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NDVA Rapport du Comité

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ÉTAT DE PRÉPARATION DES FORCES CANADIENNES :

RÉPONSE À LA MENACE TERRORISTE

Avec le démantèlement de l’Union soviétique et la fin de la guerre froide, nous, Occidentaux, avons traité avec complaisance la question de notre sécurité. Il n’en est resté qu’une seule superpuissance, les États-Unis, et, alors qu’il fallait s’occuper de conflits régionaux, notre sécurité intérieure semblait garantie. Qui pouvait nous menacer? Qui pouvait nous inquiéter? Qui pouvait rivaliser avec notre force collective?

Le maintien de la paix a été le défi militaire le plus urgent à relever et, du moins pour les Canadiens, c’est au nom des principes de la sécurité humaine que nous devions nous engager sur la scène internationale. Malgré certains signes évidents de danger, nous — et certains plus d’une fois ? avons récolté les dividendes de la paix, et de grandes opérations militaires à long terme semblaient peu probables. Nous avons contribué à la stabilisation et à la reconstruction de l’ex-Yougoslavie et participé selon les besoins à des opérations de maintien de la paix. Même s’il devait y avoir une autre forme de guerre de l’Iraq, nous nous sentions en sécurité.

La catastrophe du 11 septembre a tout changé. Elle a mis un frein à l’optimisme que nous partagions tous après la chute du Mur de Berlin. Ce dernier événement symbolisait les espoirs de la période de l’après-guerre froide, alors que le 11 septembre nous a fait constater à quel point nous avons été complaisants. S’il est une chose que nous partageons tous maintenant, c’est bien un sentiment de vulnérabilité.

Le contexte dans lequel nous formulons maintenant nos politiques étrangère et de la défense est fondamentalement différent de celui qui prévalait il y a quelques mois. Nous ne parlons plus de « guerre sans victimes », mais nous réapprenons plutôt qu’il est plus important de se battre pour des valeurs fondamentales que pour des intérêts stratégiques. Les attaques à New York, à Washington et en Pennsylvanie n’étaient pas simplement dirigées contre un symbole de la puissance financière et militaire moderne de l’Amérique, mais contre la base même sur laquelle repose les sociétés démocratiques occidentales.

L’attaque était dirigée contre notre foi dans le rationalisme séculaire, contre le fait que nous encourageons le pluralisme et contre notre conviction qu’une nation, de concert avec ses concitoyens, peut maîtriser sa propre destinée. On a tenté d’ébranler notre croyance dans le progrès et l’égalité ainsi que dans le fait que notre société en est une d’inclusion plutôt que d’exclusion.

Nous prônons la séparation de l’Église et de l’État afin de garantir la liberté de culte. Toutefois, nous comprenons, si ce n’est qu’intuitivement, que nos choix moraux s’appuient avant tout sur ce qui est objectivement bon en soi pour tous. Il existe des droits et des devoirs moraux, sans égard à la race, à la culture, à la tradition ou au gouvernement en place. Ces droits et devoirs, dans la pratique et dans l’action, nous définissent comme êtres humains, et non comme citoyens de telle ou telle société. Rien — même la religion — ne justifie des pratiques qui portent atteinte aux droits de la personne, et personne — même les institutions religieuses — ne saurait être exempté de rendre compte de ses actes.

La tragédie du 11 septembre en sol américain était en fait une attaque dirigée sur nous tous. Des Canadiens et des citoyens d’autres pays sont morts ce jour-là, quoique la plupart des victimes aient été américaines.

La question qui se pose au législateur, c’est « comment réagir », non seulement aujourd’hui, mais à long terme? Comment devons-nous nous organiser et nous préparer à d’autres attaques possibles? Que devons-nous attendre de la population et des membres de nos forces armées? Il est clair que nous n’avons pas de réponse définitive à offrir. Mais il faut que nous agissions et, ce faisant, que nous abandonnions les principes vétustes de la réflexion stratégique, de la doctrine militaire ou de l’orthodoxie politique.

La première responsabilité d’un gouvernement, c’est de veiller à la sécurité de ses citoyens. Nos citoyens craignent de plus en plus pour leur sécurité personnelle et se tournent vers le gouvernement pour qu’il garantisse en fin de compte leur bien-être physique. Aussi comprennent-ils très bien qu’il appartiendra aux hommes et aux femmes des Forces canadiennes et aux premiers intervenants de porter une part énorme du fardeau nécessaire pour assurer leur bien-être.

Notre Comité a entrepris une étude en profondeur de l’état de préparation opérationnelle des Forces canadiennes. Vu la gravité de ce qui s’est passé et la nécessité éventuelle d’une participation de nos effectifs militaires à d’autres missions, nous avons jugé important de déposer un rapport provisoire. La question a été abordée dans notre étude initiale, mais elle n’avait pas l’importance qu’elle revêt maintenant.

Enfin, si nous déposons un rapport maintenant, c’est surtout pour que le gouvernement tienne compte de nos recommandations dans l’exercice budgétaire en cours. Si nous devons fournir aux FC ce dont elles ont besoin pour relever les défis qui les attendent, il nous faut prévoir maintenant. Nous ne pouvons nous permettre d’attendre que l’économie s’améliore, ni espérer béatement qu’une fois le dossier d’Al-Qaïda et des Talibans réglé, la menace terroriste qui pèse sur nous disparaîtra.

Dans le passé, nous avons souligné la nécessité de mettre sur pied une force expéditionnaire, composée de troupes bien entraînées et entièrement interopérables avec nos alliés. Nous avons réclamé davantage de ressources, du nouveau matériel, des troupes suffisantes et un effort pour réaliser le potentiel des Réserves. Nous ne nous prétendons pas omniscients, mais, en tant que membres d’un comité, nous estimons que nos rapports et nos recommandations passés ont contribué très positivement à notre capacité de défense. La situation de la sécurité après le 11 septembre a conféré un caractère inédit d’urgence à certaines de nos observations passées.

