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SECU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent de la sécurité publique et nationale


NUMÉRO 008 
l
1re SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 12 juin 2006

[Enregistrement électronique]

  (1530)  

[Traduction]

    J'ouvre la séance et je vous informe que nous en sommes à la huitième séance du Comité permanent de la sécurité publique et nationale en ce lundi 12 juin.
    Nous avons reçu un avis de motion conforme à la règle des 48 heures.
    Sans plus tarder, je donne la parole à M. Ménard qui nous expliquera les raisons de sa motion.

[Français]

    L'objectif de ma motion est essentiellement que nous gardions le statu quo d'ici à ce que le gouvernement nous présente une loi en bonne et due forme, de façon à faire ce qu'il a promis de faire, soit d'abolir l'enregistrement de certaines armes à feu. Même s'il a donné lieu à un scandale administratif d'une très grande ampleur, le Registre des armes à feu a fait ses preuves. Il reste qu'il a été utile.
    Par exemple, depuis 1995, le total des décès par arme à feu exprimé en pourcentage de la population canadienne et en chiffres absolus, en l'occurrence la statistique la plus importante, étant donné que la population a augmenté entre 1995 et 2004, a diminué de 27 p. 100. Mieux encore, si on calcule le nombre de décès par 100 000 habitants, on parle alors d'une diminution de  34 p. 100.
    Les homicides par arme à feu, calculés par 100 000 habitants, ont pour leur part diminué de 10 p. 100, ce qui est particulièrement significatif, étant donné que cela touche les armes à feu des chasseurs, les armes longues. Les homicides par carabine de chasse, ou fusil de chasse, ont diminué de 43 p. 100, alors que les homicides commis avec d'autres armes de poing ont quant à eux augmenté de 7 p. 100. Cela indique que les armes de poing n'avaient pas changé de statut puisqu'elles étaient déjà enregistrées. Elles ont atteint, si on peut dire, une vitesse de croisière et connu une légère augmentation.
    En revanche, dans le cas des armes qui étaient visées, soit les carabines de chasse, le taux a diminué de 43 p. 100. Par ailleurs, les homicides sans arme à feu ont augmenté légèrement, en l'occurrence de 1 p. 100. Le fait le plus frappant est que les homicides de femmes commis avec des armes à feu ont diminué de 31 p. 100. Cependant, le taux d'homicides de femmes commis sans arme à feu a légèrement augmenté, c'est-à-dire de 2 p. 100. Les vols avec arme à feu ont diminué de 48 p. 100.
    De toute évidence, il s'agit d'un régime qui, malgré tous ses déboires administratifs et tout ce qui a pu causer ces derniers, donne des résultats significatifs en matière de sécurité publique. Il faudra prendre cela en considération si le gouvernement, tel qu'il l'a annoncé, présente un projet de loi. Je crois qu'il faudrait avant toute chose tenir des audiences, de façon à permettre aux principaux organismes concernés de donner leur opinion.
    Ensuite, j'ai noté que les coûts liés à l'enregistrement et au système de surveillance des armes à feu étaient sous contrôle depuis 2002. C'est ce qu'on dit dans le dernier rapport de la vérificatrice générale.
    Les économies qui résulteraient de l'abolition d'un registre des armes longues seraient peu significatives. Lorsque M. Baker a témoigné, M. Comartin a parlé de 2   à 3 p. 100, une donnée qu'il n'était pas vraiment en mesure de contredire.
    On n'a prévu que 14,6 millions de dollars pour l'enregistrement de toutes les armes à feu. Or, comme nous l'expliquait M. Baker, retirer de ce registre une seule catégorie d'armes ne diminuerait aucunement les frais fixes, entre autres ceux reliés au système informatique.

  (1535)  

    Le ministre a lui-même chiffré cette réduction à  10 millions de dollars. Or, il a proposé de rembourser les gens qui ont déjà payé leur enregistrement, ce sur quoi nous sommes d'accord. Néanmoins, cela lui occasionnerait une dépense d'environ 19 millions de dollars. Il reste que pour une économie évaluée par le ministre à 10 millions de dollars, des frais de 19 millions de dollars seraient encourus. Le ministre se dit prêt à assumer cette dépense dans le cadre de ses budgets.
     Le ministre parle de 19 millions de dollars, et je trouve ses prévisions particulièrement modestes par rapport à celles que d'autres ont faites. En effet, on a calculé que la majorité des gens ayant enregistré leur arme, soit deux millions de personnes, devaient renouveler leur permis. Avec deux millions de personnes qui paient chacune 60 $, on n'arrive pas à un total de 19 millions de dollars, n'est-ce pas? Il s'agit en fait de 120 millions de dollars. Les économies se situeraient, selon moi, quelque part entre ce que M. Comartin a indiqué, de façon prudente, et les 10 millions de dollars dont parle le ministre. Ces économies sont vraiment minimes, compte tenu des sommes que le ministre est prêt à rembourser et des éléments de ce système dont il est prêt à se priver.
    En rendant gratuits l'enregistrement des armes à feu et le renouvellement des permis, on élimine les principaux inconvénients causés aux chasseurs. Pourquoi serait-il urgent d'avoir recours à un décret en conseil avant que le projet de loi soit présenté en bonne et due forme et qu'il fasse l'objet d'un débat? Si on tient compte de ce dont le gouvernement accepte de se priver, on en conclut que la mesure annoncée fait en sorte que les économies sont infimes. D'autre part, les réalisations de ce système en matière de sécurité publique sont probantes. En outre, presque toutes les personnes qui, de par leurs fonctions, ont à composer avec l'usage, illégal ou autre, des armes à feu concluent que ce registre a été très utile.
    Il s'agit ici de l'ensemble de la profession policière, de la base au sommet. Dans le premier cas, on parle de l'Association canadienne de la police professionnelle et dans le deuxième, de l'Association canadienne des chefs de police. Tous vantent les mérites du Registre des armes à feu, malgré ses déboires. Ils l'utilisent régulièrement. Voilà donc un système qui sauve des vies et qui réalise ses objectifs en matière de sécurité publique. Comme je l'ai précisé plus tôt, les motifs invoqués ne sont pas justifiables sur le plan économique.
    Avant de décider de prendre une mesure aussi draconienne à l'endroit d'un système qui a sauvé des vies, ces gens n'ont même pas consulté notre comité, dont le mandat est pourtant de se pencher sur les questions de sécurité publique. J'ai devant moi des statistiques éloquentes, et j'en connais d'autres, bien que je ne les aie pas sous la main. Le taux de suicides, par exemple, a connu une baisse.
    Nous avons reçu des lettres de psychiatres qui nous disaient à quel point l'article 111 du Code criminel était utilisé dans des moments dramatiques. Par exemple, certains patients vivant une période de dépression laissaient craindre que celle-ci ne se termine par un suicide. On craignait pis encore, c'est-à-dire que l'individu tue sa conjointe et ses enfants avant de se suicider. C'est la situation la plus dramatique qui puisse se produire.

  (1540)  

    L'article 111 du Code criminel permet de communiquer avec le Registre des armes à feu ou même avec un simple agent de la paix. Dans de telles circonstances, celui-ci s'adresse à la cour pour demander une ordonnance visant à retirer à cette personne les armes qu'elle possède. Cependant, s'il n'y a pas de registre dans lequel ces armes à feu sont inscrites et si la personne ne collabore pas, comment les policiers vont-ils retracer les armes? La même situation se répète chaque fois qu'une personne est trouvée coupable d'un acte criminel. Je crois qu'en vertu de l'article qui précède, le juge émet une ordonnance visant à confisquer ces armes à feu. Il s'agit sans doute de circonstances où les gens ne sont pas portés à collaborer avec la police. Or, comment cette dernière va-t-elle s'assurer que la personne n'a plus d'armes à feu, s'il n'y a plus de registre?
    De toute évidence, ce dossier soulève d'importantes questions de sécurité et d'intérêt publics. J'ai du respect pour ceux qui ne sont pas de mon avis. Par contre, nous sommes en démocratie, et le Parlement, qui est divisé à l'égard de cette question, a entendu aussi bien le point de vue de gens qui se préoccupaient des victimes que celui de personnes se disant scandalisées par les déboires financiers et le scandale administratif, ou encore celui des pauvres chasseurs qui étaient incommodés par l'obligation de remplir des questionnaires.
    J'ai eu l'occasion de lire certains de ces questionnaires, et il me semble qu'il y a en effet une certaine exagération. Toutefois, ce n'est certainement pas une raison pour les éliminer. Chaque fois que des chasseurs nous ont fait part de leurs critiques concernant le Registre des armes à feu, leur association a invoqué le fait que leur organisme disposait déjà de systèmes faisant en sorte que les chasseurs soient responsables et bien informés des précautions à prendre en matière de manipulation, d'entretien et de rangement des armes à feu.
    Justement, nous voulons que les armes à feu ne se retrouvent qu'entre les mains de personnes responsables. Nous ne voulons pas ouvrir la porte à la situation inverse. C'est ce qu'il faudrait dire aux associations de chasseurs. En plus, il ne faut pas prendre de risques inutiles.
    Monsieur le président, pourquoi croyez-vous qu'il existe dans le Code criminel une disposition stipulant que le tronçonnage d'une arme à feu est un acte criminel? Pourquoi croyez-vous que certaines personnes ont tronçonné leurs armes dans le passé?
    En fait, lorsqu'on tronçonne une arme à feu, on lui enlève son efficacité. L'efficacité d'une arme de poing, c'est sa précision. On lui enlève donc sa précision. Et pourquoi le fait-on? Parce qu'une arme tronçonnée est plus facile à dissimuler. Pourquoi, au Canada, s'est-on mis à tronçonner des armes à feu? Parce qu'il était facile de se procurer des armes de chasse et parce que les armes de poing devaient être enregistrées. Les criminels qui voulaient commettre des crimes trouvaient donc plus facile de se procurer des armes de chasse, de les tronçonner, et de s'en servir au cours d'un vol à main armée, par exemple.
    Si vous abolissez le registre, à partir du moment où les armes longues sortiront de chez l'armurier, tout contrôle sera impossible. Je ne souhaite pas que cette loi soit adoptée. Quoi qu'il en soit, je ne serais pas étonné que nous assistions à un retour des armes tronçonnées. Présentement, il est à peu près aussi compliqué de se procurer une arme longue qu'une arme de poing. On me dira, bien sûr, qu'il y aura toujours des gens pour contourner les lois. Cependant, je ne crois pas que ceux qui disent cela iraient jusqu'à dire que puisque les drogués trouveront toujours de la drogue, il faut légaliser toutes les drogues, qu'il ne sert à rien d'adopter des lois sur la drogue si on s'aperçoit que les gens s'en procurent.

