Passer au contenu
Début du contenu

HESA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain
Passer à la navigation dans le document Passer au contenu du document






Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la santé


NUMÉRO 067 
l
1re SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 29 novembre 2012

[Enregistrement électronique]

  (1100)  

[Traduction]

    Nous allons commencer. Nous accueillons aujourd'hui des témoins très dynamiques. Nous sommes heureux de vous avoir avec nous.
    Par vidéoconférence, nous accueillons le Dr Julio Montaner...
    Je crois que nous venons de perdre le Dr Montaner. Nous allons essayer de rétablir la communication.
    Nous accueillons aussi Ray Racette, président-directeur général du Collège canadien des leaders en santé, et le Dr Michael Tétreault, président-directeur général de l'Hôpital St-Boniface. Ces deux témoins ont des idées novatrices, et ils vont nous en faire part ce matin.
    Nous accueillons aussi le Dr Eric Bohm, professeur agrégé pour le Concordia Joint Replacement Group de l'Université du Manitoba. Il a préparé une présentation PowerPoint en anglais. Nous sommes tous d'accord pour qu'il la présente.
    Enfin, nous accueillons le Dr Christopher Fotti, médecin au Pritchard Farm Health Centre, un projet extrêmement novateur réalisé dans ma circonscription. Il a aussi quelque chose à nous présenter.
    M'entendez-vous, docteur Montaner?
    Docteur Montaner, je suis désolée. Nous avons eu quelques ratés avec la communication vidéo, et nous vous avons perdu deux ou trois fois. Si vous voulez dire quelque chose à un moment ou un autre, faites-le-moi savoir en levant la main.
    Je ne sais pas si vous m'avez entendu présenter tous les invités qui sont ici ce matin. M'avez-vous entendue?
    Je vous entends très bien.
    Nous allons écouter les exposés de chaque témoin, puis nous passerons aux questions et réponses.
    Docteur Bohm, votre vidéo est-il prêt?
    Voulez-vous commencer, s'il vous plaît?
    Merci beaucoup. Je vous demande à nouveau pardon, le document qui accompagne mon exposé est seulement en anglais. Je le ferai traduire.
    J'aimerais prendre quelques minutes pour vous parler d'innovation dans le domaine des soins de santé orthopédiques et de la mise au point de dispositifs.
    Je suis l'un des quatre chirurgiens qui travaillent pour le Concordia Hip and Knee Institute. Nous nous spécialisons dans l'arthroplastie primaire et la chirurgie de réintervention de la hanche et du genou.
    Nous possédons une équipe multidisciplinaire de préadaptation et d'éducation, ce qui nous aide à préparer les patients avant leur intervention chirurgicale. Nous avons des installations de radiographie numérisée qui nous permettent de procéder à des analyses radio-stéréométriques à des fins de recherche et de suivi. Nous avons un laboratoire de récupération et d'analyse des prothèses et un laboratoire qui nous permet d'analyser l'usure des prothèses et de faire des essais. Nous comptons sur un groupe de recherche clinique très dynamique. Nous participons aussi à des initiatives liées à l'accès aux soins et à la qualité des soins au sein de l'Office régional de la santé de Winnipeg. Nous avons aussi récemment mis sur pied une initiative d'innovation des dispositifs orthopédiques. Tout cela sous un même toit, au Hip and Knee Institute.
    J'aimerais parler rapidement du rendement du système de santé et faire certains liens avec la théorie de fabrication et la façon dont nous avons amélioré les choses. Je vais donner certains exemples liés à l'aide aux médecins, aux délais d'attente pour des arthroplasties et à la qualité des arthroplasties dans le cadre d'une intervention chirurgicale à la suite d'une fracture de la hanche.
    On peut considérer le rendement du système de santé comme étant lié à l'accès aux soins, au caractère approprié de la bonne intervention pour le bon patient au bon moment, à l'efficacité, tant sur le plan des coûts que du point de vue clinique, et à la sécurité.
    Voici un graphique qui représente nos listes d'attente pour des arthroplasties de la hanche et du genou depuis 2005. Vous constaterez que bon nombre des patients qui ont subi une intervention chirurgicale ont été traités après le point de référence de 26 semaines, qui est représenté par la ligne jaune au milieu du graphique. Il fallait donc vraiment régler le problème.
    La théorie des contraintes renvoie à la détermination des goulots d'étranglement dans le processus et à l'utilisation de ressources pour éliminer ces goulots. C'est donc ce que nous avons commencé à faire. Nous avons tenté de trouver où étaient les goulots d'étranglement.
    Durant une journée typique de huit heures, un chirurgien orthopédiste peut procéder à trois arthroplasties. Une telle intervention chirurgicale compte beaucoup d'étapes. Il faut amener le patient dans la salle, préparer la salle, anesthésier le patient et puis il faut ensuite le positionner, le préparer, le couvrir et ainsi de suite. En fait, les arthroplasties elles-mêmes ne représentent qu'environ deux heures et demie en tout dans la journée de huit heures.
    C'était évident pour nous que le goulot d'étranglement, c'était le chirurgien. Nous devions donc faire quelque chose pour améliorer sa productivité. Nous avons essayé d'augmenter la productivité en ayant recours à des adjoints. Ces personnes sont entre autres d'excellents assistants dans la salle d'opération. Elles peuvent aider à placer et préparer le patient. Elles peuvent aider à le couvrir et fournir un coup de main à la fin de la procédure.
    Nous avons mis en place ce que nous appelons des salles doubles. Un chirurgien est assigné à deux salles, mais il y a un adjoint, un anesthésiste et une équipe de soins infirmiers dans chaque salle. Le chirurgien peut donc commencer l'intervention dans la première salle pendant que, dans la deuxième, on amène le patient, on prépare l'équipement et ainsi de suite. Quand le chirurgien a fini dans la première salle, il peut passer à la deuxième et au cas suivant. On a ainsi pu augmenter grandement le nombre d'interventions chirurgicales réalisées. Nous sommes passés de trois patients par jour à sept patients par jour.
    En fait, c'était la seule façon pour nous d'augmenter le nombre d'arthroplasties primaires réalisées, parce que nous ne pouvions pas ajouter de jours à la semaine pour procéder à des interventions chirurgicales. Nous sommes déjà occupés du lundi au vendredi. C'est la solution que nous avons trouvée pour augmenter le nombre d'interventions. Nous avons constaté une augmentation du nombre d'interventions de 42 p. 100, et, notre délai d'attente médian de l'époque a diminué, passant de 44 à 30 semaines.
    Nous nous sommes aussi penchés sur les soins à la suite d'une fracture de la hanche. En 2005, on ne faisait pas du très bon travail au Manitoba pour que les patients victimes d'une fracture de la hanche puissent subir rapidement une intervention chirurgicale. La norme nationale était de 48 heures. Seulement 53 p. 100 de nos patients subissaient une intervention chirurgicale dans les 48 heures. En comparaison avec la moyenne nationale de 65 p. 100, la situation était loin d'être reluisante. Il fallait donc faire quelque chose.
    Nous avons utilisé la méthode « Lean » pour régler ce problème. Nous avons déterminé ce qui est important pour les consommateurs. Le consommateur, c'est le patient qui a une fracture de la hanche, et laissez-moi vous dire que, pour eux, l'important, c'est de subir rapidement l'intervention chirurgicale dont ils ont besoin. Nous avons cerné les choses que nous faisions qui n'avaient pas de valeur ajoutée et avons harmonisé nos activités pour atteindre l'objectif de procéder à une intervention chirurgicale dans les 48 heures.
    Dans un premier temps, nous avons essayé de comprendre le problème. Nous avons mis en place certaines mesures de suivi standards pour déterminer l'origine des retards. Nous avons trouvé des choses comme Plavix, qui est un anticoagulant. Nous avons constaté que l'intervention chirurgicale de certains patients était reportée de cinq à sept jours pour permettre à l'effet de Plavix de se dissiper.
    Quant à la consultation obligatoire en médecine interne, à l'époque, un docteur en médecine interne voyait chaque patient victime d'une fracture de la hanche alors que ce n'était pas vraiment nécessaire. L'anesthésiste et le chirurgien orthopédiste pouvaient déterminer ensemble si le patient était apte à subir une intervention chirurgicale. Il y avait aussi des problèmes liés au temps en salle d'opération et à la disponibilité des chirurgiens.
    Nous avons réglé le problème du Plavix avec nos collègues anesthésistes et leur comité des normes. Nous avons organisé plusieurs séances scientifiques pour rappeler l'impact important des retards sur ces taux et le fait que réduire les délais améliorait les taux de mortalité. Nous avons discuté de la question du Plavix et de la consultation médicale obligatoire. Nous avons modifié certaines règles de réservation des salles d'opération pour permettre à ces patients de subir une intervention chirurgicale rapidement. Nous étions en communication écrite directe avec les sites et les médecins, et nous avons amélioré le processus de rapatriement des patients à leur hôpital d'origine.

  (1105)  

    Nos mesures ont semblé très efficaces. Voici des données sur le délai moyen pour subir une intervention chirurgicale, la durée du séjour et le taux de mortalité avant l'intervention. On peut voir que les patients attendaient en moyenne trois jours et demi. La durée du séjour à l'hôpital était de presque 30 jours et le taux de mortalité à l'hôpital s'élevait à 6,4 p. 100.
    Après l'introduction des changements, le délai moyen avant de subir l'intervention chirurgicale est tombé à 1,8 jour. La durée du séjour a diminué, passant à un peu moins de 25 jours, et le taux de mortalité à l'hôpital est descendu à 5 p. 100. Ces changements étaient tous significatifs sur le plan statistique. Il y avait donc un bon impact sur le délai avant l'intervention et le taux de mortalité.
    Je suis heureux de vous dire que nous nous sommes améliorés par rapport à la moyenne canadienne. Selon le dernier rapport, 87 p. 100 des patients du Manitoba ont subi une intervention chirurgicale à la suite d'une fracture de la hanche à temps. C'est très bon comparativement à 80 p. 100 pour le reste du Canada.
    Nous avons aussi travaillé sur le registre régional des arthroplasties pour améliorer les résultats en matière d'arthroplasties de la hanche et du genou. Nous avons appliqué certains des principes de la méthode « Lean Six Sigma », et le tout était fondé sur les données et les faits, la collecte de bonnes données et leur communication aux fournisseurs pour améliorer les soins.
    Notre registre régional des remplacements articulaires est composé de données préopératoires recueillies auprès des patients, de résultats d'évaluations fonctionnelles et de données médicales sur la comorbidité. Nous recueillons aussi des données durant l'intervention chirurgicale elle-même, sur la procédure, les détails, la prothèse utilisée et ce genre de choses. Un an après l'intervention, nous demandons aux patients comment ils vont, quel est leur niveau de fonctionnement, s'il y a eu des complications, quel est leur niveau de satisfaction, et s'ils ont eu besoin d'une réintervention. Nous posons donc des questions aux patients concernant le résultat et leur interaction avec le système de santé.
    Ces données sont compilées dans un rapport annuel envoyé à la région, au site et au chirurgien, afin que tout le monde puisse se comparer à ses pairs et à l'ensemble de la région.
    J'attire votre attention sur l'une des données que nous déclarons: la satisfaction des patients. Nous avons créé un rapport fictif qui pourrait être envoyé à un chirurgien indiquant que 83 p. 100 de ses patients qui ont subi une arthroplastie du genou étaient satisfaits, mais que 7 p. 100 étaient insatisfaits. On peut utiliser ces données pour améliorer la qualité des soins qu'offre un chirurgien à ses patients — ce sont des renseignements très utiles.
    Un autre exemple des résultats du registre est la réduction constante des taux de réintervention. Comme vous pouvez le voir, nous avons commencé à tenir le registre en 2004. Au début de 2005 et jusqu'en 2009, nous constatons une réduction constante des taux de réintervention précoce à la suite des arthroplasties de la hanche et du genou. Il s'agit d'un meilleur résultat pour les patients et d'une diminution des coûts pour le système de santé.
    Pour innover dans le domaine de la prestation des soins de santé, je crois vraiment qu'il faut comprendre ce que veut le consommateur, ce dont le patient a besoin — pour bien le mesurer et bien le communiquer et pour harmoniser les soins afin de faire ce qui s'impose. Je crois aussi qu'il faut responsabiliser les fournisseurs de soins de santé.
    Je vais glisser un mot sur le Orthopaedic Innovation Centre. En 2011, nous avons reçu une subvention de 2,5 millions de dollars de Diversification de l'économie de l'Ouest. Notre mandat est de créer, de commercialiser et d'homologuer des technologies médicales orthopédiques dans un environnement multidisciplinaire. Nous avons actuellement 10 chercheurs qui utilisent de l'équipement financé grâce à la subvention.
    Notre cheminement a été très intéressant. Nous avons constaté qu'il y a un très bon soutien pour l'innovation initiale, et un peu moins pour la mise au point et la commercialisation des produits, ce sur quoi nous travaillons actuellement. Il y a moins de capital de risque au Canada comparativement à ailleurs. Selon moi, il y a des politiques sur la propriété intellectuelle dans des centres universitaires qu'il faut mettre à jour. Il y a, bien sûr, des contraintes budgétaires liées aux soins de santé et le risque toujours présent d'exode des cerveaux vers les États-Unis, mais nous apprécions très certainement ce nouvel aspect de notre travail.
    Quant à nos efforts futurs, je crois que c'est important de renforcer le Registre canadien des remplacements articulaires. J'ai parlé d'un registre régional, mais il y a aussi le Registre canadien des remplacements articulaires. Il n'y a aucune exigence obligatoire en matière de collecte de données pour l'instant, mais nous allons y arriver. Une fois que nous aurons adopté une procédure de production de rapports réguliers, clairs et concis, nous pourrons améliorer les soins offerts aux Canadiens. Je crois qu'il faut aussi tisser des liens avec Santé Canada en ce qui a trait à la surveillance des nouvelles prothèses après leur mise en marché pour voir s'il y a des défaillances.
    C'est aussi important de promouvoir des modèles de soins axés sur des données intégrées. Il y a beaucoup de bons exemples en la matière à l'échelle canadienne. Dans le domaine orthopédique, l'Alliance de l'arthrite du Canada a élaboré un cadre. La Décennie des os et des articulations au Canada a fait beaucoup de bon travail quant aux arthroplasties de la hanche et du genou et aux soins à la suite d'une fracture de la hanche.
    Selon moi, le fait de continuer à innover dans le domaine des dispositifs orthopédiques, de faire des liens entre les données du registre et les données que l'on peut récupérer et les données des tests pour améliorer les prothèses et leur conception et de continuer à améliorer la situation pour la commercialisation est aussi important.
    J'espère pouvoir terminer sur une note humoristique en rappelant l'importance des données. En effet, si on ne mesure rien, on ne sait pas ce qu'on fait. Voici une photo de moi et d'un membre du personnel infirmier prise il y a environ un mois au Nicaragua. Nous sommes allés faire des travaux de secours médicaux là-bas, et les Américains qui se sont joints à nous ont apporté des uniformes qu'ils voulaient laisser aux gens du Nicaragua, mais ils n'étaient pas tout à fait de la bonne taille. Vous voyez, si on ne mesure rien, on ne sait pas ce qu'on fait.
    Merci de m'avoir écouté, je suis prêt à répondre à vos questions.

