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FAIT Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON FOREIGN AFFAIRS AND INTERNATIONAL TRADE

COMITÉ PERMANENT DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES ET DU COMMERCE INTERNATIONAL

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 4 novembre 1999

• 0937

[Traduction]

La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier (Brampton-Ouest— Mississauga, Lib.)): Je déclare ouverte la séance du Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international. Nous procédons à l'examen de la SEE.

Ce matin, nous avons le privilège d'avoir parmi nous Guy David, du groupe Gowling, Strathy and Henderson; Gerald Shannon, président des audiences publiques, équipe chargée de l'examen; Stan McRoberts, économiste-chercheur, équipe chargée de l'examen; et Maxime Faille, avocat, responsable adjoint de projet, équipe chargée de l'examen. Bienvenue, messieurs. Vous avez dit que vous avez lu le procès-verbal de la dernière séance et vous avez hâte de débattre de la question avec nous aujourd'hui.

Allez-vous faire un exposé?

M. Guy David (avocat, responsable du projet, Équipe chargée de l'examen, Gowling, Strathy and Henderson): Oui, merci beaucoup, madame la présidente, nous allons faire un exposé rapide de cinq à dix minutes. Par la suite, nous nous ferons un plaisir de répondre aux questions du comité.

La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Merci, je vous cède la parole.

[Français]

M. Guy David: Merci, madame la présidente et membres du comité, de cette invitation à parler de l'étude de la SEE devant votre comité.

J'aimerais tout d'abord vous présenter les membres de l'équipe ainsi que notre cabinet. Gowling, Strathy & Henderson est un grand cabinet d'avocats ayant des bureaux à plusieurs endroits au Canada. Nous avons reçu du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international le mandat d'effectuer un examen des pouvoirs et du fonctionnement de la SEE depuis la révision de la loi en 1993.

L'objectif premier de l'examen consistait à passer en revue les opérations de la SEE et la façon dont elle s'est acquittée de son mandat, cela à la lumière des modifications apportées à la loi en 1993.

• 0940

Pour s'acquitter du mandat plus large qui lui a été ainsi confié, la SEE a reçu plusieurs nouveaux pouvoirs: celui de faire des placements en actions, celui d'effectuer du crédit-bail, celui d'accorder du financement interne et celui d'offrir de l'assurance-crédit à l'intérieur du Canada, sur les créances intérieures. À la lumière de l'importance croissante des investissements par rapport au commerce, la SEE estime également que son mandat comporte le soutien des investissements liés au commerce.

Les capacités de la SEE dans les domaines du financement, du commerce international et des projets sont largement reconnues et respectées dans les milieux financiers, comme nous l'avons clairement constaté au cours de notre analyse. Elles sont également respectées par les institutions comme la Banque mondiale, la Société financière internationale, etc. On note en particulier les compétences de la SEE en matière d'évaluation du risque et de montage de crédit. D'autres organismes de crédit à l'exportation reconnaissent également les compétences et le savoir-faire de la société dans le domaine financier.

[Traduction]

En fait, la SEE est parvenue à combiner la culture commerciale et le dynamisme d'entreprise tout en maintenant le sens des responsabilités dont elle doit faire preuve en sa qualité de société d'État. Toutefois, l'orientation commerciale de la SEE crée des tensions entre elle et ceux qui estiment qu'elle devrait conserver les mêmes normes en matière de responsabilité que les autres organismes publics. Par contre, sa vigoureuse éthique en matière de concurrence conduit à des tensions avec ses concurrents du secteur privé qui estiment qu'en tant que société d'État, la SEE jouit d'avantages indus. Je suis sûr que vous n'avez pas fini d'en entendre parler au cours de vos délibérations. Ce sont les banques et les compagnies d'assurance notamment qui se plaignent à ce sujet et ce thème se retrouve dans beaucoup de parties de l'examen.

L'enthousiasme et la rapidité avec lesquels la SEE a évolué pour exploiter de nouveaux secteurs d'activité commencent également à exercer des pressions sur les limites naturelles des sociétés d'État. Nous avons noté des tensions avec certains ministères, qui préféreraient voir la Société interpréter de façon moins dynamique certains aspects de son mandat.

Nous avons conclu que la SEE présente des différences fondamentales par rapport aux institutions financières du secteur privé avec lesquelles elle entre en concurrence et coopère également. Elle est motivée de par son mandat à soutenir et à développer le commerce extérieur canadien et la capacité du pays d'y participer activement. Par contraste, l'objectif des institutions financières du secteur privé consiste à générer des profits pour leurs actionnaires en fournissant les services financiers, de quelque nature que ce soit, qui rapportent les plus hauts rendements possibles.

Au bout du compte, la SEE s'est taillé un créneau dans le secteur des services financiers canadiens et jouit d'un soutien considérable et d'une grande loyauté auprès de ses clients, les exportateurs canadiens. Compte tenu du soutien considérable dont jouit la SEE auprès des exportateurs canadiens et du fait qu'il n'existe pas d'arguments solides en faveur d'une restriction des activités de la Société, nous ne recommandons pas de lui enlever de ses nouveaux pouvoirs qui lui ont été conférés en 1993. Cependant, reconnaissant le rythme accéléré auquel la SEE évolue dans le sens d'une plus grande orientation commerciale, nous recommandons que certaines de ses opérations soient fondées sur des considérations purement commerciales.

Sauf en ce qui a trait aux prises de participation à des projets, nous recommandons que la Société ne soit habilitée à prendre des participations au capital-actions d'entreprises que par l'entremise d'une filiale assujettie à l'impôt qui fonctionnerait selon des principes commerciaux. Nous faisons une recommandation similaire au sujet du crédit-bail. Nous pensons que cela amènera la SEE à adopter une approche plus stratégique, au lieu d'exercer ses pouvoirs en analysant les opérations cas par cas. Cette approche serait orientée vers un accroissement de sa capacité.

[Français]

Tout en étant impressionnés par la performance de la SEE et par le soutien exprimé par ses clients, nous éprouvons de sérieuses préoccupations au sujet de la lenteur avec laquelle s'accroît la capacité de financement du commerce canadien à l'extérieur de la société.

Au chapitre du bien-être économique, comme vous le savez, le Canada dépend trop du commerce extérieur pour confier une responsabilité excessive à une seule institution financière. Pour cette raison, un des objectifs fondamentaux du présent examen était de recommander des modifications qui augmenteraient et diversifieraient la capacité de financement du commerce extérieur du Canada. Certaines de ces recommandations visent à encourager une plus grande participation des autres institutions financières, tandis que certaines autres viennent appuyer des propositions devant permettre à la SEE de se lancer dans de nouvelles activités.

• 0945

Nous nous préoccupons particulièrement de la participation limitée des banques canadiennes au financement à moyen terme et à long terme du commerce extérieur et au financement de projets où la participation canadienne est prépondérante. Pour ces raisons, nous recommandons—et ceci est une de nos recommandations principales—que le gouvernement crée un mécanisme de garantie pour appuyer une participation plus grande des banques aux transactions bénéficiant d'un soutien du gouvernement. Ce mécanisme devrait être géré par un petit organisme distinct de la SEE de manière à ne pas compromettre le rôle actuel et l'évolution future de la société.

[Traduction]

La Loi sur l'expansion des exportations a été modifiée en 1993 pour permettre à la SEE d'octroyer une assurance sur les créances intérieures ainsi qu'extérieures, parce que le marché intérieur n'était pas suffisamment bien desservi. Les exportateurs, en particulier les PME, estimaient qu'il était très difficile de gérer leurs relations en matière de créances avec plus d'une compagnie d'assurance.

Les opérations intérieures de la SEE ont ainsi connu un véritable essor, mais les fournisseurs de services intérieurs, à la fois les compagnies d'assurance-crédit étrangères et le secteur d'affacturage canadien, ont vite fait de dénoncer une concurrence qu'ils jugeaient déloyale.

Nous estimons qu'il est extrêmement important de préserver une concurrence et une capacité adéquates dans le domaine de l'assurance-crédit au Canada. Nous ne pensons pas qu'un retrait de la SEE du marché réglerait le problème. Ainsi, après avoir étudié la question en profondeur, nous ne recommandons pas que la SEE se retire de ce domaine.

Toutefois, nous recommandons que la SEE se fixe comme objectif d'encourager une plus grande expansion de la capacité des institutions privées canadiennes. Une fois mise en place une capacité adéquate, la Société devrait se retirer de ce domaine d'une manière qui ne nuirait en rien à la commodité que les mécanismes actuels offrent aux PME.

À la lumière des consultations que nous avons menées, il semble qu'un consensus se dégage: la SEE devrait divulguer davantage de renseignements dans certains domaines. Nous reconnaissons toutefois—nous-mêmes et les clients de la SEE—que la divulgation des renseignements ne peut pas l'emporter sur les droits des exportateurs à une protection des renseignements confidentiels sur le plan commercial et que la divulgation ne devrait pas nuire à la compétitivité des exportateurs.

Nous recommandons par conséquent que la SEE adopte une politique de diffusion, sur une base régulière, de certains renseignements spécifiques, tels que le nom des emprunteurs, les pays, le nom des exportateurs, les montants et les types de transactions.

[Français]

Si vous me donnez encore quelques minutes, je vais passer brièvement en revue les recommandations principales qui se trouvent dans notre rapport. Toutes ces recommandations sont énumérées au chapitre 12 de notre rapport, qui en est le dernier chapitre.

Premièrement, en ce qui concerne le mandat de la société, nous croyons que le mandat de la SEE devrait être reformulé dans la loi afin de refléter plus fidèlement les opérations et l'orientation stratégique actuelles de la société.

Nous croyons aussi que la SEE ne devrait pas être entravée dans les mesures qu'elle prend pour se donner une orientation plus commerciale.

Au titre de ce genre d'orientation, nous croyons que la SEE devrait être placée sous la surveillance d'un vérificateur du secteur privé au lieu du vérificateur général, et que certains changements devraient être faits au niveau de la place de la SEE dans la Loi sur la gestion des finances publiques.

Parallèlement à l'évolution commerciale de la SEE, les pouvoirs non traditionnels, tels la prise de participation, à l'exception des participations en équité dans les projets, et le crédit-bail, devraient, selon nous, être exercés par des filiales qui fonctionneraient sur une base strictement commerciale.

• 0950

La société ne devrait pas interrompre son initiative de développement du marché de l'assurance-crédit intérieure tant que le secteur privé ne sera pas suffisamment développé. La SEE devrait intensifier les efforts qu'elle déploie pour réaliser cet objectif et éventuellement se préparer à se retirer de ce marché.

[Traduction]

La SEE a lancé un certain nombre d'initiatives dans le but de renforcer la capacité canadienne de financement du commerce extérieur et de l'investissement. Au nombre de ces initiatives, figurent l'amélioration des programmes, maintenant sous-utilisés, réalisés en coopération avec les banques en vue de les rendre plus attrayants; le partage des évaluations des risques-pays; une utilisation accrue de la gestion des avoirs et de la titrisation pour démultiplier les éléments de son bilan et diversifier les risques; l'utilisation du réseau de succursales bancaires pour commercialiser les produits et services et la mise en place d'une représentation directe sur les marchés étrangers, lorsque le volume d'activités le justifie.

Étant donné que la SEE entre en concurrence avec les institutions financières canadiennes, elle ne saurait octroyer de façon efficace un cadre de garantie au financement à moyen et à long termes du commerce extérieur par les banques, sauf si elle cesse d'octroyer des prêts directs, ce que nous ne recommandons pas. Néanmoins, nous sommes enclins à recommander que le gouvernement prévoit lui-même un cadre de garantie distinct accessible aux banques canadiennes sur une base de recouvrement de coûts.

La SEE demeure, en dépit de son orientation commerciale, une institution publique, et le public canadien s'attend donc à ce qu'elle se conforme à des normes plus élevées en matière de responsabilité publique et de transparence, de protection de l'environnement et de respect des droits de la personne que celles qu'elle applique actuellement. Nous exposons dans nos recommandations des normes qui nous paraissent appropriées dans ces domaines.

