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SDIR Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Sous-comité des droits internationaux de la personne du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international


NUMÉRO 031 
l
2e SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 3 juin 2014

[Enregistrement électronique]

  (1320)  

[Français]

    Bonjour, chers collègues. Il y a quorum.
    Nous sommes le Sous-comité des droits internationaux de la personne du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international. Nous tenons aujourd'hui notre 31e séance.

[Traduction]

    Nous poursuivons notre examen des droits de la personne en Érythrée.
    Au nom de tous les membres du comité, je tiens d'abord à présenter nos excuses aux témoins pour le début tardif de la séance. Je vois que nous avons 20 minutes de retard. C'est attribuable en partie au fait que la pièce que nous occupons n'est pas à proximité de la Colline du Parlement, mais c'est surtout à cause d'un vote non prévu à la Chambre, auquel tous les partis devaient participer; nous avons dû attendre que ce soit terminé, puis revenir ici.
    Ce retard ne reflète en rien l'importance de cette question, ni à quel point nous la prenons au sérieux. C'est simplement le résultat de l'une de ces circonstances malheureuses.
    Je constate, d'après le nombre de personnes présentes, que ce sujet suscite un intérêt considérable. Je vais donc présenter nos témoins sans plus tarder.
    Aujourd'hui, nous accueillons deux représentants de la Coalition des communautés et organisations érythréennes du Canada, MM. Lambros Kyriakakos et Senai Iman, qui sont respectivement président et directeur juridique de cette organisation.
    Messieurs, nous allons vous donner la parole pour votre déclaration préliminaire, après quoi nous passerons aux questions des membres du sous-comité.
    J'informe les membres du sous-comité qu'étant donné les contraintes de temps, je vais demander à la greffière de vous indiquer qui doit partir tôt pour les déclarations des députés, afin de faciliter les choses à ceux qui doivent le faire. Nous essaierons de modifier l'ordre des interventions en conséquence et nous nous permettrons de dépasser l'heure à laquelle nous terminons normalement la séance, soit 14 heures.
    Sur ce, j'inviterais nos deux témoins à commencer, s'il vous plaît.
    Je vous remercie beaucoup de l'explication. Vos excuses sont acceptées, pourvu que nous disposions du temps nécessaire pour vous présenter notre position. Merci.
    Monsieur le président Reid, honorables membres du sous-comité, c'est un honneur pour moi de comparaître aujourd'hui devant cette vénérable institution. Je m'appelle Lambros Kyriakakos et je suis président par intérim de la Coalition des communautés et organisations érythréennes du Canada. Je suis venu du Manitoba, en tant que fier Canadien d'origine érythréenne, pour vous présenter mon exposé. Je veux aussi profiter de cette occasion pour souligner l'importance des travaux de ce comité, que nous suivons toujours de près.
    Il y a un peu plus de deux semaines, les communautés canadiennes de partout au pays ont pris le temps de célébrer notre jour de l'Indépendance. L'Érythrée est un pays ayant acquis sa liberté à un prix fort élevé. Pour les Canadiens d'origine érythréenne, il est extrêmement important de suivre le développement de l'Érythrée et d'y participer. La question des droits de la personne est devenue une priorité pour les Érythréens bien avant que le pays n'obtienne son indépendance, et nous continuons à nous pencher de façon équitable sur la question.
    Avec votre permission, j'aimerais présenter le document écrit que voici à titre de mémoire.
    La CECCO, notre organisation, représente sept grands groupes communautaires au Canada, dont la plupart existent depuis une trentaine d'années, et offre des services à environ 30 000 Canadiens d'origine érythréenne. Nous sommes un organisme national qui représente les communautés et organisations canado-érythréennes. Notre but premier consiste à représenter nos communautés, à unir nos voix, à favoriser de bonnes relations entre l'Érythrée et le Canada et entre les gens de ces deux pays, ainsi qu'à promouvoir les échanges culturels et les relations commerciales.
    Je vais passer directement à notre premier problème: l'occupation du territoire souverain de l'Érythrée. Je dirai d'abord que tout débat relatif aux droits de la personne en Érythrée est indissociable de la reconnaissance de l'occupation continue et à long terme du territoire de l'Érythrée par l'Éthiopie, en violation et au mépris du droit international.
    Je vous parle d'abord de cette question surtout parce que jusqu'à maintenant, les discussions au sujet des droits de la personne en Érythrée ont principalement porté sur les effets de la crise liée à la sécurité nationale, et non sur ses causes. Quand nous parlons de l'incidence de la sécurité nationale sur le service militaire national, la migration et l'expression des droits, il est utile d'examiner le lien de causalité entre le contexte géopolitique de la Corne de l'Afrique et le développement restreint de l'Érythrée.
    Il ne s'agit pas d'une idée nouvelle que nous pouvons revendiquer; cela vient de Canadiens fort respectés qui ont eu l'occasion d'engager une discussion sur la paix dans la Corne de l'Afrique. Je vais vous citer un extrait du témoignage de l'honorable Lloyd Axworthy devant votre comité:
... ce conflit qui perdure constitue une force si puissante et si considérable qu'il freine tous les efforts, que ce soit relativement aux droits de la personne, en vue de réduire la pauvreté ou de réformer l'agriculture. C'est un gorille de 400 kilos qui vous bloque la route et que vous ne pouvez contourner. Tant que ce conflit ne sera pas résolu, il fera obstacle à tous les efforts déployés dans ces autres domaines.
    C'était le 24 mars 2005.
    Cela crée un dangereux précédent et constitue une menace constante pour l'indépendance, la liberté et les droits de la personne de l'Érythrée. Il ne s'agit pas seulement du non-respect du droit international et des obligations liées au traité; en soi, cela représente une menace constante à la paix et à la sécurité dans la région.
    Un appel semblable a également été lancé récemment par l'ancienne juge de la Cour suprême du Canada, Louise Arbour... Selon elle, la communauté internationale a commis une grave erreur, après la guerre de 1998 entre l'Érythrée et l'Éthiopie, en n'exerçant pas de pressions plus importantes sur l'Éthiopie afin qu'elle donne suite à la conclusion, approuvée par la loi, de la Commission de la frontière internationale qui reconnaissait que le territoire disputé appartenait à l'Érythrée. La majorité des Érythréens croient que l'occupation continue du territoire érythréen souverain constitue une violation des droits de toute la population, mais surtout des personnes qui sont, encore aujourd'hui, incapables de regagner leurs terres.
    Ces faits sont importants, car ce qui en découle a une grande incidence sur la situation des droits de la personne en Érythrée; notre gouvernement, le gouvernement des États-Unis et les partenaires européens appuient l'Éthiopie, peu importe ce qu'elle fait, et ils n'agissent pas de bonne foi pour assurer la paix dans la Corne de l'Afrique dont a parlé M. Axworthy.

