Passer au contenu
Début du contenu

PROC Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain
Passer à la navigation dans le document Passer au contenu du document






Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre


NUMÉRO 084 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 15 juin 2023

[Enregistrement électronique]

  (1105)  

[Traduction]

    La séance est ouverte.
    Bienvenue à la 84e réunion du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre.
    Le Comité se réunit aujourd'hui pour étudier la question de privilège concernant le député de Wellington—Halton Hills et d'autres députés.
    Comme toujours, si vous utilisez une oreillette, vous pouvez la garder dans votre oreille ou non, mais de grâce, tenez‑la loin des microphones.
    Tous les commentaires doivent être adressés à la présidence. J'ai l'impression que la réunion, fidèle à notre tradition, sera bien animée, alors j'aimerais maximiser le temps dont vous disposez. Je vous rappelle que nous sommes saisis de la question de privilège concernant le député de Wellington—Halton Hills et d'autres députés. Je vous saurais gré de vous en tenir au sujet afin que je n'aie pas à vous interrompre. J'aimerais vraiment réduire au minimum le nombre d'interventions que j'aurai à faire, afin que nous puissions passer d'un député à l'autre et profiter pleinement de notre temps avec le ministre.
    Sur ce, nous accueillons l'honorable Marco Mendicino, ministre de la Sécurité publique, qui est accompagné de la sous-ministre déléguée, Tricia Geddes, du ministère de la Sécurité publique et de la Protection civile.
    Monsieur le ministre, vous avez un maximum de 10 minutes pour faire votre déclaration préliminaire. Je vous rappelle qu'il y a deux langues officielles et je vous prie de surveiller votre débit pour le compte des interprètes.
    Sur ce, je vous remercie de nous avoir répondu si rapidement et d'être ici.
    Bienvenue au comité de la procédure.
    Merci beaucoup, madame la présidente.

[Français]

    Bonjour à toutes et à tous.

[Traduction]

    J'aimerais tout d'abord vous présenter ma sous-ministre déléguée, Tricia Geddes, et remercier tous les gens qui, chaque jour, défendent les institutions démocratiques de notre pays, ainsi que les gens qui collaborent avec eux et tous les Canadiens. La sécurité de la démocratie canadienne est d'une importance critique, et ce sont ces gens qui veillent à la sécurité de nos institutions nationales.
    L'ingérence étrangère menace de plus en plus lourdement les démocraties du monde.

[Français]

    Les acteurs hostiles, comme la Russie, la République populaire de Chine, ou RPC, et le régime iranien poursuivent leurs tentatives visant à porter atteinte à nos intérêts nationaux et à menacer la sécurité canadienne.

[Traduction]

    Ce n'est pas un nouveau phénomène, mais les défis liés à l'ingérence étrangère sont devenus plus complexes et insidieux, et évoluent constamment. C'est la raison pour laquelle notre gouvernement a pris des mesures robustes depuis son arrivée au pouvoir en 2015.
    Madame la présidente, permettez-moi d'expliquer au Comité les quatre piliers qui sous-tendent notre plan visant à lutter contre l'ingérence étrangère: la prévention, la protection, la responsabilité et la transparence.
    Premièrement, toute bonne stratégie commence par la prévention.

[Français]

    L'Initiative de citoyenneté numérique vise à renforcer la démocratie et l'inclusion sociale au Canada en développant la résilience des citoyens quant à l'ingérence étrangère et à la désinformation en ligne, ainsi qu'en établissant des partenariats pour soutenir un écosystème d'information sain.

[Traduction]

    L'ICN accorde notamment un financement au Réseau canadien des médias numériques, qui mènent des activités pour aider les Canadiens à devenir plus vigilants et à cultiver leur pensée critique à l'égard des renseignements qu'ils consomment en ligne.
    Au sein du gouvernement fédéral, mon prédécesseur, le ministre Blair, a envoyé une lettre à tous les parlementaires en 2020 pour leur transmettre des renseignements et des ressources utiles. Comme vous le savez, madame la présidente, le SCRS continue d'offrir des séances d'information aux parlementaires afin de les aider à mieux comprendre ce qu'il faut faire pour se protéger eux-mêmes et leurs bureaux contre l'ingérence étrangère.
    Deuxièmement, nous offrons plus de protection. Nous utilisons de nouveaux outils et des ressources pour protéger les Canadiens, y compris les parlementaires. Ainsi, nous avons récemment injecté 48,9 millions de dollars dans le budget de la GRC en vue de protéger les Canadiens contre le harcèlement et l'intimidation de la part d'acteurs étrangers, d'accroître la capacité d'enquête et d'appuyer de façon proactive les communautés qui courent le plus grand risque d'être ciblées.
    Nous travaillons également avec le sergent d'armes et le SPP ici sur la Colline en vue d'offrir un meilleur dispositif de sécurité aux parlementaires et leur personnel, et nous avons récemment créé un nouveau poste, celui de coordonnateur national de la lutte contre l'ingérence étrangère, qui relèvera de mon ministère, Sécurité publique Canada.
    Troisièmement, nous faisons preuve de davantage de rigueur envers les acteurs hostiles.

  (1110)  

[Français]

    La GRC a indiqué qu'elle avait mis fin aux activités d'ingérence étrangère en ce qui concerne les soi-disant postes de police et qu'elle menait une centaine d'enquêtes sur le sujet. S'il y a des menaces à l'avenir, la GRC va toujours rester vigilante.
    Ma collègue, la ministre Joly, a récemment expulsé un diplomate étranger. Elle applique en outre un régime de sanctions rigoureuses contre le régime iranien. Nous continuerons à utiliser tous les leviers dont nous disposons au sein du gouvernement pour obliger les acteurs hostiles à rendre des comptes.

[Traduction]

    De plus, comme vous le savez, nous cherchons à créer un registre de transparence des influences étrangères. Nous avons terminé la phase officielle de consultation publique de cet exercice, en particulier en travaillant avec les communautés de la diaspora et en les faisant participer afin de créer ce nouvel outil de la bonne façon.
    Enfin, nous savons que la transparence est essentielle pour contrer l'ingérence étrangère et renforcer la confiance des Canadiens. Nous tirons des leçons du Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement et suivons ses recommandations.
    J'ai déjà mentionné deux exemples très concrets d'initiatives de mise en œuvre de ces recommandations, dont j'assure la direction, soit le poste de coordonnateur national pour lutter contre l'ingérence étrangère et le régime de transparence des influences étrangères. Il y a aussi l'OSSNR et, plus récemment, le travail effectué par le très honorable David Johnston dans son premier rapport. C'est un rapport qui trace la voie à suivre pour assurer, grâce à un exercice public, la participation des Canadiens afin qu'ils comprennent mieux comment notre communauté de sécurité nationale est outillée pour lutter contre l'ingérence étrangère.
    L'ouverture sans précédent de notre gouvernement et de nos organismes de sécurité nationale sur les menaces auxquelles nous sommes confrontés est la meilleure façon de protéger et de renforcer notre démocratie.
    Bien sûr, nous savons que l'ingérence étrangère a des répercussions bien au‑delà de nos élections et de nos élus. Toutes les facettes de la société canadienne doivent être protégées contre cette menace. Lorsque des personnes au Canada sont victimes d'intimidation, de harcèlement ou de manipulation de la part d'États étrangers ou de leurs mandataires, ces activités menacent notre souveraineté et la sécurité de tous les Canadiens. Elles ne seront jamais tolérées. Les forces de l'ordre prendront de façon indépendante les mesures qui s'imposent.
    À l'approche de plusieurs élections partielles fédérales, le Groupe de travail sur les menaces en matière de sécurité et de renseignement visant les élections a été activé pour assurer la protection de nos processus électoraux. En ce qui concerne notre économie et notre société en général, nous savons que les établissements universitaires, les secteurs de l'énergie et de la technologie et bien d'autres sont un vecteur de cette menace.

[Français]

    Toutes ces mesures et tous ces investissements suivent les principes de prévention, de protection, de responsabilité et de transparence que j'ai mentionnés précédemment. Elles transcendent les clivages politiques et partisans. Tous les membres du Parlement ont l'obligation morale de défendre les institutions de notre pays ainsi que d'assurer la sécurité de leurs électeurs et de leurs concitoyens.

[Traduction]

    Nous savons que les menaces à l'égard des institutions démocratiques persistent, comme l'ingérence étrangère et la désinformation, mais je tiens à rassurer tous les membres du Comité et les autres parlementaires, ainsi que les Canadiens, que notre gouvernement continuera de prendre toutes les mesures nécessaires pour atténuer ces menaces à notre sécurité nationale, y compris en luttant contre l'ingérence étrangère.
    Merci.
    Merci, monsieur le ministre.
    Nous allons passer à des séries de questions de six minutes, en commençant par M. Cooper.

  (1115)  

[Français]

qui sera suivi de M. Fergus, de Mme Michaud,

[Traduction]

et ensuite Mme Blaney.
    Monsieur Cooper, vous avez six minutes. Veuillez vous exprimer par l'entremise de la présidence.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Merci, monsieur le ministre et madame la sous-ministre déléguée, de comparaître ce matin.
    Par votre entremise, madame la présidente, je m'adresserai au ministre. Lorsqu'il a comparu devant le Comité mardi, le directeur du SCRS a confirmé que la note de gestion des enjeux du SCRS, qui indiquait que M. Chong et sa famille étaient ciblés par le régime de Pékin, avait été envoyée au sous-ministre de la Sécurité publique.
    Que s'est‑il passé une fois que le sous-ministre en a pris connaissance?
    Madame la présidente, je remercie mon collègue de sa question.
    Comme vous l'avez dit, monsieur Cooper, vous avez entendu le directeur du SCRS indiquer ses intentions au sujet de cette note de service. Mon prédécesseur, le ministre de la Sécurité publique de l'époque, le ministre Blair, vous a aussi dit très clairement qu'il n'avait pas reçu cette note de service.
    Ce que je peux vous assurer, monsieur Cooper et mesdames et messieurs les membres du Comité, c'est que grâce à la directive ministérielle que j'ai récemment signée, nous avons renforcé la capacité des élus d'être informés sur ces questions...
    Monsieur le ministre, j'ai posé une question précise. Si vous ne pouvez pas y répondre, c'est bon. Dites simplement que vous ne pouvez pas répondre.
    Que s'est‑il passé une fois que la note de service a été transmise au sous-ministre de la Sécurité publique?
    Ce que je peux vous dire, c'est qu'il est très clair que l'intention du directeur du SCRS et le fait que le ministre Blair n'a pas reçu cette note de service ont été pris en compte dans la directive ministérielle que j'ai mise en oeuvre.
    Elle a été envoyée à votre sous-ministre. Avez-vous demandé à votre ministère de mener une enquête pour savoir ce qu'il est advenu de cette note de service une fois que le ministère de la Sécurité publique l'a reçue, oui ou non?
    Madame la présidente, nous avons réglé cette question au moyen de la directive ministérielle, qui exige que le SCRS informe directement moi-même et le premier ministre lorsqu'il y a ingérence étrangère auprès des parlementaires.
    J'en déduis que la réponse à cette question est non.
    Par votre entremise, madame la présidente, la dernière fois que le ministre a comparu devant le Comité, le 27 avril, il a dit sans équivoque et sans réserve que « la GRC a fermé les soi-disant postes de police ».
    Nous savons maintenant que ce n'est pas vrai, du moins en date du 27 avril, lorsqu'il a comparu devant le Comité. Les organisations du Département du travail du Front uni de Pékin qui hébergent deux postes de police illégaux à Montréal ont déclaré qu'aucune mesure n'a été prise contre eux. Jody Thomas, la conseillère à la sécurité nationale et au renseignement du premier ministre, a dit au Comité, le 1erjuin, lorsqu'on lui a demandé combien de postes de police illégaux étaient toujours actifs: « Nous savons qu'il y en a deux à Montréal, et des mesures ont été prises pour qu'ils cessent leurs activités. » Cela signifie qu'ils étaient toujours actifs le 1erjuin, contrairement à ce que vous avez dit le 27 avril.
    Pourquoi nous avez-vous dit le contraire de ce qui est vrai?
    Madame la présidente, la première chose que je tiens à préciser aux membres du Comité, c'est que la GRC a toujours affirmé qu'elle avait la situation bien en main en perturbant les activités d'ingérence étrangère dans les soi-disant postes de police. Madame la présidente, comme vous le savez, cela ne veut pas dire que de telles activités n'auront pas lieu à l'avenir, mais je suis convaincu que, compte tenu des pouvoirs et des ressources que nous avons accordés à la GRC, ses agents seront vigilants. Tout récemment, vous avez entendu le commissaire Duheme, qui a comparu devant le Comité pour confirmer que les activités d'ingérence étrangère dans ces soi-disant postes de police continueront d'être perturbées en temps opportun.
    Madame la présidente, avec tout le respect que je lui dois, le ministre ne peut pas s'en sortir comme ça. Il a fait une déclaration le 27 avril. Il n'a pas nuancé ses propos. Il a fait une déclaration sans équivoque selon laquelle tous les postes de police illégaux étaient fermés.
    Jody Thomas, lorsqu'elle a comparu devant le Comité, a dit exactement le contraire. J'ai écouté les représentants de la GRC lorsqu'ils ont comparu devant le Comité il y a deux jours. Sous pression, ils ont semblé reconnaître qu'au moins un des postes est toujours actif et qu'une enquête est en cours sur l'autre à Montréal.
    Vous avez fourni au Comité des renseignements inexacts et incomplets dans ce que je considère, avec le plus grand respect, comme une tentative délibérée d'induire le Comité et les Canadiens en erreur au sujet de postes de police illégaux exploités par Pékin en sol canadien.
    Avec tout le respect que je vous dois, monsieur le ministre, comment peut‑on croire ce que vous dites?
    Mes propos devant le Comité étaient justes. La GRC s'est exprimée de façon claire et cohérente sur les activités étrangères liées aux soi-disant postes de police.
    Madame la présidente, j'encourage tous les membres du Comité à continuer d'écouter la GRC, car elle offre des séances d'information pertinente et en temps opportun. La GRC mène ses opérations de façon indépendante du gouvernement, et je suis convaincu que le gouvernement a fourni à la GRC les outils, les ressources et les pouvoirs nécessaires pour gérer ces activités d'ingérence étrangère.

