmement difficile dans les circonstances actuelles. Je le reconnais et je vous suis reconnaissant.
Le Moyen-Orient me préoccupe énormément. Beaucoup de Canadiens regardent ce qui se passe et y ont des êtres chers. Certains Canadiens sont toujours coincés dans la bande de Gaza et essaient d'en sortir, avec leur famille. Notre gouvernement s'est engagé à aider les familles de Canadiens à venir au Canada. Beaucoup de Canadiens sont revenus. Ils ont pu quitter Gaza, ce qui est très positif. Vous avez dit, avec raison, que c'était le pire endroit au monde en ce moment.
Pouvez-vous nous dire quels sont les défis à relever pour extirper les Canadiens et leurs familles qui sont toujours dans la bande de Gaza? Quels sont les défis auxquels vous faites face? Avant...
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J'ai passé plusieurs nuits blanches à cause de la situation des Canadiens coincés dans la bande de Gaza. Nous organisons habituellement des services consulaires dans divers pays de sorte qu'une fois que les Canadiens sont en mesure de partir, ils peuvent le faire; ils n'ont pas nécessairement besoin d'une autorisation, selon le pays. Dans le cas de la bande de Gaza, nous devons obtenir l'approbation pour faire sortir les Canadiens, en fait, pour faire sortir qui que ce soit, et cette approbation doit venir d'Israël, par l'entremise du COGAT, qui fait partie du ministère de la Défense israélien. De plus, les Canadiens qui quittent Gaza doivent obtenir une autorisation de l'Égypte. La coordination entre ces deux gouvernements n'est pas toujours harmonieuse, c'est le moins qu'on puisse dire.
Bien que les retards aient parfois été frustrants, reconnaissons‑le, nous devons absolument nous assurer que les Canadiens qui passent par Rafah sont en mesure d'y aller lorsque les conditions s'y prêtent. Il y a eu des bombardements dans la région du passage de Rafah, et il a donc été extrêmement difficile pour les Canadiens de se rendre au passage.
À partir du moment où des Canadiens sont au passage de Rafah, l'équipe du Caire va les rencontrer et les prend en charge. Nous avons une entente avec l'Égypte selon laquelle les Canadiens qui sortent de Gaza doivent quitter l'Égypte dans les 48 heures qui suivent. C'est pourquoi nous avons également travaillé avec les Canadiens pour nous assurer qu'ils pouvaient voyager au Canada, et s'ils n'ont pas nécessairement les fonds nécessaires, nous avons prévu un programme de prêts très efficace.
Sachez, monsieur Zuberi, que j'ai moi-même des électeurs qui ont de la famille à Gaza, et c'est un dossier auquel je consacre beaucoup d'efforts. Je dois remercier Julie Sunday, qui est à la tête de nos affaires consulaires et de notre équipe de négociation pour la libération des otages, car elle a fait un travail fantastique dans une situation très difficile.
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Nous croyons en l'ONU. Je dois dire que je regarde mes amis du Parti conservateur et je ne sais pas quelle est leur position officielle ou s'ils sont en faveur de l'ONU ou non. Je constate que M. Chong me fixe. Parfois, le silence en dit encore plus, alors je veux m'assurer que mes collègues sont tous d'accord pour dire que l'ONU est importante.
Cela dit, nous avons besoin de plus de gens à l'ONU. Affaires mondiales Canada a besoin de plus de chercheurs et de diplomates, parce que le monde a changé. Il a changé depuis le gouvernement Harper et il a changé depuis que nous étions au pouvoir avant la pandémie. C'est la réalité. Je vous ai dit au début que nous sommes dans une crise de sécurité internationale, et que nous avons donc besoin de plus de diplomates aux Nations unies et au G20, qui travaillent au sein des différentes organisations de l'ONU, y compris, par exemple, à Genève, à l'OACI, etc., parce que de nombreux gouvernements essaient de changer les règles du jeu, y compris la Chine. Si nous ne sommes pas à la table et si nous n'avons pas la capacité, nous ne serons pas en mesure de défendre nos intérêts.
Madame la ministre, je vais parler de la diplomatie parlementaire, étant donné que vous n'y faites aucunement mention dans vos documents.
J'aimerais savoir de quelle façon Affaires mondiales Canada pourrait encourager la participation des élus, qui, de manière générale, sont ouverts à l'idée de contribuer à une image positive du Canada. Plusieurs témoins ont mentionné qu'il serait utile de faire valoir cet exercice.
