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CHPC Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent du patrimoine canadien


NUMÉRO 046 
l
2e SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 11 mai 2015

[Enregistrement électronique]

  (1530)  

[Traduction]

    Bonjour à tous. La 46e séance du Comité permanent du patrimoine canadien est ouverte.
    Aujourd'hui, nous poursuivons notre étude de l'industrie canadienne du long métrage. De fait, ce sera la dernière séance où nous entendrons des témoins.
    Durant la première heure, nous accueillons Tim Southam, président du bureau national de la Guilde canadienne des réalisateurs, et David Forget, directeur des politiques, également au bureau national de la Guilde canadienne des réalisateurs. Nous accueillons aussi René Savoie, administrateur de l'Alliance des producteurs francophones du Canada. Par téléconférence depuis Vancouver, en Colombie-Britannique, nous entendrons Michelle Grady, directrice de film de la Moving Picture Company.
    Une période allant jusqu'à huit minutes sera accordée à chacune des trois organisations.
    Nous allons commencer par M. Southam. Vous avez la parole pour huit minutes.
    Monsieur le président, chers membres du Comité permanent du patrimoine canadien, je m’appelle Tim Southam, et je suis administrateur dirigeant, cinéaste et président de la Guilde canadienne des réalisateurs. Je suis accompagné de David Forget, directeur des politiques de la GCR.
    Je tiens à vous remercier de me donner l'occasion de m’adresser à vous dans le cadre de l’évaluation de l’industrie canadienne du long métrage. Le secteur de l’audiovisuel traverse actuellement une période de grands changements, et nous félicitons le Comité de sa décision opportune d’enclencher le processus d’évaluation, tout particulièrement dans le domaine du long métrage.
    Les longs métrages de fiction et les documentaires occupent une place de choix dans le coeur de tous les publics partout au monde, et pour les cinéastes, le long métrage est une forme d’expression artistique fondatrice. Malgré l’épanouissement formidable d’autres médias comme Internet ou les téléséries, le long métrage demeure pour bien des metteurs en scène la forme que nous rêvons le plus de réaliser.
    Cette situation s’explique par plusieurs raisons, certaines desquelles relèvent de la mythologie, par exemple le désir de suivre les traces de Truffaut, Campion, Scorcese, Bigelow, Jutra, Spielberg ou Cronenberg. Mais surtout, le long métrage indépendant est le véhicule qui exploite au maximum les talents d’un réalisateur en tant qu’artiste visuel, en tant que directeur de comédiens, en tant qu’auteur. C’est une forme qui permet à un cinéaste d’utiliser la totalité de sa palette, de l’écriture ou du travail avec un scénariste jusqu’à la distribution, en passant par la mise en scène, la mise en image et la conception sonore. Ainsi, le long métrage acquiert une voix unique susceptible de procurer une expérience de visionnement unique à des publics de partout.
    Le rayonnement de la culture canadienne sur les scènes nationale et internationale passe très souvent par le long métrage.

[Français]

     Malheureusement, malgré la place prépondérante qu'occupent les longs métrages de fiction et les documentaires dans les médias et dans l'imaginaire collectif, les films canadiens-anglais sont abandonnés dans leur propre pays.
    En effet, les citoyens n'ont qu'un accès restreint aux longs métrages canadiens, même s'ils financent ces oeuvres avec leurs impôts. La conséquence est que l'offre au public s'en trouve amoindrie. Des changements s'imposent à cet égard.

[Traduction]

    Notre attention se porte aujourd'hui sur la façon dont nous pouvons renforcer les mécanismes de réglementation existants à l'appui du financement et l'exposition des longs métrages canadiens, particulièrement en ce qui concerne la tendance croissante vers le visionnement à domicile et sur des plateformes mobiles.
    La situation a beaucoup évolué depuis la dernière étude de l’industrie canadienne du long métrage menée par le comité permanent en 2006. Surtout, les nouvelles plateformes numériques offrent des moyens de plus en plus variés d’accéder au contenu. Le public est soumis à une offre plus diversifiée que jamais et est toujours plus libre de choisir comment il visionnera ce contenu. Par conséquent, le marché traditionnel est soumis à une pression croissante. Bien que ces nouvelles plateformes et stratégies relatives aux fenêtres de diffusion offrent des possibilités de distribution intéressantes, elles ne sont pas encore assorties de solides modèles d’affaires et de financement.
    Nous constatons également que plusieurs éléments clés n’ont pas changé depuis 2006. Il vaut la peine de répéter que, dans son rapport de 2006, le comité a mentionné, dans ces mots, « l’inexistence d’une politique de la radiodiffusion visant à appuyer la promotion du long métrage canadien ». De plus, le rapport recommandait « que le ministère du Patrimoine canadien […] élabore une nouvelle politique pour la présentation d’émissions prioritaires à la télévision canadienne » et « que le gouvernement du Canada charge le CRTC d’élaborer une politique qui appuie la promotion (p. ex. au moyen de bandes-annonces) ainsi que le visionnement de films, d’oeuvres de fiction et de longs documentaires canadiens ».
    Le rapport a visé juste, et, en 2015, c’est encore à la télévision que la plupart des Canadiens regardent des films. La question qui tue est la suivante: dans cette culture de visionnement à domicile, où sont les longs métrages canadiens?
    La Guilde canadienne des réalisateurs a trois propositions précises qui permettraient de profiter plus pleinement de la croissance du visionnement à domicile. L’application de ces trois recommandations permettrait de fournir à l’industrie canadienne du long métrage et du documentaire une quantité importante de ressources sans exiger l’injection de nouveaux fonds publics additionnels dans le système.
    La première proposition concerne les longs métrages et les documentaires canadiens en tant qu’émissions d’intérêt national, EIN. Pour garantir que les ressources destinées aux émissions d’intérêt national sont affectées conformément à l’objectif de la politique gouvernementale, le CRTC devrait obliger les télédiffuseurs à consacrer au moins 1 % de leurs recettes canadiennes à la production de longs métrages et de documentaires canadiens. Ces recettes proviendraient des exigences actuelles de groupe au titre des dépenses en émissions canadiennes — DEC —, tout en dépassant le seuil actuel des exigences de dépenses de groupe au titre des EIN, qui est de 5 %. Une telle mesure entraînerait un soutien accru et prolongé des diffuseurs, ce qui permettrait d’augmenter le nombre actuellement très faible des licences qui sont offertes.
    Nous recommandons aussi que la Société Radio-Canada, en tant que diffuseur public national, joue un rôle plus important dans l’attribution de licences pour les longs métrages et les documentaires canadiens ainsi que dans la promotion de ces oeuvres.
    La deuxième proposition porte sur les longs métrages et les documentaires canadiens présentés par les services de vidéo sur demande et de télévision à la carte. Pour attirer un plus grand public, il faut d’abord améliorer l’accès au contenu. Le CRTC exige que les fournisseurs de vidéo sur demande et de télévision à la carte achètent les droits de diffusion de tous les nouveaux longs métrages canadiens « qui conviennent » à la présentation en vidéo sur demande et satisfont aux normes applicables. Toutefois, le conseil a refusé de préciser ce qu’on entend par le terme « qui conviennent ». Une plus grande clarté concernant ce terme permettrait de rendre notre cinéma davantage accessible aux Canadiens qui ont recours à la télévision à la carte ou à la vidéo sur demande.
    La troisième proposition concerne les longs métrages et les documentaires canadiens présentés par les services par contournement. Au cours des dernières années, les télédiffuseurs canadiens ont dû affronter la concurrence de nouveaux fournisseurs offrant l’abonnement à des services par contournement. Le fait que, contrairement aux autres fournisseurs, ces services ne sont pas assujettis à tous les règlements du CRTC leur permet d’éviter de se plier aux exigences visant à renforcer le système, notamment de participer au Fonds des médias du Canada. Par conséquent, les fournisseurs de télévision par contournement ont donc toute liberté quant à la diffusion de la culture et du contenu canadiens dans la sphère de la radiodiffusion.
    Il n’est pas très logique d’offrir un tel avantage concurrentiel à un sous-ensemble de fournisseurs. Pour commencer, le CRTC devrait encore une fois exiger que les services de télévision par contournement rendent compte des éléments suivants: le degré de programmation canadienne offerte, y compris le nombre d’oeuvres, les heures et la part du contenu total; les dépenses consacrées à la programmation canadienne; les émissions canadiennes pour lesquelles ils détiennent les droits de diffusion exclusifs; le nombre d’abonnés canadiens.

  (1535)  

[Français]

     L'environnement pour le financement, la production et la distribution du long métrage et des documentaires a été révolutionné par l'avènement des réseaux numériques et des nouvelles plateformes de visionnement. Néanmoins, aucun de ces développements n’altère la nécessité primordiale d'une masse critique de capitaux pour générer un contenu créé par les Canadiens pour le Canada et pour le monde.
    Outre les mesures mentionnée précédemment ciblant la distribution à domicile et mobile, la Guilde canadienne des réalisateurs revendique le renforcement de certains outils existants tels que les crédits d'impôt, le Fonds du long métrage du Canada, l'Office national du film du Canada et la Société Radio-Canada. De plus, nous incitons le gouvernement à inverser les coupes infligées à ces instruments et à ces services.
     Il importe également de suivre la migration de l’auditoire vers le petit écran, et de mieux recruter pour le financement et la diffusion des longs métrages canadiens la participation des services à domicile, notamment les réseaux télévisuels traditionnels et les nouveaux services Internet.
    Monsieur le président, membres du comité, nous vous remercions de nous avoir donné la chance de nous exprimer devant vous aujourd'hui. Nous nous ferons un plaisir de répondre à vos questions.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant passer à René Savoie.
    Vous avez la parole pour jusqu'à huit minutes.

[Français]

[Traduction]

    Bonjour à tous. Je m'exprimerai en français, mais je comprends très bien l'anglais.

[Français]

    Je représente ici devant vous l'Alliance des producteurs francophones du Canada, qui est constituée de 24 membres producteurs. Ces producteurs travaillent tous en français là où la langue est minoritaire, soit de Terre-Neuve-et-Labrador à la Colombie-Britannique, et développent principalement l'industrie de la production télévisuelle et des médias numériques.
    Quelques membres ont produit des longs métrages et plusieurs rêvent de pouvoir développer à l'avenir de tels projets. L'exemple que représente l'essor de l'industrie télévisuelle et du développement de ses talents et de ses capacités en région grâce à la participation active du Fonds des médias du Canada permet d'y croire. Nos membres développent et produisent présentement des séries dramatiques d'envergure pour les grands diffuseurs canadiens.
    Pour vous permettre de mieux saisir notre réalité, j'ai préparé un portrait de la situation du long métrage francophone du Canada en situation minoritaire sous l'angle d'un producteur acadien travaillant dans son milieu. C'est un portrait que j'ai soumis le 11 mars 2015. Depuis la rédaction de ce document, j'ai participé, au nom de l'APFC, à la rencontre bilatérale de la FCCF, soit la Fédération culturelle canadienne-française, avec Téléfilm Canada. Les conclusions auxquelles nous sommes arrivés à la suite de cette rencontre sont très révélatrices. C'est la raison pour laquelle nous avons modifié notre présentation devant votre comité. Pour l'APFC, il est primordial de permettre à des longs métrages de montrer la réalité des francophones de partout au Canada et de mettre ainsi en valeur la richesse culturelle de notre grand pays.
    Dans le document présenté le 11 mars dernier, nous faisions la démonstration que, pour les francophones hors Québec, l'industrie du long métrage n'avait pas beaucoup évolué au courses 10 dernières années. On parle d'un long métrage en 1998 en Acadie, d'un autre de 1,2 million de dollars en Ontario en 2011 et de trois projets à micro budget pour des talents émergents depuis les six dernières années. C'est un bilan peu reluisant. Le long métrage francophone en situation minoritaire est une denrée rare.
    La production de longs métrages de langue française au Canada provient presque entièrement du Québec. Les francophones en situation minoritaire représentent 12,5 % de la population francophone du pays. La Loi sur les langues officielles stipule que les organismes fédéraux doivent prendre des mesures positives afin d'être équitable à l'égard des francophones vivant en situation minoritaire.
    La question du financement d'un projet de long métrage est souvent ce qui empêche sa production. Téléfilm Canada, qui a récemment subi une diminution de 10 % de son budget, finance des projets de long métrage à hauteur de 30 à 35 %. Le reste du financement vient des crédits d'impôt fédéraux et des programmes provinciaux ainsi que des distributeurs ou d'autres diffuseurs. Sinon, un producteur doit être perspicace afin de trouver des sources de financement s’il veut boucler son budget et produire le film.
    Le financement provincial est le principal problème auquel font face les francophones en situation minoritaire qui veulent produire des longs métrages. Au Québec, on investit 25 millions de dollars par année dans le cinéma. Le Manitoba est l’autre province canadienne qui aide suffisamment le cinéma pour permettre la production de projets. Cependant, nous ne trouvons pas d’aide équivalente pour les francophones en situation minoritaire dans le reste du Canada.
    Les différents organismes provinciaux, qui aident surtout la production télévisuelle, n’ont pas de programmes spécifiques pour le long métrage, et les conditions actuelles ne permettent pas de croire que la situation des producteurs en situation minoritaire va s’améliorer dans les années à venir.
    À l’APFC, nous croyons qu’il est essentiel de soutenir le développement et la production du long métrage en situation minoritaire. En vertu des articles 41 et 42 de la Loi sur les langues officielles, il incombe aux institutions fédérales de veiller à ce que des mesures positives soient prises afin de favoriser l’épanouissement des minorités francophones dans un champ de compétence tel que le long métrage. Pour ce faire, voici quelques pistes de solution proposées par l’APFC.
    Selon nous, le gouvernement doit mettre en place un programme spécial d’aide à l’écriture à l'intention des scénaristes en situation minoritaire. Un montant minime serait suffisant pour développer trois ou quatre projets professionnellement. Il est aussi essentiel de créer une enveloppe spéciale pour donner un incitatif supplémentaire pour les projets présentés au plan de la production. Un incitatif supplémentaire au chapitre de la structure financière pour souligner l’importance de produire des longs métrages dans les communautés de langue officielle en situation minoritaire est nécessaire afin de combler le manque de fonds provinciaux. Une telle mesure encouragerait fortement les producteurs à se lancer dans la production de longs métrages. Un effet boule de neige apparaîtrait sûrement au fil du temps et une prolifération des oeuvres verrait le jour.

