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NDDN Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent de la défense nationale


NUMÉRO 013 
l
3e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 29 avril 2010

[Enregistrement électronique]

  (1110)  

[Traduction]

    Bonjour, mesdames et messieurs.
    La 13e séance du Comité permanent de la défense nationale est ouverte.
    Nous accueillons aujourd'hui des représentants de l'Association des industries canadiennes de défense et de sécurité. Ce sont Timothy Page, président; Janet Thorsteinson, vice-présidente, Relations gouvernementales; et David Stapley, président du conseil d'administration. Bienvenue à tous.
    Nous avons reçu votre documentation et je vous invite donc à faire une brève déclaration liminaire, après quoi nous vous poserons quelques questions. Merci à nouveau de votre participation.

[Français]

    Monsieur le président, je tiens à vous remercier de l'invitation à comparaître devant vous aujourd'hui. Je suis bien content d'avoir l'occasion de me présenter et de présenter l'association en compagnie de mes confrères: David Stapley, nouvel élu au poste de président du conseil d'administration de notre association; et la vénérable vice-présidente des relations gouvernementales, Janet Thorsteinson, qui a oeuvré pendant plusieurs années au sein du gouvernement fédéral en approvisionnement du côté du ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux.

[Traduction]

    J'espère avoir la possibilité, dans les prochaines minutes, de vous présenter notre rapport sur l'approvisionnement militaire.
    Avant cela, permettez-moi d'expliquer brièvement qui nous sommes. L'Association des industries canadiennes de défense et de sécurité, l'AICDS, est une organisation à but non lucratif dirigée par ses membres. Autrement dit, elle est gérée par un conseil d'administration élu dont les membres sont bénévoles.
    Nous regroupons quelque 800 sociétés membres qui paient une cotisation annuelle. Ces sociétés sont présentes dans 177 circonscriptions fédérales différentes. Elle emploient collectivement 90 000 personnes, essentiellement dans des industries du savoir, et elles génèrent 10 milliards de dollars de ventes militaires directes annuelles à des clients intérieurs et internationaux. La moitié de ces ventes se font à l'exportation.
    Nous avons entrepris notre étude de l'approvisionnement militaire parce que nous pensions qu'il était important d'établir le contexte dans lequel se tenait notre consultation de l'industrie. Ce contexte se caractérise avant tout par le fait que le gouvernement fédéral a pris l'engagement d'investir sur 20 ans 240 milliards de dollars pour rebâtir son équipement militaire terrestre, aérien et maritime. C'est l'investissement le plus important en une génération. Il déterminera non seulement la capacité des Forces canadiennes mais aussi la nature et la viabilité du bassin industriel de la défense du Canada pendant les 20 prochaines années. Les sommes consacrées à l'équipement de la défense sont à l'origine de nombreux emplois du savoir au Canada et contribuent ainsi à une économie prospère et mondialement compétitive. Le Canada a besoin d'une solide base industrielle de la défense et d'une économie prospère pour sa sécurité et sa souveraineté.
    Passons maintenant au rapport. Je vais vous en présenter les trois grandes parties, dans l'ordre, et je commence avec la partie consacrée à la défense et à l'économie, ainsi qu'aux principales constatations de l'exercice de consultation auquel ont participé quelque 450 experts et universitaires des industries de la défense. La première des constatations est que la défense et l'économie sont crucialement importantes pour le Canada. Elles sont interdépendantes. Elles ne sont pas mutuellement exclusives.
    Le commerce international de la défense n'est pas du libre-échange. Dans le monde entier, les gouvernements interviennent pour protéger et promouvoir leurs capacités industrielles en fonction de leurs intérêts nationaux. Le marché de la défense du Canada a besoin de stratégies proactives d'approvisionnement de la défense pour permettre et assurer une participation industrielle nationale. Les activités de R-D et les marchés d'exportation sont les moteurs-clés de la compétitivité industrielle du Canada. ITAR est un obstacle majeur à notre compétitivité industrielle.
    Finalement, toujours en ce qui concerne la défense et e l'économie, le Canada n'est pas le seul pays, parmi ses alliés, à ne pas avoir de stratégie industrielle de la défense pour guider les relations entre le gouvernement et les industries, et pour harmoniser ses objectifs économiques avec ses priorités d'approvisionnement militaire.
    Dans la partie du rapport concernant le processus même d'approvisionnement de la défense, nos principales constatations sont d'abord que la prestation des programmes d'acquisition pourrait être rendue plus efficace en améliorant le processus d'approvisionnement. Le modèle d'approvisionnement devrait être structuré pour acquérir les équipements requis et aussi pour optimiser le contenu et les emplois canadiens.
    Les stratégies d'approvisionnement de la défense devraient comprendre des objectifs industriels dont on ne semble pas tenir compte aujourd'hui.
    Les critères d'approvisionnement devraient être fondés sur les exigences de performance et ne pas être excessivement prescriptifs. Les comportements et pratiques d'élimination du risque ne servent qu'à accroître les coûts et les délais des programmes et à limiter les possibilités de contenu canadien.
    Finalement, un effectif trop limité de professionnels de l'approvisionnement dans le système nuit à la transparence et à la redevabilité, et contribue à un manque d'uniformité dans le processus d'approvisionnement.
    En ce qui concerne la partie du rapport consacrée à la gouvernance, nous avons constaté un besoin de champion politique des industries de la défense à Ottawa. Nous avons constaté que les politiques, programmes et stratégies d'approvisionnement du gouvernement ont besoin d'être mieux harmonisés si nous voulons en optimiser les avantages économiques pour le Canada. Et nous avons constaté aussi que l'absence de mécanisme cohérent de communications réduit la transparence et accroît les malentendus entre l'industrie et le gouvernement.
    Considérant ces constatations, voici nos recommandations, encore une fois présentées en trois parties successives.
    Tout d'abord, pour ce qui est de la défense et de l'économie, notre toute première priorité concerne l'élaboration et la mise en oeuvre d'une stratégie industrielle de la défense pour stimuler et appuyer nos capacités industrielles nationales critiques. La préférence serait accordée aux solutions canadiennes quand elles répondent aux besoins militaires. On réserverait 5 p. 100 du budget d'investissement du MDN à un programme de R-D mené par le secteur privé. Ce serait un programme dans lequel l'industrie canadienne bénéficierait d'une relation de premier client avec le gouvernement canadien — lorsque le gouvernement identifierait un besoin militaire et voudrait s'adresser au marché pour le satisfaire, il achèterait ce dans quoi il aurait co-investi dans l'industrie canadienne.
    Ce serait une stratégie assurant qu'on obtient la PI quand on achète de l'équipement pour la défense de façon à l'appuyer au Canada durant son cycle de vie.
    Ce serait une stratégie comprenant inévitablement des programmes et stratégies d'exportation, notamment une solution au problème ITAR et le programme de RIR, entre autres politiques et programmes fédéraux, comme outils de mise en oeuvre de la stratégie industrielle de la défense.
    En ce qui concerne nos recommandations sur les processus et pratiques d'approvisionnement, nous recommandons l'harmonisation de la stratégie industrielle de la défense avec les priorités d'approvisionnement de la défense, la stratégie de défense Le Canada d'abord, et les possibilités commerciales.
    Arrêter les objectifs industriels canadiens au moment où l'on définit le besoin d'approvisionnement et avant de choisir la stratégie d'approvisionnement. Attribuer le programme d'approvisionnement et le risque contractuel à la partie la mieux placée pour gérer ce risque. Imposer des cahiers des charges fondés sur des exigences de performance et réduire le nombre d'exigences obligatoires au profit d'exigences cotées. Rehaussé la transparence et l'uniformité administratives. Former un effectif de professionnels de l'approvisionnement.
    Finalement, en matière de gouvernance, voici nos recommandations. Premièrement, créer un conseil consultatif industriel de la défense relevant d'un ministre pour dispenser activement et continuellement des avis sur la stratégie industrielle de la défense et la base industrielle de la défense du Canada. Deuxièmement, créer un conseil consultatif mixte industrie-gouvernement de l'approvisionnement de la défense relevant du niveau de sous-ministre adjoint pour améliorer la compréhension, les communications et la gestion des questions d'approvisionnement sur une base continue. Troisièmement, créer un point de responsabilité unique au niveau du Cabinet à la fois pour l'équipement de la défense et pour la base industrielle de la défense.

  (1115)  

    Monsieur le président, membres du comité, notre conclusion est que leadership et engagement politiques sont essentiels et que nous devons agir stratégiquement pour appuyer à la fois les Forces canadiennes et l'économie canadienne, parce que la capacité des Forces canadiennes sera d'autant plus solide que nous aurons une base industrielle de la défense viable. En outre, du fait de ces consultations, des attentes ont été créées dans notre industrie en matière d'action gouvernementale dans ces domaines. Une action politique audacieuse et urgente est nécessaire pour intégrer les constatations et recommandations du rapport aux objectifs et processus d'approvisionnement de la défense du Canada avant l'expiration de la stratégie de défense Le Canada d'abord et la disparition de l'opportunité. L'AICDS reste déterminé à aider le gouvernement et ce comité de manière constructive pour atteindre ces objectifs.
    Finalement, monsieur le président, pour ce qui est des étapes futures... Dans son rapport, l'AICDS conclut que le programme d'acquisition du MDN ne devrait pas être envisagé séparément de l'impact qu'il pourrait avoir sur l'économie canadienne, s'il était géré efficacement de concert avec une stratégie industrielle de la défense, et des bénéfices que récolteraient les Forces canadiennes de l'existence d'une solide base industrielle de la défense canadienne stimulée par une stratégie industrielle de la défense.
    Mesdames et messieurs, si le comité partage cette vision des choses, nous vous encourageons à demander au gouvernement de formuler une stratégie industrielle de la défense. Si vous souhaitez approfondir cette question, mes collègues, moi-même et notre association seront ravis de vous prêter assistance.
    Je vous remercie de votre attention. Nous sommes à votre entière disposition pour répondre à vos questions.