Quel est votre point de vue sur la diplomatie parlementaire?
Nous avons connu une situation un peu gênante concernant l'Ukraine, dont vous revenez. Sauf erreur, vous n'étiez pas accompagnée de députés de l'opposition, tout comme lors de vos déplacements antérieurs. Le Canada est d'ailleurs un des seuls pays du G7 à ne pas avoir envoyé de délégation parlementaire sur place. Pourtant, on se targue d'être les plus proches alliés de l'Ukraine dans le cas de cet enjeu, qui va au-delà du clivage des partis. Ce comité a tenté de se rendre en Ukraine, mais cela lui a été refusé pour des raisons de sécurité, comme l'a révélé The Hill Times.
Pourquoi la sécurité est-elle une prérogative pour les parlementaires, et non pour les ministres?
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Merci, madame Larouche.
Nous sommes tous d'accord pour dire que la diplomatie parlementaire est importante. Elle ne relève assurément pas d'Affaires mondiales Canada, puisqu'elle est la prérogative du Parlement. Je pense que si on avait parlé de diplomatie parlementaire, la présence d'un conflit entre le pouvoir législatif et le pouvoir exécutif aurait été invoquée.
C'est pourquoi nous allons continuer de soutenir et de renforcer les divers groupes parlementaires, dont les groupes d'amitié parlementaire. Je pense que nous devons encore et toujours y travailler. En effet, nous savons maintenant que, plus nous sommes aptes à entretenir des liens diplomatiques à divers niveaux, avec divers gouvernements, le mieux c'est. C'était le premier élément.
Le deuxième concerne l'Ukraine. Le député Stéphane Bergeron m'a demandé d'aborder cette question. Il m'en a encore parlé hier. J'ai l'impression d'entendre M. Bergeron quand vous me parlez, madame Larouche.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Je vais changer un peu de sujet.
C'est la Semaine du développement international. Je sais que vous n'êtes pas la ministre du Développement international. Cependant, il y a du financement qui passe par votre ministère, en particulier pour les droits de la personne. Nous entendons des histoires vraiment troublantes dans le secteur de la part de représentants d'OSC de partout au Canada, qui évoquent des fonds qui tardent à venir et des problèmes connexes. Les OSC font un excellent travail en matière de droits de la personne, en particulier au chapitre du soutien aux femmes et aux filles. Ce travail devrait s'aligner sur notre politique d'aide internationale féministe.
Or, les OSC nous disent qu'il y a des retards dans le financement et un manque d'information de la part de votre bureau. Elles me disent que vous ne respectez pas la PAIF et qu'elles craignent que les compressions des dernières années nuisent au travail du Canada à l'échelle mondiale.
Je me demande pourquoi les approbations de votre bureau — car c'est votre responsabilité, à Affaires mondiales — et des bureaux de vos collègues prennent autant de temps. Pourquoi refuse‑t‑on de subventionner de multiples projets de défense des droits de la personne, en particulier ceux qui concernent les femmes et les filles?
Avant de vous céder la parole, madame la ministre, je tiens à dire que nous attendons depuis des années une politique étrangère féministe. On nous a dit qu'elle existait quelque part, mais nous ne l'avons pas vue. Devrions-nous abandonner tout espoir? Cette politique verra‑t‑elle le jour?
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Mme McPherson, en ce qui concerne votre premier point — à savoir que les subventions des organisations se font attendre —, c'est la première fois que j'en entends parler. Je vais me renseigner. C'est inacceptable et nous allons régler le problème.
Monsieur Morrison, je vous prie de vous en occuper.
Deuxièmement, en ce qui concerne la politique étrangère féministe, nous la vivons tous les jours. Notre politique étrangère est axée sur une approche féministe depuis que nous avons été élus. J'ai rencontré tellement d'organisations... Je reviens de l'Ukraine, où j'ai rencontré des survivantes de la violence fondée sur le sexe. Nous poursuivrons notre travail pour le compte des femmes et des filles du monde.
Je sais que la travaille également sur cette question, en appuyant les femmes entrepreneures. Le , auquel vous faisiez allusion, travaille sur le soutien aux femmes et aux filles...
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Merci, monsieur le président.