  (1110)  

    Merci beaucoup, docteur Bohm. Votre exposé était très intéressant.
    Nous allons maintenant passer à Ray Racette, président-directeur général du Collège canadien des leaders en santé.
    Allez-y, Ray, s'il vous plaît.
    Madame la présidente, mesdames et messieurs, membres du Comité permanent de la santé, c'est un réel honneur pour moi d'être ici en qualité de témoin. Ce matin, je vais vous faire part de ce que j'ai constaté en plus de 30 ans comme dirigeant dans la structure administrative des soins de santé et dans le cadre de mon travail pour le Collège canadien des leaders en santé, au pays et à l'échelle internationale. Durant ma déclaration, c'est l'optique que j'utiliserai pour vous communiquer mes réflexions.
    En tant que dirigeants, nous sommes assurément très fiers de bon nombre d'aspects de notre système de santé. Il y a beaucoup de choses que nous faisons bien. Nous ne parlons pas de beaucoup de ces choses; faire notre travail nous occupe déjà bien assez. Mais nous reconnaissons aussi que notre système de santé est sous pression. La pression vient du fait que notre population vieillit rapidement, et nous constatons aussi une prévalence accrue des maladies chroniques. Notre système n'était pas conçu pour ce genre de patients. Le système était conçu principalement pour offrir des soins actifs et les services de médecins, et nous n'avons pas suffisamment mis à niveau notre système pour pouvoir gérer ces patients.
    Vous vous demandez peut-être pourquoi c'est si important. C'est important parce que le pays est encore jeune. Si nous nous comparons à l'Europe, nous sommes un pays très jeune, mais si on regarde le Canada dans 30 ans, nous serons plus vieux qu'en Europe. Par conséquent, si on a déjà de la difficulté à être jeune, il faut apporter des changements au système pour se préparer à ce qui s'en vient.
    Le défi que nous devons relever nous attend malgré des efforts considérables sur de nombreux fronts, y compris le travail des organisations, des régions, des fournisseurs de soins de santé et du personnel pour améliorer les services. Si nous examinons le programme du leadership au pays, nous constatons qu'il mise tout sur l'amélioration, le changement et la sécurité. Il ne fait aucun doute que les gouvernements ont engagé certains niveaux de fonds pour appuyer l'amélioration, alors pourquoi sommes-nous dans cette situation difficile? C'est une question importante. Je crois cependant que la question encore plus importante, c'est de savoir comment nous nous sortirons de cette situation difficile. Que devons-nous faire pour aller de l'avant? Voilà, selon moi, la question la plus importante pour l'avenir.
    Pourquoi en sommes-nous là? Il y a beaucoup de raisons, mais je veux m'en tenir à trois éléments qui, selon moi, sont à l'origine de la dynamique actuelle. Premièrement, en raison de la façon dont les gouvernements financent les services de santé, nous avons concentré la prestation des soins de santé dans les hôpitaux et les unités de soins actifs et les services de médecins et, par conséquent, c'est là où les soins ont été canalisés. Il y a d'autres choses qui sont assurées à part ça, mais notre régime d'assurance principal mise essentiellement sur ces deux éléments.
    Quel est le résultat de cette situation aujourd'hui? On constate que les hôpitaux sont congestionnés, les patients sont souvent au mauvais endroit. Je crois que, en Ontario, on a constaté que 25 p. 100 des lits d'hôpital sont occupés par des patients qui devraient être ailleurs. On exprime souvent cette situation sous la forme de délais d'attente à l'urgence. Ce sont les conséquences de la congestion dans les hôpitaux, puis les patients ne peuvent pas être transférés là où ils le devraient. De plus, il y a des patients qui attendent pour voir un médecin. Il y a une pénurie de médecins. Par conséquent, il y a des patients qui attendent pour voir des médecins, soit un médecin de famille ou un spécialiste. Ces deux possibilités sont aussi les plus dispendieuses, et tous les patients sont là. Si on examine la situation, c'est un facteur important dont il faut aussi tenir compte.
    Deuxièmement, je crois qu'on peut dire sans se tromper que le consommateur — et lorsque je parle du « consommateur », je parle des patients, des clients ou peu importe le terme que l'on veut bien utiliser — est essentiellement exclu du processus décisionnel. Nous avons un système très paternaliste. Les patients pourraient assumer davantage de responsabilités si on leur permettait de le faire et si on les respectait assez pour les inclure en tant que membres de l'équipe de soins de santé. Nous avons beaucoup de travail à faire à ce sujet. Nous faisons très bien certaines choses, mais il y en a beaucoup d'autres que nous pourrions faire mieux.
    De plus, notre système de santé est fragmenté. Il y a beaucoup de divisions structurelles et professionnelles à l'échelle du pays. Il y a une coordination limitée des efforts partout au Canada, ce qui entraîne des manques d'efficience, des dédoublements et des incohérences. L'exposé du Dr Bohm... c'est unique et c'est limité au Manitoba, mais on fait probablement quelque chose du genre différemment dans d'autres parties du pays — tout le monde veut réaliser la même chose. Il manque un programme national en matière de santé dans cette industrie de 200 milliards de dollars. Ça devrait nous préoccuper.
    Dans une telle situation, comment pouvons-nous renforcer l'efficience et améliorer le rendement de notre système de santé? Nous pourrions commencer en parlant des pays qui ont des valeurs semblables — c'est très important — et qui offrent des services à une population plus vieille et qui obtiennent de meilleurs résultats à plus faibles coûts, parce que c'est vraiment ce que nous essayons d'accomplir.
    Prenons un pays comme la Suède. La Suède est un pays où nous sommes allés souvent dans le cadre de nos voyages d'études. Regardons comment il s'est attaqué aux trois problèmes que j'ai mentionnés.
    Premièrement, l'épine dorsale du système de santé suédois, c'est les soins primaires et non les soins actifs, et chaque citoyen est lié à un réseau de soins primaires. Ce réseau de soins primaires est étroitement lié aux hôpitaux, de sorte que les patients peuvent entrer et sortir très facilement. Il y a beaucoup d'échange d'informations, beaucoup de transfert du savoir, et donc, quand le patient est admis, son historique lié aux soins primaires le suit. Lorsqu'il obtient son congé, ce qui s'est produit durant le séjour à l'hôpital et les ordonnances au départ le suivent. C'est un processus qui se fait en douceur.
    Il y a un dossier de santé électronique qui fait le lien entre les soins primaires et les soins actifs, alors là aussi la communication des renseignements se fait sans heurt. Les unités de soins primaires sont fondées sur la notion d'équipe, et les patients peuvent avoir des rendez-vous avec n'importe lequel des membres de l'équipe assez facilement.

  (1115)  

    Le rôle des soins actifs, cependant, ne doit pas être sous-estimé et est très important, mais il est ciblé. Les soins en hôpitaux sont très spécialisés. Les capacités des hôpitaux sont protégées. On les utilise uniquement pour offrir des soins hospitaliers. Les patients qui ont besoin de soins dans d'autres installations sont transférés très facilement. Par conséquent, les hôpitaux ne sont pas congestionnés par des patients qui devraient être ailleurs.
    Les hôpitaux sont très efficients. On y utilise des outils liés à la méthode « Lean », comme nous en avons parlé plus tôt, pour rationaliser les processus dans les unités de soins infirmiers, les services d'urgence et les zones cliniques et de diagnostic.
    L'amélioration de la qualité et de la sécurité des soins pour les aînés est un objectif national. C'est très important, parce que la Suède a la population la plus âgée d'Europe. La population y est beaucoup plus âgée qu'au Canada. On s'efforce vraiment d'offrir des soins aux aînés chez eux plutôt qu'en institution. En Suède, la durée moyenne des séjours en maison de soins infirmiers est de un an, ce qui reflète les efforts déployés pour permettre aux gens de rester chez eux le plus longtemps possible. On mise beaucoup sur les soins palliatifs à domicile.
    La sécurité des patients et la qualité des soins font partie du programme national. Je vais vous donner un exemple du très bon travail qu'ils ont fait: c'est toute la question des plaies de pression et des plaies de lit à l'hôpital. En Suède, l'incidence de patients qui en sont victimes durant un séjour à l'hôpital est de 5 p. 100. Au Canada, c'est entre 20 et 25 p. 100. Sur ce plan, nous sommes vraiment à la traîne comparativement à d'autres pays.
    En Suède, on met aussi beaucoup l'accent à l'échelle nationale sur la sécurité des médicaments pour les aînés, parce que nous savons que beaucoup des admissions à l'hôpital et des visites à l'urgence sont liées à des problèmes de médicaments et au fait que les patients ne prennent pas bien leurs médicaments et ce genre de choses.
    La Suède mise aussi beaucoup sur le contrôle des infections. Nous avons de la difficulté à faire appliquer les directives sur le lavage des mains au Canada. En Suède, le taux de conformité en matière de lavage des mains est presque de 100 p. 100. Mais ce n'est pas tout; dans les zones de soins aux patients, les intervenants qui entrent dans les chambres des patients ne doivent rien porter en dessous du coude — pas de manches, pas de bijoux et pas de produits pour les ongles. Au Canada, on en parle, mais, en Suède, c'est absolument interdit d'avoir des produits pour les ongles et des bijoux ou quoi que ce soit en dessous des coudes dans les salles des patients. Les taux d'infection là-bas sont très faibles. Les normes sont très élevées et les taux de conformité le sont aussi.
    Quand on s'intéresse au fonctionnement du système suédois, on voit tout de suite qu'il a été conçu en fonction du patient. Ici, nous avons beaucoup de difficulté à transférer les patients d'un secteur à un autre. En Suède, ça se fait très facilement, parce que les transferts des patients sont orchestrés entre les secteurs; les transferts se font de façon transparente.
    Lorsque nous parlons aux représentants suédois des niveaux de soins parallèles et des patients à l'hôpital qui ne sont pas à la bonne place... Ils n'ont pas ce problème. Ils nous regardent d'un air interrogateur et semblent se demander de quoi on parle.
    Les responsables des services de santé en Suède sont extrêmement déterminés à assurer l'efficience des processus grâce à l'utilisation de la méthode « Lean ». Ils n'hésitent pas à faire des appels d'offres touchant la prestation de services lorsqu'ils ont de la difficulté avec un secteur et qu'ils veulent l'améliorer. Ils réalisent des projets dans le cadre desquels ils font des appels d'offres touchant la prestation de services — au secteur privé ou public —, et ils utilisent ce processus pour améliorer les choses.
    Ils considèrent l'industrie différemment de nous. Nous avons tendance à voir les intervenants de l'industrie comme des fournisseurs. Des gens qui nous vendent quelque chose. Ils considèrent les intervenants de l'industrie comme des courtiers de connaissances. Ces entreprises sont des entreprises mondiales qui travaillent dans des centaines de systèmes. Selon eux, ils peuvent obtenir de l'innovation de ces entreprises en raison de tout ce à quoi elles sont exposées, alors ils les considèrent comme des partenaires ayant des connaissances. C'est aussi très important.
    Les consommateurs participent activement au maintien de leur mieux-être personnel, et aussi au choix des options de soins. La réforme liée au choix des patients en Suède est un mouvement très fort, dans le cadre duquel on permet aux patients de choisir leurs fournisseurs. Bon nombre des services pour lesquels ils optent sont payés par l'État. Cela pousse les fournisseurs à offrir des services de haute qualité pour attirer des patients et obtenir du financement.
    La dernière chose que j'aimerais dire au sujet de la Suède, c'est qu'on y dépense beaucoup moins d'argent que nous, mais qu'on y obtient de meilleurs résultats, ce qui est très remarquable, compte tenu du fait que la population y est plus âgée. Parmi les services assurés, mentionnons les soins dentaires pour les jeunes et les aînés, un programme national d'assurance-médicaments, un réseau national de soins primaires et des soins à domicile — tous des services qui sont assurés, et, malgré tout, la Suède dépense moins d'argent. Et elle y arrive avec un financement à 97 p. 100 public.

  (1120)  

    C'est un système de santé public. Pour eux, la santé, c'est une entreprise, et ils planifient jusqu'en 2025.
    Merci beaucoup, monsieur Racette.
    J'espère que vous vous rendez compte que les membres du comité vont faire des pressions pour aller en voyage d'études avec vous en Suède, ce qui n'est pas une bonne chose. Je me trompe?
    Merci beaucoup. Vos propos étaient très éclairants.
    Nous allons passer au Dr Fotti, qui témoigne à titre personnel.
    Merci à vous tous de m'accueillir aujourd'hui et merci à mes médecins cliniques et mon personnel.
    J'ai rencontré Joy quand je commençais à mettre sur pied une nouvelle clinique tout juste en périphérie de Winnipeg. Il s'agit d'une clinique rassemblant 10 médecins, située en bordure de la ville, à quelques minutes de East St. Paul, au Manitoba. Pourquoi ai-je voulu créer une clinique à cet endroit? Eh bien, je vis dans le coin, alors ça ne me prenait pas beaucoup de temps pour aller au travail. De plus, je me suis rendu compte qu'il y avait peu de services de santé offerts dans le secteur. Les gens devaient se rendre à Winnipeg pour des prises de sang et voir leur médecin. Nous sommes situés le long d'une artère principale qui se rend à la ville. Le matin comme le soir, il y a donc toujours du va-et-vient à côté de nos bureaux. Les gens peuvent s'arrêter et recevoir les soins de santé dont ils ont besoin.
    Au départ, nous voulions créer une clinique très moderne. Nous voulions miser sur toutes les technologies disponibles et être prêts à utiliser les nouvelles technologies. Nous savons tous que les percées technologiques sont très utiles pour les patients — elles améliorent les soins aux patients et l'efficience générale, et donnent de meilleurs résultats pour les patients. Nous avions donc cette exigence à l'esprit lorsque nous avons conçu la clinique. Quand quelqu'un vient à notre clinique, il entre dans une clinique assez jolie, qui est totalement informatisée et électronique. Nous interagissons par voie électronique avec les laboratoires et tous les autres intervenants. C'est très utile pour nous tous. Nous voulions le faire parce que c'est important pour nous d'être à l'avant-garde dans ce domaine.
    Nous sommes neuf médecins de famille. En fait, actuellement, nous sommes huit, mais le neuvième commence en février 2013. Il y a aussi une spécialiste, dont la formation porte sur les maladies auto-immunes et de la peau. Elle a aussi une formation en médecine interne générale et offre des soins cosmétiques privés. Ce qui est vraiment bien, dans notre clinique de médecine familiale, c'est de pouvoir compter sur des spécialistes, des intervenants à qui nous pouvons parler de façon informelle dans le corridor ou que nous pouvons consulter officiellement en lien avec nos patients. Cette structure améliore grandement le service aux patients. Par exemple, si j'ai une question, je peux la poser à notre spécialiste. Elle ne pourra peut-être pas rencontrer le patient immédiatement, mais elle pourra me fournir des renseignements sur le début d'un traitement ou d'une enquête qui accélérera le processus lorsqu'elle pourra voir le patient.
    De plus, nous ne voulions pas non plus être « seulement », si je peux me permettre, une clinique familiale, nous voulions travailler en collaboration au sein de la clinique. Si j'ai une question, je peux la poser à un des autres médecins de famille de la clinique. Par conséquent, si vous venez à notre clinique, vous verrez fréquemment deux ou trois médecins réunis autour d'un patient pour examiner son dossier. Trois cerveaux valent mieux qu'un. On peut ainsi parfois accélérer le processus et, peut-être, éviter des consultations inutiles.
    Un autre avantage de notre clinique, c'est que beaucoup de nos médecins s'intéressent à des spécialités. À la clinique, nous offrons tous des soins complets en médecine familiale, mais certains d'entre nous offrent aussi des soins spécialisés. Par exemple, j'offre des soins en médecine respiratoire. Je suis membre du Comité de programme sur la médecine respiratoire du Collège des médecins de famille du Canada. Par conséquent, à la clinique, lorsqu'un des médecins a un patient qui a des problèmes respiratoires et qui pourrait bénéficier de renseignements supplémentaires que je possède, je rencontre son patient. Nous comptons actuellement sur un médecin qui offre des soins obstétriques. Il y en aura un deuxième à compter de février. Si vous voulez obtenir tous vos soins obstétriques à notre clinique, alors il y a un médecin qui peut prendre soin de vous et même être là pour l'accouchement. Ce sera aussi le cas quand le nouveau médecin entrera en poste. Habituellement, lorsque j'ai des patientes enceintes, je m'occupe d'elles jusqu'à environ 28 semaines avant de les transférer. Cela réduit la charge de travail des obstétriciens et des gynécologues — ils n'ont pas à offrir tous les soins prénataux réguliers. Cependant, si j'ai besoin de conseils ou de directives, je peux me tourner vers le médecin de notre clinique qui possède des connaissances pointues.
    Quatre de nos médecins offrent aussi des soins hospitaliers. Ils admettent des patients. Ils admettent des patients non affectés à l'hôpital. Ils facilitent aussi le processus de transition. Si des patients de notre clinique sont à l'hôpital, la transition est très facile à faire. Ça leur permet aussi de se tenir informés tandis que nous essayons d'apporter des changements dans le système hospitalier pour améliorer le continuum de soins aux patients.
    Un de nos médecins s'intéresse à la médecine sportive, ce qui est aussi très utile. Nous comptons sur une bonne équipe de médecins qui offrent des soins complets en médecine familiale, mais aussi sur des personnes qui, sans être des spécialistes, ont des intérêts particuliers et une certaine formation supplémentaire dans d'autres domaines. Comme je l'ai déjà dit, c'est une façon d'améliorer la prestation des soins à la clinique.