  (1540)  

     Le Fonds des médias du Canada, qui réserve depuis 10 ans une enveloppe consacrée entièrement aux producteurs en situation minoritaire, a permis l'évolution de l'industrie télévisuelle pour les francophones à l'extérieur du Québec. Ce sont de tels incitatifs qui permettent à nos talents de rester chez eux et de se développer dans leurs régions respectives.
    Grâce à cette initiative du Fonds des médias, nous produisons maintenant des séries dramatiques en plus des séries de variétés, des documentaires et des émissions jeunesse. Ce sont ces mêmes travailleurs qui se retrouvent souvent sur les plateaux de tournage avec des équipes chevronnées sur le plan des séries pour la télévision. Celles-ci développent leurs capacités afin de réaliser éventuellement des projets de long métrage. Ce sont également les mêmes scénaristes issus des régions qui ont des projets de long métrage dans leur poche arrière.
    Imaginons un instant qu'il y ait pour nous une avenue nous permettant de produire des longs métrages en français à l'extérieur du Québec. Ce serait une merveilleuse façon de voir à l'avenir des films pensés et réalisés en région qui montreraient la richesse du patrimoine canadien à travers les histoires et la diversité culturelle à travers les gens et les paysages. Il est très facile de croire qu'une telle possibilité existe et que la bonne volonté du gouvernement fédéral pourrait permettre à de tels incitatifs et programmes de voir le jour, que ce soit à Téléfilm Canada ou au Secrétariat des langues officielles du ministère du Patrimoine canadien.
    L'APFC croit que les programmes qui régissent le financement du long métrage canadien doivent évoluer et donner leur juste part aux francophones qui font de la production en situation minoritaire et contribuent au développement de l'industrie ainsi qu'au rayonnement de la culture canadienne. Un programme d'aide acceptable qui appuierait un ou deux films par année représenterait annuellement 500 000 $ en production et 200 000 $ en écriture. Cela nous semble bien modeste pour faciliter la production de quelques longs métrages et l'épanouissement de cette industrie pour les francophones vivant en situation minoritaire. Un programme bien ficelé ne demanderait pas beaucoup de frais d'administration.
    Si le financement que fournissait le gouvernement fédéral à Téléfilm Canada avant la réduction de 10 % était rétabli et était assorti d'une obligation de mettre un tel programme en vigueur, cela serait une très belle initiative politique qui contribuerait à l'avancement de l'industrie du long métrage canadien.
     L'APFC est persuadée que le comité tiendra compte de ces recommandations et des obligations en vertu de la Loi sur les langues officielles du Canada. Elle croit aussi que le comité veillera à faire adopter des conditions qui contribueront à assurer le développement de l'industrie du long métrage. Cela permettra éventuellement à nos membres de créer, produire et distribuer des longs métrages indépendants francophones qui donneront une voix aux communautés francophones vivant en situation minoritaire.
    Veuillez agréer, mesdames, messieurs et monsieur le président, l'expression de notre haute considération.
    Je demeure à votre disposition pour répondre à vos questions.

  (1545)  

    Merci, monsieur Savoie.

[Traduction]

    Nous allons maintenant nous rendre à Vancouver par vidéoconférence. Nous allons entendre le témoignage de Michelle Grady, qui est directrice de film à la Moving Picture Company.
    Vous avez la parole pour huit minutes au maximum.
    Bonjour. Je voudrais remercier le président et le comité de m'avoir invitée à discuter avec vous aujourd'hui.
    Je m'appelle Michelle Grady, et j'ai la chance de faire partie de l'industrie canadienne du long métrage depuis plus de 20 ans. Depuis sept ans, je suis directrice de film pour la MPC, la Moving Picture Company. Cette entreprise est un chef de file mondial en effets visuels depuis plus de 25 ans. Elle a commencé à Londres, en Angleterre, a été achetée par Technicolor en 2004, puis a ouvert sa première exploitation canadienne en 2007.
    Le sujet de l'étude du comité est un examen de l'industrie canadienne du long métrage. L'un des paramètres de votre examen, décrit dans l'invitation, était l'étude des façons de promouvoir la valeur de l'industrie, y compris la qualité des services de production offerts au Canada. L'invitation soulignait également que vous souhaitez entendre parler des changements qui ont lieu depuis la dernière étude de l'industrie du long métrage effectuée en 2006.
    En ce qui concerne les services de production, on peut soutenir que, durant cette période, il n'y a pas eu de changements plus importants qu'il y en a eu à l'époque de l'introduction de la croissance de l'industrie des effets visuels du long métrage au Canada. Auparavant, il y avait une petite industrie axée sur la télévision et le long métrage canadiens, mais, ce qui a été créé, c'est un centre des effets visuels cinématographiques pour les superproductions hollywoodiennes à grande échelle qui est reconnu partout dans le monde et primé. De fait, Vancouver est maintenant l'un des deux principaux centres du monde pour ce genre de travail, et Montréal la talonne.
    Si nous convenons que, d'un point de vue commercial, une grande partie de l'industrie canadienne du long métrage, ce sont les services qu'elle fournit aux entreprises cinématographiques hollywoodiennes, nous devons maintenant reconnaître la place importante qu'occupent les effets visuels cinématographiques dans cette catégorie des services de production canadiens.
    Que sont les effets visuels? En termes simples, les effets visuels numériques sont les divers processus par lesquels on crée ou manipule des images en dehors du contexte d'un tournage en direct. Les effets visuels supposent l'intégration de séquences tournées en direct et d'images générées par ordinateur pour créer des plans qui ont un aspect réaliste, mais qui seraient dangereux, coûteux ou simplement impossibles à saisir sur une pellicule.
    À titre d'exemple rapide, supposons que la conversation que nous sommes en train d'avoir faisait partie d'un film de science-fiction. Des extraterrestres envahissent la salle dans laquelle je me trouve. Ils débarquent de leur vaisseau, m'amènent à bord et partent. Nous me filmerions en train de participer à un petit dialogue. Dès que les extraterrestres arriveraient, la scène en entier serait numérique; elle serait créée par ordinateur, des follicules de mes cheveux jusqu'à mon manteau, en passant par la salle. Le reste de cette scène serait entièrement numérique, fait à l'ordinateur.
    Voici quelques statistiques très intéressantes pour vous concernant l'importance des effets visuels. Chacun des 50 films les plus populaires de tous les temps au box-office faisait un usage intensif des effets visuels. On consacre une plus grande part du budget des films aux effets visuels, qui comptent maintenant pour 30 à 35 % des dépenses de production liées aux 50 premiers films, comparativement à environ 25 % il y a quatre ans. Les effets visuels sont une industrie où le taux d'emploi est élevé; elle mobilise une armée de gens. En 2013, une étude de suivi de la croissance des effets visuels parmi les films les plus populaires au box-office a mentionné que, pour ce qui est des 25 des plus récents films axés sur les effets visuels, les emplois liés aux effets visuels comptaient pour 45 % des emplois liés au film.
    Comme nous pouvons le voir, les effets visuels sont un secteur en croissance, mais, si nous le ramenons un peu plus près de nous, des neuf principales entreprises au monde qui servent ce marché à créneaux, huit ont établi une exploitation importante au Canada. Je vais vous en donner la liste, car vous ne connaissez peut-être pas les noms: la MPC, ILM, Digital Domain, Sony Pictures Imageworks, Double Negative, Framestore, Method Studios et Scanline.
    Lorsque nous avons ouvert notre studio de la MPC à Vancouver, en 2007, nous étions environ 50 personnes; aujourd'hui, nous sommes 600. Nous avons ouvert un studio à Montréal en 2013, et 550 personnes y travaillent aujourd'hui. Nous pouvons prendre cette courbe de croissance et, à divers degrés, la mettre en correspondance avec celle des quelque 15 entreprises qui sont nationales ou une succursale canadienne d'une marque étrangère. Du point de vue de la créativité, nous réalisons certaines des meilleures oeuvres au monde. Depuis l'ouverture de son studio au Canada, la MPC a été mise en nomination pour plusieurs Oscars, et elle en a remporté un.
    Pourquoi la croissance des effets visuels est-elle importante? Notre industrie cinématographique est en transition, comme bien d'autres, vers un flux de production largement numérique. Dans le cadre de cette transition, de nouveaux types d'emplois sont créés; de nouvelles entreprises sont formées, et, en général, de nouvelles occasions se présentent. Dans ce contexte, nous avons établi au Canada un centre d'excellence reconnu à l'échelle de la planète. Les types d'emplois créés sont hautement spécialisés, très bien rémunérés et font l'objet d'une forte demande. Au sein de mon entreprise, le salaire moyen est supérieur de 48 % au salaire canadien moyen. L'âge moyen de nos employés est de 29 ans, et nous offrons de nombreux débouchés aux employés de tous les niveaux du spectre de l'expérience.

  (1550)  

     Étant donné la croissance de notre industrie, la demande de talent dépasse de loin l'offre. Par conséquent, nous inventons des façons créatives d'accroître l'effectif, y compris la prise en charge de programmes de formation intensifs et onéreux. Aux studios de Vancouver et de Montréal de la MPC, par exemple, nous avons mis sur pied une académie où nous embauchons trois groupes de 25 nouveaux diplômés par année, et nous leur offrons trois mois de formation supplémentaire payés ainsi qu'un contrat d'emploi de 12 mois. Ces nouveaux artistes qui viennent tout juste d'obtenir leur diplôme ont la possibilité de travailler sur les films hollywoodiens les plus importants, les plus difficiles et qui connaissent le plus grand succès aujourd'hui, des projets comme Batman c. Superman, Terminator 4, la franchise Rapides et dangereux, et la liste continue.
    Comment le gouvernement peut-il aider à promouvoir la valeur de l'industrie? Les gouvernements provinciaux et fédéral sont des partenaires essentiels de l'industrie canadienne du long métrage; ils ont participé à l'histoire de son succès et surtout au chapitre de l'essor du secteur des effets visuels cinématographiques. Afin de continuer à appuyer cette histoire de réussite, le gouvernement peut s'assurer que nous sommes visés par des politiques favorables dans les domaines cruciaux que sont les crédits d'impôt, l'immigration et l'éducation.
    Le travail d'effets visuels dont il est question fait l'objet d'une concurrence féroce à l'échelle internationale. Il n'est pas obligé de venir au Canada. Il peut aller n'importe où; il suffit d'appuyer sur une touche. Cela a poussé de nombreuses administrations à offrir des crédits d'impôt nouveaux et améliorés, mais l'une des plus grandes forces de tout système de crédits d'impôt cinématographiques, à mon avis, c'est la constance et la prévisibilité. Une politique et une pratique fédérales relatives aux crédits d'impôt cinématographiques qui appuient les thèmes de la constance et de la prévisibilité sont de grandes mesures de soutien.
    La nature concurrentielle de ce secteur à l'échelle internationale a également des répercussions sur nos effectifs. Le talent se déplace, et nous devons avoir un accès rapide et ininterrompu à ce talent, si nous voulons être concurrentiels. Cela ne signifie pas que l'industrie n'est pas engagée à l'égard du perfectionnement du talent canadien; elle l'est. Toutefois, compte tenu de la nature de l'industrie et de sa croissance rapide au Canada, l'accès au talent étranger est une nécessité concurrentielle. Par conséquent, l'immigration de talent hautement qualifié est absolument essentielle pour apporter l'expérience et le mentorat aux Canadiens. Une politique et une pratique en matière d'immigration qui renforcent notre capacité d'offrir des emplois et d'offrir des permis de travail rapidement et constamment présentent un grand avantage.
    Comme nous tentons d'accroître le nombre de jeunes Canadiens qui sont prêts à entrer dans notre industrie croissante, il est essentiel de disposer d'écoles qui produisent des diplômés ayant reçu une formation adaptée au travail d'aujourd'hui. De plus, le fait d'aider les employeurs à assumer le fardeau financier lié à la formation interne afin de perfectionner les nouveaux diplômés encouragerait un plus grand nombre d'employeurs à élaborer des programmes internes comme celui que nous avons mis sur pied à la MPC.
    En conclusion, ce que j'essaie de démontrer, c'est que l'on peut soutenir que les effets visuels cinématographiques sont le progrès le plus important réalisé par le secteur canadien des services cinématographiques au cours des dernières années, en ce qui a trait à l'expansion du modèle d'affaires. En outre, nous l'avons mis au point à une époque où les effets visuels dans les longs métrages gagnent en importance au sein de l'industrie cinématographique dans son ensemble. En partenariat avec le gouvernement, nous avons établi au Canada un centre d'excellence qui est concurrentiel et qui s'illustre à l'échelle de la planète. Nous avons créé des emplois très intéressants pour le présent et pour l'avenir.
    Merci encore de m'avoir donné la possibilité de prendre la parole, et je serai heureuse de répondre aux questions.