Enfin, j'aimerais terminer en soulignant que la croissance qu'a connue la SEE depuis l'élargissement de son mandat et de ses pouvoirs en 1993 montre clairement que la Société répond de façon satisfaisante aux besoins de ses clients. Les taux de satisfaction des clients de la SEE—vous en avez sûrement entendu parler, par la SEE elle-même—les résultats des recherches effectuées auprès des groupes d'intérêts, l'enquête réalisée dans le cadre du présent examen et les témoignages recueillis de manière non officielle au cours des consultations menées d'un bout à l'autre du pays par l'équipe d'examen indiquent en général que les personnes ayant fait affaire avec la Société sont très satisfaites de la manière dont elle s'acquitte de ses responsabilités.

Les membres de notre comité d'examen et moi-même nous ferons un plaisir de répondre à vos questions.

La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Merci.

Monsieur Morrison.

M. Lee Morrison (Cypress Hills—Grasslands, Réf.): Merci madame la présidente.

Bienvenue, messieurs et merci de prendre le temps de nous parler aujourd'hui. Je me demande si vous pouvez développer un peu plus votre proposition qui je pense, est en quelque sorte hybride, la SEE continuant de fonctionner comme entité gouvernementale dont toutefois certaines parties seraient détachées et prises en charge par le secteur privé. C'est ce que j'ai compris; est-ce bien ce que vous dites, en résumé?

M. Guy David: Nous ne le présentons pas exactement de cette façon, monsieur Morrison. Selon nous, certaines activités de la SEE, notamment les activités menées en vertu de pouvoirs non traditionnels comme la prise de participations et le crédit-bail—pouvoirs conférés en 1993—pourraient être menées sur une base purement commerciale; nous pensons toutefois que l'appui de la SEE est nécessaire. Nous recommandons donc que ces activités soient menées dans des filiales qui tireraient profit des capacités de la SEE en matière de gestion de risques, d'identification et de gestion de projets, ainsi que du capital de la SEE, qui serait utilisé par ces entités. Ces entités elles-mêmes, toutefois, fonctionneraient sur une base commerciale, c'est-à-dire qu'elles seraient assujetties à l'impôt et seraient à but lucratif. Éventuellement, ces entités pourraient être privatisées, une fois mises sur pied; nos recommandations ne vont toutefois pas aussi loin.

M. Lee Morrison: Je l'ai remarqué. Il me semble que vous allez dans une direction que je trouve intéressante, mais vous ne faites pas le saut et ne recommandez pas la privatisation.

Pourriez-vous nous dire ce que font d'autres pays, parmi nos partenaires et concurrents commerciaux? Lesquels, parmi les grands pays commerciaux, ont toujours une agence financée par l'État ou une agence d'assurances financée par l'État et lesquels confient entièrement cela aux secteurs de l'assurance et des banques?

• 0955

M. Guy David: Je vais demander à M. Shannon de répondre à cette question.

M. Gerald E. Shannon (président des audiences publiques, Équipe chargée de l'examen, Gowling, Strathy and Henderson): Merci, Guy.

La plupart continuent de prévoir la participation du gouvernement dans le domaine du financement et de l'assurance des exportations. Dans certains cas, les compétences sont partagées: un organisme du gouvernement qui assume certaines responsabilités, et dans d'autres cas, une banque. Mais je ne connais pas trop de cas où le gouvernement ne participe pas directement de manière implicite dans les secteurs du financement et de l'assurance.

C'est véritablement une question de degré—ce que cela représente—et également une question de style. La SEE s'intéresse davantage aux prêts directs, contrairement à des organismes comme Ex-Im aux États-Unis, qui s'intéressent davantage aux garanties. Dans chaque cas que nous avons examiné toutefois, autant que je me souvienne, le gouvernement joue un rôle au niveau du financement des exportations.

M. Lee Morrison: Mis à part les garanties, qui, à mon avis, représentent une intervention fort légitime du gouvernement, dans les pays où il existe des organismes d'État, ces organismes se limitent-ils en général aux entreprises très risquées, laissant les entreprises moins risquées au secteur privé? Sinon, que se passe-t-il?

M. Gerald Shannon: Je ne le caractériserais pas de cette façon. Personnellement, je crois, comme nous l'a fait remarquer quelqu'un de remarquable—Malcolm Stephens de la CIGA en Grande-Bretagne—qu'il n'existe pas de système unique dont on devrait s'inspirer en ce qui concerne le financement ou l'assurance des exportations. Chaque système reflète ses propres caractéristiques nationales.

Par conséquent, je ne pense pas que l'on puisse prendre un modèle allemand, un modèle français ou un modèle américain et dire que c'est le modèle à suivre. Dans chaque cas au contraire, ce sont les réponses aux besoins des exportateurs, les insuffisances ou les points forts du système bancaire, dans un pays donné, qui indiquent la façon dont l'exportation des biens et services devrait être financée. Je ne pense pas pouvoir en dire plus à ce sujet.

M. Guy David: J'ajouterais un point. Il y a des différences et en fait aucun système ne ressemble à un autre. Ce que nous avons constaté au Canada, c'est que la capacité de prêt direct de la SEE s'est traduite par le développement d'une expertise de très haut niveau—au chapitre des transactions, de la structure et de la gestion de projets—et nous pensons que la capacité de prêt direct permet d'expliquer la raison pour laquelle la SEE se trouve à l'avant-garde de ces institutions dans le monde entier, tandis qu'une institution qui remplirait une fonction de prêteur de dernier recours n'est pas à l'avant-plan des marchés et ne développe pas ce niveau d'expertise.

On pourrait bien sûr dire qu'au Canada les cinq ou six grandes banques pourraient développer une telle expertise. En fait, le marché canadien est probablement suffisamment petit pour que cette expertise soit dispersée dans les cinq ou six banques. Les opportunités seraient limitées et peut-être y aurait-il trop de fragmentation en pareil cas. Nous en sommes donc arrivés à la conclusion que l'expertise au sein de la SEE est essentielle pour le Canada et qu'il faut la préserver.

M. Lee Morrison: Une autre question?

La vice-présidente (Mme Colleen Baumier): Merci. Non. Attendez le tour suivant.

Madame Lalonde, s'il vous plaît.

[Français]

Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Bonjour.

Monsieur David, messieurs, j'apprécie l'ampleur de cette étude. J'aimerais que vous m'expliquiez davantage votre recommandation numéro 1. Vous parlez, avec raison, de l'importance de la prochaine ronde de négociations multilatérales qui débutera bientôt à Seattle et vous ajoutez:

    ...il est probable que les négociations relatives aux subventions et mesures compensatoires porteront de nouveau sur les questions relatives au financement des exportations.

Elles porteront donc sur le coeur de l'activité de la SEE.

• 1000

Vous dites aussi que le Canada doit bien se préparer à débattre de cette question. Dans votre recommandation, vous dites:

    Dans ce contexte, pour faciliter une participation constructive du Canada, il convient d'envisager de nouveaux mécanismes institutionnels susceptibles d'harmoniser davantage la structure du soutien officiel du crédit à l'exportation du Canada avec les pratiques des autres pays...

Pourriez-vous nous expliquer davantage tout ce qu'il y a—et je sens qu'il y en a beaucoup—dans cette première recommandation, et en particulier les enjeux que vous avez vus dans cette négociation qui s'en vient?

M. Guy David: En fait, on voit que la SEE a un rôle purement commercial et compétitif. Elle a également un rôle de crédit qui est assorti d'un soutien de l'État, ce qui est fait en vertu du consensus de l'OCDE. Il y a deux régimes, le régime de l'OCDE et celui de l'Organisation mondiale du commerce, qui régissent ses activités.

Nous croyons que l'Organisation mondiale du commerce prendra éventuellement la relève pour gérer l'ensemble de ces questions. À ce moment-là, il est certain que la pression internationale s'exercera en faveur d'un régime qui s'apparente plus à ce qu'on retrouve en Europe et même aux États-Unis qu'au régime canadien. On peut dire que le régime allemand s'apparente un peu au régime canadien.

Nous disons dans nos recommandations que certaines activités devraient être exercées par l'entremise de filiales et que la SEE devra peut-être éventuellement se réorganiser pour la partie soutien de l'État; il faudra que ses activités soient plus identifiables qu'elles ne le sont maintenant.

Mme Francine Lalonde: Identifiables?

M. Guy David: Par rapport aux activités commerciales qu'elle exerce.

[Traduction]

Gerry, voulez-vous ajouter quelque chose?

M. Gerald Shannon: Pourrais-je ajouter quelque chose, madame la présidente?

C'est lors de la dernière ronde de négociations commerciales que pour la première fois les subventions ont semblé pouvoir faire l'objet d'une définition. Nous avons réussi à formuler l'Accord sur les subventions et les mesures compensatoires qui nous permet de décider ce qu'est une subvention admissible et ce qui ne l'est pas. Dans ce contexte, pour la première fois—autant que je me souvienne, à tout le moins—nous avons réussi à aborder la question du financement des exportations par rapport aux lignes de conduite internationales—applicables à l'OMC—sur les pratiques en matière de subventions.

Je suppose—et c'est l'une des raisons de cette recommandation—que nous allons de nouveau examiner l'Accord sur les subventions et les mesures compensatoires au cours des négociations OMC à venir. Comme je l'ai dit, c'est lors des dernières négociations que l'on s'est penché sur cette question pour la première fois. Cette fois-ci, on va améliorer cet accord, ou, à tout le moins tenter de l'améliorer compte tenu des expériences vécues depuis 1994, au moment de la signature du dernier accord. Certaines des affaires qui ont fait l'objet de règlement des différends feront partie de la jurisprudence examinée par les négociateurs, lesquels décideront alors des prochaines mesures à prendre, de la façon dont le droit international peut s'appliquer par l'entremise des processus de règlement des différends de l'OMC.

C'est ce qui explique en fait qu'il faut s'assurer que tous les éléments qui font partie du processus de décision politique au Canada—le gouvernement, à tout le moins; bien sûr les ministères des Affaires étrangères et du Commerce international, des Finances, de l'Industrie; et la SEE, intervenant-clé dans ce contexte, bien sûr—soient conscients de la progression des négociations et prêts à s'assurer que les résultats contribuent à promouvoir les intérêts du Canada dans ce processus.

• 1005

La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Merci.

Madame Augustine.

Mme Jean Augustine (Etobicoke—Lakeshore, Lib.): Merci, madame la présidente.

Merci pour votre exposé et également pour ce document d'examen qui se lit très facilement.

Il me semble que vous avez un sentiment de satisfaction suite aux entretiens que vous avez eus avec les groupes d'intérêts et les particuliers. C'est mon interprétation personnelle. Dans tout le rapport, on a l'impression que le milieu des affaires et tous ceux qui s'intéressent à la question sont satisfaits de l'opération.

Vous avez fait toute une série de déclarations qui parfois, à mon avis, vont à l'encontre de certaines observations positives que vous faites ici. J'aimerais donc vous poser une question au sujet de la transparence et de la responsabilisation et vous demander si vous ne vous attendez pas à ce que l'on modifie la loi pour que la SEE soit assujettie à la Loi sur l'accès à l'information du Canada.

Vous avez également parlé de la transparence relative aux cadres environnementaux. Je vous pose de nouveau cette question: nous demandez-vous d'assujettir la SEE à la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale également? Vous l'avez sous-entendu, sans aller jusqu'à le dire. Je me demande si c'est dans ce sens qu'il faut lire ces recommandations.

Enfin, à la page 7 de votre exposé, vous parlez de plusieurs initiatives. Je me pose des questions au sujet des banques qui sont actuellement sous-utilisées. Pourriez-vous, pour ma gouverne, expliquer un peu les possibilités offertes par notre système actuel, où d'après vous, il y a une certaine sous-utilisation, et pouvez-vous me dire où, d'après vous, la SEE pourrait avoir un impact, pourrait conclure des partenariats, pourrait collaborer, ou trouver un moyen de partager plusieurs capacités dont vous faites mention ici, comme l'évaluation des risques-pays, etc.

M. Guy David: Si vous permettez, je vais demander à mon collègue Maxime Faille de répondre à votre première question sur l'accès à l'information versus le régime de divulgation que nous recommandons, et aussi de répondre à la question sur le cadre environnemental. Je demanderai ensuite à M. McRoberts de parler de la sous-utilisation des programmes de la SEE par les banques.