  (1120)  

    Je vous remercie.
    Monsieur le ministre, vous avez induit le Comité en erreur, et c'est un fait. À mon avis, personne ne peut croire ce que vous dites.
    Combien d'arrestations ont été effectuées en lien avec les postes de police illégaux de Pékin? Donnez-moi simplement un chiffre.
    Madame la présidente, je suis heureux de répéter ce que le commissaire Duheme a dit au Comité il y a quelques jours, à savoir qu'environ 100 enquêtes sur l'ingérence étrangère sont en cours.
    J'ai posé une question: combien d'arrestations ont été faites? Vous connaissez la réponse à cette question, monsieur le ministre. Le fait que vous n'y répondez pas en dit long, à mon avis, sur votre réticence à venir ici et à répondre à des questions directes.
    Combien de personnes ont été arrêtées? Donnez-moi simplement un chiffre.
    Madame la présidente, j'ai quelques points à soulever, car je veux répondre à la question de mon collègue.
    Premièrement, le fait qu'il y ait 100 enquêtes en cours...
    La réponse à ma question, monsieur le ministre, c'est zéro — aucune arrestation.
    ... montre à quel point la situation est grave. Deuxièmement, il y a le fait que...
    Je vais faire une pause.
    Monsieur Cooper, j'allais vous redonner la parole parce que le bip a sonné et que je me suis dit: « Il commence à comprendre ce que je dis ». Il a fallu de nombreuses réunions, mais nous y arrivons — bravo, bravo — je vous cède la parole. Je vais vous permettre de poser une dernière question et nous allons poursuivre. Nous entendons le bip, bip, bip. Vous savez quelle sera ma réaction, et c'est presque comme si vous y prenez plaisir.
    Je trouve cela étrange, mais chacun a eu droit au spectacle. Nous nous sentons mieux. Super.
    Monsieur le ministre Mendicino, la parole est à vous, puis ce sera au tour de M. Fergus.
    Merci beaucoup. Je vais essayer d'être concis dans ma réponse, madame la présidente.
    Premièrement, le fait que la GRC mène actuellement 100 enquêtes sur l'ingérence étrangère montre qu'elle prend cette affaire au sérieux. S'il y a des arrestations, la GRC nous tiendra évidemment au courant. Cependant, ne sous-estimons pas sa capacité de perturber les activités des soi-disant postes de police, car c'est précisément ce que la GRC a fait.
    Merci.
    Le chiffre est zéro.
    Monsieur Fergus.

[Français]

    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Monsieur le ministre et madame la sous-ministre, je vous remercie de comparaître devant nous aujourd'hui.

[Traduction]

    Ma question porte en fait sur les postes de police.
    Des représentants de la GRC sont venus témoigner ici et nous ont dit qu'ils avaient perturbé les activités illégales à ces endroits, mais ils ont ajouté une importante mise en garde, à savoir que ces édifices et ces lieux sont toujours là et qu'il y a d'autres activités tout à fait normales et appropriées qui se déroulent à ces endroits. Il serait donc exagéré de dire que nous avons fermé les postes. Les activités ont été perturbées.
    Ai‑je bien compris, monsieur le ministre? Avez-vous quelque chose à ajouter à ce sujet?
    Il est très important de préciser qu'il est question d'activités d'ingérence étrangère menées depuis les soi-disant postes de police.
    J'ajouterai autre chose. C'est que les ressources accordées à la GRC dans le budget de 2023 — comme je l'ai dit, quelque 49 millions de dollars — nous permettent de mieux protéger les Canadiens et, plus précisément, les communautés de la diaspora, qui sont souvent la cible d'activités d'ingérence étrangère.
    Madame la présidente, je dirais à M. Fergus par votre entremise qu'il a été décevant de voir les conservateurs refuser d'appuyer le budget de 2023. Ils durcissent souvent le ton lorsqu'il est question de la sécurité nationale. Ils parlent de sévir contre l'ingérence étrangère, mais ils ont voté contre le budget, qui aurait donné à la GRC une capacité supplémentaire pour gérer les activités d'ingérence étrangère dont vous parlez, et ils ont également voté contre d'autres pouvoirs qui donneraient à notre communauté de sécurité nationale des outils supplémentaires pour lutter contre l'ingérence étrangère.
    Justement, monsieur le ministre, quels sont les défis que vous devez relever lorsque des gens confondent les activités répréhensibles des postes de police avec celles des centres communautaires?
    Madame la présidente, c'est une question importante parce que les endroits où se trouvent ces prétendus postes de police attirent des gens pour des raisons tout à fait légitimes. Ils peuvent se rendre à ces endroits pour participer à des activités parascolaires ou pour obtenir des services de soutien essentiels.
    À mon avis, c'est l'un des défis qui se posent, c'est‑à‑dire faire la distinction entre les activités légitimes et les activités d'ingérence étrangère potentielles. Je pense que nous devons garder la tête froide face à la réalité selon laquelle la République populaire de Chine déploie une vaste gamme de tactiques en matière d'ingérence étrangère, non seulement par le biais de ces présumés postes de police, mais aussi par le biais de notre économie, de nos universités et d'autres attaques contre nos institutions démocratiques, et c'est pourquoi j'ai structuré ma déclaration préliminaire de façon à présenter le plan, qui est fondé sur la prévention, la protection, la reddition de comptes et la transparence. Les outils et les ressources supplémentaires que le gouvernement a mis en place visent à faire avancer ce plan afin que nous puissions nous attaquer à l'ingérence étrangère.

  (1125)  

    Monsieur le ministre, comme vous le savez sûrement, nous avons entendu de nombreux témoins nous parler de la dégradation de l'échange de renseignements entre les organismes de sécurité et de renseignement et du manque de coordination à cet égard.
    Que fait le gouvernement pour remédier à ces problèmes?
    Madame la présidente, c'est aussi une question d'une importance capitale. En tant que ministre, je suis responsable de mon bureau, de mon ministère et des organismes qui relèvent de moi. Il est important de cerner les problèmes liés à la circulation de l'information et des renseignements.
    À titre de ministre de la Sécurité publique, j'estime que nous avons commencé à nous attaquer à ces problèmes en émettant une nouvelle directive ministérielle. Lorsque l'ingérence étrangère vise des parlementaires, je dois maintenant en être informé directement par le service afin que nous puissions nous assurer que cette situation est examinée et que nous puissions être francs avec les Canadiens sur la façon dont nous faisons ce travail.
    Je dirais également que le premier rapport de M. Johnston, un rapport très substantiel et incisif, énonce un certain nombre de mesures supplémentaires que nous pouvons prendre pour continuer à renforcer notre gouvernance interne en matière de circulation de l'information et des renseignements, car c'est la meilleure façon pour le gouvernement de prendre les mesures qui s'imposent pour contrer l'ingérence étrangère. C'est précisément ce que je m'engage à faire.
    J'ai une dernière question à laquelle vous ou la sous-ministre pouvez répondre. J'ai posé cette question au directeur du SCRS, et j'aimerais vous la poser.
    Il semble que le cadre dans lequel nous avons mis en place la structure pour réagir à ces problèmes, l'ensemble de nos organismes de sécurité et de renseignement, a été établi en réaction aux menaces terroristes. Il semble que ce cadre a changé. Comment pouvons-nous maintenant adapter notre structure pour faire face à ces nouvelles et émergentes... qui sont peut-être en émergence constante, et simplement réfléchir à une nouvelle façon d'envisager les menaces causées par l'ingérence étrangère actuellement?
    Je vais dire quelques mots, puis je céderai la parole à la sous-ministre déléguée, Mme Geddes.
    Je pense que votre question porte sur la nécessité de réfléchir à la façon dont nous définissons les préoccupations en matière de sécurité nationale. Vous avez raison; après 2001, dans la foulée de la tragédie du 11 septembre, le gouvernement a mis en place une stratégie en matière de sécurité nationale. Aujourd'hui, nous continuons, bien sûr, d'être vigilants à l'égard du terrorisme, mais nous devons aussi penser à l'ingérence étrangère.
    Merci. Comme le temps est écoulé, je ne peux pas donner la parole à la sous-ministre. Je suis désolée. Elle aura peut-être une autre occasion d'intervenir.
    Madame Michaud, allez‑y.

[Français]

    Monsieur le ministre, je vous remercie d'être avec nous aujourd'hui. Nous vous en sommes reconnaissants.
    Nous sommes ici pour faire la lumière sur l'intimidation envers M. Chong, député de Wellington—Halton Hills. Nous sommes aussi ici, malheureusement, pour faire la lumière sur vos contradictions. Nous en entendons de toutes les sortes, ces jours-ci, de la part de vous et de vos collègues. Vous dites que les notes d'information et les courriels se perdent, et vous plaidez tout simplement l'ignorance au sein de divers cabinets ministériels.
    Vous parliez de transparence tout à l'heure, dans votre allocution d'ouverture. Or, en tout respect, monsieur le ministre, vous avez été tout sauf transparent dans le dossier de l'ingérence étrangère, et ce, depuis le premier jour. Vous êtes ministre de la Sécurité publique du Canada. Vous êtes responsable d'assurer la sécurité, et vous avez le devoir d'être informé et d'aller chercher l'information. Dire qu'un courriel ne s'est pas rendu, que vous n'avez pas été breffé ou que la note s'est perdue, ce ne sont pas des réponses acceptables.
    Comment expliquez-vous que, en matière de sécurité, la personne qui devrait être la première informée au Canada est plutôt la dernière?

  (1130)  

    Madame la présidente, par votre intermédiaire, je veux dire à ma collègue Mme Michaud que je suis tout à fait d'accord avec elle. En tant que ministre de la Sécurité publique, c'est mon devoir de m'assurer qu'il y a un système où l'information circule de façon efficace, transparente et claire. C'est la raison pour laquelle j'ai publié une nouvelle directive à l'intérieur de mon ministère pour renforcer les protocoles.
    J'ai reconnu que cette histoire a révélé des problèmes, mais, maintenant, je me concentre sur le renforcement des protocoles afin que le gouvernement puisse prendre les mesures nécessaires pour lutter contre l'ingérence étrangère.
    Monsieur le ministre, ce n'est pas la première fois que vos propos sont démentis par la suite.
    Madame la présidente, si vous me le permettez, je vais poser quelques questions en rafale, parce que nous avons fait une liste des exemples de cela, et il y a plusieurs situations où le ministre a dit une chose, et où on a ensuite appris le contraire.
    Monsieur le ministre, l'an dernier, vous nous avez dit que c'est la police qui vous avait demandé d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence. Cependant, nous avons appris par la suite que ce n'était pas le cas. Comment expliquez-vous cela?
    Madame la présidente, la décision d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence découlait d'une situation sans précédent. La situation sur le terrain était une urgence nationale, et la décision d'invoquer cette loi a été prise à la lumière des échanges et des consultations avec les services policiers.
     C'est exactement ce que j'ai dit devant le juge Rouleau, et ce dernier a confirmé le fait que cette décision était la bonne. C'était la décision correcte pour restaurer la sécurité publique sur le terrain.
    Je m'attends à ce que mes questions courtes soient suivies de réponses tout aussi courtes.
    Merci, monsieur le ministre. Dans le cas des soi-disant postes de police chinois, vous nous avez dit qu'ils avaient été fermés. Or, peu de temps après, nous avons appris que, là aussi, ce n'était pas le cas. M. Cooper l'a démontré un peu plus tôt.
     Encore une fois, comment expliquez-vous cela?
    Notre collègue M. Cooper a posé la question, et je vais répéter devant ce comité les propos que j'ai déjà tenus. La GRC prend des mesures concrètes concernant les soi-disant postes de police et va toujours rester vigilante en ce qui concerne cette menace. C'est clair.
    Monsieur le ministre, vous nous avez dit il y a quelques jours que vous n'aviez pas été informé du transfert du tueur Paul Bernardo vers une prison à sécurité moyenne. Or, nous avons appris par la suite que la note d'information vous avait été envoyée, que votre bureau avait été informé de ces faits.
    Comment expliquez-vous cela? Est-ce dû au fait que votre cabinet ne vous transmet pas l'information? Comment se fait-il que l'information ne se rende pas jusqu'à vous?

[Traduction]

    J'invoque le Règlement, madame la présidente.
    Monsieur Turnbull, allez‑y au sujet de votre rappel au Règlement.
    Je sais que je suis arrivé un peu en retard, mais je crois comprendre que nous étudions aujourd'hui l'ingérence étrangère et qu'il s'agit précisément d'une question de privilège. Je ne sais pas si cette question est pertinente. Je tenais à mentionner cela et à vous demander votre avis à ce sujet.
    Au début de la réunion, j'ai rappelé à tous que... Je sais que, sur la Colline du Parlement, tout est important. C'est pourquoi nous avons toute une liste de choses importantes à faire.
    Un de nos collègues a soulevé une question de privilège concernant l'ingérence étrangère, qui a été envoyée au Comité. J'espère que je ne serai jamais dans cette situation, mais j'espère aussi, en tant qu'élue, qu'on accorderait à ma question de privilège l'importance qu'elle mérite. Je vous encourage donc à vous en tenir à ce sujet. Il se passe toujours quelque chose de plus excitant par ailleurs.
    La parole est à vous, madame Michaud, mais je vous rappelle que nous sommes ici pour discuter de la question de privilège concernant le député de Wellington—Halton Hills et d'autres députés.

[Français]

    Voulez-vous poursuivre votre question ou voulez-vous en poser une autre?
    Je vais la poursuivre, madame la présidente, et expliquer à mon collègue M. Turnbull que toutes les contradictions du ministre en matière de sécurité publique au Canada nous ramènent au cœur de l'ingérence étrangère et de la campagne d'intimidation visant notre collègue M. Chong, de Wellington—Halton Hills. Ce ministre doit être transparent. Il a des comptes à rendre. Comme il s'est contredit à de nombreuses reprises, nous avons droit à des réponses. Le public y a droit également. Je crois que cela nous ramène à la question principale.
    Comment se fait-il que nous apprenions cela par les médias, que ce soit des fuites d'information qui nous permettent d'être informés du fait que certains de nos collègues députés sont ciblés par de l'ingérence étrangère et par des campagnes d'intimidation émanant de diplomates chinois? Comment se fait-il que, lorsque nous posons des questions au ministre de la Sécurité publique sur ces questions, il nous réponde ne pas avoir été au courant?
    Pour ma part, j'essaie de comprendre la situation. Je pense que les Canadiens et les Québécois essaient aussi de la comprendre. Je m'attends donc à ce que le ministre de la Sécurité publique nous donne des réponses. À mon avis, tous les points que nous avons abordés aujourd'hui sont extrêmement importants et ils nous ramènent à ce problème.
    Je vais donc offrir de nouveau au ministre l'occasion de nous expliquer comment il se fait que les notes d'information ne se rendent pas, que les courriels se perdent, que le ministre censé assurer la sécurité du public au Canada ne soit pas au courant de tout ce qui se passe et que nos institutions démocratiques soient la cible d'ingérence étrangère.