Des progrès ont été réalisés : des fonds ont été injectés pour améliorer la qualité de vie, renouveler l’habillement du soldat et acheter de nouveaux véhicules de reconnaissance et de transport de troupes blindés. Mais il faudra faire davantage.

Les militaires ont fait leur part dans la réduction du déficit. Toutefois, malgré la fermeture de bases militaires, les coupures d’effectifs, une formation réduite et l’utilisation d’un matériel vétuste, nos soldats ont été de plus en plus sollicités par leurs dirigeants politiques. La cadence élevée des missions, ajoutée à la rareté des ressources, a mis à rude épreuve les institutions militaires, les membres des forces armées, leurs familles et leurs collectivités.

Cependant, malgré les réductions, le Canada veut toujours participer aux efforts internationaux. Il veut jouer un rôle de premier plan. Et les membres des FC y sont plus que disposés.

Malgré tout, nos engagements ont été par ailleurs mitigés. Nous voulons être visibles, nous voulons « compter » pour ainsi dire. Mais nous avons acquis la réputation de rechercher le prestige ou le privilège de donner des conseils sans vouloir en payer le prix. Or, l’un ne va pas sans l’autre.

Cette attitude a nettement fait surface le lendemain de l’adresse du président Bush à la nation américaine. À la une de nos grands quotidiens, chacun se plaignait que le Canada n’avait pas été mentionné. Dans les tribunes téléphoniques, les Canadiens ont exprimé leur déception face à la possibilité que l’affront ait été intentionnel. Personne ne savait vraiment pourquoi cette omission avait été commise, mais presque tous en sont arrivés à la même conclusion. On nous a finalement dit de mettre cartes sur table. Selon plusieurs, ici et à l’étranger, le Canada n’avait pas été à la hauteur de ses engagements bilatéraux en matière de défense de l’Amérique du Nord et de ses engagements internationaux en matière de défense en tant que membre de l’OTAN.

Finalement, notre réponse militaire à la demande d’aide des États-Unis a été substantielle. Nous avons envoyé cinq navires : le destroyer Iroquois, les frégates Halifax, Charlottetown et Vancouver et le ravitailleur Preserver. Une autre frégate devrait joindre les rangs bientôt. À noter que ces frégates, joyaux de la Marine canadienne, comptent actuellement parmi les meilleures dans le monde. Notre aviation a fourni trois avions de transport Hercules, deux appareils de surveillance Aurora CP-140 et un Airbus. De plus, nous avons dépêché un petit contingent de la FOI2, notre force spécialisée dans la lutte contre le terrorisme. Au total, 2 000 militaires ont été déployés, faisant du Canada le troisième contributeur en importance au moment d’écrire ces lignes.

La question que nous pourrions toutefois nous poser, c’est : « Malgré cet engagement ferme, y a-t-il des lacunes dans la structure de nos forces? » Ainsi, que serait-il arrivé si on avait fait appel à l’armée? Aurions-nous pu déployer rapidement et soutenir longtemps un bataillon ou une brigade au complet? La réponse sans doute aurait été « non » compte tenu surtout de nos engagements existants à l’étranger.

Des témoins ont répété devant le Comité qu’aujourd’hui, l’armée ne pourrait pas réunir une brigade au complet. En effet, certains ont prétendu que, même si on rapatriait toutes les troupes canadiennes qui servent actuellement à l’étranger, le Canada ne serait toujours pas en mesure de respecter les engagements énoncés dans le Livre blanc de la Défense de 1994. Nous ne sommes pas en mesure de tirer des conclusions définitives à cet égard pour l’instant, mais qu’il suffise de dire que, si nous sommes capables de respecter ces engagements, nous y parvenons à peine. Et nous exigeons ainsi beaucoup de nos effectifs.

Nous avons aussi entendu des témoignages sur le manque d’entraînement efficace offert à nos Forces terrestres. Certains ont déclaré qu’il n’y avait pas eu d’exercice de brigade depuis neuf ans. Cette déclaration remet fortement en question le leadership et l’efficacité au combat de nos forces. Nos commandants doivent apprendre à diriger des unités militaires qui ont au moins cette taille. Pour que nos soldats soient efficaces au combat, ils doivent se connaître entre eux, s’entraîner ensemble et pouvoir établir les liens de confiance et de familiarité qu’il faut pour pouvoir survivre au combat.

Pour que nos forces puissent être interopérables avec nos alliés, elles doivent pouvoir s’entraîner régulièrement avec eux. La masse critique nécessaire pour assurer un entraînement interallié efficace, c’est la brigade. À noter également que nos forces doivent non seulement être interopérables, mais aussi pouvoir fonctionner sous un commandement canadien indépendant. La brigade est l’unité minimale nécessaire pour assurer une telle autonomie de commandement.

Nous recommandons de procéder avec grande prudence quand il s’agit d’amalgamer des unités ensemble pour diverses opérations. Des groupes sur mesure composés d’effectifs spécialisés pour une opération nationale ou internationale précise peuvent être très efficaces. La participation du Canada avec les Pays-Bas à la mission des Nations Unies en Éthiopie et en Érythrée (MINUEE) a été très réussie et a permis d’améliorer notre interopérabilité avec un important allié de l’OTAN. Toutefois, envoyer sous un commandement étranger un petit nombre de troupes canadiennes sur un théâtre plus dangereux sans leur offrir au préalable une formation conjointe peut entraîner de graves problèmes.

