Passer au contenu
Début du contenu

TRAN Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain

STANDING COMMITTEE ON TRANSPORT

LE COMITÉ PERMANENT DES TRANSPORTS

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mercredi 29 avril 1998

• 1533

[Traduction]

Le vice-président (M. Roy Cullen (Etobicoke-Nord, Lib.)): La séance est ouverte.

Bonjour, mesdames et messieurs. Nous en sommes à la 22e séance du Comité permanent des transports. Nous sommes ici aujourd'hui pour continuer notre examen des services ferroviaires voyageurs au Canada et des moyens pour revitaliser, raviver et rendre viables les services ferroviaires voyageurs au Canada.

Nous connaissons l'importance du réseau ferroviaire pour les municipalités du Canada. Il relie les villes, mais il y a aussi des services de train de banlieue et toute une foule d'autres répercussions sur les municipalités canadiennes.

Nous sommes donc ravis d'accueillir aujourd'hui les représentants de la Fédération canadienne des municipalités.

Je tiens aussi à souhaiter la bienvenue à des jeunes du Forum des jeunes Canadiens, qui se joignent à nous aujourd'hui. Ils sont venus à Ottawa de toutes les régions du Canada pour observer notre processus politique et y participer. Je leur souhaite donc la bienvenue.

Je crois que M. Knight n'est pas ici aujourd'hui. Qui lancera la discussion de votre côté? Est-ce le maire...

M. Bill Comaskey (maire de Thompson, Manitoba): Bill Comaskey.

Le vice-président (M. Roy Cullen): Monsieur Comaskey, je vous demanderais de bien vouloir présenter vos collègues. Nous accordons normalement de 10 à 15 minutes aux témoins pour présenter leur exposé, puis nous avons une période de questions et de commentaires de la part des membres du comité. Je vous remercie. Vous avez la parole.

M. Bill Comaskey: Merci, monsieur le président. Je suis heureux d'être ici aujourd'hui pour vous parler au nom de la Fédération canadienne des municipalités (FCM). Je suis accompagné aujourd'hui de Fiona Dellar, analyste des politiques à la FCM, et de Daniel McGregor, analyste principal des politiques à la FCM.

Je tiens à saluer la députée de la circonscription de Churchill, Mme Bev Desjarlais, et à la remercier d'être ici. Nous voyons Bev régulièrement.

Mme Bev Desjarlais (Churchill, NPD): Je ne savais pas qu'il allait être ici aujourd'hui.

M. Bill Comaskey: Je ne savais pas non plus que vous seriez ici.

Une voix: Une seule fois.

Des voix: Oh, oh!

M. Bill Comaskey: Je vous transmets aussi les salutations de la ville de Thompson.

M. Stan Keyes (Hamilton-Ouest, Lib.): Elle est rarement là, n'est-ce pas?

M. Bill Comaskey: Elle est souvent là.

M. Stan Keyes: Je vois.

M. Bill Comaskey: Elle est très souvent là.

Mme Bev Desjarlais: À l'épicerie.

M. Bill Comaskey: Oui, nous nous rencontrons tous les jours dans la rue lorsqu'elle est dans sa circonscription.

• 1535

Je vous remercie, monsieur le président, de nous donner cette occasion de vous parler de l'avenir du service ferroviaire voyageurs au Canada, au nom de la Fédération canadienne des municipalités, la FCM.

La FCM est reconnue depuis 1937 comme la voix nationale des administrations municipales. Elle représente les intérêts des municipalités en matière de politiques et de programmes relevant du gouvernement fédéral. Les administrations municipales qui font partie de la FCM représentent plus de 20 millions de Canadiens. Nos membres vont des grandes villes du Canada aux petites localités urbaines et rurales, et comprennent également les 17 grandes associations provinciales et territoriales. Presque toutes les municipalités qui ont perdu le service de VIA Rail dans les années 90 sont membres de la FCM.

La FCM a toujours appuyé le concept d'un service ferroviaire voyageurs rentable d'un océan à l'autre. Dans un pays aussi vaste que le Canada et dont la population est aussi éparse, un réseau de transport efficace, accessible et abordable constitue le lien nécessaire entre les collectivités. Il contribue à forger un sentiment d'identité nationale, qui est essentiel à notre survie comme entité politique.

Dans ce contexte, le transport est plus que le simple déplacement de produits et de voyageurs. C'est la colle qui nous tient tous ensemble. Si nous voulons un service ferroviaire voyageurs vraiment national, il faut un service raisonnable et fiable d'un océan à l'autre. C'est particulièrement important à un moment où les petites localités sont obligées de prendre en main et de gérer les ports et les aéroports dont le gouvernement fédéral se départit.

Les grandes villes voient leurs aéroports et leurs ports cédés à des administrations locales. Les membres du comité savent que ces transactions ne se déroulent pas aussi bien que prévu, en particulier dans le cas de localités marginales qui doivent prendre en main des administrations portuaires canadiennes et des aéroports du réseau national d'aéroports.

Dans le cadre de sa politique nationale des transports, le gouvernement fédéral doit tenir compte de l'incidence qu'ont sur les collectivités la cession, l'abandon ou la réduction des services dans tous les modes de transport simultanément. Nous croyons que vous auriez entendu continuellement ce message si vous aviez tenu des audiences dans toutes les régions du Canada comme nous l'avions suggéré.

Le président-directeur général du CN, Paul Tellier, vous a exhortés à ne pas examiner la situation de VIA isolément, mais à tenir compte de la situation concrète des autres modes de transport. C'est une excellente suggestion. Tout changement apporté dans le réseau ferroviaire voyageurs au Canada survient dans le contexte d'un réseau national de transport qui évolue continuellement et, dans certains cas, dans le désordre. Ce désordre se fait sentir cruellement dans les collectivités qui ont de plus en plus de difficulté à se fier aux services de VIA Rail comme moyen de transport des voyageurs à un moment où l'ensemble des services de transport des voyageurs est chambardé complètement.

Par exemple, bien qu'on maintienne le service ferroviaire voyageurs sur la voie du CN, dans le nord du Manitoba les résidents font face depuis une décennie à une diminution de la fiabilité du service et de sa qualité.

Bien qu'il y ait un horaire régulier pour les trains dans le nord du Manitoba, VIA est rarement en mesure de le respecter. Les trains peuvent avoir d'une heure à 12 heures de retard, et ils sont même occasionnellement annulés. Une telle situation déçoit et dérange les marchands locaux, les résidents, les touristes et les agents de voyage.

Un autre problème découle de la perte d'agents locaux de VIA le long des lignes dans le Nord, car cela signifie que les localités ont dû dépendre des services d'agents établis quatre provinces plus loin. Ces agents connaissent rarement le Nord du Manitoba et ne veulent pas vraiment prendre la peine de chercher où un train peut se trouver ou quand il pourrait arriver à destination.

Enfin, on entend souvent les gens se plaindre que le personnel de VIA est souvent impoli et peu serviable envers les voyageurs. Cela contribue à rendre le service ferroviaire voyageurs moins attrayant, ce qui fait fuir les clients, dont un grand nombre sont des touristes.

Une agence de voyage locale m'a informé qu'elle reçoit continuellement des demandes de groupes qui veulent louer un wagon complet. VIA répond toujours non à ces demandes, même quand le client éventuel est prêt à payer au prix fort la possibilité de garder son groupe ensemble pour un voyage à Churchill, au Manitoba.

Une autre résidente de l'endroit m'a dit qu'elle a eu beaucoup de problèmes avec le service ferroviaire voyageurs. À plusieurs reprises, VIA a annulé des réservations, laissant des gens en plan. Cependant, lorsqu'elle est allée à la gare parler aux employés, on lui a dit qu'il y avait encore beaucoup de places disponibles. Il y a lieu de se demander pourquoi on fait de telles annulations lorsqu'il reste encore des places.

Elle m'a également parlé du cas de touristes américains qui avaient fait des réservations à partir des États-Unis et qui se sont rendu compte à leur arrivée à Thompson qu'on avait annulé leurs réservations.

• 1540

Il arrive aussi très souvent que des touristes soient obligés de voyager dans le wagon à bagages parce qu'on a vendu trop de billets pour le même train.

Le lien ferroviaire est devenu l'un des produits touristiques les plus précieux du Canada, et lorsqu'on refuse de bien loger des touristes, c'est bien mauvais pour tous les touristes, mais aussi pour les exploitants d'entreprises touristiques et pour la réputation du Canada comme destination touristique de choix.

Il faut tenir compte aussi de l'effet qu'a l'abandon du service ferroviaire marchandises sur le service ferroviaire voyageurs. Nous n'avons pas encore constaté pleinement les répercussions de l'abandon de certains services par le CN et le CP sur VIA, qui dépend de ces voies ferrées pour exploiter son service ferroviaire voyageurs, mais cela ne peut être qu'une question de temps. Nous demandons au comité de tenir compte de l'incidence de l'abandon de certaines voies ferrées par le CN et le CP, pendant son examen de l'avenir de VIA.

