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AANR Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON ABORIGINAL AFFAIRS, NORTHERN DEVELOPMENT AND NATURAL RESOURCES

COMITÉ PERMANENT DES AFFAIRES AUTOCHTONES, DU DÉVELOPPEMENT DU GRAND NORD ET DES RESSOURCES NATURELLES

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 24 avril 2001

• 1107

[Traduction]

Le vice-président (M. John Godfrey (Don Valley-Ouest, Lib.)): La séance est ouverte. Je souhaite la bienvenue aux témoins.

Avant de commencer les présentations d'aujourd'hui, j'aimerais faire une ou deux annonces et suggérer que nous nous réunissions brièvement après ceci, si nous en avons le temps, seulement pour examiner rapidement nos activités futures. Je vais vous expliquer la situation.

Tout d'abord, pour le reste de cette semaine, il y aura une rencontre informelle du comité jeudi, ce qui veut dire que nous n'aurons pas toute la panoplie des services de traduction. Nous aurons des interprètes, mais il n'y aura pas de compte-rendu de la réunion parce que nous allons projeter un film, dont je crois le comité a convenu, intitulé, Sila Alangotok: Inuit Observations on Climate Change, qui réunit en fait les deux principaux sujets d'intérêt de ce comité, soit l'effet du changement climatique sur les ressources naturelles et l'aspect des affaires autochtones.

Vous recevrez un avis indiquant la pièce où se tiendra cette réunion, et il y aura un service d'interprétation simultanée.

[Français]

Il y aura de l'interprétation. Ce sera à la pièce 308 de l'édifice de l'Ouest, à 11 heures. Ça durera à peu près 42 minutes, je crois, et ce sera tout. Donc, entre 11 heures et 12 heures, il y aura la présentation de ce film, qui semble excellent d'ailleurs. C'est tout récent; ça date de l'année passée.

[Traduction]

Le programme des réunions de la semaine prochaine n'a pas encore été tout à fait arrêté. Nous avons communiqué avec le bureau du ministre Goodale pour lui demander de venir nous parler du budget des dépenses. Ce pourrait être le sujet de base. Nous n'avons pas encore reçu de réponse sur ses disponibilités mardi ou jeudi. Nous savons que le ministre Nault veut nous rencontrer, mais il sera absent la semaine prochaine donc, pour l'instant, nous n'avons pas encore de témoins ou de séances qui soient planifiés pour mardi ou jeudi prochain.

Comme je l'ai dit, si nous avons le temps à la fin de cette séance-ci, nous pourrions discuter brièvement de plans de secours au cas où nous ne puissions pas voir le ministre Goodale. J'aimerais savoir ce que souhaite le comité. Je fais cela en l'absence de notre président, qui n'est pas là cette semaine, mais j'ai pensé qu'il serait bon de prévoir un peu à l'avance.

Là-dessus, j'aimerais passer aux points à l'ordre du jour et souhaiter la bienvenue à la Commission Crie-Naskapie dont les représentants sont Richard Saunders, son président, Robert Kanatewat et Philip Awashish, qui présentent le rapport biennal de la Commission Crie-Naspapie.

Je pense que nous allons passer directement aux présentations. Nous avons accordé aux témoins dix minutes en tout pour faire leurs observations préliminaires parce que nous voulons laisser le plus de temps possible au dialogue.

Si j'ai bien compris, M. Saunders parlera le premier, en tant que président.

Nous vous souhaitons la bienvenue au comité, monsieur Saunders.

M. Richard Saunders (président, Commission Crie-Naspapie): Je vous remercie, monsieur le président.

Tout d'abord, je tiens à remercier le comité de nous accueillir encore une fois. Nous étions ici en 1998 pour présenter notre rapport précédent et je pense que ça a été une démarche utile.

Je préciserai pour les nouveaux membres, très brièvement, que la Commission Crie-Naspapie a été créée en vertu de la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec et elle est tenue de présenter tous les deux ans un rapport sur la mise en application de la loi. Le rapport est déposé auprès du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, qui le présente ensuite à la Chambre des communes et au Sénat. Le ministre Nault l'a présenté juste avant les dernières élections, et c'est donc la première occasion que nous avons d'en parler.

Je suis accompagné aujourd'hui de mes deux collègues, Robert Kanatewat et Philip Awashish. Ce sont deux anciens chefs de leur communauté et anciens grands chefs adjoints et, d'ailleurs, ils sont signataires de la Convention de la Baie James et du Nord québécois. C'est donc qu'à bien des égards, ils figurent parmi les fondateurs de la Convention de la Baie James.

Nous avions espéré disposer d'une période raisonnable. Je pense que ce sera un peu court pour parler de tous les sujets que nous voulions soulever, alors je serai aussi bref que possible.

Nous ne prévoyons pas discuter de tout ce que contient le rapport. Nous savons que les membres du comité le liront encore tard ce soir de toute façon, alors il est inutile d'en expliquer tous les points, mais j'aimerais parler de deux choses importantes avant de laisser la parole à mes collègues.

La première chose est que nous commençons à nous préoccuper de la nécessité d'une plus grande responsabilité politique dans la fonction publique. Nous voyons qu'il existe de formidables mécanismes de responsabilité financière. La Chambre des communes, en particulier, a pris des mesures comme l'adoption de la Loi sur la gestion des comptes publics et elle a créé la législation relative à la création du Conseil du Trésor. Fait très significatif, à mon avis, le vérificateur général rend compte directement de ses activités au Parlement et, bien entendu, les députés passent beaucoup de temps à examiner minutieusement ce qui est fait avec l'argent. Je pense que c'est ainsi que ce devrait être, mais les politiques ne sont pas moins importantes que l'argent.

L'un des problèmes que nous avons affrontés à maintes reprises est que nous avons observé ce qui, à notre avis, constitue des tentatives de bonne foi de la part des ministres pour résoudre des problèmes, de mettre en oeuvre de bonne foi certains des accords qui ont été conclus, et ce n'est pas un point de vue partisan. Nous avons vu agir ainsi des ministres de divers gouvernements. Nous trouvons, cependant, que bien qu'il soit considéré monstrueux que la fonction publique ne suive pas les lignes directrices en matière de gestion des fonds publics et de reddition des comptes, il semble être jugé sans importance qu'elle fasse peu de cas des directives des ministres, du Cabinet et même du Parlement en matière de politique. Il est rarissime qu'il y ait des conséquences à diluer des décisions prises à l'échelon politique, à attendre qu'un ministre s'en aille—la plupart ne durent pas très longtemps—ou à tout simplement faire la sourde oreille aux directives spécifiques.

Comme nous n'avons pas beaucoup de temps pour en parler, nous avons préparé un document de discussion pour expliquer ce point de vue. Avec votre permission, monsieur le président, nous en laisserons des copies au comité aujourd'hui.

Il suffit de dire que nous nous préoccupons profondément de la nécessité d'une reddition des comptes en matière de politiques dans la fonction publique. Les exemples que nous avons donnés ici se rapportent au ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien. Nous parlons ici d'un exemple où un engagement spécifique, écrit noir sur blanc et signé par un ministre relativement à la Baie James, qui a été explicitement répudié en partie par des représentants officiels. Il y a d'autres exemples, moins dramatiques. Nous pensons qu'il faut faire quelque chose relativement à la responsabilité politique dans la législation.

• 1115

La deuxième chose dont j'aimerais parler concerne ce que fait le ministère des Affaires indiennes des rapports de la Commission crie-naskapie. Lorsque le Parlement adopte une loi comme la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec, selon nous c'est dans un but précis. Les avocats diraient que la loi est intentionnelle. Elle a une raison d'être, et il devrait en découler certains résultats.

Lorsque le Parlement, dans cette loi, impose à une commission, comme une obligation, d'avoir des audiences et de faire rapport sur la mise en application de la loi, il me semble que cela signifie que quelque chose doit arriver. Ces rapports ne sont pas rédigés dans le but encombrer les bureaux des députés et les tiroirs des archives. Ces rapports, selon nous, sont censés servir de document de fond à des discussions intelligentes et approfondies sur les divers aspects de la mise en application de la loi.