Concernant la question de l’interopérabilité, notre Marine et notre Aviation ont eu un peu plus de chance que notre Armée de terre. Ces deux services ont, en vertu d’accords internationaux permanents, dû participer officiellement à des exercices réguliers avec nos alliés les plus proches. Depuis son départ du nord-ouest de l’Europe, l’Armée n’a pas été appelée, comme la Marine et l’Aviation, à se soumettre à des exigences en matière d’entraînement et de matériel. L’Aviation s’assure de sa conformité en participant aux opérations de NORAD et à d’autres opérations multinationales, alors que la Marine le fait régulièrement en participant à la Force navale permanente de l’Atlantique.

Selon la politique officielle actuelle, les FC sont en mesure de déployer sur un théâtre d’opération des unités d’avant-garde dans les 21 jours et un contingent plus important dans les 90 jours. Aujourd’hui, cela serait insuffisant. Les États-Unis s’apprêtent à déployer des unités de la taille d’une brigade légère sans artillerie ni blindés lourds en 96 heures. Il faut que nous puissions déployer nos forces dans un délai beaucoup plus court et les maintenir pendant de longues périodes. Si nous n’y parvenons pas, c’est là que s’arrêtera notre interopérabilité réelle avec notre allié le plus important.

Se permettre d’attendre longtemps avant de réunir, entraîner et dépêcher des unités d’une certaine taille sur un possible théâtre d’opération, voilà une attitude incompatible avec le besoin très réel d’un niveau plus élevé de préparation des éléments de base. Ce sont ces éléments, avec le matériel, la formation et les mécanismes de déploiement qu’ils supposent, qui sont indispensables pour mener à bien des opérations complexes dans un court délai. Dans le nouvel environnement stratégique, une capacité d’intervention rapide est un aspect essentiel de la planification et de la doctrine militaires.

Il est fini le temps de se demander si les menaces asymétriques existent ou n’existent pas. Il faut maintenant se demander comment y faire face et comment structurer et équiper nos forces pour y répondre. Les réponses ne sautent pas aux yeux, mais certains éléments de base s’imposent et s’avéreront sans doute coûteux.

Ce qui est encourageant au sujet de nos efforts pour relever les nouveaux défis qui nous attendent, c’est la détermination de l’opinion officielle. Le ministre de la Défense nationale a affirmé qu’il est clair que nous devons évaluer en détail ce qui est requis en termes d’activités et de capacité, et a ajouté que des ressources additionnelles pourraient être nécessaires pour faire le travail. Le ministre des Affaires étrangères et du Commerce international ne s’est pas fait prier pour déclarer que le Canada n’hésitera pas à se joindre aux États-Unis dans leur action militaire pour riposter contre le terrorisme, même au péril de vies canadiennes. Le 16 septembre, M. Manley a ajouté que le Canada est en guerre contre le terrorisme, que le monde a changé de façon bien réelle à la suite de ces événements et que cela va nous obliger à revoir tous les aspects de nos activités. Il a conclu en disant que, dans ses efforts, le Canada fera front commun avec les États-Unis.

En outre, le ministre des Affaires étrangères et du Commerce international a aussi laissé entendre que le gouvernement est disposé à revoir le niveau des dépenses de la Défense : « En examinant ce qui se passe actuellement dans le monde, nous pourrions très bien constater que nous devons augmenter le budget de la Défense nationale et de nos forces de sécurité… ».

Il ne fait aucun doute que le monde a changé depuis 1994. Nous avons de nouveaux défis à relever et de nouveaux engagements à respecter qui nécessiteront plus de ressources. Cela, le ministre de la Défense nationale et le ministre des Affaires étrangères et du Commerce international le comprennent très bien. Par conséquent, étant donné que la situation a changé dans le monde et qu’il faut organiser nos Forces canadiennes de façon à leur permettre de bien servir nos intérêts nationaux, nous recommandons :

1. Que le gouvernement augmente le budget du ministère de la Défense nationale.

Dire que les Forces canadiennes ont besoin de fonds additionnels, voilà une lapalissade. De 1993 à 1998, le budget de la Défense a chuté de 23 % et le pouvoir d’achat réel du ministère a fondu de plus de 30 %. En 1998, le vérificateur général a soutenu qu’il fallait injecter de 5 à 6 milliards de dollars additionnels au cours des cinq à dix prochaines années pour remplacer le matériel vétuste. En 2000, le vérificateur général a évalué le manque à gagner du ministère à 750 millions de dollars par année. De 1998 à 2000, le gouvernement a augmenté le budget de la Défense de 1,7 milliard de dollars. Toutefois, la Conférence des Associations de la défense du Canada, dans une étude récente intitulée Coincé entre les deux : une évaluation de la capacité opérationnelle des Forces canadiennes, conclut que le manque à gagner du MDN est toujours de 1 milliard de dollars par année, notamment au titre des coûts de fonctionnement et d’entretien.

Notre Comité n’a entendu aucun témoignage qui contredit ces chiffres et la conclusion voulant que les FC traverseraient une crise. Il est capital de fournir aux Forces canadiennes les moyens dont elles ont besoin pour respecter leurs engagements. Il est impératif d’augmenter le budget annuel de base et il faudrait prévoir au besoin des montants distincts pour les tâches imprévues. Le ministère ne peut continuer à retirer des fonds de son budget de base déjà insuffisant pour financer des besoins imprévues. Nous ne pouvons plus continuer à maintenir notre structure de défense en « volant Paul pour payer Pierre ».

Nous recommandons donc :

2. Que le gouvernement augmente le budget dans une mesure permettant non seulement de couvrir les coûts opérationnels occasionnés par la lutte anti-terrorisme, mais aussi de combler les lacunes au chapitre de l’intégrité du programme.