  (1545)  

    C'est la même chose en ce qui concerne les armes à feu. C'est bien évident que les criminels vont chercher à obtenir illégalement des armes à feu. Toutefois, l'illégalité a un prix très élevé. Pour se procurer quelque chose d'illégal, il faut avoir des relations particulières, et les gens que l'on rencontre veulent faire des profits considérables.
     À partir du moment où un arme longue sort de chez l'armurier, plus rien n'est enregistré. Les gangs de rue représentent actuellement la menace la plus grande à la sécurité publique dans nos villes et même dans nos campagnes. Maintenant que nous avons réussi à démanteler certaines grandes organisations criminelles, le grand risque, ce sont les gangs de rue.
    Pour le moment, les gangs de rue ne sont pas très riches. Ce sont des jeunes qui commencent dans le crime. Ce sont des jeunes voyous qui auraient beaucoup de difficulté à obtenir des permis d'acquisition et de possession d'armes à feu. Ils n'y pensent même pas, tellement c'est long et compliqué.
    Cependant, à partir du moment où il n'y aura plus de contrôle des armes à feu, il suffira à ces jeunes de trouver une personne, un parent ou quelqu'un de leur groupe, pour aller chercher l'arme à feu chez l'armurier et la leur vendre. Il y a donc un risque immédiat.
    À mon avis, il est impensable que le Parlement prenne ce risque sans que les comités soient saisis des modifications à une loi qui est au coeur de la sécurité publique et prévient l'augmentation de la criminalité.
    Le gouvernement a suivi une procédure exceptionnelle. Plutôt que de nous présenter un projet de loi en bonne et due forme, ce qui aurait d'ailleurs satisfait la partie de l'électorat qu'il veut encourager, il a court-circuité le processus parlementaire habituel. Pourquoi a-t-il fait cela?
    D'ailleurs, je signale qu'à la page 24 du programme électoral du Parti conservateur du Canada de 2006, on peut lire qu'un gouvernement conservateur « abolira la très coûteuse Loi sur le registre des armes à feu ». Il ne parle pas du petit morceau qu'il veut actuellement abolir. On peut aussi y lire qu'il « réinvestira toutes les économies découlant de la mise au rancart du projet de loi C-68 »  — aucune nuance — « pour engager des agents de première ligne pour veiller à l'application de la loi et aider les victimes de crime. »
    Le but des conservateurs était d'abolir l'ensemble du registre. Mais aujourd'hui, ils forment un gouvernement minoritaire et connaissent l'opinion publique, qui se dit généralement en faveur du registre, et ils en reconnaissent la nécessité. En fait, je me demande s'ils la reconnaissent vraiment. On insiste pour nous dire que seules les armes longues sont visées, mais dans le programme, on vise toutes les armes.
    On invoque également certaines difficultés d'application et le fait que le registre n'est pas parfait, qu'il s'y trouve des erreurs. Peut-être s'en trouve-t-il, mais alors pourquoi garde-t-on le reste? On semble oublier l'application de l'article 86 de la Loi sur les armes à feu, qui concerne le registre des armes à feu des policiers et des écoles de police. On n'y touche pas. Je ne veux pas insister là-dessus. Il y a cependant là une attitude contradictoire qui montre qu'au fond, le gouvernement voulait simplement indiquer qu'il ferait quelque chose.
    Honnêtement, je pense qu'avant de modifier cette loi, nous devrions entendre plusieurs groupes de témoins. En tant que membres du Comité permanent de la sécurité publique et nationale, nous ne ferions pas notre travail si nous n'entendions pas ces groupes. En attendant qu'un projet de loi soit présenté en bonne et due forme, gardons le statu quo. D'un côté, des vies ont été sauvées et de l'autre, il n'y a même pas d'économies.

  (1550)  

    

[Traduction]

    Merci, monsieur Ménard.
    Le mieux sera de suivre la liste de ceux qui ont manifesté l'intention de parler, puis on verra.
    Sur ma liste, jusqu'ici, j'ai Mme Kadis, M. Holland et M. MacKenzie.
    Madame Kadis.
    Merci, monsieur le président.
    J'appuie la motion et j'aimerais insister sur les avantages du Registre des armes d'épaule.
    Comme l'a dit M. Ménard, 71 p. 100 des homicides conjugaux sont commis au moyen d'une arme d'épaule. C'est un renseignement incontournable. Nous ne devons pas abandonner les femmes qui sont les victimes dans la plupart des cas de violence familiale. Il faut d'abord que cette mesure soit approuvée par le Parlement, on l'a dit, mais si c'était le cas, ce serait un retour en arrière dans la réalisation de notre objectif collectif d'assurer la sécurité publique pour les Canadiens.
    Il y a eu récemment au Parlement de nombreuses discussions sur l'ordre public, notamment à cause du dépôt de certains projets de loi. Cette mesure irait à l'encontre de ce que nous dit actuellement le gouvernement. Il est clair que cela contredit les déclarations d'Armand La Barge, président de l'Association ontarienne des chefs de police. J'ai eu le plaisir et le privilège de travailler avec lui, à l'occasion, dans ma région; dans son nouveau poste, il m'a certainement permis de vous dire qu'il croît fermement que cet élément du registre doit être maintenu. J'ai donc eu d'exhaustives discussions là-dessus.
    Dans tout ce que nous avons entendu jusqu'ici, on a invoqué des raisons financières pour la suppression de cette partie du registre. Pourtant, à notre comité, on nous a dit récemment que le programme était géré raisonnablement bien depuis 2002 et que les économies réelles ne seraient pas importantes, quel que soit le point de vue.
    Divers chiffres ont été cités. À une réunion récente du comité, on a déclaré qu'on n'épargnerait pas 10 millions de dollars dans le cadre du Registre des armes à feu comme on nous l'avait déclaré précédemment. Il y a eu beaucoup de désinformation.
    Je suis convaincue que si nous ne défendons pas le registre, collectivement nous amoindrirons notre capacité de doter nos forces de l'ordre des outils absolument nécessaires pour assurer le maximum de sécurité aux Canadiens. À maintes reprises, on a déclaré que les renseignements n'étaient pas fiables, qu'on n'y recourait pas beaucoup... Ce n'est pas vrai. Les faits disent autrement. C'est une erreur et on aurait tort de dire que le registre n'est pas bien employé. Apparemment, il est consulté non pas 5 000 fois par jour, mais plus de 6 500 fois par jour.
    On a dit au comité que parfois, ce n'est pas le registre des armes à feu qu'on voulait consulter. Je crois que c'était à la dernière séance. Ce n'est pas ce que nous disent les chefs de police et si nous ne les écoutons pas, qui écouterons-nous? Avec le nouveau régime, il n'y aura pas moyen de savoir s'il y a cinq ou dix armes d'épaule dans un domicile où se présentent les policiers. Il ne suffit pas de dire: « Nous savons qu'il y a des armes ». Nos policiers doivent savoir, dans la mesure du possible, exactement ce qui se passe chez quelqu'un. Ils ont besoin de moyens, autrement, ils sont grandement désavantagés.
    Comme je l'ai dit au départ, ce serait un message pour les femmes victimes de violence familiale, ici et ailleurs, que nous devons nous attaquer plus sérieusement à ce problème. Beaucoup d'efforts ont été déployés, mais c'est encore trop peu. Nous entendons tous parler trop souvent de cas horribles, de façon répétée, il y en a trop, on en entend trop parler. Si nous savons que 71 p. 100 des homicides conjugaux sont commis avec des armes d'épaule, comment peut-on justifier l'élimination de cette partie du registre? Quiconque appuie cette élimination nous dit que nous ne faisons pas tout ce qu'il faut, tout ce qui est possible pour mettre un frein ou réduire de beaucoup la violence familiale, surtout envers les femmes.
    Je vois les faits et j'appuie la motion. À mon avis, si nous laissons faire le gouvernement, le temps prouvera que nous avions mal réfléchi et que nous avions été mal orientés.
    On nous a aussi dit qu'une grande part des problèmes et des dépassements de coûts étaient attribuables, d'après la vérificatrice générale et d'après M. Baker, à l'opposition au registre par le lobby des armes à feu. C'est une question que j'avais posée à la vérificatrice. Cela a retardé l'entrée en vigueur de la loi, comme nous le savons bien, et a donné lieu à des dépassements de coûts et à des problèmes.
    Nous avons donc à prendre ici une décision importante en tant que comité de la sécurité publique. Nous avons la possibilité d'éviter au Parlement de commettre une grave erreur, si l'on s'engageait dans cette voie et que l'on supprime cette partie du Registre des armes d'épaule.