La Commission royale sur le transport des voyageurs au Canada a conclu en 1992 que le transport des voyageurs par automobile bénéficie annuellement de 3,4 milliards de dollars de subventions gouvernementales. La réduction continue des crédits consacrés par le gouvernement fédéral à VIA Rail abaissera les subventions aux services ferroviaires voyageurs à environ 170 millions de dollars par année d'ici à 1999. Il est clair d'après ces chiffres que tous les modes de transport ne fonctionnent pas sur un pied d'égalité. Le service ferroviaire voyageurs a été miné par le financement accordé continuellement par le gouvernement au transport par automobile, sous forme de financement de l'entretien et de l'amélioration du réseau routier.

La FCM croit que tous les paliers de gouvernement doivent coopérer et conclure une entente sur l'ensemble des services de transport de voyageurs pour le Canada, afin qu'un mode de transport ne nuise pas continuellement à la viabilité d'un autre.

Dans un discours prononcé devant votre comité en février, le ministre des Transports a demandé si nous avions besoin d'un service ferroviaire voyageurs national. La réponse des municipalités des diverses régions du pays est oui, nous avons vraiment besoin d'un service ferroviaire voyageurs national. Ce n'est pas une simple question de sentimentalité ou de nostalgie. Le service ferroviaire voyageurs relie les collectivités et les Canadiens.

Lorsque nous parlons d'un service ferroviaire voyageurs national, nous ne faisons pas seulement allusion au service dans les régions les plus densément peuplées—par exemple dans le corridor Québec-Windsor—ou aux grands itinéraires touristiques comme le trajet entre Vancouver et Calgary; nous parlons également d'un service reliant les petites localités éloignées aussi bien que les grandes agglomérations urbaines. Plusieurs des petites localités, en particulier celles qui sont éloignées, ont déjà ressenti les effets de la réduction du financement de VIA Rail, et il faut absolument éviter qu'elles ne soient assujetties à une érosion plus grande du service ferroviaire voyageur.

Pour de nombreux Canadiens, en particulier ceux de l'Ouest et des provinces Atlantiques, les réductions déjà survenues à VIA ont renforcé leur sentiment d'isolement et de désaffection vis-à-vis de la région centrale du Canada, perçue comme étant de plus en plus arrogante et insensible.

La FCM félicite VIA Rail d'avoir pris la décision de trouver de nouveaux moyens innovateurs pour faire de VIA une entreprise rentable. Les itinéraires à prix élevés pour les touristes et les services transfrontaliers devraient compléter plutôt que remplacer le service ferroviaire national. Un service ferroviaire voyageurs fiable et accessible doit être fourni aux collectivités canadiennes d'un océan à l'autre. Le chemin de fer est le mode de transport interurbain le plus économe sur le plan énergétique et le plus écologique.

Le gouvernement doit reconnaître sa responsabilité de gardien du service ferroviaire voyageurs national. Il faut se rappeler que c'est le gouvernement qui a créé VIA Rail et qu'il est donc responsable de son exploitation. Le ministre des Transports vous a demandé de chercher des solutions créatives aux problèmes qui sévissent dans le service ferroviaire voyageurs du pays. Vous ne pouvez pas compter entièrement sur des intérêts de l'extérieur pour trouver les solutions; ce n'est pas une attitude réaliste ni responsable.

Tout examen de l'avenir d'un service ferroviaire voyageurs doit inclure des évaluations environnementales et économiques honnêtes et transparentes. Il faut tenir compte de l'impact des politiques choisies sur d'autres modes de transport et sur les trois paliers de gouvernement.

On ne peut pas exagérer l'importance de la tâche à accomplir, particulièrement à un moment où le Canada s'est engagé à réduire les émissions de gaz à effet de serre de 6 p. 100 par rapport aux niveaux de 1990 d'ici à l'an 2012. Une diminution des services ferroviaires signifie une augmentation du transport automobile et par conséquent une augmentation de la congestion de la circulation, des émissions de gaz à effet de serre, ainsi que l'accroissement de l'usure de nos routes municipales et provinciales déjà congestionnées et en très mauvais état. Pour que la politique en matière de transport évolue en fonction de principes respectueux de l'environnement, comme le ministre des Transports en a souvent exprimé la volonté, les évaluations environnementales ne doivent pas être faites après coup. Il faut qu'elles fassent partie intégrante de la politique en matière de transport.

• 1545

Tous les choix possibles en matière de transport comportent des coûts et des avantages mesurables sur le plan de l'environnement, mais ils comportent également des coûts et des avantages mesurables sur le plan économique. Un service ferroviaire revitalisé ne doit pas seulement améliorer les contacts entre les Canadiens et les collectivités; il doit aussi fournir des perspectives d'emploi et de développement économique découlant de l'augmentation du nombre de voyageurs, et en particulier de touristes.

Les Canadiens qui font face à une diminution ou à un abandon des services ferroviaires voyageurs dans leur collectivité se tourneront nécessairement vers d'autres formes de transport des voyageurs: l'autobus, la voiture et l'avion, pour la plupart. Ces modes de transport sont plus durs pour l'environnement, et en ce qui concerne les autobus et les voitures, ils sont moins sûrs que le transport ferroviaire et comportent des coûts cachés qui sont énormes pour les gouvernements provinciaux et les administrations municipales, et dont on n'a pas tenu compte.

La diminution des services ferroviaires voyageurs peut réduire les coûts directs pour le gouvernement fédéral, mais les dépenses que cela entraînera pour les gouvernements provinciaux et les administrations municipales, sous forme d'entretien et d'amélioration du réseau routier, vont augmenter. Les provinces et les municipalités dépensent des milliards de dollars pour entretenir et construire des routes capables d'absorber une circulation plus abondante et de résister à la détérioration que causent les véhicules lourds, y compris les autobus.

Un élément qui est relié à la question de l'interdépendance des différents modes de transport est l'intégration multimodale. On ne peut pas examiner les services ferroviaires voyageurs sans tenir compte de leur incidence sur d'autres modes de transport des voyageurs. La FCM estime qu'il est nécessaire d'examiner toute la politique des transports au Canada d'une manière intégrée. L'intégration intermodale est nécessaire pour favoriser l'efficience sur le plan économique et sur le plan des services.

Un voyageur devrait pouvoir passer facilement du service ferroviaire voyageurs à un autre mode de transport. On trouve d'excellents modèles d'intégration intermodale dans toute l'Europe, où dans bien des cas on a intégré les services des billets et de manutention des bagages entre les modes de transport aérien et ferroviaire.

L'intégration entre les réseaux de transport intercités interurbains de transport en commun est également essentielle à l'efficacité de l'ensemble. Tous les voyages interurbains se terminent dans des municipalités, et les voyageurs dépendent énormément d'une forme de transport local pour terminer leur voyage.

Il faudrait dans les grands centres urbains un service de transport ferroviaire rapide à partir des aéroports jusqu'au coeur du centre-ville. Aux aéroports de Dorval et de Pearson, par exemple, les voies ferrées sont littéralement visibles des aérogares. À l'aéroport de Halifax, la voie ferrée se trouve à moins de deux kilomètres de l'aérogare.

Le même principe s'applique aux liens entre le chemin de fer et l'autobus. Il faut encourager les autocaristes à coopérer avec le réseau ferroviaire, au lieu de s'y opposer, en créant des gares intermodales.

Nous reconnaissons que la responsabilité principale dans le domaine des transports en commun doit incomber aux provinces et aux municipalités, mais comme il est nécessaire d'intégrer les services de transport de voyageurs, il est clair que le gouvernement fédéral doit accroître sa participation. La FCM est en faveur d'un mandat statutaire pour VIA, afin de lui donner la souplesse nécessaire pour emprunter de l'argent, trouver des investisseurs privés, et ajouter encore à sa structure existante.

La FCM estime cependant qu'il ne faut pas privatiser complètement VIA. La privatisation totale de la société signifierait certainement qu'une bonne partie du réseau actuel de transport ferroviaire des voyageurs serait abandonné parce qu'il ne serait pas économiquement viable. Dans le secteur privé, les profits passent avant l'intérêt public, et le Canada se retrouverait avec un réseau de voies ferrées exclusivement au service des régions densément peuplées.

Il ne s'agirait pas d'un service ferroviaire national. Nous savons tous qu'aucun service ferroviaire voyageurs national dans le monde ne s'autofinance complètement.

La FCM demande au comité de recommander la présentation d'une mesure législative accordant à VIA Rail un mandat clair et la capacité d'exercer ce mandat.

