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ENVI Rapport du Comité

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CROISSANCE PROPRE ET CHANGEMENT CLIMATIQUE : COMMENT LE CANADA PEUT S’IMPOSER COMME CHEF DE FILE INTERNATIONAL

1.  Introduction

Le 1er février 2018, le Comité permanent de l’environnement et du développement durable de la Chambre des communes (le comité) a convenu d’entreprendre une étude sur la croissance propre et les changements climatiques au Canada; pour ce faire, il a décidé de se focaliser sur plusieurs domaines et d’en faire rapport à la Chambre séparément[1]. Le présent rapport est le deuxième de cette étude.

Le comité a amorcé son étude du leadership international le 16 octobre 2018. Cette étude s’est échelonnée sur neuf réunions, au cours desquelles le comité a entendu 39 témoins et reçu cinq mémoires. En novembre 2018, une réunion a été ajoutée au plan d’étude original afin que puisse être discuté le Rapport spécial du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat rendu public le 8 octobre 2018. Deux autres réunions ont été ajoutées au plan en janvier 2019, afin que le comité puisse entendre des témoignages portant précisément sur la tarification de la pollution par le carbone.

Le comité tient à remercier tous les témoins d’avoir contribué à ses travaux.

2.  Contexte

a.   Conventions et négociations internationales sur le changement climatique

Le Canada est partie à des conventions internationales clés sur le changement climatique.

Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques

La Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC), établie en 1992, régit les questions relatives au changement climatique à l’échelle internationale. Les négociations menées dans le cadre de cette convention ont débouché sur plusieurs ententes, dont le Protocole de Kyoto (1997), l’Accord de Copenhague (2009) et l’Accord de Paris (2015).

Les signataires ou « parties » à la CCNUCC se réunissent à la « Conférence des parties » (CdP) annuelle, où ils font le point sur la mise en œuvre de la convention et concluent des accords pour en promouvoir l’exécution. Ces conférences sont désignées par leur ordre numérique; la CdP 24 s’est déroulée à Katowice, en Pologne, en décembre 2018.

Accord de Paris

L’Accord de Paris a été conclu à la CdP 21, en 2015. Les parties se sont engagées à réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES) dans le cadre des efforts réalisés à la grandeur du globe pour limiter la hausse de la température planétaire moyenne. L’Accord vise « à renforcer la riposte mondiale à la menace des changements climatiques, dans le contexte du développement durable et de la lutte contre la pauvreté[2] », notamment en contenant l’élévation de la température moyenne de la planète « nettement en dessous de 2 °C[3] » par rapport aux niveaux préindustriels, et « en poursuivant l’action menée pour limiter l’élévation de la température à 1,5 °C[4] » par rapport aux niveaux préindustriels.

Optant pour « l’approche ascendante », chaque partie à l’Accord de Paris décide de son objectif de réduction des émissions, qui s’exprime à titre de « contribution déterminée au niveau national » (CDN). Les CDN combinées de toutes les parties doivent limiter à 2 °C l’augmentation de la température de la planète.

Selon Isabelle Bérard, d’Environnement et Changement climatique Canada (ECCC), « [l]e Canada est un ardent défenseur de l’Accord de Paris, car celui-ci contient des obligations pour toutes les parties[5] ». Elle a expliqué que les parties à la CCNUCC négocient actuellement les « règles de mise en œuvre de l’Accord de Paris ». Ces lignes directrices exposeront comment chaque partie communiquera ses plans et ses mesures pour combattre les changements climatiques, comment elle mesurera les progrès réalisés et en rendra compte de manière transparente, et comment les progrès réalisés à l’échelle mondiale seront mesurés. Selon Mme Bérard, « [l]a mise en œuvre intégrale et effective de l’Accord de Paris est une priorité absolue pour le Canada. Nous savons que l’adoption de lignes directrices communes et solides pour tous les pays favorisera une action climatique ambitieuse, crédible et transparente[6]. » La séance de la CdP 24 de décembre 2018, tenue à Katowice, en Pologne, a débouché sur quelques avancées à l’égard des règles d’application, mais il reste des décisions importantes à prendre[7].

Négociations aux termes de l’article 6

L’article 6.2 de l’Accord de Paris prévoit la mise au point d’un système de résultats d’atténuation transférés à l’échelle internationale (RATI) où les résultats d’atténuation (c.-à-d. les réductions des émissions de GES) peuvent être transférés entre les parties de manière à réaliser les CDN des pays[8]. L’article 6.4 précise que des entités qui ne sont pas des parties (p. ex. secteur privé ou gouvernements non fédéraux) peuvent participer à ce mécanisme d’échange des résultats d’atténuation.

Les parties n’ont pas réussi à en venir à une entente sur l’article 6 à la CdP 24, en 2018, ce qui signifie que les négociations devront se poursuivre à la CdP 25, et que la mise en œuvre de l’article 6 est retardée[9].

Plan d’action pour l’égalité des sexes de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques

En novembre 2017, à la CdP 23, les parties à la CCNUCC ont adopté le Plan d’action en faveur de l’égalité des sexes. Celui‑ci « a pour objet de faire en sorte que les femmes participent pleinement, réellement et sur un pied d’égalité et de promouvoir des politiques climatiques favorisant l’égalité des sexes et l’intégration d’une perspective de genre dans la mise en œuvre de la Convention et l’action des parties, du secrétariat, des entités des Nations Unies et de l’ensemble des parties prenantes à tous les niveaux[10] ». Toutes les parties se sont engagées à élaborer, avant l’échéance de 2018, des politiques, des plans et des programmes favorisant l’égalité des sexes en matière d’adaptation, d’atténuation, de renforcement des capacités, de technologie et de financement.

Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat

Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) a été établi en 1988 par le Programme des Nations Unies pour l’environnement et l’Organisation météorologique mondiale. À l’appui des travaux des parties à la CCNUCC, le GIEC fournit aux responsables politiques des évaluations scientifiques périodiques concernant les changements climatiques, leurs incidences et les risques futurs, et leur présente des stratégies d’adaptation[11] et d’atténuation[12]. Pendant l’étude du comité, le GIEC a publié le « Rapport spécial sur un réchauffement planétaire de 1,5 °C », qui est décrit en détail ci‑dessous.

b.  Rapport spécial sur un réchauffement planétaire de 1,5 °C du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat

Le 8 octobre 2018, le GIEC a publié le Rapport spécial sur un réchauffement planétaire de 1,5 °C (le Rapport spécial). Ce rapport, réalisé à l’invitation de la CCNUCC après l’adoption de l’Accord de Paris en 2015, porte sur le scénario d’un réchauffement planétaire de 1,5 °C au‑dessus des niveaux préindustriels et les profils connexes d’évolution des émissions de gaz à effet de serre. Le GIEC a accepté de se pencher sur ces questions dans le contexte « du renforcement de la parade mondiale au changement climatique, du développement durable et de la lutte contre la pauvreté[13] ».

Le Rapport spécial explique en détail les conséquences différentes qu’aura le réchauffement climatique s’il est limité à une moyenne de 1,5 °C (au-dessus des niveaux préindustriels) et non à 2 °C. Ces températures reflètent les moyennes planétaires; le rapport précise donc que certaines régions connaîtront un réchauffement supérieur. Dans l’Arctique, les températures sont déjà de deux à trois fois supérieures à la moyenne[14].

Le rapport fait voir une différence frappante entre les répercussions des deux scénarios de réchauffement sur la biodiversité, la stabilité et la sécurité humaine. Par exemple, un réchauffement de 2 °C plutôt que de 1,5 °C entraînerait la perte d’écosystèmes entiers, menacerait gravement des stocks de poissons et des forêts qui revêtent une importance économique et culturelle pour de nombreuses collectivités du Canada, et forcerait le déplacement de 10 millions de personnes de plus de par le monde. De plus, ce réchauffement planétaire de 2 °C augmenterait les risques de feux de forêt et de propagation des espèces envahissantes, et l’Arctique serait libre de glace en moyenne une fois par décennie, plutôt qu’une fois par siècle si le réchauffement était limité à 1,5 °C[15].

On emploie dans le Rapport spécial le concept de bilan de carbone : l’atmosphère ne peut absorber qu’une quantité limitée d’équivalents en dioxyde de carbone[16] avant que l’augmentation des températures planétaires moyennes ne dépasse 1,5 °C. Or, les émissions planétaires nettes — qui sont d’approximativement 42 gigatonnes (Gt) de dioxyde de carbone (CO2) par année — ne cessent de grever ce bilan. À ce rythme, le point de bascule risque d’être atteint d’ici seulement 10 à 12 années[17], ce qui accroîtra la fréquence des extrêmes climatiques négatifs et pourrait intensifier le réchauffement.

Il est indiqué dans le rapport que la limitation à 1,5 °C du réchauffement planétaire nécessitera des transitions « rapides et de grande envergure » dans les domaines de l’aménagement du territoire, de l’énergie, de l’industrie, du bâtiment, du transport et de l’urbanisme[18]. Plusieurs témoins se sont fait l’écho de ce sentiment d’urgence, ont cité le rapport du GIEC et affirmé qu’il fallait accélérer la prise de mesures d’atténuation efficaces pour limiter les répercussions du changement climatique[19]. On peut aussi lire dans le rapport que, pour que le réchauffement reste en deçà de 1,5 °C, il faudrait que, d’ici 2030, les émissions mondiales nettes de CO2 produites par l’homme chutent d’environ 45 % par rapport aux niveaux de 2010; d’ici environ 2050, il faudrait qu’elles tombent au niveau « zéro net[20] ».

Les auteurs du Rapport spécial concluent que la plupart des profils d’évolution des émissions permettant de limiter le réchauffement planétaire à 1,5 °C nécessiteraient un bilan des émissions nettes négatif et « l’élimination du gaz carbonique (EGC)[21] à hauteur de 100 à 1000 GtCO2 au cours du XXIe siècle[22] ». Bon nombre des technologies d’EGC actuelles ne sont pas adaptées au déploiement à grande échelle, lequel exigerait de vastes quantités de ressources (terres, énergie, eau)[23]. Afin d’éviter une dépendance sur des technologies d’EGC qui n'existent pas encore, de vastes réductions des émissions de GES sont nécessaires.

Recommandation 1

Le comité recommande que le gouvernement du Canada, tenant compte du rapport spécial sur le réchauffement planétaire de 1,5 °C du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, poursuive une plus grande ambition au niveau mondial et domestique, afin d’accélérer la transition vers une économie à faible émission de carbone.

c.   Rapports du Canada à la Convention‑cadre des Nations Unies sur les changements climatiques concernant les sources et les puits de gaz à effet de serre

Conformément à la Convention‑cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC), qu’il a ratifiée en 1992, le Canada doit produire des rapports annuels sur ses sources et ses puits anthropiques de GES[24]. Les méthodes et les lignes directrices applicables à la production des rapports sont établies par le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC)[25]. Les parties à la CCNUCC déclarent leurs émissions de sept GES : le dioxyde de carbone (CO2), le méthane (CH4), l’oxyde nitreux (N2O), les perfluorocarbures (PFC), les hydrofluorocarbures (HFC), l’hexafluorure de soufre (SF6) et le trifluorure d’azote (NF3)[26]. Afin de tenir compte du potentiel de réchauffement planétaire propre à chaque GES et d’établir une unité de mesure commune, les émissions de GES sont déclarées selon une valeur d’équivalent en dioxyde de carbone (équivalent CO2)[27]. Le système de tarification du carbone du gouvernement du Canada, qui est fondé sur le rendement, englobe les émissions des sept GES surveillés par la CCNUCC[28].

La comparaison des émissions de GES entre différents pays est compliquée par les diverses sources disponibles, leur niveau de complétude, et le temps requis pour compiler et faire rapport sur les émissions. Par exemple, les données le plus récentes pour les émissions de GES du Canada remontent à 2016 et ont été communiquées à la CCNUCC en avril 2018, conformément à l’entente conclue par les parties. Par contre, les données les plus à jour d’autres pays datent de 2014. En conséquence, les paragraphes et figures qui suivent utilisent les données jusqu’à 2014 (la dernière année pour laquelle il existe des données complètes) pour comparer les émissions globales, et jusqu’à 2016 pour parler seulement des émissions du Canada.

d.  Émissions de gaz à effet de serre du Canada

En 2014, environ 1,6 % des émissions de GES à l’échelle planétaire ont été produites par le Canada, ce qui faisait du pays le neuvième émetteur de GES du monde. Cette année-là, les trois premiers émetteurs étaient, en ordre décroissant, la Chine, les États‑Unis et l’Inde[29]. Les figures 1 et 2 illustrent les émissions de GES planétaires totales en 2005 et en 2014, et celles des 10 premiers émetteurs du monde.

Figure 1 — Émissions mondiales annuelles de gaz à effet de serre, 2005 et 2014

En 2005, les émissions de gaz à effet de serre à l’échelle mondiale ont été de 38 273 mégatonnes d’équivalent en dioxyde de carbone. En 2014, ces émissions ont atteint 45 741 mégatonnes d’équivalent en dioxyde de carbone. 

Source : Figure préparée par la Bibliothèque du Parlement à partir des données tirées de World Resources Institute, « Country Greenhouse Gas Emissions », CAIT Climate Data Explorer (base de données), consultée le 19 mars 2019 [en anglais seulement].

Figure 2 — Émissions de gaz à effet de serre des 10 plus grands pays émetteurs, 2005 et 2014

Figure 2 : Émissions de gaz à effet de serre des 10 plus grands pays émetteurs, 2005 et 2014

Source : Figure préparée par la Bibliothèque du Parlement à partir des données tirées de World Resources Institute, « Country Greenhouse Gas Emissions », CAIT Climate Data Explorer (base de données), consultée le 19 mars 2019 [en anglais seulement].

Le dioxyde de carbone produit par la combustion des carburants fossiles est la principale source d’émissions de GES au Canada, comme dans de nombreux autres pays industrialisés[30]. Les émissions par habitant au Canada, qui étaient de 19,4 tonnes d’éq. CO2 en 2016, sont parmi les plus élevées du monde[31]. Les figures 3 et 4 illustrent les émissions par habitant des 10 pays ayant les émissions totales les plus élevées, et des 15 pays ayant les plus grandes émissions par habitant. La figure 5 illustre les émissions du Canada en 2016, par secteur.

Figure 3 — Émissions par habitant des dix pays ayant les émissions totales de gaz à effet de serre les plus élevées

Figure 3 : Émissions par habitant des dix pays ayant les émissions totales de gaz à effet de serre les plus élevées

Source : Figure préparée par la Bibliothèque du Parlement à partir des données tirées de World Resources Institute, « Country Greenhouse Gas Emissions », CAIT Climate Data Explorer (base de données), consultée le 19 mars 2019 [en anglais seulement]; et de Banque mondiale, « Population, total », World Development Indicators (base de données), consultée le 19 mars 2019 [en anglais seulement].

Figure 4 — Émissions par habitant des 15 pays ayant les plus grandes émissions de gaz à effet de serre par habitant

Figure 4 : Émissions par habitant des 15 pays ayant les plus grandes émissions de gaz à effet de serre par habitant

Source : Figure préparée par la Bibliothèque du Parlement à partir des données tirées de World Resources Institute, « Country Greenhouse Gas Emissions », CAIT Climate Data Explorer (base de données), consultée le 19 mars 2019 [en anglais seulement]; et de Banque mondiale, « Population, total », World Development Indicators (base de données), consultée le 19 mars 2019 [en anglais seulement].

