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SDIR Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Sous-comité des droits internationaux de la personne du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international


NUMÉRO 008 
l
2e SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 15 avril 2008

[Enregistrement électronique]

  (1305)  

[Traduction]

    Je déclare la séance ouverte. C'est la huitième séance du Sous-comité des droits internationaux de la personne et du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international.
    Aujourd'hui nous accueillons deux groupes de témoins. Firoze Manji du Kenya, et un autre groupe de trois témoins des Philippines.
    Je veux m'excuser d'avance auprès de nos témoins. Vous êtes ici pour discuter de questions très sérieuses. Nous apprécions votre présence et bien que ce ne soit certainement pas de votre faute et nous l'espérons, pas de la nôtre non plus, nous n'avons que très peu de temps à notre disposition.
    Ce que je propose de faire, et le comité s'est entendu là-dessus, serait de commencer par M. Manji et puis, après une demie heure, passer à la délégation des Philippines. Cela ne vous laisse certainement pas autant de temps que vous le méritez. C'est simplement une contrainte qui nous est imposée.
    M. Manji a fourni son exposé écrit à notre greffier. Malheureusement, il n'a pas encore été traduit, et en vertu de notre Règlement, nous ne pouvons pas le distribuer en ce moment. Nous le ferons traduire et il sera distribué demain ou après demain par courrier à tous nos membres, qui auront alors la chance de le lire.
    Sur ce, Monsieur Manji, je vous invite à commencer. Je ne suis pas certain si on vous l'a mentionné, mais nous espérons que votre exposé sera assez bref pour permettre aux députés de poser quelques questions. Je vous cède la parole. Vous connaissez mieux que nous la cause que vous défendez, donc je vous prie de commencer. Merci.
    Je vous prie de nous excuser de n'avoir pas eu le temps de faire traduire notre déclaration en français.

[Français]

    Je m'excuse de ne pas parler très bien le français. Au Kenya, on ne parle même pas très bien l'anglais.

[Traduction]

    Je vous suis très reconnaissant de me donner l'occasion de témoigner. Je prends la parole devant vous à titre de commentateur politique sur le Kenya et aussi de membre du groupe Kenyans for peace through truth and justice (les Kenyans pour la paix par la vérité et la justice), une coalition d'associations de défense des droits civils du Kenya. Cependant, je parle en mon nom personnel et non pas au nom de la coalition.
    Mesdames et messieurs, plus de 1 000 personnes ont été tuées ces trois derniers mois au Kenya. Plus de 600 000 personnes ont fui leurs maisons, poussées par la peur, à cause des actes de violence commis contre elles par une milice armée à motivation politique et à cause des actes commis par l'État, notamment la police et les groupes paramilitaires de la présidence, l'unité des services gouvernementaux.
    Ce matin, les États-Unis d'Amérique ont annoncé qu'ils accueillaient favorablement la formation d'un gouvernement de coalition qui compte 43 ministres. Ce cabinet d'une importance démesurée coûtera extrêmement cher au pays. D'après une estimation publiée ce matin, les salaires et dépenses de ces 43 ministres coûteront au pays environ 80 p. 100 du budget national du Kenya, qui a été approuvé l'année dernière et qui s'élève à 10,2 milliards de dollars.
    Je m'inquiète de voir la communauté internationale se précipiter pour reconnaître ce gouvernement. Soyons clairs: nous avons un gouvernement qui a été formé par une personne qui est clairement, d'après ce qu'indiquent les faits, responsable d'avoir mené à bien un véritable coup d'État civil au Kenya, un homme qui s'est emparé du pouvoir -- un peu comme Mugabe essaie de le faire aujourd'hui au Zimbabwe -- en manipulant les votes. Mwai Kibaki a également pris le pouvoir en truquant les résultats électoraux. Il dirige le gouvernement à titre de président usurpateur et il n'a aucun mandat populaire lui permettant d'occuper ce poste.
    Sa simple présence au pouvoir tourne en ridicule le processus électoral auquel les citoyens ont participé, un processus électoral qui a été en très grande partie pacifique, bien mené, et auquel ont prit part près de 70 p. 100 des électeurs. L'acceptation du nouveau gouvernement par le Canada revient essentiellement à accepter l'impunité pour les crimes de manipulation électorale et d'avoir effectué un coup d'État.
    Le gouvernement du Kenya a fait semblant d'accepter la tenue d'une enquête judiciaire indépendante sur le tripotage électoral. Il ne prévoit aucunement désarmer les milices ni amener devant la justice ceux qui ont commis des meurtres extrajudiciaires.
    Des milliers de femmes ont été violées. Le centre des femmes de l'hôpital de Nairobi était surpeuplé et il a fallu ouvrir de nombreux centres de crise un peu partout dans le pays pour accueillir les femmes qui avaient été violées. Personne ne dit mot quant à ce qui sera fait pour traduire devant les tribunaux les responsables de ces crimes.
    Bien que le gouvernement actuel ait pris verbalement l'engagement de créer une commission d'enquête sur les crimes commis dans la province de la vallée du Rift, où des gens ont été chassés de leurs terres, il est improbable que cela se fasse, étant donné que le gouvernement précédent était lui-même un gouvernement de coalition formé exactement des mêmes personnes qui constituent le gouvernement actuel, n'avait pas lui non plus mis sur pied cette commission. En fait, une enquête avait été établie, mais l'actuel président Mwai Kibaki lui avait interdit de mener ses travaux. Il n'y a absolument aucun plan prévoyant le retour en toute sécurité des 600 000 personnes déplacées.

