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ENVI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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37e LÉGISLATURE, 1re SESSION

Comité permanent de l'environnement et du développement durable


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le jeudi 9 mai 2002




¿ 0905
V         Le vice-président (M. Bob Mills (Red Deer, Alliance canadienne))
V         M. Neil Townsend (directeur exécutif, Transboundary Watershed Alliance)
V         M. David MacKinnon (coordonateur, Bureau de Whitehorse, Transboundary Watershed Alliance)

¿ 0910

¿ 0915
V         M. Neil Townsend

¿ 0920
V         Le vice-président (M. Bob Mills)
V         M. Peter Ewins (directeur, Conservation de l'Arctique, Fonds mondial pour la nature au Canada)

¿ 0925
V         M. Joshua Laughren (directeur, Conservation marine, Fonds mondial pour la nature au Canada)

¿ 0930
V         Le vice-président (M. Bob Mills)
V         M. William J. Borland (directeur, Affaires environnementales, J.D. Irving Ltd., Association des industries de l'environnement du Nouveau-Brunswick)

¿ 0935

¿ 0940
V         Le vice-président (M. Bob Mills)
V         Chef Gibby Jacob (Nation Squamish, Groupe de travail technique d'évaluation environnementale des Premières Nations)

¿ 0945

¿ 0950
V         Le vice-président (M. Bob Mills)
V         

¿ 0955
V         M. Neil Townsend
V         M. Roy Bailey
V         M. Neil Townsend
V         M. Roy Bailey
V         M. Neil Townsend
V         Chef Gibby Jacob
V         M. Roy Bailey
V         M. Peter Ewins

À 1000
V         Le vice-président (M. Bob Mills)
V         M. Bernard Bigras (Rosemont--Petite-Patrie, BQ)
V         

À 1005
V         M. William J. Borland
V         M. Bernard Bigras
V         M. Peter Ewins
V         M. Bernard Bigras
V         M. Peter Ewins

À 1010
V         M. Bernard Bigras
V         Chef Gibby Jacob
V         Mme Michelle Ellison (membre, Groupe de travail technique d'évaluation environnementale des Premières nations)
V         M. Bernard Bigras
V         Mme Michelle Ellison
V         Le vice-président (M. Bob Mills)
V         
V         M. William J. Borland
V         M. Julian Reed

À 1015
V         M. William J. Borland
V         M. Julian Reed
V         M. William J. Borland
V         M. Julian Reed
V         Le vice-président (M. Bob Mills)
V         Mme Hélène Scherrer (Louis-Hébert, Lib.)

À 1020
V         M. William J. Borland
V         Mme Hélène Scherrer
V         M. William J. Borland
V         Mme Hélène Scherrer
V         Chef Gibby Jacob

À 1025
V         Mme Michelle Ellison
V         Le vice-président (M. Bob Mills)
V         Mme Karen Redman (Kitchener-Centre, Lib.)
V         M. Peter Ewins
V         
V         Mme Karen Redman
V         Mme Michelle Ellison

À 1030
V         Chef Gibby Jacob
V         Le vice-président (M. Bob Mills)
V         Alan Tonks (York-Sud--Weston, Lib.)
V         M. Joshua Laughren

À 1035
V         M. Alan Tonks
V         M. Joshua Laughren
V         M. David MacKinnon
V         M. Alan Tonks
V         Chef Gibby Jacob

À 1040
V         Le vice-président (M. Bob Mills)
V         M. Charles Caccia (Davenport, Lib.)
V         
V         M. Charles Caccia
V         M. Peter Ewins
V         M. Charles Caccia

À 1045
V         M. Peter Ewins
V         M. Charles Caccia
V         M. Peter Ewins
V         M. Charles Caccia
V         M. Peter Ewins
V         M. Charles Caccia
V         M. Peter Ewins
V         
V         M. Charles Caccia
V         
V         M. Charles Caccia
V         
V         M. Charles Caccia
V         M. David MacKinnon

À 1050
V         M. Charles Caccia
V         M. David MacKinnon
V         M. Charles Caccia
V         Le vice-président (M. Bob Mills)
V         M. Charles Caccia
V         M. David MacKinnon
V         M. Charles Caccia
V         M. David MacKinnon
V         M. Charles Caccia
V         M. Neil Townsend
V         M. Charles Caccia
V         Le vice-président (M. Bob Mills)
V         M. Neil Townsend
V         Le vice-président (M. Bob Mills)
V         M. Neil Townsend
V         Le vice-président (M. Bob Mills)
V         M. Neil Townsend
V         Le vice-président (M. Bob Mills)
V         M. Neil Townsend

À 1055
V         Le vice-président (M. Bob Mills)
V         M. William J. Borland
V         Le vice-président (M. Bob Mills)










CANADA

Comité permanent de l'environnement et du développement durable


NUMÉRO 071 
l
1re SESSION 
l
37e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 9 mai 2002

[Enregistrement électronique]

¿  +(0905)  

[Traduction]

+

    Le vice-président (M. Bob Mills (Red Deer, Alliance canadienne)): La séance est ouverte.

    Permettez-moi d'abord d'accueillir nos invités. Je présente également mes excuses à ceux dont la comparution a été reportée; on me dit que le projet de loi C-5 en est la cause. Si vous êtes au courant de l'histoire, vous pourrez même en tenir rigueur aux députés de l'opposition mais nous n'entrerons pas dans ce débat, et nous ne nous prononcerons pas là-dessus non plus.

    Je crois savoir que certains d'entre vous ont aussi eu des ennuis d'avion mais cela, nous n'y pouvons rien. Si cela peut vous réconforter, l'avant-dernière fois où j'ai pris l'avion pour Ottawa, nous sommes arrivés à 5 heures du matin. Le vol avait cinq heures de retard. Au retour, le retard était de trois heures. Ça nous arrive donc à tous, et je sais combien c'est désagréable.

    Nous allons suivre l'ordre de comparution et commencer par la Transboundary Watershed Alliance. Vous avez beaucoup de documents, messieurs. Je vais vous demander de nous faire un résumé de vos observations, ainsi les députés auront du temps pour vous poser des questions. Merci.

+-

    M. Neil Townsend (directeur exécutif, Transboundary Watershed Alliance): Merci, monsieur le président.

    Je m'appelle Neil Townsend et je suis le directeur exécutif de la Transboundary Watershed Alliance.

[Français]

    Nous voudrions vous remercier de nous donner l'occasion de participer à la séance d'aujourd'hui.

[Traduction]

    Je vous remercie de l'occasion qui nous est offerte de vous exposer nos inquiétudes au sujet du projet de loi C-19, Loi modifiant la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale. Notre exposé d'aujourd'hui reprendra essentiellement notre mémoire du 21 février 2002.

    La Transboundary Watershed Alliance, ou TWA, regroupe 21 organisations consacrées à la conservation et à la défense de l'environnement des deux côtés de la frontière. Nous cherchons à préserver et améliorer la diversité et l'abondance des espèces de poissons et d'animaux dans leur habitat des bassins hydrographiques transfrontaliers de la Colombie-Britannique et du sud-est de l'Alaska. Comme vous pouvez le constater sur la carte, cette vaste région de 130 000 kilomètres carrés regroupe sept grands bassins hydrographiques qui vont du bassin Unuk au sud jusqu'au bassin Alsek dans le nord.

    La TWA a pour mandat de promouvoir la coexistence de collectivités et d'écosystèmes sains dans les bassins transfrontaliers. Elle encourage l'adoption d'une planification à long terme basée sur la conservation dans le but d'assurer la survie de ces magnifiques cours d'eau et le respect du rôle central des collectivités autochtones qui occupent ces bassins depuis des millénaires. Nous sommes convaincus qu'il faut favoriser l'intégrité écologique des bassins transfrontaliers dans leur intégralité, sans tenir compte des frontières internationales. Ces bassins hydrographiques transfrontiers relativement intouchés subissent et continueront de subir quantités d'agressions, qu'il s'agisse de routes et de mines ou d'exploitations forestières et d'ouvrages énergétiques de grande envergure.

    L'évaluation environnementale est un outil important et précieux permettant de ne pas compromettre la satisfaction des besoins de demain par les décisions d'aujourd'hui. La TWA est heureuse de pouvoir reconnaître le progrès que représente le projet de loi C-19 et de souligner les lacunes et les faiblesses que le comité pourra corriger, espérons-nous.

    Je cède maintenant la parole à mon collègue, David MacKinnon, qui présentera la première partie de notre exposé.

+-

    M. David MacKinnon (coordonateur, Bureau de Whitehorse, Transboundary Watershed Alliance): Merci, monsieur le président. Je m'appelle David MacKinnon et je suis coordonnateur du bureau de Whitehorse de la Transboundary Watershed Alliance.

    En ce qui concerne le projet de loi C-19, Loi modifiant la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale, commençons par l'article 2, qui porte sur les objectifs. Celui-ci confirme le besoin d'une coopération et d'une coordination améliorées entre les gouvernements fédéral et provinciaux. Toutefois, au sujet des efforts d'harmonisation entre les gouvernements, nous signalons à l'attention du comité plusieurs graves sujets d'inquiétude.

    En Colombie-Britannique, et peut-être aussi dans d'autres provinces, la norme en matière d'évaluation environnementale n'équivaut pas à celle de l'évaluation fédérale. Les changements attendus à l'Environmental Assessment Act de la Colombie-Britannique vont exacerber le problème. Le Bureau d'évaluation environnementale provincial a identifié des ébauches de paramètres législatifs qui prévoient un processus moins prescriptif et plus souple, une importance accrue accordée à la gestion des risques, l'absence d'appels lors de décisions relatives au processus, la définition du mandat et la désignation des personnes à consulter avant la demande par les auteurs du projet, le recouvrement des coûts et l'élimination des comités de révision des projets, fondement de la participation des citoyens.

    Les changements attendus à la loi provinciale devraient être un signal clair pour le gouvernement fédéral et les membres du comité qu'il faut une évaluation fédérale renforcée dans le projet de loi C-19. Nous recommandons que le comité modifie le projet de loi pour faire en sorte que les évaluations harmonisées respectent ou surpassent les normes de la LCEE.

    En ce qui concerne l'article 8, la TWA accueille favorablement les dispositions relatives au coordonnateur fédéral des évaluations environnementales. Selon notre expérience, celles-ci permettront une application plus uniforme de la loi. Nous appuyons les recommandations de la West Coast Environmental Law et d'autres témoins concernant l'étendue des responsabilités du coordonnateur. Comme eux, nous estimons que l'agence doit assurer la coordination dans tous les cas.

    Il faudrait inclure dans cet article des délais minimums pour la participation des citoyens et mentionner les activités saisonnières et traditionnelles des petites communautés. Il faudrait que le coordonnateur du projet, sur demande, fournisse un animateur pour les assemblées publiques. Il arrive en effet malheureusement que l'ambiance se dégrade et que les avis divergent au point de paralyser les interventions.

    Le comité devrait examiner et soumettre à un débat les diverses suggestions et recommandations des témoins pour améliorer et clarifier les fonctions et pouvoirs du coordonnateur fédéral et modifier l'article 8 en conséquence.

    L'article 9. La TWA se félicite de ce nouvel article. Au paragraphe 16.1, l'inclusion des connaissances de la communauté et des connaissances autochtones traditionnelles à l'évaluation environnementale permettra de tenir compte des conséquences locales et régionales du développement. Cette disposition permettra aux auteurs du projet, aux parties intéressées, aux autorités responsables et aux autorités fédérales de mieux comprendre les conséquences d'un projet. Cela est particulièrement vrai pour les considérations socio-économiques et culturelles dans l'étude des solutions de rechange.

    La formulation de cet article peut donner à penser qu'il est obligatoire de mettre ces connaissances à contribution. Nous partageons les réserves qui ont été exprimées sur ce point. Nous pensons toutefois que la réponse se trouve dans l'inclusion de la terminologie employée à l'article 8(j) de la Convention de l'ONU sur la diversité biologique, à laquelle le Canada est partie. Le gouvernement devrait être obligé de tenir compte des connaissances librement communiquées; nous espérons que le comité saura faire la part des choses entre les hésitations des témoins à faire part de leurs connaissances et le risque qu'une communauté n'ait pas voix au chapitre.

    Au paragraphe 16.2, la reconnaissance des études régionales constitue une nette amélioration à la Loi qui permettra de tenir compte des effets cumulatifs sur le paysage ou la région. Cet ajout vient combler une lacune grave actuellement partout au pays. Nous contestons toutefois le libellé qui limite les études à prendre en compte lorsqu'on cherche à établir les effets cumulatifs dans une région.

¿  +-(0910)  

    L'Alaska réclame depuis toujours une planification intégrée du bassin hydrographique régional de Taku. Or, la Colombie-Britannique ne cesse de faire la sourde oreille. Nous aussi réclamons une démarche régionale. L'évaluation actuelle au cas par cas nuit aux aspirations socio-économiques des collectivités locales et à la biodiversité de la région. Elle compromet également les activités terrestres des Premières nations ainsi que leurs valeurs culturelles. À notre avis, il devrait être obligatoire de tenir compte des études régionales. Cela permettrait de rendre beaucoup plus harmonieuses les négociations avec les Premières nations qui préfèrent discuter de l'intégralité de leur territoire.