  (1135)  

    Je remercie la députée de la question.
    La responsabilité du ministère m'oblige à agir là où il y a des problèmes et des défis. Je précise, pour répondre à cette question, que je vais prendre des mesures concrètes, par exemple de nouvelles directives ministérielles pour renforcer les protocoles. L'objectif est de faire en sorte que l'information soit communiquée à mon bureau, à mon équipe et, ce qui est plus important encore, au gouvernement, de façon à ce que nous puissions prendre les mesures nécessaires pour répondre aux défis en matière de sécurité publique. C'est ce sur quoi je me concentre.
    Merci.
    Madame Blaney, vous avez la parole.

[Traduction]

    Merci, madame la présidente, et merci aux témoins pour leur présence aujourd'hui.
    J'avoue que je partage la frustration de mes collègues et des Canadiens quant à la fréquence à laquelle on a l'impression que cette histoire passe d'une version à une autre.
    Ce que le ministre ne cesse de répéter, par l'entremise de la présidence, bien sûr, c'est qu'une directive ministérielle a été émise et que tout va bien maintenant. Je crois savoir que cette directive ministérielle a été émise le 16 mai et qu'elle exige qu'on informe les députés s'ils sont ciblés de quelque façon que ce soit.
    Je pense qu'il est également important que nous nous assurions que tout le monde comprenne que, si un nouveau ministre est nommé, cette directive devra être émise de nouveau. C'est en quelque sorte une solution à court terme. Je ne suis pas certaine que ce soit une solution complète. En fait, ce ne l'est pas, car c'est un remède à court terme à ce gros problème.
    Un échéancier a‑t‑il été établi pour aller de l'avant avec une loi permanente afin que nous puissions régler ce problème dans son ensemble, au lieu d'appliquer cette solution ponctuelle et de continuer à trouver des trous dans ce navire qui est en train de couler et qu'on rafistole en espérant que cela va fonctionner? Je me demande si on a un plan pour la présentation d'une mesure législative.
    Madame la présidente, par votre entremise, je réponds oui à ma collègue, Mme Blaney. Chose certaine, nous continuons de mettre l'accent sur la présentation d'une mesure législative qui créerait un nouveau registre des agents étrangers le plus tôt possible.
    Je tiens aussi à assurer à ma collègue qu'il y a un plan et que ce plan repose sur les quatre piliers que j'ai décrits dans ma déclaration liminaire. Encore une fois, pour que ce soit clair, il s'agit de la prévention, de la protection, de la reddition de comptes et de la transparence.
    Je suis d'accord avec ma collègue, Mme Blaney, pour dire qu'il est important de continuer à renforcer la gouvernance interne en ce qui a trait à l'échange d'information et de renseignements. Les directives ministérielles sont efficaces au sein des gouvernements et des administrations. La directive ministérielle que j'ai émise au sujet de l'ingérence étrangère visant des parlementaires est un moyen de renforcer les protocoles.
    Pour reprendre votre métaphore, madame Blaney, je dirais qu'il y a certainement des vagues, mais nous renforçons le navire pour qu'il puisse naviguer dans ces eaux agitées.
    Vous combinez ce qui, à mon avis, nécessite une modification fondamentale par voie législative, pour veiller à ce que les députés soient bien orientés, avec le registre des agents étrangers. Je ne comprends pas bien pourquoi vous combinez ces deux choses.
    Ma première question vise à savoir quel est l'échéancier en ce qui concerne la mesure législative. Vous ne m'en avez pas fait part. J'aimerais connaître cet échéancier.
    Deuxièmement, nous savons que les consultations sur le registre des agents étrangers ont pris fin le 9 mai. Quand allons-nous obtenir le rapport Ce que nous avons entendu?
    Premièrement, madame la présidente, je dois dire que j'ai été très heureux de pouvoir diriger les consultations publiques sur le registre des agents étrangers. Cela a été un exercice extrêmement utile. Ces consultations nous ont permis d'échanger avec des milliers de Canadiens en ligne et en personne.
    Pour reprendre les mots de ma collègue, nous avons l'intention de publier le rapport Ce que nous avons entendu dans un avenir très, très proche futur, certainement cet été. Ce rapport permettra d'orienter la création de cet outil important.
    Je répète que cet outil doit être considéré comme un ajout à toutes les autres mesures concrètes que le gouvernement a prises à ce jour en matière d'ingérence étrangère, notamment l'attribution de nouveaux pouvoirs au SCRS et l'accroissement de la transparence par l'entremise du CPSNR et de l'OSSNR.
    Les prochaines étapes, y compris la mesure législative, contribueront à créer un plan très complet pour faire face à l'ingérence étrangère.

  (1140)  

    Ma prochaine question porte sur la diaspora.
    Nous savons que certaines communautés établies ici depuis longtemps ont parlé des difficultés auxquelles elles sont confrontées sur le plan personnel en ce qui concerne l'ingérence étrangère et elles ont été en grande partie ignorées.
    Durant les consultations, comment avez-vous inclus ces communautés? Dans le cadre du processus de mise en oeuvre du registre des agents étrangers, je me demande comment vous travaillez avec ces communautés pour vous assurer que la mise en place du registre s'effectue d'une façon respectueuse et ne cible pas les personnes que nous essayons d'amener à nous informer.
    Madame la présidente, Mme Blaney soulève un point très important. Une leçon que nous avons tirée des consultations publiques sur le registre, c'est qu'il y a une crainte de représailles chez les communautés de la diaspora si elles participent à une discussion publique.
    Lorsque nous réfléchissons aux prochaines consultations, une fois que nous aurons déposé le projet de loi concernant le registre — et quand nous continuerons d'échanger avec les Canadiens de façon plus générale sur la série d'autres réformes législatives, sur lesquelles nous voudrons nous pencher — nous devons veiller à créer une atmosphère sécuritaire afin que les Canadiens se sentent en mesure d'intervenir, de donner leurs meilleurs conseils et de donner leur meilleure rétroaction, sans craindre d'être ciblés, marginalisés ou stéréotypés, ce qui est l'objectif de l'ingérence étrangère.
    Il est essentiel que nous mettions en place les conditions qui leur permettront de participer, afin qu'ils contribuent à la discussion et qu'ils bâtissent leur confiance.
    Les risques sont grands, madame la présidente. Ce qui est en jeu, c'est notre capacité de lutter contre l'ingérence étrangère. Pour contrer cette ingérence, nous avons besoin de la participation des Canadiens. Voilà notre engagement.
    Merci.
    La parole est maintenant à M. Calkins pour cinq minutes. Ensuite, ce sera au tour de M. Noormohamed.
    Monsieur Calkins, allez‑y.
    Merci, madame la présidente.
    Par votre entremise, j'aimerais demander au ministre s'il sait ce qu'est une note de gestion d'enjeux.
    C'est votre réponse finale? Je plaisante.
    Vous êtes déjà en avance sur votre prédécesseur, qui a actuellement des échanges verbaux avec le SCRS concernant l'échange d'informations qui aurait dû avoir lieu en ce qui concerne le député Chong.
    Pouvez-vous dire au Comité combien de notes sur la gestion d'enjeux vous avez lues personnellement avant d'émettre votre directive ministérielle?
    Madame la présidente, je remercie mon collègue pour sa question.
    Bien entendu, on m'informe régulièrement — chaque semaine et souvent chaque jour — des enjeux. L'objectif de la directive ministérielle était de veiller à ce qu'il y ait une meilleure transmission des renseignements de la part de nos fonctionnaires aux élus. Nous estimons que nous avons renforcé la gouvernance interne à cet égard.
    Vous avez dit que vous savez ce qu'est une note de gestion d'enjeux. Selon le SCRS, elles existent depuis 2015. Ma question est la suivante: prenez-vous connaissance de chaque note de gestion d'enjeux qui vous est envoyée par le SCRS, oui ou non?
    Je prends connaissance des notes de gestion d'enjeux. Elles prennent différentes formes. Certaines viennent directement du ministère, d'autres viennent directement d'éminents organismes, et d'autres encore viennent directement de mon personnel.
    Ce qui est important, c'est qu'il y ait un dialogue et que l'information circule afin que, en tant que ministre de la Sécurité publique, je puisse être honnête avec les Canadiens au sujet de toute question qui touche à la sécurité nationale ou à la sécurité publique et que, le cas échéant, j'exerce certains pouvoirs ministériels pour protéger les Canadiens contre des problèmes comme l'ingérence étrangère.

  (1145)  

    Puisque nous parlons d'être honnêtes avec les Canadiens et d'établir la crédibilité des propos formulés ici, afin que nous puissions rédiger un rapport et formuler des recommandations appropriées, j'aimerais parler du fait qu'en janvier 2022, vous avez dit, monsieur le ministre, que les forces de l'ordre vous ont demandé de recourir à la Loi sur les mesures d'urgence, mais nous avons découvert que ce n'est pas vrai.
    En octobre 2022, vous avez eu un problème lorsque vous avez induit un juge fédéral en erreur en antidatant des documents.
    En janvier 2023, vous avez affirmé que l'Entente sur les tiers pays sûrs fonctionnait efficacement, mais vous avez mal expliqué vos propos aux Canadiens.
    En avril dernier, vous avez dû abandonner vos amendements au projet de loi C‑21 après avoir dit que vous ne visiez pas les chasseurs respectueux des lois.
    En mai dernier, vous avez déclaré que le SCRS n'avait jamais communiqué de renseignements indiquant que le régime communiste avait ciblé M. Chong et sa famille, mais nous savons maintenant que ce n'est pas vrai.
    En mai dernier encore, vous avez dit que les postes de police étaient toujours ouverts, mais nous savons maintenant que ce n'était absolument pas vrai.
    Nous savons maintenant non seulement que le Service correctionnel du Canada a informé votre ministère en mai dernier, mais aussi que vous avez reçu copie de la note de service provenant de votre propre patron, qui l'a transmise à votre ministère.
    Hier soir, j'ai lu dans Twitter que votre patron, par l'entremise du Cabinet du premier ministre, a dit qu'il vous a envoyé la note de service, mais, selon le journaliste, il n'y a aucune indication que vous avez répondu au Cabinet du premier ministre. Le Cabinet du premier ministre a appris le 29, le jour avant que vous ayez déclaré l'avoir appris le 30, que Paul Bernardo était transféré d'un établissement à sécurité maximale à un établissement à sécurité moyenne.
    C'est...
    Il y a un rappel au Règlement.
    J'essaie d'établir la crédibilité du témoin, madame la présidente.
    Nous ne sommes pas dans une salle d'audience, mais bon.
    Invoquez-vous le Règlement, monsieur Turnbull?
    Madame la présidente, c'est le même rappel au Règlement que la dernière fois. Je veux simplement savoir si c'est pertinent.
    Je ne sais pas en quoi M. Calkins pense que ses propos se rapportent à l'ingérence étrangère, le sujet que nous étudions aujourd'hui. J'aimerais vraiment savoir dans quelle mesure ils sont pertinents dans le cadre de notre étude actuelle.
    J'attendais de voir où il allait en venir, car M. Calkins siège ici depuis longtemps, et il sait comment les choses fonctionnent.
    J'espérais qu'il allait revenir au sujet. Est‑ce que c'était votre intention, monsieur Calkins?
    Le problème, c'est l'information qui est communiquée. On vous reproche, ainsi qu'à d'autres ministres de la Couronne, de ne pas avoir obtenu l'information. Il ne fait aucun doute dans mon esprit, madame la présidente, que le ministre disposait de l'information au sujet de ce transfert et de tous les autres éléments concernant M. Chong et tous les autres enjeux que j'ai mentionnés.
    Par conséquent, madame la présidente, je vais demander au ministre s'il peut faire la seule chose qu'il sait qu'il devrait faire. Il a un microphone devant lui en ce moment. Compte tenu de tous les problèmes qui ont été causés sous sa gouverne et des problèmes propres à mon collègue, M. Chong, fera‑t‑il la chose honorable qui s'impose et démissionnera‑t‑il immédiatement?
    Madame la présidente, je me concentre sur une seule et unique chose, c'est‑à‑dire faire mon travail pour protéger la sécurité des Canadiens.
    Cette question est tellement truffée d'inexactitudes et de faussetés qu'elle ne mérite même pas de réponse.
    Merci.
    J'adore regarder les travaux de la Chambre, parce que je suis une personne « cool ». Je crois qu'une motion sur un sujet semblable a été présentée à la Chambre, ce qui signifie que la Chambre est saisie de cette question.
    Ici, je demande que nous essayions d'obtenir une réponse à la question de privilège de notre collègue et à la question sur l'ingérence étrangère dans les élections. Je ne peux qu'essayer.
    Monsieur Noormohamed, allez‑y.
    Je vous remercie, madame la présidente.
    Je remercie le ministre et sa collaboratrice d'être ici aujourd'hui.
    Je suis venu assister à la réunion aujourd'hui parce que je m'intéresse vivement à la question de l'ingérence étrangère. Je suis surpris que nos collègues de l'opposition n'aient pas vraiment insisté là‑dessus. Nous pouvons maintenant revenir au sujet à l'ordre du jour.
    J'ai été fonctionnaire au ministère de la Sécurité publique et au Bureau du Conseil privé sous trois premiers ministres de différentes allégeances. À l'époque de la Commission McDonald, je me souviens qu'il y avait beaucoup d'inquiétude entourant le partage de renseignements. Le dossier tourmentait les gouvernements libéraux et conservateurs. Il ne fait aucun doute que nous avons une discussion semblable aujourd'hui.
    À mon avis, une des choses les plus importantes que nous pouvons déterminer ayant trait à la question de privilège, c'est la façon de créer un environnement plus sûr pour les Canadiens.
    Monsieur le ministre, si vous songez à la voie à suivre, quels éléments doivent être mis en place ou le sont déjà pour veiller à ce que nous traitions la question du renseignement comme il se doit sans la confondre avec des preuves réelles?