  (1310)  

    Nous craignons que les gens se dépêcheront d'accepter la formation de ce gouvernement de coalition. À notre avis, un gouvernement provisoire est certainement nécessaire -- un gouvernement provisoire qui comprend tous les différents partis politiques et tous les acteurs politiques -- pour mettre sur pied un gouvernement qui superviserait, dans le cadre d'un mandat limité de peut-être un an ou 18 mois, et traduirait en justice les responsables des meurtres, ferait enquête sur les causes du trucage électoral et superviserait la tenue de nouvelles élections présidentielles.
    Beaucoup soutiennent que nous ne voulons pas voir de nouvelles élections au Kenya parce que celles-ci ont engendré la violence. Je voudrais rappeler aux membres du comité que les élections elles-mêmes ont été extraordinairement pacifiques. C'est seulement après que le coup d'État a eu lieu, après que Kibaki ait annoncé qu'il avait gagné les élections, que des actes de violence ont été commis au Kenya. Même l'Union européenne, dans le cadre de ses missions internationales d'observateur, a signalé que les élections, pour autant que les observateurs pouvaient en juger, avaient été bien tenues, et c'est seulement après que l'on ait tripoté les résultats que la violence a éclaté.
    Je recommande à votre comité de veiller à ce que le Canada fasse preuve de prudence dans sa reconnaissance du gouvernement actuel. Il devrait être perçu seulement comme un gouvernement provisoire. Le Canada devrait exiger que le gouvernement kényan dise clairement comment il va réagir aux violations généralisées des droits de la personne, y compris les crimes contre l'humanité qui, d'après Human Rights Watch, ont été commis dans la région de Mount Elgon.
    Le Canada doit également faire preuve de prudence en dispensant son aide humanitaire, étant donné qu'une grande partie de cette aide risque d'être utilisée entièrement pour financer les postes ministériels. J'espère que le Canada adoptera une position selon laquelle ses relations avec le gouvernement actuel dépendent du respect des principes de démocratie, de bon gouvernement et des droits de la personne. Si le gouvernement actuel est reconnu comme gouvernement permanent, c'est une violation des engagements du Canada envers les principes de bon gouvernement, étant donné que le président lui-même s'est emparé du pouvoir par un coup d'État.
    Je vais m'en tenir là pour l'instant. Je suis prêt à répondre aux questions.

  (1315)  

    Merci, monsieur Manji.
    Voici comment nous allons procéder. Je vais donner la parole à un député de chacun des quatre partis ici présents pour poser des questions. S'ils posent tous leurs questions de façon concise, cela devrait vous laisser assez de temps pour répondre et nous pourrons leur donner la parole à tous.
    Monsieur Silva.
    Monsieur le président, nous avons convenu que M. Dhaliwal serait le premier à poser des questions.
    Oh!, désolé.
    Monsieur Dhaliwal, je vous en prie.
    Merci, monsieur le président.
    Je vous souhaite la bienvenue, monsieur Manji.
    Vous avez évoqué le pogrom au Kenya. Vous avez également dit que notre gouvernement ne devrait pas reconnaître ce gouvernement. Y a-t-il quelque chose d'autre?
    Au Canada, nous sommes un pays multiculturel au vrai sens du terme. Je crois savoir que la plupart des gens qui ont été touchés au Kenya sont nés dans ce pays, mais qu'ils n'étaient pas nécessairement considérés comme des Kényans. Comment composer avec cette situation? Ce problème comporte-t-il un élément racial?
    Je ne suis pas sûr d'avoir compris votre question, monsieur.
    Pensez-vous que c'est seulement un conflit entre tribus? Voilà ce que je veux découvrir.
    Je pense qu'il importe que le comité reconnaisse qu'au Kenya, il y a deux grands partis principaux, le PNU et l'ODM. Le PNU est le parti de Mwai Kibaki, qui est un Kikuyu. Quelque 23 p. 100 de la population du Kenya est Kikuyu. L'ODM est dirigé par Raila Odinga, qui est de la tribu Luo. Seulement 13 p. 100 des Kényans sont des Luo; cependant, les résultats des élections parlementaires et présidentielles indiquent qu'environ 50 p. 100 des électeurs Kényans ont voté pour le PNU -- le soi-disant parti Kikuyu -- et 50 p. 100 ont voté pour le soi-disant parti Luo.
    On aura beau jongler avec les chiffres, il est impossible de démontrer que l'électorat kényan a voté selon l'appartenance tribale. Loin de là; pour la première fois dans l'histoire, l'électorat a voté en fonction des enjeux et non pas sur une base tribale.
    Ce qui s'est passé depuis, c'est qu'il y a eu une flambée de violence. Cette violence a eu trois causes. Premièrement, la violence initiale spontanée contre l'annonce que Kibaki s'était emparé du pouvoir, mais les deux autres principales sources de violence doivent être bien comprises.
    Premièrement, la violence est le fait de milices armées à motivation politique qui sont financées par des gens de part et d'autre. Aucun des deux partis n'a les mains propres à cet égard. Les milices ont pour but d'attaquer les gens d'une tribu en particulier, de manière à donner l'impression qu'il s'agit d'une guerre tribale.
    En pratique, cela ne reflète pas du tout les résultats électoraux. Ils ont essayé de déclencher une guerre tribale.
    Ces gens-là ne sont pas désarmés. Ce matin, on a appris au bulletin de nouvelles que six personnes ont été brûlées vive à Kibera. Plusieurs personnes ont encore été tuées aujourd'hui, après l'annonce de ce nouveau gouvernement de coalition. Il y a là-bas des gens qui s'efforcent de créer un conflit tribal. Le véritable danger est que s'ils jouent avec le feu assez longtemps, nous finirons par être plongés dans une guerre civile selon une ligne de fracture tribale. Je pense que c'est encore une possibilité.
    Le principal argument que je veux vous transmettre, honorables sénateurs, est que la solution actuellement présentée comme permanente, sous forme de ce gouvernement de coalition, n'est pas une solution permettant d'éviter ou de prévenir une guerre civile alors même que le Kenya est au bord de l'abîme.

