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AANO Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord


NUMÉRO 021 
l
2e SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 29 avril 2014

[Enregistrement électronique]

  (1535)  

[Traduction]

    La séance est ouverte. Il s'agit de la 21e séance du Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord. Nous poursuivons aujourd'hui notre étude sur les testaments et successions des Autochtones qui résident dans les réserves.
    Nous avons le privilège d'accueillir de nouveau aujourd'hui M. Gailus. Merci beaucoup d'être ici parmi nous. Il semble que vous êtes l'expert à qui nous faisons appel pour toutes les questions complexes. Nous allons vous entendre en premier.
    Nous recevons M. Roe et Mme Richer, Association du barreau autochtone au Canada. Merci beaucoup de votre présence. Nous allons vous entendre après M. Gailus.
    Nous allons entendre les deux groupes de témoins, puis les députés vont poser des questions. Nous étudions les testaments et successions des Autochtones dans les réserves et certaines questions complexes qui en découlent. Merci de participer à notre étude.
    Nous allons maintenant entendre les exposés, puis nous vous poserons des questions.
    Monsieur Gailus.
    Merci, monsieur le président. Je suis content d'être de retour.
    Je vous remercie de m'avoir invité ici pour parler de cette question très importante, complexe et plutôt frustrante pour un certain nombre de Premières Nations et d'Autochtones.
    Pour situer le contexte, je suis membre de la Nation haïda, en Colombie-Britannique. Je suis aussi avocat. Je pratique le droit autochtone depuis 15 ans dans l'Ouest du Canada. Avant cela, j'ai travaillé quatre ans et demi pour ce qui s'appelait le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien. J'ai passé six semaines à m'occuper de testaments, avant d'examiner la question des terres durant encore quatre ans et demi. Mais la question des successions surgissait toujours en matière de développement économique dans les réserves, et c'est encore le cas de nos jours. Dans ma pratique, je gère parfois des successions. J'étudie peut-être une demi-douzaine de dossiers complexes qui concernent en général les baux relatifs aux terres des Premières Nations et le développement dans les réserves. Je ne m'occupe pas des successions qui ne portent pas sur les réserves. J'espère que mes connaissances vont vous aider un peu à trouver des façons d'améliorer le système.
    Très brièvement, je veux poser une question très générale au comité: quel est le problème à régler? Existe-t-il une meilleure façon de régler la question des testaments et successions des Autochtones qui résident dans les réserves? Je pense que oui, mais la solution n'est pas simple.
    En février ou en mars, les autres témoins ici présents et moi avons été invités par le ministère à participer à un groupe de réflexion à Ottawa pour examiner un certain nombre de solutions potentielles. Je ne les ai pas trouvées tout seul. Ces solutions sont le fruit de la réflexion de tout le groupe. C'était un exercice profitable, car il y avait des représentants de la province et du curateur public, ainsi que moi, qui représentait l'Association du Barreau canadien. Mes amis ici de l'ABA étaient présents, de même que des fonctionnaires du ministère qui travaillent à ces questions au quotidien.
    Je pense qu'il existe quatre solutions potentielles. La première est le statu quo. Je dis toujours à mes clients qu'ils ont l'option de ne rien faire. Je vais laisser mes amis d'AADNC en parler. La deuxième, c'est de transférer les pouvoirs aux provinces. La troisième, c'est de confier le contrôle aux Premières Nations et d'adopter une loi facultative, comme la récente Loi sur les foyers familiaux situés dans les réserves et les droits ou intérêts matrimoniaux. La quatrième, c'est de modifier la Loi sur les Indiens et le Règlement sur les successions d'Indiens.
    Je répète que je ne vais pas parler du statu quo, mais je veux soulever un certain nombre de questions liées au transfert des pouvoirs aux provinces. Comme vous le savez, la loi diffère d'une province à l'autre. Il est très coûteux de retenir les services d'avocats et de présenter des demandes de contrôle judiciaire. Il faudrait établir si le système provincial serait plus efficient. D'après mon expérience, il ne l'est pas. Il convient de savoir comment vont se conjuguer la loi provinciale et les dispositions sur les terres dans la Loi sur les Indiens. J'ai notamment appris du groupe de réflexion que le curateur public facture des honoraires pour gérer les successions. Les Autochtones ou le ministère devront peut-être assumer des frais si nous passons au système provincial.
    La section du droit des autochtones de l'ABC a présenté des observations sur le projet de loi C-428 qui soulèvent un certain nombre de questions. Je recommande au comité de les examiner.
    La deuxième option, c'est de confier le contrôle aux Premières Nations. Mes amis pourront peut-être répondre à cette question: est-ce que les Premières Nations veulent procéder ainsi? Les Premières Nations devraient-elles exercer ces pouvoirs? Contrairement aux terres, les successions sont des questions très personnelles. Il faudrait financer tout processus de manière adéquate, si les Premières Nations décidaient d'assumer ces responsabilités.
    La quatrième option qu'il faut envisager sérieusement, c'est de modifier la loi et la réglementation.
    Une bonne partie du processus actuel est dicté par les politiques, plutôt que par la loi et le règlement. Les dispositions législatives en la matière sont peu nombreuses, et je dirais qu'il existe un certain nombre de lacunes administratives. Par exemple, il faut savoir si un administrateur doit transférer ses comptes à la fin de l'administration d'une succession. C'est ce qu'exige la Loi provinciale sur le curateur, mais la réponse semble varier lorsqu'on parle aux fonctionnaires d'AADNC.
    En Colombie-Britannique, où je réside et effectue la plupart de mon travail, la nouvelle Loi sur les testaments et les successions est en vigueur depuis le 31 mars. Nous pourrions examiner d'autres textes législatifs provinciaux et sélectionner certains éléments parmi les divers régimes pour élaborer un code global.
    Enfin, je pense que toutes les recommandations qui visent à modifier le système actuel doivent prendre en compte divers aspects: la responsabilité constitutionnelle du Canada stipulée au point 24 de l'article 91; les coûts liés aux personnes qui passent du système actuel à un système différent; les coûts liés au changement pour le gouvernement du Canada, comme le besoin de conclure un genre de protocole d'entente avec les provinces sur les frais de gestion des successions de faible valeur dont le curateur public serait maintenant responsable; les changements doivent permettre une gestion plus efficiente des successions; enfin, les coûts à long terme des terres pour les familles et les Premières Nations liées aux successions.
    Merci.

  (1540)  

    Merci, monsieur Gailus.
    Nous allons maintenant entendre M. Roe.
    Si vous êtes d'accord, je vais commencer, céder ensuite la parole à ma collègue, Mme Richer, puis je vais terminer l'exposé.
    Tansi à tous.
    Je m'appelle Brock Roe. Je suis associé au cabinet de droit MacPherson Leslie et Tyerman, le MLT. Je travaille pour les bureaux d'Edmonton, en Alberta, même si je vis à Saanich, tout près de Victoria, en Colombie-Britannique. Je me déplace selon les besoins.
    Au MLT, je m'occupe d'un certain nombre de domaines juridiques. Je travaille surtout avec nos partenaires du droit autochtone pour soutenir nos clients en matière de gouvernance de bande, de développement corporatif, commercial et économique, de transactions d'affaires, de ressources, de réglementation et de consultation entre les Premières Nations, les secteurs des ressources et les gouvernements. J'appuie aussi nos partenaires pour nos groupes de clients non autochtones.
    Grosso modo, j'ai une pratique commerciale générale en matière de droit des sociétés, de financement commercial ainsi que de gouvernance, d'acquisitions et de ventes d'entreprises et j'agis au nom de sociétés à but non lucratif. Autrement dit, je suis un généraliste.
    J'ai acquis une certaine expérience pour avoir géré les successions de quelques Autochtones qui résident ordinairement dans les réserves. Je possède aussi un peu d'expérience dans la gestion des successions ordinaires d'Albertains en dehors des réserves.
    Je suis également membre de la nation crie de Bigstone, située dans le Nord-Ouest de l'Alberta. J'ai grandi à Fort St. John, dans le Nord-Est de la Colombie-Britannique. Je possède donc une expérience unique en son genre pour avoir grandi en dehors des réserves, mais j'entretiens des liens étroits avec ma famille dans la réserve.
    Je suis aussi directeur et trésorier de l'Association du Barreau autochtone au Canada, l'ABA.
    Je vous précise que mes commentaires aujourd'hui reflètent la position de l'ABA, pas celle du MLT, du Traité 8 ou de Bigstone.
    Bonjour, je m'appelle Valerie Richer et je suis employée à la Commission canadienne des droits de la personne. Toutefois, je participe à un échange de deux ans avec l'Assemblée des Premières Nations à titre d'avocate-conseil associée. Je représente ici l'Association du Barreau autochtone au Canada, pour laquelle je siège au conseil d'administration. Mes commentaires aujourd'hui représentent le point de vue de l'ABA et ne sont aucunement liés à la commission ou à l'APN.
    J'ai de l'expérience en droit autochtone, en droit de la personne et en droit administratif. Je suis Anishinabe et je viens d'Atikameksheng Anishnawbek, une petite collectivité dans le Nord de l'Ontario. J'habite présentement à Ottawa.
    L'ABA est l'association professionnelle sans but lucratif des avocats, des professeurs de droit et des étudiants en droit des Premières Nations, des Métis et Inuits au Canada. Voici les objectifs de l'ABA:
    Reconnaître et respecter les fondements spirituels de nos lois, coutumes et traditions autochtones.
    Promouvoir la justice et la justice sociale pour les Autochtones au Canada.
    Promouvoir la réforme des politiques et des lois qui concernent les Autochtones au Canada.
    Sensibiliser les communautés juridiques et autochtones et la population en générale aux questions juridiques et sociales qui préoccupent les Autochtones au Canada.
    Conformément aux objectifs précédents, fournir une tribune et un réseau aux avocats autochtones pour leur permettre de continuer à s'informer sur l'évolution du droit autochtone, de communiquer de l'information et des expériences sur l'application du droit autochtone et de discuter des questions qui portent sur le droit autochtone.
    Nous soulignons que l'ABA n'est pas mandatée par les Premières Nations au Canada pour consulter l'État sur ces questions. Nous témoignons simplement devant vous en tant qu'entité prévue à la partie II de la Loi sur les corporations canadiennes, soit une société sans but lucratif sous la direction d'un conseil élu par ses membres dont je viens de mentionner les objectifs.

