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FAAE Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des affaires étrangères et du développement international


NUMÉRO 107 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 8 mai 2024

[Enregistrement électronique]

  (1640)  

[Traduction]

    Je déclare la séance ouverte.
     Bienvenue à la 107e réunion du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international de la Chambre des communes.
    Avant de commencer, je tiens à rappeler les importantes mesures préventives suivantes à tous les députés et à tous les témoins dans la salle.
    Pour prévenir les incidents de retour de son perturbateurs et potentiellement nocifs qui peuvent causer des blessures, tous les participants qui se trouvent dans la salle doivent garder leur oreillette loin des microphones en tout temps. Toutes les oreillettes ont été remplacées par un modèle qui réduit grandement le risque de retour de son. Les nouvelles oreillettes sont noires, tandis que les anciennes étaient grises.
    Lorsque vous n'utilisez pas votre oreillette, veuillez la placer la face vers le bas au milieu de l'autocollant destiné à cet usage, que vous trouverez sur la table. Veuillez consulter les cartons placés sur la table qui présentent les directives visant à prévenir les incidents de retour de son. L'aménagement de la salle a été modifié pour augmenter la distance entre les microphones et réduire le risque de retour de son causé par une oreillette captant le son ambiant.
    La réunion d'aujourd'hui se déroule en mode hybride. La greffière m'a assuré que les tests de connectivité avaient été effectués au préalable. Conformément à la motion de régie interne adoptée par le Comité sur les tests de connexion des témoins, tout a été fait et je suis heureux d'informer tout le monde que tout va bien.
    Conformément à l'article 108(2) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le lundi 29 janvier 2024, le Comité reprend son étude sur l'approche du Canada à l'égard de l'Afrique.
    J'aimerais maintenant souhaiter la bienvenue à nos témoins.
    Nous accueillons M. Denis Côté, analyste des politiques à l'Association québécoise des organismes de coopération internationale; et M. Andy Harrington, directeur exécutif de la Banque canadienne de grains. Nous sommes ravis d'accueillir, dans la salle, M. Philippe Dongier, directeur général du Centre d'étude et de coopération internationale.
    Chacun d'entre vous disposera de cinq minutes pour faire sa déclaration préliminaire, après quoi nous passerons aux questions des membres du Comité. Je demande à tous les témoins d'être attentifs. Lorsque votre temps d'intervention tirera à sa fin, je vous montrerai ceci, ce qui veut dire que vous devrez terminer dans les 10 à 15 secondes qui suivent. Cela s'applique non seulement à votre déclaration préliminaire, mais aussi à la période durant laquelle les députés vous poseront des questions.
    Maintenant que tout a été expliqué, nous allons entendre les témoins. Nous commençons par M. Côté.
     Monsieur Côté, vous avez la parole. Vous disposez de cinq minutes pour faire votre déclaration préliminaire.

[Français]

    Je tiens d'abord à remercier le Comité de m'avoir invité, dans le cadre de cette étude, à témoigner au nom de l'Association québécoise des organismes de coopération internationale, ou AQOCI.
    Notre association regroupe 75 organismes de coopération et de solidarité internationale qui, basés au Québec, travaillent en collaboration avec plus de 1 300 partenaires locaux dans 112 pays partout dans le monde en faveur de l'éradication des causes de la pauvreté et en faveur de la construction d'un monde basé sur des principes de justice, d'inclusion, d'égalité et de respect des droits de la personne.
    Plus de 50 de ces organismes sont actuellement actifs dans plus de 40 pays d'Afrique. Leurs activités sont fortement concentrées dans les pays du Sahel, notamment au Sénégal, au Mali, au Burkina Faso, ainsi qu'au Bénin et en République démocratique du Congo.
    En ce qui concerne l'engagement du Canada à l'égard des pays du continent africain, selon nous, la conjoncture actuelle se prête non pas à un retrait du Canada, mais plutôt à un engagement renforcé dans la région. En effet, dans un contexte de multiplication des crises, notamment sur le plan politique, climatique et sécuritaire, il est plus important que jamais de soutenir les partenaires avec lesquels nous travaillons depuis de nombreuses années et de montrer aux communautés locales que le Canada est solidaire de leurs luttes pour l'élimination de la pauvreté, pour le développement économique et la justice sociale, et contre l'insécurité et les changements climatiques.
    Les organismes de coopération internationale du Québec et du Canada ont établi des partenariats de longue date avec des groupes locaux qui leur confèrent une compréhension approfondie des réalités sociales et des besoins réels des populations dans de nombreuses communautés africaines. Cela leur donne un avantage unique pour concevoir des programmes qui sont pertinents, réactifs et efficaces.
    Compte tenu du désengagement de certains pays donateurs, notamment dans la région du Sahel, le Canada a une place à prendre et pourrait jouer un rôle de leader dans les pays du Sahel et de la francophonie, notamment. Notre longue tradition de partenariat avec ces nations nous permet d'apporter une importante contribution à leur développement et à leur stabilité. Le Canada est l'un des rares pays à pouvoir encore intervenir dans la région du Sahel, en raison justement de son approche respectueuse des populations locales et de son engagement à travailler en partenariat avec elles.
    Certains de nos membres mentionnaient d'ailleurs, lors de la consultation que nous avons menée avec eux dernièrement, que des régions où des activités de coopération internationale avaient été soutenues par le Canada par le passé se montraient déjà plus résilientes face au contexte actuel de polycrises. Cela démontre que notre engagement donne des résultats et qu'il faut maintenir cet engagement là où nous avons déjà établi des liens solides.
    Au-delà de l'approche, cependant, l'engagement du Canada dans la région doit aussi passer par un financement accru.
    En 1970, les pays de l'OCDE, dont le Canada, se sont engagés à consacrer annuellement 0,7 % de leur revenu national brut à l'aide internationale. Malheureusement, 54 ans plus tard, le Canada a atteint à peine la moitié de cette cible. Des pays comme la Suède, la Norvège, l'Allemagne et le Danemark l'ont atteinte. D'autres, comme l'Irlande, les Pays‑Bas et la Suisse, s'en rapprochent. Alors, pourquoi le Canada n'y parvient-il pas? Accroître le financement est essentiel pour garantir que nous disposons des ressources nécessaires pour soutenir efficacement le développement en Afrique.
    Finalement, le Canada a aussi une occasion de se distinguer des autres acteurs internationaux présents dans la région en s'assurant que ses entreprises se comportent de manière responsable sur le continent africain. En effet, on a rapporté trop d'allégations de violation des droits de la personne au cours des dernières années pour ne pas agir à cet égard. Le Canada se doit d'adopter rapidement une loi sur la diligence des entreprises en matière de droits de la personne et d'environnement pour prévenir les abus commis par certaines de nos entreprises en Afrique et ailleurs dans le monde. Il doit aussi donner au Bureau de l'ombudsman canadien de la responsabilité des entreprises, comme il s'y était d'ailleurs engagé lors de la mise sur pied de ce bureau, de véritables pouvoirs d'enquête pour forcer les entreprises visées par des allégations d'abus de droits de la personne à témoigner et à produire des documents.
    Merci.

  (1645)  

     Merci, monsieur Côté.

[Traduction]

    Nous passons maintenant à M. Harrington, de la Banque canadienne de grains.
    Monsieur Harrington, vous disposez de cinq minutes pour faire votre déclaration préliminaire.
     Je remercie les membres du Comité de m'avoir invité à participer à leur importante étude qui tombe à point nommé. L'approche du Canada à l'égard de l'Afrique est un sujet de discussion permanent et je suis heureux de présenter quelques observations sur la question.
    En tant que réseau de 15 organismes confessionnels canadiens voués à l'aide et au développement, la Banque canadienne de grains fournit de la nourriture aux gens en situation de crise humanitaire. En outre, elle aide les agriculteurs à adapter leurs pratiques agricoles aux changements climatiques afin d'assurer une sécurité alimentaire durable pour l'avenir. Notre projet Nature+, financé par Affaires mondiales Canada dans le cadre de l'initiative Partenariats pour le climat, en est un exemple.
     Nous entreprenons ce travail dans un contexte où 158 millions de personnes en Afrique subsaharienne sont confrontées à une grave insécurité alimentaire et où 30 millions de personnes souffraient de malnutrition aiguë rien qu'en 2023. Entre 2022 et 2023, la Banque canadienne de grains a mis en œuvre 88 projets dans 21 pays africains et a aidé plus de 700 000 personnes, ce qui inclut la réponse à la crise de la faim en Afrique de l'Est dans le cadre de la Coalition humanitaire.
     Des témoins qui ont comparu devant ce comité vous ont parlé de stabilité politique, de débouchés commerciaux et de promotion et de protection des intérêts canadiens. Ce qui ressort clairement de ces témoignages, c'est que le Canada a la possibilité d'accroître son influence dans un contexte où d'autres puissances voient la leur décliner, mais seulement si nous augmentons nos investissements de façon globale. Nous avons trois recommandations à formuler.
    Premièrement, il est essentiel de disposer d'un plan global et stratégique d'aide humanitaire et d'aide au développement. En politique étrangère, nous devons tenir compte des trois D et du C: diplomatie, défense, développement et commerce.
    Le développement est un aspect central de ce cadre et doit être considéré sur le même pied que les trois autres éléments. Nous ne pouvons pas faire abstraction du fait que les besoins humanitaires et de développement augmentent sur le continent, étant donné le nombre important de personnes qui sont en situation d'insécurité alimentaire aiguë en Afrique subsaharienne et au Sahel.
     Ce comité a déjà entendu le témoignage de M. Tieku, professeur à l'Université Western, qui affirme que si l'on règle le problème de l'insécurité alimentaire, il y a de fortes chances que l'on obtienne une meilleure stabilité. Je suis d'accord avec lui. Si les besoins en matière de développement ne sont pas satisfaits, la situation sera difficile sur le plan de la diplomatie, de la défense et du commerce.
    Sauver des vies et réduire la pauvreté ne sont pas de nouveaux objectifs pour le Canada. C'est ce à quoi sert l'aide que nous apportons de façon intelligente. Or, dans chaque région, en particulier en Afrique, nous devons adopter une approche stratégique plutôt que d'agir sans vision globale. Grâce à son propre travail, la Banque canadienne de grains dispose de preuves solides qu'investir dans l'aide est un investissement intelligent.
    Par exemple, entre 2015 et 2020, avec l'appui du gouvernement canadien, nous avons mis en œuvre un projet qui a permis d'améliorer la vie de plus de 60 000 familles en Éthiopie, au Kenya et en Tanzanie. L'objectif était d'améliorer les moyens de subsistance des ménages de petits exploitants agricoles en élargissant la pratique de l'agriculture de conservation. Il s'agit d'un processus qui contribue à l'établissement de systèmes alimentaires résilients aux changements climatiques.
    Le projet a permis d'améliorer les revenus des familles, la sécurité alimentaire et la santé des sols, tout en renforçant la résilience pour l'avenir. Il a également permis la réalisation de progrès au chapitre de l'égalité entre les hommes et les femmes, tant sur le terrain que sur le plan du marketing. Les revenus des femmes ont augmenté de 40 %. En fait, en Éthiopie, le projet a amené le gouvernement à élaborer un programme national visant à promouvoir l'agriculture de conservation.
    J'ai visité la ferme de l'une des participantes au projet en Éthiopie, une femme qui s'appelle Asnakech Zema, et j'ai vu à quel point le projet lui a permis non seulement d'accroître ses ressources, mais aussi de gagner en dignité et d'avoir une meilleure stature au sein de la communauté. Elle nous a dit: « Ma famille a maintenant de la nourriture toute l'année et le projet nous a permis de gagner de l'argent pendant les mois les plus difficiles. »
    Jane Njeri, une participante au projet au Kenya, nous a également dit: « Maintenant que nous avons adopté l'agriculture de conservation, nous avons plus de nourriture en utilisant moins de terre... Nous obtenons plus du double de la quantité de nourriture que nous avions auparavant. »
     Il est évident que les efforts déployés en matière de développement et d'aide humanitaire permettent non seulement d'assurer la stabilité, mais aussi de transformer les communautés et les nations.
     Deuxièmement, je recommande un partenariat et une collaboration mutuellement bénéfiques. D'autres témoins ont indiqué devant ce comité que l'Agenda 2063 de l'Union africaine était un document stratégique d'orientation qui pourrait et devrait éclairer l'approche du Canada.
     Je conviens qu'il ne s'agit pas seulement de savoir ce que nous pouvons tirer de la relation, ce qui n'a jamais correspondu à l'approche ou au programme du Canada. Il s'agit plutôt d'évaluer la manière dont l'avenir de l'Afrique est défini et de voir comment nous pouvons aider les Africains à atteindre les objectifs qu'ils se sont fixés, ce qui renforce notre capacité à collaborer avec eux sur les plans de la diplomatie, de la défense, du développement et du commerce et au fur et à mesure que nous évoluons ensemble.
     Ma dernière recommandation concerne le positionnement du Canada. Il est dans l'intérêt du Canada de jouer un rôle en Afrique. Nous avons vu la Chine et la Russie y étendre leur influence et les dirigeants africains se tourner vers elles tandis que d'autres pays s'en sont détournés.

  (1650)  

    En cette période critique pour l'avenir d'un continent qui a tant à offrir au monde, le Canada se trouve dans une position unique pour choisir de se manifester et de montrer à quoi pourrait ressembler un leadership fondé sur des principes. À ce titre, les engagements que nous prenons en matière d'aide sont déterminants pour l'image que l'on se fait de nous. Ils vont de pair avec nos efforts diplomatiques et commerciaux non seulement pour renforcer notre place dans le monde, mais aussi pour faire en sorte que, dans les années à venir, ce monde soit plus juste et plus équitable.
    Je vous remercie de votre attention.
    Merci beaucoup, monsieur Harrington.
     Nous passons maintenant à notre troisième témoin, qui est ici avec nous aujourd'hui.
    Bienvenue, monsieur Dongier. La parole est à vous. Vous disposez de cinq minutes.

