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ACVA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des anciens combattants


NUMÉRO 024 
l
2e SESSION 
l
43e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 5 mai 2021

[Enregistrement électronique]

  (1550)  

[Traduction]

     La séance est ouverte.
    Bienvenue à la 24e séance du Comité permanent des anciens combattants de la Chambre des communes.
    La réunion d'aujourd'hui se déroule selon un format hybride, comme c'est maintenant l'habitude. Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le 27 octobre 2020, le Comité reprend son étude sur une stratégie de commémoration au XXIe siècle.
    Je souhaite la bienvenue à tous les témoins qui ont pris le temps de se joindre à nous aujourd'hui. Je vais tous vous présenter, après quoi vous disposerez chacun de cinq minutes pour faire une déclaration liminaire. Je vous ferai signe quand il vous restera une minute, mais ne paniquez pas, car vous aurez amplement de temps pour conclure. Ce sera le cas tout au long de la réunion. Je m'excuse d'avance à ceux que je vais devoir interrompre. Cela fait partie du travail du président, je suis un « coupe-parole » officiel.
    Je vais présenter tout le monde.
     Du Fonds de commémoration de la marine canadienne, nous accueillons M. Wendall Brown, ancien président, capitaine de frégate à la retraite, et William Woodburn, capitaine de vaisseau à la retraite, actuel président de l'organisation.
     Merci à vous deux d'être ici.
    Nous accueillons également, du ministère de la Défense nationale, M. Steve Harris, directeur par intérim, historien en chef, Direction de l'histoire et du patrimoine; de l'Association nationale des retraités fédéraux, M. Jean-Guy Soulière, président, et Sayward Montague, administrateur; Steve Gregory, directeur, Défense des droits, Opération Husky 2023, et enfin, Kevin Sammy Sampson, vice-président, de la Rwanda Veterans Association of Canada.
     Merci à vous tous d'être ici et de nous aider dans notre étude sur la commémoration.
    Je vais commencer par M. Woodburn.
    Les cinq prochaines minutes sont à vous, monsieur.

  (1555)  

     Monsieur le président, distingués membres du Comité, je vous remercie pour l'important travail que vous faites.
    Je m'appelle Bill Woodburn, et je suis accompagné aujourd'hui de mon bon ami et collègue, Wendall Brown. Nous représentons tous deux le Fonds de commémoration de la marine canadienne. Nous sommes tous deux officiers de marine à la retraite, et je dois ajouter que nous sommes de fiers anciens combattants.
    Le Fonds est un organisme de bienfaisance canadien indépendant et sans but lucratif, administré par des bénévoles. Notre seul et unique mandat est d'assurer la préservation à long terme du NCSM Sackville tout au long du XXIe siècle et au-delà, et de rendre hommage à ceux qui ont servi ou qui continuent de servir en mer.
    Sackville est la dernière corvette de la Seconde Guerre mondiale. Elle a été reconnue par le gouvernement du Canada comme monument commémoratif de la Marine canadienne et lieu historique national.
    Chaque année, le premier dimanche de mai, nous commémorons la bataille de l'Atlantique, la plus longue bataille ininterrompue de toute la guerre. Selon sir Winston Churchill, c'est la seule bataille que nous ne pouvions pas nous permettre de perdre. La marine n'a pas été la seule concernée, car il a fallu monter une opération monumentale pour sauver le monde libre. Cette bataille a forcé notre pays à se transformer et à devenir un pays industriel indépendant occupant une place importante parmi ses alliés.
    Sackville n'est pas seulement un navire historique ou un monument naval; c'est un symbole concret et durable de l'un des plus grands accomplissements de notre pays. À mon avis, nous ne serions pas ici aujourd'hui si ce n'avait été de tout ce que représente le NCSM Sackville. Voilà ce que ce navire signifie pour le Canada.
    Plus de 4 400 marins militaires, aviateurs et marins marchands canadiens ont péri dans la bataille de l'Atlantique. Notre marine est passée de 6 à 373 navires. Des 269 corvettes construites dans le monde pour l'effort de guerre, 123 l'ont été ici, au Canada, dans des chantiers navals canadiens des deux côtes.
    L'importance mondiale du Sackville en tant que dernier navire du genre a été récemment confirmée par son apparition, grâce à la technologie moderne, dans le film Greyhound de Netflix, promu par Tom Hanks.
    Les équipages des corvettes canadiennes, qui portaient toutes des noms de villes et de villages canadiens, étaient composés d'hommes de toutes les provinces et de tous les horizons. Ils ont tous vécu une interminable mission de convoyage dans l'Atlantique Nord, dans des conditions imaginables. Le Sackville a servi durant tout ce temps et a été le témoin des épreuves et des horreurs vécues par les Canadiens en mer. Cette année marque le 80e anniversaire de la mise en service du Sackville.
    Notre fonds compte environ 1 000 membres répartis dans toutes les provinces, aux États-Unis et en Europe. Nos membres sont des militaires d'active, des anciens combattants et des civils. Le Sackville existe aujourd'hui grâce aux efforts et au dévouement de nos bénévoles.
    Nous sommes principalement financés grâce à des dons et au soutien continu de nos membres. Chaque été, nous ouvrons le navire aux visiteurs des environs d'Halifax. Depuis plusieurs années, le Sackville fait partie des principales destinations touristiques de la ville, en raison de son importance historique et commémorative unique.
    Cependant, la collaboration est ce qu'il y a de plus important dans notre survie. Il ne fait aucun doute que l'appui inébranlable de la Marine royale canadienne a été déterminant. Plus récemment, nous nous sommes associés à des organismes aux vues similaires pour créer un district du patrimoine maritime dans le secteur riverain d'Halifax. De plus, nous avons conclu une entente avec la MRC et Patrimoine Canada pour contribuer à la conservation du navire, et nous avons profité d'une entente officielle avec le gouvernement canadien pour financer d'importants travaux de radoub qui, je suis heureux de le dire, seront terminés d'ici quelques jours.
    En corrigeant ainsi ce qui était une importante détérioration de la coque, nous avons ajouté une dizaine d'années à la durée de vie du Sackville. Cependant, la préservation du navire à long terme exigera éventuellement le remplacement complet de la coque.
    Nous estimons le coût de cette opération à environ 12 millions de dollars. La collecte de ces fonds sera le principal objectif du Fonds dans les années à venir. Ce faisant, nous avons hâte de travailler avec les trois ordres de gouvernement et nous aurons besoin de leur soutien et de leurs conseils pour atteindre cet objectif essentiel.
    Le NCSM Sackville nous rappelle ce que les Canadiens de tous les horizons, de toutes les régions du pays, peuvent faire en période de grands dangers. Tant pour les constructeurs, les chantiers navals, les marins qui ont servi ou les familles qui ont été durement touchées, le Sackville demeure un pilier de notre histoire nationale collective. Nous devons faire en sorte que cet héritage perdure.