  (1545)  

    Comme ma collègue, je vais faire des remarques générales sur certains problèmes que nous avons constatés et qu'il faut régler.
    Étant donné que votre comité discute de la façon de gérer les successions et les possessions des Autochtones, il faut bien sûr consulter activement les Premières Nations sur tous les changements voulus, en gardant à l'esprit les objectifs que Mme Richer vient de mentionner. N'oublions pas que les Premières Nations au Canada possèdent leurs propres ordres juridiques.
    Il importe aussi de se rappeler que les Premières Nations gèrent leurs possessions depuis très longtemps. Si nous envisageons de modifier la gestion des possessions d'un Autochtone décédé au Canada, nous devons tenir compte de la façon dont les Autochtones au Canada gèrent leurs possessions, conformément à leurs propres ordres juridiques, et des ressources que le Parlement doit fournir pour bien soutenir ce travail.
    Il faut se souvenir que les relations entre l'État et un grand nombre de Premières Nations au Canada se fondent sur les traités. Ne soyez pas surpris si les Premières Nations examinent la question sous cet angle. Concernant les Premières Nations qui n'ont pas de traité avec l'État, il faut être prêt à ce qu'elles fassent valoir les droits autochtones. Ce sont deux points de vue très différents.
    Si je comprends bien, le projet de loi d'initiative parlementaire C-428 du député Rob Clarke a plus ou moins retiré un certain nombre d'articles désuets de la Loi sur les Indiens. Ensuite, certains articles sur les testaments et successions ont été supprimés dans le projet de loi. Nous discutons donc aujourd'hui de ces articles sur les testaments et successions.
    Avant d'entamer les discussions, je veux souligner diverses questions à prendre en compte dans l'examen de tout type de modification. J'ai tenté de les organiser de façon raisonnée, mais les testaments et successions constituent des questions complexes qui englobent nombre de lois. J'ai cherché à les trier et à les organiser selon certains critères.
    Le concept de résident ordinaire ne s'applique pas qu'aux réserves. Même le Manuel de procédures pour les successions des défunts le reconnaît, mais les fonctionnaires d'AADNC s'appuient sur lui pour gérer les successions. Ce concept fait aussi référence aux Premières Nations qui vivent sur les terres publiques et du ministère de la Défense, dans les parcs provinciaux et nationaux et sur les terres achetées par l'État pour les Premières Nations qui n'ont pas le statut de réserve. N'oublions pas que des Autochtones qui ne résident pas dans les réserves sont aussi visés par ce concept. Par exemple, il y a un groupe d'Autochtones qui vit sur des terres publiques dans le camp Smallboy, situé sur le versant est d'une montagne en Alberta.
    Le règlement des différends a été abordé brièvement devant votre comité le 8 avril. Le ministre ou les fonctionnaires d'AADNC ne disposent pas d'un outil administratif pour gérer les successions litigieuses. Si vous voulez apporter des changements, vous devriez parler aux Premières Nations pour trouver des solutions aux différends. Les Premières Nations sont le mieux placées pour connaître leurs communautés et elles auraient une bonne idée de la façon de régler les litiges. Par ailleurs, vous ne pouvez pas simplement transférer un processus administratif aux Premières Nations qui gèrent déjà les successions. Ce genre de processus demande des ressources adéquates.
    Les dispositions ab intestat dans les divers régimes provinciaux prévoient des seuils. La première somme est remise au survivant, puis le reste est divisé entre les enfants et lui, ou selon la formule établie. Actuellement, la Loi sur les Indiens stipule que le seuil s'élève à 75 000 $. En Alberta, ce montant est passé récemment de 40 000 à 150 000 $ dans la nouvelle loi. Je ne suis pas certain du seuil en Colombie-Britannique. En Ontario, je crois comprendre que c'est 200 000 $. Nous devons examiner cet écart. On vient de me dire que c'est 300 000 $ en Colombie-Britannique.
    Nous devons examiner pourquoi il y a cette importante disparité. De toute évidence, les provinces ne peuvent pas gérer les intérêts possessoires dans les réserves. N'oublions pas que cela excède leurs pouvoirs, aux termes des articles 91 et 92.
    C'est aussi une question de clarté. On ne peut pas simplement édicter un régime qui applique la loi fédérale dans un certain contexte de gestion des successions et la loi provinciale dans un autre.

  (1550)  

    J'essaie de me rappeler si j'ai déjà conseillé un client sur un dossier complexe qui demandait d'effectuer des recherches sur les deux régimes. Je peux vous dire que ce serait très coûteux, plus qu'un dossier qui porte sur un seul régime et qui s'appuie simplement sur la jurisprudence.
    M. Gray a signalé le 8 avril qu'environ 20 % des successions sont gérées par les administrateurs d'AADNC et le reste par les administrateurs familiaux.
    Nous craignons qu'AADNC se distance des décisions de ces administrateurs familiaux, afin de se soustraire à toute responsabilité éventuelle.
    Dans ce contexte, les administrateurs familiaux sont en quelque sorte laissés à eux-mêmes pour prendre les décisions. Ils ont pourtant beaucoup à apprendre, comme les avocats. Nous devons en tenir compte, soutenir leur prise de décisions et leur donner des directives claires. Sinon, les successions ne seront pas gérées ou réglées.
    Je ne savais pas qu'il existe des administrateurs dans les gouvernements provinciaux, mais M. Gray ou M. Saranchuk a dit le 8 avril que des contrats lient deux provinces pour la gestion des successions.
    C'est assez intéressant. En plus des Premières Nations liées par ces contrats, le comité pourrait inviter ces administrateurs pour connaître leur point de vue sur le processus et pour savoir s'il y a des améliorations à apporter.
    On a fait des commentaires sur les disparités régionales à votre dernière séance. Si on répartit les 20 % de successions gérées par AADNC, il existe une grande disparité entre la Colombie-Britannique et l'Alberta, par exemple. Il semble que personne ne comprenait pourquoi, d'après la transcription de la dernière séance. Je vais donc vous donner mon point de vue, fondé sur les discussions de notre groupe de réflexion.
    Il faut examiner comment les intérêts possessoires dans les réserves sont reconnus sur le plan juridique au pays. En Colombie-Britannique, beaucoup plus de certificats de possession ou d'occupation sont délivrés, ce que nous appelons des intérêts possessoires légitimes. En Alberta, il y en a beaucoup moins. Lorsqu'une personne décède, bien moins d'intérêts doivent être gérés qu'en Colombie-Britannique.
    La Colombie-Britannique a aussi un processus relatif aux traités auquel un certain nombre de Premières Nations participent. Bien des gens doivent examiner toutes les successions en instance et se pencher sur les intérêts échus dans les réserves.
    Certaines nations songent également à adopter la Loi sur la gestion des terres des premières nations. Il faut examiner un certain nombre d'intérêts échus dans les réserves.
    Si on vend sa maison située sur une terre ordinaire, on doit tenir compte de l'hypothèque et peut-être d'un certificat d'affaire en instance ou d'un genre de bref sur le titre de propriété. Avant de vendre la maison, on doit régler les intérêts en suspens.
    C'est le même principe dans les réserves. Avant le transfert de la terre en vertu d'un traité, d'un accord d'autonomie gouvernementale ou de la Loi sur la gestion des terres des premières nations, il faut examiner tous les intérêts échus. En Colombie-Britannique, il y a un grand nombre de certificats de possession qui sont délivrés et de vieilles successions qui prennent beaucoup de temps à régler. Je pense que les processus soulèvent ce genre de questions bien plus souvent en Colombie-Britannique qu'en Alberta, par exemple.
    Cela explique sans doute pourquoi il y a une disparité entre les provinces.
    Le testament olographe est assez facile à préparer et consiste à rédiger ses intentions sur la gestion de ses possessions après la mort. En général, il n'est pas litigieux si les intentions sur les possessions sont clairement indiquées et que la signature de l'intéressé y figure.
    En gros, c'est les critères qu'il faut respecter en vertu des dispositions sur la rédaction testamentaire dans la Loi sur les Indiens. MM. Gray et Saranchuk en ont parlé à votre dernière séance.
    Nous craignons qu'en remplacement de ces dispositions sur le testament olographe, l'exigence d'un testament solennel va forcer un Autochtone à consulter un avocat et l'empêcher de rédiger son testament dans la réserve, à l'aide de quelques directives.

