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PACP Rapport du Comité

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IMPARTITION DE L’ADMINISTRATION DU RÉGIME D’ASSURANCES

En décembre 1999, le Centre national de décision en matière de rémunération (CNDR) a demandé à la Great-West, compagnie d’assurance-vie, de lui présenter une estimation des coûts qu’entraînerait la prise en charge par elle des services d’administration des régimes d’assurances de la GRC. Jusqu’à ce moment‑là, la Great-West n’avait été que le souscripteur des régimes d’assurances.

Dominic Crupi, le directeur du CNDR, a demandé à la Great-West de se préparer à l’impartition de l’administration des régimes d’assurances de la GRC. Ce travail préparatoire a été réalisé par la Great-West sans contrat, ce qui est contraire à la réglementation relative à la passation des contrats.

En décembre 2001, après que la Great-West eut travaillé sur le projet pendant plusieurs mois, la GRC a modifié les exigences de sorte que la Great-West a déterminé qu’elle serait incapable de fournir tous les services demandés à la date prévue. Étant donné que Morneau Sobeco avait déjà passé un marché pour administrer le régime de retraite de la GRC, la Great-West a proposé au CNDR d’offrir l’impartition à cette société. Après avoir reçu un appel de Pat Casey (qui travaillait pour M. Crupi à l’administration du régime de retraite de la GRC), Morneau Sobeco a présenté une proposition d’impartition relative au régime d’assurances à Garry Roy dans laquelle cette société demandait 450 000 $ pour les coûts de démarrage et 552 000 $ pour les coûts annuels subséquents. M. Roy était à l’emploi du CNDR et relevait directement de M. Crupi.

L’enquête du Service de police d’Ottawa a révélé qu’après avoir été informés par M. Crupi que l’impartiteur serait Morneau Sobeco, MM. Casey et Roy ont examiné les options de passation de contrats à leur disposition. Toutefois, après avoir examiné les options, M. Crupi a déterminé que tout processus légitime prendrait trop de temps et qu’il serait peut-être forcé de faire un appel d’offres également pour la souscription.

Afin de contourner le processus d’appel d’offres, on a réussi à convaincre la Great-West de servir d’intermédiaire pour des paiements qui seraient faits à Morneau Sobeco, qui a reçu le mandat d’administrer les régimes d’assurances au nom de la GRC. La GRC a par la suite payé Morneau Sobeco pour ses travaux de définition des besoins, ce qui indique que le fournisseur a refait ces travaux à partir du début. Le Bureau du vérificateur général souligne que les représentants de la GRC n’ont pu trouver aucun service tangible fourni par la Great-West, qui, de son côté, estime qu’elle a aidé à définir les exigences en vue des travaux d’impartition futurs. L’enquête du Service de police d’Ottawa a mené à la conclusion que des paiements inutiles d’une valeur de plus de 250 000 $, tirés des régimes d’assurances de la GRC, avaient été faits à la Great-West1.

Le Comité a cherché à savoir durant ses audiences sur cette question qui avait demandé à Morneau Sobeco de se charger de l’administration des régimes d’assurances. Aucune réponse claire n’a été donnée quant à savoir si Morneau Sobeco avait fait des démarches auprès de la GRC ou de la Great-West, ou si la Great-West avait fait des démarches auprès de Morneau Sobeco, ou encore si la GRC avait fait des démarches auprès de Morneau Sobeco. On s’est beaucoup interrogé sur ce qui poussait la Great-West et Morneau Sobeco à s’engager dans une entreprise aussi risquée que celle‑ci. Le s.é.-m. Mike Frizzell, qui a mené l’enquête du Service de police d’Ottawa sur l’administration du régime d’assurances, a été incapable d’apporter des éclaircissements sur ces interrogations. Il s’est contenté de dire qu’un certain nombre de théories circulaient, mais qu’aucune d’entre elles n’avait été confirmée, en partie parce qu’il avait reçu l’ordre de ne plus enquêter sur cette affaire.