  (1125)  

    Nous voulions aussi nous assurer que notre clinique allait être accessible. C'était sans conteste l'une des choses les plus importantes.
    En fait, j'ai apporté un document. Le collège m'a dit l'avoir déjà envoyé à tous les membres du comité de la santé, mais si quelqu'un veut obtenir un exemplaire du document bilingue intitulé « Le Centre de médecine de famille », dites-le-moi, et je vous l'enverrai. L'idée fondamentale du document « Le Centre de médecine de famille », c'est que tout le monde doit avoir accès quand il en a besoin à un médecin de famille et à des soins parallèles, par exemple, des soins après les heures de bureau et ce genre de choses.
    Lorsque nous avons mis sur pied notre clinique...
    Pardonnez-moi, docteur Fotti. Avant que j'oublie, auriez-vous l'amabilité d'en envoyer une copie à la greffière? Nous veillerons à la distribution appropriée du document. Nos bureaux reçoivent tellement de renseignements que les membres n'ont peut-être pas vu le document, et c'est important qu'ils le consultent.

  (1130)  

    Oui. Vous n'avez qu'à me dire combien vous en voulez. Le collège sera heureux de vous les envoyer. C'est juste qu'il ne veut pas en envoyer trop si vous ne savez pas...
    L'idée derrière le « Centre de médecine de famille », c'est que tout le monde doit avoir accès à un médecin de famille rapidement et que le centre doit interagir avec d'autres professionnels de la santé — des spécialistes, des diététistes et des travailleurs sociaux, entre autres —, pour essayer de rationaliser et d'améliorer les soins offerts aux patients.
    Tous nos médecins ont les mêmes plages horaires. Par conséquent, si vous téléphonez le matin parce que vous avez besoin d'un rendez-vous, il est très probable que votre médecin pourra vous voir le jour même ou le jour suivant. Dans beaucoup de cliniques, ce n'est pas le cas. Je suis sûr qu'il vous est arrivé d'appeler votre médecin parce que vous pensiez avoir, par exemple, une infection urinaire, pour vous faire dire que votre rendez-vous était dans un ou deux mois ou que c'est arrivé à des amis ou à des membres de votre famille. En fait, ça ne sert personne, et c'est pourquoi, bien sûr, les gens doivent se rendre à l'urgence ou dans d'autres centres de soins inappropriés pour régler de tels problèmes.
    C'est ce que nous essayons de faire, et ça fonctionne très bien. Nos patients sont très satisfaits du fait que, la plupart du temps, ils obtiennent un rendez-vous très rapidement.
    Nous voulions aussi fournir des soins parallèles, des soins après les heures régulières, à nos patients et aux patients dans la collectivité. Nous avons décidé d'offrir des heures de consultation sans rendez-vous à tous les patients — y compris les clients de notre clinique, bien sûr. Nous offrons ces heures de consultation sans rendez-vous le soir, de 17 à 21 heures. Et nous allons commencer bientôt à le faire le samedi. Par conséquent, par exemple, si quelqu'un téléphone et ne peut pas obtenir une consultation avec moi parce que je suis trop occupé, il peut se présenter durant la période de consultation sans rendez-vous, le soir, et obtenir des soins le jour même.
    Nous avons dit à tous les services de soins d'urgence, les hôpitaux et les salles d'urgence que nous étions ouverts durant ces heures. Parfois, ils nous envoient des patients qui n'ont pas besoin de soins d'urgence. Nous espérons améliorer les soins offerts à nos patients et aux patients de la collectivité. Nous espérons aussi réduire l'impact sur les autres services de santé de façon à ce que, par exemple, les patients qui ont vraiment besoin d'aller à l'urgence n'attendent pas en raison de la présence de patients qui ne devraient pas être là. Ça fonctionne très bien pour nous.
    Comme dans beaucoup de cliniques, nous avons une pharmacie et un laboratoire interne. Notre pharmacienne collabore avec nous. Nous allons souvent dans son bureau et son magasin pour lui poser des questions. Elle peut même nous aider avec les dossiers des patients à qui elle ne fournit pas de médicaments.
    Nous prévoyons que la clinique de radiologie située à côté de notre clinique ouvrira ses portes dans une semaine environ. C'est une clinique totalement électronique, qui offre des services de radiographie, d'électrocardiogramme et de spirométrie. Nous l'avons aménagée de façon à ce qu'il y ait un lien entre nos systèmes de données. Par conséquent, si je demande une radiographie, la personne peut aller à côté, et les résultats s'affichent sur mon ordinateur avant son retour. Si j'ai des doutes au sujet d'une radiographie, j'ai accès à un radiologue 24 heures sur 24 et sept jours sur sept, alors je peux tout simplement prendre le combiné et utiliser la fonction de composition rapide, et, la plupart du temps, le radiologue pourra regarder la radiographie avec moi et m'aider à comprendre ce que la radiographie révèle peu importe où il se trouve.
    Encore une fois, nous avons pris de l'expansion pour offrir plus de services, mais nous l'avons fait en utilisant les appareils électroniques et la technologie disponibles. Notre clinique est complètement électronique, alors toutes les données se transmettent habituellement par des ports de données. Bientôt, les patients pourront prendre des rendez-vous en ligne, et le tour sera joué.
    Nous avons essayé de suivre le modèle décrit dans le document « Le Centre de médecine de famille » — dont nous ferons parvenir des copies à tout le monde —, et, jusqu'à présent, ça semble bien fonctionner pour la collectivité. Les patients ont facilement accès à nos services. Ils peuvent nous voir rapidement. Nous travaillons bien en collaboration avec d'autres services pour rationaliser les choses, et c'est ça, la voie de l'avenir.
    Pour terminer, j'aimerais ajouter que mon associé et moi enseignons tous les deux à l'université. C'est aussi une composante importante de tout ça — d'enseigner à des étudiants et à des apprenants, que ce soit des médecins, des infirmiers ou d'autres intervenants et de les accueillir dans nos cliniques. C'est bon pour nous. Ça nous permet de nous tenir au courant de ce qui se passe. Les étudiants nous obligent à rester vigilants, c'est sûr. C'est aussi bon de présenter aux étudiants divers modèles de soins de santé.
    La plupart de nos nouveaux médecins sont des étudiants à qui nous avons enseigné. Lorsqu'ils ont commencé à travailler dans notre clinique, la plupart des médecins n'avaient aucun patient. Au bout de quatre ou cinq semaines, leur horaire était rempli. Ils ne pouvaient plus accepter de nouveaux patients. En ce qui a trait au dernier médecin embauché, lorsque nous avons annoncé son embauche, en seulement un peu plus de deux semaines, nous lui avions trouvé plus de 1 000 patients. C'est la preuve qu'il y a encore beaucoup de travail à faire. Il y a encore beaucoup de personnes qui ont encore besoin d'un médecin.
    Merci.

  (1135)  

    Merci, docteur Fotti. Je sais que c'est un endroit très spécial, et les commentaires que j'ai entendus de beaucoup de personnes sont très éloquents.
    Je veux vous dire qu'une de mes employés qui est allée chez vous — en fait, elle a changé de médecin et elle s'est tournée vers votre clinique — a reçu un diagnostic assez grave. Elle était toujours allée dans une autre clinique, et personne n'avait diagnostiqué son problème, parce qu'il n'y avait pas le même genre de symbiose entre tous les spécialistes qu'on retrouve chez vous.
    Merci de nous avoir parlé de tout ça aujourd'hui. Nous l'apprécions beaucoup.
    Nous allons maintenant passer au Dr Montaner. Nous avons bien hâte d'entendre ce que vous avez à nous dire.
    Merci, madame la présidente.
    J'aimerais commencer par vous présenter la personne qui m'accompagne. Il s'agit du Dr Thomas Kerr, du B.C. Centre for Excellence. Il est directeur du programme de santé urbaine, ici, au centre du St. Paul's Hospital et à l'Université de la Colombie-Britannique.
    Le thème que j'aimerais aborder avec vous concerne les efforts que nous avons déployés au cours des dernières décennies pour contrôler le VIH et le sida dans la province de la Colombie-Britannique.
    Ici, sur la côte Ouest, nous avons essuyé la pire épidémie de VIH du pays. Comme monsieur Racette l'a indiqué, notre système de santé subit beaucoup de pression, et on doute dort de la durabilité de ces efforts. Nous sommes tout à fait d'accord avec le Dr Bohm lorsqu'il dit, dans sa conclusion, qu'une bonne surveillance de l'épidémie est essentielle pour comprendre ce qui se passe. Mais, au bout du compte, si on ne fait rien, la surveillance n'est pas suffisante pour nous.
    Le B.C. Centre for Excellence est unique parce que son mandat est non seulement de distribuer sans frais des thérapies antirétrovirales partout dans la province à toutes les personnes admissibles, mais aussi d'appuyer la surveillance en laboratoire. De plus, nous avons le mandat de surveiller les résultats pour la santé touchant le VIH.
    En 1995, des recherches réalisées par le centre et ailleurs révélaient que, en utilisant une trithérapie, nous pouvions arrêter la progression de la maladie. En fait, la thérapie arrête la réplication du virus et, en quelques semaines, la quantité de virus qui circule dans le sang passe à un niveau indétectable. Par conséquent, le système immunitaire se rétablit, le patient n'est plus malade, et nous lui redonnons une vie normale. Aujourd'hui, une personne de 20 ans qui entreprend la thérapie peut s'attendre à vivre une vie normale pendant 50 ans. Nous avons vraiment changé le résultat du VIH, qui est passé d'une maladie mortelle fulgurante à une maladie chronique que l'on peut tout à fait gérer à long terme.
    Grâce à la thérapie, les taux de mortalité et de morbidité dans la province de la Colombie-Britannique ont diminué de plus de 90 p. 100, ce qui a beaucoup contribué à alléger le fardeau de nos hôpitaux et du système de santé. Le traitement a été jugé extrêmement rentable pour cette raison, et, par conséquent, la province continue à l'offrir sans frais à tous ceux qui en ont besoin.
    De 1996 à 2000, nous avons rapidement mis en place la thérapie antirétrovirale dans la province. Dans le cadre de nos efforts de surveillance, nous avons constaté un résultat inattendu: le nombre de nouvelles infections au VIH dans la province avait diminué d'environ 40 p. 100. C'était un événement inattendu à ce moment-là qui donnait cependant à penser que le traitement ne faisait pas qu'arrêter la progression de la maladie. Fait plus important encore, il mettait un frein à la transmission du VIH.
    Nous nous sommes ensuite penchés sur le phénomène de la transmission mère-enfant. Nous avons constaté que, en traitant les mères, nous pouvions presque éliminer la transmission du VIH aux bébés. Dans le cadre de travaux plus récents que nous avons réalisés en collaboration avec d'autres intervenants, nous avons montré que le même principe s'applique lorsqu'on traite des utilisateurs de drogues injectables ou lorsqu'on traite des membres de couples sérodiscordants — c'est-à-dire les couples dans lesquels une personne a le VIH, et l'autre, non.
    Par conséquent, la province de la Colombie-Britannique a mis en place, il y a un certain nombre d'années, une nouvelle stratégie, le programme Seek and Treat. Nous cherchons les personnes séropositives en facilitant et en normalisant le dépistage du VIH, et nous faisons du dépistage du VIH au sein de la population afin de faire baisser la statistique récurrente selon laquelle 25 p. 100 des personnes atteintes du VIH ne le savent pas. En effet, année après année, l'Agence de la santé publique du Canada produit la même statistique et, malgré tout, nous n'avons pas encore modifié nos lignes directrices au chapitre du dépistage du VIH.
    Nous demandons une stratégie nationale sur le dépistage du VIH qui permettrait de généraliser les activités de dépistage afin que l'on puisse identifier les personnes séropositives et les traiter du mieux que nous le pouvons et, ainsi, arrêter la transmission du VIH. En abordant le problème de cette façon, la Colombie-Britannique, en plus de diminuer la morbidité et la mortalité de plus de 90 p. 100, a maintenant diminué le nombre de nouvelles infections au VIH de plus de 66 p. 100.

  (1140)  

    Je souligne que nous sommes la seule administration au pays qui a affiché une réduction significative du nombre de nouveaux diagnostics de VIH par année au cours des deux dernières décennies, alors que, durant la même période, la Saskatchewan a affiché cinq fois plus de cas, et le Manitoba, trois fois plus. Il y a aussi une augmentation du nombre de cas à Terre-Neuve et dans votre belle ville d'Ottawa. Les membres des Premières nations sont cinq fois plus touchés par l'épidémie.
    Madame la présidente, nous croyons avoir une solution applicable à l'échelle canadienne. En fait, les États-Unis ont même adopté officiellement cette approche. Nous vous recommandons de faire immédiatement du traitement et de la prévention du VIH une priorité nationale.
    Je vais céder la parole au Dr Kerr, qui vous décrira comment il faudrait appliquer cette stratégie auprès des utilisateurs de drogues injectables.
    Merci.
    Docteur Kerr, vous avez trois minutes.
    Nous avons bien hâte d'entendre ce que vous avez à nous dire.
    Vous avez quatre minutes.
    J'aimerais parler rapidement de certains enjeux pertinents liés aux renseignements fournis par le Dr Montaner. Comme il l'a mentionné, et je suis sûr que beaucoup d'entre vous le savent, la grande majorité des nouvelles personnes infectées au Canada sont des consommateurs de drogues illicites. Actuellement, l'épidémie d'infections au VIH la plus rapide au Canada touche les utilisateurs de drogues de la Saskatchewan.
    Aujourd'hui, on sait bien que, si nous voulons réussir à enrayer l'épidémie de VIH au Canada, il faut s'intéresser à la consommation de drogues illicites. Cela exige d'adhérer aux principes de la médecine fondée sur des données scientifiques, d'appuyer l'innovation et d'améliorer l'efficience.
    Il ne fait aucun doute que le gouvernement fédéral s'est intéressé au problème de la consommation de drogues dans le cadre de sa stratégie nationale et de projets de loi visant des mesures pénales. Je ne veux pas me prononcer sur le bien-fondé relatif de cette approche, mais j'aimerais dire que l'une des conséquences de cette approche est que, à l'échelle nationale, nous semblons prendre du retard sur les autres pays en ce qui a trait à la mise en oeuvre et à l'amélioration de mesures novatrices en matière de prévention et de traitement ciblant les consommateurs de drogues et la prévention de l'infection au VIH auprès de ces personnes.
    Il y a maintenant de nombreux ouvrages scientifiques qui indiquent très clairement qu'il faut fonder les programmes de lutte contre la toxicomanie sur un continuum de services qui inclut non seulement des programmes fondés sur l'abstinence, mais aussi des programmes qui visent les consommateurs actifs, ce qu'on appelle les programmes de « réduction des préjudices ».
    Les données scientifiques à l'appui des programmes de réduction des préjudices sont telles que les Nations Unies et l'Organisation mondiale de la Santé ont publié des documents d'orientation technique qui indiquent que ces programmes sont essentiels. Nous savons que ces programmes facilitent la prévention en fournissant du matériel qui permet de réduire la probabilité de transmission de la maladie. Cependant, ils permettent aussi de prévenir l'infection au VIH en assurant le traitement du VIH chez les personnes séropositives.
    Par conséquent, à Vancouver, nous avons suivi cette approche, et, alors que, en 1997, environ 19 p. 100 de tous les utilisateurs de drogues injectables étaient infectés dans le Downtown East Side, ce taux a maintenant diminué et est passé à moins de  1 p. 100.
    Nous savons aussi que les programmes de réduction des préjudices facilitent la participation aux programmes fondés sur l'abstinence, y compris la désintoxication.
    Cependant, malgré ces faits bien établis, nous ne respectons pas les normes internationales ni n'optimisons nos efforts de prévention et de traitement du VIH. Si nous avons tous pour objectifs la prévention de l'infection au VIH et la promotion de l'utilisation de traitements de la toxicomanie et de l'abstinence en matière de consommation de drogues, alors il faudrait aussi être favorables au renforcement des programmes de réduction des préjudices au Canada.
    Il est aussi évident que nous avons pris du retard en ce qui a trait au traitement novateur de la toxicomanie fondé sur l'utilisation de systèmes électroniques pour prévenir les préjudices liés à la consommation. Récemment, la ministre de la Santé du gouvernement fédéral n'a pas empêché la production de génériques d'Oxycontin. Je ne veux pas me prononcer sur le bien-fondé de cette décision, et j'aimerais plutôt m'en tenir à la lacune au niveau des systèmes qui, si on y voyait, pourrait éliminer une bonne partie des risques que représente l'abus d'Oxycontin.
    La Colombie-Britannique a mis en oeuvre le système PharmaNet à l'échelle de la province. Ce système permet aux pharmaciens et aux médecins de savoir exactement quels médicaments ont été prescrits à une personne, y compris les opiacés. Cela est très utile lorsqu'on évalue le risque que des personnes consultent plusieurs médecins pour obtenir des ordonnances d'opiacés. Cependant, ce type de système n'est pas disponible dans bon nombre de provinces où l'abus des opiacés reste un problème majeur.
    Nous pourrions aussi en faire plus pour promouvoir l'innovation en appuyant la mise en oeuvre et la mise à l'essai de nouveaux médicaments pour lutter contre la toxicomanie. Par exemple, Vivitrol est un antagoniste des récepteurs opioïdes approuvé par la FDA qui s'est révélé très efficace pour traiter la dépendance aux opiacés et la dépendance récente à l'alcool. Cependant, Vivitrol n'est pas encore disponible au Canada, et nous avons beaucoup de difficulté à obtenir l'accès à ce médicament afin de le tester dans le cadre d'essais cliniques randomisés...