La mesure législative devrait également prévoir l'existence d'un conseil d'administration et d'une direction interdépendants, ainsi que des objectifs de rendement financier clairement réalisables, et garantir un niveau équitable et suffisant de services ferroviaires voyageurs dans l'ensemble du pays.

Les représentants de VIA ont dit qu'une bonne option serait de donner à VIA le statut de société d'État commerciale. Cela lui permettrait de fonctionner comme une entreprise, car elle aurait accès d'une manière efficace aux marchés financiers et à des partenariats avec le secteur privé. La FCM est en faveur de cette option, à condition qu'elle ne serve pas à estomper la responsabilité ultime du gouvernement fédéral d'assurer pour maintenant et pour l'avenir un service ferroviaire voyageurs national.

• 1550

Même si l'on n'effectuait plus de réductions chez VIA, une diminution de la qualité des services est inévitable si l'entreprise n'a pas les moyens d'acheter du nouveau matériel. Le matériel de VIA est inadéquat depuis trop longtemps. En dépit de remises en état et de modernisations, le matériel vétuste que VIA utilise actuellement sur certains itinéraires coûte cher d'entretien et est sujet à des défaillances aléatoires. Seule une reconstruction complète, ou, encore mieux, le remplacement du matériel, permettra aux services ferroviaires voyageurs de fonctionner au Canada. VIA ne peut pas davantage assurer le service efficace qu'on souhaite avec le matériel dont elle dispose qu'Air Canada pourrait fonctionner avec une flotte de DC-3.

Il faut donner à VIA Rail les moyens et la souplesse nécessaires pour trouver les capitaux dont elle a besoin afin de moderniser son matériel et d'être ainsi en mesure d'assurer un niveau acceptable de services aux Canadiens et d'attirer les voyageurs dont elle a besoin. La FCM estime qu'un service ferroviaire voyageurs efficace, sûr et de haute qualité peut réussir.

Les trains à grande vitesse sont un excellent exemple qui montre l'importance de faire l'acquisition de nouveau matériel pour revitaliser le transport ferroviaire voyageurs au Canada. La FCM soutient depuis longtemps que les trains à grande vitesse sont la pierre angulaire d'un réseau national de transport voyageurs redynamisé. Le recours au TGV dans le corridor Québec-Windsor, et peut-être ailleurs au pays, accroîtrait la satisfaction des clients et le nombre de voyageurs, améliorerait la protection du public et réduirait la congestion des routes, de même que la pollution atmosphérique. Les profits réalisés sur les lignes à grande vitesse pourraient servir à financer le réseau de transport ferroviaire voyageurs dans le reste du pays.

Il faudra un jour ou l'autre que le gouvernement s'engage finalement à assurer le fonctionnement et la viabilité à long terme d'un service ferroviaire national. Depuis de nombreuses années, il se contente de décisions ponctuelles, sans aucun engagement à long terme à l'égard de VIA Rail, et le moment est venu de faire plus.

Nous demandons, non pas un engagement du bout des lèvres, mais une stratégie bien pensée à l'égard de VIA Rail qui définisse le rôle du gouvernement vis-à-vis de la société d'État. Le plan en question devrait prévoir un réseau ferroviaire national qui servirait le pays tout entier et prévoir aussi bien un mandat législatif pour VIA qu'un engagement de la part du gouvernement à lui assurer un niveau de financement constant, qui soit stable et fiable, et ce, sur un certain nombre d'années.

En conclusion, pour qu'elle puisse revitaliser le réseau ferroviaire voyageurs au Canada, VIA doit avoir accès à des fonds d'immobilisations. Le gouvernement peut apporter sa contribution en s'engageant à lui assurer un niveau de financement constant sur le long terme.

Le transport devrait être au nombre des domaines où l'on devrait songer à investir les excédents budgétaires qui devraient bientôt être réalité. L'avenir du transport ferroviaire voyageurs devrait notamment être au haut de la liste.

Merci.

Le vice-président (M. Roy Cullen): Merci beaucoup, monsieur Comaskey.

Vous avez dit dans votre exposé que nous devrions tenir des audiences d'un bout à l'autre du pays. Je voulais simplement vous dire que le comité a précisément l'intention de procéder à une consultation plus exhaustive des Canadiens une fois qu'il aura défini certaines options et que le gouvernement lui aura indiqué ce qu'il pense de ces options.

Je ne sais pas trop si c'est ce que vous vouliez dire, mais je tenais à apporter cette précision.

Nous passons maintenant aux questions. Monsieur Morrison.

M. Lee Morrison (Cypress Hills—Grasslands, Réf.): Merci, monsieur le président, et je vous souhaite la bienvenue, monsieur Comaskey.

Je voudrais vous poser une question de nature assez générale, puis, comme vous êtes de Thompson, je voudrais vous poser des questions plus précises au sujet de la ligne de la Baie.

Je vous pose d'abord la question générale. Dans votre exposé, vous proposez que VIA se trouve des investisseurs privés avec qui elle pourrait collaborer. Je me demande simplement comment vous pensez qu'il serait possible de convaincre qui que ce soit d'investir dans VIA.

Ou bien proposez-vous peut-être que nous adoptions le modèle britannique en vertu duquel une multitude de petites lignes ferroviaires à capitaux privés sont fortement subventionnées par le gouvernement? Ainsi, au lieu de subventionner l'État, on ne fait que subventionner les intérêts privés. Que proposez-vous au juste?

• 1555

M. Bill Comaskey: Je crois qu'il y a une étude qui a été faite en 1995, et je cite en exemple le corridor Québec-Windsor. Bombardier s'est dit intéressé par ce projet et y participe.

Nous estimons, par ailleurs, que le réseau doit prévoir une part d'interfinancement. Certaines des régions plus isolées et moins peuplées devront pouvoir être financées à même les profits des marchés plus lucratifs. Si ce principe est retenu et appliqué, les investisseurs privés voudront certainement avoir un rendement sur leur investissement, mais nous estimons que cela pourrait se faire.

Le gouvernement ne peut pas s'en laver les mains. Il n'existe pas à notre connaissance de système qui soit entièrement rentable.

M. Lee Morrison: Je passe maintenant à mes questions plus précises. Encore une fois, puisque vous êtes de Thompson, vous aurez sans doute compris que la ligne de la Baie est peut-être la plus délicate à laquelle le comité doive s'attaquer. À cause de toutes ces opérations, il s'agit d'une ligne qui ne peut guère être remplacée facilement, puisqu'il n'existe pas de solution de rechange.

Dans le contexte de l'interfinancement, cette ligne est aussi de loin la plus coûteuse de toutes les opérations de VIA. Pouvez- vous me dire comme ça combien de voyageurs utilisent la ligne de la Baie un jour donné et, plus précisément parce que vous êtes de Thompson, combien de voyageurs descendraient en moyenne chez vous un jour donné? Avez-vous une idée des nombres?

M. Bill Comaskey: Je ne peux vous donner de chiffre exact, mais il y a bien des gens qui utilisent la ligne de la Baie, non pas seulement pour se rendre à une destination touristique comme Churchill, mais comme leur seul et unique moyen de transport.

Il suffit que je me rende à la gare, ou encore que notre députée, Bev Desjarlais, s'y rende pour qu'on voie bien des gens assis dehors sur leurs sacs à dos ou sur leurs manteaux ou directement sur le sol et qui attendent de voir si le train passera.

Dans notre mémoire, nous décrivons des exemples pour montrer qu'on n'arrive pas toujours à avoir une place dans le train. Certains doivent monter dans le wagon à bagages parce qu'il n'y a pas assez de place pour eux dans le wagon-voyageurs. Je ne peux pas vous donner de chiffre exact, mais cela vous donne une idée du nombre de personnes qui utilisent le train.

Par ailleurs, le représentant de VIA pour la commercialisation dans les Prairies nous dit qu'il n'arrive pas à avoir assez de wagons. S'il pouvait en obtenir assez de l'administration centrale, il pourrait en faire la commercialisation sur la ligne.

Il semble qu'on ait une image faussée de la réalité. J'ai entendu des représentants de VIA dire qu'ils ne recouvraient que 17c. sur le dollar. Et qui donnaient l'impression que nous avons de la chance, dans le Nord du Manitoba ou dans le Nord du Canada, d'avoir une ligne ferroviaire et que nous sommes fortement subventionnés par le reste du pays. Puis, j'en entends d'autres dire qu'il nous faut 8 milliards de dollars pour des trains à grande vitesse entre Windsor et Québec.

Pour certaines régions du pays, il s'agit d'une question de développement économique; pour les gens du Nord, il s'agit d'une question de nécessité.

M. Lee Morrison: En partant donc du principe, principe auquel je souscris, qu'il s'agit d'un service nécessaire, ne devrions-nous pas peut-être envisager quelque chose d'un peu plus économique que des trains complets—des autorails, par exemple? Ne pourrait-on pas envisager comme solution pratique à ce problème des déplacements locaux dont vous parliez, en supposant qu'Omnitrax soit d'accord, d'accrocher tout simplement des wagons-lits et un wagon-restaurant à un train céréalier, quitte à ce qu'il faille deux ou trois jours pour se rendre à Churchill?

