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FINA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON FINANCE

COMITÉ PERMANENT DES FINANCES

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mercredi 6 juin 2001

• 1539

[Traduction]

Le président (M. Maurizio Bevilacqua (Vaughan—King—Aurora, Lib.)): Je déclare la séance ouverte et je souhaite la bienvenue à tout le monde.

Nous avons le plaisir de tenir cet après-midi une autre table ronde sur l'économie, et cette fois c'est avec les leaders syndicaux. En fait, le Comité des finances a décidé de faire venir des gens pour pouvoir se faire une idée de la situation de l'économie et avoir un aperçu général de l'économie canadienne, selon votre propre point de vue et celui de vos organisations.

Nous avons le plaisir d'accueillir des représentants de la Confédération des syndicats nationaux, du Syndicat des travailleurs unis de l'automobile, du Congrès du Travail du Canada, de l'Alliance de la fonction publique du Canada, de la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec et de la Fédération canadienne des syndicats d'infirmiers et d'infirmières.

• 1540

Beaucoup d'entre vous avez déjà témoigné devant le comité, alors vous savez comment nous fonctionnons. Vous avez de cinq à sept minutes pour faire votre présentation, après quoi nous vous poserons des questions.

[Français]

Oui, monsieur Loubier.

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe—Bagot, BQ): Je fais rappel au Règlement, monsieur le président.

Est-ce parce que la députation libérale ne s'intéresse pas à toute la question de l'assurance-emploi et à toutes les questions qui concernent les citoyens et citoyennes qu'on a de la misère à avoir plus qu'une députée libérale de l'autre côté de la table, alors qu'on est cinq députés de l'opposition? Il y a un problème d'assiduité et d'intérêt. Est-ce parce qu'ils ont peur d'être mis en contradiction avec les positions énoncées dans le rapport du Comité du développement des ressources humaines sur l'assurance-emploi? Est-ce que c'est ça, le problème qu'on a aujourd'hui? Je déplore le fait qu'il y ait seulement une députée libérale. Ça n'a aucun sens.

Vous pouvez continuer, monsieur le président. Je ne sais pas s'il y a moyen de remédier à cela, mais je trouve ça scandaleux.

[Traduction]

Le président: D'autres députés vont probablement venir plus tard. En tant que président du comité, j'ai tendance à ne faire aucun commentaire sur la présence ou l'absence de députés, tout simplement parce que c'est ainsi que le veut le protocole. Cependant, je m'intéresse beaucoup à ce que vous avez à dire, parce que c'est la raison pour laquelle j'ai convoqué cette réunion. Je pense que la perspective des syndicats est extrêmement importante pour l'économie du Canada. Je préférerais que nous poursuivions selon le programme établi, si on peut dire ainsi, et que nous écoutions ce qu'ont à nous dire les membres du panel sur leurs principaux problèmes. Je suppose que votre intervention était plus un commentaire qu'une question.

Nous commencerons avec le président de la Confédération des syndicats nationaux, M. Marc Laviolette.

[Français]

M. Marc Laviolette (président, Confédération des syndicats nationaux): Merci, monsieur le président.

La CSN croit que la récente Mise à jour économique confirme une fois de plus que le gouvernement libéral n'a jamais eu vraiment l'intention de consacrer 50 p. 100 des surplus budgétaires aux dépenses de programmes.

En effet, la Mise à jour économique du 17 mai nous apprend que le remboursement de la dette sera au minimum de 15 milliards de dollars, alors que l'objectif, dans le budget du 18 octobre, était de 10 milliards de dollars. C'est donc le remboursement de la dette, et non pas les dépenses de programme, qui s'approprie 50 p. 100 des marges de manoeuvre disponibles en 2000-2001. La réduction du fardeau fiscal, avec 7,7 milliards de dollars, et l'augmentation des dépenses de programmes, avec quelque 7 milliards de dollars, se partagent à parts quasi égales le reste de la marge de manoeuvre.

Pour la CSN, l'effort de remboursement de la dette est disproportionné compte tenu des besoins de la population en matière de services publics, de programmes sociaux et d'investissements en infrastructure.

La CSN s'oppose à ce qu'une part trop importante des surplus budgétaires serve à rembourser la dette tant que le gouvernement fédéral n'assumera pas une part équitable du financement des programmes sociaux provinciaux—santé, éducation postsecondaire et aide sociale—et que le financement de l'assurance-emploi n'aura pas été restauré.

Au niveau des dépenses de programmes, on constate que, malgré les réinvestissements des derniers budgets, ces dépenses de programmes ne représentent plus que 11,4 p. 100 du PIB en 2000-2001 comparativement à 16 p. 100 en 1990-1991, soit 10 ans plus tôt. Et même après l'entente fédérale-provinciale de septembre 2000, qui est venue rehausser le Transfert social canadien, le financement fédéral demeure quelque peu inférieur à ce qu'il était en 1994-1995.

Pour ce qui est du Québec, Ottawa ne finance actuellement que 14 p. 100 des programmes et services sociaux, alors que sa part s'élevait à 19 p. 100 en 1994-1995. Cet écart représente un manque à gagner de 1,2 milliard de dollars pour 2001-2002.

Pour ce qui est des dépenses fédérales structurantes, la CSN se demande quand Ottawa rétablira, au Québec, sa juste part des dépenses par rapport à la population. Entre autres, je rappelle que 20 p. 100 des dépenses de recherche et développement, 21,5 p. 100 des dépenses en biens et services et 16,5 p. 100 des transferts aux entreprises vont au Québec.

• 1545

En ce qui a trait à l'assurance-emploi, il est évident depuis plusieurs années qu'avec les surplus générés par la caisse d'assurance-emploi, on assiste à un détournement de fonds, qui est d'ailleurs dénoncé par la CSN depuis plusieurs années. Nous contestons devant les tribunaux la légalité de l'utilisation et de l'affectation des surplus du compte d'assurance-emploi.

Développement des ressources humaines Canada prévoyait un surplus accumulé de 34,6 milliards de dollars au 31 mars 2001, niveau qui dépasse largement la réserve de 10 à 15 milliards de dollars qui serait nécessaire pour assurer la stabilité des taux de cotisation sur le cycle économique. D'ailleurs, le vérificateur général du Canada disait récemment qu'il lui serait très difficile de conclure que l'esprit de la Loi sur l'assurance-emploi est respecté.

La CSN exige une augmentation du taux de couverture, une augmentation du taux de remplacement du salaire et une augmentation de la durée des prestations. C'est pourquoi on souhaite que l'équilibre entre les revenus et les dépenses du régime d'assurance-emploi soit retrouvé progressivement en ramenant les dépenses au niveau des revenus actuels du régime, et non pas en utilisant une politique de droite qui consiste à ramener les revenus au niveau des dépenses, quand on sait qu'il y a eu des coupures majeures dans ce programme.

Pour la CSN, le gouvernement doit donc cesser de fragiliser les travailleurs dans le but d'augmenter la flexibilité du marché du travail et il doit cesser de détourner les surplus de la caisse d'assurance-emploi pour financer d'autres politiques.

Dans un dossier connexe à celui de l'assurance-emploi, on déplore que le gouvernement libéral ait choisi de s'opposer à la volonté du gouvernement du Québec de mettre sur pied son propre régime d'assurance parentale, d'autant plus que la Loi sur l'assurance-emploi prévoit la possibilité d'un tel transfert. Je tiens à vous rappeler que l'Assemblée nationale vient d'adopter à l'unanimité cette loi qui institue le régime d'assurance parentale québécois. Il fait consensus au Québec que les congés parentaux doivent être gérés en dehors du programme d'assurance-emploi.

Ce programme québécois prévoit, entre autres, un taux de remplacement du salaire de 75 p. 100 pour 43 semaines de congé lors de la naissance d'un enfant et donne une couverture aux travailleuses et travailleurs autonomes. Pour les Québécois et les Québécoises, c'est un régime qui est supérieur à ce qui est offert présentement dans le programme d'assurance-emploi fédéral.

Pour ce qui est de la réduction du fardeau fiscal, pour la CSN, le rôle premier de l'État demeure le financement et la mise en oeuvre de services publics et de programmes sociaux accessibles et de qualité. Une fois cet objectif fondamental atteint, les marges de manoeuvre résiduelles pourront être employées au financement d'autres objectifs.

D'ailleurs, pour ce qui est des réductions au niveau de l'impôt, le régime qui a été adopté est assez régressif. Le tiers des contribuables ayant les revenus les plus faibles n'obtient que 4 p. 100 des économies d'impôt, le deuxième tiers des contribuables obtient 13 p. 100 des économies d'impôt, et le tiers des contribuables les plus riches obtient 83 p. 100 des économies d'impôt.

En choisissant de réduire le fardeau fiscal des particuliers en diminuant l'importance du seul impôt progressif, alors qu'il aurait pu choisir de réduire la TPS, le gouvernement vient de facto réduire la progressivité globale du système fiscal.

En plus, la CSN conçoit difficilement que la réduction des cotisations à l'assurance-emploi puisse être un gain pour les contribuables. Cette réduction de cotisations fera plutôt qu'il sera impossible de revenir à un régime beaucoup plus généreux après coup.

Je vous remercie.

[Traduction]

Le président: Je vous remercie, monsieur Laviolette.

Nous laissons maintenant la parole au Syndicat des travailleurs unis de l'automobile, qui est représenté par Bill Murnigham.

M. Bill Murnigham (représentant national, Service de recherche, Syndicat des travailleurs unis de l'automobile): Je vous remercie, monsieur le président. Merci de nous avoir invités ici aujourd'hui à présenter notre point de vue dans le cadre des importants travaux que réalise ce comité. Malheureusement, le président de notre syndicat, Buzz Hargrove, ne pouvait être ici aujourd'hui, et il vous fait ses excuses.

Le comité nous a fait parvenir des questions assez vastes. Comme nous n'avons que quelques minutes, je ne ferai que toucher à quelques aspects, particulièrement à ce dont vous avez parlé, monsieur Bevilacqua, en faisant le point sur ce qui se passe et le contexte de notre secteur de l'économie.

À l'instar de bon nombre de syndicats d'aujourd'hui, nous avons des activités de plus en plus diversifiées. Le TCA, qui compte un quart de million de membres, représente des travailleurs de l'industrie automobile, des employés de restaurants minute, des mineurs, des travailleurs du commerce de détail, de l'aérospatiale, de la construction navale, des compagnies aériennes et bien d'autres encore.

• 1550

C'est pourquoi il est très difficile de vous décrire en quelques mots la situation de tout ce monde. Au lieu de cela, j'ai pensé saisir cette occasion de faire quelques commentaires sur l'industrie automobile, ayant jugé cela opportun étant donné les événements dramatiques qui ont eu lieu depuis six mois, puis de terminer avec des observations plus générales.

Pour rafraîchir les mémoires, l'industrie automobile n'est pas seulement le noyau de notre syndicat, mais c'est aussi un élément crucial de notre économie, et puisque nous examinons le contexte financier du pays, nous devrions porter attention à ce secteur. Il représente 185 000 emplois directs dans la fabrication et des retombées phénoménales—on estime qu'en Ontario, un emploi sur six est créé par l'industrie automobile, et un sur onze au Canada. Ce secteur génère 17 milliards de dollars d'excédent commercial du pays. L'intégralité de l'excédent commercial de marchandises du pays repose sur l'industrie automobile, et ses liens dans toute l'économie sont absolument critiques, puisqu'elle est consommatrice de métaux, de caoutchouc, de plastiques, de produits chimiques, etc., sans parler des dépenses de consommation qu'elle génère. De fait, l'Ontario est sur le point d'arracher au Michigan le titre de plus grand producteur d'automobile de l'Amérique du Nord—ce n'est pas encore arrivé. Je pense tout de même qu'il est inutile de chercher à vous convaincre que l'industrie automobile est importante pour l'économie du Canada.