  (1120)  

    Merci beaucoup, monsieur Page.
    Je donne maintenant la parole à mon vice-président, l'honorable Bryon Wilfert, pour sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins de leur présence.
    Je tiens tout d'abord à vous féliciter de votre excellent rapport. Je pense que c'est un signal d'alarme. J'aimerais me pencher sur la méthodologie que vous avez employée.
    Je sais que le rapport a été envoyé au gouvernement et je peux affirmer que je ne trouve pas grand-chose à y redire. Je pense que le besoin de rationaliser, d'avoir une stratégie industrielle de la défense nationale, est absolument crucial. Cela dit, c'est bien beau de parler d'une stratégie de la défense Le Canada d'abord, mais comment peut-on la mettre en oeuvre de manière efficace et efficiente considérant ce que font certains de nos alliés?
     Voici ma première question : quel est le statut du rapport du point de vue du gouvernement? Avez-vous eu des réactions?
    Oui. Brièvement, nous avons eu de longues discussions avec des représentants du gouvernement depuis le dépôt du rapport il y a quelques semaines. Nous avons aussi eu des discussions avec certains ministres clés, aussi récemment qu'hier lorsque nous avons passé près de deux heures avec le ministre Mackay, le ministre Clément et la ministre Ambrose. Je crois pouvoir dire qu'ils prennent la question très au sérieux. J'ai cru percevoir une certaine reconnaissance qu'il existe une sorte de vacance entre la stratégie de la défense Le Canada d'abord et l'approvisionnement de la défense, ce qui est la question sur laquelle nous nous sommes concentrés, comme vous l'avez justement souligné, en parlant de stratégie industrielle de la défense.
    Je crois pouvoir dire qu'il existe un certain degré d'accord pour faire avancer cette discussion afin de voir s'il y a certaines choses qui pourraient être faites assez rapidement pour progresser. Le gouvernement est sur la même longueur d'onde que nous à ce sujet.
    Pour ce qui est d'abattre ce dragon à trois têtes pour n'en garder qu'une, quelle tête devrions-nous garder, selon vous? Dans le cadre de ce rapport, on a discuté de Travaux publics par opposition à, disons, Industrie. Qu'est-ce qui serait le plus efficace, d'après vous? Depuis la Commission Gomery, nous avons eu toutes ces... Nous voulons toujours être transparents et responsables mais nous avons ajouté toutes ces couches, essentiellement, qui ralentissent en fin de compte le processus de prestation.
    De quel ministre cela devrait-il relever pour que ce soit le plus efficace possible? Que pensez-vous également de toutes ces couches qui ont pour effet de ralentir l'acquisition, dans bien des cas, de l'équipement nécessaire?

  (1125)  

    Votre première question est de savoir auquel de ces trois paniers nous devrions nous intéresser s'il n'y en avait qu'un, et je pense que vous posez cette question pour de très bonnes raisons. Il y a beaucoup de constatations, et nous n'avons qu'un temps limité, mais certaines ont plus d'importance que d'autres du point de vue du résultat et de l'impact. On nous a posé cette question très récemment : s'il ne devait y avoir qu'un seul résultat de cela, lequel devrait-ce être? Je vais vous donner notre réponse tout en sachant qu'il y a beaucoup de travail à faire dans beaucoup de domaines. Notre réponse a été, au nom de l'industrie, que nous croyons que le pays a besoin d'une stratégie industrielle de la défense. On peut discuter de ce que ça veut dire en termes de définition. Dans le contexte de cette priorité numéro un, nous croyons qu'il faut qu'il y ait du leadership politique. Je dis cela sans vouloir offenser la bureaucratie ou les fonctionnaires, qui connaissent très bien la question, mais il va falloir du leadership politique pour avancer. Il ne nous appartient pas cependant de parler de la machinerie gouvernementale et de dire à quel ministre confier ce mandat. Nous laissons cela aux puissances supérieures.
    La troisième chose à dire au sujet de cet objectif concerne un échéancier. Si nous faisions ça dans le secteur privé, ce serait une action de 30, 60 ou 90 jours, et nous sortirions au bout de cette période avec quelque chose qui pourrait tenir debout et nous permettrait d'avancer pour guider les approvisionnements futurs. Ce serait un échéancier très ambitieux considérant que nous parlons ici d'un niveau élevé de complexité, de différents gouvernements, etc. À notre avis, si nous pouvons dire avec fierté dans un an que nous avons une stratégie industrielle, que nous avons comblé cette vacance, que nous obtiendrons un rendement pour l'économie par l'activité industrielle et la création d'emplois, par la création de technologie, etc., avant qu'une grosse partie du plan d'investissement soit dépensée, nous pourrons dire que c'est un succès. Donc, s'il y a une chose sur laquelle nous devrions nous concentrer, ce serait celle-là.
    Avec un échéancier de 30 à 60 jours, et je sais que c'est très ambitieux, avez-vous eu l'indication d'une volonté politique d'agir?
    Pas encore, monsieur.
    Si vous me permettez d'intervenir, la stratégie de défense Le Canada d'abord comporte un plan de dépense à long terme pour rebâtir l'armée. En ce qui concerne l'AICDS et ses membres, cela témoigne clairement d'un leadership de la part de ce gouvernement pour atteindre un objectif qu'il a identifié et combler un trou dans notre capacité actuelle. Ce que nous disons dans ce rapport, c'est que, sans un document d'accompagnement du plan militaire, sans un plan industriel définissant des objectifs clairs et établissant des priorités claires, comment le gouvernement pourra-t-il savoir s'il a obtenu un rendement optimal de son investissement, et comment mesurera-t-il ce rendement de l'investissement?
    C'est un peu — veuillez m'excuser — Alice au pays des merveilles : si vous ne savez pas où vous voulez aller, vous pouvez emprunter n'importe quelle route. Le gouvernement a fait preuve de leadership avec la stratégie de défense Le Canada d'abord, et notre argument est simplement qu'il faut maintenant un document d'accompagnement de façon à tirer le meilleur parti des dépenses de défense de façon à soutenir et développer les emplois du savoir dans l'économie canadienne qui permettront en même temps de contribuer à une économie prospère, d'accroître la sécurité du pays et de créer une plus grande souveraineté.
    Je ne conteste pas cela étant donné que c'est un programme très ambitieux que le gouvernement s'est fixé mais, en l'absence des critères que vous avez énoncés dans votre rapport, en particulier d'une stratégie industrielle de la défense, dont on a besoin... Je ne sais pas si je parlerais ici d'un document d'accompagnement ou si je mettrais plutôt cela en premier pour ensuite... En ce qui concerne leurs propositions, nous avons toutes ces annonces qui sont faites mais sans livraison de la marchandise pour la simple raison que nous n'avons même pas les dollars ou les capacités nécessaires pour la livrer à l'heure actuelle.
    Si vous me permettez, la création d'une stratégie industrielle de la défense permettrait à l'industrie d'investir dans des installations de production, des améliorations technologiques, du perfectionnement des ressources humaines, ce qui veut dire que, lorsque des programmes arriveraient sur le marché, l'industrie canadienne serait bien positionnée pour les décrocher.
    L'absence de plan industriel est une source d'incertitude pour les entreprises, ce qui se traduit typiquement par un investissement sous-optimal en R-D, un investissement sous-optimal en rénovation d'installations et de machinerie et en perfectionnement des compétences.
    Merci, monsieur le président.

[Français]

    Merci beaucoup.
     Je donne maintenant la parole à M. Bachand.

  (1130)  

    Merci, monsieur le président.
    Je veux souhaiter la bienvenue aux représentants de l'Association des industries canadiennes de défense et de sécurité. D'abord, je reconnais votre très grande expertise et votre grande expérience dans le domaine. Je vous connais depuis un certain temps, monsieur Page. Vous êtes vraiment une personne incroyable pour l'industrie. J'ai connu également Mme Thorsteinson dans sa vie antérieure de fonctionnaire. Elle avait une grande compétence. Et vous, monsieur Stapley, qui venez d'être élu, je veux vous souhaiter bonne chance. Vous avez réussi à accéder à la présidence de l'AICDS qui compte 800 membres. C'est un collège électoral très intelligent, et si vous êtes sorti premier de classe, c'est un peu comme nous qui sortons premiers de classe après l'élection dans notre comté. Alors j'imagine que vous êtes la meilleure personne pour faire le meilleur travail.
    Tout le monde concède — les députés le constatent aussi — que le système d'achat du gouvernement fédéral dans le domaine militaire est brisé et ne fonctionne plus. Je trouve que votre participation et votre document contribuent grandement à la question. Vous soumettez d'excellentes pistes de réflexion et j'espère que le gouvernement va saisir l'occasion.
    J'aimerais savoir de quelle façon ce que vous recommandez transforme le cheminement actuel et de quelle façon c'est traité avec la nouvelle approche que vous nous proposez.
    Je commence. Si on veut acheter un tank, un avion ou un bateau, normalement c'est la défense qui a le premier mot à dire et qui prépare des spécifications, ou requirements. Je vous suggère de prendre des notes parce que je vais avoir plusieurs petites questions. Tout d'abord, dans la situation actuelle, n'y a-t-il pas un danger, lorsqu'on fait des spécifications, qu'on dessine les spécifications intentionnellement pour aller chercher exactement le type d'équipement qu'on veut avoir ou même la compagnie qu'on veut avoir? C'est ma première question.
    Ne serait-il pas préférable de fonctionner comme les Américains, par missions? On dit qu'on a besoin d'un avion et qu'on veut qu'il porte tel cargo, et que les meilleurs l'emportent. La ligne de départ des achats, c'est la défense. Les problèmes surviennent lorsque le ministère des Travaux publics entre en ligne de compte. Une fois que les spécifications sont données, on dit à Travaux publics Canada d'aller chercher ce qu'on lui demande. À ce moment, il y a deux façons de procéder: par lettres d'intentions ou par contrats d'adjudication, les fameux PAC qui, à mon point de vue, sont négatifs. Même la vérificatrice générale dit qu'elle n'aime pas les PAC, mais parfois c'est la seule chose disponible parce que notre industrie canadienne ne peut pas tout faire, on n'est pas comme les Américains. J'aimerais savoir si cela est traité dans votre nouvelle approche.
    Par la suite, c'est Industrie Canada qui entre en ligne de compte avec les retombées économiques. Vous proposez de créer un point de responsabilité unique, et j'y suis favorable. Cependant, est-ce que cette responsabilité unique traitera de l'ensemble des dossiers? Autrement dit, est-ce la défense qui, dorénavant, aura le mandat de faire les spécifications ainsi que les lettres d'intentions ou les contrats d'adjudication, et qui aura aussi le mandat des retombées économiques? Est-ce bien la nouvelle structure que vous voulez avoir?
    Je demanderais à ma collègue Janet de répondre aux deux premières questions. Je me chargerai ensuite de la troisième.