Figure 5 — Répartition des émissions du Canada par secteur du GIEC (2016)

En 2016, les émissions totales de gaz à effet de serre au Canada étaient de 704 mégatonnes d’équivalent en dioxyde de carbone (Mt d’éq. CO2). Les émissions totales étaient réparties dans les secteurs suivants : • 45% des émissions venaient de l’énergie – combustion de sources fixes (soit 317 Mt d’éq. CO2) • 28,3% des émissions venaient de l’énergie – transport (soit 199 Mt d’éq. CO2) • 7,9% des émissions venaient de l’énergie – sources fugitives (soit 56 Mt d’éq. CO2) • 7,6% des émissions venaient des procédés industriels et utilisation des produits (soit 53 Mt d’éq. CO2) • 8,5% des émissions venaient de l’agriculture (soit 60 Mt d’éq. CO2) • 2,6% des émissions venaient des déchets (soit 19 Mt d’éq. CO2)

Source : Environnement et Changement climatique Canada. Rapport d'inventaire national 1990-2016 : Sources et puits de gaz à effet de serre au Canada, 2018, partie 1.

Note :     Le GIEC définit les secteurs suivants[32] :

  • Énergie — Combustion de sources fixes : comprend la combustion de carburant dans les secteurs manufacturier et énergétique, le secteur du bâtiment ainsi que les secteurs commercial et résidentiel;
  • Énergie — Transports : comprend les émissions provenant de la combustion, par des sources mobiles, de divers types de carburants dans les principaux moyens de transport (véhicules routiers et hors route, et transports aérien, ferroviaire et maritime);
  • Énergie — Sources fugitives : comprend les émissions intentionnelles on non intentionnelles de GES produites par l’extraction et le traitement de combustibles fossiles et leur livraison jusqu’au point d’utilisation finale;
  • Procédés industriels et utilisation des produits : comprend les émissions de GES non liées à l’énergie qui sont produites par les procédés manufacturiers et l’utilisation des produits;
  • Agriculture : comprend les émissions de GES non liées à l’énergie qui concernent la production de cultures et l’élevage;
  • Déchets: comprend les émissions de GES produites par le traitement et l’élimination des déchets liquides et solides.

e.   Réduction des gaz à effet de serre — engagements internationaux du Canada

Le Canada s’est engagé à réduire les GES dans plusieurs accords de l’ONU au cours des 30 dernières années. La contribution déterminée au niveau national du Canada aux termes de l’Accord de Paris est de réduire les émissions de 30 % en deçà des niveaux de 2005 d’ici 2030[33]. Les multiples volets du plan grâce auquel le Canada entend atteindre cette cible sont exposés dans le Cadre pancanadien sur la croissance propre et les changements climatiques (CPC)[34].

La figure 6 illustre les engagements pris par le Canada à Rio, à Kyoto, à Copenhague et à Paris, les émissions de GES réelles du Canada depuis 1990, et les émissions futures projetées. Cette figure montre aussi les émissions qui seraient générées si le CPC était mis en œuvre. On y voit que le Canada n’a pas atteint les cibles qu’il s’est fixées à Rio, à Kyoto ou à Copenhague, et que les mesures du CPC, bien qu’on estime qu’elles apporteraient des réductions majeures des émissions, ne seraient pas suffisantes pour que le Canada atteigne sa cible de Paris.

Figure 6 : Cibles de réduction des gaz à effet de serre du Canada, et émissions réelles et projetées

Notes :   a.     Les émissions de gaz à effet de serre historiques et projetées sont fondées sur les données concernant les émissions de 2014 présentées dans le Rapport d’inventaire national 1990-2014 : Sources et puits de gaz à effet de serre au Canada, Environnement et Changement climatique Canada, 2016.

b.     Les estimations des réductions des gaz à effet de serre liées aux mesures énoncées dans le Cadre pancanadien sur la croissance propre et les changements climatiques sont fondées sur les données présentées dans le Rapport d’inventaire national 1990‑2015 : Sources et puits de gaz à effet de serre au Canada, Environnement et Changement climatique Canada, 2017.

Source : Bureau du vérificateur général du Canada, Progrès vers la réduction des gaz à effet de serre — Environnement et Changement climatique Canada, Rapport 1, Automne 2017 — Rapports de la commissaire à l’environnement et au développement durable au Parlement du Canada.

En janvier 2019, ECCC a mis à jour les projections de réduction des émissions de gaz à effet de serre au Canada, illustrant comment le Canada devrait atteindre la cible de 513 Mt d’éq. CO2 en 2030 — une réduction de 302 Mt d’éq. CO2 par rapport au point de départ projeté. La figure 7 montre qu’une portion de 223 Mt d’éq. CO2 des réductions futures estimées viendra des sources suivantes :

  • politiques mises en œuvre depuis 2015 (114 Mt d’éq. CO2)
  • politiques du Cadre pancanadien en cours de mise en œuvre (85 Mt d’éq. CO2)
  • contributions de l’utilisation des terres, des changements à cette utilisation et de la foresterie (24 Mt d’éq. CO2)

L’écart de 79 Mt d’éq. CO2 entre la cible et les réductions estimées devrait être comblé par les mesures mises en œuvre mais non encore complètement modélisées, comme les investissements dans les technologies propres, et par d’autres mesures à venir, comme les politiques provinciales et territoriales. Plusieurs témoins ont noté cet écart[35].

Figure 7 — Réductions des émissions prévues en 2030

Figure 7 : Réductions des émissions prévues en 2030

Source : Environnement et Changement climatique Canada, Indicateurs canadiens de durabilité de l'environnement, Progrès vers la cible de réduction des émissions de gaz à effet de serre du Canada, janvier 2019.

Matt Jones, d’ECCC, a dit qu’une fois toutes les mesures du CPC mises en œuvre et les réductions calculées, il sera encore temps à ce moment, si nécessaire, d’apporter des correctifs au processus. Selon lui, les investissements dans la technologie propre pourraient à ce stade commencer à donner des résultats, et il pourrait alors être à la fois plus facile et moins coûteux de réduire les émissions[36].

Plusieurs témoins ont soulevé la possibilité que le Canada recoure aux résultats d’atténuation transférés à l’échelle internationale (RATI) pour combler la différence si ses réductions sont insuffisantes. Voir à ce sujet la section sur les RATI, ci-dessous.

Pour Catherine Abreu, du Réseau action climat Canada, il y a urgence à ce que le Canada atteigne ses cibles de Paris :

Depuis 1992, le Canada prend des engagements en matière de changements climatiques et manque à ses engagements. C’est la raison pour laquelle, en ce moment, le Canada n’est pas […] un chef de file en ce qui concerne les politiques sur le changement climatique. Toutefois, nous allons de l’avant, et nous avons la chance de nous racheter. L’engagement pris à Paris est notre quatrième objectif en matière de changement climatique, et nous avons l’obligation morale d’atteindre cet objectif-là. Les scientifiques du monde entier nous disent que nous disposons de 12 ans pour réduire de moitié les émissions de gaz à effet de serre mondiales […][37].

Les représentantes du Lobby Climatique des Citoyens ont elles aussi parlé de la nécessité d’agir vite : « Nous devons prendre des mesures efficaces, et très rapidement, pour rester à moins de 1,5 °C et aussi pour éviter les pires dommages[38]. »

Matt Jones, d’ECCC, a décrit le processus et le contexte dans lesquels s’inscrivent les cibles, et les réorientations qui accompagneront la mise en œuvre du CPC :

Nous sommes tout à fait conscients que la réalisation de nos objectifs de Paris n’est qu’une étape du processus. Nous ne pourrons pas crier victoire après cette étape, car, comme le GIEC nous l’a rappelé récemment, et comme nous le savons depuis très longtemps, les réductions nécessaires au niveau mondial vont bien au-delà de ce qui est envisagé en ce moment.
L’Accord de Paris exige un abaissement des cibles au cours d’un cycle régulier, et nous avons commencé à regarder au-delà de la mise en œuvre de l’actuel [C]adre pancanadien et au-delà de notre cible actuelle[39].

Plusieurs témoins ont reconnu l’importance de disposer d’un plan complet de cette sorte sur le changement climatique, et ils ont souligné qu’il fallait en poursuivre la mise en œuvre[40].

f.    Le plan du Canada pour lutter contre le changement climatique : le Cadre pancanadien sur la croissance propre et les changements climatiques

Le Cadre pancanadien sur la croissance propre et les changements climatiques (Cadre pancanadien ou CPC), élaboré avec les provinces et les territoires ainsi qu’à la suite de consultations avec les peuples autochtones[41], énonce les mesures fédérales, provinciales et territoriales nécessaires à l’atteinte de la cible du Canada au titre de l’Accord de Paris[42], qui est de réduire les émissions de GES de 30 % en deçà des niveaux de 2005 d’ici 2030. Le Cadre pancanadien repose sur quatre piliers : 1) la tarification du carbone; 2) des mesures complémentaires d’atténuation dans tous les secteurs de l’économie (divisées entre sept domaines thématiques, dont le leadership international); 3) l’adaptation et la résilience; 4) les technologies propres, l’innovation et la création d’emplois.

Tarification de la pollution par le carbone

La tarification du carbone est au cœur du CPC. En effet, ce dernier expose les grandes lignes d’un modèle pour la tarification de la pollution par le carbone. Les provinces et les territoires peuvent mettre en œuvre un système fondé sur les tarifs ou un système de plafonnement et d’échange qui leur est propre, en fonction de leurs besoins et de leurs exigences. Chaque système doit respecter le modèle fédéral, sinon le système de sécurité fédéral s’appliquera, et ce, à partir de 2019[43]. Le système fondé sur les tarifs mis en place par le gouvernement fédéral permettra de verser la plupart des revenus directement aux ménages dans les provinces et les territoires où il s’appliquera. Le système fédéral comprend : 1) une taxe sur le carbone applicable aux combustibles fossiles; 2) un régime de tarification fondé sur le rendement pour les installations industrielles dont les émissions dépassent un seuil déterminé. Ce système est conçu pour aider les industries tributaires du commerce qui produisent de grandes quantités d’émissions à éviter les fuites de carbone[44].

Le gouvernement fédéral a présenté la Loi sur la tarification de la pollution causée par les gaz à effet de serre (partie 5 du projet de loi C‑74) en février 2018 afin de mettre en place le régime de tarification du carbone. Cette loi a reçu la sanction royale en juin 2018[45].

La tarification de la pollution par le carbone est l’un des principaux outils de réduction des GES dans le monde. Actuellement, 46 pays ont adopté la tarification de la pollution par le carbone, allant de moins de 1 $ US à 139 $ US, et 14 % des émissions planétaires font aujourd’hui l’objet d’un tarif[46]. Isabelle Turcotte, de l’Institut Pembina, a signalé que la tarification du carbone prévue par le CPC « réduira la pollution par le carbone de 50 à 60 millions de tonnes d’ici 2022[47] ». Or, le Canada doit réduire ses émissions de plus de 200 millions de tonnes pour atteindre sa cible de Paris. « Nous n’y arriverons pas sans une taxe sur le carbone », a dit Mme Turcotte[48]. Les témoignages entendus sur la tarification du carbone se trouvent à la section 3 du présent rapport.

Mesures complémentaires d’atténuation

En plus de la tarification de la pollution, le CPC prévoit plus de 50 autres mesures complémentaires[49] — règlements, programmes, financement — conçues pour « pour soutenir une transition vers un avenir meilleur sobre en carbone[50] ». Les témoins ont souligné l’importance de mesures gouvernementales comme la norme sur les combustibles propres[51], les règlements sur le méthane[52], l’élimination progressive de l’électricité produite à partir du charbon[53] et l’investissement dans l’infrastructure du secteur des céréales, le transport et les technologies propres[54].

David Sawyer a parlé de l’importance des interactions entre les politiques; il a expliqué que, par exemple, les règlements sur l’efficacité énergétique des véhicules et l’abandon progressif des centrales au charbon, deux mesures établies par le gouvernement précédent, « facilitent le travail de la tarification du carbone par la suite, car les voitures sont plus efficaces et nous utilisons moins de carburant[55] ».

Le CPC énonce des mesures complémentaires dans sept domaines thématiques, mais seules celles qui relèvent du leadership international sont discutées dans la présente étude.

Le Cadre pancanadien annonce, dans le domaine du leadership international, que le gouvernement fédéral prendra trois nouvelles mesures complémentaires d’atténuation :

  • a) Leadership climatique : « Le gouvernement fédéral respectera son engagement historique de 2,65 milliards de dollars visant à offrir de l’aide aux pays les plus pauvres et les plus vulnérables en ce qui concerne l’atténuation des effets négatifs des changements climatiques et de mesures d’adaptation à ceux-ci, et ce d’ici 2020. »
  • b) Résultats d’atténuation transférés à l’échelle internationale : « Le gouvernement fédéral, en collaboration avec les gouvernements provinciaux et territoriaux et les partenaires concernés, continuera d’examiner les outils de transfert international des résultats des mesures d’atténuation pour déterminer lesquels seraient utiles au Canada et préconisera une approche rigoureuse à la mise en œuvre de l’article 6 de l’Accord de Paris. »
  • c) Politique sur le commerce et le climat : « Le gouvernement fédéral, de concert avec les gouvernements provinciaux et territoriaux, collaborera avec [ses] partenaires internationaux pour s’assurer que les règles commerciales appuient la politique climatique[56]. »

Ces mesures sont décrites à la section 4 du rapport ci‑dessous.

Les mesures complémentaires d’atténuation prévues dans le CPC sont conçues de manière à apporter des réductions de GES que la tarification de la pollution par le carbone est inapte à réaliser. Matt Jones, d’ECCC, a signalé que les auteurs du CPC ont attentivement étudié ce qui fonctionne dans le monde. Il a décrit comme suit l’approche des responsables lors des recherches qui ont abouti aux mesures inscrites au CPC :

nous avons essayé d’examiner toutes les possibilités de réduction des émissions pour chaque gaz à effet de serre dans chaque secteur et tous les outils stratégiques possibles, puis nous nous en sommes inspirés pour produire le cadre pancanadien et nous avons essayé de choisir le bon outil stratégique pour chaque source d’émissions[57].

Le comité a étudié la tarification de la pollution par le carbone ainsi que les mesures complémentaires d’atténuation relevant du leadership international qui sont inscrites au CPC. La section ci-dessous présente les témoignages entendus sur la tarification du carbone.

3.  Tarification de la pollution par le carbone au Canada

Dans le cadre de la présente étude, le comité a tenu deux réunions spéciales portant précisément sur une politique de tarification de la pollution par le carbone, ou « tarification du carbone ».

Les témoins ont parlé du fonctionnement de la tarification du carbone, y compris son coût comparatif, son incidence sur la croissance économique et son efficacité en matière de réduction des émissions de GES. Ils ont discuté du rôle de la tarification du carbone dans les efforts pour stimuler l’innovation, de même que de l’importance d’un signal de prix à long terme. Il a également été question de deux grands enjeux dont doit tenir compte une politique de tarification du carbone : les répercussions sur la compétitivité internationale des grands émetteurs, et l’incidence sur les ménages à faible revenu et les ménages ruraux. Des groupes de l’industrie ont parlé des défis qui s’annoncent pour leur secteur respectif à l’aube de la mise en œuvre de la tarification du carbone au Canada. Finalement, des témoins ont discuté du rôle du Canada à titre de leader international en matière de tarification de la pollution.

1.  Coût et efficacité de la tarification de la pollution par le carbone

Christopher Ragan, de la Commission de l’écofiscalité du Canada, a expliqué en des termes bien simples les raisons pour lesquelles il supporte la tarification du carbone : « la tarification du carbone fonctionne. Elle contribue efficacement à réduire les émissions de gaz à effet de serre[58]. » Elle est aussi selon lui la méthode la moins coûteuse de réduire les GES.

Tous les témoins qui ont comparé les coûts des diverses méthodes de réduction des émissions de GES ont dit que la tarification du carbone était le mécanisme le plus économique, et celui qui serait le moins coûteux aux Canadiens[59]. Selon les représentantes du Lobby climatique des citoyens, la tarification à augmentation constante du carbone doit être la pierre angulaire de tout plan sur le climat, puisque « c’est la façon la plus rentable d’accélérer la transition vers une économie plus propre et de produire des solutions novatrices[60] ».

