Passer au contenu
Début du contenu

FOPO Rapport du Comité

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

PDF


LA GARDE CÔTIÈRE CANADIENNE
SERVICES DE COMMUNICATIONS ET TRAFIC MARITIMES

INTRODUCTION

Nous (des SCTM) sommes sur la première garde. Nous ne devons jamais relâcher notre attention; nous devons constamment être prêts à nous attaquer de front aux difficultés et aux menaces de plus en plus grandes qui se dressent devant nous (en matière de sécurité).

Julius Smolders, Surveillant de veille, SCTM Tofino

Le 18 octobre 2001, à peine plus d’un mois après les événements catastrophiques du 11 septembre, le Comité permanent des pêches et des océans a rencontré des hauts fonctionnaires du ministère des Pêches et des Océans (MPO) et des agents des Services de communications et trafic maritimes (SCTM) qui représentaient la section locale 2182 des TCA-Canada. La question essentielle portée à l’attention du Comité était que la région du Pacifique de la Garde côtière canadienne (GCC) faisait face à une insuffisance de fonds d’environ 8 millions de dollars dans son budget pour l’exercice 2001-2002 et que les SCTM souffraient d’un manque d’environ un million de dollars. De plus, il a été indiqué au Comité que la région du Pacifique de la GCC et plus particulièrement les SCTM souffraient « d’insuffisance chronique de fonds ».

Le Comité a appris que des contraintes financières étaient la cause de difficultés éprouvées dans les installations des SCTM de la région du Pacifique, notamment : le manque de personnel, des agents surmenés des SCTM, des restrictions et des faiblesses en formation, du matériel vétuste et n’étant plus fiable, de la négligence vis-à-vis des engagements internationaux, de l’incertitude, de l’appréhension et de la frustration de la part des employés une diminution du service et une mise en péril de la sécurité de nos frontières.

À la suite de cette rencontre, le Comité a décidé de se rendre en Colombie-Britannique pour visiter les installations des SCTM et constater, de visu, le fondement de ces déclarations. Le Comité s’est rendu en Colombie-Britannique en novembre 2001 où il a rencontré des cadres supérieurs de l’administration centrale de la région du Pacifique et a visité les installations des SCTM à Victoria, Tofino et Prince Rupert. À titre de suivi, en mars 2002, le Comité s’est rendu dans les installations des SCTM de la côte Est à Halifax (N.-É.), St. John’s (T.-N.-L.) et Rivière-au-Renard (Qc) et, au Collège de la Garde côtière à Sydney (N.-É.).

CONTEXTE

La Garde côtière canadienne

La Garde côtière canadienne (GCC) a été établie en 1962 en réponse aux appels lancés pour la mise sur pied d’un service maritime national et d’un service de recherche et de sauvetage, à la manière de la Garde côtière des États-Unis (USCG), qui soient capable de répondre aux besoins de la pêche et de la navigation commerciale.

En 1995, la GCC, qui était jusque-là rattachée au ministère des Transports, a été transférée au ministère des Pêches et des Océans, la Loi sur les Océans faisant du ministre des Pêches et des Océans le responsable de la GCC. La Loi n’entra cependant en vigueur que deux ans après le transfert administratif.

La fusion de la GCC et du ministère des Pêches et des Océans a été difficile et a été très douloureuse. Les fonds impartis aux deux ministères furent considérablement réduits en 1994, en conséquence de l’Examen des programmes, et l’intégration de deux organisations aux structures et aux cultures corporatives différentes a considérablement accru les difficultés à surmonter.

Rôle de la Garde côtière canadienne

Contrairement à la Garde côtière américaine1 (USCG), la GCC est une organisation civile dont le mandat consiste à :

gérer les océans et les grandes voies navigables du Canada de manière à ce qu’ils soient propres, sûrs, productifs et accessibles, afin d’assurer une exploitation durable des ressources et le commerce maritime

La GCC est responsable des programmes suivants :

 Services à la navigation maritime
 Services de communications et trafic maritimes
 Services de déglaçage
 Sécurité et systèmes d’intervention
 Services techniques et opérationnels
 Gestion de la flotte

Services de communications et trafic maritimes

Les Services de communications et trafic maritimes sont chargés de veiller aux déplacements sûrs des navires dans les eaux canadiennes. Ils accomplissent un travail semblable à celui du contrôle de la circulation aérienne. La mission des SCTM est de fournir des services de communications et de trafic maritimes aux navigateurs et au grand public en général, afin de garantir :

 la protection de la vie en mer conformément aux accords internationaux;
 la protection de l’environnement par la gestion du trafic maritime;
 le mouvement efficace des navires; et
 l’information aux entreprises et l’intérêt national.

Le cadre réglementaire des SCTM

Le cadre réglementaire qui régit les SCTM est fondé principalement sur la Loi sur la marine marchande du Canada, la Loi sur la prévention de la pollution des eaux arctiques, l’Organisation maritime internationale (OMI), la Convention internationale pour la sauvegarde de la vie en mer (SOLAS), la Convention de l’OMI sur la recherche et le sauvetage (SAR) et le Règlement international des radiocommunications de l’Union internationale des télécommunications (UIT).

SOLAS

Le Canada est signataire de la Convention internationale pour la sauvegarde de la vie en mer, qui est un traité exhaustif portant sur la sécurité des navires marchands. Entre autres choses, les parties à la Convention sont tenues de prendre des dispositions pour la sécurité des services de radiocommunications. Les SCTM assurent la coordination des communications de sécurité et de détresse et fournissent des émissions d’information maritime résultant de cet accord international.

SMDSM

Le Système mondial de détresse et de sécurité en mer (SMDMS) est le nouveau système de traitement des communications et des appels de détresse maritimes. Il a été adopté en 1988 conformément à une modification de la convention SOLAS. Sa mise en place devait s’échelonner de 1993 au 1er février 1999. Le principe du système consiste à prévenir promptement, lors d’une urgence, les responsables de la recherche et du sauvetage à terre et les navires dans les environs. Le SMDSM utilise les communications satellitaires fournies par l’INMARSAT2 et les systèmes radio terrestres. En plus des communications de détresse, le SMDSM prévoit la diffusion d’informations générales sur la sécurité en mer, notamment les avis aux navigateurs et les avis météorologiques ainsi que les informations urgentes aux navires.

Accord de coopération Canada-États-Unis pour les Services communs de trafic maritime

La Garde côtière canadienne et l’USCG ont mis en place les Services communs de trafic maritime (STM) pour la région du détroit de Juan de Fuca en 1979 (l’accord Canada-États-Unis pour la gestion coopérative des services du trafic maritime dans la région du détroit de Juan de Fuca). Cet accord prévoit le mouvement sûr et efficace des navires et vise à réduire au minimum les risques de pollution et de dommages à l’environnement en évitant les collisions et les échouements. Dans le cadre de l’Accord, le bureau des SCTM de Tofino fournit des STM pour les approches du détroit de Juan de Fuca et le long du littoral de l’État de Washington, à partir de 48 degrés de latitude nord. Le bureau du trafic maritime de Seattle assure les STM dans les eaux canadiennes et américaines du détroit de Juan de Fuca et le bureau des SCTM à Victoria assure les STM dans les eaux canadiennes et américaines du détroit d’Haro, du passage Boundary et des passages inférieurs du détroit de Georgia. Les navires de 300 tonneaux de jauge brute et plus doivent faire un rapport au moins 24 heures à l’avance avant d’entrer dans les eaux territoriales canadiennes ou américaines et ce rapport répond à toutes les exigences réglementaires du Canada et des États-Unis sur la côte Ouest.

Le Canada a adhéré aux STM parce qu’il craignait que la circulation des navires-citernes américains ne menace sérieusement le littoral canadien, notamment les îles Gulf. L’Accord a mené à l’établissement de couloirs à sens unique dans le détroit Rosario et plusieurs chenaux étroits. Ces dernières années, il a également servi de base à une entente de collaboration par laquelle les centres canadiens de contrôle de trafic maritime se chargeraient de la gestion du secteur américain voisin en cas de défectuosité du système aux États-Unis, et ces derniers appuieraient de même un système canadien en difficulté. En février 2002 le système américain a fait défaut suite à un séisme près de Seattle, et les centres canadiens de trafic maritime à Victoria et à Tofino ont pu intervenir pour maintenir un contrôle élémentaire de la circulation dans les eaux américaines adjacentes.

Les centres canadiens ont ainsi pu éviter la catastrophe, permettant le passage d’un pétrolier avec une pleine charge de 188 000 tonnes dans le détroit Rosario, une étroite voie de navigation à sens unique. Si une autre interruption survenait, pareille assistance ne serait peut-être pas possible.