M. Maxime Faille (avocat, responsable adjoint de projet, Équipe chargée de l'examen, Gowling, Strathy et Henderson): Merci.

Nous nous sommes démenés à propos de la question relative à la transparence. On retrouve à mon avis dans tout le rapport un fil conducteur: il faut parvenir à un équilibre entre l'orientation commerciale de la SEE, qui à de nombreux égards est à l'origine de son succès et le fait qu'il s'agisse d'une société d'État, une institution publique qui doit être à l'écoute non seulement du milieu des affaires, mais aussi du grand public.

Plusieurs personnes ont suggéré d'assujettir la SEE à la Loi sur l'accès à l'information. Par contre, beaucoup d'exportateurs s'en inquiètent bien sûr, puisqu'une telle décision pourrait entraver l'orientation commerciale de la SEE à cause de la charge administrative que cela occasionnerait, sans compter le risque de divulgation d'informations commerciales confidentielles.

Nous avons examiné divers modèles dont celui de la Banque du développement du Canada, laquelle est assujettie à la Loi sur l'accès à l'information. Toutefois, on retrouve une disposition particulière dans sa loi qui, selon nous, signifie que la Banque n'a pas à divulguer certains renseignements qui n'intéressent pas particulièrement la plupart des gens. Nous n'avons pas pensé qu'il s'agissait d'un modèle utile vu qu'il présente tous les inconvénients de la Loi sur l'accès à l'information sans vraiment avoir l'avantage de garantir une plus grande transparence.

• 1010

Dans le modèle que nous proposons, nous n'assujettissons pas la SEE à la Loi sur l'accès à l'information, mais néanmoins exigeons que la SEE prévoie un modèle de transparence, un modèle de divulgation utile et pertinent—ou du moins nous l'encourageons à le faire. La SEE devrait effectivement divulguer l'information pertinente relative aux genres de transactions qu'elle mène, etc.

De toute évidence, il faut parvenir à un équilibre entre la transparence et les questions de confidentialité commerciale, mais nous pensons, en général, qu'une grande partie de l'information que nous rechercherions est de l'information qui, au bout du compte, est rendue publique grâce à diverses autres lois et à certaines exigences en la matière que l'on retrouve dans le secteur privé et qui sont prévues par les lois sur les valeurs mobilières, etc. Nous ne pensons pas que nos recommandations entraînent la divulgation d'information commerciale confidentielle susceptible d'entraver la compétitivité canadienne au chapitre des exportations, mais par contre, elles permettraient de susciter une plus grande confiance du public à l'égard des activités de la SEE.

En ce qui concerne la question de l'évaluation environnementale, nous avons là aussi examiné divers modèles. Comme vous le savez, la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale ne s'applique pas à la SEE. La Société a effectué son propre examen environnemental, qui dans une certaine mesure est parallèle à notre propre examen de la loi. Au bout du compte, toutefois, nous avons pu obtenir de l'information sur ce que la SEE prévoit faire, et nous en avons fait une évaluation. Je crois que nous sommes arrivés à des conclusions légèrement différentes quant au genre de modèle que la SEE devrait produire, et nous pensons qu'un modèle plus objectif que subjectif devrait être adopté.

Comme nous le soulignons dans le rapport, nous ne sommes bien sûr pas des scientifiques de l'environnement si bien que nous ne pouvons pas déterminer exactement quel modèle conviendrait. Nous pensons toutefois qu'il devrait être objectif et qu'il devrait pouvoir être comparé à ceux que l'on retrouve dans d'autres pays.

La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Merci.

M. Stan McRoberts (économiste-chercheur, Équipe chargée de l'examen, Gowling, Strathy and Henderson): Permettez-moi de répondre à la dernière partie de la question. Pourquoi les banques canadiennes ne semblent pas être aussi actives qu'on pourrait l'espérer dans le domaine du financement du commerce extérieur?

Nous nous sommes rendus dans six des sept grandes villes du Canada et ce thème est ressorti de toutes les consultations. Les banques ne se sont pas offusqué du fait que l'on pense qu'elles sont moins actives qu'on pourrait l'espérer dans certains de ces secteurs, surtout lorsque l'on sait que notre pays dépend du commerce.

Je devrais signaler qu'il faut faire la distinction entre les diverses formes de financement du commerce extérieur, car il n'est pas vrai que les banques canadiennes ne font rien dans ce domaine. Les banques sont actives au chapitre du financement du commerce à court terme. Les créances, par exemple, disposent d'un délai de 90 jours, voire même d'une année, car pour une institution de prêt, les éléments de risque sont beaucoup moins importants que ceux des crédits à plus long terme comme les crédits à moyen ou à long terme. Les crédits à moyen terme sont, bien sûr, ceux qui permettent de financer les ventes de machines et d'équipement, les projets et autres choses du genre.

Vous demandez pourquoi il y a lieu de s'inquiéter du fait que les banques canadiennes ne sont pas aussi actives, puisque, de toute évidence, la SEE répond aux attentes de la plupart de ses clients, sinon de tous. La réponse, c'est que les banques canadiennes sont en mesure de proposer trois ou quatre choses que la SEE ne peut pas vraiment offrir.

La première, c'est évidemment la capacité financière. La SEE n'est en général pas limitée, mais dans le cas de marchés particuliers, elle l'est, au plan des risques évidemment. Dans la mesure où d'autres intervenants peuvent participer au financement de transactions, il est possible d'augmenter la capacité dans ces marchés.

La deuxième, c'est le réseau de succursales des banques canadiennes. La SEE a une capacité limitée au Canada, dans les collectivités moins importantes, notamment. Ceci étant dit, le seul fait qu'il existe un réseau de succursales ne signifie pas que les succursales participent activement à ce secteur d'activité. En fait, les banques canadiennes devraient s'efforcer de tirer davantage parti de ces actifs qui sont bel et bien là.

• 1015

On peut dire que certaines des banques canadiennes sont modestement représentées à l'échelle internationale. La SEE voudrait corriger la situation; en fait, je crois que nous les encourageons dans ce sens. Il serait toutefois difficile pour la SEE de reproduire la capacité des banques canadiennes. Si l'on pouvait encourager les banques canadiennes à jouer un rôle plus actif, leur présence sur la scène internationale serait probablement plus importante.

Permettez-moi de parler des raisons pour lesquelles les banques canadiennes ne participent pas à ce secteur d'activité. Il est un peu difficile de cerner la question et divers points de vue s'expriment à ce sujet. Tout d'abord, les banques canadiennes sont tout simplement peu disposées à prendre des risques et sont prêtes à céder la place à la SEE, vu que ce secteur comporte pas mal de risques.

Les banques nous ont fait remarquer—je crois que toutes ont dit la même chose—que la façon dont le Canada soutient le prêt commercial dans ce secteur est différente de celle adoptée par d'autres pays. Nous en avons fait mention un peu plus tôt, lorsque nous avons dit que la plupart des autres pays ont une agence de garantie gérée par des prêteurs commerciaux. Dans notre cas, c'est la SEE qui combine les deux activités. Les banques canadiennes doivent respecter des règles consensuelles qui prévoient que 100 p. 100 de 85 p. 100 du coût d'un projet seront financés par l'entité officielle. Toutefois, nous les modifions dans le cas du Canada—ou plutôt c'est la SEE qui les modifie—seulement 65 à 75 p. 100 des 85 p. 100 admissibles sont financés. Est-ce clair? Je cite beaucoup de chiffres.

En résumé, le soutien apporté aux banques canadiennes est moins généreux que celui dont jouissent d'autres pays, d'après les banques canadiennes.

La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Merci.

Monsieur Morrison.

M. Lee Morrison: Merci, madame la présidente.

Messieurs, vous présentez des arguments assez probants en faveur du maintien de la SEE. Nous ne pouvons nous en passer étant donné, d'après ce que dit M. McRoberts, que les banques ne sont pas prêtes à combler le vide.

Dans votre rapport vous dites:

    Si la SEE est en mesure de survivre et de fonctionner par ses propres moyens, elle devrait le faire, à condition qu'il n'existe pas de motif de politique publique important favorisant la conservation du droit de propriété et de contrôle étatiques de la Société.

Je ne vois vraiment pas à quoi correspond ce motif de politique publique important. J'ai écouté votre exposé et je suis prêt à me laisser convaincre, mais pourquoi la Société ne peut-elle pas fonctionner autant comme entité privée que comme entité d'État?

M. Guy David: Je répondrai en disant qu'une part importante de l'activité de la SEE est appuyée par le gouvernement et ne peut se faire de manière purement commerciale. Il ne fait donc aucun doute que si nous voulons continuer à desservir le marché comme nous le faisons actuellement, il faut avoir une institution appuyée par le gouvernement. Reste à savoir alors comment limiter l'institution existante, la SEE, et comment réduire ses secteurs d'activité à des secteurs qui ne soient pas de nature purement commerciale. Certains pays ont adopté cette approche. D'après de nombreux témoignages recueillis de manière non officielle, cette approche est très coûteuse.

Par ailleurs, ce serait une institution qui n'aurait pas les capacités ni l'expertise que l'on retrouve dans une institution comme la SEE, qui intervient dans le secteur commercial, viable, ainsi que dans le secteur non commercial, moins viable.

• 1020

M. Gerald Shannon: J'aimerais dire, si vous permettez, que si l'on décide brusquement de privatiser la SEE, il n'est pas clair non plus si... tout d'abord, les coûts de la SEE ne manqueraient pas d'augmenter, car elle contracterait des emprunts à l'étranger. Il faut toutefois se demander ce qu'il adviendrait des petites entreprises, par exemple. La SEE passe beaucoup de temps à tirer parti des programmes existants afin de promouvoir les intérêts des petites entreprises, leur permettant ainsi de percer le marché de l'exportation, pas seulement en Amérique du Nord, mais aussi à l'échelle de la planète.

Si vous demandiez aux petites entreprises ce qu'elles en pensent, je crois qu'elles vous diraient qu'elles sont fortement en faveur de la SEE, ne serait-ce que parce qu'elle propose divers programmes qui répondent davantage aux besoins des petites entreprises que ceux que les grandes banques seraient prêtes à proposer.

J'imagine donc que si vous cherchez un motif important, c'est l'un des rôles de politique publique qu'il faudrait examiner avant de décider s'il faut opter pour la privatisation, comme tout le monde.

M. Lee Morrison: Merci.

[Français]

La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Monsieur Patry.

M. Bernard Patry (Pierrefonds—Dollard, Lib.): Merci, messieurs, d'être venus ici ce matin. J'ai d'abord un commentaire à faire sur la page 5 de votre présentation. Je voudrais vous parler de l'assurance-crédit.

La SEE, comme vous l'avez bien dit, fonctionne très bien. Elle a beaucoup de clients dont la grande majorité sont de petits clients. Pourquoi les petits clients vont-ils là? C'est très souvent à cause de l'assurance-crédit et surtout de la rapidité d'action de la SEE, qui a une équipe très rapide et qui donne souvent une réponse en moins de 72 heures, comme on le sait très bien. Ça va bien. La SEE connaît bien le marché mondial. Elle peut facilement faire l'évaluation des risques selon les pays et selon l'équipement qu'on veut leur vendre et ainsi de suite. Ça va bien. Une grande part des revenus de la SEE provient de cette assurance-crédit.

À la page 5, vous nous dites que les compagnies d'assurance-crédit étrangères et le secteur d'affacturage canadien ont dénoncé cela. Parfait. Vous nous dites un peu plus loin:

    ...nous recommandons que la SEE se fixe comme objectif d'encourager une plus grande expansion de la capacité des institutions privées canadiennes. Une fois mise en place une capacité adéquate, la Société devrait se retirer de ce domaine...

Je voudrais simplement vous donner une explication. Pour moi, ce n'est pas à la SEE de dire aux compagnies privées quoi faire. C'est à elles de décider si elles veulent prendre de l'expansion. Pourquoi les petites et les moyennes compagnies vont-elles voir la SEE? C'est parce qu'elles reçoivent quelque chose d'elle.

Voilà mon préambule. Je voudrais maintenant revenir à ce que ma collègue a demandé relativement aux banques. À la page précédente, vous nous dites:

    ...nous recommandons que le gouvernement crée un mécanisme de garantie pour appuyer une participation plus grande des banques aux transactions...