Nicholas Rivers, professeur agrégé à l’Université d’Ottawa, a expliqué comment la tarification du carbone permet de réduire les émissions et pourquoi elle s’avère la solution la moins coûteuse :

[Selon les économistes, la] tarification du carbone est le meilleur moyen pour réduire les émissions de gaz à effet de serre du fait qu’elle mise, pour ce faire, sur la main invisible du marché. En l’absence d’une tarification du carbone, les individus et les entreprises n’ont aucun incitatif à réduire leurs émissions. Ils peuvent continuer à utiliser l’atmosphère comme un dépotoir gratuit. Si l’on applique une tarification appropriée du carbone, les particuliers et les entreprises sont incités à réduire leurs émissions. En outre, une tarification du carbone encourage les entreprises à orienter leurs efforts de recherche vers les technologies à faibles émissions, ce qui réduira les coûts à venir pour la réduction de ces émissions […]
Il est important de noter que la tarification du carbone offre une grande flexibilité en permettant aux individus et aux entreprises d’adapter leurs interventions à leur situation particulière. C’est l’une des principales caractéristiques distinguant la tarification d’une approche réglementaire pour la réduction des émissions, et c’est pour cette raison que la tarification du carbone est considérée comme beaucoup plus efficiente du point de vue économique que l’approche réglementaire[61].

Des arguments semblables en faveur de la tarification du carbone ont été offerts par plusieurs autres témoins, dont Andrew Leach, Dale Beugin et Joanna Kyriazis[62]. Par exemple, M. Beugin a signalé que « [l]a tarification du carbone permet d'obtenir un certain niveau de réduction des émissions au coût le plus faible possible, comparativement aux autres solutions [reposant sur la réglementation]. Cela s'explique par la marge de manœuvre qui est ainsi offerte aux pollueurs. Pour éviter de payer une taxe sur le carbone, les particuliers et les entreprises peuvent choisir eux-mêmes la manière dont ils vont s'y prendre pour réduire leurs émissions et le moment où ils vont le faire[63]. » Le témoin a ajouté que « pour réduire les émissions de tant, un règlement exige des coûts plus élevés que la tarification du carbone[64] ». Pour Joanna Kyriazis, « la tarification du carbone est la façon la plus efficace de réduire la pollution causée par les émissions de carbone[65] », et « [l]a tarification du carbone favorise également la croissance dans les secteurs des technologies et des énergies propres. Un signal du marché est envoyé directement et a une incidence directe en récompensant ceux qui font le choix de réduire la pollution par le carbone[66]. »

Par contraste, Todd Myers, du Washington Policy Center, aux États-Unis, a affirmé que la tarification du carbone pouvait faire l’objet d’un revirement politique, et qu’il était ainsi préférable de miser sur le soutien aux technologies qui permettent de réduire les émissions de CO2 et qui donnent aux citoyens le pouvoir de réduire leurs propres émissions. Il préconise cette approche parce que, selon lui, elle contribue davantage à « défendre les intérêts des citoyens qu’à leur nuire[67] ». M. Myers a cité une étude américaine concluant que les gens sont disposés « à payer un montant [pour l’environnement], mais cela [a] ses limites[68] ». Il a également fait valoir que les électeurs américains « ne font pas confiance au gouvernement quand vient le temps de faire des dépenses judicieuses et ils craignent que les promesses ne soient pas tenues[69] ».

Les onze témoins entendus lors des deux réunions spéciales, sauf un, se sont dits pour la tarification de la pollution par le carbone comme solution de réduction des émissions. Nicholas Rivers a attiré l’attention du comité sur une déclaration récente en faveur de la tarification de la pollution par le carbone, signée par « les quatre anciens présidents de la Réserve fédérale américaine qui sont toujours vivants, 27 lauréats du Prix Nobel d’économie — soit presque tous ceux qui sont encore de ce monde — et 15 anciens présidents du Conseil consultatif économique[70] ».

Questionnés au sujet de l’incidence de la tarification du carbone sur la croissance économique, des témoins ont expliqué que les études démontrent le maintien de la croissance économique en dépit de l’application de la tarification du carbone, qui n’entraîne qu’un « ralentissement extrêmement minime de la croissance[71] ». Ils ont par ailleurs signalé qu’une approche réglementaire a une incidence plus marquée sur l’économie :

[S]i nous voulons atteindre nos cibles de réduction des émissions, la façon la moins coûteuse d’y parvenir, celle qui aura les moins grandes répercussions sur la croissance est la tarification du carbone. Une approche réglementaire aurait une plus grande incidence sur la croissance que la tarification du carbone[72].

Andrew Leach a souligné que d’autres politiques, sans lien avec la tarification du carbone, peuvent avoir de bien plus grandes répercussions sur l’économie que cette dernière[73]. Mark Cameron a quant à lui fait valoir que cela équivaut à une hausse de quatre cents et demie du litre d’essence seulement — « nous observons ce genre de hausse tous les mois, voire toutes les semaines[74] ».

Selon Keith Stewart, bien qu’elle soit considérée comme l’option la plus rentable, il y a des « choses que la tarification du carbone fait vraiment bien et [des choses] qu'elle ne fait pas aussi bien, ainsi que [des] choses que la réglementation fait mieux que la tarification du carbone[75] ». Isabelle Turcotte a expliqué « qu’en plus du prix qui y est intégré, un règlement ne donne pas à l’industrie la marge nécessaire pour faire des investissements comme elle l’entend, pour accroître son efficacité énergétique et diminuer ses émissions et innover, comme le permet la tarification du carbone[76] ».

Christopher Ragan a fourni plusieurs exemples de réductions des émissions attribuées à la tarification du carbone. Ainsi, en Colombie-Britannique, les cinq ou six premières années de tarification ont entraîné des réductions de 5 à 15 % par rapport aux niveaux que les émissions auraient atteints sans le tarif. Au Royaume‑Uni, les émissions ont connu une diminution plus importante que dans le reste de l’Union européenne grâce à la taxe sur le carbone adoptée par ce pays, et le système de plafonnement et d’échange de la Californie permet lui aussi des réductions d’émissions[77].

À savoir s’il faut interpréter comme un signe d’inefficacité l’absence d’une diminution absolue des émissions dans un territoire assujetti à une tarification du carbone, les témoins ont indiqué qu’il faut mesurer l’incidence d’une politique en fonction de ce qui ce serait produit si celle‑ci n’avait pas été adoptée, et qu’il faut aussi tenir compte du contexte : croissance démographique, autres politiques, etc. En ce qui a trait à la Colombie-Britannique, Joanna Kyriazis a signalé que « tout indique qu’une tarification du carbone contribue considérablement à faire en sorte que les émissions soient inférieures à ce qu’elles auraient été autrement[78] ». D’autres témoins ont confirmé que la tarification du carbone en Colombie‑Britannique a entraîné une diminution des émissions de GES qui n’aurait pas eu lieu sans le tarif[79].

Certains membres du comité ont fait remarquer que des réductions équivalentes à celles atteintes dans les pays ou régions qui taxent le carbone ne suffiraient pas à atteindre les cibles du Canada. Les témoins ont répondu que la tarification du carbone n’en est qu’à ses débuts et que l’un de ses avantages est qu’elle envoie aux entreprises un message à long terme sur l’impératif de réduire les émissions[80].

Quant au montant nécessaire pour entraîner des réductions d’émissions, Dale Beugin a dit ceci : « [u]ne faible tarification du carbone entraîne de plus faibles réductions des émissions de carbone. Une tarification plus élevée du carbone fera augmenter les réductions d’émissions[81]. » David Sawyer a ajouté que les réductions dépendent des interactions avec les différentes politiques — les règlements, les subventions et la tarification doivent s’aligner pour mener à des réductions[82].

Interaction des politiques

Des témoins ont parlé de l’importance de trouver le bon agencement de politiques afin d’optimiser les réductions d’émissions. Chris Ragan a recommandé de cibler les options les moins coûteuses, puisque certaines politiques non tarifaires — mais pas toutes — peuvent servir de complément à un prix sur le carbone. « J’encouragerais donc les décideurs à ne pas se contenter d’une approche à plusieurs volets, mais à plutôt rechercher la combinaison de mesures permettant de réduire les coûts au maximum », a‑t‑il dit[83].

Joanna Kyriazis a décrit quelques-unes des politiques actuelles contribuant à la réduction des émissions de GES au Canada, notant que « la tarification du carbone est un élément essentiel d’un ensemble de politiques, […] mais le gouvernement fédéral se penche également sur d’autres politiques, notamment la norme en matière de carburant propre — une mesure très importante —, les règlements sur le méthane, l’élimination progressive du charbon, ainsi que des investissements importants dans l’infrastructure des céréales, le transport et les technologies propres... Il est important de s’attaquer à ce problème sous différents angles[84]. »

Keith Stewart a rappelé que certaines mesures peuvent entraîner une baisse des émissions à court terme, mais qu’elles n’aideront pas nécessairement à atteindre les niveaux très faibles voulus en 2050. Par contre, d’autres mesures, comme la construction de nouveaux bâtiments à consommation énergétique nette nulle, ne permettront pas d’arriver aux premiers 10 % de réduction, mais elles s’avéreront essentielles à long terme[85].

Signal de prix à long terme pour stimuler l’innovation

Patrick Bateman a dit que son organisme, le Conseil canadien sur l’électricité renouvelable, croit qu’un « signal pancanadien de prix propre, juste et efficace, assorti d’une politique à long terme qui déplace les investissements vers des sources de production d’électricité non émettrices, est notre principal facteur de réussite en matière de lutte contre les changements climatiques[86] ».

La tarification du carbone motive aussi les entreprises à trouver de nouvelles méthodes moins émettrices. Selon Chris Ragan, « à long terme, l’un des principaux avantages de la tarification du carbone est qu’elle stimule l’innovation. En fait, j’estime que la meilleure façon de dynamiser le modèle d’affaires du secteur des technologies propres n’est pas l’octroi de subventions gouvernementales ou d’une aide gouvernementale qui, selon moi, présente de nombreux problèmes, mais plutôt la mise en place d’une taxe sur le carbone pure et nette qui augmente de façon prévisible. Cela stimulera l’innovation et appuiera le secteur des technologies propres[87]. » D’autres témoins ont aussi souligné l’importance du signal de prix pour stimuler l’innovation[88]. Dale Beugin a dit ceci :

Je crois que connaître à l’avance la tarification du carbone est exactement ce que les entreprises souhaitent. Elles veulent des certitudes, afin de pouvoir prendre des décisions d’investissement qui demeureront valables à long terme, et elles veulent savoir comment elles vont payer. Je crois qu’on s’attend aussi à ce que les contraintes relatives au carbone à l’étranger ne fassent que se resserrer, car les autres territoires vont s’y mettre aussi, et ce, plus vigoureusement, et ils vont peut-être même se mettre à imposer leurs propres mesures à la frontière[89].

Étant donné que la prévisibilité de la hausse graduelle du prix du carbone suscite des changements de comportement et incite à l’innovation, les renversements de politique peuvent avoir des répercussions très négatives sur les entreprises. Par exemple, en Australie, quand la taxe sur le carbone a été annulée, « la certitude politique est disparue et les entreprises qui avaient fait des investissements pour un environnement de tarification du carbone sont perdantes[90] ».

Plusieurs témoins ont parlé des différentes utilisations qui pourraient être faites des revenus de la tarification du carbone. Par exemple, ces revenus peuvent être retournés aux ménages pour minimiser l’impact de la hausse des coûts, ou utilisés dans un fond pour financer les initiatives pour la réduction des émissions. Cependant, pour Patrick Bateman, là n’était pas la question : « le signal du prix est l’élément le plus important[91] », a‑t‑il dit. Laura Sacks, du Lobby climatique des citoyens, a convenu elle aussi de « l’importance du signal des prix à long terme[92] ».

Technologie et énergie propres : leur potentiel financier pour les entreprises canadiennes dans l’économie à faible carbone de demain

Chris Turner a décrit la transition énergétique mondiale, qui s’amplifie à mesure que les formes d’énergie renouvelable deviennent les principales sources d’énergie. Comme les trois quarts de l’électricité produite au pays viennent de sources non émettrices, les entreprises qui souhaitent réduire leur empreinte carbone seront intéressées par le Canada[93]. La transition sera peut-être difficile pour l’industrie des ressources établie du Canada, mais elle représente « également une occasion extraordinaire — qui n’arrive qu’une fois par génération dans les secteurs traditionnels des ressources — de repenser certaines façons de faire et, évidemment, pour l’économie dans son ensemble de devenir un joueur important dans ce marché en émergence[94] ». M. Turner a recommandé au gouvernement de promouvoir activement les étapes préliminaires de la mise au point des technologies propres, afin d’aplanir les obstacles structurels (insuffisance de l’infrastructure; fragmentation des incitatifs) qui entravent l’accès au marché des technologies propres :

nous sommes très bons aux premières étapes de la mise au point de technologies propres. Nous avons entre autres de très bons établissements de recherche, organismes et universités et des gens intelligents, mais nous réussissons moins bien à transférer les idées du laboratoire au marché. Ces dernières années, notre part dans le marché des technologies propres a diminué d’environ 40 % selon les dernières vérifications, et c’est en grande partie parce que les idées sont transformées en propriétés commerciales à l’extérieur du Canada[95].

Michael Andrade, du Conseil des innovateurs canadiens, a avancé que, entre autres, « si nous voulons devenir un véritable chef de file — ce que nous ne sommes pas actuellement, aussi bien en termes absolus qu’en matière de progrès technologiques — il nous faudra mettre beaucoup plus l’accent sur la commercialisation des idées que nous avons, de manière à en permettre un déploiement à grande échelle dans des industries concurrentielles et tournées vers l’exportation[96] ».

Recommandation 2

Le comité recommande que le gouvernement du Canada fasse la promotion des sources d’énergie propre du Canada afin d’attirer l’investissement international et de positionner le Canada comme pays propice à la production industrielle à faible émissions et au développement des technologies.

La tarification du carbone peut avoir des avantages pour les entreprises : « Si notre pays fait preuve de leadership dans ses politiques et son empreinte à l’échelle internationale pour des entreprises qui exercent des activités à l’échelle internationale, il aura une longueur d’avance sur le cadre réglementaire dans les pays où nous menons des activités. Cela donne [aux entreprises canadiennes] un plus grand accès aux marchés et aux occasions qu’offrent les marchés émergents », a dit Hari Balasubramanian[97].

Dale Beugin a soutenu que « prendre les devants et réduire davantage nos émissions maintenant plutôt qu’attendre à plus tard peut améliorer la compétitivité du Canada dans un monde sous contrainte carbone[98] ».

Enfin, John Drexhage a mentionné que le Canada a une longue expérience dans la production d’énergie renouvelable : « les compétences que nous avons acquises en matière d’hydroélectricité au fil des ans grâce à Hydro-Québec, Hydro Manitoba, BC Hydro et les autres sont gigantesques[99] ».

Plusieurs témoins ont aussi expliqué qu’une tarification prévisible et croissante du carbone envoie un message clair aux entreprises et soutient leurs investissements dans les technologies propres et l’innovation[100]. Comme Andrew Leach l’a noté : « [l]es économistes […] constatent sans cesse que les politiques fondées sur la tarification du carbone offrent de meilleurs incitatifs à l’innovation que la réglementation tout en évitant le versement de subventions directes[101] ».

Joanna Kyriazis a expliqué de quelle façon la tarification du carbone favorise la croissance dans les secteurs des technologies et des énergies propres. Selon elle, la tarification du carbone encourage l’adoption de solutions propres, comme les thermopompes, le stockage d’énergie, le gaz naturel renouvelable et l’efficacité énergétique. En favorisant ces solutions, « le Canada contribue à la croissance de son industrie des énergies propres, dont le marché mondial est maintenant évalué à plus de 5,8 billions de dollars, et ce chiffre continue d’augmenter. C’est plus que le PIB du Japon, qui est la troisième puissance économique mondiale. » Elle a indiqué que 12 entreprises canadiennes figurent sur la liste Global Cleantech 100 pour 2019, qui se veut un guide annuel des 100 entreprises d’énergies propres les plus prometteuses dans le monde[102].