3. De plus, le Comité recommande que soient examinés les effectifs actuels des forces régulières et de réserve.

Nous jugeons nécessaire pour l’instant d’augmenter l’effectif des forces régulières au-delà des 60 000 membres prévus dans le Livre blanc. Il est urgent d’augmenter substantiellement les effectifs des forces de réserve. Nombre des hypothèses sur lesquelles se fonde le Livre blanc de la Défense de 1994 demeurent valables, mais, à cause de la situation internationale actuelle, un examen complet de notre politique de la défense s’impose. Comme cette politique dépend étroitement de nos relations internationales, il faut revoir notre politique étrangère. Nous recommandons donc :

4. Que le gouvernement entreprenne immédiatement un examen général de nos politiques étrangère et de la défense à la lumière des événements qui ont suivi le 11 septembre.

Et nous recommandons aussi :

5. Que le Parlement joue un rôle important dans l’examen.

Le temps n’est pas aux examens « internes ». Il faut que l’examen porte sur l’ensemble de nos politiques étrangère et de la défense et favorise la participation du public et des parlementaires. Le plus important toutefois, c’est que l’examen des politiques étrangère et de la défense ne serve pas de prétexte pour retarder inutilement les hausses de budgets requises.

Dans la lutte contre le terrorisme, le renseignement jouera un rôle particulièrement important. Il est absolument essentiel de disposer de renseignements militaires exacts pour assurer le succès de toute unité déployée à l’étranger. Il importe donc que nous continuions à collaborer avec nos alliés — surtout les États-Unis — à cet égard. Il nous faut aussi faire une lecture exacte de ce qui se passe à l’intérieur de nos frontières si nous voulons déceler et dissiper les éventuelles menaces terroristes. À cet égard, il est important que nos propres services du renseignement fassent davantage pour être plus efficaces, en collaborant plus étroitement entre eux.

Nous avons beaucoup appris dans nos rapports avec les États-Unis dans le domaine des renseignements électromagnétiques. Le Centre de la sécurité des télécommunications (CST) a bonne réputation et entretient de bonnes relations avec ses homologues américains et des autres pays comme le Royaume-Uni et l’Australie. Nous félicitons le gouvernement de son intention d’augmenter les ressources du CST. Les hausses récentes accordées au Centre ont été bien accueillies. Toutefois, nous invitons le gouvernement à consacrer des ressources suffisantes dans ce domaine pour que nous puissions être à la hauteur de nos engagements et apporter une contribution utile.

Nous saluons également la création du Comité spécial du Cabinet sur la sécurité publique et la lutte contre le terrorisme. Notre lutte contre le terrorisme sera, au dire de tous, longue, et il importe de maintenir une vigilance constante au plus haut niveau décisionnel. Nous recommandons donc :

6. Que le Comité spécial du Cabinet sur la sécurité publique et la lutte contre le terrorisme devienne un comité permanent du Cabinet et qu’il soit doté des effectifs nécessaires pour mener son mandat à bien.

Toutefois, nous avons relevé une lacune dans notre capacité de réunir des renseignements et de les analyser. Actuellement, le Canada ne possède pas de service spécial de collecte de renseignements à l’étranger. Certains prétendent que les renseignements électromagnétiques sont plus utiles s’ils sont complétés par des « renseignements humains » — renseignements émanant des sources sur le terrain. Nous ne sommes pas en mesure de faire une recommandation officielle à cet égard, mais nous sommes d’avis qu’il conviendrait que le gouvernement envisage la création d’un service canadien de collecte de renseignements à l’étranger.

Les Canadiens ne comptent plus sur l’éloignement des régions en conflit pour assurer leur protection; la dure réalité, c’est que la menace terroriste pèse sur la sécurité au Canada et dans le monde, et elle peut prendre bien des formes. Avec les années, on craint de plus en plus que des États ou des groupes, opposés aux efforts de paix dans le monde et incapables de se mesurer directement à des forces armées à la fine pointe de la technologie comme celles des États-Unis, recourent de plus en plus à des attaques terroristes contre les populations civiles des pays pacifiques pour réaliser leurs desseins. Ces menaces dites asymétriques ont incité bien des experts à se pencher sur la vulnérabilité des infrastructures essentielles des pays très développés comme les États-Unis et le Canada qui dépendent de plus en plus des technologies de l’information. Les experts ont aussi émis de sérieuses réserves concernant la probabilité grandissante que les terroristes utilisent des armes nucléaires, biologiques et chimiques, aussi appelées armes de destruction massive, pour tuer des centaines, sinon des milliers, de civils et semer la peur chez les survivants.

En détournant des avions le 11 septembre pour parvenir à leurs fins diaboliques au lieu de faire la guerre de l’information ou d’utiliser des armes chimiques ou biologiques, les terroristes ont pris les spécialistes du terrorisme ainsi que les citoyens ordinaires par surprise. Toutefois, cela ne nous autorise aucunement à considérer avec complaisance la menace qui pèse sur les infrastructures essentielles du Canada et la possibilité que nos citoyens deviennent les cibles d’éventuelles attaques au moyen d’armes de destruction massive. En effet, les attaques du mois de septembre ont révélé que ces terroristes ont un mépris total pour la vie humaine et que nous devons maintenir un niveau élevé de préparation pour contrer la menace sous toutes ses formes. Elles montrent également comment leurs effets peuvent se faire sentir bien au-delà des limites de la ville ou de la région sur laquelle elles sont dirigées. Des attaques contre les réseaux électriques, les systèmes de communication ou les centrales nucléaires du Canada, qu’elles soient dirigées par la voie des airs ou par des voies électroniques, pourraient avoir un effet domino sur l’ensemble de l’économie canadienne tout en compromettant le bien-être d’innombrables citoyens. Des attaques menées au moyen d’armes de destruction massive seulement, ou de concert avec d’autres armes, pourraient non seulement faire de nombreuses victimes, mais créer également un climat de peur dans la population, quelle que soit la quantité d’armes nucléaires, biologiques ou chimiques utilisées. La crainte de la maladie du charbon des dernières semaines en Amérique du Nord et ailleurs est un exemple du pouvoir déstabilisant de tels actes terroristes. En bref, les attaques terroristes contre les infrastructures critiques, ainsi que les attaques au moyen d’armes de destruction massive, constituent une menace non seulement pour les personnes et la propriété, mais aussi pour la stabilité politique et sociale qui nous tient à cœur.