  (1325)  

    Les conséquences des décisions du gouvernement sur les Canadiens d'origine érythréenne sont un autre élément que nous aimerions porter à votre attention.
    Nous sommes également ici pour discuter de ce qui nous touche directement en tant que Canadiens d'origine érythréenne. Comme l'a dit le professeur Richard Reid, de l'Université de Londres, au sujet de la sanction imposée à l'Érythrée par les Nations Unies, et plus tard appliquée par le gouvernement du Canada: « La sanction imposée à l'Érythrée est profondément inutile. Elle est dénuée d'imagination ».
    À notre avis, l'adoption de la résolution 1907 du Conseil de sécurité des Nations Unies par le gouvernement canadien et le fait que le gouvernement a par la suite gardé le silence relativement à notre droit d'exercer notre double citoyenneté ont assurément mené à beaucoup de battage médiatique négatif et à une fausse perception de ce que sont les Canadiens d'origine érythréenne. Nous sommes une communauté travaillante et pacifique, qui a contribué à faire du Canada une véritable société multiculturelle.
    Parallèlement, nous sommes fiers de nos racines érythréennes et nous sommes nombreux à maintenir des liens culturels et économiques étroits avec notre pays ancestral. À cause de cela, nous avons été témoins de ce qu'il convient de décrire comme des déclarations inexactes et inéquitables, et pire encore, malveillantes et abusives dans les médias. Par exemple, le National Post et le Winnipeg Free Press ont publié des titres comme: « Eritrea raising money in Canada, financing terrorists to attack Canada » et « Protest links seminar to Eritrean terrorists ». On parlait de nous, de nous qui sommes ici, dans cette pièce, pour représenter nos communautés.
    Les conséquences sur nos droits ont été importantes et presque immédiates. Par exemple, certaines municipalités ont privé notre organisation du privilège de déployer le drapeau érythréen, symbole apolitique appartenant à tous les Canadiens d'origine érythréenne, durant notre journée nationale de l'Indépendance, en invoquant les sanctions.
    Il faut aussi tenir compte d'un problème plus grave comme le vide qui existe actuellement par rapport à notre capacité de verser des impôts à l'État de l'Érythrée et d'envoyer des fonds à nos proches. Nous avons des membres qui détiennent des permis d'exploitation d'entreprise en Érythrée, d'autres qui veulent réclamer un héritage ou posséder une propriété et qui ne peuvent le faire parce que le gouvernement du Canada ne reconnaît pas notre droit de le faire. En raison de cette confusion, les grandes banques ont décidé de ne prendre aucun risque en ce qui concerne les transferts de fonds.
    La confusion et la controverse sont l'oeuvre, en général, d'un groupe limité quoique déterminé d'activistes politiques expatriés qui vivent maintenant au Canada et qui ne voient aucun inconvénient à se servir de nos communautés pour importer au Canada leurs conflits politiques avec le gouvernement érythréen. Ce ne sont pas des personnes qui participent à nos activités ou qui nous aident à mettre en oeuvre des programmes sociaux. Ils se plaisent à tenter d'affaiblir nos communautés afin d'amener la population du Canada à voir d'un bon oeil un changement de régime en Érythrée.
    En ce qui concerne l'impôt de la diaspora, les Canadiens d'origine érythréenne maintiennent des liens étroits avec l'Érythrée, mais on nous empêche d'exercer nos droits à la double citoyenneté en payant l'impôt de reconstruction de 2 % que nous versons volontairement à l'Érythrée chaque année. Cet impôt nous permet de contribuer au développement du pays et d'avoir accès à d'importants services et droits de propriété en Érythrée.
    Bien que le gouvernement canadien n'empêche pas directement nos membres de payer l'impôt, il n'a pas répondu lorsque nous lui avons demandé de se prononcer expressément sur la légalité de cet impôt; le manque de clarté entourant cette question fait que les banques permettent difficilement aux Érythréens d'exercer plus efficacement leurs droits à la double citoyenneté.
    Il convient de mentionner que récemment, un comité parlementaire suédois semblable au vôtre a reconnu le droit de ses citoyens de verser l'impôt de reconstruction de 2 % à l'Érythrée. La décision elle-même vient appuyer la plupart des études que nous avons menées, mais étant donné qu'il s'agit d'une décision étrangère, elle a peu de valeur probante. Nous accueillerions très favorablement une procédure qui nous permettrait de demander un énoncé juridique ou une interprétation technique de la part du comité qui fournirait des précisions sur la légalité de l'impôt, un peu comme ce qui a été fait par le parlement suédois.