  (1600)  

     J'ajouterais que nous serions heureux d'inviter chacun de vous à bord du Sackville, à votre convenance s'il vous arrive de passer par Halifax.
    Merci beaucoup.
    Merci beaucoup, monsieur Woodburn. Je vous assure que nous espérons tous avec impatience voir le jour où nous pourrons profiter de votre invitation.
    Monsieur Harris, vous avez cinq minutes.
     Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du Comité, je vous remercie de m'avoir invité à prendre la parole devant vous aujourd'hui. J'apprécie également votre travail.
    Je suis Steve Harris, historien en chef et directeur par intérim de la Direction, Histoire et patrimoine, de la Défense nationale, où j'ai travaillé pendant 42 ans. Je représente la Direction, Histoire et patrimoine, qui occupe une place unique au sein de la Défense nationale pour maintenir et préserver l'histoire et le patrimoine militaires, ainsi que pour soutenir le ministère des Anciens Combattants dans ses activités commémoratives.
    Je suis également coprésident du Groupe consultatif sur la commémoration du ministre des Anciens Combattants, poste que j'occupe depuis cinq ans. En tant que tel, j'aborde cette discussion sur la commémoration au XXIe siècle avec un prisme historique et beaucoup de connaissances institutionnelles sur le sujet.
    Bien que le ministère des Anciens Combattants ait le mandat de commémorer le service et le sacrifice des marins, des soldats et des aviateurs canadiens dans les guerres et conflits passés, le rôle du ministère de la Défense nationale est d'appuyer la planification et l'exécution de ses activités commémoratives, y compris une stratégie de commémoration à long terme.
    La Défense nationale et la Direction de l'histoire et du patrimoine continuent d'appuyer ACC dans sa commémoration de ces courageux Canadiens et Canadiennes qui ont servi le Canada dans un conflit armé, en mettant particulièrement l'accent au cours des années passées sur les Première et Seconde guerres mondiales.
    Je vous remercie de votre temps, et j'ai hâte de répondre à vos questions.
    Merci beaucoup, monsieur Harris.
    Je crois que c'est M. Soulière qui fera la déclaration préliminaire.
     Merci d'avoir invité l'Association nationale des retraités fédéraux à prendre la parole aujourd'hui. Je me joins à vous depuis Ottawa, en Ontario, qui est le territoire traditionnel et non cédé des Algonquins Anishinabe.
    L'Association nationale des retraités fédéraux représente 175 000 membres, dont 60 000 anciens combattants. Il s'agit de la plus grande organisation nationale de défense des droits représentant des membres actifs et à la retraite de la fonction publique fédérale, des Forces armées canadiennes, de la GRC, des juges de nomination fédérale à la retraite, ainsi que des conjoints ou conjointes et survivants. Nous sommes heureux de coprésider le Réseau de recherche et d’engagement des vétéranes, ou RREV, qui vise à obtenir des résultats en matière d'équité dans la vie des militaires et des anciens combattants, hommes et femmes.
    Mon collègue, Sayward Montague, et moi-même sommes heureux de vous parler aujourd'hui de la vision à long terme de la commémoration et du souvenir de tous les anciens combattants canadiens.
    Le Canada a été un chef de file en matière de commémoration du souvenir grâce aux excellents programmes élaborés et administrés par Anciens Combattants Canada, tant ici qu'à l'étranger, et aux efforts des organisations d'anciens combattants, dont bon nombre sont dirigées par des bénévoles. Toute commémoration doit forcément s'appuyer sur une compréhension et un objectif communs, et nous devons nous poser certaines questions. Qui et quoi commémorons-nous et comment? Qui ou quoi a-t-on négligé de commémorer? Pourquoi cela? Comment la commémoration peut-elle être plus inclusive et plus représentative de ceux qui ont servi?
    Les commémorations du souvenir devraient être le reflet des Forces armées canadiennes et de la GRC, que ce soit la composition des forces, leur travail ou les défis auxquels font face ceux qui ont servi.
    Tous les postes militaires ont été ouverts aux femmes en 1989. Aujourd'hui, elles constituent plus de 16 % des effectifs militaires. L'objectif à atteindre est de 25 % d'ici 2026. Nous savons que les femmes militaires ne bénéficient pas des mêmes conditions que les hommes sur les plans de la santé et autres pendant et après leur service. Les derniers mois ont été difficiles pour les anciennes combattantes qui ont vécu des situations d'inconduite sexuelle militaire et subi des traumatismes militaires sexuels.
    Il faudrait examiner de plus près si les gens s'identifient comme anciens combattants et de quelle manière ils le font éventuellement. Des recherches effectuées aux États-Unis ont révélé que les femmes militaires sont moins susceptibles que les hommes de s'auto-identifier comme vétéranes, qu'elles ne recherchent peut-être pas les avantages, les services et le soutien auxquels elles ont droit, et qu'elles sont peut-être moins visibles dans les honneurs que nous rendons aux vétérans. Par ailleurs, la reconnaissance a une incidence positive sur le bien-être des vétérans. Ces constats doivent nous amener à changer la manière de planifier les événements commémoratifs à long terme. Il importe de mieux comprendre l'expérience, les besoins et les attentes des femmes militaires et anciennes combattantes.
    Le plan stratégique de commémoration décennal du ministère élargira la portée des programmes commémoratifs et de la reconnaissance de tous ceux qui ont servi, et mettra en lumière la dimension diversité dans l'histoire militaire du Canada, notamment pour ce qui est de notre rôle dans la promotion de la paix et de la sécurité sur la scène mondiale. Le ministère s'est engagé à appliquer l'ACS+ dans les commémorations et à veiller à ce que les programmes, les politiques et les initiatives soient impartiaux. Les vétéranes devraient savoir ce que cela veut dire.
    Anciens Combattants Canada a pris des mesures pour veiller à ce que les commémorations reflètent mieux le rôle des femmes en service et des vétéranes au moyen de profils, d'entrevues, de matériel éducatif et d'un plan de leçon. Les récits des vétéranes sont plus présents dans notre conscience collective. Le ministère — par l'entremise des tribunes annuelles des vétéranes et d'autres modes d'interrelation des parties prenantes — a l'occasion d'établir des liens avec des femmes militaires d'active ou d'anciennes combattantes pour voir à quoi devraient ressembler les commémorations des temps modernes. Le gouvernement doit continuer de rendre compte de ses progrès à l'égard de ces objectifs et de corriger les partis pris systémiques ainsi que les lacunes en matière de recherche, éléments qui contribuent aux commémorations et qui en font aussi partie intégrante.

