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HESA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent de la santé


NUMÉRO 056 
l
1re SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 16 mai 2007

[Enregistrement électronique]

  (1530)  

[Traduction]

    Puisque nous avons le quorum, je déclare la séance ouverte.
    Je remercie les témoins de s'être déplacés. Nous entamons la dernière journée de nos audiences officielles avant de revoir les gens du ministère pour jeter un dernier coup d'oeil sur ce dossier. Nous sommes donc très près de la fin.
    Je précise à nos témoins que nous entendions nous laisser un peu de temps en comité pour discuter du rapport, à huis clos, à la toute fin de cette séance.
    Cela étant posé, nous allons accueillir nos témoins qui vont nous entretenir de cette importante question. Conformément à l'article 108(2) du Règlement, le Comité reprends on étude sur les médicaments sur ordonnance (Programme commun d'évaluation des médicaments). Je pense que nous en sommes à notre huitième réunion.
    Merci de vous être déplacés. Nous sommes prêts à entendre ce que vous avez à dire au comité.
    Nous accueillons Steve Morgan, de l'Université de la Colombie-Britannique. Nous sommes heureux de vous voir ici, Steve. Vous appartenez au Centre de services en santé et de recherches en politiques.
    De l'Université de l'Alberta, nous accueillons Davidas Menon de l'École de santé publique.
    Enfin, nous entendrons Jean-Claude St-Onge à titre personnel. Je suis très heureux de vous accueillir également.
    Les présentations étant faites, je vous invite à prendre la parole dans l'ordre énoncé; nous commencerons donc par l'Université de la Colombie-Britannique et par M. Morgan.
    Vous avez la parole pour 10 minutes. Nous sommes tout ouïe.
    Permettez-moi d'abord de remercier le comité de m'avoir invité à prendre la parole devant lui.
    Je veux aussi prendre un moment pour mentionner l'aide que les Instituts canadiens de recherche en santé, IRSC, m'ont apportée, non seulement à titre personnel, mais aussi pour mon programme de recherche. Je dois vous dire bien honnêtement que, sans les IRSC, des universitaires comme moi ne pourraient pas participer à ce genre de rencontre.
    Je tiens aussi à remercier le Fonds du Commonwealth, qui a son siège aux États-Unis, pour m'avoir versé une subvention afin de me permettre d'étudier le Programme commun d'évaluation des médicaments dans un contexte international afin de permettre au Canada et aux États-Unis de tirer les enseignements qui s'imposent, ce qui prouve la notoriété de ce programme.
    Avant, justement, de vous parler du contexte international, je me propose de répondre rapidement à la question de savoir pourquoi il convient de soumettre les médicaments à un examen.
    Comme je suis économiste de formation, j'appréhende sans doute le marché d'une façon très différente de celle des analystes en politique de la santé. Commençons par ce qu'on pourrait considérer comme étant le concept de « discipline de marché ».
    Il est ici question de recourir au marché pour déterminer la valeur que celui-ci accorde aux produits proposés. Pour cela, il faut que le consommateur soit très au fait de ses propres exigences et besoins; il doit évaluer avec justesse la capacité des produits de répondre à ses exigences et besoins; il doit disposer de différents moyens de rechange pour répondre à ces mêmes besoins et exigences, notamment la possibilité de ne pas consommer le produit proposé; enfin, il doit acquitter le coût total de tous ses achats. Dans ces circonstances, comme vous pourrez le constater dans la plupart des centres commerciaux, les consommateurs jugent en fonction d'un rapport qualité-prix et sont disposés à payer en conséquence.
    Cependant, la réalité est différente dans le secteur pharmaceutique. Les médicaments ne sont pas des « produits de consommation », ils sont plutôt un élément de soin. Dans ce secteur, l'objet réel n'est pas d'acheter des cachets ou des pilules. Que vous soyez patient ou administrateur d'un régime d'assurance-médicament, votre but est d'acheter des résultats en santé.
     Si vous devez améliorer votre état de santé, il est fort probable que vous soyez vulnérable, du moins dans certaines circonstances. Cela étant, en qualité de consommateur, vous n'aurez pas forcément ni le temps ni la capacité d'évaluer et de soupeser toutes les options susceptibles de répondre à vos besoins.
    Il est en fait difficile de démontrer les effets des différentes options de traitement. Il est difficile de décider si c'est la nature, un placebo ou le médicament en question qui est responsable des changements constatés dans l'état de santé d'un patient ou de la population en général. C'est pour cela qu'il faut entreprendre des essais cliniques de grande envergure. D'ailleurs, comme jamais aucun essai de ce genre n'apporte de réponse absolue, nous avons tendance à préférer les méta-analyses dans bien des cas, portant sur des milliers de patients. C'est ce que l'on appelle l'évaluation des technologies de la santé.
    L'autre caractéristique unique du secteur pharmaceutique tient au fait que les patients ne paient pas. Loin de moi l'idée de condamner les compagnies d'assurance privées ou les régimes d'assurance publics, mais force est de reconnaître que, quand ils optent pour un traitement afin de répondre à un besoin particulier, les patients ne sont pas aussi sensibles au prix des thérapies que les consommateurs sur un marché normal. À l'instar des patients, les médecins peuvent ne pas être sensibles au prix, même s'ils sont bien renseignés, puisqu'ils règlent rarement la note des médicaments sur ordonnance.
    Quelles sont les conséquences de tout cela? Eh bien, d'un point de vue économique, les produits pharmaceutiques et ceux qui les consomment ne sont pas « normalisés ». J'irai jusqu'à dire que le rapport qualité-prix constitue la plus grande déficience du marché dans ce secteur. La seconde grande déficience tient à l'absence de stimulants financiers qui pourraient pousser les gens à se renseigner sur le rapport qualité-prix.
    Je vais sauter la question des dépenses au Canada dans le cas des médicaments classifiés suivant le Règlement du CEPMP, mais je serai heureux de répondre à vos éventuelles questions à ce sujet.
    Passons à l'augmentation du nombre de processus d'examen des médicaments destinés à corriger les imperfections du marché quant aux informations relatives au rapport qualité-prix, phénomène constaté de par le monde. Pourquoi soumettre les médicaments à un examen?
    Tout d'abord, tout le monde reconnaît que les médicaments ne sont pas des produits standardisés, mais des éléments de soin. L'homologation, nécessaire à la mise en marché d'un médicament, vise des fins différentes de celles des programmes d'assurance-médicament. Les politiques d'achat de médicaments doivent s'appuyer sur des données comparatives et des données économiques. Comme la science est extraordinairement complexe, elle exige que chaque pays se dote des moyens et des connaissances nécessaires pour être en mesure d'évaluer la technologie.
    Je pense qu'il s'agit-là d'une des raisons pour lesquelles les pays ont opté pour des procédures centralisées d'évaluation des médicaments.
    S'agissant de l'objectif global poursuivi, je dirai qu'il est surtout question de rechercher l'efficacité économique et de favoriser la prise de décision étant donné que les budgets publics et privés sont limités. Les ressources ne sont pas infinies. Cela étant, il faut pouvoir s'appuyer sur des données de base et sur le bon sens économique afin de prendre de bonnes décisions sur la façon d'affecter les ressources limitées.
    Voici les informations dont nous avons besoin. Par exemple, il y a lieu de se demander si un nouveau produit est moins efficace, aussi efficace ou plus efficace qu'un produit de référence. Est-il moins coûteux, aussi coûteux ou plus coûteux qu'un produit de référence? À partir de ces trois éléments d'information en abscisse et en ordonnée, on peut prendre des décisions éclairées dans le cadre des programmes commun d'évaluation des médicaments.

  (1535)  

    Dans certains cas, la décision s'impose d'elle-même. On rejettera par exemple un médicament moins efficace et plus coûteux qu'un médicament de substitution, puisque personne ne l'utilisera. D'autres décisions exigeront d'abord un dialogue avec le public et les organismes payeurs pour décider si un médicament, par exemple plus efficace, mais aussi plus coûteux, vaut la différence de prix pour un budget public ou privé. D'autres décisions exigeront une négociation entre les acheteurs et les fournisseurs, comme dans le cas des médicaments dont l'efficacité est comparable aux médicaments de substitution et qui sont tout aussi coûteux.
    Dans l'étude que nous avons réalisée pour le compte du Commonwealth Fund des États-Unis, nous avons examiné le processus commun d'évaluation des médicaments, en vigueur au Canada, et le processus d'examen centralisé en vigueur au Royaume-Uni, en Australie et en Nouvelle-Zélande. Nous avons aussi étudié l'un des processus en vigueur aux États-Unis.
    Je vais rapidement vous parler des cas concernant le Canada, le Royaume-Uni, l'Australie et la Nouvelle-Zélande. Il convient, d'entrée de jeu, de remarquer que les processus d'examen sont extraordinairement complexes. Il est certainement très délicat d'évaluer des produits pour contribuer à des décisions éclairées en matière de couverture.
    Il existe quelques points communs entre ces différents processus, le premier étant qu'ils sont différents de l'octroi des licences. Les objectifs poursuivis dans le cas de l'octroi des licences sont différents de ceux des processus destinés à renseigner les programmes d'assurance.
    Deuxièmement, tous ces processus impliquent l'évaluation clinique de la preuve, sous une forme ou une autre, de même que l'évaluation des données économiques.
    Troisièmement, il s'agit, dans tous les cas, d'effectuer des évaluations centralisées, c'est-à-dire relevant d'un comité d'experts chargé de déterminer l'importance des données scientifiques et économiques au regard des décisions à prendre pour une région ou un pays donné.
    L'une des différences que nous avons relevé entre les pays étudiés concerne la prise de décision — ou plus encore, le contexte de financement dans lequel les décisions sont prises.
    En Australie, les examens sont effectués par le Pharmaceutical Benefits Advisory Committee, autrement appelé PBAC, qui administre un mécanisme d'examen central pour le formulaire national.
    En Australie, il existe un régime d'assurance-médicaments national reposant sur un formulaire national. Chaque médicament doit faire l'objet d'un examen centralisé et le ministre ne peut d'ailleurs pas verser de nouveau médicament sur le formulaire national sans une recommandation du PBAC.
    Il s'agit d'un processus pragmatique portant sur un cycle d'examen de 17 semaines qui permet d'étudier une centaine de médicaments par année, médicaments génériques y compris. Les motifs des décisions sont publiés sur Internet et rendus publics par le biais de ces mécanismes, de même que par des consultations publiques à différentes étapes de l'examen.
    Les prix en contexte australien sont négociés dans le cadre de ce processus d'examen. Après recommandation par le PBAC, le gouvernement et le fournisseur entreprennent la négociation du prix.
    La Nouvelle-Zélande offre une couverture universelle assortie d'un formulaire national administré par un organisme de gestion centralisé, PHARMAC. L'examen central est effectué par le Pharmacology and Therapeutics Advisory Committee, PTAC, en vertu du processus d'assurance-médicament en vigueur en Nouvelle-Zélande, mais PHARMAC peut décider d'inscrire des médicaments sur la liste à l'encontre de recommandations du PTAC, notamment parce que les décisions d'inscription dépendent de la négociation des prix.
    Le processus en vigueur en Nouvelle-Zélande est pragmatique en ce sens que l'organisation examine 30 à 40 médicaments par an. Les informations sont choisies sur Internet. Comme nous l'avons vu, la négociation du prix fait partie intégrante du processus.
    En Angleterre et au Pays de Galles, c'est le National Institute for Health and Clinical Excellence, autrement connu sous le vocable de NICE, qui effectue une partie des évaluations dans le contexte d'une couverture universelle pour les médicaments, mais selon un formulaire dit « négatif » unique au Royaume-Uni. Apparemment, tous les produits en vente au Royaume-Uni sont admissibles à la couverture publique et il incombe aux décideurs régionaux de décider implicitement de limiter les produits qui ne seront pas homologués dans tel ou tel contexte.
    C'est donc dans ce contexte que NICE en est venu à administrer un processus très sélectif. Seuls les médicaments jugés problématiques ou susceptibles d'avoir d'importantes répercussions sur le système de santé sont examinés et évalués de façon centralisée par NICE. Cela étant, NICE n'examine que 11 médicaments environ par an et le processus mis en oeuvre est très complexe, puisqu'il comprend de nombreuses étapes de consultation et de négociation avec les intervenants, ce qui peut prendre un an, voire plus par examen.
    Les lignes directrices émises par NICE à l'échelon national deviennent obligatoires à l'échelon régional. Il n'y a pas de négociation de prix dans le cadre des systèmes en vigueur en Angleterre et au Pays de Galles.
    Au Canada, le système que vous connaissez bien, comprend une couverture mixte et une multitude de formulaires administrés par des régimes publics, privés, fédéraux et provinciaux. L'examen commun des médicaments est exigé par la plupart des régimes publics, sauf au Québec, mais les décisions demeurent centralisées. Dans le système canadien, un « oui » et un « non » peuvent aussi bien dire « peut-être ».

