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NDDN Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la défense nationale


NUMÉRO 069 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 21 septembre 2023

[Enregistrement électronique]

  (1530)  

[Traduction]

    J'aimerais souhaiter la bienvenue aux témoins de cette 69 e réunion du comité de la défense. Tous trois ont déjà comparu devant nous. Le major-général Prévost était si heureux d'être des nôtres mardi dernier qu'il a décidé de revenir aujourd'hui.
    Sur ce, je demanderais au major-général Smith de nous livrer ses remarques liminaires de cinq minutes. Nous allons ensuite passer à la période de questions avec les collègues.
    Allez‑y, je vous prie, major-général Smith.
    Monsieur le président, membres du Comité, nous avons l’honneur de nous présenter de nouveau devant vous. Tel qu'indiqué, je suis le major-général Greg Smith, directeur général de la politique de sécurité internationale. Je suis accompagné de mon collègue que vous connaissez, le major-général Paul Prévost, qui est directeur d'état-major à l'État-major interarmées stratégique au sein du ministère de la Défense et des Forces armées canadiennes.

[Français]

     Je vous remercie de me donner l'occasion d'appuyer la discussion du Comité sur la Stratégie du Canada pour l'Indo‑Pacifique et de donner un aperçu des progrès réalisés par le ministère de la Défense nationale et les Forces armées canadiennes dans la mise en œuvre de nos initiatives.
    Lors de ma précédente comparution devant le Comité, j'ai mentionné que, parmi les cinq objectifs clés interreliés définis dans la Stratégie du Canada pour l'Indo‑Pacifique, le ministère de la Défense nationale et les Forces armées canadiennes se concentraient principalement sur celui intitulé « Promouvoir la paix, la résilience et la sécurité ». Cependant, nous avons également un rôle de soutien important dans celui intitulé « Le Canada, un partenaire actif et engagé dans l'Indo‑Pacifique ».

[Traduction]

    Il est important de se rappeler qu’avant la publication de la Stratégie pour l'Indo-Pacifique, le Canada avait déjà une présence régionale importante, y compris un engagement de plus de 70 ans envers le Commandement des Nations unies en République de Corée, des déploiements réguliers de navires et d’aéronefs à l’appui des opérations de présence avancée et de la surveillance des sanctions, la participation à d’importants exercices régionaux et des activités de renforcement des capacités dans le adre de notre Programme d’instruction et de coopération militaires.
    Grâce aux investissements nouveaux et importants annoncés dans le cadre de la Stratégie pour l'Indo-Pacifique, l’Équipe de la Défense a pris des mesures pour élargir et approfondir sa présence dans la région pour les années à venir et positionner le Canada comme un contributeur positif à la paix et à la stabilité dans la région.
    En fait, nous nous sommes résolument appuyés sur nos cinq axes d’effort pour aider à mettre en œuvre la stratégie. Jusqu'à présent, les Forces armées canadiennes ont renforcé la présence navale du Canada dans la région indo-pacifique, passant de deux à trois navires de guerre par an. Au début de l'année, le Navire canadien de Sa Majesté Montréal a été déployé à partir de la Base des Forces canadiennes Halifax pour mener des opérations dans les océans Indien et Pacifique, et les Navires canadiens de Sa Majesté Ottawa et Vancouver sont actuellement dans la région pour travailler avec nos alliés et nos partenaires. Leur contribution au maintien de l'ordre international fondé sur des règles a été remarquée dans toute la région, notamment lorsque le NCSM Ottawa a effectué un transit dans le détroit de Taïwan en compagnie de la marine américaine, une activité bilatérale que la marine américaine n'effectue qu'avec la Marine royale canadienne.

[Français]

    Nous avons aussi accru et diversifié nos engagements régionaux en participant à de nouveaux exercices multilatéraux. Cet été, l'Aviation royale canadienne a participé pour la première fois à l'exercice Mobility Guardian dans plusieurs sites de la région indo-pacifique, parmi d'autres nouveaux exercices et nouvelles activités prévus dans les semaines à venir.

[Traduction]

    Nous avons étendu nos efforts de renforcement des capacités grâce à de nouveaux programmes et activités, et des discussions sont en cours pour recenser d'autres possibilités pertinentes avec des partenaires régionaux. Les FAC ont notamment organisé une conférence sur les femmes, la paix et la sécurité avec les forces armées malaisiennes, l'un des domaines privilégiés pour les efforts de renforcement des capacités et de coopération en matière de sécurité. De même, la Marine royale canadienne a soutenu les efforts de renforcement des capacités lors de l'exercice multilatéral Southeast Asia Cooperation and Training, ou SEACAT, dirigé par Singapour. Ces activités sont importantes pour renforcer l'interopérabilité et la confiance avec les partenaires régionaux.
    L'Équipe de la Défense est prête à créer les quatre postes de conseillers en matière de politique de défense dans la région, les candidats ayant été choisis et se préparant à prendre leurs fonctions dans les semaines à venir. Ces nouveaux postes auront un impact immédiat sur la consolidation des partenariats clés et sur la visibilité du Canada dans les discussions régionales sur les questions sensibles de défense et de sécurité.
    Enfin, l'Équipe de la Défense a coorganisé avec ses homologues américains un atelier de coopération en matière de cyberdéfense avec les forces d'autodéfense japonaises, axé sur la réponse aux cyberincidents et le perfectionnement des effectifs afin d'améliorer leur capacité à détecter les menaces et à y répondre. Ces activités renforcent la résilience et la préparation générales, en protégeant contre les tactiques coercitives et en empêchant le vol de propriété intellectuelle précieuse.
    Tout en menant à bien ces initiatives, l'Équipe de la Défense soutient l'objectif de la Stratégie pour l'Indo-Pacifique d'être un partenaire actif et engagé dans la région en concentrant ses activités, ses engagements et ses visites portuaires sur les pays de l'ANASE, notamment les Philippines, Singapour, l'Indonésie, la Malaisie et le Vietnam. Ces efforts, parmi ceux déployés dans l'ensemble du gouvernement, ont contribué à des résultats tangibles à l'appui de nos objectifs liés à l'ANASE, y compris des invitations à observer pour la première fois les réunions et les activités du Groupe de travail des experts de la réunion des ministres de la Défense de l'ANASE, ou ADMM-Plus, en 2023.

  (1535)  

    À mon avis, cela renforce les bonnes nouvelles en provenance de Jakarta d'il y a tout juste deux semaines, à la suite de la visite fructueuse du premier ministre au sommet de l'ANASE, où l'ANASE et le Canada ont officiellement élevé leur relation au niveau de partenariat stratégique. Concrètement, ces efforts complémentaires déployés par l'ensemble du gouvernement pour renforcer notre présence dans la région et accroître notre coopération avec les partenaires de l'ANASE nous aident à atteindre les objectifs de défense et de sécurité définis dans notre Stratégie pour l'Indo-Pacifique.

[Français]

     En résumé, le ministère de la Défense nationale et les Forces armées canadiennes sont sur la bonne voie pour assurer au Canada une présence régionale significative et multiforme, à partir de laquelle nous pouvons promouvoir la paix et la stabilité à l'appui de nos valeurs et de nos intérêts nationaux.
    J'attends vos questions avec impatience.
    Je vous remercie de votre attention.

[Traduction]

    Merci, major-général Smith.
    Madame Kramp-Neuman, vous disposez des six premières minutes.
    Je vous remercie d'être parmi nous aujourd'hui, messieurs.
    Ma première question porte sur la Stratégie pour l'Indo-Pacifique. On y indique que le « Canada augmentera son engagement militaire et sa capacité de renseignement comme moyens d’atténuer les comportements coercitifs et les menaces à la sécurité régionale » en plus de déployer « des ressources militaires supplémentaires » et d'accroître « ses investissements dans la sécurité des frontières, la cybersécurité et le renseignement. »
    Je reconnais que cela s'avère absolument nécessaire et qu'il s'agit d'un excellent engagement. Cela dit, comme nous le savons, prendre un engagement ne suffit pas. Nous devons avoir la capacité de le réaliser. Pourriez-vous nous expliquer comment le Canada entend accroître ses capacités, tant dans la cybersphère que dans les domaines militaires plus traditionnels, afin de respecter ses engagements pris dans le cadre de la Stratégie pour l'Indo-Pacifique?
    Merci, monsieur le président. Je vais commencer, mais je suis certain que mes collègues sauront mieux vous répondre que moi.
    En ce qui concerne la Stratégie pour l'Indo-Pacifique, vous avez entendu parler de reconstitution et de la façon dont nous tentons de reconstruire les Forces armées canadiennes. Les FAC ont été reconstruites dans cette optique. Tous les éléments nécessaires aux piliers de la Stratégie pour l'Indo-Pacifique que nous venons de décrire ont été établis en gardant à l'esprit la taille réduite des Forces armées canadiennes. Malgré tout, nous avons été en mesure d'accomplir ce que je viens d'énumérer. Nous sommes impliqués dans les activités cybernétiques. Nous participons au partage de renseignements. Du point de vue de la défense, je peux dire que tout se passe très bien avec les ressources dont nous disposons.
    J'ai une autre question.
    J'ai récemment rencontré l'attaché militaire de l'ambassade du Japon, qui a eu la gentillesse de m'informer sur les menaces auxquelles son pays est confronté dans la région. Il m'a indiqué que les principales sources d'inquiétude du Japon provenaient de Moscou et de Pékin, à la fois de façon distincte ou sous forme d'opérations conjointes. Il a également fait état de quelques remous provenant de la Corée du Nord.
    Ma question porte principalement sur la Russie et la Chine. Quelles sont les capacités des forces russes et de l'Armée populaire de libération dans la région? Comment entrevoyez-vous la contribution du Canada face à ces deux menaces?
    Je vais tenter de vous répondre, à moins que quelqu'un [Inaudible].
    Je ne peux pas vraiment vous dire quelles sont les capacités de la Russie et de la Chine. Je m'occupe des politiques, alors je l'ignore. De toute évidence, la Chine est une puissance mondiale. La Russie, elle, dispose d'une grande puissance militaire. De notre côté, nous renforçons l'ordre international fondé sur des règles. J'ai mentionné les trois frégates. J'ai parlé d'exercices, de renforcement des capacités, notamment en ce qui concerne les femmes, la paix et la sécurité, de l'augmentation du nombre de responsables politiques dans la région et d'activités cybernétiques. Ce sont toutes des étapes importantes en matière de renforcement et de dissuasion. Nous sommes présents dans la région.
    Vous avez évoqué le Japon, qui est un excellent partenaire. Les Japonais savent que nous sommes présents dans la région. Nous entretenons d'excellentes relations avec eux et continuons à les développer. Je dirais que notre engagement personnel — nous assurons une présence physique dans la région en permanence — dissuade fortement la Russie, la Chine et la République populaire démocratique de Corée d'agir.
    J'aimerais maintenant parler de la dernière mise à jour en matière de défense, qui indique la nécessité de tripler la taille de notre flotte de sous-marins. Compte tenu de la crise de recrutement et de rétention, pourriez-vous nous dire s'il est possible de tripler le nombre de nos sous-mariniers et d'offrir une formation à l'équipe actuelle sur les nouveaux équipements?
    Je vais tenter de répondre à cette question également. Je ne suis pas un expert sur la mise à jour en matière de défense, puisque ce n'est pas mon domaine, mais je n'essaierai pas d'esquiver la question.
    Cela dit, ce que je peux vous dire, c'est que c'est en phase avec la Stratégie pour l'Indo-Pacifique. Nous ne nous dirigeons pas dans une voie inattendue. La mise à jour et la Stratégie abonderont dans le même sens. Elles respecteront notre capacité actuelle et toute capacité future que nous allons bâtir.