  (1145)  

    Je suis désolée, docteur Kerr, votre temps est écoulé.
    Dr Thomas Kerr: En résumé...
    La présidente: Je m'excuse. Pouvez-vous résumer très rapidement?
    Malgré le fait que la dépendance et le VIH restent des défis importants, nous prenons du retard. Nous pouvons en faire plus pour appuyer l'innovation dans nos systèmes, nos politiques, la recherche et l'élaboration de programmes.
    Merci.
    Merci beaucoup.
    Nous allons passer au Dr Tétreault, président-directeur général de l'Hôpital St- Boniface.
    Bonjour. Madame la présidente, mesdames et messieurs.

[Français]

    Je remercie les députés qui sont présents aujourd'hui.

[Traduction]

    C'est un privilège pour moi d'être là, et je vous remercie donc de m'avoir invité.
    J'ai eu un peu peur quand j'ai vu le titre de la séance. On parlait d'« Innovation technologique ». Je veux vous parler non pas de fusées, mais de prestation de soins de santé. J'imagine que nous avons tendance à oublier la technologie que nous utilisons tous, je parle de l'esprit humain, du cerveau humain et du coeur humain. C'est la technologie sur laquelle nous tentons de miser à l'Hôpital St-Boniface.
    Je vais vous parler de nos quatre années d'efforts pour améliorer les soins et obtenir des résultats à un coût que peuvent se permettre les contribuables.
    Vous avez obtenu une présentation PowerPoint. Je ne vais pas l'utiliser. Je préfère vous parler directement.
    Nous avons quatre grands objectifs que nous appelons nos grandes directions. Elles sont, dans l'ordre: satisfaire les patients, engager le personnel, ne faire aucun tort et gérer les ressources. Notre croyance — et plus ça va, plus nous y croyons —, c'est que, pour satisfaire les patients, il faut engager le personnel. Si nous y arrivons, nous réduirons les préjudices. En fait, en gérant les ressources — je vous parlerai des résultats dans quelques minutes — tout tombera en place. C'est ce que nous avons constaté au cours des quatre dernières années.
    Certaines personnes pensent que c'est prétentieux de dire que nous visons la perfection. Je crois que nous y serons presque dans environ trois ou quatre présidents-directeurs généraux — et je n'ai pas l'intention de prendre ma retraite bientôt. Cependant, si on réfléchit à ce qui est acceptable, c'est aucun préjudice que l'on peut prévenir et seulement des soins parfaits qui feront l'affaire. Il ne faut pas l'oublier.
    Je vais vous raconter très rapidement l'histoire des Soeurs Grises, qui ont fondé l'Hôpital St-Boniface, il y a plus de 140 ans. Elles sont venues à Winnipeg, qui était alors une nouvelle colonie, en provenance de Montréal, parce qu'il s'agissait d'un ordre de Montréal. Elles sont arrivées en canot, et ça leur a pris 56 jours. Elles ont débarqué à environ 150 mètres de l'emplacement actuel de l'hôpital. Il s'agissait de femmes courageuses et déterminées, et elles étaient la cinquième congrégation à qui l'évêque avait demandé de faire le périple vers la nouvelle colonie. Les quatre autres ordres n'avaient pas trouvé le courage de dire oui. Nous croyons que les Soeurs Grises ont fait preuve d'innovation en allant là où les autres n'avaient pas eu le courage d'aller.
    J'ai le privilège de... c'est l'une des choses que nous avons constatées lorsque nous avons demandé à nos employés d'améliorer les choses et de travailler avec nous pour que nous puissions bénéficier de leurs connaissances et leurs compétences pour le faire nous aussi. Je sais à quel point je suis privilégié de travailler avec 4 000 personnes extrêmement compétentes, dévouées, attentionnées et remplies de compassion.
    Pourquoi avons-nous fait ça? En toute franchise, c'est par frustration. Depuis de nombreuses années, nous sommes l'une des organisations les plus efficaces au pays au chapitre de l'amélioration de la qualité; c'est ainsi que nous sommes perçus, du moins. En toute honnêteté, lorsque nous regardions la réalité en face, en fait, nous n'allions nulle part. Notre médecin-chef appelle ça des « améliorations éparses ». De temps en temps, on notait une amélioration de niveau mondial. Par exemple, pendant environ 15 mois, on n'a répertorié aucune infection grave liée aux cathéters centraux dans nos unités de soins intensifs — pas une seule. C'est un rendement de niveau mondial, ça. Dans la même unité de soins intensifs, on n'a rien fait en ce qui a trait aux infections liées aux ventilateurs. On est un peu passés à côté. Même quand on tire dans le mille, la plupart du temps, si on regarde, un an plus tard, on est de retour à la case départ. Ça nous frustrait. Nous avons eu la chance d'avoir eu quelques excellents exemples de la façon dont la transformation fondée sur la méthode « Lean » permettait d'améliorer la qualité et de réduire les coûts.
    À Winnipeg, il y a une entreprise appelée Standard Aero. Elle utilise cette méthode depuis 25 ans. Il s'agissait au départ d'une entreprise du domaine de l'aérospatiale très ordinaire — pas même dans la moyenne. Elle est devenue un chef de file mondial dans son domaine, la réparation de moteurs d'aéronefs. Il y a aussi un endroit appelé ThedaCare à Appleton, au Wisconsin, vous imaginez. L'entreprise est un chef de file mondial en matière de transformation fondée sur la méthode « Lean ». J'ai visité l'une de ses unités qui a apporté 752 améliorations importantes l'année dernière. L'objectif de l'unité, cette année, est 1 000 améliorations. À titre de comparaison, notre cible cette année à l'hôpital est 1 000 améliorations, et nous serons très heureux si nous y arrivons.
    Comment avons-nous fait? Pour commencer, nous sommes allés voir notre conseil d'administration et nous lui avons dit que nous ne voulions plus avoir 15 priorités. Il y a huit ans, il y en avait 15 dans notre plan stratégique. Il y a quatre ans, il en restait neuf. Nous avons proposé une seule priorité à l'Hôpital St-Boniface: la qualité. Nous avons été assez braves pour dire que nous pensons en fait savoir comment y arriver, et c'est grâce à la transformation fondée sur la méthode « Lean ». Les membres du conseil nous ont répondu: « Allez, faites cela, et n'arrêtez jamais ».
    Ce n'est donc pas un projet ni un essai. C'est un engagement total. Si vous voulez faire partie de l'équipe de direction ou de leadership de l'Hôpital St-Boniface, vous devez vous engager totalement.

  (1150)  

    Je suis un médecin. Il a aussi fallu dépenser de l'argent que nous n'avions pas. C'était le risque. Je vous expliquerai en quoi ça a été un risque payant pour nous. Le rendement est excellent. Nous avons eu de très bonnes expériences avec des partenaires du monde des affaires. Bob Hamaberg, le PDG de StandardAero, a été mon mentor de direction, gracieusement, lorsque tout a commencé il y a 25 ans. Il agit ainsi pour deux raisons. Premièrement, il croit en la valeur morale inhérente du processus, et il est aussi un homme d'affaires qui a eu beaucoup de succès. Il croit que des soins de santé de haute qualité à un coût abordable sont un avantage concurrentiel significatif comparativement à ses compétiteurs au sud de la frontière.
    Que faisons-nous? Chaque mois, nous organisons plusieurs événements d'amélioration. Nous avons organisé plus de 100 événements du genre. On rassemble du personnel de première ligne et des gestionnaires et on leur donne du temps pour réfléchir. Nous cernons un problème, et nous leur donnons du temps pour qu'ils puissent l'analyser minutieusement et examiner ce que nous faisons, ce que nous pourrions faire mieux, ce que nous voulons réaliser et comment, durant la semaine suivante, ils vont essayer de mettre en place des changements. Qu'essaieront-ils d'améliorer? Puis, ils nous disent que, au cours des trois prochains mois, ils vont faire telle ou telle chose, pour obtenir tel ou tel résultat. Nous mesurons constamment leurs efforts. Nous réalisons aussi évidemment des projets. Parfois, il y a des choses qui sont tout simplement de bonnes idées et, en tant que dirigeants, nous devons apprendre à les appuyer et à accepter d'aller de l'avant. C'est ce qu'on appelle des « décisions qui coulent de source ». Notre objectif est de former 4 000 personnes pouvant régler des problèmes à l'Hôpital St-Boniface, 4 000 agents d'amélioration.
    Les résultats? Les patients sont satisfaits. Nous mesurons la satisfaction des patients. Peu d'hôpitaux le font. Nous le faisons constamment et nous préparons un rapport chaque mois. À deux reprises, l'année dernière, nous avons obtenu nos meilleures notes en matière de satisfaction des patients. Près de 87 p. 100 de nos patients ont dit que les soins offerts à l'Hôpital St-Boniface étaient soit très bons, soit excellents. Pour nous, les répondants qui disent que les services sont « bons » ne sont pas satisfaits. En ce qui a trait au « personnel plus engagé », nous mesurons l'engagement des employés. Nous avons recours aux services d'une entreprise appelée Aon Hewitt, qui réalise un sondage à l'échelle internationale. Nous n'avons pas atteint notre objectif. Notre objectif était d'être parmi les 10 p. 100 d'employeurs au pays qui obtiennent les meilleurs résultats en matière d'engagement du personnel. Nous avons fait plus de la moitié du chemin par rapport à là où nous étions au départ, soit à 41 p. 100 de nos employés qui étaient totalement engagés, ce qui se trouve dans la zone des améliorations nécessaires, soit dit en passant. Cette année, 58 p. 100 de nos employés sont pleinement engagés. Pour être dans les premiers 10 p. 100, il faut obtenir 65 p. 100. Nous croyons que, plus nous mobilisons nos employés afin qu'ils améliorent ce qu'ils font, plus ils seront engagés.
    En ce qui a trait à la réduction des préjudices, l'Institut canadien d'information sur la santé produit une mesure appelée le ratio normalisé de mortalité hospitalière. Lorsque nous avons commencé à mesurer le ratio, nous étions exactement dans la moyenne des hôpitaux d'enseignement canadiens. La moyenne était de un. C'est là où nous étions. Nous avons réduit le ratio. Notre cible était une réduction de 10 p. 100 par année. Nous avons obtenu une réduction de 30 p. 100 en trois ans. Nous sommes rendus à 0,7. C'est notre résultat le plus récent. Je crois que nos patients se portent mieux. Nous avons réussi à réduire la durée du séjour des patients à l'hôpital de 18 p. 100. C'est l'équivalent d'une unité d'hôpital de 30 places, là où nous sommes. Nous n'avons pas eu à la construire. Nous n'avons pas eu à embaucher du personnel. Nous avions déjà les bâtiments et les employés. Cela représente 4 p. 100 de patients de plus. Ces patients étaient 4 p. 100 plus malades. Ça ne semble pas beaucoup — 4 p. 100 — je me trompe? Ça nous a permis de traiter 1 150 patients de plus avec le même budget que l'année précédente. C'est une valeur de 4,6 millions de dollars.
    Enfin, du côté financier, notre cible est d'améliorer notre rendement financier de 1 p. 100 d'année en année — 1 p. 100 la première année, 2 p. 100, la deuxième année et 3 p. 100, la troisième. Il y a deux ans, nous avons atteint le 1 p. 100, c'est-à-dire une amélioration du rendement financier de 3 millions de dollars. L'année dernière, nous avons atteint 6,2 millions de dollars. Cette année, notre cible est 9,6 millions, et je crois qu'on réussira. Dans deux ans, ce sera 15 millions. L'industrie de la santé est une industrie de 200 milliards de dollars. Si tout le monde y arrive, c'est 2 milliards par année et 4 milliards l'année suivante.
    Pour terminer, nous sommes ici pour proposer quelque chose en quoi nous croyons: c'est-à-dire un centre d'apprentissage sur l'application de la méthode « Lean » dans le domaine de la santé au Canada. Nous avons des partenaires à la Asper School Of Business de l'Université du Manitoba et à l'École des hautes études commerciales de Montréal. Ils veulent travailler avec nous. Je pourrais aller partout au pays, mais nous croyons qu'en permettant aux gens de venir nous voir et de voir ce que nous faisons et comment on peut s'y prendre — nous ne sommes pas parfaits; nous ne pouvons pas dire aux gens ce qu'il faut faire, mais ils peuvent au moins regarder —, nous pourrons, tous ensemble, réussir peu à peu à améliorer la qualité et à diminuer les coûts.
    Merci beaucoup, madame la présidente.