Recommandation 3

Le comité recommande que le gouvernement du Canada garde intact le signal de prix de la tarification du carbone, pour que les entreprises canadiennes puissent avoir de la certitude à cet égard et pour stimuler l’innovation sobre en carbone.

2.  Considérations liées à la mise en œuvre

Christopher Ragan a décrit deux domaines clés où des politiques connexes doivent être adoptées pour répondre aux préoccupations exprimées : les répercussions injustes pour les ménages et la compétitivité des entreprises. À chacun de ces domaines correspond une solution[103].

Répercussions sur les ménages

Remettre les revenus aux ménages, ce qui peut être fait de différentes façons, permet de maintenir le pouvoir d’achat des ménages tout en les incitant à adopter de nouvelles habitudes[104]. Les mesures législatives soutenant cette stratégie prévoient des remises à l’intention des ménages[105]; Mark Cameron a d’ailleurs noté qu’une étude avait démontré qu’en Ontario, par exemple, 8 ménages sur 10 bénéficieraient de ces incitatifs fédéraux[106].

Todd Myers a quant à lui fait valoir que tout le monde n’est pas en mesure de s’adapter à la tarification du carbone, puisque les solutions de rechange peuvent être coûteuses ou inaccessibles. « Lorsqu’on n’entrevoit aucune possibilité d’éviter les taxes, la tarification du carbone ne signifie pas que l’on protège l’environnement. Elle signifie tout simplement qu’il y aura plus de taxes[107]. » Selon M. Myers, puisque les deux tiers des émissions du Canada viennent de petits émetteurs, il faudrait plutôt aider les gens à changer leurs habitudes pour réduire leurs émissions. La technologie peut faire baisser le coût associé aux efforts de réduction des émissions; il croit donc qu’il est « essentiel d’abaisser les coûts engagés par les particuliers pour réduire leurs émissions si l’on veut assurer le succès de la stratégie de réduction des émissions de CO2 », notamment parce que « [c]es changements technologiques ne sont pas assujettis aux fluctuations politiques[108] ».

Compétitivité

Pour ce qui est de la compétitivité, les allocations fondées sur la production, prévues tant dans le plan fédéral que dans le système de l’Alberta, inciteront les grands émetteurs à diminuer leurs émissions, mais non à réduire leurs activités, et maintiendront le signal de prix. Chris Ragan a toutefois reconnu qu’il est « difficile [d’]expliquer[109] » ces politiques et que tous n’en comprennent pas le fonctionnement. Michael Binnion a reproché aux allocations fondées sur la production d’être régies par des règles complexes et opaques qui sont vulnérables à la manipulation et à la politisation[110]. Andrew Leach a noté que les préoccupations à l’égard de la compétitivité étaient fondées, surtout pour les provinces qui dépendent des ressources naturelles. Il a ajouté que l’octroi de crédits d’émissions en fonction de la production pourrait remédier à la situation, tout en continuant d’envoyer le message que les émissions sont tarifées (incitant les entreprises à innover) sans diminuer la rentabilité[111]. Plusieurs autres témoins ont abondé dans le même sens[112].

3.  Point de vue de l’industrie

Peter Boag, président et chef de la direction de l’Association canadienne des carburants (ACC), a dit au comité que son association appuie les politiques de tarification du carbone, pourvu qu’elles respectent certains principes. L’ACC apprécie la clarté, la prévisibilité et la transparence du régime actuel de tarification du carbone. M. Boag a cependant signalé que pour le moment, le filet de sécurité fédéral ne satisfait pas aux autres principes privilégiés par l’ACC, qui estime que les objectifs de réduction des émissions doivent être « exigeants, mais réalisables ». M. Boag a ainsi indiqué que « [p]our le secteur canadien, la cible de 80 % [établie pour le filet de sécurité fédéral sur la tarification du carbone] correspond à un bilan en matière d’émissions que même les meilleures raffineries du monde auraient de la difficulté à atteindre[113] ». Les raffineries incapables d’atteindre leurs cibles de rendement n’auraient ainsi d’autre option que de « payer la note ». Selon lui, « l’établissement d’objectifs irréalisables détourne les investissements[114] », car les fonds réservés à la taxe carbone auraient autrement pu être investis dans les processus et les technologies qui permettraient effectivement de réduire les émissions.

L’équité et la fuite de carbone étaient au nombre des préoccupations de l’ACC. M. Boag a noté que l’ensemble de mesures disparates adoptées à l’échelle du Canada face à la tarification du carbone crée des iniquités, citant à preuve une étude qui conclut que les raffineries des provinces assujetties au filet de sécurité fédéral seraient beaucoup plus secouées par la tarification du carbone que celles des provinces où le filet ne s’applique pas, comme le Québec. Puisque toutes les raffineries canadiennes se font concurrence sur le même marché, une fuite de carbone et la fermeture potentielle de raffineries sont à prévoir, entraînant du même coup des pertes d’emplois[115].

Massimo Bergamini, président-directeur général du Conseil national des lignes aériennes du Canada, a déclaré que le « Conseil national des lignes aériennes du Canada appuie sans réserve la tarification du carbone — ou, comme certains préfèrent l’appeler, la tarification de la pollution —, y compris celle des émissions de carbone attribuables à l’aviation commerciale[116] ». Son collègue Geoffrey Tauvette a affirmé que « les mécanismes axés sur le marché devraient être au cœur de toute stratégie de réduction des émissions de carbone[117] ». Ils ont toutefois dit qu’une taxe sur le carbone n’est pas la solution pour le secteur de l’aviation. M. Tauvette a expliqué que le secteur canadien de l’aviation a grandement amélioré son efficacité énergétique dans les dernières années (de 16 % entre 2008 et 2016), et qu’il utilise déjà le nec plus ultra des aéronefs en matière de consommation de carburant[118]. Pour reprendre ses mots, « [c]ela signifie qu’une taxe sur le carbone ne nous incitera tout simplement pas à obtenir d’autres économies de carburant et ne fera rien de plus pour nous aider à réduire nos émissions[119] ».

Massimo Bergamini a déclaré qu’en 2022, une taxe sur le carbone ferait augmenter de 150 $ le coût d’un vol sans escale d’Ottawa à Vancouver pour une famille de quatre. Il a indiqué qu’une telle augmentation aurait des « effets préjudiciables pour le secteur du tourisme [national] qui […] éprouve déjà des difficultés en raison du coût élevé du transport aérien[120] ». À propos d’une taxe sur le carbone, il a indiqué ceci : « Nous estimons qu’elle aurait pour conséquence d’exacerber les fuites de capitaux et d’émissions, de freiner la croissance dans l’économie du tourisme et, selon le plan de déploiement prévu actuellement, de créer d’importantes distorsions dans le marché[121]. » Selon M. Bergamini, il serait préférable d’opter pour un régime national de compensation des émissions de carbone inspiré du modèle international, ajoutant que la politique nationale doit être en adéquation avec l’entente de 2016 sur le régime de compensation et de réduction du carbone pour l’aviation internationale (CORSIA), qui permettra aux compagnies aériennes d’acheter des crédits carbone pour les aider à atteindre leur objectif d’arriver à une croissance neutre en carbone [d’ici 2020][122].

M. Bergamini a aussi parlé du « potentiel novateur du biocarburéacteur disponible sur le marché pour ce qui est de contribuer à la décarbonisation du transport aérien[123] », ajoutant que le Canada a négligé jusqu’à maintenant ses avantages potentiels en matière de développement de biocarburants et de biocarburateurs.

Tyler McCann, le répresentant des Producteurs de grains du Canada, a souligné que les producteurs de grains occupent une place importante dans les communautés rurales[124]. Il a aussi parlé des progrès qui ont été faits dans la culture des grains au Canada : en utilisant des pratiques agricoles minimales ou sans labour, l’agriculture de précision, le programme de géstion des nutriments 4B, et la biotechnologie, les agriculteurs canadiens cultivent « de la façon la plus durable au monde, les céréales et les oléagineux les plus sûrs et de la plus haute qualité[125] ». Selon lui, « [à] une époque où la production céréalière atteint des sommets records, ses émissions de carbone se situent à de nouveaux creux[126] ». M. McCann a mis l’accent sur le fait que les producteurs de grains canadiens dependent des exportations et a note l’importance de maintenir des règles de jeu équitables vis-à-vis leurs compétiteurs internationaux. Les Producteurs de grain du Canada ont bien accueilli la confirmation que l’essence et le diesel utilisés dans les fermes ne seront pas soumis au filet de sécurité fédéral sur la tarification du carbone. Toutefois, M. McCann a expliqué que le propane et le gaz naturel utilisés dans les séchoirs à grains ne seront pas exemptés, soulignant les fait que ces séchoirs sont essentiels lorsque la saison de récolte est humide. M. McCann a fini en disant qu’ « [u]ne aide supplémentaire n’aura pas d’incidence sur les engagements des producteurs à réduire les émissions de GES. Ils le font déjà, et ils continueront de travailler fort pour cultiver davantage avec moins[127] ».

M. McCann a aussi souligné le rôle que le Canada a joué en tant que membre fondateur de la « Global Research Alliance on Agricultural Greenhouse Gases », une organisation qui dirige des efforts internationaux de coordination et de collaboration en matière de recherche sur les mesures de réduction des émissions de GES provenant de l’agriculture[128].

Recommandation 4

Le comité recommande que le gouvernement du Canada, afin d’aider les compagnies aériennes à atteindre leurs cibles de réduction des émissions de gaz à effet de serre, leur permette d’acheter des crédits de carbone compensatoires, dans le cadre d’un régime de gouvernance robuste et transparent.

Recommandation 5

Le comité recommande que le gouvernement du Canada crée de nouveaux incitatifs à la mise au point et à la commercialisation de carburants pour aéronef à faibles émissions de gaz à effet de serre.

4.  Leadership en matière de politiques

Plusieurs témoins ont souligné l’importance du leadership du Canada à l’échelle internationale en matière de tarification du carbone. Selon Nicholas Rivers, « [l]’approche adoptée par le Canada s’appuie sur 15 années d’expérience internationale en matière de tarification du carbone. Elle positionne le Canada parmi les pays à l’avant-garde des efforts déployés pour lutter contre les émissions de gaz à effet de serre[129]. » David Sawyer a dit que le « Canada s’est doté d’une structure réglementaire qui fait l’envie du reste du monde et qui constitue un exemple à suivre[130] ». Il a ajouté que lors de son passage à l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), des gens étaient curieux de savoir ce qui se fait au Canada, lui qui combine la tarification du carbone, la réglementation, les programmes de subventions à l’innovation et les mesures de contrôle des émissions de méthane : « Ce qu’on cherche à faire ailleurs dans le monde, c’est justement [d’adapter ces mesures] pour favoriser encore davantage la décarbonisation[131]. » Mark Cameron a affirmé que « l'exemple que présente le Canada avec son [C]adre [pancanadien] de tarification du carbone et la loi fédérale destinée à en assurer la cohérence partout au pays établit un précédent très important à l'échelle internationale[132] ».

Signalant que le Canada est le plus grand émetteur par habitant des pays du G20, et l’une des plus grandes économies du monde, Joanna Kyriazis a déclaré que même si elles représentent moins de 2 % des émissions mondiales, les émissions de GES du Canada ont une incidence dans le contexte international. Mme Kyriazis a indiqué comment le Canada peut montrer l’exemple :

La meilleure chose que nous puissions faire, si nous voulons convaincre les autres pays de mettre la main à la pâte, c’est de concevoir et de mettre en œuvre un régime de tarification du carbone qui fera école dans le monde et qui produira les technologies propres dont nous avons besoin non seulement pour réduire nos propres émissions et stimuler la croissance de notre économie, mais aussi pour exporter nos technologies ailleurs et aider les autres pays du monde à atteindre eux aussi leurs objectifs de réduction des émissions[133].

Recommandation 6

Le comité recommande que le gouvernement du Canada assume un rôle de leadership à l’appui du développement des technologies propres, afin non seulement de réduire les émissions et de faire croître l’économie du Canada, mais aussi d’aider les autres pays à atteindre leurs objectifs de réduction des émissions.

Dale Beugin a convenu qu’il est important pour le Canada d’agir :

Si le Canada ne fait rien pour réduire ses émissions de gaz à effet de serre, comment pouvons-nous nous attendre à ce que d’autres pays le fassent? C’est exactement la nature du problème d’action collective que constituent les changements climatiques. Ce n’est que si tout le monde agit que nous pourrons nous attaquer aux coûts et aux risques élevés que comportent les changements climatiques[134].

Afin de mettre en perspective les coûts associés aux mesures pour le climat, Joanna Kyriazis a fait valoir qu’il coûte beaucoup plus cher d’attendre ou de ne rien faire. Par exemple, elle a souligné que les dommages causés en 2018 au Canada par les phénomènes météorologiques extrêmes ont coûté 1,9 milliard de dollars en pertes assurées; dans les Prairies, les tempêtes estivales ont causé pour 240 millions de dollars de dommages; et à Toronto, une seule journée de pluies diluviennes a entraîné des coûts de plus de 80 millions de dollars[135].

Plusieurs témoins ont dit de l’approche du Canada en matière de tarification du carbone qu’elle est un signe de son leadership international et qu’elle est une étape vers l’instauration d’un tarif mondial. Hari Balasubramanian y voit un exemple essentiel de leadership international :

[S]’il n’y a pas de prix universel sur le carbone dans le monde, on observera des défaillances de marché à certains égards. En nous posant en chef de file et en mettant un prix sur la pollution, nous devons encourager ce groupe de 45 territoires nationaux qui ont déjà mis un prix sur la pollution à se transformer en groupe de 150 ou 187, quel que soit le nombre représenté à l’échelle mondiale[136].

Chris Turner a rappelé que l’importance de la tarification du carbone est très largement reconnue :

Ce que je dirais au sujet du leadership international, c’est que la plupart des organisations internationales — toutes, en fait, je crois — ont étudié la question […] et [ont] dit que l’un des meilleurs mécanismes, des mécanismes essentiels en vue de la lutte mondiale contre les changements climatiques était la tarification du carbone. Tous s’accordent pour dire qu’il s’agit d’un instrument clé, au-delà de la partisanerie[137].

Selon Mark Cameron, directeur exécutif de Clean Prosperity, « [i]l est donc essentiel pour le leadership international du Canada en matière de tarification du carbone que son filet de sécurité fédéral sur la tarification du carbone soit un succès au cours des prochaines années[138] ». Il a ajouté que si le Canada devait reculer en matière de tarification du carbone, cela pourrait décourager les efforts internationaux en la matière[139].

Recommandation 7

Le comité recommande que le gouvernement du Canada conserve la position du Canada entant que leader mondial de la tarification de la pollution par le carbone et qu’il travaille avec d’autres pays à accroître le nombre des gouvernements adoptant la tarification du carbone.

5.  La politique sur le climat, un enjeu non partisan

Laura Sacks, du Lobby climatique des citoyens, a signalé que certains pays, comme le Royaume Uni, conviennent de hisser la politique sur le climat au-dessus des considérations partisanes. Ils décident « d’utiliser une certaine méthode pour réduire les émissions et aller de l’avant, de façon à ne pas faire volte-face en adoptant une politique solide qui est ensuite supprimée. Nous voulons établir des ponts entre les parties afin d’avoir une certitude à long terme en ce qui concerne la tarification du carbone[140]. »

Catherine Abreu, du Réseau action climat Canada, a abondé dans le même sens : « même si la lutte aux changements climatiques peut être un enjeu politique qui mérite de faire l’objet d’un débat actif[,] elle ne devrait pas être une question partisane[141] ».

Recommandation 8

Le comité recommande que le gouvernement du Canada travaille à faire de la politique sur le climat un enjeu non partisan.