[Français]

    Mesdames et messieurs les membres du Comité, c'est un honneur pour moi de comparaître devant vous aujourd'hui au nom du Centre d'étude et de coopération internationale, ou CECI.
    Le CECI est un acteur de la coopération entre le Canada et l'Afrique depuis plus de 65 ans. Il est actif dans 10 pays d'Afrique de l'Ouest et de l'Afrique centrale. Il est aussi un partenaire d'Affaires mondiales Canada qui, par l'entremise de son portefeuille d'environ 250 millions de dollars en Afrique, appuie l'entrepreneuriat féminin, les droits des femmes et des filles ainsi que la résilience climatique.
    Personnellement, avant de me joindre au CECI, j'ai travaillé pendant près de 20 ans à la Banque mondiale, entre autres comme directeur régional à Dar es Salaam, en Afrique de l'Est, et j'ai travaillé pendant cinq ans pour General Electric à Nairobi.
    Comme vous le savez, l'Afrique prendra de plus en plus d'importance en tant que marché. On dit que la classe moyenne consommatrice sera composée de plus de 700 millions de personnes d'ici 2030. L'Afrique prendra aussi de l'importance comme producteur de ressources minières stratégiques, comme bassin de biodiversité à risque et comme acteur géopolitique. En effet, plusieurs des 54 pays d'Afrique diversifient leurs partenariats internationaux, y compris ceux avec la Chine et la Russie. Selon les projections, il y aura 2,5 milliards de personnes en Afrique d'ici 2050 et près de 4 milliards d'ici la fin du siècle, ce qui représentera 40 % de l'humanité.
    Bien que l'Afrique monte en puissance, un nombre croissant de pays ont une gouvernance instable, sont touchés par les conflits, par l'extrémisme violent et par la crise climatique et voient s'accroître le niveau de pauvreté extrême. On voit aussi une détérioration des conditions pour les femmes, alors qu'on observe une augmentation de la violence basée sur le genre dans ces pays en particulier et une montée de l'intolérance. On prévoit aussi que, d'ici 2050, les villes africaines, grandes et moins grandes, accueilleront près de 1 milliard de personnes de plus. Or, dans les villes, 74 % des femmes travaillent dans le secteur informel, sans aucune protection sociale ou presque.
    Maintenant que je vous ai expliqué le contexte, j'aimerais vous faire part des trois recommandations que nous voulons soumettre au Comité.
    La première recommandation est de maintenir le cap sur l'égalité des genres et la résilience climatique. Le CECI applaudit le fait que le Canada se soit positionné comme un chef de file en matière d'égalité des genres en Afrique. Nous pensons aussi que les efforts du Canada en matière de financement climatique sont louables, et nous recommandons que ces actions ciblées se consolident encore. Nous sommes convaincus que cela contribuera à un monde plus prospère et plus inclusif, et ce, de façon durable.
    La deuxième recommandation est d'appuyer les populations des pays du Sahel central, soit le Mali, le Burkina Faso et le Tchad. Comme vous le savez, l'Afrique, y compris ces pays, souhaite se libérer de l'héritage colonial. En Afrique de l'Ouest, la tension est forte avec le gouvernement français, qui est fréquemment perçu par plusieurs comme le complice d'une élite politique corrompue et exploitant ses anciennes colonies. Alors que plusieurs pays prennent leur distance de la France, il est important que la Russie ou la Chine ne soient pas la seule solution de rechange pour les pays du Sahel central. Une troisième voie est nécessaire. Parmi d'autres pays, le Canada a un potentiel d'influence à moyen terme, et il faut le considérer. Pays bilingue faisant partie de la francophonie, le Canada a une image relativement positive auprès des populations, et il a le potentiel de contribuer à une sortie de crise. Il est donc vraiment important de maintenir une aide humanitaire et une aide au développement auprès des communautés des pays du Sahel central. Nous pensons qu'un retrait complet de l'aide du Canada limiterait son potentiel d'influence à moyen terme.
    La troisième recommandation est d'avoir une identité canadienne plus forte dans les programmes géographiques bilatéraux avec chacun des pays que le Canada appuie. Nous soutenons les importantes contributions qu'apporte le Canada aux institutions multilatérales par l'entremise de la section de l'aide multilatérale d'Affaires mondiales Canada. Ces institutions jouent des rôles essentiels. Cependant, nous avons pour préoccupation que les programmes géographiques bilatéraux d'Affaires mondiales Canada utilisent trop ces agences multilatérales. Nous préconisons une plus grande utilisation des organisations canadiennes dans la livraison de l'aide bilatérale, ce qui amènerait, à notre avis, plusieurs avantages. Cela procurerait d'abord une plus grande valeur à chaque dollar investi et, surtout, cela assurerait une plus grande visibilité du Canada. Quand Affaires mondiales Canada finance le Programme des Nations unies pour le développement, par exemple, personne ne voit la contribution canadienne. Or, quand Affaires mondiales Canada finance une organisation canadienne, la visibilité canadienne est assurée. Le financement des agences des Nations unies se fait de façon assez facile et rapide par Affaires mondiales Canada, car il y a peu d'exigences de reddition de comptes. À l'inverse, le financement d'organisations canadiennes requiert de lourds et lents processus, qui mènent souvent Affaires mondiales Canada à privilégier l'option la plus simple, plutôt que de se baser sur une analyse de la valeur de l'argent investi et de considérer les bénéfices pour la visibilité du Canada. Nous recommandons donc d'examiner la possibilité de simplifier les processus dans le financement des organisations canadiennes en Afrique, en particulier pour les organisations qui ont démontré un niveau de risque fiduciaire faible et de bons résultats dans la livraison de programmes.

  (1655)  

    En conclusion, nous pensons que le Canada devrait anticiper la place importante de l'Afrique dans l'avenir du monde et profiter du capital de sympathie que lui accordent plusieurs pays. Il faut privilégier les liens avec les peuples de l'Afrique et entre les entreprises du Canada et celles des pays africains, et pas seulement les appuis gouvernementaux institutionnels. Les organisations canadiennes portent directement le drapeau canadien et travaillent souvent avec plus d'efficacité et plus d'efficience que les agences multilatérales.
    Je tiens à souligner que ces recommandations visent avant tout à favoriser une meilleure réputation et une meilleure influence du Canada auprès des pays africains.
    Je vous remercie.

  (1700)  

[Traduction]

     C'est le député Epp qui commence.
    Vous disposez de cinq minutes.
     Merci, monsieur le président.
    Merci aux témoins.
    Je poserai d'abord des questions à M. Harrington, de la Banque canadienne de grains. Par souci de transparence et aux fins du compte rendu, je précise que je suis un ancien défenseur de la Banque canadienne de grains et que j'étais un de ses employés avant d'être élu. Nous continuons à organiser un projet de culture sur notre ferme. Je connais donc bien le fonctionnement de l'organisation.
    Je sais que les fonds, ainsi que ceux de quelque 200 autres projets de culture, sont souvent complétés à hauteur de quatre pour un dans le cadre des efforts humanitaires du Canada et de la Convention relative à l'assistance alimentaire. Je crois que la Banque canadienne de grains a reçu une autorisation, ou a signé un accord avec le ministère des Affaires mondiales, pour le renouvellement de la subvention globale de 25 millions de dollars.
     Pouvez-vous me dire quand vous vous attendez à ce que le ministre signe l'accord? Un nouvel exercice financier a commencé et la signature devrait avoir lieu dans quelque temps, je l'espère. Que savez-vous à ce sujet?
    Merci, monsieur Epp. C'est un plaisir de vous voir.
     Ce que je peux dire à propos de cette subvention, c'est qu'elle existe depuis des décennies, en fait, et qu'elle a été accordée par différents gouvernements du Canada. C'est un élément clé de l'engagement du Canada à l'égard de la Convention relative à l'assistance alimentaire. Elle s'élève à 25 millions de dollars par année.
    Nous avons reçu une subvention entre 2021 et 2024. Elle est utilisée pour offrir de l'aide alimentaire humanitaire aux personnes dans le monde que l'on juge en situation d'insécurité alimentaire aiguë ou encore plus grave selon l'analyse du Cadre intégré de classification de la phase humanitaire de la sécurité alimentaire. Cette subvention a expiré le 31 mars. Avant cette date, nous avions passé un an à renégocier avec Affaires mondiales Canada dans le cadre d'un partenariat très étroit. Une évaluation externe s'est avérée très positive et nous nous sommes donc entendus sur tous les paramètres de la subvention. Je crois que le dossier a été transmis au ministre aux fins d'approbation. Il lui a été transmis en octobre, je crois.
    Entretemps, l'ancienne subvention a expiré. Nous avons des programmes permanents et essentiels dans des pays comme la Syrie, le Liban et la Somalie. Nous utilisons actuellement nos propres ressources en attendant que l'accord de subvention soit signé. Nous sommes sûrs qu'il le sera bientôt, mais nous voudrions que ce soit fait rapidement, car certains de ces besoins sont urgents.
     Merci.
     Dans votre déclaration, vous avez parlé des liens entre la diplomatie, la défense, le développement et le commerce. Parlons de l'importance de l'alimentation dans le cadre de l'intervention du Canada.
    Quelle est la place de l'alimentation et de l'agriculture dans nos efforts d'intervention en matière d'aide humanitaire et de développement? Que représente l'alimentation? Pouvez-vous expliquer ce que vous avez dit dans votre déclaration préliminaire?
    Oui.
    Lorsque nous parlons de sécurité alimentaire, nous parlons des besoins fondamentaux. Lorsque nous parlons du besoin de nourriture et de l'importance de la nourriture dans ce contexte, ne pas avoir faim est un besoin humain fondamental. Lorsque la faim sévit, il en résulte des conflits. C'est ce que l'on peut constater dans le monde à l'heure actuelle. Si l'on considère la nécessité de l'alimentation, c'est essentiellement un élément constitutif non seulement du système international de sécurité alimentaire, mais aussi de l'humanité.
    Lorsque nous pensons au soutien apporté à des pays comme le Soudan, par exemple, qui touche actuellement 18 millions d'habitants, nous constatons qu'il s'agit du pays dans le monde qui compte le plus grand nombre de personnes qui souffrent gravement de la faim. Le manque de nourriture provoque conflits, migrations et insécurité quant au bien-être des populations. La capacité à fournir de la nourriture, que ce soit par une aide d'urgence ou par des programmes de développement à long terme, ce que nous faisons dans de nombreuses régions du monde, est essentielle pour maintenir la paix et assurer la stabilité du système international.
     Je pense que nous pouvons tous voir ce qui se passe. Je sais que nous parlons de l'Afrique ici aujourd'hui, mais nous pouvons le constater à Gaza. Nous pouvons le voir au Yémen. Nous le voyons partout dans le monde en ce moment. Le manque de nourriture provoque des conflits, de l'insécurité et des migrations. Malheureusement, dans certains endroits, il est presque utilisé comme une arme pour accroître l'instabilité. C'est pourquoi l'alimentation revêt une importance capitale, non seulement pour le développement, mais aussi pour la stabilité internationale. C'est entièrement lié aux éléments que sont la diplomatie, la défense, le développement et le commerce. Donc, si nous...
     Je vous remercie. Si possible, je vais poser une autre question.
     Je sais que l'argent est rare. Quelles idées proposeriez-vous pour que nous puissions améliorer l'efficacité de notre collaboration, du gouvernement et de toute cette sphère, afin que plus d'argent soit utilisé directement et que le Canada et ses partenaires dans le monde améliorent leur contribution?

  (1705)  

    C'est une excellente question.
     Tout d'abord, je pense qu'il s'agit de simplifier le processus. Affaires mondiales Canada entreprend actuellement un processus de simplification du système de subventions et de contributions. Nous appuyons cette initiative. Le nombre d'obligations, de règles et de dispositions dans les accords quant à ce que chaque organisation de la société civile doit fournir pour effectuer ce travail est vraiment très élevé. Je sais que tout le monde en est conscient, et nous devons simplifier le processus.
     Deuxièmement, je pense que nous devons réfléchir à la sécurité alimentaire dans un cadre élargi. Nous parlons d'assistance alimentaire et nous parlons de développement. Dans de nombreux endroits, nous apportons une aide d'urgence qui pourrait être transformée en aide à plus long terme si nous simplifiions les processus, en particulier au sein d'Affaires mondiales Canada. Ces processus sont souvent cloisonnés. Nous faisons de l'aide d'urgence ici. Nous nous occupons du développement à long terme ici. Dans de nombreux endroits, nous pourrions en fait passer de l'un à l'autre. Nous l'avons prouvé dans nos projets d'assistance humanitaire, de redressement et de développement.
    Nous devons réfléchir, en fonction d'un cadre élargi, à la manière dont nous pouvons nous occuper du développement...
    Je crains que nous ayons dépassé le temps imparti. Nous allons devoir passer à la prochaine intervenante.
    C'est maintenant au tour de la députée Chatel. Vous disposez de cinq minutes.

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur le président.
    C'est passionnant de vous entendre, monsieur Harrington. J'ai envie de vous inviter à nous expliquer ce que vous entendez concrètement lorsque vous parlez de développement à long terme du secteur agricole pour une meilleure sécurité alimentaire.
    En effet, nous entendons beaucoup dire que les pays africains sont les plus vulnérables aux conséquences des changements climatiques, comme les sécheresses. Nous avons aussi entendu des témoins dire que le Canada possédait une technologie et un savoir-faire en matière agricole qui permettaient à nos fermiers de s'adapter aux changements climatiques. Par exemple, ils mettent au point des technologies et utilisent des essences, des grains et des semences qui offrent une meilleure résistance.
    De quelle manière le Canada pourrait-il contribuer à ce développement à long terme, qui est absolument important?

[Traduction]

    C'est une excellente question.
    Outre l'aspect technologique dont nous avons parlé, nous devons comprendre qu'il y a beaucoup de choses que nous pouvons faire en ce qui a trait aux pratiques agricoles. La Banque canadienne de grains dispose d'une équipe de conseillers techniques en agriculture et en moyens de subsistance qui travaillent partout au Canada avec des partenaires locaux à des projets qui visent à établir des systèmes alimentaires résilients aux changements climatiques.
    Je vais vous parler rapidement de deux choses.
     Premièrement, notre programme Nature+ au Kenya, en Éthiopie, au Mozambique et aux frontières du Zimbabwe porte sur la reforestation, la mise en valeur des terres, la santé des sols, la fertilité des sols et la création de nouveaux marchés dans des zones qui étaient complètement dégradées.
     Une partie de ces efforts ne consiste pas à recourir énormément à la technologie. Il s'agit en partie d'utiliser les connaissances locales, combinées aux connaissances dont nous disposons, afin de bâtir des systèmes alimentaires résilients qui produisent davantage, qui ont de meilleurs rendements et qui sont, en fait, meilleurs dans un contexte climatique. Notre programme d'agriculture de conservation constitue une autre version de cette approche.
    Nous devons tenir compte du fait que les changements climatiques ont des conséquences considérables pour les Africains. Les gens sont chassés de leurs terres et il est donc très important que le Canada utilise son expertise de toutes les façons possibles afin de contribuer à la mise en place de systèmes alimentaires résilients aux changements climatiques qui permettront aux Africains de mieux résister aux situations d'urgence auxquelles ils sont actuellement confrontés.