Permettez-moi de terminer en disant ce qui est arrivé. Parlons du rapport de 1998, le dernier qui a été présenté. Nous l'avons remis à la ministre Stewart en octobre 1998, le 5 octobre. À ce moment-là, elle a dit que ses collaborateurs allaient examiner le rapport et nous fourniraient une réponse sur chacune des recommandations que nous avions faites. Le 27 novembre 1998, elle nous a écrit pour répéter exactement la même chose. En janvier 1999, le 11 janvier, elle nous a écrit à nouveau pour nous dire que le ministère examinait toujours le document et que nous recevrions une réponse. Quand avons-nous reçu cette réponse? Jamais. Nous attendons encore.

Nous avons une brève réponse verbale lorsque le ministère des Affaires indiennes est venu nous parler des audiences sur ce rapport-ci. Sur les 41 recommandations que nous avions faites, ils ont décidé de ne rien faire au sujet de 29 d'entre elles parce qu'elles n'étaient pas de leur ressort.

Je vais brièvement m'expliquer. Ils ont dit «votre travail est de faire un rapport sur la mise en application de la Loi sur les Cris et les Naskapis et non pas de l'Accord de la Baie James, ni de la Convention du Nord-Est québécois». Voyons ce que dit la loi. L'alinéa 21j) décrit les pouvoirs d'une bande. Il stipule, entre autre, qu'une bande a des pouvoirs en vertu de la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec, en vertu d'autres lois fédérales et en vertu des accords.

Les peuples cris nous disent qu'ils ont beaucoup de difficulté à régler divers problèmes parce que certaines dispositions spécifiques de la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec et de la Convention du Nord-Est québécois ne sont pas pleinement appliquées. L'alinéa 21j) de la loi exige qu'ils s'acquittent de leurs pouvoirs en vertu de la Convention de la Baie James. Ils ne le peuvent pas.

Ces préoccupations nous sont signalées, et nous les examinons pour déterminer si elles sont valides, et si elles le sont, quelle est la nature du problème et quel genre de recommandations nous pouvons faire. Il n'est pas acceptable de tout simplement faire la sourde oreille aux préoccupations des communautés.

Un autre problème est que le ministère des Affaires indiennes a dit à maintes reprises, lorsqu'une bande ou une communauté, ou des chefs faisaient part d'un problème à notre commission «Eh bien, ils ne sont pas adressés à nos représentants, alors ce n'est pas une plainte officielle. Cela ne nous regarde pas parce que ce n'est pas officiel». Lorsque le Parlement crée une commission statutaire et exige qu'elle lui présente un rapport tous les deux ans, que des gens se présentent aux audiences de cette commission pour faire valoir leur point de vue, je considère qu'elle est tout aussi officielle qu'un fonctionnaire.

Je pense donc qu'il est grand temps que nous réglions ces problèmes et que nous nous acquittions des responsabilités que nous impose la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec avec sérieux, ou que nous trouvions d'autres mécanismes pour le faire.

Je pourrais fournir beaucoup d'autres détails, mais je pense que ça viendra avec les questions. Je ne veux pas empiéter sur le temps de mes collègues. Je vais laisser le micro à mon collègue Robert Kanatewat, puis ce sera ensuite le tour de Philip Awashish.

Je vous remercie, monsieur le président.

Le vice-président (M. John Godfrey): Merci beaucoup.

Monsieur Kanatewat, vous avez la parole.

M. Robert Kanatewat (commissaire, Commission Crie-Naspapie): Merci, monsieur le président.

Bonjour. Je suis heureux d'avoir cette occasion de parler aux honorables membres du Comité permanent sur les affaires autochtones, le développement du Nord et les ressources naturelles.

Tout d'abord, je tiens à remercier les membres du comité d'avoir réservé une période de leur calendrier très chargé pour recevoir la Commission Crie-Naspapie. Le contenu et les recommandations que renferme le rapport de 2000 de la Commission ont et ont toujours eu une très grande importance pour notre autonomie gouvernementale.

• 1120

Il n'est pas question dans le rapport de 2000 des problèmes et des préoccupations de la nation crie de Wemindji. Dans leur présentation à la Commission Crie-Naspapie, le 15 octobre 2000, ses membres ont exposé les préoccupations et problèmes spécifiques que je vais vous décrire.

Tout d'abord, il y a les règlements relatifs aux élections. D'après la nation crie de Wemindji, la Commission Crie-Naspapie devrait jouer un rôle plus actif dans les élections locales, en tant qu'observateur et dans la prestation de ressources comme directeurs du scrutin et candidats aux élections.

Deuxièmement, l'article 18, qui porte sur «l'Administration de la justice (Cris)», de la Convention de la Baie James et du Nord québécois, devrait être revu, modifié et mis en oeuvre conformément aux objectifs et aux besoins des communautés cries.

Troisièmement, au sujet de l'entente sur le maintien de l'ordre chez les Cris, une évaluation exhaustive des activités de maintien de l'ordre chez les Cris devrait être effectuée, qui tienne compte des voeux, des objectifs et des besoins des communautés.

Quatrièmement, au sujet des agents de conservation, la formation et la nomination d'Autochtones, de pointeurs et d'agents de conservation cris devraient se faire conformément aux dispositions de l'article 24.10 de la Convention de la Baie James et du Nord québécois.

Cinquièmement, en ce qui concerne le bureau de mise en oeuvre de la Convention de la Baie James, d'après les rapports qu'elle a eus avec le gouvernement fédéral au sujet de négociations comme celles portant sur la voie d'accès à la nation Wemindji, celle-ci a conclu que le mandat et l'objet du bureau de mise en oeuvre de la Convention de la Baie James devrait être de faciliter la mise en oeuvre des conventions et non pas de décider des obligations à l'égard du Canada.

Sixièmement, en ce qui concerne la Société de l'assurance automobile du Québec, les nations cries de Chisasibi, Wemindji et Eastmain ont été établies bien avant l'incorporation de la ville de Radisson et, pourtant, le bureau de la Société de l'assurance automobile est situé à Radisson. Les résidents de Chisasibi, Wemindji et Eastmain doivent assumer les frais de déplacement vers Radisson pour renouveler leurs permis de conduire, sans compter les autres communautés encore plus éloignées de ce service. La nation crie de Wemindji s'interroge sur les procédures, les critères et la politique de la Société de l'assurance automobile du Québec.

Le septième point concerne la route d'accès de Wemindji. La disposition 28.16, qui porte sur les routes d'accès aux collectivités cries et qui relève de l'article 28, «Développement économique et social (Cris)», de la Convention de la Baie James et du Nord québécois, prévoit la tenue de négociations entre le Canada, le Québec et les Cris de la Baie James pour la construction de routes d'accès à Eastmain, à Paint Hills (actuelle Wemindji) et à Rupert House (actuelle Waskaganish).

Une entente-cadre signée avec le gouvernement du Québec en 1990 a mené à la construction d'une route d'accès à Wemindji, au coût total de quelque 38 millions de dollars. En mars 1999, la nation crie de Wemindji a avancé du préfinancement totalisant 6,2 millions de dollars environ.

Le bureau de mise en oeuvre de la Convention de la Baie James a fait savoir que le Canada n'était pas tenu d'aider financièrement la nation crie de Wemindji à construire la route d'accès. Il faudrait rembourser à la nation crie de Wemindji la totalité du préfinancement.

Par conséquent, la Commission Crie-Naspapie fait les recommandations que voici.

Tout d'abord, elle recommande que le Canada reconnaisse ses obligations à l'égard des Cris de Wemindji aux termes de l'article 28.16 de la Convention de la Baie James et du Nord québécois. Les parties peuvent ensuite régler la question du remboursement du préfinancement avancé par la nation crie de Wemindji pour la construction de la route d'accès jusqu'à cette localité.

Ensuite, comme l'administration de la justice et la prestation de services de police sont essentielles pour avoir une administration locale bonne et efficace, il faudrait faire un examen poussé de l'article 18, intitulé «Administration de la justice (Cris)», et de l'article 19, «Services policiers (Cris)», de la Convention de la Baie James et du Nord québécois et que les parties les modifient en conséquence, de manière à répondre aux objectifs et aux aspirations actuelles de même qu'aux besoins et aux circonstances des Eeyou.

• 1125

Je vais résumer les préoccupations et vous citer le rapport selon lequel les besoins fondamentaux des collectivités cries—en matière d'habitation, d'emploi, d'infrastructure, de services d'aqueduc et d'égout, ainsi que des projets d'immobilisations—doivent être satisfaits de manière à mettre en place les conditions nécessaires pour assurer un développement social et économique convenable.