Merci, madame la ministre, de votre présence aujourd'hui.
Je suis d'accord avec les premiers commentaires de Mme Fry, mais j'aimerais traiter d'un autre sujet. Nous parlons souvent du fait qu'Affaires mondiales compte de nombreux secteurs d'activité. Ce n'est pas nécessairement le terme que j'utiliserais, mais il n'en demeure pas moins qu'il y en a beaucoup. À bien des égards, les Canadiens ne sont pas directement touchés; ils le sont juste indirectement. C'est le cas des Canadiens qui voyagent à l'étranger et qui peuvent être aux prises avec toutes sortes de difficultés. Il peut s'agir de problèmes très simples, comme la perte d'un passeport ou quelque chose du genre, qui peuvent être aisément résolus, mais il y a aussi des situations plus complexes.
Pensez-vous que les fonctionnaires d'Affaires mondiales disposent de toutes les ressources nécessaires pour répondre aux besoins des Canadiens et leur offrir les services auxquels ils sont en droit de s'attendre lorsqu'ils se rendent à l'étranger? Les gens voyagent beaucoup plus qu'avant, et je me pose des questions à ce sujet.
Je défends un peu mes propres intérêts, car j'aime bien moi-même voyager.
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J'ai été ministre du Tourisme, et j'ai alors appris que le Canada est le pays où les gens voyagent le plus par habitant. Nous aimons beaucoup aller aux États-Unis et visiter différents autres endroits à l'étranger. Cependant, notre monde est de plus en plus complexe à gérer avec des pressions qui s'exercent et des dangers qui nous guettent comme jamais auparavant. Nous devons être en mesure de fournir ces services aux Canadiens. Pour ce faire, nous devons mettre en place les mécanismes appropriés en réduisant le plus possible les formalités administratives. C'est au vu de cette nécessité de revoir notre approche que l'initiative L'avenir de la diplomatie a pris tout son sens.
Nous devons en outre mieux miser sur la technologie pour améliorer notre offre de services, notamment lorsqu'il s'agit des communications entre l'ambassade, l'agent consulaire et Ottawa pour aider les Canadiens à l'étranger.
J'ai répondu à bon nombre de vos questions — on dirait un souper chez les Joly le dimanche soir, car nous sommes une famille très politisée —, et j'espère vraiment que nous pouvons tous convenir du fait que nous devons investir davantage pour que nos diplomates aient accès à toutes les ressources nécessaires. La dernière réforme de notre ministère, Affaires mondiales Canada, remonte à plusieurs décennies. C'est l'occasion pour chacun d'exprimer sa foi envers le travail accompli par le Canada à l'échelle internationale. En toute franchise, je ne crois pas que cela devrait relever de la partisanerie.
Je pense que cela nous ramène à ce que disait M. Oliphant. Il s'agit d'offrir des services aux Canadiens, tout en veillant à protéger les intérêts de notre pays. La France vient d'investir massivement dans son nouveau réseau, en embauchant 700 diplomates de plus. À la suite de l'arrivée au pouvoir de l'administration Biden, le secrétaire Blinken a annoncé un énorme réinvestissement dans le réseau diplomatique américain. Cela porte ses fruits en ce moment en raison des nombreux conflits qui font rage et des divers problèmes de sécurité. L’Allemagne s'y emploie également. Nous ne sommes pas le seul ministère au monde à le faire. Beaucoup de nos amis et alliés font de même. Nous savons que de nombreux pays du BRIC en font tout autant. Ils veulent accroître leur influence et avoir une voix plus forte à l'échelle internationale. Nous devons donc nous adapter. C'est pourquoi cette étude est si importante.
Il y a une chose que les Canadiens ne savent pas nécessairement, et que j'ai moi-même apprise en devenant ministre des Affaires étrangères. Je parle de la mesure dans laquelle nous nous en remettons au personnel recruté sur place partout dans le monde. Par exemple, une ambassade peut compter sur 60 diplomates canadiens, mais sur 150 employés recrutés sur place. Ces gens‑là sont extrêmement importants. Beaucoup d'entre eux font du travail lié à l'immigration. C'est essentiel pour tant de membres des différentes communautés partout au pays.