  (1555)  

    Notre comité a enfin l'occasion—je suis d'accord avec M. Ménard pour dire que nous n'avons pas encore eu cette occasion—de nous assurer que nous ne contribuons pas à réduire ou à mettre en péril la sécurité des Canadiens.
    Merci.
    Monsieur Holland, vous avez la parole.
    Merci, Monsieur le président.
    Je suis heureux d'être membre de ce comité et d'être ici aujourd'hui. Je me réjouis de pouvoir intervenir sur la motion qu'a déposée M. Ménard. Je ferai deux ou trois observations.
    Premièrement, j'ai siégé au Conseil des services de la police régionale de Durham pendant un certain temps et j'ai donc pu voir à quoi servait ce registre en pratique et non pas seulement en théorie. En siégeant à ce conseil, j'ai pu voir quelle utilisation on faisait de ce registre quotidiennement, j'en ai parlé à des agents et avec le chef de police et celui qui l'a remplacé et j'ai pu voir que ce programme était utile.
    Mme Kadis a donné des chiffes qui méritaient d'être soulignés. Il est important de savoir que la très grande majorité de nos chefs de police appuient ce programme. Nous n'avons pas que quelques témoignages, mais de véritables preuves de l'efficacité du registre pour la police sur le terrain, du fait que ce registre constitue un service important.
    Je sais que certains disent que ce ne sont pas les armes à feu qui tuent, mais bien les personnes qui s'en servent, mais la réalité c'est que... deux choses méritent d'être signalées. Premièrement, nous sommes trois fois plus susceptibles de mourir d'une blessure par balle que d'une blessure de couteau, et tuer quelqu'un avec un couteau nécessite une volonté, une mens rea, si vous voulez, considérable. Vous devez poursuivre votre victime et la poignarder à répétition, ce qui est bien différent de tirer un coup de feu d'une arme d'épaule ou d'une arme de poing. Ça ne signifie pas qu'il faut interdire toutes les armes, mais il est évident que qu'il s'agit de deux choses différentes.
    Il y a une chose, qui à mon avis, doit être surveillée... et le registre a fait ses preuves non seulement en ce qui concerne l'application des ordonnances de prohibition ou dans les cas de violence familiale, comme on l'a déjà signalé, mais à d'autres égards. Il est certain que le programme n'est pas parfait. J'ai siégé au Comité des comptes publics à la dernière session. Il ne fait aucun doute que, surtout avant 2002, le programme avait de graves problèmes. À mon avis, il serait téméraire de le nier. Mais comme l'a dit la vérificatrice générale—j'ai pu l'interroger à ce sujet à une séance du Comité des comptes publics il y a plusieurs semaines—la plupart de ces problèmes ont été corrigés. Elle continue de croire que le mandat devrait être mieux défini, et a soulevé deux ou trois autres questions, mais rien qui justifierait l'annulation du programme.
    Alors quels seraient les avantages de la disparition de ce programme? Nous n'économiserions qu'une somme d'argent négligeable toutes normes confondues. On ne s'entend pas encore sur la somme précise, peut être 10 millions de dollars, peut être moins, mais dans un budget comme celui du gouvernement du Canada, c'est très peu.
    En revanche, que perdrions-nous? Nous perdrions une ressource essentielle pour nos services de police, un programme qui permet d'assurer la sécurité du public. C'est illogique. C'est insensé. Il est insensé d'invoquer des arguments antérieurs à 2002 pour tenter de supprimer un outil utile et important.
    J'espère qu'on reconnaît que ce gouvernement est minoritaire. J'espère que la motion déposée par M. Ménard sera adoptée et, si elle l'est, que le Parlement fera connaître sa volonté dans ce dossier. Je suis fermement convaincu—et, bien sûr, cela se confirmera—que la majorité des parlementaires appuient le programme et que ce serait une erreur que de le supprimer.
    Nous devons examiner ce programme dans son contexte actuel, en fonction de ses résultats et nous demander ce que nous gagnerions véritablement si nous l'abolissions.

  (1600)  

    Monsieur MacKenzie.
    Merci, monsieur le président.
    Si la motion est adoptée, et il semble évident qu'elle le sera puisque vous êtes plus nombreux de votre côté que du nôtre, j'espère que nous pourrons convoquer des experts. Je ne crois pas en être un moi-même, mais je n'aime pas non plus les hypothèses et j'ai travaillé dans ce domaine. J'étais chef de police quand cette mesure a été adoptée. C'est un peu une affaire de famille car j'ai un fils, un gendre et un neveu dans la profession.
    Ce dont vous parlez, ce n'est pas le registre. Vous parlez du contrôle des armes à feu. Le registre ne donne pas de contrôle. Le contrôle des armes à feu découlait du projet de loi C-17 qui portait sur la manipulation sécuritaire, l'entreposage et la nécessité d'obtenir une autorisation d'acquisition d'arme à feu. Cette loi n'éliminera pas les permis.
    Le problème que pose le registre des armes d'épaule, c'est qu'il comporte de nombreuses erreurs, en partant: les gens sont désormais des criminels du simple fait qu'ils n'ont pas enregistré leurs armes à feu. Le registre ne nous donne qu'une idée de la présence d'armes d'épaule dans une résidence. Nous savons maintenant que le danger vient des armes de poing.
    M. Ménard a parlé des fusils et des carabines tronçonnées. L'une des raisons pour lesquelles on coupe le canon d'un fusil de chasse, c'est parce qu'on ne trouve pas d'armes de poing qui puissent tirer des cartouches de fusils de chasse. C'est l'une des raisons.
    Quand le projet de loi C-17 a été adopté, il faut bien reconnaître que les propriétaires d'armes à feu n'étaient pas particulièrement contents. La grande majorité d'entre eux étaient probablement mécontents des mesures relatives au maniement et à l'entreposage sécuritaires, les obligeant à remiser séparément les munitions et les armes à feu, en plus d'avoir à obtenir un AAAF. Avec le temps, ils ont toutefois compris que c'était un facteur important pour éviter les morts accidentelles, surtout là où il y avait des enfants qui pouvaient mettre la main sur des armes à feu chargées, etc.
    Par ailleurs, le problème a toujours été lié aux armes de poing. Vous avez cité des chiffres. Je pense que vous avez commis deux erreurs, en attribuant la baisse des homicides à la création du registre. En fait, je vous dirais que la réduction vient en grande partie de la nécessité d'obtenir un AAAF et des mesures de maniement et d'entreposage sécuritaires.
    Il y a encore des homicides familiaux commis avec des armes à feu mais aussi avec toutes sortes d'armes, et d'autres homicides commis par des personnes qui se servent des armes à leur portée, qu'il s'agisse de couteau ou de marteau. Dans un cas, c'était un grille-pain. Les armes ne sont pas nécessairement des armes à feu, vous le savez bien.
    C'est tiré par les cheveux, quand on attribue la réduction de la criminalité au registre des armes d'épaule; il n'a rien à voir avec la réduction de la criminalité. Il est possible que sans le vouloir, on est enlevé leurs armes à certaines personnes, parce qu'elles n'allaient pas les enregistrer, mais c'est probablement tout. Il n'y aura plus d'autres cas semblables. Il s'agit de personnes âgées qui avaient des armes à feu et qui ont décidé pour une raison ou pour une autre de ne pas enregistrer leurs armes d'épaule.
    J'attire votre attention sur ceci. Je suis heureux de vous en faire part. Il s'agit d'une demande faite par le ministère le 13 octobre 2004.
    Monsieur Ménard, je pense que cela vous intéressera.
    J'en fais la lecture:
Dans les statistiques sur la criminalité, les tendances peuvent être influencées par divers facteurs, y compris des changements sociodémographiques et économiques, des changements législatifs et des changements de programme, ainsi que des changements aux pratiques policières. On ne peut pas isoler des autres facteurs l'incidence particulière du programme des armes à feu ou du registre des armes à feu.
    Je dépose ceci à l'intention de la greffière. C'était en caractères gras dans ce document du ministère.
    Je comprends vos arguments, mais je pense que vous avez tiré des conclusions de choses qui peuvent ne pas avoir été influencées par le registre. Conserver le registre alors que les ressources qui y sont consacrées pourraient être mieux employées, qu'il s'agisse d'argent ou de ressources humaines consacrées au fonctionnement d'un système...
    Mme Kadis a parlé du nombre de consultations du registre. J'ai parlé à des policiers qui travaillent sur le terrain et en gros, ces consultations se font automatiquement, à chaque demande faite au CIPC. En effet, vous pouvez régler votre CIPC, ou votre propre système informatique, comme le font certains ministères, de manière que lorsqu'il y a une demande « 10-28 », soit une vérification d'immatriculation de véhicule, vous obtenez le nom du titulaire du véhicule immatriculé, mais aussi les résultats d'une consultation du registre des armes à feu.
    Ne vous méprenez pas: on ne consulte pas le registre des armes à feu 6 500 fois par jour. La grande majorité des demandes, ou presque toutes, sont faites à cause du lien qui est fait automatiquement par le système.