À votre avis, une solution comme celle-là est-elle envisageable ou viable? Pour ce qui est tout particulièrement de la dernière proposition, il ne coûterait pratiquement rien de faire tirer ce train de voyageurs par un train céréalier. Vos collaborateurs ou vous-même avez-vous songé à quelque chose de ce genre?

M. Bill Comaskey: Nous sommes prêts à accueillir toutes les propositions, mais, de grâce, ne nous traitez pas comme de la marchandise.

• 1600

Il est arrivé que des gens demandent à aller à Churchill pour voir les baleines et les ours. On acceptait d'en prendre un certain nombre, mais on ne pouvait garantir que 11 places pour le retour. Toutes les propositions valables... peu importe, dans la mesure où il ne s'agit pas d'un service aléatoire. Il nous faut un service fiable et des trains qui arrivent à l'heure.

À notre avis, VIA a l'obligation d'assurer le service voyageurs, et je ne crois pas que la société reçoit l'appui voulu de la part de son administration centrale. En outre, étant donné les réductions budgétaires qui lui ont été imposées, elle ne peut tout simplement pas affecter le matériel nécessaire à la ligne.

Alors, toutes les propositions qui permettraient d'accroître le nombre de voyageurs sur la ligne... pas seulement nous dire qu'il nous faut nous contenter de ce que nous avons ni réduire le service que nous avons à l'heure actuelle. Il y a des gens qui viennent à Thompson pour un examen médical. S'ils ratent le train ou n'arrivent pas à monter dans le wagon à bagages, ils ne peuvent tenir leur rendez-vous avec leur médecin. S'ils réussissent à se rendre à Thompson et qu'ils n'arrivent pas à monter dans le wagon à bagages pour le retour, ils doivent rester encore deux jours.

Le vice-président (M. Roy Cullen): Merci, monsieur Morrison.

Monsieur Calder.

M. Murray Calder (Dufferin—Peel—Wellington—Grey, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président.

Bill, je vois que dans votre rapport vous dites que si nous améliorons le transport ferroviaire voyageurs, quel que soit le moyen que le comité pourrait finalement recommander pour ce faire, il y aura sans doute une réduction correspondante de la congestion routière et, partant, des gaz à effet de serre, et tout le reste... En fait, quand je siégeais au groupe de travail sur le CN, j'ai lu un rapport où l'on disait que chaque dollar investi dans l'infrastructure ferroviaire se traduirait par des économies d'environ 4 $ ou 5 $ pour l'infrastructure routière. Êtes-vous aussi de cet avis?

M. Bill Comaskey: Oui.

M. Murray Calder: Très bien. Dans ce cas, si nous trouvons le moyen d'améliorer le service ferroviaire voyageurs et que cela permet aux municipalités d'économiser l'équivalant de 4 à 5 $ au niveau du réseau routier pour chaque dollar investi, seriez-vous prêts à participer financièrement à cet effort de modernisation du service voyageurs?

M. Bill Comaskey: Non.

M. Murray Calder: Pourquoi?

Une voix: C'est là que rien ne va plus.

M. Bill Comaskey: Aujourd'hui, on essaie de tout faire payer par les municipalités. Les gouvernements s'autocongratulent parce qu'ils équilibrent leurs budgets. C'est ce qu'ont toujours fait les municipalités. Pour nous, ce n'est pas un exploit.

Je le dis avec tout le respect que je vous dois. Je suis certain que nombre d'entre vous ont eu l'occasion de servir au niveau municipal. Vous savez comment c'est. Nous n'estimons pas avoir la responsabilité de lever des impôts pour financer l'infrastructure routière.

M. Dan McGregor (analyste principal des politiques, Fédération canadienne des municipalités): Je pourrais peut-être ajouter un mot. Le rapport annuel de Transports Canada publié l'année dernière indiquait que les dépenses fédérales en matière de transport étaient passées d'un total de 4.1 p. 100 à 1,8 p. 100 en 1996-1997. Pendant pratiquement cette même période, les dépenses des municipalités en matière de transport sont passées de trois milliards de dollars en 1981-1982 à 6,5 milliards de dollars en 1993-1994. En fait, si on considère les dépenses des trois paliers de gouvernement, les dépenses fédérales ont diminué tant en termes réels qu'en dollars constants. Les dépenses des provinces et des municipalités ont augmenté d'une manière phénoménale, largement à cause du retrait du gouvernement fédéral de son rôle traditionnel de subventionnaire du transport aérien, des installations portuaires, du transport maritime. La liste n'est pas exhaustive.

Or, que nous proposez-vous? De dépenser encore un peu plus? Je crois que le point de vue du maire est celui de notre conseil d'administration. On ne cesse de demander une participation accrue aux municipalités, qui tirent leurs recettes de l'impôt foncier, impôt beaucoup moins équitable que l'impôt sur le revenu, qui devrait être la source de financement utilisée par le gouvernement fédéral.

M. Murray Calder: Le programme d'infrastructure qui vient de se terminer a été accueilli avec beaucoup d'enthousiasme par les municipalités de ma circonscription. C'est à un programme de ce genre que je pense, programme unissant les efforts des trois paliers de gouvernement pour un résultat profitable pour tous.

M. Bill Comaskey: Nous n'en disconvenons pas. C'était un excellent programme, mais le qualifier de programme tripartite est assez rare.

• 1605

Encore une fois, sauf votre respect, au départ c'était un programme d'infrastructure fédéral-municipal, qui par la suite est devenu un programme d'infrastructure fédéral-provincial-municipal. Chez nous, dans notre ville, nous avons tout de suite dit oui. Je vais m'en servir comme exemple. Nous nous sommes lancés, et pour ce qui est de nos projets nous avons payé plus de notre tiers. Au départ les dépenses étaient censées être partagées en trois. Il s'agissait des infrastructures d'une subdivision qui s'étaient détériorées au point de devoir être remplacées, et, tout compte fait, c'est la municipalité qui a pratiquement payé la facture. Mais quand ils nous ont présenté la plaque commémorative, il n'était question que des travaux subventionnés par le fédéral et le provincial dans le cadre du programme d'infrastructure. Quoi qu'il en soit, vous avez raison, les municipalités ont beaucoup apprécié ce programme, et le conseil d'administration de la Fédération canadienne des municipalités a été déçu de ne rien voir sur ce sujet dans le dernier budget.

M. Murray Calder: D'accord, ça me suffit.

Le vice-président (M. Roy Cullen): Merci, monsieur Calder.

Monsieur Crête.

[Français]

M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ): Pendant que j'écoutais votre présentation, je pensais à une publicité que j'ai vue en Europe: quelqu'un se faisait cuire un oeuf mollet et, au lieu de se servir de sa montre pour surveiller l'heure, il surveillait le passage du prochain train qui devait avoir lieu dans trois minutes, le temps qu'il fallait pour cuire son oeuf. Si cela s'était passé au Canada, je pense que c'est l'ensemble du poulailler qu'on aurait utilisé parce que la fiabilité des trains au Canada pose un problème majeur.

À La Pocatière, j'ai souvent attendu un train qui n'est arrivé qu'à trois heures du matin alors qu'il aurait dû théoriquement être là à 21 heures, 22 heures ou 24 heures. Quand cela arrive deux ou trois fois, vous finissez par prendre votre voiture.

Il y a quelques années, on avait prévu fermer la ligne qui se rendait jusqu'à Gaspé, au Québec. Il y a eu des audiences publiques et on s'est rendu compte que cette ligne pouvait avoir une vocation touristique. Il semble qu'aujourd'hui, à moins que je ne me trompe, la ligne fait des profits ou, en tout cas, réussit à se maintenir de façon assez correcte.

Je vais maintenant vous poser une question sur quelque chose qui ressort un peu de votre mémoire. Ne pensez-vous pas que la solution pour atteindre l'objectif du financement serait premièrement d'avoir un conseil d'administration de VIA Rail qui regrouperait des gens des secteurs de l'industrie touristique, de l'environnement, des municipalités, des provinces, des experts de l'industrie ferroviaire, des utilisateurs—disons que ma liste n'est pas exhaustive—qui représenteraient l'ensemble de l'industrie et qui apprendraient à travailler ensemble et à avoir des intérêts communs dans le but de développer des programmes de financement à moyen terme?