  (1540)  

    Outre les sous-mariniers, quelles seront les implications de nos engagements pris dans le cadre de la Stratégie pour l'Indo-Pacifique sur la main-d'œuvre en matière d'effectifs de navires, de soutien et de personnel logistique? Sommes-nous présentement en mesure de respecter ces engagements?
    J'insiste sur le fait que la Stratégie pour l'Indo-Pacifique a été élaborée en tenant compte de notre capacité actuelle. Nous sommes passés de deux à trois frégates dans la région, ce qui représente une présence très importante pour le Canada. Ce plan a été établi par la marine, qui a participé à ce projet. Nous voulions respecter ce qu'elle faisait pour regarnir les rangs dans le cadre de la reconstitution. Nous sommes en mesure d'œuvrer sur les deux fronts en même temps.
    Étant donné que le développement de notre armée et de nos alliés de l'OTAN en matière de tactiques et de capacités d'équipement — entre autres — a été largement axé sur les conflits en Europe, l'un ou l'autre d'entre vous pourrait‑il donner des précisions sur certains des défis uniques, qu'ils soient diplomatiques ou militaires, que nous pouvons envisager lorsque nous cherchons à accroître notre présence dans la région indo-pacifique?
    Oui, bien sûr. Je vous remercie de la question. Je vais répondre en premier, ayant servi au sein de l'OTAN.
    L'OTAN est une organisation militaire très robuste. Il s'agit d'une force de combat militaire qui agit sur les plans diplomatique et tactique. Elle regroupe présentement 31 pays, et bientôt 32. Le Canada, bien sûr, est l'un des fondateurs de cette organisation. Il n'existe aucun équivalent dans la région indo-pacifique. Nous avons des partenaires dans la région. Nous avons parlé du Japon et de la République de Corée. Nous travaillons de concert avec la Malaisie, l'Indonésie, etc. Cela dit, il n'existe pas de quartier général militaire ou de système militaire comparable auquel nous pourrions nous joindre.
    Je pense que les progrès récents que nous avons réalisés avec l'ADMM-Plus et l'ANASE en général sont un bon indicateur de la manière dont notre présence continue constitue une bonne nouvelle. Cela dit, bien que nous montrons que le Canada est fortement impliqué dans la région indo-pacifique, nous devons également comprendre qu'il n'y a pas d'équivalent à l'Organisation du traité de l'Atlantique Nord, qui existe depuis plus de 70 ans.
    Il vous reste 30 secondes.
    Souhaitez-vous ajouter quelque chose?
    Je vous remercie de la question. Je m'appelle Peter Lundy, et je suis le directeur général du Secrétariat de la Stratégie Indo-Pacifique d'Affaires mondiales Canada.
    Du point de vue diplomatique, le général a fait état de certains des récents succès. Nous avons réussi à conclure un partenariat stratégique avec l'ANASE après des années de travail, et il s'agit d'un vrai triomphe pour la diplomatie. Il est très important de démontrer ce niveau d'engagement auprès de nos partenaires dans la région pour aller de l'avant.
    Lorsqu'on cherche à mettre en œuvre le type d'initiatives que le ministère de la Défense nationale et les Forces armées canadiennes entreprennent, il convient d'effectuer un important travail diplomatique de fond au préalable. À un moment donné, dépendamment de l'état des relations, on aura peut-être besoin de certains types de protocoles d'entente et d'accords juridiques. Pour les mettre en place au moment voulu, il faut absolument faire appel à la diplomatie canadienne.
    Merci, madame Kramp-Neuman.
    J'aimerais faire un suivi sur sa deuxième question. Nous menons une étude d'analyse des menaces. Il serait utile que nous comprenions quelle est la menace du point de vue militaire. Je pense surtout à la Chine. Quels sont ses moyens? À quoi a‑t‑elle accès? J'ai cru comprendre qu'elle possédait la plus grande marine au monde.
    L'un d'entre vous, ou le ministère, est‑il en mesure de nous indiquer la nature ou l'étendue réelle de la capacité militaire chinoise en particulier?
    Sans trop entrer dans les renseignements classifiés, je peux vous donner la meilleure image, selon moi. La Chine a décuplé ses forces — ou presque — depuis 1999.
    Il ne s'agit pas de renseignements classifiés.
    Non, en effet. Ce qui est classifié, c'est ce qui concerne les menaces qui nous préoccupent le plus et les lacunes des alliés, mais il y a une réponse à toute capacité ajoutée de la Chine. Voilà pourquoi il est important que nous travaillions de concert avec nos partenaires dans la région. Nous faisons des exercices avec le Groupe des cinq. Nous veillons à être interopérables.
    Comme l'a dit le général, ce n'est pas...
    Sans vouloir vous interrompre ou empiéter sur le temps de mes collègues, voici ce que je vous demanderais si j'étais à leur place. Combien y a‑t‑il de navires? De quelles sortes de navires parle‑t‑on? Qu'en est‑il des avions? Quels sont les types d'avions impliqués? De quels drones parle‑t‑on? Quelle est la capacité de la République populaire de Chine, somme tout? On ne peut pas vraiment comprendre la menace sans en connaître les capacités.
    Je vais m'arrêter là, mais je demanderais à mes collègues de poursuivre sur cette lancée, car je pense qu'il est très important que nous connaissions le contexte de cette menace.
    Bref, je cède maintenant la parole à Mme O'Connell. Elle en est à sa dernière journée parmi nous. C'est malheureux.
    Vous disposez de six minutes.

  (1545)  

    Merci, monsieur le président.
    Je pourrais simplement vous demander de répondre aux questions du président, parce qu'elles sont excellentes, mais mon nouveau rôle à titre de secrétaire parlementaire vise notamment la cybersécurité. Je crois que tous les membres du Comité savent que ce sujet m'intéresse beaucoup.
    Par votre entreprise, monsieur le président, j'aimerais poser une question à nos témoins.
    Pourriez-vous nous parler un peu plus du travail de l'équipe d'intervention en cas d'incident cybernétique? Est‑ce que l'on renforce la capacité de nos partenaires et de nos alliés dans la région ou est‑ce que l'on renforce notre propre capacité? Puisque vous ne pouvez évidemment pas communiquer d'information confidentielle, pouvez-vous nous en dire un peu plus sur le travail cybernétique que vous faites dans la région?
    Je ne suis pas un expert dans le domaine cybernétique, mais je reconnais que le Canada et les Forces armées canadiennes sont excellents en matière de cyberdéfense.
    Nous travaillons avec nos alliés et nos partenaires dans le cadre de Stratégie pour l'Indo-Pacifique en particulier. Je parle ici du Japon et de la République de Corée. Ces alliés sont aptes et évolués, mais nous entretenons un bon partenariat. Nous apprenons ensemble. Comme je l'ai dit dans mon discours préliminaire, nous avons réalisé un exercice au Japon récemment. Les Japonais étaient très reconnaissants à notre égard. Je dirais que dans le cadre de ce partenariat, notre améliorons nos capacités ensemble.
    Vous connaissez probablement mieux l'espace cybernétique que moi, mais en le protégeant dans la région, on le protège mieux ici également. Oui, il est question d'aider nos partenaires et d'assurer une présence dans la région indo-pacifique sur le plan cybernétique, mais cela nous aide également.
    Merci.
    Pour faire suite aux questions du président au sujet des cybermenaces et de l'analyse des menaces, je comprends qu'il s'agit d'une situation classifiée, mais est‑ce que nos alliés considèrent qu'en raison de notre capacité dans un domaine d'intérêt, il faut miser sur l'expérience canadienne? Est‑ce qu'ils considèrent la cybernétique comme étant une grande menace? J'ai déjà parlé de l'Estonie; c'était une priorité fondamentale pour le gouvernement estonien.
    Où se situe cette menace dans la hiérarchie? J'aimerais, tout comme le président, mieux comprendre quelles sont les priorités dans la région.
    Je répète que je ne suis pas un expert du domaine cybernétique, mais la menace est présente et est importante dans la région.
    Cela étant dit, je vous ai donné l'exemple de l'exercice japonais. Le Japon nous a très bien accueillis, nous et les forces américaines qui s'y réunissaient pour pratiquer ensemble. Les Japonais étaient très réceptifs à l'égard de nos capacités.
    C'est un exemple de la façon dont nous sommes accueillis dans la région. Nos capacités en matière de défense sont très valides. C'est ce que demandent nos alliés et partenaires dans la région. Ce volet fait partie des cinq piliers de la Stratégie pour l'Indo-Pacifique. Nous le mettons en oeuvre.
    Si vous me le permettez, j'ajouterais qu'il ne s'agit pas uniquement d'un effort du ministère de la Défense nationale. L'initiative de la Stratégie pour l'Indo-Pacifique est notamment financée par Affaires mondiales, Sécurité publique, la GRC, le CST et le ministère de la Défense, ce qui reflète l'approche pangouvernementale à l'égard de ces enjeux.
    Il y a une demande dans la région, cela ne fait aucun doute. Une partie de notre travail est très technique et hautement classifiée, évidemment. Une partie du travail relève d'Affaires mondiales et a trait à la cyberdiplomatie. Nous travaillons avec nos partenaires dans la région en vue d'établir les normes internationales qui régiront le cyberespace. Comme vous le comprenez sûrement, d'autres adoptent peut-être une approche différente en matière de gouvernance du cyberespace. Il y a beaucoup de travail diplomatique à faire à cet égard.
    Je vous remercie. Votre réponse nous est très utile.
    En ce qui a trait aux autres capacités sur le terrain, vous avez parlé de deux à trois navires de guerre et des capacités de la force aérienne. Nous connaissons la stratégie et les politiques, mais y a‑t‑il d'autres exemples de la façon dont nos partenariats fonctionnent réellement et de la façon dont nos alliés misent sur les forces canadiennes pour combler les écarts en matière de capacité? Est‑ce qu'il y a autre chose que l'on devrait savoir? Je crois que cela nous mène à l'évaluation de la menace et à l'aide que le Canada peut apporter.

  (1550)  

    Je vais répondre en premier. Nous pourrons peut-être aborder certains détails, mais je crois qu'il s'agit d'une très bonne nouvelle. Comme vous le savez, la Stratégie pour l'Indo-Pacifique a été lancée en novembre 2022. Les Forces armées canadiennes et le ministère de la Défense nationale ont tenté de faire très vite. La troisième frégate s'est rendue dans la région en quelques semaines.
    De façon tout aussi importante, je sais que cela n'est peut-être pas particulièrement intéressant, mais nous aurons des analystes — des personnes en poste dans la région, qui seront sur le terrain en tout temps — dans quelques semaines. Ce n'est pas si mal, puisque l'on parle d'obtenir des accréditations et d'avoir le droit de s'installer dans un pays étranger. Nous avons des forces armées qui cherchent à réaliser divers exercices dans la région en vue de renforcer la capacité... ou les partenariats, comme je le dis souvent. Ces pays sont tout à fait aptes, alors nous établissons des partenariats avec eux.
    Les Forces d'opérations spéciales s'organisent rapidement. Nous avons parlé d'un exercice et elles en font d'autres. Il y a beaucoup d'activités. Nous avons deux frégates à l'heure actuelle dans la région, qui assurent une présence canadienne très importante.
    Merci.

[Français]

     Merci.
    Madame Normandin, vous avez la parole.
     Merci beaucoup, monsieur le président.
    Messieurs les témoins, je vous remercie encore une fois de votre présence. Mes questions ressembleront un peu à celles que le président voulait poser sur des choses peut-être un peu moins conventionnelles.
    On a appris hier qu'une bouée chinoise a été retrouvée dans la zone économique exclusive du Japon. J'aimerais entendre votre point de vue sur ce phénomène des bouées. Il y a aussi eu des ballons qui sont passés au-dessus du territoire nord-américain.
    J'ai beaucoup de questions. Qu'est-ce que ce phénomène représente? Est-ce une menace? Est-ce un message? Est-ce pour capter de l'information? Est-ce qu'on a un peu plus de connaissances sur ce que cela représente et sur le nombre d'objets de la sorte qu'il pourrait y avoir? Dans le même ordre d'idées, avons-nous la capacité de bien les détecter et de les anéantir? Est-ce que le Canada contribue à cela, dans la région?
    Monsieur le président, je remercie la députée de ses questions.
    Oui, c'est inquiétant. Nous sommes au courant de la présence de bouées un peu partout sur le globe. La Chine laisse des bouées un peu partout à des fins de recherche en sciences maritimes, mais nous craignons que l'information collectée puisse servir à d'autres fins, notamment militaires. Nous suivons donc ce dossier, ainsi que la communauté du renseignement, particulièrement quand il y a des trouvailles qui sont faites à partir de l'information partagée entre nos alliés, pour mieux comprendre ce qui se fait. On ne retrouve pas ces bouées qu'au Japon, mais un peu partout dans le Pacifique, dans l'Atlantique et dans l'Arctique. Tout le monde essaie de comprendre un peu la nature des données qui sont collectées.
    Je comprends donc que c'est quelque chose dont nous pouvons et devons nous inquiéter. Devrions-nous aussi augmenter notre capacité d'analyse et de recherche? Est-ce que le Canada a quelque chose à offrir du côté de la recherche et des études sur ces bouées?
    Merci.
    Effectivement, nous avons une capacité d'analyse. Nous avons RDDC, soit Recherche et développement pour la défense Canada, et plusieurs ressources, tant du côté militaire que du côté civil, pour exploiter les données.
    Cela soulève aussi une autre question. Le président a demandé quelle menace la Chine représentait, alors qu'elle a maintenant une des plus grandes marines au monde. Il y a les capacités conventionnelles qu'on connaît, comme la marine, l'aviation et l'armée, avec toutes les armes de combat qu'elle possède, comme l'artillerie et l'infanterie.
    Toutefois, ce qui est inquiétant et que l'on doit surveiller, ce sont les capacités un peu moins conventionnelles et qui sont plus nouvelles. Par exemple, il faut vraiment se soucier de ce qui se passe dans l'espace. On a aussi parlé du cyberespace. Ce sont des domaines un peu plus insidieux. On a tendance à regarder la grosseur d'une armada ou d'une flottille, mais on oublie des choses qui peuvent faire mal. La Chine fait beaucoup de recherche pour exploiter des faiblesses dans ces domaines. Il faut s'inquiéter un peu de tout cela.
    Merci beaucoup.
    J'aimerais aborder quelque chose d'un peu différent, c'est-à-dire l'accord de coopération AUKUS, une entente tripartite qui vise un peu à isoler la Chine dans la région indo-pacifique. On sait que le Canada n'en fait pas partie, notamment pour ce qui est des sous-marins nucléaires, mais on a déjà entendu qu'il y avait peut-être d'autres façons dont le Canada pourrait y participer. On sait que c'est donnant, donnant. Si on veut participer à cela, il faut être capable d'apporter quelque chose à la table.
    Est-ce qu'il y a du nouveau là-dessus, depuis les quelques derniers mois?
    Je remercie la députée de sa question.
    Le premier pilier de l'accord AUKUS, comme vous l'avez décrit, ce sont les sous-marins nucléaires. Le Canada ne participe pas à cela.
     Le deuxième pilier, ce sont les hautes technologies. À cet égard, le Canada a beaucoup à apporter. Nous travaillons donc avec nos alliés appropriés pour voir s'il y a des choses auxquelles nous pourrions contribuer dans l'avenir. Nous négocions et nous parlons avec eux pour voir si c'est possible. On peut parler de technologies différentes, qui sont très évidentes au Canada. Le Canada a des capacités de niveau mondial dans certains domaines. Nous avons beaucoup de choses à apporter, et c'est ce que nous offrons à nos alliés.