C'est pourquoi nous devons nous assurer d'être en mesure d'embaucher les meilleurs candidats et de soutenir la concurrence pour nous assurer leurs services. Dans une capitale donnée, toutes les ambassades vont tenter de recruter ces candidats qui sortent du lot. Nous devons aussi être capables de les garder à notre service. Comme leur apport revêt une importance fondamentale dans plusieurs de nos secteurs d'activité, nous devons pouvoir leur offrir une protection accrue, surtout en situation de conflit ou de crise. C'est ainsi qu'en Ukraine et au Soudan, nous avons convenu, fait sans précédent, de prendre en charge nos employés recrutés sur place en élargissant notre interprétation de l'immunité diplomatique pour nous assurer de pouvoir les mettre en sécurité.
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Merci, monsieur le président.
Je veux d'abord que vous sachiez, monsieur le président, que ma question porte sur la vérification des allégations d'un autre pays avant de réduire le financement d'une organisation de l'ONU. Selon moi, cela s'inscrit tout à fait dans la portée de votre étude sur les capacités diplomatiques du Canada.
Madame la ministre, vous savez comme moi qu'il y a deux millions de personnes à Gaza qui dépendent du soutien de l'UNRWA, l'Office de secours des Nations unies. Comme vous l'avez dit à maintes reprises, Gaza est le pire endroit au monde où vivre en ce moment. L'UNRWA emploie 13 000 personnes là‑bas. Le 26 janvier dernier, 12 de ces employés ont été promptement congédiés à la suite d'allégations voulant que ces personnes entretenaient des liens avec le Hamas.
Comme Mme McPherson l'a dit plus tôt, CBC nous apprend maintenant que nous avons suspendu notre financement avant même que le gouvernement du Canada ait pu prendre connaissance de preuves à l'appui de l'affirmation d'Israël suivant laquelle certains employés de l'UNRWA aurait été de mèche avec le Hamas de quelque façon que ce soit. À la lumière de tout cela, y a‑t‑il actuellement des conversations au sein de votre ministère ou avec le concernant un éventuel rétablissement du financement de l'UNRWA?
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Toutes mes excuses. Ma langue a fourché.
Le Canada n'a pas été intégré à l'AUKUS en 2021. C'est ce à quoi je faisais allusion. Il s'agit de l'alliance de défense et de sécurité réunissant l'Australie, les États-Unis et le Royaume-Uni. Nous avons aussi été tenus à l'écart lorsque des pourparlers avec les talibans ont eu lieu en Norvège. Nous avons également tourné le dos à nos voisins, à nos alliés, dans le dossier du gaz naturel liquéfié.
Comment réagissons-nous à tout cela? Ce que je cherche à savoir, ce n'est pas tant... Nos questions posées à la ministre portaient davantage sur nos relations internationales dans le contexte des différents points chauds dans le monde. Je suis par ailleurs très préoccupé par nos relations avec nos propres alliés. Nous ne semblons pas avoir... C'est du moins ce que nous disent les experts qui témoignent devant le Comité.
Pourriez-vous nous parler de la place du Canada dans le monde? Comment nos alliés nous perçoivent-ils, au vu de notre exclusion de ces tribunes qui pourraient nous offrir des perspectives privilégiées?
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Je ne souscris pas à la prémisse de cette question suivant laquelle nous serions exclus.
L'AUKUS est une entente sur les sous-marins conclue entre des pays ayant des intérêts de sécurité directs dans le Pacifique. Nos préoccupations relatives aux sous-marins ne sont pas du tout du même ordre. Au‑delà de l'entente de base sur les sous-marins, l'AUKUS porte sur des éléments supplémentaires faisant notamment intervenir la mise en commun des technologies. Dans ce contexte, nous avons clairement indiqué — et la Nouvelle-Zélande a fait de même —, que nous pourrions souhaiter nous joindre à ces échanges technologiques lorsque la situation s'y prêtera. Il n'en demeure pas moins que nos partenaires du Groupe des cinq nous ont bel et bien fait comprendre que l'AUKUS est en fait une entente sur les sous-marins.
J'ai été sherpa pour le G7 pendant cinq cycles de rotation, et j'estime que nous sommes présents à presque toutes les tables qui ont de l'importance. Comme l'a dit la ministre Joly, nous pourrions en faire encore davantage. Nous pourrions avoir plus de ressources — pas nécessairement plus d'argent, mais nous devons réinvestir dans le service extérieur. C'est là tout l'esprit du rapport « L'avenir de la diplomatie » et de la mise en œuvre...
