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HESA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la santé


NUMÉRO 069 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 19 septembre 2017

[Enregistrement électronique]

  (1800)  

[Traduction]

    Je déclare la séance ouverte. Je vous souhaite la bienvenue à la 69e réunion du Comité permanent de la santé. Nous sommes ici pour étudier une loi concernant le cannabis et modifiant la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, le Code criminel et d'autres lois.
     J'aimerais souhaiter la bienvenue à tous nos invités. Nous les entendrons dans l'ordre suivant. L'honorable Jody Wilson-Raybould présentera un exposé en sa qualité de ministre de la Justice. Puis, l'honorable Ginette Petitpas Taylor prendra la parole à titre de ministre de la Santé. Enfin, l'honorable Ralph Goodale interviendra à son tour en sa qualité de ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile.
    Nous accueillons à nouveau parmi nous, à la demande générale, Jacqueline Bogden, sous-ministre adjointe, Direction générale de la légalisation et de la réglementation du cannabis du ministère de la Santé. Nous recevons aussi Carole Morency, directrice générale et avocate générale principale, Section de la politique en matière de droit pénal du ministère de la Justice. Enfin, nous accueillons Trevor Bhupsingh, directeur général, Division de l'application de la loi et des stratégies frontalières du ministère de la Sécurité publique et de la Protection civile.
    Monsieur Davies?
    Monsieur le président, pouvez-vous préciser si les ministres seront présents pendant les deux heures de la réunion?
    Oui, ils le seront.
     J'aimerais maintenant demander à l'honorable Jody Wilson-Raybould de prendre la parole.
    Merci, monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du Comité. C'est un grand plaisir pour moi d'être présente ici aujourd'hui, et j'aimerais souligner le fait que vous êtes revenus plus tôt pour entendre des témoins et avoir des discussions au sujet de cette question des plus importantes, que mes honorables collègues, les ministres Goodale et Petitpas Taylor ont l'honneur de présenter, dans le contexte du projet de loi C-45 concernant le cannabis.
     Pendant que le Comité poursuivait son travail important d'examen de ce projet de loi, le ministre Goodale et moi-même avons rencontré nos homologues provinciaux et territoriaux à Vancouver. La conduite avec facultés affaiblies par le cannabis et la drogue a représenté un élément important de notre ordre du jour, et nous sommes d'avis que la participation des provinces et des territoires constitue un aspect incroyablement important de nos travaux à ce jour. Il ne fait aucun doute que la légalisation et la réglementation stricte du cannabis ont suscité beaucoup de discussions, avant et surtout après le dépôt du projet de loi C-45. Dans mon allocution d'aujourd'hui, avant que je cède la parole à mes collègues ministres, j'aimerais mettre en contexte dans une certaine mesure l'élaboration de notre proposition législative, faire ressortir le but visé par le projet de loi C-45 et donner un aperçu des aspects clés liés à la justice.
    Il existe un consensus large parmi les Canadiens selon lequel notre approche actuelle en ce qui a trait au cannabis ne fonctionne pas. Notre système d'interdiction pénale favorise un environnement où le crime organisé tire des milliards de dollars de bénéfices de la vente de cette substance, alors que des milliers de Canadiens chaque année se retrouvent avec un casier judiciaire pour des infractions non violentes liées au cannabis et que l'on ne peut pas empêcher que le cannabis tombe entre les mains des jeunes.
    La plupart des Canadiens ne croient plus que la possession simple de petites quantités de cannabis devrait faire l'objet de sanctions pénales sévères, qui peuvent avoir des répercussions toute la vie durant pour des personnes et qui utilisent des ressources précieuses de notre système de justice pénale. Notre gouvernement convient qu'il existe une meilleure approche, une approche fondée sur des données probantes, qui permettra de protéger la santé et la sécurité des Canadiens, avec un accent plus particulier sur la protection de nos jeunes.
    Au départ, le 30 juin 2016, nous avons constitué un Groupe de travail sur la légalisation et la réglementation du cannabis, dont le mandat était de nous conseiller sur la conception d'un nouveau système de réglementation. Je sais que la présidente du Groupe de travail, l'honorable Anne McLellan, et le vice-président, le docteur Mark Ware, ont comparu devant vous comme témoins la semaine dernière.
    Comme vous le savez, le Groupe de travail a mené des consultations exhaustives partout au pays, a visité les États de Washington et du Colorado, qui ont légalisé le cannabis à des fins non médicales, et a pris connaissance de près de 30 000 mémoires en ligne soumis par des Canadiens. Il a aussi sollicité le point de vue d'un groupe diversifié d'experts, de professionnels, de défenseurs des droits, de travailleurs de première ligne, de jeunes professionnels, de collectivités et d'organisations autochtones, de représentants territoriaux, provinciaux et municipaux, de responsables de l'application de la loi, de citoyens et d'employeurs.
     Le 13 décembre 2016, le Groupe de travail soumettait son rapport final comprenant plus de 80 recommandations en vue de l'établissement d'un cadre pour la légalisation du cannabis au Canada. Ce cadre repose sur une approche de santé publique visant à réduire les effets néfastes et à promouvoir la santé et la sécurité des Canadiens. Le rapport a été très bien reçu, est exhaustif et comprend des renseignements de base importants sur les enjeux que ce projet de loi vise à résoudre. Il a aussi joué un rôle essentiel dans l'élaboration du projet de loi C-45.
     Le projet de loi ouvre la voie pour que le Canada devienne le premier pays du G20 à légaliser et à réglementer de façon stricte le cannabis à l'échelle nationale. Il a été déposé le printemps dernier, en même temps qu'une autre initiative législative importante, le projet de loi C-46, qui propose de nouvelles dispositions législatives renforcées pour s'attaquer plus sérieusement à la conduite avec facultés affaiblies par la drogue et l'alcool.
     Comme le prévoit l'article 7 du projet de loi C-45, l'intention de notre gouvernement est de protéger la santé et la sécurité du public, en mettant l'accent plus particulièrement sur la protection de la santé des jeunes, c'est-à-dire restreindre leur accès au cannabis, empêcher la publicité et d'autres activités promotionnelles susceptibles d'encourager la consommation de cannabis, permettre la production licite de cannabis, afin de réduire les activités illicites, prévenir les activités illicites liées au cannabis, grâce à des sanctions et des mesures d'application appropriées, réduire le fardeau sur le système de justice pénale relativement au cannabis, donner aux Canadiens accès à un approvisionnement de cannabis dont la qualité fait l'objet d'un contrôle, et mieux sensibiliser le public aux risques que présente l'usage du cannabis pour la santé.
     Le projet de loi C-45 crée un cadre dans lequel les adultes peuvent accéder légalement au cannabis, dans un contexte de vente au détail approprié, dont l'approvisionnement est assuré par une industrie bien réglementée, ou qui est cultivé en quantités limitées à la maison. Les adultes de 18 ans et plus pourront légalement posséder ou échanger avec d'autres adultes jusqu'à 30 grammes de cannabis séché, ou son équivalent sous d'autres formes. La vente ou la possession à cette fin seront légales uniquement si elles sont autorisées en vertu de la loi.
    Le cannabis ne sera en aucun cas vendu ou distribué à des jeunes. La production de cannabis nécessitera en outre une autorisation précise. La possession, la production, la distribution, l'importation, l'exportation et la vente, à l'extérieur de ce cadre, demeureront toutes illégales et seront assujetties à des sanctions pénales. Ces dernières seront proportionnelles à la gravité de l'infraction, et iront de la remise d'une contravention à une peine maximale de 14 ans d'emprisonnement. Cette approche progressive rend compte de nos objectifs législatifs.
     En outre, le projet de loi C-45 mettra les jeunes qui possèdent ou distribuent jusqu'à cinq grammes de cannabis à l'abri des sanctions pénales, plutôt que de les exposer au système de justice pour des quantités aussi faibles. Au-delà de cinq grammes, les jeunes seront assujettis à la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents, qui met l'accent sur les interventions communautaires, la réhabilitation et la réintégration. Dans le cas des infractions moins graves, d'autres mesures seront privilégiées avant les accusations, par exemple, ne pas intervenir, avertir le jeune ou lui proposer de consulter un programme ou un organisme communautaire pour l'aider à régler les causes sous-jacentes de son comportement.
     En vertu du projet de loi C-45, les administrations fédérale, provinciales et territoriales partageront toutes la responsabilité de la supervision du nouveau système. Le gouvernement fédéral surveillera les composantes du cadre relatif au cannabis liées à la production et à la fabrication et établira des règles et des normes à l'échelle de l'industrie. Les provinces et les territoires seront responsables de la distribution et de la vente. Ils seront aussi en mesure de créer d'autres restrictions, s'ils le jugent opportun, y compris augmenter l'âge minimal pour qu'il corresponde à l'âge légal pour consommer de l'alcool. Par ailleurs, les provinces et les territoires, de même que les municipalités, pourraient créer des règles additionnelles pour la culture du cannabis à la maison, par exemple, réduire le nombre de plants permis par résidence et restreindre les endroits où le cannabis peut être consommé, comme dans les lieux publics et les véhicules.

  (1805)  

    Outre notre collaboration avec eux pour établir une chaîne d'approvisionnement sécuritaire, les provinces et les territoires seront des partenaires clés des efforts de notre gouvernement en vue d'augmenter la sensibilisation du public concernant les risques liés à la consommation de cannabis. Comme il était indiqué dans le budget de 2017, notre gouvernement a prévu 9,6 millions de dollars pour l'éducation et la sensibilisation du public, ainsi que les activités de contrôle et de surveillance. Cela comprend un suivi des tendances et des perceptions au sujet de la consommation de cannabis chez les Canadiens, et plus particulièrement les jeunes, grâce à une enquête annuelle sur la consommation de cannabis au Canada. Ces travaux contribueront à éclairer et à préciser d'autres activités d'éducation et de sensibilisation du public, afin d'atténuer les risques et les effets néfastes liés à la consommation.
    J'aimerais maintenant me pencher sur certaines des préoccupations qui ont été soulevées, que ce soit au cours du débat en deuxième lecture, ou par des témoins qui ont comparu devant vous la semaine dernière. J'aimerais assurer aux membres du Comité qu'au moment de l'élaboration du projet de loi, nous étions conscients des préoccupations exprimées concernant l'âge minimal, la possession par les jeunes de petites quantités de cannabis, la culture pour usage personnel et l'impact des dispositions législatives proposées sur les jeunes.
     Laissez-moi d'abord dire que, dans l'ensemble, les recommandations comprises dans le rapport du Groupe de travail ont été prises en compte au moment de la rédaction du projet de loi C-45, et que celui-ci suit de très près ces recommandations. En ce qui a trait à l'âge minimal, notre gouvernement a accepté les conseils du Groupe de travail, selon lesquels nous devrions tenter d'établir un équilibre entre les risques connus liés au cannabis et la réalité, à savoir que les jeunes et les jeunes adultes au Canada ont un taux de consommation de cannabis qui figure parmi les plus élevés dans le monde. En vue d'atteindre cet équilibre, le projet de loi C-45 restreint la vente du cannabis aux adultes âgés de 18 ans et plus. Les provinces et les territoires seront en mesure de fixer un âge minimal plus élevé, comme ils le font pour l'alcool et le tabac.
     En évitant des poursuites criminelles aux jeunes qui possèdent ou qui échangent jusqu'à cinq grammes de cannabis, nous sommes conscients des critiques que cela suscite, à savoir que cela envoie un mauvais message aux jeunes. La position de notre gouvernement est claire: les jeunes ne devraient pas avoir accès au cannabis, quelle que soit la quantité. En vertu du projet de loi C-45, les jeunes ne pourront en aucun cas acheter ou acquérir légalement du cannabis. Lorsque l'on critique notre gouvernement concernant sa décision de ne pas imposer de sanctions pénales aux jeunes qui possèdent ou qui partagent de très petites quantités de cannabis, on ne tient pas compte de la réalité. Les statistiques montrent clairement des taux élevés de consommation chez les jeunes, en dépit du fait que le cannabis est actuellement une substance interdite. Notre gouvernement reconnaît que dans le cas des très petites quantités, il existe une meilleure façon de résoudre le problème qui se pose avec les jeunes que la pleine application de la loi pénale.
    Notre gouvernement a eu des entretiens avec les provinces et les territoires, afin de les inciter à prévoir des infractions administratives, en vue d'empêcher les jeunes de posséder du cannabis, tout comme cela se fait actuellement pour l'alcool et le tabac. Cette approche mesurée permettra aux services de police d'avoir les pouvoirs nécessaires pour saisir de petites quantités de cannabis que les jeunes ont en leur possession. L'Ontario a récemment annoncé son intention de procéder ainsi. J'ai encouragé les autres provinces et territoires à faire de même, pas plus tard que la semaine dernière, à la réunion fédérale-provinciale-territoriale de Vancouver.
     Parmi les autres questions qui ont été soulevées pendant le débat en deuxième lecture, on a suggéré que la culture à la maison pourrait signifier un meilleur accès au cannabis pour les enfants. En réponse à cela, j'aimerais souligner que le Groupe de travail a conclu que de petites quantités de cannabis pour consommation personnelle peuvent être cultivées de façon sécuritaire et responsable par des adultes, de façon à protéger les jeunes à la maison. Les adultes devront prendre des précautions appropriées, comme ils doivent le faire maintenant pour l'entreposage des médicaments d'ordonnance, de l'alcool et d'autres substances potentiellement nocives. Par ailleurs, les sanctions importantes proposées dans le projet de loi C-45 pour la vente et la distribution à des jeunes, ou pour le recours à des jeunes ou leur participation pour commettre une infraction liée au cannabis, envoient un message clair aux adultes qui permettraient que du cannabis se retrouve entre les mains des enfants.
    En réponse aux autres préoccupations soulevées, comme celles liées au moment de la mise en oeuvre, aux défis entourant la conduite avec facultés affaiblies et à l'obligation du Canada en vertu des traités internationaux relatifs au contrôle des drogues, j'aimerais souligner qu'il s'agit là de questions que nous continuons d'aborder de façon diligente. Nous poursuivons notre collaboration avec les provinces et les territoires et, comme je l'ai mentionné, le ministre Goodale et moi-même avons rencontré nos homologues la semaine dernière.

  (1810)  

    Les ministres de la Santé, des Finances et de l'Agriculture se sont aussi réunis pour examiner la question. Par ailleurs, les représentants du gouvernement fédéral continueront de s'entretenir à ce sujet avec leurs homologues.
     Monsieur le président, je vais respecter le temps qui m'est alloué et je suis disponible pour répondre aux questions. Je vais maintenant passer la parole à ma collègue, la ministre Petitpas Taylor.