  (1330)  

    Nous aimerions porter à votre attention le problème du passage de clandestins. Le Canada est signataire de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée. La traite de personnes dans la région de la Corne de l'Afrique a pris des proportions démesurées, et rien n'a encore été fait de la part du Canada, de notre part. L'Érythrée réclame une enquête dirigée par les Nations Unies sur la traite de personnes dans la Corne de l'Afrique. Nous exhortons le Canada à prendre l'initiative de demander une enquête indépendante des Nations Unies sur ce problème dans cette région.
    En conclusion, nous aimerions que la Coalition des communautés et organisations érythréennes participe à la création d'un terrain plus propice à l'amélioration des relations érythréennes-canadiennes et aux enjeux liés aux droits de la personne dans la Corne de l'Afrique. La consultation de notre organisation permettra d'offrir une perspective équilibrée sur l'Érythrée et les questions relatives aux droits de la personne.
    Nous sommes attachés à nos identités canadienne et érythréenne. Nous n'avons jamais été menacés ni harcelés pour payer l'impôt de reconstruction de 2 % au consulat érythréen. Ceux d'entre nous qui paient cet impôt le font de leur plein gré, en reconnaissant le sacrifice requis pour reconstruire une nation déchirée par la guerre.
    Jusqu'à maintenant, aucune allégation d'intimidation ou de harcèlement n'a mené au dépôt d'accusations par le ministère public. Les membres de notre communauté qui ne souhaitent pas conserver leurs droits liés à la citoyenneté ne sont pas tenus de verser des impôts à l'État érythréen. Ils peuvent aller là-bas. Ils peuvent visiter leur famille. Ils peuvent faire tout ce qu'ils veulent. L'impôt de reconstruction de 2 % imposé aux citoyens érythréens vivant à l'étranger découle du processus référendaire en Érythrée et a été inspiré par la diaspora érythréenne. Cela a par la suite été inséré dans la loi grâce à la proclamation no  17/1991 et 67/1995 sur les formulaires fiscaux.
    Nous avons aujourd'hui trois objectifs. Premièrement, nous voulons vous exhorter à exercer des pressions auprès du gouvernement de l'Éthiopie afin qu'il se conforme à la décision de la Commission de la frontière entre l'Érythrée et l'Éthiopie et qu'il retire ses forces du territoire érythréen souverain. L'occupation continue du territoire érythréen constitue une violation des droits de la population érythréenne même.
    En outre, nous vous rappelons que le fait que l'Éthiopie ne se conforme pas au droit international et aux obligations du traité représente une menace continue à la paix et à la sécurité dans la région et crée un dangereux précédent. En 2005, le Comité permanent des affaires étrangères et du Commerce international a reconnu que la résolution de ce conflit était essentielle à l'amélioration de la situation des droits de la personne dans la région. Il serait difficile de faire avancer les choses sans d'abord régler le problème de l'occupation.
    Deuxièmement, nous voudrions demander la protection de nos droits, en tant que Canadiens d'origine érythréenne — la mauvaise interprétation de la sanction des Nations Unies dans la résolution 1907 et son application par le gouvernement canadien portent atteinte aux droits des Canadiens ayant la double citoyenneté —, la protection de nos droits garantis par la Charte canadienne des droits et libertés.
    Troisièmement, nous demandons au Canada de prendre les devants et de demander une enquête indépendante des Nations Unies sur la traite de personnes et le trafic d'organes dans la Corne de l'Afrique, le Sahara et le Sinaï.
    Enfin, nous demandons que la CECCO soit consultée pour la création d'un terrain plus propice à l'amélioration des relations érythréennes-canadiennes dans l'intérêt des deux pays et de nos communautés respectives.
    Au cours de ses 23 premières années d'existence en tant qu'État souverain et au cours de sa longue et riche histoire, l'Érythrée a subi de nombreuses épreuves, qu'elle a su surmonter. Dans l'avenir, comme l'Érythrée en a fièrement l'habitude, nous continuerons certainement de relever les défis qui se posent à nous, et la diaspora se tiendra aux côtés de nos deux nations. Mais nous implorons le Canada de participer à cet objectif de manière solidaire et non antagoniste.
    Je vous remercie de votre attention.

  (1335)  

    Merci.
    Dois-je conclure, monsieur Iman, que vous n'avez pas d'exposé à faire, ou en avez-vous un également?

[Français]

    C'est correct, monsieur le président, je n'ai rien à ajouter. J'aurais dû mentionner au début que je voulais partager mon temps de parole avec M. Kyriakakos. On peut donc procéder aux questions et réponses.
    C'est parfait, merci.

[Traduction]

    Très bien, chers collègues, nous avons moins de temps que d'habitude. Je vous propose de procéder de la façon suivante, et j'espère que vous trouverez cela acceptable. Ce sera quatre minutes chacun, pour les questions et les réponses, ce qui dans les faits signifie une question, une réponse. Vous devrez vérifier auprès de moi s'il vous reste assez de temps pour une deuxième question.
    Ensuite, étant donné que M. Cotler doit se rendre à la Chambre des communes pour une déclaration en vertu de l'article 31 du Règlement, que c'est un peu loin et, sans trop m'avancer, que M. Cotler n'est pas le député le plus jeune de la Chambre des communes...
    Je n'ai jamais remarqué.
    ... je vais lui demander de parler en premier, puis nous reviendrons à l'ordre habituel.
    Merci, monsieur le président.
    Je veux poser une question sur la situation des droits de la personne en Érythrée, dont ont traité les témoins que le comité a entendus, et, plus particulièrement, l'examen périodique universel du Conseil des droits de l'homme des Nations Unies et la représentante spéciale sur la situation des droits de la personne en Érythrée. En fait, cette dernière a fait part de préoccupations relatives aux droits de la personne dans son rapport de mai 2013, parlant d'exécutions extra-judiciaires, de disparitions forcées, de personnes tenues au secret, d'arrestations et de détentions arbitraires, de torture — et la liste s'allonge — et de l'absence de libertés fondamentales.
    Il y a deux mois, le Canada a présenté des recommandations dans le cadre de l'examen périodique universel du Conseil des droits de l'homme des Nations Unies, dans lesquelles il demande instamment à l'Érythrée de prendre les mesures nécessaires pour assurer le respect des droits de la personne, notamment les droits des femmes, les droits politiques, les droits des détenus, la liberté d'expression et les droits des minorités et des communautés religieuses qui méritent d'être protégées des persécutions.
    Que pensez-vous de tous ces rapports des instances internationales et du gouvernement du Canada sur la situation des droits de la personne en Érythrée?