  (1150)  

    C'est un enjeu qui me préoccupe énormément, madame la présidente. Cela me rappelle l'époque où j'étais procureur fédéral et m'occupais d'affaires relevant de la sécurité nationale. En effet, l'un des plus grands défis, qui continue de dérouter non seulement le Canada, mais aussi de nombreuses démocraties, consiste à comprendre comment passer de renseignements utiles et crédibles à des éléments de preuve recevables, qui peuvent être utilisés devant un tribunal pour intenter des poursuites et tenir responsables ceux qui posent des actes constituant une menace à la sécurité publique et nationale.
    Le gouvernement est vraiment déterminé à revenir sur cette question. Cela peut se faire par voie législative. Il y a actuellement des dispositions de la Loi sur la preuve au Canada qui permettent d'intenter des poursuites au cours desquelles les juges ont accès à des renseignements classifiés et rendent des décisions en fonction des privilèges que le gouvernement peut invoquer pour protéger la sécurité nationale et les personnes qui travaillent au sein de ces institutions. Ces éléments de preuve ont la pertinence et la probité nécessaires pour ensuite être utilisés dans le cadre d'audiences publiques.
    Je dirais que l'exercice est fort complexe. Nous devons trouver le juste équilibre. Lorsque le gouvernement et vous posez la question — et je ne parle pas seulement de cette question —, nous devons vraiment réfléchir à l'évolution des menaces à notre sécurité nationale. Vous avez parlé de revenir à l'ingérence étrangère dans la discussion d'aujourd'hui.
    Par votre entremise, madame la présidente, je tiens à dire à M. Noormohamed que je suis tout à fait d'accord. Les enjeux n'ont jamais été aussi importants. Nous devons mettre de côté la partisanerie et les distractions, et nous concentrer sur les questions à l'étude. Ce qui est en jeu, c'est notre démocratie, notre économie et, surtout, la population canadienne et sa sécurité.
    Je vous remercie, monsieur le ministre.
    Ma prochaine question s'adresse à Mme Geddes.
    J'ai eu le privilège de travailler pour des gens qui ont occupé votre poste et qui sont d'incroyables serviteurs de la population. C'est toujours un privilège de poser des questions à nos plus hauts fonctionnaires sur certains des enjeux que vous rencontrez au quotidien.
    Nous vivons à une époque où nous entendons constamment dire que si tout le monde avait accès à une information donnée, nous n'aurions pas de tels problèmes.
    Pouvez-vous nous rappeler pourquoi il est si important de puiser dans les renseignements de façon à ce que les gens puissent prendre des décisions éclairées? Quels risques importants y a‑t‑il à rendre publics tous les renseignements qui pourraient être recueillis?
    Je travaille dans le milieu de la sécurité nationale depuis un certain temps, et je peux vous assurer qu'un de nos moteurs les plus importants est de veiller sur ceux qui nous fournissent des renseignements — les gens mettent parfois leur vie en péril pour le faire... Nous faisons très attention à la façon de prendre ces renseignements de nature très délicate que nous avons reçus, puis d'en extraire des conseils, pour que le gouvernement puisse passer à l'action et avoir des éléments de preuve, comme le ministre l'a dit, ou pour que nous puissions nous en servir.
    Ce sont des renseignements très importants que nous voulons pouvoir utiliser, mais nous devons le faire très consciencieusement pour protéger les personnes qui, dans bien des cas, ont risqué leur vie à cette fin.
    Si vous prenez ce que vous venez de dire et que vous songez à ce qui se dit dans la sphère publique... Ce n'est pas une question partisane. J'aimerais que vous me répondiez en tant que fonctionnaire...
    Me reste‑t‑il une minute, madame la présidente?
    Je suppose que non.
    Non. Ce sont des interventions de cinq minutes.
    D'accord.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Noormohamed, voulez-vous poser votre question très rapidement?
    Oui.
    Lorsque vous avez parlé du risque, vous avez mentionné les méthodes et les sources. Quels sont les risques quant à la façon dont les Canadiens pourraient réagir si nous ne prenons pas ces mesures?

  (1155)  

    Je vous remercie.
    Madame la sous-ministre déléguée Geddes, j'ai beaucoup aimé votre dernière réponse. Notre temps est compté, mais j'aimerais beaucoup que vous nous répondiez par écrit.

[Français]

    Madame Gaudreau, vous avez la parole pour deux minutes et demie.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Pour la troisième fois, c'est tout un défi pour vous, j'en conviens. Mes questions seront très brèves.
    Est-ce normal qu'un ministre de la Sécurité publique n'ait pas les informations nécessaires pour veiller à la sécurité des Canadiens et des Québécois?
    Il est très important que le ministre de la Sécurité publique ait toute l'information nécessaire pour faire son travail. C'est la raison pour laquelle, en tant que ministre, j'ai tenté de cerner les défis et de mettre en place des solutions concrètes. La nouvelle directive ministérielle va renforcer nos protocoles. Oui, il y a des défis...
    Je vous remercie, monsieur le ministre. La dernière fois que nous nous sommes rencontrés, il y avait de gros défis à la suite de l'adoption du budget, et j'en suis consciente. Toutefois, je me demande comment on se sent, en tant que ministre de la Sécurité publique, lorsque cela prend des fuites d'information dans les médias pour qu'une alerte soit lancée.
    Madame la présidente, je partage totalement les préoccupations de ma collègue sur la question des fuites. Oui, il y a là un problème, mais j'ai confiance en nos services policiers pour mener leurs enquêtes afin que les responsables soient traduits en justice. Cependant, de mon côté, je me concentre sur le renforcement de la gestion de l'information et du renseignement, afin que le gouvernement puisse prendre les mesures nécessaires pour répondre à tous les défis.
    Je vais préciser ma question.
    Le SCRS nous a dit qu'il avait des directives ministérielles. Si celles-ci sont des mesures préventives, comme vous l'avez dit d'entrée de jeu, et que vous faites votre travail — j'imagine que c'est le cas —, comment se fait-il que, comme par hasard, on ait agi à la suite de fuites d'information? Autrement, le consul de la République populaire de Chine serait encore en train de miner notre démocratie.
    Comment se sent-on quand tout cela arrive?
    Madame la présidente, encore une fois, la directive ministérielle va non seulement renforcer les protocoles, mais aussi prévenir des fuites d'information dans l'avenir. C'est un des objectifs de cette directive.
    J'ai eu de très bons échanges avec les gens de mon ministère. Ma sous-ministre veut peut-être ajouter quelque chose sur les...
    Considérez-vous que vous avez failli à ce moment-là et que, aujourd'hui, vous voulez vous reprendre? Soyez honnête.
    Nous allons toujours faire le nécessaire pour régler les problèmes; c'est mon travail.
    Je vous remercie.

[Traduction]

    C'est au tour de Mme Blaney.
    Je vous remercie, madame la présidente.
    J'aimerais revenir sur le registre des agents étrangers. J'ai demandé comment la diaspora serait incluse dans la mise en oeuvre de ce programme. Puis‑je obtenir une réponse claire disant que vous allez former un comité et avoir...? Je veux que ce soit clair. C'est ma première question.
    Ma deuxième question à l'intention du ministre porte sur ce que M. Chong a dit au sujet de la séance d'information sur la sécurité qu'il a reçue. À ce moment, il n'avait aucune idée que sa famille et lui étaient ciblés, tant ici qu'à l'étranger, mais il l'a trouvée très utile. Je me demande s'il est envisagé que tous les députés reçoivent une sorte de séance d'information sur la sécurité, puisqu'elle semble avoir été fort utile. Et qu'en est‑il des candidats aux prochaines élections?
    Pourriez-vous répondre à ces deux questions?
    Par votre entremise, madame la présidente, je vais répondre à ma collègue, Mme Blaney. Je veux d'abord aborder la question du dialogue avec les communautés de la diaspora. J'ai profité de l'occasion pour insister sur la création d'un climat sécuritaire dans lequel nous pouvons échanger, compte tenu des craintes accrues de représailles. Je veux aussi donner deux autres exemples à Mme Blaney, qui, je l'espère, porteront leurs fruits.
    D'une part, il y a le groupe sur la transparence de la sécurité nationale, au sein duquel nous cherchons à dialoguer directement avec la diaspora et d'autres communautés, y compris les peuples autochtones. D'autre part, il y a aussi la table ronde transculturelle sur la sécurité. Grâce à ces deux tribunes, madame la présidente, nous dialoguons directement avec les communautés de la diaspora et les peuples autochtones.
    Je veux dire une autre chose, avant de redonner la parole à Mme Blaney pour qu'elle puisse reprendre la deuxième partie de sa question, si elle le souhaite. Nous travaillons en très étroite collaboration avec le Service pour fournir un soutien supplémentaire aux parlementaires et à leurs bureaux en ce qui a trait à l'ingérence étrangère. Dans le rapport annuel qui a été déposé il y a environ un mois, vous avez vu que le SCRS a renseigné 49 parlementaires fédéraux au cours de la dernière année. Il y a encore du pain sur la planche, et c'est exactement ce que nous ferons.

  (1200)  

    La formation sera‑t‑elle offerte également aux candidats pendant les élections?
    En un mot, oui. En plus des séances d'information, nous avons aussi mis en place des protocoles de signalement. Je suis donc très heureux de travailler avec Mme Blaney et tous les parlementaires à ce dossier.
    Je vous remercie.
    Nous arrivons déjà à la fin du temps que nous pouvions vous accorder.
    Monsieur Mendicino, madame la sous-ministre déléguée, nous vous souhaitons une bonne journée.
    Si vous avez d'autres renseignements à nous communiquer, plus particulièrement la sous-ministre déléguée, veuillez les faire parvenir au greffier, qui nous les distribuera dans les deux langues officielles.
    Bonne journée. La séance est suspendue pendant que nous préparons la comparution du prochain groupe de témoins.

  (1200)  


  (1205)  

    Nous reprenons nos travaux.
    Notre prochain groupe de témoins est composé de M. Daniel Jean, ancien conseiller du premier ministre en matière de sécurité nationale et de renseignement, et de M. Michel Juneau-Katsuya, ancien chef du bureau Asie-Pacifique au Service canadien du renseignement de sécurité.
    Monsieur Juneau-Katsuya, je vais vous céder la parole, après quoi nous écouterons M. Jean.
    Je vous souhaite de nouveau la bienvenue au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre. Je vous remercie d'avoir répondu aussi vite.

[Français]

    Bonjour, messieurs et mesdames.
    Je prie les interprètes de m'excuser, car je n'ai pas de texte écrit, mais je ferai des commentaires relativement courts. Ce sont des commentaires qui font suite aux témoignages que vous avez reçus cette semaine, particulièrement ceux de la Gendarmerie royale du Canada et du Service canadien du renseignement de sécurité, soit la GRC et le SCRS.
    Deux problèmes qui ont été signalés sont, à mon sens, au centre des difficultés auxquelles nous sommes confrontés aujourd'hui. Les problèmes de communication sont le premier. Ces problèmes de communication existent à la fois à l'horizontale et à la verticale. J'entends par là qu'effectivement, il existe des problèmes de communication entre les agences, malgré les discours politiquement corrects que l'on entend de nos hauts fonctionnaires. À l'horizontale, c'est-à-dire entre les agences, il y a des informations qui ne circulent pas comme elles le devraient. Si l'on omet de donner des informations, on ne peut pas dire que l'autre aurait dû les recevoir ou n'a pas fait son travail. Il y a aussi un problème de communication à la verticale, c'est-à-dire la transmission de l'information à partir des agences vers le commandement, soit le bureau du premier ministre ou d'un ministre concerné. Malheureusement, c'est une autre difficulté sur laquelle on doit s'attarder, je crois, pour améliorer les activités et les actions qui doivent être prises lorsqu'on fait face à un problème comme celui qui nous intéresse aujourd'hui.
    L'autre problème est un concept dont vous avez déjà entendu parler: le dilemme entourant le renseignement et la preuve. C'est un problème qui existe depuis la création du SCRS. Le SCRS a été créé, malheureusement, pour les mauvaises raisons historiques. Dès le début, j'y étais. On a reçu l'ordre de ne jamais se placer dans une situation où on aurait à aller témoigner. À travers l'histoire du SCRS, il y a plusieurs exemples où cela a nui à la sécurité nationale. On peut parler d'Air India, on peut parler de l'affaire Adil Charkaoui, on peut parler de l'affaire Ahmed Ressam, on peut parler de l'affaire Jeffrey Delisle. Ce sont des exemples où la communication entre le SCRS et les autres agences, particulièrement la GRC, n'a pas eu lieu comme elle l'aurait dû.
    Ce n'était pas la faute de la GRC, mais celle du SCRS, qui ne voulait pas témoigner et donner des informations. Cela a été mentionné par le commissaire de la GRC. Si l'information vient du SCRS et que la GRC doit aller témoigner en cour, elle aura à identifier l'origine de l'information, ce qui amènera les gens du SCRS à devoir témoigner. Or, c'est ce qu'ils veulent éviter à tout prix. Je dis bien « à tout prix », comme en font foi mes exemples comme celui d'Air India, entre autres. Des gens ont payé le prix pour cette politique inadéquate.
    Ce sont deux grands facteurs très importants que l'on doit pendre en considération dans l'analyse du problème de l'ingérence étrangère auquel on fait face.

  (1210)  

[Traduction]

    Je pourrai répondre en anglais. Je m'excuse, puisque je ne faisais qu'improviser, mais n'hésitez pas à me poser des questions en anglais.
    Je vous remercie, madame la présidente.
    Je vous remercie.
    Nous acceptons les deux langues officielles. N'hésitez jamais à parler la langue qui vous vient à l'esprit, surtout si vous en avez plusieurs en tête. Les deux langues sont bienvenues ici.

[Français]

    Le français est toujours bienvenu, même si la question est posée en anglais.
    Monsieur Jean, vous avez la parole.
    Merci, madame la présidente, pour l'invitation. Je remercie les membres du Comité également.
    J'ai choisi de ne pas faire d'allocution d'ouverture, parce que vous m'avez accueilli à la mi-avril et que j'ai alors fait des commentaires, tant en allocution d'ouverture que par la suite, ce qui vous a donné une bonne idée de mes vues sur le dossier de l'ingérence étrangère. Entre autres, mon avis est qu'il s'agit d'une question beaucoup plus large que la question électorale.