  (1815)  

    Je sais qu'en votre qualité de ministre de la Justice, vous avez à coeur de suivre les règles.
    Effectivement, monsieur.
    J'aimerais souhaiter la bienvenue à l'honorable Ralph Goodale parmi nous. Merci de nous faire l'honneur de votre présence.
     Nous allons maintenant donner la parole à l'honorable Ginette Petitpas Taylor, ministre de la Santé.
    Merci beaucoup, monsieur le président. Tout comme ma collègue la ministre Wilson-Raybould, j'aimerais aussi remercier les membres du Comité. Je sais que vous avez été convoqués une semaine plus tôt, soit la semaine dernière, et que vous avez accompli beaucoup de travail. J'aimerais donc vous remercier d'être présents ici et de vous acquitter des tâches nécessaires concernant ces dispositions législatives.
     Je suis honorée d'être présente ici aujourd'hui avec mes collègues le ministre Goodale et la ministre Wilson-Raybould, afin d'étudier le projet de loi C-45, Loi concernant le cannabis et modifiant la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, le Code criminel et d'autres lois. J'aimerais commencer en soulignant les progrès importants qui ont été réalisés à ce chapitre sous l'ancienne ministre de la Santé. C'est grâce à son travail ardu et aux efforts sans relâche de son personnel et de celui de Santé Canada que je suis en mesure de me présenter devant vous aujourd'hui.
    Protéger la santé et la sécurité des Canadiens est une priorité de notre gouvernement et est au coeur de ce projet de loi. Les taux de consommation de cannabis des Canadiens figurent parmi les plus élevés au monde, et des décennies d'interdiction pénale n'ont pas réduit ces taux. En fait, le cannabis est devenu la substance illicite la plus communément consommée au Canada. Aujourd'hui, 21 % de nos jeunes et 30 % de nos jeunes adultes consomment du cannabis. Nos jeunes affichent la prévalence la plus forte de consommation de cannabis comparativement à leurs homologues dans d'autres pays développés. Cela montre clairement que l'approche actuelle en ce qui a trait au cannabis ne fonctionne pas.
     C'est pourquoi notre gouvernement propose une approche de santé publique visant à légaliser et à réglementer de façon stricte le cannabis, de même qu'à en restreindre l'accès. Notre objectif est de réduire les effets néfastes liés à la consommation de cannabis, particulièrement chez les jeunes. La preuve scientifique indique que les risques découlant de la consommation du cannabis sont plus élevés chez les jeunes que chez les adultes et que plus la personne est jeune quand elle commence à consommer, plus les risques sont grands et plus ils augmentent la fréquence de consommation. La législation devant nous aujourd'hui, le projet de loi C-45, constitue le fondement de la nouvelle approche de notre gouvernement.
    Par cette législation et par des campagnes soutenues et préalables d'éducation et de sensibilisation du public, nous visons à retarder l'âge où les jeunes essaient le cannabis et à informer tous les Canadiens des risques associés à la consommation du cannabis. Aujourd'hui, j'aimerais mettre l'accent sur trois composantes de cette approche. La première a trait à la protection des jeunes. La deuxième concerne l'éducation et la sensibilisation du public et, enfin, la troisième a trait à la sécurité du produit et au contrôle de la qualité.
    Commençons par la protection des jeunes. J'aimerais mentionner très clairement que nous n'endossons d'aucune façon la consommation de cannabis et que nous ne cherchons pas des façons de faciliter l'accès au cannabis pour les jeunes. Au contraire, la protection des jeunes est au centre de l'approche de notre gouvernement de réglementer et de restreindre l'accès au cannabis. Les jeunes sont particulièrement vulnérables aux effets du cannabis sur le développement et le fonctionnement du cerveau. La preuve scientifique nous indique que plus la personne est jeune quand elle commence à consommer du cannabis et plus sa fréquence de consommation est élevée, plus grand sera le risque pour sa santé. Comme je l'ai déjà mentionné, un nombre déjà trop grand de jeunes Canadiens ont accès au cannabis. Souvent, il est plus facile pour les enfants d'acheter du cannabis que des cigarettes ou de l'alcool. Les données recueillies le démontrent bien.
    Dans l'enquête menée en 2015 sur la consommation de tabac, d'alcool et de drogues au Canada, 21 % des jeunes ont déclaré avoir consommé du cannabis au cours de la dernière année. En comparaison, 10 % des jeunes ont déclaré avoir fumé des cigarettes. La différence entre ces deux statistiques montre bien la portée et l'efficacité d'une gamme de mesures, comme les contrôles de la réglementation, de la publicité et de la promotion, dans l'éducation du public, ce qui a contribué au fil des ans à réduire les taux de consommation.
     Au Canada, on a réglementé le tabac et éduqué le public concernant les risques qu'il présente, au cours des 30 dernières années. Le pourcentage de jeunes qui consomment du tabac a diminué pour passer de 27 % en 1985 à 10 % en 2015. C'est pourquoi nous tentons de tirer parti de ce que nous avons appris par suite de la réglementation du tabac. Nous restreindrons l'accès des jeunes au cannabis en pénalisant ceux qui en vendent ou en distribuent aux jeunes et en limitant la publicité et la promotion s'y rapportant. Le projet de loi C-45 interdit à quiconque de vendre ou d'offrir du cannabis à une personne de moins de 18 ans, même si les provinces et les territoires peuvent augmenter l'âge légal minimal de la vente, de l'achat et de la consommation.
    L'âge minimal proposé de 18 ans reflète l'avis que nous avons reçu du Groupe de travail d'experts sur la légalisation et la réglementation du cannabis. Il s'agit aussi d'équilibrer le besoin de protéger les enfants et les jeunes des effets nocifs du cannabis sur la santé, tout en reconnaissant que l'établissement d'un âge minimal trop élevé risquerait de préserver le marché illégal, compte tenu des taux élevés de consommation chez les jeunes adultes de 20 à 24 ans.

  (1820)  

     Le projet de loi C-45 entraînerait la création de nouvelles sanctions pénales pour la distribution ou la vente de cannabis à des jeunes ou pour le recours à un jeune pour commettre une infraction liée au cannabis. Le projet de loi interdirait en outre certains produits et méthodes de marketing, particulièrement les plus attrayants pour les jeunes.
    Les entreprises ne seraient pas autorisées à produire ou à vendre des produits du cannabis susceptibles d'attirer les jeunes. Les personnes qui mettent en marché du cannabis n'auraient pas non plus le droit d'utiliser des emballages ou des étiquettes pouvant représenter un attrait pour les jeunes, y compris des images de personnes, de célébrités, de personnages ou même d'animaux. La publicité fausse, déloyale ou trompeuse serait interdite, tout comme les commandites, les témoignages et les appuis, ou toute autre forme de promotion ou d'image de marque pouvant inciter les jeunes à consommer du cannabis.
    La promotion du cannabis serait autorisée uniquement lorsqu'elle présente des données factuelles et qu'elle se fait à l'insu des jeunes. Par ailleurs, le cannabis ne pourrait pas être vendu dans un contexte de libre-service ou de machines distributrices. Nous croyons que ces mesures de protection permettront de maintenir le cannabis hors des mains des enfants et des jeunes.
    Les mesures de protection que nous mettons en place permettront de réduire l'accès des jeunes au cannabis, mais nous savons aussi que les jeunes aujourd'hui sont moins susceptibles que les adultes de considérer la consommation de cannabis comme présentant un risque important au chapitre de la santé. Comme personne ayant fait ma carrière à titre de travailleuse de première ligne dans les domaines de la santé mentale et de la toxicomanie, cela ne me surprend pas, et je crois fermement qu'il s'agit d'un problème que nous devons résoudre.
    Comme c'est le cas avec d'autres drogues, même si le cannabis peut être utilisé par certaines personnes à des fins thérapeutiques, son usage peut aussi comporter des risques pour la santé. Nous devons fournir aux Canadiens de l'information sur le cannabis afin qu'ils puissent parler des risques avec leurs enfants. Nous devons aussi éduquer et soutenir les adultes pour qu'ils fassent des choix éclairés et responsables, qui réduisent les risques, y compris les dangers liés à la conduite avec des facultés affaiblies par les drogues.
    C'est pourquoi, dans le cadre du budget 2017, nous avons prévu un investissement initial de 9,6 millions de dollars afin de mener une campagne d'éducation et de sensibilisation du public, en vue d'informer les Canadiens, et plus particulièrement les jeunes, des risques liés à la consommation de cannabis. Cette campagne est déjà commencée et se poursuivra au cours des prochaines années. Les fonds serviront en outre à soutenir une initiative visant à suivre les tendances et les perceptions relatives à la consommation de cannabis chez les Canadiens, et plus particulièrement les jeunes. Ces données permettront d'éclairer nos activités d'éducation du public.
    Le dernier aspect de l'approche de notre gouvernement à l'égard du cannabis que j'aimerais souligner a trait aux exigences en matière de sécurité et de qualité du produit.
    La loi est conçue pour établir un approvisionnement légal du cannabis contrôlé sur le plan de la qualité et disponible à la vente. Sous le régime de la loi proposée et de ses règlements, notre gouvernement établirait des règles dans l'ensemble de l'industrie sur les types de produits dont la vente serait autorisée. Nous aimerions aussi mettre en place des règles empêchant l'utilisation de certains ingrédients comme la nicotine, la caféine et l'alcool dans les produits du cannabis, et nous exigerions des fabricants qu'ils adhèrent à de saines pratiques de production.
    Le dévouement et les efforts ardus que nous avons mis dans la conception du système de distribution de cannabis à des fins médicales au Canada signifient que nous avons déjà de l'expérience en ce qui a trait aux exigences de sécurité et de qualité du produit. Notre système actuel, qui donne accès au cannabis à des fins médicales, est reconnu comme étant l'un des meilleurs au monde. Il comprend un certain nombre de dispositifs de sécurité, comme des inspections fréquentes des installations de production et des règlements clairs concernant la mise à l'essai et l'étiquetage du produit, ainsi que l'utilisation de pesticides. Nous utiliserons ce système de production reposant sur des permis comme modèle pour la production à plus grande échelle du cannabis prévue dans le projet de loi.
    En conclusion, il est clair que le système actuel ne fonctionne pas. La législation qui vous est présentée aujourd'hui est destinée à résoudre les problèmes auxquels nous sommes déjà confrontés. Nos enfants ont actuellement accès au cannabis et le crime organisé continue de profiter de la vente non réglementée du cannabis. Nous proposons une nouvelle façon de résoudre ce problème pour le Canada à l'aide d'une approche de santé publique.
    Nous savons tous que ce problème a une vaste portée, qui va au-delà de ce projet de loi particulier. Il exige que nous coopérions au-delà des compétences juridictionnelles et des secteurs.
    Suivant les conseils du Groupe de travail sur la légalisation et la réglementation du cannabis, ce projet de loi ferait en sorte que tous les paliers de gouvernement pourraient établir certaines exigences en ce qui a trait au cannabis, en conformité avec leurs propres pouvoirs et expériences. La participation des gouvernements des provinces et des territoires est essentielle pour veiller à ce que les jeunes n'aient pas accès au cannabis.
    En vertu de ce projet de loi, le gouvernement fédéral serait chargé d'établir et de maintenir un cadre national exhaustif et uniforme, en vue de réglementer la production, d'établir des normes de santé et de sécurité et de prévoir des interdictions pénales. Les provinces et territoires pourraient octroyer les permis et superviser la distribution et la vente de cannabis.

  (1825)  

    De concert avec les municipalités, ils pourraient adapter certaines règles dans leurs propres compétences et les mettre en application au moyen d'une panoplie d'outils comme les contraventions. Nous avons travaillé en étroite collaboration avec nos homologues provinciaux et territoriaux pour nous assurer que leur précieuse contribution est prise en compte dès le début de cet important effort, et notre gouvernement est résolu à poursuivre notre collaboration continue avec les provinces et les territoires sur cette question complexe.
     En mettant l'accent sur la protection des jeunes, l'éducation du public et les exigences en matière de sécurité et de qualité du produit, le projet de loi repose sur une approche de santé publique pour la réglementation et la restriction stricte de l'accès au cannabis. Notre gouvernement est confiant que la loi concernant le cannabis qui est proposée protégera la santé et la sécurité des Canadiens.
    Je vous remercie beaucoup.
    Merci beaucoup. Au nom de tous les membres du Comité, j'aimerais vous féliciter de votre nomination à titre de ministre de la Santé. Je suis certain que nous aurons tous l'occasion d'interagir avec vous, au fur et à mesure qu'un certain nombre d'enjeux progresseront. De toute évidence, certains des enjeux les plus intéressants sur la Colline sont abordés ici, dans ce comité. Encore une fois, félicitations.
    Nous allons maintenant donner la parole à l'honorable Ralph Goodale, ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile.
    Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du Comité, je vous remercie beaucoup de l'invitation. C'est un grand honneur pour moi de comparaître devant vous ce soir. C'est avec plaisir que je me joins à mes collègues, la ministre de la Justice, la ministre de la Santé, et le secrétaire parlementaire Blair, qui ont été à l'avant-plan et au centre des débats entourant cette question au cours des derniers mois, ainsi que les représentants de nos ministères.
    Nous sommes ici évidemment pour discuter du projet de loi C-45 et de la façon dont ces dispositions législatives contribueront à éviter que les enfants canadiens mettent la main sur du cannabis et que les criminels en retirent des bénéfices, sans doute plus efficacement que le régime défaillant qui existe dans ce pays depuis de nombreuses décennies.

[Français]

     Au cours de l'élaboration de notre approche sur la réglementation du cannabis, le renforcement de la sécurité publique a toujours été notre objectif principal.
    Je vais maintenant parler de nos efforts visant à nous assurer que les organismes responsables de l'application de la loi, notamment les services policiers et frontaliers, auront les ressources et la formation nécessaires pour protéger les communautés canadiennes.