La Garde côtière canadienne a été forcée, en août 2002, de se retirer de l’entente d’appui mutuel en cas de défectuosité des systèmes parce qu’elle manque de formation et de matériel pour remplir ses responsabilités. Par conséquent, s’il survenait une panne aux États-Unis, la Garde côtière ne ferait qu’émettre un avis à la navigation pour informer les bateaux en eaux américaines qu’ils sont laissés à eux-mêmes.

Le Comité a entendu à Seattle, à Victoria et à Tofino des témoignages selon lesquels les centres de contrôle de trafic maritime de la Garde côtière canadienne à Victoria et à Tofino n’avaient plus suffisamment de ressources pour garantir le fonctionnement efficace de l’Accord canado-américain. L’annulation des arrangements de coopération donne du poids aux témoignages reçus à Seattle.

Accord sur les Grands Lacs (AGL)

L’Accord entre le Canada et les États-Unis d’Amérique pour la promotion de la sécurité sur les Grands Lacs au moyen de la radio prévoit que le Canada et les États-Unis collaboreront en matière de radiocommunications, pour la sécurité et l’efficacité de la navigation sur les Grands Lacs.

Règlement sur la zone de services de trafic maritime de l’Est du Canada (ECAREG)

Le Règlement sur la zone de services de trafic maritime de l’Est du Canada (ECAREG) vise à déceler les défectuosités et les faiblesses des navires se trouvant dans les eaux de l’Est du Canada, ou désirant y entrer, afin que des mesures compensatoires soient prises pour prévenir les incidents. Le premier contact des navires qui s’approchent de la côte Est du Canada passe par l’ECAREG. Tous les bâtiments d’au moins 500 TJB3 ou qui transportent des matières polluantes ou dangereuses sont maintenant tenus de se manifester 96 heures avant d’entrer dans les eaux canadiennes, en plus de faire rapport de nouveau 24 heures avant d’y entrer.

Les navires destinés à entrer dans les eaux canadiennes sont tenus de fournir de l’information au sujet de leur certificat d’exploitation, des défauts ou des défectuosités de leur équipement de bord, des marchandises dangereuses qu’ils transportent, de la libération de polluants, etc. avant d’entrer dans les eaux canadiennes. Lorsqu’un navire satisfait à toutes les exigences, l’ECAREG délivre à celui-ci une autorisation de pénétrer dans les eaux canadiennes. Cette autorisation peut comporter des restrictions fondées sur les informations fournies par le bâtiment. Les régions des Maritimes et de Terre-Neuve des SCTM sont les portes d’entrée des navires arrivant au Canada et aux États-Unis par le détroit de Belle-Isle et le détroit de Cabot, en route vers la voie maritime du Saint-Laurent.

Parmi les règlements adoptés pour d’autres zones de services de trafic maritime, mentionnons le Règlement sur les zones de services de trafic maritime, le Règlement sur la sécurité de la navigation dans les rivières St. Clair et Détroit et le Règlement sur la prévention de la pollution des eaux arctiques par les navires.

Mise sur pied des SCTM

Avant 1995, les services des radiocommunications et du trafic maritimes de la GCC étaient deux organisations distinctes relevant de Transports Canada. Les deux ont été transférés au ministère des Pêches et des Océans en 1995 (avec la GCC) et ont été réunis en une seule organisation entre 1995 et 2000 : les Services de communications et trafic maritimes. En conséquence de cette fusion, le nombre d’employés est passé de 650 à 400 et le nombre de centres a été abaissé de 44 à 22. Cette intégration a également nécessité la formation des employés pour les opérations radio et les services au trafic maritime.

Le rôle des SCTM

Pour accomplir leur mandat, les SCTM assurent les fonctions suivantes :

 ils surveillent les fréquences internationales de détresse et d’appel afin de reconnaître les navires en détresse et tiennent les organismes comme les services de SAR et d’intervention environnementale au courant de la situation; ils diffusent des informations sur la sécurité maritime comme des bulletins météorologiques, de l’information sur l’état des glaces et des avis aux navigateurs au sujet des dangers pour la navigation;
 ils examinent les navires afin de s’assurer que les bâtiments qui entrent dans les eaux canadiennes respectent les normes de sécurité canadiennes et ils prennent des mesures pour contrebalancer d’éventuelles déficiences reconnues, afin de réduire au minimum le risque de pollution marine et de menaces à la sécurité maritime;
 ils assurent la régulation du trafic maritime afin de réduire les risques maritimes; ils fournissent des recommandations et des instructions et, dans certaines conditions, ils limitent les mouvements des navires; ils assurent une surveillance spécialisée pour la conservation et la protection de l’environnement à l’appui d’autres ministères et organismes comme Environnement Canada, la GRC, Agriculture et Agroalimentaire Canada, Transports Canada et la Défense nationale;
 ils gèrent un système intégré d’information sur la navigation maritime à l’appui d’avantages économiques et de l’intérêt national; les informations sur le trafic maritime sont fournies à l’industrie et à d’autres ministères fédéraux, y compris la Défense nationale;
 ils fournissent des services de correspondance publique afin de faciliter les communications entre les navires et la terre ferme et d’aider les armateurs et les agents en relayant les messages commerciaux des navires de même que les messages privés.

Les clients des SCTM sont les navires de commerce, les traversiers et les bâtiments du gouvernement, les bateaux de pêche, les bateaux de plaisance, le public canadien, d’autres ministères et organismes fédéraux, des organismes d’autres pays, des ports, des armateurs et des pilotes ainsi que d’autres intervenants du monde maritime.

L’ÉTAT DES SCTM DE LA GCC

Région du Pacifique

Au cours de sa visite en Colombie-Britannique, le Comité a rencontré des hauts fonctionnaires de l’administration centrale régionale à Vancouver et s’est rendu dans les locaux des SCTM à Vancouver, Victoria, Tofino et Prince Rupert. Le Comité a également visité la base de la U.S. Coast Guard à Seattle (Washington).

Administration centrale régionale, Vancouver

Le Comité a rencontré des hauts fonctionnaires du MPO et de la GCC à l’administration centrale de la région du Pacifique à Vancouver (C.-B.). Aux dires de ces fonctionnaires, les principales difficultés auxquelles se heurtent les SCTM peuvent être résumées comme suit :

 contraintes budgétaires continuelles;
 recrutement et actualisation des compétences, gages d’effectifs souples, compétents et très qualifiés;
 faire en sorte que la sécurité maritime et la protection de l’environnement restent parmi les priorités;
 maintenir le rythme de l’évolution des technologies et des besoins des clients;
 détérioration des actifs et gestion du cycle de vie.

Le budget du MPO pour la région du Pacifique est de 302 millions de dollars (exercice 2001-2002). La Garde côtière canadienne (GCC) reçoit environ 89 millions de dollars de ce montant; au sein de la GCC, la part des SCTM s’élève à environ 8 millions de dollars, dont 80 % sont affectés aux salaires et au paiement du temps supplémentaire et 20 % servent à l’exploitation. Ces chiffres ne tiennent pas compte du soutien additionnel reçu par les SCTM de la part des services techniques.

La stabilité financière est un problème. Selon l’administration centrale, au cours des cinq dernières années, le financement a accusé un déficit d’au moins un million de dollars par année. Pour l’exercice 2001-2002, les SCTM de la région du Pacifique ont reçu un montant additionnel d’urgence de 600 000 dollars de l’administration centrale nationale, à titre ponctuel et unique, un geste qui n’a toutefois pas éliminé les insuffisances annuelles récurrentes. Les contraintes imposées aux SCTM de la région du Pacifique sont plus élevées que sur la côte Est; le volume du trafic à gérer est beaucoup plus grand que dans toute autre région du pays (voir le Tableau 1) et, contrairement à la côte Est, la totalité de la côte est visée par les activités des SCTM. Or, en raison des sollicitations plus grandes, la formation est plus coûteuse; comparativement, il faut compter six mois pour qu’un agent des SCTM de la côte Ouest complète sa formation de débutant et seulement un mois pour un agent de la côte Est.

Quoi qu’il en soit, selon les cadres supérieurs, le système fonctionne comme il se doit et les SCTM parviennent à s’acquitter efficacement de leurs attributions; toutefois, ces mêmes fonctionnaires admettent que les SCTM ne peuvent atteindre certains de leurs objectifs à cause du manque de personnel et des contraintes financières. Un cadre supérieur a indiqué au Comité que « l’argent n’est pas un problème ». Le Comité a été choqué par cette déclaration, surtout tenant compte de la preuve du contraire donnée par des hauts fonctionnaires à Ottawa. L’opinion donnée par la direction au sujet des SCTM semblait diamétralement opposée aux avis recueillis dans chacune des installations des SCTM.

Des fonctionnaires ont indiqué que le mandat des SCTM n’a pas changé depuis le 11 septembre 2001; la sécurité n’en fait pas partie. Une telle modification nécessiterait une décision du cabinet et l’ajout de responsabilités en matière de sécurité entraînerait une hausse des coûts. Il faut préciser que les SCTM assument un rôle officieux en matière de sécurité en fournissant des renseignements à des ministères et organismes canadiens et américains.