[Français]

     C'est très éclairant. Merci beaucoup.
    Monsieur Dongier, dans votre présentation, vous avez parlé de l'importance de la biodiversité non seulement pour les Africains, mais pour nous tous qui vivons sur la même planète. Nous avons entendu M. Harrington dire qu'il était très important de restaurer les milieux dégradés.
    Pourriez-vous nous donner davantage de précisions sur l'aide que le Canada peut apporter pour stabiliser la biodiversité et régénérer les milieux dégradés?
    Comme vous le savez sûrement, l'Afrique a des ressources d'écosystèmes qui contribuent à la biodiversité mondiale, même plus que l'Amazonie. Il y a donc en Afrique un très gros capital qui est grandement à risque. C'est un actif essentiel pour l'Afrique et pour l'humanité. Or, c'est mis à risque notamment par la grande croissance de la population, qui va devoir consommer beaucoup plus de produits agroalimentaires, et par la baisse de la pauvreté, qui va aussi faire augmenter la consommation.
    On sait que l'expansion des terres agricoles vient couper les forêts et dégrader les terres. C'est l'un des facteurs importants qui contribueront à la diminution de la biodiversité en Afrique dans les décennies à venir. Il est essentiel de trouver des façons pour l'Afrique d'augmenter sa production agroalimentaire afin d'offrir une meilleure nourriture à plus de gens, mais d'une façon qui ne nuit pas trop à la biodiversité.
    Beaucoup d'actions sont menées en ce moment dans ce domaine. Par exemple, notre organisation mène, en collaboration avec l'Université de Guelph, un projet qui s'appelle le Code-barres du vivant. Il s'agit de la mesure de la biodiversité à l'aide de l'ADN environnemental. C'est une technologie qui permet, de façon peu coûteuse, de mesurer le niveau de biodiversité selon une échelle de temps. On peut vraiment voir objectivement si la biodiversité est en train d'être conservée ou non. L'idée est de trouver des façons de financer les communautés, les gouvernements locaux et même les entreprises qui mènent des actions positives en matière de biodiversité. Autrement dit, nous pilotons des méthodes pour mesurer la biodiversité et nous lions à cela des incitatifs pour bien faire en sorte que l'agriculture augmente sans trop nuire à la biodiversité. Je pense que c'est une contribution majeure que le Canada et ses partenaires peuvent apporter.

  (1710)  

     C'est fantastique.
    J'ai une autre question, qui s'adresse à tous les témoins qui voudront bien y répondre.
    Nous avons entendu dire qu'il y avait beaucoup de bureaucratie dans le traitement des demandes pour les différentes subventions. De plus, des gens d'Affaires mondiales Canada nous ont dit qu'ils entreprenaient un projet de transformation des subventions et des contributions.
    Avez-vous des réflexions à ce sujet? À votre avis, sous quel angle le ministère devrait-il aborder cette question afin qu'il puisse fournir l'aide aux pays africains de manière plus efficace?

[Traduction]

     Veuillez répondre en 20 secondes, si possible.

[Français]

     Je voudrais insister sur la possibilité d'utiliser davantage les organisations canadiennes pour la livraison de l'aide. À l'heure actuelle, les subventions sont accordées surtout aux agences des Nations unies, car il s'agit d'un processus très facile pour Affaires mondiales Canada. En revanche, conclure des accords de contribution avec des organisations canadiennes est un processus compliqué et lent. C'est pour cette raison qu'on le fait moins et qu'on a plutôt recours à des agences des Nations unies pour plus des deux tiers de l'aide bilatérale au pays. Je pense qu'il faut revoir la façon de faire et simplifier le processus afin que les règles du jeu soient équitables.

[Traduction]

    C'est maintenant au tour du député Bergeron.
    Vous disposez de cinq minutes.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins de leur présence. L'échange que nous avons est vraiment passionnant, notamment en ce qui concerne le financement des organismes à l'échelle locale. Je vais y revenir. J'aimerais commencer par aborder une autre question.
    Je pense qu'il n'y a pas lieu d'insister plus que vous ne l'avez fait, monsieur Dongier, sur l'importance de l'Afrique tant sur les plans démographique et économique que sur le plan de la francophonie, et sur le fait que le Canada s'y intéresse si mal. En effet, on ne sait pas trop quelle est sa vision pour la suite des choses. S'agira-t-il d'une stratégie, d'un cadre, d'une politique? Comme les fonctionnaires sont venus nous le dire il y a quelques jours, on ne sait plus trop comment appeler ce qu'on veut développer pour l'Afrique. Cela donne l'impression qu'on navigue un peu à vue.
    Qui plus est, la question est de savoir de quel budget nous disposons pour mettre en œuvre une telle politique, un tel cadre, une telle stratégie ou on ne sait trop quoi. Nous constatons que, l'année dernière, le gouvernement fédéral a réduit sa contribution à l'aide publique au développement. C'était la toute première fois depuis des décennies qu'il le faisait. Nous sommes donc très loin de l'objectif de 0,7 %. Quand j'en ai parlé lundi dernier, alors que le ministre du Développement international ainsi que des fonctionnaires d'Affaires mondiales Canada comparaissaient devant le Comité pour discuter des crédits budgétaires, on m'a dit que le Canada ne s'était jamais engagé à atteindre l'objectif de 0,7 % du PIB.
    Ma question s'adresse d'abord à M. Dongier, puis à M. Côté.
    Est-ce la compréhension que vous aviez, à savoir que le Canada ne se serait pas engagé à atteindre cet objectif de 0,7 %?
    Je pourrai vérifier l'information et vous répondre ultérieurement, mais, selon ce que je comprends, un engagement à cet égard a été pris il y a plus de 40 ou 50 ans.
    Comme plusieurs personnes l'ont mentionné aujourd'hui et lors de plusieurs autres de vos réunions que j'ai pu suivre, il y a actuellement une occasion pour le Canada de jouir d'une influence plus grande dans l'avenir, en particulier en Afrique de l'Ouest. Il y a vraiment un vide en ce moment. Ces pays veulent continuer à avoir des relations avec des pays comme le Canada, mais, pour l'instant, c'est comme s'ils avaient seulement le choix entre la France et la Russie. J'exagère un peu, mais on retrouve quand même cette dynamique.
    Ce serait donc le moment pour le Canada d'entrer en Afrique de façon beaucoup plus sérieuse, peut-être au moyen de ressources additionnelles, effectivement, et de devenir un acteur plus sérieux. Le Canada est très respecté et a le potentiel de jouer un rôle décisif dans une partie du monde qui, d'un côté, peut vraiment grandir, mais qui, de l'autre, peut aussi devenir instable. C'est une contribution majeure que le Canada pourrait et devrait apporter.

  (1715)  

    Merci beaucoup.
    Qu'en pensez-vous, monsieur Côté?
    Merci, monsieur Bergeron.
    J'avais également compris que le Canada s'y était déjà engagé. Il faudrait cependant retrouver la source exacte, car je ne l'ai pas devant moi. Cela dit, nous travaillons effectivement en nous appuyant sur ce postulat depuis de nombreuses années.
    Il peut arriver que certaines années budgétaires soient plus difficiles que d'autres. Cependant, lorsque la cible est atteinte à peu près à moitié après 50 ans, l'absence d'augmentation des budgets accordés à l'aide internationale ne peut pas être attribuable à une année budgétaire difficile. C'est qu'il y a quelque chose de problématique dans le système lui-même.
    Je voudrais renforcer le message qu'on a passé à propos du financement des agences multilatérales et des organisations de la société civile. En regardant les chiffres, j'ai même observé une baisse du pourcentage qui a été accordé aux organisations de la société civile canadienne, ces dernières années, comparativement au pourcentage accordé aux agences multilatérales, par exemple. Il serait important de rétablir un peu l'équilibre entre les différents canaux de financement.
    J'ajouterais que le Canada a développé un très beau volet de financement ces dernières années pour appuyer les petits et moyens organismes qui font de la coopération internationale. Ces derniers sont très nombreux au Canada et, souvent, parce que les appels à projets portent sur des montants très élevés, ils ne peuvent pas avoir accès à ces sources de financement. Ce projet est donc très important pour beaucoup de plus petits organismes au Canada. Nous espérons que ce programme sera pérennisé et renforcé. Une augmentation totale du budget permettrait aussi d'éviter certains arbitrages entre les différents canaux.
     Monsieur Côté, vous posez les bases de ma prochaine question.
    Je constate d'abord que c'est un peu une surprise pour vous deux, tout comme ce l'a été pour moi, d'entendre des fonctionnaires d'Affaires mondiales Canada dire que le Canada ne s'était pas engagé à atteindre l'objectif de 0,7 % du PIB. Je dois dire que cela m'a fait dresser le peu de cheveux qu'il me reste sur la tête. C'était une déclaration pour le moins étonnante.
    Monsieur Dongier, vous avez souligné qu'il était plus facile pour Affaires mondiales Canada de passer par les agences multilatérales pour la délivrance de l'aide publique au développement. J'ajouterais presque que c'est plus facile aussi...

[Traduction]

     Monsieur Bergeron, vous avez dépassé votre temps de parole de 35 secondes.

[Français]

    Alors, nous y reviendrons.

[Traduction]

     Je m'excuse. Je me suis trompé. Il vous reste 15 secondes.

[Français]

    Merci beaucoup.
    Je disais donc qu'il était plus facile aussi de passer par de grandes organisations comme la Croix‑Rouge. Toutefois, comme M. Côté l'évoquait, les petites organisations sont souvent plus impliquées et ont des racines plus profondes dans les milieux. Conséquemment, il y a peut-être lieu d'aller au-delà...

[Traduction]

    Monsieur Bergeron, je suis désolé, mais vous avez maintenant définitivement terminé. Non seulement vous avez dépassé le temps d'intervention de 15 secondes, mais j'avais raison. Vous l'aviez dépassé de 45 secondes lorsque je vous ai interrompu. La greffière pensait autrement, mais vous en êtes maintenant à une minute et 15 secondes de plus.

[Français]

     Je suis désolé.

[Traduction]

    Nous allons devoir passer à Mme McPherson.
    Madame McPherson, vous disposez de cinq minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président. C'est un plaisir de voir tout le monde ici. Nous avons eu droit à des échanges des plus intéressants.
    Tout comme M. Epp l'a fait, je dois avouer que j'ai œuvré avec M. Côté au sein du Réseau de coordination des conseils et que j'ai aussi travaillé avec lui dans ma carrière antérieure.
    Monsieur Côté, je vais d'abord m'adresser à vous pour parler de la valeur des petites et moyennes organisations qui sont basées dans des collectivités partout au Canada et qui font participer les Canadiens au mouvement des citoyens du monde et aux efforts de réduction de la pauvreté. Nous savons que ces organisations jouent un rôle essentiel. Je dirais que sous la dernière administration, le gouvernement conservateur de M. Harper, les importantes compressions au chapitre de la mobilisation citoyenne ont eu d'énormes répercussions sur la capacité des Canadiens de se faire l'écho des efforts déployés de par le monde pour réduire la pauvreté. Ce sont les petites et moyennes organisations qui ont été les plus durement touchées.
    Pouvez-vous nous en parler un peu? Pourquoi serait‑il avantageux pour nous de permettre à ces petites organisations d'avoir accès à du financement?

  (1720)  

[Français]

    Effectivement, les petits et moyens organismes de partout au Canada font un excellent travail. Je n'ai rien contre les grands organismes, qui font aussi un excellent travail, mais souvent on passe sous silence le travail des plus petits. Souvent, ils ont des partenaires de très longue date, par exemple 10, 20, 30 ou 40 ans, voire plus dans certains cas, et ils sont bien implantés dans les communautés. Leur travail est très efficace, de manière générale.
    La composante de l'éducation à la citoyenneté mondiale, que vous avez soulevée, est vraiment fondamentale pour faciliter l'engagement des gens du Canada et leur compréhension des enjeux internationaux, afin qu'ils se mobilisent relativement à ce qui se passe à l'international.
    Au Québec, le ministère des Relations internationales et de la Francophonie dispose d'un budget permettant de financer certaines activités d'éducation à la citoyenneté mondiale. Au Canada, si je ne me trompe pas, il n'y a plus depuis longtemps de fonds pour financer le travail que font les organismes ici. On a toujours cette image des organismes de coopération internationale qui travaillent à l'étranger. Bien sûr, c'est peut-être la part la plus importante de leur travail, mais il y a aussi beaucoup de travail qui se fait ici pour faciliter la compréhension des enjeux et des activités que mène le Canada à l'étranger notamment en matière de coopération et de solidarité internationale.