  (1555)  

    Le testament est très différent du testament olographe, et certaines formalités doivent être respectées. Un témoin testamentaire ne peut pas être désigné à titre de bénéficiaire dans le testament. Ce sera difficile, car il faut informer tout le monde. Par exemple, vous avez pleine confiance en votre soeur parce qu'elle s'occupe beaucoup des affaires de votre famille. Or, si vous voulez aussi qu'elle reçoive quelque chose, alors elle ne peut servir de témoin pour votre testament, mais vous voulez qu'elle vous aide à le préparer.
    Vous voudrez aussi probablement demander conseil pour savoir si vos legs ou les dispositions testamentaires seraient valides aux termes de votre testament. Pour le transfert de terres de réserves, si vous avez un intérêt légitime en tant que possesseur légal, comme un certificat de possession, vous voudrez en tenir compte dans votre testament et le transférer.
    Il existe un concept que l'on appelle le bail au noir, qui est en quelque sorte un intérêt non officiellement reconnu sur les terres de réserve. Beaucoup de membres des Premières Nations vivent dans une roulotte depuis longtemps, et tout le monde sait qu'ils vivent sur une certaine parcelle de terre. Nous pouvons appeler cela un intérêt, mais ce n'est pas reconnu aux termes de la Loi sur les Indiens, et c'est un intérêt légitime non reconnu. Quand la personne qui vit dans la roulotte sur ce terrain rédige un testament, peut-elle vraiment transférer ce terrain à quelqu'un d'autre? C'est une chose que l'on doit aborder dans la Loi sur les Indiens, car il y a beaucoup d'intérêts de ce genre.
    Je dirais qu'il vous faut beaucoup consulter les Premières Nations sur la façon de régler cette question, car il ne s'agit pas seulement d'introduire un régime de titres. Il y a de nombreuses questions à ce sujet en raison du caractère collectif des terres de réserve.
    En ce qui concerne l'homologation, lorsqu'on veut rédiger un testament, on doit le faire homologuer et approuver par un tribunal. Si on vit dans une réserve à trois heures de route, on devra se rendre à un palais de justice ou ailleurs pour obtenir l'information ou, si on a la chance d'avoir accès à l'Internet, on peut imprimer le document et le remplir. Il faudra payer des frais d'homologation et probablement demander une aide ou des conseils juridiques.
    Je ne sais pas si une personne vivant dans une réserve peut demander l'aide juridique et si elle satisfera aux exigences minimales pour l'aide juridique dans les provinces; de plus, comme nous le savons tous, les budgets pour l'aide juridique ont été réduits partout au pays.
    De plus, que ferons-nous en ce qui concerne les 8 % de gens qui ont déjà un testament? On en a également discuté. Si 8 % des membres des Premières Nations qui vivent dans les réserves ont rédigé des testaments et que nous prenons de nouvelles mesures, y aura-t-il quelque chose dans une loi ou ailleurs qui tiendra compte de ces testaments existants? Ces anciens testaments olographes seront-ils maintenus, ou exigerons-nous que les personnes obtiennent des conseils juridiques et rédigent un nouveau testament? Il sera difficile de retrouver ces gens. Il faudra leur dire qu'ils doivent reconsidérer tout cela, qu'ils ne peuvent céder cela de cette manière et qu'il est nécessaire d'adopter une nouvelle approche.
    Au sujet des tuteurs et curateurs publics, je crois comprendre, d'après la séance de discussions où nous avons entendu trois tuteurs et curateurs publics de la Saskatchewan, de l'Ontario et de la Colombie-Britannique, qu'actuellement, ils n'ont pas les connaissances administratives ni l'expertise nécessaires pour régler les problèmes des Premières Nations dans les réserves. Certains en ont un peu. Il existe des cas de jurisprudence — mais ils sont rares — dont ils peuvent s'inspirer. Ils n'ont pas les connaissances ni le budget pour s'occuper de cela.
    Si vous réfléchissez à l'idée de confier aux provinces la responsabilité de s'occuper de ces successions, pensez aux 3 600 dossiers ouverts actuellement et à leur transfert aux provinces. Imaginez l'exercice bureaucratique et administratif nécessaire pour déterminer quel groupe est inclus, ou que quelqu'un doit traiter avec le groupe de Colombie-Britannique parce que les dossiers sont beaucoup plus nombreux et que l'on devra affecter davantage de personnel. En Alberta, en Saskatchewan, dans les territoires et partout au pays, ce serait la même chose.
    Voilà quelques éléments à garder à l'esprit, car cela semble être un processus relativement simple, mais il est en fait assez compliqué et il exigera beaucoup d'efforts.
    Voilà mes commentaires.
    Je tiens à remercier sincèrement les témoins.
    Nous allons maintenant passer aux questions.
    Nous allons commencer par M. Genest-Jourdain. Vous disposez de sept minutes pour les questions et les réponses.

  (1600)  

[Français]

    Bonjour, monsieur Gailus.
    J'ai cru comprendre que vous oeuvriez en pratique privée en Colombie-Britannique et que vous traitiez également des dossiers de succession sur une base régulière avec votre firme. Est-ce exact?

[Traduction]

    Oui.

[Français]

    Selon votre expertise et selon la réalité propre à la Colombie-Britannique, monsieur Gailus, quels sont les coûts usuels qui pourraient être associés à la liquidation par un tiers d'une succession ab intestat, qu'il s'agisse d'Indiens ou de gens de la Colombie-Britannique en général?
    Vu que vous traitez ce genre de dossiers, avez-vous un chiffre en tête correspondant au montant habituel qui pourrait être rattaché à la succession ou à la liquidation d'une succession?

[Traduction]

    Est-ce dans les réserves?

[Français]

    En général, oui. Disons, pour une succession dans une réserve, quels sont les coûts d'une liquidation de A à Z? Si c'est un tiers qui exécute la liquidation de la succession, à combien cela peut-il se chiffrer habituellement? J'ai entendu 300 000 $ tout à l'heure. Vous avez mentionné des montants.

[Traduction]

    Pour les 300 000 $, il était question du montant auquel aurait droit un conjoint en vertu de la nouvelle loi de la Colombie-Britannique. Le conjoint survivant obtiendrait les premiers 300 000 $ de la succession, et à partir de là, ce serait les enfants et les proches parents.
    Il est difficile de dire approximativement combien cela coûterait. Je pense qu'on utilise le terme « liquidation », mais vous parlez en fait de la distribution des successions. Dans celles que je traite habituellement, il y a des biens immobiliers ainsi que des actifs.
    La plupart des successions des Premières Nations n'ont pas beaucoup de valeur et, pour tout dire, les personnes n'ont pas les moyens de retenir les services d'un avocat pour s'en occuper. Dans les dossiers que je traite, il y a souvent aussi une combinaison de membres et de non-membres; nous avons donc l'article 50 qui refait surface. Il y a des personnes qui ne peuvent hériter de la succession. Dans ces circonstances, nous discutons beaucoup avec le ministère pour déterminer s'il est nécessaire d'effectuer une vente en vertu de l'article 50.
    Récemment, les frais associés à la nomination d'un nouvel administrateur — et il s'agissait d'une succession qui avait été transférée, la compétence avait été transférée du ministère au tribunal, en vertu de l'article 44, je crois; le ministre a dit que le dossier était trop complexe et qu'il le transférait au tribunal — s'élevaient à environ 25 000 $, mais il y a eu un conflit quant à savoir qui serait l'administrateur.
    Je pense qu'en ce qui concerne les coûts, que ce soit dans une réserve ou non, si la succession a une certaine valeur, il faudra retenir les services d'avocats. Souvent, les bénéficiaires ont aussi leurs propres avocats; les coûts peuvent donc grimper très rapidement.