Deuxièmement, ne faudrait-il pas que le mandat soit clair? C'est-à-dire que les lignes rentables auraient un mandat de rentabilité, mais le gouvernement s'engagerait à donner une compensation aux lignes moins rentables. Ne pensez-vous pas que ce sont les premiers gestes qui devraient être posés? En tout cas, il me semble que c'est ce qui ressort de votre mémoire. Il faudrait laisser une place au gouvernement fédéral pour éviter que ne se reproduise ce qui s'est passé dans le cas de l'aéroport de Montréal, où on a tellement étiré l'élastique qu'il s'est cassé. Pensez-vous qu'il serait intéressant qu'on fasse des recommandations en ce sens dans notre étude?

[Traduction]

M. Bill Comaskey: Je crois que c'est une excellente recommandation. Même dans le Nord du Québec—je ne parle plus au nom de la Fédération canadienne des municipalités, mais de Transport 2000... J'ai participé à certaines des réunions, et nous sommes membres participants. Je connais un peu les problèmes du service ferroviaire dans le Nord du Québec.

Pour revenir à l'énoncé de position, nous avons dit que nous serions d'accord pour mettre en place un conseil d'administration qui aurait la possibilité de prendre des décisions quant à la façon dont le service serait dispensé. Pour ce faire, nous croyons que le gouvernement fédéral doit donner à ce conseil d'administration un mandat législatif et peut-être même créer une société d'État. Mais je suis d'accord avec vous.

[Français]

M. Paul Crête: D'autre part, le commerce en Amérique du Nord s'effectue de plus en plus du nord vers le sud. Il y a le volume traditionnel d'est en ouest, mais il y a de plus en plus de volume nord-sud. Est-ce qu'une politique de transport ferroviaire ne devrait pas, même au niveau du transport des personnes, tenir compte de cet élément et favoriser, au cours des 10 ou 15 prochaines années, les investissements en infrastructure pour répondre à cette exigence du développement nord-sud?

• 1610

La croissance du développement nord-sud est beaucoup plus importante que celle du développement est-ouest.

[Traduction]

M. Bill Comaskey: C'est également une excellente suggestion. À la fin de mai, il y aura à Winnipeg un sommet dont l'hôte sera le maire Susan Thompson. On y discutera du réseau de transport nord-sud, depuis le Mexique jusqu'au port de Churchill, et même au-delà, en passant par le centre des États-Unis, Winnipeg et Thompson. Nous y voyons une excellente occasion de renforcer le transport nord-sud au Canada. Je demanderais donc au comité d'en tenir compte dans ses délibérations.

[Français]

M. Paul Crête: J'ai une dernière petite question. Est-ce que vous avez des représentations de vos membres ou de la population au sujet du bilinguisme dans le réseau de VIA Rail? Pour ma part, quand j'ai pris le train de VIA Rail, j'ai le plus souvent constaté que le service en français, même dans l'espace qui traverse le Québec, était inexistant.

M. Dan McGregor: Je voudrais répondre à cette question et vous dire que nous n'avons eu aucun commentaire à cet égard jusqu'à maintenant.

M. Paul Crête: Merci.

[Traduction]

Le vice-président (M. Roy Cullen): Très bien, monsieur Keyes.

M. Stan Keyes: Merci, monsieur le président.

Monsieur Comaskey, je vous remercie pour votre exposé. Il comporte trois points que j'aurais envie de contester. Je ne prendrai pas le temps du comité pour les contester tous, mais je vais en contester un. Mais premièrement, sur l'itinéraire passant par Thompson et votre localité, quel est le pourcentage des touristes, par opposition à ceux qui font la navette, parmi les utilisateurs de ce service?

M. Bill Comaskey: C'est très limité actuellement, parce que l'on ne fait aucune tentative, aucun effort, pour mettre en marché cette destination.

M. Stan Keyes: Vous parlez de mettre en marché pour attirer des touristes ou des navetteurs?

M. Bill Comaskey: Nous chercherions à attirer les touristes, mais s'il y a plus de navetteurs, tant mieux, cela répondra aux besoins. Le tourisme est une industrie en pleine croissance. On n'a pas encore exploité ce marché.

M. Stan Keyes: Si le tourisme est en pleine croissance et si les touristes représentent la majeure partie des voyageurs qui pourraient se rendre dans votre localité, serait-il possible, d'après vous, pour le gouvernement fédéral d'offrir ce tronçon au secteur privé et de le vendre à quiconque serait prêt à y faire rouler un train de tourisme à destination de Thompson?

M. Bill Comaskey: Non.

M. Stan Keyes: Pourquoi?

M. Bill Comaskey: À cause de l'argument que VIA va invoquer au sujet du recouvrement des coûts. Si l'on nous disait aujourd'hui que le coût d'un train entre Winnipeg et Churchill s'élève à 17c. et si nous utilisons depuis Borden...

M. Stan Keyes: Parlons chiffres, monsieur Comaskey. À part les touristes, combien de gens utiliseront ce train?

M. Bill Comaskey: Beaucoup, parce qu'il y a déjà des gens qui voudraient se rendre dans leur localité et qui ne trouvent pas de place en pleine saison touristique.

M. Stan Keyes: Vous dites «beaucoup», mais je voudrais que vous soyez plus précis. Beaucoup, ce pourrait être 100.

Mme Bev Desjarlais: Des milliers, des milliers.

M. Stan Keyes: Cela pourrait coûter moins cher de donner une Chevrolet à chacun au lieu d'exploiter une voie ferrée; alors soyons précis.

M. Bill Comaskey: Des milliers. Je n'ai pas les chiffres sous la main en ce moment, mais le nombre de personnes qui se rendent à Churchill chaque année est connu. Beaucoup d'entre eux doivent attendre leur tour parce qu'il n'y a pas de place à bord du train, et beaucoup de gens qui voudraient rentrer chez eux, dans d'autres localités, n'arrivent pas non plus à monter à bord du train. Il est donc très difficile de mesurer exactement combien de gens l'utiliseraient.

M. Stan Keyes: D'accord.

Vous parlez à titre de représentant de localités et de municipalités d'un bout à l'autre du Canada, et non pas seulement de votre propre localité. À la page 11, vous dites que, d'après la FCM, un service ferroviaire voyageurs efficace, sûr, rapide et de la meilleure qualité sera couronné de succès. Comment définissez-vous le succès?

M. Bill Comaskey: Cela dépend du marché. Je dois vous donner une réponse franche au sujet du projet de train à grande vitesse dans le corridor Québec-Windsor. Je ne suis pas en désaccord avec la politique actuelle de la FCM à ce sujet, mais j'ai des objections à dépenser huit milliards de dollars et à mettre...

• 1615

M. Stan Keyes: Laissons de côté cette extrémité. Disons seulement que nous allons améliorer le service ferroviaire voyageurs grâce à de meilleures voitures, etc., des horaires réguliers, et tout cela, entre Toronto et Montréal, dans le corridor. Comment définiriez-vous le succès?

M. Bill Comaskey: Ce serait si le client est satisfait et s'il paye le coût entier du service.

M. Stan Keyes: Pensez-vous que les voyageurs seraient plus nombreux?

M. Bill Comaskey: Oui, je le crois.

M. Stan Keyes: Comment le savez-vous? D'après l'expérience à l'étranger... par exemple, même s'il y a 8 millions d'habitants à Paris seulement, et même si le gouvernement subventionne le service ferroviaire à hauteur de 2,5 milliards de dollars par année, on n'arrive pas à convaincre plus de 7 p. 100 du public voyageur à prendre le train, parce que les gens adorent la voiture et adorent prendre l'avion. Alors, comment pouvez-vous dire qu'il y aurait plus de clients si, dans un pays comme la France, où le gouvernement s'endette et dépense 2,5 milliards de dollars par année, il y a seulement 7 p. 100 de la population qui prend le train?

M. Bill Comaskey: Mais actuellement, c'est tout un événement que de monter à bord du train.

M. Stan Keyes: Un événement?

M. Bill Comaskey: Oui, un événement. Dans notre mémoire, nous disons que s'il y avait des liaisons intermodales... Actuellement, les gens qui voyagent par avion ou par d'autres modes de transport—pour prendre le train, il faut planifier son affaire.

M. Stan Keyes: Mais en France toutes ces liaisons intermodales existent. On peut descendre de l'avion à l'aéroport Charles-de- Gaulle et monter à bord d'un train pour se rendre directement à destination. Malgré cela, les gens n'utilisent pas le train, mais vous, vous dites qu'ils le feront au Canada. Pourquoi le feraient- ils au Canada, alors qu'ils ne le font pas en France, où il y a tout ce qu'il faut, la population, la masse critique et l'argent? Malgré tout, les gens n'utilisent pas le train.

M. Dan McGregor: Il faut voir cela sous l'angle de l'infrastructure de transport diversifiée qu'un pays veut avoir. On peut voir cela sous divers angles. Par exemple en fonction de ce que les gens sont prêts à payer sur le marché libre, mais il y a aussi d'autres mesures, par exemple l'aspect environnemental. M. Calder a soulevé tout à l'heure la question du coût de l'infrastructure.