J'ai une crainte à cet égard et ma question porte là-dessus. Le jour où on donnera aux banques un mécanisme de soutien, que feront-elles? Les banques accorderont des prêts à toutes ces compagnies parce qu'elles auront un chèque en blanc de la part du gouvernement du Canada. Je ne comprends pas vraiment votre attitude et votre recommandation à ce point de vue. Si on donne un chèque en blanc aux banques, elles vont faire des prêts à tout le monde. Est-ce qu'elles analyseront avec la même rigueur les demandes qu'elles recevront de leurs clients ainsi que les risques qu'il y a dans certains pays et l'équipement qu'ils vont vendre? C'est ma première question.

Voici ma deuxième. Vous avez dit dans votre préambule que vous souhaiteriez que la vérification soit faite par un vérificateur privé plutôt que par le vérificateur général du Canada. Voulez-vous dire que le vérificateur général du Canada ne fait pas bien son travail? C'est une question très simple. Merci.

[Traduction]

La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Et une bonne question.

[Français]

Monsieur David.

M. Guy David: Je vais d'abord répondre à votre deuxième question puisque la réponse y est beaucoup plus courte.

Nous faisons un ensemble de recommandations afin que la SEE passe de l'annexe I à l'annexe II de la Loi sur la gestion des finances publiques. C'est une recommandation qui reconnaît l'évolution de l'orientation commerciale de la SEE. De telles modifications auraient entre autres pour effet de donner à la SEE la possibilité de nommer son propre vérificateur. Nous croyons que la SEE pourrait à ce moment-là nommer un vérificateur privé.

• 1025

Nous ne disons pas que le vérificateur général ne fait pas bien son travail. En fait, la SEE a gagné trois années sur cinq le prix du vérificateur général, ce qui nous indique que le vérificateur général n'a plus rien à lui enseigner. La SEE répond à toutes les attentes du vérificateur général. Une vérification d'un vérificateur privé qui vérifie d'autres grandes institutions financières pourrait apporter à la SEE différentes disciplines qui seraient utiles. Tel est le sens de la recommandation.

Votre première question portait sur l'évaluation du risque dans le mécanisme de garantie proposé. Nous recommandons que les banques elles-mêmes appuient financièrement ce mécanisme. Les risques seraient assumés par l'agence de garantie, mais seraient répartis parmi toutes les banques participantes, qui paieraient en quelque sorte des primes. Ce serait comme un régime d'assurance. Donc, ultimement, ce sont les banques qui assumeraient le risque.

D'autre part, l'agence elle-même, directement ou avec la SEE, aurait un rôle à jouer dans l'évaluation du risque avant de donner sa garantie. Nous ne croyons pas que c'est une question de chèque en blanc. C'est tout simplement un mécanisme qui pourrait offrir le genre de garantie qui est actuellement disponible auprès de la SEE, mais de façon plus semblable à ce qu'on trouve dans d'autres pays.

[Traduction]

La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Je me demandais si vous pensez à une société de vérification que vous pourriez recommander.

M. Guy David: Non, mais je vais répéter ou développer ce que j'ai dit plus haut. Selon nous, la SEE a d'excellents résultats parmi les sociétés d'État au Canada. Le fait qu'elle ait gagné trois années sur cinq le prix du vérificateur général nous indique qu'elle répond à toutes les attentes du vérificateur général et que ce dernier n'a plus rien à lui enseigner.

Nous croyons que les sociétés de vérification qui se spécialisent dans la vérification des grandes institutions financières pourraient se pencher sur les systèmes internes, les contrôles et les lignes de conduite de la SEE, points de vérification auxquels ne s'attache peut-être pas le vérificateur général. Le vérificateur général fait la vérification de seulement deux institutions financières, je crois, la BDC et la SEE. Un vérificateur privé pourrait proposer une autre façon de faire. N'importe laquelle des grandes sociétés de vérification dispose d'un personnel très spécialisé en ce qui concerne la vérification des institutions financières. En fait, ce sont des vérificateurs privés qui procèdent à la vérification de la Banque du Canada, par exemple.

La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Merci.

Monsieur Rocheleau.

[Français]

M. Yves Rocheleau (Trois-Rivières, BQ): Monsieur David, je voudrais revenir à la question de la transparence et de la confidentialité. Lors de leur comparution cette semaine, les représentants de la SEE ont été interrogés là-dessus et ils ont paru très chatouilleux. C'est le sentiment que j'ai eu. Quand on leur demande naïvement s'ils ont une ventilation par province des activités de la SEE, ils commencent par nous dire qu'ils ne comprennent pas comment il se fait qu'on leur pose des questions là-dessus. Ils utilisent le mot «transparence», mais ils nous disent que ces données sont confidentielles.

Au fil des débats, on apprend que Nortel est un partenaire très important de la SEE. Normalement, cela est confidentiel, alors que le public canadien et québécois pourrait très bien s'attendre à ce qu'on lui dise qu'il a participé au succès de Nortel, comme on le fait au Québec. Je voudrais comprendre la culture de la SEE. Au Québec, sauf erreur, à moins qu'il ne s'agisse pas du même niveau d'intervention, quand la Caisse de dépôt s'implique avec un partenaire, c'est du domaine public. Quand la Société générale de financement, qui est de même calibre que la SEE, s'implique avec un partenaire manufacturier, par exemple, c'est du domaine public. Pourquoi a-t-on un tel comportement à la SEE? Je ne sais pas si vous avez des explications, mais ce comportement semble très curieux vu de loin.

• 1030

M. Guy David: Vous avez posé une question intéressante. Je conviens qu'il y a sûrement des analogies à faire entre l'implication de la Caisse de dépôt ou de la caisse de retraite des enseignants de l'Ontario, par exemple, et l'appui qui est accordé par la SEE.

La distinction se situe au niveau des caisses de retraite, qui sont investies sur les marchés publics de capitaux et dont la divulgation est exigée par les lois sur les valeurs mobilières qui imposent le même régime à tout le monde, alors que, traditionnellement, le soutien financier accordé par une banque ou par une institution financière, qui n'évolue pas sur les marchés de capitaux mais fonctionne plutôt par voie de prêts, est assujetti à la confidentialité. Cette différence existe donc au niveau du fonctionnement de nos marchés financiers.

Cela dit, nous recommandons une divulgation plus régulière. Nous croyons que les renseignements relatifs à un grand nombre de ces grands financements pourraient être divulgués d'une façon systématique et que les entreprises canadiennes accepteraient qu'il s'agit du prix à payer en échange d'un soutien de la part de la SEE.

Nous croyons toutefois qu'il serait nécessaire de faire exception lorsqu'on risque de dévoiler des renseignements concernant le marché ou le client de l'entreprise canadienne, lesquels sont actuellement confidentiels. Par exemple, nous ne voudrions pas dévoiler le nom d'un acheteur en Chine qu'aurait déniché un petit manufacturier de Montréal parce que nous risquerions d'attirer des concurrents. Mais, sauf dans des cas semblables, nous croyons qu'il devrait y avoir une divulgation systématique.

M. Yves Rocheleau: On pourrait se limiter à dire que telle entreprise a reçu l'appui de la SEE, qui y a investi telle somme. Je conviens que la confidentialité est importante, mais il ne faut quand même pas devenir fou avec ce principe. Ne serait-il pas raisonnable de dire que la petite entreprise de Montréal a reçu l'appui de la SEE?

M. Guy David: C'est exactement ce qu'on recommande. En Australie, on a adopté ce régime. Bien qu'il y ait certaines exceptions, l'agence australienne équivalente à notre SEE publie sur son site Web la liste des entreprises qui ont reçu son soutien, le genre de transaction, le montant du financement et le pays auquel les exportations sont destinées. Nous croyons que la SEE pourrait divulguer systématiquement de tels renseignements sur son site Web tous les 45 ou 60 jours, dans un délai raisonnable suivant la transaction, par exemple dans les 60 ou 90 jours.

M. Yves Rocheleau: Je vous remercie.

La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Merci.

Monsieur Patry.

M. Bernard Patry: J'aimerais poser une question qui s'inscrit dans un autre ordre d'idées. Lorsque M. Gillespie a comparu devant nous, nous lui avons posé des questions sur les droits de la personne et sur l'environnement.

Dans votre étude, qui est très exhaustive, avez-vous identifié des cas où des travaux effectués dans d'autres pays et financés par la SEE avaient eu un impact négatif sur l'environnement, ou si vous êtes satisfaits de l'évaluation environnementale effectuée par la SEE?

M. Maxime Faille: Nous avons abordé la question à un niveau plutôt théorique et cherché à savoir si le régime en place était adéquat plutôt que de faire une étude cas par cas et de relever des incidents. D'ailleurs, les renseignements dont nous disposions indiquaient qu'il n'y avait pas vraiment de preuve étayant la possibilité que la SEE ait financé un projet qui aurait eu des répercussions négatives sur l'environnement ou qui ait porté atteinte aux droits de la personne.

Certaines personnes ont quand même soumis certaines préoccupations, bien qu'il soit évidemment loin d'être facile d'en faire la vérification, justement parce que le financement de projets par la SEE demeure, en règle générale, confidentiel.

• 1035

Il va sans dire que certaines ONG ont dit que la SEE avait appuyé des projets qui auraient nui à l'environnement. Je ne dirai pas que nous n'avons pas vraiment approfondi la question, mais plutôt que nous l'avons abordée à un niveau plus théorique, nous demandant si le système en place était adéquat. Nous avons formulé des recommandations à cet égard, bien que rien ne semble indiquer que la SEE ait agi de façon irresponsable dans les marchés internationaux. Merci.

[Traduction]

La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Merci.

Monsieur Morrison.

M. Lee Morrison: J'ai une dernière question, messieurs. Dans votre exposé de ce matin, vous dites:

    La Société ne devrait pas interrompre l'importante initiative de développement du marché de l'assurance-crédit intérieur tant que le secteur privé ne sera pas suffisamment développé.

Cela ne contredit-il pas les représentants du secteur privé qui nous ont dit que la concurrence de la SEE sur le plan intérieur les dérange énormément? S'ils n'avaient pas la capacité voulue, ils ne se plaindraient sûrement pas. Qu'avez-vous à dire à ce sujet?

M. Guy David: D'après les témoignages que nous avons recueillis au cours de l'examen, il apparaît clairement que la SEE a développé le marché de l'assurance-crédit intérieur. Avant l'intervention de la SEE sur le marché canadien, ce dernier était lamentablement desservi.

Je n'ai pas les chiffres exacts ici, mais il s'agit d'un énorme marché potentiel lorsque l'on compare le niveau de l'assurance-crédit au Canada avec celui que l'on retrouve en Europe, par exemple, ou ailleurs. C'est un énorme marché. Depuis que la SEE a percé ce marché, l'activité de la SEE ainsi que celle du secteur privé augmentent considérablement chaque année. Il s'agit d'un taux d'augmentation extrêmement élevé qui indique que si la SEE n'était pas sur le marché, le secteur privé ne serait peut-être pas disposé à le desservir—je veux parler ici de sociétés internationales.

Ce que nous remarquons également, c'est qu'il n'y a pas de capacité canadienne dans le domaine de l'assurance-crédit sur le marché. Il n'y a pas de société canadienne ni de société sous réglementation canadienne comme, par exemple, des sociétés appartenant à des banques ou des sociétés d'assurance canadiennes. Le marché de l'assurance-crédit est desservi par des sociétés étrangères implantées essentiellement en Europe et aux États-Unis. Par conséquent, les décisions en matière de risque sont prises à l'échelle mondiale et non à l'échelle du Canada. C'est également un sujet de préoccupation.

Selon nous, le marché est suffisamment grand pour la SEE ainsi que pour le secteur privé étranger et nous croyons qu'une société canadienne, implantée au Canada, pourrait y trouver sa place afin de développer ce marché.

La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Merci.

[Français]

Madame Picard.

Mme Pauline Picard (Drummond, BQ): Je cède la parole à Mme Lalonde.

Mme Francine Lalonde: Merci. Je devrais aller faire un discours à la Chambre avant de revenir.

Ma première question porte sur le point 9, où vous suggérez de supprimer le pouvoir du ministre d'autoriser des transactions qui ne sont pas envisagées par les règlements au chapitre du financement intérieur.