  (1340)  

    En ce qui concerne précisément la représentante spéciale des Nations Unies sur les droits de la personne, 300 communautés des quatre coins du monde ont fait appel à elle pour la rencontrer aux fins de rapport. Elle a rejeté les demandes de ces communautés, de communautés érythréennes, obtenant ses preuves de réfugiés vivant en Éthiopie, à Djibouti. Le moins que l'on puisse dire, c'est que la crédibilité de ce rapport est hautement politisée.
    Qu'en est-il du fait que le rapport de la représentante spéciale a été corroboré, voir élargi, par le département d'État des États-Unis, la Commission des États-Unis sur la liberté religieuse internationale, Human Rights Watch, Amnistie Internationale et d'autres ONG que je pourrais nommer? Autrement dit, il n'y a pas que la représentante spéciale des Nations Unies que la situation préoccupe, mais aussi d'autres gouvernements, des groupes de défense des droits de la personne et, en fait, notre propre gouvernement, qui ont joint leurs voix à la sienne pour formuler les mêmes critiques.
    J'aimerais répondre à votre question en admettant le fait que nous sommes des communautés qui fournissent des renseignements en fonction de faits que nous connaissons. Que font les communautés canado-érythréennes? Je représente la communauté canado-érythréenne de Winnipeg, qui a parrainé 2 500 réfugiés. Il s'agit de la deuxième génération de réfugiés. Quand nous les parrainons, leurs opinions politiques diffèrent de celles de ceux qui les font venir au Canada. Nous agissons en fonction de critères humanitaires. Les relations entre les deux générations ont une incidence. Les gens qui affirment souffrir sont aidés par des gens qui ont des opinions politiques diamétralement différentes. Nous guérissons nos blessures à notre manière.
    Les rapports parus dans le monde ne témoignent pas de la réalité en Érythrée. Il ne fait aucun doute qu'on doit y améliorer les droits de la personne, mais les rapports ne rendent pas compte de la réalité en raison de préjugés culturel et chronologique. Le préjugé chronologique concerne les jeunes sans distinction entre le Nord et le Sud. Des millions d'Africains qui traversent la Méditerranée, combien sont des Érythréens? Analyse-t-on les droits de la personne en fonction de la torture ou de la persécution, ou le fait-on en fonction de l'exode des cerveaux et de la migration en Afrique?
    L'histoire de l'Érythrée entre également en jeu. Nous sommes ici aujourd'hui, et nous sommes la première génération. Nous avons été persécutés parce que nous avons dit que nous sommes Érythréens. Nous avons survécu et nous sommes vivants parce que quand nous nous sommes dits Érythréens, aucune balle ne nous a atteints. Ceux qui sont restés en Érythrée ont dû vivre sous la pluie de napalm de l'Union soviétique. Le monde entier est resté coi.
    Nous avons surmonté la crise et nous sommes devenus indépendants. Mais nous sommes toujours menacés. En 1961, nos institutions ont été abolies. L'Érythrée a été désinstitutionnalisée pendant l'occupation éthiopienne et même avant. Nous ne disposons pas des institutions pour instituer des droits de la personne et s'attaquer aux problèmes à cet égard, comme on le fait en Occident. Les critères sont donc entachés d'un préjugé chronologique, parce que nous établissons des critères au Canada pour juger les gens en Érythrée. Tous les rapports qui ont été préparés contiennent ces préjugés chronologique et culturel.

  (1345)  