  (1155)  

    Merci. Quelle matinée absolument fantastique nous avons eue à écouter vos excellentes idées. Chaque témoin a fait une très bonne contribution ce matin.
    Nous allons maintenant passer à la série de questions et de réponses, qui dure sept minutes. Je vais garder le chronomètre à l'oeil.
    Nous allons commencer par Mme Davies, du NPD.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Je remercie tous les témoins qui sont parmi nous aujourd'hui, surtout ceux de Vancouver. Nous savons que vous avez dû vous lever tôt ce matin pour être prêts à 8 h. Merci.
    L'étude que nous réalisons est vraiment très intéressante. Il y a eu de très bons exposés, et aujourd'hui ne fait pas exception. Je suis fascinée de vous entendre dire, monsieur Racette, que nous n'avons pas de programme national en matière de santé pour une industrie de 200 milliards de dollars. Ce que vous avez dit sur la Suède est extrêmement révélateur. S'il y a un document précis que, selon vous, nous devrions consulter, j'aimerais bien le voir, et je suis sûre que les autres membres du comité aimeraient ça aussi, juste pour voir ce qu'ils font là-bas, surtout concernant la question de compétence. Nous avons entendu dire qu'il y a des choses incroyables qui se passent là-bas.
    Je me rappelle qu'un des témoins nous a dit que le Canada est un pays de projets pilotes, ce qui rend votre commentaire encore plus convaincant, monsieur Racette. Nous faisons de très bonnes choses, mais tout est éparpillé. Ça me semble une situation très difficile, parce qu'on est Canadien peu importe où on vit au pays, et tous les Canadiens ont droit aux mêmes soins de haute qualité et au même accès partout au pays. Je vous remercie donc pour tout ce que vous nous avez dit aujourd'hui.
    J'aimerais poser quelques questions au Dr Montaner et au Dr Kerr.
    Je connais votre travail, docteur Montaner. Le travail fantastique que vous avez fait au B.C. Centre for Excellence in HIV/AIDS vous a valu une réputation internationale.
    Docteur Kerr, votre travail auprès de populations urbaines très à risque est vraiment incroyable, et je suis au courant de ce que vous faites.
    Je vous dirai sans ambages que je veux vous parler de chiffres. Nous parlons d'innovation dans les soins de santé. Ce que vous faites, c'est prévenir les infections, et les statistiques que vous fournissez sont inouïes. Pouvez-vous traduire tout cela en coûts et décrire comment, si nous changeons l'objectif de ce que nous faisons actuellement en examinant les déterminants sociaux de la santé, en tentant de réduire les préjudices, en fait, nous économisons énormément d'argent? Je le sais, mais je n'ai pas tous les renseignements à portée de main et j'aimerais que vous nous les donniez.
    Deuxièmement, il y a deux ou trois jours, j'ai lu quelque chose que vous avez écrit, docteur Montaner, et je vous ai entendu parler du programme « Seek and Treat ». Je crois que vous suggérez aussi, à la lumière de la réussite en Colombie-Britannique, d'offrir un programme national de traitement gratuit — « le traitement, c'est la prévention » — pour les médicaments contre le sida. Pouvez-vous nous expliquer pourquoi vous dites ça maintenant? Qu'est-ce qui vous a poussé à en parler?
    Merci. J'aimerais que vous répondiez à ces questions...

  (1200)  

    Merci de vos commentaires, madame Davies.
    Rapidement, il y a 3 300 nouvelles infections au pays par année. Nous avons fait valoir que, si nous adoptions une approche fondée sur le dépistage et le traitement — l'approche « Seek and Treat » dont nous avons parlé —, nous pourrions réduire ce nombre de plus de 60 p. 100 en deux ou trois ans, ce qui serait accompagné de diminutions des taux de morbidité et de mortalité.
    Les coûts de traitement d'un cas de VIH sont de l'ordre d'environ 15 000 $ par année. Sur toute une vie, on parle d'environ 300 000 à 500 000 $, et c'est vraiment une moyenne. Si nous pouvons prévenir une infection, nous ne prévenons pas seulement les cas de morbidité et de mortalité connexes, mais nous prévenons aussi toute transmission subséquente de la maladie par cette personne.
    C'est pourquoi nos données, qui ont été vérifiées de façon indépendante par l'Organisation mondiale de la Santé, révèlent qu'en investissant un peu plus au départ en faisant du dépistage et en facilitant et appuyant le traitement, y compris les pratiques de réduction des préjudices que vous demandez, on ferait des économies. Le modèle mathématique donne à penser que, peu importe ce qu'on investit aujourd'hui, on l'aura récupéré en cinq ans, et après ça, c'est des économies.
    Je vais laisser le Dr Kerr aborder le thème de la réduction des préjudices.
    En réalité, ce qui s'est passé, à Vancouver, c'est qu'on a déclaré une situation d'urgence de santé publique en raison de l'épidémie de cas d'infection au VIH et de surdose dans cette collectivité.
    Je vais vous donner rapidement quelques détails. Au plus fort de la situation d'urgence, il y avait jusqu'à 400 cas d'infection. Ce nombre est maintenant inférieur à  40. À ce moment-là, les coûts médicaux à vie du traitement de ces nouveaux cas d'infection étaient d'environ 180 millions de dollars. Aujourd'hui, ils sont plutôt de l'ordre de 16 millions de dollars.
    Nous avons également observé une diminution notable du nombre de surdoses et d'interventions des ambulanciers touchant ces événements. Grâce à quelques approches innovatrices, qui ont fait l'objet d'une évaluation rigoureuse et qui ont été entérinées dans la littérature scientifique — pensons par exemple au site d'injection supervisé Insite de Vancouver —, le nombre de décès par surdose a diminué de façon remarquable. Il a diminué de plus de 35 p. 100 à proximité de cette seule installation.
    Il est clair que nous devons adopter dans ce dossier une approche fondée sur des données probantes. Si nous faisons cela, que nous prenons des précautions, que nous procédons à des évaluations et que nous misons sur les projets pilotes qui fonctionnent, nous pourrons non seulement éviter beaucoup de souffrances, mais aussi réduire nos dépenses et diminuer le fardeau qui incombe aux hôpitaux, qui doivent placer des consommateurs de drogues dans des lits réservés aux soins actifs ou dans des salles d'urgence.
    Pour terminer, permettez-moi de dire que s'il s'agissait non pas du VIH, mais plutôt du virus H1N1 ou du SRAS, par exemple, on aurait adopté une stratégie nationale. Si nous ne faisons rien, c'est que nous avons des préjugés à l'égard du VIH.
    Merci beaucoup.
    Est-ce qu'il me reste un peu de temps?
    Votre temps est épuisé. Merci beaucoup.
    Monsieur Strahl.
    Mes questions s'adressent au Dr Bohm. Votre exposé m'a beaucoup intéressé. Quand vous avez voulu mettre en oeuvre le programme « Lean », vous a-t-il fallu des fonds supplémentaires? Avez-vous eu à demander des fonds supplémentaires ou avez-vous été capable de réaffecter les fonds existants ou de trouver des façons de faire des économies à l'interne?
    Je vous ai donné quelques exemples d'une application large de la théorie « Lean ». Le Dr Tétreault a une plus grande expérience que moi à ce chapitre, et il pourra peut-être en dire un peu plus sur le sujet.
    Nous avons constaté qu'il n'était pas nécessaire de demander de nouvelles ressources ou de nouveaux fonds. En fait, cela concerne plutôt la philosophie de la gestion, le fait de réfléchir d'une autre façon à un problème présent et de trouver d'autres solutions.
    Je crois que je vais encore une fois souligner que ce qui est important, ce sont les données. Je crois que nous avons eu de la chance, à plusieurs égards, car nous avons pu ajouter des données aux bases de données existantes. Nous avions une base de données des listes d'attente pour les arthroplasties de la hanche ou du genou. Nous avons greffé à cette base les données sur les résultats tirées de notre registre des remplacements articulaires. Il a suffi d'ajouter quelques nouveaux champs, et l'analyste y a consacré un peu plus de temps.
    Je crois que, quand vous démontrez la valeur des données, il est beaucoup plus facile de trouver des ressources pour créer de nouvelles structures de données.

  (1205)  

    Je me souviens que, pendant votre exposé sur PowerPoint, vous avez parlé d'une réduction de cinq jours, je crois, de la durée de l'hospitalisation. Avez-vous calculé quelles économies cela représente pour le système? Je sais que le Dr Tétreault l'a mentionné pour son centre. Avez-vous calculé les économies par année ou par patient qui découleraient de la mise en oeuvre de ce système « Lean »?
    Non. Je n'ai pas fait les calculs.
    Je crois que, lorsque vous faites voir les changements énormes liés à la durée des séjours ou à la mortalité, la valeur devient évidente aux yeux des gens et qu'il est plus facile d'obtenir les ressources nécessaires pour la structuration des données.
    Étant donné cette réussite et le fait que vous pouvez prouver cette réussite grâce aux données, pourriez-vous dire si les autres centres hésitent à adopter cette méthode? Si c'est le cas, pourriez-vous nous dire pourquoi, puisque, si on se fonde sur les données que vous avez présentées, il n'y aurait pas lieu d'hésiter?
    Je crois que le problème, et nous l'avons déjà mentionné, c'est que le Canada compte environ 13 systèmes de santé, et que de nombreux projets pilotes sont en cours.
    J'ai fait partie de deux ou trois groupes, notamment de l'Alliance de l'arthrite du Canada, qui rassemble un grand nombre d'organismes: l'Association canadienne d'orthopédie, la Société canadienne de rhumatologie, la Société de l'arthrite, des physiothérapeutes, et ainsi de suite. Ces groupes ont proposé un modèle relatif au cadre des soins.
    J'ai aussi été actif au sien de l'organisme appelé la Décennie des os et des articulations du Canada. C'est un regroupement canadien de fournisseurs de soins visant le système musculosquelettique. Nous avons travaillé dur pour créer une trousse d'outils sur l'arthroplastie de la hanche et du genou, au chapitre de l'accès et de la qualité. Nous avons aussi travaillé sur la gestion des fractures de la hanche.
    Bon nombre des sujets que j'ai abordés aujourd'hui sont une composante des trousses d'outils que nous avons élaborées. Une partie du travail consiste à mettre en place les éléments de ces trousses d'outils partout au Canada, et c'est un travail qui se poursuit à l'échelle du pays. Si vous voulez voir ce que nous faisons, sachez que ces éléments sont présents partout au Canada.
    Vous avez également dit qu'il était temps de mettre à jour les politiques touchant les droits de propriété intellectuelle et les centres médicaux. J'aimerais savoir quels types de changement vous avez en tête. Quelles politiques voulez-vous mettre à jour? S'agit-il de règlements fédéraux ou provinciaux?
    C'est un tout nouveau dossier pour nous. J'ai parlé du centre d'innovation des appareils orthopédiques; nous sommes en train de négocier les droits de propriété intellectuelle pour notre université, et c'est un véritable labyrinthe.
    De toute évidence, quand un investisseur veut nous aider à mettre au point un appareil donné, il faut régler toutes sortes de questions touchant les droits de propriété intellectuelle, le détenteur de ces droits, et la façon de les diviser. Nous travaillons avec notre université et nous faisons beaucoup de progrès, dans ce dossier. Mais je parle surtout de ma propre université et de ma propre expérience.
    Docteur Racette, vous avez parlé du modèle suédois, et c'est un pays qui m'intéresse un peu. Ma question est la suivante: y a-t-il un système fédéral selon lequel les provinces ou les États sont responsables de la prestation des services de santé ou y a-t-il un centre gouvernemental national responsable de la prestation des soins de santé à l'échelle du pays?
    J'aimerais préciser que je ne suis pas médecin.
    Je vous appellerai quand même « docteur ».
    La Suède n'est pas une fédération comme le Canada ou l'Australie. Mais son système est complexe. Le pays compte 20 conseils dont le rôle est de superviser les soins prodigués à l'hôpital, les soins prodigués par les médecins, les centres universitaires des sciences de la santé et le régime d'assurance-médicaments. Tout cela relève d'un conseil qui dispose d'un pouvoir de taxation. Le pays compte également environ 300 conseils municipaux, qui supervisent tout ce qu'on pourrait appeler les déterminants de la santé, à savoir les services de logement, les services sociaux, les soins aux aînés, les soins à domicile, les soins aux personnes handicapées. Ces conseils possèdent également leurs propres pouvoirs de taxation. En fait, il y a deux types de conseils qui possèdent chacun leurs propres pouvoirs de taxation. Un conseil n'a pas besoin de réduire les soins actifs quand il a besoin de ressources — il peut imposer une taxe distincte à cet effet.
    Le mandat du gouvernement fédéral, en réalité, consiste à établir les priorités nationales, ce qu'il fait en négociant avec les conseils afin d'en arriver à une entente sur les priorités nationales. Le financement versé par le gouvernement fédéral est assez peu élevé, il est de moins de 10 p. 100. La plus grande partie du financement est versée par les conseils de comté et les conseils municipaux, mais il s'agit d'une structure complexe. Il leur faut quand même négocier pour que tous les conseils, qui font partie d'une structure de gouvernance particulière, respectent la même approche normalisée en matière de soins de santé et offrent des soins de qualité constante, partout en Suède.
    Tous ces gens travaillent très dur pour atteindre le consensus et déterminer les priorités. Ils prennent beaucoup de précautions et mesurent toutes sortes de choses. Ils vont par exemple mesurer les soins prodigués par un médecin, par un hôpital ou dans un comté. Ils ont réuni des données sur plusieurs années et peuvent donc suivre l'évolution de leur rendement au fil du temps.

  (1210)  

    Merci beaucoup.
    Il vous reste un peu de temps, mais c'est comme vous voulez.
    J'ai terminé, merci.
    D'accord, merci beaucoup.
    Nous passons maintenant à la Dre Fry.
    Merci beaucoup, madame la présidente. J'aimerais féliciter toutes les personnes ici présentes, j'ai entendu des réflexions vraiment innovatrices aujourd'hui.
    Docteur Bohm, je crois que vous avez accompli quelque chose de remarquable en effectuant ces mesures. Vous avez tout à fait raison: si vous ne mesurez pas, vous ne devriez même pas songer à innover ou à apporter quelque changement que ce soit.
    Monsieur Racette, j'ai quelques commentaires à faire sur certains sujets que vous avez abordés. Vous avez parlé du fait qu'il n'y avait pas de stratégie nationale en matière de santé. Vous avez parlé de la pénurie de ressources humaines en santé, qui empêche le Canada d'innover comme la Suède l'a fait. Dans ce pays, les aînés et les malades chroniques sont soignés dans un centre communautaire ou à domicile, et 25 p. 100 des lits sont réservés aux soins actifs, à un coût énorme.
    Quel est le coût par patient et par jour des soins actifs? Est-ce que c'est quelque part entre 2 000 et 3 000 $ par patient, par jour?
    Eh bien, ça dépend du type d'hôpital. Dans un centre universitaire des sciences de la santé, ce coût est très élevé. Dans un hôpital communautaire ordinaire, il serait d'environ 1 200 $ par jour, peut-être. Dans le cas des hôpitaux d'enseignement, c'est le Dr Tétreault qui pourrait vous répondre. À St-Boniface, ce serait...
    Ce serait plutôt quelque chose comme 1 500 $. Le coût des soins actifs est beaucoup plus élevé que le coût d'une hospitalisation de longue durée.
    Mais un lit occupé représente également un coût énorme pour un hôpital.
    Combien coûtent, par personne, les soins à domicile et en milieu communautaire, en Suède? Est-ce que vous avez cette information?
    Non, je ne l'ai pas. La seule chose que je puis vous dire, c'est que nous surveillons deux mesures du rendement. Nous surveillons le pourcentage du PIB investi. Au Canada, pour le moment, ce pourcentage est d'environ 11,5 p. 100 ou 11,6 p. 100. En Suède, il est inférieur à 10 p. 100. Il est même resté à près de 9 p. 100 pendant 10 ou 15 ans, je crois. Nous avons déjà affiché un pourcentage de 9 p. 100 environ, mais il a augmenté assez rapidement. Nous surveillons également le coût moyen par patient et le coût total pour l'ensemble des citoyens, afin d'établir une moyenne. Il en coûte environ 500 $ de moins par personne, en Suède, et cela, même si les services assurés sont plus nombreux.
    Merci.
    Vous avez parlé de la fragmentation des soins à l'échelle du pays; nous constatons que certaines provinces réalisent des choses extraordinaires, mais il est impossible de regrouper toute l'information et d'évaluer ces pratiques exemplaires dans une perspective nationale.
    Vous savez que l'accord sur les soins de santé de 2004 prévoyait une certaine souplesse administrative, qui avait été acceptée par les provinces et le gouvernement fédéral. Un des cinq objectifs définis était de s'orienter vers les soins à domicile et en milieu communautaire, dans la mesure du possible, et de recourir en cas de besoin seulement aux hôpitaux et aux médecins. Cet objectif devait nous permettre de réaliser certaines choses.
    L'accord portait également sur une stratégie canadienne sur les ressources humaines en santé. Rien de tout cela ne s'est réalisé. Vous nous présentez de formidables recommandations en matière d'innovation, mais il me semble que nous ne sommes pas en mesure de les mettre en oeuvre.
    J'aimerais rapidement souligner, docteur Fotti, que le « Centre de médecine de famille » propose une manière remarquable et nouvelle de mettre en oeuvre certaines des choses dont M. Racette a parlé. J'aimerais vous féliciter, car vous venez de faire exactement ce que le collège suggère, c'est-à-dire des soins prodigués par une équipe multidisciplinaire — soins en milieu communautaire, soins à domicile, recours à l'hôpital en cas d'absolue nécessité seulement pour les soins actifs. J'aimerais vous féliciter parce que c'est justement ce que vous avez réalisé, et j'espère que le collège mettra cette méthode en oeuvre partout au pays.
    Pour terminer, j'aimerais m'adresser rapidement au Dr Montaner et au Dr Tom Kerr.
    J'aimerais vous féliciter, Dr Montaner, pour la Médaille du Jubilé de diamant de la reine que vous venez de recevoir, et pour toutes les médailles et récompenses que vous avez recueillies dans le monde entier pour cette remarquable réalisation canadienne. Je me demande si certaines personnes n'ont pas exagéré en disant que c'est probablement le plus près que nous puissions arriver de la découverte de Banting et Best, au Canada. C'est une innovation canadienne, et je sais que l'Organisation mondiale de la Santé a examiné tout ce traitement préventif qui est au coeur du programme de la Colombie-Britannique.
    Pourriez-vous me dire quel est le coût de tout le programme, en Colombie-Britannique, c'est-à-dire le volet de dépistage et le volet de traitement qui ne coûtent maintenant plus rien en Colombie-Britannique? Quel est le coût total de ce programme?