C'est toute une coïncidence que le comité nous demande ce qui a changé depuis octobre dernier. C'était précisément à ce moment que la situation a commencé à s'éclaircir, alors que le ralentissement des dépenses des consommateurs a atteint l'économie américaine. Ceux qui ont une boule de cristal peuvent peut-être mieux expliquer que moi ce qui est arrivé, une combinaison de mauvais climat sur les marchés avec la baisse de la dépense des consommateurs, peut-être trop de hausses des taux d'intérêt plus tôt dans l'année, ou peut-être une simple surcharge dans une économie de plus en plus spéculative au sud de nos frontières. Il y a donc beaucoup de facteurs en jeu, mais l'industrie automobile, comme bien d'autres, s'est retrouvée avec des stocks excédentaires et des systèmes qui produisaient trop de véhicules. Comme c'est une industrie où il y avait eu des ventes record année après année, une demande jamais assouvie, il lui a été difficile de réagir, et de réagir vite; c'est un peu comme d'essayer de faire faire un virage très serré à un énorme navire.

Pour ce qui est arrivé aux grands acteurs de l'industrie automobile du Canada, General Motors et Ford ont adopté une approche du style «on laisse venir» pour composer avec la situation. Cependant, DaimlerChrysler, pour diverses raisons, a entrepris une refonte complète de sa structure de vente en gros. Il en a résulté dans toute l'industrie des pertes fiscales à court terme, très nettement, et des compressions d'effectifs dans de nombreux secteurs. Plus de 1 500 personnes ont perdu leur emploi à cause de l'élimination d'un simple quart de travail à l'usine de Bramalea. De plus, des milliers d'autres personnes sont en train de perdre leur emploi dans tout le secteur de l'assemblage automobile. Nous voulons souligner avec fierté notre fiche de rendement. En tant que leur syndicat, nous avons négocié d'excellentes mesures pour minimiser l'impact de ces pertes d'emploi au moyen de la retraite anticipée, et je ne peux assez insister que ces emplois ont en fait disparu de l'économie, qu'il y ait ou non autant de mises à pied au bout du compte. Nous avons constaté des effets similaires dans tout le secteur des pièces d'auto.

Comme le temps manque, nous ne dirons pas en détail ce qui est arrivé dans chaque secteur de l'industrie automobile, et nous nous concentrerons sur la situation actuelle.

L'on s'attendait à une baisse d'environ 10 p. 100 des ventes d'automobiles cette année. Pour l'instant, l'économie se tient beaucoup mieux qu'en janvier et février, et les ventes ont chuté d'environ 7 p. 100 aux États-Unis et de moins au Canada. Même avec cette chute de 10 p. 100 des ventes d'automobiles, on est encore en bonne position pour avoir des ventes record pour une troisième année consécutive. Mais comme nous le voyons de plus en plus dans notre économie, les contradictions de notre époque font que ce qui peut sembler une période faste est ponctuée de facteurs sous-jacents qui laissent entrevoir des difficultés à long terme pour l'industrie. En deux mots, il y a eu un grand mouvement dans la dynamique de l'industrie depuis cinq ans sur plusieurs fronts, et cela aura des répercussions à un moment donné.

Permettez-moi de parler de quelques facteurs. Tout d'abord, il y a la capacité excédentaire mondiale. L'industrie automobile du monde entier est maintenant équipée pour produire 77 millions de véhicules, mais elle n'en vend que 54 millions. Ceci crée un excès de compétition dans l'industrie et pousse de nombreuses compagnies à rechercher les fusions et les alliances pour modifier l'ensemble de la structure d'entreprise. Quelqu'un qui aurait dit, en examinant l'industrie automobile il y a cinq ans, que nous serions dans la situation où nous nous trouvons aujourd'hui, où la moitié de la production d'automobile japonaise est sous contrôle étranger, où l'un des plus grands fabricants américains de l'industrie, Chrysler, est contrôlé par Stuttgart et où les marques européennes trouvent vite preneurs, serait passé pour fou. Et pourtant, c'est exactement ce qui se passe de nos jours.

Plus près de nous, la question du commerce se trouve encore à l'avant-plan de nos préoccupations. Selon les chiffres, le Canada, au moment même où nous parlons, se fait cibler pour les excédents d'importation. Dans un marché en déclin, les ventes d'automobiles importées sont en hausse de 11 p. 100, comparativement à seulement 3 p. 100 aux États-Unis. Là encore, on ne peut que se demander pourquoi des marchés aussi semblables l'un à l'autre peuvent avoir des résultats aussi différents. Je pense que nous comprenons que les États-Unis ont une présence beaucoup plus ferme sur la scène internationale et peut freiner les importations, alors que le Canada ne le peut pas.

• 1555

Cette situation est favorisée par la faiblesse du marché en Asie et dans la Communauté européenne. Fait important, le dollar américain, et même le dollar canadien y sont actuellement forts, ce qui entraîne une incroyable concurrence des prix. Le dollar américain a gagné du terrain sur l'euro, le yen et la devise de la Corée du Sud, ce qui est incroyable.

De nos jours, la part du marché du Canada et des États-Unis qu'occupent les trois grands véhicules produits au pays s'est réduite d'environ 6 p. 100 par rapport à ces dix dernières années, et elle continue de chuter. C'est l'équivalent d'environ 1,1 million de véhicules, ou de près de 6 manufactures de voiture. Nous sommes confrontés aussi, plus près de nous, à l'évolution de l'industrie automobile du Mexique—une évolution phénoménale. Elle a presque atteint l'envergure de l'industrie canadienne aujourd'hui. En avril dernier seulement, le Mexique a pris au Canada son titre de plus grand exportateur de pièces d'automobile aux États-Unis.

C'est dans le contexte de tous ces changements incroyables que nous nous retrouvons maintenant sans règles de commerce ou politique industrielle axées sur l'industrie automobile. Une décision de l'OMC a éliminé l'accord concernant les produits de l'industrie automobile et nous vivons désormais dans un environnement sans règles, avec tous ces changements qui surviennent.

Il serait possible que nous en venions à afficher des ventes fantastiques une année après l'autre tout en produisant de moins en moins au Canada. Il est donc crucial de trouver des moyens de soutenir l'industrie et de réglementer le commerce. Il n'y a pas de crise pour l'instant, mais il n'empêche que la situation actuelle peut en laisser prévoir une.

Bien qu'il y ait des périls à l'horizon, il y a aussi des débouchés. Le Canada a toujours une excellente fiche de rendement et une très bonne position d'investissement automobile, aux plans de la qualité, de la production et des compétences; il affiche une productivité supérieure à celle des États-Unis; et il a une main-d'oeuvre très compétente. Cependant, au bout du compte, je pense que nous allons devoir investir plus dans les industries de base et dans l'innovation—ce dont le gouvernement se plaît à parler assez régulièrement.

Il est intéressant, dans la conjoncture actuelle, que les investissements passés dans l'industrie aient été axés uniquement sur des choses comme la haute technologie—la soi-disant nouvelle économie. Avec la chute d'environ 200 p. 100 de l'indice NASDAQ comparativement au sommet atteint, peut-être le gouvernement et d'autres organes pourraient-ils examiner de plus près l'ancienne économie, dans les domaines qui emploient de grands nombres de Canadiens et qui sont le fer de lance de notre économie.

En ce qui concerne le rendement du gouvernement, je ne peux que répéter ce qui a déjà été dit, soit qu'il ne semble pas accorder de priorité à l'investissement. Investir, ce n'est sûrement pas consacrer chaque sou à la réduction de la dette et aux baisses d'impôt. Depuis que le budget a pu être équilibré en 1997, le gouvernement a accumulé d'énormes excédents, au détriment du fonds de l'assurance-emploi, en sacrifiant près de 80 p. 100 de son excédent budgétaire à la réduction de la dette et en faisant cadeau des 20 p. 100 restant aux riches, sous forme de crédits fiscaux. Comme l'a dit un collègue, le plan de moitié-moitié qui avait été prévu semble avoir rapidement été jeté aux orties.

L'idée de se concentrer sur la réduction de la dette, à une époque où la dette n'est de 53 p. 100 du produit intérieur brut annuel, semble un peu déplacée. Pour vous donner une petite idée de ce que cela voudrait dire, c'est que chaque Canadien moyen qui a un emploi permanent n'aurait une hypothèque que de 19 000 $. Alors, si vous ne pensez qu'à réduire la dette avec ce genre de fardeau fiscal, cela ne pourra rester la plus grande priorité tandis que nous progresserons, en matière d'investissement.

Pour terminer, nous devons trouver des moyens d'investir dans notre centre de croissance, d'innovation et d'excellence dans des domaines comme l'automobile, l'aérospatiale et, secteur crucial actuellement, la construction navale. Une initiative a été présentée à un groupe de travail du gouvernement pour soutenir cette industrie de façon innovatrice. Il y a aussi le développement des compétences. Le gouvernement doit actuellement s'efforcer de mettre l'épaule à la roue de l'économie, parce que ce ne seront pas les forces mondiales qui veilleront à assurer un contexte favorable pour tous les Canadiens.

Pour terminer, vous avez posé une question sur les répercussions à long terme et les problèmes que nous aurons d'ici une dizaine d'années. J'aimerais dire quelques mots sur une étude qui a été diffusée il y a quelques semaines seulement, de Statistique Canada, sur la fortune totale au pays. C'est la première fois qu'une telle étude est faite depuis 1984. Elle révèle que 10 p. 100 des Canadiens possèdent 53 p. 100 de la fortune de ce pays, alors que la moitié inférieure n'en possède que 6 p. 100.

Cette inégalité croissante est révélatrice de la nécessité d'investir selon un autre angle: il faut investir dans la reconstruction de nos programmes sociaux, de santé, l'éducation, de construction domiciliaire et dans l'industrie.

Lorsque, dans de nombreuses années, l'on examinera l'histoire de la période actuelle, il apparaîtra très clairement que nous vivons une époque déterminante où se décide si nous allons renoncer à de nombreux objectifs qui ont fait l'unicité du Canada, ou encore revigorer et reconstruire notre économie pour l'avenir.

Je vous remercie beaucoup.

• 1600

Le président: Merci beaucoup, monsieur Murnigham.

Nous allons maintenant entendre le représentant du Congrès canadien du travail, M. Ken Georgetti.

M. Ken Georgetti (président, Congrès canadien du travail): Merci.

Monsieur le président, membres du Comité permanent des finances, je tiens à commencer par vous remercier de cette opportunité que vous nous donnez de présenter le point de vue de 2,5 millions de travailleurs membres du Congrès canadien du travail sur les perspectives économiques à court et à moyen terme pour nos membres.

Je tiens aussi à dire combien je suis heureux que des représentants des syndicats affiliés du Congrès canadien du travail soient ici pour parler de la situation économique de leurs secteurs respectifs. Comme vous l'avez demandé, je vais présenter certaines recommandations qui reflètent mes préoccupations sur l'état actuel et futur de l'économie.

Ma recommandation centrale est que le plus important changement qui soit nécessaire est un changement complet de la manière dont le gouvernement et le Parlement prennent des décisions sur les travailleurs et leurs familles. Les travailleurs, et un niveau de vie supérieur pour les travailleurs et leurs familles, doivent être au centre de toute prise de décision d'ordre économique, et il vous incombe de vous en assurer. Cela signifie que lorsqu'une politique est formulée et débattue, la question qui se pose devrait être «Comment cela peut-il profiter aux Canadiens?»