  (1605)  

    Le simple fait est que vous avez vérifié l'immatriculation d'un véhicule et découvert le nom du propriétaire inscrit... et le fait que ce particulier a des armes à feu à son domicile ne veut rien dire. Son domicile ne vous intéresse absolument pas. Si vous vous rendiez à une maison et que vous décidiez de vous fiez à ces renseignements à savoir s'il y a ou pas des armes à feu dans cette maison, parce que vous avez vérifié le registre des armes à feu, vous allez vous retrouver avec des policiers morts.
    Ils n'ont pas confiance au système, et ils ne peuvent pas lui faire confiance. Ce n'est pas parce qu'il y a quelque chose qui cloche avec le registre, mais vous ne savez pas vraiment s'il y a des armes dans ce domicile ou pas. La personne qui vraisemblablement va se servir d'une arme à feu posséderait cette arme parce qu'elle l'aura volée pour quelque raison que ce soit.
    Donc, les armes à feu ne seront pas enregistrées. Ce registre n'accroît pas la sécurité de mon fils, mon gendre ou mon neveu, et je crois que pour cette seule raison on devrait affecter ces ressources à d'autres fins.
    Si vous insistez pour appuyer cette motion, dans ce cas-là je devrai vous dire que le temps est venu d'inviter des témoins qui représentent les deux camps pour que l'on sache vraiment ce que le système permet d'accomplir. À mon avis, ce registre est beaucoup moins utile qu'on ne vous l'a dit.
    Madame Freeman.

[Français]

    Monsieur MacKenzie, je vous remercie de votre exposé.
    Je voudrais souligner quelque chose de très clair. Je viens d'une circonscription où il y a beaucoup de chasseurs. Je suis avocate de formation et j'ai souvent rencontré des femmes qui étaient victimes de violence conjugale et qui étaient en grande difficulté. Je pense qu'on ne prend pas suffisamment en considération ce que représente le Registre canadien des armes à feu pour les femmes. Pour les groupes de femmes que je rencontre, c'est une sécurité, et je peux vous dire que dans la pratique quotidienne, c'est quelque chose d'incontournable.
    Je ne veux pas savoir si on a utilisé 6 500 fois le Registre des armes à feu, car je trouve cela illusoire, dilatoire et même absolument inapproprié. L'utilité du registre n'est pas fonction du nombre de fois qu'on l'utilise, mais bien de sa pertinence quand on l'utilise. Quand des femmes sont en danger, il est extrêmement important qu'on sache où sont les armes pour qu'on puisse aller les récupérer. On banalise le fait que le registre est un élément de sécurité pour les femmes de ce pays. Je viens du Québec et je suis ici pour d'autres raisons, mais je pense qu'on banalise beaucoup trop cet aspect.
    J'aimerais vous faire part de certaines statistiques. Depuis que le registre existe, le nombre d'homicides de femmes avec arme à feu a diminué de 31 p. 100. Je dois vous dire que ce ne sont pas des statistiques banales. Je ne veux pas savoir combien de fois les politiciens ont consulté le registre, mais il est bon de savoir que le nombre d'homicides a diminué de 31 p. 100.
    J'ai fait mes études à l'Université de Montréal. Les événements de Polytechnique nous ont vraiment tous marqués. Je ne pense pas qu'on puisse les banaliser et se départir de ce registre. Il a tous les défauts du monde, mais il comporte quand même des avantages.
    Je pense qu'on oublie ce que représentent les armes à feu pour les femmes et je me sens obligée de remettre ces préoccupations en évidence. Le taux d'homicides aux États-Unis est trois fois plus élevé qu'au Canada. Le taux d'homicides dont les femmes sont victimes y est cinq fois plus élevé qu'au Canada. Le taux d'homicides de femmes par arme à feu aux États-Unis est huit fois plus élevé qu'au Canada. Ces différences sont largement attribuables au fait que les armes à feu sont mieux contrôlées au Canada qu'aux États-Unis.
    Depuis l'instauration du Registre canadien des armes à feu en 1995, le taux d'homicides de femmes par arme à feu a baissé de 30 p.100, alors que le taux d'homicides de femmes a légèrement augmenté de 2 p. 100.
    Ce registre est extrêmement important pour les femmes en raison de tout cela. Les femmes sont particulièrement satisfaites de l'article 111 du Code criminel, parce qu'il permet que leur conjoint qui souffre d'une grave dépression... On parle de la vie de gens ordinaires de chacune de nos circonscriptions. Une des rares façons de récupérer les armes à feu de ces conjoints est d'avoir recours à une disposition de l'article 111. L'article 111 s'applique aux maris qui deviennent de plus en plus violents et permet aux femmes de s'adresser à la police et au tribunal pour obtenir une ordonnance.
    Pour toutes les raisons que je viens d'énoncer, je vais appuyer la motion de M. Ménard. Il faut vraiment réfléchir à toutes ces femmes et à toutes ces vies qui ont été sauvées. Voilà ce que je voulais dire, monsieur le président.

  (1610)  

[Traduction]

    Merci.
    Je vais vous donner le nom de ceux qui figurent sur ma liste d'intervenants: M. Hawn, M. Lee, M. Comartin, et puis M. MacKenzie.
    Monsieur Hawn.
    Merci, monsieur le président.
    Comme le disait mon collègue, à sept—moins quatre—vous allez nécessairement gagner, mais je tiens à présenter mes arguments.
    Comme mon collègue, je pense que si nous faisons cela, il va falloir convoquer un bien plus grand de témoins qui ont une expérience concrète. On parle des policiers de première ligne mais cela me dérange un peu. J'ai parlé à de très nombreux policiers, et plus récemment à un commissaire adjoint de la GRC, et pas un seul de ceux auxquels j'ai parlé ne se fierait à ce registre, ou ne s'y fie, dans quelque mesure que ce soit. J'ai bien du mal à accepter qu'on me dise qu'ils le font, parce que je sais que c'est faux.
    Au sujet des 6 500 requêtes par jour, vous dites qu'il ne faut pas contester ce nombre et je suis désolé, il faut le remettre en question. Cette statistique mal citée permet une désinformation et dénature l'argumentation. Il est tout simplement faux de dire qu'il y a 6 500 interrogations ou requêtes pour le registre des armes à feu et que par conséquent, il doit être utile. Mon collègue a expliqué comment les choses se passent. Je pense que vous savez que c'est vrai. L'expérience britannique et australienne, avec des lois aussi draconiennes qui existent depuis plus longtemps que les nôtres a prouvé que c'est inefficace.
    À l'école Polytechnique, un crime manifestement horrible s'est produit. Le registre des armes à feu n'aurait pas pu empêcher le drame de l'école Polytechnique. Vous ne pouvez pas arrêter un déséquilibré qui a l'intention de commettre un pareil crime. Le registre n'aurait eu aucun impact.
    On dit que nous voulons prendre des mesures draconiennes, mais nous ne voulons pas abroger la loi qui est devenue le projet de loi C-17, pas du tout. Elle existe depuis longtemps et elle va demeurer dans nos lois. Le comportement criminel n'a pas changé. Nous ne parlons pas de l'objet inanimé, mais de la personne. Quand vous comparez les drogues et les armes à feu, rappelons que les drogues sont illégales, point final. Les armes à feu sont légales, avec parfois des restrictions, comme le prévoyait le projet de loi C-17.
    Les armes à feu qui causent le plus de tort au Canada sont des armes à feu illégales. Il va de soi que les criminels n'enregistrent pas leurs armes à feu, nous le savons bien. Ces armes ne sortent pas du sous-sol de quelqu'un, elles ont traversé la frontière. C'est un fait. Toute association policière vous le dira. L'Agence des services frontaliers aussi. Personne ne niera que les femmes, les Canadiens, et tout le monde a besoin de protection contre ceux qui veulent délibérément leur faire du mal.
    J'ai une autre objection, au sujet des statistiques qu'on cite, et qui remontent à 1995, alors que le registre des armes d'épaule n'existe que depuis 1998. Les réductions dont on parle, entre 1995 et 1998, n'ont rien à voir avec la question dont nous sommes saisis. Comme pour bien d'autres discussions, ce qui m'embête, ce que d'un côté comme de l'autre, on se sert de données et statistiques trompeuses, de demi-vérités, pour faciliter l'argumentation. Tout le monde le fait, quel que soit le camp que l'on opte, et je suis le premier à le reconnaître.
    En terminant, si nous voulons faire cela, je propose que nous convoquions des témoins, y compris de vrais policiers, et non des associations de chefs de police. Je ne sais pas pourquoi on choisit l'option qui leur convenait politiquement, mais je peux vous dire que les policiers du rang, y compris des commissaires adjoints de la GRC, sont contre ce registre. Je pense comme eux.
    Si c'est l'option que nous retenons, il y a bien d'autres personnes avec qui nous devrons nous entretenir, et je vous exhorte à le faire.
    Merci, monsieur le président.