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La priorité absolue est d'investir dans le service extérieur.
La ministre Joly a cité les statistiques. La France a bénéficié d'une augmentation générale de 20 % de son budget et a engagé 800 nouveaux diplomates. Nous avons laissé notre service extérieur s'atrophier au fil du temps, du point de vue du recrutement, du maintien en poste et de l'investissement, y compris dans les compétences linguistiques.
Avant le début de cette session, j'ai discuté avec M. Hoback. Entre la fin de la guerre froide et l'invasion en février 2022, le Canada a bénéficié d'une chance extraordinaire parce que notre sécurité était essentiellement assurée par notre géographie.
Dans mon édifice, au sein de l'organisation d'Affaires mondiales, les hauts fonctionnaires faisaient fonction de négociateurs commerciaux. Nos meilleurs éléments couraient le monde entier pour signer des accords commerciaux, car, comme je l'ai indiqué, au cours de cette période de 30 ans, nous avons été protégés par notre géographie et la mondialisation qui ont permis aux entreprises canadiennes de vendre de nombreux produits et de bénéficier d'accords de libre-échange.
Nous évoluons aujourd'hui dans un monde très différent, et nous avons besoin de diplomates qui assument un éventail beaucoup plus large de fonctions.
Pour revenir sur le point soulevé par Mme Joly concernant la participation aux tables multilatérales, des règles sont en train d'être rédigées en ce moment même au sujet de la 6G. Nous devons être assis à ces tables, à la fois pour des raisons de prospérité et de sécurité nationale. Nous avons vu ce qui s'est passé lors du déploiement de la 5G: le monde et nous-mêmes avons adopté un point de vue trop étroit à l'égard de cette technologie.
Pour participer à ces discussions, il faut que des personnes travaillant dans les organisations appropriées soient assises aux tables de négociations appropriées, et cela coûte de l'argent.
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Je vous remercie de votre réponse.
Ai‑je le temps de poser une autre question rapidement?
M. Chevrier ou vous-même pourriez peut-être répondre à cette question. Je voulais obtenir des éclaircissements à propos de la question posée par M. Genuis.
Je crois comprendre que la République démocratique du Congo, ou RDC, a demandé au Conseil de sécurité des Nations unies de retirer les troupes de maintien de la paix plus tôt que prévu et qu'à la fin de l'année dernière, le Conseil de sécurité des Nations unies a accédé à cette demande de retrait des troupes de la Mission de l'Organisation des Nations unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo, ou MONUSCO.
Ai‑je compris les choses correctement? Étant donné que le Canada ne siège pas au Conseil de sécurité, ai‑je bien compris ce processus?
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Merci, monsieur le président.
Je remercie les fonctionnaires d'être parmi nous.
Je vais d'abord aborder la question de la diplomatie ouverte.
En 2022, M. Daniel Livermore, qui a été fonctionnaire dans le domaine des relations internationales pendant trois décennies, s'inquiétait du fait qu'Affaires mondiales Canada semblait ignorer les affaires culturelles internationales. Il expliquait que des recommandations du Sénat datant de 2019 avaient notamment préconisé l'élaboration d'une stratégie culturelle et que cette recommandation était restée sans réponse.
Comment le Canada entrevoit-il la diplomatie culturelle et ouverte dans sa stratégie future? Le Canada ne pourrait-il pas faire plus d'investissements dans la Francophonie, notamment pour se rapprocher de certains États africains qui, aujourd'hui, se tournent de plus en plus vers la Chine et la Russie?
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Je vous remercie de votre question.
Je me rappelle très bien le rapport publié par le Sénat sur la diplomatie culturelle en 2019. Nous avions approuvé presque toutes ses recommandations.
Nous accordons une grande importance à la diplomatie culturelle. Quand j'étais diplomate à La Havane, il y a plusieurs années, nous en faisions beaucoup. C'est comme la diplomatie parlementaire dont on a parlé auparavant.
Cela coûte cependant de l'argent. Ce n'est pas gratuit. Il faut avoir des ressources pour envoyer les Grands Ballets canadiens outre-mer, par exemple.
En ce moment, le ministère doit accorder la priorité aux choses essentielles, c'est-à-dire investir dans le personnel avant tout.
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C'était carrément une recommandation du Sénat; nous y reviendrons.