Les familles de travailleurs que représentent nos syndicats ne peuvent appuyer un plan économique ou fiscal à moins qu'il offre des espoirs d'améliorer le niveau de vie de tous les Canadiens. Mais avant de passer directement à cette recommandation et à la situation actuelle et future de l'économie, il importe de situer en quelques mots le contexte de mes commentaires.

La croissance économique, tout au long des années 90, a été plus lente que pendant toute autre décennie depuis les années 30. Les années 90 ont été aussi la deuxième décennie consécutive où les salaires moyens n'ont pas augmenté du tout comparativement à l'inflation. Les salaires n'ont même pas connu une croissance parallèle aux modestes gains de productivité observés pendant cette décennie. En même temps, la croissance globale de notre économie a été faible. Le tableau d'ensemble de ce qui se passe dans l'économie, pour les travailleurs, est donc le suivant—et c'est ainsi que nous avons vécu: l'inégalité entre le revenu gagné et le revenu total s'est accrue; l'emploi est devenu plus précaire, plus intense et plus stressant; les compressions successives à l'assurance-emploi et à l'aide sociale ont réduit le niveau de protection contre les effets perturbateurs des changements économiques et des industries saisonnières, tant pour le travailleur individuel que, encore pire, pour l'économie dans son ensemble.

Il convient de noter, aussi, que le programme fédéral de dépense représente maintenant une part plus mince du revenu national qu'à aucun autre moment depuis la Deuxième Guerre mondiale. Malheureusement, les difficultés qu'ont connu les travailleurs canadiens semblent avoir aussi été le lot de citoyens d'autres pays, souvent sous une forme plus extrême. Cependant, les perspectives sans motif de politique, à court et à moyen terme, ne sont pas encourageantes pour les gens que nous représentons.

À court terme, l'on attend de l'économie canadienne qu'elle affiche une croissance lente dans les quelques mois à venir. L'on pense, et l'on espère, que la croissance atteigne son sommet vers la fin de l'année 2001. Cependant, le rythme de croissance le plus rapide que l'on puisse espérer est bien inférieur à celui des décennies qui ont suivi la Deuxième Guerre mondiale. On ne sait pas vraiment si elle sera assez vigoureuse pour faire baisser le taux de chômage à un niveau que nous pourrions considérer raisonnable actuellement, dans notre économie.

Pour que les travailleurs canadiens puissent espérer une amélioration réelle du niveau de vie à court et à long terme, il faut un changement radical dans l'orientation de la politique économique de ce gouvernement. Comme je l'ai dit plus tôt, le changement le plus important qui soit nécessaire est d'ordre plus philosophique que, en réalité, un changement de politique ou de programme.

Le relèvement du niveau de vie des travailleurs doit être replacé au centre de la prise de décision économique. Lorsque je parle des travailleurs, je veux parler de tous les travailleurs, y compris ceux qui, dans le passé, ont été marginalisés.

Ces dernières années, l'exercice de politique économique du gouvernement n'a certainement pas visé le relèvement du niveau de vie des travailleurs. Au contraire, il nous semble que les milieux d'affaires et le gouvernement ont considéré cette question comme étant une menace à la compétitivité ou à la stabilité des prix.

À un niveau un peu moins général, il faut une volonté de reconstruire notre secteur public auquel les exercices de resserrement budgétaire des dernières années ont beaucoup nui. Plusieurs parties du secteur public méritent une attention particulière—et je pourrais ajouter, en aparté, qu'elles méritent la même augmentation salariale que vous allez vous voter d'ici quelques jours; bien sûr, je m'écarte du sujet.

Au sujet des soins de santé, le gouvernement fédéral doit avoir la volonté d'investir suffisamment de fonds dans l'actuel régime d'assurance-maladie afin d'en garantir l'universalité nationale; d'étendre la couverture du régime d'assurance-maladie aux produits pharmaceutiques et aux soins à domicile et, je pourrais ajouter, de continuer à se servir du régime d'assurance-maladie comme l'un des principaux avantages concurrentiels dont jouit l'industrie canadienne d'aujourd'hui.

• 1605

Au chapitre de l'assurance-emploi, les prestations AE doivent être rétablies et modernisées, non seulement parce que les récentes restrictions ont été trop difficiles à supporter pour les personnes irréprochables qui doivent subvenir à leurs besoins en période de chômage, alors qu'elles travaillent fort pour les industries saisonnières de notre pays—ce que j'appellerais l'économie normale, non l'ancienne économie—mais aussi parce que l'économie de notre pays est maintenant beaucoup plus vulnérable aux ralentissements économiques.

La formation est l'élément le plus important qui soit. Diverses forces, y compris le changement technologique et, fait important, le vieillissement de la main-d'oeuvre, accentuent l'importance de la formation à un moment où le gouvernement fédéral restreint ses engagements financiers ainsi qu'une partie de son pouvoir législatif en matière de formation en milieu de travail. Diverses considérations, y compris l'équité entre générations, parlent en faveur de dépenses d'infrastructures publiques et d'initiatives environnementales également.

Permettez-moi de passer au moyen et au long termes. Le vieillissement démographique qui est largement reconnu et dont enfin tout le monde prend conscience, sera accompagné d'un déclin de la croissance de la population qui arrivera pratiquement à zéro. Par conséquent, seules les augmentations de productivité pourront favoriser quasiment toute la croissance économique. Il sera donc également important de permettre à tous les Canadiens qui veulent travailler de travailler le plus facilement possible et, plus important, de transmettre aux Canadiens les compétences et les connaissances technologiques qui s'imposent.

Nous savons maintenant que nous aurons besoin au Canada d'un million d'apprentis formés uniquement dans les métiers de la construction au cours des dix prochaines années. Je suis sûr que Kathleen Connors va vous parler de la pénurie d'infirmières et d'infirmiers dans notre pays et ailleurs. Autrement dit, il faut élargir l'accès aux études postsecondaires, aux investissements dans le domaine de la recherche, à la garde des enfants, aux programmes visant à faciliter l'intégration économique des immigrants et aux programmes visant à augmenter la participation des Autochtones et des personnes handicapées au monde du travail.

Enfin, en raison de l'intégration du monde moderne dans lequel nous vivons et commerçons actuellement, il est impératif que le Canada s'efforce de réduire l'écart entre pays pauvres et pays riches, augmente l'aide au développement à l'étranger et favorise l'allégement de la dette; il doit ainsi montrer l'exemple.

Par ailleurs—c'est important—le Canada doit faire tout ce qu'il peut pour favoriser l'appui international à la déclaration OIT des principes et des droits fondamentaux dans le domaine du travail. À tout le moins, il faudrait donner aux travailleurs du Tiers monde la possibilité de s'extraire de la pauvreté et de l'appauvrissement et de créer un marché où nous pourrions vendre nos produits.

Je vous remercie encore une fois de me donner la possibilité de comparaître devant vous aujourd'hui. J'espère que vous ne vous enliserez pas dans des détails et que vous ne perdrez pas de vue l'essentiel. Il n'y a aucune raison que les gens que je représente dans notre pays se voient imposer un plan économique et financier qui ne leur offre pas la possibilité de relever leur niveau de vie. C'est très simple. Le relèvement du niveau de vie des travailleurs doit être replacé au centre du programme de la politique économique et je vous garantis alors, sans équivoque, que l'économie se stimulera immédiatement d'elle-même.

Merci.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Georgetti.

Nous allons maintenant entendre Mme Nycole Turmel, présidente nationale de l'Alliance de la fonction publique du Canada.

Nous vous souhaitons la bienvenue.

[Français]

Mme Nycole Turmel (présidente nationale, Alliance de la Fonction publique du Canada): Merci. Je tiens tout d'abord à remercier le Comité des finances de nous avoir invités à participer à cette table ronde sur l'économie.

Les députés sont sur le point de se voter une augmentation salariale importante de 20 p. 100 dans le cas des députés d'arrière-ban. Cette augmentation suit de près un vote de la Chambre des communes visant à augmenter de 11,2 p. 100 les salaires des juges fédéraux et une décision du gouvernement d'augmenter de 8,7 p. 100 la rémunération des cadres de direction du secteur public.

Dans ces trois cas, le gouvernement et diverses commissions ont fait valoir que les augmentations étaient nécessaires, compte tenu d'un gel salarial imposé par la loi, de la hausse du coût de la vie et des comparaisons avec le marché.

L'élément qui est passé sous silence dans l'analyse faite par le gouvernement, c'est la reconnaissance du fait que ces mêmes conditions s'appliquent à tous les travailleurs et travailleuses du secteur public fédéral. Les Canadiens et Canadiennes n'ont pas oublié cet élément. Dans des sondages informels tenus par les grands journaux et dans des émissions téléphoniques, on entend constamment le refrain: «Qu'en est-il des salariés ordinaires?» Bref, les Canadiens et Canadiennes se demandent pourquoi il y a deux poids, deux mesures.

Pourquoi l'élite du gouvernement devrait-elle recevoir des augmentations salariales importantes, alors que les travailleurs et travailleuses ordinaires sont tenus de force en deçà de l'inflation et de ce qui est négocié ailleurs dans l'économie? Je dis bien de force, parce que le gouvernement a fixé un mandat de négociation de 2 à 2,25 p. 100 et il semble prêt, encore une fois, à l'appliquer au moyen d'une loi.

• 1610

[Traduction]

Je viens vous dire aujourd'hui que les 120 000 membres de l'AFPC, qui travaillent directement pour le compte du gouvernement fédéral et de l'Agence des douanes et du Revenu du Canada, ne sont pas disposés à accepter des augmentations salariales qui se conforment au mandat inadéquat et rigide du gouvernement. Les deux groupes ont voté en faveur de la grève et, comme nous l'avons signalé dans le Hill Times de cette semaine, «Mettez fin à cette injustice ou on se voit en septembre!»

Contrairement à 1991 et à 1999, où nos membres sont rentrés au travail après que la loi eut mis fin à leur grève, rien ne garantit que nous allons respecter une législation semblable cette année. C'est une question de respect. Nous reconnaissons que le gouvernement amorce chaque ronde successive de négociations avec un mandat insuffisant et l'assurance que sa puissance législative prédominera. C'est maintenant chose du passé.

Tous les parlementaires savent, comme moi, que la situation financière du gouvernement fédéral s'est améliorée radicalement au cours des 10 dernières années. Alors que, en 1991, notre grève s'était déroulée dans le contexte de déficits annuels de 40 milliards de dollars, une grève, en ce dixième anniversaire de cette grève historique, aura comme toile de fond des surplus annuels considérables.

Ainsi, par exemple, une augmentation de l'offre salariale du gouvernement, de 2 p. 100 à 5 p. 100 pour les 120 000 membres de l'AFPC employés par le gouvernement fédéral et l'ADRC, coûterait environ 144 millions de dollars, soit moins de 1 p. 100 du surplus prévu pour l'exercice 2000-2001.

Compte tenu d'un surplus évalué à 15 milliards de dollars pour 2000-2001, et de surplus futurs évalués à 6,5 ou 7 milliards de dollars au cours des deux prochaines années, le gouvernement peut facilement offrir à ses travailleurs des augmentations salariales qui rétabliraient une partie, sinon la totalité, du pouvoir d'achat perdu à cause de l'inflation au cours des 10 dernières années.

Le gouvernement a donc des choix: il peut décider de financer les soins de santé, la garde des enfants et les infrastructures sociales pour les Canadiens; il peut aussi réduire les impôts. Il peut décider de favoriser la réaffectation préventive des femmes enceintes ou mettre leur santé en danger. Un de ces choix, c'est la manière dont il paie ses travailleurs. Je vous exhorte, au nom de nos membres, qui offrent des services indispensables à tous les Canadiens, de faire le bon choix, de changer le mandat du gouvernement et d'accorder aux travailleurs du secteur public fédéral des augmentations qui correspondent à l'état actuel des finances du gouvernement, au taux d'inflation courant et aux règlements salariaux dans d'autres secteurs de l'économie.