[Traduction]

    Tout d'abord, il est important d'indiquer clairement que l'approche actuelle du Canada en ce qui a trait au cannabis, qui est en place depuis des décennies, n'a simplement pas fonctionné. L'Organisation mondiale de la Santé a étudié la consommation de cannabis chez les jeunes en Europe et en Amérique du Nord. En 2009-2010, l'OMS a déterminé que le tiers des jeunes Canadiens ont déjà essayé le cannabis à l'âge de 15 ans, un taux plus élevé que dans tout autre pays visé par cette étude. En outre, dans une étude menée en 2013-2014 par l'OMS, le Canada est demeuré parmi les cinq premiers pays en ce qui a trait à la consommation à l'âge de 15 ans et se situait en première place pour la consommation de cannabis chez les 13 ans et moins.
    Par ailleurs, selon une compilation statistique de 2016 de l'Office des Nations unies contre la drogue et le crime, le taux de consommation de cannabis chez les Canadiens âgés de 15 à 64 ans se situait à près de 15 %, et il était plus élevé dans cette fourchette d'âge que dans tout autre pays, sauf deux autres dans le monde. Autrement dit, les Canadiens figurent parmi les consommateurs les plus grands et les plus jeunes de cannabis à l'échelle mondiale.
     Il est de toute évidence nécessaire de faire les choses différemment, et c'est pourquoi nous avons proposé ce nouveau régime fondé sur le cadre énoncé dans le projet de loi C-45, ainsi que des mesures améliorées afin de lutter contre la conduite avec facultés affaiblies, qui sont comprises dans le projet de loi C-46, et de la latitude pour les provinces et les territoires, afin qu'ils adoptent des approches qui correspondent à leur situation particulière.
    La consultation et le soutien des services de police et des agents frontaliers sont essentiels au bon fonctionnement de ce nouveau régime, afin qu'ils aient les outils nécessaires pour appliquer la loi. À cette fin, nous avons annoncé récemment un investissement de 274 millions de dollars, y compris 113,5 millions de dollars sur cinq ans pour la GRC et l'Agence des services frontaliers du Canada, de même que pour des programmes au sein de Sécurité publique Canada, afin principalement de garder le crime organisé à l'écart de ce nouveau système légalisé et de combattre la contrebande. L'investissement comprend aussi 161 millions de dollars pour former les agents de première ligne, afin qu'ils reconnaissent les signes et les symptômes de la conduite avec facultés affaiblies par les drogues, renforcer les capacités d'application de la loi à l'échelle du pays, veiller à ce que les services de police aient accès à des appareils de dépistage des drogues, soutenir la recherche et améliorer la sensibilisation du public concernant les dangers de la conduite avec facultés affaiblies par les drogues.
     Plus de la moitié des 161 millions de dollars seront mis à la disposition des provinces et des territoires, au cours des cinq prochaines années, et mon ministère a déjà pris des engagements auprès d'eux, en vue de déterminer leurs besoins et leurs priorités au chapitre des investissements, particulièrement en ce qui a trait à la formation et à l'équipement. Cette collaboration entre les secteurs de compétence a constitué un aspect essentiel des travaux préparatoires de ce nouveau cadre législatif, et elle le demeurera pour la mise en oeuvre et l'évaluation continue du système mis en place en vertu du projet de loi C-45. À cet égard, comme l'a mentionné la ministre de la Justice, elle et moi avons passé deux jours avec nos homologues provinciaux et territoriaux, la semaine dernière, dans le cadre d'une réunion à Vancouver, où les discussions sur ce sujet particulier ont été particulièrement importantes.

  (1830)  

    J'aimerais aborder trois sujets. Parmi les nombreux qui devront être étudiés concernant le projet de loi C-45, il s'agit des trois particuliers dont j'aimerais parler de façon plus détaillée.
     Tout d'abord, parlons du cannabis à la frontière. Évidemment, il est actuellement illégal d'entrer au Canada avec du cannabis ou d'en sortir. Il est illégal de franchir la frontière dans un sens ou dans l'autre. Cette situation ne changerait pas en vertu du projet de loi C-45. Les agents frontaliers procèdent déjà à un examen des personnes et des biens qui entrent au pays, afin de prévenir la contrebande, y compris celle de cannabis. À cette fin, ils ont recours à des technologies de pointe, à la collecte de renseignements et à la formation permanente sur la façon de détecter et d'interdire les substances qui ne doivent pas traverser la frontière. Leurs efforts se poursuivront, avec l'aide d'une partie du nouveau financement que j'ai mentionné plus tôt.
    En ce qui a trait à l'admissibilité aux États-Unis des Canadiens qui ont déjà consommé du cannabis, nous avons demandé à nos homologues américains qu'ils s'assurent de comprendre comment notre nouveau régime fonctionnera, ainsi que les objectifs visés, et nous avons énoncé clairement que nous nous attendons à ce que les voyageurs qui se déplacent dans une direction ou dans l'autre soient traités de façon juste, professionnelle et respectueuse.
    Parallèlement, toutefois, les États-Unis sont évidemment autorisés à prendre leurs propres décisions en matière d'admissibilité. J'encourage certainement les Canadiens à être honnêtes avec les agents frontaliers et à se rappeler que le cannabis demeure illégal à l'échelle fédérale aux États-Unis. En fait, une partie du nouveau financement destiné à l'Agence des services frontaliers du Canada ira à la communication et à l'affichage, afin que les voyageurs soient bien informés des dispositions de la loi.
    La situation aux États-Unis est aussi compliquée par le fait qu'un certain nombre d'États ont déjà légalisé le cannabis ou prévoient le faire dans un avenir proche, ce qui fait que la situation en ce qui a trait à la loi américaine évolue.
    En deuxième lieu, j'aimerais parler du crime organisé. À l'heure actuelle, l'industrie du cannabis à des fins non médicales au Canada est entièrement criminelle. Le commerce illégal de cannabis au pays permet au crime organisé de mettre 7 milliards de dollars par année, et peut-être plus, dans ses poches. On soupçonne ou on sait que plus de la moitié des groupes de criminels organisés au Canada participent au marché du cannabis. Les responsables de l'application de la loi au Canada dépensent plus de 2 milliards de dollars par année pour tenter d'appliquer ce qui est actuellement un régime légal inefficace. Grâce à la légalisation et à la réglementation, nous pouvons permettre d'utiliser plus efficacement les ressources servant à l'application la loi, et nous pouvons réduire de façon marquée la participation du crime organisé et l'afflux de fonds.
    Dans l'État de Washington, par exemple, la légalisation récente a fait diminuer de près de 75 % la part criminelle du marché du cannabis. Comme c'est le cas pour le tabac, nous savons que le marché noir ne sera probablement jamais éliminé entièrement, mais nous envisageons de faire passer la part du marché criminel du cannabis à des fins non médicales des 100 % actuels à des niveaux beaucoup plus faibles, ce qui constituerait une amélioration.
     En troisième lieu, j'aimerais parler de la conduite avec facultés affaiblies. Le Parlement aura l'occasion, évidemment, d'aborder cette question de façon beaucoup plus détaillée pendant l'étude du projet de loi C-46, le projet de loi complémentaire au projet de loi C-45. Le projet de loi C-46 vise particulièrement à résoudre plus efficacement le problème de longue date que représente la conduite avec facultés affaiblies par l'alcool ou la drogue. Je sais toutefois qu'il s'agit d'une question qui touche un grand nombre d'entre nous très directement, et je sens certainement très bien l'urgence d'aborder cette question de front, tant comme ministre de la Sécurité publique que comme député de Regina—Wascana.
    Parmi toutes les provinces au Canada, la Saskatchewan affiche le taux le plus élevé de conduite avec facultés affaiblies. Regina se situe au troisième rang parmi les villes au pays, et Saskatoon suit de près. De nombreuses familles en Saskatchewan, et dans toutes nos collectivités, pleurent la perte d'être chers attribuable à la conduite avec facultés affaiblies. Il s'agit par conséquent d'un problème actuel, et nous devons nous y attaquer, avec ou sans le nouveau régime s'appliquant au cannabis. Il est urgent que nous le fassions.

  (1835)  

    Comme je l'ai dit, nous y parviendrons grâce aux dispositions législatives que nous avons adoptées au printemps, ainsi qu'aux investissements additionnels que je viens de mentionner. Je suis satisfait du soutien et des activités de promotion des intérêts marqués de la part du public concernant le projet de loi C-46, et notamment d'organisations comme MADD, Les mères contre l'alcool au volant, qui sont allées aussi loin qu'une campagne de publicité très large concernant l'importance de ce projet de loi.
    En ce qui a trait à la conduite avec facultés affaiblies par le cannabis, plus particulièrement, notre approche est axée sur l'éducation du public et les mesures facilitant le dépistage ainsi que les poursuites. En mars, par exemple, Sécurité publique Canada a lancé une campagne dans les médias sociaux visant les jeunes conducteurs et leurs parents, afin de les sensibiliser davantage au sujet des dangers de la conduite avec facultés affaiblies par le cannabis.
    L'hiver dernier, sept services de police au pays, d'Halifax à Yellowknife, en passant par Vancouver, ont participé à un projet pilote innovateur, en vue d'étudier deux dispositifs différents de dépistage des drogues par prélèvements de salive, dans divers contextes opérationnels, y compris en plein milieu de l'hiver. Comme vous pouvez le voir dans le rapport qui a été diffusé en juin, les services de police ont trouvé en général que les dispositifs étaient faciles à utiliser dans diverses conditions atmosphériques et d'éclairage. Une partie de l'investissement que j'ai mentionné précédemment visera à veiller à ce que les agents de police des diverses collectivités au pays disposent de ces appareils et soient formés de façon appropriée pour les utiliser.
    Enfin, à cet égard, je sais que ce comité a entendu des préoccupations concernant l'échéancier de mise en oeuvre, mais la conduite avec facultés affaiblies par le cannabis est déjà présente sur nos routes maintenant. Plus nous mettrons en place rapidement les outils appropriés, le financement, la formation, ainsi que les pouvoirs législatifs et réglementaires, plus les Canadiens seront en sécurité. Les retards législatifs ne font pas en sorte que le problème disparaîtra ou que la situation s'améliorera. Ils ne font que ralentir la mise en oeuvre de mesures plus efficaces.
    La santé et la sécurité du public sont les principaux moteurs de notre approche en ce qui a trait au cannabis et demeureront notre priorité principale. Depuis trop longtemps, les Canadiens, et plus particulièrement les jeunes Canadiens, consomment du cannabis à des taux record à l'échelle mondiale, à l'avantage des criminels et du crime organisé. Cela doit changer, et c'est pourquoi nous étudions ce projet de loi.
    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie.
    Nous allons maintenant passer aux questions, et je crois que nous en aurons de très pertinentes. Nous avons entendu plus de 100 témoins la semaine dernière, qui ont fait état de nombreuses perspectives et opinions différentes. Je suis certain que cela générera un grand nombre de questions.
    Nous allons commencer notre ronde de questions de sept minutes par M. Oliver.
    D'accord, et merci beaucoup, mesdames et monsieur les ministres, de votre présence ici aujourd'hui pour répondre à nos questions et nous exposer la situation.
    Comme l'a mentionné le président, nous avons eu un marathon de cinq jours la semaine dernière. Nous avons entendu plus de 100 témoins. Un soir, nous avons poursuivi nos travaux jusqu'à près de 20 heures pour nous assurer de donner la chance à tout le monde de se prononcer. Ce processus a eu comme avantage que nous avons pu prendre connaissance de certains thèmes, étant donné que les témoignages étaient tellement condensés.
    Mes questions sont en lien direct avec certains de ces thèmes. Malheureusement, je ne pourrai pas les aborder tous.
    Le premier, madame la ministre Petitpas Taylor, a trait à l'accent très marqué mis sur l'éducation du public maintenant, avant la légalisation. Nous avons entendu que de nombreux jeunes ne croient pas réellement qu'un problème se pose et que le cannabis représente une menace pour eux. Il y a beaucoup de désinformation.
    J'ai pris connaissance du fonds de 9,6 millions de dollars et je vous félicite à cet égard, notamment au chapitre de sa mise en oeuvre, mais pourriez-vous parler davantage de la façon dont l'éducation en matière de santé se déroulera? Quand puis-je m'attendre à voir quelque chose de concret dans ma circonscription d'Oakville?

  (1840)  

    Merci de poser cette question.
    Je dirais, d'abord et avant tout, que notre gouvernement s'est engagé à protéger la santé et la sécurité des enfants. D'autre part, les 9,6 millions de dollars que nous avons investis ne sont que l'investissement initial. Il est important de bien le préciser.
    Le groupe de travail et les autres groupes que nous avons consultés nous ont fait comprendre l'importance d'assurer la mise en place des mesures de prévention et de sensibilisation avant l'adoption et la mise en oeuvre de la loi. Nous avons donc déjà commencé à déployer des efforts pour sensibiliser le public et assurer la prévention.
    Je crois que, la semaine dernière, vous avez entendu plusieurs groupes avec lesquels nous collaborons. L'un d'eux, Jeunesse sans drogue Canada, est venu ici vous montrer le genre de travail qu'il accomplit et les outils qu'il a conçus. Voilà le genre de choses qui nous réjouissent vraiment. Cette initiative a été très bien accueillie. Le document, l'outil en question a reçu un bon accueil de la part des médecins, des praticiens, des parents, etc.
    Il faut également reconnaître, je pense, que les campagnes de sensibilisation du public doivent rejoindre les jeunes, les personnes que nous ciblons vraiment. Nous reconnaissons que pour les gens de notre génération, qui regardent peut-être un match de hockey le samedi soir, nous pourrions investir dans des annonces publicitaires. Ce n'est peut-être pas la meilleure façon d'investir notre argent pour rejoindre les jeunes. Nous sommes conscients de la nécessité de centrer nos efforts sur une campagne dans les médias sociaux. C'est ce que nous faisons: nous investissons dans Facebook et Twitter, Instagram et autres médias qui nous permettront de rejoindre les jeunes.
    Enfin, nous voulons continuer à collaborer avec les provinces et les territoires afin que la campagne de sensibilisation du public puisse se faire avec leur collaboration et que nous ayons accès aux mêmes données.
    Un deuxième sujet dont on nous a parlé, Mme Wilson-Raybould, était la sévérité des sanctions pénales pour les personnes agissant en dehors des autorisations que prévoit la loi. L'exemple qui m'a vraiment frappé était les restrictions touchant la hauteur des plantes cultivées à domicile.
    Les membres du Groupe de travail ont dit que la limitation de la hauteur à un mètre ne vise pas à empêcher les jeunes d'obtenir de la drogue ou à restreindre le marché noir; c'est simplement parce que les règlements municipaux limitent généralement la hauteur des clôtures à quatre pieds et qu'ils se sont souciés des voisins des personnes qui cultiveraient leurs quatre plants.
    Aux termes de la loi, la culture d'un plant d'un mètre à un mètre et demi constitue une contravention et celle d'un plant de plus d'un mètre et demi une infraction criminelle passible de 14 ans d'emprisonnement. C'est l'exemple qui m'a frappé. Pourriez-vous nous expliquer les 14 ans d'emprisonnement et la gravité des sanctions pénales?
    Serait-il possible d'adoucir les peines pour certaines infractions qui ne sont pas vraiment criminelles, mais qui relèvent davantage des règlements municipaux?
    Je vous remercie de poser la question et de procéder à l'audition d'une centaine de témoins.
    Pour ce qui est des sanctions qui vont d'une amende à 14 ans d'emprisonnement, leur éventail est très large et leur imposition dépendra des circonstances particulières à l'infraction.
    Pour ce qui est précisément de la hauteur des plants que l'on peut cultiver chez soi, je suis consciente de ce que le groupe de travail a recommandé à ce sujet. D'après ce que j'ai compris, les plants peuvent atteindre une grande hauteur. Plus le plant est haut, plus il peut fournir de produit, et cela pourrait être dans le but d'en détourner une partie vers le marché illicite.
    Cela dépendra entièrement des circonstances dans lesquelles un agent de police découvrira les plants et constatera toute autre infraction. Quant à savoir s'il s'agira d'une contravention ou d'une infraction passible de 14 ans de prison, cela dépendra de la quantité de cannabis en possession de l'intéressé ou de la commission d'une autre infraction. Bien entendu, le juge aura une certaine latitude pour imposer une peine. Le procureur de la Couronne en aura également pour choisir entre la procédure sommaire et la mise en accusation.