Le Comité a trouvé troublant que le s.é.-m. Frizzell ait reçu l’ordre de ne pas suivre la piste de la GRC à la Great‑West et à Morneau Sobeco sous prétexte que cela ne faisait pas partie du mandat de l’enquête. Le Comité a trouvé encore plus troublant que l’ordre soit venu du commissaire adjoint David Gork, qui avait été chargé d’assurer la liaison administrative avec les enquêteurs de la police d’Ottawa. Comme il est dit plus loin dans le présent rapport, le manque apparent d’indépendance de la part des enquêteurs du Service de police d’Ottawa est très troublant, compte tenu notamment du fait que certains éléments de l’enquête n’ont pas été menés à leur terme.

En plus des questions liées à la raison pour laquelle l’administration du régime d’assurances à été confiée à Morneau Sobeco, il y a la question non élucidée des 540 000 $ supplémentaires qui ont été retirés du régime d’assurances pour être versés dans le régime de retraite. Le Comité a entendu parler de cette question pour la première fois lorsque le s.é.-m. Frizzell a fait écouter au Comité un message enregistré qu’il avait laissé à Rosalie Burton qui, à l’époque, était directrice générale des Ressources humaines, et dans lequel il disait que « la haute direction a retiré un autre montant d’un demi-million de dollars du régime d’assurances2». Le Comité a reçu des documents prouvant que 540 000 $ avaient été retirés du régime d’assurances entre novembre 2003 et mars 2004 par la Great‑West parce qu’un examen avait déterminé que l’entente ayant initialement justifié le déplacement des fonds avait été conclue sans autorisation et que, par conséquent, elle avait dû être annulée. Cependant, le Comité ne sait pas si la GRC avait même le pouvoir d’autoriser ce transfert.

En rapport avec le transfert des 540 000 $ du régime d’assurances au régime de retraite, on note les accusations entendues par le Comité selon lesquelles le compte rendu d’une séance du Comité des assurances de la GRC aurait été modifié. En juin 2005, le sergent Brad Chugg, un représentant des relations fonctionnelles de la GRC, avait informé la sous‑commissaire Barbara George que le compte-rendu de la réunion du 15 mars 2005 du Comité des assurances à laquelle il avait assisté était inexact. Selon le compte-rendu de la réunion, les 540 000 $ devaient venir du régime d’assurances. Le sergent Chugg a écrit que le Comité des assurances avait en effet obtenu l’assurance que les fonds viendraient des crédits de la GRC. Lorsque le sergent Chugg a interrogé Garry Roy, qui a dressé le compte rendu et travaillait au CNDR, au sujet de la raison pour laquelle le compte-rendu avait été modifié, M. Roy a répondu qu’il avait fait rapport de « ce qui aurait dû se produire » au lieu de ce qui s’était produit.

Le Comité est vivement préoccupé par le fait que le compte-rendu de la réunion du Comité des assurances a peut‑être été altéré. Le Comité n’a eu connaissance de la tenue d’aucune enquête en vertu du code de déontologie sur les allégations du sergent Chugg, même s’il avait explicitement demandé qu’une telle enquête soit ouverte. Compte tenu de la gravité de l’accusation, le Comité recommande :

Recommandation 18

Que la Gendarmerie royale du Canada ouvre une enquête en vertu du Code de conduite sur les allégations selon lesquelles le compte rendu de la réunion du 15 mars 2005 du Comité des assurances a été altéré.

Étant donné le grand nombre de questions non élucidées relativement à l’administration du régime d’assurances de la GRC, le Comité trouve très troublant le fait que la partie de l’enquête du Service de police d’Ottawa portant sur les assurances ait été écourtée. Le Comité estime que l’enquête criminelle sur l’administration du régime d’assurances de la GRC devrait être rouverte pour que toute la lumière puisse être faite sur ce qui s’est réellement produit. Compte tenu que ni la GRC ni le Service de police d’Ottawa n’ont l’indépendance voulue pour faire cette enquête, le Comité recommande :

Recommandation 19

Que le gouvernement du Canada demande à la Police provinciale de l’Ontario d’effectuer l’enquête sur le régime d’assurances, enquête qui devrait comprendre une vérification judiciaire, pour que soient pleinement examinées les irrégularités dans l’impartition de l’administration du régime d’assurances.