[Français]

Avant que je termine, permettez-moi de commenter brièvement sur le plus long terme et sur votre question: «Les institutions ont-elles besoin d'une réforme significative?» Les membres du Comité des finances et, je soupçonne, tous les députés n'ignorent pas que le gouvernement entreprend un examen des pratiques d'emploi et des lois du travail dans le secteur public fédéral. Cet examen est une occasion pour le gouvernement d'agir honorablement et d'accorder à ses travailleurs et travailleuses les droits qui s'appliquent à la plupart des autres administrations canadiennes.

Je soupçonne que cet examen va donner lieu à un projet de loi dont le Parlement sera saisi en 2002. Je dirai toutefois qu'il est important pour tous les députés d'aborder les questions avant l'introduction du projet de loi.

Pour vous aider à cet égard, les leaders de l'Alliance de la Fonction publique du Canada ont préparé un aperçu de leurs priorités pour la réforme du secteur public. Le programme en 10 points de l'alliance aborde des questions d'une importance critique, telles la négociation collective, la négociation et l'arbitrage de la dotation, la réforme de la classification et des pensions, et la dénonciation.

À mon avis, les deux prochaines années sont importantes pour les relations de travail au fédéral. Soit que les bonnes décisions soient prises et que la négociation règle des problèmes de rémunération de longue date, soit qu'elles ne le soient pas, et la population canadienne subira une grève. Ou bien la réforme de la fonction publique est faite correctement, et le processus de négociation correspondra plus étroitement au système ailleurs dans l'économie, ou bien elle perpétuera la frustration profonde que les travailleurs et les travailleuses du secteur public fédéral ressentent face au contexte paternaliste actuel.

• 1615

C'est à vous, membres du comité, et à tous les autres députés de choisir.

Merci.

Le président: Merci.

[Traduction]

Nous allons maintenant entendre M. Henri Massé, président de la FTQ. Nous vous souhaitons la bienvenue.

[Français]

M. Henri Massé (président, Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec (FTQ)): Je voudrais d'abord remercier les membres du Comité des finances de donner à la FTQ cette occasion de se faire entendre sur des questions qui sont importantes pour nos membres. Je voudrais aussi dire que je fais miennes les recommandations du Congrès du travail du Canada et de l'Alliance de la Fonction publique du Canada.

Je voudrais souligner au départ que c'est beaucoup plus plaisant de se présenter devant le Comité des finances quand les choses vont relativement bien et qu'on a des choix réels à faire, ce qui n'a pas toujours été le cas. Les finances publiques sont en bonne santé. Malgré un ralentissement de l'économie américaine, notre économie va assez bien. On parle encore de croissance de notre économie. Il y a certains indices qui ne mentent absolument pas, par exemple quand on peut augmenter les salaires des députés sans qu'il y ait trop de grogne populaire, comme c'est le cas à l'heure actuelle. Je vous dirai d'entrée de jeu que je pense que c'est une augmentation méritée, car l'État a été chiche envers vous dans les dernières années.

Mais puisqu'on admet cela, je voudrais que vous admettiez que la situation des travailleurs et des travailleuses des services du gouvernement fédéral est la même. Ils ont vécu la même situation. En bon québécois, on dit que ce qui est bon pour pitou est aussi bon pour minou. Je vous donnerais un petit conseil: dans vos débats au niveau des travailleurs et travailleuses du secteur public fédéral, ne perdez pas trop de temps à discuter de la clause optionnelle; ils vont tous s'en prévaloir sans exception.

Nous sommes ici pour parler d'économie. Je fais des salaires des travailleurs et des travailleuses du secteur fédéral une question économique. C'est la même chose pour les travailleurs de la fonction publique au niveau des provinces.

Dans les 10 dernières années, ce sont principalement nos exportations qui ont entraîné la croissance économique. Il y a actuellement un ralentissement au niveau de l'économie américaine qui va certainement se répercuter un peu sur notre économie, et la demande interne commence à peine à entraîner une partie importante de la croissance économique. Il me semble qu'il est temps d'accélérer le tempo et de permettre à la demande interne de jouer un rôle beaucoup plus important dans la croissance de l'économie. Je pense que le timing est bon: l'inflation est basse, il y a des gains de productivité importants et ce n'est pas cela qui va entraîner un problème d'inflation majeur.

Il faut rappeler qu'au cours des 10 dernières années, il s'est pris, au niveau du gouvernement canadien, des politiques qui ont entraîné la croissance économique. Mais au niveau des travailleurs et des travailleuses et du monde ordinaire, les salaires ont stagné au cours des 10 dernières années. Les salaires réels n'ont pas du tout augmenté, tant chez les travailleurs et travailleuses du public que chez ceux du secteur public: zéro.

Ce n'est pas pour rien que nous étions 60 000 dans la rue à Québec, pour Québec 2001. Alors que des politiques de développement économique importantes ont été prises pour entraîner une croissance économique importante, le travailleur ordinaire, le citoyen n'a pas un sou de plus dans son porte-monnaie. Il est temps qu'on corrige cette situation. Il est temps qu'on commence à accorder des augmentations de salaire réelles. Le gouvernement fédéral est un des employeurs importants au Canada, un exemple à suivre. Encore une fois, tout en ayant une certaine prudence, il faut consentir des augmentations de salaire réelles aux salariés du secteur public fédéral.

L'autre élément que je voulais toucher, et mon ami Ken Georgetti en a parlé abondamment, c'est toute la question de réinvestir dans la santé et l'éducation. Marc Laviolette de la CSN en a aussi parlé. J'aimerais bien qu'on cesse d'en faire une chicane fédérale-provinciale.

Quand on regarde ce qui se passe dans la vie de tous les jours dans ces deux secteurs, on voit que ça commence à être passablement dramatique. Les commissions scolaires, les directions d'école commencent à vouloir faire entrer les McDonald's, les Pepsi, les Coke dans les écoles. Quand l'industrie privée fait de la commandite à tour de bras dans nos écoles pour qu'on soit capable d'acheter des livres et d'ouvrir des bibliothèques, on commence à avoir un problème important.

• 1620

Pour ce qui est de la formation professionnelle, on a fait un peu de rattrapage au niveau des gains de productivité au cours des deux dernières années par rapport à l'économie américaine, mais la faiblesse de notre dollar nous aide un peu. D'autres ont soulevé la question de la formation professionnelle. Cela en fait partie. Le gouvernement fédéral doit étudier cela et permettre aux provinces de consacrer des budgets beaucoup plus importants aux questions de formation professionnelle.

La situation de la santé est à peu près la même dans toutes les provinces canadiennes. On n'a qu'à allumer la télévision, à lire les journaux et à écouter la radio pour voir qu'à chaque jour, c'est un drame. Je pense que ça commence même à avoir une influence néfaste sur la santé mentale de plusieurs Canadiens et Canadiennes. Il y a passablement de personnes qui sont stressées. Des personnes âgées se demandent si elles auront des soins adéquats. Les jeunes se demandent si le régime de santé va résister.

Il me semble qu'avec la marge de manoeuvre qu'on a, on doit réinvestir dans ces secteurs. On doit peut-être changer certaines choses, mais on doit réinvestir massivement dans ces secteurs. Cela n'a aucun sens.

Je voudrais aussi parler des infrastructures. Il y en a qui disent que les routes, les ponts, les réseaux d'aqueduc ne sont que du béton. C'est plus que du béton. C'est aussi une question de santé publique. On sait que nos réseaux d'aqueduc sont dans un état lamentable dans plusieurs villes, tant au Québec que dans le reste du Canada. Ça crée des problèmes importants de santé. On pourrait avoir une eau de meilleure qualité.

Aux États-Unis, où les gouvernements ont serré la vis ces dernières années, un peu comme on l'a fait au Canada, le gouvernement fédéral vient de décider d'investir 100 milliards de dollars dans l'infrastructure. C'est en plus de ce que vont faire les États.

Au Québec, par exemple, une coalition qui regroupe presque tout le monde, c'est-à-dire les syndicats, le monde des affaires et ainsi de suite, demande qu'on réinvestisse dans l'infrastructure. Chacun payerait sa part; les provinces un tiers, les villes un tiers et le gouvernement fédéral un tiers. Le dernier programme au niveau du gouvernement fédéral était incomplet et insatisfaisant. Il faut un programme beaucoup plus important pour rebâtir nos infrastructures.

Quant à avoir un programme très faible, il vaut mieux de ne pas en avoir du tout, parce que c'est souvent néfaste. Les villes ont des problèmes financiers. Elles attendent donc du gouvernement provincial et du gouvernement fédéral un programme qui a de l'allure pour relancer leurs infrastructures. Quand le programme sort, comme il est vraiment insuffisant, les travaux restent en plan.

Il y a certains travaux qui pourraient se faire, la situation étant très grave, mais on attend parce qu'on pense qu'on va avoir un programme. Le dernier programme qu'on a eu, tant au niveau du gouvernement fédéral qu'à celui du Québec, était nettement insuffisant.

En ce qui a trait à l'automobile, j'appuie mon ami des TCA. Je veux vous rappeler qu'on a une seule entreprise automobile au Québec: c'est GM de Sainte-Thérèse qui, depuis six ans, menace de quitter le Québec. Une partie importante de la population des Laurentides serait dans une situation très délicate, et ce serait dommageable pour l'ensemble de la santé économique du Québec. C'est un secteur important.

Je voudrais terminer en parlant de l'assurance-emploi. On pense que le gouvernement doit mettre en oeuvre le rapport parlementaire. Tout le monde est d'accord là-dessus. On trouvait que ce rapport n'allait pas assez loin, mais pour le moment, on souhaiterait que le gouvernement le mette rapidement en oeuvre.

Tout à l'heure, j'ai pris la peine de dire que vos augmentations de salaire étaient méritées. Si vous n'adoptez pas ce projet de loi ce printemps pour améliorer le sort de nos chômeurs et de nos chômeuses, je reviendrai vous dire, ici ou sur la place publique, que vos salaires n'étaient pas mérités. S'il y a urgence à agir, c'est bien pour nos chômeurs et nos chômeuses. C'est important.

Il y a eu des engagements électoraux très clairs de l'ensemble des partis politiques et du gouvernement. On nous disait qu'on corrigerait la situation et qu'on ferait une réforme très rapidement. Je ne sais pas si ce sont des questions techniques, car je ne comprends pas tout ça, mais il me semble qu'on devrait agir dès maintenant. Cela calmerait le cynisme des gens qui sont les plus mal pris, de ceux qui ont la malchance d'être les plus pauvres dans la population.

• 1625

En terminant, je voudrais parler de la question des cotisations. Même si on améliorait les choses et qu'on mettait en oeuvre la réforme qui est proposée par le comité parlementaire, les cotisations demeureraient trop élevées. On ne réclame pas une baisse des cotisations. On pense qu'il faut se garder une marge de manoeuvre pour l'avenir. On va revivre des récessions et il ne faudrait pas qu'on soit obligé de couper dans l'assurance-emploi, comme on l'a fait ces dernières années. Il faut se garder de bonnes réserves. Si, malgré tout ça, les cotisations sont trop élevées, il faudrait les baisser.

C'est vraiment une iniquité, une injustice que de faire payer le déficit par les travailleurs et travailleuses de la classe moyenne, ceux qui gagnent 25 000 $, 30 000 $, 35 000 $, 40 000 $ par année. Que fait-on du surplus de la caisse d'assurance-emploi? On s'en sert pour payer la dette. Qu'advient-il de ceux qui gagnent 100 000 $, 125 000 $, 150 000 $, 200 000 $, 300 000 $ par année et qui ne sont pas couverts par le régime d'assurance-emploi? Une bonne partie du salaire de ces gens n'est pas couvert par l'assurance-emploi. Ils ne paient pas leur part du déficit et des programmes.