[Traduction]

    Vous demandez, très légitimement, comment les besoins sont définis, et vous donnez en exemple l'approche américaine de système de mission. Je dois dire que le ministère de la Défense nationale a déployé certains efforts pour avancer vers des cahiers des charges axés sur le système de mission ou les exigences de performance. Il est très difficile et ardu de dresser un cahier des charges axé sur des exigences de performance. Si vous n'avez pas fait beaucoup d'approvisionnement militaire pendant longtemps — de grands systèmes — et que vous n'avez pas l'expertise interne pour ce faire, vous avez tendance à retomber dans des cahiers des charges opérationnels ou des cahiers des charges détaillés. À ce moment-là, vous pouvez effectivement obtenir une réponse qui ne vous donne qu'un seul produit.
    Il y a une centaine d'années, quand j'ai débuté ma carrière d'agent d'approvisionnement dans ce qui était alors le ministère des Approvisionnements et Services, dans des locaux temporaires, j'ai reçu du ministère de la Défense nationale une demande concernant un certain équipement qui devait fonctionner à une certaine vitesse, traiter des données un certain rythme — jusque-là, pas de problème — et être peint en bleu IBM. Évidemment, même si j'étais débutante, je voyais qu'on avait quelque chose de précis en tête.
    Dans notre monde, nous nous occupons de systèmes beaucoup plus grands que cela. L'une des choses dont nous parlons dans le processus que nous proposons... Tout d'abord, nous avons encouragé les militaires à discuter de manière plus approfondie de ce qu'ils souhaitent. Nous aimerions avoir la possibilité de leur fournir plus d'informations sur nos capacités. S'il y avait une stratégie industrielle de la défense, ce que nous recommandons vivement, l'industrie canadienne pourrait aussi se positionner à l'avance pour pouvoir satisfaire aux exigences de mission.
    Nous disons dans l'une de nos dernières recommandations qu'il y a au Canada ce qu'on peut appeler des centres d'excellence extrêmement compétents. À mon avis, quand on a un centre d'excellence capable de fournir le matériel ou le service requis, le gouvernement devrait d'abord examiner ce que ce centre a à offrir. Il devrait aussi se demander, s'il juge nécessaire d'aller s'approvisionner à l'étranger, s'il n'y a pas moyen de structurer le contrat de manière à assurer un transfert de connaissances et d'expérience vers le Canada. Cela permettrait de stimuler la création d'emplois du savoir au Canada et de faire monter d'un cran le processus d'intensité technologique.
    Je conviens que nous ne pouvons pas tout faire. Nous devons cependant pouvoir faire plus.
    Vous avez parlé des PAC et des lettres d'intention. Personnellement, je préférerais qu'on mette l'accent sur la question que j'ai abordée en premier, c'est-à-dire les exigences de performance. Vous avez parfaitement raison de dire que, si les exigences de performance sont intégrées au bleu IBM, aussi illustre que soit IBM parmi nos membres, cela limite d'office ce que TPSGC peut faire.

  (1135)  

    Il vous reste 30 secondes.
    Comme votre question porte sur la machinerie gouvernementale, monsieur, je vous réponds brièvement que nous avons jugé qu'il ne nous appartient pas de prédire comment le gouvernement pourrait répondre à cette recommandation. Il est clair que les questions de machinerie relèvent des prérogatives du premier ministre.
    Cette recommandation résulte d'une frustration générale de l'industrie reliée à la redevabilité et reliée à la compréhension du fait que les objectifs industriels sont identifiés par programme de défense. Pour nous, la clé est d'attirer l'attention du gouvernement sur l'idée d'une stratégie industrielle de la défense, sur les capacités clés que le gouvernement juge essentielles pour le Canada, pour sa souveraineté, sa sécurité ou sa prospérité économique. Nous avons fait allusion à la machinerie parce que nous en avons entendu parler en route mais il est clair que la toute première priorité que nous essayons de porter à votre attention aujourd'hui est qu'il est souhaitable de formuler une stratégie industrielle de la défense.
    Merci beaucoup.
    C'est maintenant au tour de M. Harris.
    Merci, président.
    Merci aux témoins. Il est extrêmement important que vous ayez cerné l'occasion rare qui s'offre à un pays de la taille du Canada d'identifier ce niveau de dépense de programme à long terme, et l'occasion réelle d'en tirer parti pour son industrie.
    Pouvez-vous nous dire d'abord ce qu'il y aurait de mal à adopter une politique disant que nous nous réserverons 100 p. 100 des retombées industrielles et régionales, les RIR, comme bénéfice d'un contrat éventuellement accordé outre-mer? Qu'y aurait-il de mal avec une telle stratégie? Même si ce ne serait pas nécessairement une stratégie industrielle au sens où vous l'entendez, c'est une stratégie qui semble être en vogue. Qu'y aurait-il de mal à cela d'un point de vue industriel, et pourquoi la stratégie industrielle de la défense dont vous parlez serait-elle meilleure?

  (1140)  

     C'est une excellente question et ma réponse rapide est que, si nous étions des banquiers et non pas des industriels, la formule un-pour-un serait probablement bonne, mais la vraie question quand on s'en va dans cette voie est que c'est une question de qualité plutôt que de quantité lorsqu'il s'agit de « retombées » — comme on les appelle dans le monde entier — ou de RIR, comme on dit ici au Canada.
    Cela nous ramène très rapidement à l'argument de stratégie industrielle étant donné que chaque RIR ou retombée n'est pas égale. Sans vouloir critiquer de quelque manière que ce soit la capacité industrielle existant actuellement, si nous fabriquons des rivets, par exemple — tâche au demeurant très noble si c'est la vôtre —, plutôt que de consacrer le même dollar à un emploi créant du logiciel et du code-source pour des systèmes militaires très pointus, ayant même peut-être des applications commerciales, je pense qu'on doit conclure que cette deuxième solution aurait un impact plus élevé et plus durable à long terme sur l'économie.
    Donc, même si l'exigence de 100 p. 100 des RIR est une stratégie, si l'on voit ce qui se fait ailleurs, en Inde, en Israël, au Royaume-Uni ou en Australie, pour ne donner que ces exemples, ils ont renoncé à des stratégies purement quantitative au profit de l'aspect qualitatif. L'Inde, par exemple, a déclaré qu'elle veut 35 p. 100 et non pas 100 p. 100 parce que les technologies concernées sont dans des secteurs de l'économie qui lui sont importants. L'Inde tient actuellement le plus gros concours international d'avions de chasse au monde et toute la question est de savoir ce qu'elle obtiendra avec cette condition de 35 p. 100 que le gouvernement impose aux soumissionnaires. C'est sur ce plan que la bataille sera gagnée ou perdue, et il est très clair qu'elle a des intérêts nationaux très bien définis dans certains domaines, comme les communications stratégiques, la surveillance, etc. Elle a une stratégie industrielle et elle a conclu, à tort ou à raison — à raison selon nous — que cela aura un impact plus élevé et à plus long terme, ou plus durable, sur l'économie que le statu quo.
    Puis-je poser deux autres questions en même temps? Notre temps de parole est limité.
    Lors des séances de l'été dernier, le ministre de la Défense avait laissé entendre qu'il y a en réalité une stratégie industrielle en ce qui concerne le côté construction navale de l'approvisionnement de la défense. Qu'en pensez-vous? Je suppose qu'il y a des constructeurs de navires dans votre association. Pensez-vous il y a actuellement des mécanismes adéquats en place?
    Mon autre question fait suite à la réponse de M. Stapley. Je suis choqué, mais peut-être pas surpris, d'apprendre que le Canada est le seul pays à ne pas se préoccuper d'abord de sa propre base industrielle. Y a-t-il un pays qui soit un modèle de ce dont vous parlez ici? Vous avez mentionné plusieurs pays qui font certaines choses mais existe-t-il un pays ayant un petit marché de la défense qui serait à vos yeux le meilleur exemple de ce que vous recommandez?
    L'an dernier, nous avons produit un rapport sur le secteur industriel de la marine dans lequel nous exprimions notre appui à un échéancier de production à long terme réparti de manière à rebâtir la flotte maritime du Canada et la flotte de la garde côtière. Nous l'avons fait parce que nous savions que nous avons une politique nationale de la construction navale. Nous avons aussi une industrie maritime et, dans la mesure où le Canada construit des navires au Canada, nous pouvons déclencher la création d'une chaîne d'approvisionnement comprenant peut-être 700 à 800 entreprises du secteur maritime capables d'aider à équiper ces navires des chantiers navals. Il sera important pour nous de voir comment le gouvernement répond avec sa première reconstruction de navires, de voir les liens qu'il aura faits entre le chantier naval — la construction de la coque — et l'équipement de cette coque avec les systèmes d'armes et de communications de technologie avancée les plus pointus qui représentent la vraie valeur ajoutée d'un navire de guerre moderne complexe.
    L'opinion de l'AICDS est que les deux sont nécessaires pour assurer une base industrielle de la défense viable dans le pays, et que le Canada détient une réelle capacité dans ces domaines.

  (1145)  

     Que s'est-il passé? Nous avons entendu des annonces disant que c'est ce qu'il fait mais que se passe-t-il en réalité, selon vous?
    Nous n'avons pas encore vu le gouvernement s'engager au niveau du Cabinet envers la production d'un nouveau navire. Quand il le fera, nous espérons qu'il aura tenu compte non seulement de la construction dans le chantier naval mais aussi de l'électronique et des systèmes de communications et d'armement, de la valeur qui est réellement ajoutée dans les navires militaires, ainsi que du soutien en cours de service car nous croyons qu'obtenir des pièces de fournisseurs intérieurs facilite les relations de soutien en cours de service à long terme, réduit les coûts et rehausse la prévisibilité.
    Au sujet de la deuxième question, concernant un pays qui...
    Brièvement, celui vers lequel nous avons tendance à migrer est l'Australie. Il y a de nombreux modèles mais nous avons tendance à migrer vers l'Australie. Bien que ses besoins militaires soient sensiblement différents puisque c'est un pays du Pacifique Sud plutôt que du Pacifique Nord et de l'Atlantique Nord, il y a de nombreuses similitudes. C'est une économie de taille à peu près semblable. Ses processus d'approvisionnement, du point de vue des modalités de contrats et des conditions, sont quasi identiques aux nôtres. Sa base industrielle a une composition similaire à la nôtre, avec une combinaison de sociétés nationales et de filiales de multinationales. Et elle dispose d'une stratégie industrielle qu'elle met régulièrement à jour pour qu'elle corresponde à l'évolution de ses besoins. C'est probablement là que nous chercherions, et c'est un pays que nous avons examiné attentivement pendant cette étude.
    Merci.
    Parliez-vous de changement des politiques ou de changements législatifs qui seraient nécessaires?
    Je ne pense pas que le moindre changement législatif soit nécessaire, monsieur.
    Merci beaucoup.
    M. Hawn.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Stapley, je me sens obligé de vous contester un peu dans votre évaluation de nos politiques de RIR. Je ne pense pas qu'il soit juste de dire qu'elles sont seulement quantitatives, parce que chaque dollar de retombées proposé par quelqu'un est évalué selon sa valeur, et il y a une formule. Des rivets donneront peut-être 0,25 $ sur une valeur évaluée à 1 $ alors que, bien sûr, la technologie avancée donnera peut-être 1 $ pour 1 $, et ce n'est donc pas strictement 1 $ de rivets pour 1 $ d'avion, par exemple. C'est une valeur calculée. Convenez-vous qu'il y a une conjugaison de quantité et de qualité dans notre programme de RIR, de par la manière dont la formule est appliquée?
    C'est une remarque pertinente. J'ai trop simplifié. Nous avançons dans la bonne voie. Vous parlez de modifications relativement récentes et positives apportées à cette politique, mais elles sont positives — engranger les effets multiplicateurs et reconnaître qu'un dollar peut valoir plus qu'un autre. Je conviens aussi qu'il est plus difficile de mesurer l'aspect qualitatif et que nous devrions le faire plus.
    Cette politique existe en fait depuis très longtemps. Je tenais simplement à apporter cette précision car ce n'est pas la même que d'autres, mais c'est une formule quantité-qualité.
    Le gouvernement envisage de créer un centre gouvernement-industrie d'analyse des capacités inspiré des modèles australien et britannique. Êtes-vous au courant? En outre, s'il le fait, cela répondra-t-il en partie à vos recommandations?
    Merci de cette question.
    L'idée du Canada concernant un centre de capacité s'appelle ACCORD, ce qui est un environnement pré-compétition par lequel le gouvernement, l'armée et l'industrie essaieront d'évaluer où existe la capacité et où cette capacité sera nécessaire à échéance de 10 à 15 ans.
    L'AICDS a participé à cette réflexion et encourage depuis trois ans le gouvernement à se doter de ce type de capacité. Nous y avons contribué en organisant une tribune de présentation des modèles australien et britannique au gouvernement, aux FC et à l'industrie depuis trois ans. Nous pensons que c'est un pas dans la bonne voie. Nous croyons aussi que cela doit faire partie d'une stratégie industrielle de la défense mais ne saurait la remplacer.
    On parle d'une agence unique d'approvisionnement de la défense. Il y a évidemment beaucoup d'activités différentes d'approvisionnement de la part des différents ministères, et pas seulement du ministère de la Défense nationale. S'il devait y avoir une seule agence à cet effet, elle devrait être dotée de personnes ayant les diverses compétences que possèdent actuellement TPSGC, Industrie Canada et, probablement, d'autres ministères. Il est donc facile de dire que c'est ce qu'il faudrait mais je pense que c'est difficile à décrire. Et il y aurait beaucoup de concurrence pour acquérir les mêmes compétences, le même type de personnes qui devraient présumément provenir de TPSGC, d'Industrie Canada ou d'ailleurs. Avez-vous une sorte de description conceptuelle du point de vue industriel de ce à quoi elle pourrait ressembler?