  (1605)  

     Enfin, il existe un lien entre le respect, l'identité des anciens combattants et la commémoration. Le respect est aussi fondamental que de veiller à ce que chaque ancien combattant reçoive des soins et bénéficie du respect et de la dignité qu'il mérite et auxquels il a droit après des années passées au service du Canada.
    Des problèmes comme la trahison institutionnelle et les blessures morales contribuent à une perte de confiance, ont une incidence sur la santé et le bien-être des anciens combattants et peuvent influer sur la décision des anciens combattants de ne pas s'identifier comme tels.
    Sans ces éléments essentiels de respect et de bien-être, les commémorations auront quelque chose de faux. Les plans de commémoration du Canada doivent refléter la grande diversité de nos communautés de militaires et d'anciens combattants, particulièrement pendant la Semaine des vétérans et lors des cérémonies du jour du Souvenir. Tous les anciens combattants doivent être représentés équitablement à ces événements nationaux importants.
    La participation des vétéranes et des organisations qui les représentent est essentielle à la mission. Il convient effectivement d'appliquer l'optique de l'ACS+ à la commémoration, depuis la perception qu'ont les Canadiens de l'identité des anciens combattants jusqu'aux activités nationales ou mondiales.
    Il faudrait explorer de nouvelles façons de souligner et d'honorer les contributions des femmes militaires et des vétéranes du Canada, notamment sous la forme d'une journée consacrée aux femmes militaires et aux vétéranes.
    Nous devons d'offrir des commémorations efficaces et pertinentes à tous les anciens combattants. Il faut y voir l'occasion de commémorer ce que nous sommes vraiment en tant que Canadiens. L'histoire que nous racontons doit inclure l'expérience des femmes militaires et des vétéranes, ainsi que leur contribution aux Forces armées canadiennes, à la GRC et à la paix et à la sécurité au pays et partout dans le monde.
    Merci.
    Merci beaucoup, monsieur Soulière.
    C'est maintenant au tour de M. Gregory, pour cinq minutes.

  (1610)  

     Merci, monsieur le président.
    Je m'appelle Steve Gregory. Je suis propriétaire d'une entreprise à Montréal et colonel honoraire du 2e Régiment d'artillerie de campagne, Artillerie royale canadienne. Avant de commencer, je dois vous expliquer pourquoi les commémorations sont si importantes pour moi.
     En 2006, mon fils de 10 ans, Erik, a présenté un projet d'histoire sur une bataille en Sicile. Il a eu beaucoup de mal à le terminer. Nous n'avons trouvé que peu de ressources. Rien n'existait sur l'action des Canadiens en Sicile en 1943. Par hasard, un an plus tard, j'ai visité un musée en Sicile consacré au débarquement des alliés, et j'ai été déçu. Je n'y ai vu aucune exposition canadienne, seulement une affiche et quelques petits artefacts qu'on aurait pu réunir dans une tasse. Plus tard ce jour-là, j'ai visité notre cimetière à Agira, non loin de là, et le registre portait les noms de quatre visiteurs depuis le début de cette année-là. Nous étions le 1er août.
    Ces expériences m'ont donné l'impression que nous avions abandonné la mémoire de nos disparus, que nous avions négligé d'honorer leur sacrifice. En tant que civil, cela m'a frappé. Motivé par cette perception d'injustice, j'ai alors lancé les opérations Husky 2013 et 2018 consistant à organiser de grandes commémorations civiles en Sicile.
    C'est animé de cette profonde conviction que je vous fais part de trois projets en cours.
    La Marche du souvenir et de la paix se déroule sur un sentier pédestre balisé de 325 kilomètres qui longe le chemin suivi par les troupes de la 1re Division du Canada, de la zone d'atterrissage des parachutistes, à Pachino, jusqu'à Adrano. Elle fait aussi l'objet d'un livre d'histoire et d'un guide pédestre. Nous espérons qu'elle amènera les Siciliens à participer aux commémorations et qu'elle créera un moteur économique apte à stimuler cette participation. À l'instar du chemin de Compostelle, nous espérons que cette marche sera connue sous le nom de « chemin canadien ».
    Le deuxième projet est une invitation lancée aux jeunes de 10e, 11e et 12e année à discuter de ce qui rend la paix possible. Ce projet est appelé Forum international sur la paix, la sécurité et la prospérité. Le prochain événement annuel et le concours d'études se dérouleront en distanciel et sur place en Sicile. Le forum vise à réunir des élèves du secondaire et des élèves-officiers ainsi que des universitaires qui pour explorer le rôle de nos militaires et des institutions publiques et judiciaires en matière d'établissement des conditions de paix durables, et, en fin de compte, de l'instauration de la prospérité dans la société.
    Le troisième projet est l'opération Husky qui, en 2023 et en 2028, commémorera l'anniversaire du débarquement des Alliés en Sicile. Ici, nous rendrons hommage à nos disparus et célébrerons la renaissance d'une société paisible, sûre et prospère. Comme par le passé, un groupe de Canadiens parcourront le sentier de 325 kilomètres en 20 jours.
    Deux impératifs stratégiques guident mon équipe, et j'espère qu'ils vous seront utiles.
    Premièrement, nous mettons l'accent sur la mobilisation et l'éducation de nos jeunes. Le forum représente un lien essentiel avec la communauté en regard de ce qu'a permis tant de morts: la paix. Dans le cadre de ce forum, les étudiants peuvent échanger des points de vue sur l'histoire et sur le présent avec des élèves-officiers, des universitaires et des dirigeants civils de démocraties libérales occidentales qui se préparent à combattre ou qui ont combattu pour la paix. Nous lançons le concours dans plus de 11 000 écoles secondaires canadiennes. Nous sommes convaincus que nos jeunes ont besoin de sentir que l'espace commémoratif leur appartient et qu'ils peuvent participer délibérément en tant que véritables partenaires aux événements commémoratifs. Il faut leur ouvrir la porte plus grande.
    Deuxièmement, nous collaborons avec des organisations civiles au pays et à l'étranger et nous nous appuyons sur elles. Nous sommes en train de produire d'excellents documents éducatifs, des programmes intéressants et des activités extraordinaires pour les jeunes. Si vous faites une recherche rapide, vous trouverez au moins sept organismes privés et sans but lucratif qui distribuent des programmes commémoratifs dans des écoles secondaires canadiennes, et c'est en plus de ce que fait ACC.
    Parfois, les services se chevauchent et se disputent même des ressources précieuses. Bien que la concurrence soit évidemment excellente pour l'innovation et l'efficacité, un manque de collaboration peut être cause de confusion et de gaspillage. Jusqu'à ce jour, nous avons établi des partenariats avec sept organismes, dont la 3rd Battery of Montreal Artillery, Valour Canada, l'Institut de la Conférence des associations de la défense, l'Académie canadienne de la défense, l'état-major général de l'armée italienne, le Global Peace Institute et l'Institute for Economics and Peace d'Australie.