  (1555)  

    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant passer aux questions, en commençant par M. Young, pour sept minutes.
    Merci à tous d'avoir pris le temps de venir ici aujourd'hui pour renseigner notre comité.
    Monsieur Southam, nous avons eu, juste avant la séance du comité, une brève discussion touchant les avantages comparés des longs métrages et des séries. J'aimerais soulever de nouveau le sujet, pour que cela figure au compte rendu. Vous dites que parmi tout ce que les cinéastes offrent au public — les artistes visuels, les directeurs de comédiens, les auteurs — le meilleur véhicule reste le long métrage. En quoi cela s'applique-t-il aux séries et à l'industrie canadienne? Nous avons entendu de précédents témoins dire que, de nos jours, les séries dominent, dans l'industrie du cinéma. En quoi est-ce que cela aide l'industrie canadienne? En quoi est-ce que cela lui nuit?
    Vous avez tout à fait raison, et ceux qui ont dit que les séries sont maintenant la forme dominante utilisée par les auteurs, dans l'industrie cinématographique, confirment toutes nos expériences. De plus en plus de gens aiment écouter une série et estiment que les séries télévisées offrent une expérience tout aussi satisfaisante que les longs métrages.
    Cette situation touche également la façon dont nos membres travaillent. Nous travaillons beaucoup dans le domaine des séries télévisées, j'entends par là des formes de divertissement offertes en série sur toutes les plateformes, et bon nombre de nos membres travaillent dans le domaine des longs métrages.
     J'aimerais faire une distinction importante qui devrait à certains égards, je crois, intéresser votre comité: l'un de nos membres les plus distingués, Clement Virgo, a écrit, dirigé et produit The Book of Negroes, qui était au départ un projet de long métrage et est devenu une minisérie, comme c'est d'ailleurs le cas de la série canadienne bien connue Orphan Black.
    M. Virgo fait une distinction entre son travail de cinéaste, d'une part et, d'autre part, son travail d'homme à tout faire, comme il le dit lui-même. Pour lui, cette expression désigne les périodes où il peut louer ses services et diriger différents projets un peu partout sur le continent.
     Il a également dirigé pour HBO une série bien connue, The Wire. Il travaille beaucoup dans le domaine des séries canadiennes à épisodes, mais il fait une distinction entre ce travail et le travail qu'il accomplit en tant que réalisateur de long métrage, mais aussi en tant que réalisateur de long métrage appelé à travailler dans d'autres formats, par exemple des miniséries comme The Book of Negroes ou des séries qu'il aurait lui-même conçues, écrites ou réalisées avec d'autres scénaristes.
    Tout cela nous ramène, au bout du compte, à la paternité d'une oeuvre. La répercussion générale des longs métrages, dans notre environnement à petit budget, car, au Canada, le milieu ne dispose pas d'un grand financement, ont permis à des personnes comme moi d'être à la foi scénaristes et directeurs d'une même oeuvre, donc auteurs de cette oeuvre.
    Les séries, en général, ne me donnent qu'une tâche très précise. Je vais diriger un ou deux épisodes, et il est certain que je ne serai pas le scénariste de la série. Mes compétences et mon art seront mis à contribution, mais cela ne me donne pas réellement la paternité complète du projet.
    Je crois que ce qui est magnifique et qui vaut la peine d'être conservé, quand on parle des longs métrages, c'est le fait que ce format de 90 à 120 minutes permet de créer des œuvres très personnelles, portant la signature canadienne, qui, en un sens, ont une voix particulière et une histoire unique; c'est cette histoire qui est présentée dans les festivals, dans les cinémas et sur les chaînes télévisées du monde entier, et cette particularité est probablement plus représentative de l'histoire que je veux raconter que les séries de grand format.
    D'un certain côté, la différence entre ces deux fonctions est instrumentale, tout simplement. C'est ce que je voulais dire lorsque je disais que, pour un long métrage, je suis utilisé beaucoup plus, en tant qu'artiste, que dans une série, et c'est le cas le plus souvent, mais pas toujours.
    Comment est-ce que cela se passe pour les autres personnes qui travaillent dans l'industrie, les scénaristes, les acteurs, les techniciens, tous les autres? Est-ce que le Canada profite autant que les autres des séries?
    Oh, oui! Les séries sont la forme dominante. C'est une forme passionnante. C'est un lieu où nous sommes nombreux à avoir beaucoup de plaisir en tant qu'artistes et en tant qu'artisans. Les scénaristes ne font certainement pas exception à la règle, mais imaginez les autres membres de notre organisation, les chefs décorateurs, les monteurs, les monteurs de son, les assistants réalisateurs, les directeurs de production. Vous pouvez imaginer le niveau incroyable de connaissances qu'acquièrent tous ces gens, qui travaillent pour les séries et pour les longs métrages et, étant donné la qualité des séries produites aujourd'hui, nous constatons que ce travail, toutes les compétences acquises pendant les séries, se traduit très bien dans la production de meilleurs longs métrages.
    La synergie est extraordinaire.
    Avant de commencer à diriger un film, ou pendant que vous le dirigez, entretenez-vous des relations avec les organismes gouvernementaux, par exemple, l'ONF ou Téléfilm? Quelle est la fréquence de vos contacts avec eux, sur le plan professionnel? Offrent-ils du soutien aux directeurs, et de quelle nature est ce soutien?

  (1600)  

    En tant que directeur du développement, c'est-à-dire en tant que personne créative — et l'industrie du long métrage en est un très bon exemple, puisque je suis à l'origine d'un projet en collaboration avec un producteur ou un scénariste — mes échanges avec les organismes gouvernementaux que vous avez nommés sont très fréquents.
    Ces échanges sont extrêmement importants. Ils se passent à deux niveaux. Le premier, bien sûr, a trait à l'élaboration d'un budget et du tournage et à l'obtention du financement en vue du projet, mais en outre, à une étape ultérieure du développement, il s'agit d'une relation créative. Dans cette relation, la conversation porte aussi sur le contenu du scénario et elle prend une importance incroyable quant à la façon dont le film va se réaliser, où il sera tourné, quels acteurs seront en vedette.
    C'est une conversation d'une importance critique, et je dirais même que, si elle n'avait pas lieu, aucun d'entre nous ne serait ici.
    Cela me semble assez important. Merci.
    Michelle Grady, vous avez parlé de crédits d'impôt constants et d'immigration. Auriez-vous le temps de donner quelques détails sur ces deux questions et d'expliquer ce que le gouvernement pourrait faire pour aider ce secteur à croître?
    Bien sûr.
    En ce qui concerne les crédits d'impôt, dans le secteur des services, le plus difficile, pour nos clients, c'est l'incertitude, le fait de ne pas savoir si les crédits d'impôt, dans une administration donnée, ne sont pas assurés ou qu'ils sont vacillants. Étant donné qu'ils planifient leur budget très longtemps d'avance, le fait de savoir que, dans cette administration, les crédits sont stables et faciles à utiliser constitue un attrait immense. Ils ne nous oublient pas; c'est un bon début.
    En ce qui concerne les crédits d'impôt eux-mêmes, il n'est nulle part dans le monde possible de réaliser des effets visuels pour un long métrage ou pour une émission télévisée sans une forme ou une autre d'incitatif fiscal raisonnable. Nous travaillons dans un milieu compétitif.
    En ce qui a trait à l'immigration, la croissance au Canada est rapide. Comme je l'ai dit, au cours des quatre dernières années, nous sommes devenus l'un des deux plus grands centres du monde dans ce domaine.
    De manière générale, les possibilités de travailler augmentent, mais nous devons attirer des travailleurs d'autres secteurs. Il y a des gens qui travaillent à ce niveau élevé depuis des années. Nous n'avons pas encore au Canada autant d'artistes, et nous n'avons pas suffisamment d'artistes qui ont travaillé à ces niveaux élevés. Nous nous appuyons sur l'immigration pour trouver davantage de gens, mais aussi davantage d'expérience.
    D'accord, merci beaucoup.

[Français]

     Monsieur Nantel, vous avez la parole et vous disposez de sept minutes.
     Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins d'être ici parmi nous aujourd'hui. Il s'agit de notre dernière rencontre consacrée à l'industrie du cinéma. Vos témoignages seront donc les plus frais à notre mémoire.
    J'aimerais poser une question aux représentants de la Guilde canadienne des réalisateurs.
    Vous avez évoqué une dimension avec laquelle j'étais moins familier, c'est-à-dire l'idée d'allouer un pourcentage des recettes canadiennes à la programmation d'intérêt national. La situation s'est-elle dégradée? Ce ratio de 1 % a-t-il déjà existé?
    Le ratio comme tel n'existe pas, mais cela porte sur l'ensemble de plusieurs formats, y compris les séries dramatiques, les longs métrages et les longs métrages documentaires. Nous avons constaté une chose depuis la mise en oeuvre de cette approche. En définitive, on dit que ce sont des émissions d'importance, qu'il vaut la peine de cibler une partie de l'ensemble des dépenses des télédiffuseurs et de faire en sorte qu'il y ait une licence à cet égard.
    Dans les faits, lorsqu'on regarde les données, on se rend compte qu'il y a un manque d'argent alloué aux longs métrages et aux longs métrages documentaires. Si cela vaut la peine de les inclure dans la catégorie des émissions d'intérêt national, cela vaut également la peine de dépenser de l'argent pour faire en sorte qu'ils soient produits. Nous croyons qu'il ne faut pas nécessairement diminuer les ressources disponibles pour l'ensemble des séries dramatiques, mais il serait souhaitable d'imposer au moins un pourcentage pour faire en sorte qu'il y ait du financement pour les longs métrages.
    Bien sûr.
    Ces critères de programmation d'intérêt canadien sont-ils applicables à tous les télédiffuseurs ou seulement à CBC/Radio-Canada?
    Non, cela s'applique pour l'ensemble des télédiffuseurs.
    Évidemment, j'imagine que CBC et Radio-Canada sont normalement de bons alliés pour vous. La situation économique actuelle de CBC/Radio-Canada ne doit toutefois pas vous aider.