  (1320)  

    Monsieur le président, je m'adresse à M. Manji par votre entremise: comment nous, Canadiens, comment le gouvernement canadien représentant la population du Canada peut-il intervenir, sauf en refusant de reconnaître le gouvernement actuel? Et au sujet de l'aide humanitaire, que peut-on faire pour ces 600 000 personnes qui se sont enfuies et pour les familles des plus de 1 000 personnes qui ont été tuées? Je crois savoir que des entreprises sont également menacées.
    Que pouvons-nous faire d'autre? Pouvons-nous accepter davantage de réfugiés? Il pourrait y avoir des gens qui voudraient émigrer au Canada. Pouvons-nous accélérer le traitement de leur demande? Que suggérez-vous? Avez-vous quelque chose à nous proposer?
    Je pense qu'un élément essentiel serait de mettre l'accent sur les principes du bon gouvernement et des droits de la personne.
    La communauté internationale, y compris le Canada, a été généreuse en apportant son aide humanitaire face à la crise provoquée par les personnes déplacées à l'intérieur. Cependant, je pense que ce que le Canada doit dire, c'est que si la situation perdure, alors le gouvernement kényan a l'obligation de garantir le retour en toute sécurité de ces personnes déplacées qui veulent rentrer chez elles.
    Pour que cela arrive, il faut que les responsables, les milices soient désarmés et que ceux qui sont responsables d'avoir perpétré les meurtres et chassé les gens de chez eux soient traduits en justice.
    Je pense que le Canada a un rôle très important à jouer en défendant les principes du bon gouvernement, de la démocratie, des droits de la personne.
    Malheureusement, monsieur Dhaliwal, étant donné nos contraintes de temps, nous devons passer au suivant. Merci.
    Madame Bourgeois.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Bonjour, monsieur Manji. Je trouve épouvantable que le Kenya ait à souffrir davantage qu'il a souffert ces dernières années. Je suis allée au Kenya et j'ai vu la pauvreté du peuple.
    Tout d'abord, j'aimerais savoir d'où proviennent les 600 000 personnes évacuées. Viennent-elles de ces fameux dépotoirs où elles vivaient, du nord ou du sud du Kenya?

[Traduction]

    Je ne suis pas certain d'avoir tout à fait compris la question; je vous demande pardon. Auriez-vous l'obligeance de répéter?

[Français]

    Oui. J'ai visité le Kenya et je trouve épouvantable de voir que ce peuple souffre encore. Il est pris dans une situation pratiquement militaire. Je m'interrogeais au sujet des 600 000 personnes qui ont été évacuées. D'où viennent-elles?
    Au moment où j'y suis allée, il y a deux ans et demi, 97 p. 100 de la population était extrêmement pauvre. Trois pour cent de la population mangeait trois repas par jour ou mangeait, à tout le moins. Je me demande d'où viennent exactement ces 600 000 personnes. Viennent-elles du nord, du sud, de ces dépotoirs dans lesquels elles vivaient?

  (1325)  

[Traduction]

    Merci.
    La majorité des 600 000 personnes viennent de la région connue sous le nom de province de la vallée du Rift. C'est dans cette région que les milices armées ont perpétré la plus grande partie des actes de violence. Il est intéressant de constater que dans d'autres régions du pays, même dans le Nord-Est, dans certaines des provinces les plus pauvres du pays, même sur la côte, il n'y a pratiquement pas de personnes déplacées. Et la raison en est qu'il n'y a pas de milice armée là-bas.
    Le problème a été créé par ces milices armées. Il n'y a pas de guerre tribale; ce sont les milices armées qui créent les troubles.
    Vous avez raison d'évoquer l'inégalité des revenus. Au cours des 20 dernières années, les riches sont devenus extrêmement riches et les pauvres ce sont enfoncés dans la pauvreté. Aujourd'hui, le revenu réel moyen est plus bas qu'au moment de l'indépendance.

[Français]

    Des ONG canadiennes font un excellent travail sur le territoire du Kenya. On peut ajouter l'ACDI, qui y était très présente il y a quelques années, lorsque j'y suis allée. Qu'en est-il de ces ONG actuellement? Ont-elles maille à partir avec le gouvernement militaire en place? En les aidant davantage, on pourrait contribuer à assainir les conditions de vie des Kényans.

[Traduction]

    Les ONG canadiennes ont une longue tradition de soutien au Kenya. Nous avons toujours eu de très étroites relations avec elles. Au fil des années, elles ont été extraordinaires sur le plan de leur appui envers la société civile, de leur soutien aux soins de santé, de leur soutien dans le domaine des droits de la personne.
    Je pense que les travailleurs humanitaires sont exposés aux dangers quand ils travaillent dans de telles situations, mais je pense qu'aucun d'entre eux, au cours de la dernière période, depuis six mois, n'a vu sa vie directement menacée. Je me trompe peut-être, mais que je sache, il n'y en a pas eu un seul. Je pense que le Canada peut donner un appui très solide à notre pays, en particulier dans le domaine de la justice et des droits de la personne.

[Français]

    J'ai une dernière question, monsieur Manji.
    Soyez brève, s'il vous plaît.
    Sur le territoire du Kenya, y a-t-il des compagnies canadiennes, qu'elles soient commerciales ou minières? Si oui, auriez-vous la gentillesse de déposer à ce comité le nom de ces compagnies et d'indiquer dans quel secteur elles oeuvrent, de sorte que l'on puisse peut-être intervenir auprès du gouvernement militaire, le nouveau gouvernement en place, au lieu de le faire auprès de la population?

[Traduction]

    Je voudrais bien pouvoir le faire, mais je n'ai pas les noms sous la main. J'aurais dû venir mieux informé. Je me ferai un plaisir de communiquer avec vous plus tard et de vous envoyer tous les détails sur ces compagnies.
    Merci.
    Je voudrais simplement vous signaler, monsieur Manji, que si vous êtes en mesure d'envoyer des documents, n'hésitez pas et faites-les parvenir au greffier. Ce dernier veillera à les faire distribuer à tous les membres du comité.
    Monsieur Marston, je vous prie.