[Français]

    J'ai compris que vous aviez également travaillé auprès du ministère des Affaires autochtones et du Développement du Nord canadien en ce qui touche la question des successions. À votre connaissance, le ministère a-t-il déjà fourni des chiffres qui témoigneraient des coûts associés au traitement des successions par le ministère? À l'interne, quels sont les montants qui y sont associés?
    Vous parliez de 25 000 $ dans le domaine civil. Or, si le ministère s'en est chargé, à votre connaissance, ces chiffres ont-ils déjà été portés à l'attention du public?

[Traduction]

    Est-ce dans le cas où le ministère administre la succession?

  (1605)  

[Français]

    Voilà.

[Traduction]

    Je crois qu'il n'y a aucuns frais pour cela. Un représentant du ministère serait sans doute mieux en mesure de répondre à cette question et de dire s'ils ont estimé les coûts liés à l'administration ministérielle.
    Je sais que si l'on établissait les coûts pour certaines successions complexes ou anciennes où personne ne veut s'avancer, ce serait sans doute une somme considérable, étant donné la période pendant laquelle les agents des successions doivent s'occuper de ces successions.

[Français]

    Vous avez également parlé de la responsabilité de l'État. Cela faisait référence, selon ma propre conception, à la notion de relations fiduciaires.
    Selon vous, monsieur Gailus, la prise en charge des testaments et des successions par Affaires autochtones et Développement du Nord Canada serait couverte par cette notion de relations fiduciaires qui incombent à la Couronne face aux Premières Nations. Cela pourrait-il être inclus, au final?

[Traduction]

    Sur le plan des obligations du fiduciaire, oui. Si un représentant du ministère gère la succession, il est dans la même position que la Canada Trust, par exemple, ou qu'un membre de la famille en ce qui a trait aux obligations fiduciaires liées à la gestion des biens.
    Il y a certainement des conséquences potentielles si l'administrateur fait preuve de négligence ou ne respecte pas ses obligations fiduciaires dans la gestion de la succession.

[Français]

    Monsieur le président, je vais partager mon temps de parole avec ma collègue.

[Traduction]

    Madame Crowder.
    Je n'ai qu'une minute et demie, alors je vais poser le reste de mes questions au deuxième tour, mais j'aimerais revenir sur un point.
    Monsieur Gailus, dans votre déclaration préliminaire, vous avez parlé du problème qui doit être résolu. Je crois que c'est difficile pour le comité, car c'est une question complexe.
    S'il y avait une seule chose que le comité pouvait recommander, quelle serait-elle?
    Une seule chose...
    J'ai examiné l'évaluation du programme qui a été effectuée, l'évaluation interne, qui a permis d'identifier quelques domaines importants où le ministère ne s'acquittait pas de ses responsabilités. Par exemple, il ne surveillait pas adéquatement les tiers administrateurs. Les renseignements étaient insuffisants. Il s'écoulait beaucoup de temps entre le décès d'une personne et le moment où le ministère en était avisé. Il y avait un certain nombre d'inefficacités à l'échelle ministérielle.
    Serait-ce une chose pour laquelle nous pourrions au moins agir?
    Absolument. Comme je l'ai dit, la loi et le règlement sont assez maigres, et il y a d'énormes lacunes. Il ne reste souvent que la politique pour tenter de combler ces lacunes, et parfois, même la politique ne permet pas de régler tous les problèmes.
    Je pense que la politique n'est peut-être pas appliquée partout de la même façon. En ce qui concerne les options possibles, je crois que l'on pourrait examiner la loi et le règlement de très près et déterminer s'il vaudrait la peine de mettre en place un code exhaustif. C'est ce que l'on aurait en vertu d'un système provincial; on consulterait la loi, qui dit ce que l'on doit faire et énonce les responsabilités, et on pourrait ensuite agir en conséquence, plutôt que d'agir bien souvent de façon improvisée lorsqu'un problème survient.
    Nous avons récemment connu un problème. Nous avons tenté d'écarter un administrateur qui avait été nommé par le ministère. Personne à mon bureau ne pouvait trouver le formulaire ni le processus permettant de destituer cette personne. J'ai proposé de simplement envoyer une lettre au gestionnaire régional des successions et de lui dire que nous voulions la destituer et pourquoi.
    Dans certains cas, quand nous, les avocats, tentons de comprendre comment nous y retrouver dans ce processus, nous constatons un manque de directives officielles.
    La réponse simple est d'y consacrer davantage de ressources, mais je doute que ce soit la solution.
    D'accord, merci. Je vais poser une question complémentaire au prochain tour.
    Merci.
    Monsieur Clarke, allez-y.
    Je remercie les témoins d'être venus nous parler aujourd'hui des testaments et des successions, ainsi que de la Loi sur les Indiens.
    Pour poursuivre dans la même veine que Mme Crowder, quelles seraient vos recommandations pour régler les problèmes relatifs aux testaments et aux successions? J'ai une bonne idée: éliminer complètement la Loi sur les Indiens et rédiger une toute nouvelle mesure législative. Nous savons que nous ne verrons probablement pas cela de notre vivant, car la Loi sur les Indiens s'est créée en soi un empire au sein du ministère des Affaires autochtones.
    L'un des aspects de votre témoignage qui m'a le plus intéressé, c'est que vous avez parlé de la politique, et d'un article de la Loi sur les Indiens, concernant les testaments et les successions. Ce que vous dites, c'est que l'article de la Loi sur les Indiens qui porte sur les testaments et les successions remplace un traité signé il y a longtemps, dans les premières années de la Confédération.
    J'aimerais obtenir des éclaircissements au sujet de la politique. Vous dites que pour les testaments et les successions, la politique est essentiellement une ligne directrice. N'a-t-elle rien de concret? Le ministère suit-il essentiellement la politique et pas la réglementation?
    Ma question s'adresse à qui peut y répondre.

  (1610)  

    Non, en fait, il y a sept articles qui traitent des successions, et il y a ensuite le règlement, qui va un peu dans tous les sens. Quand on le lit, on voit qu'il ne semble pas y avoir de code vraiment exhaustif, alors on se rabat sur la politique. Je dis toujours que la politique implique un élément discrétionnaire.
    Cela semble logique. Nous voyons certaines collectivités des Premières Nations... Je ne sais pas si vous connaissez le droit cri, dans lequel on traite de cette même question relative aux testaments et aux successions. Le connaissez-vous?
    Non.
    Quand nous avons parlé des lacunes administratives dans la Loi sur les fiduciaires dont vous parliez, l'une des choses qui a attiré mon attention, c'est que des contrats étaient offerts au gouvernement fédéral pour administrer les testaments et les successions pour les particuliers. Est-ce exact?
    J'ai fait cette observation. Je faisais simplement référence au témoignage de M. Gray ou de M. Saranchuk, le 8 avril. Ils disaient qu'AADNC a conclu un contrat avec deux gouvernements provinciaux en ce qui concerne cet article de la Loi sur les Indiens. Je n'étais même pas au courant de cela et j'ignorais également de quelles provinces il était question, car cela n'a pas été divulgué. J'ai pensé qu'il serait intéressant d'entendre leur point de vue et de savoir quelles Premières Nations étaient concernées.
    Vous qui êtes issu des Premières Nations et qui êtes venu témoigner ici, croyez-vous que les Canadiens sont assujettis à deux lois différentes en ce qui concerne les testaments et les successions? Y a-t-il deux poids, deux mesures?
    Excusez-moi, mais je ne comprends pas.
    Estimez-vous avoir les mêmes droits que les autres Canadiens, ou votre vie est-elle régie par la Loi sur les Indiens?
    Si elle n'est pas régie par la Loi sur les Indiens, par le ministre, alors elle est régie en vertu d'une loi provinciale par un autre ministre; si nous ne parlons pas de la Loi sur les Indiens et du ministre des Affaires autochtones, alors nous parlons du ministre responsable de la loi sur les testaments et les successions en Alberta ou en Colombie-Britannique, à mon sens. Cependant, je pense que la Loi sur les Indiens dispose davantage d'un élément discrétionnaire que la loi provinciale sur les testaments et les successions. Ce que prévoit la loi provinciale sur les testaments et les successions est plus actuel, selon moi, que ce que prévoit la Loi sur les Indiens.
    En réalité, les Premières Nations sont assujetties à deux lois ou deux mesures législatives, de compétences provinciale et fédérale, contrairement à la plupart des Canadiens.
    Selon que vous vivez ou non sur des terres publiques, essentiellement...
    Vous avez parlé du délai pour l'administration des testaments. Combien faut-il de temps, en moyenne, pour les testaments des non Autochtones comparativement à ceux des Autochtones ou des membres des Premières Nations?
    Vous voulez dire pour qu'ils soient approuvés, puis homologués, puis...?
    Oui, de la première à la dernière étape de l'administration d'une succession. Quel est le délai?
    Dans le dernier cabinet avec lequel j'ai travaillé, j'étais chargé d'un dossier concernant une succession litigieuse pour laquelle une somme importante était en jeu et il s'agissait d'une personne qui habitait hors réserve. Pendant mon temps au sein de ce cabinet — deux ans et demi —, le dossier n'a jamais été réglé. La même chose s'est produite quand je suis arrivé dans un nouveau cabinet. On m'a confié un dossier qui traitait d'un seul aspect d'une question de succession et non de l'ensemble de l'homologation. Il a fallu deux ans pour régler le dossier. C'était un aspect très litigieux. Je ne saurais dire ce qu'il en est pour un cas d'application régulière en vertu de la loi, car je n'ai jamais eu à traiter d'un tel dossier.
    Il en va de même pour les Premières Nations dans les réserves. En ce qui me concerne, les rares dossiers pour lesquels j'ai eu à faire de la recherche sont toujours ouverts et cela fait déjà un an et demi. Il s'agit simplement d'une question liée à l'administration d'une succession. Ce sont des questions litigieuses. Comme elles font l'objet de contestation judiciaire, le processus est nécessairement plus long. Toutefois, comme pour les cas courants, je n'ai aucune idée de ce qu'il en est.