  (1540)  

    À l'origine, l'accent portait sur les produits chimiques et la combinaison de ces produits, sans doute pour des raisons budgétaires, ne serait-ce que pour faire en sorte que le processus demeure pragmatique dans un premier temps.
    Il s'agit donc d'un processus pragmatique qui consiste à cibler quelque 25 médicaments par an. Des résumés des motifs sont affichés sur Internet et, comme vous le savez, des représentants de la population siègent maintenant au comité consultatif expert. Le Canada et le Royaume-Uni sont des exceptions parce que le PCE ne fait pas intervenir la négociation des prix. Il s'agit simplement d'une évaluation du prix estimé ou affiché par le fabricant.
    Pour ce qui est de l'expérience internationale, j'ai eu la chance d'interviewer des décideurs dans tous les pays étudiés et de les rencontrer personnellement lors d'une réunion que j'avais organisée à Vancouver, l'année dernière, puis à Wellington, en Nouvelle-Zélande, en mars dernier, où nous avons pu discuter des défis auxquels se heurtent les processus communs d'évaluation des médicaments partout dans le monde.
    Je m'avancerai à dire — et je le fais de façon objective, parce que je ne travaille pas et je n'ai jamais travaillé pour le PCEM — que ce processus a rapidement acquis une réputation internationale auprès d'organismes identiques. J'irai jusqu'à dire qu'il est sans doute sous-financé, mais nous pourrons en reparler plus tard.
    Le PCE et les autres programmes semblables se heurtent à des difficultés communes, l'une tenant au fait que les médicaments sont approuvés pour la vente par comparaison avec des marqueurs de substitution qui en déterminent l'efficacité; autrement dit, ils sont efficaces dans leur action sur les structures ou les systèmes biologiques de l'organisme, mais nous ne savons pas encore s'ils vont donner des résultats probants sur le plan de la santé générale du patient. C'est un problème que l'on rencontre partout dans le monde.
    Les programmes communs d'examen pêchent à cause d'essais mal conçus. En particulier, la plupart des essais portent sur une relation entre la placebo et le médicament plutôt que sur des comparaisons entre médicaments, données dont nous devrions pourtant disposer pour prendre des décisions économiques rationnelles. Il faut se demander si le médicament proposé est meilleur que ses substituts.
    Il y a de graves problèmes de transparence et de confidentialité en ce sens que les programmes communs d'évaluation sont limités à ce qu'ils peuvent publiquement déclarer au sujet des données utilisées pour la prise de décision, ce qui n'est pas uniquement le cas au Canada, mais bien partout dans le monde.
     Enfin, il existe un véritable risque de prescription à des fins inappropriées. Les fabricants prétendent, souvent à juste titre, que leurs produits sont rentables pour certains segments de la population. Toutefois, quand les produits se retrouvent sur le marché, il est souvent difficile d'empêcher qu'ils soient utilisés à des fins pour lesquelles il existe des traitements plus appropriés ou des traitements de remplacement plus rentables.
    Pour conclure, je dirai que le PCEM est respecté et que des programmes du genre sont nécessaires parce qu'ils peuvent permettre d'inciter, voire d'obliger les fabricants à divulguer le genre de preuves dont nous avons besoin pour adopter une politique rationnelle en matière de médicaments.
    Merci.
    Merci beaucoup pour votre témoignage.
    Nous avons essayé d'obtenir la participation de représentants du Royaume-Uni et de l'Australie par vidéoconférence, mais comme nous n'y sommes pas parvenus, vous pourrez peut-être répondre à un grand nombre de questions que nous aurions voulu leur poser. Merci beaucoup.
    Nous passons maintenant à M. Menon de l'Université de l'Alberta. Vous avez la parole pour 10 minutes.

  (1545)  

    Merci, monsieur le président, et merci au comité de m'avoir invité.
    En fait, je remplace au pied levé quelqu'un que vous auriez sans doute aimé accueillir. Il s'agit d'une jeune collègue avec qui j'ai collaboré à la plupart des travaux. Elle s'appelle Tania Stafinski et je tenais à vous mentionner son nom. Elle n'a pas pu se rendre à cette invitation.
    Je tiens à préciser au comité que, selon elle, vous représentez ce qui se fait de mieux.
    Elle n'avait guère le choix, puisqu'il se trouve que je suis son supérieur.
    Je tiens cependant à lui rendre officiellement hommage, puisque c'est elle qui a réalisé le gros de ce travail et qu'elle n'a malheureusement pas pu se rendre à cette invitation. J'espère donc pouvoir contribuer utilement à vos délibérations et à vos décisions, puisque vous en êtes presque au terme de vos travaux.
    Je vais brièvement vous situer en contexte le travail auquel nous avons participé, afin que vous compreniez ce dont il retourne.
    Ces dernières années, nous avons réalisé plusieurs projets de recherche financés par des organismes comme les IRSC, dont M. Morgan vous a parlé, sur les différences constatées dans les formulaires utilisés d'une province à l'autre — différences en matière d'accès à des médicaments de traitement du cancer en particulier — et nous avons examiné des modèles utilisés ailleurs dans le monde dans le cas des programmes de couverture des médicaments onéreux, ainsi que la façon dont les données économiques sont ou pourraient être utilisées dans la prise de décision concernant des médicaments.
    L'intérêt, dans le cas qui nous préoccupe — et je suppose que c'est la raison pour laquelle je suis ici — réside dans une partie du travail que nous avons réalisé sur ce que j'appelle les processus centralisés d'examen des médicaments actuellement en vigueur dans le monde. M. Morgan vous a déjà donné des précisions en ce qui concerne trois pays auxquels nous nous sommes aussi intéressés. Je vais, pour ma part, essayer de me limiter à cette dimension, puisque nous traitons de la situation dans le monde. D'ailleurs, je vais débuter par cela.
    Il y a deux ou trois ans, nous nous étions fixé pour objectif de recenser les modèles d'examen centralisé en vigueur dans le monde. En universitaires originaux que nous étions, nous pensions pouvoir apporter notre pierre à l'édifice en entreprenant ce travail à l'heure où d'autres étaient en train de concevoir un système commun d'examen des médicaments au Canada. Il aura fallu toutefois attendre un certain temps avant que qui que ce soit s'intéresse à nos travaux.
    Nous avons examiné des aspects comme les cadres de gestion, la gouvernance ainsi que les processus d'examen et les mécanismes d'appel éventuels. Dans la mesure du possible, nous avons comparé entre eux certains aspects communs des processus d'examen. Nous n'avons pas examiné des choses comme le délai jusqu'à la couverture, les délais d'approbation ni le nombre de médicaments examinés par pays. D'autres l'ont fait; M. Morgan a travaillé dans ce domaine. Ce n'était donc pas l'objet de notre recherche.
    À l'époque, nous avions constaté que 16 pays environ ayant des systèmes de santé essentiellement publics administraient ce qu'on pourrait baptiser de systèmes centralisés d'examen des médicaments: l'Australie, l'Autriche, la Belgique, le Danemark, la Finlande, la Grèce, l'Irlande, l'Italie, les Pays-Bas, la Nouvelle-Zélande, le Portugal, l'Afrique du Sud, la Suède et le Royaume-Uni. Nous avons constaté l'existence de différentes approches et de différents modèles en fonction des différentes structures de soins de santé. Certains de ces systèmes étaient en place depuis relativement longtemps, tandis que d'autres étaient nouveaux.
    Je vais faire un survol de ce que nous avons constaté.
    En ce qui concerne la structure, la gouvernance et le rôle, il existe différents modèles d'organisation dans différents pays destinés à gérer le processus commun d'examen des médicaments: cela va des organismes gouvernementaux relevant d'un ministère à des organisations autonomes. Il existe donc toute une diversité de modèles.
    Dans sept des 16 pays, l'organisme équivalent au CCCEM — le Comité consultatif canadien d'expertise sur les médicaments, qui est le comité de révision du PCEM — formule des recommandations en matière de remboursement, de couverture et d'homologation des médicaments. Dans sept autres pays, l'organisme central est investi d'un rôle de réglementation et il tranche sur le sort à réserver aux médicaments, sous l'angle de la couverture. En Norvège, l'organisme peut agir sur les deux plans en fonction de la nature de la demande de remboursement. Comme certains fixent le niveau de remboursement, la tarification intervient forcément dans le processus, ce qui n'est pas le cas chez nous. Certains organismes nationaux s'intéressent à d'autres aspects, comme les lignes directrices concernant l'usage maximum, les indications de prescription et des choses du genre.
    Ces organismes de type CCCEM, si on peut les appeler ainsi, sont habituellement composés: de médecins, généralistes et spécialistes; d'économistes en santé; de pharmaciens; de pharmacologistes cliniciens et de représentants des ministères et organismes gouvernementaux, de même que des caisses d'assurance-maladie, dans certains cas. En Nouvelle-Zélande, le conseil est essentiellement composé de médecins et de pharmacologistes cliniques. Cet aspect n'a rien de théorique, parce que l'essentiel du processus repose sur la structure et les membres des organismes décideurs, et sur la représentation au comité. Nous tenions donc à examiner cet aspect.
    En Australie, en Suède et au Royaume-Uni — au Royaume-Unis, l'organisme s'appelle NICE, comme on vous l'a dit — le comité d'examen comprend aussi des représentants de la population, qu'il s'agisse de simples citoyens ou contribuables ou encore de représentants de patients.

  (1550)  