  (1330)  

    Je serai bref, car je crois que nous n'avons presque plus de temps.
    Il est important de ne pas reconnaître le gouvernement actuel à cause de la manière dont il est arrivé au pouvoir. Si j'ai bien compris, vous voulez qu'on examine les fonds de l'ACDI qui sont dépensés là-bas.
    Au cours d'une réunion précédente, j'ai entendu dire qu'une partie de cet argent se retrouve entre les mains des membres du congrès ou des députés. Il y a de quoi frémir, surtout quand on songe à ce qui s'est passé dans ce pays.
    Outre cela, vous avez parlé de désarmer les milices. D'après vous, qui pourrait s'en charger et le Canada pourrait-il jouer un autre rôle quelconque, à votre avis?
    Merci.
    Je pense que les forces armées pourraient se charger de désarmer les milices, mais il faudrait que ce soit fait en présence d'observateurs internationaux, parce qu'il est apparu clairement que, dans la région de Mount Elgon, où l'armée est allée pour désarmer un groupe de miliciens, les soldats se sont livrés en toute impunité à des massacres de grande envergure. L'armée du Kenya a massacré des gens, des civils aussi bien que les soi-disant membres de cette milice.
    Human Rights Watch a publié il y a 10 jours un rapport dans lequel on documente les crimes contre l'humanité qui ont été perpétrés.
    Il doit y avoir un moyen de recourir aux forces internationales ou aux forces armées de l'Union africaine pour superviser le désarmement. Le désarmement n'est pas une tâche facile.
    Merci.
    Monsieur Sweet, je vous prie.
    Je serai aussi bref que possible, quoique nous pourrions poursuivre longtemps notre conversation, étant donné les énormes préoccupations suscitées dans ce pays depuis longtemps.
    Vous avez dit que le PNU est dominé par les Kikuyus. Quel pourcentage de la population cette tribu représente-t-elle?
    Le PNU n'est pas dominé par les Kikuyus. Ses dirigeants sont essentiellement des membres de la tribu Kikuyu.
    Les Kikuyus représentent seulement 23 p. 100 de la population du Kenya.
    Seulement 23 p. 100.
    J'ai deux questions. Premièrement, vous avez dit que le modus operandi consiste à inciter à la guerre civile. Insinuez-vous que l'on fait cela strictement à des fins de camouflage, seulement pour conserver le pouvoir? J'essaie de comprendre pour quel motif on voudrait déclencher cette guerre.
    Deuxièmement, au sujet des élections, vous avez dit qu'elles ont été pacifiques et bien tenues. Pouvez-vous m'indiquer des documents précis sur lesquels nous pourrions mettre la main et qui démontrent comment elles ont été truquées, autrement qu'en jonglant avec les chiffres comme vous l'avez déjà dit?
    Premièrement, je pense qu'il faudrait tenir une enquête pour comprendre quels sont exactement les motifs des gens qui se livrent à cette incitation, mais il n'y a aucun doute que les groupes de milice armés ciblent des groupes de gens en particulier pour s'en débarrasser, pour les expulser d'une région en particulier.
    Ce sont des conjectures de ma part, mais je pense que la raison en est que ce sont souvent des régions où il y a pénurie de terres et où l'on peut avoir accès à des terres très lucratives. Si un député au Parlement ou un politicien peut offrir à sa clientèle un meilleur accès aux propriétés, cela incite fortement les gens à appuyer ce politicien à l'avenir. C'est la première raison.
    Les élections ont été remarquablement pacifiques. Je recommande au comité de lire le rapport de la mission d'observateurs de l'Union européenne, ainsi que l'analyse postélectorale faite par la Commission nationale des droits de la personne du Kenya, que l'on peut se procurer dans les deux cas sur leurs sites Web respectifs.
    Si vous examinez ce qui s'est passé, le 27 décembre, les élections ont eu lieu. Le scrutin a pris fin ce soir-là. Dans toutes les circonscriptions sans exception, dans chacun des 70 000 bureaux de scrutin, il y avait des gens de tous les partis. Chacun d'eux a ratifié les résultats. Chacun d'eux a tenu et conservé des dossiers. Même la police a tenu des dossiers sur le déroulement du vote et a consigné les résultats définitifs au niveau des circonscriptions. Ces résultats ont ensuite été transmis par télécopieur ou d'autres moyens à la Commission électorale du Kenya, au Kenyatta International Conference Centre à Nairobi.
    Le 29 décembre, aucun résultat n'avait été annoncé. Des rumeurs circulaient sur certains agissements. Ces rumeurs ont été confirmées quand l'unité de services gouvernementale, la force paramilitaire qui relève exclusivement du président, s'est emparée de ce secteur de Nairobi, a vidé l'immeuble, a complètement exclu tous les observateurs internationaux et a exclu tous les représentants des partis d'opposition qui s'y trouvaient et qui avaient le droit d'être observateurs à la Commission électorale. Cela fait, le président de la commission est allé à la télévision pour annoncer que Mwai Kibaki avait remporté les élections.
    On soupçonnait fortement qu'il s'était passé quelque chose de louche. Ce soupçon a été confirmé 24 heures plus tard quand un fonctionnaire du Parlement qui avait été détaché à la Commission électorale a pris la parole lors d'une conférence de presse télévisée et a déclaré que les résultats annoncés par le président de la Commission électorale du Kenya ne correspondaient pas aux résultats réels.
    Vingt-quatre heures plus tard, quatre commissaires de la Commission électorale qui avaient tous été nommés par Mwai Kibaki ont également courageusement pris la parole et, lors d'une conférence de presse, ont annoncé que ces résultats avaient été manipulés, que les résultats qu'on avait annoncés n'étaient pas les résultats réels.
    Depuis lors, M. Kivuitu, qui est le président de la Commission électorale, a également reconnu que ce qu'il avait annoncé ne correspondait pas aux résultats réellement obtenus. 