    Nous devrons interrompre cette réponse, je le crains. Nous avons dépassé de beaucoup le temps prévu pour cette question.
    Veuillez m'excuser.
    Il n'y a pas de mal. Je sais que vous tentez de donner une réponse complète.
    Si vous désirez continuer de traiter d'un point dans une autre réponse, vous pouvez toujours le faire en répondant à une autre question.
    Pardonnez-moi d'avoir parlé trop longtemps.
    Monsieur Sweet, vous avez la parole.
    Monsieur Kyriakakos, pourriez-vous expliquer à mes collègues la relation entre la Coalition des communautés et organisations érythréennes du Canada et le gouvernement actuel de l'Érythrée?
    Nous formons une coalition de nombreuses communautés de toutes les régions du Canada, lesquelles ne sont pas homogènes en ce qui concerne la politique érythréenne ou canadienne. Nous comptons parmi nous des gens de toutes opinions sur chaque facette de la vie politique. Tous les gens s'entendent toutefois au sujet des questions nationales en Érythrée, car tous ont immigré au Canada pendant l'occupation du pays au cours de la guerre de 30 ans. C'est notre point de référence commun. Nous ne traitons pas de politique au sein de la coalition. Par contre, nous favorisons le développement. Nous n'obligeons pas et n'incitons pas les gens à verser l'impôt de 2 %, à moins que quelqu'un ne s'adresse à nous pour savoir comment renouveler sa carte de résident permanent. Nous lui expliquons alors comment faire.
    Vous avez indiqué que tout le monde verse volontairement cet impôt de 2 %. Vous affirmez ne pas avoir de rapports officiels avec le gouvernement de l'Érythrée.
    Nos liens seraient avec la communauté de la mère patrie et non avec le gouvernement de l'Érythrée comme tel.
    Je pense qu'il importe que vous compreniez que notre sous-comité des droits de la personne est ici pour défendre le peuple de l'Érythrée. Le régime nous préoccupe grandement. J'ai un cartable d'une épaisseur substantielle, comme vous pouvez le constater, rempli de témoignages sur des violations des droits de la personne qui figureraient parmi les pires du monde. Vous avez évoqué un préjugé chronologique, mais vous avez utilisé une déclaration de M. Axworthy datant de 2005 pour justifier l'existence d'un régime de conscription qui oblige chaque citoyen à faire son service militaire, lequel est souvent prolongé aussi longtemps que les intéressés le souhaitent, et qui restreint même l'accès au pays et les déplacements à l'étranger.
    J'ai de la difficulté à comprendre pourquoi cette absence des droits de la personne est nécessaire en raison de la situation de sécurité en Érythrée. Vous parlez de la chronologie, mais nous n'avons vu aucune preuve montrant que le gouvernement a l'intention de rétablir les institutions et de commencer à émerger de nouveau. Comment expliquez-vous cela?
     Je pense que c'est une question d'évaluation sur le terrain. À titre de Canado-Érythréens, nous voudrions favoriser une meilleure communication entre le Canada et l'Érythrée afin de mieux évaluer la situation sur place. Nous considérons qu'une partie de l'information, si elle n'est pas vraiment observée sur le terrain, ne témoignera pas de la réalité. Si nous pouvons améliorer le consulat ici — à un certain point, c'était sur le plan de l'ambassade aussi —, l'amélioration de la communication donnera au Canada l'occasion de jouer un rôle de leader, puisqu'au moins quatre sociétés canadiennes travaillent dans le secteur minier. Quand on les interroge sur la situation des droits de la personne ou quand il est question de la réalité érythréenne, leurs propos diffèrent de ceux qu'on entend ici.
    Combien de temps me reste-il?
    J'ai bien peur que vous arriviez tout juste au bout du temps qui vous est alloué, monsieur Sweet.
    J'aurais une brève question avant que nous passions au prochain intervenant. Il y a seulement quatre sociétés minières canadiennes qui ont des opérations en Érythrée? Je croyais qu'il y en avait...
    Il y en a quatre actuellement.
    Des sociétés minières...?
    Oui, quatre sociétés minières canadiennes...
    D'accord. Vous m'apprenez quelque chose. C'est bien, je vous remercie.
    Monsieur Marston, vous avez la parole.

  (1350)  

    Monsieur Kyriakakos, il arrive souvent que nos points de vue et nos perspectives divergent de ceux du gouvernement, mais je dois dire que les témoignages entendus jusqu'à maintenant devant notre comité concernant l'Érythrée allaient totalement à l'encontre de ce que vous nous dites aujourd'hui. J'estime important que l'on nous présente les deux côtés de la médaille.
    Dans vos observations — il est possible que je vous ai mal compris et je veux donc vous donner la chance de préciser —, vous avez indiqué que la diaspora est à l'origine de l'impôt de 2 %. D'après les autres témoins que nous avons entendus — et c'est ce que rapportent également les médias —, cet impôt serait appliqué par le gouvernement et l'on aurait recours à des menaces de représailles et à d'autres moyens illicites pour le percevoir. Comme le soulignait M. Sweet, suivant les informations que nous avons reçues, cet impôt n'aboutirait à aucun résultat concret en termes de reconstruction, ce qui laisse à penser que l'argent perçu finirait dans les poches de certains fonctionnaires.
    Notre parti s'intéresse de près aux rapports produits par les rapporteurs spéciaux des Nations Unies. Nous travaillons en partenariat avec Amnistie Internationale dans de nombreux dossiers. Il s'agit à nos yeux d'une organisation particulièrement intègre. Il y a contradiction entre ce que vous nous dites aujourd'hui et les témoignages en provenance de ces sources qui ont su gagner notre confiance. Votre témoignage me laisse donc perplexe. Je m'attendais en quelque sorte à plus de franchise de votre part étant donné que tout indique qu'il se produit chaque jour dans ce pays d'épouvantables violations des droits de la personne. Je ne vois pas comment quelqu'un pourrait être justifié de vouloir défendre de tels agissements.
    Vous êtes libre de me répondre dans un sens ou dans l'autre, mais je demeure stupéfait par la teneur de votre témoignage.
    Eh bien, je vous remercie de me donner l'occasion de traiter de cet aspect des choses.
    L'impôt de 2 % — le nom qu'on lui a donné en tigrigna signifie impôt de guérison et de reconstruction — a été établi à la demande de la diaspora. La question de la justice sociale était primordiale après l'indépendance. Notre pays avait été détruit, et il y avait tous ces gens qui vivaient à l'étranger, et tous ceux qui souffraient en Érythrée. Parmi les impacts sociaux découlant de 30 années de guerre, notons que l'on a recensé 20 000 orphelins et 60 000 personnes handicapées.
    La diaspora s'est empressée d'intervenir en se demandant sur quelles bases on pouvait combattre le terrorisme. Il fallait réduire la pauvreté et restaurer la justice sociale. Comme il ne pouvait y avoir de justice sociale sans la contribution de la diaspora, on a voulu réagir sans tarder en instaurant ce prélèvement de 2 %, alors qu'auparavant, nous pouvions contribuer à hauteur de 10 ou 15 %. Alors, l'impôt de 2 % a été établi officiellement en 1991, ce qui a permis de faire le nécessaire pour ces 20 000 orphelins et ces 60 000 personnes handicapées et de jeter les bases des institutions fondamentales de la société.
    Une vingtaine d'années plus tard, l'Érythrée a maintenant atteint 7 des 8 objectifs du Millénaire, selon les statistiques des Nations Unies.
    Pour ce qui est de cet impôt de la diaspora, les gens qui ont comparu devant vous ont habilement évité de vous dire qu'ils avaient fait gratuitement des études en Érythrée grâce à l'argent venant de la diaspora, à cette contribution de 2 % que nous leur avons fait parvenir. Selon les dernières statistiques disponibles, l'espérance de vie atteignait 65 ans en Érythrée en 2011, alors qu'elle n'était que de 39 ans en 1991. Nous, les membres de la diaspora, avons donc contribué à leur éducation ainsi qu'à l'amélioration de leur état de santé et de leur environnement tout en parrainant l'immigration de plusieurs d'entre eux au Canada.
    Ce n'est pas une relation qu'il nous faut établir comme c'est le cas avec l'Irak, la Libye et la Syrie. Le tissu social de l'Érythrée est différent. On y trouve neuf nationalités et de nombreuses religions qui cohabitent depuis longtemps dans l'harmonie, et qui ne permettraient pas que la situation se dégrade comme ce fut le cas en Somalie. C'est grâce au tissu social du pays, mais aussi à la conscience politique du gouvernement en place. Nous accordons le bénéfice du doute aux gens du gouvernement, même s'ils peuvent susciter une certaine méfiance et si nous constatons leurs lacunes, parce que ce sont des libérateurs. Ils ont évité un génocide. Pendant 30 ans, nous avons essuyé les attaques au napalm de l'Union soviétique, et nous avons survécu. Ce n'est pas nous qui étions là. Nous faisions déjà partie de la diaspora. Mais ces gens-là sont restés au pays et ont empêché un génocide. Grâce à eux, le monde n'a pas eu à vivre un second Rwanda. Cet apport est bien suffisant pour que l'on accorde au gouvernement le bénéfice du doute, malgré ses travers.
    Le gouvernement est formé de gens ordinaires. Ils ne sont pas propriétaires d'une maison et ne possèdent pas de voiture. Ils circulent en sandales dans les rues de la ville. Ils assistent à des mariages ordinaires de gens ordinaires. Ils n'ont pas changé. Il est difficile par ailleurs de faire évoluer certaines mentalités. Nous allons leur laisser la chance d'y parvenir, car ils le méritent.