    Le nombre de membres siégeant à ces comités varie de quelques-uns, comme six en Grèce, à 60 au Royaume-Uni. Dans ce dernier pays, on retrouve aussi des épidémiologistes et d'autres méthodologistes et l'on peut même dire que le comité représente tous les secteurs concernés par le processus.
    Les critères de couverture varient aussi d'un pays à l'autre, selon le système en vigueur. Comme M. Morgan y a fait allusion tout à l'heure, on retrouve parmi les critères la valeur thérapeutique des médicaments qui s'entend notamment de l'utilité et de l'efficacité clinique du produit examiné et de l'existence éventuelle d'un traitement permettant déjà de soigner l'état sous-jacent considéré. La gravité de l'état pathologique, le caractère commun des besoins constatés et les répercussions éventuelles sur la santé publique sont d'autres critères examinés par ces organismes. On ne sait pas exactement, d'après les documents publics, quel poids relatif est accordé à chacun d'eux. La pondération pourrait être un élément clé de la combinaison des critères.
    Ces dernières années, on a constaté dans la plupart des examens centralisés, un net regain d'intérêt pour la rentabilité des médicaments. Soit dit en passant, le Canada est un chef de file dans cette question de la rentabilité, c'est-à-dire pour ce qui est de l'utilisation des méthodes rentables et de l'élaboration de méthodes également rentables pour la prise de décision dans le cadre de programmes de soins de santé en général et pas uniquement pour le choix de médicaments. Dans certains pays, on ne retient que le prix. En revanche, d'autres excluent complètement cette dimension de l'analyse.
    En outre, des organismes examinent les répercussions sur les budgets, ce qui peut être différent de la notion de rentabilité. La rentabilité consiste essentiellement à comparer deux éléments entre eux. Dans certains pays, du moins dans deux d'entre eux, l'un des critères est l'automédication, la priorité n'étant alors pas accordée à des médicaments dispensés en milieu hospitalier. D'autres pays examinent la question sous l'angle de la congruence aux priorités gouvernementales et au taux potentiel de mauvaises utilisations.
    Voilà donc pour les critères en général. Les données à évaluer au regard de ces critères, le plus souvent grâce à des essais contrôlés dont M. Morgan vous a parlé, sont obtenues grâce à des études comparatives portant sur d'autres thérapies, ce qu'il convient de rappeler, mais M. Morgan l'a déjà fait.
    La question est donc de savoir pourquoi quelqu'un d'autre que Santé Canada doit faire un second examen après celui du ministère? Personnellement, j'estime que les objectifs poursuivis par ces examens sont différents. Même les exigences concernant les données sont différentes. Le ministère s'appuie sur des essais cliniques, parfois très importants où l'on utilise souvent des placebos comme comparateurs, mais pour les décisions relatives au remboursement des médicaments, Santé Canada fait une comparaison avec des produits de référence. À ce stade, le ministère peut ne pas disposer de données d'essai, ce qui constitue généralement un défi dans le cas des examens communs de médicament.
    La pathologie, l'incidence de la maladie, le fardeau qu'elle représente pour la société et les répercussions éventuelles sur la santé publique sont autant d'éléments d'information retenus à l'étape de l'analyse. Comme je le disais, 13 des 16 pays recommandent fortement d'effectuer des évaluations économiques. De plus, les fabricants sont souvent invités à fournir des évaluations du volume prévu afin de permettre la préparation de budgets en conséquence.
    Je crois que M. Morgan vous a parlé des étapes de l'évaluation et de l'estimation du processus. L'évaluation consiste à examiner les données et l'estimation de l'information consiste à porter un jugement, ce que fait un autre organisme.
    Qui s'occupe de tout cela dans les différents pays étudiés? Ça dépend. Qui peut soumettre des demandes? Eh bien, dans la plupart des pays, c'est le fabricant ou l'organisme d'approbation de la commercialisation, c'est-à-dire l'organisme chargé d'approuver les fins commerciales, qui s'en charge.
    En Australie, un organisme médical, un professionnel de la santé ou même un particulier peut demander un examen, mais je ne sais pas exactement comment les priorités sont établies dans ce cas.
    On note également des différences dans la façon dont les informations sont regroupées, à quel moment elles le sont et ainsi de suite.
    Enfin, il y a des différences quant à la tenue de consultations officielles auprès d'autres groupes pendant ce processus.
    S'agissant des appels, véritable pomme de discorde entre certains secteurs, nous avons constaté qu'il n'existe de mécanisme d'appel des décisions qu'en France et au Royaume-Uni. Toutefois, cela peut avoir changé. Ces deux dernières années, tous les organismes ont fait l'objet d'intenses pressions pour ouvrir le processus et permettre à plus de gens d'y participer.

  (1555)  

    Je conclurai par cinq remarques que je juge pertinentes à la situation canadienne.
    Tout d'abord, la plupart des pays administrent des processus d'examen semblables à ceux de Santé Canada, en plus d'un examen de la couverture. Dans la plupart des 16 pays étudiés, à l'exception du Royaume-Uni, de l'Australie et de la Nouvelle-Zélande, c'est le même organisme qui traite des deux aspects, contrairement à ce qui se fait chez nous où nous avons réparti certaines fonctions concernant divers aspects des thérapies médicamenteuses entre le CEPMB, Santé Canada et les provinces. Dans certains pays, on ne constate pas une telle division, les choses ayant évolué de pair.
    Deuxièmement, aucun de ces pays ne fait d'examen à des échelons inférieurs parce que les décisions prises par le PCE, ou les recommandations adressées au ministre ou au comité ministériel, constituent le fondement des mesures prises par la suite. Il n'y a donc pas de second échelon où l'on décide de débloquer des fonds pour les médicaments homologués. Cette façon de faire explique la différence qu'il peut y avoir dans les délais d'homologation.
    Troisièmement, les décisions relatives à la couverture prise par ces différents organismes couvrent un vaste éventail, notamment pour ce que je viens juste de vous expliquer quant aux rôles mixtes que l'on retrouve dans ces pays. Dans certains cas, l'organisme fixe le niveau de remboursement. Il peut décider d'autoriser le médicament à hauteur de 65 p. 100 du niveau prescrit. Au Canada, ce sont les provinces qui s'en chargent, souvent dans le cadre de négociations avec les fabricants.
    Il y a une chose à laquelle j'invite le comité à réfléchir. Il a beaucoup été question d'élargir le niveau de participation au processus commun d'examen des drogues. Au Royaume-Uni, par exemple, un jury de citoyens conseille NICE. Je crois qu'il existe la même chose en Nouvelle-Zélande où il y a un comité consultatif de consommateurs. Les gens, un peu partout, essaient différentes façons de passer d'un processus technique, scientifique et clinique à un processus plus ouvert pouvant illustrer quelque chose pour les gens. C'est difficile et les gens essaient différentes choses, mais ce qui est bien, c'est que le PCE est à présent une dimension publique puisque des représentants y siègent. Je vous invite donc à tenir des réunions publiques, un peu comme vous le faites avec celle-ci.
    Enfin, il y a un aspect qui peut être délicat pour certains gouvernements provinciaux. Quand nous avons examiné les organismes appliquant un PCE, nous avons constaté que certains d'entre eux peuvent recommander la radiation. Dans ce cas, ils examinent les médicaments déjà offerts et, s'ils veulent en ajouter un, ils peuvent recommander la radiation d'un médicament précédemment homologué.
    Une partie du problème tient au fait que, quand les gens s'inquiètent de l'augmentation des dépenses de médicament, ce n'est certainement pas parce qu'ils ont peur que le plancher s'effondre. Il faut se poser la question non seulement au sujet des médicaments, mais aussi au sujet des technologies de la santé: quelle technologie ou quel médicament remplacé justifierait un retrait de financement? Je crois qu'il serait utile de se demander au moins comment on pourrait aborder la chose sous l'angle de l'examen commun des médicaments.
    Merci, monsieur le président.
    Merci beaucoup. Je suis certain que nous aurons beaucoup de questions à vous poser quand nous aborderons cette phase de la réunion.
    Nous allons maintenant passer à un professeur qui est également auteur.
    Monsieur St-Onge, vous avez la parole pour 10 minutes.

[Français]

    Bonjour, mesdames et messieurs. Je remercie les membres du comité de m'avoir donné l'occasion de m'adresser à eux.
    Vous trouverez toutes les références à la fin de mon texte. En guise de présentation, je dirai que les médicaments représentent 17,5 p. 100 —

[Traduction]

    Nous n'avons pas votre texte, parce qu'il n'a pas été traduit, mais si vous parlez assez lentement, nous pourrons vous suivre.

[Français]

    Les médicaments représentaient 17.5 p. 100 des dépenses de santé en 2005, un pourcentage substantiellement plus élevé que celui qui est consacré aux médecins. Les dépenses en médicaments sont devenues l'élément le plus inflationniste du système et elles augmentent deux fois plus rapidement que l'ensemble du budget de la santé. Par ailleurs, au Canada, on prescrit près de deux fois plus de médicaments d'ordonnance qu'aux Pays-Bas et au Danemark. Pourtant, les grands indicateurs de santé sont pratiquement identiques dans ces trois pays.
    Le Canada n'est pas seulement un grand consommateur de médicaments, mais ces produits sont coûteux, voire inabordables pour certains segments de la population, et ils pèsent de tout leur poids sur les finances publiques. Récemment, le Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés démontrait que dans 11 pays industrialisés, les médicaments génériques sont moins chers qu'au Canada et parfois, par une marge considérable. Quant aux médicaments brevetés, ils se vendent partout ailleurs meilleur marché qu'ici, sauf aux États-Unis et en Suisse.
    Par exemple, les génériques en Nouvelle-Zélande se vendent 77 p. 100 moins cher qu'au Canada, en Espagne, 42 p. 100, en France, 29 p. 100 et même aux États-Unis, 35 p. 100. Pour les brevetés, ces chiffres sont respectivement de 21 p. 100 pour la Nouvelle-Zélande, de 27 p. 100 pour l'Espagne et de 15 p. 100 pour la France. Quant aux États-Unis, on n'en parle pas.
    Lorsque les prix sont ajustés pour tenir compte du pouvoir d'achat, les médicaments brevetés sont 37 p. 100 moins chers en Espagne qu'au Canada.
    En 2005, un groupe de chercheurs dirigé par le Dr Morgan publiait une étude dans le British Medical Journal montrant que 80 p. 100 de l'augmentation du prix —

  (1600)  

[Traduction]

    Si vous voulez bien ralentir un peu, ce sera parfait.

[Français]

    — des médicaments en Colombie-Britannique était attribuable à l'introduction de nouveautés ou de nouvelles indications qui n'apportent rien ou qui apportent peu sur le plan thérapeutique. Ces produits, qu'on appelle des me-too, sont des molécules équivalentes à celles qui existent déjà sur le marché. Ces nouvelles indications sont souvent d'une efficience non validée sur le terrain. La consommation de ces nouveautés qui ont remplacé les anciens produits a fait doubler les dépenses en médicaments en Colombie-Britannique entre 1996 et 2003.
    D'après le Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés, entre 1990 et 2003, seulement 5,9 p. 100 de ces nouveautés représentaient une percée sur le plan thérapeutique. C'est là que le bât blesse. Dans la même veine, la FDA signalait que les trois quarts des médicaments qui ont été mis sur le marché dans les années 1990 n'apportaient rien de neuf par rapport aux anciens traitements.
    Ce qui précède montre l'importance d'une évaluation rigoureuse des médicaments qui doivent figurer sur les formulaires des provinces, c'est-à-dire une évaluation probante et pertinente réalisée par des experts indépendants. Une étude publiée dans le Journal of the American Medical Association, portant sur 1 140 essais cliniques, indiquait que les essais financés par l'industrie étaient 3,6 fois plus susceptibles de résulter en des conclusions favorables au produit du commanditaire. Ce sont ces études qui sont soumises pour approbation aux agences de contrôle.
    À titre d'exemple, soulignons les nouveaux anti-hypertenseurs proposés en première ligne, qui ne sont pas plus utiles pour la vaste majorité des patients que les anciens traitements, mais qui sont des dizaines de fois plus chers. Le Dr Furberg, chercheur principal d'une vaste étude sur les anti-hypertenseurs, a calculé que les consommateurs américains ont déboursé de 8 à 10 milliards de dollars inutilement en utilisant ces nouveautés.
    M. Robert Goyer, ancien président du Conseil du médicament du Québec, évaluait que l'anti-ulcéreux le plus populaire et le plus cher a coûté 60 millions de dollars de trop, car des solutions de rechange moins coûteuses existaient et faisaient aussi bien l'affaire dans la plupart des cas.
    Sur un autre plan, la Croix-Verte signalait l'existence de disparités importantes dans les prix des médicaments payés par diverses agences gouvernementales. Un médicament sur le formulaire de l'Ontario était inscrit au prix de 1,90 $ et le même produit était vendu au ministère de la Défense pour 45 ¢. La différence est du simple au quadruple.
    La Nouvelle-Zélande nous indique une voie à suivre pour l'utilisation optimale des médicaments. En 1973, ce pays mettait sur pied une société publique, Pharmac, composée de scientifiques indépendants et de groupes de patients. Pharmac est un pôle d'achat groupé de médicaments qui a la capacité de négocier des prix. Elle procède par appel d'offres auprès des fabricants, qu'elle met en concurrence les uns avec les autres.
    Pharmac établit la liste des meilleurs médicaments à partir de critères scientifiques. Elle choisit celui qui constituera le produit de référence et elle sélectionne un certain nombre d'alternatives qui sont remboursées au prix du produit de référence le meilleur marché, sauf en cas d'intolérance ou de contre-indications. Des accords nommés cross-deals sont négociés avec les fabricants. Quand un nouveau produit efficace et sécuritaire arrive sur le marché, il est inscrit sur le formulaire, à condition que le fabricant consente un rabais sur un produit qui figure déjà sur la liste. Pharmac pratique également le système des dépenses maximales. Un contrat est conclu avec un fabricant en vue de la vente et du remboursement d'une certaine quantité de médicaments à partir d'une analyse des besoins. Si les dépenses excèdent ce maximum, la firme rembourse la différence à Pharmac. Finalement, les produits qui n'ont pas démontré leur supériorité sur les traitements existants ne sont pas remboursés. C'était le cas du Celebrex et du Vioxx avant qu'ils ne soient retirés du marché pour cause de toxicité cardiovasculaire. Soit dit en passant, le Vioxx a gagné le prix Galien en 1999, si je ne m'abuse, qui est ni plus ni moins l'Oscar du médicament. C'est ainsi que le formulaire de Nouvelle-Zélande comprend 2 600 produits, contre 5 000 au Québec.