  (1845)  

    Merci.
    Monsieurs Goodale, nous avons entendu un agent de la GRC, je crois, dire qu'il serait naïf de s'attendre à ce que la loi change les choses pour le crime organisé. Pourriez-vous nous parler un peu plus du marché réglementé et nous dire pourquoi vous pensez qu'il réduirait la rentabilité des activités du crime organisé ou qu'il aurait un effet dissuasif? Pourriez-vous nous en parler?
    Bien entendu, l'objectif est d'empêcher au maximum le crime organisé de bénéficier d'une source d'argent illégal. C'est un marché de 7 milliards de dollars et probablement plus à l'heure actuelle. Pour le moment, ce marché est entièrement entre les mains du crime organisé. Nous pouvons certainement faire mieux. Pouvons-nous éliminer entièrement ce marché? C'est notre objectif. Il est peut-être naïf de croire que nous pourrons entièrement l'éliminer, mais je pense que nous pouvons le réduire dans une large mesure.
    Les résultats obtenus ailleurs, comme dans l'État de Washington, montrent que si on diminue la rentabilité, si on a un régime rigoureusement réglementé et bien structuré, si on fait disparaître l'attrait financier ou on le réduit largement en changeant les lois, il est possible d'endiguer cette source d'argent. Selon les estimations, l'État de Washington a réussi à la réduire d'environ 75 % en relativement peu de temps. Notre objectif est plus ambitieux. Les chiffres émanant des autres pays laissent entendre que nous pouvons certainement envisager des progrès considérables par rapport à la situation actuelle.
    Votre temps est écoulé.
    Madame Gladu.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie tous les ministres de se joindre à nous ce soir. Je tiens particulièrement à féliciter la nouvelle ministre de la Santé au sujet de son rôle. J'ai hâte de travailler avec vous pour améliorer la santé des Canadiens.
    Je vais d'abord adresser mes questions à la ministre de la Justice. Tout ce que chacun de vous a dit est très agréable à entendre, mais la réalité est quelque peu différente. Les membres libéraux du comité ont rejeté ma demande et celle de mon collègue du NPD d'entendre le témoignage des jeunes et peut-être aussi celui de l'Uruguay, le seul autre pays qui a légalisé la marijuana. Nous avons entendu le témoignage de la police selon lequel il lui sera impossible d'être prête pour la date de mise en oeuvre du 1er juillet. Un grand nombre de provinces n'ont pas encore de plan et certainement pas encore de loi. Les municipalités nous ont dit qu'elles ne seraient pas prêtes pour la date d'entrée en vigueur. Les Autochtones ont dit qu'ils ne seraient pas prêts.
    Étant donné que 88 % des Canadiens ne consomment pas de cannabis et qu'il reste 283 jours d'ici cette date arbitraire, pourquoi êtes-vous aussi pressés de faire courir des risques au public? La police n'a pas encore de tests ou de formation pour détecter la conduite avec facultés affaiblies par la drogue. Nous avons 100 000 parents qui ont reçu une formation pour la campagne de sensibilisation du public dont on a parlé, mais c'est tout. C'est le seul témoignage que nous ayons reçu. Seriez-vous disposés à différer la date de mise en oeuvre jusqu'à ce que toutes les parties prenantes soient prêtes?
    Je pourrais peut-être résumer certaines des observations que nous avons formulées dans notre déclaration préliminaire. Comme l'a dit M. Goodale, la situation actuelle au Canada est lamentable. Nos jeunes sont ceux qui consomment le plus de cannabis. Nous sommes déterminés à remédier à cette situation le plus rapidement et le plus efficacement possible.
    Nous sommes déterminés à procéder à la légalisation en juillet 2018. Pour ce faire, nous avons adopté un plan d'action extrêmement complet, au cours des deux dernières années, afin d'en discuter avec tous nos homologues des provinces et des territoires. Ces entretiens se sont poursuivis la semaine dernière et continueront jusqu'en juillet 2018.
    Nous avons fait participer un important noyau d'experts à la production du rapport du groupe de travail qui, comme je l'ai mentionné dans ma déclaration préliminaire, a mené, d'un bout à l'autre du pays, des consultations intensives dont nous avons bénéficié.
    Merci.
    Je vois que vous allez vous en tenir à la date prévue. Les gens fument actuellement du cannabis que ce soit légal ou non. Nous partons du principe que la légalisation est la seule solution pour remédier au problème, ce dont je ne suis pas certaine.
    Ma deuxième question s'adresse à la ministre de la Santé. Nous avons entendu des témoignages selon lesquels il y a 30 % de plus de schizophrénie et de troubles psychotiques, de dépression, d'anxiété et de dépendance chez les jeunes de moins de 25 ans qui consomment du cannabis.
    Nous avons également entendu parler du rendement des plantes cultivées à domicile. Ces plantes pourraient fournir jusqu'à 600 grammes de cannabis dans un logement, sans qu'il y ait d'exigences relativement au contrôle de la puissance ou à l'entreposage sous clé. Rien n'empêche les parents de fumer devant leurs enfants. L'expérience de l'État de Washington montre que la culture à domicile permet au crime organisé de prendre pied. Ce n'est pas autorisé là-bas et la police canadienne approuve cette décision.
    Pourquoi pensez-vous que l'autorisation de la culture à domicile ne nuira pas à la santé des jeunes?

  (1850)  

     Premièrement, comme mes collègues l'ont mentionné, il a été clairement démontré que l'interdiction, l'état actuel des choses, ne fonctionne pas. Nous devons vraiment veiller à suivre notre plan. Le projet de loi C-45 a pour objectif de légaliser, de réglementer rigoureusement le cannabis et de limiter son accès pour les jeunes. C'est vraiment notre priorité.
    Comme vous l'avez dit, nous savons que la consommation est élevée chez les jeunes Canadiens. J'ai ici quelques chiffres: 21 % des jeunes de 15 à 19 ans consomment du cannabis et 30 % des jeunes de 20 à 24 ans en consomment. Nous reconnaissons que nous devons mettre en place un système réglementé parce que les jeunes Canadiens ont actuellement accès à des produits non réglementés. S'ils décident d'en consommer, nous voulons que les produits qu'ils consommeront soient réglementés.
    Encore une fois, nous n'incitons pas les jeunes à consommer du cannabis, mais nous voulons faire en sorte que ce produit soit sûr et qu'il ne tombe pas entre les mains des enfants.
    Merci.
    Bien entendu, s'il y en a chez eux, ils pourront s'en procurer.
     J'ai une question à poser au ministre de la Sécurité publique. Je vais faire suite à une question que M. Mulcair a posée à la Chambre aujourd'hui. Il parlait aussi du fait que lorsque les gens veulent traverser la frontière et qu'on leur demande s'ils ont fumé du cannabis, à part le premier ministre, ils ne sont pas autorisés à entrer aux États-Unis. Vous avez dit que c'est effectivement le cas et que les États-Unis peuvent dire ce qui est légal ou non dans leur pays.
    Sachant que cela va poser un sérieux problème, ne croyez-vous pas nécessaire d'en informer les jeunes qui songent à faire carrière sur la scène internationale vu qu'il nous reste 283 jours avant que le problème ne se pose?
    Nous devons, car c'est un objectif très valide et important de la politique publique, veiller à ce que tous les Canadiens comprennent quelles sont les conséquences juridiques ou judiciaires de leurs choix et de leurs décisions. Comme je l'ai mentionné dans mon discours, l'Agence des services frontaliers du Canada va notamment s'efforcer de bien informer les gens des conséquences que leur comportement pourrait avoir à la frontière. Nous n'accepterions pas que les Américains nous dictent ce que nous devons faire à notre frontière et nous laisserons également les Américains décider de ce qu'ils feront de leur côté. C'est de leur ressort et c'est leur responsabilité.
    Nous pouvons veiller à ce que les Canadiens soient informés des répercussions juridiques et des conséquences. Nous allons également maintenir le dialogue avec les États-Unis pour veiller à ce qu'ils nous traitent de façon équitable, respectueuse et professionnelle, comme nous sommes en droit de nous y attendre, lorsque nous arrivons à leur frontière. Les Américains ont droit à ce genre de traitement lorsqu'ils arrivent à notre frontière. Je crois important de mentionner que la situation juridique est complexe et changeante aux États-Unis étant donné que, dans bien des cas, les États vont dans la direction diamétralement opposée à celle de l'autorité fédérale.
    Je pense qu'on peut s'attendre à ce que le cadre juridique évolue aux États-Unis et nous devons veiller, dans la mesure du possible, à ce que les Canadiens en soient informés.
    Monsieur Davies.
    Merci, monsieur le président. Je remercie les ministres de leur présence parmi nous aujourd'hui. Je voudrais féliciter la ministre de la Santé pour sa nomination et j'ai également hâte de travailler avec elle.
    Ma première question s'adresse à la ministre de la Santé. Le Groupe de travail sur la légalisation du cannabis a recommandé que votre gouvernement légalise et réglemente les produits comestibles et les concentrés. Voici ce que l'honorable Anne McLellan a déclaré, la semaine dernière, quand je lui ai demandé pourquoi le groupe de travail avait fait cette recommandation:
… il s'agit d'un créneau en croissance du marché du cannabis. Évidemment, si votre préoccupation est la santé du public, votre objectif est de dissuader les gens de fumer le produit… Si le produit est utilisé à des fins médicales, il existe des thérapies sans inhalation de fumée… et comme on le mentionne dans le rapport du Groupe de travail, le marché des produits comestibles est en croissance.
Si vous voulez passer d'un marché illicite à un marché légal et réglementé, alors vous devez offrir la même qualité et la même variété que ce qui est offert dans le marché illicite. On peut certainement affirmer que nous avons entendu ces commentaires à maintes reprises de divers éventails de personnes auxquelles nous avons parlé. Vous pourriez certainement autoriser et permettre les produits comestibles sous diverses formes pour des raisons de santé publique et de sécurité publique.
    Madame la ministre, étant donné que deux des principaux objectifs du projet de loi sont de réduire les activités illicites et de donner accès à du cannabis dont la qualité a été contrôlée, comme cela figure à l'article 7, pourquoi votre gouvernement ne tient-il pas compte de cette recommandation? Autrement dit, si l'interdiction ne fonctionne pas, comme vous l'avez dit, pourquoi interdisez-vous les produits comestibles?

  (1855)  

    Je dirais tout d'abord que notre gouvernement s'est engagé à faire en sorte que d'ici juillet 2018, les Canadiens aient accès à du cannabis séché, du cannabis frais et de l'huile de cannabis. C'est le point de départ du travail à accomplir. Néanmoins, nous sommes d'accord avec les recommandations du groupe de travail, mais nous devrons mettre en place une réglementation au sujet des produits comestibles et ce sera fait en temps voulu.
    Nous reconnaissons qu'aux États-Unis — qui ont une vaste expérience à ce sujet — la plupart des problèmes et des complications étaient dus aux produits comestibles. Ils ne s'étaient pas bien préparés pour ce genre de produits. Nous voulons nous assurer d'avoir la bonne réglementation en place afin de disposer de tous les outils nécessaires pour faire les choses comme il faut.
    En ce qui concerne les produits comestibles, nous pouvons voir qu'un grand nombre d'entre eux pourraient être légalisés. S'il y a des centaines, voire des milliers de ces produits qui peuvent être légalisés, nous devrons veiller à avoir la bonne réglementation pour bien faire les choses.
    Merci.
    C'est pourquoi nous faisons avancer le processus.
    Sam Kamin, qui est professeur à l'Université de Denver, a déclaré au comité: « Je pense que notre expérience, l'expérience américaine en général, montre que nous avons appris à réduire les risques. » Il mentionne que « des emballages refermables, non transparents, de l'information claire sur les portions individuelles, les concentrations maximales de THC par emballage sur les articles individuels », l'interdiction de la commercialisation s'adressant aux enfants, etc., font partie de l'expérience du Colorado.
    Madame la ministre, je vais de nouveau vous poser la question. Si vous ne réglementez pas ces produits, cela veut dire que vous n'atténuez pas les risques relatifs aux produits comestibles et aux concentrés. Pourquoi est-ce préférable? Pourquoi vous contentez-vous de laisser ces produits sur le marché noir et, comme l'a dit le ministre de la Sécurité publique, entre les mains du crime organisé qui ne les vend probablement pas dans des emballages à l'épreuve des enfants. Pourquoi vous contentez-vous d'attendre un an de plus au lieu de les réglementer maintenant comme le Colorado l'a fait avec beaucoup de succès?
    D'abord et avant tout, nous voulons nous assurer de bien faire les choses. Comme nous l'avons dit, nous sommes déterminés à mettre en place la réglementation nécessaire pour les produits comestibles; nous nous y engageons. Néanmoins, nous voulons nous assurer d'utiliser les pratiques exemplaires et nous continuons de consulter nos voisins du Sud. Ils nous ont dit que s'ils avaient le choix, ils suivraient probablement maintenant l'exemple du Canada au lieu de procéder comme ils l'ont fait.
    Merci.
    Monsieur Goodale, ma question s'adresse à vous et porte sur la frontière. Nous sommes tous des parlementaires, je pense, nous savons que les États-Unis sont un pays souverain et personne ne demande à qui que ce soit de dicter leur conduite aux Américains. Le fait est qu'à compter du 1er juillet 2018, si c'est bien la date cible, il y aura une nouvelle réalité juridique au Canada. Nous savons tous que des Canadiens se présentent à la frontière américaine, que des douaniers américains leur demandent s'ils ont consommé du cannabis et que s'ils répondent par l'affirmative, ils sont systématiquement refoulés.
    Essayez-vous de conclure un accord avec les Américains pour reconnaître la nouvelle réalité juridique ou bien les gens d'affaires et les simples citoyens du Canada devront-ils simplement tenter leur chance lorsqu'ils se présenteront à la frontière des États-Unis, le 2 juillet?
    Nous faisons bien comprendre aux Américains que le Canada adopte un nouveau régime juridique qui, nous en sommes convaincus, compte tenu d'arguments très convaincants, sera plus efficace que le régime fédéral américain pour mettre le cannabis hors de la portée des enfants et tarir la source d'argent illégal dont profite le crime organisé. Nous maintenons un dialogue permanent et nous ne manquerons aucune occasion de veiller à ce que les Canadiens soient traités équitablement.
    Merci.
     Madame la ministre de la Justice, le projet de loi C-45 reste axé sur la criminalisation à bien des égards, notamment en ce qui concerne les restrictions touchant la possession de cannabis et sa culture ainsi que les infractions relatives à la vente. L'Association canadienne des chefs de police a déclaré au comité:
Nous savons qu'en 2016, il y a eu environ 16 000 ou 17 000 accusations de possession simple de marijuana…
    En fait, il y en a eu plus.
… mais nous croyons qu'elles seront remplacées par des appels importuns. Elles seront remplacées si, hélas, on autorise la culture à domicile et qu'on nous confie le soin de gérer cet aspect de la réglementation. Vous comprendrez que ce nouveau mandat prendra beaucoup de temps à nos agents et qu'il nous coûtera cher. Il faudra saisir les plants et les apporter au service de police désigné ou à quelque installation d'entreposage.
    Sans parler des nouvelles dispositions concernant la conduite avec facultés affaiblies par le cannabis. Puis il ajoute:
Nous ne voyons pas comment cela fera gagner du temps à notre personnel.
    Un des objectifs du projet de loi énoncés à l'article 7 est de réduire le fardeau sur le système de justice pénale. Étant donné que les organismes d'application de la loi croient que le cadre proposé ne réduira pas les activités de répression et que votre gouvernement a récemment annoncé son intention de consacrer 274 millions de dollars supplémentaires à l'application de la Loi sur le cannabis, comment le projet de loi C-45 va-t-il précisément réduire le fardeau sur le système de justice pénale.