Tableau 1 : Répartition de la charge de travail et des effectifs aux SCTM,
par région

Région

Nombre de sites

Cas de détresse maritime4

(exercice 1999-2000)

Mouvements de trafic maritime5

(exercice 1999-2000)

Postes opérationnels

Nombre de postes autorisés (ETP)

Postes actuellement occupés

Terre-Neuve

       5

          620

        39 164

       9

       51

     48

Maritimes

       3

          759

       149 031

       9

       60

     60

Québec

       4

        1 111

       186 456

     14

       75

     69

Centre et Arctique

       5

        1 336

        29 942

     15

       59

     60

Pacifique

       5

        3 265

       428 952

     18

      101

     91

Canada

     22

        7 091

       833 545

     65

      346

   328

Victoria

La zone de responsabilité (ZR) des SCTM de Victoria s’étend au sud et à l’est de l’île de Vancouver, y compris dans certaines eaux américaines. La principale difficulté de ce secteur est l’intensité du trafic maritime. Ce bureau gère le plus grand volume de trafic maritime, dix fois supérieur au volume de tout autre centre au Canada.

Les SCTM de Victoria étaient à court de personnel lors du passage du Comité. Il a été dit au Comité que les SCTM de Victoria avaient besoin de plus d’opérateurs simplement pour fonctionner de manière sécuritaire. La pénurie s’explique en partie par l’intégration des opérations radio et du contrôle du trafic; à ce moment, le service a perdu un certain nombre d’éléments qui n’avaient pas soit le désir de faire ce travail, soit les aptitudes voulues. Le Comité a également appris que les SCTM de Victoria avaient besoin d’un autre poste de STM6, doté pour une période de 12 heures par jour, en raison de l’intensité très élevée du trafic dans le secteur. Les pénuries de personnel aux SCTM de Victoria ont parfois occasionné la réduction voire même la suspension des services (lesquels sont interrompus selon un ordre de priorité établi).

Le vieillissement des équipements est également un problème au bureau de Victoria. Des intervenants ont dit que le « matériel se détériore à vue d’oeil ». Par exemple, le système de radiogoniométrie accuse entre 25 et 30 ans d’âge et a besoin d’être remplacé.

De plus, le centre des SCTM de Tofino ne profite pas d’un accès7 au système de radar de la U.S. Coast Guard. Les données fournies par un tel accès sont essentielles au fonctionnement efficace du système de matrice de défaillances; de l’avis du Comité, il faudrait faire en sorte d’établir ce lien.

Tofino

La zone de trafic de Tofino couvre le territoire compris entre 124 degrés 40 minutes de longitude ouest (ligne Tofino-Seattle ou TSL) et Triangle Island, à l’extrémité nord de l’île de Vancouver. Les SCTM de Tofino sont également chargés de la circulation maritime au sud, au large de la côte de l’État de Washington, jusqu’à 48 degrés de latitude nord, en vertu d’une entente avec les États-Unis.

Le centre de Tofino possède une station radar non surveillée située sur le mont Ozzard et un centre informatisé de traitement des données au centre des opérations, à Amphitrite Point. La station radar est censée avoir une portée de 60 milles marins et a une portée étendue de 84 milles marins. La couverture radar s’étend, selon un arc, dans l’océan Paficique du côté ouest de l’île de Vancouver et englobe les approches du détroit de Juan de Fuca. Le bureau de Tofino utilise également une « antenne » de la station radar de trafic maritime de la USCG de Seattle, située à Cape Flattery, sur la presqu’île Olympic, dans l’État de Washington. Parmi les autres pièces d’équipement, on peut citer l’ordinateur d’estime et la table de traçage, utilisés avec des cartes de transit pour suivre l’évolution des navires au-delà de la couverture radar. Lors de la visite du Comité, ce système était censé être remplacé sous peu par le VTOSS (système de soutien opérationnel pour le trafic maritime)8, système élaboré à l’interne sur la côte Ouest.

La langue est une difficulté particulière au bureau des SCTM de Tofino, car la plupart des communications VHF sont faites avec des capitaines ou des officiers de pont qui, souvent, parlent peu ou pas du tout l’anglais. Il faut faire preuve de prudence même pour les avis de routine, en raison des problèmes de langue. Le Centre doit également composer avec d’importantes flottilles de pêche, canadiennes et étrangères, qui occupent la zone selon la saison. Il arrive que ces flottilles nuisent à la circulation maritime notamment des navires-citernes, des navires de charge et des barges. Le bureau de Tofino est souvent appelé à indiquer l’emplacement et la taille approximative des flottilles de pêche.

Les SCTM de Tofino appuient d’autres organismes comme le MPO et la Garde côtière, la GRC, l’Agence des douanes et du revenu du Canada, la Sécurité des navires (Transports Canada), la Garde côtière auxiliaire, le Centre de coordination des opérations de sauvetage, Environnement Canada, le ministère de la Défense nationale, l’Armée américaine et l’U.S. Coast Guard, ainsi que les commissions des pilotes et des ports de Victoria et de Port Angeles.

Selon les agents des SCTM de Tofino, le service manque de personnel. La formule de dotation est fondée sur un ratio de 5,5 personnes par poste, pour trois postes. Cela donne 17 personnes pour le bureau de Tofino, ce qui est insuffisant pour le centre. Le Comité a appris que certains pays européens utilisent une formule de sept personnes par poste ou plus, pour doter leurs centres de STM. Une pleine dotation selon cette norme ne permettrait pas seulement d’assurer la fourniture ininterrompue des services; elle permettrait aux employés en place de suivre des formations de recyclage et de requalification, pour la mise à niveau de leurs compétences et leur perfectionnement. Également, cela permettrait aux surveillants de veille de s’acquitter de leurs fonctions à temps et de manière professionnelle. Il faut savoir que les surveillants ont des tâches additionnelles qu’ils n’ont pas le temps d’accomplir.

Appliquée à Tofino, cette formule donnerait entre quatre et cinq employés de plus. De l’avis des agents des SCTM de Tofino, l’adoption d’une telle norme permettrait au Canada de respecter ses obligations intérieures et internationales.

Les postes ne sont pas dotés en temps opportun. Par exemple, l’un des surveillants de veille de Tofino était censé prendre sa retraite dans les six mois suivant la visite du Comité mais il n’était pas prévu de remplacement avant 2003. Cela aurait entraîné pour le centre un manque de personnel pendant au moins un an.

La formation requise n’est pas fournie, malgré qu’on la réclame sans cesse. On nous a dit qu’un agent, promu surveillant de veille à Tofino, n’a pas reçu la formation de surveillant avant trois ans, alors que la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique exige qu’elle soit donnée dans un délai de six mois. De plus, des employés se sont improvisés instructeurs en cours d’emploi même s’ils n’avaient pas reçu la formation de base d’instructeur.

Les SCTM de Tofino comptent beaucoup sur du matériel de surveillance radar et de communications spécialisés et complexes pour fournir leurs services. Ils comptent également sur les techniciens. Étant donné que la Direction des Services techniques a connu les mêmes contraintes financières et réductions de personnel, y compris des restrictions sur l’achat de pièces de rechange, elle ne peut plus effectuer l’entretien préventif du matériel; elle se contente de réparer le matériel quand il tombe en panne.

En vertu de l’accord sur les STM, un Groupe mixte de coordination (GMC) régional (Canada-États-Unis) a été établi et chargé d’élaborer et de communiquer les règlements sur le trafic maritime et les pratiques et procédures normalisées à utiliser dans le cadre du système des STM. Le GMC se réunit deux fois l’an pour examiner les aspects techniques et opérationnels de l’accord pour s’assurer que les procédures, le matériel et les règlements de chaque pays sont compatibles, autant que faire se peut. Selon des agents du bureau de Tofino, la plupart des employés de Tofino n’ont jamais assisté à une réunion du GMC à Seattle, en raison de contraintes budgétaires. Il a été proposé que le bureau de Tofino envoie un agent des SCTM à Seattle aux trois mois, jusqu’à ce que chacun y soit allé au moins une fois, puis de passer ensuite à une fois l’an. Ce défaut d’assister à des activités primordiales du GMC, en raison de contraintes financières, a été rappelé au Comité par des cadres à Seattle.

Les employés du bureau de Tofino ont soulevé la question de la sécurité. La zone des STM de Tofino est la porte d’entrée de toute la région nord-ouest du Pacifique. Les SCTM n’ont pas de rôle direct à jouer en matière de sécurité; cependant, le bureau de Tofino est très bien placé pour recueillir des informations pouvant être utiles à d’autres organismes gouvernementaux. Toutes les informations sont transmises à la Défense nationale, à la GRC, à l’Agence des douanes et du revenu du Canada ou encore à la Garde côtière canadienne ou à la USCG. Les informations sont transmises sur des circuits protégés et non protégés de communication de la voix et des données. Il a été souligné qu’il est de plus en plus difficile de communiquer de l’information aux unités de surface ou aériennes en raison du manque de systèmes radio sécuritaires et que les SCTM ont besoin de systèmes de communications brouillées en MF et VHF, et qu’il faut augmenter le nombre d’organismes reliés par des lignes terrestres sécuritaires.