  (1555)  

    Merci beaucoup.
    Les hautes technologies, c'est un peu large: pouvez-vous être un peu plus précis, s'il vous plaît?
    Oui. Je peux parler des technologies sous-marines, ou encore des technologies liées aux armes hypersoniques ou visant à contrer celles-ci. Il y a aussi l'intelligence artificielle. Ce sont des exemples de ces hautes technologies.
     Merci beaucoup.
    Je vais vous poser une question que je risque de poser aussi plus tard aux représentants de Taïwan. Je comprends que Taïwan est un peu seule pour se militariser et s'approvisionner en matériel. Je sais que cela faisait partie des éléments soulevés lors de la visite de mes collègues là-bas.
    Êtes-vous capable de m'expliquer pourquoi Taïwan est un peu isolée à cet égard? Serait-il envisageable que le Canada, dans le futur, donne un coup de pouce militaire à Taïwan?

[Traduction]

    Allez‑y.
    Au sujet de la diplomatie, le Canada adopte évidemment la politique d'une seule Chine, qui dicte nos interactions avec Taïwan à tous les égards. Nous sommes régulièrement en contact avec les intervenants clés de Taïwan, de façon non officielle.
    Au sujet de l'avenir... Je ne peux répondre à la question sur la capacité militaire ou l'approvisionnement. Tout ce que je peux dire, c'est que l'on ne sait pas si le Canada apportera son aide dans le futur. Je ne peux répondre à la question.

[Français]

     Monsieur le président, je ne comprends pas très bien la question sur l'avenir des capacités de Taïwan. Peut-on m'éclairer à cet égard, pour que je comprenne bien ce dont on parle?

[Traduction]

    Vous pourriez peut-être nous donner certaines précisions.

[Français]

    Ce que nous comprenons des collègues qui sont revenus d'une mission là-bas, c'est que Taïwan est responsable de la création de son propre arsenal militaire et qu'elle n'a aucune aide d'autres pays. Cette situation pourrait-elle être appelée à changer dans le futur?
    Monsieur le président, c'est une question intéressante.
    Le Canada a évidemment une certaine capacité militaire, mais d'autres alliés en ont bien davantage. C'est à eux de négocier de l'armement ou des ventes d'armes à Taïwan.

[Traduction]

    Ils ont construit un avion de guerre en 500 jours à partir du point zéro... Seuls.
    Merci, madame Normandin.
    Allez‑y, madame Mathyssen.
    Merci, monsieur le président.
    Pour poursuivre la conversation au sujet de la maximisation de nos forces après la reconstruction dans la région indo-pacifique, je peux comprendre ce que nous voulons faire et pourquoi c'est si important. Je m'inquiète toutefois — après ce qui s'est passé cette semaine — de la façon dont nous procédons. J'aimerais savoir s'il est question de partenariats avec l'Inde et de quelle façon les nouvelles de lundi auront une incidence sur les prochaines étapes.
    Permettez-moi de... C'est une question très délicate. Vous êtes tous des témoins d'expérience. Je vais permettre la question, mais je m'attends à ce que vous évitiez d'aborder certains de ses éléments.
    Merci, monsieur le président.
    Je suis ici avec mon collègue d'Affaires mondiales Canada. Il connaît bien la région indo-pacifique; il peut donc m'aider.
    Nous travaillons avec le ministère. Bien sûr, la défense fait partie des affaires étrangères, qui représentent un dossier actif, comme vous l'avez fait valoir. C'est un dossier délicat. Le ministère étudie la question. Nous suivons les directives et nous travaillons avec Affaires mondiales Canada dans le cadre de tous les types d'interactions militaires avec l'Inde.
    Notre présence y est importante, et elle est accrue en raison de la Stratégie pour l'Indo-Pacifique. Il serait donc naturel d'avoir la capacité de collaborer davantage avec l'Inde. Nous réfléchissons évidemment à toutes ces questions, puisque nous comprenons mieux le problème, mais c'est Affaires mondiales Canada qui est le principal ministère responsable.
    Je vous remercie pour votre question, monsieur le président. Je vais commencer par parler de la stratégie en soi.
    L'un des objectifs stratégiques est que le Canada soit un partenaire fiable, engagé et actif dans la région. Pour l'atteindre, nous devons avoir une vision sur 10 ans. C'est le fondement qui oriente notre approche stratégique. Nous nous attendons à ce que certains enjeux bilatéraux fassent surface au cours du cycle de vie de la stratégie. C'est ce qui s'est passé au cours des derniers jours.
    Ce que je peux dire au Comité — et il s'agit de nouvelles récentes —, c'est que le premier ministre a fait valoir aujourd'hui à New York que l'Inde était sans aucun doute un pays d'une importance croissante, avec lequel nous devons continuer de travailler, non pas seulement dans la région, mais partout dans le monde. Nous ne voulons pas causer de problèmes, mais le Canada affirme sans équivoque l'importance de la primauté du droit, de la protection des Canadiens et de la défense de nos valeurs. C'est pourquoi nous avons demandé au gouvernement indien de collaborer avec nous pour établir les processus, pour connaître la vérité et pour que justice soit rendue.
    C'est la position actuelle au sujet de l'Inde dans le contexte d'une vaste stratégie à long terme.

  (1600)  

    Bien sûr, la situation évoluera et changera au fil du temps. Nous devons faire preuve de souplesse. J'en suis conscient. Cette année seulement, le Canada a participé avec l'Inde à l'exercice Sea Dragon. Est‑ce que nous allons réévaluer ce type d'exercice pour l'avenir?
    Monsieur le président, je vais réitérer ce qu'a très bien dit mon collègue d'Affaires mondiales Canada: l'Inde est un acteur de premier plan dans la région. La stratégie pour l'Indo-Pacifique existe; nous devons donc nous attendre à prendre des engagements bilatéraux en ce sens.
    Nous évaluons la situation. Nous savons ce qui se passe cette semaine. Nous réévaluons tout cela. Il y a un problème, mais nous devons maintenir la conversation. Nous devons continuer d'échanger avec les militaires, mais nos collègues d'Affaires mondiales Canada procèdent à une analyse active de la situation.
    Général Prévost, vous vous souviendrez que mardi, je vous ai parlé du sommet des pays BRICS qui s'est tenu en août. Pourriez-vous — vous ou les autres témoins — nous parler de ce sommet du point de vue indo-pacifique? Nous avons parlé de son incidence sur l'Ukraine et la Russie. Toutefois, puisque la situation a changé, comment allons-nous réagir?
    Je vous remercie pour cette question.
    En ce qui a trait aux politiques étrangères, le Canada surveille les délibérations et les résultats de toutes sortes de forums internationaux, notamment celui des BRICS, qui s'est tenu récemment, parce qu'il a une incidence sur les intérêts canadiens évidemment, mais je n'ai pas de détails à vous fournir au sujet des résultats de ces discussions. Nous nous intéressons de façon générale au sommet à titre de partie externe.
    Il y a eu de nombreuses conversations au sujet de la Stratégie pour l'Indo-Pacifique et de son importance. Je suis préoccupée parce que je crois qu'elle n'adopte pas une approche fondée sur les droits de la personne. Pourriez-vous nous dire comment nous pouvons aller de l'avant dans le monde dans lequel nous nous retrouvons, sur le plan des droits de la personne?
    Il vous reste 15 secondes.
    Oui.
    La Stratégie comprend un financement important pour l'aide canadienne internationale, qui use d'une approche fondée sur les droits de la personne. Il s'agit toujours d'une « valeur ajoutée ». Il ne faut pas uniquement tenir compte des nouvelles initiatives, mais aussi du travail régulier que fait le réseau de missions du Canada dans la région, qui se centre sur les droits de la personne, par l'entremise des organisations locales et internationales.
    Merci, madame Mathyssen.
    Chers collègues, si nous sommes disciplinés, nous pourrons passer à travers une série de questions complète de 25 minutes.
    Monsieur Bezan, vous disposez de cinq minutes.
    Merci, monsieur le président. Je remercie également les témoins d'être avec nous aujourd'hui.
    Nous avons appris, plus tôt ce mois‑ci — et d'autres renseignements sont communiqués —, que d'anciens pilotes de chasse canadiens formaient des pilotes de chasse de la Force aérienne de l'Armée populaire de libération en Chine. Est‑ce que les Forces armées canadiennes s'inquiètent de voir leurs anciens pilotes — les trois qui ont été nommés sont Paul Umrysh, Craig Sharp et David Monk — en Chine, collaborer avec l'Armée populaire de libération?

  (1605)  

    Nous en sommes très préoccupés. Je crois que notre chef d’état-major de la Défense a parlé publiquement de la situation dans le cadre d'une entrevue. Évidemment, la situation fait l'objet d'une enquête criminelle par la GRC. Vous avez nommé les pilotes. Je ne peux pas vous en dire plus sur la suite des choses.
    En tant qu'organisation militaire, nous sommes très préoccupés...
    Quelle est l'incidence de la Loi sur la défense nationale, des ententes de non-divulgation que ces pilotes ont dû signer lorsqu'ils travaillaient pour l'Aviation royale du Canada et de la Loi sur la protection de l'information ou LPI? Nous avons entendu dire que l'Australie avait resserré ses règles et renforcé les sanctions en vertu de sa loi sur la défense et d'autres lois en matière de sécurité, en imposant jusqu'à 20 ans d'emprisonnement pour ce type de violation, à la suite de l'implication de deux Australiens dans cette affaire.
    Quelles mesures supplémentaires le Canada et nos partenaires du Groupe des cinq peuvent-ils prendre pour dissuader ces personnes qui ne pensent qu'à l'argent et non à la sécurité nationale?
    Nous ne faisons pas que nous pencher sur la question; nous prenons des mesures concrètes. Nous examinons comment nous pourrions resserrer les règles de la défense pour que les membres qui quittent l'organisation comprennent que tout ce qu'ils ont appris — les compétences qu'ils ont développées, les informations qu'ils ont reçues — doit demeurer secret. Les habiletés qu'ils ont acquises et les informations que nous leur avons confiées pour qu'ils puissent défendre les Canadiens doivent rester secrètes.
    Nous nous assurons de resserrer le contrôle pour qu'ils comprennent ce point lorsqu'ils quittent les Forces. Tout cela est déjà prévu dans la loi. Nous examinons comment nous pourrions raffermir tout cela en vertu de la Loi sur la protection de l'information.
     Les Forces armées canadiennes ont-elles demandé ou donné l'ordre à ces individus de cesser leurs activités et de revenir au Canada?
    Nous leur avons demandé publiquement d'arrêter, peu importe ce qu'ils faisaient. Le reste est visé par une enquête. Le dénouement de cette histoire est entre les mains de la GRC.
    D'accord.
    Des commentaires ont été formulés plus tôt sur la manière dont le Canada pourrait en faire plus dans ses activités de coopération. Nous avons notamment parlé des pays de l'ANASE et de notre adhésion à la Réunion élargie des ministres de la Défense de l'ANASE. J'aimerais savoir si le gouvernement du Canada a pris des mesures pour participer davantage au dialogue quadrilatéral pour la sécurité, communément appelé Quad, vu le rôle croissant de cette organisation dans les conversations sur la sécurité en général, surtout au regard des actions provocatrices de la République populaire de Chine.
    Je ne suis pas un spécialiste du Quad, mais je peux dire que les Forces armées canadiennes et la Stratégie pour l'Indo-Pacifique reconnaissent le rôle central de l'ANASE. C'est avec cette organisation que nous travaillons.
    Notre adhésion à l'ADMM-Plus et notre participation à un certain nombre de groupes de travail constituent un bon pas en avant, mais c'est sur l'ANASE que nous misons pour acquérir le statut de partenaire stratégique. Comme je l'ai décrit plus tôt, l'ANASE n'est pas l'OTAN, mais c'est une organisation avec laquelle nous pouvons collaborer. Nous gravissons les échelons. Les progrès que nous réalisons grâce à la Stratégie pour l'Indo-Pacifique sont de bon augure.
    Sachez que lors de la visite du Comité en Europe le mois dernier, les alliés de l'OTAN nous ont dit que les régions du Pacifique et de l'Indo-Pacifique faisaient partie de leurs préoccupations liées à la sécurité. Ils ont fait remarquer que deux pays membres de l'OTAN, en l'occurrence le Canada et les États-Unis, ont des côtes sur le Pacifique, ce qui revêt un intérêt du point de vue de l'OTAN.
    Comment pourrions-nous intégrer davantage certaines des compétences et des systèmes de commandement et de contrôle de l'OTAN pour accroître la présence de nos forces de sécurité dans la région indo-pacifique?
    C'est une vaste question. L'OTAN travaille sur le concept stratégique OTAN 2030. Cette initiative tient compte de la Chine. Nous avons les États-Unis, le Canada, la France et une étendue d'eau — ou peu importe le terme technique — de quelque deux millions de kilomètres carrés dans le Pacifique. De nombreux alliés s'intéressent grandement à ce territoire. Le fait de collaborer avec eux, lorsque c'est nécessaire, à l'OTAN et en Europe fait aussi avancer notre travail dans la région indo-pacifique.
    Enfin, il faut également établir des liens avec des partenaires — l'OTAN en est un — tels que le Japon, la Corée, l'Australie et la Nouvelle-Zélande. Nous bâtissons donc une relation et un partenariat plus vastes pour regrouper, dans une certaine mesure, à la fois l'OTAN et l'Indo-Pacifique.
    Merci, monsieur Bezan.
    Monsieur Fisher, vous avez cinq minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci, messieurs, d'être présents parmi nous aujourd'hui. Merci pour les services que vous rendez au Canada.
    Major-général Smith, vous avez parlé des différents piliers, mais c'est celui du partenaire « actif et engagé » qui m'interpelle le plus. Dans quelle mesure nos activités et notre engagement dans la région ont-ils changé depuis le lancement de la stratégie en novembre 2022? Vous avez employé les termes « élargir et approfondir ». Vous avez mentionné, si je ne m'abuse, que le Canada était passé de deux à trois navires de guerre.
    Pourriez-vous nous en dire un peu plus sur ce pilier et nous expliquer ce que fait le Canada pour être un partenaire engagé et actif dans la région?