  (1900)  

    Un des objectifs énoncés à l'article 7 du projet de loi est effectivement de réduire le fardeau sur le système de justice pénale. Dans la Loi sur le cannabis, nous avons mis en place une série de sanctions qui vont d'une contravention à de graves infractions criminelles. Je sais que vous rapportez les déclarations de la police. Comme M. Goodale en a parlé, nous sommes déterminés à mettre en oeuvre la Loi sur le cannabis en fournissant aux agents d'application de la loi tous les outils dont ils auront besoin, que ce soit relativement à la conduite avec facultés affaiblies par la drogue ou aux autres mesures, afin qu'ils puissent bien faire leur travail.
    Nous allons continuer à collaborer avec nos homologues des provinces et des territoires pour leur fournir le soutien dont ils ont besoin, de même qu'avec les gouvernements municipaux. Je pense que l'éventail des sanctions allant de la contravention aux infractions plus graves contribuera à réduire la charge de travail des tribunaux, surtout dans le cas des jeunes, pour les infractions moins graves de possession de 30 à 50 grammes de cannabis. Il sera possible de suivre d'autres voies que le système de justice pénale ordinaire.
    Il ne semble pas que cela réduira le fardeau.
    Votre temps est écoulé, monsieur Davies.
    Merci.
    Merci beaucoup.
    C'est au tour du Dr Eyolfson.
    Je remercie les ministres d'être venus.
    Monsieur Goodale, j'apprécie particulièrement ce que vous avez dit quant à la nécessité de lutter contre les gangs criminels. J'ai exercé la médecine d'urgence à Winnipeg pendant près de 20 ans et j'ai pu voir de près pourquoi nous étions la capitale des meurtres au Canada. Je ne saurais pas vous dire combien j'ai soigné de blessures par balles ou par arme blanche. La majorité de ces cas résultaient du commerce illicite de la drogue, et surtout du cannabis.
    Je vous remercie et j'apprécie les chiffres que vous avez cités en provenance des États de Washington et du Colorado montrant la diminution de la part du marché illicite résultant de la légalisation.
    Un autre gros problème de sécurité publique que j'ai également constaté de très près est la conduite avec facultés affaiblies sous toutes ses formes. Nous savons, comme vous l'avez dit, que le problème existe déjà. Ce n'est pas la légalisation qui va le créer. Nous savons qu'il existe. Avons-nous des données quant au nombre de personnes qui conduisent actuellement avec des facultés affaiblies par le cannabis?
    Je ne parle pas de victimes d'accident sur lesquelles on a simplement constaté la présence de cannabis, mais des données sur les collisions causées par une conduite avec facultés affaiblies par le cannabis?
    Je n'ai pas ces chiffres sous la main ce soir. Cela pourrait intéresser tous les membres du comité. Je vais demander à mes adjoints de préparer un résumé de ce que nous savons actuellement au sujet de la conduite avec facultés affaiblies par la drogue par opposition à la conduite avec facultés affaiblies par l'alcool. Je vais envoyer cela au comité dès que nous aurons pu compiler les chiffres.
    Très bien. Merci.
    En ce qui concerne le Colorado, nous avons entendu dire que ce que l'on prenait pour une hausse de la conduite avec facultés affaiblies par le cannabis était en fait attribuable à l'amélioration des méthodes de détection plutôt qu'à une augmentation du nombre d'incidents. Cette loi et les dispositions qui seront prises pour l'appliquer vont-elles aider à mieux déceler et détecter la conduite avec facultés affaiblies par le cannabis?

  (1905)  

     La loi, et plus particulièrement le projet de loi C-46 qui l'accompagne, va y contribuer à deux égards. Premièrement, la législation mettra en place un nouvel équipement de dépistage routier qui sera plus efficace pour fournir des renseignements préliminaires sur l'affaiblissement potentiel des facultés par la drogue et permettra de procéder à des tests plus précis au poste de police en prélevant des échantillons de sang. Cet équipement permettra d'obtenir des renseignements plus précis.
    Deuxièmement, la formation sera plus importante. Une partie de l'argent dont j'ai parlé dans ma déclaration servira à former davantage d'agents pour tester la sobriété sur le terrain afin qu'ils aient les compétences nécessaires pour évaluer la situation sur la route. Il y a actuellement environ 3 500 de ces agents qui reçoivent une formation dans les divers corps de police du pays. Notre objectif est de doubler leur nombre au cours des 18 à 24 prochains mois.
    Nous visons également à accroître largement, d'au moins 50 %, le nombre d'experts en reconnaissance de drogues. Ce sont des personnes qui ont été préqualifiées comme experts de la détection des drogues et qui témoignent à ce sujet devant les tribunaux. Nous avons environ 500 experts au Canada, à l'heure actuelle. Nous voudrions en avoir au moins 750 répartis dans les différentes régions du pays, bien entendu.
    Un meilleur équipement et un plus grand nombre d'agents bien formés pour travailler sur le terrain ou dans les postes de police nous permettront certainement de dépister et de quantifier le problème de façon plus précise, à l'avenir.
    Très bien. Merci.
    Une des autres préoccupations qui ont été émises concernait les dispositions permettant de cultiver jusqu'à quatre plants à domicile. Nous savons que cela suscite de nombreuses hypothèses. Nous ignorons dans quelle mesure cette culture se répandra. Apparemment, c'est une plante très difficile à cultiver, du moins d'après ce que j'ai entendu dire. Mais là encore, il y a toutes sortes d'hypothèses. Un agent d'un des services de police nous a parlé de ce qu'il adviendrait d'un immeuble de 200 appartements si quatre plants étaient cultivés dans la moitié de ces logements, mais quand je lui ai demandé ce qui l'amenait à croire que cela se produirait, il m'a répondu: « Je n'ai aucune donnée qui puisse le prouver. »
    Cela dit, dans l'état actuel des choses, avons-nous une idée de ce que pourrait être l'ampleur du problème ou de l'incidence de ce genre de culture? Avons-nous également une loi fédérale limitant le nombre de plants qui pourraient être cultivés si les propriétaires d'un immeuble d'appartements voulaient interdire cette culture? Y a-t-il une loi fédérale disant que vous n'avez pas le droit de cultiver cette plante dans des immeubles d'appartements?
    Pour ce qui est des lois fédérales, nous allons continuer à travailler avec les provinces et les territoires, et surtout avec les municipalités étant donné que cela a des conséquences sur la location résidentielle. Compte tenu des divers liens avec les autres autorités et autres lois, nous allons continuer à travailler de concert avec nos homologues à cet égard.
    Pour ce qui est du scénario dont vous parlez concernant les immeubles d'appartements, comme vous le savez, le groupe de travail en a longuement discuté. La limite a été fixée à quatre plants, en partie parce qu'un trop grand nombre de plants pourrait poser les problèmes que suscitent les cultures trop importantes dans les immeubles. La limitation du nombre de plants évitera certainement ces conséquences négatives.
    Très bien. Merci.
    Votre temps est écoulé.
    Voilà qui termine nos tours de questions de sept minutes.
    Je voudrais souhaiter la bienvenue à deux nouveaux membres permanents de notre comité, Dave Van Kesteren, du Parti conservateur et notre nouveau secrétaire parlementaire, Bill Blair, qui est avec nous depuis un certain temps, mais qui est maintenant membre permanent sans droit de vote du comité. Nous vous souhaitons la bienvenue à tous les deux et nous comptons sur votre contribution.
    Nous allons maintenant passer à des tours de questions de cinq minutes en commençant par M. Webber.

  (1910)  

    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les ministres de leur présence ici aujourd'hui.
     Madame Wilson-Raybould, nous avons entendu le témoignage de M. Steven Hoffman, qui est professeur de droit à Osgoode Hall et un expert en droit international. Comme nous-mêmes au Parti conservateur, il tient beaucoup à ce que nous n'enfreignions aucune loi internationale. Il estime que le projet de loi C-45 violerait en fait trois traités des Nations unies: la Convention unique sur les stupéfiants de 1961 qui a pour but de « limiter exclusivement aux fins médicales et scientifiques la production, la fabrication, l'exportation, l'importation, la distribution, le commerce, l'emploi et la détention des stupéfiants »; la Convention sur les substances psychotropes de 1971 et la Convention des Nations unies contre le trafic illicite de stupéfiants et substances psychotropes de 1988 qui fait de l'achat ou de la culture de stupéfiants ou de substances psychotropes destinés à la consommation personnelle une infraction pénale. Ce sont les trois traités des Nations unies que nous enfreindrons quand la loi sera adoptée.
    Je voudrais seulement savoir ce que votre gouvernement compte faire vis-à-vis des autres pays du monde qui sont signataires de ce traité. Comptez-vous simplement enfreindre et violer les traités ou allez-vous vous retirer des traités? Si vous vous en retirez, vous devez donner un préavis, mais le délai aurait été le 1er juillet 2017. Je me demande simplement ce que votre gouvernement compte faire vis-à-vis de nos partenaires internationaux.
    Mes collègues et moi-même travaillons en collaboration très étroite avec la ministre des Affaires étrangères. Je vous remercie de parler des conventions internationales dont nous sommes signataires. Je suis parfaitement consciente des engagements que nous avons pris à l'égard de ces conventions.
    Nous avons une approche solide pour procéder à la légalisation et nous réglementons uniquement le cannabis au Canada. Nous avons parlé très ouvertement de notre approche avec nos partenaires internationaux et nous allons procéder à la légalisation et à une réglementation rigoureuse du cannabis en ayant une approche solide sur le plan de la santé et de la sécurité.
    Notre approche en matière de santé et de sécurité est conforme aux objectifs de nos conventions internationales, mais comme l'a fait l'ancienne ministre de la Santé aux Nations unies, nous allons continuer de parler très ouvertement du travail que nous faisons, de son objectif et de l'optique bien particulière dans laquelle nous abordons ce projet de loi. Nous allons également continuer d'avoir des échanges ouverts et solides avec nos partenaires internationaux.
    Avez-vous averti officiellement que vous alliez vous retirer de ces traités?
     Comme je l'ai dit, nous travaillons en collaboration très étroite avec nos partenaires et la ministre des Affaires étrangères et nous avons parlé très ouvertement de notre approche à l'égard du projet de loi C-45.
    Pourrais-je ajouter que les États-Unis sont confrontés à ce problème en ce qui concerne leur position sur divers enjeux au niveau international? Alors que l'interdiction est maintenue au niveau fédéral, plusieurs États, y compris certains de ceux qui ont le plus fort pourcentage de la population, s'orientent dans la direction opposée. Il se pourrait que divers pays participent à une discussion internationale très importante à ce sujet au cours des mois et années à venir.
    Oui. M. Hoffman et M. Goodale ont parlé des États-Unis et du fait que certains États légalisent ou ont légalisé la marijuana, bien entendu, mais la législation fédérale ne la légalise pas. Apparemment, c'est ainsi que les États-Unis contournent le traité.
    Sait-on ce qu'il en est de l'Uruguay et des conséquences que la légalisation de la marijuana a eues dans ce pays?

  (1915)  

    Sur le plan des relations internationales et des discussions avec l'Uruguay…?
    Oui, quant au fait que l'Uruguay viole également le traité. L'Uruguay était signataire des traités des Nations unies et il a maintenant légalisé la marijuana. Avez-vous connaissance des conséquences ou des sanctions que lui a imposées la communauté internationale?
    Je ne répondrai pas à une question qui est du ressort de mon homologue, mais je vais certainement vous donner une réponse après avoir eu l'occasion de parler à la ministre des Affaires étrangères.
    Très bien. Merci.
    Le greffier m'a signalé que j'avais oublié de mentionner que M. McKinnon est membre permanent du comité. Il est ici depuis un certain temps, mais c'est maintenant officiel et je voudrais donc lui souhaiter officiellement la bienvenue au comité.
    Monsieur McKinnon, je crois que vous allez partager votre temps avec Mme Sidhu.
    Oui, merci, monsieur le président et merci de m'accueillir.
    Vous êtes le bienvenu.
    J'ai l'impression d'être ici depuis longtemps.
    Ma question s'adresse à vous, madame Wilson-Raybould. Nous savons que les adolescents trouvés en possession de cinq grammes de cannabis ou plus auront affaire au système de justice pénale par l'entremise du système de justice pénale pour les adolescents. Cela semble plutôt effrayant. Je sais que leur casier judiciaire sera scellé lorsqu'ils seront adultes, mais je me demande si nous ne pourrions pas explorer d'autres solutions non pénales.
    Je pense que tout le monde devrait avoir peur du système de justice pénale et devrait éviter à tout prix d'y avoir affaire. Pour ce qui est des cinq grammes ou moins, nous continuons d'examiner la question. Je poursuis les discussions avec mes homologues des provinces et des territoires afin de l'examiner avec mes collègues. Par exemple, l'Ontario a annoncé, la semaine dernière, qu'elle légiférerait pour limiter davantage la possession de cannabis chez les adolescents et permettre aux policiers de saisir le cannabis en possession d'un jeune comme elle peut le faire actuellement pour l'alcool.
    Pour ce qui est des adolescents de 12 à 17 ans trouvés en possession de cannabis, comme vous l'avez mentionné c'est la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents qui s'applique. Cette loi favorise la réadaptation et la réintégration des jeunes dans la société. Elle tient compte du niveau de maturité de l'adolescent et de sa dépendance. Elle exige qu'un policier envisage des sanctions de substitution si les circonstances s'y prêtent, un avertissement ou d'autres mesures afin d'éviter que l'adolescent se retrouve dans le système de justice pénale.
    Merci, madame la ministre.
    Je vais céder la parole à ma collègue.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie tous les ministres de leur présence parmi nous.
     Ma question s'adresse à la ministre de la Justice. L'article 31 du projet de loi C-45 interdit de vendre du cannabis ou un accessoire dont la forme est attrayante pour les jeunes. Qui va établir si le cannabis ou l'accessoire est attrayant ou non pour les jeunes? Un ministre a-t-il été désigné pour le rappel de ces produits? Vous pourriez peut-être nous expliquer cela.
    Si je comprends bien la question, la loi prévoit que la publicité, la présentation des produits, soit du ressort du ministre de la Santé comme c'est indiqué dans de nombreuses dispositions de la loi.
    Je ne sais pas si ma collègue désire vous en dire un peu plus.
    Oui, certainement.
     Le projet de loi C-45 propose une réglementation rigoureuse à l'égard de l'emballage et de l'étiquetage ainsi que de la commercialisation et de la publicité. Nous voulons vraiment faire en sorte que les instruments de commercialisation n'incitent pas les jeunes à consommer du cannabis. C'est très similaire à ce que nous avons fait dans la législation relative au tabac et pour les produits du tabac. Des règles du même genre s'appliqueront. Il y aura des mises en garde et nous verrons aussi à ce que l'emballage soit très neutre, si l'on peut dire. Nous veillerons également à ce que la commercialisation se fasse sans commandites ou soutiens.
    En dernier lieu, les seuls renseignements qui figureront sur l'emballage seront de nature commerciale: le contenu de l'emballage, la quantité de produit ou d'autres renseignements de ce genre. Voilà le genre de renseignements qui figureront sur l'emballage. Là encore, nous voulons veiller à ce que la publicité n'incite pas les jeunes à consommer du cannabis.