  (1355)  

    Merci.
    Madame Grewal, c'est à vous.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à nos témoins pour le temps que vous nous consacrez et l'exposé que vous nous avez présenté.
    Monsieur Kyriakakos, pourriez-vous nous dire en quoi la présence de Nevsun Resources Ltd. a des répercussions négatives sur les citoyens qui sont conscrits au sein du service national? Pensez-vous qu'il y a un lien entre Nevsun et le financement des groupes de coalition armés dans la région?
    Merci pour la question.
    Les seules statistiques que nous ayons sont celles du gouvernement érythréen. Je ne suis pas à l'origine de ces données, mais ce sont des questions qui nous tiennent à coeur.
    Le gouvernement a mobilisé 110 000 soldats. Nevsun pourrait vous donner des détails au sujet de ceux qui travaillent pour l'entreprise. Nous n'avons aucune tolérance pour les violations des droits de la personne, car ces principes sont à la base de la libération de l'Érythrée. Il n'y a pas de libération et de liberté possibles sans le respect des droits de la personne. C'est la direction que nous voulons emprunter.
    Nevsun a fourni certains détails après avoir fait l'objet d'accusations. Le gouvernement de l'Érythrée a alors communiqué des renseignements sur le nombre de personnes qui y travaillaient, le salaire qu'elles touchaient et leurs conditions d'emploi. Les préjugés culturels étaient toutefois flagrants. J'ai vu le rapport initial qui soulignait que huit travailleurs devaient s'asseoir ensemble et manger dans la même assiette, une façon de faire qui a cours depuis des siècles en Érythrée. Lorsqu'on retrouve des préjugés semblables dans un rapport, on devine qu'il n'a pas été rédigé sur les lieux mêmes. C'est plutôt quelqu'un de très éloigné qui a tenté de décrire comment les choses se passent en Érythrée.
    Est-ce que la Coalition des communautés et organisations érythréennes du Canada appuie les sanctions des Nations Unies contre l'Érythrée, et quelles autres mesures le Canada pourrait prendre à votre avis en réaction à ces violations des droits de la personne?
    On dit ici qu’il n’y a pas de paix et qu'il n'y a pas de guerre. Si l’Érythrée ne respecte pas les obligations du traité, ce n’est pas parce qu’un petit bout de terre ne lui a pas été rendu. C’est à cause de la menace pour la sécurité et la paix. Si aucune mesure n’est prise pour rétablir la confiance entre les deux pays, il sera impossible de démilitariser la région. Ce qu’on n’a pas souvent dit, c’est qu’il y a environ 300 000 soldats en Érythrée, et que l’Éthiopie peut rassembler un million de soldats en six semaines ou quelques mois, en faisant appel aux réservistes.
    Si la situation n’est pas démilitarisée... parce qu’il n’y a pas de réelle menace ni d’amélioration. Les droits de la personne ne s’amélioreront pas et il n’y aura aucun développement agricole.
    Le Canada a un rôle à jouer pour exiger la mise en oeuvre du traité existant. Ce sera la plus importante mesure de confiance prise sur le terrain pour dissiper les tensions. Je crois que ce serait... D’autres formes d’aide... Je veux dire, à titre de coalition de collectivités, nous ne sommes pas des politiciens et nous ne pouvons pas vraiment prendre de décision, mais nous savons que c’est là le plus grand obstacle.
    Pourriez-vous nous parler des conditions dans les prisons de l’Érythrée? Est-ce que les prisonniers sont traités différemment en fonction du crime qu’ils ont prétendument commis? Par exemple, est-ce que les journalistes ou les fonctionnaires du gouvernement sont traités différemment des personnes arrêtées pour des motifs religieux?
    Notre recommandation à l’intention du gouvernement, lorsque les représentants viennent ici et que nous pouvons leur parler, est la suivante: nous n'aurons peut-être pas les mêmes institutions que l’Occident, mais nous devons aller de l’avant pour protéger la prochaine génération contre cette énorme migration. Il ne s’agit pas seulement de la migration érythréenne, mais aussi de la migration africaine. C’est une association très triste de migration, de trafic humain et de tragédie humaine.
    En tant que Canadiens d’origine érythréenne, nous offrons notre appui, ce que nous pouvons pour améliorer les relations entre l’Érythrée et les pays européens, et le Canada en particulier, pour que le pays puisse se sortir de cette crise, parce que nous croyons qu’il s’agit d’une crise. Les Nations Unies ont dit qu’il s’agissait d’une crise.
    Je ne peux pas en dire plus, parce qu’en tant que leader communautaire, je n’ai pas de renseignements précis sur les sanctions des Nations Unies et sur ce qui arrivera à l’avenir, mais nous lutterons toujours pour que les sanctions soient levées.