  (1615)  

     Cet accent mis sur la collaboration est encore plus important à l'étranger. En pleine pandémie, le 11 novembre dernier, un groupe de civils italiens a visité bon nombre des 21 cimetières, déposant des couronnes en notre nom. Ces relations précieuses ne sont possibles que si les Canadiens maintiennent le lien et ne se contentent pas de faire une apparition tous les cinq ans.
    Il faut que la stratégie de commémoration pour le XXIe siècle, faisant fond sur le travail des bénévoles civils et des partenariats public-privé, soit délibérée et pérenne. La collaboration, combinée à la diversité et à l'inclusion véritable de nos jeunes, devrait, dans la mesure du possible, faire appel à des partenaires locaux pour mobiliser nos jeunes et inspirer un esprit de commémoration.
    J'espère qu'ACC pourra jouer un rôle central dans l'organisation et l'administration de ces initiatives de civils. Ces gens-là sont très nombreux et ce sont tous de grands citoyens qui essaient de faire ce qu'il faut.
    Merci.
    Merci beaucoup, monsieur.
    Le dernier, mais non le moindre, sera M. Sampson qui a la parole pour cinq minutes.
     Monsieur le président, madame Wagantall et distingués membres du Comité, je vous remercie de m'avoir invité à comparaître devant vous aujourd'hui dans le cadre de votre étude sur la commémoration.
    Je me propose de vous parler de la politique actuelle du gouvernement du Canada qui répartit les anciens combattants du service actif en deux catégories et de la façon dont cette répartition s'applique à la commémoration.
    Tout d'abord, l'article 33 de la Loi sur la défense nationale, qui s'applique au service, et l'article 31, qui s'applique au service actif, séparent légalement les anciens combattants en deux catégories. Chaque jour, quelque 90 à 95 % des militaires font leur service dans des conditions normales, tandis que 5 à 10 % d'entre eux servent au sein de l'ONU, de l'OTAN ou d'autres corps étrangers, dans des conditions de travail dangereuses qui sont habituellement contraires aux droits et libertés garantis par la Charte. Le personnel en service actif reçoit des directives juridiques d'un officier canadien l'enjoignant d'exécuter des tâches dangereuses, et s'il ne s'y conforme pas, il peut être accusé en vertu de la Loi sur la défense nationale.
    Monsieur le président, je vous renvoie maintenant au document de politique 1447 d'Anciens Combattants Canada, qui est un document essentiel définissant les catégories de service en temps de guerre et de service spécial, et divisant en outre les Canadiens en deux catégories distinctes au titre des commémorations et, de façon plus intrinsèque, des assurances. À mon avis, le document 1447 d'ACC est probablement l'un des documents de politique les plus répugnants en vigueur au Canada. Voici pourquoi.
    La catégorie du service en temps de guerre, qui est la plus élevée, concerne exclusivement les anciens combattants de la Première Guerre mondiale, de la Seconde Guerre mondiale et de la guerre de Corée. Les anciens combattants du temps de guerre ou les anciens combattants d'élite ont reçu la majorité des fonds commémoratifs et, avec la GRC, les anciens combattants du temps de guerre bénéficient des dispositions de la Loi sur les pensions pour les blessures reçues en service actif, en vertu donc du principal régime d'assurance du Canada. La catégorie du temps de guerre s'applique aussi à tous les détenteurs de la Croix de Victoria remise par le Canada.
    La deuxième catégorie de ce document répugnant, le document 1447, est celle des services spéciaux, c'est-à-dire celle concernant les anciens combattants de toutes les missions de l'ONU, de l'OTAN ou d'autres missions de service actif depuis 1953. Si l'on remettait une carte de récompense aux anciens combattants, le service spécial correspondrait à la catégorie à rabais qui n'aurait reçu que peu ou pas de financement pour commémorer ses membres au cours des 50 dernières années. Aucun service spécial ne permet d'obtenir la Croix de Victoria. Les anciens combattants de cette catégorie à rabais ayant été blessés en service actif reçoivent 40 % de l'assurance-blessure accordée à leurs homologues de la catégorie du service en temps de guerre et de la GRC.
    Monsieur Samson, la semaine dernière, vous avez posé une question au sujet de la guerre en Afghanistan et des problèmes auxquels se heurte l'un de vos électeurs. Le document de politique 1447 d'ACC indique clairement que, pour le Canada, l'Afghanistan n'était pas une guerre, mais que les vétérans blessés lors de cette mission méritent d'être traités comme les autres sur le plan commémoratif et d'être indemnisés de façon équitable, mais nous savons que ce n'est pas vrai.
    Mesdames et messieurs les députés, je vous demande de consulter les documents BP 303 et PRB 00-06 de la Bibliothèque du Parlement pour comprendre pourquoi l'Afghanistan n'est pas considéré comme une guerre dans la politique canadienne et pour en apprendre beaucoup sur vos responsabilités en tant que députés, en vertu de l'article 32 de la Loi sur la défense nationale, quand le gouvernement décide d'engager des Canadiens en service actif.
    Pour préciser mon propos, je vais vous donner un exemple. Si un ancien combattant de la guerre de Corée, un membre de la GRC et un vétéran du Rwanda soumettent une demande de prestations pour TSPT à Anciens Combattants Canada, le vétéran du Rwanda recevra 40 % des prestations pour blessure accordées aux autres anciens combattants du service actif. Les chiffres ne mentent pas. Les législatures qui se sont succédé n'ont pas respecté ni traité de façon égale tous les anciens combattants canadiens du service actif. Et cela en dépit des rapports du directeur parlementaire du budget et des préoccupations soulevées par la génération actuelle de vétérans.
    En tant qu'adjudant à la retraite et vétéran du service actif ayant participé à sept missions différentes, il m'est difficile de commémorer des missions la tête haute quand je sais que les soldats et les caporaux sont incapables de joindre les deux bouts, simplement à cause du document 1447 d'Anciens Combattants Canada.