4.  Les mesures complémentaires prévues de leadership international

En plus de recueillir des témoignages sur la tarification de la pollution au carbone, le comité a entendu les participants sur les trois mesures complémentaires de leadership international énoncées dans le CPC. La présente partie traite des témoignages entendus à ce sujet.

Plusieurs témoins ont fait ressortir que la mise en œuvre du CPC est en soi une expression de leadership international[142] — il s’agit selon eux d’un pas important pour le Canada, le CPC étant un élément crucial de la capacité du pays à atteindre ses objectifs de réduction des émissions. Comme Anne-Raphaëlle Audouin l’a expliqué :

avec le [C]adre pancanadien, nous avons maintenant pour la première fois une stratégie nationale sur le climat. Nous avons toutes les cibles et tous les objectifs dont nous avons besoin. La mise en œuvre de cette stratégie créera d’importantes possibilités de développement économique et de création d’emplois au pays. Notre leadership national se traduira par d’énormes possibilités à l’échelle mondiale dans l’économie de l’énergie propre. Nous devons maintenant passer de la planification climatique à l’action climatique. Il est temps de bien mettre en œuvre le cadre pancanadien[143].

Plusieurs témoins ont parlé de l’importance de mettre en œuvre le CPC, d’y consacrer du temps et d’apporter les corrections nécessaires en cours de route[144]; ils ont aussi fait remarquer que ce serait le premier plan en la matière que le Canada exécuterait sérieusement : En effet, comme John Drexhage l’a dit, le Canada s’est doté d’un programme d’action national sur les changements climatiques dès 1994, mais en tant que pays, « nous n’avons à peu près pas progressé d’un iota dans la mise en œuvre depuis. J’aimerais simplement voir des mesures constructives commencer à se mettre en place, et non pas des efforts pour tenter de trouver une solution globale et exhaustive avant de faire quoi que ce soit[145]. »

Selon Isabelle Turcotte de l’Institut Pembina, « la crédibilité du Canada dans la lutte contre les changements climatiques sur la scène internationale repose sur notre capacité à mettre en œuvre avec succès le cadre pancanadien, le plan d’action sur le climat, ou les mesures qui nous permettront d’atteindre notre cible de 2030 en vertu de l’Accord de Paris et, par la suite, de revoir cet objectif en fonction des attentes internationales[146] ».

La négociatrice en chef en matière de changement climatique du Canada a décrit l’attention que porte la communauté internationale à l’approche canadienne :

Nos initiatives ainsi que celles de la communauté internationale concernant la tarification du carbone et les marchés du carbone en général suscitent un vif intérêt. Du point de vue de la négociation, les parties reconnaissent que les marchés du carbone et l’échange international des droits d’émission sont une façon d’accélérer la réduction des émissions de GES[147].

a.   Engagements financiers internationaux du Canada dans la lutte au changement climatique

À la CdP 15, à Copenhague, en 2009, le Canada s’est engagé à collaborer avec les pays développés partenaires afin « de mobiliser ensemble 100 milliards de dollars américains par année d’ici 2020 auprès d’une grande diversité de sources[148] ».

Dans un esprit de progression par rapport à cet engagement antérieur, l’Accord de Paris énonce à l’article 9 que les pays développés continueront de montrer la voie en fournissant des ressources financières pour venir en aide aux pays en développement aux fins de l’atténuation et de l’adaptation, « compte tenu du rôle notable que jouent les fonds publics » et eu égard à la nécessité de prévoir des ressources d’origine publique et sous forme de dons pour l’adaptation[149]. Les parties ont convenu que le financement doit être accru et qu’un juste milieu doit être trouvé entre le financement de l’atténuation et celui de l’adaptation[150].

Dans le CPC, le gouvernement fédéral réitère son engagement à verser 2,65 milliards de dollars d’ici 2020 pour « offrir de l’aide aux pays les plus pauvres et les plus vulnérables en ce qui concerne l’atténuation des effets négatifs des changements climatiques et de mesures d’adaptation à ceux‑ci[151] ». Selon Anar Mamdani, du ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement, des fonds de plus de 1,2 milliard de dollars ont été annoncés dans le cadre de cet engagement de 2,65 milliards de dollars[152].

Dans les discussions sur le financement de la lutte au changement climatique, les témoins ont insisté sur les thèmes ci‑dessous.

Combiner le financement de l’adaptation et de l’atténuation

Des témoins ont fait valoir que le Canada devrait consacrer à l’adaptation au moins la moitié de son financement de la lutte au changement climatique. Naomi Johnson, de la Banque canadienne de grains, a souligné que le texte de l’Accord de Paris prône l’équilibre entre l’adaptation et l’atténuation. Elle a ajouté que le Canada s’est amélioré à cet égard, puisque depuis peu, il consacre à l’adaptation non plus 16 % mais 30 % de son financement de la lutte au changement climatique[153]. C’est cependant encore loin du financement égal de l’adaptation et de l’atténuation, égalité réclamée par les témoins et dans les brefs soumis au comité[154].

Quelques témoins ont déploré le manque de projets d’adaptation conformes aux critères de financement actuels; Dominique Charron, du Centre de recherches pour le développement international, a parlé du « manque de projets d’adaptation adéquats pouvant être financés par les investisseurs[155] ». Selon Mme Charron, les projets d’adaptation réussissent plus difficilement à obtenir des fonds parce qu’ils sont plus risqués et parce que leurs objectifs à long terme sont surtout des améliorations sociales dont le rendement financier n’est pas aisément quantifiable[156]. Pour corriger cette lacune, il faudra à l’avenir, selon Laurence Blandford, du Center for Clean Air Policy, se soucier autant « de concevoir [et] d’élaborer […] les projets[157] » que de les mettre en œuvre.

De l’avis des témoins, les projets d’adaptation font partie intégrante du financement de la lutte contre le changement climatique parce qu’ils aident les pays les plus pauvres et vulnérables, qui subissent dès aujourd’hui certaines des répercussions des changements climatiques[158].

Adaptation : cibler les pays les plus pauvres et vulnérables

Dans son mémoire écrit, CARE Canada a signalé que les pays en développement « subissent jusqu’à 80 % des contrecoups des changements climatiques, notamment l’insécurité alimentaire, les pertes et les dommages, les menaces aux moyens de subsistance et l’instabilité[159] ». Compte tenu de cette réalité, divers témoins ont demandé que le Canada veille attentivement à ce que son financement de la lutte au changement climatique profite aux pays les plus faibles et vulnérables[160].

Certains témoins ont abordé l’angle de l’égalité des sexes. Les représentantes du ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement et du Centre de recherches pour le développement international ont signalé que les femmes et les filles sont particulièrement vulnérables à l’impact du changement climatique. Ces deux témoins ont donc expliqué comment le financement du Canada vient en aide aux femmes, par exemple en appuyant des projets agricoles intelligents face au climat ou une initiative locale de système d’annonce de crue[161]. CARE Canada et la Canadian Coalition on Climate Change and Development ont réclamé la prise de nouvelles mesures dans ce domaine, et prôné l’adoption d’une stratégie affirmant clairement l’intégration de l’égalité des sexes au financement de la lutte au changement climatique et le soutien des organisations environnementales et agricoles composées de femmes[162].

De manière plus générale, Laurence Blandford, du Center for Clean Air Policy, a dit que le financement de la lutte au changement climatique doit « mettre l’accent sur la transformation à long terme dans les pays en développement, et non pas seulement sur le financement de projets[163] ».

Mécanismes de versement du financement de la lutte au changement climatique

Une grande partie du financement international du Canada pour la lutte au changement climatique est versée par l’intermédiaire d’organismes multilatéraux et d’initiatives du secteur privé. Par exemple, le Canada s’est engagé à octroyer 300 millions de dollars au Fonds vert pour le climat, le mécanisme de financement des mesures d’adaptation et d’atténuation établi dans le cadre de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques[164]. Anar Mamdani a expliqué la nécessité d'une participation du secteur privé, disant que :

[l]es estimations relatives au financement nécessaire pour lutter contre les changements climatiques sont de l’ordre de billions de dollars, une somme si importante que le secteur public ne peut l'assumer seul. Le financement public de la lutte contre les changements climatiques peut aider à mobiliser le secteur privé afin de proposer des solutions novatrices et viables. C’est la raison pour laquelle le Canada fournira 1,8 milliard de dollars de son financement de lutte contre les changements climatiques sous forme de contributions remboursables, notamment par l’entremise de mécanismes spécialisés canadiens au sein de banques de développement multilatérales[165].

Des témoins se sont toutefois dits préoccupés par le risque de s’en remettre excessivement aux organisations multilatérales et au financement du secteur privé. Ces entités tendent à préférer les projets d’atténuation aux projets d’adaptation, ne sont guère efficaces lorsqu’il s’agit d’aider les plus vulnérables et craignent trop le risque pour s’intéresser aux initiatives de faible ampleur ou à un stade préliminaire[166]. Pour Naomi Johnson, de la Banque canadienne de grains, le financement de la lutte au changement climatique doit se faire en collaboration avec les organismes locaux et nationaux de la société civile, puisque ceux-ci ont souvent l’expertise nécessaire pour optimiser l’adaptation et aider les plus vulnérables[167].

Recommandation 9

Le comité recommande que le gouvernement du Canada recense les organisations non gouvernementales canadiennes et les organisations locales de la société civile capables de mener à bien des projets efficaces d’adaptation et d’appui aux populations vulnérables à l’étranger, et qu’il aide ces organisations à accéder aux fonds internationaux et canadiens consacrés au climat.

En ce qui concerne les méthodes d’affectation des fonds, beaucoup de témoins ont proposé que le gouvernement opte davantage pour les subventions plutôt que les prêts. Ils ont expliqué que ce mode de financement allégerait l’endettement des pays en développement et faciliterait la tâche aux PME qui souhaitent lutter contre le changement climatique dans les pays en développement[168].

La « juste part » du Canada

Les engagements actuels du Canada se chiffrent à 800 millions de dollars par année d’ici 2020, tandis que l’ensemble des pays donateurs promettent US 100 milliards de dollars américains par année[169]. Plusieurs témoins ont avancé que ce financement, s’il est le bienvenu, n’est pas suffisant. Selon eux, l’économie du Canada représente 3,9 % de l’économie de tous les pays donateurs de l’OCDE. Le Canada devrait donc assumer 4 % du montant promis total, soit 4 milliards de dollars américains par année[170]. Comme le secteur privé et les organismes multilatéraux fourniraient une partie de cet engagement de 100 milliards de dollars américains, la « juste part » du Canada serait 3,9 % du financement provenant des sources bilaterales (37,3 milliards de dollars américains), soit en fait environ 1,8 milliard de dollars par année — le double de l’engagement actuel[171].

Par ailleurs, Keith Stewart, de Greenpeace Canada, et la Canadian Coalition on Climate Change and Development ont expliqué que le financement de la lutte au changement climatique doit s’ajouter à celui des autres programmes officiels d’aide au développement; si on se contente de prélever les fonds pour le climat sur l’enveloppe des autres objectifs de développement international, ceux-ci seront de plus en plus négligés à mesure que le changement climatique absorbera une portion accrue du budget[172].

Recommandation 10

Le comité recommande que le gouvernement du Canada porte à 50 % la portion de financement pour la lutte au changement climatique qu’il consacre aux mesures d’adaptation.

Recommandation 11

Le comité recommande que le gouvernement du Canada veille à ce qu’une plus grande portion du financement pour la lutte au changement climatique soit accordée sous forme de subventions, plutôt que seulement sous forme de prêts, ceux-ci étant difficiles à rembourser pour beaucoup des pays les plus pauvres et vulnérables.

Recommandation 12

Le comité recommande que le gouvernement du Canada accroisse son financement de la lutte au changement climatique dans les années à venir dans le but de fournir sa « juste part » du financement mondial en la matière, soit environ 1,8 milliards de dollars par année.

b.  Commerce international et politique sur le climat

Dans le CPC, le gouvernement fédéral s’est engagé à ce que les règles commerciales soutiennent la politique sur le climat.

Accords commerciaux et changement climatique

Comme l’a mentionné Silvia Maciunas, du Centre pour l’innovation dans la gouvernance internationale, « je ne pense pas que la Convention-cadre ou l’Accord de Paris nous permettront à eux seuls de résoudre le problème climatique. Il faut voir comment d’autres éléments du cadre juridique international s’inscrivent là‑dedans[173]. » Elle a soulevé plusieurs questions de nature commerciale qui pourraient entraver le développement des technologies propres et la transition vers l’économie à zéro émission. Par exemple, les règles de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) sur les subventions peuvent nuire au financement de l’énergie renouvelable ou de la technologie propre, parce que « l’OMC ne tient pas compte de l’intérêt public que sert la subvention[174] ». Elle a proposé des solutions : les pays aux vues communes pourraient négocier des ententes sur la technologie propre qui permettent les subventions, ou encore le Canada pourrait proposer une interprétation des règles de l’OMC permettant les subventions dont « l’objectif public est justifiable[175] ». De même, Mme Maciunas a demandé au Canada de continuer de chercher des moyens de se pencher sur les subventions aux carburants fossiles, qu’elle a qualifiées d’« incitatif pernicieux[176] ».

Recommandation 13

Le comité recommande que le gouvernement du Canada, s’étant engagé à mener un examen international de ses subventions aux carburants fossiles, s’assure d’en publier les résultats avec transparence, et que le Canada continue de chercher des façons de réduire et d’éliminer les subventions aux carburants fossiles.

Keith Stewart, de Greenpeace Canada, a proposé que chaque accord commercial soit jugé à l’aune de son impact — qui doit être positif plutôt que négatif — sur la stabilité climatique. Selon lui, « il faut mettre l’accent sur les changements climatiques et donner du mordant à la réglementation, autant pour protéger l’environnement que pour protéger le commerce et les entreprises[177] ». Pour Catherine Abreu, les accords commerciaux doivent renforcer les mesures de protection sociales et environnementales solides dont le Canada s’est doté, afin d’aider les entreprises canadiennes à négocier le virage vers l’économie à énergie propre[178].

Silvia Maciunas a recommandé que le Canada, afin de montrer la voie, travaille à mettre au point une « dérogation concernant le climat » à l’OMC. Cet outil permettrait aux membres de ne pas respecter leurs obligations dans des « circonstances exceptionnelles » liées au changement climatique s’ils obtenaient les trois quarts des appuis (plutôt que le consensus). Il faudrait pour ce faire collaborer avec un groupe de pays aux vues similaires[179].

Mme Maciunas a aussi fait remarquer que l’Accord économique et commercial global (AECG) entre le Canada et l’Union européenne engage les signataires « à favoriser les investissements commerciaux dans les biens et services environnementaux[180] », ce qui pourrait être bénéfique au secteur des technologies propres du Canada.

Selon ce témoin, le Canada gagnerait à insister sur l’inclusion de certaines dispositions dans ses futurs accords commerciaux. Par exemple, le Japon et l’Union européenne ont signé une entente qui oblige les deux parties à mettre en œuvre l’Accord de Paris et à « promouvoir la contribution du commerce à la transition vers le développement à faibles émissions de gaz à effet de serre et à l’épreuve des changements climatiques[181] ». De même, un accord entre la Nouvelle‑Zélande et Taïwan « engage les deux pays à éliminer les droits de douane sur les biens environnementaux[182] ». Les dispositions de ce genre peuvent aider à réduire les différends commerciaux risquant d’interférer avec les mesures sur le climat.

Recommandation 14

Le comité recommande que le gouvernement du Canada continue d’inclure des dispositions novatrices dans les accords commerciaux régionaux et bilatéraux du Canada, particulièrement dans les secteurs qui pourraient aider à la transition vers l’économie à faibles émissions de carbone et au commerce des biens et services environnementaux.