Je ne reprendrai pas en détail les enjeux et préoccupations des collectivités cries et naskapies qui sont énumérés aux pages 50 à 61 de la version anglaise et aux pages 54 à 66 de la version française. Je tiens toutefois à souligner aux membres du comité que la Commission Crie-Naspapie aimerait que vous invitiez les hauts fonctionnaires du ministère des Affaires indiennes à donner suite aux préoccupations permanentes des Eeyou cris et naskapis.

Agooda, Meegwetch. Je vous remercie.

Le vice-président (M. John Godfrey): C'est nous qui vous remercions.

Monsieur Awashish.

M. Philip Awashish (commissaire, Commission Crie-Naspapie): Monsieur le président, membres du comité, wachyia et meegwetch, c'est-à-dire merci de nous avoir invités.

La Convention de la Baie James et du Nord québécois de même que la Convention du Nord-Est québécois, deux traités contemporains, obligent le gouvernement du Canada à recommander au Parlement l'adoption d'une loi spéciale permettant au gouvernement local des Cris-Naskapis d'avoir un système ordonné et efficace.

La loi spéciale fédérale, c'est-à-dire la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec, a reçu la sanction royale le 14 juin 1984. Sauf lorsqu'il s'agit de décider quels bénéficiaires cris et naskapis des conventions sont des Indiens au sens de la Loi sur les Indiens, cette dernière ne s'applique pas aux Premières nations cries-naskapies, pas plus qu'elle ne s'applique à leurs terres collectives locales.

L'une des principales fonctions de la Commission Crie-Naspapie est de préparer des rapports biennaux sur l'application de la Loi sur les Cris-Naskapis du Québec. Le ministre des Affaires indiennes s'organise pour que chaque rapport soit déposé devant les deux Chambres du Parlement. Celui de l'an 2000 est le septième rapport de la Commission Crie-Naspapie.

Soit dit en passant, la Commission Crie-Naspapie est actuellement le seul organe juridique qui fait rapport de certains aspects de la Convention de la Baie James et du Nord québécois et de la Convention du Nord-Est québécois.

La Loi sur le règlement des revendications des Autochtones de la Baie James et du Nord québécois oblige le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien à présenter à la Chambre des communes un rapport annuel sur la mise en oeuvre de ces conventions pour la période allant de 1978 à 1998 inclusivement.

Comme le délai fixé au ministre dans la loi pour déposer son rapport annuel sur la mise en oeuvre des conventions est échu, les Premières nations cries-naskapies se trouvent maintenant dans la fâcheuse situation où, en réalité, il n'existe pas vraiment de processus ou de régime convenable, efficace et acceptable pour présenter des rapports ou assurer le suivi de la mise en oeuvre des conventions.

Quoi qu'il en soit, la Commission Crie-Naspapie existe maintenant depuis 17 ans environ. Elle a conclu que le gouvernement local cri-naskapi a considérablement évolué au cours des deux dernières décennies, en réaction surtout aux changements fondamentaux survenus dans le paysage politique, social et économique du Nord québécois.

Les Premières nations cries-naskapies utilisent leurs gouvernements locaux pour répondre à des besoins comme l'habitation, le développement économique, le maintien des traditions, les services de police, l'administration des programmes et des services, le développement communautaire, la protection de l'environnement et la représentation politique.

De plus, indépendamment du régime juridique actuel créé par la Loi sur les Cris-Naskapis du Québec, les Premières nations cries et naskapies recourent aux coutumes et aux droits traditionnels pour assurer la gouvernance locale. Par conséquent, il est clair que les Premières nations cries-naskapies exercent le gouvernement local au-delà de la portée de la Loi sur les Cris-Naskapis du Québec, qui ne répond pas actuellement à leur vision de gouvernement local.

• 1130

Dans ses rapports antérieurs, la Commission Crie-Naspapie a de nombreuses fois recommandé que soit examinée, révisée et modifiée la Loi sur les Cris-Naskapis du Québec de manière à correspondre aux défis, à la réalité changeante et aux besoins en évolution du gouvernement local des Cris-Naskapis. Ces conclusions et recommandations ont l'appui des Premières nations cries et naskapies.

Toutefois, le ministère fait la sourde oreille à ces conclusions et recommandations, de sorte que la Loi sur les Cris-Naskapis du Québec demeure un outil d'administration locale inflexible, rigide et statique pour les Premières nations cries-naskapies. Par conséquent, depuis son adoption par le Parlement en 1984, l'application de l'esprit et de la Loi sur les Cris-Naskapis du Québec n'a pas été faite par le gouvernement du Canada d'une manière qui reconnaît, rehausse et autorise les pratiques actuelles et le plein potentiel des gouvernements locaux cris et naskapis.

Comme beaucoup d'entre vous le savent peut-être, l'automne dernier, le ministre Robert Nault s'est engagé à consulter les Premières nations du Canada au sujet des grandes questions de gouvernement, par exemple, d'un train de mesures législatives concernant le gouvernement des Premières nations. De plus, dans une lettre adressée au président actuel de la Commission, le 16 mars 2000, le ministre a affirmé qu'il ne faudrait envisager des révisons au mandat de la Commission que dans le contexte d'une initiative beaucoup plus vaste visant à redéfinir l'autogouvernement des Cris, des Naskapis ou encore des deux.

À la lumière de la suggestion et des initiatives prises par le ministre des Affaires indiennes, de même que de l'appui et des aspirations des Premières nations cries et naskapies, il faut envisager et adopter des mesures législatives et administratives permettant de réaliser le plein potentiel de gouvernement local des Cris et des Naskapis.

Plus particulièrement, pour que les modifications qui s'imposent à la Loi sur les Cris et Naskapis du Québec soient faites, il faut établir un processus utile et efficace de discussion entre le Canada et les Premières nations cries et naskapies. Celles-ci souhaitent redéfinir l'«autogouvernement» et ajuster leurs relations avec le Canada.

Voilà qui met fin à mon exposé. Je répondrai volontiers à toutes vos questions. Je vous remercie.

Le vice-président (M. John Godfrey): C'est nous qui vous remercions.

Comme c'est l'usage ici, l'opposition sera la première à faire une intervention. En l'absence de l'Alliance,

[Français]

je donne la parole à M. Marceau, du Bloc québécois, pour sept minutes.

M. Richard Marceau (Charlesbourg—Jacques-Cartier, BQ): Merci beaucoup, monsieur le président.

Monsieur Saunders, j'aimerais d'abord vous donner la chance d'expliquer un plus en détail ce que vous avez dit au tout début concernant ce qu'il advient des rapports que vous présentez. Ce sont des rapports volumineux et très complets, dont la production exige beaucoup d'efforts, de temps et d'argent, et vous êtes en train de me dire que le gouvernement fédéral les regarde à peine et les met sur des tablettes et que vous n'en entendez plus parler. Est-ce bien ce que vous êtes en train de me dire?

[Traduction]

M. Richard Saunders: J'aurais quelques commentaires à faire à ce sujet. À mon avis, les ministres prennent effectivement pas mal au sérieux ces rapports, pour la plupart. Ne nous leurrons pas. Ils ont beaucoup de choses à faire et les rapports de la Commission crie-naskapie n'en sont qu'une. Je ne crois pas qu'il y ait des doutes à ce sujet. Ils administrent un très grand ministère, des dossiers très compliqués. Ils ont de nombreux programmes en cours et beaucoup de travail à faire.

• 1135

J'ai l'impression toutefois que les ministres, les plus récents en particulier, ont pris un vif intérêt personnel à ce que nous avions à dire et souhaitaient que quelque chose soit fait en termes d'examen et d'étude. En fait, la ministre Stewart, la dernière en charge de ce dossier, comme je l'ai dit, a précisé que la loi serait examinée. Elle l'a affirmé de vive voix quand nous lui avons présenté notre rapport et elle l'a répété par écrit quelques fois. Mais cela ne s'est pas produit.

Le problème, c'est que la situation se répète constamment. Je suppose que cela nous amène à conclure que, lorsqu'un ministre promet quelque chose, il faudrait qu'on y donne suite. S'il s'agit d'une instruction légitime donnée au personnel, il faudrait qu'elle soit exécutée, même s'il s'agit de tâches insignifiantes comme de lire le rapport, d'en faire une analyse, de transmettre les conclusions au ministre et de préparer une lettre pour sa signature. Des choses aussi simples devraient se faire, mais ce n'est pas le cas.

Quant au dernier rapport, un haut fonctionnaire du ministère a mis 18 mois avant de venir nous voir. À compter du rapport à l'étude, nous vous dirons exactement, au chapitre 10, ce qu'il avait à dire au sujet de chacune de nos recommandations. C'est alarmant parce que, essentiellement, il n'avait presque rien à dire.