  (1920)  

    Merci.
     Je m'adresse à la ministre de la Santé. Au cours de nos séances de la semaine dernière, nous avons entendu parler des recherches sur le cannabis et ses effets sur la santé. Nous savons que la recherche est un instrument important pour éclairer les décisions des citoyens et du gouvernement. Dans quelle mesure la légalisation du cannabis permettra-t-elle de faire davantage de recherches? Avez-vous prévu de faire plus de recherches à ce sujet?
    Merci beaucoup pour cette question. C'est une question très importante.
    Notre gouvernement entend tout à fait favoriser la recherche en ce qui a trait au cannabis, en considérant deux types d'usage: l'usage médical et l'usage récréatif. L'IRSC a émis une proposition de subvention d'un million de dollars spécifiquement pour la recherche dans ces deux domaines. Nous attendons les résultats avec impatience. En ce qui concerne la ministre de la Santé et à la recherche, il sera plus facile pour la ministre de la Santé d'approuver ce type de recherche quand le projet de loi C-45 sera réalité, car le produit sera alors légal.
    Merci.
    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant passer à M. Van Kesteren.
    Merci, monsieur le président.
    Merci de votre présence ici. C'est la première fois que j'ai l'occasion de participer à ce comité. J'anticipe avec bonheur d'y contribuer.
    Cette question s'adresse à la ministre de la Santé et je suis étonné qu'elle n'ait pas encore été soulevée. Est-ce que fumer de la marijuana est bon pour la santé?
    Comme le projet de loi C-45 l'indique, nous ne faisons d'aucune façon la promotion...
    Mais répondez à la question. Est-ce que c'est bon pour la santé?
    En ce qui a trait à la réponse...
    Faites la comparaison avec la cigarette. Est-ce que c'est meilleur pour la santé que de fumer la cigarette?
    Je ne dirais pas que c'est meilleur pour la santé, non, mais une fois de plus...
    Dans les faits, je crois que c'est cinq fois plus toxique.
    L'hon. Ginette Petitpas Taylor: Oui...
    M. Dave Van Kesteren: Je suis curieux, où voulez-vous en venir? Nous avons reconnu, et c'était évident, que de fumer la cigarette était mauvais. Le gouvernement a même cru que de taxer la cigarette, même très lourdement, était la meilleure chose à faire et nous avons ainsi réduit son usage de façon importante. Est-ce qu'il y a un plan de match avec cette législation? Avez-vous l'intention de faire la même chose? Allons-nous taxer le produit pour que les gens le délaissent parce qu'il est mauvais pour eux?
    L'objectif du projet de loi C-45 est très clair: il s'agit de légaliser le cannabis, de le réglementer strictement et d'en restreindre l'accès aux enfants.
    Je sais cela.
    C'est là notre objectif réel.
    En ce qui a trait au marché dans son état actuel, nous constatons que 100 % des profits vont au marché noir. En réglementant le système, nous voulons nous assurer que les gens auront accès à un produit sécuritaire et, ce faisant, sortir les profits des mains des criminels.
    Mais n'est-ce pas là un exemple de deux poids, deux mesures? Nous sommes arrivés à la conclusion que la cigarette était nocive.
    Je vais vous raconter une petite histoire. Une fois, j'ai reçu à mon bureau des gens de l'industrie du tabac qui étaient vraiment furieux que les Autochtones vendent du tabac. Nous en avons discuté et je leur ai dit quel était mon problème. Le gouvernement a taxé ce produit au point qu'il est maintenant rentable pour le crime organisé. En fait, je ne sais pas si les gens sont au courant, mais une balle de tabac valait à l'époque 75 000 $. C'était plus lucratif de vendre du tabac que de vendre de la marijuana. La compagnie de tabac vend un produit dont on sait qu'il est mauvais pour la santé des gens et des groupes autochtones le vendent illégalement. Je leur ai répondu que je ne savais pas qui étaient les criminels.
    Allons-nous avoir un problème...? Je pourrais peut-être demander à quelqu'un d'autre.
    Monsieur Goodale, vous pouvez peut-être m'aider vous aussi. J'espère franchement que nous savons où nous allons et que nous n'allons pas rendre ce produit moins cher, et de ce fait, plus attrayant pour les jeunes. Ou allons-nous le taxer au point que certains groupes comme les Autochtones vont trouver que cela correspond tout à fait à leurs compétences et vont commencer à en produire? Y avons-nous songé?
    Vous comprenez où je veux en venir. Il semble y avoir beaucoup de choses auxquelles vous n'avez pas réfléchi et que vous devriez peut-être prévoir.
    Nous avons été guidés dans notre analyse par l'étude aussi excellente que compréhensive du groupe de travail.
    La question du prix et de l'imposition de taxes est une question très sérieuse sur laquelle se penchent le ministre des Finances et ses homologues provinciaux en ce moment même, afin de déterminer quel type de régime fiscal doit s'appliquer, de façon à permettre aux gouvernements de payer les coûts en jeu, sans en arriver au scénario qui vous inquiète, c'est-à-dire un marché noir. Par conséquent, les ministres des Finances doivent exercer beaucoup de prudence dans leurs délibérations sur les règles fiscales à appliquer au cannabis, afin de s'assurer qu'ils ne créent pas un marché noir sans le vouloir, car c'est exactement ce que nous voulons éviter.

  (1925)  

    J'ai quelque chose en commun avec M. Blair, en ce qui concerne la police. Trois de mes fils sont policiers. Parfois, j'aime croire que je suis un peu libertaire. Une fois, lors d'une conversation, nous avons parlé de la légalisation de la marijuana. J'ai dit: « Je suis libertaire. Je pense que si les gens veulent fumer, c'est leur affaire. » Il faut que je vous dise, ils ne m'ont plus lâché. Ce sont mes fils policiers qui m'ont dit que j'étais cinglé. Ils ont commencé à m'énumérer... Je n'ai pas le temps de soulever les problèmes dont ils ont parlé.
    C'est la force policière. Ces gens-là sont sur la ligne de front et je n'ai encore rencontré personne... à l'exception de M. Blair. Je suis certain qu'il y en a d'autres, mais je ne les ai pas rencontrés. Combien de personnes dans les forces de l'ordre nous disent de mettre la pédale douce, que nous ne savons pas ce que nous faisons, et que nous devons comprendre qu'il y aura des conséquences que nous n'avons pas encore prévues? Pourquoi n'écoutez-vous pas ces groupes et pourquoi ces groupes ne se sentent-ils pas tranquilles face à tout cela, si vous avez vraiment dialogué avec eux?
    Il y a des conséquences graves à maintenir le statu quo. Avec le statu quo, les adolescents canadiens sont devenus les plus grands utilisateurs de marijuana en Occident.
    Mais savons-nous pourquoi?
    Le statu quo met 7 milliards de dollars par année entre les mains du crime organisé. Remettre la solution à plus tard ne fait que perpétuer l'échec actuel. Nous devons passer de l'échec à un autre système qui offre de meilleures chances de succès afin de protéger nos enfants et de ralentir le crime organisé et, nous l'espérons, l'arrêter.
    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant passer à M. Ayoub.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Je suis très content que les témoins soient ici pour répondre à des questions importantes.
    Comme je l'ai déjà fait la semaine dernière...

[Traduction]

    Désolée, monsieur le président. Mes excuses, il n'y a pas de traduction.
    Pas de souci. Recommençons, alors.

[Français]

    Je voulais vous remercier. Nous sommes très privilégiés que vous soyez tous les trois présents pour répondre à des questions importantes.
    Comme je l'ai dit la semaine dernière, nous avons assez attendu. Il y a urgence d'agir. Vous l'avez dit, monsieur Goodale, cela fait longtemps que nous faisons face à un système qui ne fonctionne pas. Il faut avancer.
     À titre d'information, la semaine dernière, j'ai tenu une réunion à la mairie de ma circonscription et 130 personnes y ont participé. Il y a été dit que 45 % des jeunes de ma circonscription consomment de la marijuana depuis la dernière année. Si je dis qu'il y a urgence d'agir, c'est parce que les statistiques canadiennes sont catastrophiques. Nous nous sommes penchés sur les raisons pour lesquelles les pourcentages étaient à ce point élevés.
    Madame Petitpas Taylor, je voudrais faire le point sur l'éducation. Comme pour l'alcool et la cigarette, l'aspect de l'éducation est important. Les parents, les personnes qui nous entourent, la société et les gouvernements ont un effet sur ce que les jeunes consomment ou ne consomment pas. Dans le contexte de la légalisation de la marijuana, ce qui est fait ou prévu en termes d'éducation doit permettre de sensibiliser nos jeunes, de réduire la consommation de marijuana et de faire en sorte qu'ils n'en consomment pas à un jeune âge. S'ils décident d'en consommer plus tard, ce doit être en toute connaissance de cause.

  (1930)  

    Je vous remercie beaucoup de votre question.
    Tout d'abord, je dois dire que la campagne de sensibilisation est une priorité pour nous.
    Nous avons appris de l'expérience de nos voisins américains. Ceux-ci ont regretté de ne pas avoir éduqué la population avant l'entrée en vigueur de la loi.
    Pour nous, les investissements de 9,6 millions de dollars ne sont qu'un début.
     Nous reconnaissons que nous devons sensibiliser et éduquer les jeunes afin qu'ils connaissent les conséquences de la consommation de marijuana. Il faut avoir une discussion honnête avec nos enfants. Nous voulons outiller les parents et les jeunes pour nous assurer qu'ils reçoivent la bonne information.
     Nous avons établi des partenariats avec des agences qui ont conçu des outils et qui en élaborent d'autres. Nous voulons également nous assurer de rejoindre les jeunes en utilisant les mêmes outils qu'eux, notamment les médias sociaux. Ainsi, différentes mesures seront incluses dans la campagne de sensibilisation.
    Je répète que le fait d'encourager le dialogue avec les jeunes est un élément important, un élément clé du processus de sensibilisation. Nous voulons nous assurer que les jeunes reconnaîtront les signes avant-coureurs, les symptômes et les résultats de la consommation de la marijuana.
    Madame Petitpas Taylor, je me fie à vos paroles et je vous encourage fortement à poursuivre vos efforts de sensibilisation. Je sais que c'est important pour vous. La sensibilisation, c'est la première étape, et cela nécessite des investissements. Ainsi, j'incite mon gouvernement à investir beaucoup plus dans la sensibilisation et l'éducation pour parfaire la compréhension.
    Monsieur Goodale, j'aimerais aborder le sujet de la production à des fins personnelles et du nombre de plants. Un de mes collègues se demandait comment nous allions réussir à contrecarrer la production et à gérer les prix. Si la production à des fins personnelles est permise, cela réduira-t-il l'intérêt, pour le crime organisé, à produire de la marijuana et à la vendre sur un marché où le prix est beaucoup plus bas? En effet, les consommateurs individuels, le public cible, n'auront désormais plus besoin d'aller voir des criminels. Présentement, les enfants et les adultes doivent faire affaire avec des criminels pour se fournir en cannabis. Y a-t-il une corrélation à faire de ce côté?

[Traduction]

    Votre argument est vraiment important et très valable. En ce moment, la production et la distribution sont entièrement, à 100 % entre les mains des organisations criminelles, sauf pour le volet médical, dont Santé Canada s'est approprié depuis un certain nombre d'années. L'objectif est de retirer à ces organisations criminelles le monopole de fait, de leur retirer l'incitatif des bénéfices et d'établir un régime de production réglementé nous permettant de mieux contrôler la qualité et de faire respecter les normes en vigueur, de sorte que les bénéfices soient gagnés légalement et non illégalement, de façon à obtenir une sécurité accrue et des avantages sur le plan de la santé publique.
    Est-ce que le nouveau régime sera absolument parfait et une réussite à 100 %? Nous l'espérons. Certes, c'est notre but. En vertu d'un nouveau cadre juridique avec des règles et des contrôles stricts, nous croyons que nous améliorerons la santé et la sécurité publiques avec beaucoup plus de succès que ne le fait un régime vieux de plus de 90 ans, qui est de toute évidence un échec lamentable.
    Votre temps est écoulé, nous allons maintenant retourner à M. Davies.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur le ministre Goodale, la première ministre libérale de l'Ontario, Kathleen Wynne, a récemment annoncé son intention de mettre la vente au détail des produits du cannabis entre les mains d'une société d'État. La semaine dernière, ce comité apprenait que l'État du Colorado — que n'importe quel État en fait — ne pouvait établir un tel modèle de distribution publique, car cela ferait en sorte que les employés de l'État enfreignent la loi fédérale américaine sur le trafic du cannabis.
    Monsieur le ministre, étant donné que les employés de la société d'État ontarienne se chargeront de la vente du cannabis, est-ce que cela affectera leur admissibilité aux États-Unis, à votre avis?
    Non, car ils n'ont enfreint aucune loi américaine.