Prévention de la fuite de carbone

Parce qu’elles ne sont pas appliquées universellement, les mesures de tarification de la pollution pourraient inciter certaines industries grandes consommatrices d’énergie, dans le contexte de pressions de la concurrence internationale, à déménager dans des pays où les règles sont moins exigeantes, ou encore à importer leurs produits à fort contenu en énergie plutôt que de les produire au Canada. Cette « fuite de carbone » rendrait les mesures de réduction inopérantes. Pour la prévenir, divers mécanismes peuvent être mis au point, notamment dans le contexte des accords commerciaux[183]. La tarification fondée sur le rendement, décrite dans la partie consacrée à la tarification du carbone, est l’un de ces mécanismes.

Matt Jones a expliqué comment éviter la fuite de carbone : « [L]a meilleure façon d’éviter les fuites de carbone est de concevoir des politiques intelligentes et d’effectuer les analyses nécessaires pour nous assurer de comprendre la position concurrentielle des entreprises canadiennes[184]. » Selon lui, les politiques canadiennes sont conçues pour soutenir les réductions d’émissions sans nuire à la compétitivité des entreprises[185].

Laurence Blandford, du Center for Clean Air Policy, a signalé que le régime de réduction du carbone n’est pas le seul facteur qui détermine la compétitivité du Canada, et que les décisions d’investissement des entreprises ne se fondent pas uniquement sur la politique de lutte au changement climatique : « Il y a d’autres aspects qui font du Canada un endroit de choix où investir et je pense que beaucoup d’entreprises y prêtent attention[186]. »

Réduction des émissions à l’échelle nationale ou mondiale

Michael Binnion a mentionné que, comme certaines des industries du Canada ont des émissions faibles par comparaison aux mêmes industries ailleurs dans le monde, on pourrait réduire les émissions à l’échelle planétaire si on remplaçait la production ailleurs dans le monde par la production canadienne. Selon lui, la production de l’aluminium canadien, grâce à l’hydroélectricité propre disponible au Canada, génère « seulement deux tonnes d’émissions par tonne d’aluminium produite, comparativement aux secteurs américain (11), australien (14) et chinois (17)[187] ». Selon lui, le problème de cette stratégie est qu’elle diminuerait globalement les émissions mondiales, mais augmenterait celles du Canada. M. Binnion a reproché à la tarification du carbone de peser sur les producteurs canadiens, qui génèrent relativement peu d’émissions, et de favoriser potentiellement la production étrangère plus polluante, au lieu d’en entraîner le remplacement.

Il a recommandé plutôt la déréglementation et la réduction du fardeau fiscal pour aider les industries canadiennes comme celle de l’aluminium — des industries « qui ont des avantages comparatifs mondiaux en matière de carbone[188] » — à devenir plus compétitives sur les marchés mondiaux. Si les sociétés canadiennes remplaçaient la production étrangère, il pourrait en résulter une baisse des émissions planétaires.

Pour Hari Balasubramanian, les ressources naturelles sont un avantage du Canada :

Du point de vue industriel, c’est impossible qu’on réussisse à mettre au point des technologies de captage et de stockage du carbone à grande échelle d’ici 2030, même si toutes les entreprises d’énergie fossile que je connais partout dans le monde y travaillent fort. Pour réussir, nous devons investir dans le reboisement, dans la protection des forêts, dans le soutien des peuples autochtones de la région amazonienne et dans la protection des plus grands puits de carbone de la planète[189].

Recommandation 15

Le comité recommande que le gouvernement du Canada prenne des mesures pour protéger et faire croître ses puits de carbone naturels, comme les forêts, les terres humides, les sols et les océans.

c.   Résultats d’atténuation transférés à l’échelle internationale (RATI)

L’Accord de Paris, à l’article 6, permet le transfert entre pays des résultats d’atténuation (crédits pour les réductions d’émissions de GES), mais les mécanismes à cette fin n’étaient pas encore au point au moment de l’étude du comité. Les priorités du Canada, telles qu’ énoncées dans le CPC, sont que les transferts internationaux de résultats d’atténuation se fassent selon des règles de comptabilité rigoureuses établies à l’aide d’experts, et que ces transferts se traduisent par des réductions concrètes des émissions de GES (par exemple, la double comptabilisation doit être évitée).

L’article 6 de l’Accord de Paris ouvrirait donc la voie à la coopération internationale au moyen des marchés du carbone. Pour Catherine Stewart, négociatrice en chef du Canada en matière de changement climatique, « les parties reconnaissent que les marchés du carbone et l’échange international des droits d’émission sont une façon d’accélérer la réduction des émissions de GES[190] ».

Comment les résultats d’atténuation transférés à l’échelle internationale pourraient contribuer à l’atteinte des cibles de réduction des GES

Selon certains analystes, les RATI peuvent beaucoup contribuer à concrétiser des changements transformationnels. Par exemple, selon le Center for Clean Air Policy, « les RATI peuvent catalyser l’ambition dans la mesure où ils réduisent le coût de mise en œuvre, appuient l’action rapide, permettent le transfert des technologies à faibles émissions de carbone et renforcent la capacité d’atténuation du pays[191] ».

Plusieurs témoins ont fait remarquer que ce n’est pas au Canada que l’on trouve certaines des réductions qui seraient les plus faciles à réaliser. John Drexhage a donné l’exemple du torchage de gaz que pratique l’industrie pétrolière de nombreux pays : « Les fuites de gaz naturel sont immenses partout en Europe de l’Est. Quand on voit qu’on essaie de réduire les fuites de gaz naturel en Alberta à des millièmes ou des centièmes de points de pourcentage, [il] semble beaucoup plus sensé [de réduire plutôt] les taux de fuites de 5 à 10 % qu’on observe dans certains pays[192]. » Pour ce témoin, c’est là un domaine où les RATI pourraient contribuer aux réductions planétaires, et il serait sensé que les pays comme le Canada investissent dans les secteurs de ce genre pour y réduire les GES dans d’autres pays.

Certains ont fait valoir que le Canada pourrait choisir d’acheter les réductions de GES d’autres pays pour atteindre ses cibles, mais de nombreux témoins ont fait une mise en garde : les RATI doivent s’ajouter aux réductions opérées au pays mais non s’y substituer — ils doivent nous donner l’ambition d’en faire plus[193].

S’assurer que les résultats d’atténuation transférés à l’échelle internationale fonctionnent

Des mesures de gouvernance nationales et internationales devront être en place pour que les RATI suscitent réellement une réduction des émissions. Les dangers potentiels sont notamment la double comptabilisation en conjonction avec le financement de la lutte au changement climatique, ou le transfert aux pays développés, sous la pression de l’industrie, des résultats d’atténuation faciles à atteindre des pays en développement, qui auraient alors d’autant plus de difficulté à atteindre leurs cibles[194].

John Drexhage a reconnu l’inquiétude de certains représentants de l’industrie et des gouvernements provinciaux, qui craignent que le financement des RATI à l’étranger se fasse au détriment de l’investissement dans la réduction des émissions de GES au Canada[195].

Pour plusieurs témoins, l’achat de réductions d’émissions à l’étranger pourrait signifier dans les faits qu’on donne carte blanche aux grands pollueurs du Canada et qu’on se déleste sur d’autres pays de l’obligation de réduire les émissions[196].

Dans l’ensemble, les témoins ont convenu que les RATI pourraient contribuer à réduire les émissions planétaires globales, mais une inquiétude s’est clairement exprimée chez certains : ils pourraient aussi affaiblir notre ambition de réduire les GES[197]. Plusieurs témoins ont donc avancé que les RATI ne devraient être qu’une mesure ultime, utilisée pour accroître encore davantage les réductions quand toutes les mesures possibles ont été prises à l’échelle du pays. Pour Keith Stewart, de Greenpeace, le Canada devrait concrétiser au pays toutes les réductions prévues dans le CPC, et « [l]es crédits transférés à l’échelle internationale devraient être considérés comme la cerise sur le gâteau, comme un moyen d’accélérer le processus[198] ».

En revanche, John Drexhage a dit qu’il était préférable de voir les RATI comme « un investissement stratégique complémentaire aux mesures nationales, ce qui aidera également le gouvernement fédéral à combler l’écart par rapport aux émissions[199] ».

Toujours selon M. Drexhage, « [p]our ce qui est des initiatives nationales et des crédits internationaux, il ne s’agit pas de faire un choix entre les deux. Il faut les deux[200] ». Ce témoin a ajouté que les RATI apportent une souplesse dont le Canada ne manquera jamais d’avoir besoin pour atteindre ses cibles de réduction des GES, quelles qu’elles soient[201].

Recommandation 16

Le comité recommande que le gouvernement du Canada envisage d’utiliser les résultats d’atténuation transférés à l’échelle internationale pour atteindre ses cibles de réduction des émissions, et qu'il les utilise d’une manière qui appuie clairement une approche ambitieuse de la réduction des émissions dans le monde.

Isabelle Turcotte, de l’Institut Pembina, a reconnu que les RATI pourraient stimuler de nouvelles approches d’innovation et de coopération, mais elle a énoncé les principes que devraient respecter les pays acheteur et vendeur : « garantir l’intégrité environnementale des réductions; éviter le double comptage; préconiser l’utilisation volontaire des RATI avec l’autorisation des parties; favoriser la mise en œuvre des contributions déterminées au niveau national dans les deux pays; et surtout […], les RATI doivent soutenir l’ambition des pays et les encourager à dépasser leurs cibles[202] ».

Mme Turcotte a proposé que le gouvernement fédéral mette en place un régime national sur les RATI et y incorpore un mécanisme qui garantira le respect de ces principes. Ce régime pourrait s’accompagner de règles claires sur l’utilisation nationale des RATI, et notamment sur les types de crédits admissibles, les normes de mesure, de rapport et de vérification, et les restrictions éventuelles.

Recommandation 17

Le comité recommande que le gouvernement du Canada élabore un régime national sur l’utilisation des résultats d’atténuation transférés à l’échelle internationale pour le Canada, en établissant des règles claires sur leur utilisation, notamment les types de crédits admissibles, les normes de mesure, de rapport et de vérification, et les éventuelles restrictions, et que ce régime incorpore un mécanisme garantissant le respect de principes clés comme appuyer une approche ambitieuse de la réduction des émissions.

Le Conseil canadien sur l’électricité renouvelable croit que les RATI sont l’occasion de partager avec le monde l’expertise du Canada tout en soutenant la participation canadienne à l’économie mondiale, et de faire preuve ainsi de leadership international. Il a toutefois émis une réserve : « Il faudra examiner attentivement la façon dont les crédits internationaux interagissent avec nos cibles et nos marchés nationaux en matière d’émissions. Des limites et un prix plancher pour le carbone pourraient faire en sorte que les signaux de prix provenant de la tarification du carbone ne soient pas indûment compromis[203]. »

5.  Leadership international sur le changement climatique

a.   Pratiques exemplaires de réduction des gaz à effet de serre dans le monde

Le comité a demandé aux témoins quels pays réussissent à réduire leurs émissions de GES et à concrétiser leurs engagements internationaux. John Drexhage a répondu que la Norvège atteint ses cibles de réduction des GES parce que, en partie, elle investit dans « des projets importants de réduction et de séquestration de gaz à effet de serre au-delà de ses frontières. Cela l’aide à atteindre ses objectifs et à mettre son expertise à contribution à l’étranger, ce qui est utile à l’industrie d’énergie propre florissante et au renforcement des capacités d’autres pays[204]. »

Le Japon a aussi été mentionné pour le mécanisme de crédits conjoints qu’il a mis au point : « En collaborant étroitement avec l’industrie, les Japonais ont investi dans des occasions de réduire les émissions de gaz à effet de serre qui favorisent également de véritables possibilités économiques[205]. » On a aussi encensé le Japon pour ses efforts visant à maximiser l’efficacité énergique et réduire l’énergie consommée « par unité de production, par ménage, par pied carré d’espace de bureau[206] », etc.

A aussi été cité le programme d’échange de droits d’émission de l’Australie, qui donne lieu à des « stratégies de réduction des émissions d’une valeur de 2,5 milliards de dollars appuyées et pilotées par le secteur privé[207] »; dans le cadre de ce programme, des acteurs non traditionnels (comme une grande société minière) diffusent le message selon lequel la tarification du carbone est à la fois une solution et une chance financière à saisir.

Catherine Abreu a salué la responsabilisation et la transparence qu’exige, par rapport aux émissions de gaz à effet de serre, le processus législatif de la Suède, de la Grande‑Bretagne, de la Finlande et du Danemark[208]. Elle a expliqué que ce processus, qui prend par exemple la forme du Comité sur le changement climatique au Royaume-Uni, pourrait fonctionner au Canada : des rapports réguliers et de style uniforme sur l’atteinte des objectifs climatiques seraient produits, des recommandations et rapports seraient adressés aux gouvernements provinciaux et fédéral, et le gouvernement fédéral devrait y répondre.

Recommandation 18

Le comité recommande que le gouvernement du Canada mette au point un mécanisme de reddition de comptes solide pour les objectifs du Cadre pancanadien sur la croissance propre et les changements climatiques. Ce mécanisme devrait établir des indicateurs clés qui aideront le pays à mesurer les progrès et à produire à ce sujet des rapports de style uniforme, le tout dans le but de prendre des mesures concrètes pour tenir les engagements du Canada au titre de l’Accord de Paris.

Plusieurs témoins ont cité des exemples où le secteur privé fait preuve de leadership dans le dossier du changement climatique. En particulier, on a souligné l’importance du Groupe de travail sur la divulgation accrue de renseignements sur les risques financiers liés au climat, établi par Mark Carney et Mike Bloomberg. Selon eux, ce groupe de travail pourrait offrir un processus réellement complémentaire de sorte que les entreprises qui participent au commerce international puissent avoir une compréhension commune des risques financiers liés au climat qui pèsent sur leurs activités et puissent les comptabiliser de façon transparente[209]. Selon un témoin, cet intérêt des grandes entreprises montre que les comportements commencent à changer[210].

b.  Changement climatique : l’engagement et la collaboration du Canada sur la scène internationale

Le comité a souhaité étudier, outre les mesures annoncées dans le Cadre pancanadien, le leadership international du Canada et la perception du Canada dans la communauté internationale. Selon les témoignages entendus, le Canada a un bilan globalement mitigé sur le plan du climat, mais il est considéré comme un chef de file pour ce qui est la tarification du carbone.

Selon Chris Ragan, de la Commission de l’écofiscalité du Canada, « le Canada n’est pas un chef de file en matière de politiques climatiques, mais nous allons en fait de l’avant, et c’est une bonne chose[211] ». De même, des témoins ont reconnu que, même si le Canada n’est pas encore à l’avant-garde du combat global pour le climat, il est néanmoins réputé dans le domaine des sciences du climat[212] et de la tarification du carbone.

Greg Flato a dit que de nombreuses recherches entreprises au Canada sont publiées dans des revues de très haut niveau et citées dans des évaluations du GIEC, et que le Canada jouit d’une excellente réputation à l’échelle internationale en tant que chef de file en matière de climatologie[213].