  (1605)  

     Permettez-moi d'aborder un sujet connexe, mais dans le droit fil de ce qui précède. L'évaluation des médicaments commence bien avant que les autorités s'interrogent sur l'opportunité de les inscrire sur les formulaires, à savoir dès qu'ils sont soumis à la Direction des produits thérapeutiques. Sur ce plan, nous devrions souhaiter que des améliorations soient apportées à l'évaluation de l'efficacité et de la sécurité des médicaments.
    Les critères d'homologation de Santé Canada sont-ils assez rigoureux? Pour qu'un médicament soit approuvé, il doit généralement démontrer qu'il est plus efficace qu'un placebo. Ne devrait-on pas exiger que le produit fasse ses preuves contre un médicament qui est déjà sur le marché, dont on connaît le profil de toxicité et qui est beaucoup moins coûteux? Par ailleurs, les essais cliniques sont généralement de courte durée. Ils sont conçus pour évaluer l'efficacité du médicament et non sa toxicité, et les patients recrutés sont des patients idéaux. Les conséquences peuvent être dramatiques. C'est ainsi qu'on découvrira beaucoup plus tard les effets indésirables de nombreux produits. Sur une période de 25 ans, 10 p. 100 des médicaments ont reçu l'avertissement le plus sévère de la FDA, le black box warning, et 2,9 p. 100 ont été retirés du marché, alors que la monographie de 51 p. 100 d'entre eux a été modifiée en raison de problèmes de sécurité découverts après la commercialisation. Les recherches du Dr Joel Lexchin, de l'Université York, montrent que, sur une période de 40 ans, 39 p. 100 des médicaments retirés de la circulation l'ont été entre 1993 et 2004, une proportion beaucoup plus importante que dans les décennies précédentes. Certains d'entre eux auraient été approuvés avec trop d'empressement?
    Plusieurs spécialistes ont tiré la sonnette d'alarme au sujet de la problématique. Aux États-Unis, une abondante littérature parle de crise de confiance à l'égard du processus d'homologation des médicaments, et puisque le processus de réglementation est pratiquement identique dans les deux pays, nous avons des raisons de nous inquiéter.
    Cette crise de confiance a incité l'Institute of Medicine des États-Unis à faire toute une série de recommandations au sujet du processus de réglementation. Parmi ces recommandations, l'institut propose d'apposer un triangle noir sur les nouveaux médicaments pour une période de deux ans afin de signaler que tous les effets indésirables du produit ne sont pas connus; il suggère d'augmenter le budget de la FDA; il propose d'abolir ce qu'on appelle les frais aux usagers, qui correspondent aux frais que les fabricants paient pour approuver les nouveaux médicaments. Ces frais existent aux États-Unis depuis 1992 et au Canada depuis 1994. En échange, les fabricants ont obtenu une réduction du temps d'approbation des nouveaux produits. De nombreux observateurs pensent que, depuis sa mise en oeuvre, cette pratique est responsable de l'augmentation du nombre de médicaments retirés pour des raisons de sécurité. Un sondage interne de la FDA réalisé au tournant du siècle soulignait que 36 p. 100 des scientifiques de l'agence — ils avaient quatre choix de réponse — n'avaient aucunement confiance ou étaient modérément confiants dans la sécurité et l'efficacité des médicaments qu'ils approuvent et 18 p. 100 disaient avoir subi des pressions pour approuver des médicaments, en dépit des réserves qu'ils avaient quant à leur toxicité.
    Le Dr Robert Peterson, ancien directeur général de Santé Canada, confiait au Journal de l'Association médicale canadienne que la réglementation internationale en matière de sécurité est adéquate dans 75 p. 100 des cas et que Santé Canada n'a pas de pouvoirs légaux, notamment celui d'exiger des études de suivi après commercialisation pour vérifier la toxicité des médicaments. La plupart des essais de phase IV demandés par Santé Canada ne sont tout simplement pas mis en oeuvre. Par ailleurs, Santé Canada étudie des propositions de modification au processus d'homologation qui mettraient l'accent sur la gestion des risques, ce qui suscite des craintes de la part de nombreux observateurs, craintes qui ont été exposées dans un article tout récent du Journal de l'Association médicale canadienne.
    Compte tenu de ce qui précède, le principe de précaution ne devrait-il pas avoir préséance sur la gestion des risques, d'autant que les évaluations indiquent que 10 000 Canadiens meurent chaque année des effets indésirables des médicaments, même s'ils suivent les indications à la lettre?

  (1610)  

    En guise de conclusion, Santé Canada devrait disposer de pouvoirs étendus et d'un financement adéquat pour évaluer les médicaments. N'y aurait-il pas lieu d'utiliser quelques millions de nos surplus prodigieux pour garantir une meilleure qualité de vie et une plus grande sécurité aux citoyens canadiens qui le méritent? Et pourquoi ne pas rétablir le Bureau de recherche sur les médicaments, qui a été fermé en 1997?
    Merci.

[Traduction]

    Merci beaucoup à tous les trois pour vos exposés.
    Nous allons aborder la période des questions.
    Nous commencerons par Mme Brown. Vous avez la parole, madame.
    Merci, monsieur le président.
    Bienvenue à nos témoins.
    Monsieur Morgan, dans une des pages de votre présentation facile à lire, parmi les défis communs auxquels se heurtent le PCEM et les programmes semblables, il est question des « produits de remplacement non validés », mais quand vous avez commenté cette page, vous avez plutôt parlé de marqueurs de substitution non validés. Je n'ai pas vraiment compris ce que cela signifie. Pourriez-vous me l'expliquer?
    Bien sûr et merci d'avoir soulevé cette question. C'est toujours bien de pouvoir s'expliquer officiellement.
    Il est donc question de « marqueurs de substitution », ce qui veut dire que, très souvent, les médicaments sont approuvés pour l'homologation et soumis au régime d'assurance-médicaments en fonction de leurs effets sur l'organisme humain. Les médicaments ont des effets sur certaines fonctions organiques sensibles. Par exemple, un médicament peut être approuvé parce qu'il abaisse le taux de cholestérol ou la tension artérielle.
    Nous avons des raisons de croire que les marqueurs de substitution — c'est-à-dire l'abaissement du taux de cholestérol ou de la tension artérielle — donneront lieu aux résultats recherchés sur le plan de la santé, soit une diminution du risque de maladie cardiovasculaire, de crise cardiaque ou d'AVC. Nous recevons bien souvent des médicaments qui sont homologués sur la base des marqueurs de substitution — ce que nous appelons parfois aussi des « marqueurs cliniques secondaires » — qui, eux, n'ont pas été validés.
    On vient, par exemple, tout juste d'entendre parler des inhibiteurs de la COX-2. Quand ces inhibiteurs se sont retrouvés sur le marché, les médicaments qui en contenaient étaient surtout vantés pour leurs effets sur les saignements et les ulcères gastro-intestinaux. Le profil de risque était fondé sur les saignements sous-cliniques ou les risques sous-cliniques; autrement dit, le problème a été détecté par un médecin à l'aide d'un instrument d'exploration, plutôt que d'être un état signalé par les patients. On s'est ensuite rendu compte que certains de ces médicaments ne donnaient pas les avantages escomptés sur le plan des risques gastro-intestinaux et l'on s'est aperçu qu'ils présentaient des risques sur le plan cardiovasculaire.
    Vos présentations à tous trois ne m'inspirent pas beaucoup confiance quand je vois que nous consommons autant de médicaments en vente libre ou sur ordonnance.
    Deux d'entre vous, je crois, ont parlé des essais cliniques comparatifs faisant intervenir des placebos. Pensez-vous qu'il est temps que Santé Canada ou d'autres organismes de réglementation ou d'approbation insistent pour que ces essais cliniques soient réalisés par rapport à des médicaments déjà recommandés ou homologués pour l'état sous-jacent?

  (1615)  

    Oui, mais reste à savoir comment s'y prendre, et c'est là la difficulté.
    Le véritable problème, c'est que ces essais — qu'on appelle généralement essais de phase trois et qui portent sur des populations humaines relativement importantes à partir de laquelle les demandes d'homologation sont soumises — prennent du temps. On pourrait craindre qu'ils prennent tellement de temps qu'un produit de référence retenu au début de l'étude n'en soit plus un au terme de cette même étude, d'où la question de savoir quel effet ce genre d'essai pourrait avoir sur la commercialisation du produit advenant que l'on ait utilisé tel ou tel autre produit de référence. C'est une question qui se pose.
    Toutefois, et à ce que je sache, il y a des laboratoires qui font des premières séries d'essais en basant leurs comparaisons sur des traitements existants plutôt que sur des placebos. J'estime donc que nous devrions au moins insister pour que l'on aille dans ce sens, mais encore faudra-t-il s'entendre sur les médicaments de référence à retenir pour les études.
    L'Australie a été l'un des premiers pays à se doter de lignes directrices sur la teneur des demandes aux fins de remboursement, surtout en ce qui a trait à l'élément économique. Le Canada a emboîté le pas peu après. Au début des années 90, ces deux pays étaient des pionniers en la matière. À l'époque, l'industrie australienne s'est posé la question et voulait savoir quel médicament de référence il fallait utiliser. On lui a généralement dit de fournir toutes les informations qu'elle avait en sa possession et que l'organisme d'homologation jugerait sur pièce.
    Je pense donc que, si l'on utilise un médicament de référence plutôt qu'un placebo, il faut d'abord que les parties s'entendent sur ce qui sera accepté comme base de comparaison et cela sur une période raisonnable. Il n'est pas envisageable de rejeter un médicament ou une technologie parce que, entre-temps, on aura trouvé un produit de substitution plus efficace qui est utilisé par presque tout le monde.
    À propos de certaines données que nous a communiqué M. St-Onge, comme le fait que l'on compte 5 000 médicaments sur le formulaire du Québec, tandis que la Nouvelle-Zélande n'en a que 2 600, j'aimerais que vous me répondiez tout trois à cette question: pensez-vous que nous avons trop facilement homologué les médicaments surtout quand on considère certains des problèmes que vous avez soulevés, comme le fait que le produit de référence retenu est un placebo et qu'on utilise parfois des marqueurs de substitution non validés? Est-ce pour cela que nous avons 5 000 médicaments homologués tandis qu'il n'y en a que 2 600 en Nouvelle-Zélande? Les Néo-zélandais homologuent-ils moins de médicaments au point qu'ils en ont moins sur leur formulaire?

[Français]

    Il est certain, par exemple, que la Nouvelle-Zélande a deux réducteurs de cholestérol, alors que le Québec en a six maintenant. La Nouvelle-Zélande a toujours refusé d'approuver le Celebrex ou le Vioxx, parce que leur supériorité sur les anti-inflammatoires traditionnels n'a jamais été démontrée, et aussi parce que déjà, au départ, on soupçonnait que le Vioxx pouvait causer des problèmes sur le plan cardiovasculaire. Les données étaient là.
    L'étude 090, par exemple, avant l'approbation du Vioxx, montrait que les gens qui prenaient le Vioxx avaient eu trois fois plus de crises cardiaques que ceux qui prenaient le Naproxène ou un placebo. Déjà, des données indiquaient à la Nouvelle-Zélande que ces produits ne devaient pas être remboursés et ne devaient pas figurer sur le formulaire.
    Une étude faite par Zhou et ses collègues de l'Université McMaster montrait que tous les anticholestérols étaient équivalents en matière de prévention secondaire. Quand on a déjà deux ou trois médicaments sur le marché, pourquoi en approuver un quatrième, un cinquième ou un sixième dont on ne connaît pas le profil de toxicité? Cela pose un certain nombre de problèmes.
    Évidemment, on n'a pas toujours les données nécessaires qui nous permettraient de dire que nous avons assez de médicaments de ce genre et qu'on n'a pas démontré que tel nouveau médicament était plus efficace que son concurrent. Il y a certainement des efforts à faire en ce sens.