Ce n'est plus une prime d'assurance. C'est vraiment une taxe sur la masse salariale qui est inéquitable parce qu'on la fait payer aux travailleurs et aux travailleuses qui ont des revenus moins élevés. On aimerait beaucoup que cette question soit réglée. Ça fait longtemps qu'on dénonce cet état de fait.

Maintenant, on sait qu'il fut un temps où les finances publiques étaient dans la dèche, où ça allait très mal, où les choix étaient très difficiles à faire. On a vécu un bout de temps avec ça, mais il me semble que ce n'est plus la situation aujourd'hui et qu'on devrait corriger cette injustice au plus sacrant.

Merci.

[Traduction]

Le président: Merci beaucoup, monsieur Massé.

Nous allons maintenant entendre Mme Kathleen Connors qui représente la Fédération canadienne des syndicats d'infirmières et d'infirmiers. Nous vous souhaitons la bienvenue.

Mme Kathleen Connors (présidente, Fédération canadienne des syndicats d'infirmières et d'infirmiers): Merci. J'ai le plaisir de représenter ici les 118 000 infirmières et infirmiers, infirmières et infirmiers autorisés, infirmières et infirmiers auxiliaires autorisés et infirmières et infirmiers psychiatriques. Nos membres travaillent dans des hôpitaux et des établissements de soins de longue durée, dans nos collectivités et nos foyers.

Comme c'est le cas de la profession des soins de santé, lorsque nous parlons de politique économique, nous nous lançons dans certaines abstractions. J'espère vraiment que, au cours de notre dialogue de cet après-midi, nous ne nous lancerons pas dans des abstractions susceptibles de nous faire oublier que derrière toutes les questions monétaires et financières, se profilent des gens, des gens qui ont des sentiments, des familles, des amis et des collègues. J'espère que nous ne l'oublierons pas. Tout comme les infirmières et les infirmiers et les médecins du système de soins de santé suivent des débats sur les questions de santé, lorsque nous parlons de l'économie, nous devons nous rappeler que ce sont les gens qui sont le fondement de l'économie et que les économies saines exigent des gens en bonne santé.

Le diagnostic à court et à moyen termes réservé aux infirmières et infirmiers dans notre économie n'est pas très optimiste, étant donné que notre capacité de prévenir et de traiter la maladie diminue de plus en plus. Comme d'autres travailleurs, les infirmières et infirmiers s'inquiètent au sujet de leur emploi et de leur famille. En ce moment, nos emplois ne sont pas particulièrement intéressants et influent négativement sur nos familles. De plus en plus, la santé des Canadiens de notre pays en est touchée. Nous connaissons dans notre pays une atroce pénurie dans le domaine des soins infirmiers qui, si elle n'est pas rapidement réglée, se transformera en crise d'ici la fin de la décennie. À l'heure actuelle, il manque au Canada 20 000 infirmières et infirmiers et ce chiffre sera multiplié par cinq d'ici la fin de la décennie. Je tiens à replacer cette question dans son contexte.

Les infirmières et infirmiers dispensent 80 p. 100 des soins professionnels directs et ils sont actuellement près de 228 000 au Canada. La moyenne d'âge est de 48 ans et l'âge de départ à la retraite est 56 ans en moyenne. Par conséquent, d'ici l'an 2011, il y aura une pénurie de 113 000 infirmières et infirmiers au Canada.

Les infirmières et infirmiers qui ont du travail à l'heure actuelle, sont obligés de faire du temps supplémentaire. Cette obligation signifie que vous pouvez faire l'objet de mesures disciplinaires si vous refusez de rester au travail. C'est un fardeau excessif pour les infirmières et infirmiers et leurs familles, sans compter que le fait que les infirmières et infirmiers doivent assumer plusieurs postes de travail à la suite, jour après jour, compromet les soins dispensés aux patients.

• 1630

Ce n'est pas tout, croyez-moi. Les infirmières et infirmiers ont le sentiment d'être sous-évalués par les administrateurs des établissements où ils travaillent. Pourquoi? Voici une courte liste des raisons. Le salaire est peu élevé par rapport aux responsabilités. Beaucoup de médecins et d'administrateurs n'écoutent pas les propositions des infirmières et infirmiers, même lorsque c'est une question de vie ou de mort. Il suffit d'examiner le rapport de la Commission Sinclair du Manitoba à ce sujet. Nos règles de travail sont rigides, nous ne pouvons pas avoir d'heures régulières si bien que la vie de famille et les vacances en souffrent, sans compter que nous ne bénéficions d'aucun appui pour l'éducation permanente et le perfectionnement. Nous avons sans aucun doute les mêmes préoccupations que les autres travailleurs de notre pays.

Tout cela donne un milieu de travail où le moral est bien bas. Nous représentons le groupe de travailleurs les plus malades du pays, alors que nous travaillons dans le système des soins de santé. Dans certains endroits, les infirmières et infirmiers ne peuvent tout simplement plus supporter cette situation. Cet après-midi, les infirmières et infirmiers de la Colombie-Britannique ont rejeté à 96 p. 100 la dernière offre de convention collective. Les infirmières et infirmiers de l'Ontario préparent des stratégies en raison des résultats incertains de leurs négociations. Les infirmières et infirmiers disent clairement que trop, c'est trop.

Nous sommes naturellement des dispensateurs de soins et non des activistes. Les événements survenus au cours de la dernière décennie dans le système dans lequel nous travaillons ont tout changé. Nous vivons un malaise social et ne voyons pas la lumière au bout du tunnel. Notre régime d'assurance-maladie s'est dégradé et nous craignons que notre régime public, à but non lucratif, ne soit supprimé. Nous en arrivons à contre-coeur à la conclusion suivante: les gouvernements refusent de remettre sur pied le régime qui a si bien desservi notre pays.

Dans les années 80 et 90, nous avons entendu des personnes comme le président de Chrysler, Lee Iacocca, se plaindre avec véhémence du coût des soins de santé privés aux États-Unis. Il a déclaré que pour Chrysler, les soins de santé coûtaient plus cher que l'acier. Il a également remarqué qu'un tel fardeau n'existait pas au Canada. Il envisageait bien sûr les soins de santé privés, à but lucratif, dans le contexte des affaires. Pour les particuliers, c'est encore plus troublant. Pour moi, les soins de santé ont une réalité très personnelle, car au cours des 18 derniers mois, j'ai été du côté des patients. J'ai été traitée pour un cancer des intestins et de l'utérus et j'ai été bien soignée, mais je me suis rendu compte que c'est un système où les gens qui y travaillent subissent des tensions extrêmes.

Toutefois, je sais qu'au Canada—si j'ai de nouveau une maladie grave—je recevrai des soins, contrairement à mes voisins du Sud. Aucun agent d'assurance beau parleur ne m'appellera pour me dire: «Madame Connors, très heureux de votre rétablissement; nous avons eu le plaisir de vous compter parmi nos clients, mais malheureusement, vous n'avez plus droit aux prestations de notre compagnie: hasta la vista.» Nous pouvons être sûrs de ne jamais recevoir d'appel de ce genre au Canada, grâce à notre régime d'assurance-maladie, pour l'instant à tout le moins. Ce n'est toutefois pas très réconfortant, n'est-ce pas?

Si je soulève la question de la pénurie des infirmières et infirmiers ainsi que celle de la dégradation du régime d'assurance-maladie dans le cadre d'une séance du Comité des finances, c'est parce que ces deux questions découlent des compressions budgétaires. Nous avons commencé à connaître de telles compressions dans les années 90. En 1992, le Canada dépensait 10,2 p. 100 de son produit intérieur brut en soins de santé, mais cette année-là, les gouvernements fédéral et provinciaux, voulant contenir le déficit, ont réduit les dépenses de santé. Entre 1992 et 1997, les dépenses de santé par habitant ont diminué dans tout le pays. Depuis, elles recommencent à augmenter, mais elles sont toujours au même niveau qu'en 1994.

Pendant ce temps, nous avons vu notre économie croître, mais pas nos dépenses en soins de santé, malgré l'accord conclu en septembre 2000 entre les gouvernements fédéral et provinciaux. Aujourd'hui, nous consacrons seulement 9,2 p. 100 de notre produit intérieur brut aux soins de santé. C'est un point de pourcentage de moins qu'en 1992. Autrement dit, l'économie a fait des progrès, mais les dépenses en soins de santé n'ont pas suivi le rythme, si bien qu'aujourd'hui nos voisins du Sud dépensent 50 p. 100 de plus par habitant que nous pour les soins de santé. Alors, pourquoi dire que les dépenses en soins de santé vont à la dérive?

• 1635

Notre mémoire cite un passage de ce que Gord Guyatt, de la faculté de médecine de l'université McMaster, qui a examiné la question récemment, a écrit sur le sujet:

    Les dépenses de santé du gouvernement de l'Ontario ont monté de 17,7 milliards de dollars en 1995 à 18,4 milliards de dollars en 1999, ce qui représente une hausse de 3,8 p. 100. Cependant, en tenant compte de l'inflation et de la croissance de la population, les dépenses réelles par personne ont diminué de 6,7 p. 100. Les alarmistes font observer que l'Ontario dépense 40 p. 100 du budget provincial pour les soins de santé. Mais ce n'est pas surprenant parce que Queen's Park a sabré dans les prestations d'aide sociale, la protection de l'environnement et l'éducation. En effet, par rapport au PIB de la province, les dépenses publiques ont baissé de 16 à 12 p. 100 depuis 1992, alors que la population vieillit et a besoin de services de santé plus lourds.

Les restrictions budgétaires ont transformé certains premiers ministres provinciaux en élagueurs réticents de l'arbre du régime d'assurance-maladie mais, pour d'autres, comme Mike Harris et Ralph Klein, elles servent d'excuse pour commencer à couper dans le tronc du régime, et en imputer l'entière responsabilité au parti fédéral au pouvoir. Ces premiers ministres ont aussi commencé à vanter les mérites de la médecine privée à but lucratif, alors que rien ne prouve qu'elle est plus rentable.

Nous n'entendons aucun élu au pouvoir revendiquer que le budget du régime de soins de santé soit rétabli. Vous pensez peut-être que c'est parce que les Canadiens croient que l'accord conclu en septembre dernier a restitué tous les fonds supprimés. Vous et moi savons que ce n'est pas le cas, n'est-ce pas? Pourtant, aucun programme public n'est plus cher aux Canadiens que le régime de soins de santé, et aucun n'est plus important pour notre bien-être physique.

Je ne pense pas que nous puissions continuer de nous faire dire que nous ne pouvons pas nous permettre de dépenser davantage pour les soins de santé. Un récent sondage que nous, infirmières, avons effectué indique clairement que les Canadiens sont prêts à accepter des hausses d'impôt pour qu'il y ait plus d'infirmières. Ils réduiraient l'aide directe et les allégements fiscaux aux entreprises pour accroître le nombre d'infirmières au travail. Je parle de la réaction des gens devant ce qui se passe sur le plan économique.

Les solutions ne sont pas très satisfaisantes pour nous: des listes d'attente plus longue, des services désassurés, des cliniques privées plus nombreuses, pour les soins ophtalmologiques, les chirurgies d'un jour et le traitement des cancers, et la présence de groupes comme Aetna et Liberty Health et Humana avec leurs factures. Nous ne sommes pas prêts à cela.