Les employés ont fait remarquer que nos ports constituent de plus en plus des maillons faibles dans la chaîne de notre sécurité nationale.

De plus, depuis les événements du 11 septembre 2001, il nous a été donné de constater que la plus importante brèche dans nos défenses nationales sont nos ports et nos voies navigables.

Julius Smolders, Surveillant de veille, SCTM Tofino

Cette opinion sur la perméabilité des ports a été confirmée récemment dans le rapport du Comité sénatorial permanent sur la sécurité nationale et la défense intitulé L’état de préparation du Canada sur les plans de la sécurité et de la défense, déposé le 28 février 2002.

Au sortir des audiences, le Comité s’est vu préoccupé par un vaste éventail d’enjeux touchant à la sécurité et liés aux activités du crime organisé dans les ports canadiens et qui accroissent la vulnérabilité du Canada aux actes terroristes.

L’île de Vancouver offre un point d’entrée idéal pour les immigrants illégaux et toute une série d’indésirables, et pour le trafic de drogue ainsi qu’un théâtre pour d’autres actes touchant à la sécurité en raison de la côte irrégulière, de l’absence de couverture radar du côté nord de l’île et de l’accès facile à la partie continentale de l’Amérique du Nord. Certains intervenants ont fait valoir que ces particularités font ressortir la nécessité d’une surveillance radar au large de la côte Nord de l’île de Vancouver. Les incidents mettant en cause des navires transportant des immigrants illégaux laissent supposer qu’ils sont bien au fait de l’absence de couverture radar dans ce secteur. La technologie du système d’identification automatique (SIA)9 n’est pas une solution viable du point de vue de la sécurité, étant donné qu’un capitaine peut fermer le transpondeur, rendant ainsi le passage du navire indétectable. Les patrouilles aériennes et navales ne sont pas, en soi, des solutions pratiques globales, ne serait-ce que pour des raisons comme le coût et les aléas de la météo.

Prince Rupert

Les SCTM de Prince Rupert sont chargés de la plus vaste zone de STM au Canada. Cette zone, qui couvre une superficie d’océan de 77 000 kilomètres carrés (30 000 milles carrés), s’étend de la frontière de l’Alaska, au nord, à Cape Caution, juste au nord de l’île de Vancouver, au sud. Elle englobe les eaux de l’entrée Dixon, du détroit d’Hecate et du détroit de la Reine-Charlotte.

Le centre de Prince Rupert fonctionne au moyen de 14 stations de communications réparties sur sa zone de responsabilité; cependant, il ne dispose pas d’installations radar. Le Comité a appris qu’en conséquence, le Canada ne peut être certain des navires qui circulent dans ses eaux. Le SIA n’élimine pas la nécessité de stations radar car des navires illégaux peuvent rendre leur transpondeur inopérant. Le centre peut ignorer qu’un navire vogue dans son secteur à moins qu’un autre navire ne le signale. On a proposé l’installation de postes radar aux extrémités nord et sud des îles de la Reine-Charlotte. La mise en place de l’infrastructure nécessaire à des stations radar dans la région pourrait être coûteuse, en raison de l’éloignement et de l’absence d’un réseau électrique, mais elle est néanmoins essentielle, selon le Comité.

Les ressources ont été réduites de manière draconienne, et ont atteint un niveau inadmissible au cours des cinq dernières années. Par exemple, le nombre de techniciens à Prince Rupert est passé de sept à trois. Normalement, on envoie deux techniciens à un site éloigné; cela signifie que, si un technicien est malade ou en vacances, le bureau de Prince Rupert est privé de soutien technique. Non seulement le nombre de techniciens a-t-il été réduit mais en plus on a imposé à ceux qui restent des responsabilités additionnelles par suite de la fusion avec le MPO.

L’entretien prévu n’est pas effectué. Si des équipements tombent en panne en hiver, il peut être très difficile de les réparer tant en raison de l’emplacement éloigné de nombreux sites et de la difficulté d’accès, dans des conditions météorologiques difficiles, que du nombre limité d’heures de clarté et des difficiles conditions qui règnent sur le site. À cela s’ajoute le fait qu’il faut compter parfois une heure et demie pour se rendre sur un site, ce qui donne un aller-retour de trois heures, de sorte qu’il reste très peu d’heures de clarté pour faire le travail d’entretien. En outre, on peut se trouver dans l’impossibilité de retourner sur un site pendant des semaines. Par conséquent, une défaillance en hiver peut mettre un grand secteur en panne et le priver de couverture pendant une période prolongée. Voilà pourquoi, l’entretien préventif est beaucoup plus important dans le nord que dans le sud. Les conséquences d’une défaillance du matériel peuvent être beaucoup plus graves, en raison des conditions difficiles. Le Comité a appris que 18 vies ont été perdues en mer, au cours des 14 mois précédents, dans la zone de Prince Rupert.

Les SCTM de Prince Rupert utilisaient encore une table à cartes à l’ancienne, sortie tout droit d’un film sur la Seconde Guerre mondiale, avec des bandes de papier pour suivre l’évolution des navires dans la zone. L’on prévoyait cependant que le VTOSS entrerait en fonction dans les deux semaines suivantes et la formation idoine était déjà en cours. (L’INNAV ou Système intégré d’information sur la navigation maritime10, que le VTOSS remplace temporairement, n’était toujours pas disponible malgré les 17 millions de dollars qui lui ont déjà été consacrés11.)

Lors de la visite du Comité (le 23 novembre 2001), on avait compté depuis le mois de janvier précédent, 55 jours pendant lesquels du matériel était en panne à au moins un site. Des employés ont décrit un incident où un pêcheur avait été blessé à l’œil par une gaffe et pour lequel les SCTM ont été incapables de mettre le navire de pêche en contact direct avec un médecin de l’hôpital local parce qu’un poste (Rose Inlet) était en panne.

Le bureau des SCTM de Tofino est responsable d’une vaste zone océanique. Pour localiser un navire en détresse dans cette zone, au moyen de matériel de radiogoniométrie, il faut établir la position du bâtiment par triangulation à partir d’au moins deux points. Si cela ne fonctionne pas, il peut être impossible d’établir la position précise du navire, de sorte qu’il peut être nécessaire de recourir à des moyens comme la recherche aérienne ou l’appel à des navires de passage. Cette situation est inefficace et expose le navire, son équipage et les passagers à des risques accrus.

Le bureau de Prince Rupert fonctionnait en déficit de personnel; les agents des SCTM n’étaient pas au nombre voulu. Le manque de formation est un problème. Le temps requis pour remplacer les agents est une préoccupation. Il faut compter au moins un an de formation, après le collège, avant que la nouvelle recrue puisse s’asseoir à son poste. Cela signifie que de nouveaux agents pourront ne commencer à combler des postes qu’en 2003. Si rien n’est fait avant l’automne 2003, le bureau de Prince Rupert pourrait perdre encore dix personnes. De surcroît, le Comité a appris que le bureau de Prince Rupert perd de bons éléments faute de pouvoir leur offrir la possibilité de se perfectionner.

Les employés sont stressés et frustrés. Cette situation est attribuable en partie aux exercices de « moindre coût » et de « pratiques exemplaires », en vertu desquels le prochain exercice commence avant que l’on ne connaisse les résultats de l’exercice précédent. Un nombre excessif de sondages de l’AC régionale a obligé le centre à travailler avec moins de crédits mais à ne pas réduire les services. Cette mission était impossible, compte tenu des ressources déjà limitées et du fait que d’autres coupures entraîneraient inévitablement une réduction des services. Les employés ont exprimé leur frustration de voir les patrons nier l’existence de problèmes, car ils s’attendent que les cadres parlent en leur nom.

Le manque de personnel engendre un nombre excessif d’heures supplémentaires, phénomène qui ne fait qu’exacerber le stress imposé aux agents expérimentés des SCTM de Prince Rupert et d’autres sites.

USCG à Seattle

Le 13e district de la Garde côtière américaine (USCG), qui est responsable du nord-ouest du Pacifique, englobe les États de Washington, de l’Oregon, de l’Idaho et du Montana. Les bâtiments et aéronefs du district couvrent plus de 460 000 milles carrés (près de 1,2 million de kilomètres carrés) dans l’océan Pacifique. Le district dispose de 1 279 hommes et femmes en service actif, de 461 en réserve et de 1 660 membres de la Garde côtière auxiliaire américaine.