Ma deuxième question est appuyée par une lettre que j'ai reçue récemment et qui a été signée par le directeur général de Développement et Paix. Il y traite d'un projet qui a été financé en partie—je ne sais pas en quelle partie—par la SEE et qui consistait en la construction d'un barrage en Colombie. Ce projet a entraîné le meurtre de plusieurs personnes, le déplacement de populations autochtones, etc. Développement et Paix a pris fait et cause pour les autochtones. Bien que je ne puisse pas tout vous raconter au cours des cinq prochaines minutes, je puis vous dire que la situation était assez dramatique.

• 1040

D'ailleurs, peut-être avez-vous eu cette lettre. Non? Je vous la ferai parvenir parce qu'on y parle de la SEE. Je vous en lis un extrait:

    La stratégie actuelle est évidente: si les autochtones fuient ou si l'on élimine leur résistance, on pourra remplir le barrage sans que cela ne coûte trop cher en compensations et on pourra faire main basse sur leurs terres.

Je vous ai dit qu'il y avait eu des assassinats. Il continue:

    La Société de l'expansion des exportations, organe du gouvernement du Canada, ne participe évidemment pas à ces complots. Toutefois, au nom des intérêts commerciaux du Canada, elle a joué un rôle considérable dans la réalisation de ce projet.

    Le gouvernement procède actuellement à une révision de la loi concernant la SEE et de la façon dont elle remplit son mandat. Ce mandat l'oblige à tenir compte de l'ensemble des priorités du gouvernement, notamment en ce qui concerne la protection de l'environnement et le respect des droits humains.

    Il nous semble important de savoir comment la SEE tient compte de cet aspect de son mandat dans le dossier de Urra 1. Le rôle du Canada suscite dans ce cas-ci beaucoup d'interrogations. Nous avons limité à cinq les questions qui nous semblent les plus fondamentales.

    1. Au départ, la SEE a-t-elle pris en considération le fait—pourtant annoncé—que le projet risquait d'accroître la violence et l'injustice à l'encontre des autochtones de la région?

    2. La SEE a-t-elle tenu compte des craintes, des analyses et des dénonciations exprimées par les autochtones de la région quant à l'impact environnemental du projet et ses répercussions sur leur mode de vie?

    3. La SEE a-t-elle consulté les communautés autochtones pour entendre leur point de vue sur les impacts social et environnemental du barrage?

    4. La SEE a-t-elle discuté du contexte particulier...

Il dit à la fin:

    La SEE étant un partenaire d'affaires important dans ce projet, ses actions peuvent avoir beaucoup de répercussions.

Il dit aussi qu'il faudrait «mettre en place à la SEE un mécanisme transparent qui permette, avant d'engager un financement, de bien évaluer la situation des droits de la personne dans le pays concerné.»

Vous faites une recommandation, mais il ajoute qu'il faudrait un mécanisme transparent. Ce serait une mesure supplémentaire à la recommandation que vous faites.

M. Maxime Faille: Évidemment, nous ignorons ce cas. Que je sache, il n'a pas été porté à notre attention. Je pense qu'il faudrait plutôt poser la question à la SEE.

De notre côté, nous recommandons effectivement qu'il y ait un mécanisme d'évaluation environnementale des projets qui, selon le modèle de la Banque mondiale, comprendrait toute la question des déplacements humains. Nous recommandons également qu'il y ait une divulgation de la révision environnementale dans un certain délai pour que le public et les parties intéressées puissent commenter sur cette révision environnementale.

Donc, nos recommandations vont dans ce sens. Évidemment, il faut chercher un équilibre entre la possibilité pour les exportateurs canadiens d'être concurrentiels sur le marché mondial et les obligations du Canada en matière d'environnement et de droits de la personne. Je pense que nos recommandations abordent cette question, mais nous ne connaissons pas le cas particulier dont vous parlez puisqu'il n'a pas été porté à notre attention.

Mme Francine Lalonde: Merci.

M. Guy David: Pour répondre rapidement à votre première question, sans contradiction en ce qui concerne le financement intérieur, actuellement, on précise dans le règlement de la loi quels genres de financement intérieur la SEE peut faire, mais c'est précisé de façon assez subjective. De plus, on dit que le ministre des Finances ou celui du Commerce international, ou les deux ministres peuvent autoriser des transactions qui ne sont pas déjà permises par le règlement.

Notre position est que le financement intérieur devrait, au départ, être exceptionnel pour la SEE parce que les banques canadiennes desservent assez bien le marché intérieur. Si c'est exceptionnel, les exceptions devraient être précisées assez clairement dans le règlement. Pour nous, dire que le ministre peut autoriser des choses qui sont des exceptions à l'exception est aller un peu trop loin. On aimerait un règlement qui soit clair: vous pouvez faire ce genre de financement intérieur, point final. Il pourrait alors y avoir un débat entre la SEE et les banques pour voir si ce règlement est assez étroit ou non, et on pourrait arriver à un compromis.

• 1045

[Traduction]

La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Merci.

Je crois que tout un chacun a pu faire part de ses préoccupations.

J'aimerais répéter les félicitations de Mme Augustine au sujet du rapport qui se lit très facilement.

D'accord, nous avons encore le temps de poser une question rapide, madame Picard.

[Français]

Mme Pauline Picard: Vous avez dit une chose sur laquelle je voudrais avoir certaines précisions. Vous mentionnez que plusieurs initiatives ont été soumises dans le but de renforcer la capacité canadienne de financement du commerce extérieur et de l'investissement, mais que ces initiatives ont été sous-utilisées. Savez-vous pourquoi? Comment se fait-il qu'on n'ait pas utilisé ces initiatives pour renforcer la capacité de financement du commerce extérieur? Dans la mesure où la SEE adopterait une orientation plus commerciale, qu'adviendrait-il de son rôle public à long terme et comment pourrait-elle faire en sorte de ne pas concurrencer indûment les entreprises privées qui fournissent les mêmes services?

M. Guy David: Pour répondre à votre question, je dois vous mentionner qu'il y a une petite différence entre les textes anglais et français de ma présentation. Je dois vérifier. Je pense qu'une erreur s'est glissée dans le rapport.

Mme Pauline Picard: C'est normal que ça me chicotte.

M. Guy David: Il est vrai qu'un certain nombre d'initiatives ont été entreprises, mais on dit que certaines initiatives devraient être entreprises par la SEE. Ces nouvelles initiatives sont celles que j'énumère à la page 6, je crois. Ce sont des initiatives qui pourraient et qui devraient être entreprises. Pour ce qui est des initiatives qui ont été entreprises, nous avons constaté une sous-utilisation, surtout par les banques. Donc, les initiatives ne vont pas assez loin.

Mme Pauline Picard: Si la SEE adopte une orientation plus commerciale, n'y aura-t-il pas danger qu'elle vienne concurrencer les entreprises qui font ce genre de financement du commerce extérieur?

M. Guy David: Oui, bien sûr, et on le reconnaît. Par contre, on dit que l'évolution de l'orientation commerciale déjà entreprise ne devrait pas être arrêtée. Nous reconnaissons que cette évolution existe et que la SEE a une orientation commerciale. Nous disons, par exemple, que certains aspects des activités pourraient être assumés par des filiales qui, à toutes fins pratiques, fonctionneraient sur une base commerciale. On reconnaît par là que les entreprises seraient sur un pied d'égalité. À certains niveaux, comme celui de la divulgation du soutien financier et celui de l'environnement, et dans bien d'autres secteurs, nous reconnaissons que la SEE devra toujours être assujettie au régime qui s'applique aux institutions publiques et auquel le secteur privé n'est pas assujetti.

Mme Pauline Picard: Je suis un peu sceptique. Il faudra sûrement établir des mécanismes très clairs et très transparents si on veut que la SEE adopte une nouvelle orientation en ce qui concerne le commerce extérieur et en ce qui concerne tout le volet que vous expliquiez tout à l'heure, c'est-à-dire les banques. Je ne suis pas tout à fait convaincue ou je n'ai pas tout à fait compris, et cela me semble très compliqué. Quand on ajoute une nouvelle structure et de nouvelles orientations, il y a toujours un fouillis administratif. Il faudrait donc adopter un mécanisme dont les règles soient claires. Je sais que vous faites des recommandations, mais à mon point de vue, en français, les mots ne sont pas assez pesants pour éviter qu'on se retrouve devant un fouillis administratif dans lequel on ne pourrait plus se comprendre et que la SEE perde sa vocation.

• 1050

[Traduction]

La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Merci.

Je crois qu'il conviendrait que je vous explique pourquoi aussi peu de membres du comité sont présents. Le NPD dépose aujourd'hui une motion d'opposition exprimant son mécontentement à propos de...

Feu Shaughnessy Cohen avait l'habitude de dire: «Les banques sont mauvaises. Le commerce est mauvais.» Beaucoup de nos membres qui auraient voulu être ici sont là-bas pour défendre notre position commerciale; je crois qu'ils ont malheureusement raté une séance très intéressante.

Nous vous remercions beaucoup d'être venus.

Je vais maintenant suspendre la séance pendant cinq minutes avant d'entendre notre prochain groupe de témoins.

• 1051




• 1102

La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Nous allons maintenant entendre Louise Charron Fortin, directrice générale, Service des délégués commerciaux, Planification et politique. Elle est accompagnée par Robert Shaw-Wood, directeur adjoint, Direction du financement à l'exportation, et par Richard Lecoq, directeur de la direction.

Madame, je vous cède la parole.

Mme Louise Charron Fortin (directrice générale, Service des délégués commerciaux, Planification et politique, ministère des Affaires étrangères et du Commerce international): Merci, madame la présidente et membres du comité.

Comme l'a indiqué madame la présidente, je m'appelle Louise Charron Fortin et je suis actuellement directrice générale du Service des délégués commerciaux, Planification et politique, au ministère des Affaires étrangères et du Commerce international. J'étais auparavant directrice du financement à l'exportation et j'ai dirigé l'examen de la Loi sur l'expansion des exportations ainsi que la production de ce rapport.

Je suis accompagnée aujourd'hui par M. Richard Lecoq, actuellement directeur de la Direction du financement à l'exportation, et par Robert Shaw-Wood, directeur adjoint.

J'ai l'honneur de vous parler aujourd'hui des divers aspects de l'examen. En tant que fonctionnaire commerciale de carrière et en ma qualité d'ancienne ambassadrice à l'étranger où je m'occupais d'affaires commerciales, je peux personnellement témoigner de l'importance d'un financement commercial concurrentiel pour une petite entreprise qui veut conclure une transaction difficile; de l'importance d'un tel financement pour percer un nouveau marché en dépit de la féroce concurrence internationale; de l'importance d'un tel investissement pour encourager des investissements stratégiques et pour compenser les risques politiques et autres.

Il y a un peu plus de 18 mois, le MAECI, en consultation étroite avec le ministère des Finances, a entamé un processus qui devait mener au rapport sur l'examen de la Loi sur l'expansion des exportations. C'est M. Sergio Marchi, alors ministre du Commerce international, qui a déposé ce rapport le 21 juillet dernier.

La Loi sur l'expansion des exportations définit le mandat et les secteurs d'activités de la Société d'expansion des exportations. En 1993, au moment des dernières modifications apportées à la Loi, la SEE s'est vue conférer des pouvoirs élargis afin d'aider directement et indirectement les exportateurs, plus précisément dans les domaines de l'assurance intérieure et des placements en actions pour des projets de sociétés nationales et étrangères.

C'est à ce moment-là que le Parlement a décidé qu'il convenait de procéder à un examen de la Loi cinq années après sa mise en vigueur. L'article 25 de la Loi de 1993 stipule également que le rapport doit être examiné par les comités de la Chambre et du Sénat ou par un comité conjoint des deux Chambres.

• 1105

J'aimerais ce matin vous entretenir au sujet de notre approche face à ce processus d'examen, ainsi qu'au sujet de nos objectifs et de nos principes directeurs. Je vais également parler du contexte plus vaste de notre perspective, soit la place de la SEE dans la stratégie commerciale internationale du gouvernement, et parler de certains des grands thèmes du rapport.