    En outre, au sujet du libellé proposé de l'article 16.2,une controverse s'est élevée en Colombie-Britannique concernant les projets dits «à venir». Les autorités fédérales ont décidé que les effets cumulatifs n'avaient pas à être pris en compte en l'absence de propositions concrètes. Je vous invite à vous reporter à la page 10 de notre mémoire où nous décrivons la situation en détail.

    Au sujet de l'article 13, comme beaucoup de témoins, nous estimons qu'il faut supprimer la disposition sur la décision finale. Une décision irrévocable du ministre si tôt dans le processus est illogique. Le rapport devrait tenir compte des considérations socio-économiques et culturelles de manière à prendre en considération les conséquences plus vastes d'un ouvrage sur l'usage traditionnel des terres.

    Je redonne maintenant la parole à M. Townsend.

¿  +-(0915)  

+-

    M. Neil Townsend: Pour ceux qui suivent le texte du mémoire, le paragraphe suivant devrait porter le titre «Article 10» au lieu de «Article 18».

    Au sujet de l'article 10, donc, la TWA appuie tout amendement destiné à renforcer le rôle capital de la participation des citoyens à l'évaluation environnementale. Le libellé du paragraphe 18(3), toutefois, ne suffit pas à guider l'autorité responsable pour déterminer l'opportunité de la participation des citoyens. Puisque nous avons du mal à trouver un cas où une telle participation ne serait pas opportune, le pouvoir discrétionnaire entourant l'inclusion ou l'exclusion de la participation publique nous inquiète. C'est pourquoi nous demandons que le projet de loi C-19 soit renforcé pour garantir la participation publique et que l'on précise le pouvoir discrétionnaire en la matière.

    Article 19. Nous sommes heureux de la modification proposée en faveur des programmes de suivi discrétionnaires aux programmes obligatoires. Ces derniers sont indispensables pour permettre d'atteindre les objectifs d'atténuation et de répondre aux inquiétudes des citoyens.

    L'article 20, qui concerne la coopération au sein des comités de révision intergouvernementaux, comme nous l'avons dit, nous souhaitons une mention claire des pouvoirs fédéraux dans le projet de loi C-19 et une indication que les normes et mécanismes fédéraux prévaudront.

    Article 23, nous soulignons au comité une lacune concernant l'application de la LCEA concernant les effets environnementaux à l'échelle internationale. Notre proposition est amplement décrite dans notre mémoire.

    C'est précisément à cause de l'article 23 que nous sommes ici aujourd'hui. À notre avis, il faut un nouvel amendement au paragraphe 47(1) pour que le Canada respecte ses obligations en vertu du Traité sur le saumon du Pacifique pour toute évaluation d'un projet ayant des conséquences à l'étranger et pour s'assurer que les inquiétudes qu'ils pourront susciter de part et d'autre de la frontière puissent être calmées de manière efficace et opportune.

    L'article 47 ne prévoit aucun mécanisme déclencheur outre le pouvoir discrétionnaire du ministre, si un projet risque d'avoir des effets néfastes à l'étranger et de nuire aux relations internationales, comme c'est le cas aujourd'hui entre la Colombie-Britannique et l'Alaska. Cela risque également d'exaspérer nos voisins américains à l'avenir, surtout si l'on songe à la controverse en Alaska autour de l'aquaculture et de la levée possible du moratoire sur la mise en valeur des ressources extracôtières.

    Nous demandons que soit ajouté au paragraphe 47(1) un mécanisme permettant au ministre de l'Environnement et à celui des Affaires étrangères d'intervenir rapidement. Le libellé que nous proposons se trouve à la page 18.

    Au sujet de l'article 26, nous nous réjouissons de la création du Registre canadien d'évaluation environnementale. Comme d'autres, nous souhaitons que le registre actuel prévu à l'article 55 soit conservé et que le registre électronique vienne s'y ajouter.

    La TWA reconnaît l'immense effort accompli à l'occasion de l'examen quinquennal de la loi ainsi que l'excellent travail réalisé par le Comité consultatif de la réglementation en préparation pour le projet de loi C-19. La TWA demande au comité de recommander une autre révision quinquennale dans le projet de loi.

    En conclusion, la TWA estime que le projet de loi C-19 pourrait être renforcé davantage pour que les principes de l'évaluation soient appliqués uniformément au pays et non de façon irrégulière d'une province à l'autre. Le bassin hydrographique transfrontalier de la Colombie-Britannique et de l'Alaska continuera de faire face à une multitude de projets de développement de qualité et de viabilité diverses. Nous estimons que ces régions aux abondantes richesses naturelles, importantes sur le plan culturel et d'une grande diversité méritent la meilleure protection législative et les meilleures évaluations environnementales que le Parlement puisse leur accorder. Grâce à ces mécanismes, nous sommes convaincus que la région pourra devenir un modèle de développement durable pour le Canada et le reste du monde.

    La TWA remercie le Comité permanent de l'environnement et du développement durable de la Chambre des communes d'avoir pu exprimer ses vues et formuler ses recommandations sur le projet de loi C-19.

¿  +-(0920)  

+-

    Le vice-président (M. Bob Mills): Merci beaucoup.

    Nous entendrons maintenant le porte-parole du Fonds mondial pour la nature.

+-

    M. Peter Ewins (directeur, Conservation de l'Arctique, Fonds mondial pour la nature au Canada): Merci beaucoup.

    Je m'appelle Peter Ewins et mon collègue est Josh Laughren. Au nom du Fonds mondial pour la nature au Canada, nous vous remercions beaucoup de nous donner cette occasion de vous faire part de notre point de vue et de formuler nos recommandations sur les modifications que l'on propose d'apporter à la LCEE dans le projet de loi C-19. Nous sommes également accompagnés de Sarah Dover, qui est présente dans la salle, même si elle n'est pas assise à la table, et qui est notre conseillère en politique ici à Ottawa.

    Je vais prendre la parole en premier et Josh Laughren suivra. Je suis le directeur de notre programme de conservation de l'Arctique, tandis que Josh dirige nos travaux de conservation marine. À nous deux, nous nous occupons d'une bonne partie des dossiers qui nous préoccupent au Canada. Comme vous pouvez l'entendre à mon accent, j'ai grandi au Royaume-Uni. J'ai fait mon doctorat en sciences marines en étudiant la Mer du Nord, dans le dossier du secteur du pétrole et du gaz. Je laisse à Josh le soin de vous décliner ses titres et qualités.

    Je voulais vous dire que ma fillette, qui a huit ans, m'a demandé hier quand je suis parti: «Pourquoi t'en vas-tu encore à Ottawa, papa?» J'ai dû lui répondre: «Eh bien, c'est une bonne question, chérie, mais c'est une mission importante». J'ai dû lui expliquer pourquoi je devais consacrer mon temps à un comité permanent qu'elle ne pouvait pas comprendre. J'ai donc simplement dit: «Parce que je veux aider les gens à faire du Canada un endroit où il fera bon vivre pour toi et pour tes enfants, et même pour les ours, les caribous et les poissons». J'ai trouvé assez intéressant qu'elle me demande d'expliquer en termes concrets à quoi rime tout ce processus, et je tenais à vous en faire part.

    Le Fonds mondial pour la nature au Canada est venu ici aujourd'hui pour poser une question précise au comité. Vous avez devant vous un résumé écrit de sept pages, dans lequel nous faisons valoir chacun de nos points de façon très concise. Vous y trouverez une série de cartes en couleur avec transparents et je vous demanderai de vous y reporter pendant mon exposé, mais aussi par la suite. Notre but, c'est de vous demander de modifier le projet de loi C-19 pour aider à tenir les engagements pris par le gouvernement fédéral relativement aux aires protégées, comme étape cruciale vers l'atteinte d'un développement vraiment durable partout au Canada, autant pour les terres que pour les cours d'eau.

    Pour ceux d'entre vous qui ne connaissent pas le Fonds mondial pour la nature, très brièvement, c'est la plus grande organisation de conservation indépendante au monde, présente dans plus de 100 pays, et présente au Canada depuis plus de 30 ans. Notre mission est d'aider à bâtir un avenir dans lequel les êtres humains pourront vivre en harmonie avec la nature, dans un équilibre durable entre le développement et la protection. Il est très important de comprendre que nous insistons beaucoup sur l'aspect durabilité, en tenant compte de la présence des gens dans l'équation.

    Dans la foulée de nombreux engagements internationaux envers le développement durable, en 1992, le Conseil canadien des ministres de l'Environnement, le Conseil canadien des ministres responsables des parcs, et le Conseil des ministres de la faune du Canada ont tous signé une déclaration dans laquelle les signataires prenaient l'engagement de compléter le réseau d'aires protégées du Canada, à titre de représentants des régions naturelles terrestres du pays, d'ici l'an 2000; et d'accélérer la mise en place d'un tel réseau dans les régions naturelles marines du Canada. Cette déclaration, qui tient en une page, se trouve à l'annexe 1 du document que nous vous avons remis.

    Essentiellement, cet engagement visait à mettre de côté et à protéger un échantillon du riche patrimoine naturel et national du Canada en paysages terrestres et marines. La tâche est seulement terminée à un tiers pour les aires terrestres, et on n'a pas encore commencé pour les aires marines. Aujourd'hui, on continue de prendre des décisions de mise en valeur, avec ou sans évaluation environnementale, d'un bout à l'autre de notre pays, autant sur terre que dans l'eau, et ces développements ferment graduellement la porte pour ce qui est de la possibilité de terminer un tel réseau d'aires protégées représentatives. Je compare l'approche conceptuelle dans ce dossier à une politique d'assurance: on met de côté pour l'avenir, étant donné l'incertitude qui plane, des choses précieuses que l'on veut léguer aux générations futures. En l'occurrence, les écosystèmes intacts et les eaux et les terres du Canada sont cette police d'assurance.

¿  +-(0925)  

    Ces engagements que les gouvernements du Canada ont tous pris il y a 10 ans ont une raison d'être simple et incontestable. Il s'agit de l'approche en deux volets face au développement durable que la plupart d'entre vous connaissent bien et qui est généralement reconnue. Le premier volet consiste à mettre de côté un échantillon représentatif d'aires protégées—des secteurs où il n'y aura aucune mise en valeur industrielle, à cause de leur valeur environnementale, culturelle et autre exceptionnelle—et l'autre volet consiste à faire de la mise en valeur industrielle dans le reste du paysage, mais en mettant en oeuvre les meilleures techniques disponibles en termes d'atténuation et de rétablissement.

    Je tiens à insister sur le fait que ces aires protégées sont en réalité les joyaux de notre patrimoine naturel. Elles comportent de nombreux avantages pour la biodiversité et la société. Quand ce réseau sera complet, ces aires seront clairement des secteurs de référence d'une valeur absolument fondamentale que nous utiliserons, comme société, pour évaluer et atténuer les répercussions cumulatives du développement. Elles représentent un élément absolument essentiel de l'évaluation environnementale.

    Ces aires constituent des réservoirs intacts de biodiversité et de processus écosystémiques. Elles représentent aussi un réseau d'endroits qui aident la biodiversité et les êtres humains à s'adapter aux répercussions des changements climatiques. Nous ne savons pas exactement de quoi aura besoin la biodiversité. Ces aires nous donnent les meilleurs outils possibles pour répondre à ces besoins. Dans bien des cas, en particulier dans les zones frontières du Canada, elles ont une grande importance culturelle et spirituelle pour les Premières nations. Il est clair que le parachèvement de ce réseau est l'une des tâches les plus fondamentales, si nous voulons pouvoir dire en toute honnêteté au Canada que nous pratiquons le développement durable.

    Ce point de vue n'a pas été retenu par l'ACEE dans les décisions prises dans le cadre de l'évaluation environnementale de la première mine de diamant du Canada dans les terres stériles—la mine BHP proposée en 1996—en conséquence, le Fonds mondial pour la nature a intenté une poursuite devant les tribunaux. En 1996, cette poursuite a débouché sur une lettre de l'ACEE, dans laquelle on reconnaissait l'importance de mentionner expressément, dans les évaluations environnementales, les aires protégées et les aires protégées potentielles. Cet engagement n'a pas été tenu non plus.

    Nous voici donc aujourd'hui confrontés à des exemples majeurs, concrets, régionaux des résultats de cette attitude sur le terrain, et de l'impact potentiel que peut avoir l'adoption par l'ACEE de ces principes, de cette approche et de ces engagements. Dans le dossier qui me préoccupe particulièrement, le gazoduc de la vallée du Mackenzie, qui s'ajoute à l'exploitation du gaz naturel dans l'Arctique occidental, nous avons une occasion en or de démontrer exactement sur quoi déboucherait cet engagement du Canada. Après avoir dirigé la plus importante commission royale de tous les temps au Canada, il y a 25 ans, le juge Thomas Berger a recommandé de ne pas construire de pipeline tant que toutes les revendications territoriales autochtones n'auraient pas été réglées et que l'on n'aurait pas établi une planification adéquate pour toutes les aires de conservation septentrionales--c'est ce que nous appelons aujourd'hui les «aires protégées».