En plus d’accomplir des missions équivalant à celles dont est chargée la Garde côtière canadienne, notamment la sécurité maritime, la mobilité maritime et la protection des ressources naturelles, l’USCG assume d’importantes responsabilités en matière de sécurité maritime et de défense nationale. Au portefeuille de la sécurité maritime, on trouve la répression du trafic de stupéfiants, l’immigration illégale, la protection de la zone économique exclusive des États-Unis et des ressources marines vivantes et le contrôle général du respect du droit maritime et des traités. Sous le volet de la défense nationale sont groupées des fonctions générales de défense, de sécurité du territoire, de sécurité des ports et des voies navigables et du déglaçage polaire.

La station et le Groupe de la USCG à Seattle et le Service de trafic maritime de Puget Sound sont logés au même endroit en bordure de l’eau à Seattle (Washington). La mission principale de la station de Seattle consiste à appliquer le droit maritime à l’intérieur de Puget Sound. Le Groupe de la Garde côtière américaine de Seattle est responsable de la recherche et du sauvetage, de l’application du droit maritime, de la sécurité de la navigation de plaisance et des aides à la navigation. Sa zone de responsabilité est bornée par la frontière canado-américaine jusqu’au Nord, s’étend à travers le détroit de Georgia et le long des îles de San Juan et englobe tout le sud de Puget Sound.

Le Service de trafic maritime de Puget Sound surveille chaque année quelque 250 000 mouvements de navires-citernes, de navires de charge, de transbordeurs ou de traversiers et de remorqueurs tirant ou poussant d’autres bâtiments. Le centre utilise un système radar très précis expressément conçu pour les applications du STM. Les dix centres radar actuels couvrent 2 500 milles carrés (6 400 kilomètres carrés) dans Puget Sound et les détroits de Rosario et de Juan de Fuca. Les émetteurs-récepteurs VHF-FM originaux y ont été remplacés en 1984 par un système de faible puissance informatisé couvrant tout le secteur qui offre davantage de souplesse et qui fournit une réponse plus rapide.

Le STM de Puget Sound est unique parmi les six services de trafic maritime de l’USCG, puisqu’il est le seul service de trafic maritime américain qui collabore avec deux services étrangers, ceux de Victoria et de Tofino, au Canada. Ces trois services coordonnent le trafic maritime entre Puget Sound, les détroits de Georgia, de Juan de Fuca, de Rosario et de Haro et la côte ouest de l’île de Vancouver, et ce, jusqu’à 60 milles du littoral (50 milles marins).

Le personnel de Seattle a souligné la complexité de la région englobant Puget Sound et les détroits de Georgia et de Juan de Fuca, qu’on peut considérer comme une importante voie navigable. La région est effectivement le système portuaire le plus important d’Amérique du Nord, l’équivalent de presque toute la côte Est, et est l’un des secteurs navigables les plus achalandés au monde. En plus d’être un secteur où circulent des navires de commerce, des transbordeurs ou des traversiers, des bateaux de pêche et des embarcations de plaisance, la région compte quatre ports militaires : trois américains et un canadien.

On y a souligné le besoin d’y ajouter la dimension de la sécurité, tout en y facilitant le commerce et en y assurant la sûreté des voies navigables. Le contre-amiral Brown, commandant du 13e district, a parlé au Comité de la nécessité d’élaborer des protocoles communs de sécurité. Il a noté que la connaissance est le premier critère. Le STM fournit des renseignements cruciaux au sujet des navires qui circulent, de ce qu’ils renferment et de leurs intentions. Il a noté que les États-Unis sont déjà en train d’élaborer des protocoles et prenaient des mesures pour « fusionner » les organismes. Par conséquent, la sécurité commune exige des protocoles conjoints et les États-Unis souhaitent collaborer avec le Canada plutôt qu’agir unilatéralement. D’après le contre-amiral, les prochaines étapes cruciales nécessiteraient des interventions conjointes planifiées en prévision des situations d’urgence et la reconnaissance des infrastructures vitales.

Le commerce est important pour la qualité de la vie et il faut le faciliter, mais les ports ne devraient pas être désavantagés. Le nombre d’actes illégaux commis dans les ports augmente à mesure que les frontières terrestres sont mieux surveillées.

On a décrit l’Accord Canada-États-Unis de coopération pour les Services communs de trafic maritime (CVTS) comme un modèle de relations internationales et un fondement sur lequel s’appuyer. La collaboration avec les SCTM de la GCC était excellente. Même s’ils tenaient le professionnalisme et le dévouement des agents des SCTM en haute estime, les membres du personnel de la Garde côtière américaine de Seattle étaient cependant conscients que leurs collègues canadiens, à Tofino en particulier, n’étaient pas assez nombreux. Par exemple, il avait été difficile d’amener des employés des services canadiens à Seattle pour qu’ils se familiarisent avec le système et la réglementation des États-Unis, en raison de pénuries de personnel et de budgets de formation insuffisants; pourtant, de telles activités devraient être prioritaires. On a fait l’éloge du Système de soutien opérationnel pour le trafic maritime de Victoria, mais établi que le fait qu’il s’agissait essentiellement d’un système fonctionnant en solo constituait une faiblesse.

La visite du Comité aux installations de la USCG à Seattle a laissé aux membres le sentiment très net que nous sommes les parents pauvres de nos voisins américains. Selon le Comité, le manque de fonds sape nos rapports avec nos pendants américains.

Côte Est

Pour donner suite à son étude de la côte Ouest, le Comité a visité trois emplacements des SCTM sur la côte Est (Halifax, St. John’s et Rivière-au-Renard) et le Collège de la Garde côtière canadienne à Sydney (Nouvelle-Écosse) en mars 2002.

Région des Maritimes — SCTM de Halifax

La zone de responsabilité de la Région des Maritimes inclut toutes les eaux à partir d’Eastport, au Maine, la baie de Fundy, la côte sud-ouest de la Nouvelle-Écosse, l’île de Sable, la côte est de la Nouvelle-Écosse, la baie Chédabouctou, toutes les eaux du Cap-Breton et le détroit de Cabot, toutes les eaux entourant l’Île-du-Prince-Édouard et les côtes est et nord du Nouveau-Brunswick.

Les navires communiquent avec les SCTM de Halifax lorsqu’ils atteignent la zone de services de trafic maritime, à 15 milles marins approximativement du cap Chébouctou en se dirigeant vers l’atterrage occidental du port de Halifax. Les SCTM de Halifax gèrent en moyenne chaque mois les mouvements de 4 500 navires de types et de tailles variables. Le service de communication du centre assure une écoute ininterrompue, le long de la côte sud de la Nouvelle-Écosse, sur diverses fréquences de détresse et d’autres fréquences maritimes afin d’offrir de l’aide sur le plan des communications aux navires en difficulté.

Au moment de la visite du Comité, les SCTM de Halifax poursuivaient un projet de trois ans (amorcé au cours de l’exercice financier 1999-2000) destiné à améliorer les services de communications et de trafic maritimes à l’intérieur du port de Halifax. Le projet incluait la modernisation des installations des SCTM à Shannon Hill, le remplacement des systèmes radar au cap Chébouctou, à l’île Georges et dans le bassin Bedford, ainsi que de nouveaux systèmes de transmission, de distribution et d’affichage de données numériques. Le nouveau système INNAV devait entrer en service le 29 avril 2002. On devait bientôt mettre en œuvre le nouveau SIA international pour le port de Halifax et ses atterrages. Le SIA transmet automatiquement l’identité, la position, le cap, la longueur, la largeur, le type et le tirant d’eau d’un navire et de l’information au sujet de la présence ou non à son bord de marchandises dangereuses aux stations terrestres et aux autres navires qui se trouvent dans le secteur.

La détection radar des navires étrangers n’est possible que dans la baie de Fundy, le port de Halifax et la baie Chédabouctou. Quiconque désire entrer illégalement au pays pourrait le faire en n’importe quel point du reste du littoral. Les agents ont mentionné que la GCC devrait étendre sa couverture radar dans ce secteur, afin d’améliorer la sécurité de notre littoral.

La dotation en personnel constitue un problème pour les agents des SCTM de Halifax. On a déclaré au Comité que la dotation en personnel dans la région des Maritimes a été réduite au minimum ces dernières années et en est actuellement au point où la direction ne peut respecter ses obligations contractuelles. La section locale 2182 des TCA-Canada, qui représente les agents des communications maritimes de la GCC, a expliqué que cette situation a poussé la direction à exiger, à la table de négociation, un préavis excessif pour les congés annuels, afin de réduire le trop grand nombre d’heures supplémentaires qui découlait directement d’une dotation en personnel insuffisante.

On a également déclaré au Comité que la « formule de dotation en personnel » ne répondait pas aux besoins. Cette formule, par exemple, ne tient pas compte du plus grand nombre de semaines auquel davantage d’agents supérieurs ont droit, ni des congés de maladie. On nous a déclaré que les trois centres des Maritimes sont aux niveaux minimaux de dotation en personnel ou en sont près même si l’on ne tient pas compte de la formation. Une personne de plus par quart réduirait le problème des heures supplémentaires.