[Traduction]

    Voulez-vous que les trois répondent?
    Oui.
    Très bien. Allez-y.
    Je vous dirai deux choses. D'abord, l'une des différences dans le nombre de médicaments provient du fait que l'on peut trouver beaucoup plus de médicaments dans telle catégorie du formulaire que dans telle autre. La Nouvelle-Zélande en est un bon exemple, puisque ce pays a moins de types de médicaments sur son formulaire.
    Quand on a le choix, il est possible de faire des différences entre les produits d'une même catégorie sur le plan des prix, ce qui est le cas dans certains pays comme le Canada. Je ne connais pas vraiment la question, mais les médicaments génériques ne sont inscrits au formulaire qu'en fonction d'un certain pourcentage du prix du médicament breveté à l'origine. Ce genre de choix peut donc être avantageux.
    Il faut être prudent dans cette comparaison du nombre de médicaments inscrit aux formulaires. Très souvent, on croit que cela est synonyme d'accès, surtout les gens de l'industrie. Toutefois, ces formulaires font l'objet de politiques de couverture différentes. Un pays pourrait très bien homologuer beaucoup plus de médicaments qu'un autre, mais exiger un paiement de contrepartie élevé à titre de compensation.
    Pour ce qui est de la question de l'accès, il faut aussi tenir compte du facteur abordabilité à cause du transfert des coûts du public au particulier. La question est de savoir si cette formule est souhaitable pour favoriser l'accès ou si elle est discriminatoire envers ceux qui ne peuvent pas s'offrir le médicament.

  (1620)  

    Je sais que nous parlons des médicaments ayant fait l'objet d'un examen qui sont ensuite inscrits au formulaire, mais je voudrais que nous revenions sur la facilité et la rapidité avec laquelle nous homologuons les médicaments, surtout quand on songe que tous les effets secondaires peuvent ne pas être connus. Par exemple, même dans le cas d'essais cliniques s'échelonnant sur deux ans, on peut ne pas découvrir tous les effets secondaires avant sept ans. Autrement dit, n'y aurait-il pas lieu, avant de nous demander pour quel médicament nous allons payer et lequel nous allons inscrire au formulaire, de nous assurer que l'homologation des médicaments se fait de façon rigoureuse?
    Monsieur Morgan, pourriez-vous me répondre?
    Je vais vous répondre, puis je reviendrai sur le cas de la Nouvelle-Zélande.
    Vous venez de soulever une question importante. Nous voulons nous assurer que les médicaments mis en marché sont sûrs et efficaces. L'une des tendances les plus préoccupantes est l'adoption des avis de conformité sous condition qui équivalent essentiellement à homologuer les médicaments de façon conditionnelle. Dans ce cas, les premiers essais sont prometteurs, mais ils ne suffisaient pas ou il n'y a pas eu suffisamment de données de recueilli pour établir l'innocuité et l'efficacité du médicament, ce qui n'empêche que nous lui accordons une homologation dans l'espoir qu'il ne présentera que des risques mineurs à l'étape de l'application.
    Je suis économiste. J'étudie l'organisation industrielle et les politiques de l'innovation. Je crois que le mécanisme de promotion de la concurrence et de l'innovation que nous recherchons doit consister à maintenir des normes élevées sur le plan réglementaire et peut-être même à hausser la barre. J'estime que nous avons suffisamment abaissé la barre jusqu'ici dans le contexte des processus dont il est question aujourd'hui. En contrepartie, il faudrait réexaminer la législation sur les brevets et envisager de rouvrir le débat sur la question du rétablissement de la durée des brevets. Il s'agit d'un débat qui sort des cadres de la discussion d'aujourd'hui, mais je crois qu'il va falloir en parler. De toute façon, c'est ce qui se passera à l'échelle internationale.
    L'Office of Fair Trading, au Royaume-Uni, a formulé d'intéressantes recommandations dans ce sens et, aux États-Unis, on discute régulièrement de la question du rétablissement de la durée des brevets qui consiste essentiellement à accorder des brevets demeurant valables plus longtemps à condition que le laboratoire effectue des essais cliniques plus longs parce que le brevet est inutile, en un sens, jusqu'à ce que le produit soit commercialisé. Toutefois, nous pourrons en reparler plus tard.
    Je veux parler un peu de la question de la Nouvelle-Zélande. Le formulaire de la Nouvelle-Zélande comporte moins de « médicaments » commercialisés. Ces formulaires présentent aussi moins de formes dosifiées, d'emballages, par rapport à ce qui se fait au Canada. On constate une prolifération des emballages, des forces médicamenteuses ainsi que des posologies pour des molécules chimiques semblables. Or, si vous examiniez les formulaires sous l'angle thérapeutique ou chimique, vous constateriez que les produits inscrits sont assez semblables.
    La Nouvelle-Zélande n'a pas pris de décision au sujet de médicaments très controversés, comme les inhibiteurs de la COX-2, du type Vioxx. Dans l'ensemble, le formulaire de la Nouvelle-Zélande est assez complet.
    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant passer à Mme Demers. Je suis heureux de vous revoir au comité. Vous avez la parole pour cinq minutes.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Je suis très contente d'être avec vous également. Vous m'avez tous manqué.
    Messieurs, merci d'être avec nous. Il y a longtemps que j'ai siégé au Comité de la santé; je n'ai pas participé aux études qui ont été faites. Cependant, en tant que consommatrice et personne, j'ai souvent eu besoin de médicaments. On est toujours inquiet quant aux médicaments que l'on nous fournit. Je peux comprendre les inquiétudes de ma collègue Mme Brown, car lorsqu'on a besoin de médicaments, on veut s'assurer que les médicaments fournis sont les bons.
    En écoutant vos présentations, j'ai constaté qu'il semblait y avoir un peu de dissension dans les différentes perceptions. On a dit que dans des pays comme la Suède, la Suisse et la France, environ 50 p. 100 plus de médicaments sont acceptés et reconnus qu'ici, au Canada. Y a-t-il une plus grande fréquence d'erreurs dans ces pays, puisqu'on y accepte plus de médicaments? Cela me préoccupe. Devrait-on axer davantage le Programme commun d'évaluation des médicaments sur des médicaments innovateurs? Je me souviens qu'au Comité de la santé, nous avions entendu des personnes atteintes du VIH qui réclamaient l'accès à un médicament en cours d'évaluation. Malheureusement, elles ne pouvaient avoir accès à ce médicament, qui pouvait potentiellement leur sauver la vie. Parce que ce médicament était en cours d'évaluation et qu'on mettait beaucoup de temps à l'accepter, on n'accordait pas à ces gens la possibilité de l'obtenir. Cela fait-il aussi partie du problème? Si le Programme commun d'évaluation des médicaments ne relève pas de Santé Canada, qui détermine la valeur des informations et des évaluations? Qui fait rapport au gouvernement? Qui détermine s'il faut mettre un médicament sur le marché ou pas?
    Monsieur St-Onge, vous parlez du grand nombre de médicaments qu'il y a sur la liste du Québec. C'est vrai et j'en ai bénéficié. J'ai souffert d'un cancer il y a six ans et j'étais très contente d'avoir différents choix afin de pouvoir prendre le médicament approprié au type de cancer dont je souffrais. J'ai de la difficulté à prendre position sur un sujet aussi important. Je sais qu'au Québec les évaluations sont faites plus rapidement.

  (1625)  

[Traduction]

    Posez votre question, s'il vous plaît.

[Français]

    Je pose plusieurs questions en même temps, monsieur le président.

[Traduction]

    Très bien, mais faites vite.

[Français]

    Fait-on moins attention? Est-on moins méticuleux? Je ne sais pas pourquoi c'est ainsi. Je vous pose des questions.
    Je ne sais pas par quel bout commencer, mais je vais prendre l'exemple d'un médicament contre le cancer qui s'appelle Iressa. Je suis allé sur le site de Santé Canada, entre autres, qui est assez bien fait en ce qui a trait aux effets indésirables des médicaments. C'est un médicament qu'on utilise contre le cancer du poumon. Maintenant, on l'utilise aussi hors indication pour traiter, entre autres, le cancer du cou et de la tête.
    Les évaluateurs de Santé Canada précisent que ce médicament, par exemple, n'a pas réussi à diminuer le taux de mortalité, n'a pas réussi à accroître la survie sans qu'il y ait progression de la maladie et sans aggravation des symptômes.
    Pour revenir à ce que le Dr Morgan disait tout à l'heure, c'est un médicament qui a été approuvé à partir de critères de substitution, qu'on appelle en anglais les surrogate endpoints. On a constaté que le médicament réduisait la tumeur cancéreuse, et c'est sur cette base qu'on l'a accepté.
    Au moins quatre essais cliniques ont été faits qui ont tous démontré que le médicament n'améliorait pas la survie sans progression de la maladie ni aucune de ces choses. En conséquence, l'organisme de la protection des consommateurs des États-Unis, Public Citizen, a rédigé une pétition qui circule actuellement aux États-Unis pour que ce médicament soit retiré du marché. En plus, il entraîne des effets indésirables très graves. Allez sur le site de Santé Canada et vous pourrez constater lesquels; je ne veux pas vous les donner.
    Ce sont peut-être des choses qui ne devraient pas exister. Lorsqu'on accepte un médicament à partir d'un critère de substitution, on devrait être très, très prudent à l'égard de ce médicament et exiger que la société qui le fabrique fasse des essais cliniques pour démontrer qu'il est véritablement important et qu'il diminue véritablement la mortalité, qu'il améliore la qualité de vie, etc.

  (1630)  