  (1615)  

    Pendant le processus judiciaire, avez-vous à franchir des obstacles, par l'intermédiaire du ministère, ou à obtenir l'approbation des fonctionnaires du ministère?
    En Alberta, j'avais la possibilité de communiquer assez rapidement avec la personne chargée du dossier. Toutefois, j'estimais que la discussion n'était pas adéquate. J'avais la possibilité d'obtenir son opinion sur le dossier. Pour être honnête, je trouvais que c'était une démarche plus franche que de communiquer avec les avocats de la partie adverse pour avoir leur avis sur ce qu'ils pensent que leur client a dit, pour ensuite retourner aux instructions. C'était un aspect unique.
    Je vous prie de m'excuser. Je ne peux vraiment vous dire comment cela fonctionnerait pour un dossier courant.
    D'après ce que j'ai entendu de la part de témoins au comité, c'est qu'il ne semble pas y avoir de problème et qu'il suffit de maintenir le statu quo. Si l'on veut apporter des changements, je ne crois pas que c'est la bonne approche.
    Nous avons parlé de vos quatre éléments, dont fait partie le statu quo. Nous savons que cela ne fonctionne pas et les Premières Nations font des progrès. Certaines régions ou collectivités des territoires des Premières Nations ont maintenant l'autonomie gouvernementale en vertu de traités.
    À votre avis, cette approche pourrait-elle être envisagée pour les testaments et les successions? Quelles sont vos recommandations pour modifier efficacement les dispositions de la Loi sur les Indiens sur les testaments et successions? Comment pourrait-on examiner la question de façon efficace et apporter un changement, un changement positif?
    Nous ne savons pas ce que veulent les Premières Nations. Je ne peux que vous présenter notre opinion; voilà pourquoi nous sommes ici.
    Les dispositions sur les testaments et les successions sont anciennes et dépassées. Je pense que c'est à cela que vous voulez en venir.
    Le problème, c'est que ces dispositions ne sont pas vraiment à jour. Comme dans d'autres administrations, ils ont examiné leurs lois sur les testaments et les successions, leurs lois sur les successions non testamentaires et les ont modernisées, par exemple. Ils se sont penchés sur toutes sortes de nouveaux enjeux, comme les conjoints de fait, les mariages entre personnes de même sexe, etc.
    Je pense que vous pouvez examiner ces enjeux et essayer de les intégrer aux changements que vous voulez apporter. Vous voudrez peut-être chercher à préciser les règles sur la nomination des membres de la famille en tant qu'administrateur. Je ne dis pas qu'il faut que ce soit semblable à un processus provincial, mais je pense que vous pouvez certainement étudier certaines des leçons apprises dans les provinces par rapport à ce qu'elles ont fait, voir dans quel domaine elles estiment qu'il faut s'améliorer, puis le faire.
    Il est également important d'obtenir l'avis des tuteurs et curateurs publics, car ils ont une certaine idée de la façon de faire les choses pour les gens et par rapport à certains aspects pour lesquels il existe des failles sur le plan juridique et dont ils ont eu à s'occuper.
    Puis-je ajouter quelque chose?
    Certainement.
    En lisant les témoignages de la réunion du 8 avril, j'ai été étonnée de lire que 92 % des gens des réserves meurent sans avoir fait de testament, ce qui signifie que seulement 8 % des gens avaient un testament. Or, le nombre de litiges qui ont fait l'objet de procédures judiciaires est très petit.
    Ce que j'ai constaté, c'est que le nombre restreint de litiges et de testaments indique que les Premières Nations règlent ces dossiers elles-mêmes, manifestement. Si l'on veut choisir des aspects précis d'un processus, il faut d'abord se pencher sur ce qui fonctionne dans les collectivités des Premières Nations et sur l'autonomie gouvernementale qui leur permet d'adopter leurs propres lois. Les testaments et les successions constituent un bon endroit où commencer.
    Merci.
    Nous passons à Mme Bennett.
    Encore une fois, je pense que le comité a clairement indiqué que le statu quo n'est pas acceptable, mais ce qui a été tenté pourrait avoir une série de conséquences inattendues. Si vous écriviez le rapport du comité quelles devraient être nos recommandations, à votre avis?

  (1620)  

    Je pense que vous pouvez demander aux membres de votre propre personnel de vous indiquer les lacunes qu'ils décèlent dans les processus, parce qu'on leur présentera des plaintes par rapport à divers enjeux. À l'externe, peu importe le processus que vous établirez, je pense que vous devez discuter avec les Premières Nations pour avoir leur avis sur les aspects à améliorer. Si elles veulent adopter une approche régionale, il vous faudra alors demander aux conseils de bande de s'en occuper. Les Premières Nations voudront peut-être envisager cette solution. Elles voudront peut-être simplement faire appel à un médiateur, à un processus d'arbitrage ou utiliser leur propre processus s'ils ont un ordre juridique qui traite des biens légués aux familles ou aux membres de leur Première Nation.
    Ce que cela signifie, c'est que vous devrez obtenir un avis externe sur la suite des choses. Comme le Canada est un grand pays où l'on trouve environ 630 Premières Nations qui pourraient vouloir se prononcer sur la question, ce sera difficile.
    J'ai aussi en tête un commentaire entendu lors des discussions du groupe de réflexion. Je crois que le commentaire est celui de la directrice régionale des successions de la Colombie-Britannique. Je ne sais trop comment interpréter son commentaire, mais elle a dit que les Premières Nations de la Colombie-Britannique ne souhaitaient pas vraiment accepter cette responsabilité. Elle a indiqué que dans les traités liés aux accords négociés sur l'autonomie gouvernementale, les Premières Nations s'en remettent aux articles actuels de la Loi sur les Indiens pour les questions relatives aux testaments et aux successions. Il serait intéressant de discuter avec les Premières Nations qui traitent de ces questions pour savoir pourquoi il en est ainsi et, pour celles qui souhaitent s'en charger, pour connaître leurs intentions à cet égard. S'il s'agit de Premières Nations qui sont près de conclure un accord ou un traité, il faudrait aborder le sujet avec les Premières Nations pour savoir ce qu'elles veulent faire à cet égard. Demandez-leur si vous devriez rédiger quelque chose qui s'adresse spécifiquement à leurs besoins; elles pourront alors vous indiquer si cela leur convient.
    Malheureusement, je n'ai pas de réponse en ce qui a trait aux articles qu'il faudrait reprendre, car cela ne se fera pas.
    Non, mais il s'agit simplement de savoir ce qui doit être amélioré jusqu'à ce que ces aspects soient traités dans la Loi sur les Indiens. Je pense que c'est là le mandat qui a été confié au comité. Que devrions-nous recommander, à votre avis?
    Je dirais que vous devrez mettre en place un mécanisme de consultation simplement pour avoir le point de vue des Premières Nations sur les problèmes externes qu'elles ont décelés.
    Par là, vous entendez que c'est ce que le Canada doit faire.
    M. Brock A. F. Roe: Oui, absolument.
    L'hon. Carolyn Bennett: Cela ne serait pas vraiment un processus parlementaire. Le Canada devrait consulter les Premières Nations, n'est-ce pas?
    Oui. Lorsque vous le ferez, vous aurez une idée du degré d'intérêt des Premières Nations pour agir sur ce front, s'il y a lieu, et vous saurez s'ils ont les ressources nécessaires, parce qu'elles ont déjà beaucoup à faire.
    Je ne crois pas qu'il y ait une solution miracle. Comme Brock l'a indiqué, dans le cadre du processus de la Commission des traités de la Colombie-Britannique, les Premières Nations s'en remettent simplement aux lois provinciales; elles ne semblent donc pas avoir d'intérêt pour cette question à ce moment-ci. Ces négociations se poursuivront pendant encore longtemps, comme le comité le sait pertinemment, j'en suis certain.
    Je suis d'accord avec Brock pour dire qu'il faut une consultation élargie. De toute évidence, si l'on souhaite faire appel à une loi provinciale, par exemple, il faut aussi discuter avec les représentants provinciaux, les tuteurs et curateurs publics, dont j'ai parlé dans mon exposé. Or, vous avez raison de dire que des améliorations sont requises entre-temps. Je pense que l'approche n'est pas simplement de jeter le bébé avec l'eau du bain. Dans les faits, comme Brock l'a indiqué, la loi comporte de bons éléments, des éléments efficaces qui découlent de choses comme les testaments olographes. Le ministre peut agir rapidement pour approuver les testaments et nommer des exécuteurs et des administrateurs, bien plus rapidement que le processus judiciaire. Dans l'exercice de mes fonctions, j'ai constaté que l'on n'a pas à attendre pendant des semaines pour l'approbation d'un testament ou pour la nomination d'un exécuteur — ou d'une exécutrice — chargé de la gestion de la succession.
    Il y a là de bons éléments. Comme Brock l'a indiqué, le fait est que l'approbation serait accordée, soit par un juge, soit par quelqu'un dans un bureau régional du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien. Je ne pense pas que ce soit une question d'autonomie.
    Pour ce qui est de votre comité, je pense que vous devez procéder lentement, en fait, et mener de vastes consultations. Jusqu'à ce qu'il y ait une solution miracle, d'ici à ce que le gouvernement du Canada décide de se retirer de ce secteur, les modifications à la loi et aux règlements devront être graduelles.