[Traduction]

    Oui, et je pense que si vous réduisez les efforts de mobilisation citoyenne dans le monde, les Canadiens cessent tout à coup d'en parler. Ils s'en préoccupent moins ou ils ne sont plus en mesure de reconnaître la valeur de l'engagement citoyen à l'échelle planétaire. Lorsqu'on réduit l'aide de telle sorte qu'elle est la moitié de ce qu'elle devrait être, alors que d'autres pays sont en mesure d'atteindre la cible de 0,7 % et sachant que c'était au départ un engagement de Pearson, il devient beaucoup plus facile pour le gouvernement de trouver les fonds requis.
    Les investissements en faveur de la participation citoyenne ont été réduits. Ce manque à gagner n'a jamais été comblé. Nous sommes loin du compte, et je peux vous assurer que le NPD, s'il était porté au pouvoir, mettrait en œuvre un plan pour atteindre l'objectif de 0,7 % très rapidement. Il n'en demeure pas moins que je comprends votre point de vue lorsque vous parlez du rôle que jouent toutes les organisations, petites, moyennes, multilatérales et grandes, au Canada.
    Monsieur Harrington, ma prochaine question s'adressera à vous, si vous n'y voyez pas d'inconvénient. Je suis ravie de vous revoir.
    Je me réjouis également de vous voir.
    Vous avez parlé de l'instrumentalisation du manque de nourriture. Vous avez dit que si nous ne nous attaquons pas au problème de la faim, les coûts en aval seront astronomiques.
    Pourriez-vous nous parler de certains des moyens que nous pourrions déployer pour réduire les risques et contribuer à un développement plus durable dans des contextes de fragilisation? Je sais que vous avez parlé de la possibilité de faire la transition, mais quelle forme cela pourrait‑il prendre selon vous?
    C'est une excellente question.
    En ce qui concerne les États fragilisés, nous parlons de certains des endroits du monde où il est le plus délicat de travailler. Ce sont aussi des endroits où nous devons continuellement retourner pour offrir de l'aide alimentaire. Je dirais qu'il y a trois aspects à considérer.
    Tout d'abord, en plus de fournir de l'aide alimentaire ou des services d'urgence dans ces pays, nous devons y être présents. C'est là que la formule diplomatie, défense, développement et commerce entre en jeu selon moi. Nous, Canadiens, devons être présents afin de voir la transition s'opérer et assurer un développement suffisamment durable pour réduire les risques de catastrophe. Nous devons sans cesse retourner aux mêmes endroits pour apporter notre aide dans des situations d'urgence. Nous repartons, une nouvelle crise éclate et nous voilà de retour. Nous devons assurer une présence soutenue. Je pense que M. Côté l'a très bien exprimé. Nous devons également être présents par l'entremise de nos partenaires locaux qui sont vraiment au fait des circonstances qui prévalent dans leur pays.
    C'est la première chose que je dirais. Il est primordial de s'éloigner des cloisonnements qui nous font passer d'une aide d'urgence concrète un jour à l'aide au développement l'année suivante pour plutôt combiner ces deux éléments.
    Je pense aussi que l'on attribue de grandes quantités de ressources aux États fragilisés sans toutefois prendre le temps de vraiment réfléchir à la façon dont nous pouvons utiliser ces ressources intelligemment en travaillant avec des partenaires locaux. De nombreux citoyens de ces pays ont une résilience dont nous ne tenons pas toujours compte. Les contributions de grande envergure sont assorties de toutes sortes de clauses et de modalités. Il arrive que nous nous rendions compte en cours de route qu'il serait préférable de procéder différemment, mais il nous est impossible de changer le cours des choses du jour au lendemain parce que nous avons les mains liées par ces modalités. Dans le cadre de ce processus de soutien financier et de transformation, je dirais que la gestion fondée sur des données probantes est un élément clé.
    Merci.
    Nous passons maintenant à M. Chong.
    Vous avez quatre minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins d'être des nôtres aujourd'hui.
    J'ai deux questions que je voudrais poser à nos trois témoins.
    Vous comparaissez dans le cadre d'une étude sur l'approche du Canada à l'égard de l'Afrique. En outre, cette étude suit son cours parallèlement à la réflexion entreprise par le gouvernement du Canada quant à la meilleure façon de collaborer avec l'Afrique, et notamment avec l'Union africaine.
    Premièrement, si vous étiez chargé d'élaborer une stratégie canadienne pour l'Afrique, comment la structureriez-vous, quelles seraient vos priorités dans le cadre de cette stratégie et quelles ressources, quels fonds y rattacheriez-vous?
    Deuxièmement, la stratégie devrait-elle avoir une portée continentale ou plutôt établir une distinction entre l'Afrique du Nord et l'Afrique subsaharienne? Devrait‑on aller encore plus loin en se concentrant sur des sous-régions particulières de l'Afrique subsaharienne, que ce soit l'Afrique australe, l'Afrique de l'Est ou l'Afrique de l'Ouest?

  (1725)  

    Nous allons commencer par M. Harrington, s'il vous plaît.
    Merci. C'est une très bonne question.
    Grâce au financement de la Fondation Bill et Melinda Gates, Crestview a publié il y a quelques années un excellent rapport intitulé Opportunity 2050. On peut y lire ceci:
Au cours des 30 prochaines années, l'aide internationale, la saine gouvernance, le commerce et les industries génératrices d'emplois pourraient ajouter plus de 15 billions de dollars au PIB de l'Afrique subsaharienne. Cela pourrait du même coup créer plus de 400 000 emplois et contribuer à l'économie canadienne jusqu'à hauteur de 2,7 billions de dollars au cours de la même période.
    Je dirais d'abord et avant tout qu'il faut s'engager. Nous détournons le regard. Nous fermons les robinets. Nous devons renouveler notre engagement dans tous les domaines dont nous avons parlé — la défense, la diplomatie, le commerce et le développement.
    N'oubliez pas que le développement est vraiment à la base de tout cela. Mes collègues ont parlé de tout l'argent qui passe par les Nations unies et d'autres organisations. Je me souviens de l'époque où je me rendais en Afrique et où je voyais des drapeaux canadiens flotter au‑dessus des sites de projets dirigés par de très petites et moyennes organisations.
    Je dirais qu'il faut demeurer mobilisés. Il y a un contexte africain plus large, mais aussi des considérations régionales à prendre en compte. On ne peut pas voir l'Afrique comme une entité indivisible. Le Sahel est très différent de l'Afrique subsaharienne, qui elle-même ne ressemble en rien à l'Afrique du Nord, laquelle se démarque aussi nettement de l'Afrique australe. Il faut tenir compte du contexte régional.
    Dans l'ensemble, notre engagement doit se situer à un niveau beaucoup plus élevé. Il faut vraiment voir cela comme quelque chose qui profiterait au Canada aussi bien qu'à l'Afrique.
    Merci.
    Nous allons maintenant entendre M. Côté.
    Soyez très bref, car il ne reste qu'une minute pour votre réponse et celle de M. Dongier.
    Merci.

[Français]

    Merci beaucoup.
    Évidemment, comme je viens du secteur du développement, c'est certain que je favoriserais un engagement plus important dans ce secteur. Ce n'est pas non plus pour dire que l'engagement économique n'est pas important. Il ne faut pas oublier cependant que les engagements en matière de développement favorisent aussi le développement économique en Afrique. Si on veut avoir des partenaires économiques aussi, cela fait donc partie de l'équation.
    Je vais laisser également à M. Dongier le temps de répondre.
    Merci. Vous êtes très gentil, monsieur Côté.
    Monsieur Dongier, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Je dirais que, compte tenu de la grande croissance de la population en Afrique, l'objectif premier devrait être de déterminer comment avoir une croissance rapide mais inclusive, pour que beaucoup de gens en profitent, et ce, de façon durable. Les PME composent maintenant 80 % de l'économie africaine. Or, l'accès à la finance et l'accès aux services d'appui à l'entreprise leur manquent. Il faudrait qu'il y ait des systèmes d'appui à la finance. Dans quelles industries devrions-nous nous concentrer? Il y a beaucoup d'industries, mais une industrie très porteuse pour l'Afrique est le secteur agroalimentaire. Il est très intensif en main-d'œuvre et il rejoint les besoins d'alimentation et de croissance économique. Nous avons parlé de biodiversité auparavant. Comment faire grandir le secteur agroalimentaire avec les PME de façon durable et de façon à instaurer une résilience au climat?
    Ensuite, il faut déterminer dans quelle zone de l'Afrique nous avons un avantage. L'Afrique francophone est une zone où le Canada a manifestement un avantage particulier, en raison de ce qu'on a dit avant, c'est-à-dire que l'Afrique francophone change de partenaires et que le Canada a un rôle un peu spécial à jouer à cet égard. Nous pouvons bien sûr être actifs partout en Afrique, mais je dirais que l'Afrique francophone, celle de l'Ouest en particulier, est une zone où nous devrions nous concentrer.

[Traduction]

    Nous passons maintenant à M. Zuberi. Vous avez quatre minutes.
    Merci, monsieur le président.

[Français]

    Je remercie tous les témoins de leur présence aujourd'hui.
    Je vais d'abord poser une question générale au sujet de l'aide au développement.
    Il est important pour nous de situer certaines choses. Jusqu'à maintenant, notre gouvernement a été là pour soutenir le secteur. En même temps, il faut tenir compte de ce que disent les chefs des autres formations politiques. Par exemple, le chef de l'opposition officielle promet de faire des coupes dans l'aide au développement international.

  (1730)  

[Traduction]

    Si un gouvernement du Canada — pas le nôtre qui a toujours contribué au développement international — choisissait de réduire son aide, comme certains ont promis de le faire, quelles seraient les répercussions sur le secteur?
    J'aimerais donner la parole à tous les témoins.
    Vous pouvez me répondre d'une manière générale. C'est une question théorique.
    Permettez-moi d'essayer de répondre à cette question.
    En tant qu'organisation, nous sommes non partisans. Depuis des décennies, nous travaillons avec des gouvernements de différentes allégeances. Je pense que nous avons déjà discuté aujourd'hui de cette cible de 0,7 % que nous n'atteignons pas en matière d'aide publique au développement. Le montant de notre aide a fluctué selon le gouvernement au pouvoir. À l'heure actuelle, tout dépend des chiffres que vous utilisez, mais nous en sommes à un peu plus de 0,3 %.
    Si nous voyions cette proportion diminuer encore plus, nous constaterions des conséquences très importantes sur trois plans: premièrement, pour les personnes avec lesquelles nous travaillons dans les contextes les plus fragiles; deuxièmement, pour l'engagement canadien et le désir d'apporter sa contribution partout dans le monde; et troisièmement, pour l'écosystème des agences de développement elles-mêmes. On ne peut pas juste décider d'augmenter la cadence. Si nous voulions l'année prochaine en faire davantage, nous ne pourrions pas simplement aller de l'avant et déployer nos équipes. Nous devrions prendre conscience du fait que notre secteur n'a ni les capacités ni l'expertise voulues.
    Je pense que cela aurait des conséquences assez dramatiques.
    Je comprends ce que vous nous dites. Je suis conscient également du contexte dans lequel vous évoluez et de votre point de vue dans ce débat.

[Français]

    Est-ce que d'autres témoins veulent répondre à la question?
    Je vous en prie, monsieur Côté.
    Je voudrais simplement rappeler que les fonds publics financent largement aussi les organisations de la société civile canadienne qui travaillent en développement international. Ces dernières n'ont pas énormément de sources de financement. Ce ne sont généralement pas des groupes qui sont financés par des fondations privées. Une importante partie de leur financement provient de l'aide publique au développement. Cela aurait donc effectivement des répercussions considérables dans le secteur. Plusieurs organisations disparaîtraient probablement, et ce, assez rapidement, en plus des conséquences...
    Merci, monsieur Côté.
    J'ai une question pour vous. Vous avez parlé du Bureau de l'ombudsman canadien de la responsabilité des entreprises, soit l'OCRE.

[Traduction]

    Vous avez dit souhaiter qu'il dispose de pouvoirs d'enquête. Auriez-vous quelque chose à ajouter au sujet de l'importance de l'OCRE, notamment en lien avec l'Afrique?

[Français]

     En Afrique et ailleurs, au cours des 10 à 20 dernières années, et même au-delà, il y a souvent eu des allégations d'abus des droits de la personne portées à l'endroit de compagnies minières, notamment canadiennes. C'est un problème important.
    Au Canada, on a créé ce bureau, qui a un potentiel extraordinaire pour enquêter sur ces allégations, mais qui, présentement, n'a pas les outils pour le faire. Ce que nous aimerions, c'est que Mme Meyerhoffer ait les outils. Elle a elle-même mentionné, au cours des derniers mois, qu'elle avait besoin des outils pour pouvoir mener complètement ces enquêtes. Sinon, ça ne débouche pas sur des résultats probants.
    Merci.

[Traduction]

    Nous passons maintenant à M. Bergeron pour une période de deux minutes.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Compte tenu du peu de temps qu'il me reste, je n'insisterai pas davantage sur le sujet dont il était question précédemment, à savoir le financement des petites et moyennes organisations en développement international, qui sont souvent davantage ancrées sur le terrain que ne le sont les grandes organisations. Comme l'évoquait Mme McPherson, nous devons avoir un meilleur équilibre dans le financement accordé aux organisations multilatérales, qui demeurent importantes, aux grandes organisations et aux petites et moyennes organisations.
    Monsieur Côté, j'aimerais revenir sur la partie de votre présentation où vous demandiez que soit adoptée rapidement une loi sur la diligence des entreprises en matière de droits de la personne et de l'environnement, afin que l'ombudsman de la responsabilité des entreprises puisse jouir de véritables pouvoirs d'enquête.
    Diriez-vous que l'adoption du projet de loi S‑211 sur le travail forcé et le travail des enfants, qui requiert seulement des déclarations volontaires de la part des entreprises, ou que la mise en place de cet ombudsman avaient simplement pour but de se donner bonne conscience?

  (1735)  

    Je dirais que, malheureusement, la loi découlant du projet de loi S‑211 n'arrive pas à faire ce que nous voudrions qu'une loi sur la diligence raisonnable fasse, c'est-à-dire aller au-delà d'un exercice de rapportage. Nous voudrions que ça couvre l'ensemble des droits de la personne. Malheureusement, ce n'est pas ce que fait cette loi.
    Cette loi n'oblige pas non plus les entreprises à prendre des mesures. Au fond, aux termes de cette loi, les entreprises doivent vérifier s'il y a du travail forcé dans leur chaîne d'approvisionnement, mais cela ne les oblige pas nécessairement à prendre des mesures pour corriger la situation si jamais elles découvrent des problèmes de travail forcé.
    Quand on a annoncé la création d'un bureau de l'ombudsman, celui-ci devait avoir les pouvoirs que nous demandions. Les camarades de la coalition à laquelle je participe étaient présents lors de l'annonce. C'est malheureusement dans les mois qui ont suivi que les pouvoirs qui avaient été annoncés ont disparu du mandat ou de la description du travail de l'ombudsman. Ce que nous voudrions, c'est que ces pouvoirs lui soient dévolus, car cette personne ne peut pas mener des enquêtes sur des entreprises et aller au fond des choses si elle n'a pas le pouvoir de demander des rapports et des témoignages aux parties.