  (1335)  

    Monsieur Manji, nous vous remercions d'être venu. Nous nous excusons de ne vous avoir consacré qu'un temps limité. Merci de nous avoir éclairés.
    Merci beaucoup pour votre temps.
    J'invite maintenant notre prochain groupe de témoins à prendre place.
    Nous nous excusons auprès de nos témoins des Philippines pour notre retard. Nous n'avons pas eu accès à la salle à l'heure prévue. J'ai l'intention de poursuivre la réunion un peu au-delà de l'heure prévue; ainsi, au lieu de terminer à 14 heures, nous irons jusqu'à 14 h 10. Cela donnera aux députés le temps d'aller à la Chambre des communes, même s'ils doivent s'y rendre à la course, tout en vous laissant une période convenable pour faire votre exposé.
    Ce groupe a exactement 30 minutes à sa disposition. Pour s'assurer qu'il y ait suffisamment de temps pour un tour de questions de la part de chacun des partis, je vous suggère de tenter de vous en tenir à 20 minutes. Cela nous donnera 10 minutes pour les questions et réponses, et je serai beaucoup plus strict que la première fois pour ce qui est de faire respecter les délais.
    Cela dit, je souhaite la bienvenue à nos témoins et je les invite à faire leur exposé.
    Honorable président et membres du Sous-comité des droits de la personne, bonjour.
    Nous, membres de la Chambre des représentants des Philippines comparaissons devant vous afin de vous demander de nous aider à exhorter le gouvernement canadien à exercer plus de pressions sur le gouvernement des Philippines pour mettre fin aux exécutions extrajudiciaires et aux disparitions forcées dans notre pays.
    Nous comparaissons devant le comité à la fois à titre de représentants des victimes et à titre de victimes de persécution politique et de violation des droits de la personne de la part du gouvernement Arroyo.
    Depuis sept ans que Gloria Macapagal-Arroyo est au pouvoir, il y a eu presque 900 exécutions extrajudiciaires et 190 disparitions forcées. Parmi les 900 personnes qui ont été exécutées, 226 étaient membres des trois partis politiques que nous dirigeons et que nous représentons au Congrès. Nous, les représentants élus, avons été accusés de faux crimes, notamment de rébellion, accusations qui ont été à juste titre rejetées par la Cour suprême. D'autres accusations sont cependant toujours en attente de jugement devant des tribunaux inférieurs.
    Les victimes d'exécutions extrajudiciaires sont des activistes bien connus, notamment des travailleurs, des paysans, des étudiants, des femmes, des Autochtones, des petits salariés et des journalistes.
    Deux rapports de recherche des faits ont été présentés au gouvernement des Philippines et aux Nations Unies. Les deux rapports font des recommandations au gouvernement quant à la façon de mettre fin aux exécutions; cependant, le gouvernement Arroyo n'a donné suite à aucune de ces recommandations.
    Un rapport plus définitif a été préparé par Philip Alston, rapporteur spécial de Nations Unies. Le rapport attribue directement les exécutions et les violations des droits de la personne aux forces armées des Philippines et à son programme anti-insurrectionnel intitulé Oplan Bantay Laya, ou « operation freedom watch ». Le professeur Alston recommande le retrait des exécutions extrajudiciaires en tant qu'élément de ce programme.
    La présidente Arroyo est à l'origine du programme. L'an dernier, elle a ordonné la pleine mise en oeuvre de Oplan Bantay Laya d'ici 2010, lorsque son mandat prendra fin. Le programme anti-insurrectionnel met en oeuvre l'aspect militaire du plan de sécurité interne nationale, ou PSI, qui est également approuvé par la présidente. Ce plan combine les campagnes militaires pour assurer la paix dans des zones de conflit et la réduction de la pauvreté et les objectifs de développement. Il faut souligner que l'ACDI finance ces efforts de construction dans le Mindanao qui est touché par des conflits.
    L'administration Arroyo a obstinément refusé d'assumer la responsabilité et d'agir de façon décisive pour mettre fin aux exécutions politiques et pénaliser ceux qui en sont directement responsables. C'est pourquoi il est important pour nous de demander l'appui du Canada afin que ce dernier suive l'exemple de l'Union européenne et prenne des mesures définitives pour persuader le gouvernement des Philippines de mettre fin aux exécutions.
    Je vais demander à mon collègue de présenter son témoignage.
    Merci, monsieur le président.

  (1340)  