    La dernière carte, qui se trouve à l'annexe 5, illustre mon dernier point. C'est une carte très simple de l'Alaska, du Yukon et des Territoires du Nord-Ouest. On y montre l'emplacement, il y a deux ou trois mois, des aires protégées existantes et du pipeline proposé dans la vallée du Mackenzie. Vous pouvez voir qu'en Alaska, le paysage est parsemé de secteurs colorés en vert raisonnablement étendus. C'est essentiellement un réseau d'aires protégées qui répondent à toutes ces fonctions que nous envisagions en 1992, quand l'engagement des trois conseils canadiens a été pris d'équilibrer le développement industriel. En Alaska, il y a des réseaux d'aires protégées adjacentes à l'oléoduc de l'Alaska.

    Il y a un contraste frappant entre cette carte et celle du nord-ouest du Canada, qui est essentiellement vierge. Il n'y a aucune aire protégée dans laquelle on garantirait la protection des valeurs culturelles et naturelles.

    Je vais m'en tenir là. Je tiens à vous remercier encore une fois. Je suis convaincu que, grâce au projet de loi C-19, le processus d'évaluation environnementale peut contribuer puissamment à la réalisation de cet engagement fédéral.

+-

    M. Joshua Laughren (directeur, Conservation marine, Fonds mondial pour la nature au Canada): [Note de la rédaction: Difficultés techniques] ...voilà essentiellement où nous en sommes. Nous avons un engagement fédéral pour ce qui est des aires protégées, et nous avons aussi un engagement pris par l'Agence canadienne d'évaluation environnementale de tenir compte des aires protégées dans les évaluations environnementales, ni l'un ni l'autre de ces engagements ayant vraiment été tenus.

    Comme Pete l'a dit, nous avons accompli à peu près un tiers de la tâche pour les aires terrestres, et nous venons tout juste de commencer pour les aires marines. L'annexe 2 présente une carte assez compliquée, mais que vous pouvez comprendre facilement si je vous dis que les secteurs en rouge, qui représentent une grande partie du Canada, ne comptent que très peu ou pas du tout d'aires protégées. Je vais montrer que cette inaction entraîne un coût.

    À l'annexe 3, il y a une carte de la Nouvelle-Écosse. Je pense que tout le monde connaît le dossier de l'exploitation pétrolière extracôtière en Nouvelle-Écosse. On voit sur la carte les secteurs qui ont été aliénés, la plupart depuis cinq ans. Plus de 6 millions d'hectares ont été cédés aux compagnies pétrolières et gazières, alors qu'il y a actuellement zéro—pas une seule—aire protégée au large de la Plate-forme Scotian. Vous pouvez voir sur la carte une aire vierge au milieu des secteurs aliénés. Cette aire que l'on appelle «the Gully» pourrait devenir une aire protégée.

    Ce que je veux démontrer, c'est que nous sommes en train de perdre des options pour notre réseau d'aires protégées. Ce n'est pas seulement que nous prenons du retard à remplir nos engagements; nous sommes en train de perdre toute possibilité de les tenir. Comme la LCEE met en cause le développement durable, et donc la protection et le développement, nous estimons que la loi a un rôle à jouer soit de veiller à ce que nous puissions tenir nos engagements.

    C'est un fait que nous avons pris beaucoup de retard à parachever la mise en place d'un réseau représentatif, et c'est ce qui a incité le Fonds mondial pour la nature à promouvoir ce que nous appelons le principe de la préséance de la conservation. Essentiellement, cela revient à dire que les grands projets de développement devraient recevoir le feu vert seulement après que l'on ait identifié un réseau d'aires protégées représentatif dans la région naturelle où l'on propose de faire le développement en question. Voila pourquoi dans les premières recommandations que nous formulons en vue d'apporter des amendements aux articles 2 et 16, nous recommandons de changer la définition de l'expression «effet environnemental» à l'article 2 pour inclure le potentiel de compléter un réseau représentatif d'aires protégées. Cela ne ferait qu'inscrire dans la loi l'engagement déjà pris par l'Agence d'évaluation environnementale. Ce n'est rien de nouveau, il s'agit simplement de donner suite à un engagement existant.

    Le deuxième point auquel il faut s'attarder, ce sont les répercussions des nouveaux développements sur les aires protégées existantes. Là encore, l'annexe 3 illustre très clairement notre argument. Le secteur dit «Gully» saute au yeux, complètement entouré par des projets d'extraction du pétrole et du gaz extracôtiers. Comme je connais un peu les courants dans ce secteur, le mouvement de l'eau et les masses d'eau, les alevins, etc., je sais très bien à quel point ces projets extracôtiers peuvent facilement avoir des répercussions sur le fameux Gully. Il m'apparaît évident que lorsque l'on donne le feu vert à de tels projets, il faut tenir compte dans les évaluations environnementales du fait qu'il existe là-bas un trésor biologique de calibre mondial reconnu internationalement qui s'appelle le Gully. Et la question s'est déjà posée. Ce n'est pas nouveau. Voyons par exemple ce qui s'est passé avec la mine de charbon Cheviot. Mais c'est encore plus crucial dans un environnement marin, étant donné la fluidité de l'eau. Nous avons donc ajouté une recommandation à l'article 48, pour faire en sorte que les évaluations environnementales prennent expressément en compte les aires protégées existantes et que l'on confère certains pouvoirs au ministre des Parcs pour s'assurer que cela soit fait.

    Nous avons donc deux arguments très précis. Le premier vise à inscrire dans la loi les engagements que nous avons déjà pris, pour s'assurer qu'on y donne vraiment suite, et le deuxième consiste à s'assurer que l'on tienne compte, dans l'étude de tout nouveau développement, non seulement des aires protégées existantes, mais aussi de notre capacité de remplir les engagement nationaux et internationaux relativement à un réseau d'aires protégées. Nous croyons que ce sera considéré comme une proposition d'amendement amicale, puisqu'elle vise seulement à reconnaître des engagements qui ont déjà été pris.

    Je pense que j'ai assez parlé. Nous essayons d'être le plus concis possible.

    Je vous remercie de nous avoir donné l'occasion de prendre la parole aujourd'hui. Nous sommes à votre disposition pour répondre à vos questions.

¿  +-(0930)  

+-

    Le vice-président (M. Bob Mills): Merci beaucoup. Nous passerons aux questions tout à l'heure.

    Nous entendrons maintenant monsieur William Borland.

+-

    M. William J. Borland (directeur, Affaires environnementales, J.D. Irving Ltd., Association des industries de l'environnement du Nouveau-Brunswick): Bonjour, monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du Comité permanent de l'environnement et du développement durable. Je m'appelle Bill Borland et je suis directeur des affaires environnementales chez J.D. Irving Litd. à Saint John, au Nouveau-Brunswick. Je m'adresse au comité au nom de l'Association des industries de l'environnement du Nouveau-Brunswick, une association sans but lucratif oeuvrant à promouvoir l'essor de l'industrie de l'environnement au Nouveau-Brunswick.

    L'association a été fondée en 1994 et représente depuis les intérêts de ses membres dans tous les secteurs de l'industrie de l'environnement, allant de l'élaboration et de la fabrication d'outils technologiques aux services consultatifs, techniques, financiers et juridiques. À ce titre, un bon nombre de nos membres interviennent, directement ou indirectement, dans le processus d'évaluation environnementale et risquent d'être touchés par les modifications à la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale.

    Le risque auquel on est confronté en vous rencontrant à cette étape-ci de vos délibérations est qu'il est très difficile de dire quoi que ce soit d'original. Nous avons toutefois suivi ce que les autres ont dit et nous avons jugé qu'il était important de témoigner, ne serait-ce que pour corroborer certains témoignages que vous avez déjà entendus. À cet égard, je serai très bref.

    C'est avec grand intérêt que nous avons suivi le déroulement de l'examen quinquennal, notamment en prenant connaissance du document de travail pour consultation publique et du rapport faisant suite à la révision de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale, déposé au Parlement du Canada par le ministre de l'Environnement. Nous appuyons sans réserve la réalisation des trois défis suivants présentés dans le document de travail: rendre le processus plus cohérent, plus prévisible et plus opportun; améliorer la qualité des évaluations environnementales; et accentuer les occasions de participation du public. Ceux-ci constituent assurément un bon pas vers l'élaboration de mesures législatives plus efficaces en matière d'évaluation environnementale. Nous appuyons avec la même conviction les recommandations formulées dans le rapport déposé par le ministre de l'Environnement à la suite de l'étude du Comité consultatif de la réglementation, et nous nous réjouissons que la plupart d'entre elles aient été acceptées et introduites dans le projet de loi C-19.

    Nous estimons que lorsque l'occasion se présente de commenter une mesure législative telle que le projet de loi C-19, il est aussi important de reconnaître les mesures positives qui ont été prises et de souligner les progrès accomplis que de relever les points de désaccord. Nous constatons que, très souvent, les gens viennent se plaindre des trois premiers points et ne mentionnent pas les sept autres, et que lorsque l'on prend connaissance de la version définitive on constate que l'on a changé les trois premiers et supprimé les sept dont on était vraiment satisfait. Je trouve donc qu'il est important de dire qu'il y a de très bonnes choses dans ce projet et de vous demander de bien vouloir les laisser telles quelles.

    Dans son rapport déposé à la Chambre, intitulé Renforcer l'évaluation environnementale pour les Canadiens, le ministre reprend les trois défis proposés dans le document de travail et les retient comme objectifs de la nouvelle LCEE. Si vous le permettez, nous aimerions commencer chacun de ces objectifs en commençant par le deuxième et le troisième, puis terminer avec nos observations sur le premier.

    Au terme de cinq ans consacrés à l'examen de la LCEE, il ne fait aucun doute qu'améliorer la qualité des évaluations environnementales contribuera à de meilleures décisions au profit du développement durable. Nous sommes tous en faveur des initiatives proposés menant à la réalisation de cet objectif et nous leur donnons notre appui. Accroître la conformité à la loi par un programme d'assurance de la qualité garantira de meilleures évaluations environnementales.Renforcer les actions de suivi mènera à la responsabilisation et permettra de faire en sorte que des mesures de protection de l'environnement demeurent en place durant toute la durée des projets. L'examen plus rigoureux des effets cumulatifs,—tâche qui pourrait s'avérer difficile—est un aspect qui doit être pris en compte.

    Pour ce qui est d'accentuer les occasions de participation du public, il est clair qu'un meilleur accès à l'information, une prise en compte accrue des perspectives autochtones et l'élargissement des occasions de participation seront grandement bénéfiques à la réalisation de cet objectif.

    Pour ce qui est maintenant de rendre le processus plus cohérent, plus prévisible et plus opportun, c'était assurément l'un des points les plus épineux auquel nous ayons été confrontés du point de vue pratique et du point de vue d'un promoteur de projet. L'incertitude qui régnait autour du Processus d'évaluation et d'examen en matière d'environnement (PEEE) sous l'ancienne LCEE était sans contredit un des problèmes majeurs, avec le fait que le processus était imprévisible et demandait beaucoup de temps.

¿  +-(0935)  

    Pour avoir participé à une évaluation fédérale, je sais que des options de développement sont écartées pour éviter des terres ou des fonds fédéraux de manière à se soustraire à une évaluation. Pourquoi? Parce que le processus est perçu comme un trou noir sans fond. Une fois qu'on y a mis le pied, on ne sait jamais si on en sortira ou quand. Quand on essaie d'établir un budget ou de saisir une occasion, la loi peut être catastrophique. Dans tous les cas où j'y ai été mêlé, on a trouvé une solution respectueuse de l'environnement, mais je ne suis pas convaincu qu'il s'agissait de la meilleure. Le projet de loi marque une grande amélioration sur ce point mais ne rend pas vraiment le processus prévisible ou rapide.

    La plupart des recommandations du Comité consultatif de la réglementation ont été acceptées par l'ACEE et incorporées au projet de loi C-19. Toutefois, à notre avis, une recommandation très importante a été omise. Une étape destinée à définir le cadre de l'évaluation et du projet est nécessaire pour réduire l'incertitude tant du promoteur du projet que du public, lesquels sauraient alors à quoi s'attendre d'une étude approfondie. Sans cette étape, le processus reste trop ouvert et continue de ressembler à un trou noir.

    L'ampleur du projet et celle de l'évaluation doivent être définies pour que toutes les parties sachent dès le début quels délais ils ont acceptés et la portée de l'évaluation. ce qui doit être évalué. Faute de l'avoir fait par le passé, les conclusions des évaluations ont suscité du mécontentement qui ont mené à des poursuites et rendu le processus incertain. Ces situations ne sont dans l'intérêt de personne: les promoteurs voient leur projet différé, leurs partenaires sont déçus et les organismes de réglementation sont frustrés. En l'absence de cette étape, nous pataugeons dans l'inconnu durant toute la durée de l'opération, ce qui constitue une perte de temps et d'argent.