  (1605)  

    L'environnement est difficile pour tout le monde.
     La mise en oeuvre de cette politique du CRTC — et pas nécessairement en détail — faisait partie des recommandations du comité en 2006. On voulait une approche pour faire en sorte qu'il y ait un appui pour la promotion et le financement des longs métrages. Il est pertinent que le CRTC ait une politique à cet égard. Dans les faits, on voit cependant un manque d'appui pour les longs métrages. On suggère donc d'ajouter des obligations. Cela n'augmente pas l'ensemble des obligations des télédiffuseurs. Cependant, cela fait en sorte qu'une portion de l'argent est consacrée aux longs métrages.
    Comme vous avez beaucoup parlé des séries, je vais vous poser une dernière question.
    Que pensez-vous du projet pilote du CRTC relativement à ce qui serait considéré comme du contenu canadien? J'ai cru comprendre que si ces critères étaient appliqués, la série The X-Files serait considérée comme ayant un contenu canadien. Est-ce exact?
     C'est exact.
     On essaie de comprendre ce qui motive cette décision. On comprend qu'il s'agit d'un projet pilote. Bien sûr, nous sommes dans un monde où il y a une concurrence internationale. Évidemment, nous sommes d'avis que c'est grâce à la qualité de nos produits que nous allons obtenir du succès.
     Par contre, chaque année, peu de grandes séries dramatiques avec un budget d'au moins 2 millions de dollars par épisode sont produites. On estime qu'il y en a de quatre à six par année. On semble penser que pour des projets d'un tel niveau d'excellence, nous n'avons pas de réalisateurs. Il y a peut-être une scénariste et une artiste, mais plusieurs membres de notre association ne seront pas considérés.
    On questionne la logique qui sous-tend cela. Pense-t-on qu'il y a un manque de qualité, un manque de talent et un manque de compétences dans nos milieux? C'est tout à fait le contraire. Ces réalisateurs dont on parle travaillent à de grands projets internationaux et sont tout à fait capables de participer à ce type de projets. On questionne cette logique. Pourquoi a-t-on besoin d'un virage d'une telle importance?
    Heureusement, on parle d'un projet pilote.
    Heureusement, c'est un projet pilote.
    Merci beaucoup, monsieur Forget.
    Madame Grady, j'aimerais vous dire à quel point je suis heureux que vous soyez ici parmi nous. Je pense que tout le monde ici voulait entendre parler davantage des effets spéciaux et de la postproduction. Grâce à vous, on aura au moins effleuré ce sujet.
    Sur ce, je laisse la parole à mon collègue Kennedy Stewart, qui voudrait vous poser quelques questions.

[Traduction]

    Je suis heureux d'accueillir ici quelqu'un de la côte Ouest.
    J'aimerais avoir votre opinion au sujet de l'industrie du cinéma en Colombie-Britannique. Pourquoi est-ce que le siège de votre compagnie est situé là-bas? Pourquoi restez-vous dans cette province, et que pourrions-nous faire pour que d'autres compagnies s'y installent?
    Nous nous sommes installés ici lorsque Technicolor, une entrerpise déjà présente au Canada, au Québec, en Colombie-Britannique et en Ontario, a décidé de se lancer dans les longs métrages. Elle a acheté une entreprise du Royaume-Uni, parce que c'est là que se trouvaient les talents. La motivation de MPC était de pouvoir travailler à l'échelle internationale, ne plus être limitée à Londres.
    Vancouver a été le premier choix, un choix évident. C'était le premier choix, mais il n'était pas évident à l'époque. Il y avait déjà depuis quelques années des crédits d'impôt pour l'animation numérique ou les effets visuels, mais ils n'avaient pas encore véritablement été mis à l'essai.
     Les studios voulaient en faire l'essai, alors ils ont communiqué avec MPC, un des studios, et ont dit aux responsables: « Si vous nous aidez à réaliser un projet à Vancouver, nous allons bien vous récompenser. » C'était pour un long métrage que nous avons réalisé en 2008, intitulé Watchmen. Le projet a eu un tel succès que les autres grandes sociétés ont commencé à ce moment-là à nous téléphoner.
    Comment envisagez-vous la croissance de l'industrie, dans cette région?
    Nous sommes remontés jusqu'à 10 ans en arrière, mais si vous pouviez voir 10 ans en avant, que faudrait-il faire pour que le secteur réussisse encore mieux? Comment attireriez-vous davantage d'entreprises, à votre avis?
    Notre principal problème, c'est le talent. Le secteur croît plus rapidement que nous ne pouvons créer des talents canadiens. Nous créons de nouveaux talents canadiens à une vitesse incroyable, mais nous devons nous assurer que les frontières restent ouvertes de façon que les artistes des effets visuels puissent se déplacer, qu'ils puissent venir travailler pour MPC, à des projets comme Batman c Superman.
     Nous offrons du travail à contrat, mais pas beaucoup d'emplois à temps plein. Les gens vont venir travailler avec moi, sur Batman c Superman, mais dès que le projet est terminé, ils vont aller travailler pour une autre entreprise canadienne sur un autre grand film. Ils peuvent aussi se rendre en Nouvelle-Zélande pour travailler sur Le Hobbit, et nous devons nous assurer qu'ils pourront revenir ici, car l'accès à ce bassin de gens talentueux est essentiel.
    Une politique en matière d'immigration qui nous permet de réagir rapidement, en toute transparence, est l'une des mesures clés que nous pourrions prendre.
    C'est un sujet de discussion, pour nos clients; ils ne veulent pas que la source des talents se tarisse. C'est un risque potentiel.

  (1610)  

    Merci.

[Français]

    Monsieur Dion, vous avez la parole et vous disposez de sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie Mme Grady, M. Savoie, M. Southam et M. Forget.
    Monsieur Savoie, pouvez-vous nous résumer, s'il vous plaît, quelle sont vos principales recommandations?
    Nos principales recommandations sont de créer un fonds pour aider les producteurs qui travaillent en région en situation minoritaire. Le fonds pourrait être géré par le Secrétariat des langues officielles ou par Téléfilm Canada, qui serait obligé de donner ces fonds à des producteurs francophones pour développer l'industrie francophone en situation minoritaire.
     Combien d'argent devrait être consacré à ce fonds?
    On parle de 700 000 $ par année. Ce serait suffisant pour faire un ou deux longs métrages. Téléfilm Canada a ce qu'on appelle le Programme à micro-budget. Ce programme peut permettre de faire des longs métrages qui peuvent coûter jusqu'à 2,5 millions de dollars. On pourrait donc en faire un ou deux par année.
    S'agit-il d'une nouvelle demande que vous formulez au comité ou en avez-vous déjà discuté avec le gouvernement?
    C'est une nouvelle demande que je présente au comité.
    Je vous remercie beaucoup.
    Je vais regarder les mémoires que j'ai devant moi. Je vous remercie beaucoup, monsieur Southam, de votre présentation.

[Traduction]

Dans un de vos paragraphes, vous parlez du rapport présenté par le comité en 2006. Vous citez quelques aspects. J'aimerais comprendre: dites-vous qu'il ne s'est pas fait grand-chose au sujet de ces aspects, depuis 2006, ou que vous êtes satisfait de ce qui a été fait et que vous voulez maintenant aller plus loin?
    Je crois que je vais commencer.
    Il y a quelques minutes, nous avons parlé des programmes d'intérêt national, c'est-à-dire de l'obligation pour les diffuseurs d'investir dans certains types de programmes à risque élevé. Je fais un lien. À ce moment-là, le comité a donné un mandat, en termes généraux, consistant à faire plus...
    Pensez-vous que le mandat a été rempli ou non?
    Non. Nous ne pensons pas que cela a été fructueux.
    D'accord, vous ne le pensez pas. Je comprends maintenant ce paragraphe; je n'étais pas certain.
    Je ne suis pas très sûr non plus du pourcentage. Dans le premier paragraphe du point un, on dit ceci: « ... au moins 1 % de leurs recettes canadiennes à la production... »
    Le pourcentage est-il de 1 % de 30 %, ou prenez-vous 30 % de ce 1 %?
    Je vais clarifier les choses; l'obligation est en général de 5 %, c'est-à-dire une tranche des 30 % des obligations globales des diffuseurs. La tranche de 5 % est la part qui doit être consacrée à ces programmes. Nous disons que ce pourcentage de 5 % n'a pas donné de résultat. Même si les longs métrages sont inclus dans cette tranche de 5 %, c'est de l'argent qui n'est pas dépensé.
    Nous proposons d'augmenter ces obligations d'au moins 1 %, mais toujours dans la tranche de 30 %.
    Il s'agira donc d'une tranche de 6 % des 30 %?
    Eh bien, six, c'est cinq plus un, alors oui, de la tranche des 30 %.
    Les 30 % resteront 30%.
    Oui, c'est précisément là ce que je veux dire. Nous ne suggérons pas que les obligations globales des diffuseurs soient augmentées.
    D'accord.
    Voulez-vous 1 % de cette tranche de 6 %, ou est-ce que ce sera un montant global de 6 % dont vous espérez avoir une part?
    Nous ne sommes pas allés jusqu'à définir ce que la cagnotte globale devrait être. Nous disons qu'un minimum de 1 % qui serait consacré aux longs métrages ferait en sorte que les réalisateurs auraient davantage d'argent entre les mains. Cela comblerait une des lacunes de la politique actuelle, si on s'assurait qu'au moins 1 % était consacré aux longs métrages. Ce que nous constatons, aujourd'hui, c'est que, même si les longs métrages sont compris, l'argent n'est en fait pas consacré aux longs métrages. Il est consacré à d'autres options possibles, par exemple les séries dramatiques.
    Je vais poser la question que j'ai déjà posée à M. Savoie. Est-ce que c'est la première fois que vous avez fait cette demande?
    Oui.
    D'accord, merci beaucoup.

[Français]

    J'espère que c'est clair pour tout le monde. On parle de 1 %.

[Traduction]

    Deuxième point; il semble que le mot « conviennent » vous pose problème.

[Français]

    En français, le mot est qui « convienne ».

[Traduction]

    Que s'est-il passé? Existe-t-il une autre interprétation de ce mot?
    Pourriez-vous nous dire pourquoi vous avez soulevé cette question? Qu'est-ce qui cloche avec le mot « conviennent » tel qu'il est présentement utilisé?

  (1615)  

    Il s'agit des services de télévision à la carte et de vidéo sur demande. Selon la décision, les diffuseurs devaient payer des droits de présentation pour tous les nouveaux longs métrages canadiens. Un film qui est un long métrage canadien original doit automatiquement être offert dans le cadre de ces services de télévision à la carte et de vidéo sur demande.
    Nous constatons que cela ne se passe pas toujours ainsi, et cela a trait aux différentes opinions de ce qui constitue quelque chose qui convient... Nous affirmons que le seul fait d'être un long métrage canadien admissible veut dire qu'il doit être inclus dans ces services. Nous avons de la difficulté à établir que tous les films canadiens qui peuvent être offerts dans le cadre de ces services le sont, et il se peut que les Canadiens n'aient pas accès à ces films.
    Merci beaucoup.
    Je crois que j'ai le temps d'aborder mon dernier point.

[Français]

    Quand on parle de la télévision par contournement, il s'agit de Netflix et de quelques autres qui s'en viennent ou qui existent déjà.
    Il va y en avoir d'autres.
    Oui, et à cet égard vous avez une liste de propositions. Encore une fois, est-ce nouveau? En avez-vous déjà parlé au gouvernement ou au CRTC?
     On en a déjà parlé. On a fait cette recommandation — et plusieurs d'entre nous l'avons faite — dans le cadre de l'initiative « Parlons télé : une conversation avec les Canadiens ».
    Il importe de souligner que ce format domine le marché, mais il n'est pas inclus dans le système actuel qui demande aux diffuseurs privés de faire une contribution minimale au Fonds des médias du Canada.
    Quand vous avez parlé de ces quatre points, quelles ont été les réactions?
    En fait, on a constaté que le président du CRTC a formulé la demande. Je crois que c'était très couru et on a bien remarqué dans la presse que c'était le cas. Disons que la chose n'a pas été résolue par la suite. Nous trouvons que la question est très importante, en particulier compte tenu de l'évolution du visionnement à domicile sur ces supports.
    Pour le moment, vous demandez seulement au comité que ces industries de contournement fournissent des informations.
    C'est le cas pour le moment et ce serait déjà beaucoup.
    Si elles refusent de le faire, c'est peut-être parce qu'elles craignent qu'après vous avoir fourni ces informations, vous ayez des demandes de contenu canadien précis qui, je présume, seraient comparables à celles de leurs compétiteurs canadiens qui, eux, sont assujettis à ces demandes.
    On ne veut pas faire de procès d'intention, mais on se demande pourquoi ces informations ne seraient pas offertes au public canadien étant donné que ces compagnies opèrent dans le secteur canadien.
    Merci.