[Traduction]

    En fait, lors de mon témoignage à la mi‑avril, j'ai dit qu'à mon avis, l'une des plus grandes préoccupations demeure la surveillance, l'intimidation et le harcèlement de la diaspora. Fait intéressant, depuis ma comparution, beaucoup de membres de la communauté sont venus en parler, et nous avons également appris qu'un député a été ciblé, ce qui est très important d'un point de vue démocratique.
    Je vais m'arrêter ici. Je serai heureux de répondre à toutes vos questions.
    Même si nous voulons examiner la situation, je pense que nous devons aussi nous attarder aux stratégies et aux mesures à prendre. Dans ce contexte, j'espère qu'à la période de questions d'aujourd'hui, un membre d'un parti quelconque — cela m'importe peu — me demandera de parler de l'expérience australienne. J'ai beaucoup de choses à dire sur la façon de transformer les grandes préoccupations en actions et en stratégies.
    Je vous remercie.
    Je vous remercie, et j'ai une bonne nouvelle: même si personne ne vous pose la question, si vous pensez que ces renseignements sont pertinents pour le Comité, veuillez simplement les envoyer au greffier. Nous ferons traduire le document dans les deux langues officielles. Je peux vous assurer que les membres du Comité sont bien informés, et nous serions ravis de recevoir toute information que vous pourriez nous fournir.
    Je vais donner la parole à M. Cooper, qui sera suivi de M. Turnbull, Mme Gaudreau et Mme Blaney.
    Ce qui a changé depuis votre dernière comparution se rapporte à l'oreillette. Nous vous demandons de la garder soit dans votre oreillette, soit sur le côté. Lorsqu'elle est près du microphone, elle provoque un retour de son, qui crée un bruit horrible dans les oreilles des interprètes. Je vous prie donc de garder l'oreillette à l'oreille ou sur le côté. De préférence, ne la manipulez pas près du microphone, au cas où cela se produirait.
    Monsieur Cooper, vous avez la parole.
    Je vous remercie, madame la présidente.
    Je remercie les témoins de comparaître de nouveau devant le Comité.
    Par votre entremise, madame la présidente, mes questions s'adresseront à M. Jean.
    Monsieur Jean, depuis votre dernière comparution devant le Comité le 18 avril, vous avez rencontré David Johnston, le rapporteur du premier ministre. À la page 26 de son rapport, il confirme que vous êtes l'auteur d'une note de service que le BCP a adressée au premier ministre en 2017, et qui avait été rapportée par Global News. Je vais vous poser des questions qui découlent des conclusions de M. Johnston.
    Avez-vous rédigé la note de service à la demande de Katie Telford, la cheffe de cabinet du premier ministre?
    Tout d'abord, essayons peut-être de clarifier ce qui a été rapporté dans les médias par rapport à la note de service que j'ai envoyée. Je pense que le rapporteur le fait également dans son rapport.
     Selon le rapporteur spécial, les reportages de Global News portaient sur une ébauche de la note de service, à savoir une version préliminaire antérieure qui aurait fait l'objet d'une fuite. Le rapporteur a eu l'occasion de lire cette ébauche, contrairement à moi.
    Ce qui a changé depuis ma comparution à la mi‑avril, c'est que j'ai pu lire ma note de service de juin 2017. De plus, comme il a été divulgué que j'en suis l'auteur, je peux au moins parler du fait que... Je peux dire de façon générale ce qui se trouvait dans la note, à l'exception des renseignements classifiés en soi.
    C'est moi qui ai rédigé la note de service de juin 2017 qui a été envoyée au premier ministre. J'étais l'auteur final, la personne qui l'a signée. C'est exact.

  (1215)  

    Avez-vous préparé les ébauches?
    À vrai dire, j'aurais dû voir une ébauche, n'est‑ce pas? C'est toujours ainsi que les choses fonctionnent. Vous voyez une version préliminaire, vous y apportez des correctifs, puis elle vous revient. Je ne peux pas dire si j'ai vu la version de Global puisque je n'y ai pas eu accès. Je ne vois pas non plus toutes les versions antérieures, de sorte que...
    Est‑ce que Katie Telford, la cheffe de cabinet du premier ministre, vous a demandé de préparer la note de service?
    Je ne me souviens pas que la cheffe de cabinet m'ait demandé de rédiger une note de service. Cela ne veut pas dire que ce n'est pas arrivé. C'est possible dans le contexte... Les responsables ont régulièrement des séances d'information avec le Secrétariat de l'évaluation du renseignement. C'est peut-être ce qu'ils avaient demandé. C'est possible. Mais à mon avis, ce n'est pas arrivé.
    Votre réponse est non, elle ne vous a pas demandé de préparer la note de service.
    À moi? Non. Mais comme je l'ai dit, cela ne veut pas dire que la demande initiale n'a peut-être pas été adressée au Secrétariat de l'évaluation du renseignement, qui donne régulièrement des séances d'information à la cheffe de cabinet et au secrétaire principal.
    Qui était la personne-ressource qui vous a amené à rédiger la note de service?
    Comme je l'ai dit, je peux parler de la note de service en général. Nous voulions la rédiger pour un certain nombre de raisons. Nous étions de plus en plus inquiets de certaines activités de la Chine. Comme je l'ai déjà dit lors de ma dernière comparution, nous étions particulièrement préoccupés à l'époque par la sécurité économique et le fait que la Chine essayait d'acquérir des technologies sensibles.
    En réalité, nous avons aujourd'hui un bon exemple de situation où le Canada a agi de façon très responsable. Nous sommes perçus comme l'un des pays ayant considérablement affuté ses outils pour protéger les technologies sensibles et le reste. Je peux en dire plus à ce sujet dans d'autres...
    Comme je l'ai mentionné lors de ma dernière comparution, avant les élections de 2015, j'étais sous-ministre des Affaires étrangères. Nous avions envoyé un avis aux missions diplomatiques leur demandant de ne pas se mêler des élections. Nous constations une crainte grandissante que des acteurs étatiques étrangers tentent peut-être d'entrer en contact avec des gens à l'échelle locale. Nous avions des préoccupations à l'égard de nos recherches. Nous étions inquiets étant donné qu'il y avait beaucoup de corruption à l'époque, comme vous vous en souvenez probablement.
    Je vous remercie, monsieur Jean. Je m'excuse de vous interrompre, mais mon temps est limité.
    Pour reprendre là où vous vous êtes arrêté, M. Johnston dit dans son rapport qu'une version antérieure de la note de service contenait un libellé semblable à celui qui a été rapporté par Global News le 8 février, à savoir que les agents de Pékin « aidaient des candidats canadiens aux élections ». Cependant, M. Johnston précise que « cette ébauche a fait l'objet d'une importante révision avant que la note de service soit envoyée au premier ministre », et le passage sur l'avertissement à propos de Pékin a été retiré.
    Qui a refusé d'inclure l'avertissement initial selon lequel Pékin aidait les candidats canadiens aux élections?
    Premièrement, je n'ai pas vu l'ébauche de note de service que Global News est censé avoir vue. En fait, M. Johnston semble avoir vu une ébauche différente de celle dont M. Cooper a parlé.
    Deuxièmement, la note que j'ai envoyée mettait en garde contre toutes sortes d'activités d'ingérence étrangère menées par la Chine, et nous ne nous sommes certainement pas opposés à ce que le gouvernement soit sensibilisé. À vrai dire, l'une des principales raisons pour avoir rédigé la note, en plus de sensibiliser le gouvernement à propos de la nécessité d'être très conscient de la situation, était que nous venions d'avoir les élections américaines, et on mettait beaucoup l'accent sur la cyberingérence étrangère. Nous voulions que le gouvernement sache que les outils que nous allions mettre au point, quels qu'ils soient, devaient être également efficaces pour lutter contre l'ingérence étrangère non numérique. En fait, les outils adoptés après le groupe de travail spécial — le protocole et tout le reste — s'appliquaient autant à la cyberingérence étrangère qu'à l'ingérence non numérique.
    Vous avez approuvé la note de service définitive.
    M. Daniel Jean: Oui.
    M. Michael Cooper: Le libellé de la note de service définitive a été, comme M. Johnston l'a dit, considérablement révisé. On a laissé entendre que ce devrait être général et qu'aucun pays ne devait être nommé. Pourquoi?

  (1220)  

    Non.
    Tout d'abord, ce n'est pas ce que dit le rapport du rapporteur. Il dit que nous devons faire preuve de prudence, peu importe les mesures que nous prenons. Il parlait de prendre des mesures. En ce qui concerne la note de service, il était très évident que nous avions des préoccupations par rapport à la multiplication des activités d'ingérence étrangère de la Chine.
    Merci.
    En fait, la première chose que la conseillère juridique principale du rapporteur m'a dite, c'est que notre note de service est très claire.
    Excellent. Merci de votre réponse.
    Monsieur Turnbull, vous avez six minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Merci aux témoins d'être ici aujourd'hui. Je suis heureux de vous revoir. La saga se poursuit dans ce dossier — et c'est un dossier important —, et il est donc formidable de vous revoir et d'ajouter votre expertise au reste.
    Monsieur Jean, ma première question sera pour vous.
    Vous avez évidemment lu le premier rapport du très honorable David Johnston. En général, souscrivez-vous aux conclusions de son rapport?
    Je souscris généralement aux conclusions, oui.
    Merci.
    Je ne souscris pas à toutes les conclusions, mais en général, oui.
    Merci beaucoup.
    Je pense que vous avez mentionné avant qu'une grande partie de l'accent, depuis plusieurs années, a été mis sur les signaux d'alarme pendant les élections américaines. De nombreuses activités d'ingérence ont augmenté le niveau d'alerte pour le Canada. Vous avez mentionné la cyberingérence ou la désinformation.
    Est‑ce que cela provenait principalement de la Russie?
    C'était principalement attribuable à la Russie.
    En même temps, nous étions très préoccupés par un certain nombre de choses liées à la Chine. J'ai parlé de la sécurité économique. Vous ne devez pas oublier que, à l'époque, Xi Jinping menait une importante campagne anticorruption. On a fait valoir que certaines de ses cibles correspondaient plus à des rivaux politiques. Nous voulions indiquer très clairement que la Chine ne devait pas, de quelque manière que ce soit, prendre des mesures au Canada, essayer de s'en prendre aux personnes qu'elle considérait comme des fugitifs. Nous avons également eu plusieurs discussions avec la Chine sur l'importance de passer par les voies normales.
    Il ne fait aucun doute que beaucoup de nos discussions concernant l'ingérence étrangère portaient principalement sur la Chine, mais je fais remarquer que le Service canadien du renseignement... et d'autres rapports publiés depuis des années ont identifié d'autres acteurs étatiques qui tentent également de s'ingérer dans les activités et les institutions démocratiques du Canada.
    Monsieur Jean — je vais passer à M. Juneau-Katsuya dans une seconde —, je veux savoir si vous pensez que tout processus public à l'avenir, peu importe la forme qu'il prend, devrait aborder l'ingérence étrangère de façon globale et inclure ces autres acteurs étatiques.
    Tout d'abord, à propos des autres acteurs étatiques, lors de ma comparution d'avril, j'ai effectivement mentionné qu'il y a d'autres pays, notamment lorsqu'il s'agit d'activités de surveillance et d'intimidation de la diaspora.
    Pour répondre à votre deuxième question, je suis persuadé qu'il est temps pour nous de nous concentrer sur le diagnostic du problème. Le processus, quel qu'il soit, que nous adopterons pour tirer encore plus au clair la situation ne devrait pas, selon moi, retarder davantage les mesures qui doivent être prises.
    Merci.
    Monsieur Juneau-Katsuya, qu'en pensez-vous?
    Notre approche dans le processus public qui sera utilisé à l'avenir, quel qu'il soit... On s'apprête à prendre une décision, j'en suis certain — la forme que cela prendra fait l'objet de négociations. L'approche devrait-elle être globale et inclure d'autres acteurs étatiques, Pékin et aussi d'autres pays?
    Sans aucun doute. Nous devons être en mesure, à ce stade‑ci, de sensibiliser la population générale au même moment. Ce sera un des objectifs ou une des fins de cette enquête d'ordre général.
    En même temps, on a recueilli beaucoup de connaissances grâce aux différents comités. Plus de 350 témoins ont comparu devant le Parlement à différents niveaux. Je pense que nous comprenons bien la situation.
    Je suis d'accord avec M. Jean lorsqu'il dit qu'il est urgent de passer à l'action et de prendre des mesures concrètes, car le prix que nous payons maintenant collectivement est énorme. Les gens perdent confiance dans leurs élus, dans les dirigeants du pays et dans les institutions. Pire encore, nos alliés perdent confiance dans notre capacité de régler le problème.
    Merci.
    La dernière fois, monsieur Juneau-Katsuya, je vous ai posé une question sur le premier ministre Harper, car vous aviez fait des observations sur le nombre de ces menaces qui remonte à plus de 30 ans et sur la façon dont chaque gouvernement a été influencé ou compromis dans une certaine mesure. Vous avez dit que le premier ministre Harper est devenu laxiste par rapport à la Chine.
    Ce qui m'intéresse aujourd'hui, c'est de savoir s'il y a...

  (1225)  

[Français]

    J'invoque le Règlement, madame la présidente.

[Traduction]

    M. Berthold invoque le Règlement.

[Français]

    Madame la présidente, j'invoque le Règlement pour une question de pertinence.
    Nous sommes ici pour étudier le cas de M. Michael Chong, et je ne vois pas en quoi M. Harper a un lien avec la question dont nous discutons aujourd'hui.

[Traduction]

    J'encourage toujours la pertinence, mais nous avons élargi la question de privilège pour inclure l'ingérence étrangère dans les élections. En fait, c'est un collègue conservateur qui a présenté la motion. Tant que c'est lié à l'ingérence étrangère, j'estime que c'est pertinent, mais j'encourage toujours les gens à s'en tenir au sujet à l'étude, s'il vous plaît.
    Merci, madame la présidente.
    C'est pertinent. Il y a de l'ingérence étrangère depuis longtemps. C'est ce que M. Juneau-Katsuya a dit.
    En 2014, le premier ministre Harper a signé un accord de 31 ans avec la Chine. Je veux vous demander si on a exprimé des préoccupations à l'époque. Il y a eu des reportages des médias. Je viens tout juste de regarder certains de ces reportages réalisés auprès de spécialistes de la sécurité et du renseignement qui ont signalé que c'était une réelle préoccupation.
    Y a‑t‑il eu des conséquences sur la sécurité nationale du Canada et, en ce qui a trait à nos relations commerciales, nous sommes-nous retrouvés dans une position vulnérable d'une certaine façon?
    Je vais vous demander de répondre en premier, monsieur Juneau-Katsuya, et ce sera ensuite au tour de M. Jean.
    Je suis d'accord. J'ai effectivement dit, et je vais le répéter encore une fois, que depuis M. Mulroney, chaque premier ministre a été compromis d'une façon ou d'une autre, ce qui a mené à des décisions discutables en ce qui a trait aux intérêts du Canada. Nous croyons que c'est attribuable à l'agent d'influence qui a réussi à accéder au processus décisionnel.
    Donc, oui, M. Harper — et je paraphrase — a pris de mauvaises décisions, mais il n'est pas le seul, malheureusement. C'est la raison pour laquelle il est maintenant important de s'attaquer collectivement au problème.
    Dans le même ordre d'idées, je veux vous poser une question concernant l'Accord sur la promotion et la protection des investissements étrangers et l'accord commercial. Ces accords ont-ils sérieusement compromis la sécurité nationale du Canada pour ce qui est de la capacité de la Chine à s'ingérer dans nos affaires?
    Monsieur Jean, vous pourriez peut-être répondre à celle‑ci.
    À vrai dire, je vais...
    M. Ryan Turnbull: Faites preuve de la même indulgence à mon égard.
    La présidente: Si c'est une réponse d'un mot, je peux vous accorder le temps. Autrement, nous allons passer au prochain tour.
    Allez‑y, monsieur Jean.
    N'oubliez pas qu'il a été signé et qu'il a fallu attendre deux ans avant sa ratification, et certaines des préoccupations liées à la sécurité nationale étaient certainement au cœur des échanges, mais dans tous nos accords commerciaux, dans nos accords sur la promotion et la protection des investissements étrangers, nous avons toujours protégé notre capacité de faire des examens relatifs à la sécurité nationale. D'autres pays ont fait l'erreur de ne pas le faire; ce n'est pas notre cas.
    Merci.
    Madame Gaudreau, vous avez la parole.