Il est question, dans notre mémoire, d'autres compressions et, en tant qu'infirmière, je connais les déterminants sociaux de la santé. Si nous n'avons pas un environnement sain, si nous ne réglementons pas l'environnement, les gens seront malades et il faudra dépenser pour les soins plutôt que pour la prévention. C'est ce que j'appelle les programmes populaires, nos programmes sociaux. On ne peut continuer de faire des compressions dans les programmes sociaux essentiels, de logement, de nutrition de la petite enfance, de garderie et d'éducation qui font en sorte que beaucoup de Canadiens ne tombent pas malades précocement ou ne deviennent pas de grands malades à la charge de notre système de santé. Si on ne dépense pas pour la prévention, on va devoir dépenser pour la maladie, et nous ne pouvons tout simplement pas continuer dans cette voie. Des jeunes enfants qui sont mal nourris grandissent dans la maladie. Les gens sans logement sont malades et requièrent des soins médicaux coûteux. Les enfants et les adultes qui n'ont pas accès à des programmes d'éducation sanitaire et d'autres programmes de préservation de la santé ont plus souvent recours au système, ce qui est dommage. C'est un fardeau pour eux, et c'est une perte pour notre société.

Nous consacrons des milliards de dollars à la réduction de la dette, mais nous négligeons les programmes environnementaux et sociaux, et il se peut que nous ne fassions que déplacer les coûts et cacher la facture—qui risque d'être beaucoup plus élevée, plus lourde à bien des égards. C'est un changement d'orientation qui est néfaste pour les enfants et leurs parents, et cela nous donne l'impression que la mesquinerie est ce qui décrit le Canada des années 90 et du nouveau millénaire. J'ai entendu un jeune me dire récemment qu'on ne semble plus se soucier des autres comme avant. Est-ce notre idée du Parlement? Est-ce ce que nous voulons léguer à nos enfants? Je ne le pense pas.

En terminant, j'aimerais vous faire part des trois revendications qui me tiennent le plus à coeur.

Premièrement, il faut rétablir le financement de notre régime de soins de santé au niveau d'avant les compressions effectuées dans les années 90. On peut peut-être faire une exception dans le cas des produits pharmaceutiques dont les coûts augmentent rapidement—et je dis bien produits pharmaceutiques—parce qu'il n'y a pas de crise financière dans le domaine des soins de santé.

Le rétablissement du financement n'est pas suffisant. Pour améliorer le régime d'assurance-maladie, il faut que le rétablissement des fonds soit accompagné d'un important sens des responsabilités. Nous devons imposer des conditions pour assurer que les fonds servent à soutenir les fournisseurs de soins de santé et le système dans lequel nous travaillons, et à vraiment améliorer les soins dispensés aux malades.

• 1640

Enfin, beaucoup de programmes environnementaux et sociaux servent à préserver la santé et à prévenir la maladie. Les compressions que ces programmes ont subies dans les années 90 n'ont pas été une économie pour les contribuables, parce que cela va entraîner d'autres coûts qu'il faudra payer plus tard. Les Canadiens ont lutté pour avoir un pays en santé grâce au régime d'assurance-maladie ainsi qu'à des mesures sociales, environnementales et autres d'initiative publique. Nous devons maintenant lutter pour rétablir ces mesures et les améliorer. Je vous dirais que nos parents et nos enfants ne méritent pas moins.

Merci.

Le président: Merci beaucoup, madame Connors.

[Français]

M. Marc Laviolette: Monsieur le président, je fais un rappel au Règlement. Il y a des chaises vides devant nous. Nous sommes les représentants des travailleurs organisés au Canada. C'est nous qui produisons la richesse de ce pays. Nous sommes venus pour faire le point sur l'économie canadienne et, excusez l'expression, ils ont «câlicé leur camp». C'est un manque de respect fondamental envers les travailleurs. Quant à moi, je vais fermer les livres et m'en retourner chez nous. Nous étions venus pour discuter avec ceux qui sont responsables des politiques économiques et nous faisons face à un ensemble vide, aussi vide que le sont leurs politiques. C'est ce que j'ai à dire devant l'absence des libéraux. Je trouve cela absolument inacceptable.

[Traduction]

Le président: Bien, il y a en fait un membre du parti ministériel...

Monsieur Loubier.

[Français]

M. Yvan Loubier: Monsieur le président, moi aussi je déplore qu'on ait des hommes et des femmes devant nous, qui représentent des millions de travailleurs et de travailleuses au Québec comme au Canada, qui viennent présenter des doléances au nom de leurs membres, au nom aussi des personnes qui sont touchées par le chômage et qu'il n'y ait pas un député ministériel qui reste jusqu'au bout de la présentation à partir du début. Et Mme Bennett vient tout juste d'arriver, comme par hasard. Je trouve cela honteux et très odieux.

C'est sûr qu'il est dur de se faire dire la vérité en face, de se faire dire que le gouvernement fédéral n'a pas mis suffisamment d'argent pour former les chômeurs et les chômeuses et leur venir en aide. Mais il faut savoir assumer ses responsabilités. Les 173 libéraux ont été élus, lors des dernières élections, pour servir la population, non pas pour s'esquiver, se sauver devant la vérité quand on la leur présente en pleine figure.

Moi j'aimerais, car il semble y avoir unanimité ici aujourd'hui, qu'on adopte immédiatement une motion qui se lit ainsi:

    Le gouvernement fédéral doit présenter à la Chambre des communes, avant l'ajournement de la présente session, un projet de loi contenant les principales recommandations relatives au régime d'assurance-emploi présentées par le Comité de développement des ressources humaines.

Et je demande le vote sur cette motion immédiatement.

[Traduction]

Le président: Malheureusement, vous ne pouvez pas proposer la motion parce que nous n'avons pas le quorum.

[Français]

M. Marc Laviolette: En plus, il faut avoir quorum. On devrait s'en aller si on n'a pas quorum. Je suis venu de Montréal, et ce n'est pas pour parler aux murs.

[Traduction]

Le président: Monsieur Laviolette, sans vouloir vous offenser, je pense que vous avez exprimé votre point de vue, mais le Comité des finances a adopté certaines mesures pour ce qui est de l'audition des témoins. Nous avons le quorum pour entendre des témoins, mais nous ne l'avons malheureusement pas pour proposer une motion, et je pense que M. Loubier le sait.

[Français]

M. Yvan Loubier: Vous ne trouvez pas, monsieur le président, que c'est plutôt odieux qu'on se retrouve dans une situation où il n'y a pas suffisamment de députés libéraux. Vous êtes 173. Il y a sûrement moyen, quand se présentent des témoins aussi importants que ceux-là, de les écouter.

Par la suite, on entend toutes sortes de niaiseries à la Chambre des communes justement parce que vos députés ne sont pas informés, parlent à tort et à travers et disent que le ministre des Finances a raison. Vous écoutez comme si vous étiez des députés-tapis, et on se demande pourquoi vous n'êtes pas informés. C'est parce que vous n'êtes pas présents lors des vrais débats que vous acceptez n'importe quoi.

On est venu nous dire aujourd'hui qu'il y avait d'autres priorités que le remboursement de la dette. La dette, c'est une chose, mais les besoins des travailleurs, c'en est une autre. Les besoins des chômeurs et des chômeuses en sont aussi une autre.

Le système de santé est en train de s'écrouler parce que la main-d'oeuvre est insuffisante. On fera face à une pénurie incroyable au cours des 10 prochaines années. Et vous, vous avez une responsabilité ministérielle en tant que député. Vous côtoyez le ministre des Finances, tous les décideurs de ce Conseil des ministres chaque jour. Vous avez un pouvoir d'influence qui est incroyable et vous n'êtes même pas présents pour entendre les arguments présentés par ceux et celles qui représentent des millions de travailleurs et travailleuses au Canada.

Je trouve cela écoeurant, monsieur le président. Je ne trouve pas d'autre mot. Et ce n'est pas la première fois que ça arrive. Ne pensez pas que c'est à cause de vous. Les députés de l'opposition sont plus souvent ici que les députés ministériels. C'est insensé.

[Traduction]

Le président: Comme je vous l'ai dit, monsieur Loubier, je ne peux pas faire de commentaire sur la présence des membres parce que ce serait déplacé de ma part, en tant que président. Je peux dire qu'il y a toujours des gens présents ou absents parmi les députés des deux côtés de la Chambre.

• 1645

Je n'ai pas vraiment convoqué cette table ronde pour insister là-dessus. Je l'ai convoquée parce que je voulais, en tant que membre du comité, entendre le point de vue des représentants syndicaux. Nous pourrions peut-être discuter des priorités dont vous avez parlé en passant à la période des questions.

Nous allons commencer par M. Peschisolido.

M. Joe Peschisolido (Richmond, AC): Je dispose de combien de temps, monsieur le président?

Le président: Cinq minutes.

M. Joe Peschisolido: Merci.

J'aimerais souhaiter la bienvenue aux témoins et les remercier d'être venus nous rencontrer aujourd'hui. J'aimerais d'abord poser une question à Kathleen Connors.

Il y a deux semaines, dans ma circonscription de Richmond, j'ai rencontré un groupe d'infirmières qui viennent des Philippines. Elles ont fait une demande d'immigration comme bonnes d'enfants et elles ont du mal à pratiquer leur métier d'infirmière.

Que peut-on faire pour les aider à exercer leur métier tout en offrant les soins infirmiers de qualité que les Canadiens veulent?

Mme Kathleen Connors: Je suis bien au courant du problème et j'aurais quelques remarques à formuler.

Un pays aussi riche que le Canada, qui fait partie du G-8, devrait être en mesure de répondre à ses besoins en personnel médical et de s'attaquer au problème de la pénurie d'infirmières au sein du pays. Nous devons inciter les gens à choisir des métiers spécialisés dans tout... en intégrant les Canadiens de toutes origines.

Il est immoral que nous allions recruter dans des pays du tiers monde, des pays en développement, et que nous privions ces pays de ressources humaines précieuses. Les infirmières aux Philippines sont des fournisseurs de soins de santé primaires. Quel service rendons-nous à ce pays si nous attirons ses infirmières au Canada pour répondre à nos besoins? Cela dit, les gens qui choisissent de vivre et de travailler au Canada devraient être en mesure d'exercer le métier pour lequel ils ont été formés.

Nous pensons qu'il y a une disposition dans la loi actuelle sur l'immigration... Il n'est pas reconnu que nous manquons d'infirmières. Les infirmières philippines qui sont venues ici pour travailler comme bonnes d'enfants n'ont pas la possibilité d'être intégrées au système à moins qu'elles fassent reconnaître par DRHC et les gouvernements provinciaux que leurs services sont requis.

Il incombe à notre pays de fournir l'aide dont ces infirmières ont besoin pour subir l'examen national d'accréditation que doivent réussir toutes les infirmières canadiennes pour exercer leur métier; c'est à nous qu'il incombe de fournir l'aide voulue pour assurer leur intégration culturelle dans notre pays.

Il y a un certain nombre de façons d'envisager la question. Mais notre pays doit régler son problème de personnel médical au Canada. Pourquoi ne pouvons-nous pas offrir de la formation, du soutien et des programmes d'enseignement à la population de notre pays? C'est une question qui s'adresse à votre gouvernement et aux gouvernements provinciaux.

M. Joe Peschisolido: Merci, madame Connors.

Le président: Je viens d'apprendre que nous devrons aller voter vers 17 h 10, si je ne me trompe pas.

Pouvons-nous aller plus rapidement? Si tout le monde pose ses questions, nous laisserons ensuite les témoins répondre. Qu'en pensez-vous? Êtes-vous d'accord?

[Français]

M. Joe Peschisolido: Il y a une autre chose. Je suis d'accord avec M. Massé qu'il y a des choix réels qui s'offrent au gouvernement en ce qui concerne la formation professionnelle, l'éducation et la santé. Selon vous, quel rôle pourrait avoir le gouvernement dans notre fédéralisme, en tenant compte des compétences provinciales, pour faire bouger les choses dans la santé, la formation professionnelle et aussi l'éducation?