[Traduction]

    Monsieur Dykstra, vous avez sept minutes.
    En général, je calcule assez bien, mais, quand M. Dion a demandé si tout le monde comprenait bien ce qui était décrit, j'ai dû me placer dans l'autre catégorie.
    Vous pourriez peut-être, monsieur Forget ou monsieur Southam revenir sur le sujet encore une fois pour me dire quelle est votre interprétation de ce qui est actuellement en place et de ce qui devrait y être à votre avis.
    Actuellement, l'obligation globale des télédiffuseurs à l'égard des émissions canadiennes dont ils acquièrent les droits de présentation s'élève à 30 %. Une partie de ces 30 % va aux émissions d'intérêt national, c'est-à-dire ses émissions à risque élevé comme les séries dramatiques, les longs métrages documentaires et les longs métrages de fiction.
    Les 5 % font partie de la tranche de 30 %. Des 30 % qu'ils doivent dépenser globalement pour la programmation canadienne, ils doivent en utiliser 5 %, et les 25 % qui restent peuvent servir au contenu canadien de leur choix. Les 5 % sont destinés aux projets de grande envergure.
    Nous croyons que les longs métrages de fiction et les longs métrages documentaires font partie des projets visés par les 5 %. Toutefois, lorsqu'on regarde les chiffres, on voit que peu d'argent est effectivement dépensé pour l'acquisition des droits de présentation. Sans vouloir déshabiller Pierre pour habiller Paul, nous suggérons d'inviter les télédiffuseurs à continuer de dépenser comme ils le font présentement — sur les séries dramatiques par exemple — tout en augmentant de 1 % l'obligation comprise dans les 30 %, et que ces 1 % soient consacrés aux longs métrages afin d'aider et d'en arriver à des dépenses effectivement engagées pour l'acquisition de droits pour ceux-ci.
    L'enjeu ici est de mettre en place un système dont l'intégration est supérieure, de mettre un terme à ce cloisonnement où le long métrage est l'apanage des cinémas pour en arriver à une intégration aux services en ligne et à la télédiffusion. Il s'agit d'une façon de faire participer les télédiffuseurs au financement et aux droits de présentation pour les longs métrages.
    J'espère que j'ai répondu à votre question.

  (1620)  

    Oui, c'est plus clair. Parfois, la deuxième ou la troisième fois est la bonne.
    L'un des éléments que vous avez mentionnés fait partie de la tranche de 1 % des recettes qui est destinée à soutenir la production de films canadiens. Comment cet argent devrait-il être réparti?
    Nous avons traité de cet aspect pendant notre étude de l'industrie de la musique — à savoir l'offre éventuelle de financement supplémentaire, qu'il provienne du ministère du Patrimoine canadien ou du gouvernement fédéral, soit assumé uniquement par le ministère ou s'il y avait un financement de contrepartie de la part du secteur privé, et toutes les autres combinaisons possibles —, et cela a soulevé des préoccupations relativement à la façon dont l'argent serait distribué et à propos de la personne qui aurait à prendre les décisions.
    Pourriez-vous approfondir un peu la chose, et peut-être qu'ensuite Michelle pourrait aussi formuler des commentaires. Si nous bonifions le fonds, comment l'argent devrait-il être distribué, et qui en serait responsable?
    L'argent dont il est question, à l'égard des émissions d'intérêt national, c'est l'argent qui est déjà dépensé par les télédiffuseurs pour acquérir des droits de présentation, et nous ne suggérons aucunement d'y changer quoi que ce soit.
    Nous espérons qu'une plus grande partie de ces ressources — à savoir l'argent des télédiffuseurs allant à l'acquisition de droits pour la diffusion de contenu sur les ondes — sera consacrée aux longs métrages. Le secteur se portera mieux si un montant supplémentaire va aux longs métrages. Le gouvernement n'a pas à dépenser plus d'argent, entre autres choses.
    Cela dit, par contre, la participation des télédiffuseurs aiderait au financement des longs métrages. L'appui au financement des longs métrages permet d'alléger le poids assumé par les autres partenaires, y compris le gouvernement, et de renforcer le système.
    Michelle.
    Excusez-moi, pouvez-vous reformuler la question en mettant l'accent sur le secteur des services pour les effets visuels de longs métrages?
    Vous avez abordé le sujet du crédit d'impôt, du soutien qu'il fournit et de la façon dont on pourrait l'améliorer. Pourriez-vous nous en parler un peu plus, du point de vue du secteur des effets visuels?
    Absolument.
    À mon avis, nous devons nous garder de chercher à obtenir le crédit d'impôt le plus généreux au monde. Nous courons à notre perte. Je crois que nous devons constamment comparer notre crédit d'impôt aux régions du monde qui connaissent du succès afin de veiller à demeurer compétitifs. Si nous faisons cela, nous allons bien nous en sortir. Nos infrastructures, nos innovations et nos talents sont fabuleux.
    Je ne suis pas nécessairement partisane de l'augmentation des crédits d'impôt. Je penche davantage du côté de l'évaluation: les comparer constamment avec ceux des marchés qui nous font concurrence.
    Le plus important, c'est que le gouvernement n'arrête jamais de montrer à l'industrie qu'elle est appuyée et estimée et que les crédits d'impôt ne sont pas menacés.
    C'est une opinion intéressante.
    Vous avez parlé de l'incroyable développement de l'industrie au Canada ainsi que des emplois qui existent maintenant. Si j'aborde ce sujet et souhaite l'approfondir un peu plus, c'est que vous avez accompli cela grâce au modèle actuel. Puisque ce développement exponentiel a eu lieu au cours des 10 dernières années avec le système que nous avons présentement, serait-il juste de dire que le système fonctionne?
    Le système fonctionne depuis longtemps en Colombie-Britannique. Le système en vigueur sert bien le secteur des effets visuels au Québec.
    L'une des difficultés — et je n'ai absolument aucune solution pour y remédier — tient au fait que nous affrontons la concurrence à l'échelle mondiale ainsi qu'à l'échelle nationale. Les provinces se font concurrence avec leurs crédits d'impôts, et je n'ai pas de solution à cet égard. À l'échelle du Canada, on peut dire qu'on déshabille Pierre pour habiller Paul.
    Nous avons été chanceux de pouvoir développer les deux secteurs. C'est parce que nous sommes une entreprise internationale. Mais nous sommes en concurrence avec les autres provinces, tout comme le sont les autres entreprises.

  (1625)  

    La concurrence est-elle apparue au cours des 10 dernières années, ou cela remonte-t-il à quatre ou cinq ans, lorsque les provinces ont commencé à se montrer plus combatives et à suivre l'exemple du gouvernement fédéral au chapitre des crédits d'impôts, y voyant la possibilité de prendre une plus grande part au pays?
    Oui, c'est exactement ça. Il y a10 ans, l'industrie était négligeable.Les choses ont changé au cours des quatre dernières années.
    Merci.
    Vous avez également abordé dans vos commentaires la question de l'industrie du film indépendant. Vous avez parlé de changements précis que vous aimeriez voir. J'ai remarqué que le renforcement des outils actuels, comme les crédits d'impôt, en faisait partie.
    Pourriez-vous nous en parler un peu plus? Cet outil a hors de tout doute porté ses fruits. Grâce à lui, un grand nombre d'entreprises ont eu l'occasion de croître au Canada. Selon vous, comment pourrions-nous renforcer les crédits d'impôt actuels?
    Je vous prie de répondre en moins de 30 secondes.
    Si vous n'y voyez pas d'objection, madame Grady, je vais reprendre vos paroles, car il s'agit d'un bon exemple. Vous avez parlé d'une expansion et d'un approfondissement de l'expertise et de la compétence dans le système et du fait que nous n'étions pas de gros joueurs dans le secteur des effets visuels il y a 10 ans. Je crois que les exposés d'aujourd'hui montrent qu'un système de crédits d'impôt stable et prévisible favorise le développement de l'expertise, de l'infrastructure, des studios et de la postproduction. Je crois que les effets visuels sont un bon exemple de réussite à ce chapitre.
    En ce qui concerne le renforcement des crédits d'impôt, nos partenaires, ainsi que ceux au Canada, désirent un environnement prévisible et stable ainsi qu'un outil qui permettra d'injecter efficacement de l'argent dans notre système et dans notre pays.
    Merci.
    D'accord, merci beaucoup, et merci à nos témoins. Si vous avez des choses aux fins de notre étude, je vous invite à nous les faire parvenir immédiatement. Nous allons conclure l'étude et commencer à travailler sur le rapport très bientôt. Nous vous serions très reconnaissants de nous faire parvenir vos contributions d'ici un jour ou deux, et merci encore d'être venu témoigner aujourd'hui.
    Nous allons suspendre brièvement la séance.

    


    

  (1630)  

    Nous reprenons la 46e séance du Comité permanent du patrimoine canadien.
    Nous allons poursuivre notre étude de l'industrie du long métrage canadien.
    Nous avons parmi nous aujourd'hui Mme Ann Mainville-Neeson, vice-présidente, Politique de radiodiffusion et Affaires réglementaires, de Telus et Mme Prem Gill, directrice, Programmation et Contenu.

[Français]

     De Québecor Média inc., nous accueillons M. André Provencher, vice-président, Création et Développement international.

[Traduction]

    Madame Mainville-Neeson, vous avez la parole.
    Mesdames, vous avez au plus huit minutes.
    Je vous suis très reconnaissante de me donner l’occasion de prendre la parole aujourd’hui. En tant que directrice générale du contenu à Telus, je suis responsable de gérer les engagements de Telus en matière de télévision communautaire en Colombie-Britannique et en Alberta. Je suis accompagnée d’Ann Mainville-Neeson, vice-présidente, Politique de radiodiffusion et réglementation à Telus, dont vous venez de faire la connaissance.
    Je suis très heureuse de vous communiquer des détails sur le modèle de financement que nous avons mis sur pied pour soutenir la création de la télévision communautaire dans l’Ouest canadien. Le modèle de financement de Télé Optik Local est unique en son genre, car il repose sur le choix des téléspectateurs et permet de s'assurer que le public sera au rendez-vous au moment de la diffusion de la programmation créée.
    Telus exploite un service de distribution de radiodiffusion en Colombie-Britannique, en Alberta et au Québec, c’est pourquoi elle tient à soutenir la création de contenus locaux. L’engagement financier de Telus à ce chapitre se concrétise notamment par son programme de financement de la télévision communautaire appelé Storyhive. La plateforme sociale Storyhive met à contribution les téléspectateurs en leur donnant l’occasion de jouer un rôle de premier plan dans la formation et le soutien des créateurs de contenus locaux. Plus précisément, Storyhive est comparable aux plateformes de financement participatif, comme Indiegogo et Kickstarter, sauf que, au lieu de demander des fonds à la collectivité, les créateurs lui demandent des votes. Ils peuvent ainsi montrer l’intérêt du public pour le contenu qu’ils désirent produire et pour lequel ils cherchent du financement.
    Notre modèle de financement, inspiré de celui de Kickstarter, permet à tous les créateurs de contenu de la Colombie-Britannique et de l’Alberta de soumettre leurs idées afin que le public puisse voter pour celle qu’il souhaiterait voir financée et produite. Le succès de Storyhive s’explique par le fait que le public participe au projet dès l’étape de l’idéation. Cette participation se traduit ensuite par une forte cote d’écoute des émissions diffusées par le service de télévision communautaire.
    De plus, la plateforme Storyhive favorise et stimule la collaboration entre les différents acteurs du milieu de la création de la Colombie-Britannique et de l’Alberta. Fait à noter, la plateforme propose un annuaire qui facilite les échanges entre les réalisateurs, les scénaristes, les producteurs, les compositeurs, les spécialistes des médias sociaux et les professionnels de tous les horizons. C’est un peu comme un mini-LinkedIn à l’intention du milieu de la création de l'Ouest canadien. Telus offre aussi aux candidats retenus une formation complète pour les aider à réaliser le mieux possible leur idée.
    À ce jour, nous avons financé 59 projets par l’intermédiaire de Storyhive, et plus de 1 800 créateurs ont participé au programme. J’ai eu la chance de rencontrer personnellement les 59 producteurs de ces projets, et je peux vous dire en toute honnêteté que les subventions et la participation du public changent véritablement la donne. Notre objectif est de faire de Storyhive l’une des sources de financement les plus populaires et les plus crédibles auprès des créateurs de contenu communautaire et des cinéastes émergents de la Colombie-Britannique et de l’Alberta. Ainsi,Telus appuie la création d’une télévision communautaire de qualité qui est pertinente pour les téléspectateurs.
    Nous sommes convaincus qu’il n’a jamais été aussi stimulant de créer du contenu communautaire au Canada. Storyhive est une façon nouvelle et novatrice d’atteindre et de bâtir un auditoire mobilisé en donnant la parole à celui-ci dans le processus de décision. Nous ne créons pas du contenu uniquement pour remplir nos obligations réglementaires, nous créons du contenu qui intéresse les gens du pays. Grâce à notre plateforme ouverte, tout un chacun peut présenter une demande de financement et obtenir le soutien financier dont il a besoin pour porter son idée à l’écran. Storyhive est un outil remarquable qui permet aux créateurs de la Colombie-Britannique et de l’Alberta de faire leur entrée sur le marché. Je vous invite donc à rester à l’écoute! Vous verrez de plus en plus de personnes se tailler une place grâce à cette plateforme.
    Merci.