[Français]

M. Richard Marceau: J'essaie de comprendre comment vous pouvez dire que les ministres prennent les rapports au sérieux alors que vous ne recevez aucune réponse. Ça me semble un peu contradictoire. Je vous sens venir un peu. Je me trompe peut-être, mais vous semblez avoir une dent contre la fonction publique et la rendre un peu responsable de l'état de la situation. Cependant, il demeure que dans notre système de gouvernement, malheureusement ou heureusement, un ministre est responsable de son ministère. Un ministre doit prendre la responsabilité de ce qui se fait ou de ce qui ne se fait pas dans son ministère. C'est peut-être dû à votre fonction, mais il me semble que c'est une erreur que de vouloir attribuer la faute aux subalternes et non pas à la personne qui est ultimement responsable du problème, c'est-à-dire le ou la ministre.

[Traduction]

M. Richard Saunders: Sans me lancer dans un examen partisan ou politique, ce qui de toute évidence n'est pas de mon ressort, j'aimerais vous citer—et nous le citons dans le document—le vérificateur général du Canada qui a mentionné certains de ces problèmes. À la page 6 de la version française de son rapport, intitulé Le point sur une décennie au service du Parlement, qu'il a déposé le 27 février 2001, le vérificateur général dit:

    Dans tous les gouvernements modelés sur celui de Westminster, les ministres sont responsables envers le Parlement de l'état de leurs ministères. Cependant, contrairement à d'autres pays, le Canada n'a jamais mis à jour cette doctrine pour établir une distinction entre les responsabilités du ministre envers le public et celles des hauts fonctionnaires.

Je ne conteste pas du tout le fait que ce sont les ministres, non pas les bureaucrates, qui sont responsables et qui doivent rendre des comptes à la Chambre des communes. C'est dans l'ordre des choses. Par contre, je ne voudrais certes pas être ministre en charge d'un énorme ministère et y passer deux, trois ou quatre ans peut-être sans savoir comment se déroulent les programmes et sans moyen de le savoir, parce que je n'ai pas été là assez longtemps et que j'en ignorais tout au départ. Je n'accepterais pas de ne pas comprendre les répercussions de la politique à la base, de ne pas savoir si mes décisions sont exécutées avec efficacité et opportunité. Je crois que les ministres, s'ils veulent rendre des comptes au Parlement comme ils le devraient, ont besoin d'avoir en place les mécanismes voulus pour exercer un véritable contrôle de la gestion au sein de leurs ministères. Je ne crois pas qu'ils les aient actuellement. Il faudrait leur donner ces outils.

• 1140

[Français]

M. Richard Marceau: C'est vrai que les ministères sont de grosses machines. Les ministres sont aussi entourés d'un cabinet politique. Il me semble que des rapports aussi bien faits que le vôtre, pour une situation aussi importante que celle des Cris et Naskapis... Le Parlement a passé une loi en 1984 justement parce qu'il s'est dit que la situation était assez importante pour faire quelque chose.

Ce genre de chose me dérange au plus haut point. De deux choses l'une: ou bien on le fait... Clémenceau disait que, quand on fait quelque chose, on le fait bien, sinon on ne fait rien. Finalement, c'est ce que je veux dire. Si on a décidé de le faire, faisons-le correctement, sinon arrêtons-nous là et mettons l'argent ailleurs. Vous avez autre chose à faire que de perdre votre temps à faire des rapports qui ne sont pas lus. Vous vous donnez corps et âme à un travail qui, finalement, passe dans le beurre.

Le vice-président (M. John Godfrey): Étant donné que le temps fuit, on va accepter ça comme un commentaire éditorial plutôt que comme une question, mais il se peut bien qu'on revienne sur ce point.

Monsieur Martin.

[Traduction]

M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Je vous remercie beaucoup, monsieur le président, et je remercie ceux qui se sont donné la peine de venir nous rencontrer aujourd'hui. Votre document est très détaillé et, de toute évidence, vous y avez investi beaucoup de réflexion et d'énergie.

Cependant, le thème prédominant ou ce qui me frappe le plus est l'impression, je suppose, que certains actes ou une certaine inaction vous irritent. J'aimerais donc vous offrir la possibilité de vous expliquer un peu plus clairement, car je suis nouveau au sein du comité.

J'aimerais commencer par vous poser une question fondamentale. Dans un des mémoires, vous avez mentionné que vous ne tombiez pas vraiment sous le coup de la Loi sur les Indiens, sauf lorsqu'il est question de définir qui est indien et ainsi de suite. Vous pouvez peut-être me faire un historique de cette question, très brièvement, c'est-à-dire me dire quand vous avez été soustraits de l'application de la Loi sur les Indiens et les faits qui ont mené à cette décision.

M. Richard Saunders: Je crois que le commissaire Awashish peut vous l'expliquer mieux que moi.

M. Philip Awashish: Comme je l'ai mentionné dans mon bref mémoire, la Loi sur les Cris et Naskapis du Québec est le produit de la Convention de la Baie James et du Nord québécois et de la Convention du Nord-Est québécois.

Durant la négociation de la convention, processus auquel mon collègue, Robert Kanatewat, et moi-même avons participé—je ne puis bien sûr parler que du volet cri de ces négociations—les Cris ont décidé que le régime de gouvernement local prévu dans la Loi sur les Indiens était trop restrictif, qu'il n'était pas du tout le reflet du gouvernement cri. Par conséquent, la Loi sur les Indiens ne devrait pas s'appliquer.

Les négociations menant à la Convention de la Baie James et du Nord québécois ont été l'occasion de mettre de l'avant le gouvernement local des Cris. Par conséquent, le Canada s'est engagé à recommander l'adoption d'une loi spéciale pour les Cris. Il a pris un engagement analogue à l'égard des Naskapis visés par la Convention du Nord-Est québécois.

Les modalités et dispositions de la Loi sur les Cris et Naskapis du Québec ont fait l'objet de discussions entre le Canada et les parties autochtones visées à partir de 1975, année de signature de la Convention de la Baie James et du Nord québécois, jusqu'en 1984, année où le Parlement a adopté la Loi sur les Cris et Naskapis du Québec.

Voilà donc un bref historique de la Loi sur les Cris et Naskapis du Québec. Le Canada souhaitait conserver certaines dispositions de la Loi sur les Indiens, soit la définition de qui est Indien.

• 1145

M. Pat Martin: D'accord. Voilà qui est très utile. Je vous en remercie, bien que je remarque dans les exposés—en réalité, dans votre propre exposé aussi—qu'en raison du manque de mise en oeuvre des recommandations qui ont été faites, vous êtes encore aux prises avec une loi qui demeure inflexible, rigide et inchangée, en d'autres mots, un document imparfait.

Nous le savions peut-être quand nous avons abrogé la Loi sur les Indiens, qui représente selon moi 130 ans d'un horrible drame social, et je suis vraiment heureux que vous ayez été les premiers au pays à vous débarrasser de ces menottes, pour parler franchement. Toutefois, si nous avons mis en place un document imparfait qu'il fallait améliorer à coup de modifications et de recommandations, le ministre ou les divers ministres et leurs hauts fonctionnaires ont été négligents en ne donnant pas suite aux recommandations.

Le point que je ferais valoir, par conséquent, s'il me reste quelques minutes, c'est que j'ai remarqué plusieurs mentions du fait qu'une loi de protection des dénonciateurs pourrait peut-être aider les bureaucrates à dénoncer les situations où l'on se traîne les pieds sans compromettre leur emploi. Le Sénat se penche actuellement sur un projet de loi visant à protéger les dénonciateurs et il se pourrait fort bien que ce projet de loi aboutisse à la Chambre des communes. Je vais peut-être vous laisser les quelques minutes qui restent pour que vous m'expliquiez comment ces dénonciations pourraient en réalité contribuer à faire mettre en oeuvre ce que vous réclamez.