[Français]

    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Je remercie les témoins de leur présence.
    Nous avons rencontré plus de 60 témoins depuis que nous étudions cette question, soit depuis le mois de novembre. Je n'ai pas votre expertise, et j'aimerais que vous me disiez si je fais un bon portrait de la situation.
    Nous avons entendu qu'il y a manifestement un manque relativement à la culture du renseignement au Canada et un manque d'intérêt de la part des ministres et du premier ministre.
     Ce manque d'intérêt fait qu'on laisse souvent des rapports de renseignements tomber entre deux chaises. D'ailleurs, j'ai cru comprendre que c'était systémique. Cela peut ultimement mener à la non-lecture de documents. C'est ce que nous essayons de comprendre, et c'est la raison pour laquelle nous avons invité M. Mendicino. De plus, cela peut aussi faire que le Service canadien du renseignement de sécurité est négligé et pas assez financé. On nous a donné des chiffres à cet égard dernièrement. Je me demande si la faible crédibilité du Canada le rend dépendant du Groupe des Cinq. Cela m'amène aussi à penser que c'est la raison pour laquelle nous sommes exclus du pacte de sécurité AUKUS. J'essaie de faire des liens, mais peut-être que le Canada n'est pas assez sérieux sur le plan de la défense. Personnellement, je crois que cela ne fait aucun doute.
    Selon vous, sommes-nous vraiment bien protégés?
    Merci pour la question.
    Effectivement, on l'a entendu de plusieurs témoins en poste et de hauts gradés.
    On a d'excellents enquêteurs au Canada, on a une excellente réputation sur le plan opérationnel. Par contre, sur le plan politique, on se tire une balle dans le pied, c'est-à-dire qu'on a pris beaucoup trop de temps à prendre certaines décisions.
    Prenons l'exemple de l'affaire Huawei.
    Nos alliés du Groupe des cinq ont pris leur décision relativement rapidement, alors que le Canada a beaucoup trop traîné. Cette ambivalence vient appuyer le témoignage ici, à savoir que, depuis les années 1990, on parle de l'existence d'une opération en provenance des États‑Unis qui s'appelait Dragon Lord. Cette opération visait à surveiller les activités et les actions politiques au Canada, et que l'on suspectait soit d'être influencée ou d'avoir été infiltrée ou de ne pas prendre les décisions adéquates pour protéger l'alliance du Groupe des cinq et éventuellement aussi la sécurité canadienne. Malheureusement, les actions semblent aller dans cette direction.
    Dès les années 1990, si des alliés, comme notre allié le plus rapproché, c'est-à-dire les États‑Unis, se préoccupent justement des décisions, ils ont noté exactement ce que, moi, à mon époque, comme chef du bureau Asie‑Pacifique, j'avais aussi tenté d'alerter. Toutefois, on nous a demandé de détruire le rapport plutôt que d'en prendre note.
    Ce sont effectivement ces problèmes qui ont persisté, qui n'ont fait qu'amplifier au fil des années, et qu'on a pas vu voir de plus en plus d'audace de la part de certains pays, dont la Chine en particulier, dans leurs activités et de prendre beaucoup plus de place pour s'ingérer à tous les niveaux, tant sur le plan économique, académique que politique, voire dans les communautés, évidemment.

  (1230)  

    Je vous remercie, vraiment.
    J'aimerais aussi offrir à M. Jean la possibilité de répondre, parce que cela m'amène à la stratégie et à l'action.
    Mes propos, d'entrée de jeu, est-ce que c'était une...
    Pour mon premier point, j'aborderais les deux entrées en matière que vous avez faites, c'est-à-dire le manque de culture et le manque d'intérêt politique.
    Par exemple, si on regarde les rapports auxquels a fait allusion M. Rigby la semaine dernière, soit celui de l'Université d'Ottawa, auquel j'ai participé également, et celui de CIGI, soit le Centre pour l'innovation dans la gouvernance internationale, on parle du manque de culture. Cependant, lorsqu'on écrivait ces rapports, on se demandait parfois si le manque de culture faisait également... On se demandait s'il n'y avait pas autant d'intérêt politique que lorsqu'il y a une crise comme celle-là. Il faut vraiment faire preuve de plus de maturité en matière de sécurité nationale. C'était le premier point.
    Quant aux rapports de renseignement, lorsque vous regardez le cas présent, c'est certain qu'il y a eu un problème. Il faut donc aller au-devant de cela. et trouver des façons d'apporter des correctifs, mais il ne faudrait quand même pas généraliser.
    J'ai servi de près le premier ministre Harper dans des fonctions différentes et j'ai servi comme conseiller à la sécurité nationale auprès du premier ministre Trudeau, et je peux vous dire qu'en général, les renseignements qui demandaient des actions ou qui devaient au moins susciter des demandes d'information parvenaient au premier ministre et aux ministres. Souvent, les bonnes actions ont été prises.
    La note de service de juin 2017 est un très bon exemple. Cette note de service visait à sensibiliser les personnes concernées aux actions d'ingérence étrangère de la Chine. Dans le contexte d'essayer de mieux protéger nos élections, il ne fallait pas juste penser d'un point de vue de cybersécurité, il fallait aussi penser d'un point de vue analogue. Les instruments ont été faits dans ce sens.
    En ce qui concerne votre allusion au Groupe des cinq, on ne sera jamais des contributeurs en volume comme les États‑Unis ou la Grande‑Bretagne. On n'a pas les ressources. Dans les conversations que j'ai depuis des années avec ces gens, on soulève toujours le fait que c'est la valeur ajoutée qui est plus importante que le volume.
    Pour revenir à ce que vous avez dit d'entrée de jeu, il faut que le Canada sensibilise les Canadiens à l'importance de cet enjeu. C'est la raison pour laquelle il faut constamment ajuster nos instruments. C'est ce que disait M. Juneau‑Katsuya à la fin de sa réponse.
    Il me reste quelques secondes.
    J'ai posé la question au ministre de la Sécurité publique, à savoir s'il avait failli à sa responsabilité. Techniquement, ce n'est pas vrai qu'il ne peut pas avoir d'informations.
    Croyez-vous que c'est ça qui est arrivé? J'ai l'impression qu'il y a quelques décennies, l'information circulait déjà.
    Lorsque j'ai parlé du problème de la communication à la verticale, c'est exactement ce à quoi je faisais allusion.
    Lorsque j'ai parlé dans mes témoignages antérieurs que, malheureusement, on a observé que certaines informations parvenaient au plus haut niveau, mais que pour des raisons personnelles, partisanes ou encore simplement parce que des personnes avaient été mal guidées, on a pris les mauvaises décisions.
    Je vous remercie, madame la présidente.
    Merci à vous.

[Traduction]

    Allez‑y, madame Blaney.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Je remercie les deux témoins d'être ici aujourd'hui.
    L'une des questions que je continue de poser se rapporte à la nécessité de mettre à jour la loi.
    Je vais la poser aux deux témoins.
    Je vais commencer par vous, monsieur Jean, parce que je vais lire ce que vous avez dit lorsque vous nous avez visités ici le 18 avril. Vous avez parlé du fait que nous n'avions pas revu la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité, le SCRS, « depuis 1984 ». Vous avez dit que nous « devrions en faire un examen périodique » et qu'il « ne devrait pas se limiter à une revue mécanique de la loi, mais déboucher sur de nouvelles mesures. »
    Je me demande si vous pouvez parler un peu — et, comme je l'ai dit, la question est pour les deux témoins — de ce qu'il faut examiner et des mesures législatives que nous avons vues dans d'autres pays qui pourraient le plus aider le Comité à cerner les meilleurs processus pour informer les députés qui sont pris pour cibles afin qu'ils sachent notamment quoi faire pour protéger leurs propres intérêts, mais aussi ceux des membres de leur famille.

  (1235)  

    Madame la présidente, c'est une excellente question.
    Dans une certaine mesure, les lacunes de la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité sont au cœur de ce que vous examinez en ce moment. Lorsque les médias ont initialement signalé l'affaire Chong, compte tenu de mes fonctions, des voisins et d'autres personnes me posaient toujours des questions à ce sujet. Ma première réaction, puisque je connais Michael Chong depuis plusieurs années, a été d'avoir tendance à le croire lorsqu'il a dit qu'il n'avait pas été informé, car je pense que c'est une personne d'une très grande intégrité. En même temps, j'ai beaucoup de respect pour les responsables de la sécurité nationale et le SCRS, et j'ai vraiment de la difficulté à croire que si le SCRS avait eu l'information, il n'aurait pas pris de mesure. Ce qui me préoccupe, c'est qu'il était peut-être très limité dans ce qu'il pouvait communiquer à M. Chong, puisqu'il n'y a pas de mesure législative.
    Deuxièmement, même si j'ai beaucoup de respect pour le SCRS, je vais revenir à mon dernier témoignage. Maintenant que les « joyaux de la Couronne » ne sont plus au gouvernement, le SCRS doit changer sa culture relativement à la façon dont il communique avec les gens lorsqu'il détient ce genre d'information, pour qu'ils en sachent assez pour se protéger. Lorsque j'étais conseiller à la sécurité nationale et au renseignement, des gens du secteur privé venaient me dire que je devrais être préoccupé par la situation, mais ils n'en disent pas plus, ce qui signifie qu'on n'a pas assez d'information pour savoir quelle posture il faut adopter. La réalité, c'est que la loi ne leur permet pas de le faire.
    [Difficultés techniques] mettre à jour la Loi sur le SCRS. Un registre des agents étrangers est une bonne chose. Ce n'est toutefois pas une panacée en soi. Nous devrions régulièrement mettre à jour nos mécanismes de sécurité nationale. Nous devons faire quelque chose par rapport à la collecte de renseignement et d'éléments de preuve. Je dirais que nous devrions commencer par quelque chose de limité et voir si cela fonctionne. Nous devrions travailler avec des groupes de défense des libertés civiles pour nous assurer que les gens sont encore équitablement défendus. Un certain nombre de choses peuvent être faites. De la sensibilisation, de la prévention... c'est également très important.
    Je vois.
    Plus tôt aujourd'hui, le ministre a parlé de la directive ministérielle qui vient tout juste de faciliter l'échange d'information. Il semble penser que c'est la solution. Je crois quant à moi que la solution est législative. Je me demande ce que vous en pensez.
    Le problème, c'est que si vous allez trop loin... À l'heure actuelle, à cause de ce qui s'est produit, tout le monde voit d'un bon œil la directive ministérielle et veut s'assurer que les députés sont protégés.
    Le hic, c'est que si vous allez trop loin au moyen d'une directive ministérielle sans légiférer, à un moment donné, des gens, les tribunaux, diront que vous avez peut-être dépassé les limites. Vous avez besoin des deux. Vous devez moderniser nos instruments. D'autres pays mettent à jour leur législation sur la sécurité nationale presque tous les trois ou quatre ans. Nous ne le faisons pas régulièrement.
    Merci.
    Monsieur Juneau-Katsuya, j'ai une question pour vous. Lors de votre comparution devant le Comité le 11 mai, vous avez dit que, bien entendu, le processus de nomination présente l'une des plus grandes lacunes. Nous savons que chaque parti a son propre processus. Lorsque nous nous penchons là‑dessus et que nous constatons qu'il y a une lacune, que nous voyons qu'il manque peut-être d'information ou de sensibilisation au sein du parti, comment pouvons-nous la combler?
    Il est très important que dans les rôles que le gouvernement joue, il ne soit pas perçu comme étant partisan, mais il me semble que les partis eux-mêmes ont besoin d'information pour remédier à ce genre de lacunes particulières qui mènent à une plus grande vulnérabilité. Je me demande juste si vous avez des recommandations pour nous à ce sujet.
    Absolument. D'emblée, c'est une question de communication et de sensibilisation du grand public.
    Je vais également poursuivre dans la même veine que M. Jean. En tant que pays, nous devons évoluer et mieux comprendre en quoi consistent la sécurité nationale et le rôle que chaque personne joue à cet égard au pays.
    J'ai suggéré et recommandé, par exemple, que les candidats de chaque parti signent une déclaration, sur la foi de leur honneur, qui dit qu'ils n'ont pas été influencés par un État étranger ou qu'ils n'agissent pas sous l'autorité d'un État étranger. Même chose pour leur personnel.
    Si l'on se fie uniquement aux allégations et aux reportages des médias, on dirait que, en 2019, certaines personnes étaient payées par un autre pays. Nous devons être en mesure d'avoir ce genre de processus, car si nous constatons plus tard qu'ils ont menti, ils devraient être poursuivis.
    N'oublions pas une chose: l'ingérence étrangère n'est pas seulement attribuable à des diplomates. Il y a aussi des Canadiens qui aident ces personnes, et ce qu'ils font revient presque à trahir leur pays.