  (1935)  

    À la ministre de la Justice: Michael Spratt, un avocat, a témoigné devant ce comité que le projet de loi C-45...
    Je dirai seulement qu'ils n'ont enfreint aucune loi, non seulement la loi des États-Unis.
    Eh bien, pas encore.
     Michael Spratt a témoigné que le projet de loi C-45 laisse intacte la criminalisation du cannabis dans de nombreuses instances, ce qui portera préjudice à des Canadiens vulnérables. Je voudrais citer un passage de son témoignage:
Un adulte qui possède 30 grammes de marijuana en public est un criminel. Un jeune qui possède plus de cinq grammes de marijuana est un criminel. Un jeune de 18 ans qui passe un joint à son ami de 17 ans est un criminel. Un adulte qui fait pousser cinq plants de marijuana est un criminel. Un adulte qui laisse son plant de marijuana d'un mètre pousser un centimètre de plus est un criminel.
La persistance de cette criminalisation ne cadre pas avec une politique de justice pénale fondée sur des preuves et ne servira qu'à diminuer en partie l'influence positive de ce projet de loi.
... la criminalisation asymétrique de la marijuana ne servira qu'à perpétuer la disproportion des interventions des forces de l'ordre auprès des jeunes, des marginaux et des membres de minorités raciales dans notre société.
    Monsieur le ministre, vous savez que les Autochtones, les personnes marginalisées et les membres de minorités raciales sont surreprésentés dans notre système de justice pénale et sont touchés de façon disproportionnée par la criminalisation des drogues. En conservant cette approche criminelle quant au cannabis, le projet de loi C-45 perpétuera cette discrimination. Pourquoi avez-vous procédé ainsi?
    Premièrement, nous travaillons à une révision complète du système de justice pénale, qui vise spécifiquement à réduire la surreprésentation des Autochtones et des personnes marginales.
    Ce que le projet de loi C-45 cherche à accomplir est, comme je l'ai mentionné plus tôt lors de mon témoignage, l'inclusion d'une diversité de sanctions dans la loi, de la simple contravention à la poursuite au criminel plus sérieuse. L'occasion se présente de procéder par émission de contraventions pour nombre des infractions que vous avez mentionnées, par exemple, la possession de 30 à 50 grammes pour un adulte. Quant aux jeunes, si vous parcourez la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents, il est possible de procéder de manière différente, de sorte que les agents de police puissent...
    La question, avec tout le respect que je vous dois, madame la ministre, est: « Êtes-vous d'accord que cette loi continuera d'avoir un effet disproportionné sur les Autochtones et les membres des minorités raciales? »
    La raison d'être de cette loi, comme vous l'avez fait remarquer avec raison, se trouve dans notre article 7. Notre objectif est de faire en sorte que nous légalisions et réglementions le cannabis afin d'en préserver nos jeunes et de faire en sorte que les profits ne soient plus entre des mains criminelles.
    D'accord. Je comprends.
    Nous avons une obligation et je travaille extrêmement fort, dans le cadre plus large de la révision du système de justice pénale, pour m'attaquer à la surreprésentation des Autochtones et des personnes marginalisées, qui résulte de nombreux facteurs.
    D'accord.
    Après la présentation du projet de loi C-45 le premier ministre Trudeau a déclaré à VICE News devant une assemblée que:
... nous mettrons l'accent sur les changements à apporter à la législation afin de réparer ce qui est brisé [dans] le système et qui fait mal aux Canadiens... et nous prendrons ensuite les mesures nécessaires pour examiner ce que nous pouvons faire pour ceux qui ont un dossier criminel pour une infraction qui n'est plus criminalisée.
    Pourtant, Kathy Thompson, sous-ministre adjointe à la sécurité communautaire et à la réduction du crime au ministère de la Sécurité publique, a dit devant ce comité qu'il « n'y avait aucun projet en ce moment d'introduire un pardon automatique », comme on l'a laissé entendre, et on ne trouve absolument rien dans ce projet de loi qui traite de l'obtention d'un pardon.
    Monsieur le ministre, pouvez-vous confirmer que votre gouvernement se prépare à effacer les dossiers criminels pour les infractions qui ne seront plus des infractions quand la législation proposée sera en vigueur?
    Nous réfléchissons au problème. Nous ne sommes pas encore arrivés à une conclusion, mais bien évidemment, nous examinons toutes les options et toutes les complexités dans le but d'atteindre l'objectif que le premier ministre a énoncé.
    Merci.
    Je vais revenir à la ministre de la Justice. Le groupe de travail McLellan a énoncé ce qui suit:
Les gouvernements du Canada et de nombreuses autres organisations devront travailler rapidement pour se préparer à la mise en oeuvre du nouveau système. Ils devront renforcer ou développer leurs capacités dans de nombreux domaines liés à la production, à la distribution et à la vente au détail, au contrôle de la qualité et à l'application de la loi, ainsi qu'à la recherche et à la surveillance... Il faudra avoir en place tous les éléments pour assurer le bon fonctionnement du système.
    Il recommande également que le gouvernement fédéral « joue un rôle de leadership pour veiller à ce que la capacité soit développée parmi tous les ordres de gouvernement avant le lancement du régime réglementaire ».
    Pourtant, lorsqu'on lui a demandé si le gouvernement fédéral avait collaboré avec les gouvernements autochtones sur une base de nation à nation pour développer cette capacité, le chef régional de l'Ontario Isadore Day a rapporté à ce comité:
Non, ils ne l'ont pas fait...
Le processus législatif, la capacité juridique, les processus issus d'une entente commune sur la façon dont nous allons nous unir et travailler ensemble pour arriver à un résultat collectif, tout cela constituera un défi. Rien de tout cela ne semble se produire avec ce gouvernement.
    Madame la ministre, malgré l'avertissement clair émis par le groupe de travail que la coopération intergouvernementale est essentielle et vu les déclarations répétées du premier ministre selon lesquelles il tient par-dessus tout à ses relations avec les peuples autochtones, pourquoi notre gouvernement a-t-il ignoré les gouvernements des Premières Nations lors du développement des capacités en vue de l'adoption du projet de loi C-45?

  (1940)  

    Je suis en désaccord avec l'affirmation selon laquelle nous avons ignoré les peuples autochtones. Nous sommes fermement engagés à nous investir dans une relation de nation à nation avec les peuples autochtones dans tout le pays.
    Je sais que les peuples, les communautés et les organisations autochtones ont eu la chance de s'exprimer devant le groupe de travail lors de l'élaboration de son rapport. De la même façon, je sais que mes collègues et moi continuerons à nous investir auprès des communautés autochtones au fur et à mesure que nous avancerons vers juillet 2018. Écouter autant de communautés autochtones que nous le pouvons constitue un engagement ferme de notre part.
    Il s'agit d'une discussion plus vaste au sujet des gouvernements autochtones et de la capacité de ces communautés, qu'elles soient régies par la Loi sur les Indiens ou par des ententes issues d'un gouvernement autonome. Nous sommes conscients de la capacité des communautés autochtones qui sont encore régies par la Loi sur les Indiens et qui adoptent des règlements sur les substances toxiques dans leurs réserves. De même, nous allons continuer à comprendre les communautés autochtones, à nous investir auprès de celles qui bénéficient d'ententes sur l'autonomie gouvernementale et à leur offrir la possibilité de progresser dans cette voie. Je sais que ma collègue, la ministre Petitpas Taylor, consacre beaucoup de temps à la santé et aux réalités des communautés autochtones sur une base continue.
    Merci beaucoup.
    Ceci met fin à notre tour de questions habituel. Cependant, je crois sentir qu'il reste encore bien des questions, alors nous allons poursuivre avec un autre premier tour. Nous en avons tout juste le temps, par contre, alors veuillez limiter vos questions et vos réponses à cinq minutes. Je vais tenter de vous faire taire après cinq minutes sans trop m'immiscer.
    Nous allons commencer avec M. Ayoub.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Effectivement, avoir plus de temps pour poser plus de questions a toujours été notre souhait. Lorsque nos confrères de l'autre côté ne peuvent pas participer aux débats parce qu'ils doivent s'absenter, ils veulent tout de même avoir du temps pour poser des questions. Je voulais faire le point là-dessus.
    J'aimerais revenir à la question du contrôle des prix. Nous avons entendu toutes sortes de choses lors de témoignages sur ce sujet. On a parlé de 35 $ pour 3,5 grammes, du prix du cannabis médicinal ou du prix demandé sur la rue par les criminels.
     Le gouvernement préfère-t-il que les provinces donnent la responsabilité de la vente de cannabis au secteur privé ou à un organisme gouvernemental ou sans but lucratif? Comment le gouvernement fédéral veut-il s'y prendre pour que les provinces alignent leurs responsabilités en la matière?

[Traduction]

    Peut-être que mes autres collègues voudront y participer également. Dans le cadre que nous sommes en train d'établir, la vente au détail sera organisée et gérée au palier provincial. Si une province choisit de confier la vente au détail à une société d'État, celle-ci jouerait alors un rôle essentiel dans l'établissement du prix. Les autres provinces voudront peut-être privilégier une approche différente quant à leur façon de créer un marché et de laisser les forces du marché déterminer le prix.
    Le rôle essentiel que le gouvernement peut et va jouer se situe au plan fiscal, en ce qui a trait aux taxes. Je suis certain que les ministres des Finances — au fédéral, au provincial et dans les territoires — voudront s'assurer que le régime fiscal sur lequel ils s'entendent collectivement réalisera les deux principaux objectifs de la législation, notamment retirer la marijuana des mains des enfants et stopper le flux d'argent illégal vers le crime organisé, ce qui suppose l'élimination maximale humainement possible du marché noir. Ils ne voudront pas établir un prix qui ferait en sorte de perpétuer le marché noir. Ce sont des décisions fiscales auxquelles les ministres des Finances devront réfléchir consciencieusement.

  (1945)  

    Merci.
    Merci de votre témoignage, Ramez. J'ai une question.
    Nous avons invité la plupart des provinces et des territoires à faire une présentation, mais nous avons seulement obtenu réponse de la Saskatchewan, qui a dit qu'elle n'était pas prête pour cette législation. Si le projet de loi devait devenir loi, l'Ontario et le Nouveau-Brunswick ont des plans pour les communautés éloignées et les communautés autochtones. Comment les gens pourront-ils se procurer ces produits? Le marché noir demeurera-t-il en place jusqu'à ce que ces provinces et territoires établissent leurs propres règles de distribution et de vente au détail?
     Nous reconnaissons que les différentes juridictions ne sont pas toutes arrivées au même point quant au travail qu'elles ont accompli dans ce projet. Si une autorité législative, une province, la Colombie-Britannique par exemple, n'est pas prête lorsque nous espérons que le projet de loi C-45 sera loi, alors il y aura un filet de sécurité. Le gouvernement fédéral s'assurera qu'il y ait une distribution sécuritaire, par un producteur agréé qui pourra envoyer ses produits par courrier sécurisé.
    Si une province ou un territoire n'a pas abordé l'enjeu des collectivités rurales ou autochtones — des collectivités éloignées —, est-ce que cela sera maintenu parallèlement à la distribution provinciale, ou est-ce que vous mettrez fin au modèle du commerce électronique?
    Le gouvernement fédéral n'a pas l'intention de jouer longtemps un rôle de détaillant. C'est une situation temporaire. En attendant, si les provinces et les territoires ne sont pas prêts, nous allons nous assurer que la procédure est mise à leur disposition.
    J'ai une dernière question au sujet de l'emballage. Dans le cas de la cigarette, on tend vers une banalisation de l'emballage. En l'état, le projet de loi ne prescrit pas la banalisation du matériel d'emballage utilisé pour la vente et la distribution. Ainsi, rien n'empêche de saisir cette occasion pour afficher des couleurs et des images de marque. Avez-vous songé à appliquer les règlements de banalisation de l'emballage à la vente de cannabis?
    Nous visons à l'établissement d'une réglementation rigoureuse. Il me semble en effet que nous pourrions aller dans le sens de la réglementation des produits du tabac. Nous voulons nous assurer que l'emballage n'incite pas les enfants à consommer du cannabis. Nous avons bien l'intention d'y veiller.
    Nous allons maintenant passer à Mme Gladu.
    Merci, monsieur le président.
    J'ai une question pour la ministre de la Santé au sujet de la culture de cannabis à domicile.
    Non seulement la marijuana se retrouverait ainsi à la portée des enfants, mais d'autres inquiétudes ont également été soulevées lors des témoignages. En fait, les maisons où du cannabis est cultivé ont 24 fois plus de chance de passer au feu. On recense plusieurs incidents de vol d'électricité et de plaintes liées à l'odeur, sans parler des inquiétudes au sujet de la moisissure. Qui plus est, au Québec et en Ontario, les propriétaires qui louent leur propriété ou leur sous-sol ne pourraient pas empêcher les locataires de faire pousser du cannabis ou d'en consommer.
    Le meilleur exemple que nous ayons vient du modèle de l'État de Washington où on a ajouté l'usage récréatif de la marijuana à un système d'usage médical du cannabis très rigoureux et réglementé. La culture à domicile n'est permise que pour ceux qui ont une santé fragile et ne peuvent pas se rendre au dispensaire de marijuana. Résultat: ils ont éliminé la majorité du marché noir. Selon les statistiques, 80 % des activités sont licites là-bas.
    Dans ce contexte, le gouvernement envisage-t-il d'interdire la culture à domicile sauf dans le cas des consommateurs à la santé fragile?
    À l'heure actuelle, il faut se rappeler que la culture à domicile ne représente que quatre plants de marijuana. On est loin d'une opération de culture de cannabis à l'intérieur d'une maison. Nous examinons de près les recommandations du groupe de travail, qui recommande également cela. Nous irons de l'avant, mais il nous tarde d'entendre les recommandations du Comité. Je le répète: il me semble que nous devons aussi faire confiance aux citoyens quand ils sont chez eux. Je ne doute pas que les Canadiens prendront les mesures qui s'imposent pour s'assurer que le produit — à l'instar de tout autre produit — sera conservé dans un endroit sécuritaire et qu'il y restera, pour le bien de leurs enfants. Lorsqu'on a de l'alcool ou des produits inflammables à la maison, on veille à ce qu'ils restent hors de portée des enfants.
    À ce chapitre, je crois que les parents, ainsi que la plupart des citoyens, agiront de manière responsable.