Nous souhaitons pouvoir tirer profit de la sagesse collective de votre comité et espérons que cet exercice sera axé sur l'avenir tout en étant acceptable aux yeux de tous les intéressés. Même si la Loi sur l'expansion des exportations exige un tel examen, je dois vous faire remarquer qu'il n'y a pas de lignes directrices au sujet de la forme que doit prendre un examen de cette nature. Par exemple, sa portée aurait pu être très limitée et assez bureaucratique. M. Marchi, en sa qualité de ministre du Commerce international, avait toutefois décidé que cet examen devait faire l'objet de vastes consultations. Pour assurer un examen transparent, autonome et complet, le MAECI, par l'entremise de Travaux publics et Services gouvernementaux Canada, a lancé un appel d'offres pour la réalisation de ce travail et la production d'un rapport pour notre ministre.

Comme vous le savez, parmi les trois cabinets d'avocats, c'est le cabinet Gowling, Strathy and Henderson, plus connu sous le nom de Gowling, qui a obtenu le contrat. Nous avons demandé à Gowling de nous présenter une analyse de deux grandes questions et de nous faire des recommandations à ce sujet, à la suite d'un vaste processus de consultation auquel devaient participer les exportateurs et d'autres intervenants.

Tout d'abord, il fallait évaluer dans quelle mesure les modifications apportées à la Loi sur l'expansion des exportations en 1993 avaient donné à la SEE la souplesse nécessaire pour développer des instruments financiers concurrentiels permettant de répondre aux besoins présents et futurs des entreprises canadiennes, notamment les PME. Ce qui nous intéressait particulièrement, c'était l'effet des pouvoirs élargis de la SEE dans les domaines du crédit-bail, des placements en actions, du financement interne et de l'assurance-crédit intérieure.

Deuxièmement, il fallait que les consultants donnent des conseils à propos des changements qu'il faudrait peut-être apporter à la Loi de manière à ce que le système de financement commercial du Canada reste à l'avant-garde de la concurrence internationale. Nous voulions en particulier savoir comment notre système de financement des exportations se compare avec celui de nos principaux concurrents, tout en tenant compte des tendances et de la capacité du marché privé.

Le lancement de l'examen a été largement annoncé dans des communiqués, des envois postaux, des envois électroniques, des journaux ainsi que dans des publications de commerce et d'investissement internationaux. Plus de 40 mémoires ont été reçus et deux séries de consultation ont été organisées dans cinq villes du Canada.

Je tiens à dire de nouveau que dès le début, nous avons dit qu'il était extrêmement important que les examinateurs soient indépendants. Nous avons également insisté sur le fait que quiconque souhaitait comparaître devant l'équipe d'examen devait pouvoir le faire. Ainsi, le rapport reflète une diversité de perspectives.

À notre avis, l'examen réalisé est crédible. Bien des gens ont indiqué qu'il s'agit de l'examen le plus complet du système de financement des exportations du Canada jamais réalisé. Les 39 recommandations que renferme le rapport Gowling reflètent clairement l'ampleur et la profondeur du débat.

J'aimerais maintenant m'attarder sur le rôle de la SEE dans le contexte de la stratégie de développement commercial international du gouvernement.

Notre stratégie de commerce international reflète la pensée et les priorités du MAECI et de 21 ministères et organismes, y compris la SEE, qui, ensemble, forment l'agence virtuelle de promotion des exportations appelée Équipe Canada. Reconnaissant l'importance du commerce et de l'investissement pour la prospérité du Canada, le gouvernement s'est fixé quatre objectifs pour cette stratégie: faire du Canada le meilleur pays commercial au monde en améliorant notre compétitivité commerciale internationale; faire du Canada le pays le plus recherché pour l'investissement en Amérique du Nord; créer des emplois en encourageant l'innovation et la R et D parmi les PME et les entreprises multinationales; exercer le leadership dans le domaine de la libéralisation du commerce mondial.

• 1110

Comme vous le savez, la SEE a le mandat d'aider les sociétés canadiennes à être plus compétitives au sein d'une économie globale en rapide évolution, en offrant des produits d'assurance et financiers de classe mondiale, ainsi qu'en proposant des solutions. La SEE est devenue essentielle pour le gouvernement qui peut ainsi atteindre ces quatre objectifs. Il faut souligner que la SEE a maintenant plus de 5 000 clients, que son appui s'est chiffré l'an passé à près de 38 milliards de dollars et qu'elle jouit d'une très bonne réputation auprès des clients. De l'avis de bien des gens, la Société atteint son objectif essentiel qui consiste à créer une capacité et des possibilités pour aider les entreprises canadiennes qui veulent se positionner sur la scène internationale.

Dans le cadre de ce mandat et conformément à notre stratégie de promotion du commerce international, la SEE a mis l'accent sur trois grands objectifs.

D'abord, la SEE s'est engagée à accroître le nombre de PME à vocation exportatrice et à améliorer leur accès au financement. Les PME représentent presque 90 p. 100 de nos clients, et nous avons entrepris de mieux faire connaître le nom corporatif de la SEE et de sensibiliser les PME aux produits et services qu'offre la société. Or, il reste encore beaucoup à faire, vu que le Canada compte, au total, 75 000 entreprises exportatrices dont la plupart sont des PME. La SEE a également mis sur pied des équipes de services financiers aux PME, équipes qui ont établi de nouveaux programmes de concert avec les banques commerciales. Ces équipes travaillent en étroite collaboration avec la direction de promotion des exportations des PME en vue d'atteindre un plus grand nombre de petites et moyennes entreprises.

La SEE collabore aussi de près avec d'autres membres d'Équipe Canada, notamment la Corporation commerciale canadienne, la Banque de développement du Canada et la Société du crédit agricole. Ces entreprises font partie du Conseil des institutions financières de la Couronne et collaborent ensemble en vue d'améliorer la prestation continue de services aux PME.

Ensuite, la SEE aide un plus grand nombre d'entreprises à s'implanter dans divers marchés internationaux, et offre notamment un soutien aux exportateurs dans les marchés en développement. L'an dernier, la SEE a offert une aide financière aux exportateurs et investisseurs canadiens qui font affaire dans 200 pays, dont 130 sont des marchés naissants. La Société a adopté des stratégies précises et mis sur pied, par exemple, des équipes de promotion des marchés naissants pour faire en sorte que ce volet demeure un élément central du plan d'entreprise. À l'heure actuelle, les investissements de la SEE dans les marchés à risques élevés atteignent environ 9 milliards de dollars par année, ce qui montre que la Société a contribué à trouver de nouveaux débouchés pour les exportations canadiennes en dehors du marché américain.

Enfin, la SEE s'est engagée à établir des partenariats plus solides avec d'autres intervenants des secteurs privé et public en vue de tirer le maximum des ressources disponibles. Elle compte, par exemple, intensifier ses efforts de financement en consortium avec des banques canadiennes et étrangères et ainsi faciliter l'octroi de prêts aux exportateurs et investisseurs. La Société a également entrepris de créer de nouveaux partenariats avec des assureurs privés. Elle a mis au point plusieurs produits pour encourager les banques canadiennes à participer davantage au financement des exportations.

La SEE devra s'attacher à mener ces initiatives à bien, ce qui constitue pour elle un défi de taille. Les banques disposent de vastes réseaux nationaux et internationaux, et nous croyons que les exportateurs devraient être en mesure de tirer parti de ceux-ci. Les banques canadiennes octroient rarement des prêts à moyen et long terme aux exportateurs canadiens, ce service étant déjà offert par la SEE. Par ailleurs, il y a des banques américaines et britanniques qui fournissent un tel financement à leurs exportateurs, sauf que ce financement est garanti par le gouvernement. Au fur et à mesure que nos réseaux de succursales bancaires participeront plus activement au financement des exportations avec l'aide de la SEE, le nombre de PME qui tireront parti de nos programmes d'appui à l'exportation augmentera. Le rapport conclut également que la SEE doit faire encore plus pour développer la capacité du secteur financier canadien de fournir un soutien aux exportateurs.

• 1115

Le partenariat avec le secteur privé, et notamment avec la communauté financière du Canada, constitue un des thèmes majeurs du rapport Gowling, et nous sommes heureux cette question ait été abordée.

De manière générale, nous sommes d'accord avec la conclusion du rapport selon laquelle la SEE appuie avec efficacité nos objectifs commerciaux internationaux et ceux des exportateurs canadiens. La Société évolue constamment étant donné qu'elle doit s'adapter à la nouvelle dynamique internationale, et nous appuyons cette orientation. Le rapport ne propose, à cet égard, aucun changement radical. Il aborde plusieurs questions controversées, dont l'importance à accorder au respect des droits de la personne et à la protection de l'environnement dans le processus d'approbation des prêts et de l'assurance-crédit, et l'adoption d'une politique de divulgation des opérations de la SEE. Ces questions sont toutes fort importantes. Or, nous devons également tenir compte des besoins des exportateurs qui sont soumis à la concurrence internationale.

Nous souscrivons également à la recommandation voulant que la Société continue de fonctionner comme une entité commerciale, selon des principes commerciaux, puisque cela lui permet d'être financièrement autonome. La SEE est un organisme unique en son genre du fait de cette vocation commerciale. Or, il est important que la SEE tienne également compte, dans l'exercice de son mandat, des objectifs de la politique des pouvoirs publics. Cela comprend le rôle qu'elle doit jouer au chapitre de la promotion du commerce international qui, comme je l'ai déjà mentionné, englobe des questions comme le soutien accordé aux PME et aux entreprises dans les marchés à risques élevés qui n'intéressent guère les institutions financières du secteur privé. Il est également important que la SEE continue de respecter les obligations commerciales internationales du Canada auprès de l'OCDE et de l'OMC.

Pour terminer, je tiens à dire qu'il tarde au ministère de connaître vos vues sur le rapport. Le gouvernement compte s'en inspirer quand il examinera les recommandations du rapport. Il s'appuiera également sur les commentaires que formuleront les autres groupes intéressés qui comparaîtront devant vous.

Les exportations sont essentielles au bien-être économique des Canadiens. Nous sommes davantage tributaires du commerce que n'importe quel autre pays membre de l'OCDE. La croissance des exportations repose en grande partie sur la mise sur pied de services dynamiques et solides en matière d'assurance et de financement des exportations.

Je vous remercie de votre attention.

La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Merci.

Nous allons maintenant passer aux questions.

Monsieur Rocheleau.

[Français]

M. Yves Rocheleau: Tout d'abord, je voudrais déplorer, pour ne pas dire dénoncer le fait que le comité n'a pas eu la délicatesse d'exiger un document ayant trait au témoignage du ministère. Je ne sais pas si cela reflète la culture de ce comité—j'en suis à mes premières activités à ce comité—ou la culture du ministère des Affaires étrangères du Canada, mais dans les deux cas, cela nous explique mieux l'image qu'on colporte à l'étranger quant au Québec ou la façon dont on ignore le Québec à l'étranger, comme on l'a vu dans des documents qui ont circulé cet été et qui ont été très instructifs.

[Traduction]

La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Excusez-moi, monsieur Rocheleau, aucun document n'a été présenté en anglais, de sorte que les anglophones sont tout aussi désavantagés que vous.

Mme Jean Augustine: Nous sommes tous dans le même bateau.

[Français]

M. Yves Rocheleau: Je ne sais pas si c'est la culture de ce comité ou celle du ministère qui veut qu'on traite de façon aussi ingrate les parlementaires. C'est déjà difficile parce que les choses vont vite, et on ne nous aide pas du tout à accomplir nos responsabilités envers nos commettants.

• 1120

J'ai deux questions à poser, madame la présidente, l'une portant sur la recommandation 9 du rapport Gowlings, qui indique qu'on devrait supprimer le pouvoir discrétionnaire du ministre, comme on l'appelle au Québec, de prendre une décision même si les règles ne le prévoient pas. Je voudrais savoir dans quel contexte cela existe chez vous et à quelle fréquence on a utilisé ce pouvoir discrétionnaire du ministre des Affaire étrangères.