  (1150)  

    Nous étions très conscients de certaines choses durant la consultation. Premièrement, il y a eu le nombre de fois où l'industrie a dit que le processus d'approvisionnement est incohérent. Pour un programme donné, il peut y avoir une série de règles A et, pour un approvisionnement séparé mais de nature similaire, une série de processus B, et avec des personnes différentes ayant des niveaux différents de compréhension et des niveaux différents d'expérience. J'apprécie donc votre question qui porte en fait sur la fusion de cette expertise.
    Nous avons essayé de refléter exactement les opinions exprimées. Nous savons que changer la machinerie gouvernementale prend un temps incroyablement long et exige beaucoup d'énergie. Nous ne voudrions certainement pas que toute l'attention du gouvernement soit réservée à l'examen de cette recommandation alors que nous pensons qu'il y a dans le rapport beaucoup de choses beaucoup plus faciles à faire pour améliorer sensiblement la manière dont fonctionne le système, et qui produiraient des bénéfices pour l'économie canadienne en conséquence.
    C'est précisément ce que je veux dire. Il s'agirait d'une restructuration énorme de la machinerie gouvernementale, pas seulement de celle concernant l'approvisionnement de la défense, à moins qu'il n'y ait déjà qu'une seule agence d'approvisionnement. Je ne sais pas vraiment comment ça marcherait car d'autres ministères font des approvisionnements et, par exemple, TPSGC et Industrie Canada devraient probablement conserver leurs propres services d'approvisionnement. On finirait peut-être par créer un nouveau monstre qui ne ferait que s'ajouter aux monstres existants.
    À notre avis, la clé est d'aborder l'approvisionnement de la défense d'un point de vue pangouvernemental de façon à ce que tous les points de lumière différents qui résident au sein du gouvernement — que ce soit d'un point de vue R-D ou d'un point de vue soutien des exportations, ou que ce soit du point de vue Avantage Canada, ou des stratégies de S-T du MDN ou d'Industrie Canada — aient une certaine connectivité, soient harmonisés avec quelque chose, et qu'il y ait une reddition de comptes sur leur efficacité. C'est là où nous sommes arrivés.
    La clé, je le répète, est d'envisager ce défi d'exploiter les dépenses de la défense de manière non seulement à obtenir l'équipement, ce qui est primordial, mais aussi à le faire d'une manière qui développe les capacités dans des secteurs clés de l'économie canadienne.
    Nous sommes certainement d'accord à ce sujet.
    Le MDN prépare aussi une politique d'évaluation de la performance des fournisseurs, son intention étant qu'elle soit le complément d'une politique similaire révisée de Travaux publics. Avez-vous contribué à ce processus? Savez-vous de quoi je parle?
    Oui, nous sommes au courant et nous pensons que ce serait une bonne chose. Chaque fois qu'on peut...
    Pour les fournisseurs.
    Chaque fois qu'on peut mesurer la performance, que ce soit du côté client ou du côté fournisseur, ça ne peut qu'être bénéfique au système dans son ensemble. Donc, oui...
    Participez-vous activement à ce processus en ce moment?
    Nous avons été invités de temps à autre, par des canaux variables, à donner notre avis sur le processus et sur les paramètres de mesures du progrès, entre autres. L'un des défis est de savoir quand commencer à mesurer — avant de lancer le programme, lorsqu'il est terminé, lorsqu'il y a un problème, après qu'il y ait eu un problème? Ce n'est donc pas un modèle facile à mettre en place pour les gens du gouvernement mais je pense que ce serait une chose très positive du point de vue de l'optimisation des ressources.
    Pour ce qui est de savoir quand commencer à mesurer, je crois que c'est à toutes les étapes que vous avez mentionnées, surtout s'il y a des critères différents.
    Je pense que vous avez raison, en fin de compte, d'un point de vue pratique.
    Vous avez parlé de partage du risque, ce qui ramène aux modalités et conditions de Travaux publics. Il n'y a peut-être pas de réponse courte à ma question mais quel est le degré de frustration à ce sujet, ou formule-t-on les modalités et conditions en termes de partage du risque entre le gouvernement et les fournisseurs?
    Le partage du risque est une chose dont j'ai entendu parler durant les consultations dans le pays, partout où nous sommes allés. C'est plus profond que simplement les modalités et conditions, bien que les gens aient des opinions très arrêtées sur des choses telles que l'indemnisation illimitée, lorsqu'ils sont simplement incapables ou qu'ils ne veulent pas... Je pense qu'il serait inapproprié de devoir risquer toute son entreprise pour obtenir un contrat.
    Dans bien des cas, le gouvernement canadien ne réussit pas à obtenir le degré de concurrence souhaité parce que des gens refusent de participer. Deuxièmement, quand ils participent, ils doivent inévitablement intégrer le coût d'acceptation de ce risque dans leur prix. Autrement dit, le gouvernement paye pour ce risque. Si c'est dans un domaine où le gouvernement serait mieux positionné pour assumer le risque dans le cadre de son processus de partage budgétaire, je pense qu'il gaspille son argent. Des choses comme les fluctuations des taux de change pourraient être un domaine à examiner.

  (1155)  

    Merci.
    Merci beaucoup.
    C'est maintenant au tour de M. Martin.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci aux témoins d'être présents aujourd'hui.
    Je m'adresse à Mme Thorsteinson. En ce qui concerne le risque dans les contrats, devrait-il être assumé par le secteur privé, par le gouvernement ou par les deux, en termes de risque une fois qu'on achète un produit?
    Je ne crois pas qu'il y ait de réponse unique à cette question, malheureusement. Tout dépend de ce qu'on achète, du fait que le produit est en développement ou non, du fait que c'est un produit totalement abouti qu'on achète tel quel, et du fait qu'il risque ou non de changer au cours d'un très long programme.
     Par exemple, si l'on devait acheter des hélicoptères qui sont en cours de production, on pourrait dire que le risque doit être assumé par l'entrepreneur qui a une chaîne de production et un concept prouvé. Par contre, si vous dites ensuite que vous voulez que votre hélicoptère ait cinq rotors au lieu de quatre, ou qu'il ait plus de réservoirs d'essence que prévu, qu'il puisse transporter plus d'équipement sur une plus longue distance, vous changez la structure de votre besoin de manière telle que vous êtes maintenant dans un coût de développement. À ce moment-là, je pense que le gouvernement devrait être prêt à assumer une plus grande part du risque.
    Merci de cette explication.
    En ce qui concerne la stratégie nationale de construction navale dont nous avons parlé, nous avons tenu plusieurs réunions dans ma circonscription où se trouve BFC Esquimalt. Nous avons eu d'excellentes réunions avec l'industrie qui a fait un travail fabuleux dans l'expression d'une vision d'avenir. Je crois que ce serait un bon projet pilote pour mettre en place une stratégie nationale de la construction navale, pour lancer le processus, si vous voulez.
    Est-ce que l'AICDS envisagerait, afin d'essayer d'élaborer une telle stratégie nationale de la construction navale, d'employer ce projet pilote à partir duquel nous pourrions voir comment rationaliser le processus d'approvisionnement?
    En bref, oui. Nous attendons avec impatience l'émergence de la politique de la construction navale. Nous avons contribué en partie à une étude et à une analyse très détaillée de l'industrie maritime.
    Pour ce qui est de votre deuxième question, il y a une relation entre ce à quoi nous faisions allusion dans l'argument de la stratégie industrielle de la défense du point de vue des technologies et des systèmes installés sur les navires, par opposition à ce que j'appellerais les coques de navires.
    Si nous réussissons à obtenir la politique nationale de la construction navale, pour commencer, afin de régler la question très difficile des chantiers navals — c'est politiquement très difficile, nous le reconnaissons — et de l'harmoniser avec ce que nous faisons par le truchement de la stratégie industrielle de la défense plus axée sur l'électronique, nous aurons une capacité de construction navale de niveau mondial et efficiente avec le temps.
    Nous tenons beaucoup à faire partie des deux aspects de ce processus et à nous assurer que cette convergence se produit dans l'intérêt de toutes les parties : nos clients, d'abord, les contribuables, juste après, et l'industrie, ensuite.
    Merci.
    En ce qui concerne Travaux publics, Industrie Canada et le MDN — je pense que M. Hawn a fait allusion à cette question, comme M. Harris — il y a certaines de ces solutions dans votre document. Fondamentalement, c'est une structure fondée sur les pratiques exemplaires que vous avez relevées internationalement et que le Canada pourrait adopter pour rationaliser ce processus au sein du gouvernement afin d'éliminer les obstacles et de pouvoir mettre en oeuvre un processus rationalisé qui nous permettrait d'atteindre cet objectif.
    Je crois qu'il y a plusieurs facteurs dans ce que vous dites. Je séparerai l'idée de savoir si c'est le jeu entre les ministères. Je commencerais absolument avec la question des exigences de performance dont j'ai parlé plus tôt. Je n'insiste pas là-dessus pour le moment.
    Je pense que le gouvernement a une stratégie d'investissement et que, pour ses propres raisons, ce n'est pas un document public. Plus l'industrie canadienne sera au courant de ce qui est envisagé, mieux elle pourra répondre aux besoins du gouvernement et plus le gouvernement pourra optimiser ses ressources.