[Traduction]

    Merci.
    C'est maintenant au tour de Mme McPherson.
    Vous avez deux minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Monsieur Côté, j'ai déposé le projet de loi C‑263, qui donnerait à l'ombudsman canadien de la responsabilité des entreprises les outils qui nous ont été promis il y a de nombreuses années déjà. J'inviterais donc tous ceux qui ont à coeur de permettre à l'ombudsman de mieux remplir son rôle à examiner de plus près le projet de loi C‑263.
    Je dois cependant dire que je ressens une certaine frustration. J'ai bien écouté l'information que vous nous transmettez, monsieur Côté.
    J'ai aussi entendu vos commentaires, monsieur Harrington, au sujet de la complexité des choses à Affaires mondiales. Il y a environ sept ans, j'ai été membre du Groupe d'action pour une efficacité améliorée, et nous avions ces mêmes conversations. Nous discutions des motifs qui devraient nous inciter à corriger ces lacunes que nous cherchons encore à corriger aujourd'hui.
    Selon vous, qu'est‑ce qui nous empêche d'y arriver? Pourquoi ces choses sont-elles si difficiles à régler pour les gouvernements?
    Monsieur Harrington, je vais commencer par vous.
    Tout d'abord, je dirais qu'Affaires mondiales regorge de gens très bien qui ne ménagent pas leurs efforts. J'ajouterais que la façon dont les choses sont organisées, la manière dont les ministères sont structurés, ne permet pas vraiment des métissages fructueux.
    J'estime qu'il faut d'abord et avant tout nous pencher sur la structure d'Affaires mondiales Canada. Tant que cette analyse ne sera pas faite, il sera en fait très difficile d'apporter les changements voulus parce que chacun est enfermé dans son cloisonnement. C'est aussi ce que je suis à même d'observer dans mon propre environnement. Il serait donc essentiel à mes yeux de bien examiner la structure même de l'organisation dans son ensemble. Je pense que cela doit être fait avant que nous puissions commencer à nous attaquer à certains des principaux problèmes qui causent ces [inaudible].
    La deuxième chose que je dirais, c'est qu'il y a beaucoup d'aversion pour le risque. Nous accomplissons un travail qui est loin d'être sans risque, et les mesures se superposent pour éviter ces risques.
    Je vais permettre à mes collègues de vous répondre également.
    J'aimerais juste souligner très rapidement que lorsque vous parlez d'aversion pour le risque, on nous répète sans cesse que c'est un domaine où nous avons besoin d'innovation...
    Tout à fait.
    ... et l'innovation ne va pas sans risque.
    Monsieur Côté, je suis désolée.
    Je crains que nous ayons dépassé les deux minutes prévues.

[Français]

    Oui...

[Traduction]

    Très brièvement, monsieur Côté, en moins de 30 secondes, s'il vous plaît. Désolé.

[Français]

    D'accord, merci.
    Je suis d'accord sur les éléments soulevés par M. Harrington.
    J'aimerais mentionner une autre chose. J'ai travaillé avec Affaires mondiales Canada, alors je sais qu'il y a plein de gens extrêmement compétents et dévoués au sein de ce ministère. Ce n'est pas là un problème. Cela dit, la rotation des gens entre les différents postes fait qu'il est très difficile de nouer des relations à long terme avec des agents. C'est toujours à recommencer. C'est un élément qui contribue à prolonger le processus. Comme ces gens ne connaissent pas les organismes, c'est à recommencer chaque année. C'est donc un autre facteur qui ralentit un peu les choses, en plus de ce que M. Harrington a déjà mentionné.

  (1740)  

[Traduction]

    Merci, monsieur Côté.
    Nous passons maintenant à M. Aboultaif.
    Vous avez trois minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Harrington, vous avez dit que nous devions agir de façon stratégique. Il nous faut adopter une approche stratégique, plutôt que de simplement chercher à parer au plus pressé.
    Croyez-vous que le Canada a une approche à la pièce à l'égard de l'Afrique? Pourriez-vous nous en dire un peu plus à ce sujet? J'aurai peut-être d'autres questions par la suite.
    Je pense que c'est effectivement le cas. Je crois que nous n'avons pas adopté une approche stratégique réfléchie à l'égard du continent dans son ensemble ni même à l'égard de ses différentes régions. J'ai l'impression que nous considérons souvent la situation pays par pays. Je ne pense pas non plus que nous ayons eu une stratégie holistique cohérente en ce qui concerne la façon dont le développement peut interagir avec le commerce et la diplomatie, et ce, même dans le contexte de la consolidation de la paix et de la défense.
    Tous ces éléments s'appuient les uns les autres. Tant que nous ne pourrons pas revenir à une situation où il y a cohésion entre ces différents modes de fonctionnement et où nous ne travaillons pas en vase clos — avec de fréquentes compressions et des actions qui s'accélèrent d'une part et sont ralenties par ailleurs —, je ne suis pas certain que nous aurons une stratégie cohérente. Il faut adopter une approche holistique.
    Nous avons plus de concurrence que jamais dans la région et une concurrence différente, non pas de la part de nos alliés, mais plutôt en provenance de pays comme la Russie et la Chine.
    Selon vous, sur quoi devrions-nous nous concentrer pour être vraiment efficaces, en sachant qu'il y a des obstacles qui se dressent devant nous, notamment à l'égard de certains projets de développement dans la région?
    Quelles sont les deux principales choses que nous devrions faire, soit à l'échelle régionale, soit sur le plan de l'offre de produits, par exemple?
    Pour ce qui est des régions, mes collègues ont parlé du Sahel et j'ajouterais à cela l'Afrique subsaharienne. Ces régions sont souvent riches en ressources. Le Canada pourrait bénéficier du développement de ces secteurs, mais c'est possible uniquement si nous nous engageons bel et bien en faveur du bien-être de la population locale, et c'est là que l'aide au développement prend tout son sens. Nous ne pouvons pas faire le travail que nous faisons, le travail que nous voulons faire, sans avoir une bonne réputation.
    Si vous visitez tous ces pays où nous sommes nombreux à nous rendre, vous pourrez constater une énorme influence chinoise en même temps qu'une influence croissante de la Russie. Vous ne verrez pas de Canadiens là‑bas. Nous devons être présents pour avoir un rôle à jouer dans ce qui sera, à bien des égards, le siècle de l'Afrique. Je dirais donc que la chose la plus importante que nous devrions faire, c'est d'être présents suivant les différents éléments d'une stratégie holistique, sans négliger le besoin d'aide au développement. Jetez les bases de la stabilité dans ces pays et vous en récolterez les fruits de toutes sortes de façons partout dans le monde.
    Pensez-vous que l'approche adoptée par le gouvernement actuel au cours des neuf dernières années — et je ne vous demande pas une opinion partisane à ce sujet, je veux simplement clarifier ce point — a été efficace? Que peut‑on faire pour que cette option devienne plus viable et plus productive?
    En faisant abstraction encore une fois de toute partisanerie, je pense qu'il y a des aspects qui ont été efficaces. Nous avons été en mesure d'avoir une incidence très marquée sur l'égalité entre les sexes dans le monde. Je pense qu'il y a des endroits où les résultats n'ont pas été au rendez-vous et où nous n'avons pas vraiment eu de stratégie réfléchie. C'est notamment le cas pour l'Afrique quant à la façon d'intégrer l'aide au développement aux autres aspects de la politique étrangère canadienne. Je me réjouis certes du travail accompli au bénéfice des femmes et de l'égalité des genres. Je pense que nous pourrions poser d'autres gestes dans une perspective plus globale. J'estime que l'une des choses les plus importantes que nous devons faire — et je crois que nous en conviendrons tous —, c'est d'augmenter l'aide publique au développement afin d'avoir plus d'impact dans les pays dont nous parlons aujourd'hui.
    Est‑ce qu'une approche axée sur le développement économique pourrait nous permettre d'obtenir plus rapidement des résultats dans nos efforts pour accroître l'efficacité et avoir une présence plus soutenue?
    Je répondrais par l'affirmative, mais avec une mise en garde. Je pense que si nous ne tenons pas compte de l'aspect économique dans ce que nous faisons, nous ne parviendrons pas à apporter la stabilité à ces pays et à établir des liens commerciaux pouvant nous être profitables. Il doit donc y avoir effectivement un aspect économique, mais il doit aussi être appuyé par des considérations liées au développement.
    Merci.
    Le dernier à pouvoir poser ses questions sera M. Alghabra qui dispose de trois minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci aux témoins de leur présence ici aujourd'hui.
    Bien des questions que je prévoyais poser ont déjà été posées, donc continuons à parler de ce que vous venez de mentionner, monsieur Harrington, soit du rôle du secteur privé au Canada. Je pense que nous sommes tous d'accord pour dire que nous avons besoin de plus d'activités économiques et d'engagement dans la région. Pourriez‑vous nous aider à comprendre ce que nous pourrions faire de plus... Comment pourrions‑nous accroître la motivation, mis à part le profit à strictement parler, bien évidemment? Comment pourrions‑nous rehausser — et par extension, cela se traduira bien sûr par des profits — la synchronicité et la collaboration avec les organismes de développement international pour favoriser l'atteinte des grands objectifs du Canada et des travailleurs canadiens?

  (1745)  

    Je suis sûr que mes confrères auront quelque chose à dire là‑dessus, donc je vais leur laisser du temps.
    Je dirai, tout d'abord, que si nous ne mobilisons pas la population et le secteur privé canadiens, nous ne pourrons pas susciter la conscientisation dont nous avons besoin pour que le Canada ait une réelle incidence en Afrique, donc il doit y avoir une façon pour nous de les sensibiliser. Je crois aussi qu'il importe que les organismes de développement et les autres travaillent avec les entreprises afin d'influencer les méthodes de travail dans les pays où les ressources abondent. Dans des pays comme la République démocratique du Congo, il y a toujours des guerres pour les ressources, donc c'est très important que nous puissions compter sur l'aide de la population et des entreprises canadiennes pour encourager fortement le leadership éthique fondé sur des principes dont elles peuvent faire preuve en Afrique par leurs activités économiques. J'ai vu des exemples, en fait, où des partenariats entre les organismes de développement et les moteurs économiques internationaux en Afrique peuvent réellement profiter aux collectivités locales.
    J'aimerais bien entendre la réponse de mes confrères aussi.
    Oui, j'aimerais aussi entendre les autres témoins.
    Monsieur Dongier, allez‑y.
    La politique sociale la plus efficace pour l'Afrique, c'est en fait — aux yeux des dirigeants africains et de bien des gens, du moins — d'attirer plus d'investissements, de créer plus d'emplois. Le continent passera de 1,5 milliard d'habitants à 4 milliards d'habitants dans les quatre ou cinq prochaines dizaines d'années. Le défi de la création d'emploi est fondamental, et il faut des investissements dans des secteurs qui demandent beaucoup de main‑d'oeuvre. Comme vous le savez, il y a divers secteurs qui ont du potentiel en Afrique, mais non seulement le secteur de la transformation agroalimentaire répond aux besoins pressants des consommateurs sur le continent, mais il emploie beaucoup de travailleurs et peut bénéficier des compétences et de la valeur qu'apportent les entreprises canadiennes. Il reste à savoir comment mettre cela en place, mais je suis convaincu que c'est là que se situe le gros des besoins sur le continent: il faut favoriser une croissance inclusive et durable.
    Je vais donner la chance à M. Côté de répondre aussi, et lui demander s'il a un exemple de la façon dont les organisations travaillent avec le secteur privé pour atteindre cet objectif.

[Français]

     Malheureusement, il aurait fallu que j'y réfléchisse avant. Aucun exemple ne me vient en tête en ce moment, mais je suis d'accord sur ce qu'a mentionné M. Dongier. Le secteur agroalimentaire en est un qui est important en Afrique. Il faut donc travailler avec les petites et moyennes entreprises et avec les communautés de là-bas, et il faut le faire surtout de façon éthique.
    Bien sûr, à mon avis, il faut davantage regarder de quelle façon nos activités peuvent influer positivement sur les droits de la personne et sur le développement économique des communautés là-bas. Si des entreprises canadiennes qui travaillent de façon éthique peuvent s'engager auprès des communautés, tant mieux. C'est une bonne chose.
    Il ne faut pas oublier que l'aide au développement favorise le développement économique là-bas, ce qui peut créer ou renforcer de petites et moyennes entreprises qui pourront travailler avec des entreprises canadiennes par la suite.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Cela met fin à la période de questions des députés.
    Messieurs Dongier, Côté et Harrington, je vous remercie beaucoup. Nous vous sommes très reconnaissants de votre temps, de vos réflexions et de votre expertise.
    Nous allons suspendre la séance pour préparer le prochain groupe de témoins.

  (1745)  


  (1755)  