    Une étape de définition du cadre de l'évaluation améliorera considérablement la certitude et la satisfaction des participants aux évaluations environnementales. Il faut espérer qu'une telle mesure permettra d'éviter les litiges et favorisera la participation des intervenants.

    Je félicite le ministère et le Comité consultatif de la réglementation de l'immense travail accompli à l'occasion de l'examen quinquennal d'une loi très complexe et très controversée. Nos recommandations aboutiront à une évaluation environnementale plus productive et plus efficace, ce qui ne pourra qu'améliorer le climat pour tous les Canadiens.

    Nous espérons que vous donnerez suite à nos suggestions et je vous remercie de votre temps et de votre attention.

¿  +-(0940)  

+-

    Le vice-président (M. Bob Mills): Merci beaucoup.

    Nous allons maintenant entendre le dernier groupe.

+-

    Chef Gibby Jacob (Nation Squamish, Groupe de travail technique d'évaluation environnementale des Premières Nations): Bonjour, je suis le chef Gibby Jacob et mon nom ancestral est KaKeltn siyam. Je suis un des chefs héréditaires de la nation des Squamishs, ancien propriétaire de la totalité de Vancouver et je suis heureux d'être ici.

    Je suis accompagné de Michelle Ellison, membre du Groupe de travail technique en évaluations environnementales des Premières Nations, que je désignerai dorénavant sous le nom de groupe de travail. Nous sommes ici aujourd'hui pour faire un exposé au nom du groupe de travail et je vous remercie de l'occasion qui m'est offerte de le faire.

    Je suis au service de mon peuple depuis 21 ans et je suis l'un des chefs élus de ma tribu. J'en suis très fier. Il est rare que quelqu'un survive plus de deux ans en pays indien—sans interruption, je dois préciser.

    Je suis ici au nom du groupe de travail. Ce groupe fait fonction d' organisme de documentation pour les pratiques d'évaluation environnementale des Premières nations, les associations autochtones, les bureaux d'évaluation environnementale de la Colombie-Britannique et d'autres organismes et organisations. Un des objectifs de notre mandat est de

développer et de recommander des initiatives et des stratégies destinées à aider les Premières Nations, le Bureau d'évaluation environnementale de la Colombie-Britannique et les organismes gouvernementaux à faciliter et à soutenir des pratiques d'évaluation environnementale efficaces des Premières Nations.

Même si les représentants du Bureau d'évaluation environnementale de la Colombie-Britannique, de l'Agence canadienne d'évaluation environnementale et d'autres organismes gouvernementaux font partie du groupe, notre témoignage ne met en cause que les représentants des Premières Nations au sein du groupe de travail.

    Je vais discuter d'une inquiétude qu'éprouve le groupe de travail au sujet du libellé d'une disposition du projet de loi C-19 après quoi j'évoquerai les inquiétudes plus générales du groupe de travail. Le groupe de travail s'inquiète tout particulièrement d'une des rares dispositions du projet de loi C-19 qui reconnaît l'intérêt des Autochtones pour les évaluations environnementales. Il s'agit de la disposition qui cherche à incorporer le point de vue des Autochtones dans l'évaluation.

    Le paragraphe loi 16.1 du projet de loi C-19 énonce ceci:

Les connaissances locales et les connaissances et traditions autochtones peuvent être prises en compte pour l'évaluation environnementale d'un projet.

Le groupe de travail est d'avis que cela ne reflète pas de façon adéquate les inquiétudes importantes que les Premières Nations ont de l'utilisation pertinente des connaissances indigènes.

Tout d'abord, l'expression «connaissances et traditions autochtones» devrait être remplacée par «connaissances indigènes». L'expression «connaissances et traditions autochtones» laisse entendre que les seules connaissances pertinentes des peuples autochtones pour les évaluations environnementales sont traditionnelles ou issues du passé. Il est clair que ce n'est pas le cas. Ceux qui détiennent des connaissances indigènes ne connaissent pas que le passé.

    Deuxièmement, le projet de loi C-19 ne parle pas du consentement éclairé préalable des détenteurs ou des communautés de connaissance indigènes. En intégrant ce concept au projet de loi C-19, on alignerait la LCEE sur le paragraphe 8(j) de la Convention des Nations Unies sur la biodiversité biologique, ratifiée par le Canada. Le groupe de travail est régulièrement témoin de connaissances traditionnelles mal ou insuffisamment utilisées, exploitées ou utilisées sans la permission des Premières Nations. Même si le libellé du paragraphe 16.1 du projet de loi est discrétionnaire, le groupe de travail estime qu'il pourrait être mieux rédigé, de manière à répondre aux voeux des Premières Nations. Par exemple, le libellé pourrait être le suivant:

    Les connaissances locales et indigènes peuvent, avec le consentement éclairé préalable de la part de la communauté ou du groupe autochtone détenant ces connaissances, être prises en considération lors d'évaluations environnementales.

    Comme c'est le cas pour la plupart des groupes des Premières Nations, la principale inquiétude du groupe de travail tient au fait que le projet de loi C-19 ne reconnaît pas les droits, le titre et l'autonomie gouvernementale autochtone ainsi que les obligations fiduciaires de la Couronne envers les peuples autochtones du Canada. Bien que le projet de loi C-19 propose d'amender l'article relatif à l'objet de la loi pour inclure la promotion de la communication et de la collaboration entre les autorités responsables et les peuples autochtones en ce qui concerne les évaluations environnementales, cela ne va pas vraiment assez loin pour intégrer le devoir d'agir équitablement en common law pour la consultation, qui a été reconnu par les tribunaux.

¿  +-(0945)  

    Même si nous avons présenté des instances à ce sujet dans notre lettre du 3 octobre 2001 adressée au comité permanent, nous tenons à exposer cette préoccupation plus en détail en raison de trois jugements récents rendus par des tribunaux de l'Ouest du Canada, lesquels ont clarifié plus amplement que les décisions gouvernementales prises sans se conformer aux obligations fiduciaires envers les peuples autochtones peuvent être sans valeur ou annulées. Il est nécessaire que le projet de loi C-19 reflète ces changements récents de la loi.

    Dans l'affaire La Première nation Tlingit de Taku River c. Ringstad et al, la Cour d'appel de la Colombie-Britannique a annulé un certificat d'évaluation environnementale concernant une route qui traverse le territoire de la Première nation Tlingite émis par le ministère de l'Environnement en vertu de la B.C. Environmental Assessment Act, parce que la Couronne n'a pas abordé de façon efficace l'essentiel des intérêts de la Première nation Tlingite lors de la réunion du comité de projet relativement à l'évaluation environnementale.

    Dans l'affaire la Nation Haida c. Colombie-Britannique (ministre des Forêts), la Cour d'appel de la Colombie-Britannique a suivi l'arrêt de la cause Taku et a accordé un jugement déclaratoire selon lequel la Couronne et la compagnie forestière Wayerhaeuser avaient le devoir de consulter la nation Haida de bonne foi et de s'efforcer de trouver les arrangements pratiques entre les intérêts autochtones du peuple Haida d'une part et les objectifs à court et long terme de la Couronne et de Weyerhaueuser pour gérer les licences des propriétés forestières de production sur le territoire Haida, dans l'intérêt du public, d'autre part. La cour a statué que l'obligation de consulter s'étendait aux intérêts culturels et économiques du peuple Haida.

    Dans l'affaire la Première nation crie Mikiswe c. Canada (ministre du Patrimoine canadien), la Section de première instance de la Cour fédérale en Alberta a annulé un permis ministériel, accordé suite à une évaluation environnementale en vertu de la LCEE, pour une route traversant le parc national Wood Buffalo, faute de consultation suffisante avec le peuple Mikisew, même si ce dernier a participé à un processus régulier de consultation publique.

    Ces décisions précisent mieux que jamais la teneur de l'obligation de la Couronne de consulter les Premières Nations relativement à leurs préoccupations ayant trait aux décisions du gouvernement concernant l'utilisation des terres et de l'eau et en particulier, ces causes établissent que la consultation relative aux éventuelles violations des droits des peuples autochtones aux termes de l'article 35 constitue une obligation juridique exécutoire survenant avant que ces droits ne soient prouvés en Cour ou confirmés dans un traité—ce qui ressort des arrêts Taku et Haida. Au minimum, une consultation sérieuse exige que les décideurs gouvernementaux satisfassent les intérêts autochtones grâce à une consultation de bonne foi, avec la véritable intention d'intégrer les préoccupations des peuples autochtones au processus décisionnel—ce qui provient également des décisions rendues dans les affaires Haida et Taku. La consultation des groupes autochtones dans le cadre d'un processus de consultation publique est insuffisante. Il faut tenir des consultations distinctes avec les groupes autochtones, conformément à l'article 35, qui constitue un processus distinct, sinon plus approfondi—ce qui découle de l'arrêt Mikisew. Des consultations sont nécessaires pour que le gouvernement puisse déterminer ce qu'une offre équitable d'indemnisation représente relativement à une éventuelle violation d'un droit ancestral—là encore, cela provient de l'arrêt rendu dans l'affaire Mikisew.

    En fait, les groupes autochtones du Canada ont vraiment leur mot à dire avant qu'un projet aille ou non de l'avant aux termes de la LCEE. Notre opinion est plus importante que celle du grand public en raison de la relation fiduciaire qui existe entre la Couronne et les peuples autochtones et du fait que nos droits ancestraux sont protégés aux termes de l'article 35 de la Constitution. Pour que le gouvernement s'acquitte de ses obligations fiduciaires avant de décider si un projet peut aller de l'avant aux termes de la LCÉE, il doit s'assurer que l'on a répondu, grâce à un processus distinct, aux préoccupations des groupes autochtones dont les droits ancestraux risquent d'être touchés par un projet. Cela semble logique.

    Les peuples autochtones peuvent avoir des préoccupations qui ne tombent pas sous le coup de la définition des «effets environnementaux» aux termes de la LCEE, comme l'indemnisation relative à la violation de droits ancestraux. Ces préoccupations et d'autres qui ne concernent qu'un peuple autochtone doivent être examinées dans le cadre de consultations aux termes de l'article 35.

¿  +-(0950)  

    Je sais ce que vous pensez. Vous pensez que ce chevauchement est impossible. Nous admettons que personne ne souhaite un système inefficace. Le groupe de travail recommande que l'Agence canadienne d'évaluation environnementale envisage de mettre en oeuvre une politique semblable aux accords d'harmonisation conclus entre le gouvernement et les provinces, en vue d'éviter le double emploi. Ce processus confirmerait davantage que les consultations avec les Premières Nations se font de gouvernement à gouvernement.

    En conclusion, les modifications apportées à la loi depuis que le projet de loi C-19 a été déposé signifient que vous devez vous remettre au travail. Ces arrêts—dans les causes Haida, Taku et Mikisew—confirment que les décisions prises aux termes de la LCEE, modifiées par le projet de loi C-19, seront vraisemblablement contestées par les groupes autochtones parce qu'elles violent de façon injustifiable les droits autochtones, ou par des groupes autochtones de tout le pays parce qu'il n'y aura pas eu de consultation. Si nous obtenons gain de cause, ces décisions seront déclarées nulles et non-avenues. Le groupe de travail est d'avis, et pense que vous en conviendrez, que cette incertitude du processus d'évaluation environnementale est néfaste pour tous les Canadiens.

    Avant de conclure, j'aimerais simplement dire que je comparais aujourd'hui au nom de Lyle Leo, dont l'absence est due à un décès imprévu de l'un de ses proches. Malheureusement, son neveu a perdu la vie à un très jeune âge et je suis donc ici pour remplacer M. Leo, et j'essaierai de répondre du mieux possible. Mais puisque Michelle est présente et qu'elle collabore depuis le début avec le groupe de travail technique, nous allons tous les deux nous efforcer de répondre à toutes vos questions.

    Je vous remercie de votre attention.

+-

    Le vice-président (M. Bob Mills): Je remercie sincèrement nos témoins. Nous allons maintenant passer aux questions. Je vous demanderais de donner des réponses aussi brèves que possible pour que nous puissions vous poser un maximum de questions.

    Nous commencerons par monsieur Bailey.

+-

    M. Roy Bailey (Souris—Moose Mountain, Alliance canadienne): Merci, monsieur le président.

    Je tiens à vous remercier tous de votre présence. Vous nous avez fait une mise à jour sur la question, en tout cas à mes yeux.

    Ce n'est pas un dossier facile. Le terme «environnement» revêt un tout nouveau sens aujourd'hui, même comparé à ce qu'il signifiait il y a dix ans. Je pense que vous serez tous d'accord sur ce point.

    Je vis dans une région où l'on a construit deux petits barrages. J'en avais assez d'entendre dire que l'évaluation environnementale devait se faire cinq six sept ou même huit fois. Les barrages ont été construits. Toutes ces objections, qui étaient très virulentes, sont aujourd'hui oubliées et tout le monde s'entend à dire que ces barrages sont une excellente chose.