Si la France dépense 2,5 milliards de dollars par année pour subventionner le transport ferroviaire des voyageurs, la question est de savoir combien d'argent cela permet d'économiser pour l'infrastructure routière. La France est un État unitaire, de sorte que ce n'est pas aussi compliqué que dans notre pays.

M. Stan Keyes: Les économies sont de zéro.

M. Dan McGregor: Comment le savez-vous? Combien de milliers...

M. Stan Keyes: Parce que leur réseau routier est actuellement saturé.

M. Murray Calder: C'est vrai.

M. Dan McGregor: Mais combien leur faudrait-il dépenser en plus si personne ne prenait le train?

M. Stan Keyes: Donc, la position de la FCM est qu'il n'y a rien de mal à dépenser 2,5 milliards de dollars par année pour subventionner un service ferroviaire voyageurs qui n'attire pas plus de 7 p. 100 de l'ensemble du public voyageur?

M. Dan McGregor: Nous ne commentons pas la politique française.

M. Stan Keyes: D'accord; alors ramenons ces chiffres à l'échelle du Canada. Êtes-vous prêts à dépenser des centaines de millions de dollars par année pour obtenir que seulement 4 p. 100 des voyageurs prennent le train?

M. Dan McGregor: Ce que nous...

M. Stan Keyes: Est-ce bien ce que vous êtes en train de me dire?

M. Dan McGregor: Non, nous avons constamment dit qu'à notre avis les trois niveaux de gouvernement devraient se consulter et essayer de définir quel devrait être le poids relatif du transport des voyageurs au Canada. Cela n'a jamais été fait.

Chose certaine, nous sommes prêts à venir en discuter. Nous l'avons offert à plusieurs reprises. Nous sommes directement visés. Comme l'a fait remarquer la Commission royale sur le transport des voyageurs au Canada, le transport des voyageurs par automobile est subventionné au rythme de 3,4 milliards de dollars par année au Canada. Le transport des voyageurs par avion reçoit près d'un milliard de dollars de subventions par année, tandis que maintenant le mode ferroviaire ne reçoit plus que 170 millions de dollars par année. On peut donc difficilement dire que les règles du jeu sont équitables au Canada.

Qu'est-ce qui vient en premier, la poule ou l'oeuf?

M. Stan Keyes: C'est pourquoi je dis ce que je dis. J'essaie de vous expliquer pourquoi les choses sont comme elles sont.

M. Dan McGregor: Oui, mais peut-être que si les règles du jeu étaient un peu plus uniformes, nous ne serions pas en train d'avoir cette discussion.

Le vice-président (M. Roy Cullen): Merci, monsieur Keyes.

Madame Desjarlais.

Mme Bev Desjarlais: Je veux donner un peu de répit à M. Comaskey. Comme vous venez de Thompson et moi aussi, on s'imagine probablement que nous sommes toujours du même côté. Je tiens à vous assurer que ce n'est pas toujours le cas. Mais sur cette question, nous sommes absolument sur la même voie. Je vais donc prendre le relais, et je ne voudrais pas que l'on croie que nous avons mijoté tout cela ensemble. Ce que vous dites, j'aurais pu tout aussi bien le dire moi-même, car je sais quelles sont les conséquences pour la circonscription.

• 1620

Je peux répondre, peut-être pas avec des chiffres précis, à ce que M. Comaskey disait à propos des gens qui ne trouvent pas de place à bord du train. Il y a cinq, six ou sept localités le long de la ligne de la Baie en direction de Churchill; pour ces gens-là, le train est leur seul mode de transport. Il y a ici ou là un minuscule aéroport. Leur seul moyen d'aller et de venir, c'est le train, et il n'y en a que deux par semaine.

Il y a dans ces localités des gens qui doivent aller et venir, pour faire des achats ou pour un rendez-vous chez le médecin, et si les trains sont remplis de touristes ils n'ont pas de place, ou bien ils doivent se contenter des wagons à bagages, ou parfois on les fait monter à côté de l'orignal qu'on a ramassé et qu'on veut débarquer plus loin le long de la ligne. Voilà la réalité

On nous dit qu'il faudrait des chiffres précis... Je suis certaine que VIA connaît passablement bien les chiffres. Je pense que ce serait essentiellement les habitants de ces localités qui utiliseraient ce train, car c'est leur seul moyen de transport, et l'avion coûte très cher.

À part cela, je sais que vous êtes ici à titre de représentants des municipalités de l'ensemble du Canada. Je sais qu'un certain nombre de municipalités des provinces de l'Ouest, même si elles sont mieux desservies par le réseau routier que certaines localités éloignées, ont ressenti durement la perte du service ferroviaire, parce que nous avons une population vieillissante. J'ignore s'il en a été question durant les discussions avec les municipalités, mais a-t-on songé que le vieillissement de la population pourrait entraîner un usage accru du transport ferroviaire?

M. Bill Comaskey: Nous n'en avons pas discuté au conseil de la FCM, mais c'est assurément un point intéressant, et nous en prenons bonne note.

Mme Bev Desjarlais: Il en a été question durant les discussions que j'ai eues avec d'autres intervenants, et je voulais savoir si l'on avait étudié la question.

Très bien. Merci.

M. Bill Comaskey: Merci.

Le vice-président (M. Roy Cullen): Monsieur Bailey, vous avez la parole.

M. Roy Bailey (Souris—Moose Mountain, Réf.): Merci, monsieur le président.

Nous avons entendu devant notre comité, monsieur le maire, des représentants du CN, du CP, de VIA, des experts-conseils. Les jeunes ici présents s'aperçoivent sans doute qu'il y a du vrai dans ce vieil adage selon lequel l'existence même du Canada est un péché contre la géographie ou un péché contre nature et qu'il n'y a aucun autre pays dans le monde qui a les problèmes de transport particuliers que nous avons. Je pense qu'il faut être réaliste.

Nous ne sommes pas les seuls à avoir des problèmes de transport, mais je suis d'accord avec ce que vous dites. Mon collègue et moi-même sommes sur le point de perdre... Comme je le disais au comité il y a quelque temps, dans deux ans on pourra venir prendre notre acier. Ils peuvent installer une voie toute neuve de Windsor à Montréal, et nous, nous allons donner nos voies à VIA Rail, ce qui leur permettra d'économiser beaucoup. Nos collectivités sont perdantes à cause de l'abandon des voies ferrées.

Je suis grandement préoccupé par votre groupe. Vous avez répondu à la question en disant qu'il fallait payer tout en entier. Maintenant, si vous étudiez l'histoire des transports au Canada, que ce soit le train ou la route, l'usager ne paie jamais le coût entier. Que ce soit bien clair.

Quant à une société d'État qui aurait plus de succès... je pense que je dois contester cela, Bill, pour la raison suivante. En Saskatchewan, nous avons tenté d'établir un service d'autobus, la Saskatchewan Transportation Company, et même cette compagnie perd de l'argent et a perdu beaucoup d'argent.

Quant à l'argument que vous avez soulevé au sujet des routes et des dépenses consacrées au réseau routier, le gouvernement fédéral et la province de la Saskatchewan ont financé, à même la taxe sur le carburant, environ 5 p. 100 des routes. Par conséquent, on ne peut pas dire que les gens qui roulent sur nos routes ne les payent pas. La moitié de chaque litre d'essence que je mets dans ma voiture sert à payer les routes, ou devrait servir à financer les routes, et il y a donc une taxe élevée sur la route.

Je pense que votre association devrait faire attention de ne pas laisser de côté les très fortes dépenses imposées à chaque utilisateur de la route, parce que nous payons.

J'en reviens à ceci. En tant que représentant de votre association, comment comptez-vous desservir toutes les régions du Canada sans que le gouvernement fédéral verse des milliards et des milliards de dollars? Je ne crois pas que ce soit possible.

• 1625

Le défi que notre comité doit relever, c'est qu'il doit se pencher sur vos problèmes, les problèmes que mon collègue a invoqués dans le Nord, mais si nous voulons réaliser le rêve de Transport 2000, il n'y aura pas assez d'argent à Ottawa au cours des 20 prochaines années pour s'en rapprocher de façon réaliste, et je pense que vous en conviendrez.

M. Bill Comaskey: Je voudrais qu'il n'y ait pas de malentendu. Quand j'ai dit que les usagers du système de transport devaient payer le coût entier, ce n'est pas ce que je disais. Je parlais du train à grande vitesse entre Québec et Windsor. Il devrait pouvoir subventionner certaines autres lignes.

Il faudra que le gouvernement soit présent, et j'irais même jusqu'à dire qu'il faudra que d'autres niveaux de gouvernement prennent des engagements pour ce qui est de subventionner le service ferroviaire voyageurs. Je tiens à apporter cette rectification, si je m'étais fait mal comprendre.