  (1215)  

    Le coût annuel, si vous tenez compte des médicaments et... [Note de la rédaction: difficultés techniques]
    Docteur Montaner, je m'excuse, la communication a été coupée.
    M'entendez-vous?
    Merci, madame Fry, pour vos questions et vos commentaires.
    À l'heure actuelle, le programme de la Colombie-Britannique coûte quelque 120 millions de dollars par année; il faut savoir que la province compte 14 000 personnes infectées par le VIH et qu'environ 7 000 personnes suivent un traitement antirétroviral. Le coût moyen par patient est de quelque 15 000 $, pour tout le traitement. Bien sûr, on n'en paie que la moitié, par rapport au nombre total de personnes infectées.
    Comme je l'ai déjà dit, cet investissement offre un taux de rendement vraiment phénoménal. L'Organisation mondiale de la Santé l'a reconnu, et c'est pour cette raison que l'ONUSIDA et l'OMS, entre autres, ont recommandé que cette approche soit mise en oeuvre partout dans le monde. On fait ce qu'il faut pour que ça se réalise.
    Je m'excuse; quel est le coût par année par rapport au budget de la province, et quels sont les coûts des soins hospitaliers, etc., avant la mise en oeuvre du programme de dépistage et de traitement « Seek and Treat »? Quel était le coût des soins prodigués aux patients infectés par le VIH dans les hôpitaux, les salles d'urgence, etc.? Pourriez-vous nous dire quel était le coût total, Julio, docteur Montaner?
    Je ne peux pas vous donner de chiffre, mais il dépasse plusieurs fois le total des dépenses actuelles. Autrement dit, le taux de rendement de l'investissement s'exprime par un ratio de trois à cinq pour un, car, en réalité, nous faisons plus qu'empêcher les gens de tomber malades, nous les remettons sur pied de façon qu'ils puissent continuer à contribuer à la société.
    Comme je l'ai dit, la Colombie-Britannique affiche un taux de transmission verticale nul depuis sept ans. On a enrayé l'épidémie chez les enfants. Mais ce n'est pas tout: comme nous avons réduit de 65 p. 100 le nombre de nouveaux cas, nous empêchons que de nouveaux cas se déclarent, puisque les nouveaux cas connaissent une croissance exponentielle en raison de la transmission continue.
    Merci, docteur Montaner.
    À mon avis, cela pourrait être intégré à une stratégie nationale d'assurance-médicaments, ce qui, je le répète, était l'un des objectifs de l'accord sur la santé de 2004 qui n'a jamais été réalisé.
    J'aimerais poser une question au Dr Kerr. L'expression « réduction des préjudices » a une très lourde connotation morale pour certaines personnes, mais nous avons pourtant entendu le Dr Tétreault parler de la réduction des préjudices en milieu hospitalier — se laver les mains pour ne pas répandre l'infection.
    Pourriez-vous expliquer ce qu'est la réduction des préjudices de façon à supprimer ce jugement moral chargé de valeurs?
    Vous n'avez que 30 secondes pour répondre.
    Pouvez-vous répondre en 30 secondes, Thomas?
    Bien sûr. La réduction des préjudices ne se limite pas seulement qu'aux consommateurs de drogues. Il est surprenant de constater que cette expression est associée à la stigmatisation, lorsqu'on l'utilise pour ça. Elle s'applique à bien d'autres choses, entre autres la bière légère et les cigarettes à faible teneur en nicotine. Les campagnes contre l'alcool au volant sont une forme de réduction des préjudices. En réalité, il semble que le Canada a un problème avec cette expression; ce n'est pas un problème pour les Nations Unies, ni pour l'Organisation mondiale de la Santé ou pour l'Association médicale canadienne. C'est tout simplement une pratique fondée sur des données probantes qui illustre ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas.
    Merci, docteur Kerr.
    C'est maintenant le tour de M. Carrie.
    Merci beaucoup, madame la présidente. J'aimerais remercier tous les témoins d'aujourd'hui pour leurs excellents exposés.
    Je vais poser mes questions, mais je vais également laisser un peu de mon temps à M. Lizon.
    Monsieur Racette, quel est au Canada le coût d'un lit d'hôpital, par jour? Avez-vous une idée?
    Je n'ai pas les données sous les yeux, mais je pourrais les demander à l'ICIS, l'Institut canadien d'information sur la santé, et vous les transmettre.
    D'accord.
    Qu'est-ce qui empêche les provinces d'adopter ces différentes pratiques? Nous avons entendu parler d'une pratique qui a cours en Colombie-Britannique. Si une autre province, par exemple la Saskatchewan, voulait adopter ces pratiques, est-ce que quelque chose l'empêcherait de le faire?

  (1220)  

    Non, rien ne l'en empêche.
    Je me posais tout simplement la question.
    J'ai aimé la discussion touchant les différents modèles. Vous avez parlé de la Suède. Docteur Fotti, j'ai été très impressionné de voir que vous semblez mettre cela en pratique sur le terrain, et j'adore voir ça. Vous avez parlé de diverses choses, par exemple le « Centre de médecine de famille ». J'ai parlé avec des témoins représentant Inforoute Santé du Canada des dossiers de santé électroniques. Il semble que vous avez commencé à utiliser cette technologie dans votre clinique. Vous avez commencé à parler d'informatisation et d'échange d'informations.
    Pourriez-vous expliquer un peu mieux comment vous vous y prenez?
    J'aimerais aussi vous poser une question sur les modèles de rémunération utilisés dans votre clinique. Il semble qu'un certain nombre de professionnels s'occupent d'un même patient. En Ontario, le modèle utilisé est celui de la rémunération à l'acte. Est-ce que vous utilisez un autre modèle qui semble fonctionner?
    Pour répondre à votre dernière question, ma clinique utilise le modèle de la rémunération à l'acte, mais, quand nous faisons des « consultations de couloir », ça se passe en toute simplicité: « Docteur Boroditsky, pourriez-vous venir examiner avec moi un cas d'éruption cutanée? » Nous ne facturons pas en double et nous ne faisons rien du genre.
    Quand nous recourons aux services de certains de nos médecins qui portent un intérêt particulier à un domaine donné, il s'agit davantage d'une consultation, mais l'objectif est que notre expertise supplémentaire dans ce domaine permettra, nous l'espérons, d'améliorer les résultats. Mais, la plupart du temps, quand nous nous retrouvons deux ou trois dans la même pièce, c'est simplement parce que l'un d'entre nous s'est dit: « J'aimerais bien avoir un ou deux avis supplémentaires. » Ça fonctionne assez bien.
    Quant à nos dossiers électroniques, c'est aujourd'hui tout simplement insensé d'envisager les soins de santé sans eux, c'est évident. Encore aujourd'hui, en tant que propriétaire d'une entreprise, on comprend à quel point le suivi peut être efficace... Il est par exemple beaucoup plus difficile d'égarer des résultats d'analyse: ou bien ils ont été enregistrés dans le système, ou bien ils ne l'ont pas été. Dans l'ancien temps, ils pouvaient tomber du dossier ou se retrouver au mauvais endroit, des choses comme ça. C'est maintenant beaucoup plus sûr pour les patients, également.
    Il y a cependant un hic, et cela vous fera probablement penser à quelques-uns des commentaires qui concernent la fragmentation. Notre dossier électronique peut communiquer avec la plupart des autres dossiers électroniques, mais nous avons eu beaucoup de problèmes avec certaines régions, dont le dossier électronique ne pouvait communiquer avec le nôtre. Nous devons encore tout leur transmettre par télécopieur, il faut convertir les données en format PDF et créer un dossier, puis quelqu'un doit compulser ce dossier. Par contre, si les systèmes communiquaient comme il faut, les renseignements pourraient être enregistrés dans les champs pertinents du dossier de santé électronique, et l'information se trouverait au bout des doigts.
    Nous avons eu d'autres problèmes, entre autres quand nous avons voulu communiquer avec ce que l'on appelle le dossier eChart. Ce eChart nous permet d'accéder, pour un patient donné, à toutes les données de laboratoire enregistrées dans un système central — ce système comprend tous les diagnostics, tous les tomodensitogrammes, toutes les radiographies, absolument tout.
    Nous sommes très bien engagés dans ce projet: nous pouvons accéder à l'historique des médicaments et de l'immunisation des patients, et à toutes sortes d'autres données. C'est très pratique, dans un bureau. Disons que vous êtes venu chercher les résultats d'un tomodensitogramme et que je ne les ai pas encore reçus. Il me suffirait d'ouvrir une session: les résultats seraient probablement déjà là, et je pourrais vous les communiquer.
    Le hic, puisque nous sommes en train d'essayer de le mettre en oeuvre avec leur aide, c'est que leur technologie est si vieille que, pour l'adopter dans notre clinique, il faudrait que leur technicien vienne et réduise la capacité de notre Internet, et je ne sais trop quoi, pour que ce système fonctionne avec le nôtre. Mais nous hésitons, car, si nous procédons ainsi, nous pourrions avoir de la difficulté à communiquer avec notre service de radiographie. Peut-être nous suffirait-il de réduire les capacités d'un ou de deux postes, et les mettre au niveau des anciennes technologies, pour utiliser ce programme.
    Ce serait bien que les technologies puissent travailler en meilleure collaboration. Malheureusement, c'est très fragmenté de la façon actuelle.
    Allez-y, monsieur Lizon.
    J'ai deux minutes, je vais donc rapidement poser ma question.
    Ma question s'adresse au Dr Bohm. Elle n'est pas directement liée à votre exposé, mais s'attache davantage au côté technique des prothèses ou des hanches et genoux artificiels. Comment ont-ils évolué au fil des ans? Vers quoi allons-nous? Qu'aimeriez-vous voir, à l'avenir, en ce qui concerne ces prothèses?
    C'est une question intéressante. Merci.
    Dans un monde idéal, nous finirions par ne plus avoir à remplacer de hanches ni de genoux, car nous pourrions prévenir la progression de l'arthrite. Cela suppose un dépistage et un traitement précoces de l'arthrose de même qu'un dépistage et un traitement précoces des formes inflammatoires de la maladie, par exemple la polyarthrite rhumatoïde. Si les patients en arrivent là, toutefois, l'objectif ultime serait de concevoir une prothèse de la hanche ou du genou que les patients ne sentent pas, qui fonctionne normalement et qui durera jusqu'à la fin de leur vie.
    Nous nous occupons à l'heure actuelle de deux grands aspects de la question. Dans le cas des arthroplasties du genou, vous vous rappelez peut-être les données que je vous ai présentées, soit qu'environ 5 p. 100 des patients à qui on a remplacé un genou sont insatisfaits du résultat. Ils n'ont pas l'impression que leur genou est normal. La prothèse produit un cliquètement, elle bloque et elle cause de la douleur au patient. Elle est un peu instable, et le patient n'a pas l'impression d'avoir un genou normal. Je crois que nous avons beaucoup de travail à faire pour concevoir des prothèses, et en particulier des prothèses du genou, qui ne semblent pas anormales. L'autre dossier est celui de la durée. Ces prothèses finissent par s'user. J'ai vu des photos de prothèses et d'implants de tige brisés, et c'est la raison pour laquelle on travaille très dur pour perfectionner la surface d'appui — l'assise, comme on dit — afin d'augmenter la durée de vie de la prothèse. Nous avons fait de grands progrès dans ce dossier.
    Le dernier aspect dont nous devons nous occuper concerne le problème constant de l'infection. C'est-à-dire l'infection pendant l'opération et l'infection qui survient tardivement, 5 ou 10 ans après. Je crois que nous allons concevoir des prothèses qui nous aideront à réduire les risques d'infection. Ce sont là nos trois grands dossiers.

  (1225)  

    Quelle est notre position par rapport aux autres pays industrialisés?
    En ce qui concerne la mise au point de prothèses, nous accusons du retard par rapport au reste du monde. Nous espérons changer cela, à Concordia. Une bonne partie des produits sont développés aux États-Unis et en Europe, mais je crois que le Canada a une chance unique, car il y a au Canada une collectivité très serrée de chirurgiens orthopédistes qui travaillent en général très bien les uns avec les autres. Nous sommes en train d'élaborer un registre amélioré des remplacements articulaires, de mettre en place des réseaux d'exérèse d'implants, des analyses radio-stéréopmétriques, et ainsi de suite. Nous sommes donc très bien placés pour concevoir ce genre de prothèse.
    Merci beaucoup.
    Ces questions se sont révélées très utiles. Merci à tous les membres du comité.
    Docteur Sellah, c'est maintenant votre tour. Je crois savoir que vous voulez lire le texte d'une motion.
    Allez-y.

[Français]

    Merci, madame la présidente.
    J'aimerais indiquer que je donne avis de la motion suivante :
    
Que le Comité entreprenne une étude d'au moins cinq rencontres sur les déterminants sociaux de la santé afin d'examiner et d'évaluer les preuves selon lesquelles les conditions sociales jouent un rôle déterminant dans la santé; de confirmer les conditions sociales ou économiques qui ont des répercussions sur la santé des Canadiens et, dans la mesure du possible, de quantifier ces répercussions; de cerner les effets, y compris financiers, de ces déterminants sur le système de santé du Canada; de recommander des façons d'aborder ces déterminants afin d'améliorer la santé des Canadiens; de rendre les soins de santé au Canada plus durables et plus abordables, et qu'il en fasse le rapport à la Chambre des Communes.
    Merci, madame la présidente.

[Traduction]

    Merci.
    Je dois vous dire que vous devez donner un préavis de 48 heures. Nous pourrons traiter de cette motion le 4 décembre.
    Allez-y. Il vous reste encore du temps pour poser des questions.

[Français]

    Merci.
    Ma question s'adressera au Dr Fotti. J'ai entendu avec précision votre exposé. Je trouve que votre initiative est très belle puisque votre approche vise ce qu'on veut maintenant avoir, soit des soins axés sur le patient.
    Je veux seulement que vous m'éclaircissiez un point. Votre clinique est-elle similaire aux groupes de médecine de famille, qu'on appelle GMF au Québec, et que le gouvernement a implanté comme projet pilote? Si c'est le cas, j'aimerais savoir si vous obtenez ou non de l'aide financière de la part du gouvernement local. Par exemple, au Québec, on a eu une mauvaise expérience avec les cliniques de radiologie RocklandMD. Cela nous a coûté très cher et nous ne voudrions pas tomber dans ce qu'on appelle le fait de « déshabiller Pierre pour habiller Paul ». De plus, je vous ai entendu dire que vous aidiez les systèmes hospitaliers. J'aimerais que vous élaboriez un peu sur la façon que vous le faites.
    Merci.