    Monsieur Townsend, ai-je bien compris que vous dites dans votre mémoire que vous avez eu d'énormes problèmes en raison de la position qu'a adoptée récemment le gouvernement de la Colombie-Britannique?

¿  +-(0955)  

+-

    M. Neil Townsend: Voulez-vous parler de... [Note de la rédaction: Difficultés techniques]

+-

    M. Roy Bailey: Oui.

+-

    M. Neil Townsend: Oui. Un certain nombre de problèmes se sont posés relativement à la rivière Taku, car il y avait des différences entre l'évaluation environnementale de la Colombie-Britannique et celle du gouvernement fédéral. Nous avons en fait évité de faire des observations directes sur cette affaire précise dans notre mémoire parce qu'elle fait l'objet d'un appel auprès de la Cour suprême fédérale et nous tenions à le signaler maintenant.

+-

    M. Roy Bailey: Cela m'amène à une question à laquelle tous les témoins voudront peut-être répondre. Le gouvernement fédéral et les provinces appliquent tous un code d'investissement, si l'on peut dire, outre ce que vient de nous dire le chef Jacob relativement aux consultations avec les Premières nations ou les peuples autochtones. Est-il possible que ces trois groupes soient un jour sur la même longueur d'ondes? Je me demande si c'est possible sans s'affronter pendant des mois et des mois au sujet de ce qui constitue un projet sans risque pour l'environnement. J'aimerais que tous les témoins répondent à cette question.

+-

    M. Neil Townsend: Je vais vous répondre brièvement, car je suis certain que le chef Jacob, qui en a parlé dans son exposé, a quelque chose à ajouter.

    À notre avis, il est vraiment nécessaire d'avoir ce filet fédéral comme solution de repli pour garantir la mise en oeuvre d'une norme de base. En fait, l'harmonisation du processus est avantageuse pour tous les participants si l'on veut disposer d'un processus accéléré qui s'applique à tous les aspects nécessaires de l'évaluation environnementale. Mais en fin de compte, que ce soit dans la province de la Colombie-Britannique ou ailleurs, où les normes sont inférieures ou supérieures à celles du gouvernement fédéral, nous estimons qu'il importe d'avoir cette solution de repli pour garantir la tenue d'une évaluation environnementale de qualité suffisante. Bien entendu, nous recommanderons un processus homogène et harmonisé chaque fois que possible.

+-

    Chef Gibby Jacob: À mon avis, tout est possible. Que ce soit probable, c'est une autre affaire. Lorsque nous commençons à tenir compte de tous les intérêts en jeu, et je ne peux parler que de mon territoire traditionnel. Il y a environ 2 millions de personnes qui vivent sur notre territoire traditionnel et avec tous les intérêts spéciaux qui ont été proposés—et vous en avez cités quelques-uns vous-même—tous ceux qui avaient leur mot à dire se sont sans doute fait connaître pour faire leurs déclarations.

    Dans le contexte actuel, il faudrait probablement envisager des consultations de gouvernement à gouvernement dans le cadre de ce processus. Avec les groupes environnementaux, nous avons eu des problèmes communs sur lesquels nous nous penchons ensemble depuis plusieurs années, mais cela s'est fait au cas par cas et nous avons sans nul doute...

+-

    M. Roy Bailey: Merci.

    Dans le même ordre d'idées, les deux principaux projets dont il est question dans les nouvelles aujourd'hui, relativement à l'environnement, sont les oléoducs qui doivent relier le nord au sud. Combien de temps vous... Si ces cartes présentent les itinéraires prévus, etc., ne faudrait-il pas attendre des années avant que l'un de ces oléoducs ne se concrétise s'il faut que tous les groupes participent tour à tour au processus? M. Ewins pourra peut-être répondre à cette question. 

+-

    M. Peter Ewins: Pour qu'un mégaprojet se déroule convenablement, il faut énormément de temps. D'après les prévisions, il faut environ quatre ans pour toute la période d'évaluation réglementaire dans le cadre du groupe d'examen coordonné du Mackenzie, à l'heure actuelle. Nous approuvons sans réserve ce processus et nous pensons qu'on peut faire une analyse approfondie en intégrant les travaux des onze à dix-sept organismes différents, y compris l'ACEE.

    J'aimerais faire une remarque importante au sujet de ce projet ou de n'importe quel autre. La majorité de ces problèmes fastidieux, onéreux, ridicules, politiques et évitables qui se posent dans chaque cas, pourraient être évités si l'on mettait en place une méthode de planification des systèmes, où toutes les parties prenantes participeraient aux discussions avant que ces problèmes ne commencent à se poser. Il y a de nombreux exemples, même au Canada, où cela s'est fait avec succès. Le processus «Des terres pour la vie» de l'Ontario en est un, et l'accord d'exploitation minière du Manitoba en est un autre, sans oublier le partenariat Muskwa-Kechika, au Nord-est de la Colombie-Britannique. Tous ces processus sont adaptés au cas des régions concernées.

    Dans le cas du Mackenzie, l'élaboration d'une vision du développement durable dans le cadre d'une table ronde est possible pour permettre aux Premières nations et aux autres groupes d'intérêt, y compris les valeurs gouvernementales, économiques, culturelles et environnementales, d'être pris en compte. Cela n'exige pas des calculs scientifiques poussés. Il suffit que les gens s'engagent à adopter une vision régionale générale et à donner plus de certitude à l'accès et au statut d'occupation des terres. Du point de vue de l'espace, où va se trouver l'oléoduc? Où se trouveront les zones protégées? Où sont les zones spirituelles et culturelles et comment va-t-on les protéger? Il faut répondre à ces questions avant d'être obligé de réagir après qu'un autre projet de construction routière, de piste aérienne ou d'extraction minière ne soit envisagé.

    Nous savons donc comment procéder, mais il nous faut pour y parvenir un engagement, du leadership et la tenue d'une véritable table ronde, à laquelle participeront tous les ordres de gouvernement ainsi que des représentants de l'industrie, du grand public et des groupes d'intérêt.

À  +-(1000)  

+-

    Le vice-président (M. Bob Mills): Nous vous redonnerons la parole tout à l'heure, Roy.

    À vous, monsieur Bigras.

[Français]

+-

    M. Bernard Bigras (Rosemont--Petite-Patrie, BQ): Merci, monsieur le président.

    J'ai plusieurs questions, dont la première s'adresse à M. Borland.

+-

    Je veux vous féliciter pour votre mémoire, qui met bien en relief le fait qu'il y a une absence flagrante dans ce projet de loi: c'est qu'il n'y a pas de définition du cadre d'évaluation. Au fond, on ne sait pas quelle est la portée de l'évaluation et quels sont les délais. Je pense que c'est une erreur flagrante du projet de loi dans la mesure où on veut appliquer la notion de développement durable. La notion de développement durable est cette mixité du développement économique et de la protection de l'environnement.

    Je sais qu'il y a des projets, entre autres à Toulnustouc, au Québec, qui étaient intéressants, mais dont les délais n'étaient pas prévus. Il y a eu des retards importants et le promoteur était carrément insatisfait. Les citoyens auraient pu bénéficier de ce projet économique dans un mode de développement propre, mais il a été retardé. Donc, merci pour cela.

    Vous nous indiquez que vos membres sont dans le domaine de l'élaboration et de la fabrication d'outils technologiques aux services de consultation. Vous nous parlez peu du registre public. Vous savez qu'il y a actuellement un débat à ce sujet. On dit que les documents de ce registre public devraient être simplement sur support électronique et qu'on devrait délaisser la formule papier. Dans la mesure où vos membres travaillent dans ce secteur de l'industrie de l'environnement, croyez-vous que le support papier devrait demeurer afin de permettre à vos membres de faire des travaux qui répondent aux besoins de votre clientèle?

À  +-(1005)  

[Traduction]

+-

    M. William J. Borland: C'est donc une question sur les documents électroniques et les documents sur papier. Je pense qu'il faut utiliser tous les supports possibles pour envoyer de l'information au public. Tout le monde n'a pas accès aux documents électroniques. Il faut en tenir compte. Immanquablement, les gens reçoivent une version électronique et de toute façon l'imprime sur papier.

    En tant que promoteurs, agents de réglementation et administrateurs des procédures de la LCEE, nous devons veiller à ce que tous ceux qui ont besoin d'information l'obtiennent sans délai. Pour un promoteur qui communique de l'information à ce que j'appelle un administrateur d'évaluation afin qu'elle soit portée à la connaissance du public, il est très décevant de constater un mois plus tard que cette information n'a pas encore été diffusée. Dans bien des cas, nous prenons le parti de contourner la procédure et d'intervenir nous-mêmes auprès du public afin que les choses progressent sans délai.

[Français]

+-

    M. Bernard Bigras: J'aimerais maintenant poser une question à M. Ewins. Une réévaluation de la loi fédérale en matière d'environnement devrait nous permettre de nous projeter dans l'avenir et d'essayer de donner une vision de l'évaluation environnementale. C'est du moins ce que je crois. Je voudrais savoir ce que vous pensez du concept de l'évaluation environnementale stratégique, qui consiste à évaluer un projet en fonction des paramètres traditionnels, mais aussi à essayer de comprendre en quoi le projet pourrait contribuer à l'amélioration de l'environnement. Je pense à certains projets hydroélectriques qui, en principe, selon certains paramètres, pourraient ne pas être acceptés dans le cadre d'un processus donné, mais qui permettent de réduire les gaz à effet de serre et donc d'améliorer la biodiversité. Croyez-vous que ce projet de loi aurait dû tenir davantage compte de ce qu'on appelle l'évaluation environnementale stratégique?

[Traduction]

+-

    M. Peter Ewins: Thank you very much. C'est une bonne question.

    Je suis tout à fait favorable aux tentatives que peut faire l'administration fédérale, y compris avec les évaluations environnementales stratégiques, que ce soit au niveau de la réglementation ou des grandes orientations. J'ai eu connaissance d'une très bonne directive du cabinet datant de 1992 ou 1991 sur l'évaluation environnementale stratégique. C'est exactement le genre de formule qu'il faut pour bien mettre en place ces visions proactives et préventives qui peuvent recouper des valeurs divergentes dans notre société. C'est l'un des mécanismes utilisés ailleurs dans le monde.

    Il y a deux mois, je me suis rendu dans la région de la mer du Nord. Par rapport au Canada, les gouvernements norvégien et britannique sont très avancés dans l'utilisation et le financement des évaluations environnementales stratégiques qui permettent d'éviter ce genre de conflits dans les activités extra-côtières.

    Donc, pour répondre simplement à votre question, je pense qu'il serait extrêmement utile que le projet de loi C-19 reprenne en termes concrets cet engagement à réaliser des évaluations environnementales stratégiques pour les politiques, les programmes et les plans qui émanent du gouvernement fédéral.

[Français]

+-

    M. Bernard Bigras Sentez-vous que ce concept est pris en considération dans ce projet de loi? À la lecture du projet de loi, sentez-vous qu'il y a un préjugé favorable à cet égard?

[Traduction]

+-

    M. Peter Ewins: Je le crois, mais je ne connais pas en détail tous les articles du projet de loi.

À  +-(1010)  

[Français]

+-

    M. Bernard Bigras: Monsieur Jacob, je tiens à vous dire que j'adhère à votre vision quant à une relation de gouvernement à gouvernement entre les premières nations et le gouvernement fédéral. Ma question porte là-dessus.

    L'article 16.1 proposé se lit ainsi:

16.1 Les connaissances locales et les connaissances et traditions autochtones peuvent être prises en compte pour l'évaluation environnementale d'un projet.

    Estimez-vous que cet article est conforme à ce qui a été négocié dans les traités et les conventions passés entre les nations autochtones et le gouvernement fédéral?

[Traduction]

+-

    Chef Gibby Jacob: Je peux répondre en partie à la question.

    Comme vous le savez sans doute, nous sommes entrés en Colombie-Britannique dans une nouvelle phase de négociation de traités. Ce n'est pas encore fait, mais nous espérons conclure des traités tôt ou tard.

    J'essaie de rassembler mes idées. Peut-être pourriez-vous intervenir, Michelle.

+-

    Mme Michelle Ellison (membre, Groupe de travail technique d'évaluation environnementale des Premières nations): Certainement.

    Puis-je demander une précision? Voulez-vous savoir si l'article 16.1 est conforme aux dispositions des traités et des conventions?

[Français]

+-

    M. Bernard Bigras: Oui.

[Traduction]

+-

    Mme Michelle Ellison: D'après mon expérience et d'après ce qui s'est dit au sein du groupe de travail, je pense que cette disposition ne va pas aussi loin qu'une entente de non-divulgation avec une Première nation dans le cadre d'un traité ou d'une procédure d'évaluation environnementale. Une Première nation exige généralement une forme quelconque d'entente de non-divulgation concernant certains aspects du savoir traditionnel qu'elle fournit, en particulier si ce savoir traditionnel est d'ordre spirituel ou concerne des sites sacrés. Voilà le point de départ.