  (1610)  

    Chacun des cinq piliers accroît notre présence là‑bas. Puisque nous sommes de plus en plus engagés, les gens comme moi et mes collègues doivent se rendre sur place et établir des collaborations. Nous allons avoir quatre emplacements permanents dans certaines capitales de la région. Nous poursuivrons notre travail de cette manière. Nous avons affecté davantage d'attachés de défense dans la région.
    La présence sur place est primordiale. Par exemple, lorsque nous assistons aux réunions et que des sujets comme la sécurité dans la région sont abordés, il y a un Canadien dans la pièce. Notre présence aide sur tous ces fronts. Nous menons des activités liées à la sécurité, au maintien de la paix et aux femmes avec les alliés dans la région. Nous sommes là, dans la pièce, à penser à ces enjeux. Nous sommes perçus comme des experts. Je pense que chaque pilier nous aide vraiment et amène les parties prenantes dans la région à penser au Canada.
    Merci de vos commentaires. C'est très encourageant.
    Vous avez dit également que vous cherchiez d'autres occasions de travailler avec nos alliés. Pourriez-vous nous en parler?
     C'est une excellente question.
    Nous travaillons constamment avec nos alliés. En effet, une de mes tâches liées aux relations militaires internationales est de me rendre dans la région avec l'attitude d'un vendeur et de trouver des gens qui veulent travailler avec le Canada. À mon humble avis, je fais en règle générale du très bon boulot. De nombreuses personnes veulent faire des choses avec nous. Pensons seulement à la cybersécurité, dont j'ai parlé plus tôt. Quelques personnes avec lesquelles nous avions établi un contact étaient dans la région. Nous savions qu'un exercice de cybersécurité se déroulait. Lorsqu'elles ont su que le Canada était intéressé, elles ont voulu participer elles aussi.
    Ce n'était qu'un petit exemple des avantages de notre présence sur place et de ce que cela nous permet de réaliser.
     Pourriez-vous fournir des informations à jour au Comité sur l'opération Neon? Les appareils Aurora et les navires de guerre Vancouver, Winnipeg, Ottawa et Regina sont là‑bas. L'un de vous pourrait‑il nous faire part des derniers développements sur ce front?
     Je vais commencer, puis mon collègue vous fournira un peu plus de détails.
    Nous sommes toujours mobilisés dans le cadre de l'opération Neon et nous continuons à surveiller les sanctions contre la Corée du Nord. Nous le faisons depuis longtemps de manière épisodique. Notre présence là‑bas et notre contribution à la sécurité dans la région s'inscrivent en grande partie dans cette opération.
    Je vais m'arrêter ici et céder la parole à mon collègue, qui vous donnera plus de détails.
    Monsieur le président, je vais parler de l'opération Neon, mais je vais d'abord répondre à la question précédente, si vous me le permettez.
    Nous parlons souvent de la différence entre deux ou trois navires. Contrairement à ce qu'on pourrait penser, l'ajout d'un navire change beaucoup de choses. En effet, les deux navires permettent une présence épisodique, soit six mois par année, tandis que les trois navires permettent une présence permanente dans la région. De cette manière, il y a toujours un navire canadien qui se déplace dans différents ports, ce qui nous amène à travailler avec des partenaires de différents pays — un nouveau partenaire pratiquement chaque semaine — dans le cadre d'exercices multilatéraux. Voilà un exemple concret du renforcement de la présence du Canada, qui est aujourd'hui constante.
    Quant à l'opération Neon, notre navire de guerre Vancouver se trouve là‑bas en ce moment. Au cours des prochaines semaines, nous mettrons en œuvre la résolution du Conseil de sécurité de l'ONU. L'opération Neon est le deuxième volet le plus important de ce que nous faisons. Jusqu'à présent, nous avons parlé de la stratégie — que nous appelons opération Horizon — qui a pour objet de bâtir des capacités et d'établir des partenariats. L'opération Neon est plutôt une mission consistant à surveiller les sanctions contre les transferts illicites de la Corée du Nord.
    Comment l'environnement de la menace dans la région a‑t‑il évolué depuis le coup d'envoi de l'opération Neon en 2019?
     Je ne dirais pas que l'environnement de la menace a changé. La menace dans la région évolue lentement. Nous avons parlé des capacités que la Chine a acquises dans la région. Nos interactions avec la Chine ont changé dans le cadre de cette mission, à la fois en mer et dans les airs, mais principalement dans les airs. La menace ne découle pas d'une escalade militaire; elle est plutôt liée à la sécurité et à une « conduite non professionnelle », dont nous avons recensé des occurrences dans le cadre de la mission. Nous remplissons une mission légitime commandée par les Nations unies. Nous mettons en œuvre une résolution des Nations unies. Nous nous trouvons dans des eaux internationales. Notre présence à cet endroit est légitime. Pour une raison ou pour une autre, la Chine n'aime pas cela, et des interceptions non professionnelles se produisent de temps à autre.
    Merci, monsieur Fisher.

[Français]

     Madame Normandin, vous avez maintenant la parole pour deux minutes et demie.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
     Monsieur Lundy, on parle de la façon dont l'Occident perçoit la zone indo‑pacifique, mais j'aimerais savoir comment, selon vous, la zone indo‑pacifique perçoit l'Occident, notamment pour ce qui est de la question de la guerre en Ukraine.
    Au IISS Shangri-La Dialogue, en juin, le ministre de la Défense de l'Indonésie, M. Prabowo Subianto, était très complaisant envers la Russie et proposait des solutions de paix qui semblaient assez particulières. De plus, on sait que la Chine ne s'est pas présentée au G20, mais qu'elle va rencontrer M. Poutine.
     Y a-t-il quelque chose qui se passe dans la région indo-pacifique, un changement ou un glissement quelconque quant à la situation en Ukraine?

  (1615)  

[Traduction]

     Votre observation est juste. Les perceptions et les actions dans la région sont en effet complexes et diversifiées. Je ne peux pas formuler de commentaires sur les choix stratégiques de ces pays. Cela dit, au Canada, nous défendons sans relâche notre position vis‑à‑vis de ce qui s'est passé en Ukraine. Nous insistons sur l'importance de la primauté du droit et du rôle de la communauté internationale dans la prise de décisions à l'égard de ce pays. C'est un élément clé de la diplomatie du Canada. Nous défendons cette position depuis le début de la situation en Ukraine et nous continuerons à le faire.

[Français]

    Selon les réponses que vous recevez, y avait-il plus d'ouverture au début et moins maintenant, ou est-ce l'inverse? Le ton a-t-il toujours été constant dans la région indo-pacifique relativement à l'Ukraine?

[Traduction]

    Il est difficile de mesurer les effets de nos efforts sur les autres. Je vous dirais qu'il faut faire preuve de constance lorsque nous défendons une position. Il faut marteler notre point de vue. Nous nous assurons d'énoncer clairement notre perspective sur l'Ukraine lors des événements multilatéraux importants comme le G20 et l'Assemblée générale des Nations unies à New York. Nous espérons que les pays membres feront des choix stratégiques différents.
     Merci, madame Normandin.
    Madame Mathyssen, vous avez deux minutes et demie.
     Merci.
    Nous avons parlé de cybersécurité. Lorsque nous étions à Taïwan — j'étais ravie de faire partie de ce voyage —, nous avons énormément entendu parler des gigantesques efforts de sensibilisation auprès de la population au sujet de la mésinformation, de la désinformation et des dommages qui y sont rattachés. Des efforts énormes sont dévolus pour s'attaquer à ce problème étant donné le volume considérable de cyberattaques que reçoit le pays. Sauf erreur, on estime le nombre de ces attaques à un million par jour.
    Ici, au Canada, des choses effrayantes se sont produites qui ont un lien avec l'incidence des médias sociaux au pays et le pouvoir des géants du Web et qui peuvent avoir des répercussions sur les Canadiens et sur leur sécurité. Selon un article paru dans les médias cette semaine, Meta aurait adopté une politique interne pour retirer des comptes Facebook au Canada les publications relatant ce qui est arrivé à M. Nijjar.
    Que font les Forces canadiennes sur ce front en ce qui concerne la Stratégie pour l'Indo-Pacifique et la protection que nous devons accorder à nos propres ressortissants? Comment faites-vous pour tenir compte de ce contexte lorsque les géants du Web entrent en jeu?
    Votre question s'éloigne un peu du sujet, mais puisque nos témoins sont des experts...
    C'est mon temps et c'est ma question, monsieur le président.
    Oui.
    Allez‑y.
    Monsieur le président, si vous le permettez, je peux répondre brièvement à la question.
    Cet enjeu est préoccupant. À l'instar des autres Canadiens, les soldats des forces terrestres, maritimes et aériennes sont vulnérables à tout ce qui circule dans les médias sociaux. Le chef d'état-major de la défense nous a demandé de nous pencher là‑dessus. Comment prémunir nos membres contre ce phénomène omniprésent qu'est la mésinformation? Nous élaborons une solution en collaboration avec Recherche et développement pour la défense Canada et plusieurs autres partenaires. Tout cela commence par la sensibilisation à tous les niveaux hiérarchiques pour aider les gens à développer un sens critique qui leur permettra de distinguer les informations fiables des autres.
    Ce sont de vastes questions qui pourraient faire l'objet d'une étude, mais existe‑t‑il au sein des forces armées des programmes de formation portant sur ce sujet précis?
    Il n'existe aucun programme pour l'instant. Nous essayons en ce moment de déterminer les méthodes de sensibilisation que nous pourrions utiliser. Nous offrons à nos membres un bon programme de formation sur le développement de la pensée critique. Il faut voir à présent comment nous pourrions mettre sur pied des programmes pour donner aux gens la capacité de se défendre contre la mésinformation. C'est ce que nous commençons à examiner.
    Nous devons nous arrêter là.
    Nous passons à M. Kelly pour cinq minutes. Je vais vérifier qui est le prochain député libéral sur la liste.

  (1620)  