  (1200)  

    Merci beaucoup.
    Lorsque nous avons accueilli des représentants du MDN, je leur ai posé une question sur l'établissement d'une meilleure relation. Vous avez parlé d'un conseil consultatif mixte industrie-gouvernement. Ils nous ont dit qu'ils se voient quatre fois par an et que c'est suffisant. Est-ce suffisant ou non?
    Je pense que la réponse est que ce n'est jamais suffisant. Nous sommes aussi responsables de cela. Ce n'est pas quelque chose que nous pouvons reprocher à nos collègues du gouvernement.
    Il existe un organisme appelé CCID, Conseil consultatif de l'industrie de défense. C'est à un niveau supérieur. Il se réunit à intervalles réguliers pour se pencher sur ces questions de manière très apolitique. Il représente une bonne partie du gouvernement, une bonne partie du pays, et il fait dans l'ensemble du bon travail.
    Je dirais aussi à titre personnel — plutôt qu'en qualité de président de l'AICDS — que l'industrie pourrait mieux faire pour contribuer à ce processus. Ce n'est pas une situation dans laquelle les gens du gouvernement ne méritent que des critiques. Ils méritent des félicitations pour ce qu'ils essaient de faire.
    J'ai fait allusion au fait que cela ne couvre pas tout l'éventail des intérêts, et c'est ce dont nous parlons ici. Comment pourrions-nous obtenir — je vais sans doute employer les mots à mauvais escient — une vision plus éclairée du haut vers le bas de ces questions, comprenant un niveau politique? Quand on nous pose ces excellentes questions, comme celle que vous avez posée sur la construction navale, il y a une opinion éclairée d'un très large éventail d'intérêts. Il y a l'industrie et tous les paliers de gouvernement, y compris politiques.
    Nous pensons qu'il doit y avoir un dialogue à ce sujet mais qu'il n'y a pas vraiment de mécanisme pour ce faire. Nous le faisons bilatéralement et ponctuellement avec M. Hawn et d'autres parties intéressées. C'est évidemment à leur crédit mais il n'y a pas de mécanisme officiel à ma connaissance, à part le CCID, pour avoir cette discussion dans un contexte défense-industrie.
    Merci.
    Merci beaucoup.
    Je donne maintenant la parole à M. Braid pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci aux témoins d'être venus ce matin, et merci également pour les recommandations de votre rapport.
    À mesure que nous examinons vos recommandations, et à mesure que nous avançons dans l'harmonisation des objectifs économiques avec l'approvisionnement et une stratégie industrielle de la défense, je pense que les bienfaits pour notre économie et pour les entreprises canadiennes deviennent tout à fait clairs. Pourriez-vous nous donner une recommandation concrète et un exemple de la manière dont nous pourrions utiliser l'approvisionnement de la défense pour stimuler l'innovation au Canada et créer ces importants emplois du savoir?
    Mon collègue me demande si je peux répéter l'histoire de la boîte noire que j'ai racontée hier soir comme exemple pour vous répondre. Je ne sais pas si c'est la meilleure mais je vais le faire brièvement.
    Cela me ramène aux remarques de M. Hawn disant que nous avons une politique de RIR depuis longtemps. La société pour laquelle je travaillais en a bénéficié pendant quelques années dans le cadre d'un marché de la défense qui a débouché sur une boite noire dans laquelle des gouvernements européens ont investi des dizaines de millions de dollars qui sont allés dans l'industrie canadienne dans le cadre des exigences de RIR. Au début, ça ne semblait pas très excitant. C'était un projet de construction d'après dessin, comme on dit dans l'industrie, plutôt qu'un projet intensif d'ingénierie. Mais très rapidement, parce que les produits deviennent désuets, ce qui s'est passé, c'est que nous avons demandé à des ingénieurs très brillants d'ici, de la vallée de l'Outaouais, de réinventer cette boîte noire, de réduire les coûts et d'améliorer la performance. Le résultat est que chacune de ces boîtes noires qu'on utilise aujourd'hui dans le monde a été construite à 30 milles d'ici. C'est un exemple de succès de la politique. Nous avons créé une capacité de niveau mondial, et la chose la plus importante est que nous sommes passés d'un simple rôle de fabrication un rôle beaucoup plus important de conception et d'ingénierie, et que cela nous a permis d'accaparer tout le marché. C'est un exemple.
    Si l'on examine les programmes qui existent aujourd'hui, celui qui me vient à l'esprit est celui des véhicules blindés. On avait décidé il y a 20 ans que nous deviendrions un chef de file mondial pour les véhicules terrestres, et nous l'avons fait, malgré la petite taille de notre pays, avec une société qui s'appelle General Dynamics Land Systems, de London, qui est incontestablement un chef de file mondial.
    Des décisions stratégiques d'approvisionnement très difficiles devront bientôt être prises. Est-ce que nous irons sur le marché international pour tenir un concours de conception afin de construire au Canada? C'est une possibilité. La deuxième est de dire que nous allons construire avec notre instrument national, un centre d'excellence industriel, c'est-à-dire GDLS, ou organiser un concours total, le gagnant ramassant toutes les billes, ce qui pourrait vouloir dire que nous perdrons cette capacité au Canada. Voilà le genre de décisions difficiles que le gouvernement devra prendre et je ne pense pas qu'il y ait de solution magique. Il faut examiner chaque possibilité selon ses mérites et voir comment nous pouvons donner la meilleure capacité aux hommes et femmes courageux de nos forces armées en obtenant le meilleur rendement économique.
    En fin de compte, il faut des gens très intelligents, dévoués et, honnêtement, très audacieux pour prendre ce genre de décision.

  (1205)  

    Merci de votre réponse et de ces deux exemples.
    Monsieur Page, vous avez dit dans votre déclaration liminaire qu'une des choses que le gouvernement devrait faire serait d'acheter ce dans quoi nous avons déjà co-investi. Ça me semble évident. Pourquoi nous le fait-on pas?
    Ma réponse sera purement spéculative et je suis sûr que mes collègues auront des exemples à vous donner.
    À notre époque où la concurrence à tout crin semble être devenue le mantra, on perd de vue la manière dont on est arrivé au point où l'on a identifié un besoin, et parfois c'était par un co-développement que RDDC, ST&R et le MDN ont peut-être mis au point avec l'industrie.
     Le paradoxe n'est pas seulement d'organiser un concours pour un besoin dans lequel vous avez déjà co-investi, mais aussi que vous risquez de disqualifier le partenaire industriel avec qui vous avez fait le co-développement parce qu'il constate qu'il est considéré comme étant en conflit d'intérêts.
    Notre suggestion est que le gouvernement devrait décider plus tôt à l'étape de la R-D s'il veut établir une relation à long terme avec ce partenaire industriel, c'est-à-dire qui continuera après l'étape de la R-D. Ensuite, si ce programme doit être mis sur le marché, il s'engagerait à acheter à ce partenaire industriel.
    Merci beaucoup.

[Français]

    Monsieur Bachand, vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je veux revenir sur la politique industrielle de défense. J'ai devant moi le document intitulé « The Report of the CADSI Marine Industries Working Group » dans lequel on trouve des choses intéressantes. Or, je remarque que, dans le rapport que vous venez nous présenter aujourd'hui, vous ne vous êtes pas aventurés à définir l'architecture éventuelle d'une politique industrielle. Par contre, dans le document que j'ai devant moi du groupe de travail sur la marine, vous avez poussé assez loin vos spécifications et vos visions d'une stratégie industrielle marine.
    Je voudrais lire ce qui m'a frappé dans ce rapport. Malheureusement, je vais devoir le lire en anglais:

[Traduction]

    « Que le gouvernement adopte une stratégie industrielle maritime qui maximise la participation directe des industries maritimes canadiennes à la conception, à la construction et au soutien des navires du gouvernement en exigeant que les fonctions cruciales suivantes, outre la construction des navires, soient exécutées au Canada par des sociétés canadiennes : maîtrise d'oeuvre, gestion de projet, intégration de plates-formes et de systèmes de mission, gestion et contrôle de la conception, et soutien en cours de service ».

[Français]

    J'aimerais savoir quel travail vous avez fait au sujet de la marine. Est-ce la façon dont vous entrevoyez la politique industrielle de défense?
    Je m'explique. Je pense que le groupe sur la marine possède l'expertise nécessaire au Canada pour faire ce que vous demandez. Cependant, a-t-on l'expertise nécessaire pour le faire dans l'aviation aussi? Je pense que non.
    Si vous êtes favorables à une politique industrielle, verriez-vous à ce qu'elle soit architecturée selon les environnements actuels de la défense? Poussez-vous votre raisonnement jusqu'à dire que la politique industrielle, mis à part les grands principes, va s'appliquer différemment dans la marine, dans l'armée de terre et dans l'aviation? Allez-vous jusque-là? On ne peut pas bâtir une politique industrielle large en s'appuyant sur de grands principes. Il faut voir ce que les Canadiens peuvent faire ou non. On ne peut pas demander aux Canadiens de bâtir de A à Z un avion C-17 qui fait du transport stratégique, on en est incapable.
    Dans votre idée, la politique industrielle, dans son raffinement, va-t-elle jusqu'à considérer chacun des environnements? Sinon, entrevoyez-vous autre chose?

  (1210)  

[Traduction]

    Merci de cette question.
    Nous avons évidemment obtenu durant la consultation une tonne de réponses à la question que vous venez de poser, et nous savons que le Canada est un marché relativement petit. Par conséquent, l'industrie canadienne ne peut pas tout faire pour tout le monde en ce qui concerne les besoins de l'armée, qu'il s'agisse de systèmes pour les soldats ou de systèmes aérospatiaux, terrestres ou maritimes. La valeur d'une stratégie industrielle de la défense est qu'elle permet de choisir les capacités qui sont importantes pour le pays selon ses besoins de défense et divers environnements — parce qu'il y a beaucoup de capacités dans l'intégration des systèmes électroniques de la défense qui sont applicables sur le plan terrestre aussi bien que sur le plan aérien ou maritime — et de déterminer à partir de cette base industrielle d'expertise quelles sont les capacités clés qui vont servir à répondre au besoin national et où se trouvent les possibilités commerciales internationalement.
    Dans le rapport que nous avons produit, nous avons tenté d'exposer cette vision, si vous voulez. C'est la vision que nous souhaitons voir le gouvernement adopter. Nous serons heureux de travailler en consultation pour doter cette stratégie industrielle de la défense des capacités que le gouvernement juge importantes pour des raisons de souveraineté, de sécurité ou d'économie. Elles différeront selon le domaine de la défense où elles seront appliquées.
    Je vous invite seulement à ne pas perdre de vue les capacités polyvalentes — celles qui sont utilisées dans un véhicule blindé mais peuvent être légèrement modifiées pour être également utilisées dans un avion de chasse moderne ou dans un navire de guerre moderne.

[Français]

    Merci beaucoup.