Une partie des problèmes de la région découle du regroupement de cinq stations radio et de trois STM dans trois centres. Il en est résulté que les centres restants comptaient davantage sur les nouvelles télétechnologies, au moment même où on réduisait les budgets. On n’effectuait de l’entretien que lorsque l’équipement tombait en panne, on ne payait pas les techniciens pour qu’ils restent en attente et il n’y avait pas de soutien technique la fin de semaine pour les services Internet.

Le budget était insuffisant pour permettre à la région d’assurer tous les services qu’elle fournissait dans le passé et on a laissé entendre qu’une augmentation budgétaire de 700 000 $ ne serait pas déraisonnable.

Le syndicat s’est inquiété du regroupement possible des centres des SCTM de Halifax et de Sydney (N.-É.) et de Saint-Jean (N.-B.). Il a fait remarquer que durant le regroupement des services radio et de trafic maritime de la GCC on avait déterminé que trois centres stratégiquement situés pourraient fournir le meilleur niveau de service, ce qui avait été reconfirmé en 2000 par Conseils et Vérification Canada12. Selon le syndicat, la direction régionale des Maritimes avait axé son attention sur un autre regroupement d’emplacements des SCTM dans la région en réaction à la diminution des budgets afin d’établir finalement un seul centre à Dartmouth. Les agents des SCTM estimaient, étant donné l’importance du secteur de responsabilité des Maritimes, qu’il serait impossible de contrôler les communications et d’assurer efficacement des services de sûreté et la sécurité à partir d’un seul centre. De l’avis du syndicat, une réduction du nombre de centres dans la région ne ferait qu’accroître la vulnérabilité aux attaques d’organisations terroristes, surtout dans le sillage des événements du 11 septembre 2001.

Région de Terre-Neuve — SCTM de St. John’s

La région de Terre-Neuve est responsable d’un vaste secteur du plateau continental (de 2,5 millions de kilomètres carrés) et de presque 29 000 kilomètres de littoral (ce qui est comparable à celui de la Colombie-Britannique). Les navires évoluant dans la région sont souvent exposés à de dures conditions météorologiques, à des états des glaces et de la mer difficiles et à une visibilité restreinte. La région est desservie par cinq centres de SCTM situés à Goose Bay, à St. Anthony, à Port aux Basques, à Placentia et à St. John’s. Les centres sont responsables de la sécurité et du mouvement accéléré des navires dans les zones de trafic maritime du détroit de Belle Isle, de Port aux Basques, de la baie de Plaisance, de St. John’s et de l’Est du Canada, des itinéraires maritimes qui traversent l’Atlantique au large de la côte sud-est de Terre-Neuve et de tout le secteur des eaux hauturières de cette province.

Chaque année dans la zone de responsabilité de la région de Terre-Neuve, il y a environ 40 000 mouvements de gros navires, de même que des dizaines de milliers de mouvements de bateaux de pêche. On transporte en outre actuellement près de 50 millions de tonnes de marchandises polluantes en empruntant ce secteur de responsabilité. Le port de St. John’s ne dispose d’aucun radar; le système de surveillance y est entièrement manuel. On a déclaré au Comité que la région de Terre-Neuve fonctionne actuellement au moindre coût et le Comité a compris qu’il était impossible de réduire davantage les dépenses.

La portée limitée (de 50 kilomètres) du radar installé à Port aux Basques peut constituer un problème de sécurité, étant donné que des navires sont susceptibles d’entrer, sans être détectés, dans le golfe du Saint-Laurent par le détroit de Cabot, qui mesure environ 75 milles (120 kilomètres) de largeur. Ces navires ne seraient pas détectés avant d’atteindre Les Escoumins, à 300 milles (500 kilomètres) de l’entrée du golfe.

Région du Québec — SCTM de Rivière-au-Renard

Il y a quatre centres de SCTM dans la région du Québec : Rivière-au-Renard, Les Escoumins, Québec et Montréal. La région gère annuellement environ 220 000 mouvements de navires.

On ne fait pas autant d’entretien préventif qu’on le faisait il y a quelques années; cependant, il est presque impossible qu’une panne complète se produise, étant donné que la plupart des emplacements disposent d’équipement en double (certaines fréquences radio pour les appels commerciaux ne sont pas dédoublées). Tous les emplacements des stations radio sont accessibles par route, sauf un, qui ne l’est que par hélicoptère.

La région a entrepris une étude pour déterminer s’il était possible de regrouper les centres, tout en maintenant le même niveau de service. On a étudié sept scénarios, allant du statu quo à un seul centre. Chaque année, les SCTM de la région du Québec rencontrent le secteur maritime, y compris l’industrie de la navigation commerciale, les plaisanciers et l’administration de pilotage pour les informer de ce qu’elle est en train de planifier et pour solliciter leurs réactions.

Les agents des SCTM de Rivière-au-Renard sont bien répartis selon l’âge. Trois agents des SCTM de Montréal devraient, par contre, prendre leur retraite l’an prochain.

La mise en service du SIA a débuté; on prévoit avoir terminé d’ici quatre ans. Grâce au SIA et à INNAV, les SCTM pourront suivre la position des navires en temps réel. La direction a déclaré au Comité que, sans le SIA, un radar pour remplacer celui actuellement utilisé aux Escoumins devrait avoir une portée de 40 kilomètres et coûterait 5 millions de dollars mais que, avec le SIA, on aurait besoin d’un système radar moins puissant pour couvrir le secteur où les pilotes s’embarquent à bord des navires et que ce système ne coûterait que 500 000 $. Le Comité sait que le SIA est un outil précieux qui n’est toutefois utile que lorsque les navires sont conformes et à condition que le matériel fonctionne. Peu de choses ont changé à la suite du 11 septembre; la nouvelle obligation imposée aux termes de l’ECAREG de fournir un rapport 96 heures avant d’entrer en eaux canadiennes n’a pas de répercussion pour la région.

Collège de la Garde côtière canadienne — Sydney (Nouvelle-Écosse)

Le Collège de la Garde côtière canadienne (CGCC), un centre national de formation maritime, a ouvert ses portes en 1965. Le programme de formation du Collège, qui est situé au Cap-Breton et qui comprend des résidences pour les étudiants, est offert dans les deux langues officielles. Au départ, seuls les hommes étaient acceptés au Programme de formation d’élèves-officiers (PFEO) de quatre ans, qui comportait deux options : la navigation maritime et la mécanique navale. On a commencé en 1974 à accepter les femmes à ce programme.

En 1992, Transports Canada a transféré son Centre de formation maritime de Cornwall (Ontario) au CGCC, ce qui y a amené les départements des services de trafic maritime, des opérations radio, de la logistique et de la recherche et du sauvetage.

Au début des années 1990, le CGCC a commencé à tracer de nouvelles orientations pour convertir un centre qui avait un seul but, offrir le PFEO, en un centre polyvalent, une grande partie de cette conversion reflétant un nouveau programme de formation de courte durée. Le CGCC a été transféré en 1995 de Transports Canada au ministère des Pêches et des Océans. Il ne fait pas partie de l’organisation de la GCC, mais rend compte au sous-ministre adjoint responsable des ressources humaines au MPO. C’est aussi un campus satellite du University College of Cape Breton.

Le Collège a récemment rétabli son PFEO en acceptant des étudiants du Moyen-Orient. Il y a actuellement au CGCC 60 étudiants autres que du Canada. Le Collège tire environ la moitié de ses revenus de la formation d’étudiants autres que du Canada. Le CGCC fonctionne à l’heure actuelle aux deux tiers de sa capacité, qui est de 260 étudiants.

Le Collège a commencé à utiliser des simulateurs au milieu des années 1970 et la majeure partie de la formation qu’il offre englobe maintenant l’emploi de ces appareils, qui fournissent un milieu sans danger, efficace et contrôlé pour le développement de compétences cruciales.

Les départements du CGCC incluent ceux :

 des sciences nautiques;
 des services de communications et de trafic maritimes;
 de la recherche et du sauvetage;
 des interventions environnementales;
 de la sécurité nautique.

Le Collège a développé de nouveaux secteurs d’activité durant l’Examen des programmes et ses revenus sont passés de 700 000 $ en 1995 à 4 millions de dollars en 2002 (son budget total étant de 11 millions de dollars). Il emploie actuellement environ 150 personnes et les stagiaires qui y vivent en résidence apportent indirectement une contribution de 8 millions de dollars à l’économie locale.

Lors de sa visite, le directeur a déclaré au Comité que le CGCC faisait face à un certain nombre de défis, qui incluent les suivants :

 renforcer sa capacité d’offrir des cours de formation dans les deux langues officielles;
 obtenir un financement suffisant;
 attirer du personnel enseignant qualifié;
 obtenir des fonds pour développer l’apprentissage électronique.