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Nous passons maintenant à M. Jaffer, pour cinq minutes.
    Cinq minutes. Ça va.
    Merci à tous nos témoins de s'être déplacés. Toute cette question du programme commun d'évaluation des médicaments m'est relativement nouvelle, puisque je ne siège à ce comité que depuis tout récemment.
    Monsieur Menon, j'ai été tout particulièrement intéressé par ce que vous avez dit en résumé de votre exposé — je crois que c'était au point 4 — à propos de l'idée de la participation du public, de la présence de représentants de la population au Royaume-Uni et en Australie. Vous avez, je crois, parlé d'un jury de citoyens ou d'un conseil de citoyens. Je trouve que ce processus est intéressant et je sais que, dans une certaine mesure, nous avons à peu près la même chose ici. Toutefois, dans les pays en question, dans quelle mesure la population participe-t-elle au processus d'examen des médicaments? A-t-on beaucoup recours à ces gens-là et leur demande-t-on conseil? Participent-ils au processus? Comment les représentants de la population sont-ils sélectionnés ou nommés dans ces pays?
    Comme je peux parler plus intelligemment de la situation du Royaume-Uni, je me propose de vous en dire quelques mots. Quand NICE, le National Institute for Health and Clinical Excellence, a été créé, il était question, en priorité, d'aborder les examens de technologie en santé en faisant participer plus d'intervenants du secteur que par le passé, soit des experts en technique, en essai clinique et en méthodologie. Ce sont ces experts qui, avant, examinaient, concevaient et formulaient des recommandations, la population étant essentiellement limitée aux résultats de leurs travaux ou devant vivre avec les décisions qu'ils prenaient.
    C'est ainsi que les Anglais ont mis sur pied le conseil de citoyens. Je dois préciser que ce conseil ne participe pas à l'examen des différents produits. Il intervient simplement au niveau des catégories de médicaments ou de technologies qui lui paraissent importantes et qu'il juge devoir examiner quant à leur aspect; il ne se préoccupe pas des dimensions très techniques ou scientifiques caractéristiques des essais.
    Le conseil a été constitué après un appel de candidatures à l'échelle nationale. Je ne m'en souviens pas exactement, mais je crois que le conseil des citoyens compte une vingtaine de membres. Ces gens-là ont été sélectionnés pour représenter la population du Royaume-Uni. J'ai assisté à deux de leurs réunions. Autour de la table, on voit des gens de tous horizons, de tous âges, de toutes conditions et de toutes les races.
    Ils sont assis les uns à côté des autres et c'est fantastique de les voir travailler. Ils ne prennent pas de décision quant aux produits qui doivent être homologués ou pas. Je me rappelle un produit qui concernait des maladies orphelines. Il était important pour NICE, avant de commander les essais, de comprendre la réalité des familles dont certains membres prenaient les médicaments orphelins et de savoir ce que les citoyens en pensaient.
    Ce qui est intéressant, c'est qu'à la faveur de ce processus, les citoyens en sont venus à comprendre que toutes les décisions sont matière à compromis. En un sens, le processus d'homologation de Santé Canada n'est pas affaire de compromis, puisqu'il est possible d'ajouter tous les médicaments qu'on veut, dès l'instant qu'on estime qu'ils répondent aux critères scientifiques établis. Toutefois, dans le cas d'une couverture basée sur un formulaire, les décisions du PCEM sont des compromis. Quand les gens comprennent qu'il s'agit de compromis, j'ai l'impression qu'ils acceptent mieux les décisions prises.
    Bien, pour poursuivre, je crois vous avoir entendu dire que des représentants de la population siègent au PCEM. Je ne sais pas ce qu'il en est. Vous avez dit que la procédure de nomination au Royaume-Uni vise à accepter un vaste éventail de représentants de provenances diverses. Estimez-vous que c'est ce qui se passe ici?
    Vous avez également dit qu'il serait possible d'améliorer le rôle de ces gens-là ou d'améliorer la consultation publique. Pourriez-vous nous dire ce que vous entendez par là?
    M. Morgan serait peut-être davantage en mesure de vous parler du processus. Je crois que deux membres du CCCEM représentent la population. À ce que je sache, l'invitation a été lancée sur le site Internet, mais je ne sais pas exactement quelle procédure a été appliquée pour sélectionner ces gens-là.
    Il s'agissait d'un appel. Deux représentants de la population siègent au CCCEM, mais ils n'ont pas le droit de vote.
    J'estime que la représentation publique est une question importante et je me propose d'illustrer une partie du travail réalisée au sujet des processus de couverture en général, c'est-à-dire des produits pharmaceutiques en santé et de la technologie de façon plus générale.
    Il existe un cadre éthique intéressant qui s'articule autour de la responsabilité vis-à-vis de ce qui est raisonnable; il s'agit donc d'un cadre portant sur ce qui est raisonnable. Celui-ci s'articule autour de quatre critères qui régissent le processus de décision. Tout d'abord, il y a la question de la pertinence, autrement dit de l'application des critères pertinents à la prise de décision. Et c'est précisément là, comme M. Menon vous l'a dit, que la mobilisation de la population est importante: il faut mobiliser le public pour nous aider à déterminer le genre de critère à appliquer dans la prise de décision sans nécessairement opter pour la démocratie directe, c'est-à-dire sans demander aux représentants de la population de faire des choix difficiles. Cette responsabilité appartient aux fonctionnaires et aux spécialistes.
    L'information publicitaire est un autre critère pour lequel on part du principe que le bien-fondé des décisions doit être rendu public. Une fois les décisions prises, il faut pouvoir les soutenir. Pour l'instant, ce critère est limité par les clauses de confidentialité invoquées par les fabricants. Pour vous dire honnêtement, je ne pense pas que le Canada puisse agir seul sur ce plan. Nous devrons collaborer avec d'autres pays à l'élaboration de ce qu'on pourrait appeler un ensemble minimal de données, soit des normes minimales de transparence applicables à la prise de décision, et exiger que les fabricants et d'autres groupes participent à la publication de l'information ou à cette forme de transparence.
    L'autre question qui se pose au sujet de ces critères ou de ce cadre décisionnel est celle de la révision. Il faut prévoir la possibilité de faire appel des décisions pour en favoriser le réexamen en cas de problèmes de procédure.
    Vient enfin la question de l'exécution. Les décisions doivent être contraignantes et il faut se doter d'un mécanisme quelconque qui en garantisse la mise en oeuvre.
    Le PCEM canadien donne d'assez bons résultats compte tenu de nos problèmes de compétence multiples en matière de drogues et des limites de transparence découlant de la confidentialité des données. Le PCEM n'a rien à envier aux autres systèmes. Il est évident qu'il faut rechercher la pertinence des critères et obtenir la participation des patients à l'établissement de ces critères.
    Un certain travail a été effectué pour attirer des gens au comité. Vous pourriez peut-être demander à un jury de citoyens ou à un panel national de dresser une liste de critères. En Nouvelle-Zélande, il y a neuf critères dont il faut tenir compte. Au Canada, nous devrions peut-être en avoir 16, puisque nous avons 16 régimes d'assurance-médicaments.

  (1635)  

    Merci beaucoup. Nous allons maintenant passer à Mme Priddy.
    Merci, monsieur le président.
    Ma première question va porter sur l'un des objectifs dont il est question dans la Stratégie nationale sur les produits pharmaceutiques, c'est-à-dire la mise au point d'un formulaire de médicaments national. Certains d'entre nous pourraient dire qu'il s'agit-là d'une première étape sur la voie de la création d'un régime national d'assurance-médicaments, que d'aucuns ont également réclamé. Pourriez-vous très brièvement — parce que j'ai deux ou trois autres questions à vous poser — me dire ce que vous pensez de l'idée d'un formulaire de médicaments national? Dites-moi si c'est bien ou pas, si c'est mauvais ou si ça pourrait passer.
    Eh bien, je dirais que ça pourrait passer.
    Quand ils pensent à ce que le programme commun d'évaluation des médicaments a pu donner ou pas, je crois que les gens ont tendance à oublier, dans leurs critiques du système, qu'avant le PCEM, chaque province appliquait un mécanisme quelconque, comme tout le monde le sait. Cela a-t-il changé la prise de décision? Je n'en suis pas certain. Comment donc pourrait-on se retrouver dans une situation où les gouvernements provinciaux seraient d'accord avec un formulaire commun alors même qu'ils ne peuvent pas prendre le même genre de décisions fondées sur des preuves communes et des recommandations, comme c'est actuellement le cas?
    Le mieux que je puisse espérer — et il est possible que je sois cynique — c'est de parvenir à un panier de produits pharmaceutiques au niveau d'un formulaire commun. Il pourrait être difficile de décider des produits à mettre dans ce panier et il faudrait partir de certains critères; toutefois, cette formule pourrait être intéressante parce qu'elle permettrait des achats en gros.
    Bien.
    En revanche, je ne vois pas comment toutes les provinces pourraient s'entendre sur un seul et même formulaire qui serait traité de la même façon.
    D'accord, merci.
    Monsieur Morgan.
    Je le concède, je suis un pragmatique sur le plan des politiques. Je me rends compte que, dans le contexte canadien, la notion de programme national d'assurance-médicaments est encore vague — oui, on pourrait dire pragmatique ou même pessimiste.
    Je crois, cependant, que l'idée d'un formulaire national constitue un pas dans la bonne direction. M. Menon vient juste de vous parler d'une recommandation que nous venons de faire, Bob Evans et moi, dans un ouvrage que l'IRPP devrait bientôt publier et qui porte sur les défis auxquels se heurte le Canada sur le plan des politiques. Notre propos est assez général dans le chapitre que nous avons consacré aux médicaments et aux soins de santé. Nous recommandons, dans le cas du Canada, de débuter par un régime national d'assurance-maladie axé sur les cinq principales maladies chroniques que nous trouvons ici : le diabète, l'hypertension, l'hypercholestérolémie — faites votre choix.
    Vous pourriez débuter par les grandes catégories et appliquer un formulaire national pour ces médicaments essentiels, c'est-à-dire pour les catégories dont M. Menon vous a parlé. Ce faisant, vous auriez mis sur pied un programme national d'assurance-médicaments et je ne pense pas que le médicaments qu'on retrouverait dans le panier de la pharmacopée destinés à traiter l'hypertension, le cholestérol, le diabète et que sais-je encore seraient âprement contestés.

  (1640)  

[Français]

    Ce serait souhaitable, en effet, ne serait-ce que pour des raisons d'efficience, par exemple. Si un tel organisme est mis sur pied, il aura un pouvoir beaucoup plus grand de négocier, à condition qu'il ait le pouvoir de le faire. Je sais que la RAMQ, par exemple, n'a pas ce pouvoir de négocier avec les sociétés pharmaceutiques.
    Il y a parfois des choses qui sont relativement aberrantes. Je parlais avec la pharmacienne d'un grand hôpital de la région de Montréal il n'y a pas très longtemps, et elle me disait que les hôpitaux ont le droit de négocier avec les sociétés pharmaceutiques. Ils reçoivent des IPP, des inhibiteurs de la pompe à protons, des anti-ulcéreux. Ils les paient 1 ¢ la pilule, alors que la RAMQ leur rembourse 1,80 $. La différence entre les deux prix est tout à fait ahurissante. Or, cela ne s'applique pas seulement aux IPP: il y a beaucoup d'autres exemples.
     Évidemment, on sait pourquoi les fabricants font cela. Ils le font pour habituer les médecins à prescrire ces médicaments et pour habituer les patients à les prendre. Mais s'il y avait un tel organisme qui pouvait faire des achats et négocier les prix, ce serait excellent pour les patients ainsi que pour les finances publiques.
    La question du Québec en est une autre.

[Traduction]

    Merci.
    À l'évidence, on envisage, et l'on est même passé aux actes, d'élargir le rôle du PCEM pour que celui-ci se penche sur les médicaments en circulation. Je ne sais pas ce que vous en avez dit au sujet des autres pays, mais pourriez-vous très rapidement me faire part de votre avis sur l'ouverture du rôle du PCEM qui s'intéresserait désormais aux médicaments en circulation plutôt que de se limiter aux nouveaux médicaments?
    Je vais rapidement vous répondre.
    Pour moi, c'est essentiel. C'est une des raisons pour lesquelles le PCEM a été mis sur pied. Les Américains ont un groupe qui s'appelle le Drug Effectiveness Review Project, DERP, dont le slogan pourrait se traduire ainsi « mondialiser la preuve, localiser les décisions ».
    C'est, à bien des égards, ce que fait le PCEM au Canada. N'est-ce pas? Il nationalise la preuve et maintient la prise de décision à l'échelon local, ce qui peut être approprié pour le Canada, mais pour bien faire et pour prendre en compte tout l'éventail des agents pharmaceutiques présents sur le marché, comme Dev vous l'a dit tout à l'heure, il faut envisager de travailler au niveau des catégories de médicaments, nouveaux comme anciens, et d'établir ce que l'on pourrait considérer comme des médicaments de premier choix au Canada.
    Je pense donc que tout cela va exiger une importante mobilisation de ressources. J'estime que le gouvernement fédéral peut assumer un rôle de chef de file à cet égard, mais ce ne sera pas banal parce qu'il est coûteux d'évaluer et d'estimer les données scientifiques en toute transparence, mais je crois qu'il serait très utile de faire participer la population à ce processus, d'une façon ou d'une autre.
    Excellent. Merci.
    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant passer à Mme Davidson.
    Merci, monsieur le président.
    Merci pour vos exposés qui, je pense, nous ont permis d'entendre des choses nouvelles.
    Monsieur Morgan, je vais commencer par vous. Dans votre exposé, vous avez dit que le PCEM est en train d'acquérir rapidement une certaine notoriété auprès des autres organismes qui appliquent des processus d'examen, ailleurs dans le monde. Ce n'est pas là quelque chose que j'ai entendu de la bouche d'autres témoins.
    Il a été question d'absence de reddition de compte, de dédoublement et de l'opacité du système. On nous a dit que le système vise plus à contenir les coûts qu'à optimiser les avantages. Il n'y a pas de procédure d'appel. Soyons justes, tout de même: ces critiques ne faisaient pas une comparaison avec ce qui se fait dans d'autres pays. Pourriez-vous réagir à ce sujet? Pourquoi est-ce que les choses paraissent tellement différentes entre ce que nous pensons ici et ce que les autres pensent dans le monde?
    J'ai l'impression que vous tenez certaines de ces remarques de représentants de l'industrie. C'est leur position au sujet de n'importe quel projet visant à examiner les médicaments de façon transparente et à prendre des décisions en matière de couverture qui soient fondées sur des preuves.
    L'industrie n'aime pas ce genre de processus ailleurs dans le monde parce qu'il est plus facile, pour elle, d'écouler ses produits pharmaceutiques librement sur le marché plutôt que d'avoir à se plier aux diktats scientifique d'un organisme national. Il demeure que le processus en vigueur au Canada est respecté et je crois que les scientifiques canadiens participant aux évaluations et estimations sont aussi respectés.
    Pour ce qui est des mécanismes d'appel, je dirais qu'il en existe puisqu'il est possible de refaire une demande. Les fabricants peuvent en effet refaire une demande s'ils ont de nouvelles preuves à soumettre à la considération de l'organisme d'évaluation.
    Certaines critiques formulées à l'endroit du PCEM sont carrément non fondées.
    Sur la scène internationale, le Canada a été invité à participer à des réunions d'organismes comme le PCEM parce que notre processus est respecté. Il y a place à l'amélioration pour tous les processus dans le monde et je crois que nous parviendrons à réaliser améliorer les choses en collaborant et en dialoguant avec les autres organismes d'examen.
    Nous avons tiré des enseignements des histoires à succès. Par exemple, je crois que la participation de la population au comité consultatif australien a été très utile dans la décision du PCEM d'opter pour ce genre de formule. Par exemple, nous pourrions apprendre du Royaume-Uni tout ce qui concerne la transparence et l'instauration d'un dialogue dans le cadre des processus d'examen.
    Je pense avoir écrit cinq articles sur les PCE dans le monde. Eh bien, ce sont ceux qu'on me réclame sans doute le plus dans le monde entier, par rapport à tous ceux que j'ai signés dans toute ma carrière, soit 50 ou 60.