Nombre des éléments dont le Canada a besoin pour contrer ces menaces sont déjà en place, mais doivent être renforcés. Ils ne sont pas tous de nature militaire, quoique certains des plus importants relèvent du ministère de la Défense nationale. Ainsi, le Bureau de la protection des infrastructures essentielles et de la protection civile (BPIEPC) a été créé en février 2001. Récupérant la capacité d’intervention en cas de catastrophes naturelles et autres de Protection civile Canada qui relève déjà du ministère, le BPIEPC joue un rôle de premier plan dans la protection des infrastructures essentielles du Canada, notamment en cas de guerre de l’information. Le Centre de la sécurité des télécommunications (CST), relevant aussi du ministère de la Défense nationale, contribue également à la protection des systèmes informatiques du gouvernement par l’entremise de ses services de sécurité de la technologie de l’information. Toutefois, comparativement à ce qui s’est fait aux États-Unis depuis quelques années, le Canada a été lent à prendre des mesures coordonnées pour protéger ses infrastructures essentielles.

Dans le passé, on n’a peut-être pas considéré que la menace était aussi grande pour le Canada que pour les États-Unis, mais la plupart des infrastructures essentielles des deux pays, dont les pipelines et les réseaux électriques, sont si étroitement liées entre elles que la sécurité dans un pays dépend de celle dans l’autre. Lors des attaques de septembre, le BPIEPC venait d’être créé et s’affairait à dresser l’inventaire des principaux éléments des infrastructures essentielles du Canada et à établir des liens avec les divers organismes fédéraux, provinciaux et privés qui en assurent l’exploitation. En effet, le gouvernement fédéral n’est pas le seul responsable de la protection des infrastructures essentielles, de sorte que le BPIEPC a la tâche délicate de coordonner la collaboration entre les différents niveaux de gouvernement et entre les secteurs public et privé. Il serait dérisoire d’augmenter le nombre de gardiens armés dans les centrales, les réseaux de pipelines et les autres éléments matériels des infrastructures critiques si leur fonctionnement risquait d’être compromis par des actes de guerre de l’information dirigés contre les réseaux informatiques. Cela dit, il est important dans la lutte contre le terrorisme qu’il existe un organisme qui a une idée d’ensemble des infrastructures nationales et de leur vulnérabilité. Nous recommandons donc :

7. Que le Bureau de la protection des infrastructures essentielles et de la protection civile (BPIEPC) accélère la production d’un inventaire détaillé des infrastructures essentielles du Canada et la conclusion d’ententes de coopération avec les exploitants publics et privés des infrastructures.

Et également :

8. Que le budget du BPIEPC soit augmenté pour assurer un financement suffisant des mesures visant à améliorer la protection des réseaux informatiques et des autres éléments des infrastructures essentielles, notamment une collaboration plus étroite avec les services américains correspondants.

Il est aussi important de pouvoir gérer les conséquences d’une catastrophe, que la cause en soit un événement naturel ou le terrorisme, que de protéger les infrastructures essentielles contre des attaques. Réagir rapidement et efficacement en cas de catastrophe naturelle peut limiter le nombre de victimes et en restreindre les effets à la région immédiate. Il en va de même si la catastrophe est causée par des terroristes, notamment si ceux-ci utilisent des armes nucléaires, biologiques ou chimiques. Dans les deux cas, les premiers intervenants, qu’il s’agisse de pompiers, d’agents de police ou de personnel médical, sont appelés à évaluer l’étendue de la catastrophe et les ressources nécessaires pour en atténuer les conséquences. Comme les événements de septembre l’ont démontré, il n’est de prime abord pas toujours clair que la situation est le fait de terroristes, mais il faut réagir rapidement pour en atténuer les conséquences. L’équipe d’intervention d’urgence du BPIEPC a déjà contribué dans une certaine mesure à la formation des premiers intervenants en offrant ou en finançant des programmes de formation. Toutefois, plus une catastrophe sera grande, plus le gouvernement fédéral et en particulier le BPIEPC devront intervenir dans les opérations de secours. Le BPIEPC sait quelles sont les ressources humaines et matérielles disponibles au Canada qui sont les mieux en mesure d’atténuer les conséquences d’une catastrophe. Il peut faciliter leur déploiement dans la ville ou la région sinistrée, comme il l’a fait quand il a coordonné les envois de couvertures et d’autres fournitures à bord d’appareils militaires dans divers aéroports du Canada vers lesquels avaient été dirigés les avions de ligne américains et étrangers. En effet, le besoin urgent de loger et de nourrir des milliers de passagers aériens en quelques heures à peine montre à quel point il faut nous préparer à toutes sortes d’éventualités, même à celles auxquelles personne n’aurait pu s’attendre.