  (1950)  

    Selon moi, il est naïf de penser cela.
    La sensibilisation et l'éducation du public sont très importantes. Pour réduire le pourcentage de conducteurs en état d'ébriété sur les routes, il a fallu une énorme campagne de sensibilisation du public. Vous demandiez des statistiques un peu plus tôt, il me semble. En ce qui a trait aux accidents de la circulation, l'alcool était présent dans 18 % des cas, les drogues dans 24 % des cas et une combinaison des deux dans 16 % des cas. C'est donc sans contredit un sujet de préoccupation.
    De quel genre de campagnes avons-nous besoin? Il faut se rapprocher de ce qui a été fait pour le tabac. Vous avez parlé d'une annonce gouvernementale de 9,5 millions de dollars, mais c'est sur cinq ans, il me semble. Regardons ce qui a été accompli dans les États du Colorado et de Washington. Dans l'État de Washington, on a dit avoir dépensé 7 millions de dollars par année pour une population de sept millions d'habitants, si je ne m'abuse. Au Colorado, c'était 10 millions de dollars pour cinq millions d'habitants, je crois. Je crains que le financement ne soit pas suffisant. De plus, il ne reste que 283 jours et aucune campagne de sensibilisation n'a encore été lancée. Vous avez parlé de Facebook et des médias sociaux, mais je n'en ai rien vu. Si je n'ai rien vu alors même que je surveille cela, je crains qu'il n'y ait rien eu d'autre que les 100 000 $ de la formation à but non lucratif à l'intention des parents.
    Quel plan de sensibilisation envisagez-vous afin de prévenir l'augmentation des cas de conduite avec facultés affaiblies par la drogue, augmentation que l'on anticipe au vu de l'expérience des États du Colorado et de Washington?
    Je répondrai en premier, puis mon collègue prendra le relais, s'il le souhaite.
    Je vous rappelle que la somme de 9,6 millions de dollars constitue un investissement initial en sensibilisation et en prévention. C'est important. L'expérience d'autres États nous a enseigné qu'il fallait commencer par la campagne de sensibilisation avant l'instauration du nouveau régime. C'est précisément ce que nous faisons. J'ai déjà été travailleuse sociale et, à ce titre, je peux vous dire que la sensibilisation et la prévention sont la clé. Il faut absolument transmettre des informations justes, aux jeunes tout particulièrement.
    En ce qui a trait aux outils déjà existants, j'ai parlé déjà du programme Jeunesse sans drogue. Au reste, les campagnes sur les médias sociaux sont déjà lancées. Nous tenons à redoubler d'efforts dans ce domaine parce que nous voulons faire en sorte que les gens reçoivent les informations justes dont ils ont besoin.
    Pour ce qui est de la conduite affaiblie, mon collègue voudra peut-être intervenir.
    Je rappellerai simplement que la campagne a déjà débuté. Elle est d'abord axée sur les médias sociaux, parce que les statistiques révèlent que c'est de loin la manière la plus efficace de rejoindre les jeunes.
     Le travail est en cours. Nul doute que la cadence s'accélérera et que l'effort d'autres instances sera complémentaire, y compris le travail des gouvernements provinciaux qui, dans certains cas, ont dans leurs cartons d'importantes campagnes d'information et d'éducation associées au projet de loi C-45 et au nouveau régime de réglementation du cannabis et, en particulier, au projet de loi C-46, qui a trait à la conduite avec facultés affaiblies. Certains organismes du secteur privé, comme MADD — Mothers Against Drunk Driving — et l'Association canadienne des automobilistes ont diffusé de l'information dans le domaine public de manière très active, notamment par le biais de publicités payées.
    J'ai oublié de mentionner qu'un groupe de travail a été formé en collaboration avec les provinces et les territoires pour coordonner la campagne de sensibilisation du public. La coopération avec les provinces et les territoires, je le répète, est cruciale. Nous leur savons gré de leur contribution.
    Monsieur Davies, vous avez cinq minutes.
    Madame la ministre de la Santé, j'aimerais reprendre là où vous aviez laissé au sujet de l'importance de l'éducation et de la sensibilisation. Des témoins ont parlé avec conviction de l'importance de disposer de matériel éducatif au sujet du cannabis qui soit taillé sur mesure pour différents publics cibles. Selon eux, le même matériel ne peut convenir à tous les groupes. On a demandé au chef régional de l'Ontario, Isadore Day, si le gouvernement fédéral avait collaboré avec l'Assemblée des Premières Nations ou avec toute autre organisation autochtone afin de créer du matériel éducatif ciblé et convenable au plan culturel — matériel qui aurait été diffusé avant le 1er juillet 2018 — ou si les communautés autochtones avaient reçu de l'argent pour ce faire. M. Day a répondu non, tout simplement.
    Pourquoi le gouvernement fédéral ne travaille-t-il pas avec les organisations autochtones?

  (1955)  

    Je dois d'abord préciser que nous avons établi des relations de travail avec plusieurs groupes de la communauté. Comme vous l'avez dit, le même matériel ne saurait convenir à tous.
    Il me faudrait reprendre la parole pour vous démontrer le travail de consultation des communautés des Premières Nations et des communautés autochtones qui a été fait. Je serais ravie de vous parler plus en détail de cette consultation.
    Merci.
     Madame la ministre de la Justice, j'aimerais savoir qui sera chargé d'appliquer le texte découlant du projet de loi C-45 sur les réserves et les terres des bandes.
    Pour les communautés qui sont encore régies par la Loi sur les Indiens, il y a la possibilité d'instaurer un règlement administratif qui en fera des communautés sans drogue, si tel est leur souhait. Si elles sont encore régies par la Loi sur les Indiens ou si elles ont signé une entente d'autonomie, ce sont les dispositions ou les accords qu'elles ont conclus qui indiqueront s'il en ira de la compétence provinciale ou si des discussions avec la GRC devront avoir lieu. Dans le cas des communautés autonomes, il y a souvent des accords avec des organismes provinciaux.
    Je jure que ce sera ma dernière citation du chef Day. La voici:
C'est l'une des questions qui restent en suspens. La réponse déterminera si, oui ou non, nous déclarerons que nous sommes prêts.
Je dois vous dire qu'il y a beaucoup de nervosité en ce moment dans la plupart des communautés. On se demande si l'on pourra appliquer les lois de la communauté ou même les lois fédérales-provinciales sur le cannabis à usage médical et récréatif.
    Il a dit: « Selon moi, le gouvernement fédéral se montre très irresponsable en n'arrivant pas à répondre à cette question. »
    Je suggérerais au gouvernement fédéral de consulter les Premières Nations à ce sujet de manière un peu plus consciencieuse. Qui appliquera la loi sur les terres des bandes? Il semble qu'il y ait beaucoup de confusion à ce propos.
    Merci d'aborder cette question. Je connais le chef Day. Je sais qu'il s'emploie activement à faire progresser les choses et à repenser la gouvernance au-delà de la Loi sur les Indiens. Nous avons l'occasion, au sein de tous les partis, d'aider les communautés autochtones à redéfinir leurs institutions gouvernementales en dehors du cadre de la Loi sur les Indiens, afin que la situation soit beaucoup plus claire qu'elle ne l'est à présent.
     J'en appelle aux collègues d'en face et à tout le monde afin qu'ils donnent un coup d'épaule pour rebâtir les communautés. C'est l'engagement qu'a pris le premier ministre et c'est dans cette direction que nous allons.
    Nous ferons de notre mieux.
    J'ai une dernière question. Nous entendons très souvent dire que la totalité du marché est entre les mains du crime organisé. Or, des faits prouvent que ce n'est pas le cas. Le professeur Neil Boyd, un criminologue de l'Université Simon Fraser, nous a dit qu'une étude du ministère de la Justice menée en 2011 concluait que 95 % des personnes reconnues coupables de trafic de cannabis n'avaient aucun lien avec le crime organisé ou les gangs de rue. D'autres témoins nous ont dit que bien des gens qui participent à la production et à la vente de marijuana sont des types non violents, qui ont l'esprit d'entreprise et qui n'ont rien à voir avec le crime organisé.
    Ma question porte sur l'article 62, lequel confère au ministre le pouvoir de refuser la demande d'une personne voulant participer à la production de marijuana sous prétexte qu'elle a fait l'objet d'une condamnation liée au cannabis par le passé. Selon le professeur Boyd, la participation d'une personne au trafic illégal actuel ne devrait pas être une raison suffisante pour lui interdire l'entrée sur le marché légal, d'autant plus que nous sommes en train d'essayer de faire sortir les gens de l'ombre — du marché illégal vers le marché légal. À moins que ces personnes aient un casier judiciaire pour des menaces ou de la violence, ou qu'il y ait des preuves de leur malhonnêteté.
    Madame la ministre, en l'absence de tels facteurs aggravants, croyez-vous qu'une condamnation liée au cannabis suffise à elle seule à justifier l'interdiction, pour une personne, de participer au nouveau marché légal?
    Je laisse à ma collègue, la ministre de la Santé, le soin de répondre en vous parlant du processus exhaustif qui est en place et qui a trait à ce dont vous parlez, précisément.
    Que la personne qui veut répondre le fasse.
    Pour ma part, je transmets la question à Mme Bogden. Qu'en dites-vous?
    Madame Bogden, souhaitez-vous transmettre la question à quelqu'un d'autre?
    Des députés: Oh, oh!
    Je répondrai à la question du député. Comme vous le savez, j'étais au comité la semaine dernière. Nous avons alors discuté des nombreuses exigences qui sont imposées dans le système actuel de production du cannabis à des fins médicales. Ces exigences servent à préserver l'intégrité du système et à empêcher le crime organisé de l'infiltrer.
    Le gouvernement présentera les exigences qui seront imposées, au moyen d'une réglementation, dans le contexte de la nouvelle loi. Il y a au gouvernement une conscience de ces inquiétudes; aussi seront-elles prises en considération. Cela dit, je crois qu'il y a une volonté de trouver un équilibre, comme c'est le cas maintenant, afin de préserver l'intégrité du système.

  (2000)  

    Merci.
    Le temps est écoulé.
    Nous passons maintenant à M. McKinnon. Monsieur, vous désirez partager votre temps avec M. Eyolfson, n'est-ce pas?
    En effet.
    Monsieur le président, je dois partir. Il est 20 heures.
    Puisqu'il en est ainsi, je ne vous poserai pas de question. N'y voyez rien de personnel.
    Monsieur Goodale, vous avez souligné que l'importation et l'exportation de cannabis étaient illégales et allaient le rester. Cependant, il m'apparaît que le nouveau régime que nous instaurons fera émerger une nouvelle source de cannabis au pays par le biais des opérations de culture légale — on devrait parler de producteurs légaux, j'imagine —, de la culture personnelle, etc. J'ai l'impression que cela pourrait entraîner le détournement du produit, qui serait exporté aux États-Unis, par exemple.
    À quelles difficultés l'Agence des services frontaliers du Canada — soit l'ASFC — sera-t-elle confrontée quand viendra le temps de contrer de telles activités dans le contexte du nouveau régime?
    La loi à la frontière ne change pas. L'importation et l'exportation sont illégales en ce moment et elles le resteront. Nous nous en remettrons donc aux gens compétents qui travaillent à l'ASFC pour faire en sorte que la loi soit respectée à l'importation comme à l'exportation. Ils utiliseront la technologie dont ils disposent ainsi que les opérations générales d'application de la loi qu'ils déploient de main de maître. Parmi les sommes d'argent que nous avons annoncées, certaines serviront à accroître leurs ressources et leurs procédures pour assurer la sécurité à la frontière.
    Avez-vous conscience qu'il risque d'y avoir davantage de tentatives d'exportation de cannabis cultivé de manière légale?
    Il est possible que quelqu'un tente de faire cela. Toutefois, à ce jeu-là, je parie que l'ASFC aura le dessus et arrivera à assurer la sécurité à la frontière. On ne doit pas sous-estimer la détermination et le zèle des gens de l'ASFC qui, en collaboration avec les forces de l'ordre à l'échelle du pays, veillent au respect des lois. Nous avons des attentes très élevées envers nos policiers et nos agents frontaliers. Nous leur demandons de bien faire leur travail et c'est ce qu'ils feront.
    Merci.
    Je n'ai pas d'autres questions.
    Docteur Eyolfson.
    Merci.
    Madame Petitpas Taylor, le Groupe de travail sur la légalisation et la réglementation du cannabis a recommandé qu'il y ait un système d'accès pour les patients distinct de celui du marché non médical — du marché récréatif, autrement dit. Cependant, l'Association médicale canadienne a recommandé que cela fasse l'objet d'une évaluation d'ici cinq ans, parce qu'il est possible que l'on n'ait pas besoin de deux systèmes pour les usages médical et récréatif.
    Croyez-vous que le système réservé à l'usage médical est appelé à se prolonger indéfiniment ou fera-t-il plutôt l'objet d'un examen?
    Nous disposons en ce moment d'un service de qualité, de calibre international, pour l'usage médical du cannabis au pays. Nous en sommes bien conscients. Pour ce qui est du projet de loi C-45, nous voyons bien qu'il est possible de bâtir sur ce qui existe déjà en matière de service.
    En revanche, il faut absolument que nous veillions à ce que les consommateurs de cannabis médical aient toujours accès au produit dont ils ont besoin. Nous allons surveiller la situation de près pour nous assurer qu'ils ont encore accès à leur médicament, c'est-à-dire au produit qu'ils consomment.
    Madame Bogden, voudriez-vous ajouter quelque chose?
    J'ajouterais, madame la ministre, que le gouvernement s'est engagé à accepter la recommandation du groupe de travail. Le système sera examiné dans cinq ans pour décider s'il doit être maintenu.
    Très bien.
    Merci beaucoup. Je n'ai pas d'autres questions.
    Merci beaucoup.
    Voilà qui met fin à notre série de questions. Je tiens à remercier tout le monde, dont les ministres, évidemment.
    Je voudrais faire une observation qui n'engage que moi. Je ne parle pas au nom du Comité; comme celui-ci a déjà parlé, je n'ai pas à le faire.
    Tous les intervenants ont dit que l'éducation était nécessaire, dans une mesure plus grande que ce qu'il en est en ce moment, sans doute. Pourquoi ont-ils dit cela? Parce que presque tous les témoins que nous avons entendus ont souligné la grande importance de la sensibilisation et de l'éducation.
    Il y a un instant, je me faisais la remarque suivante: quelque chose s'est produit dans ce comité que je n'avais encore jamais vu. Des témoins nous ont dit: « Je commets des actes criminels chez moi. J'en ai commis auparavant et j'en commettrai encore de retour chez moi. » Il y a même un témoin qui nous a dit: « J'ai commis un crime ce matin, avant de venir à ce comité, et aussitôt après, je commettrai un autre crime: je fumerai de la marijuana. »
    Voilà qui montre l'importance de l'éducation. Je suis content que tous les intervenants aient soulevé cet enjeu. L'éducation — ainsi que la nécessité d'une éducation précoce — est le thème qui traverse tous les témoignages.
    Je vous remercie d'avoir pris le temps de venir répondre à nos questions et d'être restés plus longtemps que prévu. Je remercie les membres du Comité.
    La séance est levée.
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