  (1400)  

    Monsieur le président, est-ce qu’il me reste du temps?
    Non. J’ai bien peur que nous dépassions d’environ une minute le temps prévu pour cette série de questions.
    Monsieur Benskin, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Dans votre exposé, et à plusieurs reprises dans vos réponses, vous avez parlé des préjugés culturels et vous avez dit que les choses différaient des apparences ou que les gens sur le terrain ne les voyaient pas. Je vais vous poser la question directement: à votre avis, quelle est la situation des droits de la personne en Érythrée?
    Mon collègue, M. Sweet, a parlé. Je suis membre du comité depuis peu; je n’ai donc pas sa vaste expérience du sujet ni celle de M. Marston, mais on m’a dit qu’on avait entendu des témoignages exhaustifs sur la situation des droits de la personne en Érythrée. Si je comprends bien, vous dites que ces témoins ont tort ou qu’ils se trompent. Qu’est-ce qu’on ne comprend pas à ce sujet?
    L'Érythrée est un petit pays. Les efforts diplomatiques et l'accès aux médias y sont restreints. La confusion règne; je vais vous présenter quelques exemples simples. Un tribunal israélien a rendu une décision visant l'expulsion de 20 présumés réfugiés érythréens. Le tribunal a rendu sa décision après avoir découvert que... C'est une décision du 26 août...
    Pardon, je vous demande quelle est la situation actuelle, et non ce que d'autres pays ont décidé. Je veux savoir ce qu'on ne comprend pas de la situation en Érythrée.
    Oui, je vais conclure.
    Dix-neuf des 20 personnes qui ont comparu devant le tribunal à Tel-Aviv étaient des Éthiopiens. Les statistiques de l'OIM ou les statistiques internationales font peut-être référence aux citoyens érythréens. Nombre d'entre eux ne sont pas des citoyens érythréens.
    Mais qu'est-ce qui se passe...?
    Je vais répondre à la question.
    Sur le terrain, les questions relatives aux droits de la personne, surtout celles qui ont trait au service militaire, doivent être améliorées.
    Comment doivent-elles être améliorées?
    La délimitation des frontières dissipera les tensions. Les jeunes pourront être démilitarisés et le développement sera possible. La levée des sanctions permettrait les transferts de fonds et l'affectation de l'impôt de 2 % au développement.
    Désolé. Je vais aller droit au but; je suis une personne directe. J'ai l'impression que vous tentez d'éviter la question plutôt que de me donner une réponse directe.
    Ma question est la suivante: quelle est la situation actuelle en Érythrée, en ce qui a trait aux activités relatives aux droits de la personne? Qu'est-ce qu'on comprend mal? Je ne parle pas de lever les sanctions. Je vous demande de me dire ce qui, selon vous, ne se passe pas comme les autres témoins l'ont fait valoir.
    On exagère les chiffres. On exagère la description. Il y a...
    On exagère comment?
    ... les chiffres qui sont présentés ici.
    Vous avez dit qu'on exagérait la description? Comment exagère-t-on?
    On parle de 60 000 ou de 40 000 personnes qui vivent en Érythrée; les chiffres varient.
    Depuis l'indépendance, les personnes qui sont retournées en Érythrée sont plus nombreuses que celles qui l'ont quittée. Avant, la population de l'Érythrée était de deux millions de personnes; aujourd'hui, elle est de quatre millions de personnes. Le nombre de personnes réinstallées est plus élevé que le nombre de personnes qui ont quitté le pays au cours des 23 dernières années; c'est donc inexact. Est-ce que les gens s'en vont? Les jeunes, oui.
    Les statistiques inexactes sont un facteur. Il y a exagération.
    La gravité des violations des droits de la personne contre les Érythréens qui vivent au pays ou qui le visitent est plutôt attribuable au manque d'institutions. Notre système de justice n'a pas atteint le niveau souhaité pour offrir des procès adéquats et pour garantir la protection des droits de la personne au même titre qu'en Occident.