Ainsi, même si la contribution du BPIEPC aux opérations de secours aux sinistrés a toujours été adéquate, il faut donner au Bureau les moyens d’aider davantage les autorités municipales et provinciales à atténuer les incidences d’une catastrophe. Il faut que les services fédéraux chargés de secourir les sinistrés aient des moyens accrus pour pouvoir intervenir de la façon voulue lorsqu’il y a des inondations, des marées noires et d’autres incidents, qu’ils résultent de phénomènes naturels ou d’actes terroristes. D’ailleurs, les attaques terroristes à l’arme chimique et surtout biologique pourraient faire tellement de victimes et toucher tant de collectivités, et faire déborder les services médicaux et autres services locaux si rapidement qu’elles constitueraient en elles-mêmes des sinistres majeurs. Nous devons donc veiller à ce que notre capacité de secourir les sinistrés soit plus que suffisante afin de relever les défis que présentent les catastrophes naturelles, tels les tremblements de terre, et les calamités causées par les terroristes. Aussi recommandons-nous :

9. Que le gouvernement augmente suffisamment le budget des services de la protection civile du BPIEPC chargés d’intervenir en cas d’urgence pour accroître de façon significative nos moyens de secourir les sinistrés partout au Canada, en appui aux administrations municipales et provinciales, chaque fois que survient une catastrophe, qu’elle soit causée par la nature ou par des terroristes.

Comme les événements du 11 septembre l’ont démontré, le BPIEPC et plus particulièrement ses services de protection civile comptent beaucoup sur les avions de transport des Forces armées pour expédier des fournitures, des secouristes spécialisés, du personnel médical et même du matériel lourd vers les régions du pays frappées par des catastrophes. En fait, ce jour-là, tous les vols civils étant suspendus, les appareils des Forces canadiennes étaient à peu près les seuls à sillonner l’espace aérien du Canada. Et comme ces événements tragiques l’ont aussi montré, nous ne pouvons pas nous permettre de supposer que des catastrophes ne se produiront jamais à plusieurs endroits du pays en même temps. Lorsqu’une situation d’urgence survient, nos avions de transport militaire pourraient devoir répondre à de nombreuses exigences alors que beaucoup d’entre eux, comme les avions de transport Hercules, sont déjà monopolisés par leurs utilisations habituelles, comme les opérations de recherche et de sauvetage et l’approvisionnement des Casques bleus et des autres militaires canadiens en mission à l’étranger. On a beaucoup parlé dernièrement des possibilités limitées et de l’âge de certains de nos appareils de transport militaire. Or, ils n’ont jamais été aussi indispensables que maintenant pour atténuer les incidences des catastrophes, qu’elles soient attribuables à la nature ou à des terroristes. En conséquence, nous recommandons :

10. Que le Canada se procure de nouveaux appareils de transport lourd pour renouveler son parc actuel afin d’avoir les moyens de transport aérien stratégique et tactique dont il a besoin pour expédier rapidement et efficacement du personnel et des approvisionnements de secours aux régions du Canada qui seraient frappées par des catastrophes naturelles ou des attentats terroristes graves ainsi que pour expédier des renforts et du matériel militaire vers ses unités outre-mer.

Il arrivera également qu’il faudra envoyer des troupes à l’étranger dans le cadre d’opérations de maintien de la paix ou de combat. Nous recommandons donc :

11. Que le gouvernement reconnaisse l’urgence d’augmenter la capacité de transport par mer des Forces canadiennes.

Nos soldats ont une vieille tradition qui fait leur fierté et qui consiste à livrer des approvisionnements de secours aux sinistrés du Canada et du monde entier. Il y a quelques années, ils ont fait une autre contribution importante aux missions internationales de secours en créant l’Équipe d’intervention en cas de catastrophe (DART), laquelle équipe peut être déployée n’importe où dans le monde pour appuyer les opérations des organismes nationaux et internationaux d’aide humanitaire et de secours aux sinistrés. Ainsi, en plus d’approvisionnements, le Canada peut envoyer quelque 200 militaires provenant de plusieurs unités des Forces, notamment des services médicaux, des services de sécurité, du quartier général et des services de la logistique, et capables, au besoin, d’évoluer pendant une quarantaine de jours dans des endroits éloignés. Prête à entrer en jeu au Canada si c’était nécessaire, l’équipe DART intervient surtout lorsque des catastrophes surviennent à l’étranger, et elle est organisée pour fonctionner en des endroits du monde où l’infrastructure est quasi inexistante et où la sécurité laisse plutôt à désirer.

Déployé à la BFC Trenton, le matériel peut être expédié rapidement, bien qu’il faille un certain temps pour rassembler tout le personnel requis. Dans le contexte actuel, toutefois, il y aurait peut-être lieu de faire une plus grande place à DART dans l’arsenal dont dispose le gouvernement fédéral pour atténuer les répercussions des catastrophes naturelles et des attaques terroristes au Canada. On pourrait certainement le faire sans réduire les ressources que l’équipe peut mettre à la disposition des pays étrangers. DART pourrait former l’avant-garde de l’intervention fédérale partout au Canada dans l’éventualité d’une catastrophe naturelle ou d’un attentat terroriste grave dès que les autorités locales constateraient qu’elles n’auraient pas les ressources voulues pour faire face à la situation. Or, comme une intervention rapide est cruciale et que d’autres ressources sont disponibles au Canada, il pourrait ne pas être nécessaire que l’équipe DART dépêchée vers une situation de crise survenant au Canada soit aussi nombreuse qu’une équipe expédiée dans un pays en développement. Au Canada, une unité de base composée de spécialistes médicaux et autres et prête à intervenir rapidement pourrait suffire. En conséquence, nous recommandons :

12. Que le gouvernement affecte à l’Équipe d’intervention en cas de catastrophe des Forces canadiennes les ressources voulues afin qu’elle puisse intervenir plus efficacement et plus rapidement en cas d’urgences survenant au Canada sans pour autant réduire les moyens qu’elle affecte au soutien des missions d’aide humanitaire et de secours aux sinistrés menées à l’étranger.