  (1620)  

     Les balles, les bombes, les maladies et les traumatismes ne font pas de discrimination, mais le Canada, lui, fait de la discrimination à l'égard des actuels vétérans du service spécial en ce qui concerne la commémoration et, par essence, les indemnités pour blessures.
    Je recommanderais que le document 1447 soit retiré et que les vétérans du service actif soient traités sur un pied d'égalité en ce qui concerne la commémoration et l'assurance en vertu de la Loi sur les pensions. Les missions devraient être nommées et classées de façon appropriée, ce qui donnerait lieu à des niveaux de commémoration, de soins, de transparence et de responsabilisation plus adaptés pour les Canadiens, pour les vétérans et pour le gouvernement.
    Mesdames et messieurs les députés, j'apprécie votre travail. Vous faites un travail fantastique, mais tant que le Canada ne commencera pas à s'occuper de ses vétérans blessés en service actif pour obtenir l'égalité, il sera difficile d'encourager des gens comme moi à commémorer ouvertement les missions.
    Merci beaucoup du temps que vous nous consacrez aujourd'hui.
    Merci, monsieur Sampson.
    Pour la première série de questions, la parole va à Mme Wagantall pour six minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci à vous tous pour ce que vous faites et pour votre service à la nation, ainsi que pour les commémorations auxquelles vous prenez part. C'est clairement une passion pour vous tous, et c'est très important pour moi aussi.
    Bonjour, monsieur Sampson. Je suis heureuse de vous revoir.
     Je fais partie des péquins, des civils de cette équipe qui ont trouvé les anciens combattants très aimables dans la façon dont ils nous ont révélé leur vie et tout ce qu'ils ont vécu. C'est d'ailleurs ce que vient de faire M. Sampson en nous parlant de ses années de service et du rôle qu'il joue.
    Monsieur Sampson, je vais simplement revenir sur ce que vous avez indiqué à la page 3 du document que vous nous avez remis. Vous avez renvoyé les membres de ce comité à deux documents que la Bibliothèque du Parlement pourrait nous fournir pour en apprendre davantage sur nos responsabilités et les questions entourant la guerre en Afghanistan — désolée, la mission en Afghanistan... car ce n'était pas une guerre. J'aimerais demander à notre greffier ou à notre analyste de nous fournir ces renseignements. Il semble que c'est quelque chose qui pourrait certainement nous être utile. Si c'est possible, je l'apprécierais.
    Monsieur Sampson, pourriez-vous nous en dire davantage sur l'article 32 de la Loi sur la défense nationale et nous expliquer pourquoi vous, en tant qu'ancien combattant, estimez que ce projet de loi est important pour les anciens combattants et pour la commémoration.
    Merci beaucoup de la question, madame Wagantall. Je suis ravi de vous revoir également. Merci beaucoup de l'invitation.
    L'intervention au Rwanda remonte à 1994. L'article 32 de la Loi sur la défense nationale exige que les députés siègent à la Chambre des communes « dans les 10 jours » pour discuter ouvertement, de façon transparente et démocratique de la mission de « service actif » que le Canada entend entreprendre. Du point de vue de la reddition de comptes, les députés... remontons à 1991, quand le Canada a pris part à la guerre du Golfe. Des députés sont venus nous rendre visite pendant la guerre du Golfe. Ils ont discuté de la guerre du Golfe pendant 10 jours afin de déterminer si le Canada devait ou non y participer, mais ils ont aussi posé des questions pour s'assurer que les aspects fondamentaux étaient couverts: qui serait déployé; combien d'unités y aurait-il; quand arriveraient-elles; quels étaient les éléments de sécurité et de sûreté à considérer; quel chapitre des Nations unies s'appliquait et ainsi de suite?
    Aujourd'hui, le gouvernement du Canada n'observe plus l'article 32, parce qu'il pense que ce n'est pas pertinent. Je ne sais pas trop comment fonctionne la loi fédérale, mais je crois comprendre que l'article 32 a force de loi, et qu'il exige — c'est presque obligatoire — que vous discutiez de nos droits et libertés au regard de la Charte et de la façon dont ces droits et libertés seront touchés par le service actif dans lequel le Canada nous engage.
    Aujourd'hui, le gouvernement libéral aime prendre toutes ses décisions en secret. Toutefois, c'est le gouverneur en conseil qui s'occupe de la législation sur les services actifs, et c'est précisément pour cela que vous êtes tous censés siéger à la Chambre des communes pendant 10 jours pour en discuter.
    Nous avons essentiellement remis l'Europe en selle, en Lettonie, en Pologne, en Ukraine et dans la mer Baltique, et je ne pense pas que l'un d'entre vous ait participé à la formulation de dispositions relatives au service actif pour déterminer, entre autres, si c'était la meilleure chose pour le Canada ou pour nos troupes.
    L'article 32 se trouve dans le document BP-303. Il en parle abondamment, et je vous encourage tous à le lire. Vous allez trouver des renseignements très intéressants sur vos obligations.

  (1625)  