    Je vous souhaite à nouveau la bienvenue.
    Nous reprenons la séance. Nous allons entendre le deuxième groupe de témoins d'aujourd'hui.
    Je souhaite la bienvenue à M. Jason Nickerson, qui représente Médecins Sans Frontières au Canada.
    Nous accueillons aussi Marie‑Pierre Nogarède, directrice générale adjointe; et Maxime Allard, directeur du Programme de coopération volontaire de la Fondation Paul Gérin‑Lajoie.
    Enfin, nous accueillons Catriona Addleton, directrice des programmes internationaux d'Islamic Relief Canada, qui se joint à nous par vidéoconférence.
    Vous disposerez chacun de cinq minutes pour présenter votre exposé.
    Nous accusons beaucoup de retard, donc je serai intransigeant cette fois‑ci pour que tout le monde respecte son temps de parole. Les limites de temps s'appliquent non seulement à vos exposés, mais aussi aux réponses que vous donnez aux questions des députés.
    Après toutes ces explications, nous allons commencer par M. Nickerson.
    Vous avez cinq minutes pour présenter votre exposé.
    Médecins Sans Frontières, ou Doctors Without Borders, est une organisation humanitaire médicale internationale qui donne des soins médicaux aux gens touchés par des conflits armés, des catastrophes naturelles, des déplacements forcés et de la négligence. Nous menons des interventions médicales d'urgence dans plus de 70 pays où le système de santé est perturbé et où les autorités locales et d'autres fournisseurs de soins ne répondent pas ou ne peuvent pas répondre aux besoins urgents.
    Des pays où nous travaillons de nos jours, 35 sont situés en Afrique, ce qui représente plus de la moitié de nos activités et de nos dépenses, pour un total de 1,15 milliard de dollars. En tout, 8 de nos 10 principaux programmes par pays sont déployés dans des pays africains.
    Chacun de ces pays, et le travail que nous y effectuons est complexe et se caractérise par une grande diversité, donc je tiens à parler durant mon exposé de ce dont nos équipes sont témoins de nos jours dans deux pays en particulier: le Soudan et la République démocratique du Congo.
    Nous sommes présents au Soudan depuis 1979 et nous prodiguons des soins médicaux, faisons des chirurgies et donnons des soins primaires à des patients externes dans 11 États. En ce moment, plus de 10 millions de Soudanais sont déplacés, à cause du conflit qui a éclaté en avril 2023. Plus de 1,7 million de personnes ont franchi la frontière pour se rendre dans des pays voisins, comme le Tchad, la République centrafricaine et le Soudan du Sud. Nous menons de vastes programmes médicaux d'urgence dans chacun de ces pays et y avons beaucoup intensifié nos activités.
    Depuis des mois, nous sonnons l'alarme quant à la situation humanitaire qui se détériore au Soudan et à la réponse qui se situe bien en deçà des normes d'urgence. Cette période a été marquée par les obstructions administratives des parties au conflit, qui refusent aux organisations humanitaires les visas nécessaires, les autorisations de voyage, les permissions d'acheminer des fournitures et d'aller à la rencontre des populations touchées.
    Les conséquences sont bien réelles. La semaine dernière, nous avons publié un communiqué de presse où nous soulignons les résultats des dépistages de malnutrition menés par nos équipes dans le camp Zamzam, dans le Nord du Darfour, au Soudan. Les résultats effarants montrent que 30 % des 46 000 enfants que nos équipes ont évalués souffrent de malnutrition aiguë, et que 33 % des 16 000 femmes enceintes et allaitantes évaluées souffrent de dénutrition aiguë.
    Tout cela sur fond de conflit violent, si bien que nos équipes traitent des centaines de patients blessés à cause du conflit, y compris des enfants, alors que nous demandons le renforcement urgent de la réponse humanitaire. Nous demandons que les parties en conflit assurent la protection des civils, des travailleurs humanitaires et de l'infrastructure de santé. Nous demandons aussi que des pays comme le Canada mettent à profit toute leur influence diplomatique pour garantir cette protection.
    Dans l'Est de la RDC, nous répondons à une gigantesque crise humanitaire, dans la foulée de la reprise des combats en 2022, qui ont causé le déplacement de 1,6 million de personnes, dans un conflit qui est largement négligé et où la violence contre les civils est endémique. Par exemple, seulement en 2023, nous avons donné des soins dans nos cliniques à 20 556 survivants de violence sexuelle dans le Nord‑Kivu, et nous savons que cela ne représente qu'une fraction des besoins.
    Néanmoins, la réponse humanitaire générale à la crise est extrêmement inadéquate, c'est pourquoi nous ne cessons de réclamer une aide humanitaire accrue. Nous demandons au Canada, en particulier, de renforcer son aide humanitaire et de mettre à profit tous ses leviers diplomatiques pour trouver des solutions à cette crise.
    Le Canada est un donateur humanitaire respecté qui agit selon des principes et qui fait la distinction entre l'aide humanitaire et la politique. Cette distinction est importante, mais je tiens aussi à souligner que la résolution des conflits n'est pas de la responsabilité des organisations humanitaires; c'est la responsabilité des États. Nous aimerions que le Canada fasse plus clairement usage de diplomatie et s'engage dans les États fragiles touchés par des conflits, y compris les pays africains.
    En terminant, je tiens à mentionner que comme organisation humanitaire médicale, nous demeurons extrêmement préoccupés par le manque d'accès de nos équipes et de nos patients aux médicaments essentiels, qui après la pandémie de COVID‑19 sont devenus un enjeu explosif de santé publique, de droits de la personne et de commerce international. Bien des pays africains ont été privés d'un accès opportun aux vaccins et aux médicaments thérapeutiques. Malheureusement, ce n'est pas inhabituel pour le marché de fonctionner ainsi, mais nous pouvons tirer des leçons de cette expérience pour orienter la stratégie du Canada en matière de recherche médicale et de développement.
    Par exemple, de 2018 à 2020, la RDC a connu la deuxième éclosion d'Ebola en importance de l'histoire, et elle s'est produite en même temps qu'un conflit armé violent de longue date. À l'époque, il n'y avait qu'un vaccin expérimental, élaboré par le Laboratoire national de microbiologie du Canada, mais son développement a finalement été interrompu pendant des années, parce que le Canada a octroyé le brevet à une société pharmaceutique qui n'a pas jugé bon de poursuivre le projet. Il n'existait aucun traitement approuvé.
    De nos jours, il existe des vaccins et des traitements contre le virus Ebola. Toutefois, les vaccins, bien qu'ils soient très efficaces, sont les plus dispendieux au monde, et nous signalons dans un rapport récent que nous avons beaucoup de mal à accéder aux deux traitements qui existent contre le virus Ebola.

  (1800)  

    Le Canada fait du bon travail dans ce domaine, mais il doit adopter une approche différente en matière d'innovation et d'octroi de brevets pour garantir que l'accès aux médicaments et l'abordabilité dans des endroits comme plusieurs pays africains soient mis en priorité.
    Je vous remercie de mener cette étude. C'est avec grand plaisir que je répondrai à vos questions.
    Merci beaucoup, monsieur Nickerson.
    Nous passons maintenant à Mme Nogarède, qui représente la Fondation Paul Gérin‑Lajoie.
    Vous disposez de cinq minutes.

[Français]

    Chers membres du Comité, je suis honorée de me présenter devant vous, aujourd'hui, au nom de la Fondation Paul Gérin‑Lajoie pour discuter de l'approche du Canada à l'égard de l'Afrique. Je salue l'initiative du Comité d'étudier ce thème, particulièrement dans le contexte actuel de multiplication des crises.
    Depuis 47 ans, la Fondation Paul Gérin‑Lajoie favorise l'accès à une éducation équitable de qualité tout au long de la vie, garantissant à chaque personne les moyens de façonner son avenir et celui de nos sociétés, en particulier en Afrique francophone. Grâce à La Dictée PGL, qui a mobilisé 15 millions d'élèves et leurs parents depuis plus de 30 ans, nous contribuons également à la sensibilisation du public aux efforts du Canada en matière d'aide internationale.
    Les messages que nous voulons que vous reteniez, aujourd'hui, sont les suivants.
    L'éducation est le levier le plus puissant pour le développement et la stabilité grâce à son pouvoir transformateur sur les individus et les sociétés; le Canada devrait investir, à hauteur de 0,7 % de son revenu national brut, dans l'aide publique au développement, dont au moins 10 % en éducation; et la stratégie du Canada en Afrique devrait accorder une place prépondérante à l'éducation, notamment à cause de la composition sociodémographique de sa population.
    Premièrement, nous croyons que l'éducation est l'outil le plus puissant pour maximiser les retombées des investissements du Canada sur le continent africain. Nous croyons que l'éducation a le pouvoir de provoquer le changement et de mener à des sociétés plus résilientes, équitables, pacifiques et prospères.
    Permettez-moi de vous donner un exemple concret.
    À la suite de la Déclaration de Charlevoix sur l'éducation de qualité pour les filles, les adolescentes et les femmes dans les pays en développement, lors du G7 de 2018, la Fondation Paul Gérin‑Lajoie, en consortium avec le Centre d'étude de coopération internationale, ou CECI, et en partenariat avec des organisations locales, a mis en œuvre un projet d'éducation et de formation professionnelle dans la région des Grands Lacs. Grâce au financement d'Affaires mondiales Canada, des milliers de filles et d'adolescentes déscolarisées, incluant des réfugiées, ont intégré le système scolaire et le marché du travail. Grâce au projet, elles étudient dans des écoles mieux adaptées et sécurisées, où l'enseignement est de meilleure qualité et est dispensé selon une pédagogie sensible au genre et aux conflits. Nous constatons une amélioration du climat social dans les communautés où les populations réfugiées et d'accueil cohabitent de façon plus harmonieuse, et où des entreprises privées sont créées collectivement par les deux communautés.
    Deuxièmement, historiquement, les engagements du Canada, notamment par l'entremise de sa Politique d'aide internationale féministe, l'ont positionné comme un chef de file respecté sur le plan des droits des femmes partout au monde. Cependant, nous reconnaissons que la présence du Canada en Afrique est encore insuffisante. Avec une moyenne d'environ 0,23 % dans les dernières années, l'aide publique au développement canadienne reste bien en deçà de l'objectif de 0,7 % du revenu national brut, ou RNB, fixé par les Nations unies. Comme mon collègue Denis Côté l'a aussi mentionné tout à l'heure, d'autres pays atteignent leur objectif en matière d'aide publique au développement.
    De plus, depuis plusieurs années, le gouvernement canadien investit environ 10 % de son aide publique au développement en éducation, ce qui, selon nous, doit absolument être maintenu et, idéalement, augmenté, pour un secteur aussi primordial. Il est crucial d'atteindre ces objectifs pour repositionner le Canada comme chef de file en matière de solidarité internationale et d'éducation. C'est également important d'un point de vue stratégique pour les intérêts canadiens sur les plans économique, sécuritaire et humanitaire.
    Troisièmement, l'Afrique subsaharienne a la main-d'œuvre la plus jeune au monde, et celle-ci sera la plus nombreuse en 2050. Pourtant, la région a également les taux les plus élevés d'exclusion de l'éducation. Selon l'Organisation des Nations unies pour l'éducation, la science et la culture, ou UNESCO, 60 % des jeunes âgés de 15 à 17 ans n'y sont pas scolarisés. Ce grave manque d'accès à l'éducation freine le potentiel de développement économique du continent africain et le rend encore plus vulnérable aux conflits, aux instabilités politiques et aux conséquences des changements climatiques.
    La population africaine façonnera l'avenir, et l'influence de ce continent sera de plus en plus importante dans différents enjeux mondiaux. Le Canada, avec ses modèles éducatifs réputés et prisés à l'échelle mondiale, a historiquement joué un rôle de chef de file en matière d'éducation en Afrique. Dans ce contexte d'explosion démographique, il est crucial que le Canada se réapproprie ce rôle en renouvelant et en multipliant les financements en éducation dans les pays africains.
    En conclusion, accorder la priorité à l'éducation garantit une meilleure utilisation des ressources et maximise les retombées des investissements canadiens, publics ou privés, en Afrique.
    Nous réaffirmons la nécessité d'investir davantage dans l'aide publique au développement, tout en maintenant ou en augmentant la part consacrée à l'éducation. En effet, le Canada doit renforcer son appui au continent africain, particulièrement dans le domaine de l'éducation, pour lui permettre d'assurer son développement et sa stabilité.
    Nous vous remercions de votre attention.

  (1805)  

     Merci beaucoup, madame Nogarède.

[Traduction]

    Nous passons maintenant à Mme Addleton d'Islamic Relief Canada.
    Vous disposez de cinq minutes.
    Merci de m'avoir invitée à représenter Islamic Relief Canada et à prendre part aux discussions sur l'Afrique que tient le Comité permanent des affaires étrangères et du développement international de la Chambre des communes.
    Islamic Relief est née en Afrique de l'Est, en réaction à la famine de 1984. Depuis 40 ans, nous poursuivons notre travail en Afrique et y mettons en oeuvre des programmes humanitaires et de développement, surtout dans les régions les plus éloignées et les moins bien servies. L'Afrique est un continent immense et d'une grande diversité, confrontée à de nombreuses difficultés, mais qui présente aussi des occasions à saisir.
    J'aimerais prendre le temps qui m'est imparti pour vous parler d'une stratégie dans laquelle le Canada peut investir, étant donné que bien des difficultés sont exacerbées par la crise climatique, les conflits qui s'aggravent et qui perdurent et une croissance économique variée, entre autres. Nous devons appliquer une stratégie holistique qui reste axée sur le renforcement de la résilience et qui aide les collectivités à élaborer et à mettre en œuvre des politiques locales, inclusives et durables.
    Cela étant dit, j'aimerais vous présenter une brève anecdote.
    Durant une visite à nos installations au Mali, j'ai été frappé par une remarque très simple. Plusieurs personnes m'ont dit: « nos collectivités ne différencient pas les besoins selon le type de réponse à privilégier, comme les urgences, le développement et la consolidation de la paix. Nous pensons qu'il faut répondre à tous ces besoins. »
    Ce sentiment illustre le besoin d'appliquer une approche holistique, qu'on appelle aussi l'approche « triple nexus », surtout dans le contexte des investissements du gouvernement du Canada. Il faut notamment réduire au minimum la rigidité des modalités de financement. J'aimerais vous présenter deux exemples qui montrent le genre d'incidence que peut avoir une stratégie holistique.
    Au Kenya, nous avons mis en place un programme triple nexus de petite taille, à l'aide du financement de l'Agence suédoise de coopération internationale pour le développement. Ce programme visait à apaiser les tensions liées aux conflits pour les ressources et à élaborer des plateformes de dialogue, dont des comités pour la paix, ainsi qu'à mener des activités de subsistance et d'aide pour gérer les ressources naturelles. Grâce à nos efforts, la prévalence et la récurrence des conflits entre les communautés ont diminué. Le comité pour la paix a établi un système d'alerte rapide en cas de conflit, des biens pillés ont été rendus à leurs propriétaires et la communication entre les communautés a été renforcée.
    Dans un autre exemple, au Soudan du Sud, nous mettons en oeuvre un programme transformateur pluriannuel qui vise à promouvoir l'égalité des genres, à favoriser la paix et à concevoir des moyens de subsistance résilients. À l'aide de diverses initiatives d'assainissement de l'eau, de renforcement de la paix dans les collectivités, d'amélioration des moyens de subsistance et de mentorat, le programme génère des résultats positifs. Un titulaire de droits ou un bénéficiaire a dit: « Grâce à la paix, nous pouvons faire des progrès dans tous les secteurs de notre communauté. »
    La phase un produit des résultats épatants, dont l'augmentation de plus de 200 % des revenus annuels des familles ciblées, l'augmentation de 49 % des actifs productifs appartenant à des femmes, l'augmentation de 44 % du nombre de titulaires de droits pouvant discuter de sujets liés à la paix et une réduction de 8 % du nombre de conflits durant la mise en œuvre du projet.
    Ces résultats montrent la puissance de programmes bien intégrés axés sur la dignité humaine, qui offrent des outils essentiels, une façon tangible de se sortir de la pauvreté et un environnement favorable à la participation inclusive et à la prospérité.
    Dans cette optique, nous recommandons tout d'abord que le gouvernement accroisse son financement à l'Afrique. Compte tenu de l'augmentation de la prévalence des catastrophes et de facteurs aggravants comme les crises qui perdurent dans le temps, il est impératif que le Canada déploie davantage d'efforts de financement.
    Deuxièmement, dans le cadre de l'augmentation du financement, nous recommandons que le Canada investisse de manière considérable dans la stratégie triple nexus, soit dans l'imbrication de l'aide humanitaire, du développement et de la consolidation de la paix. Nous savons que le développement durable dépend de la paix, et les résultats sont encore meilleurs quand on déploie des efforts sur les trois fronts de manière bien coordonnée.
    L'approche triple nexus est recommandée dans de nombreuses évaluations des programmes que le Canada déploie dans des pays comme l'Éthiopie et la RDC, donc il est temps de redoubler d'efforts dans la stratégie triple nexus. Il faudra également améliorer les liens intergouvernementaux pour intégrer le programme triple nexus. Je répète qu'il faudra pour cela faire preuve de moins de rigidité dans les modalités de financement.
    Enfin, nous recommandons que le Canada maintienne son attention sur l'amélioration de la gouvernance, surtout celle des autorités locales et des sociétés civiles, dans le cadre de l'approche triple nexus. Cela exige indirectement l'élaboration de voies vers la localisation et met en valeur les relations entre l'État et la société. Par le fait même, le gouvernement doit favoriser les solutions locales aux défis humanitaires et du développement.
    Nous croyons fermement que la stratégie du Canada pour l'Afrique doit s'assortir d'un financement accru, miser sur des programmes transformateurs holistiques qui répondent aux besoins interreliés des collectivités et contribuer à une Afrique prospère.
    Merci du temps que vous m'avez accordé.