M. Richard Saunders: Il faudrait souligner que nous sommes loin de critiquer tous les hauts fonctionnaires. La grande majorité des fonctionnaires de tous les ministères s'acquittent de leur mieux de leurs fonctions et ils s'efforcent effectivement d'exécuter les instructions ministérielles. Toutefois, il importe de comprendre que ce n'est pas parce que la plupart des fonctionnaires sont d'une honnêteté scrupuleuse en matière d'argent qu'il faut abroger la Loi sur la gestion des finances publiques. Ce n'est pas une raison pour se débarrasser du vérificateur général. Ce n'est pas une raison non plus pour abolir le Comité des comptes publics. De la même façon, le fait que la plupart des fonctionnaires font un effort consciencieux en vue de mettre en oeuvre la politique ne justifie pas de ne pas prévoir un quelconque mécanisme de reddition de comptes pour traiter des situations où ce n'est pas le cas, car la mise en oeuvre de la politique a tout autant d'importance, selon moi, que la gestion des fonds publics.

Pour ce qui est des dénonciations, il faut frapper un juste équilibre. Si vous êtes responsable de mettre en oeuvre la politique de manière consciencieuse, cela ne signifie pas que vous pouvez vous contenter d'acquiescer systématiquement aux demandes du ministre, sans égard à la nature de la demande. Il vous arrivera de recevoir des demandes suspectes.

Maintenant, on ne devrait pas passer son temps à dénoncer parce qu'on est en désaccord avec l'opinion politique des ministres—sûrement pas. On n'a pas à le faire. Mais si on estime qu'un acte répréhensible grave a été commis, par un ministre ou par des fonctionnaires, ou qu'une politique a été clairement rejetée, ou qu'on a refusé de mettre en oeuvre une mesure, il devrait y avoir un mécanisme permettant à un fonctionnaire de soulever le problème pour examen—pas sans raison, mais seulement s'il a des motifs clairs et raisonnables à présenter. Les situations de ce genre devraient être soumises peut-être, comme nous le proposons, à un nouveau commissaire à l'éthique, qui remplirait essentiellement les fonctions du conseiller en éthique actuel, mais qui aurait plus de pouvoirs et serait responsable devant le Parlement, au lieu de ne pas l'être. Il y a des moyens d'agir.

Le vice-président (M. John Godfrey): Nous reviendrons sans doute là-dessus, mais c'est maintenant

[Français]

le tour de M. St-Julien.

M. Guy St-Julien (Abitibi—Baie-James—Nunavik, Lib.): Merci, monsieur le président.

Je vais poursuivre sur votre rapport. Je sais que vous n'avez pas une dent contre les fonctionnaires, parce qu'il y en a qui travaillent fort, mais il est écrit dans votre rapport que l'un des exemples récents depuis l'adoption de la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec remonte à 1986, lorsqu'un sous-ministre adjoint des Affaires indiennes a soutenu devant la Commission Crie-Naskapie que le gouvernement n'était pas lié par une entente que le ministre a signée, en sachant que les fonctionnaires ne l'approuvaient pas.

On parle beaucoup de démocratie. On en a parlé au Sommet des Amériques et partout. Par ailleurs, on sait que les fonctionnaires qui n'ont pas lu votre rapport exercent un pouvoir discrétionnaire dans plusieurs aspects de la mise en oeuvre des politiques. Mais on connaît la situation. Même nous, comme députés, on a de la misère à savoir ce qui se passe dans les ministères. Au moment où on élève la voix et où on écrit des lettres, les fonctionnaires reculent et ainsi de suite. Je prends bonne note de cela.

• 1150

Ce qui me préoccupe, c'est la Commission Crie-Naskapie. On sait que la Convention de la Baie James et du Nord québécois a été le premier règlement de revendications territoriales de l'ère moderne au Canada. Elle a été signée en 1975 par les gouvernements du Canada et du Québec, la Société d'énergie de la Baie James, la Société de développement de la Baie James, Hydro-Québec et le Grand conseil des Cris.

Vous avez visité toutes les communautés cries et vous avez rencontré des gens qui vous ont fait part de leurs préoccupations. Je sais que la commission travaille très fort sur le terrain, mais actuellement, les conditions de logement sont une préoccupation de santé et de sécurité liée de près au thème du renforcement des collectivités et des économies et de l'appui aux gens.

À la suite de vos visites, pourriez-vous parler aux membres du comité de la question des conditions de logement?

[Traduction]

M. Robert Kanatewat: Les problèmes de logement touchent en fait toutes les communautés cries, pas seulement quelques-unes. Je pense que le grand chef et le chef des Washaw Sibi sont venus récemment en discuter avec votre comité permanent.

Le ministre des Affaires indiennes et du Nord s'est rendu dans la communauté des Washaw Sibi et s'est engagé à verser 1 million de dollars pour corriger la situation parce que certaines de ces maisons ont terriblement besoin d'être remplacées. C'est le cas non seulement dans quelques communautés, mais dans toutes les communautés cries.

C'est un médecin qui a effectué l'enquête tout récemment, et il a évidemment condamné beaucoup d'installations dans lesquelles les gens vivent. Le surpeuplement et la pénurie de logement causent beaucoup de risques pour la santé au sein des communautés. La plupart d'entre elles, ou quelques-unes d'entre elles, sont jugées dangereuses en raison des conditions de vie.

Ce n'est pas seulement dans cette communauté, mais dans toutes les communautés. Et même la communauté naskapie connaît les mêmes problèmes de mauvaises conditions de vie.

[Français]

M. Guy St-Julien: Merci. Je veux poursuivre parce que c'est important.

On sait que la Commission Crie-Naskapie fait des rapports au Parlement, mais qu'il arrive souvent qu'elle n'obtienne même pas de réponse. C'est aussi le cas des députés.

Un autre sujet me préoccupe. Il s'agit de la protection environnementale en territoire cri. Actuellement, les Cris disent que le régime de protection environnementale et sociale garanti par l'article 22 de la Convention de la Baie James et du Nord québécois est miné par le gouvernement du Canada et le gouvernement du Québec. On sait que nous sommes fiduciaires de la Convention de la Baie James et du Nord québécois de 1975 et, depuis plusieurs années, les Cris disent qu'il doit y avoir une meilleure protection du côté environnemental. En avez-vous entendu parler lorsque vous avez visité les communautés?

[Traduction]

M. Richard Saunders: C'est un problème qui, je pense, touche l'ensemble du pays. Je crois que le gouvernement fédéral est... J'essaie toujours d'être indulgent à l'égard de ceux que je critique, et j'essaie de comprendre quelles sont leurs difficultés. Je pense qu'il est difficile pour le gouvernement fédéral de concilier son rôle de gouvernement et son rôle de fiduciaire à l'égard des peuples autochtones.

• 1155

Nous en avons parlé brièvement la dernière fois que nous sommes venus vous rencontrer. Une fois qu'ils sont élus, les gouvernements pensent qu'ils ont pour tâche de prendre des décisions, même difficiles, d'établir des priorités de dépenses, de déterminer quels services publics limiter et d'exercer un pouvoir discrétionnaire.

C'est pourquoi les gouvernements sont élus. C'est essentiellement ce qu'ils font et, si nous ne sommes pas d'accord, il y a des solutions politiques à envisager.

Mais le cadre qui est déterminé par la Convention de la Baie James et du Nord québécois, par exemple, ou d'ailleurs les traités dans les Prairies ou tous les règlements en matière de revendications territoriales ne permet pas d'exercer librement son pouvoir discrétionnaire. Il y a des dispositions précises à suivre.

La Cour suprême a statué que les traités entraînent des obligations légales, ce qui est vrai. Il y a des fonctionnaires qui conseillent les ministres concernant l'exercice de leur pouvoir discrétionnaire, l'établissement des priorités, les dépenses à réduire et à augmenter, et on se dit que, si le ministre accepte telle chose, la responsabilité est politique. Par contre, il faut aussi constater qu'un accord exécutoire existe et qu'il faut le respecter. C'est une autre optique, et il est très difficile de concilier les deux points de vue.

C'est la raison pour laquelle, en 1998, nous avons recommandé que les traités et les règlements en matière de revendications territoriales soient mis en oeuvre par un organisme indépendant des responsables habituels des Affaires indiennes, et nous pensons toujours la même chose.

Je ne sais pas si j'ai bien répondu à votre question, monsieur St-Julien.

M. Guy St-Julien: Merci.

Le vice-président (M. John Godfrey): Monsieur Finlay.

M. John Finlay (Oxford, Lib.): Merci, monsieur le président.

Je vous remercie de votre réponse, monsieur Saunders. J'ai une mauvaise impression de déjà vu.

Je ne sais pas si vous étiez ici, monsieur Saunders, la dernière fois que nous avons étudié le rapport de la Commission crie-naskapie, mais je me rappelle que les deux chefs, Robert et Philip, étaient ici.