Pouvoir du Conseil du Trésor

Le Bureau du vérificateur général a soulevé, dans le chapitre du rapport de la vérificatrice générale portant sur les régimes de retraite et d’assurances, la question de savoir si la GRC avait le pouvoir d’administrer son propre régime3. Bien que la GRC ait administré ses propres régimes d’assurances durant plus de 50 ans, la vérificatrice générale estime qu’elle n’a pas le pouvoir de percevoir les cotisations et d’administrer les régimes d’assurances au nom de ses membres. Le s.-comm. Paul Gauvin, qui était alors administrateur supérieur des Affaires financières, a expliqué ce qui suit :

En outre, pour ce qui est de la question de savoir si la GRC devrait payer les frais d’administration de l’assurance sur son budget propre au lieu que ces frais soient financés par les adhérents au régime au moyen de leurs primes, comme c’est actuellement le cas, je veux souligner qu’un avis juridique du ministère de la Justice veut que la GRC ne puisse couvrir les frais d’administration d’assurance sur ses fonds sans le consentement du Conseil du Trésor, et nous n’avons pas ce consentement4.

Les porte-parole du Conseil du Trésor ont souscrit à cet avis et se sont engagés à travailler avec la GRC pour clarifier la question de savoir si la GRC a le pouvoir d’administrer ses régimes d’assurances.

Lorsque le sous-commissaire Kevin Mole, qui est maintenant dirigeant principal des Ressources humaines, a comparu devant le Comité, on lui a demandé qui avait le pouvoir d’administrer le régime d’assurances, et il a répondu que des discussions s’étaient amorcées en 2005 avec le Secrétariat du Conseil du Trésor et que la GRC espérait pouvoir s’adresser

aux ministres responsables du Conseil du Trésor dès le mois de septembre pour leur présenter diverses options, y compris la délégation des pouvoirs relatifs au régime à la GRC, l’évaluation des frais d’administration et une option visant à obtenir de nouveau l’approbation des crédits5[…]

Le Comité s’est réjoui d’apprendre que cette question avait été examinée, mais il voudrait obtenir confirmation que les pouvoirs ont été clarifiés. Le Comité recommande donc :

Recommandation 20

Que la Gendarmerie royale du Canada présente au Comité, d’ici le 31 mars 2008, un rapport sur les efforts déployés pour clarifier la question du pouvoir d’administration du régime d’assurances de la GRC.

Compte tenu de l’incertitude touchant le choix d’accorder à Morneau Sobeco, sans appel d’offres, l’impartition de l’administration des régimes d’assurances de la GRC, le Comité estime que la GRC pourrait ne pas en avoir pour son argent. Le Comité souscrit à la recommandation de la vérificatrice générale, suivant laquelle la GRC devrait « soumettre le contrat d’administration des régimes d’assurances au processus d’appel d’offres le plus tôt possible6 ». Le Comité a constaté avec plaisir que la GRC était d’accord avec la recommandation de la vérificatrice générale, mais il a ajouté que l’application de cette recommandation dépendait de la clarification du pouvoir d’administrer les régimes d’assurances. Pour veiller à ce que cela se produise, le Comité recommande :

Recommandation 21

Que la Gendarmerie royale du Canada soumette le contrat d’administration des régimes d’assurances au processus d’appel d’offres au moment de son expiration.



[1]Rapport de la vérificatrice générale, paragraphe 9.34.

[2]Réunion 46, 16 h 45.

[3]Vérificatrice générale du Canada, paragraphe 9.48.

[4]Réunion 51, 15 h 50.

[5]Réunion 60, 17 h 20.

[6]Vérificatrice générale du Canada, paragraphe 9.45.