  (1810)  

    Merci beaucoup, madame Addleton.
    Nous passons aux questions des députés. Nous commencerons par M. Hoback.
    Vous avez trois minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins.
    Nous devrons être très brefs, car je ne dispose que de trois minutes.
    Dans quels domaines le Canada excelle‑t‑il vraiment en matière d'aide étrangère? Quels sont les domaines auxquels nous devrions vraiment accorder la priorité? Pensez-vous qu'il est plus stratégique de toucher à tout un tas de petites choses, mais de ne rien faire d'envergure?
    Je vais commencer par vous, monsieur Nickerson, puis j'entendrai les autres personnes autour de la table.
    Absolument. Je pense qu'il y a eu des investissements très stratégiques dans la santé et les droits sexuels et reproductifs, et que c'est un engagement de longue date de plusieurs gouvernements canadiens.

  (1815)  

    Est‑ce ce dont le monde a besoin? Sur le terrain, est‑ce la chose la plus importante?
    Il ne fait aucun doute qu'il y a d'énormes lacunes à cet égard, donc le fait de fournir une aide ciblée est un véritable succès.
    Je dirais que d'un point de vue humanitaire, le Canada est un bon donateur qui se fonde sur des principes, en ce sens qu'il ne tente pas de diriger les activités générales des organisations humanitaires.
    Toute intervention humanitaire doit se fonder sur l'évaluation des besoins et la réponse aux besoins. C'est la façon dont le Canada aborde l'aide humanitaire, et c'est une force.

[Français]

     Selon nous, le message a été assez clair. Le Canada doit investir en éducation. Je pense que le Canada doit choisir sa stratégie, sa signature, comme M. Roy l'avait mentionné lors de son passage ici, dernièrement. L'éducation a vraiment un pouvoir transversal sur tellement d'autres domaines: l'économie, la santé maternelle et infantile, l'environnement, la paix, la sécurité.
    Je m'arrête ici.

[Traduction]

    Je ne veux vraiment pas être impoli. Le temps file tellement vite.
    Madame Addleton, qu'en pensez-vous?
    Je suis d'accord avec ce que les témoins précédents ont mentionné.
    Il y a eu des investissements stratégiques fructueux dans les femmes et les filles en particulier, dans divers secteurs. Il faut une aide ciblée. Il faudra que le Canada priorise les domaines en fonction du financement disponible, et on espère qu'il augmentera.
    Je recommanderais particulièrement d'accroître le financement en Afrique de l'Ouest.
    Pourquoi n'y a‑t‑il pas plus d'investissements des entreprises dans cette région? Je sais qu'il y a beaucoup d'investissements en provenance de l'Europe, de la Turquie et d'autres pays.
    Pourquoi n'y a‑t‑il pas plus d'investissements du milieu des affaires canadien? Est‑ce en raison d'un manque d'éducation? Est‑ce pour des raisons de sécurité ou simplement par manque de sensibilisation? Quelqu'un voudrait‑il s'exprimer là‑dessus?

[Français]

    Bien sûr, le manque d'éducation fait que les entreprises, même celles qui sont assez élémentaires, ont besoin d'une population éduquée.
    La règle de droit, le respect des contrats, la sécurité sont évidemment importants aussi, mais on pense qu'à long terme, l'éducation est probablement la plus...

[Traduction]

    Cela n'empêche pas les entreprises européennes d'investir dans la région.
    Je crains que votre temps ne soit écoulé. Merci, monsieur Hoback.
    Nous passons maintenant à M. Zuberi. Vous avez trois minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je vais partager mon temps avec ma collègue, Mme Vandenbeld.
    Dans les deux minutes dont je dispose, j'aimerais parler du Soudan. Monsieur Nickerson, vous avez mentionné qu'il faut miser sur une approche pangouvernementale, utiliser une gamme complète d'outils diplomatiques.
    Tout d'abord, je suis sûr que vous savez très bien que notre gouvernement a donné 132 millions de dollars en aide au Soudan et 142 millions de dollars à la République démocratique du Congo. Nous sommes là, mais je suis tout à fait d'accord avec vous pour dire qu'il y a toujours beaucoup plus à faire, et je respecte pleinement le travail que vous et votre organisation accomplissez au Soudan.
    Dans les circonstances actuelles, nous avons aussi un programme pour ceux qui fuient la violence au Soudan. Nous accueillerons ainsi 3 250 demandes de personnes qui cherchent refuge au Canada.
    En ce qui concerne les outils diplomatiques, pourriez-vous nous en dire un peu plus sur le Soudan, en une minute?
    Je ne suis pas en mesure de vous donner une réponse particulièrement complète ici, mais nous nous heurtons à des obstacles administratifs partout, qu'il s'agisse des visas et des autorisations de voyage ou d'acheminer des fournitures chirurgicales dans certaines parties de Khartoum, où nous avons été bloqués, on nous refuse l'accès.
    Je tiens à souligner que le Canada est l'un des pays à s'être efforcé de mobiliser les autres donateurs pour faire pression en faveur de l'élimination de ces blocages, mais vraiment, je ne le mentionne que pour vous donner une idée des difficultés de fonctionnement dans cet environnement. C'est la réalité: d'un point de vue très pragmatique, la communauté internationale doit dénoncer la situation, on peut le faire individuellement, par pays, ou collectivement, au sein des groupes de donateurs, mais c'est important.
    Je vais céder la parole à ma collègue.
    Je sais que nous avons très peu de temps.
    D'après ce que nous entendons, il y a deux choses. Il y a la hauteur du financement, mais il y a aussi la souplesse, l'agilité, la fausse dichotomie entre le développement et l'aide humanitaire, l'imbrication de l'aide humanitaire, du développement et de la paix.
    Depuis 2015, le Canada a augmenté son aide publique au développement de 54 %, et nous nous sommes engagés à continuer sur cette voie jusqu'en 2030. Dans le dernier budget, nous avons annoncé l'injection de 350 millions de dollars supplémentaires exclusivement pour les crises humanitaires.
    Je suis très heureuse, monsieur Nickerson, que vous mentionniez la République démocratique du Congo. Le ministre et moi sommes tous deux allés en RDC au cours des quatre derniers mois. Comme on l'a mentionné, nous avons augmenté notre contribution de 142 millions de dollars là‑bas, tout comme nous avons augmenté le financement destiné au Soudan.
    Pourriez-vous me dire très rapidement ce que nous pouvons faire, au‑delà du financement à proprement parler, pour le rendre plus souple, plus prévisible et plus durable, afin que nous puissions être plus efficaces lorsque nous devons changer de cap et qu'un problème de développement devient une crise humanitaire et vice versa?

  (1820)  

    Vous avez 15 secondes, s'il vous plaît.
    Je vous prie de m'excuser, mais nous avons dépassé le temps imparti.
    C'est entendu.
    Cela dépend en partie de la façon dont les organisations se positionnent dans ces crises également. Nous sommes une organisation humanitaire qui renforce la capacité d'intervention d'urgence, d'adaptation et d'intensification des activités dans ces situations. Il s'agit en partie d'influencer la façon dont le système humanitaire et le système de développement international fonctionnent.
    Merci.
    Nous passons maintenant à M. Bergeron.
    Vous avez trois minutes, monsieur.

[Français]

     Merci beaucoup.
    Tout à l'heure, je rappelais le fait qu'on a évoqué l'importance qu'aura l'Afrique au cours des prochaines décennies pour ce qui est de la démographie de l'économie et de la Francophonie. On a souvent tendance à se conforter en se disant que le français est la langue qui connaîtra la plus grande croissance au cours des prochaines décennies grâce à l'Afrique.
    Vous avez évoqué le fait que Jean‑Louis Roy, la semaine dernière, nous a rappelé que ce n'était pas une évidence et que, pour que le français continue de progresser en Afrique, il faudra effectivement faire en sorte d'enseigner le français à ces millions d'enfants qui s'assoiront sur les bancs d'école.
    Encore faudra-t-il qu'il y ait des écoles et qu'il y ait de l'enseignement du français dans ces écoles. En effet, si on n'enseigne pas le français dans les écoles en Afrique, ces jeunes parleront certainement le wolof ou le swahili, mais ne parleront probablement pas le français.
    Il y a donc un effort à faire, et, comme l'évoquait à juste titre l'un des témoins précédents, la France est un peu disqualifiée dans plusieurs pays francophones en Afrique.
    Le Canada est-il en train de manquer le bateau quant à l'importance qu'il doit accorder à l'éducation, particulièrement en français, en Afrique?
    En ce qui a trait au fait français, il est certain que le Canada a un avantage grâce à son bilinguisme et à sa présence à l'Organisation internationale de la Francophonie, ou OIF.
    À la Fondation Paul Gérin‑Lajoie, nous travaillons avec l'OIF dans certains programmes, notamment dans le secteur éducatif. Il faut se rappeler que, pour la plupart des gens qui vont à l'école en français, le français est leur langue seconde. On travaille à assurer une transition harmonieuse entre la langue maternelle et la langue française, notamment au moyen de cours dans la langue maternelle des élèves au début. Quand on commence par la langue française, il y a souvent une perte d'apprentissage qui se fait en tout bas âge et qui est difficile à rattraper.
    Cela étant dit, le Canada devrait-il se positionner un peu plus? Probablement. Nous en avons l'occasion en raison de la réputation de la France en ce moment, notamment en Afrique de l'Ouest. De plus, le Canada a la réputation d'être très bienveillant dans les pays d'Afrique francophones, en général, et d'Afrique de l'Ouest, en particulier.
    Il y a donc probablement une occasion en ce sens.
     Vous plaidez en faveur du maintien du budget de 10 % pour l'aide publique au développement consacrée à l'éducation. Vous plaidez même en faveur d'une augmentation, ce sur quoi je serais d'accord, mais les faits nous montrent plutôt que c'est bien en deçà de 10 %, dans certains cas.
    Le plus récent rapport statistique sur l'aide internationale du Canada en 2022‑2023 nous montre que 4,23 % de l'aide internationale du Canada a finalement été consacrée à l'éducation.
    Se fixe-t-on des objectifs qu'on sait ne pas être en mesure d'atteindre?
     En effet, je pense qu'il est primordial, comme je l'ai mentionné aujourd'hui, de se fixer des objectifs d'au moins 10 % et de les atteindre.
    Je nous invite à regarder la situation du point de vue inverse. Qu'arrivera-t-il si le Canada n'investit pas en éducation ou n'investit pas assez en éducation?
    Le résultat sera que les taux d'alphabétisation vont demeurer faibles; les compétences nécessaires pour accéder à des emplois bien rémunérés vont être rares; cela va augmenter les inégalités sociales et économiques; cela va perpétuer le cycle de la pauvreté et de l'exclusion sociale; cela va contribuer à l'instabilité politique; cela va créer un terrain fertile pour les conflits, l'extrémisme...

  (1825)  

[Traduction]

    Je crains de devoir passer à la prochaine députée.
    Nous passons maintenant à Mme McPherson.
    Vous avez trois minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Trois minutes, c'est très court. Je vais commencer tout de suite avec vous, monsieur Nickerson.
    Tout d'abord, je vous remercie de votre présence. Je suis heureuse de vous revoir.
    Vous avez parlé des leçons acquises en ce qui concerne l'équité vaccinale, l'accès aux médicaments essentiels. Le Canada a‑t‑il tiré des leçons de cette expérience? Je veux dire, nous n'avons pas accepté la dérogation à l'Accord sur les ADPIC. Qu'est‑ce qui a changé? S'il y avait une autre pandémie demain, y aurait‑il une différence dans ce qui se passerait cette fois‑ci?
    Non, je ne pense pas que nous en ayons tiré les leçons voulues. Il s'agit d'un problème mondial, en ce sens que les considérations d'accès et d'abordabilité ne sont pas intégrées à la façon dont le financement est attribué à la mise au point de vaccins et de produits thérapeutiques, par exemple.
    L'une des leçons qui ressort très clairement de cette expérience — et en fait, c'est une recommandation de nombreux rapports de différents comités parlementaires —, c'est qu'il faut inclure des dispositions sur l'accès et l'abordabilité dans les accords de financement, dans le financement fourni pour la mise au point de vaccins et de produits thérapeutiques. En gros, il faut prescrire que si le Canada finance la mise au point d'un médicament, ce médicament doit être rendu abordable, il doit être accessible aux Canadiens et aux gens du monde entier à prix raisonnable et équitable.
    Non, nous n'en avons pas vraiment tiré de leçons, et nous continuons de constater une énorme iniquité dans l'accès à diverses choses comme les vaccins, les produits thérapeutiques et les tests diagnostiques là où nous travaillons.
    Merci.
    Je sais que des efforts ont été déployés pour fabriquer des vaccins dans différentes régions du monde, mais je ne crois pas que cela se soit rendu au stade voulu.
    J'ai rencontré des gens qui s'inquiètent beaucoup du sort de la population en RDC. Nous savons que la situation là‑bas est très grave, qu'il est très ardu d'obtenir du soutien là‑bas et que les conséquences politiques de tout ce qui se passe dans la région sont très lourdes.
    Monsieur Nickerson, que pouvez-vous nous dire au sujet de la RDC et de la façon dont le Canada peut aider à ce stade?
    Il y a un manque de financement à la base. Il y a un manque d'argent. Je ne dis pas que le Canada doit être le seul pays à combler l'écart, mais il faut reconnaître qu'il est impératif de mobiliser les donateurs. Je pense que le Canada peut jouer un rôle important à ce chapitre, non seulement à titre de bailleur de fonds, mais aussi en mobilisant les autres pays pour financer l'aide humanitaire.
    La deuxième chose, comme je l'ai mentionné, c'est que les gens sont soumis à des niveaux incroyables de violence, y compris de violence sexuelle et fondée sur le sexe. Il faut mobiliser les efforts diplomatiques pour mettre fin à cette violence contre les personnes. Ce n'est pas quelque chose que nous pouvons faire en tant qu'humanitaires. Nous sommes là pour fournir une aide médicale aux personnes dans le besoin et sauver des vies, mais puisque le Canada s'interroge sur son rôle sur le continent africain, je pense qu'il doit de toute évidence déployer une diplomatie efficace et travailler à la résolution des conflits.
    Oui, et à la consolidation de la paix.
    Merci beaucoup.
    Je crois que mon temps est écoulé, monsieur le président.
    Nous passons maintenant à M. Aboultaif.
    Vous avez trois minutes.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais laisser une minute à mon collègue, le député Epp.
    Madame Nogarède, je suis allé à Dakar en 2018 pour le Partenariat mondial pour l'éducation, et le Canada s'était alors engagé à créer un fonds important. Comment évaluez-vous l'engagement du Canada à cet égard? Comment cela fonctionne‑t‑il pour les pays envers lesquels nous nous sommes engagés, et si nous devions évaluer le tout à ce stade‑ci, quelle incidence cela a‑t‑il eue sur l'éducation là‑bas?