  (1645)  

    Dites-moi une chose. Pensez-vous vraiment que les évaluations du PCE visent davantage à contenir les coûts ici au Canada que dans d'autres pays ou est-ce que tous les programmes du genre ont tendance à faire la même chose en matière de coûts?
    Je n'ai jamais assisté aux délibérations du PCEM et je ne fais pas partie du processus, mais ce que je peux vous dire, en tant qu'observateur qui a eu des entretiens très francs avec des personnes participant à ce genre de programme dans cinq pays, c'est que le Canada se préoccupe beaucoup moins des coûts que les autres pays, à l'exception du Royaume-Uni avec NICE. Le Canada et le Royaume-Uni se détachent très nettement du lot en ce sens qu'ils s'attardent presque uniquement à l'efficacité relative des produits examinés et que les coûts n'interviennent qu'en second lieu.
    J'estime qu'on a tort de critiquer le PCEM pour cela, parce que le Canada est une exception dans la mesure où il s'intéresse davantage à l'aspect scientifique qu'à l'aspect économique.
    Vous nous avez dit que l'Australie examine 100 médicaments par an, y compris les génériques. Est-ce que d'autres pays examinent les médicaments génériques, comme l'Australie? Sur ces 100 médicaments, combien sont des génériques?
    Près de la moitié.
    Les Australiens homologuent les médicaments génériques dans le cadre de ce processus parce que, comme je le disais, l'Australie a opté pour un régime de négociation et de fixation des prix qui est extrêmement compliqué. Les médicaments doivent être soumis à tout le processus destiné à établir des critères thérapeutiques qui servent de base de comparaison à l'étape de l'examen des prix. C'est pour cela que les Australiens examinent autant de médicaments.
    Sont-ils les seuls à examiner les produits génériques?
    Oui, sur les cinq pays que j'ai étudiés. Dev pourrait sans doute vous parler des 16 pays auxquels il s'est intéressé.
    Pourriez-vous le faire?
    Je ne me souviens pas combien d'organismes européens examinent les médicaments génériques, mais il y en a.
    Merci.
    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant passer à Mme Kadis.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à vous tous de vous être déplacés au moment où nous approchons de la production de notre rapport intérimaire.
    Il a beaucoup été question, avec les témoins, de maladies rares, des dépenses qui y sont associées et du fait que les gens n'obtiennent pas leur dû. Dites-moi si, dans d'autres pays, comme le Royaume-Uni et l'Australie, il existe un processus spécialisé ou un mécanisme différent dans le cas des maladies rares et, le cas échéant, de quoi s'agit-il?
    Je ne pourrai vous répondre en détail pour tous les pays. Le problème des maladies rares — certaines d'entre elles tombent même dans la catégorie des maladies onéreuses, à cause du coût des traitements — c'est que nous ne pouvons pas produire beaucoup de données scientifiques susceptibles de nous aider à prendre le genre de décisions que le PCEM doit prendre, parce qu'en présence d'une maladie très rare, le bassin de patients est très limité et qu'il est donc quasiment impossible de conduire des essais destinés à recueillir suffisamment de données pour parvenir à des conclusions utiles. Il faut ajouter à cela le fait que les médicaments rares ou orphelins, comme on les appelle, sont beaucoup plus coûteux parce qu'ils reviennent plus cher à produire et qu'ils le sont en plus petite quantité pour des marchés restreints. Voilà autant de facteurs qui compliquent le processus.
    Au bout du compte, quelqu'un doit décider si, pour ces catégories de médicaments, on est prêt à accepter des niveaux de preuve différents. C'est le genre d'argument que tiennent les méthodologistes. Au Royaume-Uni, NICE a essayé de s'attaquer à ce problème au point de se pencher sur les maladies ultra-orphelines qui sont encore plus rares. Quand je dis plus rares, je veux parler de leur prévalence. D'ailleurs, lors d'une réunion d'un jury de citoyens dont je vous ai parlé, les gens essayaient de voir jusqu'à quel point il pourrait être différent de traiter des médicaments ultra-orphelins. En vérité, on ne peut pas s'attendre à disposer des mêmes données ou des mêmes preuves, parce que c'est tout simplement impossible.
    Au Canada, nous avons eu le même genre de discussions dans le cas de médicaments comme la Fabrazyme. Je ne sais pas exactement quelle décision le PCEM a prise à ce sujet, mais ce dont je suis certain, c'est que les médicaments onéreux et les médicaments rares sont abordés de façon tout à fait différente quant au genre de données nécessaires à la prise de décision les concernant.

  (1650)  

    Monsieur Morgan, pouvez-vous nous en dire un mot?
    J'ajouterai simplement à ce que M. Menon vient de dire que différents pays adoptent des approches différentes. En Australie et en Nouvelle-Zélande, par exemple, les organismes d'homologation approuvent des médicaments pour des maladies rares ou orphelines en recourant à leur processus centralisé, mais ces pays ont également — sous la pression politique et sans doute à juste titre dans certains cas — créé des enveloppes de financement distinctes pour des médicaments destinés à traiter des maladies rares. Compte tenu de considérations d'ordre éthique tout à fait particulières et des responsabilités sociales uniques qui peuvent nous incomber dans le cas de certaines de ces pathologies, on pourrait toujours prêcher en faveur d'un financement réservé assorti d'un budget plafonné qui permettrait de prendre une décision au sujet des maladies rares à partir d'algorithmes de rentabilité légèrement différents.
    Je demeure persuadé que le slogan « mondialiser la preuve et localiser les décisions » se tient. Ces médicaments doivent être soumis aux mêmes normes de preuve strictes. Ce que nous ne voulons pas, c'est acheter des promesses, de l'espoir ou du battage publicitaire. Nous voulons acheter des résultats sur le plan de la santé et nous voulons donc savoir si ces médicaments fonctionnent. Cela étant posé, je pense que nous devrions prendre l'expression « mondialiser la preuve et localiser les décisions » au pied de la lettre. Il arrive souvent qu'il n'y ait pas suffisamment de patients dans un pays pour évaluer les médicaments en question et nous devrions donc envisager de nous associer à nos collègues, ailleurs dans le monde, pour déterminer la meilleure approche possible afin d'être éthique et responsable dans le cas de ces produits et de ces patients envers qui nous devons montrer de la compassion et pour qui nous devons nous assurer de faire ce qu'il faut afin de parvenir aux résultats thérapeutiques recherchés.
    Nous sommes aux prises avec une contradiction qui revient sans cesse dans nos audiences, certains témoins disant que tout fonctionne bien et que le système a été élargi, tandis que d'autres — essentiellement les groupes de défense dans le secteur de la santé et l'industrie — affirment que rien ne va et qu'il y a des obstacles partout. À quoi attribuez-vous de telles divergences d'opinion? C'est un phénomène qui est revenu régulièrement dans nos séances. Nous essayons bien sûr de déterminer à quoi il faut l'attribuer. Est-ce parce que des gens ne seront jamais contents, peu importe le système, ou est-ce parce que ce système est vraiment inefficace et qu'il ne répond pas à leurs besoins?
    Je m'exprime encore une fois en tant qu'observateur de l'extérieur et je dirais qu'il s'agit d'un système qui fonctionne relativement bien. Quand j'ai entamé mon étude, il y a deux ans, je m'attendais honnêtement à trouver des défauts énormes et j'ai été surpris de constater à quel point le système canadien fonctionne bien.
    J'ai l'impression que vous avez à faire aux inévitables jeux politiques caractéristiques des programmes qui ont pour objet d'affecter de maigres ressources — il y en a qui gagnent, d'autres qui perdent et les perdants se plaignent systématiquement. Je ne porte pas de jugement ici. Ceux qui perdent voudraient avoir les mêmes droits que les autres à ces maigres ressources, ce qui les amène à contester le processus et à exprimer des inquiétudes.
    Tout ce que je peux vous dire, en tant que profane, c'est que ce processus est très long. J'irai même jusqu'à dire qu'il représente l'une des meilleures politiques en matière de médicaments jamais appliquée à l'échelon national au Canada, parce que, il faut bien le dire, nous n'avons eu que très peu de politiques nationales en la matière, sauf par le biais de la réglementation.
    Merci beaucoup.
    C'est au tour de Patrick Brown.
    Merci, monsieur le président.
    J'ai quelques remarques à formuler et quelques questions à poser.
    Tout d'abord, quelqu'un a dit que les commentaires que nous avons entendus émanent sans doute de l'industrie. Eh bien, je dois préciser que les commentaires au sujet du PCEM n'émanaient pas uniquement de l'industrie pharmaceutique, mais aussi de patients et de médecins que je connais, dans ma circonscription, outre que des témoins sont venus me faire part des problèmes personnels qu'ils ont connu à cause du processus. Nous avons entendu bien des témoins de groupes de bienfaisance qui recueillent des fonds et représentent des Canadiennes et des Canadiens souffrant de différentes maladies. L'éventail est large.
    Un des exposés que j'ai trouvé les plus émouvants était celui de la Société canadienne du cancer au sujet du cancer du rein de certaines difficultés que la Société a eus avec le PCEM. Les opinions sont très variées et il est très difficile de réconcilier les points de vue. Les gens se font une idée complètement différente de l'utilité du PCEM.
    Les précédents promoteurs du PCEM ont notamment indiqué qu'une des raisons pour lesquelles ce programme avait été mis sur pied, c'est qu'il fallait instaurer des normes nationales dans le cas du processus d'approbation des médicaments au Canada et instaurer davantage d'éléments communs entre les différents régimes d'assurance-médicaments des provinces. J'ai posé cette question. J'ai voulu savoir si les choses avaient changé, s'il y avait une certaine communauté de conception et si les normes nationales avaient été appliquées. Comme je n'ai pas été satisfait par la réponse, j'aimerais que vous m'en disiez plus. Si, il y a plusieurs années de cela déjà, on voulait parvenir à une certaine harmonisation, pourquoi est-ce que des régimes d'assurance-médicaments provinciaux font totalement fi des décisions du PCEM? Pourquoi des médicaments destinés à traiter le cancer sont-ils rejetés à l'échelon national par le PCEM et approuvés, par exemple, par la Colombie-Britannique ou l'Ontario? C'est troublant.
    Il y a une autre question que je voulais vous poser. Je ne l'ai jamais posée en l'abordant sous cet angle. On parle toujours d'accès aux médicaments pour les patients. Avant le PCEM quel tort le processus en place portait-il au patient? En quoi le système est-il meilleur aujourd'hui qu'il ne l'était à l'époque? Pouvez-vous affirmer à ce comité que le système de soins de santé canadien, le processus d'approbation des médicaments, sert mieux les patients de nos jours que lors de sa création il y a plusieurs années?
    J'invite n'importe lequel d'entre vous à exprimer son point de vue à ce sujet.