13. Que le ministère de la Défense nationale examine diverses formules, notamment la création au sein de DART d’une unité de base composée de personnel médical et autre qui pourrait intervenir très rapidement au Canada dans l’éventualité de catastrophes naturelles ou d’attentats terroristes graves.

C’est dans l’éventualité d’un attentat terroriste nucléaire, biologique ou chimique (NBC) qu’il importerait tout particulièrement de pouvoir répondre rapidement à une demande d’aide n’importe où au Canada. Comme c’est le cas dans les missions de secours aux sinistrés, les militaires ne sont qu’un des nombreux éléments des ressources disponibles pour atténuer les répercussions d’un attentat NBC. Le ministère du solliciteur général, Santé Canada et les services municipaux et provinciaux de secouristes opérationnels auraient tous un rôle à jouer, surtout si l’attentat prenait des proportions telles qu’il compromettrait gravement la sécurité nationale. En plus des travaux de recherche menés au Centre de recherches pour la défense Suffield et dans d’autres laboratoires sur les mesures défensives à prendre en cas d’attaque NBC, nos militaires ont créé une Équipe d’intervention en cas d’urgence nucléaire, biologique et chimique (EINBC) qui est stationnée à Camp Borden et qui peut fournir les spécialistes et l’aide voulus pour faire face à des attentats NBC. Mais cette équipe est très peu nombreuse et elle emploie tout son temps à aider les militaires chargés, au front ou ailleurs, d’atténuer les incidences d’éventuels attentats NBC. Elle pourrait être dépêchée sur les lieux d’un ou deux attentats pour soutenir le travail des secouristes opérationnels, mais elle serait vite débordée si beaucoup d’attentats étaient commis en même temps à divers endroits au Canada. Même si elle était plus nombreuse, l’équipe ne pourrait pas à elle seule atténuer les répercussions d’un attentat NBC grave.

Elle pourrait cependant apporter une aide inestimable aux secouristes opérationnels civils, qui demeurent notre moyen de défense de première intervention. Les Forces canadiennes pourraient en fait appuyer les secouristes en leur adjoignant les membres de l’Équipe, tandis que le ministère, par l’intermédiaire du BPIEPC, pourrait améliorer les moyens d’intervention des secouristes en leur assurant une formation supplémentaire ou en finançant des programmes de spécialisation. Comme aux États-Unis, des programmes avaient déjà été mis sur pied, avant le 11 septembre, pour mieux former les secouristes opérationnels en prévision d’un attentat NBC, mais il est évident qu’il faudra faire plus à ce chapitre. Même mieux formés, les secouristes pourraient quand même avoir besoin de l’expertise de l’Équipe d’intervention. Il y aurait donc lieu de faire le nécessaire pour qu’elle puisse être dépêchée sur les lieux très rapidement. Ce serait possible en stationnant l’Équipe plus près des moyens de transport. Par exemple, elle pourrait quitter Camp Borden et s’installer à la BFC Trenton de manière à pouvoir partir vers le lieu d’un attentat sans délai; elle pourrait même devenir un élément de DART. Cela dit, comme l’a signalé le chef d’état-major de la Défense, des Équipes d’intervention NBC pourraient être stationnées dans un certain nombre de bases militaires disséminées sur l’ensemble du territoire canadien, ce qui réduirait le délai dans lequel des spécialistes militaires pourraient être dépêchés sur les lieux d’éventuels attentats NBC. En conséquence, nous recommandons :

14. Que le gouvernement affecte plus de ressources au BPIEPC afin qu’il puisse grossir le budget des programmes de formation dans l’utilisation des techniques d’atténuation des incidences des attentats nucléaires, biologiques et chimiques qu’il offre aux secouristes opérationnels municipaux, provinciaux et du secteur privé.

15. Que le gouvernement donne de l’expansion à l’Équipe d’intervention en cas d’urgence nucléaire, biologique et chimique (EINBC) des Forces canadiennes en augmentant son effectif et en stationnant des détachements en divers endroits du Canada afin que les militaires puissent plus rapidement appuyer les secouristes opérationnels dans l’éventualité d’attentats terroristes menés au moyen d’armes de destruction massive.

Comme le besoin de protéger leurs effectifs au front dans l’éventualité d’attentats aux armes NBC préoccupe les Forces canadiennes depuis longtemps, leur personnel a reçu une formation en la matière. Lorsqu’on a annoncé, au début de 2001, l’acquisition de nouveaux vêtements de protection et de capteurs spéciaux à l’intention des unités spécialisées, il était clair que l’on craignait de plus en plus le risque qu’une guerre faisant appel à des armes NBC n’éclate. Mais maintenant, avec la menace terroriste, de telles armes risquent encore plus d’être utilisées dans nos villes et dans d’autres régions du pays. Or, comme le personnel des Forces canadiennes pourrait être déployé au Canada pour aider les autorités civiles à assurer la sécurité des citoyens et soutenir les secouristes opérationnels dans leur travail — comme il l’a fait lorsque la rivière Rouge a provoqué des inondations et lors de la tempête de verglas —, il y aurait lieu de lui donner une formation plus poussée pour le préparer à intervenir dans l’éventualité d’incidents NBC. Dans certaines circonstances, le personnel mobilisé pourrait être composé en partie de réservistes.