[Français]

     Je vous remercie de votre question.
    Je pense que les engagements du Canada en matière d'éducation ont eu des effets importants. Plus de 4 millions de filles en ont bénéficié. Ces engagements ont comblé le fossé de l'accès à l'éducation pendant les conflits et les crises. Toutefois, ces systèmes éducatifs sont encore fragiles et s'effondrent en raison des effets croissants des chocs climatiques et des conflits.
    J'ai aussi mentionné la croissance de la population en Afrique. Par conséquent, il faut vraiment continuer à investir massivement en éducation, malgré des avancées considérables, en raison des besoins grandissants, notamment en matière d'enseignants qualifiés et d'infrastructures adéquates.

  (1830)  

[Traduction]

    Merci.
    J'ai une question pour Médecins Sans Frontières sur la situation au Soudan. Votre organisation a indiqué que les Nations unies doivent faire preuve de plus d'audace en ce qui concerne le Soudan. Sur quels plans croyez-vous que nous devons améliorer notre participation ou notre engagement? Comment peut‑on y arriver et où se situe le Canada à cet égard?
    Comme je l'ai dit, nous constatons de grandes lacunes dans l'intervention humanitaire dans le Nord du Darfour où, comme je l'ai mentionné, il y a une crise de malnutrition. Par exemple, nous sommes pour ainsi dire la seule organisation internationale présente sur le terrain en ce moment, malgré des besoins énormes.
    Tout d'abord, il faut qu'il y ait une volonté politique d'intensifier notre intervention et de travailler dans cet environnement très difficile. Nous n'essayons pas de donner l'impression que ce n'est pas difficile, mais il est possible de travailler là‑bas, et les besoins existent. Il faut assurément en faire plus.
    Dans quelle mesure l'aide internationale se rend-elle jusqu'à la population plutôt qu'aux organisations sur le terrain? Dans quelle mesure réussissez-vous à intervenir avec les autres organisations, et quelle est la solution si nous n'arrivons pas à fournir de l'aide directement à la population?
    Il faut comprendre qu'il s'agit d'une crise régionale. Il est certain que la situation actuelle est très grave dans le Nord du Darfour, mais il en va de même des besoins dans l'Est du Tchad, où l'accès est beaucoup plus simple et facile. Il manque manifestement de financement, et il faut intensifier nos efforts, mais il est tout à fait possible de fournir de l'aide aux personnes dans le besoin, en particulier, comme je l'ai dit, dans l'Est du Tchad.
    Merci.
    Nous passons maintenant à Mme Vandenbeld. Vous avez trois minutes.
    Merci. Je ne m'attendais pas à un autre tour.
    J'aimerais revenir à la question de l'imbrication des trois formes d'aide, en particulier lorsqu'il faut adapter nos stratégies, lorsqu'une organisation est là pour du développement puis qu'une crise humanitaire survient, afin qu'elle puisse changer de cap au fil du temps. C'est d'ailleurs la transformation qui s'opère actuellement dans les subventions et les contributions versées par Affaires mondiales Canada.
    Selon vous, en quoi cela favorise‑t‑il l'imbrication des trois formes d'aide, en plus d'offrir la souplesse nécessaire pour répondre rapidement aux besoins sur le terrain sans qu'on soit lié à un cadre de résultats en particulier?
    Je vais commencer par Mme Addleton.
    En ce qui concerne l'initiative des subventions et des contributions, au‑delà du fait que les organismes des Nations unies mettront le financement commun et qu'il deviendra flexible, je pense qu'il est vraiment important que les organisations reçoivent également un financement un peu souple.
    Je pense qu'il s'agit aussi de trouver des solutions qui fonctionnent pour toutes les parties. Il faudrait peut-être prévoir un fonds de prévoyance dans le budget pour les urgences, plutôt que de devoir réaffecter une partie du financement du développement à la crise humanitaire, répartir le financement équitablement plutôt que de le laisser fluctuer entre ces deux pôles.
    Je vais m'arrêter là parce que je sais que nous manquons de temps, mais vous pouvez peut-être céder la parole à un autre témoin également.

[Français]

    Il est important qu'Affaires mondiales Canada soit flexible sur le plan du financement et qu'il ait des partenariats préexistants.
    La société civile locale est aussi cruciale. Il faut renforcer les capacités des partenaires dans les pays pour qu'ils puissent à la fois s'occuper de la paix et de la sécurité, et à la fois du développement et de l'humanitaire.
    C'est possible de le faire pour certains sujets et dans certaines régions. C'est possible de faire de la préparation et de la réduction des risques, mais il faut du financement à long terme.

[Traduction]

    Monsieur Nickerson, allez‑y.
    Je ne me prononcerai pas sur l'aspect financier, je pense qu'on en a déjà assez parlé, mais je dirais que notre organisation humanitaire s'inquiète beaucoup de l'idée d'imbriquer les trois formes d'aide. Si nous arrivons à faire notre travail dans des situations si difficiles, c'est en raison de la perception et du fait que nous appliquons des principes humanitaires d'indépendance, d'impartialité et de neutralité.
    L'une des clés, pour cela, c'est que nous jouissons d'une indépendance très claire sur le terrain. Nous sommes là pour fournir de l'aide médicale humanitaire. Nous ne participons pas aux activités de rétablissement de la paix ou d'édification de l'État, ce n'est pas de notre ressort. Nous craignons vraiment que cette imbrication ne compromette la sécurité des organisations humanitaires si elle n'est pas utilisée correctement.
    Nous pourrons faire un suivi auprès du Comité à ce sujet, mais je ne pense pas qu'on en tienne assez compte.

  (1835)  

    Merci.
    Nous passons maintenant à M. Bergeron.
    Il vous reste une minute et demie.

[Français]

     Merci beaucoup, monsieur le président; je vais être bref.
    Croyez-vous que le gouvernement du Canada devrait impliquer davantage le gouvernement du Québec dans la question de l'éducation en français dans les pays africains?
    Les organisations, comme la Fondation Paul Gérin‑Lajoie, font déjà affaire avec le gouvernement du Québec et le gouvernement du Canada. Cela ne nous cause pas vraiment de problème. Il y a déjà une certaine collaboration avec des instances internationales. Je pense que les organisations canadiennes, notamment celles du Québec, sont capables de faire le lien entre les deux organisations. C'est une des raisons qui font qu'on favorise les organisations canadiennes comparativement aux organisations multilatérales. En effet, nous sommes en mesure de répondre à plusieurs besoins ou priorités en même temps.
    De plus, je pense que les expertises du Québec, sur le plan de l'éducation, méritent vraiment d'être transmises, non seulement au Canada, mais aussi sur l'ensemble du continent africain. Je pense notamment à l'approche par compétences, à la pédagogie sensible au genre, à la gestion de l'éducation, à l'apprentissage des compétences de vie et à l'entrepreneuriat.
    Toutes ces approches méritent d'être bien partagées avec le Canada.
    Mon but n'était pas de vous mettre en boîte, mais plutôt de dire que le gouvernement fédéral dispose des moyens et que le gouvernement du Québec dispose de la connaissance de ce qu'est l'éducation. On peut donc probablement en faire davantage pour mieux soutenir les organisations qui, comme la vôtre, se consacrent à l'éducation dans les pays en développement.
    Je vous remercie infiniment.

[Traduction]

    Nous passons maintenant à Mme McPherson.
    Il vous reste une minute et demie.
    Merci beaucoup.
    Aussi intéressant que cela puisse être, je vais de nouveau m'adresser à M. Nickerson.
    En ce qui concerne la protection des travailleurs humanitaires, nous constatons une fréquence accrue des attaques à leur encontre partout dans le monde. Nous savons à quel point la situation est dangereuse pour les travailleurs humanitaires dans de nombreux contextes différents.
    Pouvez-vous nous parler de l'importance de l'indépendance? Pouvez-vous nous dire ce que le gouvernement canadien devrait faire pour aider à protéger les travailleurs humanitaires?
    Oui, je dirai deux ou trois choses là‑dessus.
    Premièrement, je pense que nous avons les mécanismes en place, juridiquement, pour attester du fait que les humanitaires bénéficient de certaines protections en vertu du droit humanitaire international. Je ne pense pas qu'on ait forcément besoin de nouvelles lois. Il suffit d'assurer le respect des protections existantes.
    Le Canada dénonce haut et fort les attaques perpétrées contre des travailleurs humanitaires. C'est bien. Cela aide à établir un genre de cadre normatif et les attentes. C'est utile, mais encore là, cela nous ramène à la diplomatie et à la nécessité de communiquer clairement aux parties aux conflits les attentes de la communauté internationale par des moyens diplomatiques. Encore là, c'est un peu en dehors de notre champ de compétences, mais nous nous attendons à ce que le droit humanitaire international et des textes comme les Conventions de Genève soient considérés comme dans le bien commun et à ce qu'on fasse activement la promotion des protections accordées aux humanitaires. C'est ainsi que nous pourrons rester en sécurité. C'est le cadre dont dépend notre protection dans des circonstances très difficiles.
    Je pense que le Canada doit continuer d'en faire la promotion sur diverses tribunes, y compris par la voix de la présidence du Groupe des amis de la Résolution 2286, qui est une résolution sans équivoque du Conseil de sécurité des Nations unies à ce sujet, soit sur la protection de la mission médicale dans les conflits armés, et qu'il doit continuer de s'en faire le défenseur.
    Merci.
    Nous passons maintenant à M. Epp.
    Vous avez trois minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Il y a eu des discussions entre les partis au sujet d'une motion dont j'ai donné avis la semaine dernière. Je crois que vous constaterez qu'il y a consentement unanime à l'égard de la motion suivante.
Que le Comité permanent des affaires étrangères et du développement international fasse rapport de ce qui suit:
1) Que le Comité demande au gouvernement du Canada de mettre en oeuvre la recommandation no 8 du onzième rapport du Comité permanent des pêches et des océans intitulé Rétablir la pleine responsabilité des ressources et de gouvernance pour la Commission des pêcheries des Grands Lacs, adopté durant la 1re session de la 44e législature, en transférant la responsabilité de la Commission des Grands Lacs à Affaires mondiales Canada;
2) Que, conformément à l'article 109 du Règlement, le gouvernement dépose une réponse globale à la recommandation no 8 du onzième rapport du Comité permanent des pêches et des océans.
    Monsieur le président, je pense que vous constaterez que le Comité est prêt à adopter cette motion avec dissidence.

  (1840)  

    Merci.
    Monsieur Zuberi, vous avez la parole.
    Monsieur le président, je ressens fortement l'envie de canaliser le Garnett en moi pour faire de l'obstruction, mais je vais me contenir.
    Je propose d'adopter la motion avec dissidence.
    (La motion est adoptée avec dissidence.)
    Nous passons maintenant à M. Epp.
    Merci, monsieur le président.
    Je cède le reste de mon temps de parole aux témoins.
    Merci.
    Pour la dernière série de questions, nous allons donner la parole à Mme Dabrusin. Vous avez trois minutes.
    J'aimerais demander à M. Nickerson s'il peut nous soumettre quoi que ce soit sur l'imbrication des trois formes d'aide. Je pense que ce serait vraiment utile.
    J'ai vraiment été captivée par ce que vous avez dit. Vous parliez des menaces de violence sexuelle...
    Donnez-moi une seconde, s'il vous plaît. Je pense que nous avons des problèmes d'interprétation.
    Vous avez la parole.
    Premièrement, j'ai demandé si le témoin pouvait nous soumettre des documents sur l'imbrication des trois formes d'aide, ou l'approche du « triple nexus », et nous faire part de son point de vue là‑dessus, parce que je pense que c'est important pour le Comité.
    Deuxièmement, vous avez parlé du nombre de femmes victimes de violence sexuelle en République démocratique du Congo. Il y en a plus de 20 000. Est‑ce bien cela? Oui.
    Lorsque nous élaborons des politiques applicables en zones de conflit — nous avons une politique et une approche féministes —, que pouvons-nous faire pour mieux soutenir les femmes et nous assurer qu'elles obtiennent l'aide et le soutien dont elles ont besoin?
    Je commencerais par dire qu'il est essentiel de continuer de financer des interventions médicales et psychosociales complètes contre la violence sexuelle et sexiste.
    Notre rôle, en tant qu'organisation médicale et humanitaire, est d'offrir des soins de la qualité visée là où nous travaillons. Nous sommes en mesure de fournir un ensemble complet d'interventions médicales, de services psychologiques et d'autres choses. Je dirais que l'une des choses à prendre en considération, c'est la difficulté d'assurer la protection voulue pour prévenir la violence sexuelle et fondée sur le sexe et qu'il faut y accorder beaucoup plus d'attention.
    Nous nous heurtons constamment aux mêmes difficultés lorsque nos interventions se terminent. Les gens ont encore besoin d'avoir accès à un refuge sûr, à de l'aide juridique et ainsi de suite. En général, à bien des nombreux endroits, il est préférable que ces services soient fournis par des organisations locales. Il y a un certain nombre d'organisations féministes locales qui offrent des refuges sûrs, qui fournissent des services de protection et ainsi de suite, afin que les victimes ne retournent pas ensuite dans la collectivité où vit leur agresseur, par exemple.
    Je pense qu'il s'agit clairement d'une chose que les organisations locales apportent que les organisations internationales, non gouvernementales et humanitaires ne peuvent pas apporter parce qu'elles ne sont tout simplement pas bien adaptées pour cela. Les organisations locales ont nettement des liens plus étroits avec les services de protection, de soutien et ainsi de suite.
    Merci.
    Je suis désolée. Mon temps tire à sa fin.
    Je suis désolé. Votre temps est écoulé, madame Dabrusin. Je vous présente mes excuses.
    Comme il est 18 h 45, nous allons devoir mettre fin à la séance.
    Permettez-moi de remercier tous nos témoins et les organisations pour lesquelles ils travaillent. Elles font un travail vraiment formidable en Afrique et même ailleurs.
    Merci beaucoup, monsieur Nickerson, madame Nogarède, monsieur Allard et madame Addleton. Nous vous sommes très reconnaissants d'avoir pris le temps de nous faire bénéficier de votre expertise.
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