Les témoins ont aussi énuméré les nombreux forums internationaux où le Canada assume un rôle de leadership et travaille avec d’autres pays, bilatéralement ou multilatéralement, à la lutte contre le changement climatique. Par exemple, le Canada est l’un des acteurs clés de la CCNUCC[214]. Catherine Abreu, du Réseau action climat Canada, a dit : « La première fois que j’ai assisté à une conférence des Nations unies sur les changements climatiques, c’était à Paris, en 2015, et je peux vous dire à quel point il était émouvant d’être canadienne à un moment où le monde entier était emballé par le retour du Canada. Nous ne pouvons pas nous permettre de perdre de nouveau notre réputation pour avoir joué dans la cour des grands en ce qui concerne les politiques climatiques et la diplomatie climatique internationale[215]. »

Isabelle Bérard, d’ECCC, a parlé de l’importance de l’Accord de Paris et des autres efforts du Canada dans le dossier du changement climatique : « Nous croyons fondamentalement que l’Accord de Paris va permettre d’accélérer les efforts mondiaux en matière de changements climatiques. Le Canada utilise tout de même d’autres moyens afin de démontrer son rôle de chef de file mondial dans ce domaine[216]. »

Le leadership international du Canada s’exprime aussi d’autres façons. Isabelle Bérard, d’ECCC, a donné, entre autres, les exemples suivants :

  • Le Canada et le Royaume-Uni ont lancé l’Alliance : Énergiser au-delà du charbon. Cette alliance est une coalition volontaire de gouvernements, d’entreprises et d’organisations qui aident à mettre fin à l’utilisation de l’énergie produite au moyen de centrales au charbon partout au monde. L’Alliance continue de grandir et est maintenant composée de 74 membres, qui reconnaissent la valeur de cette initiative;
  • Le Canada, de concert avec la Chine et l’Union européenne, a lancé la réunion ministérielle sur l’action climatique et a accueilli conjointement deux rencontres entre ministres afin d’essayer de trouver un terrain d’entente en vue de l’adoption du « livre de règles de mise en œuvre de l’Accord de Paris »;
  • ECCC travaille en étroite collaboration avec plusieurs pays pour faire progresser le programme international du Canada en matière de changements climatiques et de protection de l’environnement;
  • Le Canada collabore avec les États-Unis et le Mexique dans le cadre de la Commission de coopération environnementale;
  • Le Canada s’est joint à des États partageant la même vision au sein des États-Unis et du Mexique pour créer le Dialogue nord-américain sur le leadership en matière de climat, s’engageant à collaborer dans les dossiers des transports propres, de l’efficacité des véhicules, de l’énergie propre et de la réduction des polluants climatiques à courte durée de vie;
  • Le premier ministre Trudeau et son homologue chinois ont publié une déclaration commune sur les changements climatiques et la croissance propre. Cette déclaration établit de nouveaux dialogues ministériels sur les changements climatiques, l’environnement et l’énergie;
  • La ministre McKenna est la vice-présidente exécutive internationale du Conseil chinois de coopération internationale en environnement et en développement, le CCCIED;
  • Le Canada et l’UE entretiennent de solides relations bilatérales en matière d’environnement et de changements climatiques;
  • Il existe un partenariat franco-canadien sur le climat et l’environnement;
  • Le Canada travaille avec le Royaume-Uni sur des questions comme l’adaptation aux changements climatiques, la tarification du carbone et l’élimination progressive du charbon traditionnel dans le cadre du partenariat entre le Canada et le Royaume-Uni, annoncé par le premier ministre Trudeau et la première ministre May en septembre 2017[217].

Lucie Desforges, directrice générale, Direction des affaires bilatérales et commerce, ECCC, a mentionné que le Canada a aussi conclu des ententes de coopération avec la France et le Royaume-Uni afin d’en apprendre davantage auprès de ces pays sur des sujets comme l’adaptation et le financement vert[218].

6.  Conclusion

Pour la première fois, le Canada s’est doté d’un plan sur le changement climatique et le met en œuvre. Ce plan n’est peut-être pas parfait, et il est probable que des correctifs doivent y être apportés en cours de route. Mais presque tous les témoins ont convenu que s’il exécute les mesures prévues dans le Cadre pancanadien, y compris la tarification du carbone, le Canada sera sur la bonne voie. Les cibles de réduction des GES adoptées par le Canada ne sont pas considérées comme très ambitieuses; or, le rapport spécial du GIEC, publié en octobre 2018, appelle la planète à plus d’ambition. La trajectoire des émissions actuelle du Canada révèle un écart important entre les réductions projetées et celles qu’il faudrait réaliser, et c’est au prix de mesures supplémentaires que le Canada pourra atteindre ses cibles et être vu comme un leader mondial.

Le Canada est bien positionné pour négocier le virage de l’économie à faible ou à zéro émission de carbone : il dispose d’un réseau électrique fondé principalement sur l’énergie renouvelable; d’une industrie de la technologie propre en pleine croissance et qui n’attend que notre soutien; et de vastes territoires où pratiquer l’entreposage naturel du carbone. Pour le Canada, l’heure est venue d’opter pour l’innovation, de miser sur ses forces, de rassembler les Canadiens dans la lutte contre le changement climatique et de jouer sur la scène mondiale un rôle de premier plan face à ce défi.


[1]              Chambre des communes, Comité permanent de l’environnement et du développement durable [ENVI], Procès-verbal, 1er février 2018.

[2]              Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques, Accord de Paris, article 2, 12 décembre 2015.

[3]              Ibid.

[4]              Ibid.

[5]              ENVI, Témoignages, 16 octobre 2018, 1545 (Isabelle Bérard, sous-ministre adjointe, Direction générale des affaires internationales, ministère de l’Environnement).

[6]              Ibid.

[7]              Carbon Brief, « COP24: Key outcomes agreed at the UN climate talks in Katowice », 16 décembre 2018 [en anglais seulement].

[8]              Banque asiatique de développement, « Appendix: Informal Document by the Chair Subsidiary Body for Scientific and Technological Advice », Decoding Article 6 of the Paris Agreement, 16 mars 2018 [en anglais seulement].

[9]              Carbon Brief, « COP24: Key outcomes agreed at the UN climate talks in Katowice », 16 décembre 2018 [en anglais seulement].

[10]            Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques, « Annexe : Plan d’action pour l’égalité des sexes », Questions de genre et changements climatiques : Projet de conclusions proposé par le Président — Recommandation de l’Organe subsidiaire de mise en œuvre, point 2, 13 novembre 2017.

[11]            Les mesures d’« adaptation au changement climatique » visent l’ajustement aux conséquences du changement climatique, comme la hausse des températures, l’accroissement de la fréquence et de la force des tempêtes, etc.

[12]            Les mesures d’« atténuation du changement climatique » visent la prévention des changements climatiques, le plus souvent par la réduction des émissions de gaz à effet de serre.

[13]            Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat [GIEC], « Approbation par les gouvernements du Résumé à l’intention des décideurs relatif au Rapport spécial du GIEC sur les conséquences d’un réchauffement planétaire de 1,5 °C », communiqué de presse, 8 octobre 2018.

[15]            GIEC, Réchauffement planétaire de 1,5 °C, Résumé à l’intention des décideurs, p. 9-10 [en anglais seulement].

[16]            Le concept d’« équivalent en dioxyde de carbone » permet de tenir compte des temps de résidence dans l’atmosphère et du potentiel de réchauffement planétaire des GES autres que le CO2, comme le méthane, les gaz fluorés et l’oxyde nitreux.

[17]            GIEC, Réchauffement planétaire de 1,5 °C, Résumé à l’intention des décideurs, p. 14 [en anglais seulement].

[18]            Ibid., p. 17 [en anglais seulement].

[19]            ENVI, Témoignages, 16 octobre 2018, 1705 (Laura Sacks, chef de groupe et coordonnatrice de la Colombie‑Britannique, Section Nelson-West Kootenay); ENVI, Témoignages, 18 octobre 2018, 1615 (Hari Balasubramanian); ENVI, Témoignages, 25 octobre 2018, 1540 (Laurence Blandford, directeur, Analyse de politique internationale, Center for Clean Air Policy); ENVI, Témoignages, 30 octobre 2018, 1535 (Silvia Maciunas, directrice adjointe, Droit international de l’environnement, Centre pour l’innovation dans la gouvernance internationale).

[20]            GIEC, Réchauffement planétaire de 1,5 °C, Résumé à l’intention des décideurs, p. 14 [en anglais seulement].

[21]            Le rapport spécial du GIEC décrit l’EGC comme suit : « Activités anthropiques visant à éliminer le CO2 de l’atmosphère et à le stocker durablement dans des réservoirs géologiques, terrestres ou océaniques, ou dans des produits. Il comprend l’amélioration anthropique existante et potentielle des puits biologiques ou géochimiques et le captage et le stockage direct de l’air, mais exclut l’absorption naturelle de CO2 non directement causée par les activités humaines [traduction] », p. 26.

[22]            GIEC, Réchauffement planétaire de 1,5 °C, Résumé à l’intention des décideurs, p. 19 [en anglais seulement].

[23]            Ibid.

[24]            Environnement et Changement climatique Canada, Rapport d'inventaire national 1990-2016 : Sources et puits de gaz à effet de serre au Canada, 2018, partie 1.

[25]            Ibid.

[26]            Ibid.

[27]            Environnement et Changement climatique Canada, Potentiels de réchauffement planétaire.

[28]            Environnement et Changement climatique Canada, La tarification du carbone : cadre de réglementation du système de tarification fondé sur le rendement.

[29]            World Resources Institute, « Total GHG Emissions Excluding Land-Use Change and Forestry — [2005, 2014] », CAIT Climate Data Explorer (base de données), consultée le 27 février 2019 [en anglais seulement].

[30]            Environnement et Changement climatique Canada, Les rapports nationaux du Canada à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (2017).

[31]            World Resources Institute, « Country Greenhouse Gas Emissions », CAIT Climate Data Explorer (base de données), consultée le 14 mars 2019 [en anglais seulement].

[34]            Gouvernements de Terre-Neuve-et-Labrador, de l’Île-du-Prince-Édouard, de la Nouvelle-Écosse, du Nouveau‑Brunswick, du Québec, de l’Ontario, de l’Alberta, de la Colombie-Britannique, du Yukon, des Territoires du Nord-Ouest, du Nunavut et du Canada, Cadre pancanadien sur la croissance propre et les changements climatiques, 2016.

[35]            P. ex. ENVI, Témoignages, 23 octobre 2018, 1745 (Isabelle Turcotte, directrice, Politique fédérale, Institut Pembina); ENVI, Témoignages, 30 octobre 2018, 1600 (John Drexhage, consultant, Drexhage Consulting).

[36]            ENVI, Témoignages, 16 octobre 2018, 1630 (Matt Jones, sous-ministre adjoint, Bureau de mise en œuvre du Cadre pancanadien sur la croissance propre et les changements climatiques, ministère de l’Environnement).

[37]            ENVI, Témoignages, 1er novembre 2018, 1630 (Catherine Abreu, directrice générale, Réseau action climat Canada).

[38]            ENVI, Témoignages, 16 octobre 2018, 1705 (Laura Sacks).

[39]            Ibid., 1610 (Matt Jones).

[40]            P. ex. ENVI, Témoignages, 1er novembre 2018, 1630 (Catherine Abreu); ENVI, Témoignages, 23 octobre 2018, 1735 (Keith Stewart, stratège principal en énergie, Greenpeace Canada); ENVI, Témoignages, 18 octobre 2018, 1530 (Hari Balasubramanian, associé directeur, EcoAdvisors); ENVI, Témoignages, 25 octobre 2018, 1535 (Anne‑Raphaëlle Audouin, représentante, Conseil canadien sur l’électricité renouvelable).

[41]            Gouvernements de Terre-Neuve-et-Labrador, de l’Île-du-Prince-Édouard, de la Nouvelle-Écosse, du Nouveau‑Brunswick, du Québec, de l’Ontario, de l’Alberta, de la Colombie-Britannique, du Yukon, des Territoires du Nord-Ouest, du Nunavut et du Canada, Cadre pancanadien sur la croissance propre et les changements climatiques, 2016.

[42]            Le Canada et 194 autres pays parties à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques ont conclu l’Accord de Paris le 12 décembre 2015; le Canada a ratifié cet accord le 5 octobre 2016.

[44]            Environnement et Changement climatique Canada, Document technique relatif au filet de sécurité fédéral sur la tarification du carbone, 18 mai 2017, p. 5.

[46]            ENVI, Témoignages, 1er novembre 2018, 1625 (Christopher Ragan, président, Commission de l’écofiscalité du Canada).

[47]            ENVI, Témoignages, 23 octobre 2018, 1745 (Isabelle Turcotte).

[48]            Ibid.

[49]            ENVI, Témoignages, 8 novembre 2018, 1610 (Nancy Hamzawi, sous-ministre adjointe, Direction générale des sciences et de la technologie, ministère de l’Environnement).

[50]            Envrionnement et Changement climatique Canada, Deuxième rapport annuel du Cadre pancanadien sur la croissance propre et les changements climatiques, décembre 2018.

[51]            ENVI, Témoignages, 30 janvier 2019, 1700 (Joanna Kyriazis, conseillère de direction principale, Clean Energy Canada); ENVI, Témoignages, 28 janvier 2019, 1610 (David Sawyer, agrégé supérieur, Institut pour l’IntelliProspérité).

[52]            ENVI, Témoignages, 30 janvier 2019, 1700 (Joanna Kyriazis); ENVI, Témoignages, 23 octobre 2018, 1545 (Isabelle Turcotte); ENVI, Témoignages, 8 novembre 2018, 1610 (Nancy Hamzawi); ENVI, Témoignages, 28 janvier 2019, 1610 (David Sawyer).

[53]            ENVI, Témoignages, 30 janvier 2019, 1640 (Joanna Kyriazis); ENVI, Témoignages, 1er novembre 2018, 1635 (Catherine Abreu); ENVI, Témoignages, 16 octobre 2018, 1655 (Matt Jones).

[54]            ENVI, Témoignages, 30 janvier 2019, 1700 (Joanna Kyriazis).

[55]            ENVI, Témoignages, 28 janvier 2019, 1635 (David Sawyer).

[56]            Gouvernements de Terre-Neuve-et-Labrador, de l’Île-du-Prince-Édouard, de la Nouvelle-Écosse, du Nouveau‑Brunswick, du Québec, de l’Ontario, de l’Alberta, de la Colombie-Britannique, du Yukon, des Territoires du Nord-Ouest, du Nunavut et du Canada, Cadre pancanadien sur la croissance propre et les changements climatiques, 2016.

[57]            ENVI, Témoignages, 8 novembre 2018, 1625 (Matt Jones).

[58]            ENVI, Témoignages, 1er novembre 2018, 1625 (Christopher Ragan).

[59]            ENVI, Témoignages, 23 octobre 2018, 1710 (Isabelle Turcotte); ENVI, Témoignages, 28 janvier 2019, 1545 (Andrew Leach, professeur agrégé, Alberta School of Business, University of Alberta); ENVI, Témoignages, 28 janvier 2019, 1555 (Dale Beugin, directeur général, Commission de l’écofiscalité); ENVI, Témoignages, 28 janvier 2019, 1550 (Nicholas Rivers, professeur agrégé, Université d’Ottawa); ENVI, Témoignages, 1er novembre 2018, 1710 (Christopher Ragan).

[60]            ENVI, Témoignages, 16 octobre 2018, 1705 (Laura Sacks).

[61]            ENVI, Témoignages, 28 janvier 2019, 1550 (Nicholas Rivers).

[62]            ENVI, Témoignages, 28 janvier 2019, 1545 (Andrew Leach); ENVI, Témoignages, 28 janvier 2019, 1555 (Dale Beugin); ENVI, Témoignages, 30 janvier 2019, 1545 (Joanna Kyriazis).

[63]            ENVI, Témoignages, 28 janvier 2019, 1555 (Dale Beugin).

[64]            Ibid., 1600.

[65]            ENVI, Témoignages, 30 janvier 2019, 1545 (Joanna Kyriazis).

[66]            Ibid., 1550.

[67]            Ibid., 1605 (Todd Myers, directeur de l’environnement, Washington Policy Center).

[68]            Ibid., 1600.

[69]            Ibid.

[70]            ENVI, Témoignages, 28 janvier 2019, 1550 (Nicholas Rivers).

[71]            P. ex., ENVI, Témoignages, 28 janvier 2019, 1710 (Dale Beugin).

[72]            ENVI, Témoignages, 28 janvier 2019, 1710 (Nicholas Rivers).

[73]            Ibid., 1710 (Andrew Leach).

[74]            Ibid., 1715 (Mark Cameron, directeur exécutif, Clean Prosperity).

[75]            ENVI, Témoignages, 23 octobre 2018, 1705 (Keith Stewart).

[76]            Ibid., 1710 (Isabelle Turcotte).

[77]            ENVI, Témoignages, 1er novembre 2018, 1625 (Christopher Ragan).