    Merci.
    Je représente le Parti Anakpawis, soit le Parti des travailleurs et des paysans au Congrès des Philippines, un parti qui est ciblé à l'heure actuelle dans notre pays par les exécutions extrajudiciaires et les violations des droits de la personne.
    La répression des syndicats a entraîné l'exécution extrajudiciaire de 87 membres et dirigeants syndicaux; 29 ont été torturés; et un certain nombre de nos membres ont disparu. Il y a eu au total 1 272 cas de violation du droit du travail, notamment des politiques systématiques antisyndicales et antigrèves, des mesures antisyndicales, la dispersion violente de grévistes et le licenciement illégal de travailleurs en grève.
    J'ai moi-même été victime de fausses accusations de rébellion. J'ai passé 16 mois en prison immédiatement après que la présidente Gloria-Macapagal-Arroyo ait déclaré l'état d'urgence nationale en 2006. J'ai été libéré lorsque la Cour suprême des Philippines a retiré les accusations de rébellion contre moi. Cependant, l'accusation de sédition a été maintenue et la persécution de mes collègues du Parti Anakpawis se poursuit.
    Nous sommes ici pour demander votre appui et votre intervention. Le Canada offre un soutien à la formation de la police et des militaires aux Philippines. Cet été, le Canada formera 12 officiers de rang intermédiaire des forces militaires philippines ici.
    Le Canada offre une aide au développement aux Philippines à raison d'environ 14 millions de dollars par an, ce qui représente la huitième plus grande contribution officielle d'aide au développement pour le pays. Environ 60 p. 100 des fonds de l'ACDI servent à financer des projets à Mindanao où une insurgence musulmane est active depuis les dernières décennies. Nous avons de bonnes raisons de croire que les fonds canadiens sont utilisés dans des campagnes de sécurité interne du gouvernement Arroyo, notamment dans le cadre du plan national de sécurité intérieure. Nous aimerions que votre comité examine la question et s'assure que le Canada n'est pas complice ou ne contribue pas aux violations des droits des Philippins.
    L'an dernier, le gouvernement des Philippines a adopté la Loi sur la sécurité de l'homme. Le gouvernement Arroyo continue d'utiliser la guerre contre le terrorisme pour faire taire la dissidence, transformant des actes légitimes de protestation en des crimes punissables par une peine d'emprisonnement de 40 ans.
    Les groupes de sociétés civiles internationaux et les gouvernements tiennent le gouvernement Arroyo responsable et exigent qu'il mette fin aux exécutions extrajudiciaires. L'Union européenne, les gouvernements de la Finlande, de l'Espagne, de la France et du Japon ont tous publié des déclarations de préoccupation ou de condamnation pure et simple. Je vous demande de prendre une position ferme de principe contre les violations des droits de la personne à l'égard des Philippins.
    Je vous remercie.

  (1345)  

    Merci.
    Depuis qu'Arroyo a pris le pouvoir, 98 femmes ont été exécutées pour des raisons politiques, 30 ont été enlevées et 24 détenues. Mon parti, le Parti des femmes Gabriela, est particulièrement ciblé par la répression politique. La présidente du parti a été accusée de rébellion et elle a été obligée de demander refuge au Congrès pendant deux mois. Elle fait toujours face à des accusations de meurtres multiples. Je suis accusée de rébellion et j'ai survécu récemment à une attaque à la bombe au Congrès qui a fait six morts, dont mon chauffeur. L'attaque à la bombe s'est produite le jour où mon parti et les autres partis d'opposition ont déposé une procédure de destitution contre la présidente Arroyo.
    Je viens de Mindanao, une île riche en ressources naturelles où des sociétés minières canadiennes sont très actives. Le Canada a déposé une demande relative à d'importants projets miniers dans les Philippines d'une valeur d'environ 1 milliard de dollars en investissements, et beaucoup d'autres sociétés font de l'exploration.
    Je demande au sous-comité d'examiner le lien entre les activités des sociétés minières canadiennes aux Philippines et les violations des droits de l'homme, notamment les exécutions extrajudiciaires. Dix-huit femmes qui étaient membres de mouvements communautaires opposés aux grandes opérations minières ont été assassinées.
    Aux Philippines, la militarisation va malheureusement de pair avec les projets de développement comme l'exploitation minière. Même pendant que nous sommes ici aujourd'hui, des troupes militaires ont été déployées dans une collectivité indigène dans le nord des Philippines et terrorisent les résidents qui se sont opposés au projet minier de la société Olympus Pacific Minerals qui a son siège social à Toronto.
    Sous le prétexte de combattre l'insurrection, les militaires prennent le contrôle de la région afin de permettre la mise en oeuvre des opérations minières. Les particuliers et les organisations qui s'opposent à l'exploitation minière sont considérés par les militaires comme étant membres de la nouvelle armée populaire rebelle et ennemis de l'État, ce qui en fait des cibles légitimes auxquelles ils peuvent s'attaquer.
    Je vais maintenant demander au chef de notre délégation, le représentant Satur Ocampo, de présenter une recommandation au sous-comité.
    Merci.
    Merci, monsieur le président.
    Au nom de notre délégation et des communautés que nous représentons, nous aimerions présenter les recommandations suivantes au sous-comité.
    Tout d'abord, nous demandons au premier ministre de faire une déclaration publique ferme concernant les exécutions extrajudiciaires et de demander au gouvernement des Philippines de prendre sans délai des mesures visant à mettre en oeuvre les recommandations du rapporteur spécial des Nations Unies, M. Philip Alston.
    Ensuite, nous demandons au gouvernement canadien de divulguer l'information qu'il possède sur le soutien fourni par le Canada à la mise en place d'une capacité de lutte contre le terrorisme, à l'instruction militaire, à la formation policière et de cesser de financer les programmes de l'ACDI jusqu'à ce qu'il ait été démontré qu'ils ne renforcent pas la stratégie anti-insurrectionnelle du gouvernement et ne favorisent pas les violations des droits de la personne. Nous demandons au gouvernement canadien de faire un examen de la question et de suspendre le financement de ces programmes jusqu'à ce que cet examen soit terminé.
    Troisièmement, nous demandons au gouvernement canadien de faire enquête sur les plaintes qui ont été portées contre des sociétés minières canadiennes aux Philippines, et d'adopter une mesure législative pour faire en sorte qu'il soit possible de poursuivre au Canada les sociétés minières qui commettent des violations des droits de la personne à l'étranger.
    Quatrièmement et finalement, nous invitons le sous-comité à visiter les Philippines dans le cadre d'une mission d'enquête sur la situation des droits de la personne, notamment en ce qui concerne les exécutions extrajudiciaires et les plaintes à l'égard des violations des droits de la personne commises par des sociétés minières canadiennes.
    Merci.