[Traduction]

    Merci.
    Le modèle utilisé dans ma clinique est celui de la rémunération à l'acte. Nous ne recevons ni soutien ni financement d'une source publique, à l'exception, au Manitoba, du programme des dossiers médicaux électroniques. Le projet consiste à faire en sorte que les cabinets de médecins n'utilisent plus de dossiers papier, pour utiliser plutôt des dossiers électroniques. Nous recevons un peu de financement de ce programme, qui nous aide à mettre en oeuvre nos dossiers électroniques et à entretenir le projet, mais les médecins et la clinique tirent leur revenu de la facturation à l'acte.
    Je sais que ce document fait une grande place aux modèles financés d'une autre manière, puisque, beaucoup de données le confirment, si les médecins étaient rémunérés selon un autre modèle de financement, par exemple un financement global ou quelque chose du genre, ils n'auraient plus à s'efforcer de voir plus de patients.
    Nous sommes chanceux, car nos médecins gagnent bien leur vie et ils n'ont pas besoin de voir 40 ou 50 patients par jour. Nous voyons tous probablement une vingtaine ou une trentaine de patients par jour, ce qui, dans le cadre d'une journée de travail normale, nous donne la plupart du temps la possibilité de prendre en charge de manière adéquate les problèmes des patients. De toute évidence, plus vous voyez de patients, moins vous avez le temps de faire ça.
    Il y a certaines cliniques où les médecins sont rémunérés à l'acte dans lesquelles les médecins voient 40 ou 50 patients par jour. Mais, à moins de travailler jusqu'à 22 heures chaque jour, la consultation ne sera pas très longue. Il faut donc trouver un juste équilibre.
    Nous ne recevons aucun financement direct, mis à part le financement destiné aux dossiers électroniques. Dans le cas d'une organisation hospitalière, nos patients peuvent communiquer avec nous après les heures normales de travail. Mais, de toute façon, n'importe qui se trouvant dans le secteur peut venir nous voir après les heures normales de travail, à notre clinique sans rendez-vous.
    Je travaille beaucoup dans les salles d'urgence, également. Dans une salle d'urgence, si je ne suis pas certain que le patient va faire l'objet d'un suivi approprié ou que les tests dont il a besoin vont être faits, et même s'ils ne sont pas urgents, j'ai tendance à les faire faire à l'urgence, pour plus de sûreté.
    Si vous êtes un de nos propres patients, je sais que, si vous venez nous voir, je pourrai vous donner rendez-vous avez votre médecin habituel dès le lendemain matin, s'il le faut, pour qu'un suivi soit fait, ou je vous dirai de revenir la semaine suivante et faire à ce moment-là un suivi, si un traitement a été entrepris; il est inutile que je prenne le mors aux dents et que je demande des tests inutiles à l'hôpital. Encore une fois, dans une salle d'urgence, à l'hôpital, si le médecin n'est pas certain que son patient va être traité et suivi de manière appropriée, il aura tendance à en faire davantage dans la salle d'urgence que ce qu'il ferait dans un autre cadre.

  (1230)  

[Français]

    Je comprends de votre réponse que cela ne ressemble pas vraiment aux GMF au Québec puisque, comme vous venez de mentionner, lorsque vous êtes à l'urgence et que vous voyez qu'elle est débordée, vous pourriez recommander aux patients d'aller à la clinique pour avoir accès à plus de services de laboratoire et à un meilleur suivi. C'est exact?

[Traduction]

    Oui, c'est exact.
    Une dernière minute.

[Français]

    Je vais profiter de l'occasion pour poser une brève question au Dr Kerr.
    Vous aviez commencé à parler de la prévention relative aux utilisateurs de stupéfiants. Donc, je vous laisse le temps d'élaborer davantage sur cette question.

[Traduction]

    Je crois que nous devons faire une distinction entre deux types de prévention. Il y a dans un cas la prévention primaire, qui consiste à tenter d'empêcher les gens de se mettre à consommer de la drogue. À ce chapitre, nos résultats sont médiocres. Nous investissons dans des programmes qui se sont toujours révélés inefficaces, en particulier des programmes qui essaient de faire peur aux jeunes en leur disant que, s'ils commencent à consommer de la drogue, ils ne vivront pas très vieux. Ces programmes ont fait l'objet d'une évaluation appropriée, et on sait qu'ils ne sont pas efficaces.
    Les programmes de prévention primaire qui fonctionnent sont ceux qui visent à intervenir dès l'enfance, dans des environnements familiaux malsains, par exemple.
    La prévention secondaire, dont j'ai parlé, vise davantage la prévention de la maladie et de la mortalité et de la comorbidité chez les gens qui consomment déjà des drogues. Et là, nos résultats sont réellement pitoyables. On en a la preuve en Saskatchewan, où nous avons affaire à une épidémie que l'on arrive pas à contrôler et pour laquelle il existe des mesures de prévention efficaces, qui...
    Je suis désolée, docteur Kerr. Je dois vous interrompre. Vous avez largement dépassé le temps qui vous avait été imparti, mais je vous remercie quand même de tout ce que vous avez dit. Je sais qu'il est difficile de se plier aux contraintes de temps, mais je dois être juste avec tout le monde.
    Nous allons maintenant donner la parole à Mme Block et à M. Lobb. Allez-vous commencer, madame Block?
    Merci beaucoup, madame la présidente. J'aimerais également remercier tous les témoins qui se sont présentés aujourd'hui.
    C'est à vous, docteur Fotti, que je vais adresser mes questions, au sujet... Je crois que c'est une clinique médicale que vous avez mise sur pied. J'aimerais savoir quelle est la différence entre votre clinique... Sur votre site Web, vous dites que vous visez à offrir des soins de première qualité dans le confort d'un spa et avec l'aide de la technologie de pointe. Pourriez-vous me donner une plus ample description?
    Oui. Quand nous avons conçu notre clinique, nous voulions que ce soit un lieu de travail agréable. Dans certaines des cliniques où j'ai déjà travaillé, on se sentait un peu déprimé d'aller travailler, à cause du choix des couleurs et des choses comme ça. Quand nous avons conçu notre clinique, nous avons accordé un peu plus d'attention à la décoration. Nous recevons beaucoup de commentaires, et j'ai même récemment recueilli le commentaire d'un de mes patients qui est en train de mourir du cancer. Il venait chercher un supplément de médicaments contre la douleur. Il ne lui reste plus beaucoup de temps, quelques mois tout au plus. Il se présente avec son épouse et son fils et il dit: « Savez-vous quoi? Quand je viens ici, il me semble que tout le monde est heureux. C'est beau. » Il a ajouté ceci: « Je n'ai pas l'impression de venir consulter mon médecin pour obtenir des médicaments contre la douleur parce que j'ai un cancer et que je vais mourir. » Il a dit qu'il avait l'impression d'être venu jaser avec un ami.
    Nous recevons donc beaucoup de commentaires de nos patients, qui disent que l'environnement, les qualités esthétiques de la clinique, les met à l'aise, et il arrive que la vie au bureau est un peu plus facile, car c'est ici que nous devons annoncer de mauvaises nouvelles, par exemple. Et il est tout simplement plus agréable de travailler dans un bel endroit.

  (1235)  

    J'ai seulement une autre petite question, et, ensuite, je vais céder la parole à mon collègue. Vous en avez peut-être parlé dans votre déclaration préliminaire, mais je veux seulement y revenir et m'en assurer. Quels sont les types de technologies dont s'est doté votre bureau que d'autres cabinets de médecins de famille pourraient ne pas avoir?
    Je crois que de nombreux cabinets de médecins de famille sont probablement dotés de technologies relativement semblables, mais nous, nous fonctionnons entièrement de façon électronique. Tous nos dossiers sont entièrement électroniques. Tout le système est électronique. Nous communiquons avec notre pharmacie de manière électronique. Nous disposons d'appareils portatifs pour faire des échographies et des Doppler. Nous effectuons d'autres examens spécialisés dans la clinique, comme la prise de l'indice tibio-brachial pour effectuer une perfusion aux pieds. Puis, nous nous sommes associés avec d'autres entreprises pour créer la clinique de radiographie, qui est, techniquement, la voisine immédiate de notre clinique, et non seulement pour l'avoir, mais également afin qu'elle soit reliée à nous instantanément de façon électronique, de sorte que nous puissions examiner instantanément des résultats de tests et d'autres choses du genre.
    Il y a peut-être beaucoup de cliniques qui offrent la radiographie et d'autres choses, mais elles ne se sont peut-être pas dotées de ce type de communication électronique instantanée, et c'est très essentiel. Ainsi, si je vous examine dans le cadre d'une visite sans rendez-vous et que j'estime que vous devez passer une radiographie pour m'aider à établir un diagnostic — je crois peut-être que vous avez la hanche fracturée ou quelque chose comme ça —, vous pouvez l'obtenir. Si je ne suis pas certain, je peux discuter avec le radiologue sur-le-champ. Si votre hanche est fracturée, votre place n'est pas vraiment dans une clinique sans rendez-vous, mais nous allons vous envoyer à l'hôpital avec toute l'information déjà prête.
    Merci.
    Ma question s'adresse au Dr Bohm.
    Lorsque j'ai commencé ma carrière professionnelle, j'ai travaillé dans l'industrie de l'automobile. Évidemment, les initiatives Lean et Six Sigma sont bien ancrées dans l'identité des entreprises. En commençant par le travailleur à l'usine, dès son premier jour, c'est la sécurité qui passe avant tout, puis, après, on s'appuie essentiellement sur Six Sigma et Lean et on essaie de trouver des initiatives afin d'accroître l'efficience.
    Pourriez-vous nous donner une meilleure idée de la mesure dans laquelle ces initiatives sont ancrées, d'un bout à l'autre du pays, dans le domaine médical, l'industrie des soins de santé? Que faudra-t-il faire pour aider à continuer d'augmenter ces possibilités d'amélioration?
    C'est une bonne question. Merci.
    Selon moi, ce que je constate, c'est qu'il y a des endroits précis dans l'ensemble du Canada où cette sorte de philosophie prend de l'ampleur. Il y a de petits projets pilotes. Je crois que vous en avez déjà entendu parler aujourd'hui. Les organismes hospitaliers accueillent cela favorablement. Je crois que nous voyons de petits groupes de gens adopter cette philosophie dans l'ensemble du Canada. Il y a de plus en plus de liens qui se créent entre ces gens, et de plus grands groupes se forment, ce qui leur permet de partager leurs expériences et leurs difficultés et aide à faire connaître cette philosophie.
    Je crois sincèrement que c'est un défi. En fait, Michel et moi en parlions hier soir dans le taxi. Il s'agit presque d'un changement de culture. Nous sommes en train d'adopter une nouvelle façon de dispenser des soins, d'effectuer le suivi des résultats, de rendre compte des résultats, de modifier les soins qui sont donnés et d'agir en fonction des informations. Nous parlions de la façon de s'y prendre pour amorcer ce changement de culture. Je crois que c'est ce qu'il y a de plus important et le plus grand défi. Je crois que nous y arriverons grâce à ces groupes de gens qui travaillent ensemble.
    J'ai été heureux de voir que vous avez fait mention du livre intitulé Théorie des contraintes. Il s'agit de la bible d'à peu près tous les fabricants, je pense, dans l'industrie, et donc, j'étais content de voir que vous en parliez.
    Et c'est tellement simple.
    Oui.
    Je n'ai qu'une petite question pour le Dr Fotti. Je sais qu'il ne me reste plus beaucoup de temps.
    Une de mes préoccupations concernant Inforoute et l'initiative numérique qui est entreprise d'un bout à l'autre du pays, c'est justement ce que vous venez d'aborder: l'intégration de tous les différents systèmes. Nous avons entendu différents témoins fournir des témoignages contradictoires. Cependant, j'ai également eu des commentaires de la part de l'industrie des logiciels, et je sais que cela pose un important problème. Vous l'avez déjà constaté vous-même dans votre pratique. Que pouvons-nous faire pour surmonter ce problème?

  (1240)  

    C'est une bonne question, et je ne crois pas qu'il y ait de réponse très simple.
    La meilleure façon, ce serait que tout le monde, ensemble, s'entende pour adopter un système ou des systèmes qui peuvent communiquer adéquatement les uns avec les autres. Actuellement, c'est tellement fragmenté. Notre système peut, en fait, communiquer avec leur système. Nous pourrions donc transférer vos dossiers à partir de mes dossiers à l'autre fournisseur, sans difficulté. Les dossiers seraient intégrés, et les espaces appropriés seraient remplis, et ainsi de suite, mais ils ne possèdent pas la technologie qui leur permettrait d'effectuer le processus en sens inverse. Donc, que vous ayez recours à un fournisseur ou à de nombreux fournisseurs, leur mandat, lorsque vous leur demandez de soumissionner pour votre secteur et votre région, c'est de pouvoir communiquer avec tous ces différents types de choses. De plus, indiquez eChart et les radiographies, et tout ce qui, selon vous, est important pour votre secteur. Il doit pouvoir communiquer.
    Merci beaucoup, docteur Fotti.
    Nous allons maintenant entendre M. Morin, s'il vous plaît.

[Français]

    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Ma première question s'adresse au Dr Tétreault.
    Je vous remercie beaucoup de votre présentation. J'ai trouvé cela très captivant. Je vous félicite également pour le bon travail que vous faites dans votre hôpital.
    Dans votre présentation, vous avez formulé plusieurs pistes de solutions et plusieurs initiatives qui, selon moi, relèvent davantage des champs de compétence provinciale. J'aimerais savoir ce que le gouvernement du Canada pourrait faire, dans le cadre de sa juridiction, pour vous appuyer dans votre mission et dans vos initiatives, le but étant évidemment de respecter les champs de compétence provinciale.
    Je vous remercie beaucoup de votre question.
    À ma connaissance, le fait d'appuyer la recherche et l'enseignement fait par un partenariat d'universités sur un sujet comme la transformation Lean dans les soins de santé n'est pas exclusivement de juridiction provinciale.
    Je déjeunais hier avec le doyen du Asper School of Business de l'Université du Manitoba pour lui demander de lancer le partenariat, d'inviter les gens à venir profiter des occasions d'apprendre et aussi de nous envoyer des candidats pour la recherche et d'approfondir notre connaissance dans le domaine. Il y a des questions aujourd'hui sur la façon de faire, sur ce qui réussit et ce qui ne réussit pas. Il faut apprendre ensemble avec les gens du domaine des affaires et de la santé.
    Éventuellement, le rêve est de contaminer le curriculum de tous les professionnels de la santé avec ce genre d'apprentissage davantage relié au domaine des affaires. Les gens du domaine des affaires du HEC de Montréal et du Asper School of Business veulent développer un enseignement relatif à ces techniques d'affaires pour leurs candidats en ce qui concerne la santé. À cet égard, je pense que le gouvernement fédéral pourrait jouer un rôle.
    Je vous remercie beaucoup de votre réponse.