  (1625)  

    J'ajouterais que je ne sais pas si vous avez discuté directement avec les Premières Nations et leurs dirigeants, mais je vous suggère de le faire. Mettre en place des choses au profit des Premières Nations sans qu'elles aient leur mot à dire est une chose du passé qu'il faut vraiment éviter de répéter.
    On m'a parlé de chiffres selon lesquels le programme des testaments et successions d'AADNC dépense 3,5 millions de dollars pour un effectif de 44 personnes. J'imagine la quantité de travail que pourraient abattre les collectivités des Premières Nations avec une somme pareille. Ces dernières années, l'effectif des fonctionnaires chargés des dossiers relatifs aux Premières Nations a fait l'objet d'importantes compressions, de sorte que le personnel restant est débordé. J'imagine que ce genre de ressources pourrait être très utile pour traiter des questions liées aux testaments et aux successions.
    Je pense que le comité pourrait procéder à une analyse exhaustive à laquelle participeraient les Premières Nations et qui serait dirigée par les Premières Nations.
    Merci beaucoup.
    Pour les prochaines questions, nous passons à M. Strahl.
    Je vous remercie de me donner aujourd'hui la possibilité de poser plus de questions qu'au début de l'étude.
    Je suppose que ma question fondamentale, que j'ai aussi posée aux fonctionnaires, mais sous une autre forme, c'est de savoir si ce changement, cette modernisation ou cette amélioration quelconque du régime des testaments et des successions... Est-ce une demande des membres des Premières Nations ou des chefs en conseil? Ou s'agit-il de quelque chose que l'on a examiné, que l'on considère comme un élément qui pourrait être retiré de la Loi sur les Indiens et qu'étant donné que nous avons découvert qu'il existe deux façons distinctes de procéder, le retirer ou le modifier est justifié?
    Quiconque veut y répondre peut le faire, qu'il s'agisse de vous tous ou de deux d'entre vous.
    Est-ce une chose à laquelle les collectivités des Premières Nations ont indiqué ne pas vouloir... Vous avez dit qu'il n'y a pas eu d'intérêt à cet égard en Colombie-Britannique, mais cela a-t-il fait l'objet de demandes à quelque niveau que ce soit? Nous avons déjà modifié la Loi sur les élections au sein des premières nations, à la demande de deux ou trois groupes, en préparant une loi à adhésion facultative. Existe-t-il un phénomène semblable? Des groupes ont-ils demandé ces changements?
    Cela découle de deux facteurs, à mon avis. Le premier concerne certains de nos clients qui sont confrontés à ces questions dans les réserves. Je ne peux évidemment pas porter atteinte au secret professionnel, mais il s'agit selon moi d'un des facteurs. J'essaie d'analyser le problème en fonction des faits et j'examine la loi, comme tout avocat le ferait, et cela me frustre. Lorsque j'examine ces dispositions désuètes, je me dis qu'elles ne présentent aucune solution et que je dois étudier la situation et faire preuve de créativité. Ne vous détrompez pas: les avocats seront créatifs. C'est ainsi qu'évolue la common law sur un sujet. Toutefois, c'est extrêmement frustrant. On marche sur des oeufs, parce qu'on ne sait pas si un aspect précis a été prouvé ou non, si un juge acceptera l'argument ou si les clients seront satisfaits des conseils que vous pourrez leur donner.
    C'était le premier facteur. L'autre, c'est... Je ne connaissais pas ce processus jusqu'à ce que j'entende parler du projet de loi d'initiative parlementaire de M. Clarke visant à modifier certaines parties de la Loi sur les Indiens en y retirant les dispositions désuètes. C'était il y a environ un an, je pense. Je m'étais contenté de l'imprimer et de l'examiner succinctement; j'ai constaté que les dispositions sur les testaments et les successions s'y trouvaient. C'était à peu près à l'époque où j'avais été saisi de l'autre dossier au travail. Je me rappelle avoir alors pensé que cela ne fonctionnerait pas. En effet, si l'on retire ces dispositions, qu'utilise-t-on pour les intérêts possessoires à l'égard des terres de réserve? Cette pensée se rapprochait du point de vue exprimé par M. Christopher Devlin — le partenaire de M. Gailus dans son cabinet d'avocats — dans le rapport qu'il a présenté à ce comité dans le cadre de son étude du projet de loi C-428.

  (1630)  

    Merci.
    Monsieur Gailus, vous avez dit qu'il y a place à l'amélioration, et je crois que M. Roe serait d'accord avec vous. La question vous a été posée quelques fois déjà, mais j'essaie de bien comprendre. Quelle forme croyez-vous que cela devrait prendre? Un changement législatif est-il nécessaire? Est-ce qu'une modification de la réglementation pourrait suffire? Est-ce qu'une mise à jour...?
    Nous en avons parlé en long et en large. Il n'y a pas de solution facile, et comme l'a dit Mme Richer, il serait probablement mieux de ne rien faire jusqu'à ce que le processus de consultation soit entamé. Je crois bien que nous sommes tous d'avis que des améliorations pourraient être apportées, mais pour paraphraser Carolyn, comment procède-t-on pour en arriver là? Par où commence-t-on? En dehors d'une modification législative, y a-t-il des choses acceptables à faire pour nous permettre d'avancer, ou la recommandation est-elle vraiment que nous amorcions une conversation nationale avec les Premières Nations à cet égard?
    Nous ne sommes pas censés poser de question dont nous ne connaissons pas la réponse, mais en voilà une.
    Seulement si vous êtes avocat.
    Il y a plusieurs options possibles. Je crois assurément que les politiques actuelles du ministère peuvent être améliorées. Il y a les règlements. C'est beaucoup plus facile de modifier les règlements que de modifier la loi. Il est certain que les règlements pourraient être mis à jour et affinés. Je crois qu'il faudra effectivement s'adresser à la base. Les modifications de ce type ne pourront se faire sans une vaste consultation. Avec le recul, j'en suis venu à la conclusion que la première étape consistait probablement à définir le problème et à proposer quelques solutions possibles, mais de façon très générale, puis d'aller sur le terrain aux fins de consultation et de parler aux employés du ministère et aux membres des Premières Nations pour se faire une idée des chances de réussite des solutions mises de l'avant.
    Je ne suis pas convaincu. Il nous faut encore bien cerner le problème. Nous tournons en rond. Il y a le problème du caractère désuet de la loi, celui de ses dispositions d'une autre époque et celui de ses lacunes. Je crois que le comité a le devoir de bien régler cette question une fois pour toutes. Il se peut que je n'aie pas une bonne vue d'ensemble de la situation ou que je n'aie pas la formation juridique pour bien saisir tout ce qui est en jeu. Y a-t-il des documents qui font le tour de la question, qui définissent les problèmes qui devraient être réglés d'une façon ou d'une autre? J'ai l'impression que nous pédalons dans le vide et j'aimerais bien qu'on nous donne un peu plus de précisions.
    En 2010, j'ai préparé un document en vue d'une présentation à la sous-section des testaments et fiducies de l'Association du Barreau canadien. Je l'ai passé en revue ce matin. C'est un excellent document...
    Des voix: Oh, oh!
    M. John Gailus: ... qui établit très bien en des termes que tous pourront comprendre — du moins, je le crois — le cadre dans lequel nous sommes aujourd'hui. Je crois que ce document pourrait être utile au comité. Il est d'ailleurs déjà là.
    Une voix: Formidable.
    M. John Gailus: Si vous le souhaitez, je peux préparer une liste des 10 principaux changements nécessaires, mais je doute qu'elle soit aussi divertissante que celles de David Letterman.
    À titre d'exemple, l'une des choses qui nous viennent à l'esprit est la façon de traiter avec les successions, et surtout avec les successions sans testament. Le problème n'est pas que ces successions soient résolues, mais bien qu'on ne s'en occupe tout simplement pas. Puis, arrive un moment où le petit-fils ou quelqu'un d'autre s'intéresse au certificat de possession de la terre et souhaite mettre la main dessus seulement pour découvrir que son grand-père, son père, sa mère sont décédés et que personne n'a pris soin de leur succession.
    On se retrouve donc avec 20 ou 30 héritiers qui vont chacun avoir une fraction des intérêts, des intérêts qui, de surcroît, sont indivis. Alors l'un des problèmes relatifs à ces successions sera d'essayer de convaincre tout le monde de transférer la terre. Cela peut donner lieu à des querelles intestines. Dans les cas où la terre est effectivement transférée et qu'il y a 30 personnes engagées dans le processus, le problème est alors de les convaincre toutes d'exploiter cette terre. Alors, les occasions qui se présenteront disparaîtront l'une après l'autre, puisque chacune de ces 30 personnes détient virtuellement un droit de veto.
    L'une des choses qui manquent au régime actuel est la possibilité pour une personne d'aller en cour afin de demander l'ordonnance de partage qui lui permettra de vendre sa partie. Il y aura des offres, de sorte qu'à défaut de conclure un marché, il vous sera quand même possible de faire quelque chose avec la terre. C'est un exemple de ce qui pourrait être modifié sur le plan législatif: les lois pourraient être mises à jour afin de permettre la résolution de ces impasses.
    J'ai présentement trois dossiers qui concernent cette question. Certains intérêts fractionnels — dans ce cas-ci, la propriété est divisée en vingt-cinq — tiennent les autres héritiers en otage en bloquant le partage de la terre.