  (1240)  

    Merci pour ces explications.
    Merci.
    Monsieur Cooper, vous êtes le suivant.
    Madame la présidente, pour ma dernière question, je veux poursuivre dans la même veine avec M. Jean.
    Le rapport de M. Johnston dit qu'une des premières ébauches de la note de service de 2017 faisait allusion ou contenait un langage semblable à celui de Global News. Il était question d'agents de Pékin qui aidaient des candidats canadiens à se lancer en politique. Vous avez dit que vous n'avez pas vu cette ébauche de la note de service, si je vous ai bien compris.
    Dans son rapport, M. Johnston affirme qu'elle a ensuite été révisée:
Cette note de service l'avertit [...]
    ... c'est‑à‑dire le premier ministre...
[...]  que des efforts publics de sensibilisation devraient rester généraux et ne pas cibler des pays en particulier, en raison de sensibilités diplomatiques.
    Je vous le demande encore: pourquoi a‑t‑on décidé, par exemple, de ne pas nommer Pékin ou de ne pas attirer l'attention sur la menace posée par Pékin? Pourquoi a‑t‑on changé le libellé?
    La note indique très clairement que nous devons nous soucier de la Chine et qu'il y a des préoccupations croissantes. Elle donne toutes sortes d'exemples. Je ne vais pas entrer dans tous les détails.
    Dans ce contexte, dans le cadre du travail que nous allons essayer de faire pour protéger nos élections — car des efforts étaient déployés avec la ministre des Institutions démocratiques pour élaborer certains des mécanismes à respecter —, nous devrions également nous assurer d'avoir des mécanismes pour gérer les menaces semblables à celles que je viens de décrire.
    À propos de la phrase à laquelle vous avez fait allusion, je veux vous rappeler qu'à l'époque, le SCRS n'avait pas encore commencé à nommer la Chine dans son rapport annuel sur l'ingérence étrangère. Ce n'est que récemment qu'il a commencé à le faire.
    La note de service encourage les responsables à inclure dans les mesures de lutte contre l'ingérence étrangère... Elle ne dit pas de ne rien faire. Elle dit juste qu'on voudrait peut-être ménager les relations étrangères dans le cadre des mesures prises.
    Je vous remercie de cette réponse.
    Je vais maintenant céder le reste de mon temps de parole à M. Berthold.

[Français]

    Merci, monsieur Cooper.
    Tout à l'heure, monsieur Jean, lorsqu'on vous a demandé si vous étiez d'accord avec les conclusions du rapport de M. Johnston, vous avez dit d'entrée de jeu que vous étiez globalement d'accord, mais qu'il y a certains points sur lesquels vous aviez des réticences. Est-ce possible de nous faire parvenir la liste des points sur lesquels vous avez des réticences?
    Je ne pense pas que c'est dans l'intérêt de ce que vous essayez de faire ici. Il me fera plaisir de vous envoyer, par contre, les suggestions que j'ai faites à M. Johnston sur la façon dont nous pourrions mieux nous équiper pour vaincre l'ingérence étrangère.
    J'aimerais juste être clair. Tout à l'heure, lorsque j'ai répondu à cette question, je voulais dire qu'on me demandait d'évaluer le rapport dans son ensemble. J'ai dit que, en général, je suis d'accord avec ce qui ressort du rapport, mais qu'il y a, ici et là, des choses avec lesquelles je ne suis pas d'accord.
    Ces choses nous intéressent beaucoup. Étant donné les connaissances que vous aviez en tant que conseiller à la sécurité nationale, cela nous intéresse de savoir ce avec quoi vous n'êtes pas d'accord dans le rapport. Je ne pose pas d'autres questions là-dessus. Toutefois, si c'est possible, j'aimerais que vous puissiez faire parvenir ces points de désaccord au Comité, parce que, justement, c'est la transmission de l'information qui est au cœur du problème.
    Nous avons entendu parler d'un trou noir lors de la comparution de Mme Judy Thomas, de notes qui ne se rendent pas au destinataire, même s'il s'agit du ministre ou du premier ministre. C'est donc très important. Je me mets dans la peau des gens qui nous regardent actuellement alors que nous parlons de processus.
    Par exemple, vous avez signé une note d'information en juin 2017. La note finale, celle lue par le premier ministre, est une note dont une version antérieure parlait du financement d'un réseau de candidats. Toutefois, il n'est pas clairement indiqué qui a demandé la note d'information et qui travaille sur ces notes. Comment ça fonctionne? Qui les approuve? Qui décide au bout du compte? C'est votre signature qui est là, mais qui décide ultimement de ce qui va être transmis ou pas au premier ministre? Combien de personnes vont intervenir dans ces notes? Qui sont ces personnes? Y a-t-il du personnel politique?

  (1245)  

    Certainement pas; la réponse à votre dernière question est non.
    Évidemment, nous travaillons en équipe. Il s'agit d'un effort collectif, mais lorsqu'on voit...
    Qui fait partie de cette équipe?
    Lorsqu'on parle d'une note de service qui vient du Bureau du Conseil privé et que suffisamment d'éléments ont évolué, ce qui fait que le premier ministre doit en être informé ou que des recommandations doivent être formulées, c'est l'équipe du conseiller à la sécurité nationale et au renseignement qui décide de rédiger la note.
     Il peut arriver que quelqu'un de la classe politique ait vu un rapport de renseignements et demande plus d'information sur le sujet. Les notes sont préparées par les membres de mon équipe, mais, ultimement, c'est le conseiller qui les signe. Comme je le disais, la note de juin 2017 était très claire: on était en droit d'être préoccupé et il fallait tenir compte des mesures à prendre pour ce qui est des élections. Ces mécanismes ont été mis en place.
    Ce qui n'est pas clair, c'est le processus ayant mené à la note finale. Pourquoi cette note a-t-elle évolué d'une telle façon qu'une version qui a été rendue publique...
    Permettez-moi de vous donner un exemple, monsieur Berthold.
    À cette époque, les rapports du Service canadien du renseignement de sécurité mélangeaient souvent les relations diplomatiques, c'est-à-dire les choses que les diplomates canadiens font à l'étranger, et les choses qui relevaient réellement de l'ingérence étrangère. J'ai soulevé cela auprès du directeur de l'époque, et celui-ci a fait une excellente suggestion. Nous nous sommes donc assis avec ses analystes qui connaissent le mieux la Chine. Nous nous sommes penchés sur les différents types d'exemples pour déterminer ce qui était assurément de l'ingérence étrangère et ce qui relevait du rôle des diplomates canadiens. Nous voulions améliorer la nature du renseignement, pour être capable de...
    Merci, monsieur Jean.
    Monsieur Berthold, vous avez laissé M. Jean terminer sa réponse, et c'est la raison pour laquelle je vous ai donné un peu plus de temps de parole. Si on fonctionne comme cela, je n'ai pas de problème à donner plus de temps de parole.

[Traduction]

     Madame Romanado, vous avez la parole.
    Merci beaucoup, madame la présidente. Par votre intermédiaire, j'aimerais également remercier les témoins de leur présence.
    La réunion d'aujourd'hui porte sur la question de privilège concernant la campagne d'intimidation envers le député Chong. Monsieur Jean, vous avez été le conseiller du premier ministre en matière de sécurité nationale et de renseignement de mai 2015 à mai 2018. En ce qui concerne les détails de la question de privilège, vous n'occupiez plus ce poste lorsque ce problème précis s'est produit avec le député Chong. Nous comprenons maintenant, d'après le témoignage du directeur du SCRS, que la note de gestion des questions d'intérêt a été présentée suite aux sanctions, dans la foulée du vote de février 2021 sur la motion présentée à la journée de l'opposition à la Chambre des communes. Je vais avoir des questions à vous poser à vous deux en raison de votre expertise en matière de renseignement.
    Monsieur Juneau-Katsuya, vous avez mentionné quelque chose en réponse à une question précédente portant sur les candidats qui se présentent aux élections et qui sont susceptibles de manquer de loyauté envers le Canada, et ainsi de suite. Comme vous le savez tous les deux, j'en suis certaine, le 28 juin 2017, l'Assemblée populaire nationale de la RPC a adopté la Loi sur le renseignement national, et a énoncé les grandes orientations de la première autorisation officielle du renseignement en RPC. Voici une citation:
Une tendance importante et soutenue dans la structure juridique de la sécurité nationale mise en place depuis 2014 ressort clairement dans la Loi: la sécurité nationale est l’affaire de tous. Tant que les institutions actives dans le domaine du renseignement national respectent les pouvoirs qui leur ont été conférés dans l’exercice de leurs fonctions, elles peuvent, conformément à l’article 14, « demander aux organes, aux organisations et aux citoyens compétents de leur assurer le soutien, l’aide et la coopération nécessaires. »
    Sur la base de ces modifications législatives, pourriez-vous nous faire part de vos commentaires sur le changement de posture du Canada en ce qui concerne la collecte de renseignements? Nous savons que le poste de conseiller à la sécurité nationale est passé à celui de conseiller à la sécurité nationale et au renseignement le 28 avril 2017. Nous savons également que l'enjeu du renseignement s'est accru en fonction de nos capacités et de nos priorités. Pouvez-vous nous aider à mieux comprendre comment cela a changé la posture du Canada en matière de collecte de renseignements?

  (1250)  

    D'abord, cette nouvelle loi met de l'avant l'image d'agressivité que la Chine a décidé de montrer à la face du monde entier. Il faut comprendre que les services de renseignements chinois sont essentiellement contrôlés par le comité central du Parti communiste.
    Cette nouvelle loi envoie également un message à l'ensemble des membres de la diaspora chinoise: ils seront obligés de collaborer avec les services de renseignement de leur pays d'origine, sous peine d'être potentiellement accusés de trahison. Il est donc question d'un conflit d'intérêts imposé aux Chinois qui vivent à l'étranger, et d'une forme de pression exercée par le régime.
    Malheureusement, la compréhension du fonctionnement des services de renseignement chinois et du gouvernement communiste chinois échappe encore à de nombreuses agences de renseignement occidentales, et notamment le SCRS. En effet, le SCRS a adopté depuis la guerre froide une perspective eurocentrique et axée sur la compréhension de la Russie. Cependant, les méthodes de renseignements de la Chine diffèrent de celles de la Russie. En raison de son gouvernement non élu, la RPC a le loisir d'agir sur le temps long, et ses activités de renseignements peuvent ainsi s'échelonner sur 5, 10, 15, voire 20 ans. Le temps n'est absolument pas un problème pour le régime chinois.
    À cet égard, nous savons que, selon l'indice de distance de puissance établi par Hofstede, la RPC agit dans la durée, et que par conséquent, leur collecte de renseignements peut prendre 10 ou 15 ans. Êtes-vous d'accord avec cette analyse?
    Tout à fait.
    Dans le contexte, le Canada est désavantagé, car nos services de renseignements doivent obtenir des résultats très rapidement; autrement, les priorités opérationnelles changent. Voilà pourquoi, dans une certaine mesure, notre population a été mal servie, parce que nous n'avons pas été en mesure d'accumuler des renseignements pendant suffisamment de temps.
    Je tiens à rappeler que la GRC a effectué un excellent travail pour essayer de rattraper son retard depuis que cet enjeu a été soulevé. Selon moi, elle a fait d'excellents progrès en matière d'implication auprès de la communauté chinoise au Canada, comme en a témoigné le commissaire. Je crois ce qui a été dit à ce sujet.
    Malheureusement, le Canada a accumulé du retard en matière de collecte de renseignements. Par ailleurs, je remarque des lacunes en ce qui concerne la communication horizontale entre le SCRS et la GRC.
    Mme Sherry Romanado: Je vous remercie.
    Je vous remercie, madame Romanado.
    Madame Gaudreau, à vous la parole.

[Français]

    Merci beaucoup, madame la présidente.
    J'ose me projeter dans un avenir rapproché. Si vous étiez premier ministre, ministre de la Sécurité publique ou chef de cabinet, et qu'il restait quelques jours avant la fin de la session parlementaire, que feriez-vous dès maintenant, pour l'avenir?
    Il ne reste que très peu de temps, mais immédiatement, on se doit de se préparer à se doter d'une loi sur l'ingérence étrangère. L'un des gros problèmes pour les forces de l'ordre, à l'heure actuelle, c'est qu'il est difficile d'enquêter là-dessus et de faire en sorte que les personnes ayant commis des actes répréhensibles soient traduites en justice. C'est parce que le Code criminel et la Loi sur la protection de l'information ne nous protègent pas adéquatement. Il y a des dispositions concernant l'espionnage économique ou industriel et d'autres choses de ce genre, mais pour l'ingérence étrangère, c'est-à-dire le fait d'intimider des communautés et de recruter des politiciens pour collaborer avec eux, on doit se doter d'une loi, comme l'Australie, l'Angleterre et les États‑Unis l'ont fait.
    Alors, dans un premier temps, il faut agir sur le plan législatif.
    Monsieur Jean, avez-vous un autre conseil?
    Je suis tout à fait d'accord. Je pense qu'on doit aller au-delà de la partisanerie. Oui, il y a un processus à suivre, et les partis vont s'entendre là-dessus, mais on devrait affûter nos instruments, dont nos lois, comme la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité, les pénalités pour l'ingérence étrangère, le registre, etc. Il faut essayer de faire quelque chose de ce côté-là. C'est exactement ce que les Australiens ont fait.
    En 2017, les Australiens étaient dépassés par la question de l'ingérence étrangère. Ils sont allés chercher un journaliste qui était un expert sur la Chine, John Garnaut. Il est allé en Australie et a travaillé avec l'équivalent australien du SCRS, puis il a produit un rapport. Celui-ci était classé secret, mais c'est ce qui a été à l'origine de toutes les mesures prises par les Australiens, qu'il s'agisse de leurs politiques, de leur registre d'agents étrangers, de leurs pénalités plus sévères pour l'ingérence étrangère ou des mesures visant à protéger les représentants élus. Il faut donc se donner une bonne stratégie à l'égard de tous ces éléments, et je pense qu'il y a moyen de le faire.

  (1255)  

    C'est quelque chose à faire en parallèle.
    Oui, il faut le faire en parallèle, sinon...
    On peut marcher et mâcher de la gomme en même temps, car on demande une enquête publique indépendante. Ici, nous sommes au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre. Ce n'est pas une commission d'enquête.
     Êtes-vous d'accord qu'une enquête publique est nécessaire?
    Oui, c'est rendu nécessaire, parce que le peuple canadien se doit d'avoir des mesures claires et de voir que son gouvernement prend la chose au sérieux. Comme M. Jean vient de le dire, il se doit de voir tous les partis travailler ensemble pour résoudre ce problème qui touche maintenant la sécurité de l'ensemble des Canadiens et des Canadiennes.