  (1635)  

    Continuons.

[Français]

     Monsieur Provencher, vous avez la parole
     Monsieur le président, chers membres du comité, si je comprends bien, je suis votre dernier témoin à comparaître aujourd'hui dans le cadre de cette étude. J'apprécie beaucoup le temps que vous nous accordez aujourd'hui.
    Je m'appelle André Provencher et j'ai l'honneur de représenter aujourd'hui Québécor Contenu de même que TVA Films, soit notre unité d'affaires qui intervient plus spécifiquement dans la distribution de longs métrages et de contenus audiovisuels sur les marchés de la télévision, du DVD et des plateformes numériques comme la vidéo sur demande et la vidéo sur demande par abonnement.
    Au cours de son histoire, Québecor a démontré un attachement profond et un soutien à la fois tangible et indéfectible envers le cinéma québécois francophone. Lancé en 2008 à l'initiative de son actionnaire principal, le service « Éléphant, mémoire du cinéma québécois » en représente sans doute la plus formidable illustration.
    Jusqu'à ce jour, Québecor a investi plus de 6 millions de dollars dans la restauration de 200 films du répertoire cinématographique québécois et les a rendus disponibles à un large public sur diverses plateformes facilement accessibles. La réussite et le rayonnement de ce projet philanthropique sont tels qu'ils dépassent maintenant les frontières et s'étendent jusqu'au Festival de Cannes. En effet, dans quelques semaines ou dans quelques jours, à l'initiative d'Éléphant, le prestigieux festival international fera place pour une seconde année à un classique du répertoire cinématographique québécois avec la présentation du film Les Ordres, de Michel Brault.
    C'est dire à quel point Québecor a à coeur les oeuvres du cinéma canadien et francophone, en particulier. Dans cet esprit, nous nous réjouissons de l'examen que vous avez entrepris sur l'industrie canadienne du long métrage et nous tenons à vous en féliciter. Nous vous remercions également de l'invitation à venir exposer notre point de vue et discuter avec les membres du comité.
    Force est d'admettre que l'industrie canadienne du long métrage est soumise de plus en plus à des enjeux de taille, dont plusieurs découlent de la diversification des plateformes de diffusion, particulièrement celles numériques. La multiplication des choix offerts aux consommateurs entraîne une évolution des comportements qui obligent l'ensemble des acteurs à redéfinir leurs approches stratégiques et leur position particulière dans la chaîne des valeurs. En ce sens, nous croyons nécessaire que l'examen sur l'industrie canadienne du long métrage englobe non seulement les impacts découlant de l'ère numérique, mais aborde également les facteurs d'inertie qui affectent une transformation réelle et souhaitable du cinéma canadien. Comme le souhaitait René Bonnell, l'auteur d'un examen très remarqué du cinéma français réalisé l'année dernière, il s'agit ici d'éviter de proposer des changements pour qu'au fond rien ne change.
    L'adaptation aux défis courants et anticipés exige en effet de l'industrie canadienne du long métrage qu'elle s'interroge sur ses fondements et les mécanismes qui la gouvernent. Cela dit, nous ne croyons pas que de nouvelles règles plus contraignantes à l'endroit des diffuseurs canadiens, ou encore l'ajout de nouveaux fonds publics sans contrepartie d'un nouvel équilibre des risques d'affaires, puissent faire partie des solutions à considérer.
    Historiquement, l'industrie canadienne du long métrage a permis aux créateurs, aux cinéastes, aux artistes et aux artisans de refléter la culture et les valeurs de notre pays en bâtissant un répertoire riche, diversifié et unique. Cette contribution fondamentale s'est construite en majeure partie grâce aux politiques et au financement mis en place au fil du temps par les gouvernements fédéral et provinciaux. Bien entendu, nous en avons retenu plusieurs bénéfices, dont ceux d'une cinématographie abondante et d'une industrie générant des retombées économiques indispensables.
    Ces acquis doivent maintenant être consolidés et augmentés pour tirer avantage de la conjoncture numérique actuelle. Pour ce faire, nous avons relevé quatre changements ou ajustements structurels à considérer, sous la prémisse générale d'un rapprochement plus soutenu et marqué entre le cinéma et le public canadien. Autrement dit, nous voulons faire en sorte que les consommateurs soient le point de départ de toute transformation de l'industrie.
     Le premier changement touche aux assises financières et aux risques d'affaires des entreprises. Le temps est venu, nous semble-t-il, de revoir la répartition du risque entre les producteurs, qui encourent très peu de risques, et les distributeurs, qui sont toujours exposés financièrement. Nous saluons d'ailleurs la récente initiative qu'a eue Téléfilm Canada de revoir la pondération des facteurs financiers et des facteurs qualitatifs dans le cadre de l'analyse de la performance des longs métrages. À cet égard, nous serions en faveur d'une pondération qui accorderait une nette prédominance aux critères financiers. Cela permettrait de tenir compte de la hauteur réelle des risques d'affaires assumés par les entreprises tout en créant des incitatifs plus déterminants au recours à des fonds privés.
    Le second changement vise la sélection des longs métrages à produire et à financer. Le processus actuel est dominé par les agences d'État. Au cours des dernières années, ces agences ont accordé une importance disproportionnée au cinéma d'auteur par rapport au cinéma grand public. Il faudrait davantage se préoccuper du cinéma populaire qui génère les revenus autonomes essentiels à la survie de nombreux pans de l'industrie. Dans cette perspective, il est approprié que la voix des distributeurs, des diffuseurs et des exploitants de salles soit davantage entendue.

  (1640)  

     La réussite du long métrage repose sur l'implication en amont de tous les éléments de la chaîne de valeur. À terme, le mode de sélection doit être « débureaucratisé » et reposer sur des systèmes d'enveloppes comparables par rapport à ce qui fait maintenant le succès du Fonds des médias du Canada. En vertu de ce dernier, c'est le marché, et non la bureaucratie, qui détermine les émissions à produire.
    Le troisième changement concerne la distribution et aborde la situation particulière du marché francophone. En 2012, notre filiale TVA Films  a été contrainte de renoncer à ses activités de distribution dans les salles en raison de leur rentabilité négative et du niveau exagéré de concentration entre les mains d'un quasi-monopole. Mais, au-delà de la nécessité d'introduire et de maintenir une concurrence plus dynamique dans le marché francophone, nous sommes d'avis que la contrainte de la projection en salle doit être progressivement éliminée pour rejoindre les publics là où ils se trouvent.
     Aux États-Unis, Netflix et YouTube,  notamment, ont annoncé la production de films qui seront d'abord projetés sur leurs plateformes respectives. Il faut que la commercialisation et le plan de distribution d'un long métrage ne soient plus emprisonnés dans une formule du one size fits all.
    Elles doivent en effet s'ajuster aux façons les plus efficaces et rentables d'exploiter des oeuvres. Par exemple, en certaines circonstances, la projection simultanée en salle et sur les plateformes numériques favoriserait l'atteinte des publics qui se trouvent dans des régions éloignées des grands centres. En ce sens, l'innovation et l'expérimentation sont de plus en plus des valeurs incontournables.
    Le dernier changement vise la coproduction internationale et l'exportation. Fièrement, le Canada a déjà pris des mesures concrètes pour favoriser les échanges internationaux, notamment par l'entremise de traités de coproduction. Ces mesures sont efficaces et peuvent êtres assouplies pour éviter certains effets pervers comme l'inflation des coûts. Notre industrie et nos entreprises devraient également être encouragées à rechercher des partenariats stratégiques et financiers qui soient  moins à la pièce et plus globaux avec leurs vis-à-vis étrangers.
    En conclusion, l'industrie canadienne du long métrage fait face à des défis majeurs qui ne peuvent être résolus par des changements mineurs. Nous devons revoir chacune des conditions d'exploitation et nous assurer qu'elles mobilisent et responsabilisent l'ensemble des acteurs au profit du public canadien et de notre cinématographie dans son ensemble.
    Je vous remercie.
    Merci.

[Traduction]

    Passons maintenant aux questions.
    Monsieur Yurdiga, vous avez sept minutes.
    Je tiens à remercier tous ceux qui ont participé à la discussion d'aujourd'hui sur l'industrie du film.
    Je tiens à féliciter Telus d'avoir investi dans notre industrie cinématographique et dans d'autres émissions canadiennes. Vous en avez produit plus qu'un peu grâce à vos programmes.
    Madame Gill, pouvez-vous nous donner quelques exemples de réussite dans l'industrie du film?
    Qui ont trait à Storyhive?
    M. David Yurdiga: Oui.
    M. Prem Gill: Je crois que je vais vous expliquer rapidement comment fonctionne Storyhive. Il s'agit de microsubventions qui servent à financer des courts métrages et des séries web, et nous tenons actuellement un concours en vue de subventionner la production de vidéoclips. Puisqu'il s'agit de microsubventions, nous ne pouvons pas financer des longs métrages, mais nous espérons tout de même que les gens vont se faire une place dans cet environnement. C'est comme une pépinière où les gens de talent peuvent faire l'expérience du système et comprendre comment il fonctionne.
    En ce qui concerne les réussites qui en ont découlé, des gens nous ont présenté des courts métrages financés au moyen de Storyhive et nous leur avons accordé des subventions plus importantes en vue de productions plus longues. On les voit passer par notre système. Certains de ces films ont été présentés dans le volet courts métrages de festivals comme Sundance, le festival du film de Vancouver ou d'autres festivals plus modestes. Nous espérons également que la croissance de ce programme — qui n'existe que depuis environ un an et demi — amènera ces gens à faire leur entrée dans le système et à produire du contenu canadien d'envergure.

  (1645)  

    Combien de productions sont financées au moyen de Storyhive par année?
    L'année dernière, nous avons financé 59 projets. Nos exercices tombent en quelque sorte entre l'année civile et l'année de radiodiffusion, mais, en date de mars, nous avions accordé plus de 700 000 $ en subventions à des créateurs en Colombie-Britannique et en Alberta.
    Pouvez-vous nous donner des exemples de réussite chez les participants de l'année dernière?
    Absolument.
    Nous venons de terminer un concours pour une série web. Dans le cadre de ce programme, 30 projets étaient en lice pour deux prix de 50 000 $ aux fins de la production d'une série. Le premier épisode produit pour une série s'appelle un pilote. On a soumis les pilotes au vote du public. Nous n'allions financer qu'un seul projet par province, alors nous estimons que c'est toute une réussite que d'avoir finalement financé deux projets par province — à hauteur de 50 000 $ chacun — pour la production de séries, parce que les projets ont suscité un incroyable intérêt. Actuellement, les projets ont été visionnés environ 85 000 fois sur YouTube, et cela est pris en considération dans notre plateforme.
    Comme les créateurs possèdent tous leur propriété intellectuelle, leur contenu se trouve sur leur site web. Certains d'entre eux présentent leur oeuvre en première à des festivals Web à Toronto et à d'autres endroits en Amérique du Nord. Les réussites ne font que commencer, ce n'est que le début de l'histoire.
    Le programme Storyhive de Telus n'utilise aucun financement gouvernemental, mais il donne aux producteurs de tous les niveaux d'expérience l'occasion de participer, et la production réussit ou échoue.
    Pourquoi le modèle de Storyhive fonctionne-t-il?
    C'est une question très intéressante.
    Je pense qu'il fonctionne parce que nous tenons compte, en quelque sorte, de la collectivité. Elle nous aide à prendre des décisions relativement à la programmation.
    Nous montrons à ces gens comment attirer le public. Le risque est faible, puisqu'il s'agit d'une subvention de 10 000 $. Ils jouissent du confort de l'univers de Storyhive, où l'on prend soin d'eux et on les aide à comprendre comment se constituer un public, particulièrement au moyen des plateformes sociales.
    Je dirais qu'il s'agit de l'élément déterminant: les aider à comprendre comment attirer le public. Il peut s'agir d'un public mondial, peut-être pas seulement d'un public local ou d'un public canadien. Mais, assurément, il s'agit de personnes qui s'intéressent à leur contenu.
    C'est une pépinière pour la mise en valeur du talent, pour rassembler les gens et pour trouver de nouvelles façons de raconter les histoires locales.
    Passons à autre chose. Je sais que Telus a investi beaucoup d'argent dans nos collectivités pour s'assurer que Storyhive fonctionne.
    L'industrie cinématographique canadienne peut-elle survivre sans investissement gouvernemental?
    Je dirais que non, mais je vais laisser Ann répondre à cette question.
    Je pense que beaucoup des programmes que nous avons en place, y compris le programme de crédits d'impôt, sont très importants pour l'industrie.
    Pour ce qui est des autres sources de financement privé, comme ce que Telus fait pour la programmation communautaire, ces types de programmes continueront d'être importants. Comme l'a souligné le CRTC, ce que nous faisons avec Storyhive et nos programmes communautaires fait partie de notre obligation réglementaire, alors nous devons dépenser cet argent de toute façon. Par contre, c'est la façon dont nous avons choisi de le dépenser qui est vraiment novatrice et que nous voulons porter à l'attention du comité.
    Toutefois, ce qui importe, au bout du compte, c'est de ne pas chercher à obtenir trop de subventions qui nuiront à l'industrie globale de la radiodiffusion. C'est notre point de vue.
    Existe-t-il d'autres compétiteurs qui offrent des produits comparables sur les marchés canadiens? Je suis au courant de ce que Telus fait, mais y a-t-il d'autres joueurs?
    Pas que je sache. Des concours similaires sont peut-être tenus.
    Un des autres éléments concernant la plateforme, c'est que le répertoire de créateurs auquel j'ai fait allusion au début de mon discours en devient aussi actuellement une partie fort intéressante. Comme vous l'avez entendu dire par différentes personnes qui se sont présentées devant le comité, nous avons une communauté cinématographique et télévisuelle émergente et très dynamique.
    Il y a une communauté établie, mais il y a aussi quelque part une communauté artistique émergente et en devenir, et cela permet aux gens de vraiment nouer des liens. Vous pourriez être un musicien local, mais ne pas du tout savoir comment faire un vidéoclip. Vous pouvez réellement entrer en contact avec des gens au moyen de notre plateforme. Je pense que c'est un aspect qui la distingue. Même si d'autres tiennent des concours similaires, où on peut obtenir des microsubventions pour financer des émissions de télévision, il s'agit d'un aspect tout à fait unique pour ce qui est des courts métrages.
    Je m'intéresse aux participants de Storyhive.
    S'agit-il de jeunes? Quelle est la fourchette d'âge? Est-ce qu'on va des adolescents jusqu'à des gens de n'importe quel âge?