    Ma question s'adresse à vous, major-général Smith. Pourriez-vous parler de l'importance de la connaissance du domaine sous-marin dans la région indo-pacifique, y compris les approches vers l'Arctique canadien?
    Monsieur le président, si je comprends bien, la question porte sur la connaissance du domaine sous-marin. Je vais répondre dans la perspective de la Stratégie pour l'Indo-Pacifique. Il est absolument crucial d'avoir une présence dans la région. Grâce à nos trois frégates, nous en saurons davantage sur ce qui s'y passe. Cela dit, le Pacifique comporte une immense superficie.
    L'étude du Comité porte sur l'analyse de la menace. Dans cette optique, à quel point doit‑on se soucier de l'absence de connaissance du domaine ou du maintien de la connaissance du domaine? Y a‑t‑il des menaces que nous devons contrer et qui nécessitent la connaissance du domaine? Je pense entre autres aux menaces qui touchent l'espace sous-marin.
    C'est une vaste question.
    C'est un problème partout. Nous devons comprendre ce qui se passe dans la région indo-pacifique, dans l'Arctique et dans les approches vers l'Amérique du Nord. La modernisation du NORAD — étant donné que la mission du NORAD englobe elle aussi la connaissance du domaine maritime — consiste en partie à examiner comment accroître la connaissance du domaine sous-marin et du domaine maritime.
    Nous faisons des investissements à cet effet. Je ne peux pas vous fournir de données précises, car je ne m'attendais pas à cette question, mais je sais qu'une portion de la somme de 40 milliards de dollars annoncée pour la modernisation du NORAD sera affectée à la connaissance du domaine sous-marin qui entoure l'Amérique du Nord.
    Le Canada ne fait pas partie de l'alliance AUKUS. Dans quelle mesure notre exclusion affecte‑t‑elle notre capacité à maintenir une connaissance du domaine?
    Monsieur le président, je peux amorcer une réponse.
    Je voudrais seulement réitérer que l'alliance AUKUS est un partenariat qui porte sur la production de sous-marins nucléaires. Le Canada n'est pas dans les sous-marins nucléaires...
    Non. Dans votre déclaration préliminaire, je crois — et dans les témoignages —, vous avez dit que les sous-marins nucléaires n'étaient pas le seul élément de l'alliance. Il y a aussi la cybersécurité et les capacités générales dans l'espace sous-marin. Est‑ce exact de dire que l'alliance ne comporte pas seulement un type de sous-marin en particulier?
     C'est tout à fait vrai, monsieur le président.
     Les sous-marins nucléaires constituent le premier pilier, tandis que les hautes technologies constituent le deuxième. Je peux probablement mieux l'expliquer en anglais. L'alliance comprend aussi des technologies telles que l'intelligence artificielle, l'apprentissage machine et les systèmes de défense hypersonique. Le Canada pourrait apporter une contribution. Nous travaillons là‑dessus avec les alliés.
    La question demeure de savoir dans quelle mesure notre exclusion de l'alliance nous prive des avantages qui y sont rattachés et nous empêche d'assurer la sécurité de nos approches vers l'Arctique et la sécurité de nos côtes. Nous pourrions aussi nous demander dans quelle mesure cette exclusion nous empêche d'agir comme un allié important du Groupe des cinq, qui ressemble de plus en plus à un Groupe des trois.
    Monsieur le président, j'ai parlé aujourd'hui de la Stratégie pour l'Indo-Pacifique, qui constitue un bel exemple de ce que le Canada apporte à ses alliés. Le Canada est tenu en haute estime dans la région, à la fois comme partenaire et allié. Certes, nous ne faisons pas partie du premier pilier de l'alliance AUKUS. Nous nous efforçons par contre de trouver un moyen de contribuer au deuxième pilier. Cela dit, tous les éléments de la Stratégie pour l'Indo-Pacifique que je viens de décrire impliquent le travail avec les partenaires régionaux. Or, notre présence est souhaitée dans la région. Nous sommes respectés dans la région et nous apportons une contribution.
    Aviez-vous quelque chose à ajouter, major-général Prévost? Vous aviez l'air de...
    Non. Par contre, je pense que votre question comportait une partie de la réponse. L'alliance AUKUS regroupe trois des pays du Groupe des cinq. Or, il y a une collaboration extraordinaire entre les partenaires du Groupe des cinq. L'échange de renseignements se fait à tous les niveaux, y compris aux plus hauts niveaux de classification.
    Vu ce que vous venez de dire, pensez-vous que le Canada peut espérer une invitation à se joindre à l'alliance AUKUS? Nous pourrions alors profiter de la collaboration entre ces partenaires.
    Monsieur le président, nous travaillons sur ce dossier. Nous parlons à nos alliés, plus particulièrement aux États-Unis et à l'Australie. Je me plais à dire que nous pouvons apporter une contribution, surtout en tenant compte de l'économie du Canada et des technologies au pays. Nous en discutons avec nos alliés.
    D'accord.
    Pour revenir à la question que le président a posée plus tôt, pourriez-vous énumérer, dans le temps qu'il vous reste — environ une minute et demie —, quelques-unes des menaces posées par des régimes antagonistes qui devraient nous préoccuper, que ce soit les cybermenaces ou les menaces touchant l'espace sous-marin, maritime ou aérien?
    En 15 secondes, monsieur le président, je dirais que tous les domaines sont touchés. La Chine fait de grandes avancées. Les capacités de déni d'accès et d'interdiction de zone, communément appelées A2/AD, placées autour de Taïwan visent à la fois l'espace et l'espace sous-marin et tout ce qui se trouve entre les deux. C'est un système robuste.
    La question suivante revient sans cesse sur la table. Je ne le dis pas au nom du Comité, mais en mon nom propre. J'aimerais que vous nous décriviez au moyen de renseignements non classifiés les capacités actuelles de la Chine pour que nous puissions nous faire une idée générale de l'état actuel de la menace. Est‑ce possible?
    Des députés: D'accord.
    Le président: Très bien. C'est...

  (1625)  

    C'est une bonne question.
    Monsieur Collins, vous avez les cinq dernières minutes. Bienvenue au Comité.
    Merci, monsieur le président, et merci de m'avoir invité à cette séance.
    J'ai beaucoup lu sur les plans de modernisation à long terme de l'armée chinoise. Comment faisons-nous face à cette réalité au moyen des ressources dont nous disposons et quelle aide nos partenaires fournissent-ils?
    Monsieur le président, il va sans dire que je peux parler davantage du Canada que de la Chine. La Stratégie pour l'Indo-Pacifique a été établie en fonction de ce contexte. Les capacités de la Chine sont énormes. Mon collègue en a touché un mot. À mon avis, nous faisons essentiellement de la dissuasion. Nous démontrons l'importance de suivre l'ordre international fondé sur des règles.
     Le passage récent des Forces canadiennes dans le détroit de Taïwan renforce le statut de voie navigable internationale au titre de la Convention des Nations unies sur le droit de la mer. Cette opération réaffirme l'ordre international fondé sur des règles et produit un effet dissuasif sur la Chine en montrant à cette dernière les règles auxquelles nous adhérons et la manière dont les pays interagissent.
    Merci, monsieur le président.
    Puis‑je poser une question sur la stratégie? À quel point cette stratégie est-elle fluide? Va‑t‑elle changer au fil du temps? Comment réagissez-vous aux problèmes qui surviennent pendant un certain laps de temps? J'imagine que la stratégie est flexible. Comment évaluez-vous son taux de succès? Quels sont les points de contrôle qui vous permettent de déterminer qu'il est temps de changer d'orientation?
    Monsieur le président, je peux commencer, si vous le voulez bien.
    En fait, la stratégie est fluide. Comme je l'ai mentionné plus tôt, elle s'étend sur un horizon de 10 ans, mais elle comporte aussi un point milieu. En effet, à la cinquième année, nous ferons une évaluation complète de la stratégie et nous apporterons les ajustements qui s'imposent.
    Il existe également une solide structure de gouvernance, allant du niveau des directeurs au sein de la bureaucratie jusqu'au niveau des sous-ministres. D'ailleurs, la semaine prochaine se tiendra la deuxième réunion du comité des sous-ministres. Ce sera l'occasion d'évaluer la mise en œuvre de la stratégie sur le terrain et de déterminer où nous en sommes — la question étant de savoir si nous atteignons les objectifs nécessaires en matière de rendement —, puis de recalibrer le tout et d'apporter ces ajustements. Voilà pour la mise en œuvre détaillée.
    À divers moments, les ministres voudront certainement se prononcer sur la trajectoire de la stratégie une fois qu'ils auront compris les modalités de sa mise en œuvre sur le terrain, et cela représente d'autres possibilités.
    Monsieur le président, si vous me permettez d'intervenir du point de vue de la défense, il s'agit d'une stratégie entièrement financée. Nous prenons des mesures vraiment concrètes, puis nous les passons en revue et, enfin, nous évaluons le tout: obtenons-nous les bons résultats? Nous pouvons ensuite rectifier le tir.
    En somme, nous faisons rapport à Affaires mondiales, dont relève le secrétariat, mais du point de vue de la défense, nous évaluons également comment nous nous débrouillons et quels changements nous pouvons apporter, au besoin.
    Monsieur le président, j'aimerais ajouter quelque chose au sujet de la fluidité.
    Sur le plan opérationnel, les interventions sur le terrain varieront d'une année à l'autre en fonction de nos priorités et des partenaires avec qui nous devons collaborer, mais je pense que la stratégie consiste également à créer des relations, ce qui prend du temps. Nous avons choisi des partenaires. Nous en choisirons d'autres. Nous ne pouvons pas simplement sauter... Ce que nous essayons de faire, c'est d'avoir une présence permanente et de nouer des relations durables avec les gens. C'est fluide sur le plan tactique et opérationnel, mais sur le plan stratégique, il s'agit d'essayer d'établir des relations à long terme.
    Quel rôle l’intelligence artificielle joue‑t‑elle dans la stratégie du point de vue de la défense? J'ai parlé plus tôt de modernisation. Quel rôle cela joue‑t‑il dans la création et la mise en œuvre de la stratégie, et aussi, du point de vue de la défense, qu'est‑ce qui pourrait nous inquiéter au sujet des autres acteurs dans la région qui utilisent l'intelligence artificielle pour créer des problèmes?
    Je dirais que le seul aspect qui nous inquiète probablement, c'est la dernière question, à savoir le dernier point que vous avez soulevé au sujet de la façon dont d'autres adversaires potentiels se servent de l'intelligence artificielle. C'est une chose que nous surveillons.
    L'intelligence artificielle ne fait pas partie de notre stratégie. Nous avons beaucoup de chemin à faire quant à la façon dont nous travaillons avec l’intelligence artificielle, mais nous nous inquiétons de l'usage qu'en font les adversaires potentiels.
    Il vous reste environ 45 secondes.
    Je serai donc très bref. Il a été question plus tôt d'une approche fondée sur les droits de la personne. Puis‑je vous demander comment la Stratégie pour l'Indo-Pacifique tient compte de l'expansion du réseau commercial du Canada? Est‑ce que cela entre en ligne de compte à un moment donné dans les décisions que nous prenons dans le cadre de cette stratégie?

  (1630)  

    Je suis désolé. Pour que je puisse comprendre la question, monsieur le président, s'agit‑il de la dimension commerciale...?
    Oui. Nous avons des partenaires commerciaux dans la région. Nous entretenons des relations qui sont évidemment importantes pour l'économie du Canada. Quel rôle cela joue‑t‑il dans la Stratégie pour l'Indo-Pacifique?
    L'un des objectifs stratégiques est d'améliorer le commerce, l'investissement et la résilience de la chaîne d'approvisionnement. En fait, c'est l'un des éléments les plus robustes et les plus dynamiques de la stratégie.
    Nous menons des missions commerciales d'Équipe Canada dans la région. Le premier ministre en a récemment annoncé cinq autres pendant son séjour là‑bas, je crois, en plus de soutenir les exportateurs canadiens grâce à des programmes comme CanExport, pour lequel nous constatons un très grand intérêt de la part du secteur privé canadien.
    Merci, monsieur Collins. Cela met fin à notre première heure.
    Je tiens à remercier nos témoins de leur présence. C'est toujours un plaisir de vous voir ici plutôt que sur un écran de télévision.
    Sur ce, nous allons suspendre la séance avant de passer aux témoins de la prochaine heure.
    Je vous remercie.

  (1630)  


  (1630)  

    Chers collègues, le temps joue contre nous. Reprenons donc la séance.
    Pour la deuxième heure, nous accueillons le représentant de Taïwan. Nous vous sommes reconnaissants de votre présence parmi nous, monsieur, en compagnie de vos collègues. Vous disposez de cinq minutes pour faire votre exposé. Je vous laisse le soin de présenter vos collègues.
    Sur ce, à vous la parole. Merci.
    Monsieur le président McKay, mesdames et messieurs les membres du Comité permanent de la défense nationale, bonjour.
    J'aimerais commencer par vous remercier de m'avoir invité à comparaître devant le Comité. Je me réjouis de chaque occasion qui m'est donnée de faire connaître mon point de vue selon la perspective taïwanaise.
    Le sujet d'aujourd'hui est la situation dans l'Indo-Pacifique. En plongeant dans ce sujet et en essayant de démêler mes conclusions, j'ai eu de la difficulté à me concentrer uniquement sur l'Indo-Pacifique. Plus j'étudiais la question, plus j'étais convaincu qu'aucune région du monde n'est à l'abri des complexités géopolitiques auxquelles nous sommes confrontés aujourd'hui. Ce qui se passe dans la région indo-pacifique est inévitablement lié à ce qui se passe dans d'autres régions du monde et vice versa, notamment en Ukraine, en Asie centrale, en Afrique et au Moyen-Orient.
    Pour bon nombre d'entre nous, les risques géopolitiques les plus inquiétants aujourd'hui sont liés soit à la guerre entre la Russie et l'Ukraine, soit à la rivalité entre les États-Unis et la Chine ou, encore, à l'agression et aux tensions provoquées par la Corée du Nord dans le détroit de Taïwan. La guerre en Ukraine est peut-être plus importante et plus imminente que les autres conflits potentiels. Cependant, comme nous l'avons vu, la Russie, la Chine et la Corée du Nord se rapprochent graduellement et forment une alliance cohésive pour aider à renforcer leurs régimes et à contrer ce qu'ils perçoivent comme des pressions externes. Nous devons comprendre que notre lutte ne se limite pas à la région indo-pacifique.
    Entre la Russie et la Chine, il y a toujours eu davantage de relations économiques et diplomatiques qui se soutiennent mutuellement, sans oublier une coopération militaire pure et dure. Cependant, au fur et à mesure que l'invasion russe de l'Ukraine s'est heurtée à des batailles ardues, la relation entre la Russie et la Chine semble s'être renforcée pour devenir une sournoise alliance semi-militaire à laquelle la Corée du Nord a récemment été invitée à adhérer dans le cadre d'un bloc trilatéral.
    Un dictateur, c'est déjà assez difficile à prédire; imaginez-en trois.
    Antony Blinken, le secrétaire d'État américain, a prononcé un important discours la semaine dernière à la School of Advanced International Studies, ou SAIS, de l'Université Johns Hopkins. Il a dit:
Ce que nous vivons aujourd'hui est plus que la mise à l'épreuve de l'ordre mondial de l'après-guerre froide. C'en est plutôt la fin [...] On reconnaît de plus en plus que plusieurs des postulats fondamentaux qui ont façonné notre [...] ère de l'après-guerre froide ne tiennent plus [...]
Des décennies de stabilité géopolitique relative ont cédé la place à une concurrence de plus en plus vive avec des puissances autoritaires et révisionnistes.
    Les médias ont rapidement repris l'essentiel du discours de M. Blinken: l'ère de l'après-guerre froide est révolue. Une nouvelle ère se dessine.
    La proposition de M. Blinken est d'adopter un nouveau concept de « géométrie variable diplomatique » pour faire face aux défis de la nouvelle ère qui s'annonce. Je ne comprends pas encore tout à fait le sens de ce concept, mais je suis certain qu'à mesure que nous avancerons, les rivalités entre les démocraties et les autocraties ne feront que s'intensifier avec le temps.
    En terminant, j'aimerais souligner qu'au début de l'année, nous aurions encore pu penser que les plus grandes incertitudes géopolitiques venaient du théâtre ukrainien, de la confrontation entre les États-Unis et la Chine, de la péninsule coréenne et du détroit de Taïwan, comme je l'ai mentionné plus tôt. Cependant, lorsque nous réfléchissons à l'avenir, force est de constater que le ralentissement rapide quelque peu inattendu de l'économie chinoise et son effet d'entraînement pourraient bien éclipser d'autres préoccupations régionales. L'échec économique de la Chine pourrait constituer le plus grand risque géopolitique dans les années à venir.
    D'après ce que nous pouvons observer, les difficultés économiques de la Chine ne font peut-être que s'accentuer. Si l'économie de la Chine continue de se détériorer et que rien ne l'aide à se rétablir, les conséquences ne se limiteront probablement pas à son économie, mais elles engloberont une combinaison d'urgences sociales, économiques et politiques. Il y aura sans doute une crise systémique et une transformation globale qui toucheront tous les aspects de la Chine et qui s'étendront à d'autres régions.
    Bref, une grande incertitude plane sur la Chine.