M. Richard Saunders: Ils sont plus visibles.

M. John Finlay: J'ai ressenti le même sentiment d'impuissance que celui que je commence à éprouver maintenant, parce que je me rappelle avoir demandé: «Comment les choses fonctionnent dans les faits quand les trois parties qui se réunissent—le gouvernement du Canada représenté par les Affaires autochtones, le gouvernement du Québec et la Commission Crie-Naspapie—sont censées s'entendre sur la gestion des forêts, les pêches, l'eau et le reste, tous des aspects qui font partie intégrante de cet accord?» N'est-ce pas le cas?

Selon vous, ne pas se présenter à la réunion est un moyen efficace de ne pas prendre de décision et, si vous êtes présents mais qu'eux—c'est-à-dire la province et le gouvernement fédéral—n'y sont pas, tout le monde n'est pas représenté et, par conséquent, les décisions sont très difficiles à prendre.

Je ne sais pas. J'imagine que notre comité a une certaine responsabilité. Nous assumions une certaine responsabilité pendant le dernier mandat. Nous avons produit un rapport. Nous vous avons écouté. Comme M. Saunders l'a dit, nous confions ensuite le dossier au ministère, et des mesures doivent être prises. Bien franchement, d'après ce que je lis, il ne s'est pas passé grand-chose, ce qui ne me rassure pas beaucoup pour l'avenir.

Nous avons travaillé très fort dans le cas d'autres accords également. J'étais dans la vallée du Nass au moment de l'accord. Nous avons mis sur pied le Nunavut et il y aura des problèmes dans son cas que nous devons régler.

Si vous pouvez nous indiquer des pistes à suivre ou des choses à faire qui pourraient avoir un effet constructif, j'aimerais bien les entendre.

M. Richard Saunders: Monsieur Finlay, je ne vais pas rentrer dans les détails, mais je pense qu'il est nécessaire, comme nous le proposons, de créer un organisme qui serait chargé de veiller à la mise en application des traités et des règlements en matière de revendications territoriales. Cet organisme doit être indépendant du ministère des Affaires indiennes et du Nord et distinct des mécanismes bureaucratiques et discrétionnaires habituels.

• 1200

M. John Finlay: Ne devrait-il pas assumer une certaine responsabilité politique?

M. Richard Saunders: Sûrement.

M. John Finlay: Nous ne pourrions pas le séparer du gouvernement.

M. Richard Saunders: Non, mais je pense que cet organisme doit vouloir assurer la mise en application judicieuse des obligations légales, dont parle la Cour suprême. C'est une attitude bien différente de celle qui consiste à exercer un pouvoir discrétionnaire et un jugement sans distinction.

Il faut mettre en application l'accord. Vous avez parlé des Nisga'a. Tom Malloy représente le gouvernement fédéral auprès des Premières nations, qui négocient un accord avec lui. Elles pensent obtenir quelque chose. C'est la même chose dans le cas des Cris qui ont négocié avec le gouvernement fédéral. Ils croyaient avoir obtenu quelque chose. Mais ils doivent constamment faire appel aux tribunaux pour en assurer la mise en oeuvre. Il ne devrait pas en être ainsi.

Le vice-président (M. John Godfrey): Je vais maintenant intervenir

[Français]

parce que c'est maintenant le tour de M. Marceau et nous revenons à ce côté.

M. Richard Marceau: Merci, monsieur le président.

J'ai une brève question pour M. Awashish. Dans votre présentation, surtout à la fin, je ne suis pas sûr d'avoir compris exactement ce que vous vouliez dire à propos de la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec. D'une part, vous dites que la loi a besoin d'être changée parce qu'elle est inflexible, rigide, etc., et d'autre part, vous semblez dire que le problème réside dans la façon par laquelle le gouvernement du Canada met en oeuvre la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec. Alors, quel est le problème? Est-ce la loi elle-même ou la façon dont elle est appliquée par le gouvernement?

[Traduction]

M. Philip Awashish: Le problème de la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec est causé par la façon dont elle est mise en oeuvre. Quand les Cris et les Naskapis ont discuté des dispositions de la loi avec le Canada, il a été convenu que la loi évoluerait en fonction des modalités de l'autonomie gouvernementale des Autochtones. Les administrations locales des Cris et des Naskapis ont changé considérablement, comme nous l'avons dit, depuis 20 ans, et la loi devait suivre cette évolution. Elle aurait dû être révisée et modifiée pour tenir compte des réalités actuelles et des nouveaux besoins des administrations locales cries et naskapies. Cela n'a pas été le cas. Quand je parle de la mise en oeuvre de la loi, je veux aussi dire que la loi doit être révisée et modifiée en conséquence.

[Français]

M. Richard Marceau: Merci.

[Traduction]

Le vice-président (M. John Godfrey): Je constate que c'est maintenant à mon tour. J'ai quelques observations à faire.

D'abord, il me semble important de revenir sur les droits et les privilèges des comités permanents. D'après le Règlement, nous avons le droit de nous occuper de la reddition des comptes en matière de gestion des politiques. Selon les précédents qui figurent dans Marleau et Montpetit, il est bien clair que les raisons pour lesquelles vous demandez une nouvelle loi peuvent faire partie de nos fonctions, si nous le voulons.

D'après ce que nous avons entendu jusqu'ici—et je fais simplement cette proposition pour que nous en discutions entre collègues—je pense qu'il serait utile, étant donné que notre programme nous en laisse le temps, de demander à des représentants du ministère des Affaires indiennes et du Nord de venir nous rencontrer la semaine prochaine pour nous parler d'abord du rapport de 1998.

• 1205

Je crois comprendre que le fonctionnaire qui vous a répondu de vive voix n'est plus le responsable compétent. Je pense que le problème dépasse ce rapport en particulier. Il se rapporte davantage à la façon dont nous gouvernons et à la façon dont nous rendons des comptes.

Je ne veux pas imposer des déplacements supplémentaires, mais si le comité veut inviter des représentants à venir nous expliquer les défaillances du régime de reddition des comptes, j'aimerais savoir si vous êtes libres la semaine prochaine. Nous devrions y penser. Je pense qu'il serait utile de régler cette affaire.

Le chapitre 10 de votre rapport fait état d'un certain mécontentement au sujet de la façon dont le dernier rapport a été accueilli, et nous aimerions avoir l'assurance que le présent rapport sera traité différemment. Le seul moyen d'en savoir plus est d'inviter les représentants du ministère à venir nous rencontrer, mais il serait utile qu'un représentant de la Commission vienne nous prêter main-forte.

Je ne sais pas si c'est une initiative utile. Mes collègues auront peut-être un autre avis. Mais je constate que nous avons du temps mardi prochain et jeudi prochain. Nous avons une petite marge de manoeuvre. Je soumets donc la question à mes collègues. J'aimerais savoir si vous pensez que c'est une initiative utile.

J'aimerais aussi dire que la Commission Crie-Naspapie m'intéresse parce que c'est un organisme unique en son genre. J'aimerais vous demander si, malgré le fait que les fonctionnaires ne vous ont pas répondu comme vous auriez aimé qu'ils le fassent, vous pensez que cela présage de l'avenir. Si nous devons d'une façon ou d'une autre remplacer ou moderniser la Loi sur les Indiens, diriez-vous que c'est un modèle à suivre—même si nous pouvons avoir besoin de prévoir d'autres mécanismes, comme celui que vous proposez pour l'examen des traités—qui pourrait s'appliquer dans l'ensemble du pays étant donné que nous cherchons de nouveaux modèles de gestion des affaires publiques, par exemple?

M. Richard Saunders: Je vais vous dire ce que j'en pense rapidement, et mes collègues auront peut-être des remarques à ajouter. Je pense que c'est un bon modèle à suivre, mais qu'il peut être amélioré. La Commission Crie-Naspapie, telle qu'elle existe actuellement, ne prend pas de décision, contrairement à d'autres commissions établies par la loi. Elle tient des audiences et formule des recommandations.

Quand une commission peut prendre des décisions, comme c'est le cas du CRTC, ses décisions sont exécutoires. Dans certains cas, elles peuvent être examinées par le Cabinet. Elles sont sûrement soumises à l'examen judiciaire, par exemple. C'est normal. Mais une commission qui prend des décisions n'est pas assujettie à un suivi.

Une commission comme la nôtre formule des recommandations. Je ne pense pas que les contribuables du pays devraient payer des gens comme nous pour faire du lobbying et faire valoir leurs idées. L'argent des contribuables ne devrait pas servir à payer des activités de lobbying. Ce n'est pas ce à quoi il doit servir.