  (1615)  

    Merci.
    C'est à vous, monsieur Lee.
    Mon collègue propose donc que si l'on décide d'agir de cette façon, il faudra rencontrer beaucoup plus de témoins. J'ai entendu ce qu'a dit M. MacKenzie également. Je dois dire que je suis d'accord, mais ce n'est pas à vous messieurs qu'il incombe de prendre ces mesures mais plutôt au gouvernement qui n'est pas ici aujourd'hui. Le gouvernement semble avoir décidé d'agir de cette façon sans avoir consulté nombre de ces intervenants. Je pense donc qu'il incombe au gouvernement de suivre ce petit processus au lieu de simplement s'engager dans cette voie pour respecter une promesse électorale. Je me prêterai volontiers à cet exercice.
    Je dois reconnaître qu'il y a quelques années, j'ai beaucoup hésité avant d'approuver la création d'un registre des armes d'épaule. J'étais des libéraux qui doutaient de l'utilité d'un tel registre. J'ai même mis ma carrière en péril et j'ai refusé d'accepter ces propositions pendant plusieurs années. J'ai changé d'avis quand j'ai constaté que les armes d'épaule présentaient un problème. Il n'est pas difficile de trouver des exemples.
    Nous n'avions pas vraiment vu des exemples clairement parce que lorsqu'on se penche sur le cas des armes d'épaule, dans l'ensemble on songe aux chasseurs sportifs légitimes. Pas de problème; il y a peut-être une question de manutention sécuritaire mais ça n'a rien à voir avec le Code pénal. Vous avez les tireurs de compétition. Aucun problème. Vous avez les collectionneurs, ceux qui font des reconstitutions historiques; encore une fois pas de problème. Puis vous avez ceux qui chassent pour assurer leur subsistance, tout particulièrement dans le Grand Nord, où ils utilisent les armes d'épaule pour se procurer de la nourriture.
    Il s'agit là d'utilisation légitime. C'est habituellement ce à quoi on pense quand on parle de l'utilisation des armes d'épaule au Canada. Il serait impossible de penser à cette arme à feu et dire que cela représente un gros problème de criminalité, parce que cela fait partie du patrimoine canadien.
    Il y a trois choses qui doivent être mentionnées, et je crois qu'elles l'ont été d'ailleurs. Tout d'abord, dans 71 p. 100 des agressions contre les femmes avec des armes à feu, les armes d'épaule interviennent. Si vous êtes un homme, 29 p. 100 des cas d'agressions armées mettent en jeu des armes d'épaule. Si vous êtes une femme, le taux est de 71 p. 100. Les deux camps sont très différents. Donc la canadienne moyenne va nous dire, à nous parlementaires: fichtre, il existe un problème. Nous ne savons pas vraiment pourquoi, mais le problème existe avec les armes d'épaule et non pas les armes de poing.
    Deuxièmement, l'événement qui a en fait lancé tout le mouvement du contrôle des armes à feu a été le massacre à l'école Polytechnique. L'auteur du crime s'est servi d'un mini-Ruger, une arme d'épaule. Donc lors de ce massacre une arme d'épaule a été utilisée. A l'occasion du plus récent événement , un événement tragique et triste, quatre agents de la GRC ont été tués à Mayerthorpe par des armes d'épaule. Nous jouerions à l'autruche si nous disions que l'arme d'épaule ne pose pas de problème, compte tenu les exemples dont nous disposons.
    Le gouvernement songe à abolir le registre, mais il n'y a pas eu d'examen des économies éventuelles. Ce n'est pas la seule chose à laquelle on pense, faire des économies, mais ce serait quand même un facteur pertinent. Nous voudrions également savoir quels avantages a présenté ce registre. Tout le monde n'est pas du même avis quant aux avantages découlant de la création du registre.
    Les policiers vérifient-ils le système? Bien sûr que oui. Est-ce qu'il y a 6 500, 1 000 ou 3 000 consultations par jour, par semaine, peu importe? Nous savons simplement qu'ils consultent le système, et tous les policiers ne sont pas du même avis quant à l'utilité du registre. Il se peut fort bien qu'ils s'en servent pour des motifs différents selon la ville, la localité ou la province. Lorsqu'ils consultent le CIPC, ou autre forme d'accès pour consulter le registre des armes à feu, ils se servent pour diverses raisons des renseignements généraux disponibles.

  (1620)  

    Les données dont nous disposons sur la criminalité... et je serai le premier à reconnaître que ce que je vais dire touche plutôt les questions de sociologie peut-être que les avantages directs découlant d'un régime de contrôle des armes à feu. Les statistiques révèlent d'importantes améliorations en matière de sécurité des Canadiens depuis cinq à dix ans, donc en partie depuis que le registre des armes à feu existe. Je ne peux pas dire qu'une seule de ces améliorations est directement attribuable au registre des armes à feu, parce que je ne peux pas le prouver. Mais je suis convaincu que ce registre a présenté certains avantages.
    Le taux d'homicide des femmes tuées par des armes à feu a chuté de près de 67 p. 100 depuis dix ans environ. Une chute de 67 p. 100 depuis dix ans : je voudrais bien savoir à quoi cela est attribuable. Était-ce le contrôle des armes à feu? Peut-être. Avons-nous recueilli toutes les armes non utilisées qui se trouvaient accrochées dans les cuisines ou les salons? Avons-nous enlevé à tous ceux qui n'auraient pas dû avoir accès à des armes à feu, celles qu'ils détenaient? Est-ce simplement un pur hasard que 71 p. 100 des femmes qui sont victimes d'agressions par des gens qui se servent d'armes d'épaule... est-ce que tout cela explique la chute de 67 p. 100 du nombre de femmes tuées par une arme à feu au cours des 10 dernières années. Les chiffres sont énormes. Si j'étais une femme je dirais : « je ne sais pas ce que vous faites, mais continuer dans la même voie ». C'est une chute dramatique.
    Le taux d'homicides lors desquels on a utilisé des carabines et des fusils de chasse a également chuté de la même façon, 68 p. 100, pendant la même période. Les homicides causés par des armes à feu ont baissé de 37 p. 100, un taux qui peut être comparé à celui qui touche les femmes. J'aimerais vous rappeler encore une fois que la chute était de 67 p. 100 en ce qui a trait aux actes criminels dont les femmes sont les victimes. Le taux général n'était que de 37 p. 100.
    En 1991, 652 personnes de plus qu'en 2003 ont été tuées par des armes à feu. En une seule année. 652 personnes ont pu continuer à vivre parce qu'il y a eu une chute du taux d'homicides par armes à feu.
    Il y a donc de bonnes choses qui se produisent, et cela est en partie attribuable à mon avis au registre des armes à feu; cependant, le registre ne peut pas être la seule explication. Il y a d'autres bonnes choses qui se produisent.
    Puisque nous avons déjà un registre des armes à feu, et je sais que le gouvernement songe à se défaire du programme d'enregistrement des armes d'épaule, je crois que c'est au gouvernement même ou peut-être même au Parlement qu'il appartient de se pencher sur ce dossier de vérifier les données, les statistiques, et de préciser pourquoi on voudrait changer le statu quo. J'aimerais participer à cette étude, mais je ne sais pas combien de temps il faudrait consacrer à une telle enquête. Il est clair que nous ne pourrons pas le faire avant le congé d'été.
    Je crois que le comité a parfaitement raison d'encourager le gouvernement à ne pas agir trop rapidement. J'appuierais une motion exhortant le gouvernement à ne pas se défaire du registre tant qu'on n'aura pas eu l'occasion de vérifier certaines des choses qui ont été mentionnées.
    Je vais m'arrêter là.
    Merci, monsieur le président.