    Je vous en remercie.
    Comment, selon vous qui êtes un vétéran, le Canada devrait-il faire participer la population aux commémorations? Je comprends un peu ce qui vous angoisse dans toute cette dynamique en raison de vos perceptions à l'égard de ceux qui ont servi depuis la guerre de Corée.
    Qu'auriez-vous à nous dire à ce sujet?
    J'aimerais dire qu'il ne faut pas réinventer la roue. Je propose que nous nous tournions vers nos partenaires au sein du Commonwealth. Prenons l'Australie, par exemple, qui entretient des rapports très fructueux avec ses anciens combattants. Prenons aussi la Nouvelle-Zélande. Chaque année, ces deux pays organisent un événement appelé Anzac Day. À cette occasion, les anciens combattants peuvent, un jour par an, le matin à l'aube, rassembler tout le monde pour un défilé commémoratif des vétérans. Cela favorise la camaraderie. L'événement favorise des commémorations saines. Chez nous, il favorisait des relations positives avec les Canadiens. Nous ferions cela à l'aube et personne ne risquerait de se retrouver au beau milieu d'un défilé en pleine heure de pointe, et ainsi de suite.
    Les anciens combattants peuvent ainsi se rassembler. Je peux quasiment vous garantir que, de nos jours, les vétérans ne se rassemblent pas pour commémorer, à moins que ce soit pour un événement qui repose sur l'esprit de camaraderie. Dans mon cas, par exemple, la seule chose qui va me faire sortir de ma chaise, ce sont mes amis, mes copains et mes frères et sœurs d'armes.
    Si nous faisons quelque chose de ce genre, si nous commençons à regarder ce que d'autres pays ont fait, je pense que nous économiserons beaucoup de temps et d'argent. Je pense que nous pourrions nous inspirer de beaucoup de bonnes idées d'autres pays qui trouveraient un écho auprès des anciens combattants et des Canadiens ici.
    Puis-je vous poser une question au sujet du monument commémoratif de l'Afghanistan? Il s'agit d'un plan de 10 ans et, bien sûr, il a fallu beaucoup de temps pour aboutir. Les anciens combattants me disent que c'est très important, qu'ils ont un endroit où se rencontrer.
    Est-ce le genre de choses dont vous parlez?
    Veuillez répondre très brièvement, s'il vous plaît.
    En fait, je n'ai pas de commentaire à faire à ce sujet, madame Wagantall. Je ne suis pas vraiment certain du plan pour le Monument commémoratif national de la mission du Canada en Afghanistan, mais je me risquerai à dire que, pour tous les anciens combattants d'Afghanistan, ce monument serait presque un endroit sacré où nous aimerions aller commémorer nos morts.
    Merci, monsieur.
    La parole est maintenant à M. Fillmore, pour six minutes.
    Merci, monsieur le président, et merci infiniment à nos témoins de s'être joints à nous aujourd'hui. Vous nous avez tous présenté un point de vue unique et intéressant, et je tiens à vous en remercier.
    J'ai le grand privilège de représenter Halifax, le port d'attache de la Marine de la côte Est du Canada, et le port d'attache du NCSM Sackville. Vous ne serez donc pas surpris si je pose mes questions au capitaine de vaisseau Woodburn et au capitaine de frégate Brown.
    Commander Brown, je suis heureux de vous voir. Nous nous voyons habituellement lors des commémorations de la bataille de l'Atlantique, au Musée maritime de l'Atlantique. Nous n'avons pas pu le faire deux années de suite. Je me réjouis à l'idée de vous rencontrer très bientôt en personne quand nous serons sortis de ce marasme.
    Comme vous le savez, j'ai eu de nombreuses fois le privilège de monter à bord du Sackville et d'aller dans la salle des opérations avec feu le grand Jim Reddy, pour l'entendre chanter l'histoire du Sackville et le rôle de ce bâtiment au sein de la nation canadienne. C'est une histoire remarquable qu'il faut absolument préserver et entretenir. C'est vraiment ce dont je veux vous parler.
    Je demanderai à chacun de vous, capitaine Woodburn et commander Brown, d'utiliser le temps dont je dispose pour mes questions à nous parler des besoins du Sackville et de ce qui, selon vous, peut et devrait être fait pour préserver la corvette, afin qu'elle puisse demeurer la dernière corvette canadienne encore intacte.

  (1630)  

     D'accord, je vais commencer, monsieur. Merci beaucoup. Je me disais bien que vous nous poseriez peut-être des questions comme celle-ci.
    La première chose, c'est l'aide du gouvernement, surtout pour un groupe comme le nôtre, qui est très indépendant et qui est notamment présent dans les médias sociaux. La crise de la COVID nous a vraiment incités à nous tourner vers les médias sociaux, mais il me semble qu'avec le pouvoir et la vigueur d'une organisation comme Anciens Combattants Canada — pas seulement pour nous, mais pour beaucoup d'organisations semblables à la nôtre —, nous pourrions organiser de bien meilleures commémorations, et mettre plus régulièrement en valeur nos différentes entités aux yeux des Canadiens, plutôt que de nous contenter du jour du Souvenir ou d'événements spéciaux.
    Dimanche dernier, j'ai assisté à la cérémonie de commémoration de la bataille de l'Atlantique. Nous étions six pour commémorer la bataille et déposer une gerbe, tandis qu'habituellement une foule bruyante se presse pour assister à un véritable déploiement de pompe en souvenir de cette bataille.
    Je pense que nous pourrions avoir besoin d'aide pour élaborer de meilleures stratégies d'utilisation des médias sociaux.
    J'ai aussi pensé que le versement d'incitatifs au secteur privé pour l'amener à contribuer aux initiatives commémoratives pourrait être une façon d'améliorer ce que nous avons. Nous avons de la difficulté à réunir des fonds, car ce sont habituellement des Canadiens ordinaires qui nous donnent de l'argent et nous aident, parce qu'ils croient dans la cause et dans ce que nous représentons.
    Enfin, je dirai que je suis très intrigué par ce que le Royaume-Uni a fait dans le cas de navires d'importance historique comme le HMS Victory et le HMS Warrior. Les Britanniques ont transformé la loterie nationale en un système de contribution à des projets patrimoniaux. La survie du Victory et du Warrior a pu être assurée grâce à cela. C'est une excellente stratégie, mais il nous faudrait beaucoup de travail pour transformer la loterie actuelle.
    Voilà quelques-unes des idées qui nous seraient certainement utiles.
    Commander Brown, vous voudrez peut-être ajouter quelque chose.
    Je pense que ceux d'entre nous qui participent activement aux activités du Sackville poursuivent en fait deux objectifs. L'un est la préservation du navire et l'autre, comme l'a dit le capitaine Woodburn, sa promotion dans le domaine public. C'est beaucoup plus qu'un monument commémoratif statique. Il s'agit d'un monument commémoratif vivant où l'on peut rassembler les anciens combattants ou, plus particulièrement de nos jours, leurs descendants qui peuvent ainsi chercher à se représenter ce qu'ont pu vivre leurs ancêtres.
    De telles visites, très émotives pour certains, ont lieu tous les jours. Au départ, les gens ne savent pas forcément grand-chose parce que, comme vous le savez, les anciens combattants de la Seconde Guerre mondiale étaient réticents à parler de ce qu'ils avaient vécu. Les gens se présentent avec des fragments d'informations ou de phrases que leurs ancêtres leur ont communiqués, et ils essaient, en marchant sur les traces de leurs ancêtres, de reconstituer ce qu'eux ont pu voir.
    Pour pérenniser le navire, comme l'a dit le capitaine Woodburn, nous aurons besoin d'un groupe de bénévoles. Il serait très coûteux de refaire la coque du navire, pour la renforcer sous la ligne de flottaison, et nous devrons probablement le faire d'ici 10 ans. Nous avons besoin de fonds pour cela.
    Avec l'ère électronique, nous pouvons certainement améliorer notre présentation en montrant, par exemple, un moteur en marche et la façon dont les gens travaillaient à leurs postes, et ainsi de suite, simplement pour améliorer notre présentation.