M. Henri Massé: Est-ce que vous voulez que je réponde tout de suite?

[Traduction]

Le président: Posons d'abord toutes les questions.

[Français]

M. Yvan Loubier: Je vous félicite de votre présentation et je m'excuse encore une fois du contexte. Mais, comme je l'ai dit, ce n'est pas la première fois que cela se produit. J'espère que cela ne vous découragera pas de revenir nous voir parce que nous, nous prenons en considération ce que vous nous dites, et nous nous ferons un plaisir et un devoir de le transmettre à la Chambre des communes.

• 1650

Mes félicitations pour l'analyse que vous nous avez présentée. J'ai deux préoccupations qui sont en rapport avec votre exposé. On vit tous, et Paul vit la même chose dans sa circonscription, un problème criant de pénurie de main-d'oeuvre dans tous les secteurs, surtout les secteurs techniques. On n'arrive pas à trouver de solution durable à ce problème.

Je vis une expérience personnelle, dans ma circonscription. Depuis quatre ans, même en faisant une vaste campagne de publicité, on ne réussit à combler que 40 p. 100 des besoins de la région en main-d'oeuvre spécialisée ou moins spécialisée. Ça m'inquiète. N'auriez-vous pas de nouvelles voies à nous suggérer d'explorer.

Deuxièmement, un chiffre m'a fait sursauter un peu dans le rapport de la CSN; c'est votre estimation des surplus. Vous pouvez multiplier facilement par deux les surplus fédéraux des prochaines années. Ici, vous avez mis le doigt uniquement sur les surplus prévus. Pour tenir compte des surplus qui sont délibérément imprévus par M. Martin, vous pouvez doubler le chiffre. L'an prochain, il y aura 17 ou 18 milliards de dollars, selon les pires scénarios où il y aurait un ralentissement économique. Alors, si vous avez des choses à anticiper, anticipez un surplus de 17 à 18 milliards de dollars. C'est ça.

[Traduction]

Le président: Monsieur Crête.

[Français]

M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ): Merci, monsieur le président.

Je voudrais d'abord féliciter tout le mouvement syndical pour l'action que vous avez menée au Sommet de Québec. Je pense que vous avez réussi tout au moins à influencer le discours officiel. Il faudra que des gestes politiques suivent, mais je pense que ce fut un exemple, notamment la marche pacifique. Je tenais à le dire.

Je voudrais répondre à M. Massé. Il n'y a pas de problème technique pour modifier la Loi sur l'assurance-emploi. C'est seulement une question de volonté politique. Il s'agit tout simplement que le gouvernement décide de mettre en vigueur les recommandations unanimes du comité. Je suis d'accord avec vous qu'elles ne constituent pas la panacée universelle, mais ce serait un pas dans la bonne direction.

Vous savez qu'il y aura un débat, aux alentours de septembre, sur le taux de cotisation. C'est une question très importante parce que, si effectivement on tient le débat sur le taux de cotisation sans savoir au préalable décidé quelles bonifications contiendra le régime, la tentation sera très forte pour le gouvernement de simplement baisser les cotisations en fonction du coût actuel du régime. Pour qu'il s'autofinance, il faut 1,85 $ pour 100 $ de gain, alors que le taux actuel est de 2,25 $.

Mais il faudrait d'abord savoir quelle proportion d'améliorations on veut lui apporter. Je voudrais savoir de vous si vous seriez ouvert à l'établissement ou à une tentative d'édifier une position conjointe avec la partie patronale de partout au Canada, comme cela s'est déjà fait au Québec pour plusieurs dossiers consensuels. De cette façon, ceux qui cotisent au régime, employeurs et employés finalement, pourraient présenter une position commune.

Pensez-vous qu'il y ait une possibilité d'ouverture vis-à-vis d'un tel projet? On pourrait en arriver à un taux moyen intéressant en bout de ligne? J'aimerais avoir votre opinion là-dessus.

[Traduction]

Le président: Monsieur Nystrom.

L'hon. Lorne Nystrom (Regina—Qu'Appelle, NPD): Je veux aussi souhaiter la bienvenue aux chefs syndicaux,

[Français]

et merci beaucoup d'être venus ici

[Traduction]

présenter vos exposés.

Dans son exposé, M. Georgetti a dit que les années 90 avaient été la pire décennie depuis les années 30, et il a indiqué qu'il fallait améliorer les conditions de travail dans notre pays. Je sais qu'il s'intéresse particulièrement à l'investissement de nos caisses de retraite; hier, justement, nous assistions au même lancement de livre organisé par les métallos, pour la parution du livre Working Capital, sur les caisses de retraite des travailleurs. Je me demande si vous, et les autres, pourriez nous dire quelles politiques pourraient faciliter l'investissement des fonds des travailleurs et des caisses de retraite des syndicats.

J'ai un peu entendu parler du Fonds de solidarité qui existe au Québec, mais quelles sont les politiques qui pourraient être utiles, sur le plan fédéral, pour faciliter l'investissement des fonds des travailleurs afin de créer des emplois et d'améliorer le niveau de vie? M. Georgetti et les autres, je pense aussi aux fonds à caractère éthique. Nous avons proposé de modifier le RPC, par exemple, de façon à ce que le fonds de placement respecte des critères éthiques et à ce que des travailleurs siègent au conseil du Fonds de placement du Régime de pensions du Canada.

Monsieur le président, j'aimerais donc entendre les commentaires que quiconque voudra bien formuler sur ces sujets.

Le président: Merci, monsieur Nystrom.

Je vais moi aussi poser une brève question. Je suis très heureux de constater que la question de la productivité devient beaucoup plus...

M. Yvan Loubier: Parlez-vous en tant que libéral ou en tant que président?

Le président: Je suis un président indépendant, comme vous le savez, monsieur Loubier. Au fait, je vous remercie d'avoir voté pour moi; je vous en suis vraiment reconnaissant.

• 1655

Monsieur Georgetti, d'abord, il y a la question de la productivité, qui est extrêmement importante. Je pense que c'est assez évident. J'aime aussi le fait que vous changez de vocabulaire, ici. Dans les exposés, on parle toujours de la qualité de vie, ce qui important bien sûr, mais il semble plutôt être question de niveau de vie. Est-ce voulu, ou pensez-vous qu'un meilleur niveau de vie sert en fait à améliorer la qualité de vie? C'est la question que je pose, mais il y en a eu d'autres, et nous allons maintenant entendre les réponses.

Monsieur Laviolette, vous voulez-vous commencer?

[Français]

M. Marc Laviolette: Oui. D'abord, sur les besoins en main-d'oeuvre spécialisée, on récolte, qu'on le veuille ou non, le fruit des politiques passées. La valorisation de la formation professionnelle et de la formation technique a longtemps été négligée. C'est pourquoi, aujourd'hui, on a de la difficulté à recruter.

Mais je pense que la façon de favoriser le recrutement, de faire en sorte que les jeunes étudient dans les secteurs où il existe un besoin, c'est tout simplement en valorisant les emplois dans ces secteurs et en démontrant que, dans ces secteurs, il existe des emplois de qualité bien rémunérés. Automatiquement, je pense que les jeunes se montreront intéressés.

Soit dit en passant, le fait que, dans ces secteurs, les employés soient syndiqués aide beaucoup à augmenter la qualité des emplois. C'est ainsi que le développement économique et le taux de syndicalisation ne sont pas en contradiction.

Quant à l'estimation des surplus, on prend bonne note de vos projections, et ce que vous me dites ne me surprend pas du tout.

M. Yvan Loubier: Ça fait cinq ans, là.

M. Marc Laviolette: Vous savez comment c'est: si nous, les syndicats, nous les estimons trop à la hausse, on va dire que nous exagérons. On a donc tendance à se montrer conservateurs quant aux surplus.

M. Yvan Loubier: [Note de la rédaction: inaudible]

M. Marc Laviolette: Oui, c'est ça.

Mais, sur la position conjointe en vue de bonifier l'assurance-emploi, je n'ai pas d'objection de principe. C'est pourtant un peu drôle qu'on n'ait pas cherché à édifier une position conjointe pour affecter les surplus dans le paiement de la dette. Tout le monde dénonce cela. Il y a un consensus très large voulant que c'est une taxe déguisée. Le gouvernement libéral a quand même décidé de procéder ainsi, alors que ce n'est pas le but même du programme.

Pour ce qui est des investissements des fonds de pensions dans des secteurs créateurs d'emplois, si j'ai bien compris, au Québec, on a une expérience quand même assez importante. Les organisations syndicales se sont données des outils, que ce soit le Fonds d'action ou le Fonds de solidarité. Il y a aussi la Caisse de dépôt et placement du Québec qui place la Régie des rentes et les différentes épargnes des Québécois dans l'économie. Le but est toujours de créer, de maintenir ou de développer des emplois; c'est le critère. C'est aussi pour obtenir un rendement sur les investissements, parce qu'il s'agit de fonds de pensions.

De plus en plus, le débat sur l'éthique dans les placements prend de l'importance. Il y a une campagne de la Confédération internationale des syndicats libres, à laquelle d'ailleurs la CSN et le CTC sont affiliés, pour s'assurer que les placements des fonds de pensions qu'on contrôle ne se font pas dans de la création d'emplois où les gens ou les enfants, par exemple, sont exploités. Mais ça, c'est un autre débat.

Je pense, pour ce qui est de l'expérience québécoise, qu'elle date du début des années 1960, et les résultats de la construction de l'économie québécoise, telle qu'elle est aujourd'hui, sont dûs en partie à ces politiques. Cela a créé énormément d'emplois.

C'est particulier au Québec, me direz-vous. C'est ça, mais je déteste m'adresser à des chaises vides. Alors, même si les syndicats cherchent à négocier, là où est le pouvoir, ce n'est pas dans l'opposition, c'est au parti au pouvoir. Mais là, on a un ensemble vide devant nous. Quoi qu'il en soit, c'est en gros ce que j'avais à dire sur ces questions.

• 1700

[Traduction]

Le président: Monsieur Laviolette, vous ne devriez jamais sous-estimer l'influence des députés d'en face, parce que leur contribution au Comité des finances est assez importante.

[Français]

M. Marc Laviolette: Je ne les sous-estime pas, mais on sait où est la majorité, n'est-ce pas?

[Traduction]

Le président: Monsieur Georgetti.

[Français]

M. Marc Laviolette: Eh bien, non. Ils sont en train d'augmenter leurs salaires.

[Traduction]

Le président: Allez-y, monsieur Georgetti.

M. Ken Georgetti: Je tiens beaucoup à remercier les libéraux d'avoir au moins fait sortir le député qui dormait là-bas. C'est un bon début.

Mais je veux aussi remercier les personnes venues nous entendre, et j'aimerais répondre à quelques-unes des questions qui m'ont été posées.

J'aimerais commencer par vous répondre, parce que je ne pense pas qu'il y a un changement de vocabulaire. À mon avis, la qualité de vie et le niveau de vie sont synonymes. Notre productivité ne nous laisse pas indifférents. Nous sommes très fiers de constater que toutes les statistiques connues au Canada indiquent que les travailleurs syndiqués sont en fait plus productifs que les non syndiqués, et je pense que c'est parce qu'ils ont un meilleur niveau de vie et une meilleure sécurité d'emploi.

Mais sérieusement, notre productivité est déterminée davantage par la qualité et la quantité des investissements effectués dans les emplois que nous occupons, et la qualité et la quantité de ces investissements dépendent beaucoup de l'attitude de l'employeur envers nos membres, du genre de formation qu'ils reçoivent avant de travailler et en cours d'emploi et des perspectives d'emploi qui leur sont offertes. Ces facteurs ne sont pas incompatibles entre eux. Mais je pense qu'il doit y avoir une série de besoins pour que la productivité soit un objectif commun et, en bout de ligne, les gains de cette productivité doivent être partagés équitablement par les gens. Donc, à certains égards, c'est différent, mais, à d'autres, je pense que c'est synonyme.