  (1625)  

    Merci.
    Voulez-vous qu'on se penche là-dessus immédiatement? S'agit-il d'une motion?
    Non, je suis simplement d'accord avec certains des autres députés qui ont pris la parole, et qui proposent que quelqu'un devrait—
    Si le gouvernement ne veut pas procéder à cette enquête, parce qu'il se sent engagé par une promesse électorale, très bien. Cependant le Parlement n'a pas fait de promesse électorale. Notre responsabilité entre autres à titre de députés est de passer au crible les décisions que prend le gouvernement.
    Je ne veux pas dire à mes collègues ce qu'ils devraient faire—c'est plutôt une chose dont devrait se charger le sous-comité du programme—mais la motion est bien claire. Je n'ai aucune difficulté à appuyer cette motion, mais il appartient au comité au complet de décider s'il veut lancer une enquête. Nous sommes probablement le seul comité parlementaire qui soit capable de le faire, à moins que le Sénat, l'autre endroit, décide de s'en charger.
    Monsieur Comartin.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais revenir sur ce que disait pour finir M. Lee et ajouter une ou deux choses.
    Cette motion vise en fait à essayer de communiquer au gouvernement qu'il lui appartient de justifier ce qu'il fait à huis clos alors qu'il devrait le faire en public. Il a reçu des avis juridiques l'informant qu'il ne peut se débarrasser du registre des armes d'épaule, parce que le gouvernement canadien doit présenter un registre des armes d'épaule—je sais qu'il existe au moins deux opinions juridiques dans ce sens—et qu'il ne devrait pas poursuivre sur cette voie, comme il semble vouloir le faire, sans soumettre un amendement à la Chambre afin de voir s'il peut faire modifier cette loi.
    Tant qu'il ne l'aura pas fait, il est irresponsable et imprudent pour le gouvernement de poursuivre dans ce sens. C'est en plus antidémocratique. Pour un gouvernement qui a pris le pouvoir en invoquant la corruption du gouvernement qui l'a précédé, et à parler de responsabilisation en employant tous ces autres mots à la mode, c'est vraiment le comble de l'hypocrisie.
    La motion est donc tout à fait appropriée. J'espère que les députés ministériels vont l'approuver, mais je n'y compte pas trop, étant donné le capital politique qu'ils ont investi dans la question.
    Monsieur le président, j'aimerais maintenant revenir sur une ou deux questions précises posées par des Conservateurs, notamment M. MacKenzie, sur toute la question des consultations du registre. Elles vont continuer parce qu'on cherche à savoir s'il y a des armes de poing, des armes à autorisation restreinte, chez ces gens-là. Rien ne changera; aussi, le coût du registre va demeurer même si nous nous débarrassons du registre des armes d'épaule. Cela ne va pas économiser un sou d'après moi. Il y aura quelques économies de personnel, parce que l'on va mettre à pied certaines personnes qui reçoivent les demandes d'inscription d'armes d'épaule au registre mais, sinon, il n'y aura aucune économie. Les coûts vont demeurer les mêmes.
    La question des conséquences imprévues est évidemment l'un des avantages que nous aurions si nous entendions des témoins à ce sujet. Je ne vois pas de raison de m'opposer à cela. En fait, j'y serai favorable. Il y a eu d'importantes conséquences imprévues. Nous avons sorti d'un à deux millions d'armes des mains de gens qui ne voulaient pas les utiliser. Ces armes étaient volées, étaient mal utilisées, n'étaient pas rangées de façon sûre. C'est une des conséquences imprévues que l'on a constatées. Ce n'était pas prévu.
    Comme l'a dit Mme Freeman, cela a certainement rendu un peu de tranquillité, en particulier aux femmes, parce que nous savons qu'elles sont les principales victimes de violence au moyen d'armes d'épaule dans les relations familiales, beaucoup plus que le reste de la société ou que leurs partenaires.
    Vous savez, monsieur le président, si nous étions réellement sérieux à propos de la criminalité attribuable aux armes de poing, nous insisterions sur le registre des armes d'épaule. Nous insisterions sur tout le registre. Les provinces, en particulier celles de l'Ouest, ont choisi de ne pas le faire. J'estime que c'est irresponsable. Mais si nous voulions réellement nous attaquer au problème, plutôt que de consacrer tous ces efforts à éviter de respecter la loi, si nous la respections vraiment, nous pourrions probablement diminuer considérablement le nombre de crimes à main armée.
    M. Hawn et M. MacKenzie peuvent parler des entretiens qu'ils ont eus avec... parce que moi aussi, je parle avec des agents de police et la réalité, c'est que les chefs de police et l'association professionnelle ont déclaré et voté, voté de façon démocratique au sein de l'une et l'autre de ces organisations, qu'ils continueraient à soutenir l'idée du registre. Tous veulent que cela coûte moins cher, ce qui est déjà le cas et qui peut aller plus loin. Lorsque le système informatique fonctionnera bien, on pourra encore diminuer les coûts.
    Enfin, ce que je veux dire, c'est que depuis le début de l'année, j'ai assisté aux funérailles de deux agents de police, un dans ma circonscription. Celui-ci a été tué avec une arme de poing. C'était à Laval, en banlieue de Québec. Cette jeune femme a été tuée avec une arme d'épaule.

  (1630)  

    Vous le savez bien, monsieur le président, parce que vous étiez là lorsque nous avons reçu la lettre du chef de police ici à Ottawa. Elle indiquait un chiffre que j'ai trouvé intéressant et plutôt convaincant. Si l'on considère les 20 dernières années, et notamment les 10 dernières années depuis que le registre existe, plus d'agents de police ont été tués à l'aide d'armes d'épaule que d'armes de poing.
    Cela ne minimise en aucune façon le problème actuel, le fait que l'on utilise de plus en plus des armes de poing. C'est très clair et nous savons pourquoi. Il y a un trafic beaucoup plus important qui vient des État-Unis qu'il y a cinq ou sept ans, essentiellement dû aux bandes de motards. Il nous faut déployer davantage de ressources.
    Encore une fois, il nous faut nous montrer plus sévères dans ces secteurs mais se débarrasser du registre des armes d'épaule ne fera rien pour régler le problème. Cela ne fait rien face à la réalité que les armes d'épaule restent un problème de criminalité. Il ne fait aucun doute que les pourcentages ont changé. Nous avons davantage de problème d'armes de poing. Mais, en termes absolus, nous avons autant de problèmes d'armes d'épaule qu'auparavant — sauf, comme vous avez entendu les statistiques citées par M. Ménard et Mme Freeman, que les suicides ont diminué, que les morts accidentelles ont diminué et que la violence familiale a également diminué en ce qui concerne les armes d'épaule.
    Toutefois, le problème demeure. Je ne suis pas naïf, je ne m'enfouis pas la tête dans le sable et je ne prétends pas que nous n'avons pas de problèmes d'armes de poing et d'armes à autorisation restreinte. Nous en avons et cela a empiré ces dernières années. Mais la raison pour laquelle cela a empiré n'a rien à voir avec les armes d'épaule. Ce problème n'a pas diminué. Il demeure, si ce n'est des économies dont je parlais.
    Pour revenir à la motion proprement dite, il me semble qu'elle est tout à fait appropriée. J'espère que le gouvernement va comprendre que sa responsabilité est en cause. C'est au gouvernement de prouver qu'il doit modifier la loi et c'est la façon dont il doit s'y prendre, pas dans l'ordre inverse, pas en le faisant par derrière, pas en le faisant sans l'autorisation du Parlement.
    C'est ainsi qu'il est censé agir. Toutes les mesures qu'il prend actuellement visant à démanteler le registre des armes d'épaule devraient être immédiatement interrompues. C'est vraiment là l'objet de cette motion. Nous devrions avoir des audiences à ce sujet. Le comité devrait s'en charger. Mais tant que cela n'aura pas été fait et tant que l'amendement n'aura pas été adopté par la Chambre — et je ne pense pas qu'il sera jamais adopté par la Chambre — le gouvernement devrait cesser ce qu'il est en train de faire.
    Merci, monsieur le président.
    Avec la permission du comité, il y a une statistique que vous avez mentionnée, monsieur Comartin, dont je n'étais pas encore au courant. Vous avez dit qu'on avait empêché entre un et deux millions d'armes à feu de se retrouver entre de mauvaises mains. Où avez-vous obtenu ces données?
    Ces données viennent...
    De la coalition.
    Oui.
    Je suis désolé, Mme Freeman a raison; ces données viennent de la coalition.
    Monsieur MacKenzie.
    J'aimerais réitérer quelques arguments.
    Premièrement, le projet de loi C-68 ne vise pas le contrôle des armes à feu. C'est là notre problème. L'enregistrement des armes à feu n'équivaut pas au contrôle des armes à feu. Le projet de loi C-17 visait le contrôle des armes à feu, et en vertu de celui-ci les gens devaient obtenir une autorisation d'acquisition d'armes à feu (AAAF).
     La baisse de certaines de ces statistiques est en partie attribuable au fait qu'il y a eu des demandes d'autorisation et que les policiers ont eu à faire des vérifications. Certaines personnes se sont vu refuser le privilège d'obtenir des armes à feu.
    À mon avis, en ce qui a trait aux armes d'épaule, vous faites beaucoup trop de présomptions en faveur du projet de loi C-68.
    Monsieur Comartin, je crois que vous avez bien illustré votre argument lorsque vous avez parlé des deux policiers qui ont été tués. Un a été tué avec une arme de poing, l'autre avec une arme d'épaule. Dans le cas de l'arme de poing, l'homme faisait l'objet d'une ordonnance de la cour lui interdisant de posséder une arme à feu sauf pour la chasse. Il pouvait donc en posséder à cette fin.