    Comme l'a dit le chef Jacob, il faut absolument faire figurer la notion de consentement éclairé préalable dans la loi. Elle doit aussi figurer dans toutes les ententes sur l'utilisation du savoir traditionnel, mais pas de façon aussi complète que dans un accord sur la question.

+-

    Le vice-président (M. Bob Mills): Merci.

    À vous, monsieur Reed.

+-

    M. Julian Reed (Halton, Lib.): Merci, monsieur le président.

    Monsieur Borland, vous avez utilisé l'expression «définition du cadre de l'évaluation» qui nous permettrait d'éviter le trou noir où ces évaluations ont trop souvent tendance à s'embourber. Pensez-vous qu'on puisse formuler en termes généraux une procédure ou des paramètres de définition du cadre de l'évaluation qui s'appliqueraient à l'avenir à toutes les évaluations?

+-

    M. William J. Borland: Je pense qu'on peut adopter une procédure pour définir le cadre de l'évaluation, qui soit applicable à n'importe quel projet. Évidemment, la définition du cadre de l'évaluation sera différente d'un projet à un autre.

    Je reconnais que même si l'on a défini un jour le cadre de l'évaluation d'un projet en disant: voilà les questions à traiter dans tel ou tel délai, il est toujours possible que de nouveaux problèmes apparaissent entre-temps. En tant que promoteur, je suis tout à fait prêt à accepter que des renseignements nouveaux apparaissent au grand jour. Nous sommes prêts à les recevoir. Mais il n'y a pratiquement rien en ce qui concerne la définition du cadre de l'évaluation.

    Rien ne s'oppose à ce qu'un organisme fédéral considère chaque situation et délimite les questions posées par chaque projet, définisse le cadre des travaux à entreprendre et donne son feu vert. S'il revient par la suite en disant qu'il a constaté de nouveaux problèmes, c'est parfait, mais s'il revient tous les jours avec cinq ou six problèmes supplémentaires, cela montre bien qu'il aurait fallu prendre certaines mesures dès le départ pour que tout se déroule correctement avec un degré suffisant de certitude.

    Et le problème ne concerne pas uniquement les promoteurs. Les groupes écologistes ont eux aussi des attentes concernant les résultats des études d'impact, et leurs déceptions dans ce domaine ont parfois suscité un contentieux.

    Pour répondre à votre question, je pense qu'il est effectivement assez facile d'adopter une procédure pour définir le cadre de l'évaluation au début de chaque étude.

+-

    M. Julian Reed: Ce sujet m'a toujours préoccupé. Dans le cadre de nos travaux, j'ai également remarqué qu'on se plaint souvent des changements apportés en cours de route au processus de réglementation. À cause de ces changements, le promoteur peut se trouver contraint, par exemple, de remettre son projet sur la planche à dessin et de tout recommencer. Vous avez certainement déjà réfléchi à cette question.

À  +-(1015)  

+-

    M. William J. Borland: Il y a deux questions qui se posent ici. Tout d'abord, si la procédure n'était pas aussi longue, on ne pourrait pas modifier les règles à mi-parcours. Deuxièmement, les nouvelles règles n'apparaissent pas du jour au lendemain. Quand on entreprend une évaluation environnementale de deux ans, il est bien entendu que de nouveaux règlements vont entrer en vigueur au cours de cette période de deux ans. Il se peut qu'un nouveau règlement commence à s'appliquer avant la fin de l'étude d'impact sur l'environnement. C'est tout à fait normal, et on peut parfaitement vous dire: vous n'avez pas à respecter les contraintes qui étaient en vigueur lorsque vous avez amorcé l'évaluation, mais vous devrez vous conformer à celles qui s'appliqueront à la fin.

    Dans bien des cas, on ne considère pas les contraintes réglementaires qui vont s'appliquer à l'échéance qu'on s'est fixée. Je ne peux pas parler au nom de tous les promoteurs, mais en ce qui nous concerne, où voulons-nous être rendus d'ici cinq ou dix ans? Il est inutile de consacrer de l'argent à un programme qui ne se conforme qu'aux contraintes d'aujourd'hui, et non pas à celles de l'avenir.

    Je pense qu'il faut donc en tenir compte dans la définition de l'évaluation. Quelqu'un qui travaille à un projet doit connaître les mesures législatives en préparation et les changements qu'elles apporteront aux contraintes réglementaires. Il faut que tout cela soit connu et que les promoteurs puissent s'y préparer.

+-

    M. Julian Reed: Je pense à un cas que je connais personnellement. C'est un promoteur, qui a entrepris un projet et l'a soumis au processus des approbations. Certains règlements ont été modifiés 18 mois plus tard et ont annulé les approbations déjà obtenues. Le promoteur a dû reprendre toute la procédure.

    J'ai toujours fait mon cheval de bataille de l'idée suivante: une fois qu'un projet est lancé, il ne devrait être assujetti qu'à la réglementation en vigueur au moment du lancement. Son promoteur pourrait ainsi connaître toutes les règles applicables. Si les règles ou la réglementation changent par la suite, il me semble qu'elles ne devraient s'appliquer qu'aux projets ultérieurs.

+-

    M. William J. Borland: Je sais qu'il est difficile de faire admettre les droits acquis, mais cela reste une possibilité. L'autre possibilité, ce serait des communications plus ouvertes pendant cette période de 18 mois. Si une nouvelle loi entre alors en vigueur, elle n'apparaîtra pas du jour au lendemain. Quelqu'un devra bien la connaître. Mais je suppose qu'un bon promoteur—c'est à lui que je renvoie la balle—pensera à se renseigner sur les nouvelles lois en préparation et sur leurs conséquences pour son projet. Il n'y a donc pas de solution à sens unique, et je ne suis pas opposé à la consécration des droits acquis.

+-

    M. Julian Reed: Merci.

    Merci, monsieur le président.

+-

    Le vice-président (M. Bob Mills): À vous, madame Scherrer.

[Français]

+-

    Mme Hélène Scherrer (Louis-Hébert, Lib.): Merci, monsieur le président.

    Mes questions sont dans la même veine que celles qui ont été posées concernant le cadre et les délais de l'évaluation. Vous avez bien répondu aux questions, mais je voudrais avoir quelques autres détails. Vous expliquiez qu'il fallait des critères bien précis pour l'évaluation et que si les promoteurs et le grand public connaissaient ces critères, la Loi sur l'évaluation environnementale s'appliquerait plus facilement et on ne parlerait plus d'un trou noir.

    On parle de critères d'évaluation. Selon vous, ces critères devraient-ils être les mêmes pour tous les projets? On a entendu parler de certains projets. Je pense que c'est M. Mills qui avait parlé du projet d'un pont qui aurait jeté de l'ombre quelque part sur une rivière, affectant ainsi les poissons. On voit que pour certains projets, on déborde un cadre, alors que pour un autre projet, on se limite à un encadrement très précis. On a l'impression que cela est parfois un peu discrétionnaire, selon que le promoteur est très important ou pas dans une région.

    Quand vous parlez de cadre d'évaluation, pensez-vous à un cadre rigide? Devrait-on énoncer tous les éléments à prendre en considération et prévoir un encadrement en termes de temps, c'est-à-dire un délai? Ou voyez-vous plutôt un cadre et des critères qui pourraient être nuancés d'un projet à un autre? Est-ce que les critères doivent changer selon l'envergure du projet et selon qu'il est situé ou non sur un territoire indigène, ou si on doit prévoir dans ce projet de loi 20 critères à prendre en considération dans un cadre très rigide?

À  +-(1020)  

[Traduction]

+-

    M. William J. Borland: Vous avez raison. Le cadre d'un projet peut toujours s'élargir. Si on n'impose pas de limite à sa croissance, il va constamment s'étendre au point où les projets de Colombie-Britannique auront des conséquences dans l'Île-du-Prince-Édouard—même si mon exemple est quelque peu excessif.

    Je pense qu'on peut fixer des critères qui devront s'axer autour de la question des effets cumulatifs. Jusqu'où vont-ils aller? On pense à l'exemple classique du promoteur qui veut construire un pont au-dessus d'un cours d'eau, et qui a besoin pour cela d'un permis. Le pont est accepté, on a maintenant une route d'accès, qui est intégrée au projet. Cette route a été construite pour donner accès à la forêt. La forêt est donc intégrée au projet et l'évaluation englobe une étude de la méthode de gestion de la forêt, alors qu'il s'agissait au départ de construire un pont sur un cours d'eau.

    Je n'ai même pas besoin de dire si c'est bien ou mal, mais il faut bien fixer une limite quelque part. C'est un principe qui vaut pour n'importe quel projet, qu'il s'agisse de franchir un cours d'eau, de construire un immeuble ou d'aménager le littoral. Il faut définir le cadre du projet et en fixer les limites.

    Est-ce que j'ai une réponse à ce problème? Non, car je suis convaincu qu'il faut procéder au cas par cas. Certains projets auront un cadre plus large que d'autres, mais je pense qu'il faut considérer ce que j'appelle les zones écologiquement sensibles qui vont subir directement les effets du projet. Dès qu'on tombe dans les effets indirects ou les effets par application, etc., l'évaluation risque de s'éterniser. Les délais devront constamment être repoussés, la procédure sera interminable et je ne pense pas que le promoteur ni le public puissent obtenir les réponses qu'ils cherchent.

[Français]

+-

    Mme Hélène Scherrer: Tout le monde est d'accord pour dire que le fait de ne pas avoir de critères représente un problème. Cependant, quand on a un cadre très rigide, c'est encore plus problématique parce qu'à un moment donné, le territoire ne conviendra pas, le délai ne conviendra pas et les critères ne conviendront pas non plus. Il faut parfois être en mesure de doser les choses. Est-ce que des critères souples feraient l'affaire de tout le monde, ou s'il y a encore quelqu'un qui dirait qu'il y a trop de latitude? Le jour où les critères seront trop rigides, les gens vont dire qu'ils ne sont pas capables de se retrouver là-dedans. 

    J'essaie de voir de quelle façon on pourrait trouver un juste milieu. Est-ce que vous envisagez d'énumérer des critères?

[Traduction]

+-

    M. William J. Borland: Oui, il est possible de le faire. Mais ces critères ne devront pas être trop stricts. Ils doivent conserver une certaine souplesse, car chaque projet est différent des autres. L'évaluateur doit avoir une certaine latitude pour dire que tel ou tel élément outrepasse la ligne fixée lors de l'établissement des critères.

    Je suis convaincu qu'on peut définir des critères généraux et les présenter noir sur blanc. Mais il faut aussi prévoir une certaine souplesse et une certaine latitude pour ceux qui vont définir le cadre de l'évaluation, et qui, dans certains cas, estimeront qu'il faut aller un peu plus loin. Tout cela prend du temps, car il peut y avoir des conflits parmi les responsables du projet, et il leur faudra du temps pour parvenir à un consensus. Mais on peut fixer un ensemble de critères pour la définition du cadre de l'évaluation. Il en existe déjà dans la plupart des formules législatives sur les EIE, et je peux donc vous répondre qu'effectivement, c'est possible.

[Français]

+-

    Mme Hélène Scherrer: Vous dites qu'il faudrait remplacer le terme «connaissances et traditions autochtones» par le terme «connaissances et traditions indigènes».  Pouvez-vous m'expliquer la subtilité ou la différence qu'il y a entre «autochtones» et «indigènes»?

[Traduction]

+-

    Chef Gibby Jacob: De mon point de vue le terme «indigène» est utilisé dans le monde entier. Il s'agit simplement de rester constant dans la défense des positions auxquelles le Canada a donné son accord. C'est de cela qu'il s'agit d'abord.

À  +-(1025)  

+-

    Mme Michelle Ellison: Je peux d'ailleurs ajouter que «indigène» est le terme utilisé dans les accords internationaux, les conventions, etc. Au Canada «autochtone» est plus usité, parce que c'est le terme qu'on trouve dans la Constitution. Dans beaucoup de pays de la commom law, l'Australie et la Malaisie, par exemple, on parle aussi d'«Autochtones».

+-

    Le vice-président (M. Bob Mills): Merci.

    Madame Redman.

+-

    Mme Karen Redman (Kitchener-Centre, Lib.): Merci, monsieur le président.

    Je félicite le Fonds mondial pour la nature d' avoir asséné un coup sérieux à certains qui auraient voulu utiliser le label «WWF». Vous avez su vous faire les champions de votre cause.

    Des voix: Oh! oh!

    Mme Karen Redman: Au cours de votre exposé, vous avez parlé d'engagement à plusieurs reprises. Si je ne me trompe, l'agence s'est engagée, en ce qui concerne les aires protégées, à réviser les principes directeurs, et non à réviser la loi. Je crois que Robert Connelly a écrit à votre président, Monte Hummel, le 26 novembre, pour réaffirmer que cet engagement tenait.