Au moins 40 % des membres du personnel enseignant du CGCC devraient prendre leur retraite au cours des cinq à dix prochaines années. Le Collège se demande s’il pourra attirer de nouveaux enseignants. Il souffre actuellement d’une pénurie de personnel pour le programme des sciences nautiques.

L’Examen des programmes a « décimé » le Collège. On n’y a pas offert de programme de formation d’élèves-officiers de 1994 à 1998. En juin 2002, c’était la première fois en quatre ans que le CGCC décernait des diplômes à des élèves-officiers finissants.

Le personnel du Collège était conscient des difficultés qu’on éprouve à attirer des candidats des SCTM au CGCC pour le cours de formation de débutants de 25 semaines. Par exemple, un cours prévu pour janvier 2002 avait été annulé en raison d’un manque de fonds pour y inscrire des gens. Le problème était attribuable au financement insuffisant dans la région.

On a déclaré au Comité que le fait de mettre un brise-glace à la disposition du Collège un durant la morte-saison serait très utile pour l’instruction.

Le Collège et son personnel jouissent d’une très bonne réputation, à l’échelle internationale, et ils la doivent en partie à la certification ISO 9000. Le personnel du Collège participe également à des conférences internationales. Il contribue aussi à l’élaboration de normes internationales.

Le département des SCTM du CGCC dispose d’une équipe innovatrice de formateurs. La formation qui y est offerte inclut la formation de base (de débutants), le maintien de compétences dans certains domaines comme les procédures de gestion des cas de détresse et du trafic maritime et le perfectionnement professionnel. Les prochains enjeux incluront une révision de la Loi sur la marine marchande du Canada et la sécurité (par exemple, des employés ont réitéré l’opinion d’agents des SCTM selon laquelle, même si bien des gens croient que le SIA est la solution, ce système risque d’être hors service et n’est pas encore installé à bord de bien des navires). Maintenir une transition en douceur entre la formation des SCTM et la réalité constitue un autre défi. Le fossé peut s’élargir rapidement au fur et à mesure du développement de la technologie.

CONCLUSIONS

Environ la moitié de nos gestionnaires intermédiaires et supérieurs et entre le quart et le tiers des employés opérationnels de l’exploitation ont pris leur retraite ou ont accepté des indemnités de départ volontaire, dans le cadre de programmes d’encouragement à la retraite anticipée et de programmes de prime de départ anticipé. Notre seul bureau a perdu 9 de ses 22 employés de l’exploitation. Cela explique que, au niveau de l’exploitation, le bureau des SCTM soit handicapé par un manque chronique de personnel et de contraintes budgétaires irréalistes. Cette pénurie a entraîné une réduction temporaire ou une réduction des services, comme en font foi les Avis aux navigateurs : édition canadienne.

Les programmes offerts par les SCTM, notamment la formation, l’assurance de la qualité, les normes et les procédures, souffrent tous de négligence. Le Ministère est incapable de nous fournir la formation dont nous avons besoin et nous sommes bien loin de respecter nos engagements internationaux.

Le nombre de gestionnaires intermédiaires et supérieurs continue de diminuer au sein des SCTM. Bon nombre des gestionnaires qui sont demeurés après la fusion sont partis à la retraite ou ont choisi de terminer leur carrière ailleurs, hors du domaine des SCTM. Je suis fortement enclin à croire que la décision de quitter les SCTM a été motivée en grande partie par la pression incessante de contraintes financières irréalistes; par les frustrations causées par leur incapacité de réaliser les programmes des SCTM dans de telles conditions et par le stress et l’insatisfaction continuels causés par l’orientation générale des SCTM et de la Garde côtière, depuis quelques années.

Julius Smolders, Surveillant de veille, SCTM Tofino

Cette déclaration, faite à Tofino (Colombie-Britannique), donne une idée assez précise des nombreux problèmes que le Comité a constatés non seulement à Tofino, mais dans d’autres centres des SCTM ailleurs au pays.

Les SCTM de la Garde côtière canadienne ont été créés à la suite de l’intégration des Services radio et des Services de trafic maritime de la GCC au moment de leur transfert de Transports Canada au ministère des Pêches et des Océans, en 1995. Les tenants de l’intégration des services en question sous l’égide des SCTM font valoir que le geste a permis d’économiser au niveau national 209 équivalents temps plein, 10,6 millions de dollars en salaires et 2,9 millions de dollars en coûts de fonctionnement et d’entretien, ce qui équivaut à des économies annuelles de 13,6 millions de dollars.

Le plan directeur de 1995 relatif à l’intégration des services de trafic maritime exigeait une période de mise en œuvre de cinq ans, qui a par la suite été réduite à quatre ans. Le plan national d’activités des SCTM de 1998-1999 à 2000-2001 exigeait une période de stabilité, ce qui ne s’est pas produit. On continue à imposer aux SCTM des pressions financières année après année, ce qui influe sur leur capacité de fournir la formation obligatoire, de moderniser leur équipement et de recruter en temps opportun et de façon structurée de nouveaux employés et mine également leur capacité de s’acquitter de la tâche qu’ils ont le mandat de remplir sur le plan opérationnel. Le problème fondamental, c’est qu’en dépit des économies déjà réalisées grâce à l’intégration les STCM continuent d’être terriblement sous-financés. Le sous-financement des SCTM de la seule région du Pacifique est de l’ordre de 1 million de dollars par année. Le volume beaucoup plus élevé du trafic dans la région du Pacifique y aggrave les difficultés.

On ne sait trop si la haute direction nie ou ne comprend simplement pas la gravité des problèmes causés par le sous-financement. La haute direction de la GCC à Ottawa a reconnu le manque de fonds mais les cadres supérieurs de la région du Pacifique soutiennent que les SCTM sont capables de s’acquitter de leur mandat, en réaffectant des fonds à l’intérieur de l’enveloppe régionale existante. Les membres du Comité doutent qu’il soit possible de réaffecter des fonds sans nuire sérieusement d’autres services de la Garde côtière canadienne, étant donné qu’ils savent que les SCTM de la GCC ne sont pas les seuls services à souffrir d’un sous-financement chronique. Le message des centres opérationnels de la région du Pacifique, en particulier, contrastait vivement par rapport à ceux des autres : ce terrible sous-financement a eu de graves répercussions sur les opérations des SCTM et est en train de compromettre la capacité de ces derniers de s’acquitter de leur mandat.

Au cours des dernières années, nous avons essayé de faire coller une boîte avec un budget. Il nous faut avoir un budget qui colle à la boîte. Vous ne pouvez pas assurer un service de cette envergure avec un budget de broche à foin.

Julius Smolders, surveillant de veille, SCTM de Tofino

Le Comité croit qu’il s’agit là d’une évaluation juste d’une politique de sous-financement continuel des SCTM et que cette politique doit être changée.

Ce que le Comité a entendu aux centres opérationnels des SCTM de la région du Pacifique a été confirmé durant la visite qu’il a effectué à la base de la Garde côtière américaine de Seattle.

La pénurie de personnel est en train de compromettre le fonctionnement efficace et efficient des SCTM. Notamment, elle alourdit la charge de travail des agents, les contrait à faire plus d’heures supplémentaires et aggrave le stress et les vexations qu’ils ressentent. Les départs à la retraite et l’attrition au cours des prochaines années risquent d’aggraver la pénurie de personnel. Le fait qu’il peut falloir jusqu’à deux ans à une recrue pour devenir un agent des SCTM parfaitement compétent souligne la nécessité d’agir immédiatement pour répondre aux futurs besoins en personnel. Même avec un effectif complet, le service canadien est sous-doté en personnel comparativement à ses contreparties américaine et européennes. On ne sait pas clairement si la formule actuelle de dotation en personnel de 5,5 personnes par poste fournit suffisamment de ressources, en particulier lorsqu’on tient compte des besoins de formation, de congés de maladie et de vacances.

Le personnel des SCTM ne reçoit pas de formation périodique opportune. Des agents ne peuvent souvent pas assister à des cours de formation prévus au calendrier, parce que les fonds sont épuisés bien avant la fin de l’exercice financier, à l’intérieur de ce qu’on nous a tous décrit comme étant la « période limite de l’automne ». Il a, en outre, été impossible à des membres du personnel des SCTM de la région du Pacifique de se rendre à Seattle pour y suivre un programme de formation polyvalente sur les opérations américaines des Services communs de trafic maritime en raison de contraintes de financement et pour des réunions du Groupe mixte de coordination créé aux termes de l’Accord sur les CVTS.