  (1350)  

    Je remercie tous nos témoins aujourd'hui de cette discussion informative. Je sais que vous vous êtes réellement efforcés d'être succincts dans vos observations. J'encourage les membres de notre comité à être tout aussi succincts dans leurs questions.
    Nous allons commencer un premier tour de table en donnant la parole aux libéraux.
    Monsieur Silva.
    Merci beaucoup.
    Je veux remercier tous les témoins qui comparaissent devant notre comité. Je voulais tout simplement vous laisser savoir que tout d'abord, même si votre comparution est très brève, tout ce que vous dites est enregistré de sorte que nous en avons pris note. Par ailleurs, les documents dont nous sommes saisis sont assez complets.
    Le professeur Alston est quelqu'un que j'admire beaucoup. C'est un professeur bien connu en matière de droits de la personne, un grand universitaire et quelqu'un qui est depuis très longtemps rapporteur aux Nations Unies, donc le fait qu'on lui ait confié cette tâche montre bien qu'il est urgent de recueillir de l'information, de recueillir les faits et de préparer un rapport adéquat. Il est le candidat idéal étant donné ses connaissances mondiales en ce qui a trait aux droits de la personne.
    Ce qu'on lit dans les rapports du professeur Alston et du juge Jose Melo est tout à fait consternant au sujet de l'intervention militaire et des violations militaires dans votre pays. En tant que pays je pense que nous devons dénoncer la situation et dire que c'est tout à fait outrageux, qu'un pays qui se dit démocratique doit aussi respecter ses institutions démocratiques, la liberté d'association et les droits du travail. À l'heure actuelle, ce que disent ces deux rapports qui ont été préparés par deux personnes très respectables est très perturbant.
    Donc je pense que vous avez raison lorsque vous dites qu'il faut que notre comité se penche sur la question. Nous devons accorder à la question toute l'attention nécessaire et en tant que comité nous allons certainement transmettre vos recommandations spécifiques au sujet du Canada, car nous avons une certaine responsabilité étant donné le rôle que nous jouons avec l'ACDI, avec l'instruction militaire, avec nos partenaires et aussi avec nos sociétés minières car nous avons des intérêts à cet égard également.
    Étant donné tout cela, nous avons un intérêt et je pense qu'il y a également le fait que nous nous soucions des Philippines et du développement des Philippines. Au fil des ans, une très grande communauté de Philippino-Canadiens se sont installés au Canada, et nous reconnaissons le fait qu'il est urgent pour nous de prendre des mesures.
    Donc, nous vous remercions beaucoup d'être venus rencontrer notre comité. Je voulais tout simplement faire cette observation. J'ai cependant bien entendu vos recommandations et je les comprends, et j'en ai pris note.
    Merci, monsieur.
    Pas d'autres observations?
    Dans ce cas, continuons.
    Madame Bourgeois.

[Français]

    Monsieur le président, j'ai deux questions et un commentaire.
    La mine dont vous parliez, à Mindanao, est-ce TVI Pacific?

[Traduction]

    Oui, TVI Pacific et Crew Development se trouvent à Mindanao.

[Français]

    Parfait, merci.
    Ma deuxième question s'adresse à M. Beltran.
    À moins que j'aie mal compris, vous avez semblé dire que le Canada offre un appui aux forces militaires des Philippines. Est-ce exact?

[Traduction]

    Oui.
    Est-ce que je me trompe ou est-ce que j'ai raison?
    Vous avez raison.

[Français]

    J'avais bien compris. Il y a aussi l'Organisation internationale du travail, qu'on a rencontrée lors d'une autre séance de comité, notamment pour aider les gens de la Birmanie. Il semble que l'Organisation internationale du travail ait, en raison de sa position, d'excellents contacts avec différents gouvernements. J'aimerais simplement vous suggérer de communiquer avec cette organisation.
    Monsieur le président, je vais maintenant faire un commentaire. La situation des compagnies minières canadiennes aux Philippines et celle du peuple philippin ont fait l'objet d'une étude par le Sous-comité des droits internationaux de la personne, auquel je siégeais de même que M. Goldring et plusieurs autres, il y a environ deux ans et demi. Nous avons fait un excellent rapport sur les activités des compagnies minières canadiennes aux Philippines, notamment TVI Pacific de l'Alberta.
    Je suis très étonnée, malgré le rapport que le sous-comité a produit il y a deux ans et demi, que la situation ne soit pas encore réglée. Je voudrais que ce sous-comité puisse discuter de la suite que le gouvernement du Canada a donnée à ce rapport et de l'appui qu'il accorde aux forces militaires des Philippines. C'est le gouvernement conservateur qui venait d'arriver au pouvoir, à ce moment-là. C'est épouvantable et ce n'est pas la première fois qu'on en discute ici. J'espère que le Canada ne perdra pas la face encore une fois. Je suis même choquée, monsieur le président.
    Merci beaucoup.

  (1355)  

[Traduction]