  (1635)  

    Merci.
    Passons à Mme Crowder.
    Je vais essayer de faire le point.
    Tout d'abord, il y a ces questions foncières d'une grande complexité qui ne concernent pas les compétences provinciales, comme vous l'avez souligné, monsieur Gailus. J'ai lu votre document et j'ai bien écouté votre témoignage. L'étude sur les terres que nous avons menée avait elle aussi cerné ces questions fort complexes. Nous avons donc cet élément, qu'on ne saurait ignorer.
    L'autre aspect qui ne peut être mis de côté est le fait qu'il y a différents statuts dans les réserves. Certains résident habituellement dans les réserves, mais ne peuvent être reconnus comme membres inscrits sur réserve en raison d'inadmissibilité de la deuxième génération ou du non-respect d'autres critères. Les terres de certains pourraient faire l'objet d'une vente en vertu de l'article 50, même s'ils sont des membres de la collectivité. Voilà un autre élément.
    Madame Richer, vous avez souligné à bon escient qu'aucun changement majeur ne devrait être fait sans que le devoir de consulter ait été rempli, comme cela s'est fait pour nombre de décisions. D'après ce que je peux comprendre, voilà le type de contexte avec lequel nous devons composer.
    Il y a aussi ces deux autres éléments sur lesquels le comité devrait selon moi se pencher.
    Tout d'abord, y a-t-il à l'heure actuelle des Premières Nations qui exercent leur compétence à l'égard des testaments et des successions? Je ne crois pas que nous en connaissons une seule, mais il serait probablement utile pour le comité de parler avec des Premières Nations qui ont décidé d'exercer cette compétence.
    Ensuite, je crois que M. Roe a dit que le comité aurait avantage à recevoir le témoignage des deux provinces qui ont un contrat avec AADNC et d'entendre le point de vue de certains tuteurs publics.
    Pour la suite, je m'aventure peut-être en terrain miné. C'est un peu ma bête noire... mais j'avoue que j'y pense aussi parce que le ministère a fait une évaluation des problèmes relatifs à ses processus internes. Bref, je crois que le ministère devrait préparer un rapport sur ce qu'il fait pour régler ses propres problèmes à l'interne. Ensuite, le ministère pourrait resserrer ses politiques et processus sans qu'il y ait besoin de changer la loi. Peu importe les raisons — absences de formulaires appropriés, mauvaise compréhension des procédures, etc. —, le ministère devrait disposer d'un processus limpide applicable partout au Canada quant au traitement des testaments et des successions.
    En ce qui concerne le règlement des différends, la Commission canadienne des droits de la personne a un très bon cadre pour permettre aux collectivités d'arriver à des solutions. Je crois comprendre que Mme Richer ne voit pas de problèmes de ce côté, mais le fait demeure qu'il existe des processus de résolution des différends qui pourraient être adoptés.
    En dernier lieu, sans se lancer dans de grandes modifications législatives, il serait opportun d'examiner le processus réglementaire pour voir si certains mécanismes mériteraient d'être dépoussiérés et rajeunis à la lumière de ce que certains gouvernements provinciaux ont mis en oeuvre en matière de modernisation.
    C'est bien cela? Ai-je bien résumé certains des éléments clés?
    M. Roe a fait un excellent travail en dressant la liste complète des choses que je n'ai même pas abordées, mais j'essaie de voir sur quel prochain sujet le comité devrait mettre le cap. Il y a certes des choses que nous apprendrons de nos futurs témoins, mais il y en a d'autres sur lesquelles nous pourrions formuler des recommandations en attendant une modification en profondeur de la loi — un exercice complexe, s'il en est un — et le déploiement d'un processus global. Entre-temps, nous pouvons assurément faciliter la vie des gens en simplifiant certaines choses.
    Avez-vous des observations à formuler à ce sujet? Mon analyse comporte-t-elle des erreurs flagrantes qui m'auraient échappé?
    M. Brock A. F. Roe: Excusez-moi, je voulais simplement relire mes notes.
    Mme Jean Crowder: Je n'y vois pas d'inconvénient.

  (1640)  

    Non, je pense que vous avez bien présenté la situation.
    D'accord. C'est tout ce que j'avais à dire, à moins que vous ayez quelque chose à ajouter, monsieur Roe, après avoir relu vos notes.
    M. Brock A. F. Roe: Non.
    Mme Jean Crowder: Comme vous pouvez le voir, ce sujet nous donne du fil à retordre parce qu'il est compliqué. Ils n'ont pas été des légions à réclamer que nous réglions ce problème. Si nous allons consacrer du temps et de l'énergie à l'étude de cette question, assurons-nous que le changement résultant sera significatif et qu'il ne donnera pas lieu à de nouvelles difficultés pour les Premières Nations, comme des dépenses additionnelles, des complexités supplémentaires et d'autres choses de ce genre. Je crois qu'il est important de ne pas perdre cela de vue non plus.
    Merci de votre temps.
    Merci.
    Au tour maintenant de M. Dreeshen.
    Monsieur Gailus, durant votre exposé, vous avez dit quelque chose au sujet des dossiers complexes auxquels vous vous intéressez. Vous avez entre autres parlé des baux sur les terres des Premières Nations.
    Puisque nous devons examiner tous les aspects de cette question, j'aurais aimé vous entendre faire le point sur les problèmes associés à ces baux, car j'aimerais bien comprendre ce dont vous avez parlé tout à l'heure.
    Dans son exposé, M. Roe a fait allusion aux baux au noir, qui sont un problème bien réel en Colombie-Britannique.
    Par exemple, il pourrait s'agir du cas suivant: un entrepreneur d'une première nation décide d'inviter un promoteur immobilier ou un certain nombre de personnes à venir sur sa propriété pour bâtir un parc de maisons mobiles. Comme il s'agit habituellement d'un parc pour les caravanes, les occupants ne se soucient pas d'obtenir l'approbation du ministère et se retrouvent avec un bail au noir, c'est-à-dire sans bail légal.
    Or, il n'est pas rare que la personne meure, ce qui donne lieu à toutes sortes de problèmes, puisque les gens qui vivent dans ces conditions — et ce sont habituellement des gens à revenu fixe — n'ont pas de tenure légale leur permettant d'être là. Il n'est pas rare d'avoir à composer avec ce genre de problème. Il faut essayer de trouver la façon de traiter la succession et d'établir s'il s'agit vraiment d'un actif de succession qu'il sera possible de transférer. La propriété n'a pas d'existence juridique. Elle ne se trouve nulle part dans le Système d'enregistrement des terres indiennes. Impossible d'en retrouver la trace. Il pourrait s'agir d'un contrat d'une page que la personne décédée avait signé avec le promoteur, lequel a vendu tous ses lots avant de s'exiler sous d'autres cieux. Les caravanes de ces « locataires » sont devenues fixes avec le temps; elles ne sont plus déplaçables.
    C'est un problème que je vois plutôt souvent. On vient me voir pour que je gère ces enjeux et que j'essaie de redresser la situation.
    En ce qui concerne les successions, je conseille à mes clients de mettre leurs affaires en ordre. Il importe d'obtenir un bail officiel avec le ministère ou avec la Première Nation concernée. Beaucoup de ces Premières Nations ont maintenant leur propre code foncier.
    Outre ces codes fonciers et autres choses de ce genre, et compte tenu de la façon dont elles administrent leurs affaires, y aurait-il moyen de doter les Premières Nations de règlements et d'autres mécanismes susceptibles de les orienter quant à la façon d'administrer ces testaments et ces successions dans les réserves?
    J'aborde la question sous un angle légèrement différent. Existe-t-il une structure sur laquelle les Premières Nations pourraient se baser pour gérer ces questions, comme un règlement ou quelque chose d'autre?