[Traduction]

    Ma prochaine question s'adresse à M. Racette.
     Dans votre exposé, vous avez brièvement parlé d'un programme national en matière de santé. Pourriez-vous décrire plus en détail ce qu'il comprendrait?
    La majeure partie du programme national traite de qualité et de sécurité. Il s'agit donc, pour les responsables, de recenser un certain nombre de problèmes liés à la sécurité des patients ou à la qualité des soins auxquels ils veulent s'attaquer à l'échelle nationale. La question de la sécurité des médicaments pour les personnes âgées est très vaste. Les soins dispensés aux personnes âgées constituent une question très importante à l'échelle nationale. Elles sont déjà âgées, mais elles continuent également de vieillir. Alors, comment gèrent-ils ça?
    Il y a l'utilisation de technologies. Nous avons parlé de Lean. Les responsables ont créé un système très ingénieux, parce que leurs processus sont très efficients.
    Une de leurs principales préoccupations, c'est la manière de gérer les listes d'attente, mais lorsqu'ils parlent des listes d'attente, ils ne parlent pas d'autre chose; ils parlent de listes d'attente pour tous les types de spécialistes, toutes les choses pour lesquelles une personne serait sur une liste d'attente. Ainsi, leur objectif, en fait, c'est de faire en sorte que les listes d'attente soient très conviviales et très courtes, peu importe leur objet. Ils ont une exigence selon laquelle, s'ils ne communiquent pas avec une personne inscrite sur une liste d'attente dans les 30 jours, ce patient peut obtenir des soins dans un autre pays, et ils doivent en assumer les coûts.
    C'est à ce genre de choses auxquelles ils s'attaquent dans le cadre du programme national.
    Ce qui m'intéresse le plus, c'est de savoir si, au Canada, nous pourrions avoir un programme fédéral national en matière de santé, ou si cela ne s'applique qu'en Suède et que nous ne pouvons pas disposer d'un programme ou d'une stratégie semblable ici.
    Vous pourriez examiner un autre pays qui a le même type de constitution que le Canada — l'Australie. Tout d'abord, dans la loi constitutionnelle australienne de 1901, on a prévu le rôle du gouvernement fédéral et des gouvernements d'État. La répartition des compétences est la même, mais le pays dispose de structures permanentes qui créent des liens. Vous pourriez également parler d'un programme national. L'Australie a un comité permanent sur la santé, qui est composé de tous les ministres de la Santé du gouvernement fédéral et des États. Ils se réunissent régulièrement, et pas seulement à l'occasion.
    Deuxièmement, les sous-ministres de la Santé fédéral et des États se réunissent par l'intermédiaire du Conseil consultatif des ministres de la Santé de l'Australie. Ils conseillent les ministres, mais, ensemble, ils ont pu obtenir un consensus national sur le programme de réforme pour l'Australie. Ils ont un problème que nous n'avons pas au Canada — en Australie, les États ne peuvent taxer les soins de santé, tandis que, au Canada, les provinces le peuvent. Vous pouvez imaginer combien cela a été difficile pour eux d'établir un dialogue alors que le gouvernement fédéral a tous les pouvoirs de taxation et que les États assument toute la responsabilité liée à la prestation des soins. Malgré cette grande différence par rapport à nous, au Canada, ils ont pu se doter de structures qui ont permis un tel dialogue.

  (1245)  

    C'est intéressant.
    Cela m'a beaucoup étonné lorsque vous avez dit que, en Suède, ils dépensent moins, mais ils en ont plus pour leur argent. Y a-t-il des façons de devenir également plus efficient au Canada, des façons concrètes? Si nous parlons des compétences fédérales, tant mieux, mais comment se fait-il que nos systèmes de santé sont si rouillés?
    Ils ont pu se doter de capacités dans tous les milieux. Pour eux, le domicile, c'est un milieu de soins. Le foyer est un milieu de soins. Ils examinent toutes les différentes options où ils ont des patients, et ils font des pieds et des mains pour que le patient soit au bon endroit. Ils doivent équilibrer certaines choses, notamment le coût, la qualité et la sécurité, mais, puisqu'ils examinent toutes les possibilités quant aux endroits où le patient peut aller, et qu'ils assurent les soins dans tous ces endroits, ils réussissent beaucoup mieux à placer le patient dans le bon milieu.
    Nous éprouvons des difficultés, d'une certaine manière, parce que nous n'assurons les soins que dans certains milieux. Les patients veulent se retrouver dans des endroits où ils n'ont pas à payer de leur poche, et bon nombre de ces milieux sont déjà congestionnés. Ils ont mieux réussi à examiner toutes les possibilités quant aux endroits où les patients pouvaient être placés, et ils ont créé des options permettant aux patients d'y être. Plus particulièrement, ils fournissent un maximum de soins à la maison. Les lits dans leurs hôpitaux sont seulement un peu moins coûteux que les nôtres, et le ratio de lits par foyer de soins est très inférieur. Ils prennent vraiment soin de leurs patients lorsqu'ils ne peuvent pas rester à leur domicile. Nous savons que c'est ce que les patients veulent, mais le système les appuie également s'ils ne peuvent pas rester chez eux.
    Vous mentionnez que, en Suède, 97 p. 100 des soins sont financés par le public. Nous constatons une nouvelle tendance au Canada: des patients paient davantage, et de plusieurs façons. Je vous demanderais de comparer les deux approches et de me donner votre opinion sur les situations où il convient d'utiliser l'argent du privé ou si nous devrions nous en tenir au financement public.
    Ils ont pu démontrer qu'il est possible d'avoir un système complet en ayant recours essentiellement au financement public à 100 p. 100, donc cela constitue la preuve qu'il est possible d'y arriver dans un système financé presque entièrement par l'État.
    Au Canada, 30 p. 100 de nos dépenses proviennent du secteur privé, et cela augmente puisque le système public est de plus en plus contraint. Cependant, il y a un secteur qu'ils financent et que nous ne finançons pas, et ce sont les soins dentaires. Ils payent les soins dentaires jusqu'à l'âge de 19 ans. Ils savent que, si vous adoptez dès le départ une bonne hygiène dentaire, en arrivant à l'âge adulte, vous serez en meilleure santé pour le reste de votre vie. C'est ce que nous propose le secteur privé, et les gens qui n'ont pas d'assurance privée ne peuvent pas en bénéficier.
    Ils font des choses comme ça. Ils font la même chose avec les personnes âgées en ce qui a trait aux soins dentaires. Lorsque les gens vivent de leur pension, ils ne peuvent pas souvent se le permettre. Ils ont une approche très stratégique quant à leurs investissements pour que les gens restent en santé. Leur raisonnement derrière certaines de ces politiques publiques est très bon.
    Merci, monsieur Racette.
    Je vais maintenant adresser certaines questions aux témoins. Les témoignages ont été très intéressants aujourd'hui, très diversifiés à de nombreux égards.
    Docteur Montaner et docteur Kerr, merci pour vos exposés aujourd'hui. Je veux également vous féliciter, docteur Montaner, pour votre Médaille du jubilé de diamant de la reine. Vous la méritez. Félicitations.
    J'ai été très surprise, parce qu'il y a certains d'entre vous que je connais très bien depuis très longtemps, et j'ai vu le genre de choses que vous faites. Le comité a fait preuve de beaucoup d'audace en menant une étude sur l'innovation. Ce que nous avons tenté de faire, au début, c'était d'examiner les processus dans l'ensemble de notre pays afin de repérer et de partager ceux qui étaient les plus innovateurs. C'est comme — je ne sais pas si vous avez étudié cela — les organisateurs avancés d'Ausubel. Selon la théorie, si vous adhérez à certaines idées, c'est que vous comprenez d'où elles viennent.
    En cours de route, nous avons beaucoup parlé de médecine préventive, en d'autres termes, du fait d'amener les gens à adopter des modes de vie sains. Notre population vieillit, comme vous le savez. Nos enfants sont obèses, donc c'est quelque chose que nous avons examiné. Le comité s'est également penché sur les problèmes qui surviennent en fin de vie. Si quelqu'un souffre d'une maladie chronique, il faut lui permettre de rester chez lui le plus longtemps possible.
    Nous avons également constaté que, partout au pays, les limites sont floues. Par le passé, les médecins faisaient une chose, les infirmières en faisaient une autre, et le patient était en quelque sorte laissé à lui-même. Maintenant, c'est devenu un cercle permettant une collaboration accrue où le patient joue un rôle important concernant ses soins de santé. Nous avons également vu, dans certaines régions du Nord, que les intervenants d'urgence, que le comité accueillera en temps opportun, se sont chargés de régler les problèmes lorsqu'ils effectuent des visites à domicile pour prodiguer des soins. Ils font des intraveineux et d'autres choses de ce genre parce qu'il n'y a personne d'autre aux alentours pour le faire. Cela se produit dans le Nord, au Nunavut, et dans des endroits semblables.
    Ce que nous tentons de faire, c'est d'envisager d'autres points de vue que ceux que nous avions généralement. Je crois que, aujourd'hui, nous avons eu droit à un autre exemple typique de gens qui nous ont honorés de leur présence et nous ont fait part de leurs pratiques exemplaires.
    Docteur Bohm, une chose dont je suis certaine, c'est que votre clinique au Concordia Hip and Knee Institute fait un travail remarquable avec les hanches et les genoux. Vous aviez le même type de fonctionnement — je ne crois que vous en avez parlé — où les médecins participent beaucoup à la conception de meilleures hanches et de meilleurs genoux de remplacement. Je suis moi-même allée dans vos laboratoires.
    Chers collègues, si vous allez dans leurs laboratoires, vous verrez des rangées et des rangées de hanches et de genoux. Je ne sais pas si un jour je voudrai subir une arthroplastie de la hanche ou du genou. C'est remarquable, et ils veulent tellement améliorer les choses constamment.
    Pourriez-vous nous parler un peu de cette collaboration? C'est assez unique.

  (1250)  

    Merci de m'en donner l'occasion. C'est difficile de couvrir tout ce que nous faisons en 10 minutes. Les cliniciens, les chirurgiens et les physiothérapeutes font effectivement preuve d'une très grande collaboration, tout comme nos collègues techniciens.
    Nous avons créé plusieurs éléments d'intérêt, notamment un laboratoire d'exérèse d'implants et d'analyse. Vous pouvez imaginer que, à mesure que de nouveaux implants sont mis au point, ils peuvent être mis à l'essai en laboratoire, mais que, au moment de les poser sur les patients, cela ne fonctionne pas, pour une raison à laquelle vous n'aviez pas pensé. Lorsque nous retirons ces implants, puisque nous effectuons l'ensemble du travail de réintervention au Manitoba, nous pouvons les apporter à notre laboratoire d'exérèse, et nos techniciens peuvent les examiner et déterminer pourquoi ça n'a pas fonctionné, et nous pouvons en tirer des enseignements.
    Il y a une collaboration avec les chirurgiens sur ce plan aussi, non?
    Absolument. Nous sommes très présents et participons aux discussions. Nos bureaux sont l'un à côté de l'autre. Je peux donc me rendre à l'autre bout du corridor et parler à nos médecins du cas sur lequel je viens de travailler et de la raison pour laquelle, selon moi, ça a échoué, et nous pouvons l'analyser.
    L'autre élément, bien sûr, c'est la mise à l'essai de nouveaux implants et la création de produits. Nous avons des instruments de test à l'usure que nous venons tout juste d'installer il y a deux jours. C'est palpitant. Nous disposons de beaucoup d'équipements de laboratoire permettant la mise à l'essai et la mesure d'implants, de l'usure de la surface, et ce genre de choses, qui sont, encore une fois, mis au point et subventionnés par le ministère de la Diversification de l'économie de l'Ouest. C'est une très bonne collaboration.
    Dr Fotti, il semble qu'il y a une certaine synergie entre vos pratiques exemplaires au Pritchard Farm Health Centre et celles de Concordia. Vous faites des choses différentes, mais, selon ce que j'entends, ce qui vous relie, c'est votre collaboration et le fait d'être sur place avec des gens ayant différentes spécialités ou des intérêts particuliers, comme vous le dites.
    Je discutais avec un médecin, un neurochirurgien, qui a un enfant qui a la fibrose kystique. Ce garçon est en train de passer d'un milieu pour enfants à un milieu pour adultes en ce qui a trait à ses soins médicaux parce qu'il va avoir 18 ans.
    Je ne pense pas que le comité ait bien compris l'élément que vous avez ajouté, ce que vous appelé le « confort d'un spa ». C'est assez intéressant, le fait que cet endroit ait ce genre d'aspect, et que ça ne soit pas dispendieux du tout. Il y a même des gens qui font le don de toiles qu'ils achètent auprès d'un artiste local, et il y a d'énormes fenêtres. Pourriez-vous nous en parler?
    Il y a beaucoup de gens à qui j'ai parlé qui ont le sentiment que leur niveau d'anxiété diminue lorsqu'ils entrent dans cette clinique. Pourriez-vous nous en dire un peu plus là-dessus? Personne n'a jamais parlé de ça à notre comité.

  (1255)  

    Oui, certainement.
    Lorsque nous avons conçu la clinique, nous voulions qu'elle fonctionne très bien et que ce soit un endroit où il fait bon travailler. Je peux reprendre l'histoire de mon patient ayant le cancer à laquelle vous avez fait allusion.
    Lorsque les gens arrivent, si la clinique ne ressemble pas à une salle d'urgence d'hôpital ou à un cabinet de médecin, ils se sentent plus à l'aise. Lorsque les gens sont vraiment malades, ce genre de choses leur donne envie de sourire ou fait en sorte qu'ils apprécient leur visite. Je crois que c'est une excellente chose.
    Les personnes âgées apprécient le fait que vous n'ayez pas d'ascenseur. Elles m'ont dit qu'elles détestent les ascenseurs et qu'elles aiment les grandes fenêtres.
    C'est une composante dont nous ne parlons généralement pas dans le domaine des soins de santé, et je pense que c'est important.
    Oui, je pense que c'est très important, dans l'ensemble, pour tout le monde, y compris le personnel. Si nous avons de bons employés et de bons médecins, et si l'endroit est agréable, nous avons un faible roulement. C'est, au bout du compte, ce qui est souhaitable pour les patients.
    Vous êtes de St-Boniface, docteur Tétreault. Je me sens obligée de vous demander votre impression. Vous ne cachez pas le fait que vous voulez vous améliorer chaque année. Pourriez-vous en dire un peu plus, en respectant le temps dont nous disposons, c'est-à-dire une minute, au sujet des freins et des contrepoids dans votre propre hôpital et quant au fait de demander aux patients leurs impressions relativement aux soins qui leur sont prodigués? Je sais que bon nombre d'entre nous sommes allés dans des hôpitaux et avons souhaité que quelqu'un nous pose la question.
    Ayant été moi-même le patient d'un des collègues du Dr Bohm — après avoir passé cinq mois dans un fauteuil roulant, j'ai marché de mon hôtel jusqu'ici ce matin —, je dois dire qu'ils effectuent un excellent travail. C'est le client qui s'exprime, mais je ne veux pas me retrouver dans son laboratoire d'exérèse d'implants pour autant.
    L'été dernier, nous avons organisé une activité de familiarisation pour 28 personnes qui venaient du Québec, de la Belgique et de la Suisse, et le commentaire que nous avons entendu le plus souvent, c'était: « Vous mesurez vraiment tout. » Et c'est le cas. Nous l'avons déjà dit aujourd'hui, mais c'est essentiel si nous voulons nous améliorer. Oui, la seule ambition que nous avons, c'est de devenir un meilleur hôpital l'année prochaine comparativement à cette année, et un meilleur hôpital l'année suivante.
    Il y a une chose que j'estime très importante... Et nous faisons partie d'un réseau Lean de 60 organisations — malheureusement, il n'y a que cinq organisations canadiennes à peu près —, mais ce n'est pas tout le monde au sein du réseau qui fait ce que nous faisons, c'est-à-dire notre position par défaut. Tout le travail que nous effectuons en vue de nous améliorer touchera un patient ou un membre de sa famille, à moins qu'il y ait une raison spécifique de ne pas le faire. Cela s'est révélé extrêmement utile pour nous. Donc, il ne s'agit pas que de mesurer, il faut également écouter les gens qui ont l'information.
    Merci beaucoup.
    Je dois dire, monsieur Racette, que vous avez toujours été très innovateur dans votre façon de penser.
    Docteur Montaner et docteur Kerr, vous m'en avez beaucoup appris aujourd'hui, et je suis très heureuse que vos résultats parlent d'eux-mêmes.
    Je crois que nous avons eu un comité extraordinaire ce matin. Je veux remercier mes collègues pour leurs questions très judicieuses, et je veux remercier à nouveau nos éminents invités d'être venus aujourd'hui.
    Cela dit, la séance est levée.
Explorateur de la publication
Explorateur de la publication
ParlVU