[78]            ENVI, Témoignages, 30 janvier 2019, 1640 (Joanna Kyriazis).

[79]            P. ex., ENVI, Témoignages, 1er novembre 2018, 1625 (Christopher Ragan); ENVI, Témoignages, 28 janvier 2019, 1550, 1645 (Nicholas Rivers); ENVI, Témoignages, 28 janvier 2019, 1720 (Dale Beugin).

[80]            ENVI, Témoignages, 16 octobre 2018, 1715 (Laura Sacks); ENVI, Témoignages, 23 octobre 2018, 1615 (Isabelle Turcotte); ENVI, Témoignages, 25 octobre 2018, 1610 (Patrick Bateman, représentant, Conseil canadien sur l’électricité renouvelable).

[81]            ENVI, Témoignages, 28 janvier 2019, 1635 (Dale Beugin).

[82]            Ibid., 1635 (David Sawyer).

[83]            ENVI, Témoignages, 1er novembre 2018, 1715 (Christopher Ragan).

[84]            ENVI, Témoignages, 30 janvier 2019, 1700 (Joanna Kyriazis).

[85]            ENVI, Témoignages, 23 octobre 2018, 1705 (Keith Stewart).

[86]            ENVI, Témoignages, 25 octobre 2018, 1535 (Patrick Bateman).

[87]            ENVI, Témoignages, 1er novembre 2018, 1625 (Christopher Ragan).

[88]            P. ex., ENVI, Témoignages, 28 janvier 2019, 1655 (Dale Beugin); ENVI, Témoignages, 28 janvier 2019, 1545 (Andrew Leach); ENVI, Témoignages, 30 janvier 2019, 1635 (Joanna Kyriazis).

[89]            ENVI, Témoignages, 28 janvier 2019, 1655 (Dale Beugin).

[90]            ENVI, Témoignages, 23 octobre 2018, 1710 (Isabelle Turcotte).

[91]            ENVI, Témoignages, 25 octobre 2018, 1610 (Patrick Bateman).

[92]            ENVI, Témoignages, 16 octobre 2018, 1715 (Laura Sacks).

[93]            ENVI, Témoignages, 30 octobre 2018, 1550 (Chris Turner, à titre personnel).

[94]            Ibid., 1545 (Chris Turner).

[95]            Ibid., 1550.

[96]            ENVI, Témoignages, 1er novembre 2018, 1710 (Michael Andrade, président et chef de la direction, Morgan Solar Incorporated, Conseil des innovateurs canadiens).

[97]            ENVI, Témoignages, 18 octobre 2018, 1620 (Hari Balasubramanian).

[98]            ENVI, Témoignages, 28 janvier 2019, 1655 (Dale Beugin).

[99]            ENVI, Témoignages, 30 octobre 2018, 1405 (John Drexhage).

[100]          P. ex., ENVI, Témoignages, 28 janvier 2019, 1545 (Andrew Leach); ENVI, Témoignages, 30 janvier 2019, 1615 (Joanna Kyriazis).

[101]          ENVI, Témoignages, 28 janvier 2019, 1545 (Andrew Leach).

[102]          ENVI, Témoignages, 30 janvier 2019, 1550 (Joanna Kyriazis).

[103]          ENVI, Témoignages, 1er novembre 2018, 1625 (Christopher Ragan).

[104]          Ibid.

[105]          ENVI, Témoignages, 28 janvier 2019, 1705 (Dale Beugin).

[106]          Ibid., 1605 (Mark Cameron).

[107]          ENVI, Témoignages, 30 janvier 2019, 1600 (Todd Myers).

[108]          Ibid., 1605.

[109]          ENVI, Témoignages, 1er novembre 2018, 1625 (Christopher Ragan).

[110]          ENVI, Témoignages, 25 octobre 2018, 1550 (Michael Binnion, à titre personnel).

[111]          ENVI, Témoignages, 28 janvier 2019, 1545 (Andrew Leach, professeur agrégé, Alberta School of Business, University of Alberta).

[112]          ENVI, Témoignages, 23 octobre 2018, 1545 (Isabelle Turcotte); ENVI, Témoignages, 25 octobre 2018, 1535 (Patrick Bateman); ENVI, Témoignages, 1er novembre 2018, 1625 (Christopher Ragan).

[113]          ENVI, Témoignages, 30 janvier 2019, 1540 (Peter Boag, président et chef de la direction, Association canadienne des carburants).

[114]          Ibid., 1535.

[115]          Ibid., 1540.

[116]          Ibid., 1555 (Massimo Bergamini, président-directeur général, Conseil national des lignes aériennes du Canada).

[117]          Ibid., 1555 (Geoffrey Tauvette, directeur, Carburant et Environnement, Comité environnemental).

[118]          Ibid.

[119]          Ibid.

[120]          Ibid., 1555 (Massimo Bergamini).

[121]          Ibid.

[122]          Ibid., 1705 (Geoffrey Tauvette).

[123]          Ibid., 1555 (Massimo Bergamini).

[124]          ENVI, Témoignages, 23 octobre 2018, 1550 (Tyler McCann, directeur général par intérim, Producteurs de grains du Canada).

[125]          Ibid.

[126]          Ibid., 1555.

[127]          Ibid., 1600.

[128]          Ibid., 1555.

[129]          ENVI, Témoignages, 28 janvier 2019, 1555 (Nicholas Rivers).

[130]          Ibid., 1715 (David Sawyer).

[131]          Ibid., 1715 (Nicholas Rivers).

[132]          Ibid., 1600 (Mark Cameron).

[133]          ENVI, Témoignages, 30 janvier 2019, 1625 (Joanna Kyriazis)

[134]          ENVI, Témoignages, 28 janvier 2019, 1650 (Dale Beugin).

[135]          ENVI, Témoignages, 30 janvier 2019, 1540 (Joanna Kyriazis).

[136]          ENVI, Témoignages, 18 octobre 2018, 1625 (Hari Balasubramanian).

[137]          ENVI, Témoignages, 30 octobre 2018, 1630 (Chris Turner).

[138]          ENVI, Témoignages, 28 janvier 2019, 1605 (Mark Cameron).

[139]          Ibid., 1600.

[140]          ENVI, Témoignages, 16 octobre 2018, 1715 (Laura Sacks).

[141]          ENVI, Témoignages, 1er novembre 2018, 1655 (Catherine Abreu).

[142]          P. ex., ENVI, Témoignages, 23 octobre 2018, 1630 (Isabelle Turcotte); ENVI, Témoignages, 28 janvier 2019, 1600 (Mark Cameron).

[143]          ENVI, Témoignages, 25 octobre 2018, 1535 (Anne-Raphaëlle Audouin).

[144]          P. ex., ENVI, Témoignages, 16 octobre 2018, 1625 (Matt Jones).

[145]          ENVI, Témoignages, 30 octobre 2018, 1700 (John Drexhage).

[146]          ENVI, Témoignages, 23 octobre 2018, 1545 (Isabelle Turcotte).

[147]          ENVI, Témoignages, 16 octobre 2018, 1600 (Catherine Stewart, directrice générale, Changement climatique international et négociatrice en chef en matière de changement climatique, ministère de l’Environnement).

[148]          Justin Trudeau, premier ministre du Canada, « Le premier ministre annonce un soutien pour le financement de la lutte contre les changements climatiques », Nouvelles, 27 novembre 2015.

[149]          Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques, Accord de Paris, article 9, 12 décembre 2015.

[150]          Gouvernement du Canada, L’Accord de Paris.

[151]          Gouvernements de Terre-Neuve-et-Labrador, de l’Île-du-Prince-Édouard, de la Nouvelle-Écosse, du Nouveau-Brunswick, du Québec, de l’Ontario, de l’Alberta, de la Colombie-Britannique, du Yukon, des Territoires du Nord‑Ouest, du Nunavut et du Canada, Cadre pancanadien sur la croissance propre et les changements climatiques, 2016.

[152]          ENVI, Témoignages, 16 octobre 2018, 1540 (Anar Mamdani, directrice, Environnement, ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement).

[153]          ENVI, Témoignages, 18 octobre 2018, 1540 (Naomi Johnson, conseillère en politiques, Banque canadienne de grains).

[154]          ENVI, Témoignages, 18 octobre 2018, 1540 (Naomi Johnson); ENVI, Témoignages, 1er novembre 2018, 1635 (Catherine Abreu); Shaughn McArthur (Responsable des politiques et de l’influence, CARE Canada), « #CanAdapt : Vers une politique internationale sur les changements climatiques sensible à la sexospécificité conçue au Canada », réponse écrite au Comité permanent de l’environnement et du développement durable de la Chambre des communes [Réponse écrite de CARE Canada], novembre 2018; Canadian Coalition on Climate Change and Development, Réponse écrite au Comité permanent de l’environnement et du développement durable de la Chambre des communes [Réponse écrite de C4D], 2 novembre 2018.

[155]          ENVI, Témoignages, 1er novembre 2018, 1655 (Dominique Charron, directrice, Agriculture et environnement, Programmes et partenariats, Centre de recherches pour le développement international).

[156]          Ibid.

[157]          ENVI, Témoignages, 25 octobre 2018, 1540 (Laurence Blandford).

[158]          ENVI, Témoignages, 18 octobre 2018, 1540 (Naomi Johnson); ENVI, Témoignages, 23 octobre 2018, 1535 (Keith Stewart); ENVI, Témoignages, 1er novembre 2018, 1635 (Catherine Abreu).

[159]          Canadian Coalition on Climate Change and Development (2018), Réponse écrite de C4D.

[160]          ENVI, Témoignages, 18 octobre 2018, 1540 (Naomi Johnson); ENVI, Témoignages, 1er novembre 2018, 1635 (Catherine Abreu).

[161]          ENVI, Témoignages, 16 octobre 2018, 1545 (Anar Mamdani); ENVI, Témoignages, 1er novembre 2018, 1640 (Dominique Charron).

[162]          Shaughn McArthur (2018), Réponse écrite de CARE Canada; Canadian Coalition on Climate Change and Development (2018), Réponse écrite de C4D.

[163]          ENVI, Témoignages, 25 octobre 2018, 1540 (Laurence Blandford).

[164]          ENVI, Témoignages, 16 octobre 2018, 1550 (Anar Mamdani).

[165]          Ibid.

[166]          ENVI, Témoignages, 18 octobre 2018, 1545 (Naomi Johnson); ENVI, Témoignages, 25 octobre 2018, 1540 (Laurence Blandford).

[167]          ENVI, Témoignages, 18 octobre 2018, 1540 (Naomi Johnson).

[168]          ENVI, Témoignages, 18 octobre 2018, 1545 (Naomi Johnson); ENVI, Témoignages, 18 octobre 2018, 1615 (Hari Balasubramanian); ENVI, Témoignages, 23 octobre 2018, 1535 (Keith Stewart); ENVI, Témoignages, 1er novembre 2018, 1710 (Catherine Abreu).

[169]          Shaughn McArthur, 2018, Réponse écrite de CARE Canada; Canadian Coalition on Climate Change and Development, 2018, Réponse écrite de C4D.

[170]          ENVI, Témoignages, 1er novembre 2018, 1635 (Catherine Abreu); ENVI, Témoignages, 23 octobre 2018, 1535 (Keith Stewart).

[171]          Aid Watch Canada, The Reality of Canada’s International Climate Finance, 2010 to 2015: A Benchmarking Report, novembre 2017 [en anglais seulement]; Canadian Coalition on Climate Change and Development, 2018, Réponse écrite de C4D.

[172]          P. ex., ENVI, Témoignages, 23 octobre 2018, 1535 (Keith Stewart); Canadian Coalition on Climate Change and Development, 2018, Réponse écrite de C4D.

[173]          ENVI, Témoignages, 30 octobre 2018, 1535 (Silvia Maciunas).

[174]          Ibid., 1540.

[175]          Ibid.

[176]          Ibid.

[177]          ENVI, Témoignages, 23 octobre 2018, 1535 (Keith Stewart).

[178]          ENVI, Témoignages, 1er novembre 2018, 1635 (Catherine Abreu).

[179]          ENVI, Témoignages, 30 octobre 2018, 1545 (Silvia Maciunas).

[180]          Ibid., 1535.

[181]          Ibid.

[182]          Ibid.

[183]          Programme des Nations Unies pour l’environnement et Organisation mondiale du commerce, « Partie IV : Les politiques nationales visant à atténuer le changement climatique et à s’adapter à ses effets et leurs implications pour le commerce », Commerce et changement climatique, s.d.

[184]          ENVI, Témoignages, 16 octobre 2018, 1450 (Matt Jones).

[185]          Ibid.

[186]          ENVI, Témoignages, 25 octobre 2018, 1555 (Laurence Blandford).

[187]          Ibid., 1550 (Michael Binnion).

[188]          Ibid.

[189]          ENVI, Témoignages, 18 octobre 2018, 1640 (Hari Balasubramanian).

[190]          ENVI, Témoignages, 16 octobre 2018, 1600 (Catherine Stewart).

[191]          P. Cozzi, S. Davis et L. Blandford, Centre for Clean Air Policy, Transfers in the Paris Agreement: Can they enable greater ambition?, 5 octobre 2016 [traduction].

[192]          ENVI, Témoignages, 30 octobre 2018, 1610 (John Drexhage).

[193]          P. ex., ENVI, Témoignages, 23 octobre 2018, 1535 (Keith Stewart); ENVI, Témoignages, 23 octobre 2018, 1550 (Isabelle Turcotte).

[194]          P. Cozzi, S. Davis et L. Blandford, Centre for Clean Air Policy, Transfers in the Paris Agreement: Can they enable greater ambition?, 5 octobre 2016 [en anglais seulement].

[195]          ENVI, Témoignages, 30 octobre 2018, 1555 (John Drexhage).

[196]          P. ex., ENVI, Témoignages, 30 octobre 2018, 1555 (John Drexhage).

[197]          P. ex., ENVI, Témoignages, 23 octobre 2018, 1750 (Isabelle Turcotte); ENVI, Témoignages, 1er novembre 2018, 1705 (Catherine Abreu).

[198]          ENVI, Témoignages, 23 octobre 2018, 1735 (Keith Stewart).

[199]          ENVI, Témoignages, 30 octobre 2018, 1600 (John Drexhage).

[200]          Ibid.

[201]          Ibid., 1555.

[202]          ENVI, Témoignages, 23 octobre 2018, 1750 (Isabelle Turcotte).

[203]          ENVI, Témoignages, 25 octobre 2018, 1535 (Patrick Bateman).

[204]          ENVI, Témoignages, 30 octobre 2018, 1555 (John Drexhage).

[205]          Ibid.

[206]          ENVI, Témoignages, 8 novembre 2018, 1625 (Matt Jones).

[207]          ENVI, Témoignages, 18 octobre 2018, 1530 (Hari Balasubramanian).

[208]          ENVI, Témoignages, 1er novembre 2018, 1705 (Catherine Abreu).

[209]          Ibid., 1635.

[210]          ENVI, Témoignages, 18 octobre 2018, 1530 (Hari Balasubramanian).

[211]          ENVI, Témoignages, 1er novembre 2018, 1625 (Christopher Ragan).

[212]          ENVI, Témoignages, 8 novembre 2018, 1605 (Nancy Hamzawi).

[213]          Ibid., 1625 (Greg Flato, chercheur principal, Centre canadien de la modélisation et de l’analyse climatique, Direction générale des sciences et de la technologie, ministère de l’Environnement).

[214]          ENVI, Témoignages, 16 octobre 2018, 1540 (Isabelle Bérard).

[215]          ENVI, Témoignages, 1er novembre 2018, 1635, (Catherine Abreu).

[216]          ENVI, Témoignages, 16 octobre 2018, 1540 (Isabelle Bérard).

[217]          Ibid., 1540; 1545.

[218]          Ibid., 1540 (Lucie Desforges, directrice générale, Direction des affaires bilatérales et commerce, ministère de l’Environnement).