[Traduction]

    M. Boughen, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Je vous souhaite moi aussi la bienvenue et vous remercie de consacrer une partie de votre journée très chargée à notre comité.
    Voici mes questions. Selon des informations publiques, près de 42 p. 100 de tous les contrats accordés en 2006 par le Département de la défense des États-Unis, ce qui représente 68 p. 100 de la valeur totale, étaient des contrats de source unique. Il y a eu alors 402 contrats accordés à des sociétés canadiennes, d'une valeur totale de 231 millions de dollars.
    Au Canada, 80 p. 100 de la valeur des contrats accordés par TPSGC au nom du MDN sont accordés par voie de concours. Devrions-nous avoir plus ou moins souvent recours à la méthode de source unique en matière d'approvisionnement?
    Je vais commencer et mes collègues auront peut-être quelque chose à ajouter.
    Il n'y a pas de réponse unique à cette question. Tout dépend des circonstances. Vous parliez tout à l'heure d'une situation dans laquelle il pourrait y avoir un concours très tôt dans le processus. Le gouvernement et l'industrie choisiraient leur partenaire de R-D, si vous voulez, ils mettraient de l'argent sur la table pour un investissement commun des secteurs public et privé et, si tout marchait bien, il ne serait probablement pas nécessaire d'organiser un concours et de jeter le bébé avec l'eau du bain. Ce serait un scénario. Lorsqu'il s'agit de produits standards et de sources multiples, je pense qu'il devrait y avoir un concours au max pour avoir le meilleur prix et le meilleur produit.
    Tout dépend de ce qu'il y a dans le pipeline, le pipeline d'approvisionnement, et chaque cas doit être examiné individuellement dans le but d'obtenir le meilleur contrat possible pour le pays, tous facteurs pris en compte. Malheureusement, acheter des crayons est beaucoup plus facile qu'acheter des systèmes militaires de pointe. Donc, que ce soit 80-20 ou 20-80, je ne sais pas.
    Le modèle américain tient compte de qui a son sang sur la table mais, s'il s'agit d'un investissement important du secteur privé, c'est pris en compte dans le processus de sélection final. C'est vrai dans la plupart des pays. Il se peut que le pendule soit allé trop loin dans un sens, comme nous le disons dans notre rapport. Un concours pour le plaisir d'avoir un concours ne donne pas nécessairement la meilleure valeur dans chaque cas.

  (1215)  

    Permettez-moi d'ajouter que répondre à un appel de propositions coûte cher. Il ne serait pas légitime d'obliger les gens à consacrer des millions de dollars et des mois de travail, selon le programme, pour participer à un concours bidon. Cela coûte au gouvernement et à l'industrie du temps et de l'argent qui pourraient être mieux utilisés ailleurs.
    D'aucuns diront, comme le font certains membres de notre association, que la recherche par le gouvernement d'une démarche de source unique, une démarche PAC, si vous voulez, révèle peut-être l'existence d'un problème plus fondamental dans le processus d'approvisionnement lui-même, dans la mesure où c'est une tentative de contournement, dans le but d'obtenir l'équipement dont ont besoin les hommes et les femmes en uniforme aussi rapidement que possible pour les besoins de leur mission, c'est incontestable. Cela révèle peut-être un problème systémique d'un processus d'approvisionnement qui ne permet pas de faire ce genre d'acquisition autrement que par une approche de source unique.
    Je crois qu'il y a un autre facteur, qui est que ces statistiques sont compilées de manière très différente. Dans le système canadien, un approvisionnement par PAC est d'office considéré comme ayant été compétitif mais il peut y avoir énormément de nuances à ce sujet. Tout d'abord, il faut avoir une raison de source unique, puis publier une annonce et, d'un seul coup, comme par magie, ça devient compétitif. Les États-Unis n'ont pas le même problème.
    J'ai beaucoup apprécié votre rapport et je vous en félicite car il est très complet. À sa lecture, toutefois, je me suis dit qu'il portait sur la production de recherche opérationnelle mais qu'on n'y parlait absolument pas de l'aliénation des biens. Que va-t-on faire des machines, des biens et de l'équipement qu'on aura acheté pour 12 milliards de dollars par an pendant 20 ans, soit 240 milliards en tout, lorsque tout sera devenu désuet et non fonctionnel? A-t-on réfléchi à la manière dont on va se débarrasser de tout cela?
    Nous n'avons pas examiné cela. Ce que nous avons examiné, cependant...
    C'est pourquoi ce n'était pas là.
    Vous avez bien lu.
    Ce que nous avons vu, c'est que le Canada utilise traditionnellement ses avions, ses véhicules et ses navires plus longtemps et plus durement que pratiquement n'importe qui. Voilà pourquoi nous insistons dans notre rapport sur l'importance d'une capacité viable de soutien en cours de service. Avec le temps, l'industrie est devenue la véritable gardienne de l'équipement militaire, longtemps après que le MDN ou Travaux publics aient défini le besoin, aient organisé le concours et aient signé le contrat. L'industrie est là pour entretenir, réparer et rénover l'équipement afin de lui donner un cycle de vie utile beaucoup plus long que ce qui serait normalement requis.
    Deuxièmement, avec la rapidité du changement technologique, il y a beaucoup d'insertion de générations de technologie dans un équipement moderne, ce qui est aussi assuré par le secteur industriel. Donc, selon nous, l'industrie est beaucoup plus qu'un simple vendeur de bébelles à la Wal-Mart. C'est un opérateur direct d'équipement militaire. Il y a actuellement un système UAV en Afghanistan, de l'entraînement de vol au Canada, et de la logistique de base en Afghanistan et ailleurs, le tout géré par le secteur privé. Nous sommes des fournisseurs, des opérateurs est aussi des gardiens de l'équipement militaire pendant de longues périodes. Voilà pourquoi il est important que nous ayons une stratégie industrielle fondée non seulement sur la phase d'acquisition des grands programmes d'investissement mais aussi sur le cycle de vie utile complet. Cela dit, nous n'avons pas parlé de la phase de mise hors service.
    Merci, monsieur le président.
    Merci.
    C'est maintenant au tour de M. Wilfert.
    Merci, monsieur le président.
    Le gouvernement de Paul Martin avait attribué 15 milliards de dollars à l'armée dans le budget de 2005 pour commencer à rebâtir nos forces militaires. Le gouvernement Harper a annoncé des crédits. Maintenant, nous sommes dans une situation où l'argent devient de plus en plus rare.
    Pensez-vous que tout ceci soit réaliste? Dans la conjoncture économique actuelle, avec un déficit de plus de 56 milliards de dollars, pensez-vous que nous verrons réellement, au moins dans un avenir prévisible, une véritable stratégie de la défense Le Canada d'abord porter fruit, étant donné qu'on fait toutes sortes d'annonces mais qu'il n'y a pas de livraison de la marchandise parce qu'il n'y a plus d'argent?

  (1220)  

    C'est évidemment une question dont on discute beaucoup dans les conseils d'administration, pas seulement en ce qui concerne le marché canadien mais aussi aux États-Unis, au Royaume-Uni et ailleurs pour ceux d'entre nous qui sommes des exportateurs. En dernière analyse, c'est une question de jugement parce que nous devons placer nos paris pour employer nos gens et continuer nos activités de recherche et développement.
    Je n'essaye pas d'éviter la question, ce que je veux vraiment dire, c'est que nous ristournons. Nous examinons tous les marchés potentiels à notre disposition, tous les programmes dans lesquels nous avons une position potentielle légitime à jouer au Canada, dans tout l'éventail de ce dont nos collègues du ministère de la Défense auront besoin au cours des années, et puis nous ristournons pour la raison même que vous mentionnez, parce que nous voyons de près l'incidence des taux de change, les problèmes budgétaires, les défis économiques. Nous ne faisons pas de paris absurdes qui nous obligeraient à faire de profondes restructurations.
    Au fait, il y a actuellement une profonde restructuration en cours dans l'industrie canadienne de la défense, nonobstant les programmes très généreux que le gouvernement a mis en route ces dernières années.
    Je pose cette question dans le contexte des sociétés avec lesquelles je suis en contact — comme vous, monsieur le président — et qui me disent : « Eh bien, le processus d'approvisionnement comporte toutes sortes de contraintes juridiques et certains paramètres que nous comprenons mais on tend à mettre plus l'accent là-dessus que sur l'exécution du programme lui-même ». C'est une chose que beaucoup de vos membres semblent dire : « C'est pourquoi nos coûts augmentent. Au départ, nous dressons un budget pour x mais il y a ensuite des retards et, évidemment, ça finit par coûter y. Et même si nous tenons compte de ce qui risque d'arriver, selon nous, ça n'arrive pas. » Je suppose que ça fait partie intégrante de votre appel à une rationalisation du processus mais ça semble être une source de frustration dont me parlent continuellement certains de vos membres.
    C'est vrai et, encore une fois, ce n'est pas particulier au Canada.
    Tout simplement, le temps, c'est de l'argent. Toutes les entreprises n'ont pas nécessairement un trésor de guerre qui n'attend qu'à être investi. L'argent coûte de l'argent, tout comme quand vous prenez une hypothèque. Si le coût de votre argent se prolonge sur une très longue période, vous faites rapidement disparaître votre profit potentiel. Donc, vous démarrez dans le trou et ça ne s'améliore jamais.
    Si vous gardez ça en tête, quand nous examinons la valeur ajoutée par rapport à la valeur non ajoutée d'un processus — un processus d'approvisionnement, dans notre cas —, personne dans l'industrie ou au gouvernement ne souhaiterait jamais jeter une pièce de processus qui offre de la valeur.
    De là où nous sommes, nous voyons le processus commercial par opposition au processus gouvernemental. Nous pourrions construire le même satellite pour un client différent, avec les mêmes paramètres de risque, risques techniques, risques financiers, risques de performance, etc., et les coûts de processus pour faire ça dans le monde commercial seront considérablement moins élevés que les coûts de processus pour faire ça dans le monde gouvernemental. C'est ce qu'on entend dire constamment. Nous avons cette expérience dans le secteur privé, où nous traitons tout le temps entre nous, et le processus est donc beaucoup plus efficient.
    Par contre, ce que nous n'avons pas — il faut être juste envers le gouvernement — c'est l'obligation de rendre des comptes à un électorat. Quel est le prix? Quel est le delta?
    Oui, vous voulez trouver l'équilibre.
    Si vous étiez l'entraîneur d'une équipe de hockey, vous ne voudriez pas jouer constamment vos matches avec un joueur en moins, je suppose.
    J'essayerais de l'éviter.
    Vous voudriez un effectif complet.
    Ça dépendrait du nombre de joueurs que l'équipe adverse mettrait sur la glace au même moment.
    Si elle met six joueurs sur la glace, vous devrez probablement faire la même chose, à moins que vous ayez une pénalité. Mais la pénalité que vous semblez avoir est que nous semblons nous pénaliser nous-mêmes en termes de processus d'approvisionnement avec tous ces retards, ces coûts de valeur non ajoutée, etc.
    Êtes-vous en mesure de quantifier l'impact de cela sur votre industrie, en termes de ce que cela fait pour le processus?