[Traduction]

     Merci.
    Allez‑y, madame Blaney.
    Je vous remercie, madame la présidente.
    Je vais revenir à vous, monsieur Juneau-Katsuya.
    Je suis curieuse. Lorsque vous êtes venu témoigner au Comité en mai, vous aviez parlé du fonctionnement de la chaîne de commandement comme d'un obstacle, et vous aviez commenté le fait que les rapports du SCRS et de la GRC sont transmis directement au premier ministre. Cela fait souvent partie du problème. Je pense aux problèmes vécus par les députés, aux réalités de l'ingérence étrangère et à ce que cela signifie pour eux et leurs proches. Je pense également aux besoins de la diaspora chinoise au Canada, et aux nombreux témoins qui nous ont fait part d'activités spécifiques qu'ils ont détectées et qui les préoccupent énormément. Ces personnes s'expriment souvent à leurs propres risques et à ceux de leurs proches.
    Je me demande si vous pourriez parler un peu de ce genre d'obstacles que rencontrent les membres de la diaspora chinoise, et de la manière dont nous pouvons améliorer la situation. Cela fait‑il partie de votre analyse de la lutte contre l'ingérence étrangère, par exemple?
    La lutte contre l'ingérence étrangère doit sans aucun doute faire partie des priorités des forces de l'ordre, qui doivent obtenir les moyens de travailler sur cet enjeu.
    Votre question mérite plusieurs réponses.
     Il est de la responsabilité des forces de l'ordre et du milieu du renseignement de protéger la population canadienne. Il incombe aux forces de l'ordre, notamment à la GRC, d'être en mesure d'interagir avec les communautés, de recevoir et de traiter différentes requêtes et, espérons‑le, de neutraliser les actes malveillants qui vont à l'encontre de la sécurité publique.
     En ce qui concerne nos processus politiques, et notamment notre processus électoral, nous devons également être en mesure d'avertir dès que possible toute personne susceptible d'être prise pour cible parce qu'elle s'oppose à la vision du régime chinois. N'oublions pas que la RPC a recruté et continue de recruter des politiciens occidentaux pour servir ses propres intérêts. Il existe aussi des représentants élus qui servent les intérêts chinois de manière inconsciente, ce que nous appelons des « idiots utiles ». Nous devons impérativement prendre conscience de cette réalité.
    Je vous remercie.
    Allez‑y, monsieur Cooper.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Comme je dispose de quatre ou cinq minutes de temps de parole, je souhaite présenter une motion, puis utiliser le reste de mon temps, le cas échéant, pour poser une question à M. Jean.
    La motion que je souhaite déposer, et qui, selon moi, pourrait être adoptée...
    Je vais interrompre brièvement la séance.
    Pourriez-vous nous fournir votre texte dans les deux langues officielles.
    Mon texte est très court. Je vais en faire la lecture pour le compte rendu, puis il sera distribué...
    Votre texte a‑t‑il été soumis aux interprètes?
    Je pense que c'est le cas.
    Je rappelle qu'il s'agit de la procédure habituelle. La dernière fois, j'ai en quelque sorte donné le feu vert, mais on m'a fait part de certaines préoccupations. Afin de ne pas interrompre le déroulement de la séance d'aujourd'hui, et parce que le temps avance, je vais vous donner mon accord pour une seconde fois. À l'avenir toutefois, je voudrais que vous sachiez que j'ai besoin d'obtenir une copie de votre texte dans les deux langues officielles pour la soumettre à nos interprètes.
    Je précise cela aux fins du compte rendu. Ce n'est pas parce que j'ai accordé une permission spéciale par deux fois à M. Cooper que je me permettrai d'en accorder à d'autres députés à l'avenir. Je tiens donc à vous rappeler que si vous souhaitez déposer une motion au Comité, j'ai besoin d'une copie du texte dans les deux langues officielles, et j'aimerais qu'une autre copie soit remise à nos interprètes.
    Allez‑y, monsieur Cooper.
     Merci beaucoup, madame la présidente.
    La motion se lit comme suit:
Que le Comité invite Mme Zita Astravas, cheffe de cabinet du ministre de la Protection civile, à comparaître seule pendant deux heures, et qu'elle soit convoquée dans les sept jours.
     J'estime que le ministre Blair a induit le Comité en erreur lorsque, en réponse à des questions concernant la note de gestion des dossiers portant sur le député Chong et sa famille, il a non seulement affirmé ne pas avoir reçu cette note, mais qu'il a également prétendu de manière absurde que le SCRS avait pris la décision opérationnelle de ne pas l'informer au sujet du député Chong ni du fait que lui et sa famille avaient été ciblés par le régime de Pékin.
     Le témoignage du ministre Blair a été contredit par celui du directeur du SCRS, qui a en effet affirmé qu'aucune décision opérationnelle de ce type n'avait été prise. Au contraire, les renseignements pertinents ont bel et bien été envoyés au ministre Blair sous la forme d'une note de gestion des dossiers, dû au fait que le régime chinois avait ciblé le député Chong, et qu'il s'agissait d'un sujet de préoccupation majeure.
    À cet égard, il me semble approprié que la cheffe de cabinet du ministre de la Protection civile soit convoquée devant le Comité pour répondre à des questions sur ce qu'elle sait. Je rappelle que Mme Astravas a elle aussi reçu une copie de la même note de gestion des dossiers.
    Le ministre Blair et sa cheffe de cabinet ont bien des comptes à rendre. Nous considérons que la première étape est de convoquer Mme Astravas.
    Madame la présidente, je souhaite à présent m'adresser à M. Jean, qui a discuté dans sa déclaration préliminaire du modèle australien. Je note que l'Australie a criminalisé le fait d'offrir de l'aide à un service de renseignement d'un pays étranger, ce qui n'est pas le cas du Canada. Pensez-vous qu'une telle mesure serait utile pour contrer l'ingérence étrangère?
     Je vais vous céder le reste de mon temps de parole pour vous permettre de préciser votre pensée au sujet du modèle australien.

  (1300)  

    Je pense que des mesures dissuasives doivent être mises en place, que ce soit la criminalisation ou diverses autres sanctions à imposer aux individus qui se livrent à des activités d'ingérence étrangère.
    Toujours en 2017, pour vous dire à quel point l'ingérence étrangère était omniprésente, un sénateur aurait à l'époque transmis des informations classifiées à la Chine. Il y avait toutes sortes de préoccupations de cette nature.
    Si un registre des agents étrangers est mis en place, il s'appliquera facilement aux personnes qui, en raison de leur profession — les avocats et d'autres professionnels du même type —, se conforment tout naturellement à la loi. Pour autant que le registre ne renferme pas d'énormes exemptions comme il y en a ailleurs, il incitera les gens à respecter la loi.
    Certaines personnes décideront tout de même d'enfreindre la loi. C'est la raison pour laquelle nous devons mettre en place des mesures dissuasives. Peu importe si ce sont des sanctions de nature criminelle ou monétaire, ces mesures doivent avoir un effet vraiment dissuasif. C'est crucial.
    Vous devez absolument octroyer davantage de capacités. Pour régler le principal problème que constituent la surveillance et l'intimidation des membres de la diaspora — j'étais vraiment heureux d'entendre le témoignage de la GRC cette semaine —, nous devons collaborer avec les communautés afin que les gens se sentent à l'aise de parler. Il est essentiel de prendre des mesures contre les individus qui se livrent à des manœuvres d'intimidation contre des membres de la communauté.
    Au cours des deux dernières années, j'ai rencontré un grand nombre de jeunes Chinois dans le cadre de mon travail. Leurs parents, des dissidents selon les jeunes en question, leur disaient: « Fais attention à ce que tu fais, car nous avons peur pour les membres de notre famille en Chine ou pour nous-mêmes. » Nous devons mettre en place un espace sécuritaire pour que les Canadiens qui se font harceler et intimider puissent s'exprimer.
    De nombreuses mesures ont été établies. Elles sont consignées dans un document que je serais heureux de fournir au Comité. Je sais que vous essayez de lever le voile sur ces choses, mais j'exhorte tous les partis à transcender la partisanerie et à se concentrer sur une stratégie qui permettra de contrer l'ingérence étrangère. C'est une question d'intérêt national.
    Très bien. Je vous remercie. Il vous restait sept secondes avant vos cinq minutes, mais je vois en fait dans mes papiers que plus de sept secondes supplémentaires avaient été accordées.
    Je cède la parole à M. Noormohamed pour cinq minutes. Son intervention sera la dernière de la réunion d'aujourd'hui.
    Monsieur Noormohamed, la parole est à vous.
    Merci, madame la présidente.
    Merci aux témoins d'être venus comparaître.
    Je vais vous poser une question et céder le reste de mon temps à M. Fergus.
    À la réunion du 2 juin du comité de l'éthique, Dean Baxendale, directeur général du China Democracy Fund, a dit ce qui suit:
    Sous le gouvernement Harper, un certain nombre de protocoles d'entente ont été conclus directement avec la GRC. Cela a permis à quelque 25 agents communistes chinois — que nous appellerons agents de police — d'entrer au pays pour chercher à rapatrier en Chine de soi-disant criminels vivant au Canada. Un certain nombre d'entre eux — environ 290 — ont été expulsés au cours de cette période.
    Je ne pense pas me tromper en disant que ces protocoles d'entente ont encouragé la surveillance policière ou l'intimidation de membres de la communauté chinoise par des agents provenant de l'étranger.
    À votre avis, monsieur Juneau-Katsuya, si le gouvernement Harper avait mieux évalué les conséquences de ces ententes, quelle serait la situation aujourd'hui? Cela aurait‑il changé quelque chose?

  (1305)  

     Je suis convaincu que la situation serait différente. En permettant la collaboration avec la police dans cette perspective, ils ont envoyé le mauvais message à la communauté. C'est inévitable.
    Toujours selon cette perspective, nous savons que pendant leur séjour, certains policiers chinois ont tenu des rencontres secrètes qui contrevenaient aux règles. Ces agissements ont été signalés au ministre de la Sécurité publique et à Pékin par l'entremise de notre ambassadeur et au moyen d'autres rouages.
    Voilà un bon exemple de politiques ou de décisions mal avisées dont les motifs étaient éminemment discutables. Quel gain faisait le Canada en permettant que des mesures soient prises par des autorités dont l'intention première était douteuse? La même chose s'est produite lorsque certaines entreprises canadiennes ont pu être achetées par les Chinois. Plusieurs premiers ministres ont donné cette autorisation dans le passé.
    Un processus est en place au ministère de l'Industrie pour permettre aux organismes de sécurité nationale d'empêcher la vente de certains actifs. Malheureusement, ce processus n'est pas assez utilisé de mon point de vue.
    Merci.
    Je cède le reste de mon temps à M. Fergus.
    Merci beaucoup, cher collègue.
    J'aimerais avant toute chose remercier les témoins.
    J'ai deux brèves questions.
    Parfois, travailler à un comité, c'est comme boire de l'eau à même un boyau d'incendie. Nous devons avaler un déluge d'informations. Parfois, c'est après avoir décanté ces informations et y avoir réfléchi que je parviens à en dégager le sens.
    Monsieur Juneau-Katsuya, ce n'est pas la première fois que vous témoignez devant le Comité. Je crois bien que c'était celui-ci. Je suis désolé. Je vous ai entendu témoigner sur le même sujet au comité de l'éthique.
    Vous avez dit lors de vos témoignages précédents que selon vos estimations, 70 % des membres du personnel de l'ambassade de la Chine étaient des espions. Aux fins de notre étude, j'aimerais retracer mes sources. Pourriez-vous fournir au Comité vos sources? Les autres spécialistes des politiques étrangères à qui j'ai parlé n'arrivent pas à un pourcentage aussi élevé.
    Ces données sont fondées sur mon expérience au SCRS.
    D'accord.
    Pourriez-vous nous rappeler jusqu'à quelle année vous avez travaillé au SCRS?
    J'y ai travaillé jusqu'en 2000.
    Très bien.
    À votre avis, les choses ont-elles changé depuis cette époque?
    Si les choses ont changé, elles ont dû empirer selon toute vraisemblance. Depuis la moitié des années 1990, comme je l'ai mentionné lors de mes comparutions précédentes, nous avons décelé des tentatives d'ingérence étrangère provenant de l'ambassade de Chine. Nous avons découvert, en consultant les dossiers d'Élections Canada, que l'ambassade avait donné en 1995 de l'argent au Parti libéral et au Parti conservateur. Ils préparaient le terrain pour l'ingérence étrangère à laquelle nous assistons.
    Malheureusement, à l'époque, le SCRS n'a pas bien compris et évalué ce qui se passait. Nous avons laissé les choses aller pendant des décennies. Même si j'ai quitté le SCRS en 2000, j'ai continué à travailler sur ce dossier et à mener des enquêtes pour divers clients. Nous avons vu les Chinois mener des opérations de plus en plus audacieuses et accroître le nombre d'agents de renseignement se faisant passer pour des diplomates.
    Merci beaucoup de votre réponse.
    Ma prochaine question s'adresse à M. Jean. Je ne vais probablement pas avoir assez de temps pour entendre la réponse, mais j'espère que vous pourrez nous la fournir par écrit, monsieur Jean.
    Je veux revenir sur le modèle australien. Vous avez parlé un peu des pratiques que nous devrions adopter.
     En nous basant sur l'expérience australienne, quelles erreurs pouvons-nous éviter concernant le registre des agents étrangers? Quelles mesures pouvons-nous prendre?
    Le registre des agents étrangers doit s'inscrire dans une stratégie plus globale. Nous ne devons pas en exagérer l'importance.
     Il faut y aller de manière très ciblée. Le registre devrait contraindre les personnes qui représentent la Chine... Il devrait être calqué sur le modèle de la Loi sur le lobbying. Les gens qui représentent les intérêts de la Chine — les cabinets d'avocats ou d'autres firmes — devraient être tenus de fournir leurs coordonnées comme l'exige la Loi sur le lobbying. Des sanctions devraient être imposées aux individus qui ne se conforment pas et qui ne déclarent pas ces informations. Les sanctions devraient être substantielles, comme je le disais à M. Cooper plus tôt.
    Nous devons mettre en place des mesures assez robustes pour nous attaquer au nœud du problème. Voilà pourquoi je souhaite que le travail du Comité transcende la partisanerie et permette de développer une stratégie pour lutter contre le problème, déterminer quelles instances devraient être actualisées et apporter des correctifs qui donneront les résultats escomptés.
    Je suis peut-être trop naïf.

  (1310)  

     Merci.
    Monsieur Juneau-Katsuya, monsieur Jean, merci beaucoup de votre temps aujourd'hui.
    Vous avez mentionné que vous aviez des documents qui pourraient être utiles dans le cadre de notre étude. Je vous demanderais de transmettre ces documents au greffier. Nous en remettrons un exemplaire à chacun des membres du Comité dans les deux langues officielles.
    Je voudrais également souligner, comme cela a été mentionné une fois, je pense, que l'ensemble des comités ont entendu au total 300 témoins. La demande, l'exigence, est que nous nous élevions au‑delà de la partisanerie, car il est essentiel de protéger les institutions au pays. Nous avons beau parler sur la scène internationale des institutions démocratiques, mais si nous ne protégeons pas les nôtres, qui nous prendra au sérieux?
    Je vous remercie sincèrement des informations que vous nous avez fournies. Je vous souhaite à tous les deux une excellente fin de journée.
    Chers collègues, nous nous retrouverons mardi prochain.
    Portez-vous bien.
    La séance est levée.
Explorateur de la publication
Explorateur de la publication
ParlVU