  (1635)  

    Avec une arme d'épaule.
    Oui... Oh, je suis désolé. Mais en fait, cet homme ne pouvait être en possession d'une arme d'épaule sauf pour la chasse.
    Si la loi avait été appliquée, cet homme n'aurait pas été en possession de cette arme. Il n'était pas qualifié pour avoir cette arme. Il était instable mentalement. La loi l'aurait empêché d'être en possession de l'arme. Le juge a dérogé à cette loi.
    Le tribunal. Et c'est exactement mon argument. Cet homme n'aurait pas dû être en possession d'une arme au départ, que ce soit une arme d'épaule ou une arme de poing. Ce que l'on voit ici, ce n'est pas le contrôle des armes à feu.
     Pour ce qui est de la question des armes d'épaule et des armes à feu, je veux que chaque agent de police sache où se trouvent les armes à feu. Il ne s'agit pas de savoir combien il y en a; s'il y a une arme à feu, je voudrais que l'agent de police sache où elle est. Il n'est pas important de savoir s'il y en a une ou s'il y en 20; cela ne fait aucune différence. Et c'est exactement ce qui se passe dans ces cas-là.
    Le projet de loi C-68 ne rend pas la vie des agents de police plus sécuritaire. Nous disons qu'il faut se débarrasser du registre des armes d'épaule, mais les gens doivent toujours posséder un permis. Les agents de police peuvent continuer à vérifier le système, et c'est ce qu'ils feront, pour s'assurer qu'il y a... En fait, le système dira aux agent de police s'il devrait y avoir des armes à feu à cet endroit là, mais ne leur dira pas s'il y en a bel et bien dans la maison.
    Ne nous leurrons pas, cette partie ne change; c'est la partie où l'on dit aux gens qu'ils doivent avoir un permis pour être en possession d'une arme à feu. Le type d'armes à feu importe peu. Le fait qu'une arme d'épaule figure au registre ne change pas la situation et ne rend pas la vie des agents de police, ni de quiconque, vous ou moi, plus sécuritaire.
    Merci.
    Monsieur Norlock.
    J'aimerais expliquer à Mmes Kadis et Freeman le rapport entre les armes d'épaule et la sécurité des femmes et de notre société.
    Désolé de me répéter mais j'ai été policier pendant 30 ans. Je n'ai jamais été chef de police et j'ai passé la majorité de ma carrière comme agent de première ligne. Je dois vous avouer qu'au début les forces de l'ordre ne répondaient pas bien aux besoins des femmes. Quand un incident domestique se produisait, on séparait les combattants et on disait ensuite à la femme de se trouver un lieu sûr où elle serait à l'abri du danger et que si le lendemain elle voulait toujours porter une accusation, on l'aiderait à trouver un juge de la paix pour le faire. Je peux vous assurer qu'il y a beaucoup de policiers de première ligne, comme moi, que cela dérangeait. Mais les policiers suivent les règles de leur département.
    C'est l'inverse qui se produit aujourd'hui, Dieu merci: essentiellement la responsabilité incombe au policier en ce qui concerne la sécurité de la femme et de ses enfants. Et d'ailleurs comme je me plaisais à le dire à l'époque, pourquoi serait-ce à eux de quitter le domicile? On devrait plutôt arrêter le mari, ou le délinquant dans la résidence en question — il est très rare que ce soit une femme — et le mettre en prison jusqu'à ce que son enquête sur le cautionnement le lendemain. À mon avis, c'est la seule chose à faire. La violence conjugale ne devrait en aucune manière être tolérée.
    Pour ce qui est du fait que les femmes se sentent plus en sécurité, et que les statistiques — vous parlez de statistiques et moi de preuves empiriques — sur le lien entre le registre des armes d'épaule et la sécurité des femmes, je ne peux, pour ma part, que vous parler de ma propre expérience. Avant l'existence du registre à armes d'épaule, ou même du programme FAC, on appelait ça... Désolé, cela fait un moment que je ne suis plus policier et je ne souviens plus de l'article exact du Code criminel; à l'époque, il y avait l'article 100. S'il y avait un cas de violence conjugale ou encore qu'il risquait d'y en avoir et qu'on se présentait à la résidence en question et que la femme nous disait, tremblante de peur, que son mari avait des armes, on les saisissaient. On se présentait alors devant un juge et une enquête était lancée pour déterminer si le mari en question avait le droit d'avoir des armes à feu, dans la plupart des cas. En général, le juge nous donnait raison, ou au moins pendant ce temps les intéressés avaient le temps de se calmer et on pouvait essayer de régler la situation conjugale.
    Le système FAC, qui existait avant le registre des armes à feu, n'était pas parfait. Pour ma part, j'estime qu'il aurait dû être plus approfondi. Maintenant, l'occasion nous est donnée d'agir dans ce sens, et c'est exactement ce que le gouvernement propose de faire.
    Vous savez, ce qui est vraiment dommage...je dois faire très attention parce que tout qu'on dit risque d'être mal interprété. Dans certains cas, je pense qu'on va trouver des solutions en s'écartant de la politique. Par exemple, dans le dossier qui nous intéresse. Je suis convaincu que toutes les personnes assises autour de cette table, les 308 députés qui siègent à la Chambre, veulent vraiment assurer la sécurité le bien-être des citoyens qu'ils représentent.
    Certains vous diront que si on agit ainsi, ce sera le début d'une nouvelle ère ou bien qu'on est misogyne. Je suis convaincu que les 308 députés veulent agir pour le bien de notre société. Mais je peux vous dire que les citoyens que je représente ou bien des gens qui m'ont parlé du registre des armes d'épaule, estiment que le gouvernement s'immisce encore une fois dans leur vie.
    L'Australie et la Grande-Bretagne ont resserré leur système de contrôle des armes à feu. Franchement, j'ai pris connaissance de statistiques qui indiquent que les infractions commises avec une arme à feu avaient augmenté de 100 p. 100 dans ces pays. Je vous parle de la Grande-Bretagne, ou même les policiers ne sont pas armés. Les crimes commis avec des armes à feu sont devenus plus fréquents.

  (1640)  

    Ici nous ne sommes pas aux États-Unis. Nous sommes une société différente. Un mélange de la façon européenne et la façon nord-américaine de faire les choses. D'après moi, la plupart des propriétaires d'armes à feu sont des gens très responsables qui sont tout à fait prêts à remplir un questionnaire pour obtenir une AAAF, qui sont tout à fait prêts à répondre aux questions qu'on leur pose pour voir s'ils devraient vraiment posséder des armes à feu. Ils sont prêts à se soumettre à une vérification des antécédents, et même à ce qu'on organise les entrevues avec leur conjoint. C'est quelque chose qui se fait. Mais je ne vois pas vraiment comment l'enregistrement d'une arme d'épaule fasse en sorte que le citoyen moyen soit mieux protégé.
    Je peux vous dire que le père d'un des agents qui a été tué à Mayerthorpe m'a envoyé une lettre—je l'ai encore, d'ailleurs—qui appuyait notre position. Il dit que notre parti est sur la bonne voie. J'hésite toujours à parler de la vie ou de la mort d'un agent de police et de présenter cela d'un point de vue politique. J'aimerais dire certaines choses ici que je ne dirai pas. Mais franchement, il y a des agents qui seraient en vie aujourd'hui si nous appliquions le Code criminel beaucoup mieux que nous le faisions à présent. Cela vaut pour tous les gens qui participent à notre système pénal. Je n'accuserai personne.
    Je suis convaincu que si certaines de nos lois actuelles étaient bien appliquées, nous ne serions pas ici en train de discuter de certaines de ces sujets. Mais elles ne sont pas bien appliquées, et c'est l'une des raisons pour laquelle je suis entré en politique. Je n'aimais pas la direction que prenait ce pays, mais je suis convaincu qu'avec le gouvernement actuel nous sommes sur la bonne voie.
    Voilà donc un commentaire politique général. Je veux préciser que je ne ferai jamais parti d'un gouvernement qui mettrait en péril la vie de n'importe quel groupe de notre société, surtout les femmes. Je peux vous en assurer.
    Merci.
    Notre dernier intervenant sera M. Alghabra...
    Madame Kadis invoque le Règlement.
    Je suis tout à fait prêt à lui céder ma place.
    Madame Kadis.
    Monsieur le président, j'aimerais proposer un amendement à cette motion. Je sais que nous allons bientôt passer au vote.
    Conformément à l'article 108(2) du Règlement, je propose que le président ou le vice-président du Comité permanent fasse rapport à la Chambre dans les cinq (5) jours de séance qui suivent l'adoption de cette motion.
    Est-ce que le président pourrait faire un petit commentaire sur cette motion? J'évite de parler depuis le début de la séance. Certains des chiffres qui ont été cités sont un peu trompeurs.
    Monsieur Ménard, monsieur Comartin, certains d'entre vous prennent pour acquis que...