  (1225)  

    Aujourd'hui, un retard dans un programme signifie que les entreprises mettent des gens à pied à un moment où le gouvernement investit dans des programmes de relance économique pour créer de l'emploi au Canada, à un moment où le gouvernement a engagé énormément d'argent sur les 20 prochaines années pour rebâtir l'armée. Nous croyons, et c'est la thèse de notre rapport, qu'il y a une occasion gagnante-gagnante pour le Canada non seulement de rééquiper son armée mais aussi de le faire de manière à développer ses capacités et à se doter d'une capacité durable.
    Dans le monde entier, des pays considèrent que leur secteur industriel de la défense est un moteur d'innovation, un moteur de technologie, de croissance technologique. Nous avons une occasion énorme, par la stratégie de défense Le Canada d'abord, de nous inspirer de ce que font nos concurrents pour arriver à la même situation gagnante-gagnante pour le Canada. Ce sera bon pour l'économie canadienne, ce sera bon pour la sécurité du Canada, et ce sera bon pour les travailleurs du savoir de l'ensemble du pays.
    Merci. Vous êtes à l'évidence un très bon entraîneur car vous avez réalisé que, si l'équipe adverse est au complet, la vôtre doit l'être aussi. Excellent.
    Merci beaucoup.
    Je donne maintenant la parole à M. Payne.
    Merci, monsieur le président.
    Merci aux témoins.
    Je reviens sur ce qu'ont dit certains de mes collègues au sujet d'une stratégie de la défense. Monsieur Stapley, vous avez parlé de la situation actuelle relative aux gouvernements, aux récessions, etc. Votre processus a consisté à faire un retour en arrière pour analyser ces choses-là afin d'essayer de voir dans quelle voie on s'en va. Est-ce le processus typique, quel que soit le gouvernement au pouvoir?
    Je crois.
    Merci.
    Certains de mes autres collègues ont parlé de stratégie industrielle et je crois que cela offrirait certains avantages. Évidemment, j'ai aussi des préoccupations à ce sujet car je me demande si nous aurions alors vraiment la concurrence dont nous avons besoin.
    Vous avez parlé de la construction navale. Potentiellement, si l'on prend tous les aspects des besoins des Forces canadiennes, qu'il s'agisse de chars d'assaut, de camions ou d'avions, vous pourriez avoir, évidemment, les logiciels d'armement de technologie avancée, etc. Envisagez-vous que tout cela vienne du Canada? Si tel est le cas, d'où viendra la concurrence? Si nous n'avons qu'une seule source, je peux envisager des ralentissements de production et des coûts énormes. Pouvez-vous m'aider à résoudre ce dilemme?
    Je vais commencer et Tim pourra compléter ma réponse.
    Nous n'avons jamais recommandé d'essayer de faire tout ce dont a besoin notre client intérieur. On ne construit pas d'avions de chasse au Canada, par exemple, et il n'y a pas de raison que l'on commence. À mon avis, nous n'en avons pas les moyens. À l'exception de l'usine de véhicules terrestres de London, nous ne construisons pas de chars d'assaut. Nous construisons des navires, ou nous en avons construit. Il faut se demander ce qui est réaliste, raisonnable et durable.
    Pour le reste, nous en revenons au modèle financier et au modèle commercial, ce qui comprend un élément très important, la concurrence. Comment obtenir la meilleure valeur? Il peut y avoir une douzaine de formes différentes de concurrence. Il peut y avoir de la concurrence pour la technologie en ouvrant les marchés et en laissant la meilleure équipe gagner. Il peut y avoir de la concurrence au niveau de la production. Il peut y avoir de la concurrence pratiquement n'importe où entre les deux.
    Il peut aussi avoir de la concurrence à pratiquement chaque niveau de la chaîne d'approvisionnement, et c'est ce que font les maîtres d'oeuvre. Il se trouve que je travaille pour une société de la défense de niveau intermédiaire et nous faisons quotidiennement concurrence à nos homologues internationaux. Il y a beaucoup de place pour la concurrence. Même après avoir choisi le maître d'oeuvre, celui-ci a l'obligation envers son client de maximiser la concurrence à chaque niveau de la chaîne d'approvisionnement, quelle que soit votre définition de la concurrence. Il y a donc des méthodes et il faut les envisager en fonction du type de produit demandé. Un navire est différent d'un ordinateur IBM, pour prendre un exemple.
    Vous savez, ce n'est pas de la mathématique quantique, il suffit de voir ce qu'il faut faire pour obtenir la meilleure valeur. Je ne recommande donc aucunement de renoncer à la concurrence mais, en même temps, je dis qu'il ne faut pas investir n'importe comment si c'est raisonnable d'attendre certains bénéfices pour le pays.
    La question que nous avons essayé d'aborder dans une partie de notre rapport est la relation entre le gouvernement et l'industrie dans le contexte de notre environnement de la défense et dans le contexte mondial. Il semble y avoir une relation de travail beaucoup plus étroite entre les gouvernements nationaux et leur base industrielle de la défense nationale du point de vue des objectifs militaires et économiques définis que ça ne semble être le cas au Canada.
    Notre argument est que nous jouons sur un marché mondial et que nous ne pouvons pas aller sur le marché mondial avec succès si nous nous imposons un handicap. Donc, dans la mesure où le gouvernement canadien identifie des capacités essentielles, des capacités industrielles essentielles, et veut avoir l'assurance d'avoir accès à ces capacités à partir de fournisseurs étrangers, dans un processus de concurrence, on a besoin de cette relation de confiance et de cette relation de responsabilité et de respect entre les parties qui, selon nous, n'existe pas actuellement. C'est ce que nous avons essayé de dire, c'est-à-dire qu'il y a une occasion réelle en ce moment de forger une nouvelle relation entre les entreprises et l'industrie, une relation débouchant sur un environnement gagnant-gagnant dans lequel les travailleurs canadiens auront la possibilité de faire du travail à valeur ajoutée pour appuyer la mission des Forces canadiennes et les objectifs économiques du gouvernement fédéral.

  (1230)  

    Vous avez parlé tout à l'heure, dans le contexte de RHDCC, des activités de R-D et du travail avec d'autres situations de type militaire. Nous avons à Medecine Hat une organisation, Meggitt Defense Systems, qui travaille la main dans la main avec ces gens-là, et vous avez parlé de complications en terme de conflits. Il faut trouver une solution pour avancer parce que j'ai entendu dire qu'il y a des problèmes lorsque Meggitt essaye de vendre de l'équipement au gouvernement alors qu'elle peut en vendre dans le monde entier.
    Brièvement.
    Oui, nous en avons entendu parler. Avoir le Canada comme premier client est un atout extrêmement important. Quand on va à l'étranger et qu'un client potentiel nous demande pourquoi nous ne réussissons pas à vendre à notre propre gouvernement, comment pourrions-nous nous attendre à ce qu'il achète chez nous?
    D'ailleurs, Meggitt est très intéressée par le secteur des véhicules aériens sans pilote, les UAV, qui ont une application non seulement militaire mais aussi commerciale, pour la surveillance des pipelines, la surveillance des territoires du Nord, etc. Donc, dans la mesure où le gouvernement identifie une capacité répondant à ces intérêts conjugués, cela ajoute de la valeur à l'économie et ajoute de la valeur à notre sécurité.
    Merci.
    Merci.
    Je donne maintenant la parole à Mme Gallant.
    Merci, monsieur le président, et merci aux témoins.
    Tout d'abord, vous parlez du document d'accompagnement de la stratégie de la défense. Dans quelle mesure devrait-il être détaillé? Il arrive un moment où, oui, nous avons énoncé notre stratégie générale pour la défense mais, avec un document d'accompagnement, il y a des questions de sécurité qui sont reliées. Dans quelle mesure vous attendez-vous à participer ou à être inclus dans un tel document?
    Nous avons dit que la stratégie de la défense Le Canada d'abord énonce de manière excellente l'intention du gouvernement de rebâtir les forces militaires, et il y a un plan d'investissement qui, si nous avons bien compris, a été adopté par le gouvernement, mais il n'y a pas d'harmonisation de ces deux documents avec des objectifs économiques et industriels pour le pays. Comme le gouvernement s'est engagé à dépenser un quart de billion de dollars au cours des 20 prochaines années, nous pensons qu'il serait cohérent de rebâtir nos forces militaires en gardant un oeil résolument fixé sur la reconstruction des forces militaires et un autre résolument fixé sur la stimulation et le développement de l'économie canadienne dans les domaines de capacité qui serviront aux besoins militaires futurs et serviront à notre économie nationale.
    Jusqu'où doit-on aller en ce qui concerne les détails? Nous ne le savons pas. Ce que nous demandons, c'est qu'il y ait au moins un engagement et une reconnaissance qu'un projet industriel est important pour le pays et qu'il doit être efficacement harmonisé avec la stratégie de la défense Le Canada d'abord et, franchement, avec les possibilités commerciales, car notre marché intérieur et nos besoins intérieurs sont relativement minimes par rapport à ceux de l'arène mondiale.
    Comment proposeriez-vous d'inclure nos forces en sciences? Nous avons nos chercheurs qui décident sur leurs projets. Pour certains, cela semble un peu aléatoire, mais harmoniser nos atouts en recherche scientifique — nous sommes des chefs de file mondiaux dans certains domaines — avec les besoins de l'industrie et de la défense...
    Totalement. C'est ce que nous demandons dans notre rapport. Nous ne serons pas concurrentiels sur les projets à faibles coûts de l'industrie de la défense. Nous devons être concurrentiels dans le domaine du savoir car, comme nous sommes un petit marché, nous avons plus de chances de devenir des fournisseurs des chaînes d'approvisionnement des grandes entreprises mondiales.
    Ces grandes entreprises ne cherchent pas de la technologie désuète. Elles ne cherchent pas des fournisseurs de deuxième ou troisième rang. Elles cherchent les meilleurs de chaque catégorie, et les Canadiens sont bien placés. Nous avons un excellent système d'enseignement stimulé par des ingénieurs et des scientifiques. Nous devrions tirer parti de cette capacité de ressources humaines pour nous concentrer sur les secteurs de l'environnement de la défense où le Canada peut être compétitif.