  (1635)  

    Pour Taïwan, les enjeux sont énormes au regard de nos étroites relations commerciales.
    Je suis prêt à répondre à vos questions.
    Je vais m'arrêter ici. Merci.
    Merci, monsieur Tseng.
    Les six premières minutes vont à Mme Gallant.

  (1640)  

    Votre Excellence, ce lundi, 103 avions et 9 navires de guerre de l'Armée populaire de libération ont été détectés autour de Taïwan. C'est le nombre le plus élevé depuis le mois d'avril lorsque 91 avions ont survolé le territoire. À quel moment une invasion officielle de Taïwan sera‑t‑elle déclarée?
    Eh bien, l'incursion d'avions de guerre chinois dans notre zone d'identification de défense aérienne est devenue une pratique très courante, et c'est une situation que nous voyons presque tous les jours. À l'approche des élections présidentielles, vous verrez de plus en plus d'incidents de la sorte parce que cela fait partie des tactiques de la zone grise chinoise pour influencer l'opinion des Taïwanais quant au parti politique à appuyer.
    Je ferai remarquer que le but de cet exercice militaire, y compris de l'incursion des avions de guerre dans notre zone d'identification de défense aérienne, est vraiment de présenter une image peu rassurante de Taïwan, car le discours qui y prévaut aujourd'hui crée un climat de confrontation entre les partisans de la guerre et ceux de la paix. Différents candidats à la présidence préconisent différents scénarios, mais ce genre d'exercice militaire dans notre zone d'identification de défense aérienne sera une façon d'appuyer et d'encourager les discours qui laissent entrevoir l'éventualité d'une guerre entre les deux camps. Bien sûr, cela peut intimider certains électeurs taïwanais, les amenant ainsi à voter pour les candidats en faveur de la paix. À vrai dire, cela fait partie de la guerre cognitive. Je vous exhorte donc à prêter également attention à une telle possibilité.
    Taïwan n'est pas non plus à l'abri de l'ingérence politique dans les élections.
    À quel point est‑ce que Taipei juge crédibles les menaces du président Xi de lancer des attaques nucléaires contre le Japon, et ce, jusqu'à ce que le Japon se rende sans condition s'il tente d'intervenir dans l'invasion de Taïwan par Pékin? Dans quelle mesure cette menace est‑elle prise au sérieux par Taipei?
    En fait, la Chine accélère l'expansion de son arsenal nucléaire. À l'heure actuelle, on estime que la Chine possède environ 350 ogives et bombes nucléaires. Certes, ce n'est pas suffisant pour dissuader les autres puissances d'exercer des représailles, mais il reste que la Chine accélère l'accumulation de son arsenal nucléaire.
    Ce qui est inquiétant ici, c'est que l'allusion de M. Poutine aux armes nucléaires en Ukraine semble avoir un effet sur le renforcement de l'aide accordée à l'Ukraine par le camp occidental. Il se peut que M. Xi Jinping tire avantage de l'énergie nucléaire. D'ailleurs, lors du 20e Congrès du Parti communiste, tenu en octobre dernier, il a expressément évoqué la construction d'armes stratégiques à propulsion nucléaire, armes que la Chine pourrait utiliser en temps de guerre. Je pense donc que c'est une éventualité très alarmante pour nous.
    Comment la puissance militaire combinée de la République populaire de Chine et de ses alliés se compare‑t‑elle à celle de Taïwan, des États-Unis et de tous les alliés de Taïwan?
    Eh bien, la Chine n'a pas beaucoup d'alliés, n'est‑ce pas? En fait, la plupart des alliés chinois sont des pays qui sont en difficulté ou qui ont différentes sortes de problèmes.
    Les seuls alliés que j'ai mentionnés et qui peuvent représenter une menace quelconque sont la Corée du Nord et la Russie, qui se sont rapprochées ces derniers temps. C'est vraiment une situation que nous devrions surveiller de plus près. Le chef nord-coréen, Kim Jong Un, était en Russie il y a à peine une semaine, et il est déjà question que M. Poutine se rende en Chine le mois prochain.
    On rapporte que M. Kim ira également en Chine au mois d'octobre. Le but est de participer à ce qu'on appelle le sommet de l'initiative La Ceinture et la Route. C'est la troisième fois que ce sommet a lieu en Chine. Il est fort probable que les trois chefs d'État se réunissent à cette occasion. La rencontre de ces trois pays — la Corée du Nord, la Russie et la Chine — serait très inquiétante.

  (1645)  

    Récemment, le gouvernement de Taipei a offert son aide au gouvernement du Canada pour combattre la propagande et l'ingérence politique de la République populaire de Chine.
    À votre connaissance, le gouvernement canadien a‑t‑il profité de l'offre de Taipei, et y a‑t‑il donné suite?
    Veuillez répondre très brièvement.
    Non, nous n'avons pas encore reçu de réponse du côté canadien.
    Merci, madame Gallant.
    Monsieur Fisher, vous avez six minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Messieurs, merci beaucoup de vous joindre à nous aujourd'hui au comité de la défense nationale.
    Nous assistons à la montée de la désinformation. C'est là un outil dont se servent certains États pour atteindre leurs buts et objectifs stratégiques. Comment Taïwan est-elle touchée par ce phénomène, et quelles mesures prend-elle pour lutter contre cette mésinformation et cette désinformation?
    Qu'il s'agisse de désinformation ou de mésinformation, tout cela fait partie de leurs tactiques de zone grise. Cela s'inscrit également dans le cadre de leur guerre cognitive. L'objectif est vraiment de pénétrer notre société et de semer la discorde. Parfois, c'est très efficace, surtout en période électorale. C'est à ce moment‑là qu'il faut choisir quelqu'un. Cela peut donc servir de stratégie pour influencer l'élection présidentielle de Taïwan.
    Taïwan fait face à ce genre de situation depuis des années. Notre société est devenue beaucoup plus mûre au cours des dernières années et elle sait comment s'y prendre en la matière. Pour être honnête, je ne pense pas que la guerre cognitive menée par la Chine procure les avantages auxquels elle s'attendait.
    Que peuvent faire le Canada et Taïwan pour se soutenir mutuellement dans ce domaine?
    Au cours des derniers mois, après la fin de la pandémie, nous avons déjà reçu trois délégations parlementaires du Canada à Taïwan. Je crois que chacune d'elles prévoyait des rencontres avec des fonctionnaires ou avec nos ONG. Il y a un engagement très actif, qui est au cœur même de notre lutte contre la désinformation. De telles communications et visites seraient très propices à notre collaboration.
    Il y a beaucoup de discussions au sein du groupe d'alliés, particulièrement aux États-Unis, sur l'atténuation des risques pour la chaîne d'approvisionnement, surtout en provenance de la Chine.
    En ce qui concerne les ressources naturelles, les minéraux critiques et la fabrication de pointe, pouvez-vous nous donner une idée de la façon dont le Canada et Taïwan peuvent approfondir leurs relations industrielles et économiques?
    La question de la chaîne d'approvisionnement est un sujet auquel nous accordons désormais une grande importance. Des dialogues sont en cours entre les responsables de nos deux pays. Nous pensons que le Canada a beaucoup de chance de pouvoir prendre une place très importante dans la chaîne d'approvisionnement mondiale.
    Plus précisément, je tiens à mettre l'accent sur les minéraux critiques que vous détenez. C'est très important. Des dialogues sont en cours, mais ils ne sont pas encore arrivés à maturité. Il y a différents objectifs en jeu, car ce n'est pas de commerce que vous parlez. En fait, ce que vous recherchez, ce sont des investissements pour développer cette filière des minéraux critiques. Nous ne sommes peut-être pas encore prêts à investir. Nous sommes plutôt intéressés par le côté commerce.

  (1650)  

    Au cours de votre déclaration liminaire, pour laquelle nous ne vous avons accordé que cinq minutes — j'aurais aimé en entendre un peu plus —. vous avez parlé de stabilité géopolitique. Vous avez dit que la guerre froide était terminée et qu'une nouvelle guerre froide se profilait à l'horizon. Pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet?
    Les gens parlent encore de l'après-guerre froide, comme si, après la fin de la guerre froide, il y avait une période spéciale que l'on pouvait désigner dans les relations internationales avec certaines caractéristiques propres. M. Antony Blinken affirme que ce n'est pas le cas, que cette époque est révolue.
    Nous ne savons pas à quoi ressemblera cette nouvelle ère qui s'amorce, mais il est évident qu'elle sera très différente de l'après-guerre froide. Elle sera beaucoup plus compliquée. Ce ne sera pas une ère de guerre froide, car elle est plutôt noire et blanche. Présentement, ce n'est pas l'après-guerre froide, parce qu'il y a beaucoup d'interactions. Le risque de désolidarisation de la chaîne d'approvisionnement fait partie de cette ère, de la nouvelle ère qui s'annonce. Ce risque était en fait très présent dans l'après-guerre froide. Nous entrons dans une nouvelle ère.
    Je prendrai les 45 dernières secondes.
    Si nous sommes dans l'après-guerre froide, ce que je reconnais, et que la politique d'une Chine unique a été élaborée à l'époque de la guerre froide, pensez-vous que cette politique d'une Chine unique devrait être modifiée?
    Faites attention à ce que vous allez répondre à cela.
    Des députés: Oh, oh!
    Il n'y a pas de définition fixe de ce qu'est la politique d'une Chine unique. Nous devons discuter plus en détail de la direction que nous allons prendre en ce qui a trait à la révision de cette politique. Bien entendu, la politique actuelle d'une Chine unique n'est certainement pas ce que nous souhaitons pour Taïwan.

[Français]

     Madame Normandin, vous avez la parole pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Messieurs les témoins, je vous remercie de votre présence. Nous vous en sommes extrêmement reconnaissants.
    J'aimerais que vous nous parliez de commentaires qui ont émané des États‑Unis récemment. Le directeur de la CIA a mentionné que le président Xi avait donné ordre d'être prêt à envahir Taïwan d'ici 2027. En parallèle, le Pentagone mentionne qu'une invasion militaire ou un blocus de Taïwan aurait peu de chances de succès, surtout dans le cas d'un blocus. Cela donnerait le temps aux alliés de rassembler les forces requises pour soutenir Taïwan.
    J'aimerais savoir si vous faites la même lecture que le Pentagone, selon lequel une invasion de Taïwan ne pourrait pas réussir.

[Traduction]

    Merci beaucoup de cette question.
    La raison pour laquelle la CIA ou le Pentagone ont désigné l'année 2027 comme l'année où la Chine va peut-être envahir Taïwan, c'est que c'est ce que la Chine a dit. Cette année a été utilisée par la Chine comme une année charnière parce qu'elle marquera le 100e anniversaire de la fondation de l'Armée populaire de libération. La Chine veut faire de 2027 l'année de la modernisation complète de sa puissance militaire, ce qui signifie qu'en 2027, elle sera en mesure de mener une guerre avec des armées de premier ordre. Ce ne sera pas nécessairement une guerre régionale, mais bien une guerre mondiale. Tel est l'objectif de la Chine.
    Un objectif est une chose. Savoir s'ils sont réellement capables d'atteindre ce statut en est une autre.
    En ce qui concerne Taïwan, je peux vous dire qu'il existe une coopération très étroite entre l'armée de Taïwan et celle des États‑Unis. Nous coopérons non seulement avec les forces militaires, mais aussi avec les autres membres de l'appareil militaire. Par exemple, nous coopérons aussi en matière de renseignement.
    Les décideurs taïwanais n'ont pas le luxe de supposer que la Chine ne va pas envahir Taïwan, mais nous n'envisageons pas d'année précise pour cette invasion. En fait, nous pensons qu'il faut accélérer les choses autant que possible. C'est ce qui explique la panoplie de réformes militaires en cours à Taïwan. Il existe également un programme de réforme de notre système de réserve. Nous ne prévoyons pas d'années précises pour une éventuelle guerre.
    Nous espérons maintenir la paix. Nous ne voulons pas que la guerre prouve que la Chine a fait le mauvais calcul. La vision qui sous-tend l'édification de notre force est cette notion de « paix par la force ». Nous ne voulons pas la guerre, mais nous nous y préparons.