  (1635)  

    Merci.
    Je suis désolé de devoir vous interrompre.
    Merci à vous deux.
    La parole est maintenant à M. Desilets, pour six minutes.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Je remercie tous nos témoins de leur présence, et particulièrement des loyaux services qu'ils ont rendus au pays, dans plusieurs cas.
    Jusqu'à maintenant, la qualité de vos témoignages m'impressionne.
    Ma première question s'adresse à M. Soulière.
    Ce que vous avez dit m'a marqué et je suis resté accroché là-dessus depuis quelques minutes. Vous avez parlé de reconnaissance vis-à-vis des femmes, de non-respect à leur endroit et d'une grande proportion de femmes qui ne se retrouvent pas dans ce milieu.
    Monsieur Soulière, vous est-il possible de préciser encore votre pensée, s'il vous plaît?
     Je peux le faire, mais je vais demander à Mme Montague de compléter, puisque c'est elle qui a une connaissance plus approfondie du dossier.
    Ce sera avec plaisir.
    On ne peut pas englober tous les éléments du sujet. Par conséquent, nous avons donc décidé, comme association, de mettre l'accent sur les femmes dans les Forces armées canadiennes et dans la Gendarmerie royale du Canada. C'est pourquoi nous avons créé ce comité avec un groupe d'autres femmes concernées.
    Madame Montague, voulez-vous poursuivre?

[Traduction]

    Je vais répondre en mentionnant les statistiques qui ont circulé sur les États-Unis. Nous savons que les Américains font des recherches sur la façon dont les femmes s'identifient en tant que vétéranes, cela dans un contexte culturel et selon une optique culturelle sans doute bien différents.
    Il y a du travail à faire dans le contexte canadien afin de mieux comprendre les militaires et les anciens combattants canadiens. ACC a fait des progrès à cet égard, mais il reste certainement beaucoup de chemin à faire, notamment pour ce qui est des questions de genre et d'autres aspects que nous appliquons aux activités de commémoration et à l'étude de notre histoire dans le contexte militaire.
    Je m'en tiendrai à cela et je vais revenir aux mémoires prébudgétaires et aux autres témoignages que nous avons présentés au Comité au sujet de l'étude sur les arriérés.
    Vous savez, quand il s'agit de transactions fondamentales avec des organisations, des ministères dont nous dépendons pour obtenir des avantages absolument nécessaires et difficiles à décrocher, et quand on a affaire à des anciens combattants qui attendent depuis plusieurs années des décisions et des jugements relatifs à leur genre, ce manque de respect prend une ampleur démesurée. Cela se transforme en facteur de distanciation par rapport à la culture, à la camaraderie et au lien avec la communauté qui est si particulier à l'armée. C'est malheureux quand cela se produit, mais c'est, encore une fois, une question fondamentale qui peut être réglée en portant une certaine attention aux détails, franchement.
    Je m'en tiendrai à cela, mais j'insisterais pour qu'on mette l'accent sur la recherche et l'amélioration des données.

[Français]

    Poursuivons sur ce que vous venez de dire.
    Y a-t-il des différences majeures entre les arriérés non réglés chez les femmes et chez les hommes, selon vous?

[Traduction]

    D'après les données que nous avons vues dans les rapports du ministère des Anciens Combattants au sujet de l'arriéré, nous savons que les délais d'attente sont plus longs pour les femmes. Je pourrais obtenir ces chiffres. Il y a aussi des différences, et vous les connaissez, monsieur Desilets, entre les demandes présentées par les anglophones et celles des francophones.
    Anciens Combattants Canada, et c'est tout à son honneur, a mis en place des solutions intéressantes pour vraiment s'attaquer à l'arriéré, après avoir déterminé qu'il existait effectivement des problèmes structurels ou systémiques qui en étaient la source.
    On pourrait faire le même effort quant aux demandes présentées par les femmes. En 2018, 42 % de celles-ci avaient attendu plus de 40 semaines pour une décision, alors que seulement 26 % des hommes avaient attendu aussi longtemps. Nous sommes au courant de cas demeurés sans réponse pendant 104 semaines, plus de deux années. On en sait moins sur l'expérience des anciennes agentes de la GRC dans le traitement de leurs demandes, mais pour ce que nous savons, nous avons demandé qu'on s'en occupe.

  (1640)  

[Français]

    Nous souhaitons tous faire disparaître ces arriérés. Nous sommes conscients qu'il y a une grande différence de traitement entre les francophones et les anglophones, et entre les femmes et les hommes. Vous le confirmez encore une fois.
    Quelles seraient vos recommandations pour se sortir de ce cercle vicieux?

[Traduction]