M. Roy Bailey: Dans votre réponse à M. Keyes, quand M. Keyes vous a demandé comment vous définiriez le succès ou un service viable, vous avez dit que c'était un service qui faisait ses frais. Je comprends ce que vous voulez dire. Je ne vois aucune liaison au Canada qui fait ses frais comme tels.

M. Bill Comaskey: Non.

M. Roy Bailey: Cela n'arrive même pas dans les régions où il y a des embouteillages.

J'en reviens à ceci. Que propose votre organisation pour répondre à toutes les demandes qui ont été formulées devant le comité? À votre avis, que devrait faire le gouvernement fédéral, que devrait faire le Canada, compte tenu du montant d'argent qu'il faudrait investir là-dedans? Avez-vous essayé de chiffrer tout cela?

M. Bill Comaskey: Nous ne l'avons pas fait. Comme M. McGregor l'a dit, nous, comme niveau de gouvernement, nous sommes tout à fait disposés à discuter avec les deux autres niveaux de gouvernement. Je vous ferai remarquer que beaucoup trop souvent on nous laisse à l'écart, et quand on nous demande enfin notre avis la décision a déjà été prise. Nous voudrions être parties prenantes, mais cela ne veut pas dire que nous sommes prêts à faire un chèque.

Vous avez absolument raison de dire que la FCM a été à l'avant-garde du programme national d'infrastructure. Je pense qu'on a estimé à 20 milliards de dollars le coût de réparation des routes et des ponts en mauvais état. C'est regrettable qu'on n'ait pas reconduit ce programme dans le dernier budget, et nous exhortons le comité à en faire mention également dans son rapport.

Le vice-président (M. Roy Cullen): Merci, monsieur Bailey.

Ce n'est pas conforme aux règles, mais, avec l'indulgence de M. Casey, je voudrais donner la parole à M. Nault, et ensuite à M. Casey.

M. Bill Casey (Cumberland—Colchester, PC): Ça va.

M. Robert D. Nault (Kenora—Rainy River, Lib.): Merci.

Ma question est très précise. À la page 9, vous dites que «la FCM préconise de donner à VIA un mandat législatif qui lui donnerait la souplesse voulue pour emprunter de l'argent, trouver des investisseurs privés et renforcer sa structure actuelle». Plus loin, vous dites que «la FCM fait toutefois une mise en garde contre la privatisation complète de VIA».

Dois-je déduire de cette déclaration que vous êtes contre l'idée de privatiser entièrement la société VIA actuelle, mais pas contre la privatisation de certaines lignes? Je pose la question parce que, pour être logique, vous dites qu'il faudrait autoriser la société à emprunter et trouver des investisseurs privés. Puis à la fin du paragraphe vous dites que nous savons tous qu'aucun service voyageurs national dans le monde n'est entièrement autofinancé.

En réalité, quelle personne dotée du moindre jugement voudrait investir dans cette entreprise, à moins qu'on ne change le système?

J'ai l'impression—et je voudrais m'en assurer—que la Fédération souhaite une certaine forme de privatisation; par exemple, un train touristique qui dessert le Nord du Manitoba. Cela ne règle en aucun cas le problème des besoins des voyageurs locaux. Il est tout à fait possible de s'assurer que les deux marchent de pair, ou on peut exploiter deux trains distincts.

En fait, si je suis un homme d'affaires et que je pense pouvoir bien gagner ma vie en exploitant un petit train touristique pendant l'été dans le Nord du Manitoba, pourquoi vous opposeriez- vous à ce projet, en tant que dirigeant municipal dans la région en question?

• 1630

Je suis cet exemple parce que quelqu'un a demandé si vous autoriseriez une entreprise à soumissionner pour exploiter un train privé dans le nord du Manitoba, et vous avez répondu qu'il n'en était pas question. Je suis un peu surpris. Étant moi-même originaire du Nord, je sais que le développement économique fait cruellement défaut dans le nord de l'Ontario, tout comme dans le nord du Manitoba.

J'aimerais obtenir des précisions sur la position de la Fédération canadienne des municipalités par opposition à celle du maire de Thompson.

M. Bill Comaskey: Merci de votre question.

Nous ne sommes pas partisans de la privatisation.

M. Robert Nault: Ce n'est pas ce que vous dites dans le mémoire.

Je comprends votre point de vue, et vous pouvez donner votre avis personnel, mais si vous parlez au nom de la Fédération, je veux savoir quelle est la position de cet organisme qui représente une vingtaine de millions de gens. Il est dit dans le mémoire que vous espérez trouver des investisseurs privés et miser sur la structure actuelle, mais que la Fédération fait toutefois une mise en garde contre la privatisation de tous les services de VIA.

Cela nous porte à croire que vous êtes en faveur de la privatisation partielle dans certains secteurs. Est-ce le cas?

M. Bill Comaskey: Ce n'est pas ce que nous voulons dire.

S'agissant de l'investissement privé, nous sommes pour des investissements dans certains secteurs de la société, mais contre l'idée de privatiser certains secteurs du marché, car cela remettrait en cause les lignes les plus éloignées, comme celle de la Baie. Qui alors assurerait le service sur cette ligne?

M. Dan McGregor: Ce que nous essayons de faire, monsieur Nault, c'est de faire preuve d'ouverture d'esprit à l'égard des partenariats entre les secteurs public et privé. En fait, pour certaines lignes, ce serait plus viable que pour d'autres. Nous voulons toutefois maintenir tout le réseau sous l'égide d'une seule société du secteur public de façon à pouvoir préserver l'intérêt public pour ce qui est de l'interfinancement.

La construction, la propriété, l'exploitation et la cession, comme cela s'est fait par exemple pour le pont de la Confédération... nous comptons faire preuve d'ouverture d'esprit face à ces modèles de partenariat entre le secteur public et le secteur privé. Ce n'est pas une privatisation, à notre avis. Nous considérons qu'il s'agit d'une coentreprise ou d'un partenariat entre les secteurs public et privé, dans le cadre duquel la société continuera d'appartenir au secteur public.

M. Robert Nault: J'ai beaucoup de mal à vous suivre, et je pense que vous devriez aller demander au conseil d'administration d'éclaircir les choses pour ma gouverne.

J'ai visiblement mal interprété la teneur de votre mémoire. Vous pouvez sans aucun doute commercialiser certaines lignes, comme nous l'avons fait pour les aéroports, et nous les citons en exemple. Ils continuent d'appartenir au gouvernement fédéral, mais ils sont commercialisés et exploités au niveau local parce que les entreprises locales veulent en général jouer un plus grand rôle pour garantir leur viabilité et mieux comprendre comment le système fonctionne.

Si nous voulions commercialiser certaines lignes, mais qu'elles continuent d'appartenir à la société VIA... Est-ce ce que vous proposez? Dans certains cas on permettrait à un particulier d'acheter tel ou tel train, de posséder le matériel, de l'exploiter et de garder les bénéfices, bien franchement, s'il était possible d'attirer un grand nombre de touristes en commercialisant ce secteur précis.

Je partage l'opinion exprimée dans votre mémoire en ce qui a trait à Thompson. On ne fait rien pour mettre cette région en valeur. VIA a un bien piètre bilan à cet égard. Et surtout, on ne commercialise pas la découverte des baleines et des ours polaires. Nous essayons d'assurer le succès de l'entreprise. C'est l'objectif que poursuit notre comité.

Je veux simplement m'assurer de bien comprendre ce que vous dites, au cas où le maire d'une grande ville, membre de la Fédération, témoignerait devant notre comité en disant qu'il désapprouve les observations faites par l'organisme dont il fait partie, et qu'il est en faveur de la commercialisation du couloir, par exemple.

M. Bill Comaskey: En fait, je suis heureux de vous rencontrer. Vous et moi avons déjà en échange de correspondance. Vous avez lu à l'occasion certaines lettres de moi portant sur le prix de l'essence.

M. Robert Nault: Absolument.

M. Bill Comaskey: Merci.

M. Robert Nault: C'est à moi que vous parliez.

M. Bill Comaskey: C'est bien vous. J'ai été déçu lorsque vous avez quitté ce comité pour assumer d'autres obligations.

M. Robert Nault: Pour faire des choses plus grandes et plus importantes.

M. Bill Comaskey: De temps à autre, les maires de grandes villes désapprouvent la politique de la Fédération. C'est peut-être par conviction personnelle ou par esprit de clocher, mais comme l'a expliqué M. McGregor, notre mémoire se fonde sur la politique de la Fédération canadienne des municipalités. Même s'il y a certains passages que je n'approuve pas—moi aussi, j'ai parfois l'esprit de clocher—cela représente la position de la Fédération, et nous sommes pour toute option susceptible de procurer des recettes.

• 1635

Le vice-président (M. Roy Cullen): Merci, monsieur Nault.

Monsieur Casey.