  (1405)  

    D'accord.
    Nous n'avons donc pas assez d'institutions, mais nous devons examiner les causes de ce manque.
    Est-ce qu'il me reste du temps?
    Je vous ai donné une minute de plus. Merci beaucoup, Monsieur Benskin.
    Nous allons maintenant passer à M. Woodworth. Je tiens simplement à vous aviser que nous avons dépassé l'heure de fin prévue. Je sais que certains d'entre vous doivent se rendre à la Chambre des communes. Je demanderais seulement qu'un néo-démocrate reste ici. Nous avons besoin d'un député de l'opposition pour poursuivre les témoignages.
    Nous allons tous deux rester.
    D'accord, c'est excellent.
    Monsieur Woodworth, vous avez la parole.
    Je remercie les témoins de leur présence aujourd'hui pour parler d'une question très délicate et importante pour toutes les personnes touchées.
    Monsieur Kyriakakos, avez-vous bien dit qu'il n'y aurait aucune conséquence pour les Érythréens expatriés qui ne paient pas l'impôt de 2 %?
    Oui, c'est exact.
    Je ne connaissais pas très bien la question, mais il semble y avoir un enregistrement audio d'une présentation de Semere Ghebremariam O. Micael, ancien chef du consulat général de l'Érythrée en Ontario, datant du 21 avril 2013, au cours de laquelle il informe les participants que les citoyens érythréens ne pourront pas investir au pays s'ils ne paient pas l'impôt de 2 %.
    Saviez-vous que cet enregistrement existait?
    Je crois que oui, parce que la CBC l'a diffusé.
    Êtes-vous en désaccord avec M. Micael? Croyez-vous qu'il a tort de dire que les personnes qui ne paient pas l'impôt en subiront les conséquences?
    Je crois qu'il faut faire une distinction. Les gens peuvent se rendre en Érythrée. Pour y investir, il faut être un contribuable.
    Donc, lorsque vous avez dit que le non-paiement de l'impôt n'entraînerait aucune conséquence, ce n'est pas ce que vous vouliez dire; vous vouliez simplement dire que les personnes qui ne paient pas l'impôt seront peut-être en sécurité si elles se rendent en Érythrée, mais elles n'auraient aucun autre droit. Par exemple, elles n'auraient pas le droit d'y investir.
    C'est exact.
    Très bien.
    Je n'ai pas entendu ce témoignage en personne, mais on nous a dit que certaines personnes vivant en Érythrée auraient été forcées de demander à leur famille au Canada de payer l'impôt.
    Est-ce possible?
    Les communautés canado-érythréennes sont ici depuis 30 ans. L'impôt de reconstruction de 2 % a été mis en oeuvre il y a 22 ans. Nous entendons parler de cette situation depuis deux ans.
    Pourquoi n'a-t-on pas alerté la police? Pourquoi est-ce qu'aucun tribunal du Canada ou du monde n'a rendu de décision juridique relative à la présence d'extorsion ou de paiement forcé? Il n'y a aucun document juridique à cet égard, seulement ces témoignages.
    Est-il possible que ces témoins, qui sont peut-être pauvres et impuissants et qui n'ont peut-être pas accès au système juridique du Canada aient été menacés par des fonctionnaires bien intentionnés, mais fautifs, en Érythrée?
    Non. Je peux affirmer que le tissu social de la communauté érythréenne ne permettrait jamais qu'un tel climat soit établi. Nous n'avons aucune tolérance à cet égard.

  (1410)  

    Donc, la communauté est confrontée au choix suivant: accepter la preuve selon laquelle certaines personnes ont été menacées ou accepter le commentaire que vous venez de faire.
    Je recommanderais la tenue d'une enquête approfondie et détaillée à ce sujet. Nous n'accepterons pas qu'on agisse de la sorte auprès d'autres Canadiens au nom de la communauté érythréenne ou de ses représentants.
    Nous aimerions voir le rapport d'enquête de la police. Ensuite, nous pourrons commenter.
    Je vais m'arrêter là, mais je trouve qu'il est de plus en plus difficile de le faire lorsque des personnes impuissantes se plaignent d'un gouvernement, bien que le solide système de justice du Canada nous le permette.
    Dans tous les cas, je vous remercie de vos réponses. Vous avez rendu très clair le choix du comité.
    Je donne le temps qu'il me reste.
    En fait, il ne vous reste plus de temps, vous avez même un peu dépassé le temps qui vous était accordé. Mais vous n'êtes pas le seul, puisque presque tous les intervenants ont fait de même, à part M. Sweet, à qui il restait trois secondes.
    J'aimerais vous poser une question, si possible, avant de vous laisser partir. Vous avez dit que quatre sociétés canadiennes réalisaient des activités d'exploitation minière en Érythrée, et cela me surprend. Je sais que Nevsun en fait partie; en fait, nous entendrons jeudi un avocat qui a réalisé une enquête sur les droits de la personne relative aux pratiques de Nevsun. Je sais qu'il y a une autre mine d'or canadienne, mais je ne connais pas les deux autres.
    Pourriez-vous nous en dire plus à ce sujet? Vous ne connaissez peut-être pas leur nom, mais si vous pouviez nous transmettre ces renseignements, nous vous en serions reconnaissants. Nous nous intéressons grandement aux activités et au comportement des sociétés minières canadiennes dans les autres pays, y compris le vôtre.
    Il y a en tout 20 sociétés minières en Érythrée. Quatre d'entre elles sont canadiennes. Je vais vous transmettre leur nom. Je ne les ai pas avec moi.
    J'aimerais cela.
    Ce sont sûrement des sociétés qui font de l'exploration minière, sans toutefois exploiter les mines. Elles ne procèdent actuellement pas à l'extraction, je suppose.
    Je m'engage à vous transmettre les détails de leur travail.
    D'accord. Je vous en serais très reconnaissant. Cela nous serait très utile.
    Chers collègues, je crois que nous venons de terminer notre réunion la plus longue à ce jour. Je vous remercie.
    Je remercie également nos témoins et les membres du public de leur présence. Vous avez fait preuve de beaucoup de souplesse. Je sais que nous avons dû changer la salle d'audience. Vous vous êtes très bien adaptés. Nous vous remercions d'avoir su composer avec les particularités du système parlementaire canadien.
    Merci beaucoup.
    Merci.
    La séance est levée.
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