Ma deuxième question porte sur ce que vous dites à la page 26. Je vous lis les dernières lignes:

    Par exemple, le concept de «retombées économiques pour le Canada», qui a été un facteur fondamental dans l'allocation des crédits de la SEE, peut difficilement être concilié avec les stratégies financières mises au point pour appuyer la mondialisation des entreprises canadiennes les plus prospères. Certains soutiendront qu'appuyer les investissements des entreprises canadiennes à l'étranger revient à appuyer les exportations d'emplois. Or, si on ne soutient pas les entreprises qui désirent installer leurs exploitations à des endroits où elles peuvent réduire leurs coûts ou faciliter leur accès au marché étranger, leur croissance se ralentira, elles ne pourront pas optimiser leurs économies d'échelle et elles seront vulnérables face à la concurrence.

Dans la pratique des choses, est-ce que cela signifie qu'une entreprise canadienne établie au Canada qui déciderait, pour des raisons d'affaires tout à fait logiques, d'aller s'établir aux États-Unis, en Malaisie, au Pérou ou n'importe où ailleurs, donc de quitter le territoire canadien pour mieux se développer, pourrait à la limite avoir l'appui de la SEE pour s'installer ailleurs afin d'être plus rentable, cela avec le deniers des contribuables du Canada et du Québec?

Mme Louise Charron Fortin: Merci beaucoup. Je vais répondre en français puisque la langue est prioritaire.

M. Yves Rocheleau: Allez, allez!

Mme Louise Charron Fortin: Je dois m'excuser de la confusion qu'il y a eu autour de cette question de rapport. Nous avons effectivement soumis un rapport. Je ne sais trop où il est, mais il est malheureusement dans la langue de Shakespeare. Nous croyions que la traduction serait faite ici. Donc, je vous présente encore une fois nos excuses.

Je vais commencer à répondre à votre première question et j'encouragerai mes collègues à ajouter des éléments s'ils le souhaitent.

Effectivement, la réglementation telle qu'elle existe présentement exige que, si la SEE considère un financement qui est indirectement relié à l'exportation sur le plan intérieur, elle obtienne l'approbation du ministre. Je suppose qu'en 1993, lorsque cette réglementation a été élaborée, il s'agissait de permettre au ministre d'exercer un certain contrôle sur les initiatives de la société.

Nous sommes en train d'examiner toutes les recommandations du rapport Gowlings, et il reviendra évidemment au ministre de décider s'il tient à se défaire de ce contrôle.

En ce qui concerne nos opinions personnelles, nous tiendrons à conserver un certain niveau d'imputabilité de la part de la société à l'égard du ministre, par exemple en ce qui concerne ce sujet-là.

M. Yves Rocheleau: Selon ce que je comprends, madame, dans des situations qui n'ont jamais été prévues mais dans lesquelles l'intérêt public canadien voudrait que la société intervienne, le ministre peut intervenir, comme au Québec, où l'article 7 sur la Société générale de financement, dont j'ignore s'il existe encore, permettait au ministre de l'Industrie et du Commerce d'intervenir au nom de l'intérêt public dans des situations non prévues. Selon ce que je comprends, telle est la situation, mais je voudrais aussi savoir à quelle fréquence le ministre intervient, parce qu'il est très rare que le ministre québécois utilise ce pouvoir. Qu'en est-il chez vous?

• 1125

Mme Louise Charron Fortin: Je faisais allusion à la réglementation ou à la situation dans laquelle la SEE doit solliciter l'approbation du ministre.

M. Yves Rocheleau: L'inviter à utiliser son pouvoir discrétionnaire.

Mme Louise Charron Fortin: C'est exactement cela, sur une base très imprévue.

M. Yves Rocheleau: À quelle fréquence cela se produit-il dans la pratique?

[Traduction]

La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Votre temps de parole est écoulé. Nous allons donner la parole à Mme Augustine.

Oui, je pense que le témoin a indiqué qu'il n'était pas en mesure de fournir les renseignements demandés.

Madame Augustine.

Mme Jean Augustine: Merci, madame la présidente. Je tiens à remercier les témoins d'être venus nous rencontrer aujourd'hui. Je suis satisfaite du processus de consultation, de l'étude que nous avons entreprise. Le rapport est fort bien rédigé, et je crois que vous avez fait un choix judicieux en retenant les services de ce cabinet. Il est toujours agréable d'avoir un document compréhensible.

Je voudrais revenir à certaines questions que j'ai déjà posées, la première ayant trait à la SEE. On m'a dit que la Société n'élabore pas de politiques, qu'elle applique les politiques du gouvernement. J'imagine que vous êtes bien placés pour répondre à cette question.

Je tiens d'abord à dire que la SEE est présente dans plus de 200 pays. Tous les documents que nous avons reçus le mentionnent. Sur ce nombre, 130 sont des marchés naissants à risques élevés. Le rôle de la SEE, comme on peut le lire ici, est d'aider les entreprises canadiennes à pénétrer les marchés naissants à risques élevés, mais au potentiel énorme.

Nous avons reçu une brochure qui s'intitule «Business Without Borders». Si nous tenons compte du fait que la SEE est présente dans 200 pays, du code de déontologie commercial qu'elle a adopté, de la dynamique internationale, des considérations liées à l'environnement, au droit du travail, aux droits de la personne, ainsi de suite, comment la politique de votre ministère s'inscrit-elle dans le mandat de la SEE? Voilà pour la première question.

Deuxièmement, et dans le même ordre d'idées, la SEE affirme très clairement qu'elle souhaite continuer à recruter et à garder les personnes hautement qualifiées et compétentes. J'aimerais savoir si, parmi celles-ci, on retrouve des femmes, des membres de groupes minoritaires, ethniques et autres qui reflètent le visage de la société urbaine du Canada.

La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Je tiens à vous rappeler, madame Augustine, que vous avez cinq minutes.

Mme Jean Augustine: Très bien. Je pense qu'il y a un lien, madame la présidente, entre mes deux questions.

La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): D'accord. Merci.

Madame Louise Charron Fortin.

Mme Louise Charron Fortin: Vous avez soulevé plusieurs points qui portent essentiellement sur l'environnement et les droits de la personne.

• 1130

Pour ce qui est des droits de la personne, la SEE suit les conseils et les directives du ministère, puisque c'est lui qui est chargé d'élaborer la politique applicable à un certain nombre de pays. Vous savez tous que si un pays viole les droits de la personne, le ministère prendra des mesures en vue de lui manifester son mécontentement. Vous en avez eu des exemples ces derniers jours. Donc, dans ce cas-ci, il revient au ministère de conseiller la SEE à ce chapitre.

La question de l'environnement, elle, comporte de nombreuses dimensions. Il est vrai que le ministère a encouragé la SEE à inclure, dans son processus, des mesures environnementales, des cadres environnementaux, pour faire en sorte que les projets tiennent compte des considérations liées à l'environnement. Cela se fait de deux façons. D'abord, la SEE applique depuis longtemps des normes et procède à des évaluations des risques que présentent les projets qui comportent un volet environnemental. La SEE a mis en place, récemment, un cadre environnemental. Je pense que les témoins antérieurs en ont déjà parlé.

L'autre fait encourageant—et c'est plus qu'un fait encourageant—c'est que le ministère, de concert avec la SEE, fait preuve—soit dit en toute modestie—de leadership à l'échelle mondiale en ce sens qu'il encourage la mise en place de lignes directrices et de cadres multilatéraux cohérents. Je fais ici allusion à l'OCDE et au Consensus.

Je dois dire que l'idée d'imposer, à ce stade-ci, des mesures trop contraignantes à la SEE et au processus d'évaluation soulève quelques réserves d'ordre commercial. Comme je viens de le mentionner, il n'existe pas, pour l'instant, de lignes directrices multilatérales. On a fait allusion aux lignes directrices adoptées par la Banque mondiale, mais celles-ci ne sont pas appliquées par nos concurrents, du moins pas dans leur intégralité. La plupart des organismes de crédit à l'exportation veillent à tout le moins à ce que les pays appliquent leurs codes ou normes. Nous ne voulons pas, à ce stade-ci, imposer des normes contraignantes ou très sévères à la SEE, alors que nous poursuivons activement les négociations en vue de l'adoption d'une norme internationale. C'est à ce chapitre que nous jouons un rôle sur le plan politique.

Pour ce qui est du recrutement des personnes hautement qualifiées, je suis déçue de ne pas travailler pour la Société. Je suppose que je n'ai pas été recrutée. En effet, la SEE fixe des normes très élevées pour ce qui est des compétences techniques qui sont requises du personnel. C'est un domaine fort complexe. Quand à leur rendement réel, surtout en ce qui concerne les catégories que vous avez mentionnées, je n'ai pas les renseignements sous la main.

• 1135

La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Je pense que Mme Augustine aimerait savoir s'il existe une politique officielle pour les quotas de recrutement.

Mme Jean Augustine: Pas les quotas.

La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Non, mais...

Mme Louise Charron Fortin: Il faudrait poser la question à la SEE si vous voulez des précisions. Toutefois, je peux vous dire que la Société applique les règles auxquelles sont assujettis tous les ministères et organismes du gouvernement. La SEE est une société d'État et elle doit appliquer ces règles.

La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Merci.

Madame Picard.

[Français]

Mme Pauline Picard: J'aimerais savoir si vous croyez que la SEE devrait avoir un portefeuille plus à risque. Quand on la compare à d'autres organismes comme les OCE, par exemple, on voit qu'elle est la seule à prendre peu de risques, ce qui la limite beaucoup dans ses projets, surtout dans les pays les plus pauvres et les pays en voie de développement parce qu'il y a là de plus grands risques. Dans les différentes lectures que j'ai faites, je me suis rendu compte que la participation de la SEE dans ces pays était limitée parce que les risques y sont beaucoup plus élevés.

Ma deuxième question est dans la foulée de l'intervention de Mme Augustine. Pour ma part, j'ai un cerveau qui fonctionne de façon très concrète et j'espère avoir une réponse que je serai mieux en mesure de comprendre.

Quand la SEE est interpellée par une compagnie canadienne qui voudrait faire affaire dans un pays où on tisse des tapis et où ces tapis-là sont faits par des enfants qui sont réduits à l'esclavage, quelles mesures sont prises? Quelle règle la SEE doit-elle suivre pour se conformer aux politiques concernant le respect des droits de la personne ou le respect des droits des enfants?

J'ai entendu dire et j'ai pu lire qu'il y avait beaucoup de voeux pieux et de «oui, oui, on pratique cela», mais que dans les faits, on faisait des affaires. On fait parfois une petite recommandation à l'entreprise qui veut faire affaire dans ce pays où on utilise les enfants, mais qu'en est-il des sanctions? Vous disiez tout à l'heure que vous encouragiez l'adoption de mesures et que vous essayiez de répondre à certaines préoccupations, et vous avez ensuite dit que des sanctions pouvaient s'appliquer et que quelque chose s'était passé dernièrement au niveau des sanctions. C'est la première fois que j'entends parler de sanctions. Quelle est la vraie politique en ce qui concerne le respect des droits de la personne par les entreprises canadiennes qui veulent faire du commerce extérieur et aller dans différents pays pour faire du développement ou du financement? Quelle est cette politique? Est-ce que des mesures concrètes sont prises? Est-ce que des sanctions sont prises? Est-ce qu'on refuse de financer des entreprises ou si on encourage les gens? Est-qu'on leur mentionne que ces pays ne respectent pas les droits de la personne?

Mme Louise Charron Fortin: Si j'ai bien compris, votre première question portait sur la capacité de la SEE de prendre plus de risques dans certains marchés.

Mme Pauline Picard: Je disais simplement qu'on m'avait dit que, comme la SEE ne pouvait compter sur le financement du gouvernement, elle ne prenait pas beaucoup de risques. Est-ce vrai?

Mme Louise Charron Fortin: Dans un premier temps, vous avez raison de dire que la SEE assume les frais et les coûts de ses opérations. Donc, elle est indépendante du gouvernement canadien à cet égard. Cependant, elle a un système qui lui permet de gérer et de minimiser ses risques quant aux projets à l'étranger. Elle a des instruments, des moyens et des systèmes qui lui permettent de faire du provisioning, de la protection de ses investissements. Elle a entre autres un système de provisioning—M. Gillespie vous en peut-être parlé—de 2,5 milliards de dollars qui lui permet de coussiner ses activités à l'étranger et qui lui donne une marge de manoeuvre intéressante. Elle a également sa base de capital, qui est d'environ 1,7 milliard de dollars, ce qui lui donne un coussin général de 4 milliards de dollars.