En effet, les premiers militaires à arriver sur les lieux d’une catastrophe naturelle ou d’un attentat terroriste pourraient provenir des unités de la Force de réserve qui sont stationnées dans les villes et les régions touchées ou aux environs. Les réservistes ont déjà participé à des opérations de secours à l’occasion de nombreuses catastrophes survenues en divers endroits du pays ainsi qu’à des opérations outre-mer. Ils pourraient contribuer à la lutte anti-terrorisme en gardant divers éléments de l’infrastructure essentielle et en aidant les autorités locales à établir des plans d’intervention dans l’éventualité d’urgences. En cas d’attentat terroriste, ils pourraient contribuer à stabiliser la situation en aidant à maîtriser les foules et, moyennant une formation plus poussée en matière d’attentats NBC, apporter une aide précieuse aux secouristes opérationnels. En participant activement aux opérations de secours et de sécurité organisées immédiatement après un attentat terroriste, les réservistes pourraient non seulement faire profiter les intervenants d’une expérience inestimable, mais aussi encourager d’autres jeunes Canadiens à s’enrôler dans la Réserve et, ainsi, à renforcer son effectif.

Dans le contexte actuel, nous ne pouvons pas nous permettre de négliger le rôle important que la Force de réserve peut jouer dans la lutte au terrorisme. En fait, la Force constitue un élément important des ressources militaires du Canada, et nous avons l’intention de faire une étude plus poussée des responsabilités qui lui sont confiées et de ses besoins dans le cadre de notre étude de l’état de préparation des Forces canadiennes. Pour l’instant, comme la menace terroriste nous oblige à régler rapidement certaines questions, nous recommandons :

16. Que le gouvernement assure au personnel de la Force de réserve et de la Force régulière une formation plus poussée dans la détection des attaques nucléaires, biologiques et chimiques et dans les mesures à prendre pour en atténuer les incidences afin qu’il puisse intervenir en toute sécurité et avec efficacité dans l’éventualité où il serait appelé à aider les autorités civiles au lendemain d’attentats de ce genre.

17. Que le gouvernement procède aussi rapidement que possible à l’acquisition annoncée précédemment, de vêtements de protection et de capteurs spéciaux à l’intention du personnel militaire appelé à intervenir dans l’éventualité d’attentats nucléaires, biologiques ou chimiques et qu’il évalue en toute priorité les besoins en matériel supplémentaire de ce genre.

18. Que le ministère de la Défense nationale augmente les moyens dont la Force de réserve dispose pour secourir les sinistrés et appuyer l’intervention des militaires dans l’éventualité d’attentats terroristes au Canada.

Tôt ou tard, la guerre au terrorisme sera livrée chez nous comme à l’étranger. Il est donc impératif que les Forces canadiennes puissent être déployées rapidement au Canada et outre-mer. La rapidité avec laquelle les événements du 11 septembre se sont succédés a mis en évidence l’importance de pouvoir réagir avec célérité, c’est-à-dire, en fait, quelques heures, voire quelques minutes après un attentat. Le Canada possède déjà, dans la Force opérationnelle interarmées 2 (FOI 2), stationnée près d’Ottawa, un moyen d’intervention militaire rapide en cas d’attentat terroriste qui a été avant tout conçu dans l’éventualité où des prises d’otages et des actes terroristes de ce genre seraient commis au Canada. La menace terroriste fait que non seulement cette unité devrait-elle maintenir son degré de formation, mais qu’il y aurait lieu d’augmenter considérablement son effectif. FOI 2 serait ainsi plus en mesure d’intervenir dans l’éventualité d’incidents, tant au Canada qu’à l’étranger, et de contribuer aux missions internationales visant à détruire les moyens grâce auxquels les terroristes peuvent perpétrer leurs attentats. À long terme, il pourrait également émerger de FOI 2 une force spéciale qui pourrait s’ajouter aux moyens dont disposent les Forces canadiennes pour assurer la sécurité nationale et internationale. C’est une possibilité à étudier soigneusement. Dans l’intervalle, il faudra agir rapidement pour mettre à profit l’expertise et les ressources actuelles de FOI 2. Aussi recommandons-nous :

19. Que le gouvernement augmente considérablement — peut-être à plus de 1 000 membres — l’effectif de la Force opérationnelle interarmées 2 afin qu’elle soit encore plus en mesure d’intervenir dans les prises d’otages et d’autres attentats terroristes qui pourraient survenir au Canada et de maintenir son interopérabilité avec des forces alliées semblables en cas de déploiement à l’étranger et contribuer de façon significative aux opérations internationales anti-terrorisme menées.

Enfin, le présent rapport provisoire porte surtout sur la nécessité de grossir les rangs des Forces canadiennes afin qu’elles puissent plus efficacement faire échec à la menace terroriste qui s’est manifestée le 11 septembre dernier. Or, les efforts importants qu’elles et le ministère de la Défense nationale déploient depuis pour protéger le Canada et contribuer au maintien de la paix internationale sont le meilleur argument en faveur d’une augmentation des budgets et des moyens des Forces et du ministère. En effet, des appareils de transport militaire ont porté des fournitures dans diverses villes du pays qui, soudainement, ont dû accueillir des milliers de passagers aériens inattendus, tandis que les CF-18 et ceux qui les pilotent, les entretiennent et les guident participaient à la surveillance de l’espace aérien nord-américain dans les rangs du NORAD. Pendant ce temps, les équipages d’un certain nombre de navires de guerre canadiens et d’autres militaires ont été déployés pour appuyer les missions internationales visant à extirper le terrorisme à sa source. Les Casques bleus canadiens en mission en Bosnie et ailleurs dans le monde contribuent activement au maintien de la paix dans le monde. Le Canada s’acquittait déjà de nombreux engagements militaires avant le 11 septembre, mais maintenant, les Forces canadiennes et le ministère de la Défense nationale portent un fardeau encore plus lourd. Il est donc essentiel de faire en sorte que les militaires du Canada disposent d’assez de ressources non seulement pour maintenir leur capacité actuelle, mais aussi pour se doter des nouveaux moyens dont ils ont besoin pour contrer la menace terroriste.