  (1655)  

[Français]

     Merci.
    De façon peut-être plus précise, ce que je comprends de l'analyse du Pentagone, c'est qu'un blocus économique de Taïwan donnerait le temps aux alliés de Taïwan de préparer de l'aide et empêcherait une invasion militaire de Taïwan. Êtes-vous d'accord avec cette analyse?

[Traduction]

    Je pense que vous faites référence à un exercice militaire qui s'est déroulé juste après la visite de Nancy Pelosi, alors présidente de la Chambre des représentants des États‑Unis. C'était en août de l'année dernière. Oui, cet exercice militaire était le plus important qu'on avait vu jusque là. Il était différent des autres exercices qu'ils avaient menés. Le blocus naval était peut-être l'aspect le plus alarmant à l'époque, parce que c'était quelque chose de nouveau.
    Toutefois, en cas de guerre réelle, un blocus militaire de Taïwan n'est peut-être pas la façon la plus efficace... J'ai entendu cela de différentes sources. Un blocus donnerait aux alliés le temps de venir aider Taïwan. Si l'objectif de la Chine est de mener une guerre très rapide qui prendra de cours l'aide que la communauté internationale pourrait déployer à la rescousse de Taïwan, un blocus naval ne fonctionnera pas. Là encore, il s'agit d'un aspect technique de la guerre militaire.
     Comme je l'ai dit, à Taïwan, nous espérons obtenir davantage de soutien international. Nous qualifions de préventive la diplomatie que Taïwan mène. Nous voulons que le monde entier fasse savoir aux Chinois que, quel que soit le type d'invasion qu'ils ont en tête, cela leur coûtera trop cher. Nous ne voulons pas qu'une guerre ait lieu.
    Madame Mathyssen, vous avez six minutes.
    Une partie de vos propos sur l'augmentation rapide des capacités nucléaires et des stocks nucléaires de la Chine ont provoqué chez moi une certaine accélération de mon rythme cardiaque, mais vous avez ensuite ajouté certaines observations sur la paix par la force, précisant que c'est ce qui fait votre force. C'est ce que vous espérez. Pensez-vous toujours qu'il y a de la place dans tout cela pour discuter de la non-prolifération nucléaire?
    À Taïwan, nous savons comment les dirigeants chinois, les universitaires chinois ou les généraux de l'armée chinoise discutent de la perspective de l'unification. Permettez-moi de vous donner des précisions à ce sujet.
    La vision chinoise de l'unification avec Taïwan est celle d'une Chine plus forte. Il en parle comme d'un rajeunissement d'une grande puissance. S'ils savent que cette unification se fera à leurs dépens, ils ne seront pas enclins à le faire, et en particulier si nous leur faisons savoir que cela leur coûtera très cher.
    Pour les dirigeants chinois, l'unification est un moyen d'élever le statut de la Chine et non d'affaiblir le pays. À l'heure actuelle, le monde entier dit aux dirigeants chinois que s'ils utilisent la force contre Taïwan, ils n'auront pas une Chine plus forte après l'unification. Ce n'est donc pas ce que recherchent les dirigeants chinois.
    Vous avez beaucoup entendu parler de ce que nous disons à Taïwan, des raisons de notre confiance. C'est un point sur lequel nous sommes confiants. Bien sûr, on peut toujours dire qu'un dictateur peut avoir une vision irrationnelle des choses. Si c'est le cas, il est difficile de poursuivre une discussion très raisonnable, mais je vous dis qu'à l'heure actuelle, nous ne considérons pas une invasion de la Chine comme une menace imminente.

  (1700)  

    Vous avez dit qu'il y avait eu une augmentation du nombre d'avions de la République populaire de Chine dans votre espace aérien et vous avez parlé des répercussions qu'avait eues cette augmentation.
    En ce qui concerne la guerre cognitive, lorsque nous nous sommes rendus là‑bas, nous avons parlé des médias sociaux, des cyberattaques, etc. Il a été dit qu'il y en avait un million par jour. Ces chiffres ont-ils également augmenté? Avez-vous des statistiques à ce sujet?
    Oui. En fait, nous avons des mécanismes militaires en temps réel pour rendre compte des activités militaires qui se déroulent dans le détroit de Taïwan. Ces activités n'ont commencé qu'en septembre 2020. Avant cela, nous n'en avions pas vu beaucoup de la part de l'armée chinoise, y compris de la part de l'armée de l'air, mais après cela, nous avons décidé de rendre compte publiquement de ces activités parce que la Chine aime travailler en secret. Elle n'a pas l'habitude de faire les choses au vu et au su du monde. Lorsque nous avons décidé d'exposer publiquement ces activités, la pression s'est exercée sur eux.
     Chaque fois qu'il y a un exercice militaire ou des incursions d'avions ou de navires de guerre, nous l'annonçons publiquement à Taïwan. Vous pouvez en prendre connaissance. Notre ministère de la Défense nationale a un site Web que vous pouvez consulter quotidiennement.
    Comme je l'ai dit, pour le moment, l'intention de la Chine est d'influencer notre élection présidentielle, mais elle convoite aussi quelque chose à beaucoup plus long terme. Les Chinois veulent changer le statu quo. Ils veulent changer le statu quo de la ligne médiane dans le détroit de Taïwan. C'est une autre raison pour laquelle nous sommes très reconnaissants envers le Canada: vous envoyez vos navires de guerre croiser dans le détroit de Taïwan.
     La Chine ne considère pas le détroit de Taïwan comme une zone internationale, mais par vos transits navals dans ce détroit, vous défiez cette prétention de Pékin. C'est donc très important pour nous.
    Mon temps est‑il écoulé?
    Il ne vous reste que 15 secondes.
    Je les garderai pour la prochaine fois, monsieur le président.
    Merci.
    Monsieur Bezan, allez‑y.
    Merci, monsieur le président.
    Merci d'avoir bien voulu nous rencontrer à nouveau, monsieur l'ambassadeur. C'est toujours un plaisir de vous voir.
    Compte tenu de ce que la guerre en Ukraine et l'invasion par la Russie nous ont enseigné, je sais que Taïwan prend cette question à cœur et qu'elle se questionne sur ce qui doit se passer pour faire face à l'agression chinoise de Pékin. Nous avons été très impressionnés par l'équipement militaire que Taïwan a déjà été en mesure de fabriquer elle-même. Lors de la première séance, vous avez parlé des avions de combat que vous avez pu tester et mettre en production en 500 jours. Nous avons vu vos capacités en matière de défense aérienne et de systèmes de missiles. Vous avez vos propres navires de guerre de fabrication taïwanaise.
     Lorsque vous prenez connaissance des rapports quotidiens et des mises à jour géopolitiques dans votre région, et que vous apprenez que 55 avions de l'Armée populaire de libération volent autour de Taïwan et qu'en plus, Pékin envoie plusieurs navires de guerre dans votre zone économique, que faites-vous pour contrer la menace sous-marine? Nous parlons toujours de l'air et de l'eau, mais je suis persuadé qu'avec la prolifération des sous-marins que la Chine a construits au cours de la dernière décennie, vous ne perdez pas cela de vue non plus.

  (1705)  

    Je ne suis pas un officier militaire, je ne peux donc vous donner que les informations dont je dispose. Nous développons notre propre force sous-marine. Comme cela a été annoncé, la fabrication du premier sous-marin sera terminée l'année prochaine. Le contrat du premier lot de sous-marins compte huit unités. Ce sera un élément très important de notre autodéfense.
    Pour ce qui est de la surveillance des activités sous-marines, nous travaillons pour l'instant avec nos alliés — les États-Unis et le Japon plus que quiconque. Nous savons que le détroit de Taïwan, la mer de Chine orientale et la mer Jaune ne sont pas assez profonds pour permettre des activités sous-marines. C'est pourquoi la Chine ne cédera pas au sujet de ses activités en mer de Chine méridionale. Cette mer est suffisamment profonde pour cacher les sous-marins qu'elle a construits dans la province d'Hainan.
    S'il n'y a qu'une seule base sous-marine, elle est facile à surveiller. Vous savez comment faire. Ils ont besoin d'une alternative. Ils pensent que la côte orientale de Taïwan est la mieux indiquée. La côte orientale de Taïwan est très proche d'un fond marin très profond dans le Pacifique. Nous ne prenons donc pas à la légère leurs ambitions pour Taïwan.
    La menace ne se situe donc pas dans le détroit de Taïwan. Il faut protéger le front pacifique.
    Vous avez mentionné l'aide que vous avez pu obtenir en coopération avec les États-Unis et le Japon. Je crois savoir que ces derniers jours, le Japon n'a pas envoyé d'attaché de défense, mais un conseiller militaire — un officier retraité de la marine japonaise, je crois. Le Canada peut‑il faire davantage, en travaillant avec Taïwan, pour donner plus de profondeur à la coopération militaire et aux relations entre nos deux forces de défense?
    Nous serions certainement heureux d'une plus grande coopération entre nos armées. Un renforcement des relations entre militaires est toujours très positif pour nous, d'autant plus que nous sommes des partenaires aux vues similaires. Nous tenons également compte du fait que le Canada essaie lui aussi d'accélérer l'édification de ses propres forces navales. En fait, selon votre stratégie indo-pacifique, vous avez déjà ajouté un navire de guerre en Asie de l'Est, dans la région indo-pacifique. Le fait que trois navires empruntent le passage dans la zone indo-pacifique est très significatif pour nous. Nous en sommes très contents.
    Nous pouvons faire quelque chose de plus, car, comme je l'ai dit...

  (1710)  

    Il faudra attendre une autre question pour en savoir plus. Je vous remercie. Nous devrions peut-être vous faire revenir pour l'étude sur les marchés publics.
    Des voix: Oh, oh!
    Le président: Madame O'Connell, vous avez cinq minutes.
     Vous avez dit que la Chine n'a pas d'alliés, sauf ceux qui, je pense, se sont construits par nécessité. J'aimerais que vous nous parliez de cela.
    Vous avez également parlé du rajeunissement d'une grande puissance. Corrigez-moi si je me trompe, mais une partie de cette stratégie consiste à investir dans certaines nations en développement et de miser sur cette relation issue de la nécessité dans le but d'une utilisation ou d'une alliance future.
    Compte tenu de ce fait et de la situation économique de la Chine, percevez-vous un ralentissement des activités tentaculaires de la Chine dans d'autres nations et pays de régions comme l'Afrique, l'Amérique du Sud, etc. Dans l'affirmative, voyez-vous une occasion pour des pays comme le Canada d'aider certains de ces pays à se développer afin qu'ils ne deviennent pas à ce point dépendants des investissements chinois?
    Je vous remercie de me donner l'occasion d'expliquer ce que j'ai dit précédemment. Ce que je voulais dire, c'est que si vous procédez à vote au sein du système des Nations unies, il est évident que la Chine obtiendra de nombreuses voix. Ce n'est pas ce que j'entendais par « alliés ». Ces votes proviennent de pays qui aspirent à obtenir l'aide de la Chine, notamment par l'intermédiaire d'investissements dans le cadre de l'initiative « La ceinture et la route ». Ils se tournent vers la Chine pour obtenir de l'aide, mais ils ne l'aideront pas en retour dans l'éventualité de confrontations géopolitiques. Je crois que je réponds aux questions sous cet angle.
    La Chine a Xi Jinping. M. Xi souhaite que la Chine se revitalise et devienne une grande puissance d'ici 2049. C'est ce qu'il a déclaré lors du 19e congrès national, car je précise encore une fois que 2049 marquera le 100e anniversaire de la création de la RPC. Ces années marquantes ont une signification pour le parti communiste chinois, mais une semaine est une période très longue sur la scène politique. Si vous dites que vous voulez réaliser quelque chose en 2049 ou 2027, ce n'est qu'un slogan politique.
    Nous observons ce qui se passe quotidiennement. Comme je l'ai mentionné dans ma déclaration préliminaire, le fait est que la Chine connaît des difficultés économiques auxquelles elle ne s'attendait pas et auxquelles le monde entier ne s'attendait pas non plus. Le monde s'est en quelque sorte habitué à ce que la Chine soit comme une locomotive, une force motrice de la croissance économique mondiale, mais ce n'est pas ce qui va se passer. C'est ce que vous lirez de plus en plus dans les médias internationaux. Les médias internationaux ont parfois une vision optimiste de la Chine parce qu'ils ont eux-mêmes investi d'énormes sommes d'argent dans ce pays. Ils espèrent que l'économie chinoise pourra être relancée, mais ce n'est pas le cas, comme le montrent les données actuelles.
    Ma question porte en partie sur le fait que nous remarquons certaines des difficultés économiques liées au remboursement des prêts du FMI auxquelles l'Argentine fait face, mais la Chine intervient pour garantir certains de ces prêts et achète également des médias et des bases militaires dans ce pays. Je trouve cela très intéressant. Je vous saurais gré de formuler des commentaires supplémentaires à ce sujet.
    Ma question suivante porte sur la cybernétique. Vous avez également parlé de l'ingérence dans les élections. Dans notre pays, nous parlons souvent de l'ingérence de la Chine dans les élections. Vous avez indiqué que votre pays a une population mature qui a pris conscience de ces tactiques. Bien que cette situation ne soit pas nouvelle pour le Canada, je pense que les citoyens canadiens en sont plus conscients aujourd'hui.
    Selon votre expérience, pourriez-vous nous donner des conseils sur la manière de sensibiliser notre population aux tactiques d'ingérence étrangère?