J'aimerais répondre à la question de M. Nystrom—et mon ami Henri et moi partageons la même passion. Mais je pense que les caisses de retraite constituent une importante mise en commun de capitaux. Fait intéressant, 85 p. 100 de tous les fonds de pension qui existent au Canada aujourd'hui font l'objet de discussions à la table de négociation. Pourtant, seulement 33 p. 100 de la main-d'oeuvre est syndiquée, et il y a 85 p. 100 de tous les fonds de pension qui font l'objet de négociations collectives. La moitié de tous les fonds de pension qui existent au Canada aujourd'hui sont négociés par les syndicats du secteur public, ce qui constitue assurément une importante mise en commun de capitaux.

Je pense que le gouvernement fédéral peut faire beaucoup à ce sujet. Il devrait insister pour que les experts financiers consultent les propriétaires des fonds de pension au sujet de l'élaboration des politiques et pour que les investissements soient effectués conformément aux critères éthiques des propriétaires des fonds. Je pense que c'est un précepte de justice naturelle.

Il faut dire que le gouvernement fédéral, sur l'initiative du gouvernement du Québec, a créé un fonds de capital de risque financé par les employés, qui constitue à lui seul la plus importante mise en commun de capital de risque au Canada, régie et organisée par le mouvement syndical. Il n'est pas surprenant qu'il y ait des critères éthiques à respecter.

Quand nous avons créé notre fonds en Colombie-Britannique, des experts nous ont dit qu'on ne pourrait pas faire d'argent avec ce genre de restrictions. Selon eux, la première année, il était trop tôt pour se prononcer et, la troisième année, on ne pouvait faire d'évaluation. Le fonds a aujourd'hui sept ans, et l'intérêt simple sur l'investissement est en moyenne de seulement 19 p. 100, composé chaque année. En tenant compte des crédits d'impôt, le rendement a été d'environ 35 p. 100 pour les investisseurs qui ont pris des risques élevés et contribué à montrer aux travailleurs l'importance du capital de risque et des mises de fonds initiales.

Je pense que ce programme a été avantageux pour tout le monde, et qu'il faut en féliciter le gouvernement. Mais on peut faire beaucoup plus. Je pense qu'il est temps que les Canadiens assument la responsabilité non seulement du travail qu'ils effectuent et des impôts qu'ils paient, mais aussi des entreprises dont ils sont propriétaires par leur salaire différé.

Franchement, quand des entreprises comme Nortel, qui appartiennent à tous les Canadiens qui souscrivent à un régime de pension, perdent 75 p. 100 de leur valeur et récompensent leur PDG en lui versant une prime de 120 millions de dollars et un salaire de 90 millions de dollars pour licencier 25 000 travailleurs canadiens... il n'est pas normal pour l'investissement de nos fonds de pension de laisser un PDG agir ainsi.

Le président: Madame Turmel.

[Français]

Mme Nycole Turmel: Je vais aborder deux sujets. Vous parlez des besoins au niveau de la main-d'oeuvre. Le problème est le même au niveau du secteur public fédéral, surtout dans le secteur technique et dans le secteur des employés des milieux opérationnels.

Maintenant, en plus du problème des salaires, il y a deux problèmes à la fonction publique fédérale: la formation et le renouvellement de la fonction publique fédérale. On n'a pas les budgets nécessaires pour former les employés.

• 1705

La deuxième partie de tout ceci, c'est que présentement, la moyenne d'âge est d'environ 48 ans et qu'au moins 30 p. 100 des employés de la fonction publique fédérale sont des employés occasionnels, des employés à terme ou des employés à temps partiel. Le confrère Georgetti parlait de stabilité et de qualité de vie. Qu'est-ce qu'on fait quand la fonction publique fédérale ne donne pas l'exemple?

Ce sont les deux points que je voulais ajouter. Je pense que l'accent doit être mis sur la formation et sur la stabilité à l'intérieur de la fonction publique fédérale.

[Traduction]

Le président: Madame Connors.

Mme Kathleen Connors: Il est certain que les infirmières pourraient reprendre à leur compte ce qu'on a dit au sujet des compétences et de la formation. Il suffit de savoir que les Américains viennent recruter chez nous des infirmières qui ont reçu une formation postsecondaire qui est financée finalement par le gouvernement fédéral et les transferts de paiement.

On vient ici offrir aux infirmières la possibilité de poursuivre leur formation, aux frais de l'employeur. Ces employeurs investissent dans leurs employés. À de multiples reprises, dans notre pays... C'est seulement en Alberta, avec la dernière convention collective, que les infirmières ont obtenu deux jours de congé pour poursuivre leur formation et cinq jours si elles étudient pour obtenir un diplôme. C'est ridicule. Comment allons-nous rapatrier les infirmières canadiennes si notre pays n'est pas en mesure d'offrir des possibilités de formation comparables?

Notre fédération, en collaboration avec le Congrès du travail du Canada, travaille à l'élaboration d'un projet pilote sous l'égide de Développement des ressources humaines Canada pour que des fonds de l'assurance-emploi soient versés à des travailleurs du secteur de la santé pour la formation permanente. Si on veut poursuivre des études postsecondaires, on ne peut toucher d'assurance-emploi. Il faut régler ce problème et le surplus de l'assurance-emploi pourrait être consacré à la formation; il pourrait servir à valoriser le travail et à mettre à profit les compétences que les travailleurs du secteur possèdent déjà.

Pour ce qui est d'inciter les gens à se lancer dans le domaine de la santé, faisons comme en République d'Irlande, pour l'amour du ciel. Dans ce pays, ceux qui s'inscrivent en sciences infirmières peuvent étudier gratuitement. En effet, on offre de payer les études de ceux qui choisissent ce métier, et des jeunes gens se sont lancés dans ce domaine pour cette raison.

Je sais que le Parti libéral a offert des comptes d'apprentissage individuels. Pourquoi ne pas payer les frais de scolarité dans les domaines où il y a pénurie de main-d'oeuvre? Il faut faire des investissements de ce genre pour ceux qui vont travailler et s'engager à rester, si on les valorise en leur offrant des perspectives de carrière. Il faut penser carrière, pas emploi, et valoriser cela.

Le président: Merci.

Monsieur Murnigham.

M. Bill Murnigham: J'ai deux observations à faire, rapidement. Un problème qui touche tout le monde est celui de la pénurie de main-d'oeuvre qualifiée dans l'industrie, dans le secteur public, dans les domaines de la construction, de la transformation, et partout. J'aimerais dire qu'il faut envisager la formation autrement. On demande aux entreprises privées d'en partager le fardeau. Or, elles constatent qu'une fois formés, les employés partent. Cela devient un problème.

Je pense qu'il faut reconnaître que c'est un échec total. Le marché ne peut pas assurer seul ce genre de formation. Il peut être encouragé à le faire, mais je pense qu'il faut rétablir le financement de base pour l'enseignement postsecondaire et offrir des fonds de l'assurance-emploi pour les stages de formation dans les entreprises en restructuration. Encore une fois, je pense qu'il faut repenser la question très rapidement.

Pour ce qui est de la question de la productivité dont le président a parlé, j'aimerais dire que les travailleurs entendent beaucoup parler de la productivité. C'est tout à fait vrai. M. Georgetti a parlé d'investissement. L'investissement est essentiel pour améliorer la productivité. Ce serait un changement de mentalité et de vocabulaire que de parler d'investissement dans le secteur public. Le vocabulaire de la productivité peut servir. Si nous voulons améliorer la productivité dans le secteur public, il faut investir dans ce secteur. Et on peut envisager la même chose dans des secteurs sous-financés, comme les soins de santé, l'éducation, le logement et les services publics en général.

Le président: Monsieur Massé.

[Français]

M. Henri Massé: Sur la question des choix réels, je voudrais indiquer qu'on est souvent venus ici pour présenter des solutions alternatives aux décisions du gouvernement alors qu'il y avait un déficit énorme. Je pense qu'il fallait effectivement corriger le déficit. On a exigé des sacrifices importants de la population et des travailleurs et travailleuses des services publics, mais c'était peut-être incontournable. Mais quand on a une marge de manoeuvre, et on en a une réelle en ce moment, il me semble qu'il faut regarder ces questions avec beaucoup plus d'aplomb. Ce qui me chicote, c'est que quand on discute de ça, on en fait toujours une chicane fédérale-provinciale.

• 1710

Le gouvernement fédéral a affecté des budgets à l'éducation, mais pas où on l'aurait nécessairement souhaité dans chacune de nos provinces. Pour la santé, c'est la même chose. Il me semble qu'on devrait passer outre à ces chicanes et admettre qu'il y a un problème réel et trouver une façon de le corriger.

Je termine en parlant de la productivité et de la question de la formation. Pour ce qui est de la productivité, on est en train de rattraper les États-Unis, mais on a encore un retard assez important par rapport à eux. Ce retard sera très difficile à rattraper avec notre dollar à 80 ¢. La haute technologie, les machines viennent en grande partie des États-Unis, et quand elles ne viennent pas des États-Unis, elles viennent de pays où on est obligés de payer en dollars américains. On a donc moins de changement technologique qu'on devrait en avoir, et ça va durer tant et aussi longtemps que notre dollar sera bas.

Mais on a un avantage, et c'est notre formation qui est encore meilleure que celle de beaucoup d'autres. C'est là qu'il faudrait réinvestir massivement. Même si on prend un peu de retard au niveau de la technologie, si on se rattrape au niveau de la formation, notre niveau de productivité pourra se tenir près du niveau de productivité américain. Comme on vient de le dire, c'est une question d'investissement, et encore là, on tombe dans les conflits entre les provinces et le fédéral.

Il y a eu une entente avec le Québec sur la formation de la main-d'oeuvre, mais le budget ne permet pas, à l'heure actuelle, de vraiment faire de la formation professionnelle. Il ne permet pas de former les travailleurs et les travailleuses en emploi, alors qu'on sait que des changements radicaux s'en viennent. On n'a pas la formation nécessaire. Donc, il faudrait que le gouvernement réinvestisse là-dedans et qu'il y ait des ententes avec les provinces, parce que la plupart des provinces gèrent ces questions elles-mêmes à l'heure actuelle.

[Traduction]

Le président: Merci. Au nom du comité, j'aimerais vous remercier. Malheureusement, nous devons aller voter et il n'y aura pas de sonnerie. Le vote se tiendra à 17 h 15.

Je tiens à vous remercier très sincèrement de vos témoignages. Comme vous le savez, j'estime que le point de vue des syndicats est extrêmement important si nous voulons nous attaquer à une question qui est, je pense, primordiale pour les Canadiens—à savoir l'élaboration d'un programme visant à améliorer le niveau de vie de tous les Canadiens. Nous avons parlé de la productivité. Je suis bien sûr sensible à ce que vous en pensez. Ce fut une table ronde très intéressante.

Avant de terminer, j'ai une brève annonce à faire aux membres du Comité des finances. Pat Steenberg, notre greffière, qui est avec nous depuis deux ans et demi et a fait de l'excellent travail, a accepté un nouvel emploi qui, je pense, va beaucoup l'intéresser, auprès des Églises canadiennes pour la justice et la paix.

C'est une grande cause, bien sûr, Pat. Inutile de dire que vous allez nous manquer. Au nom du comité, j'aimerais vous exprimer toute notre reconnaissance pour l'excellent travail que vous avez accompli au cours de ces deux ans et demi. Merci.

Là-dessus, la séance est levée.

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