  (1235)  

    J'ai observé qu'aux États-Unis — c'est vrai dans le monde entier mais surtout aux États-Unis — les industries de la défense s'épanouissent à proximité des bases militaires. Ils ont reconnu qu'il y a une synergie et des économies possibles dans la maintenance de l'équipement.
    Nous avons cela à un certain degré. Nous avons Med-Eng qui fabrique des tenues antibombe. Elle se trouve à Pembroke, à une trentaine de milles de la base, à peu près. Ce sont les tenues antibombe qu'on voit dans le film Démineurs. Il y a aussi les gilets pare-éclats que portent les membres du comité lorsqu'ils vont en Afghanistan. Même Bubble Technologies, le leader mondial en détection de rayonnement, a été plus fonction de la proximité du réacteur universel de la recherche nationale et de ses scientifiques.
    Qu'est-ce que le Canada ne fait pas pour ne pas développer ses industries de la même manière? Après tout, l'industrie, c'est l'emploi, et l'emploi, c'est la devise de cette décennie au moins.
    Je réponds d'abord à ce que vous avez dit au sujet des États-Unis, c'est-à-dire de la communauté de capacité industrielle à l'extérieur des bases. Le Commandement Communications-Électronique aux États-Unis est un bon exemple car il achète pour beaucoup de branches différentes de l'armée américaine. Il a donné naissance à un excellent groupe de PME à proximité. Il parle au Département de la défense et obtient des réponses en temps réel à ses besoins, et l'industrie s'épanouit.
    Il n'y a tout simplement pas assez d'action dans nos bases pour justifier la naissance d'autant d'entreprises. Certaines le font. Les types qui fournissent des services de réparation et de remise en état sont parfois à proximité.
    La deuxième chose que vous avez mentionnée est cruciale. C'est la ligne de vision et la connectivité entre les investisseurs, les scientifiques, les industriels qui construisent les trucs, et les utilisateurs. Chacun travaille dur mais nous devons trouver un meilleur moyen pour permettre à cette collectivité de choisir ensemble les gagnants, et je ne veux pas dire aux dépens des perdants. Si nous faisons quelque chose en sciences — comme dans l'exemple de Med-Eng — et que nous allons l'acheter, faisons la connexion et obtenons-le avec un montant minimum de processus.
    Voilà ce que vous avez soulevé qui est tellement pertinent par rapport à ce que nous proposons. Comment rationaliser ça sans perdre la redevabilité, et créer des emplois localement?
    Merci.
    M. Page.
    Nous n'avons pas encore décrit de vision de ce que le pays attend de sa base industrielle de la défense. Nous n'avons pas identifié, stimulé et soutenu des champions comme vous venez d'en identifier. Nous n'avons pas identifié de stratégie, et de stratégies pouvant être utilisées pour les soutenir.
    Merci beaucoup.
    C'est maintenant au tour de M. Harris.
    Merci, président.
    Je suis désolé d'être entré et sorti à plusieurs reprises. J'ai été appelé. J'espère qu'on n'a pas encore posé mes questions, bien que j'aie certaines notes.
    Je m'intéresse à votre suggestion qu'un pourcentage fixe du budget d'investissement de la défense — vous avez dit 5 %, je crois — soit consacré à la R-D pour être géré par l'industrie. Comment cela marcherait-il? Vous demandez au gouvernement de formuler une stratégie industrielle, et le gouvernement dira : « Voici les secteurs, et ce sont les secteurs dans lesquels nous attendons de l'action ». Ensuite, vous suggérez que le gouvernement dise : « Vous décidez où la R-D se fera ».
    Cela ne risque-t-il pas d'engendrer des conflits à l'intérieur de l'industrie elle-même directement avec les concurrents ou avec d'autres? N'est-ce pas en réalité quelque chose que le gouvernement devrait décider lui-même, peut-être avec l'avis de l'industrie?

  (1240)  

    Je mentionnerai deux choses en guise de réponse à votre question.
    Notre processus de consultation nous a dit qu'il y a un déficit croissant dans la R-D du secteur privé reliée à la défense et que cela s'explique en partie par l'absence d'une stratégie industrielle qui stimulerait l'investissement du secteur privé. Il ne faut pas prendre cela à la légère. Le statu quo n'est pas une option acceptable car le monde n'attendra pas que le Canada fasse du rattrapage. Selon le secteur industriel, il est important de consacrer plus d'argent à la R-D menée par le secteur privé. La question est de savoir qui conduira l'autobus. Il faut qu'il y ait une relation entre l'industrie et le gouvernement en termes de ce qui est important mais, une fois que la décision aura été prise — et supposons que c'est co-développé et que chaque partie y met de l'argent —, la question est de savoir ce qu'on fait des résultats de cette S-T ou R-D. Qui possède la propriété intellectuelle associée? Nous pensons que la propriété de cette R-D devrait en grande mesure appartenir à des mains industrielles parce que l'industrie est mieux à même de commercialiser ce travail de R-D en capacité de produits et en services qui serviront non seulement un client militaire mais aussi un client commercial et rendront de ce fait l'entité plus concurrentielle dans l'environnement intérieur et plus prête à faire concurrence internationalement.
    Mais vous avez aussi parlé de projets dans lesquels l'industrie et le gouvernement ont co-investi et qui auraient des capacités créées par l'industrie et le gouvernement, qui les utiliseraient alors. Mais vous ne pensez pas qu'il devrait avoir un partage de la propriété intellectuelle?
    Quand une technologie est co-développée, chacun détient un intérêt. La question est de savoir pour quel usage, quel usage final? L'utilisateur final aura évidemment besoin d'avoir accès et de comprendre cette technologie, comme le disait M. Stapley un peu plus tôt, mais c'est aussi le cas du secteur privé de façon à pouvoir maintenir son rôle de gardien de l'équipement militaire et de façon à pouvoir continuer son évolution de la technologie pour appuyer les besoins militaires futurs et les possibilités commerciales, deux éléments qui contribuent à une entreprise privée plus compétitive.
    Jusqu'où êtes-vous allés dans l'identification ou la suggestion de secteurs particuliers ou d'expertise qui pourraient être selon vous les prémisses d'une stratégie industrielle pour le Canada?
    Le rapport est relativement timide à ce sujet, mais seulement parce qu'il eût été présomptueux de la part de notre organisation de suggérer où le gouvernement devrait aboutir. Ce que nous demandons, c'est un dialogue, un engagement envers une stratégie industrielle de la défense et ensuite un dialogue pour contribuer à son élaboration.
    Cela dit, il existe dans ce pays des champions évidents qui appuient les besoins militaires et appuient l'économie intérieure. Il serait peut-être bon de commencer avec eux. Il faudrait analyser ce qui est unique dans les besoins du Canada, que ce soit dans le Grand Nord, que ce soit dans l'environnement maritime ou à nos frontières terrestres, ou dans notre appui croissant à des efforts internationaux de maintien de la paix dans des États déchus ou en déchéance. Il y a un certain nombre de domaines que le gouvernement pourrait retenir, pour répondre à votre question, mais les joyaux de la couronne dans l'industrie de la défense pendant les 15 années à venir sont dans l'électronique.
    Merci.
    Je donne la parole à M. Hawn.
    Merci, monsieur le président.
    Je n'ai que trois ou quatre questions relativement courtes.
    Travaux publics a créé en 2008 un poste d'ombudsman de l'approvisionnement. Vos membres auront-ils eu affaire à lui? Si oui, quelles ont été leurs réactions?
    Nous n'avons pas eu de réactions particulières à ce sujet. Si vous examinez le genre de besoins dont cet ombudsman pourrait être saisi, par rapport à ceux qui pourraient être portés devant le Tribunal canadien du commerce international — ou devant les tribunaux si l'on invoquait une exception de sécurité nationale —, ils ne se situent pas réellement dans le genre de zone d'acquisition d'équipement auquel la plupart de nos membres s'intéressent.

  (1245)  

    Bien. Merci.
    Le gouvernement s'efforce d'intégrer des incitatifs positifs aux contrats, des carottes plutôt que des bâtons. Qu'en pensez-vous? Avons-nous besoin des deux? La méthode de la carotte et du bâton est-elle appropriée? Comment pensez-vous que cela évoluera à l'avenir?
    Je crois que la réponse est oui car c'est une question de degré et, tant qu'il y a un équilibre et un risque et une récompense, très bien. L'industrie se doit de rendre compte de son rendement. Je ne pense pas que cela puisse être contesté. Nous demandons simplement qu'il y ait un équilibre dans les équations de gestion du risque. Donc, oui, on peut employer la carotte et le bâton.
    Ma dernière question, et je l'ai gardée pour la fin parce que je tenais vraiment à ce que la réponse soit au procès-verbal, concerne la stabilité du financement. Nous avons parlé de la stratégie industrielle de la défense, de questions de financement, etc. Je ne sais pas quelle sera votre réponse mais je me dois de vous poser la question : quelle est l'importance, selon vous, pour la stratégie industrielle de la défense, pour l'avenir de nos capacités de défense, pour l'avenir de nos capacités industrielles, d'avoir un financement stable à long terme et adéquat?
    Je pense que c'est important à deux égards. Du point de vue approvisionnement, je pense que c'est évident, nous pouvons planifier nos effectifs, le niveau d'emploi, nous pouvons planifier nos investissements, nos gens et notre technologie et ensuite, parce que nous sommes prudents, nous pouvons appliquer un petit taux d'escompte de façon à ne pas devoir subir de traitement de choc, ce que nous essayons d'éviter. C'est une chose très difficile à faire, comme vous le savez, quand il faut dégraisser.
    La stabilité du flux d'investissement est importante mais nous sommes réalistes. Nous devons tenir compte de la situation du gouvernement. C'est là que la communication et la transparence sont importantes. Pourquoi la stratégie industrielle est-elle importante dans ce contexte? On peut dire, dans une certaine mesure, que c'est ce qui nous permet de nous lever et de dire que nous avons créé tant de milliers d'emplois, que nous avons fait avancer le moteur de la technologie par un facteur de deux ou de trois, et que nous nous sommes positionnés pour exploiter les marchés suivants avec des exemples très précis à cause de la stratégie de RIR associée à un programme ou, mieux encore, une stratégie industrielle. Je pense que cela facilite un peu les choses pour les compromis très difficiles que le gouvernement doit faire entre les programmes sociaux et l'approvisionnement de la défense, par exemple. En ce sens, je pense que cela aidera certainement à stabiliser dans une certaine mesure le flux d'investissement, ce qui nous est certainement utile, afin qu'il y ait au moins une relativité indirecte entre ce que nous recommandons et la capacité du gouvernement de le mettre en oeuvre, pour que nous ne retombions pas dans une autre situation de recherche et de sauvetage à aile fixe, où tout le monde avait raison mais voyez où nous en sommes.
    Je vais poser ma question un peu différemment. Il y a différents éléments qui contribuent au succès et qui permettent d'arriver là où on veut. Pouvons-nous arriver là où nous voulons sans un financement stable à long terme?
    Si je voulais plaisanter, je demanderai ce que nous voulons faire. Si notre objectif est de rééquiper l'armée et si la stratégie est d'acheter du matériel de série à l'étranger, ce qui n'offrira qu'un bénéfice probablement marginal à l'économie canadienne et sur le plan des emplois du savoir, nous disons dans notre rapport que ce serait passer à côté d'une occasion et que ce ne serait pas un grand succès. Ce qui est fondamental, c'est l'engagement à long terme prévisible et stable qu'a pris le gouvernement de rééquiper l'armée. C'est en soi un bon point de départ mais ce n'est pas suffisant pour que notre organisation puisse crier victoire. Nous pourrons crier victoire quand cet engagement de financement sera harmonisé avec des objectifs industriels permettant un environnement gagnant-gagnant à la fois pour les militaires et pour l'économie.
    Je vous comprends parfaitement mais le financement à long terme prévisible et stable en est un élément crucial.
    Une voix: Dites-lui oui.
    M. Timothy Page: Oui.

[Français]

    Merci beaucoup. Je tiens à remercier nos témoins d'avoir participé à nos travaux. C'est grandement apprécié par nous tous, membres du comité.
    Cela met fin à notre 13e séance du Comité permanent de la Défense nationale. Merci et bonne journée.
    La séance est levée.
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