Mais cela nous cause un problème. Si nous tenons bien compte des revendications de la communauté, si nous analysons assez bien les questions et si nous formulons des recommandations au moins à moitié pertinentes, qu'est-ce qu'on en fait? Si les pressions que nous exerçons ne sont pas efficaces—et je ne pense pas qu'elles le sont—et si nos décisions ne sont pas exécutoires, il est bien facile d'oublier les rapports que nous présentons.

C'est pourquoi la balle se retrouve dans le camp d'un comité comme le vôtre qui, comme vous dites, a sûrement la possibilité et le pouvoir de donner suite aux questions de ce genre. C'est aussi vrai, mais de façon un peu différente, dans le cas d'un comité du Sénat.

J'imagine que nous vous lançons la balle, et c'est la raison pour laquelle nous sommes ici. Nous n'allons sûrement pas faire de lobbying à ce sujet. Mais, comme nous ne prenons pas de décisions exécutoires, quels sont nos choix? Je pense que l'endroit est bien choisi pour examiner ces questions.

Le vice-président (M. John Godfrey): Merci.

Monsieur Vellacott, je sais que vous êtes arrivé tard, voulez-vous intervenir maintenant?

M. Maurice Vellacott (Saskatoon—Wanuskewin, AC): J'ai lu la documentation à l'avance. J'écoute et j'apprends, et je vais laisser ma place à d'autres pour l'instant.

Le vice-président (M. John Godfrey): D'accord.

[Français]

Dans ce cas, c'est le tour de M. St-Julien.

M. Guy St-Julien: Merci, monsieur le président.

• 1210

Monsieur Saunders, je veux aborder deux points. J'ai lu le rapport il y a plus de 15 mois, et deux choses m'inquiètent. Je visite les Cris sur le terrain, comme vous avez visité toutes les communautés. Le grand chef Ted Moses, les chefs des communautés, les Cris et moi-même sommes frustrés par le retard dans la négociation d'un accord sur des programmes spéciaux de formation pour les Cris de la Baie James en application du paragraphe 28.9 de l'Accord de la Baie James.

On sait que les négociations avec Développement des ressources humaines Canada et les Cris peuvent aboutir à un accord qui permettra de mieux remplir l'obligation prévue aux paragraphes 28.9.1, 29.8 et 29.2. Cela représente un aspect important de la stratégie des Cris du Canada en réduisant les risques de litige reliés à la non-application de la Convention de la Baie James et du Nord québécois. L'exécution de ces programmes spéciaux, en plus de remplir une obligation énoncée dans la Convention de la Baie James et du Nord québécois, vise à accroître l'autonomie et à réduire la dépendance envers le bien-être social et les coûts de l'aide sociale en fournissant de la formation dans les principales industries du territoire cri, et ainsi à appuyer le thème du renforcement des collectivités et des économies et de l'appui aux gens.

On dirait que dans ce dossier, Développement des ressources humaines Canada se traîne encore une fois les pieds. Auparavant, c'était le comité Vanat-Namagoose, et on a maintenant le comité négociateur Gagné-Namagoose. Du côté des Cris, c'est toujours le même négociateur et il fait de l'excellent travail, mais on est encore en retard. Que disent les Cris au sujet de ce dossier de la formation?

[Traduction]

Le vice-président (John Godfrey): Qui voudrait répondre à la question? Monsieur Saunders.

M. Richard Saunders: Je vais commencer à y répondre.

D'abord, les Affaires indiennes diraient que cette question dépasse notre mandat. Pour une fois le ministère aurait raison.

Cela montre le genre de difficulté que nous éprouvons. Dans la Convention de la Baie James et du Nord québécois, la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec et la Convention du Nord-Est québécois, on semble répondre aux espoirs de bien des gens. Avant l'accord, les communautés éprouvaient de graves problèmes économiques, comme toutes les communautés autochtones du Canada.

L'accord devait, entre autres, aider les peuples autochtones, les Cris et les Naskapis, à être plus autonomes sur leur propre territoire, à mieux utiliser leurs ressources, à mieux contrôler les activités au sein de leurs communautés et à mieux profiter des terres qui avaient assuré leur substance pendant des milliers d'années. Beaucoup de gens inspirés et pleins d'espoir, y compris ces deux hommes, ont signé l'accord pensant que beaucoup de problèmes seraient réglés par les Cris et les Naskapis eux-mêmes, de sorte qu'ils seraient moins dépendants d'autres programmes gouvernementaux.

Dans la mesure où les accords ont été mis en oeuvre, des progrès ont été réalisés. Il n'y a pas de doute à ce sujet. Là où ils n'ont pas été mis en oeuvre, l'autonomie exercée par les communautés est moins grande que ce qu'on espérait au départ. La mise en oeuvre appropriée des accords réglera en partie le problème.

Philip, vouliez-vous ajouter quelque chose?

M. Philip Awashish: Vous demandez, monsieur St. Julien, ce que les Cris et les Naskapis disent. Vous avez parlé en particulier de l'article 28 de l'accord et aussi de Développement des ressources humaines.

Ce que les Cris disent, d'abord, c'est qu'ils sont admissibles aux programmes et aux services courants qui sont offerts aux autres Premières nations du Canada. Ensuite, ils sont admissibles aux programmes et aux services courants que les autres citoyens du Canada reçoivent. Pour cela, ils ne voient vraiment pas pourquoi un traité devrait être signé.

• 1215

Cependant, on leur a aussi promis et garanti des programmes et des services spéciaux, qui sont prévus pour les Cris à l'article 28 de l'accord. Ils comprennent qu'un traité devait être signé pour qu'on puisse leur offrir et leur garantir des programmes et des services spéciaux. Néanmoins, le traité précise qu'ils sont admissibles aux programmes et aux services courants que les autres Premières nations du Canada reçoivent et qu'ils sont admissibles aux programmes et aux services offerts aux autres citoyens du Canada.

Le vice-président (M. John Godfrey): D'accord.

[Français]

Monsieur Marceau, avez-vous une question à poser avant M. St-Julien, pour que justice soit faite?

[Traduction]

Ça va.

[Français]

Monsieur St-Julien.

M. Guy St-Julien: Merci, monsieur le président. Il me reste deux questions.

Une autre question me préoccupe à propos du résumé que vous avez fait et de votre rapport. Le grand chef Ted Moses et plusieurs trappeurs m'ont exprimé la semaine dernière, pendant les vacances de Pâques, leur frustration concernant le grave retard qu'on accuse dans l'atteinte d'un accord de financement de l'Association des trappeurs cris du Québec. On sait que c'est important. La Baie James est un grand territoire et les trappeurs sont inquiets. Vous ont-ils parlé de ce dossier, messieurs Saunders, Awashish et Kanatewat?

[Traduction]

M. Philip Awashish: Les trappeurs me parlent des questions qui les préoccupent, mais ils ne s'adressent pas à moi en tant que commissaire. Ils m'en parlent parce qu'ils savent que j'ai participé aux négociations sur l'accord et que j'ai contribué à sa mise en oeuvre.

Les trappeurs s'expriment sur l'Association des trappeurs cris, les programmes de sécurité du revenu, les mesures législatives sur les armes à feu et d'autres questions. Ils se préoccupent des obligations du fédéral et bien sûr du Québec à leur égard, en tant que trappeurs.

Ils s'inquiètent de la situation de l'Association des trappeurs cris, par exemple. L'association leur assure des prestations, des programmes et des services. Elle leur permet de pratiquer un mode de vie traditionnel, fondé sur la chasse, la pêche, la trappe et des activités connexes dans le Eeyou Istchee, c'est-à-dire sur le territoire cri.

Le vice-président (M. John Godfrey): Je signale, au fait, que le film que nous allons voir jeudi a été produit, fort à propos, par l'Institut international du développement durable de Winnipeg et l'Association des chasseurs et des trappeurs, ce qui est une heureuse collaboration.

[Français]

Monsieur St-Julien, avez-vous une deuxième question? Ce sera ensuite à M. Finlay.

M. Guy St-Julien: Merci. J'en aurais pour toute la journée, monsieur le président.

Le vice-président: Oui, mais on ne passera pas toute la journée ici.