    En ajoutant une référence aux aires protégées dans la définition de «effet environnemental», ne crée-t-on pas le risque d'exclure, par inadvertance, un certain nombre d'autres facteurs importants?

+-

    M. Peter Ewins: Je ne pense pas. La proposition que nous faisons est très centrée sur les aires protégées ou potentiellement protégées, pour ce qui est de cet engagement des trois conseils, et cela n'exclut aucun des autres aspects concernant un effet environnemental important. Il s'agit de bien mettre en évidence ceci: il y a un écart entre ce qui devrait être la position du Canada et ce qu'elle est en ce moment, et cela en raison des engagements qui ont été pris et approuvés. Personne n'en doute, et je ne pense pas non plus que qui que ce soit ait changé d'avis sur les raisons de cette politique.

    Il ne s'agit pas pour nous de dire que dans le libellé proposé il y a une omission. Il y a tout simplement quelque chose de très important qui manque. Après l'engagement de Bob Connelly de l'Agence canadienne d'évaluation environnementale, et suite à des discussions que nous avons eues par la suite avec lui, je crois que deux choses viendront servir cette cause. D'abord une édition révisée du Guide des autorités responsables, incluant une référence à un système d'aires protégées ou potentiellement protégées complet et achevé, avec mention de ce qu'un développement pourrait avoir pour conséquence sur la possibilité d'y parvenir. La deuxième chose s'est l'inclusion d'une référence, non pas d'une exigence statutaire, mais juste quelque chose qui devra être ensuite repris dans le projet de loi C-19, dans ces deux articles particuliers.

+-

    M. Joshua Laughren: Si vous le permettez, j'aimerais ajouter quelque chose aux excellentes observations de M. Borland. Je ne vois pas pourquoi ajouter un critère supplémentaire à la liste déjà existante pourrait exclure toute autre considération, mais je pense que cela répond en même temps à l'argument de M. Borland. Même si nous avons des critères définissant les aires protégées, cela ne nous empêche pas—ou ne le devrait pas—de ré-examiner, cas par cas, toutes les autres questions qui pourraient se poser. Je pense que cette marge de manoeuvre a toujours existé et continuera à exister.

+-

    Mme Karen Redman: Chef Jacob, il est impressionnant de voir comment le groupe de travail a réussi à réunir autour d'une table ronde en Colombie-Britannique toute une mosaïque de points de vue. On voit même ceux des Premières nations et des gouvernements fédéral et provincial, coïncider sur ces questions d'évaluation environnementale.

    Le ministre s'est engagé à ce que l'agence soit chargée par la loi de constituer un comité consultatif autochtone. Cette décision se fonde sur l'expérience acq pendant l'examen quinquennal. Quel est votre avis, ou celui de Mme Ellison, sur cet aspect des recommandations qui ont été proposées?

+-

    Mme Michelle Ellison: Nous avons parlé du comité consultatif autochtone dans notre lettre adressée au comité permanent le 3 octobre, si vous voulez vous y reporter. Nous estimions, bien entendu, que la participation des Premières nations au processus était importante, vitale et nécessaire, pour qu'on tienne compte du point de vue autochtone dans le processus d'évaluation environnementale.

    Dans notre lettre, je crois que nous avons précisé que nous souhaitons voir dans la loi même une disposition relative à la création d'un comité consultatif autochtone. Nous estimons que peu des préoccupations des Premières nations ont été satisfaites par voie directe, dans la loi, même si on en traitait dans le rapport du ministre. On a laissé entendre que les questions autochtones seraient étudiées par votre comité, et puisque c'est le seul moyen prévu par la loi, ou le projet de loi, pour intégrer ces questions autochtones, nous estimons qu'il faut que cela figure expressément dans la loi.

    On pourrait peut-être ajouter une disposition à l'article 58, sur le pouvoir du ministre de donner des lignes directrices, dans le cadre de l'application de la loi. Un paragraphe ou un alinéa pourrait préciser qu'il faut des lignes directrices pour tenir compte d'une consultation significative et la création d'un comité consultatif autochtone.

À  +-(1030)  

+-

    Chef Gibby Jacob: J'aimerais ajouter une chose: ce groupe de travail technique a été formé pour accomplir une tâche précise. Les Premières nations des régions très isolées de la province de la Colombie-Britannique n'ont pas la capacité de traiter du genre de questions soulevées dans un processus d'évaluation environnementale. Ce groupe a été formé principalement pour préparer une trousse d'information qui rendrait les Premières nations capables de suivre le processus de A à Z, et de disposer des outils nécessaires tout le long du processus.

    C'est en fin de compte une question de capacité et de financement. Quand on essaie de voir quel financement est disponible pour les Premières nations, on constate qu'il est vraiment minime. Beaucoup de Premières nations dépendent presque entièrement des subventions fédérales pour le fonctionnement de leurs programmes.

    Je suis active dans mon domaine depuis 21 ans. Je n'ai jamais vu le gouvernement offrir du financement aux Premières nations pour qu'elles participent pleinement à un processus aussi exhaustif que celui de l'évaluation environnementale en vertu de la LCEE ou de sa version britanno-colombienne. Quand on pense aux dollars discrétionnaires, ils sont tous déjà accordés. Si on songe à des choses non discrétionnaires, comme le développement social, on ne peut pas y toucher, de toute façon.

    Voilà essentiellement pourquoi le groupe a été créé: pour essayer réduire la complexité et donner aux Premières nations les ressources nécessaires pour passer à l'action.

+-

    Le vice-président (M. Bob Mills): Merci.

    Monsieur Tonks, vous avez la parole.

+-

    Alan Tonks (York-Sud--Weston, Lib.): Merci, monsieur le président. Je veux remercier nos témoins pour leurs représentations.

    Parlons un peu plus de toute cette question de la définition du cadre de l'évaluation. Vous voyez bien qu'on a fait vibrer quelques cordes sensibles. Tous ceux qui ont vécu de longues et difficiles évaluations environnementales conviendront que si on pouvait en définir le cadre, adopter une tactique précise, ou peut-être une stratégie, on pourrait éviter de longues audiences qui coûtent cher, entre autres. Mais est-ce raisonnable?

    J'aimerais savoir ce que vous en pensez Joshua, puisque vous avez parlé des incidences pour le Gully et la nécessité de procéder à des études régionales, afin de protéger l'environnement contre un projet de pêche en eaux profondes ou quelque autre.

    David, au début de votre exposé, je crois que vous avez parlé des effets cumulatifs. Est-ce que ces deux questions sont compatibles avec la définition du cadre de l'évaluation? Serait-il utile de concentrer nos efforts sur une définition du cadrede manière à répondre aux préoccupations que vous avez formulées? Est-ce qu'on se bercerait d'illusions? Y aurait-il d'autres façons de faire, pour que davantage de fonds soient disponibles et qu'on puisse se concentrer sur ces questions, par exemple, pendant l'étude approfondie? À votre avis, en nous penchant sur cette question de la définition du cadre, perdons-nous notre temps?

+-

    M. Joshua Laughren: Je vais essayer de répondre d'abord.

    Je ne pense pas qu'on perde notre temps ou que ce soit inutile. Il faut reconnaître qu'il s'agit d'aménagement du territoire et de prendre des décisions éclairées. Beaucoup d'éléments doivent être réunis pour cela, tant du côté hauturier, régi par la Loi sur les océans, la gestion intégrée, régie par la Loi sur les pêches et les évaluations environnementales stratégiques. Après l'aménagement du territoire, de responsabilité gouvernementale, il y a les évaluations environnementales par projet, les relations de travail entre les projets, soit entre leurs promoteurs et les intéressés locaux. Pour que de bonnes décisions soient prises, tous ces éléments entrent en jeu. Je crois que la LCEE et le projet de loi C-19 peuvent contribuer à ces décisions. Mais ces mesures législatives à elles seules ne règlent pas le problème. Il s'agit d'outils particuliers, dans une trousse d'outils dont on doit se servir pour prendre de bonnes décisions en matière d'aménagement du territoire.

    Est-ce que cela répond à votre argument?

À  +-(1035)  

+-

    M. Alan Tonks: Oui.

+-

    M. Joshua Laughren: Je pense que le jeu en vaut la chandelle, mais il faut comprendre que ce n'est qu'un élément.

+-

    M. David MacKinnon: Je suis d'accord avec Josh. Pour la région que nous représentons, il s'agit essentiellement de bassins hydrographiques dans leur état primitif. Pour tous les projets, on prévoit un couloir d'entrée, ce qui aura inévitablement des répercussions diverses, plus tard.

    Pour répondre à votre question, je ne pense pas qu'on perde notre temps en essayant de régler la question de la définition du cadre de l'évaluation. Pour revenir à notre mémoire, je trouve important d'intégrer à l'étude tous les documents qui se rapportent au niveau régional ou territorial, et de les considérer comme un élément essentiel de toute évaluation.

    Il est certain qu'une étude plus globale sera la meilleure solution pour le territoire dont nous parlons, pour ce type de région. Mais divers types de procédures existantes peuvent aussi s'intégrer à un document sur la définition du cadre. Par exemple, dans le cas des travaux sur la rivière Taku, les Tlingits de l'endroit ont leur propre processus d'aménagement du territoire, depuis des années. Ce genre d'information peut être intégrée au processus. La formule de traité en Colombie-Britannique tient compte aussi d'éléments régionaux, qui peuvent être intégrés aussi. Il serait à mon avis justifié d'intégrer ces données à une évaluation du cadre.

+-

    M. Alan Tonks: Ai-je le temps de poser une autre question? Oui?

    Chef Jacob, au sujet de votre expérience relative à la LCEE jusqu'ici, vous avez beaucoup insisté pour que le gouvernement fédéral s'acquitte de ses responsabilités fiduciaires, en vertu de l'article 35 de la Constitution et vous avez cité des arrêts. Vous avez peut-être déjà répondu à cette question: quelle est votre expérience du suivi qui est donné aux évaluations environnementales, pour ce qui est de la capacité de financement que vous avez et de vos connaissances? Et je ne parle pas de connaissances traditionnelles, mais des outils offerts par le gouvernement fédéral, dans le cadre de la responsabilité fiduciaire.

    Lorsque vous parlez de responsabilité fiduciaire, parlez-vous de celle du gouvernement fédéral ou de la vôtre, et de vos droits? Il y a une nuance. Je pense que c'est une relation partagée, mais c'est aussi une question de délégation de pouvoirs. Je sais qu'on entre à ce moment-là dans des questions relatives aux traités, mais ce que je veux savoir, c'est si vous avez ou non les outils financiers et la compétence pour participer pleinement à ces évaluations environnementales.

+-

    Chef Gibby Jacob: Aux yeux de ceux qui connaissent notre nation, nous sommes considérés comme l'une des tribus riches. Nous tirons des revenus importants de nos transactions foucières. Mais même avec les ressources dont nous disposons, nous ne serions probablement pas en mesure d'assumer les dépenses constantes que représente ce genre de processus.

    Nous avons participé au processus d'évaluation environnementale de la Colombie-Britannique, mais nous disposions pour cela de fonds du gouvernement provincial. C'est principalement parce que chaque dollar que nous recevons est rendu à nos membres, sous forme de services. Comme vous le savez probablement tous, il n'y a pas suffisamment d'argent pour tous, et nous sommes certainement comme tout le monde, à cet égard.

    Je suis fier de dire que notre nation emploie 350 personnes, donc 99 p. 100 des nôtres, ce qui montre que tout revient à nos membres. Il serait difficile de réduire nos services pour participer à ce genre de processus, alors que 900 personnes sont sur des listes d'attente, pour obtenir un logement. Cela représente un gros effort de notre part, alors que nous devons répondre aux besoins fondamentaux de notre peuple.

    Pour répondre à cette question, le devoir fiduciaire...c'est une question difficile, et je suis convaincu que c'est un problème pour toutes les Premières nations. Comme promoteurs de notre propre territoire, et même comme promoteurs de nos propres projets, nous devons nous assurer que nous nous acquittons de nos responsabilités fiduciaires envers nos membres. Nous faisons de grands efforts pour cela. Nous aimons à croire que nous faisons preuve d'une grande transparence. Nos communications sont probablement sans égales, surtout dans notre province, avec nos membres. Ils nous ont déjà dit que nous ne leur donnions pas suffisamment d'information, et maintenant ils nous supplient de cesser de leur en donner. Nous voulons croire que nous sommes aussi transparents et ouverts que possible avec nos gens. S'ils pensent le contraire, nous aimerions pouvoir leur répondre.

    Nous avons participé davantage à des évaluations au niveau provincial pour de grands projets, sans recourir à nos propres fonds. Nous avons dû faire venir des sociétés environnementales pour faire le travail à notre place, puisque nous n'avons pas encore ces compétences. Je dis pas encore, parce que nous avons de très nombreux jeunes qui cherchent quelque chose à faire. Ils nous demandent comment ils pourraient répondre aux besoins de notre nation, quand nous aurons choisi des orientations. Bientôt, ils seront tous là pour nous aider.