J'aimerais maintenant aborder la collaboration avec les provinces.
Des témoins ont recommandé de mettre plus l'accent sur les partenariats avec les représentants provinciaux. Les représentants des bureaux d'Affaires mondiales Canada à l'étranger ont dit que, pour un État appartenant à une confédération, ils disposaient du service extérieur provincial le plus élaboré au Canada et au monde.
Quelle est donc la stratégie d'Affaires mondiales Canada pour accroître sa collaboration avec les bureaux extérieurs du Québec et des provinces?
Ces derniers pourraient-ils jouer un rôle dans l'élaboration d'une stratégie culturelle ou permettre l'organisation de la diplomatie ouverte?
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En tant que sous-ministre des Affaires étrangères et ancien sous-ministre du commerce international, je dirais qu'il existe une grande collaboration entre les bureaux du fédéral et ceux des provinces situés un peu partout dans le monde. D'ailleurs, j'ai eu l'occasion à plusieurs reprises de rencontrer mon homologue du Québec pour parler de collaboration.
Je crois que, sur le plan de la diplomatie culturelle, c'est une très bonne idée de partager les ressources et les stratégies. Je suis certain que, en ce moment, les choses se passent ainsi dans les ambassades réparties dans le monde.
Il n'existe pas de programme comme tel, mais, dans nos ambassades en Chine, aux États‑Unis et partout en Europe, nous avons une collaboration très étroite, même avec le Québec.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Je vous remercie tous d'être présents aujourd'hui et aussi de rester avec nous à cette heure un peu tardive.
Monsieur Morrison, je voudrais me faire l'écho de vos observations selon lesquelles le Canada se trouve aujourd'hui dans une situation différente.
Je travaillais dans ce secteur à l'époque, et je n'étais pas favorable à l'idée de réunir au sein d'Affaires mondiales Canada l'ACDI, le commerce international et d'autres ministères. Je pense que la diplomatie est importante, mais j'estime aussi que le développement revêt une importance cruciale. C'est l'un des pieds du tabouret qui doit soutenir notre politique étrangère, au même titre que la défense. Je crois que nous avons laissé tomber la diplomatie et le développement, et que nous devons prendre davantage de mesures dans le secteur de la défense. Je tiens à le mentionner clairement.
J'ai une question plus détaillée à vous poser. Elle concerne les préoccupations que j'ai communiquées à la ministre et au gouvernement à l'automne au sujet des détonateurs qui traversaient le Kirghizistan pour être acheminés en Russie.
Cette affaire met en évidence une véritable faille dans nos lois. Ces détonateurs étaient en route vers la Russie, vraisemblablement en vue d'être utilisés dans des mines terrestres identiques à celles ciblées par les efforts de déminage en Ukraine que le gouvernement canadien finance. Notre comité a procédé à un examen des sanctions et a recommandé que le gouvernement du Canada publie chaque année des données complètes sur les exportations canadiennes de biens à double usage comme ces détonateurs. Nous constatons ces lacunes dans notre système d'exportation d'armes. La ministre a parlé d'un système « robuste », mais je pense que de nombreuses organisations et de nombreux exemples ont montré clairement qu'il n'est pas aussi robuste qu'il devrait l'être.
Allez-vous faire de la publication des données sur les biens à double usage une priorité immédiate cette année?
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Tous les députés ont eu l'occasion de poser leurs questions.
Permettez-moi de remercier de leur présence le sous-ministre Morrison et le dirigeant principal de la transformation, M. Chevrier. Cela fait presque trois heures que vous êtes parmi nous.
J'aimerais également profiter de l'occasion pour remercier les autres fonctionnaires qui se sont joints à nous et qui comprennent, bien sûr, Mme Shirley Carruthers, sous-ministre adjointe et dirigeante principale des finances. De plus, nous avons eu le plaisir d'accueillir Mme Vera Alexander, sous-ministre adjointe associée, Gestion des personnes et des talents. Bien entendu, nous avons également eu le plaisir de recevoir M. Stéphane Jobin, directeur général de l'Institut canadien du service extérieur. Je vous remercie infiniment du temps que vous nous avez consacré et des compétences dont vous nous avez permis de bénéficier.
Nous allons maintenant suspendre la séance pendant quelques minutes afin de pouvoir passer aux travaux du Comité.
[La séance se poursuit à huis clos.]