M. Guy St-Julien: Allons-y, messieurs Saunders, Awashish et Kanatewat. Parlons des négociations axées sur l'avenir. Je sais que le rapport a été déposé il y a plusieurs mois et que les fonctionnaires sont là. La stratégie des Cris de la Baie James a été approuvée en 1997, mais qu'en est-il des négociations, des obligations en souffrance, de la gestion des litiges, de la relation Canada-Québec, de l'élargissement de la base fédérale pour le ralliement des autres ministères et des revendications des Cris? Est-ce que vous participez aux négociations pour donner un indice? Vous êtes une commission et vous faites du bon travail, mais est-ce que le gouvernement du Canada et le ministère prennent la peine de vous consulter à tous les mois sur les rapports et sur ce qui se passe actuellement?

• 1220

Je sais que vous êtes sur le terrain. En terminant, souhaitez-vous que le gouvernement du Canada, le ministère des Affaires indiennes du Canada et les hauts fonctionnaires vous consultent plus souvent?

[Traduction]

M. Richard Saunders: Je pense que ce serait utile s'ils le faisaient. Comme vous le savez, le poste de commissaire est une fonction à temps partiel. Nous avons tous d'autres activités, mais il est clair, comme vous dites, que nous sommes sur le terrain. Nous entretenons suffisamment de contacts avec les communautés et avec les dirigeants. Heureusement, nous sommes bien au fait d'un certain nombre de dossiers et nous serions heureux de discuter avec les représentants des Affaires indiennes ou quiconque veut profiter de notre expérience, grande ou petite.

Mes collègues, notamment, ont tous les deux une vaste expérience de la vie dans les communautés de la baie James, des négociations entourant l'accord, de la mise en application de la loi et le reste. J'en aurais pour toute la journée, moi aussi, mais...

Donc, pour vous répondre, oui, nous serions très heureux que tout ceux qui veulent nous consulter le fassent.

Le vice-président (M. John Godfrey): Merci.

Je pense que je vais laisser M. Finlay poser une dernière question avant d'essayer de suggérer un genre de plan de travail pour la semaine prochaine. Je vais du moins soumettre ma proposition et voir si elle suscite de l'intérêt.

Monsieur Finlay.

M. John Finlay: Merci, monsieur le président.

J'aimerais revenir à certains de vos propos, chef Awashish, sur les services. Je pense que vous avez bien expliqué la situation, et j'aimerais que vous me donniez un exemple.

Vous avez d'abord dit que les Cris sont admissibles aux services que les autres membres des Premières nations reçoivent. Je suis d'accord là-dessus. J'aimerais que vous me donniez un exemple concret de ces services. Je sais qu'il y en a beaucoup. Parlez-vous de services comme le logement, peut-être, ou les soins de santé?

M. Philip Awashish: Le ministère des Affaires indiennes et d'autres ministères fédéraux offrent certains programmes et services aux bandes indiennes, aux Premières nations du Canada. Les Cris ont droit aux mêmes programmes et services.

M. John Finlay: Bien. C'est juste.

M. Philip Awashish: Vous en avez nommé quelques-uns. C'est exact.

M. John Finlay: Pour être plus précis, le Programme d'aide préscolaire aux Autochtones devrait être offert aux Cris du nord du Québec.

M. Philip Awashish: Quel programme?

M. John Finlay: Le Programme d'aide préscolaire aux Autochtones.

M. John Awashish: Oui.

Le vice-président (John Godfrey): Vous savez ce dont il est question, le développement de la petite enfance, l'intervention précoce pour...

M. Philip Awashish: Oui.

M. John Finlay: Vous avez ensuite parlé des services que les autres citoyens reçoivent—pour obtenir un passeport, disons, les services de citoyenneté, ou de pensions du Canada?

M. Philip Awashish: C'est juste. Nous parlons des autres programmes et services fournis aux autres citoyens.

M. John Finlay: Puis, il y a des programmes et des services spéciaux destinés aux Cris. Donnez-moi un exemple. Sont-ils énoncés dans la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec?

M. Philip Awashish: Il s'agit de programmes et de services spéciaux qu'on appelle aussi avantages et garanties. Ils sont énoncés dans la Convention de la Baie James et du Nord québécois.

On précise dans le traité que les Cris sont admissibles aux programmes et services courants qui sont offerts aux autres membres des Premières nations et aux autres citoyens pour bien les distinguer des services et programmes spéciaux énoncés dans l'accord qui s'ajoutent aux programmes et services courants.

M. John Finlay: Si je peux poser une dernière question, globalement, à quoi les Cris se sont-ils engagés en échange des programmes et services spéciaux qui, d'après ce que vous avez dit, ne sont pas offerts aux autres membres des Premières nations et aux autres citoyens? Il doit y avoir une contrepartie. Pouvez-vous me donner un exemple?

• 1225

M. Philip Awashish: D'abord, la Convention de la Baie James et du Nord québécois est un règlement à l'amiable. Les Cris, avec les Inuits, poursuivaient en justice Hydro-Québec, le gouvernement du Canada et le gouvernement du Québec pour des revendications territoriales liées à un projet d'aménagement hydroélectrique. La convention est à la fois un règlement à l'amiable et un traité moderne. Les conditions de la convention, du règlement ou du traité ont été négociées par les parties concernées. La convention est le résultat de concessions mutuelles. Les Cris ont bien sûr fait des compromis, dont la Convention de la Baie James et du Nord québécois, notre traité moderne, est le résultat. Les Cris sont dédommagés pour ce qu'ils ont perdu.

Le vice-président (M. John Godfrey): Merci.

D'abord, j'aimerais, au nom du comité, remercier les commissaires d'être venus nous rencontrer. Nous vous sommes reconnaissants d'avoir témoigné devant nous et nous sommes sensibles aux préoccupations que vous avez exposées.

Dans ce contexte et pour revenir à la proposition que j'ai faite durant la séance, je vais demander à mes collègues s'il serait utile, étant donné que nous avons deux périodes libres la semaine prochaine, que des fonctionnaires viennent nous rencontrer pour discuter...

[Français]

Monsieur St-Julien.

M. Guy St-Julien: C'est une excellente idée, monsieur le président. Cette fois-ci, on ne veut pas avoir les sous-ministres adjoints. On veut les sous-ministres, ceux qui sont au sommet. Les Cris de la Baie James amènent chaque fois ici les leaders, notamment le grand chef Ted Moses, et nous recevons aujourd'hui Philip Awashish, Robert Kanatewat et le président de la commission, Richard Saunders. Nous voulons ceux qui sont à la tête du ministère des Affaires indiennes et non des adjoints.

[Traduction]

Le vice-président (M. John Godfrey): Nous ferons de notre mieux. Nous avons deux possibilités mardi et jeudi, et comme je l'ai indiqué, c'est une question d'équilibre. Je pense qu'il serait très utile d'avoir au moins... Je ne suis pas sûr que tout le monde vit ici, mais on pourrait concilier les horaires, selon les discussions.

Je pense qu'il serait très utile qu'un commissaire soit présent. Je pense que nous aimerions discuter précisément de ce qui fait référence au rapport de 1998 dans le présent rapport. Nous aimerions aussi comprendre toute la question de reddition des comptes au sujet de laquelle—et peu m'importe comment vous l'exprimer—il semble y avoir décalage entre les interventions du ministre et celles des fonctionnaires. Je pense que nous sommes pleinement autorisés à examiner ces problèmes.

Seriez-vous d'accord, chers collègues membres du comité?

[Français]

Ça va?

M. Guy St-Julien: Oui.

Le vice-président (M. John Godfrey): Il n'y a pas de problème, monsieur Marceau? Bon, voilà. Nous faisons toujours un acte délicat parce qu'on a déjà dû demander au ministre... Oui, on va essayer pour le mardi, sinon pour le jeudi. Mais nous avons toujours la possibilité de recevoir M. Goodale. On fera de notre mieux.

Monsieur St-Julien.

M. Guy St-Julien: Je suis d'accord que M. Goodale vienne, mais je voudrais que ce soit partagé à 50-50. C'est important.

Le vice-président (M. John Godfrey): Ah, non, non. Nous avons deux possibilités: mardi et jeudi.

M. Guy St-Julien: Essayons pour mardi matin.

Le vice-président (M. John Godfrey): D'accord. On va essayer.

[Traduction]

En question complémentaire, les commissaires, ou l'un d'entre eux du moins, seraient-ils libres?

M. Richard Saunders: Oui, monsieur le président.

Le vice-président (M. John Godfrey): Parfait. Nous vous tiendrons au courant, alors.

Je vous remercie. La séance est maintenant levée.

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