La détérioration de l’équipement constitue un grave problème à bien des endroits; dans certains cas, elle a entraîné des interruptions de service ces trois dernières années. Le manque d’entretien périodique et préventif en raison d’une réduction du nombre de techniciens aggrave le problème. On répare plutôt l’équipement lorsqu’il se brise. Le problème semble des plus graves à Prince Rupert, où, du fait des conditions météorologiques l’hiver et de l’éloignement des installations, toutes les défaillances de l’équipement risquent d’entraîner l’interruption des services assurés par les SCTM pendant des périodes prolongées. Le manque de soutien technique mine également la capacité de mettre à niveau et de moderniser sans délai l’équipement opérationnel.

Les points exposés ci-dessus ont causé beaucoup de stress et de frustration chez le personnel des SCTM. Les injonctions et les opérations « d’analyse du moindre coût » continues pour la région du Pacifique qui étaient destinées à régler ses problèmes budgétaires ont, en outre, accru le stress. D’après le Comité, les seules raisons pour lesquelles les SCTM continuent à fonctionner aussi bien qu’ils le font sont le dévouement et le professionnalisme de leur personnel. Le fait de dépendre de ce dévouement ne remplace cependant pas des niveaux raisonnables de dotation en personnel, une formation en temps opportun et un équipement fonctionnel moderne. La solution ne consiste pas à continuer à obliger les SCTM à s’adapter aux pressions budgétaires; elle consiste plutôt à assurer un niveau stable de financement qui permettra aux Services de communications et de trafic maritimes de respecter pleinement leur mandat actuel.

D’autres secteurs de la fonction publique du Canada font également face à des défis sur le plan des ressources financières et humaines. Les SCTM de la GCC jouent cependant un rôle crucial en assurant la sauvegarde de la vie en mer et en protégeant l’intégrité environnementale du littoral du Canada, en plus de jouer un rôle croissant en matière de sécurité nationale. Ils contribuent aussi de façon importante à protéger sa souveraineté. Si les SCTM ne disposent pas des ressources nécessaires pour remplir leur mandat, des vies peuvent être menacées et le Canada risque de ne pouvoir respecter pleinement ses obligations internationales.

Il est important de comprendre qu’un rétablissement du financement ne répond à aucune des inquiétudes plus élevées au sujet de la sécurité en conséquence du 11 septembre et des événements subséquents; ce rétablissement permettrait simplement aux SCTM de la GCC de remplir le rôle dont ils ont actuellement le mandat de s’acquitter. Un rétablissement du financement ne répond pas non plus à l’augmentation prévue du trafic des navires de commerce ni à d’autres préoccupations au sujet de la sécurité qui existaient préalablement, comme celles relatives à la lutte contre le trafic des stupéfiants et à l’immigration illégale. Même s’ils n’ont pas eux-mêmes le mandat d’assurer la sécurité nationale, les SCTM de la GCC, qui sont les yeux et les oreilles d’autres organismes gouvernementaux, jouent un rôle inestimable en protégeant l’intégrité des frontières maritimes du Canada et sa souveraineté.

RECOMMANDATIONS

Le Comité recommande :

RECOMMANDATION 1

Qu’on accroisse immédiatement le financement des SCTM de la GCC de la région du Pacifique d’au moins 2 millions de dollars dans le budget fédéral 2003-2004 afin de :

 rétablir des niveaux appropriés de dotation en personnel;
 d’offrir la formation requise;
 de remplacer l’équipement vétuste et n’étant plus fiable et
 d’assurer l’entretien préventif prévu du matériel.

Qu’on songe à augmenter les budgets des SCTM des quatre autres régions dans les mêmes proportions.

RECOMMANDATION 2

Qu’on prenne sans délai l’initiative d’adopter des mesures pour porter les niveaux de dotation en personnel à au moins 7 agents par poste.

RECOMMANDATION 3

Qu’on accorde une priorité élevée à la mise à niveau et à la modernisation sans délai de l’équipement.

RECOMMANDATION 4

Qu’on double l’équipement situé dans des emplacements éloignés ou difficilement accessibles, afin d’avoir une solution de repli et pour réduire les risques d’interruptions de service.

RECOMMANDATION 5

Qu’on accroisse les niveaux de dotation en personnel des Services techniques jusqu’au point où l’on puisse entretenir l’équipement suivant un calendrier périodique d’entretien préventif, plutôt que d’attendre qu’il fasse défaut.

Compte tenu des nouvelles préoccupations au sujet de la sécurité, le Comité recommande :

RECOMMANDATION 6

Qu’on élargisse le mandat des SCTM de la GCC pour y inclure l’exercice d’un rôle officiel sur le plan de la sécurité nationale.

De plus, le Comité exhorte le ministre des Pêches et des Océans à insister auprès du ministre des Finances afin qu’il affecte immédiatement au ministère des Pêches et des Océans des crédits continus spécifiquement destinés à

 Assurer une surveillance radar totale des côtes Est et Ouest;
 Fournir aux SCTM des systèmes protégés sans fil et de communication terrestre.

1La USCG est une organisation militaire exploitée sous l’égide du département des Transports en temps de paix, mais qui relève du Secrétaire de la Marine dès déclaration d’une guerre.
2L’INMARSAT a été le premier exploitant mondial de communications mobiles par satellite. L’organisation fournit tout un éventail de services de communications maritimes, terrestres, aéronautiques et autres.
3TJB = tonneau de jauge brute.
4« Cas de détresse maritime » est l’expression utilisée à des fins statistiques pour compiler les cas d’accidents maritimes, d’accidents à bord de navires et d’incidents maritimes signalés au centre des SCTM. Un accident maritime est un événement qui englobe les accidents comme les collisions, les échouements, les naufrages, les incendies et les explosions; elle comprend les accidents dans lesquels des personnes sont happées ou frappées par le chargement ou une machine tombent à la mer ou tombent du pont du navire ou sur le quai. Un accident à bord d’un navire est un événement entraînant la mort, une blessure ou une maladie qui n’est pas le résultat d’un accident maritime. Un indicent maritime signalé à un centre des SCTM est un cas touchant au bris ou à la défaillance d’une pièce de gréement, d’une structure ou d’une machine. L’incident maritime comprend également les situations graves comme les collisions et les échouements évités de justesse et les déplacements du chargement.
5Un « mouvement de trafic maritime » est compté quand un navire commence ou cesse de « faire route ». « Fait route » tout navire qui n’est pas au mouillage ni amarré à terre ou à sec. Chaque période passée à faire route constitue un mouvement.
6Un poste d’opérateur des SCTM est le lieu (un poste de travail) au sein d’un centre des SCTM où l’agent des SCTM accomplit ses fonctions. Normalement, dans un centre des SCTM de la GCC, un tel poste peut appartenir à deux grandes catégories : gestion du trafic maritime (l’agent des SCTM se préoccupe principalement du mouvement sûr et efficace des navires dans une voie navigable donnée ou dans une zone de trafic maritime intense) et sécurité, parfois appelée radio, surtout dans l’Est (l’agent des SCTM se préoccupe principalement de surveiller les fréquences de détresse et d’appel internationales et de fournir de l’information maritime sur la sécurité aux navigateurs).
7Par accès on entend une liaison de données qui permet de voir les informations radar d’un autre point.
8Le VTOSS (système de soutien opérationnel pour le trafic maritime) est un système d’information intégré élaboré pour suivre les mouvements des navires sur la côte Ouest et tenir des registres à leur sujet. Dans son rapport de décembre 2002, la vérificatrice générale du Canada indique que la Région du Pacifique n’a pas demandé l’autorisation de l’administration centrale pour l’élaboration du VTOSS, qui a été financé à même les budgets régionaux des opérations, que la région n’a pas utilisé d’approches formelles d’élaboration, de sorte qu’on ne retrouve presque pas de documentation sur le système. De plus, l’entretien du VTOSS doit être fait par l’employé qui l’a élaboré.
9Le système d’identification automatique est exigé par la convention SOLAS pour certains types de navires, depuis le 1er juillet 2002. Le SIA est un système émetteur à transpondeur embarqué grâce auquel les navires transmettent en continu différentes données (code d’identification, position, cap, vitesse, données statiques du navire et données connexes) aux bâtiments se trouvant dans ses parages et aux autorités à terre, sur une fréquence VHF commune.
10L’INNAV (Système intégré d’information sur la navigation maritime) est un dispositif de gestion de l’information opérationnelle conçu pour assurer une gestion fiable des voies navigables, soutenir le commerce et maximiser les possibilités d’intégrer des technologies nouvelles.
11La vérificatrice générale a noté que la première étape de INNAV a été installée dans huit centres de l’Est du Canada. Le coût direct total estimatif du projet s’est élevé à 13 millions de dollars (Rapport de la vérificatrice générale du Canada, Chapitre 2 — Pêches et Océans Canada — Contribuer à la sécurité et à l’efficience de la navigation maritime.
12Conseils et Vérification Canada est un organisme de service spécial de Travaux publics et Services gouvernementaux Canada, chargé d’améliorer la gestion et les activités de l’appareil fédéral au Canada et à l’étranger.