• 1140

J'aimerais mentionner que déjà 25 p. 100 de ses affaires se font dans des marchés à risque.

Plus récemment, elle a également mis en place un système très sophistiqué d'évaluation des risques qui lui permet d'aborder la question du risque de façon beaucoup plus stratégique et à long terme.

[Traduction]

La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Merci.

Monsieur Patry.

[Français]

M. Bernard Patry: J'aimerais vous poser une question dans un autre ordre d'idées, relativement au rôle de la SEE vis-à-vis de l'OMC.

La ronde du millénaire va débuter très bientôt à Seattle, et sait que cela aura un impact très important sur le Canada parce qu'il est un pays exportateur, surtout que les décisions de l'OMC sont sans appel. C'est très délicat pour nous en ce sens qu'il y a très probablement une certaine perte de souveraineté des pays qui en sont membres, y inclus le Canada.

Le rôle de la SEE semble beaucoup plaire à nos petites et moyennes entreprises. Elles sont très heureuses. M. Gillespie est venu nous faire un rapport là-dessus. Maintenant, le Bureau canadien des assurances a exprimé des réserves là-dessus. Selon lui, le Canada ne remplit plus ses obligations internationales vis-à-vis de l'OMC et de l'OCDE et pourrait faire face, dans un avenir assez rapproché, à des contestations sur le plan commercial de la part de ses partenaires. Il semble que la France, l'Angleterre, les États-Unis et l'Allemagne aient mis en place des mécanismes très spéciaux, et il semble qu'il pourrait y avoir des poursuites du fait que la SEE ne paie pas de taxes et n'est pas soumise au règlement de l'assurance du Canada.

Dans cette optique, croyez-vous qu'il est vraiment essentiel de modifier la loi régissant la SEE en regard de nos obligations vis-à-vis de l'OMC?

Mme Louise Charron Fortin: Voici d'abord quelques antécédents en ce qui concerne l'OMC. Encore récemment, l'OMC, dans le cadre d'un appel portant sur le secteur de l'aéronautique, a conclu qu'au niveau des comptes corporatifs, la SEE rencontrait ses exigences en ce qui concernait le dossier qui était à l'étude à ce moment-là à l'OMC.

Ce qui a été mis en question, c'est le compte Canada. J'aimerais expliquer qu'une décision disait que le Canada offrait des subventions défendues, prohibited subsidies. J'aimerais quand même préciser un fait. Dans notre défense, et je dis «notre» de façon royale, nous avons pris la décision stratégique de ne pas fournir de renseignements détaillés sur la transaction en question, d'abord parce que le plaignant n'avait pas fait un prima facie, n'avait pas débattu et présenté s'arguments substantiels. Deuxièmement, si on avait décidé de présenter ces renseignements, on aurait mis à risque la confidentialité des transactions et des dossiers pour le Canada. Donc, on se serait porté préjudice. C'est à cause de l'absence d'information que le panel a jugé que nous ne nous conformions pas à nos obligations.

• 1145

Maintenant, je puis vous affirmer qu'au niveau du compte Canada, les transactions respectent les règles du consensus, mais on n'en a pas fait la preuve, pour les raisons que je vous ai expliquées.

Du côté de la SEE, le compte corporatif est assujetti aux exigences de l'OMC et s'y conforme, comme le dossier récent en fait foi.

Vous soulevez d'autres questions au sujet des taxes, des dividendes et ainsi de suite. La question a été soulevée ici. Si on devait mettre en oeuvre la recommandation qui a été faite de transférer la SEE à l'annexe II de la loi, cela clarifierait la nature commerciale de la SEE, mais ce n'est essentiel pour répondre aux exigences et aux règles de l'OMC.

M. Bernard Patry: Merci.

Mme Louise Charron Fortin: Merci.

[Traduction]

La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Vous avez employé, plus tôt, le mot «concurrents». J'aimerais savoir ce que vous entendez par cela. Faites-vous allusion aux banques ou aux compagnies d'assurance? Cela soulève une tout autre question pour ce qui est de savoir si le gouvernement devrait faire concurrence au secteur privé.

Mme Louise Charron Fortin: Merci. Quand j'ai employé le mot «concurrents», je faisais allusion à la concurrence entre entreprises, aux exportateurs qui font concurrence aux entreprises canadiennes, et non pas à la SEE. Je faisais allusion à la concurrence à laquelle sont soumises les entreprises canadiennes.

La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): D'accord, merci.

Monsieur Rocheleau.

[Français]

M. Yves Rocheleau: Je voudrais revenir à la deuxième question que j'ai posée plus tôt.

Le texte de la page 26 que je vous ai lu signifie-t-il qu'il est normal que la SEE collabore au financement d'une entreprise canadienne implantée au Canada qui, pour des fins de meilleure rentabilité, souhaite s'établir dans un autre pays? Est-ce que cette entreprise va, à la limite, recevoir des deniers des contribuables canadiens pour s'installer ailleurs, occasionnant des pertes d'emplois au Canada?

Mme Louise Charron Fortin: Je crois, et le témoin précédent aurait probablement pu le confirmer, que ce serait effectivement l'élan donné à l'analyse de la recommandation qui a été faite par Gowlings.

Maintenant, l'intention de la loi et des modifications qui avaient été faites en 1993 était d'abord et avant tout de donner à la SEE la capacité d'investir dans des projets à l'étranger en tant que participant à ces projets, afin d'ouvrir la voie aux sociétés et exportateurs canadiens pour vendre des produits et services.

Maintenant, je devrai me documenter davantage. En fait, on parle de coactionnaires dans un contexte de financement de projets.

M. Yves Rocheleau: On faciliterait...

Mme Louise Charron Fortin: Oui, telle est l'intention, parce qu'une telle implication de la SEE ouvrirait des occasions d'affaires.

M. Yves Rocheleau: Trouvez-vous cela normal?

Mme Louise Charron Fortin: Écoutez, ce n'est pas à moi d'en juger, mais si...

M. Yves Rocheleau: Est-ce que le ministère trouve cela normal?

Mme Louise Charron Fortin: Si l'argument de fond est que cela contribue à la création d'emplois au Canada parce que ces services et ces biens sont manufacturés au Canada, la SEE aura certes à l'esprit ce contenu et ces bénéfices canadiens au moment de la décision.

• 1150

M. Yves Rocheleau: Je ne porte pas de jugement, mais je me demande si le texte en question ne signifie pas qu'on encouragerait même un déménagement si on décidait, sur le plan corporatif, qu'il serait bon de déménager. Ce sont les intérêts canadiens qui sont en cause. On déménage en Malaisie. Très bien, on va avoir nos entrées en Malaisie ou aux Philippines, on va payer aux employés des salaires beaucoup moins élevés et les actionnaires y trouveront leur compte. Les contribuables canadiens contribueront-ils à cette perte de 100, 200 ou 25 emplois ou si, au contraire, vous vous refusez à...? C'est le sens de ma question.

Mme Louise Charron Fortin: En fait, les commentaires que j'ai faits portaient, par exemple, sur un investissement dans un projet d'infrastructures, mais à l'étranger. Il s'agirait d'être partenaire, par exemple, dans une infrastructure de production d'électricité en Afrique.

Avez-vous des commentaires, Richard?

M. Richard Lecoq (directeur, Direction du financement à l'exportation, ministère des Affaires étrangères et du Commerce international): Non.

M. Yves Rocheleau: Certains soutiennent que le fait appuyer les investissements des entreprises canadiennes à l'étranger équivaut à appuyer les exportations d'emplois. C'est là qu'on peut se poser des questions. Est-ce fondé? C'est le rapport; ce n'est pas nécessairement votre politique.

Mme Louise Charron Fortin: D'accord.

[Traduction]

La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): C'est un des points que soulève la recommandation. De manière générale, nous sommes d'accord avec la politique de divulgation, parce que je sais que plusieurs d'entre nous... J'ai eu des problèmes dans ma propre circonscription, puisqu'on avait laissé entendre que la SEE avait octroyé des prêts qui avaient entraîné la création de deux ou trois mille emplois ailleurs, alors qu'il y avait eu des mises à pied importantes au Canada.

Donc, les Canadiens ne pourront pas vraiment savoir quel genre de projets ils financent, tant qu'une politique de divulgation—et nous insistons là-dessus—n'aura pas été adoptée.

Mme Louise Charron Fortin: Vous soulevez là un point important, et je tiens à dire que nous sommes en faveur de l'adoption d'une telle politique. En fait, la Société doit pouvoir démontrer que la transaction ou l'investissement qu'elle a effectué sert les intérêts du Canada. Ces retombées peuvent se traduire, non pas par la création immédiate d'emplois, mais par des activités de R-D au Canada. Il y a de nombreuses façons de calculer l'impact d'une transaction sur l'économie canadienne.

La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Eh bien, ces retombées ne se traduiront peut-être pas par la création d'emplois, mais il ne faudrait pas qu'il y ait des mises à pied ou des pertes d'emploi au Canada. Nous n'aurons aucun moyen de le vérifier tant que la politique de divulgation n'aura pas été adoptée.

Je m'excuse, j'ai empiété sur votre temps de parole. Avez-vous d'autre chose à ajouter?

Mme Louise Charron Fortin: Si cette transaction hypothétique entraînait la perte d'emplois, ce facteur serait pris en compte au moment de déterminer si cette transaction sert les intérêts du Canada.

La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Ce serait difficile de déterminer une chose pareille.

Madame Augustine.

Mme Jean Augustine: Madame la présidente, j'ai ici un article qui figurait dans la documentation qu'on nous a remise. Je le trouve un peu inquiétant, mais je vous demanderais, en dix phrases ou moins, de commenter la déclaration suivante ou de la réfuter:

    [...] Le Canada est le seul pays qui n'ait pas modifié son organisme de crédit; nous avons du retard sur nos partenaires commerciaux, soit les États-Unis, l'Allemagne, la France, la Grande-Bretagne [...]

Je pense que vous savez d'où vient cet article. Il figure dans la documentation qui nous a été remise. Est-ce vrai? Pouvez-vous nous dire si nous avons du retard sur nos partenaires commerciaux?

• 1155

M. Richard Lecoq: Oui, il est vrai que la SEE est très différente des organismes concurrents, et nous tenons à ce qu'elle le soit. Nous voulons que la SEE soit compétitive. Dans les autres pays, les organismes de crédit à l'exportation sont utilisés en dernier recours alors que, dans notre cas, le rôle de la SEE est d'être compétitive et financièrement autonome. Voilà pourquoi elle ne coûte rien aux contribuables, et je pense que le ministère est d'accord avec cela. Donc, oui, elle est très différente des autres, et nous tenons à ce qu'elle le soit.

Mme Jean Augustine: Mais j'ai eu l'impression que le fait d'avoir du retard sur les autres voulait dire quelque chose d'autre.

M. Richard Lecoq: Je ne sais pas.

M. Robert Shaw-Wood (directeur adjoint, Direction du financement à l'exportation, ministère des Affaires étrangères et du Commerce international): Je pense que vous faites allusion au mémoire du Bureau d'assurance, et il parlait des autres organismes de crédit à l'exportation qui ont décidé de ne plus offrir de services d'assurance-crédit intérieure et de privatiser ce volet de leurs opérations.

Je suppose qu'on pourrait dire que la SEE, selon le point de vue que vous adoptez, a du retard sur les autres à ce chapitre, sauf que la situation ici a toujours été différente. Comme l'accès à l'assurance-crédit n'était pas tellement développé, la SEE a décidé d'offrir ce service. Or, le secteur privé est en train de devenir un intervenant important dans ce domaine, d'où la nécessité d'envisager des partenariats. Donc, nous avons un certain retard sur les Européens et les organismes qui fournissent déjà des services d'assurance-crédit.

Mme Jean Augustine: Je pense que les auteurs de l'article viennent du Bureau de l'assurance.

La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Merci.

Je tiens à vous remercier d'avoir comparu devant le comité. Nous ne sommes pas nécessairement un groupe très facile, même si nos questions ne sont pas tellement compliquées.

Mme Jean Augustine: Je pense que mes questions l'étaient.

La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Eh bien, les miennes ne le sont pas. Et je fais allusion ici à mes questions et à mon attitude.

Je vous remercie d'avoir comparu devant nous aujourd'hui.

La séance est levée.