  (1645)  

    J'ai un rappel au Règlement.
    Permettez-moi de finir, s'il vous plaît.
    L'amendement est sur la table. Nous devrions peut-être voter sur l'amendement, et puis discuter de la motion principale.
    Nous n'avons pas encore commencé à voter.
    C'est vrai, mais j'essaie de vous dire que le comité est actuellement saisi d'une motion. Nous discutons de l'amendement. La procédure nous oblige à voter sur l'amendement, et puis à revenir à la motion principale. Je suis bien sûr tout à fait prêt...
    Monsieur le président, je propose que nous passions au vote.
    Pas de débat?
    (L'amendement est adopté)
    Nous pouvons maintenant discuter de la motion principale. Nous reprenons le débat.
    Allez-y.
    Merci, monsieur le président.
    En tant que Canadien moyen, il serait très difficile pour moi de rejeter une loi qui exige que toute personne enregistre une arme à feu qui peut tuer. Mais avant de conclure trop hâtivement, j'ai décidé de rencontrer le chef du service de police de Peel, dans ma région. J'ai eu une très franche discussion avec lui. Je voulais lui parler de cette question pour ne pas être influencé par mes propres préjugés, peut-être. Il a affirmé catégoriquement que le registre doit être maintenu dans sa forme actuelle. Le registre et les dispositions législatives sur le contrôle des armes à feu sont des outils que les agents de police utilisent comme mesure préventive pour protéger les Canadiens. Le registre est une mesure préventive.
    Il est vrai que nous avons besoin d'autres mesures pour protéger les Canadiens, mais celle-ci en est une que les agents de police utilisent.. J'espère vraiment que nous n'allons pas faire fi des arguments que les agents de police nous présentent en tant que parlementaires, en tant que gouvernement. Ils nous disent qu'ils utilisent ces outils.
    Nous ne devrions donc pas rejeter les arguments qui ne cadrent pas nécessairement avec ce que nous estimons nécessaire. Ce sont des arguments à prendre au sérieux. Je sais que certains chefs de police ont dit que le registre n'est peut-être pas particulièrement efficace. Mais la plupart disent que leurs agents l'utilisent chaque jour. Avec les mesures de contrôle des armes à feu, le registre donne aux policiers la possibilité d'identifier l'emplacement des armes à feu.
    D'autre part, le registre agit aussi comme élément dissuasif. en empêchant les propriétaires d'armes à feu d'agir parfois de façon irrationnelle. La plupart des crimes commis avec des armes à feu ne sont pas prémédités. Si un propriétaire d'une arme à feu sait que son arme est enregistrée, c'est pour lui un autre élément dissuasif qui le portera à y réfléchir à deux fois avant de commettre un crime. C'est peut-être pour cela que la plupart des crimes commis avec des armes à feu le sont avec des armes qui ne sont pas enregistrées.
    Ce gouvernement est en train de démanteler le registre des armes à feu, mais non seulement ça—il accorde aussi l'amnistie à ceux qui veulent être propriétaire d'arme d'épaule. C'est un sujet de préoccupation. Le gouvernement a la responsabilité d'expliquer pourquoi il veut démanteler le registre actuel des armes à feu, étant donné qu'il fonctionne.
    Merci.

  (1650)  

    Monsieur MacKenzie.
    J'avais l'impression que les députés d'en face étaient tous d'accord pour inviter quelques témoins pour discuter du système, pour voir s'il fonctionne ou pas. Ça ne sert à rien d'entendre les idées des députés. Comment pouvons-nous aller de l'avant avec cette motion avant d'entendre ces gens-là, des gens qui peuvent nous donner un point de vue professionnel?
    J'entends toujours les mêmes arguments de l'autre côté de la table, soit qu'il s'agit d' une mesure de contrôle des armes à feu. Pour comprendre le système, il faut convoquer des témoins.
    Cette motion parle de chasseurs. Mais ceci ne concerne pas seulement les chasseurs, ceci concerne la sécurité des Canadiens.
    Madame Freeman, avec tous mes respects, je dois dire que je m'inquiète autant au sujet des femmes que vous. Nous nous inquiétons tous. Nous avons tous travaillé dans le domaine. Je suis d'accord avec M. Norlock—nous avons très mal agi envers les femmes pendant le premier siècle de la Confédération, et nous avons fait très peu ou rien pour empêcher la violence familiale. Maintenant nous arrivons à faire beaucoup plus et nous pouvons faire encore mieux, mais ça ne change rien pour ce qui est du registre. Si nous réagissons tout simplement sans entendre les experts qui peuvent nous expliquer les faits, nous ne rendons pas service aux Canadiens.
    Les députés d'en face avaient dit qu'ils pensaient que ce serait une bonne idée de recevoir les experts. Je me demande pourquoi on a changé d'avis au dernier moment et pourquoi nous voulons aller de l'avant avec cette motion sans entendre quelques experts.
    Est-ce que je peux enchaîner sur ce point?
    Comment allons-nous procéder? Le comité souhaite-t-il entendre des témoins?
    S'agit-il d'un amendement que vous allez proposer?
    Vous devez mettre aux voix la motion dont nous sommes actuellement saisis, monsieur le président.
    Mais vous pouvez proposer un amendement.
    Puis-je y répondre?
    Oui, monsieur Ménard.

[Français]

    J'aurais aimé que vous présentiez le même argument à votre ministre au cours de la réunion de votre caucus. Avant de changer les règles, il fallait changer la loi, et les experts auraient dû être entendus ici, au comité. Qu'auriez-vous dit si le gouvernement libéral, en annonçant des modifications à la loi sur la marijuana, avait annoncé qu'en attendant les modifications sur la marijuana, tout le monde pouvait fumer et trafiquer de la marijuana au Canada et qu'il y aurait une amnistie? Vous auriez dit qu'avant de modifier la loi sur la marijuana, il fallait entendre les experts.
    Monsieur MacKenzie, je pense très honnêtement que vous interprétez mal les paroles que vous avez entendues ici. Si vous y réfléchissez bien, vous comprendrez que vous les interprétez mal. Tout ce que nous avons voulu dire de ce côté-ci de la table, c'est qu'avant de changer les règles prévues dans la loi actuelle, il aurait fallu entendre des experts. Comme on n'a pas entendu d'experts avant de modifier la loi, nous estimons que la loi devrait s'appliquer telle qu'elle a été adoptée par le Parlement. C'est ce qu'a clairement exprimé M. Comartin.
    Si vous voulez présenter une motion pour qu'on entende les experts, ce qui, à mon avis, serait une façon de retarder l'étude d'une motion d'urgence, nous voterons contre.

[Traduction]

    Si c'est comme ça que vous voyez la chose, très bien, mais il y a eu des amnisties par le passé, et je ne crois pas que ceci ce soit produit à l'époque. Si vous voulez courir ce risque... c'est vous qui avez dit qu'il fallait entendre les experts. Si vous voulez foncer et voter sans les avoir entendus, faîtes-le à vos risques et périls.
    Monsieur Hawn.
    Et, en passant, pour ce qui est de la marche à suivre, nous ne voterons que lorsqu'il n'y aura plus personne qui désire prendre la parole.

  (1655)  

    Très brièvement, à l'appui de ce qu'a dit M. MacKenzie, il ne s'agit pas de modifier la loi, il s'agit plutôt d'une amnistie, ce qui fut le cas lorsque le gouvernement précédent était au pouvoir, huit fois. Il ne s'agit pas de modifier la loi.
    J'aimerais simplement faire une remarque sur les propos de M. Alghabra, car à mon avis il a réfuté son propre argument. Il a parlé de quelqu'un qui aurait perpétré un crime passionnel, un crime non prémédité. L'individu n'aurait pas hésité en raison de l'enregistrement de ses armes à feu. C'était un crime passionnel. L'auteur se moque de l'enregistrement de l'arme à feu. Il a tout simplement perdu la raison. Peu importe que l'arme à feu soit enregistrée ou non. Cela n'importe absolument pas. Dans un crime passionnel, par définition, l'auteur n'a pas toute sa raison. Il se moque pas mal si son arme à feu est enregistrée ou non. C'est bête.
    Monsieur Holland.
    Je propose qu'on mette la motion aux voix, monsieur le président.
    Ça y est pour le débat? D'accord.
    (La motion modifiée est adoptée) (Voir le procès-verbal)
    Le Président :La séance est levée.