M. Bill Casey: Merci. Je me demande si la Fédération a une vue d'ensemble ou une vision pour un service ferroviaire voyageurs dans notre pays. Avez-vous une vision globale pour l'ensemble du pays?

M. Bill Comaskey: Je dois prendre garde à répondre au nom de la Fédération et de ne pas vous donner mon avis personnel, car ma vision n'est peut-être pas celle du conseil d'administration national.

M. Bill Casey: En fait, vous avez soulevé une autre question. Avant de répondre à ma première, est-ce que la Fédération s'est beaucoup penchée sur cette question? Existe-t-il au sein de la Fédération un comité qui a fait des recherches sur cette question et fait des propositions en matière de coûts, de cadres et de principes?

M. Bill Comaskey: Nous n'avons pas effectué d'étude en profondeur, mais nous avons un comité des transports. Ce comité se penche sur cette question à l'heure actuelle, et je siège aux deux comités.

Nous nous débattons avec le problème depuis un certain temps, et pas simplement pour répondre à l'invitation de présenter un mémoire à ce comité de la Chambre des communes. Nous nous penchons sur la question depuis des années.

M. Bill Casey: Parlons maintenant de votre vision.

M. Bill Comaskey: Je parle au nom de toutes les municipalités membres de la Fédération canadienne des municipalités et sans doute de toutes les collectivités du pays. Nous estimons que, dans notre vaste pays, il faut qu'il existe une politique nationale des transports. Notre vision, c'est la possibilité pour les Canadiens de se déplacer d'un coin à l'autre du pays.

Lorsque votre collègue m'a demandé ce que je considérais comme une preuve de succès, si les gens sont satisfaits et qu'ils apprécient pouvoir utiliser un certain mode de transport—la plupart du temps le service ferroviaire—pour se déplacer d'une collectivité à l'autre, nous considérons que c'est une preuve de succès.

Nous n'avons pas les ressources voulues pour effectuer une étude en profondeur sur les coûts et le genre de mandat conféré à votre comité. La Fédération ne dispose pas de ce genre de ressources, mais nous y avons passé beaucoup de temps.

M. Bill Casey: Étant donné que le gouvernement vise essentiellement la suppression du déficit, existe-t-il, selon vous, un niveau acceptable de subventions du service ferroviaire voyageurs au Canada? L'an prochain, cela se montera à 170 millions de dollars. Quel est le niveau acceptable?

M. Bill Comaskey: Nul ne le sait. Les Canadiens ont loué les efforts du gouvernement pour équilibrer le budget. À notre avis, les gouvernements sont obsédés par l'idée d'équilibrer rapidement leurs budgets, et maintenant ils se trouvent un peu dans une impasse, car ils ne savent pas quoi faire de l'excédent.

M. Stan Keyes: Quel excédent?

M. Murray Calder: Quel excédent? Ne croyez pas tout ce que vous lisez.

M. Stan Keyes: Il y en avait un.

M. Lee Morrison: Vous l'avez déjà tout dépensé.

M. Stan Keyes: Pour les étudiants, vous voulez dire?

Le vice-président (M. Roy Cullen): À l'ordre!

Nous vous écoutons.

M. Bill Comaskey: En outre, lorsque VIA Rail déclare dans son rapport annuel qu'elle est subventionnée jusqu'à concurrence de 56 p. 100 ou 44 p. 100 seulement, les responsables se félicitent d'avoir limité les frais pour les contribuables. Nous ne considérons pas cela comme un exploit.

Il faut subventionner les services ferroviaires voyageurs si nous voulons les offrir d'un bout à l'autre du pays. Le gouvernement fédéral a atteint son objectif dans un délai beaucoup plus court que prévu, et cela s'est fait au détriment des voyageurs, qui ne peuvent plus se déplacer d'une localité à l'autre par train, ou par d'autres moyens d'ailleurs.

Nous convenons qu'il importe d'équilibrer le budget, mais pas de sabrer dans les services à ce point. Pour ce qui est de VIA Rail, nous estimons que c'est l'un des problèmes qui sont posés.

M. Bill Casey: La Fédération estime qu'il doit exister un service ferroviaire voyageurs à l'échelle nationale, et que le gouvernement fédéral devrait assumer une partie des dépenses. Je n'essaie pas de vous faire dire ce que vous n'avez pas dit, mais est-ce fondamentalement...

• 1640

M. Bill Comaskey: Nous savons que VIA ne dessert pas certaines régions du pays, et loin de nous l'idée qu'elle doit prévoir ces services dans son plan d'entreprise général. Toutefois, dans les régions où la société est censée, d'après son mandat, assurer un service de transport des voyageurs, la Fédération s'attend à ce que ce service soit offert et croit que c'est indispensable, car cela devrait être normalisé, et il ne devrait pas exister un service acceptable, voire bon, dans le centre du pays tandis qu'il est de qualité inférieure, voire très médiocre, dans le Nord.

Le vice-président (M. Roy Cullen): Merci beaucoup, monsieur Casey.

Nous avons terminé le premier tour de questions. Mme Desjarlais voudrait poser une dernière question aux témoins.

Mme Bev Desjarlais: Vous avez parlé de la commercialisation de VIA en disant que cela laissait à désirer. Je crois que nous sommes tous d'accord sur ce point. J'ai rencontré des responsables de VIA, et certaines préoccupations ont été exprimées.

Vous avez dit que le service disparaît lorsque les subventions diminuent. D'après mes renseignements, la société ne peut pas fournir de wagons, car elle n'en a pas suffisamment. Si l'on pouvait gagner davantage sur une ligne reliant l'Alberta à la Colombie-Britannique—je ne citerai pas de nom—même s'il y avait un wagon supplémentaire, on le prendrait de là pour le mettre sur un autre train. Après l'accident de Biggar, certains ont dit que la situation allait encore s'aggraver, car nous risquions de perdre un autre wagon qui serait déplacé ailleurs.

Avez-vous l'impression que les gens prendraient plus souvent le train s'il y avait plus de wagons disponibles?

M. Bill Comaskey: J'ai entendu des exploitants et des voyageurs dire que s'il y avait plus de wagons, on pourrait les remplir sur ces lignes. Ma réponse est donc oui, absolument.

Mme Bev Desjarlais: Je suppose que les gens ne sont pas extrêmement surpris lorsqu'on supprime des services ferroviaires, mais cela se produit aussi pour le service aérien dans les collectivités du Nord. Lorsqu'on a besoin d'un avion supplémentaire et que, en raison d'un incident, on ne peut pas assurer la ligne Calgary-Winnipeg, on prend l'avion de Thompson et on l'utilise sur cette ligne. Les gens n'ont qu'à attendre quelques heures à Winnipeg. C'est toujours la même vieille histoire: si vous habitez trop loin, vous n'êtes jamais traité sur un pied d'égalité. En toute franchise, c'est l'impression que l'on a dans l'Ouest, et sans doute que les gens du fin fond de la côte Est ont la même impression relativement aux services de transport disponibles.

Voilà ce que j'avais à dire. Je vous remercie.

Le vice-président (M. Roy Cullen): Très bien, merci, madame Desjarlais.

Avant de conclure, je voudrais vous faire part d'une coïncidence inhabituelle qui s'est produite aujourd'hui. Un de nos collègues se trouvait dernièrement à Winnipeg. Il a pris l'avion vers The Pas, et ensuite le train jusqu'à Churchill via Thompson. Il a constaté qu'il n'y avait pas beaucoup de voyageurs à bord du train. Toutefois, celui-ci a suivi un itinéraire qui lui a paru inhabituel. Il va deux fois à Thompson, et ensuite se rend à Churchill. Il a dit qu'il avait vu les mêmes têtes à bord du train.

Je ne comprends pas comment cela fonctionne. Pourriez-vous nous expliquer comment le train dessert The Pas, Thompson et Churchill?

M. Bill Comaskey: En effet, il y a un embranchement qui revient à Thompson. Voilà pourquoi les gens ont l'impression que l'on fait marche arrière et ensuite marche avant.

Le vice-président (M. Roy Cullen): D'accord, maintenant je comprends tout à fait. Mais j'ai dû poser la question. C'était un vrai concours de circonstances. Je parlais avec lui juste hier, et il a mentionné le service. Donc, je suppose que c'est une de ces anomalies historiques, n'est-ce pas?

M. Bill Comaskey: Cela devrait être normal.

Le vice-président (M. Roy Cullen): Ah bon.

Je tiens à remercier M. Comaskey et ses collègues d'être venus aujourd'hui et d'avoir présenté si bien leur mémoire. Merci d'avoir pris le temps de venir ici à Ottawa pour comparaître devant nous et nous faire part de vos idées. Je vous assure que nous allons les prendre en considération.

M. Dan McGregor: Merci.

M. Bill Comaskey: Merci, monsieur le président.

Le vice-président (M. Roy Cullen): La séance est levée.