  (1650)  

    C'était vraiment intéressant.
    Au départ, nous pensions qu'il s'agirait d'un public typique de la génération Y, mais en réalité, il varie de 24 à 60 ans. Une communauté très active de personnes dans la mi-trentaine jusqu'à la quarantaine participe également à Storyhive. Il peut s'agir de personnes qui travaillent dans un atelier d'effets visuels le jour, mais qui sont passionnées par un projet, un court métrage, qu'elles ont toujours voulu réaliser. Elles y participent aussi. Elles n'ont pas nécessairement créé leur propre propriété intellectuelle dans le cadre de leur travail de jour, mais elles y participent aussi.
    La tendance penche effectivement du côté des gens un peu plus jeunes, mais pas aussi jeunes que nous l'avions prévu. C'est devenu un endroit très intéressant. Je dirais que l'âge moyen des participants est probablement de 34 ans.
    Merci beaucoup.

[Français]

     Monsieur Nantel, je vous cède la parole pour sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie tous les trois d'être ici parmi nous aujourd'hui. Vous êtes nos derniers témoins à comparaître à ce sujet. Je trouve fascinant que, dans les deux cas, on parle beaucoup de la télévision bien qu'il s'agisse d'une étude sur l'industrie du cinéma. Je pense que ce n'est pas étonnant, dans la mesure où la télévision est clairement le mode de diffusion qui occupe la deuxième place en termes de popularité auprès des consommateurs québécois et canadiens.
     Monsieur Provencher, de toute évidence, vous avez un important bagage d'expériences. Je me souviens d'une époque où vous étiez à TVA et où je vous y croisais. À maints égards, vous avez veillé à la mise à jour des modèles d'affaires. Vos quatre recommandations sont d'ailleurs largement basées sur la dimension business de la production et sur l'apport financier.
    Comment voyez-vous l'avenir de la télévision? Les difficultés financières de toutes les stations de télévision généralistes ont fait la une des journaux récemment. Comme je me plais souvent à le rappeler, quand nous avons été élus en 2011, la plupart d'entre nous n'avait pas de iPad. Or nous en avons tous un maintenant.
     Comment voyez-vous l'avenir de notre contenu culturel?
     C'est clair que nous faisons présentement face à des défis considérables et il y en aura d'autres dans les années à venir. Dans le contexte du contenu télévisuel francophone, il y a quand même certains facteurs qui nous sont toujours favorables. L'attachement des Québécois envers leurs produits télévisuels et leurs artistes est un avantage qu'il ne faut pas nier. Cela dit, lorsque vient le temps d'équilibrer les comptes, c'est autre chose. Comme vous avez pu le constater dans le dernier rapport du CRTC, l'ensemble de l'industrie de la radiodiffusion éprouve des problèmes de rentabilité assez importants. Avec nos auditoires, nous devons migrer vers les plateformes numériques afin qu'il y ait une forme de cohésion et de partenariat interne entre les différentes fenêtres de façon à assurer un financement adéquat.
    Je vais vous donner l'exemple du service Illico, qui a été lancé il y a maintenant deux ans. Il a permis à notre groupe de lancer des séries comme Mensonges et d'intéresser un public à une plateforme numérique de vidéo par abonnement et de vidéo sur demande par abonnement. Par la suite, l'émission a pu être diffusée sur une chaîne plus conventionnelle de télévision thématique, soit addikTV. Grâce aux contributions financières des différentes plateformes, on arrive à avoir une offre de contenus qui est toujours assez distinctive et remarquable.
    L'autre voie que notre groupe a empruntée est celle des partenariats internationaux. Selon nous, il n'y a pas d'issue à notre système de télédiffusion si nous ne partageons pas les défis et les enjeux avec des partenaires internationaux. Nous avons donc annoncé récemment des ententes de partenariat avec TF1 en France, par exemple. Nous nous apprêtons à faire la même chose d'ici quelques semaines avec un important diffuseur aux États-Unis. Nous recherchons d'autres partenaires pour créer des contenus et pour qu'il y ait un maximum d'entraide entre les diffuseurs qui, partout dans le monde, sont aux prises avec les mêmes difficultés.
    Lors du dernier MIPTV, il y a...
    Je m'excuse de vous interrompre. Quand vous dites « sont aux prises avec les mêmes difficultés », faites-vous référence au gros rouleau compresseur qui arrive sur les autres plateformes?

  (1655)  

    Bien sûr. Le dispersement de l'écoute sur les différentes plateformes est un facteur. Du même coup, il y a un affaiblissement des recettes publicitaires. Celles-ci sont la base essentielle du modèle d'affaires des radiodiffuseurs conventionnels.
    J'allais porter à votre attention une entente assez étonnante qui a été annoncée il y a quelques semaines au dernier MIPTV, à Cannes. Il s'agit d'une entente entre deux radiodiffuseurs européens et un radiodiffuseur américain: TF1, RTL Allemagne et NBC. Ils ont annoncé la mise en production de trois séries de fiction à budget élevé dont ils vont partager la responsabilité, les coûts et le financement.
    Je travaille dans le milieu de la télévision et de l'audiovisuel depuis plus de 30 ans et c'est la première fois que j'assiste à ce genre de stratégies. Nos discussions avec certains partenaires pressentis aux États-Unis nous indiquent que même les Américains, qui sont en situation de force par rapport à nous à cause de leur démographie, de leur historique et de leur expertise du marché international, disent qu'ils ne passeront pas au travers sans qu'il y ait une consolidation et un partage avec des partenaires du reste de la planète.
    Avec cette consolidation, n'y a-t-il pas un risque inhérent à quitter le storytelling canadien, qui est très local?
    TVA, par l'entremise du projet Éléphant, a effectivement joué un certain rôle. Le bureau des archives a rendu disponibles une multitude de films. Le dernier Gala Artis a bien démontré l'engagement de TVA dans la communauté artistique en soulignant le travail que tout le monde fait à cet égard.
    Je pense qu'il y a deux pôles. D'un côté, il y a la production, la stimulation de cette production et l'intérêt de la clientèle en créant un sentiment d'appartenance, et de l'autre, il y a la visibilité. S'il n'y a pas de visibilité, on n'est pas vu. Si les gens ne sont pas intéressés, on ne profitera pas de notre visibilité.
     Je ne vous cacherai pas que cela n'est pas sans risques.
     Cela étant dit, plusieurs de nos auteurs, de nos grands artistes ou de nos entreprises culturelles ont réussi à s'installer partout dans le monde et à faire valoir leurs capacités ou leurs talents à écrire des histoires. En fait, c'est l'histoire du Cirque du Soleil, bien entendu, qui a mené tout son développement sur la base d'une stratégie de propriété intellectuelle. Il a mis à contribution plusieurs de nos auteurs et de nos metteurs en scène.
     Il en va de même pour une personnes comme Robert Lepage, qui est connu partout dans le monde. Cela n'a pas affecté sa capacité de raconter des histoires avec son point de vue québécois et canadien, bien au contraire.
    Je ferai donc un lien avec l'initiative dont nous parlaient plus tôt des producteurs francophones, c'est-à-dire de souligner l'importance des scénaristes, à savoir ce que les gens de TELUS font essentiellement. Vous essayez de semer du talent à raconter.
    Je suis assez fier de pouvoir mentionner une chose. Récemment, Québecor a lancé une initiative qui sollicitait les créateurs et les concepteurs d'émissions de télévision. Excusez-moi de faire un aparté sur la télévision, mais je reviendrai au long métrage avec plaisir.
    Nous avons donc fait cela dans le cadre de C2 Montréal, un événement sur la créativité et l'innovation qui aura lieu à la fin du mois de mai, à Montréal, et qui a pris beaucoup d'importance un peu partout sur la planète. On l'a qualifié de « Davos de la créativité ».
    On a demandé que des gens nous proposent de nouvelles idées pour leur télévision. Nous attendions, au maximum, une cinquantaine de propositions parce que c'était beaucoup plus complexe que de se contenter d'écrire son nom sur une feuille de papier et de la déposer dans un chapeau. Nous en avons reçu 215. Il y avait là plusieurs propositions vraiment intéressantes. Nous nous adressions autant aux professionnels qu'aux amateurs.
    Nous sommes favorisés car nous avons un réservoir de grands talents artistiques et créatifs. Ce réservoir ne demande qu'à être sollicité davantage. Il faut installer cela dans un environnement d'affaires qui soit plus réel.
    En ce qui a trait à notre cinéma, j'ai le regret de constater que son financement par les fonds privés est l'un des plus faibles. On parle de 3 à 5 %.

  (1700)  

    Merci.
    Monsieur Dion, vous avez la parole et vous disposez de sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie M. Provencher, Mmes Gill et Mainville-Neeson.

[Traduction]

    Je pense que vous êtes en effet les deux derniers intervenants, mais le contraste entre les deux exposés est assez frappant. Telus a beaucoup à nous dire au sujet du rôle du gouvernement fédéral, et je suis très impressionné par le modèle que vous avez présenté, mais vous avez choisi de ne mettre l'accent que sur cela. Pourquoi?
    À l'exclusion de sa programmation communautaire, Telus ne possède aucun service de programmation de contenu que ce soit. Nous ne sommes qu'un distributeur. Dans la mesure où nous exerçons des activités dans la collectivité et produisons des émissions communautaires, nous avons un modèle novateur que nous avons jugé utile de vous présenter. Autrement, nos activités ne concernent pas la propriété ni la création de contenu.
    Qu'espérez-vous nous voir faire de votre modèle novateur, qui est en effet plutôt novateur? Qu'aimeriez-vous nous voir recommander au gouvernement au sujet de ce modèle?
    L'aspect novateur est que le modèle crée... Il permet d'attirer le public avant que le financement soit consenti. Il est à espérer que cet aspect, en soi, constitue le fondement d'une partie du financement qui sera affecté à la production de contenu canadien, parce que, au bout du compte, créer du contenu qui ne sera jamais regardé n'est pas aussi utile que de s'assurer que ses producteurs, ses réalisateurs et ses auteurs se sont constitué un public et que, lorsqu'ils créeront enfin leur oeuvre, celle-ci sera vue, appréciée et offerte...
    Devons-nous mettre en oeuvre une nouvelle politique? Le modèle actuel convient-il, ou y a-t-il quelque chose que nous devrions faire pour nous assurer que ce genre de modèle va se multiplier?
    Je pense que la souplesse que nous procure l'actuelle politique en matière de programmation télévisuelle communautaire est ce qui nous a permis de faire cela.
    Vous ne souhaitez pas que des modifications soient apportées à la politique.
    Pas pour ce qui est de la politique actuelle en matière de télévision communautaire.