  (1655)  

    Ce sont effectivement des questions intéressantes. Il y a bien des différences d'opinions et on ne peut pas toutes les attribuer à l'industrie.
    Permettez-moi de revenir un peu en arrière pour poser une question au sujet de ce que les gens tendent à oublier : pourquoi a-t-on institué le programme commun d'évaluation des médicaments dans un premier temps? Quelqu'un a-t-il dit que le PCEM permettrait d'accéder à des médicaments communs partout au pays? De tout ce que j'ai lu —
    Je dois vous préciser que, sept années durant, j'ai été le premier directeur de l'OCCETS, prédécesseur de l'ACMTS, et que j'ai donc une petite idée de l'interaction entre le provincial et le fédéral dans ce domaine. Quand il a été question du PCEM pour la première fois — et je crois que M. Morgan vous en a parlé —, l'objectif visé était de faire en sorte que l'examen des médicaments en vue de leur éventuelle inscription au formulaire soit plus efficace et que l'on réduise les éventuels dédoublements. Voilà quels étaient les premiers objectifs. Quant à venir à affirmer qu'il était question d'améliorer l'accès aux médicaments pour les patients ou d'améliorer les soins aux patients, j'ai envie de demander ce que l'on entend par amélioration des soins. Cela revient-il à dire que les décisions prises antérieurement n'étaient pas favorables à la santé des patients? Est-ce une hypothèse de départ? Je ne pense pas, très honnêtement, que ce soit le cas.
    J'estime que le PCEM a permis un certain nombre de choses : il y a maintenant une procédure de demande et il existe un ensemble de normes à respecter. Il existe des lignes directrices à respecter également et, en ce sens, les normes sont aussi respectées. Ce que je crains, c'est qu'elles demeurent à ce point techniques et cliniques qu'elles ne traduisent pas les points de vue ni les valeurs des autres. C'est peut-être là où ce situe le divorce, parce que les normes sont fondées sur une méthodologie très arrêtée.
    Je sais que vous manquez de temps, mais je veux faire une autre remarque. Tout cela me rappelle une chose. Mes collègues me détesteront pour cela, mais je dois vous raconter une petite histoire: quelle est la différence entre un méthodologiste et un terroriste? Eh bien, il est toujours possible de négocier avec un terroriste. J'ai l'impression que nous sommes piégés par le développement méthodologique et que nous avons tendance à oublier l'élément humain. C'est là, selon moi, que ce situe véritablement la fracture.
    En réponse aux accusations selon lesquelles le système ne fonctionne pas, je me demande si l'on s'attendait vraiment à ce que le PCEM permette de favoriser l'accès à un plus grand nombre de médicaments. Nous attendions-nous raisonnablement à cela? Si l'on retient cette hypothèse, c'est que l'on refusait des traitements à certains patients avant et je n'ai rien trouvé qui le confirme. C'était peut-être le cas. Quoi qu'il en soit, le PCEM permet maintenant aux gens de prendre des décisions qui se défendent davantage d'un point de vue scientifique.
    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant passer à M. Malo.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie d'être présents cet après-midi.
    Professeur Morgan, tout à l'heure, ma collègue Mme Demers vous a posé une question à laquelle vous n'avez pas eu le temps de répondre. Avez-vous des études qui vous prouvent que plus d'erreurs sont commises dans les pays où il y a davantage de médicaments acceptés en vertu d'un processus d'évaluation plus rapide, et ce, justement parce que ces médicaments sont approuvés plus rapidement et en plus grand nombre?

  (1700)  

[Traduction]

    Non. Je ne connais pas suffisamment ce qui a été écrit au sujet des règlements de précommercialisation et je préfère m'en remettre à mes collègues qui sont spécialisés dans les processus réglementaires et leur impact.
    Je vous ferai toutefois remarquer qu'il y a de bonnes raisons pour lesquelles des pays comme la France ont homologué beaucoup de médicaments. C'est en partie dû aux stratégies d'homologation internationales et de commercialisation des laboratoires, stratégies qui consistent à faire d'abord approuver les médicaments sur des marchés comme le marché français pour obtenir un prix plus élevé et passer par une filière où l'approbation est obtenue un peu plus facilement qu'ailleurs. Autrement dit, il y a création de précédents.
    Si les laboratoires essayaient d'abord de faire homologuer leurs produits dans un pays jugé difficile d'un point de vue réglementaire — et l'on peut dire que les États-Unis font partie du lot — et s'ils sont refusés, ils établissent du même coup un mauvais précédent à l'échelle internationale.
    S'il y a beaucoup de médicaments dans certains pays, ce n'est pas parce que les consommateurs de ces pays ont vraiment besoin de milliers de médicaments, mais plutôt parce que les compagnies pharmaceutiques doivent d'abord les faire accepter sur ces marchés avant de s'attaquer à d'autres pays.

[Français]

    Il y a entre autres une étude qui a été faite par le Government Accountability Office des États Unis qui révèle qu'aux États-Unis, avant l'imposition en 1992 des frais aux usagers, 1,6 p. 100 des médicaments étaient retirés de la circulation. Les frais aux usagers ont fait en sorte qu'on a réduit le temps d'approbation de moitié. On montrait que vers la fin de la décennie, 5,4 p. 100 des médicaments étaient retirés de la circulation à cause du danger qu'ils posaient.
    Une étude parue dans Pharmacoepidemiology and Drug Safety en 1995 démontrait que de 1974 à 1993, 10 produits ont été retirés de la circulation aux États-Unis, alors que de 1997 à 2001, après l'introduction des frais aux usagers, il y a eu 12 retraits, dont 9 médicaments qui avaient été approuvés après 1992. D'après plusieurs observateurs, on aurait probablement coupé les coins rond et approuvé des médicaments un peu trop rapidement. Le résultat a été, entre autres, la pire catastrophe médicale, soit celle du Vioxx.
    Lors de la séance que le comité a tenue lundi, on a entendu deux jeunes femmes parler de l'histoire de leur mère qui, atteinte d'un cancer, n'avait pas accès à un médicament qui avait été préalablement testé dans le cadre d'une étude-pilote. Le médecin a simplement dit à la patiente qu'il se croisait les doigts en espérant que le médicament serait finalement approuvé. 
    Que pensez-vous d'une situation comme celle qu'a vécue cette famille qui était aux prises avec une maladie grave, le cancer?

[Traduction]

    Je réagirais exactement de la même façon. Cela étant, le chercheur que je suis n'a pas de réponse à cette question.
    Je suis venu vous parler de médicaments. Il se trouve que j'ai passé les 10 premières semaines de l'année dans un hôpital, dont six aux soins intensifs. Je partage donc tout à fait le point de vue de ces personnes. C'est là, d'ailleurs, que nous nous heurtons à un problème selon moi, c'est parce que nous raisonnons au niveau des grands nombres et que nous oublions l'individu. Il va falloir qu'on en tienne compte et ce ne sera pas grâce aux données scientifiques obtenues à la suite d'essais contrôlés.

[Français]

    De toute façon, il existe au Canada des moyens d'avoir accès à des médicaments expérimentaux.
    Supposons que quelqu'un soit atteint du VIH et que tous les médicaments qu'il a pris jusqu'à maintenant ne fonctionnent plus. Si un nouveau médicament arrive sur le marché et qu'il est prometteur, bien qu'il puisse s'accompagner d'effets indésirables dont on ne connaît pas tous les détails, si la personne, qui est en phase terminale ou sur le point de mourir, veut l'expérimenter, je ne pense pas qu'on puisse s'y opposer.
    Il en va de même pour quelqu'un, par exemple, qui est en phase terminale d'un cancer. Ici, on parle de cas très sérieux. On ne parle pas de problèmes comme l'arthrite, par exemple, pour laquelle des médicaments qui ont déjà fait leur preuve sont sur le marché. Vous pouvez mettre sur le marché un nouveau produit dont vous ne connaissez pas les effets indésirables, alors qu'il existe des médicaments qui ont déjà fait leurs preuves.
    Cependant, le Dr Graham du Food and Drug Administration, la FDA, disait que la première chose qu'il avait apprise à l'école de médecine, c'était de ne jamais être le premier à tester un nouveau médicament. Quand ce ne sont pas des maladies qui menacent la vie — Dans mon cas, je ne serais pas le premier à tester un nouveau médicament. Dans d'autres circonstances, toutefois, ce peut être différent.

  (1705)  

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Nous allons mettre un terme à cette séance en cédant la parole au dernier intervenant, M. Fletcher. Vous avez quatre minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président, j'espère simplement qu'il s'agit de minutes métriques.
    J'ai deux questions à vous poser. La première concernant la transparence. Au PCEM, ce sont les fabricants qui imposent la confidentialité commerciale. Est-ce le cas dans d'autres pays aussi? Les fabricants disent-ils qu'il ne faut pas montrer ceci ou cela?
    Effectivement et j'estime que nous devons entreprendre un dialogue à cet égard avec les gens du Royaume-Uni, par exemple, parce que les documents de divulgation produits par NICE comportent beaucoup plus d'informations que le PCEM peut en produire. Et croyez-moi, j'ai interrogé des membres du CCCEM qui m'ont dit qu'ils aimeraient beaucoup publier davantage d'informations. Ils ont l'impression d'être restreints dans leur action, un peu comme Santé Canada est limité dans ce qu'il est possible de divulguer dans le cadre d'un processus réglementaire.
    On dirait que les fabricants craignent que l'information soit diffusée. Or, si celle-ci est disponible dans une partie du monde, elle l'est partout. Pourquoi donc ne pas la diffuser au Canada? De toute façon, la concurrence mettra la main dessus. Comment réagissent les fabricants à une telle affirmation?
    C'est vrai que c'est un processus politique important — je veux parler du fait que l'on indique aux gens où se trouve l'information. C'est ce que nous pourrions faire. Je demeure persuadé que nous devrions collaborer et travailler avec les fabricants afin de déterminer le niveau de divulgation raisonnable.
    Passons un instant à autre chose. On sent bien que la question des valeurs est omniprésente dans tout ce débat, même si nous n'en avons pas discuté en profondeur lors de notre étude en comité. Je pense qu'il y a toujours quelqu'un, quelque part, qui évalue la vie en termes de qualité et de quantité. En revanche, on dirait que dès qu'on parle de médicaments vendus sur ordonnance, la question se pose plus directement.
    Nos témoins pourraient-ils dire au comité ce que d'autres pays font dans le cas de ce genre d'évaluation et ce qu'ils recommanderaient au comité pour que la question soit correctement traitée dans notre rapport.
    Permettez-moi de vous donner une brève réponse.
    Pour commencer, les questions de qualité de vie et de valeur ne sont pas les mêmes. La qualité de vie peut être mesurée scientifiquement dans un grand nombre d'essais de technologies médicamenteuses et même non-médicamenteuses. Il existe des méthodes validées pour cela permettant de voir si l'on améliore la qualité de la vie d'une population de patients donnée. Dès lors, on se rend compte que des valeurs se rattachent à tout cela, mais aucun de ces organismes ne les a jamais explicitement énoncées. Je pense que ce n'est qu'au cours des trois ou quatre dernières années qu'on a commencé à en parler et que les organismes internationaux chargés d'évaluer les technologies de la santé ont commencé à comprendre où et comment il serait possible d'intégrer ces valeurs.
    Puis, tout cela s'est transformé en questions plutôt méthodologique: comment débusquer ces valeurs, comment les obtenir et auprès de qui? Une partie de mon programme de recherche a consisté à tenir compte de la mobilisation des citoyens autour de la prise de décision concernant les médicaments destinés à traiter le cancer. Nous venons juste de recevoir une subvention de cinq ans des IRSC pour mettre sur pied une nouvelle équipe à cette fin. Quant à moi, je trouve qu'il est encore très tôt pour inclure cette dimension dans les décisions portant sur l'affectation des ressources dans les soins de santé. Je ne pense pas qu'il existe quelque part un superbe exemple que nous pourrions suivre. C'est d'ailleurs ce qui m'amène à penser que le Canada pourrait prendre l'initiative dans ce dossier, comme il l'a fait dans le passé pour d'autres choses.

  (1710)  

    Quelqu'un a-t-il quelque chose à ajouter?
    C'est une question délicate de toute façon.
    Eh bien, nous allons nous arrêter ici pour la période des questions.
    Merci beaucoup à nos témoins de s'être déplacés. Vos exposés nous ont été très utiles à la veille où nous allons rédiger notre rapport au sujet du PCEM et de l'importante étude que nous avons entreprise. Merci beaucoup d'avoir répondu à notre invitation et d'avoir contribué à nos travaux.
    Nous allons faire une courte pause pour passer à huis clos afin de discuter des travaux futurs du comité et de notre rapport.
    Merci beaucoup.
    [La séance se poursuit à huis clos.]