À  +-(1040)  

+-

    Le vice-président (M. Bob Mills): Je souhaite la bienvenue à M. Caccia, notre président habituel. Je crois qu'il est venu simplement s'assurer que le vice-président faisait bien son travail, mais il est tout de même le prochain intervenant sur notre liste.

+-

    M. Charles Caccia (Davenport, Lib.): Merci beaucoup. Je serai bref.

    Monsieur le président, au bas de la page 4 de son mémoire, le Fonds mondial pour la nature fait référence à une lettre de l'ACEE, de décembre 1996. On dit que l'agence avait accepté d'inclure dans le Guide des autorités responsables une référence précise aux aires protégées et celles qui pourraient l'être, mais que cela ne s'est pas encore concrétisé. Les témoins pourraient-ils nous dire pourquoi?

+-

    M. Peter Ewins: Avant que vous n'arriviez, nous avons parlé de cette question en réponse à Mme Karen Redman, mais si j'ai bien compris, c'est simplement une question de priorités pour l'agence, qui a encore cette intention. La dernière fois que j'ai posé la question, il y a environ six mois, on promettait que ce serait bientôt mis en route. Comme toute bonne chose, je présume que cela prendra beaucoup de temps et j'ai bien fait valoir que nous n'étions pas satisfaits de la réponse quand on nous a dit qu'il y avait d'autres priorités. Nous pensons en effet que les promoteurs sont ceux qui ont besoin d'information de haute qualité et à jour, au sujet de la définition du cadre de l'évaluation et des principes directeurs pour pouvoir présenter ces demandes et se livrer à cet exercice.

+-

    M. Charles Caccia: Vous a-t-on fixé une échéance?

+-

    M. Peter Ewins: À l'époque, non. D'après notre président, qui a participé à ces entretiens par téléphone, il semblait que c'était une priorité. On a alors discuté de procès, et c'était clairement une question d'importance pour l'agence. Elle est toutefois morte de sa belle mort en 1997. Depuis, malgré nos pressions, nous n'avons pas réussi à en refaire une priorité.

+-

    M. Charles Caccia: Peut-on donc conclure, comme vous semblez le faire, que c'est encore une priorité, après six ans, mais qu'il faut être patient, comme avec le mouvement des glaciers?

À  +-(1045)  

+-

    M. Peter Ewins: Oui, c'est ce que je dirais.

+-

    M. Charles Caccia: Quand pensez-vous que cette question sera réglée?

+-

    M. Peter Ewins: Laissez-moi sortir ma boule de cristal.

    Des voix: Oh, oh!

    M. Peter Ewins: Je m'attends à ce que ce soit réglé demain, mais est-ce bien réaliste...

+-

    M. Charles Caccia: Aussi à la page 4 de votre mémoire, vous parlez d'un principe fondamental, celui du développement durable, que vous soulignez en caractère gras. Où pourrait-on apporter cet amendement au projet de loi C-19?

+-

    M. Peter Ewins: Nous ne proposons pas que ces caractères gras fassent partie d'un amendement au projet de loi C-19. Nous comprenons qu'il ne s'agit pas ici d'intégrer un principe clé comme celui-là. Ce serait un principe directeur. On pourrait le trouver dans un article de préambule ou d'autres documents d'orientation. Nous avons décidé que les amendements les plus favorables qui cristalliseraient la discussion sur cette question sont ceux proposés aux articles 2 et 16 de la LCEE.

+-

    M. Charles Caccia: Passons rapidement à la consultation: pensez-vous que les éléments clé soulevés dans le cadre de la consultation ont été intégrés au projet de loi C-19?

+-

    M. Peter Ewins: Je crains de ne pas pouvoir répondre à cette question, même si je pense que oui.

    Josh, avez-vous une meilleure idée?

+-

    M. Joshua Laughren: Non.

+-

    M. Charles Caccia: Quelqu'un d'autre veut-il en parler?

+-

    M. William J. Borland: Moi oui.

    Nous avons dit notamment qu'une bonne part du travail des consultations, surtout avec le Comité consultatif de la réglementation, a été pris en compte, à l'exception de la définition du cadre de l'évaluation. Il semble bizarre que de si nombreuses recommandations aient été intégrées, mais pas celle-ci. Nous estimons qu'il est absolument crucial que cela fasse partie d'un processus de rencontre efficace.

+-

    M. Charles Caccia: Pouvez-vous nous dire pourquoi?

+-

    M. William J. Borland: Pourquoi il n'en fait pas partie? Non, je n'ai pas d'explication.

+-

    M. Charles Caccia: Finalement, très brièvement, à l'intention de l'Alliance, vous faites référence à la page 5 au projet d'extraction minière et de construction routière de Tulsequah Chief, en Colombie-Britannique, en disant que le gouvernement fédéral a clairement laissé agir le processus d'évaluation provincial. Pourriez-vous nous dire comment et pourquoi?

+-

    M. David MacKinnon: Essentiellement, d'après ce que nous avons constaté dans l'étude de Tulsequah Chief, la province a pris l'initiative et déployait beaucoup d'efforts pour faire comprendre que tout effet négatif du projet devrait être atténué. Nous avons constaté que les participants fédéraux, soit les pouvoirs fédéraux, ne défendaient pas avec autant d'ardeur leur domaine de compétence fédérale. Nous l'avons appris récemment, la position initiale des représentants fédéraux c'est qu'ils ne prévoyaient pas que ce projet aurait des effets négatifs. C'est ce qu'on pouvait lire assez tôt, dans une lettre. Ce n'était pas une décision finale, mais c'était une sorte d'énoncé de position, au moment-même où la province préparait sa position. Depuis, très récemment, le fédéral a présenté sa position. Ce sont les autorités qui le représentent, au ministère des Pêches et Océans, qui ont dit qu'on avait de graves préoccupations dans divers domaines, y compris pour les poissons et la faune. Je pense que ce renversement de position nous fait comprendre que le gouvernement fédéral, tout en étant à la table assez tôt dans le processus—c'est-à-dire avant ses nombreux avatars et les instances à la Cour suprême de la Colombie-Britannique et à la Cour d'appel—ne s'acquittait pas nécessairement de ses responsabilités en vertu de diverses lois fédérales.

À  +-(1050)  

+-

    M. Charles Caccia: Pouvez-vous donner une explication?

+-

    M. David MacKinnon: Je préférerais que les représentants du ministère des Pêches et des Océans et d'autres représentants fédéraux donnent leur explication. C'est quelque chose dont nous nous occupons assez activement. Nous essayons de savoir exactement ce qui s'est produit.

+-

    M. Charles Caccia: Ai-je le temps de poser une autre question?

+-

    Le vice-président (M. Bob Mills): Oui, si elle est brève.

+-

    M. Charles Caccia: Monsieur le président, j'aimerais demander à M. MacKinnon s'il a participé au processus de consultation. S'il l'a fait, peut-il nous dire si les deux sujets soulevés pendant le processus de consultation sont inclus dans le projet de loi C-19?

+-

    M. David MacKinnon: Demandez-vous si j'ai participé au processus de consultation concernant le projet de loi C-19?

+-

    M. Charles Caccia: Non, je parle du processus précédent. Avez-vous participé au processus lancé par l'agence?

+-

    M. David MacKinnon: Non, je ne l'ai pas fait.

+-

    M. Charles Caccia: Y avez-vous participé, monsieur Townsend?

+-

    M. Neil Townsend: Nous n'avons pas participé au processus.

+-

    M. Charles Caccia: Merci, monsieur le président.

+-

    Le vice-président (M. Bob Mills): Je tiens à informer les membres du comité que le comité de la santé se réunit ici à 11 heures, de sorte que nous devons libérer la salle.

    En outre, en ce qui concerne la motion qui a été présentée—en réalité, Karen Kraft Sloan m'a demandé de la présentée en son nom—, il n'y a pas quorum aujourd'hui et nous ne pourrons donc pas nous prononcer sur la motion. Nous devrons attendre à la prochaine réunion. J'espère qu'elle sera ici à ce moment-là et qu'elle pourra nous donner plus de détails.

    J'ai une très brève question à poser, si vous le permettez. M. Borland, vous avez mentionné, je crois, que vous prenez parfois l'initiative d'informer vous-même les gens. D'après mon expérience personnelle, c'est bien souvent le cas, et la population est invitée bien trop tard à participer au processus. Or s'il est tard, on peut s'attendre à ce que les gens ne viennent pas s'opposer à une proposition. Je pense que vous êtes probablement d'accord avec moi et je vous remercie d'avoir signalé que vous devez parfois prendre vous-même l'initiative. Vous voudrez peut-être ajouter quelque chose à ce sujet.

    Je veux aussi poser une question au sujet des eaux limitrophes. Plusieurs membres du comité savent que j'ai participé à un projet qui a été proposé dans l'État de Washington. La rivière Sumas prend sa source dans l'État de Washington et coule jusqu'en Colombie-Britannique. Je ne crois pas que vous étiez là pour vous occuper de cette question, et je me demande seulement pourquoi.

+-

    M. Neil Townsend: Pour l'instant nous consacrons notre attention au bassin hydrologique du nord-ouest de la Colombie-Britannique et du sud-est de l'Alaska, de sorte que nous nous occupons d'un secteur très limité sur le plan géographique.

+-

    Le vice-président (M. Bob Mills): Comment pensez-vous que le Traité des eaux limitrophes internationales... Supposons que des citoyens d'Abbotsford, par exemple, veuillent faire quelque chose? À quel point serait-ce efficace? Ce projet pourrait fort bien être annulé, mais supposons qu'il ne le soit pas. Dans quelle mesure ces gens pourraient-ils le contester en vertu du traité des eaux limitrophes?

+-

    M. Neil Townsend: Parlez-vous du Traité des eaux limitrophes internationales?

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    Le vice-président (M. Bob Mills): Oui.

+-

    M. Neil Townsend: Je répète que je ne suis pas un spécialiste, mais d'après notre expérience, il n'a pas été particulièrement facile d'utiliser le Traité des eaux limitrophes internationales pour résoudre les questions qui nous préoccupent. Dans le secteur dont nous parlons, il n'y a pas de Commission mixte internationale, l'organisme formé en vertu du Traité des eaux limitrophes internationales, pour s'occuper de ces questions. Nous avons demandé ou recommandé—comme d'autres l'ont fait, y compris l'État d'Alaska—que la Commission mixte internationale joue en effet un rôle et s'acquitte de son mandat de superviser l'application du Traité des eaux limitrophes internationales dans cette région en particulier. Cet organisme n'est pas présent chez nous et jusqu'à maintenant nous n'avons pas vu la Commission mixte internationale intervenir ou même accuser réception de notre demande. Par conséquent, en ce qui concerne le rôle de ce traité en particulier, nous n'avons pas vu une grande possibilité de l'utiliser, et c'est le cas particulièrement des citoyens de l'État d'Alaska—étant donné que ce projet se situe en Colombie-Britannique—, pour vraiment participer au processus.

+-

    Le vice-président (M. Bob Mills): Lors de notre réunion à Washington, certains sénateurs et membres du Congrès ont laissé entendre que c'était un outil très utile. Est-ce que cela vous paraît juste?

+-

    M. Neil Townsend: Je pense qu'il pourrait constituer un outil utile. Certains des concepts sont très importants. Et comme je l'ai dit, nous préconisons que la Commission mixte internationale joue un rôle ici. Cela pourrait constituer un mécanisme très utile mais il n'est pas appliqué. S'il était appliqué, il pourrait s'avérer très utile.

À  -(1055)  

+-

    Le vice-président (M. Bob Mills): Monsieur Borland, vous aviez quelque chose à ajouter je crois.

+-

    M. William J. Borland: C'est pour faire une observation pour montrer que les études d'impact sur l'environnement sont utiles. Je suis actuellement en plein projet. Il s'agit du réaménagement d'un petit projet hydroélectrique. Lorsque j'ai soumis les documents concernant l'évaluation des incidences sur l'environnement au gouvernement provincial, j'ai joint en annexe au document d'inscription les procès-verbaux de trois réunions d'établissement de la portée des incidences et de réunions publiques, un projet de plan de gestion des pêcheries, et un projet de plan de protection environnementale. C'était la première fois que des fonctionnaires avaient se pencher sur ce genre de projet. Nous avions fait nos devoirs, le projet a été examiné dans un mois et demi, au cours des vacances de Noël. Alors ça peut marcher, ça marche quand on le fait soi-même.

    On compte sur l'appui du public et dans bien des cas, les gens font la promotion de cette approche. Il y a un certain nombre de voix dissidentes mais évidemment, tout le monde ne peut pas être d'accord. Je pense que c'est un bon exemple de l'efficacité d'un projet quand on fait participer le public à l'étape préliminaire.

-

    Le vice-président (M. Bob Mills): Très bien. Merci.

    Je m'excuse auprès des députés qui n'ont pas eu un deuxième tour.

    Je voudrais tous vous remercier de vos exposés. Nous allons certainement en tenir compte dans notre examen du projet de loi C-19.

    Je vous remercie, collègues. La séance est levée.