[Français]

     D'accord.
    Monsieur Provencher, ce que nous proposent les gens de TELUS vous inspire-t-il quelque chose?
    À mon avis, nous nous attendons à ce que le gouvernement contribue à créer un environnement plus favorable à l'investissement privé dans l'industrie du long métrage canadien. Si, partout dans le monde, d'autres pays sont parvenus à faire participer davantage les fonds privés au financement des oeuvres, je pense que le Canada peut lui aussi regarder de ce côté.
     Comme nous l'avons souligné, Téléfilm Canada a instauré l'année dernière ou il y a deux ans un nouveau mode d'évaluation de la performance des films qui tient compte de la performance financière, à savoir combien de personnes iront voir les films en salle et à combien se chiffreront les revenus provenant du reste de l'exploitation. Or nous pensons qu'il faut aller plus loin à cet égard.
    Depuis que vous avez entrepris vos travaux, on a beaucoup entendu parler de réglementation et de fonds publics. Je ne nie pas qu'il s'agit là d'éléments très importants. Cela dit, la performance des fonds investis dans l'industrie canadienne du long métrage est ce sur quoi nous voulons attirer votre attention. Je pense que nous pouvons en tirer davantage et surtout mobiliser d'autres investisseurs.
     Quelles formes cela peut-il prendre? Ma foi, c'est l'innovation et l'imagination qui peuvent nous amener là. Il pourrait s'agir d'incitatifs fiscaux, par exemple, ou d'incitatifs particuliers pour les investisseurs privés.
    Mais on en a déjà.
    Vous en avez sous la forme de crédits d'impôts. Comme personne ou comme entreprise, je ne vais pas plus loin. Tout est canalisé par l'offre de fonds du ou des gouvernements. Parmi les fonds privés que je connais au Québec, il y a notamment le Fonds Harold Greenberg et le Fonds Cogeco. La question est de savoir comment il serait possible de mobiliser davantage de ressources à l'intérieur de cela et faire en sorte que les investissements soient plus profitables qu'ils ne le sont présentement.
    En France, par exemple, la recherche de M. René Bonnell s'est penchée sur certaines solutions, entre autres le report de certains honoraires et une participation plus importante des producteurs au financement de leurs propres activités. Je pense que ces pistes pourraient être examinées avec beaucoup d'intérêt.

  (1705)  

    Vous avez parlé de quatre pistes.
    Reprenons-les une à la fois pour que vous puissiez nous expliquer comment, selon vous, cela permettrait de libérer de nouveaux fonds. Vous appelez cela vos voeux.
    Vous demandez que le critère financier soit lié davantage à la capacité du distributeur qu'à celle du producteur.
     D'abord, sur le plan financier, nous souhaitons que Téléfilm Canada, qui, il faut le reconnaître, a déjà fourni un effort important, contribue à la pondération des critères de performance dans une mesure de 75 % en ce qui a trait à la rentabilité financière ou à la performance des films en salle et qu'il y ait une sanction qui découlerait d'une mauvaise performance.
    À l'heure actuelle, les sanctions sont plutôt faibles pour les producteurs. Il faudrait que ceux-ci se préoccupent davantage du succès commercial de leurs oeuvres.
    Deuxièmement, en ce qui concerne la sélection des longs métrages...
    Si je peux me permettre, j'aimerais savoir ce que vous avez en tête lorsque vous parlez de sanctions?
    À l'heure actuelle, si un producteur livre trois films dont la performance est plutôt faible, ses propositions à Téléfilm Canada seront moins retenues. Il s'agit d'une forme de sanction. C'est donc dire que ses activités de production pourraient être affectées par une mauvaise performance. On parle ici de trois films.
    Et de la performance aux guichets?
    Oui, mais en fait...
    Maintenant, ce n'est plus un guichet.
    Non, en effet. En outre, il est question de performance économique, mais aussi de performance dans les festivals. Téléfilm Canada considère d'autres critères. Je pense que le système est adéquat. Nous souhaitons simplement que la pondération des critères à l'intérieur du système d'évaluation de la performance soit revue.
    Avez-vous rendue publique la pondération que vous souhaiteriez voir adopter?
    Nous l'avons rendue publique auprès de la direction de Téléfilm Canada.
    Est-ce que le comité pourrait en avoir une copie?
    Je crois bien que oui.
    D'accord. Je vous remercie.
    Deuxièmement, vous suggérez qu'il y ait plus de cinéma grand public et moins de cinéma d'auteur.
     Tout à fait, mais cela ne veut pas dire d'éliminer le cinéma d'auteur.
    Depuis cinq ou six ans, nous avons assisté au Québec à une dégradation assez inquiétante de la performance des films québécois au box-office. La semaine dernière, la France a publié les résultats de la fréquentation en salles des films français. Les producteurs de films français possèdent 44 % de la part de marché des films en salles en France. Ici, c'est 5 %. En France, ils ont réussi à dynamiser l'industrie en se tournant davantage vers le consommateur. Ils sont plus interpellés par la réussite des films en salle. Ici, je ne dis pas qu'on ignore totalement ce facteur. Je pense plutôt, encore une fois, qu'il y a des façons d'encourager les producteurs à viser des films qui sont plus performants.
    Actuellement, il y a certains films québécois dont le rendement est plutôt bon. Le dernier film de Léa Pool remporte un bon succès en salle. C'est la même chose pour Aurélie Laflamme — Les pieds sur terre, qui semble connaître un assez bon départ. D'autres films, par contre, finissent leur carrière en salle sans avoir amassé 100 000 $ au box-office. Cette somme représente 7 000 ou 8 000 personnes qui se sont rendus dans une salle de cinéma.
    Je suis désolé, mais mon temps est écoulé.
    Merci, monsieur Dion.

[Traduction]

    Monsieur Dykstra, la parole est à vous pour sept minutes, et ce sera tout.
    Monsieur Provencher, j'aimerais que vous expliquiez plus en détail certains des points que vous avez soulevés, et je crois que cela s'inscrit dans les commentaires que vous venez de formuler. Vous avez parlé du Fonds des médias du Canada et de ce style de financement pour Téléfilm. Pourriez-vous nous en dire davantage sur la façon dont ce type de financement servirait mieux Téléfilm que ce qui est actuellement en place?

[Français]

    Je ne saurais pas vous dire à quel moment exactement le Fonds des médias du Canada a modifié de façon assez importante son système de gestion des fonds. Il a créé des enveloppes qui sont maintenant gérées par les télédiffuseurs . Il y a des mécanismes pour définir d'année en année les enveloppes qui sont remises à chacun d'entre eux que ce soit Radio-Canada, TVA, CTV, CBC ou encore les chaînes thématiques canadiennes.
    Aujourd'hui, c'est principalement un critère de marché qui dicte le choix des séries à produire ou des émissions à mettre à l'antenne qui seront financées par le Fonds des médias du Canada. Donc, j'oserais dire qu'il n'y a plus d'intervention qualitative de la part des fonctionnaires ou des employés du Fonds des médias du Canada.
    Nous pensons que ce système est un grand succès dans le monde de la télévision. Nous ne voyons pas pourquoi il ne pourrait pas inspirer également la sélection des films dans l'industrie du long métrage. Cela voudrait dire que les distributeurs et les exploitants de salles pourraient contribuer en amont à faire la sélection des films. Ils introduiraient certainement un point de vue qui est davantage basé sur leurs connaissances et leurs perceptions des goûts et des tendances des consommateurs.
    Nous disons en fait que le consommateur devrait être le point de départ de tout changement dans l'industrie.

  (1710)  

[Traduction]

    Merci, j'apprécie la question.
    Ma question s'adresse à Prem ou à Ann. Un des aspects fascinants de ce que vous faites — et qui, à mon avis, continue de surprendre beaucoup d'entre nous —, c'est que vous le faites sans aucune forme de financement gouvernemental, et, certainement, le but n'est pas d'aller dans cette direction. Je me demande s'il y a un de vos compétiteurs, grand ou petit, qui tenterait de travailler avec le même genre de programme et de processus que vous avez mis en place.
    À notre connaissance, la réussite de Storyhive, l'innovation que nous avons présentée au comité aujourd'hui, aucun autre compétiteur n'offre ce genre de plateforme.
    Nous sommes certainement d'accord avec M. Provencher sur le fait que les consommateurs doivent être les premiers à choisir certains des programmes qui sont produits. C'est ce qui est fantastique de la réorientation de l'enveloppe de financement du Fonds des médias du Canada, et l'industrie cinématographique peut profiter des mêmes choses. Lorsque nous disons que notre programme aide à se constituer un public, c'est que les consommateurs — en votant pour ce qui sera financé, ce qui sera produit — ont déjà décidé que c'est quelque chose qu'ils aimeraient voir. Le fait de prendre des décisions en matière de financement en fonction de ce que les consommateurs veulent voir tend généralement à mener à la réussite.
    Ce n'est pas une mauvaise idée.
    Je suis heureux que vous ayez commenté cet aspect, parce que je voulais obtenir une ou deux recommandations de votre part aux fins de l'étude.
    Vous approchez la chose d'un point de vue complètement différent. Vous n'êtes pas une organisation — du moins à cet égard, du moins dans l'étude que nous examinons ici, du moins dans le travail que vous faites — qui est du genre à prévoir ou à essayer d'obtenir du financement gouvernemental. Vous approchez cela d'un point de vue légèrement différent. J'ai pensé que vous pourriez peut-être formuler une ou deux recommandations qui pourraient vraiment nous aider à l'égard de notre étude et du résultat que nous aimerions voir.
    Sans entrer dans les détails, nous n'avons pas de recommandation particulière, si ce n'est de dire que la participation du consommateur à une certaine partie du processus décisionnel s'est révélée fructueuse pour nous avec Storyhive, et que nous croyons qu'il y a une grande leçon à tirer qui peut se traduire par d'autres formes de financement, comme pour les longs métrages.
    Même si les autres mécanismes de financement sont quelque peu différents, comme les crédits d'impôt, qui ne sont certainement pas la même chose... L'idée selon laquelle, d'une certaine façon, on peut intégrer dans le système un élément de succès avec le consommateur est, je crois, la recommandation que nous vous demanderions instamment de mettre en oeuvre.
    Merci.
    André, vous avez parlé de la coproduction comme étant une façon efficace d'éviter l'inflation des coûts. Pourriez-vous préciser un peu cette idée, parce que, évidemment, il ne s'agit pas simplement de venir à la table et de demander d'autres fonds; en réalité, il s'agit de venir à la table et de formuler des recommandations qui permettraient de veiller à ce que l'argent des contribuables aille plus loin qu'il ne va actuellement.

[Français]

     Tout à fait. Comme je l'ai évoqué tout à l'heure, des expériences faites dans l'industrie de la télévision peuvent être transposables dans l'industrie du long métrage à travers le monde. On ne peut peut-être pas le faire chaque fois, mais je pense que les partenariats stratégiques en amont, par exemple entre des chaînes ou entre des groupes financiers, permettraient peut-être d'augmenter la pertinence et la qualité de ce qui est fait. Cela peut se faire tout en préservant notre capacité de raconter les histoires qui sont les nôtres. Je rejoins ce que disait M. Nantel à ce sujet. Je salue l'initiative lancée par le CRTC, qui est tourné résolument autant vers les marchés canadiens que les marchés extérieurs.
    L'expérience de séries à budget élevé mérite d'être menée. Elle va tout à fait dans le sens de ce que nous observons présentement au chapitre de la collaboration et du partenariat entre les joueurs de différents pays. L'industrie du long métrage bénéficie d'une certaine expérience parce que c'est d'abord elle qui a éprouvé les accords de coproduction. On peut faire une évaluation de leur efficacité et, au besoin, les mettre à jour pour encourager davantage de collaboration et de partenariat avec les joueurs étrangers.

  (1715)  

[Traduction]

    Ce sera le dernier mot.
    J'aimerais remercier nos témoins d'être venus. Vous serez nos derniers témoins dans le cadre de l'étude. Si vous avez d'autres contributions que vous aimeriez apporter, veuillez nous les faire parvenir d'ici un ou deux jours. Encore une fois, merci d'avoir été parmi nous aujourd'hui.
    Nous allons suspendre brièvement pour nous réunir à huis clos afin de nous consacrer aux affaires du comité.
     [La séance se poursuit à huis clos.]
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