  (1715)  

    À Taïwan, lorsque nous parlons de cyberattaques, nous faisons précisément allusion à des attaques ciblant des infrastructures critiques ou la page d'accueil en ligne du gouvernement afin de voler des renseignements tirés d'importantes bases de données ou de commettre des crimes de ce genre. Je mentionne encore une fois que ces attaques font partie des tactiques de zones grises de la Chine.
    L'autre partie de ces tactiques consiste à disséminer de la désinformation. En fait, les cyberattaques constituent une partie très concrète de ces tactiques — « concrète » en ce sens que l'on peut compter le nombre d'attaques et de...
    Malheureusement, nous allons devoir en rester là. Je m'en excuse, mais je le fais sans aucune sincérité.
    Des voix: Oh, oh!
    Le président: Ce serait formidable si nous pouvions faire comparaître le ministre des Affaires numériques devant nous. Je pense que tous ceux d'entre nous qui ont participé à ce voyage ont été très impressionnés par la manière dont Taïwan gère la guerre cognitive et les cyberattaques.
    Madame Normandin, vous avez la parole pendant deux minutes et demie.

[Français]

     Merci beaucoup.
    Nous l'avons entendu plus tôt, Taïwan est complètement autonome en ce qui a trait à la production de ses capacités militaires. Je comprends qu'il est à peu près impossible de s'approvisionner sur les marchés internationaux pour des systèmes de défense.
     Ma question comportera deux volets. D'abord, j'aimerais savoir pourquoi cela semble aussi difficile de s'approvisionner sur les marchés internationaux. Ensuite, est-ce que c'est une situation qui devrait changer à l'avenir? Est-ce que ce serait à l'avantage de Taïwan qu'on puisse offrir davantage de soutien en matière de production militaire?

[Traduction]

    Excusez-moi, qu'avez-vous dit? Avez-vous demandé s'il était difficile d'avoir accès au marché international?

[Français]

    Je parle plutôt de la possibilité de s'approvisionner sur les marchés internationaux pour des systèmes de défense.

[Traduction]

    Nous jouissons d'un statut international tout à fait unique. Les États-Unis et, dans une moindre mesure, le Japon sont en fait les seuls pays à avoir pris un engagement envers Taïwan en matière de sécurité.
    Les États-Unis disposent d'une loi appelée la Taiwan Relations Act, qui stipule très clairement que la paix et la stabilité dans le détroit de Taïwan sont prises très au sérieux. En outre, dans la même partie de la loi sur les relations avec Taïwan, il est indiqué que les États-Unis fourniront des armes d'autodéfense à Taïwan. Au fil du temps, nous obtiendrons plus de soutien de ce genre de la part des États-Unis, proportionnellement à la menace que la Chine continentale fait peser sur nous.
    Autrefois, nous pouvions acheter des armes sur le marché international, mais aujourd'hui, en raison des tactiques d'intimidation de la Chine continentale, tout pays désireux de traiter avec Taïwan dans le domaine de la vente d'armes s'expose à des représailles et à des sanctions de la part de la RPC. Voilà pourquoi nous ne faisons pas appel à vous. Autrement, nous serions heureux de prendre contact avec vous. Vous possédez de nombreux systèmes d'armement avancés qui nous intéresseraient beaucoup.
    Madame Mathyssen, vous avez la parole pendant deux minutes et demie.
    Lors de notre visite, le rapport du Comité spécial sur la relation entre le Canada et la République populaire de Chine a suscité beaucoup d'enthousiasme. Ce rapport a été présenté à plusieurs reprises au cours de notre voyage.
    La réponse officielle du gouvernement du Canada a été fournie. Pourriez-vous donner votre avis sur cette réponse, si vous estimez qu'il lui manque certains éléments? Que pensez-vous de cette réponse?
    En réponse aux 18 recommandations proposées dans le rapport du Comité spécial sur la relation entre le Canada et la République populaire de Chine, le gouvernement fédéral a donné son accord, son accord de principe ou son accord partiel. Ce sont les trois types de réponses que le gouvernement fédéral a données à 14 des 18 recommandations. Ce pendant, le gouvernement fédéral a répondu qu'il « prend note » de 4 des 18 recommandations. Il s'agit des recommandations 2, 4, 12 et 13.
    Du point de vue de Taïwan, je dirais que nous espérions que les 18 recommandations seraient acceptées, ou du moins qu'elles feraient l'objet d'un accord de principe.
    Quant aux préoccupations du gouvernement fédéral, nous pensons qu'elles pourraient être apaisées dans le cadre de l'élaboration en ajoutant une condition ou une clause restrictive, mais ce n'est pas ainsi que la réponse du gouvernement a été formulée. Je le mentionne en toute amitié. Je n'ai pas l'intention de critiquer qui que ce soit au sein de l'administration.
    Par exemple, nous parlons de principes. La deuxième recommandation, par exemple, porte sur le fait que l'avenir de Taïwan doit être décidé uniquement par le peuple taïwanais. Le gouvernement a répondu qu'il « prend note de cette recommandation ». Je crois que les membres du Comité spécial sur la relation entre le Canada et la République populaire de Chine avaient réfléchi suffisamment entre eux avant de rédiger cette recommandation. Compte tenu des préoccupations de Taïwan et du comité spécial, je pense qu'il s'agit d'une question de principe, un principe qui reflète les valeurs fondamentales et l'esprit fondamental de la démocratie. C'est ce qui importe le plus.
    L'inquiétude de l'administration, qui craint que Taïwan n'utilise cette recommandation pour modifier sa politique et changer le statu quo, je pense, me semble un peu tirée par les cheveux. Ce n'est pas notre politique actuelle, et cela ne se produira pas.

  (1720)  

     Monsieur Kelly, la parole est à vous pendant cinq minutes.
    Je vous autorise à poursuivre si vous le souhaitez. C'était une bonne question, et je pense que votre témoignage est très important.
    En ce qui concerne les autres recommandations que le gouvernement fédéral a acceptées avec une certaine réserve, il pourrait gérer les problèmes d'une manière qui nous laisserait une plus grande marge de manoeuvre pour les résoudre.
    Par exemple, dans la recommandation no 12, le Comité exhorte le gouvernement à envisager sérieusement de demander à la ministre du Commerce international, Mme Mary Ng, de se rendre à Taïwan pour signer l'APIE, c'est-à-dire l'Accord sur la promotion et la protection des investissements étrangers. La réponse du gouvernement est que, conformément à la pratique établie, l'APIE doit être signé par les chefs du Bureau commercial du Canada à Taipei et du Bureau économique et culturel de Taipei au Canada, c'est-à-dire moi-même et mon homologue à Taipei, M. Jim Nickel.
    J'estime que c'est une façon trop sémantique de répondre à cette question. Si une ministre du Commerce international visite Taïwan, il n'est pas nécessaire qu'elle soit là pour signer cet accord. Elle peut venir à tout moment, car ces déplacements visent à promouvoir le commerce international entre nous. Ce type de réponse du gouvernement fédéral me semble un peu trop légaliste.
    Nous pouvons nous entendre, et nous pouvons trouver des solutions. J'espère que d'autres échanges pourront avoir lieu entre les fonctionnaires de nos deux gouvernements afin que nous puissions résoudre les malentendus. Je formule toutes ces observations en toute amitié.

  (1725)  

    Je vais revenir sur les cybermenaces et la lutte contre la désinformation générée par l'État, dont nous savons qu'elle est pratiquée par la RPC.
    Nous savons que vous vous occupez de cette question, peut-être avec beaucoup plus de connaissances et d'intensité que nous le faisons au Canada. Y a-t-il autre chose que vous pourriez nous dire au sujet de la manière dont Taïwan est en mesure de réagir aussi rapidement aux attaques de la RPC?
    Il n'est pas juste d'établir des comparaisons entre Taïwan et le Canada, car vous n'avez probablement rencontré ce problème qu'au cours des élections de 2019 et 2021. La plupart du temps, on aurait pu penser qu'on vivait un temps de paix.
    À Taïwan, nous affrontons ce problème quotidiennement, et la situation ne fait que s'aggraver à l'approche des élections nationales. Naturellement, nous sommes plus expérimentés, et nous avons développé une sorte de résistance. Nous résistons mieux aux cyberattaques ou aux campagnes de désinformation de la Chine. Nous sommes dotés de nos systèmes de réponse aux cyberattaques, et nous utilisons des codes rouge, jaune et...
    Pendant les dernières minutes de l'intervention de Mme Gallant — je veux juste m'assurer d'avoir compris clairement la discussion —, elle a demandé si Taïwan avait offert de travailler avec le gouvernement canadien et si cette offre avait été acceptée. Vous avez répondu que, non, le gouvernement canadien n'avait pas répondu à l'offre ou que l'offre avait été rejetée. Que s'est-il passé? Qu'en est-il de la possibilité pour Taïwan de travailler avec le Canada pour nous aider à résoudre ce problème grandissant?
    Comme cette proposition émane de mon ministre des Affaires étrangères, la réponse sera donnée par son homologue, ou du moins par Affaires mondiales Canada (AMC). Nous ne parlons pas de ce type de coopération. Je dirais que la coopération se déroule déjà d'une manière différente. Lors de leur visite à Taïwan, les parlementaires se sont entretenus avec nos collègues qui étaient sur place et assuraient ce type de protection contre les cyberattaques ou la désinformation. Nous apprenons les uns des autres.
    Nous sommes forts. Les députés qui se sont rendus à Taïwan le savent très bien. Nous ne parlons pas seulement de politiques gouvernementales visant à protéger notre société; il y a en fait une mobilisation générale de notre société civile. Les ONG jouent un rôle très important. Elles aident notre population à être mieux renseignée. Une prise de conscience sociale est observée parmi nos concitoyens. Ils savent que nous devons apprendre à distinguer la désinformation des vraies nouvelles, de l'histoire véridique.
    Je vais devoir conclure cet échange. Vous n'avez pas tort en ce qui concerne la manière très perfectionnée dont Taïwan répond aux cyberattaques. Il serait utile que notre comité entende un témoignage direct à ce sujet, mais ce n'est pas le sujet dont nous parlons aujourd'hui.
    Cela dit, nous allons demander à Mme Lalonde de conclure les séries de questions. Vous avez la parole pendant cinq minutes, madame.
    Je tiens tout d'abord à vous remercier. Merci d'être venus témoigner devant nous aujourd'hui. C'est ma première semaine au sein du Comité. J'entends parler d'espoir, de résilience et, je dirais, de désir de renforcer l'amitié entre nos deux pays.
    Selon toutes les notes que j'ai prises, je crois qu'à un moment donné, vous avez parlé de désinformation. Vous avez expliqué que vous aviez fait preuve de plus de transparence. Vous avez avisé le peuple taïwanais de tous les renseignements qui étaient communiqués et qui désinformaient vos citoyens. Pouvez-vous nous expliquer en quoi cette décision a aidé votre pays?
    Je pense que la transparence est parfois considérée comme la faiblesse de nos démocraties, parce que les régimes autoritaires l'utilisent simplement pour infiltrer notre société. Cependant, lorsque la transparence est utilisée de manière appropriée et qu'elle est accompagnée d'une communication publique efficace, elle peut être notre force. C'est ainsi que nous la percevons à Taïwan.
    Nous parlons de lutte contre la désinformation. Nous adhérons largement aux principes de la démocratie, qui sont très importants, tels que la liberté d'expression et la liberté de la presse. Même si nous savons que de la désinformation est diffusée, nous n'interdisons pas aux gens de s'exprimer.
    En fait, les mesures que nous prenons sont toujours une réponse aux fausses nouvelles ou à la désinformation, mais ce n'est pas grave. Plus nous le ferons, plus nos concitoyens sauront ce qui se passe. Nous disposons de plusieurs types d'applications qui nous permettent d'expliquer à nos concitoyens comment faire preuve de discernement. La gestion de ces applications est bénévole: les personnes qui se portent volontaires pour ce travail veulent rendre service au pays, à notre société.
    Je le répète, la transparence est notre force.

  (1730)  

    J'aimerais conclure en vous demandant de me faire part de votre point de vue à propos de ce qui vous préoccupe le plus et de la manière dont le Canada, et en particulier notre comité, peut vous aider.
    Notre plus grande préoccupation concerne les pays qui partagent les mêmes vues que nous. Les membres du camp des démocraties devraient collaborer plus étroitement.
    À l'heure actuelle, nous constatons que la tendance est très saine. Nous construisons vraiment le genre de solidarité qui existe entre des partenaires qui ont des vues similaires, mais je ne prendrais pas à la légère ce que nos ennemis avérés ou potentiels font pour essayer de démanteler le travail d'équipe que réalisent les communautés partageant les mêmes idées. Voilà notre préoccupation, mais nous croyons que la démocratie l'emportera.
    J'ose le croire aussi, monsieur.
    Monsieur le président, je vais conclure ainsi.
     C'est une excellente note de conclusion.
    Représentant Tseng, je vous suis reconnaissant d'avoir comparu devant le Comité et de nous avoir fait part de vos réflexions. J'aimerais poursuivre cette conversation, en particulier en ce qui concerne la cyberguerre et la guerre cognitive. Nous avons constaté que Taïwan est extrêmement perfectionné dans ce domaine et que le Canada a de nombreux enseignements à tirer de la façon dont il s'y prend.
    Vous nous avez amplement renseignés sur cette analyse de la menace indo-pacifique. Face à cette menace, vous êtes en première ligne et vous combattez sur le front pour nous tous. Je vous remercie, vous et votre pays, du travail que vous accomplissez.
    Cela dit, chers collègues, nous reprenons mardi notre étude sur les processus d'approvisionnement. Jeudi, le ministre Blair et ses collègues seront présents.
    Sur ce, la séance est levée.
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