  (1645)  

    En théorie, les deux se recoupent souvent, surtout chez les Premières Nations des villes et des banlieues qui font du développement dans leurs réserves. Je n’ai pas regardé la Loi sur la gestion des terres des premières nations ou les codes fonciers depuis un certain temps, mais il serait possible d’y inclure certains règlements pour encadrer la façon de prendre soin de ces problèmes de succession lorsqu’ils se présentent.
    Aux termes du régime actuel, je ne crois pas que l’on pourrait aller jusqu’à les laisser élaborer leur propre code.
    J’avais une autre question.
     Monsieur Roe, je crois que vous avez mentionné le concept des 75 000 $ pour le conjoint, assortis d’un partage des avoirs subséquents entre les autres ayant droit. Vous avez aussi précisé que les changements apportés différaient d’une province à l’autre. Sur quoi se base-t-on pour statuer en la matière? Sur la valeur foncière, sur les actifs? De toute évidence, il faudra s’attendre à différentes évaluations, même à l’intérieur d’une seule et même province.
    Comment en est-on arrivé là? Cela a-t-il à voir avec l’évaluation foncière ou avec les décisions prises par les différentes administrations?
    Je suis désolé. Je ne sais pas comment ces chiffres ont été établis pour l’Ontario, la Colombie-Britannique ou l’Alberta — il est question de 300 000 $ pour la Colombie-Britannique, de 150 000 $ pour l’Alberta et de 200 000 $ pour l’Ontario —, mais j’aimerais bien le savoir. Au même titre que j’aimerais savoir comment le montant de 75 000 $ a été établi aux termes de la Loi sur les Indiens.
    En pratique, lorsque la situation se produit dans la collectivité, il se peut que le conjoint survivant qui a des relations acrimonieuses avec ses enfants — il ne faut pas nécessairement y voir une démarche égoïste — tente de faire valoir que la valeur de la succession est en dessous du seuil, car il voudra garder les 75 000 $ pour lui-même. Le conjoint survivant ayant en enfant devra partager avec lui tout ce qui est au-dessus de cette valeur. Les premiers 75 000 $ reviennent donc au conjoint survivant et tout ce qui reste est partagé entre eux, et ainsi de suite.
    Lorsque vous commencez à jouer avec le seuil, vous modifiez le montant auquel le conjoint a droit. Je ne vois pas comment vous pourriez évaluer dans les 150 000, 200 000, ou 300 000 $ une terre située dans une réserve en région éloignée. En revanche, Pour les réserves en contexte urbain, il est peut-être possible de faire intervenir ce seuil.
    Voilà ce que j’en pense.
    Avec ce seuil, si les premiers 75 000 $ vont au conjoint survivant et qu’il y a, disons, trois enfants, est-ce que le reste est partagé à quatre? Prenons une succession d’une valeur de 500 000 $. Le conjoint reçoit d’office 200 000 $, ce qui laisse 300 000 $ à partager. Le partage se fera-t-il à parts égales entre les trois enfants et le conjoint, ou seulement entre les trois enfants? Comment cela fonctionne-t-il?
    Il y a la première tranche, qui est de 75 000 $ ou de la valeur du seuil en vigueur. Cette tranche revient au conjoint survivant. Pour le reste, on se fonde sur une formule consignée dans la Loi sur les Indiens ou dans un régime provincial, selon ce qui s’applique. Toutes les formules diffèrent un peu les unes des autres. D’après ce que je comprends, c’est le conjoint d’abord, puis le conjoint avec un enfant. Dans tous les cas, c’est le conjoint avant les enfants.
    Oui. Voilà l’aspect que je voulais que vous clarifiiez.
    S’il n’y a pas d’enfants, la succession va aux parents. S’il n’y a pas de parents, la succession va aux frères et soeurs. C’est habituellement la façon de procéder.
    M. Clarke avait une courte question complémentaire.
    Ce n'est que pour poursuivre à ce sujet.
    De façon hypothétique, si mon projet de loi d'initiative parlementaire, le projet de loi C-428, est adopté par le Sénat, les Premières Nations auront le droit d'établir leurs propres règlements. C'est un aspect très important de mon projet de loi. C'est une question d'autonomie gouvernementale, et je crois que c'est l'un des aspects sur lesquels les Premières Nations pourront exercer cette autonomie.
    Mais cela donnera-t-il le droit ou la possibilité aux Premières Nations d'instaurer leurs propres règlements en matière de testaments et de successions — lesquels seront administrés par leurs propres collectivités — sans contrevenir à la structure ou à la constitution actuelle?
    Est-ce la solution?
    La première chose qui me vient à l'esprit c'est qu'en vertu de la loi actuelle, c'est au ministre d'approuver le testament. Je ne sais pas si votre projet de loi a l'intention d'abolir cette prérogative du ministre et d'enchâsser cette autorité dans un règlement, de sorte que la décision revienne au chef et au conseil. Ensuite, la même chose pourrait se faire quant à l'administration de la succession. Le ministère ne s'en occuperait pas et laisserait cette responsabilité au chef et à son conseil, ou à leur administration. Est-ce là où vous voulez en venir?

  (1650)  

    Ce que je souhaite, c'est qui le ministre soit carrément exclu de tout le processus et que le pouvoir soit redonné aux Premières Nations. Est-ce que l'intégration à des règlements des dispositions législatives en matière de testaments et de successions serait une solution possible?
    C'est compliqué, je sais. Je comprends où vous souhaitez en venir. Je voudrais moi aussi que les Premières Nations soient en mesure de prendre soin elles-mêmes de ces questions.
     Lorsque vous avez une petite réserve avec un nombre restreint de membres... Vous êtes de Muskeg, n'est-ce pas? Il y a des milliers de Premières Nations là-bas. Je suis de Bigstone et c'est la même chose: il y a des milliers de Premières Nations. L'administration est énorme, mais il y a encore d'importants clans familiaux dont il faut tenir compte. Je m'inquiète un peu de l'équitabilité des procédures lorsqu'il s'agit d'un système qui a été établi dans la réserve par les personnes de la réserve qui en ont besoin. Je tiens à veiller à ce que tout le monde puisse compter sur un processus équitable lorsque viendra le temps de régler la succession de la famille. Il faut éviter que l'intégrité soit biaisée. Un système à un échelon plus ou moins régional qui fait à peu près l'unanimité est une solution qui pourrait être envisagée.
    Selon moi, le fait de donner la possibilité à chaque nation de se doter de ses propres règlements sans en parler aux autres nations rend les choses un peu trop secrètes.
    Puis-je intervenir?
     Je crois que vous devez disposer d'une source législative pour ça. Vous ne pourriez créer un règlement sans savoir d'où cette autorité viendra, et elle viendra des articles 42 à 50 de la Loi sur les Indiens. Si vous supprimez les articles 42 à 50 avec l'intention de régler ces problèmes en adoptant des règlements, vous aurez encore un problème, car la province ne les reconnaîtra pas. Il y aura un vide législatif. Vos règlements doivent avoir un fondement législatif.
    Je crois qu'il y a de nombreuses questions. Leur existence même en suscite clairement une foule d'autres, alors nous vous remercions de votre témoignage d'aujourd'hui.
    Nous allons suspendre la séance pendant quelques minutes, mais avant cela, nous tenons à remercier Mme Richer, M. Roe et M. Gailus de leur présence.
     Nous savons que vous êtes très occupés, mais que vous avez néanmoins pris le temps de venir ici pour nous parler. Merci beaucoup.
    La séance est maintenant suspendue.
    [La séance se poursuit à huis clos]
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