    Merci beaucoup, madame Bourgeois.
    Monsieur Marston, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    À nos invités, je veux dire que je reconnais quelque chose de très crucial — le fait que vous vous soyez placés dans une situation de risque en venant ici nous parler comme vous l'avez fait aujourd'hui. Je respecte beaucoup le courage dont vous faites preuve et la façon responsable dont vous défendez les intérêts de votre pays. Je vous en félicite.
    Monsieur le président, je suis très préoccupé, car ce n'est pas la première fois que nous entendons dire que des fonds de l'ACDI sont peut-être utilisés de façon inappropriée dans d'autres pays. Nous devons faire quelque chose à ce sujet.
    Personnellement, je suis très troublé du fait que 12 officiers de cette armée — si on prouve que c'est le cas — sont formés ici au Canada. Nous devons aller au fond de cette affaire.
    Une autre chose qui remonte à la surface est le rapport de responsabilité sociale et des sociétés. Voilà maintenant plus d'un an qu'il a été présenté, et nous n'avons pas entendu dire qu'on y avait donné suite. Il est temps de faire quelque chose.
    Je ne vais pas poser de question, car nous avons très peu de temps, et j'ai eu la chance de rencontrer ces gens aujourd'hui.
    Je le répète, je suis très impressionné par votre courage. Merci beaucoup.
    Merci beaucoup, monsieur Marston.
    Nous avons un peu de temps. Les membres du comité ont été très rapides pour ce tour de table.
    Monsieur Marston, vous avez eu la courtoisie d'être très bref la dernière fois, alors peut-être que si nous réussissons à finir ce tour de table, nous pourrons vous revenir pour autre chose.
    Non? Très bien.
    Dans ce cas, M. Kenney ou M. Sweet, allez-y.
    Merci, monsieur le président.
    Je suis d'accord avec tout ce qui a été dit au sujet de votre grand courage. J'ai lu vos biographies avant de venir ici. Ce que vous avez enduré jusqu'à présent est remarquable. Je vous encouragerais tout simplement à continuer votre lutte pour faire triompher les droits de la personne et la justice.
    Y a-t-il eu des arrestations ou des condamnations dans les Philippines suite à ces exécutions? Quelqu'un a-t-il été traduit en justice de quelque façon que ce soit, pour ces enlèvements ou ces assassinats?
    Pour ce qui est des exécutions, les deux cas pour lesquels il y a eu poursuites avec deux condamnations concernaient des journalistes. Cependant, en ce qui concerne tous les activistes politiques, aucun cas n'a été traduit en justice, il n'y a pas eu de condamnation.
    S'agissait-il de journalistes étrangers?
    Non, c'étaient surtout des journalistes locaux.
    Or, il y a toujours des accusations en suspens pour quelques-uns d'entre vous, n'est-ce pas?
    Oui. M. Beltran, qui est membre du Congrès, est accusé de sédition. Il y a une requête en cour demandant le rejet, étant donné qu'une telle accusation n'est pas censée être déposée à l'égard d'un membre du Congrès qui siège, car la pénalité prévue est de moins de six ans. À titre de membres du Congrès, nous ne pouvons faire l'objet de telles accusations.
    Dans mon cas, c'est plus grave. C'est un crime capital. On m'accuse de meurtres multiples, avec 15 chefs d'accusation au sujet d'incidents qui se sont produits il y a 22 ans. À l'époque, j'étais en détention militaire sous la dictature de Marcos. Nous avons fait valoir ce point, mais les avocats de la poursuite n'ont pas laissé tomber la cause. Nous l'avons portée devant la Cour suprême, et nous attendons le jugement.
    Monsieur le président, reste-t-il du temps?
    Oui, monsieur Kenney.

  (1400)  

[Français]

    Monsieur le président, je n'étais pas au courant du rapport que le sous-comité a produit lors de la dernière législature. Il serait intéressant que le greffier fasse circuler une copie de ce rapport afin qu'on en prenne connaissance. Je ne sais pas s'il a été examiné par le comité permanent. Quoi qu'il en soit, ce rapport m'intéresse également.

[Traduction]

    J'ai une question à poser à nos témoins. Je vous remercie tous d'avoir pris le temps de venir ici pour nous informer et, évidemment, d'avoir le courage de prendre la parole sur cette affaire.
    Dans le cadre de vos recommandations, vous demandez que le gouvernement du Canada fasse enquête sur les plaintes contre les compagnies minières canadiennes aux Philippines. Ma collègue Mme Bourgeois a laissé entendre qu'il y avait peut-être un lien quelconque entre les compagnies minières canadiennes et certains de ces actes de violence.
    Pourriez-vous nous expliquer brièvement comment cela pourrait être le cas? Prétendez-vous, ou avez-vous des preuves quelconques que les entreprises canadiennes aux Philippines ont directement ou indirectement été impliquées dans la perpétration de ces actes de violence? Le cas échéant, sur quelle information fondez-vous cette hypothèse?
    Les compagnies minières embauchent habituellement du personnel militaire et paramilitaire pour constituer leurs forces de sécurité. Ainsi, quand des abus sont commis, les compagnies minières sont directement ou indirectement en cause.
    Des poursuites ont été intentées devant les tribunaux locaux, mais aucune mesure n'a été prise. La commission des droits de la personne a même intenté des poursuites contre les forces militaires relevant du commandement du Sud — les forces armées des Philippines —, mais rien n'a été fait. Il y a donc un lien en ce sens que les compagnies minières ont embauché ce personnel militaire pour assurer leur sécurité.
    Merci.
    À un niveau plus élevé, le lien possible que j'ai évoqué tout à l'heure — ça n'a peut-être pas été enregistré — est que le plan global de lutte contre l'insurrection, dont le professeur Alston a dit qu'il comportait des exécutions sommaires, est l'une des grandes initiatives du gouvernement Arroyo. Ce programme relève du cadre plus général du plan de sécurité interne qui, étrangement, conjugue les opérations militaires pour établir la paix dans les régions touchées par les troubles et des projets de lutte contre la pauvreté et de développement.
    Maintenant, au Mindanao, région touchée par les troubles, l'ACDI contribue au travail de maintien de la paix. Vous voudriez savoir si les fonds dépensés là-bas servent exclusivement aux projets de développement... mais étant donné que c'est lié aux opérations militaires, si une partie quelconque de cet argent a peut-être été canalisée vers le programme de lutte contre l'insurrection, dans le cadre duquel des exécutions sommaires ont été commises.
    Merci beaucoup. Nous sommes allés un peu au-delà de 14 heures, heure à laquelle nous devions terminer.
    Y a-t-il d'autres affaires dont il faut traiter d'urgence? Non?
    Dans ce cas, je remercie beaucoup nos témoins d'être venus. C'est une question importante. Vous avez été très aimables et nous avez bien renseignés. Merci.
    Merci beaucoup, monsieur le président, et mesdames et messieurs les membres du sous-comité.
    La séance est levée.