    Pour commencer, il faut investir dans la stratégie d'ACS+ et, ce qui me paraît le plus crucial, s'assurer que le ministère travaille tant rétroactivement que prospectivement et veiller à ce que l'argent consacré à la recherche sur les questions touchant les femmes militaires et ex-militaires soit affecté selon les principes d'équité envers les sexes et les genres dans la recherche. Il s'agit de mieux comprendre les données et de faire en sorte que ce qui ressort des plans d'ACS+, des plans ministériels et des lettres de mandat soit rapporté et réalisé.
    Merci.
    La parole est maintenant à Mme Blaney, pour six minutes.
    Tout d'abord, je tiens à remercier tous ceux d'entre vous qui ont servi sous les drapeaux. Merci d'avoir parlé de choses qu'il peut être difficile d'exprimer. Je vous en suis très reconnaissante.
    Je remercie aussi les civils ici présents qui, conscients de la grande importance de ces histoires, accomplissent le travail de soutien nécessaire pour les amplifier et trouver des occasions de laisser s'exprimer les voix qui souvent ne sont pas entendues.
    Je vous remercie tous de vos exposés.
    Je m'adresserai d'abord à M. Soulière et à Mme Montague.
    Vous avez dit dans votre déclaration préliminaire qu'il est très difficile pour nos anciens combattants et nos militaires de se sentir concernés par les événements commémoratifs s'ils ont l'impression d'être négligés sur le plan du soutien et des services qu'ils reçoivent. La commémoration devrait toujours, à mon sens, nous interpeller, nous amener à réfléchir et nous mettre au défi de faire mieux.
    Pour faire suite aux propos de M. Desilets, vous avez parlé des lacunes sur le plan de la diversité et de la nécessité d'intégrer le processus d'ACS+ dans l'examen des activités de commémoration. Pourriez-vous nous parler de ces lacunes? Qu'avez-vous entendu les gens dire de ces lacunes? Que pourrions-nous faire différemment? Qu'est-ce qu'ACC pourrait faire différemment pour s'attaquer à ce problème concernant les activités de commémoration?
    J'invite l'un ou l'autre d'entre vous à répondre.
    Je vais laisser à Mme Montague le soin de répondre à la question, puisqu'elle a travaillé avec le groupe à l'origine de toute cette information.
    Merci.
    Je vous remercie, madame Blaney, ainsi que monsieur Soulière.
    Pour ce qui est des plans de commémoration, nous sommes au courant du plan stratégique décennal de commémoration d'ACC. Il est inspiré par l'un des groupes consultatifs auquel a participé notre collègue, M. Harris.
    Ce que nous avons remarqué dans notre examen du mandat et du compte rendu des discussions du groupe consultatif, c'est que le sujet de l'équité ou de l'analyse comparative entre les sexes en matière de commémoration n'avait pas été soulevé. Le ministère a cerné le besoin d'une ACS+ dans ce domaine, mais il n'y a rien de précis sur ce que cela signifie exactement. Par conséquent, la façon de la réaliser constitue une nouvelle inconnue, et la compréhension de ce que cela signifiera est certainement lacunaire.
    Encore une fois, cela revient à l'analyse comparative entre les sexes et à l'utilisation de cet outil dans tout le travail qui se fait. Du bon travail est accompli par Anciens Combattants Canada et les organismes ici représentés qui le soutiennent.
    C'est l'une des principales lacunes. L'autre lacune concerne la recherche, et c'est une question difficile. Nous avons dit qu'il a été constaté aux États-Unis que les femmes sont moins enclines à s'identifier comme ex-militaires. Cela peut tenir à divers facteurs ou raisons, mais il est vraiment essentiel de comprendre pourquoi cela se produit. Il s'agit d'une situation malheureuse et dommageable en soi, mais qui peut laisser supposer que les anciennes militaires n'ont pas ou ne demandent pas accès aux prestations, aux services et au soutien dont elles ont besoin, si bien qu'il en résulte des inégalités qui font boule de neige. Nous devons nous assurer que les efforts et les fonds de recherche ciblent les lacunes en vue d'amener une meilleure compréhension de ce groupe et de mieux commémorer sa contribution.
     En dernier lieu, j'ajouterais qu'ACC a la possibilité d'établir des liens avec la communauté des anciennes militaires. Il a créé le bureau des femmes et de la communauté LGBTQ2 il y a maintenant deux ou trois ans. Il a été annoncé il y a un an en mars, mais il est sur pied depuis un peu plus longtemps. Il est extrêmement important de poursuivre cet effort. Il en va de même du forum des anciennes militaires, événement annuel qui bénéficie de l'engagement du ministre. Je crois que deux forums se sont tenus jusqu'à maintenant. Il est essentiel de pérenniser ce forum et d'y intégrer des activités commémoratives.

  (1645)  

    Je vous en remercie.
    Monsieur Gregory, vous avez parlé du travail qui se fait. La marche du souvenir et de la paix m'intéresse beaucoup. Comme j'ai pris des notes à la sauvette, je vous prie de m'excuser si j'ai oublié quelque chose.
    Pourriez-vous nous expliquer comment cela fonctionne? Est-ce un événement auquel nous invitons les Canadiens à participer en tant qu'activité commémorative? Je suis convaincue de son importance.
    Vous avez beaucoup parlé des jeunes. C'est quelque chose qui, bien sûr, m'intéresse beaucoup. Comment faire pour que la commémoration atteigne les jeunes? C'est le souvenir du passé qui nous pousse à agir dans le présent. C'est de la plus haute importance.
    Je suis tout à fait d'accord avec vous.
    Je suis profondément préoccupé par le fait que le monde de nos enfants, de nos jeunes, ne cesse de rétrécir. Dans la mesure où nous pouvons les aider à comprendre ce qui rend la paix possible et comment la profession des armes, nos militaires, hommes et femmes, y contribuent, je pense qu'ils viendront à apprécier différemment la nécessité de la commémoration.
    Nous ne cherchons pas à articuler nos communications avec les jeunes autour de nos militaires ou de la nécessité de commémorer leur sacrifice; cela passe difficilement dans les écoles secondaires. C'est un fait. Max Hastings a écrit, dans Bloomberg, au sujet du recul de l'enseignement de l'histoire militaire dans les universités américaines. C'est catastrophique. Au Canada, il y a très peu de programmes d'éducation provinciaux qui comprennent l'histoire militaire. À nos yeux, pour rejoindre les jeunes, il faut tenir une discussion sur ce qui rend possibles la paix ainsi que la prospérité et la productivité des sociétés démocratiques et sur le rôle que jouent les militaires dans ces sociétés.
    Nous espérons que la marche du souvenir et de la paix devienne un moteur économique qui suscitera l'engagement de civils au Canada comme en Italie. Elle a connu un grand succès. Le gouverneur de la Sicile a signé un protocole d'entente avec les militaires italiens désignant tous les lieux du débarquement comme sites patrimoniaux. Cela signifie que des fonds y seront affectés dans le but d'établir une meilleure communication entre, bien sûr, des alliés. Pour eux, les retombées du tourisme ne sont pas à négliger.
    Désolé, monsieur Gregory, je dois vous interrompre.
    Monsieur Brassard, vous avez cinq minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président, et merci à vous tous d'être ici.
    Je suis heureux de revoir quelques-uns d'entre vous. Si je me souviens bien, vous aviez comparu ici pour parler des prestations. Non, je me trompe, ce n'était pas pour les prestations, mais pour autre chose. Je suis néanmoins, madame Montague, monsieur Soulière, heureux de vous revoir.
    Monsieur Gregory, j'aimerais revenir sur ce que Mme Blaney disait au sujet de la sensibilisation des jeunes. Vous avez beaucoup parlé du pourquoi. Les groupes de témoins précédents nous ont parlé de la sensibilisation des jeunes et de l'importance que cela aura sur les activités commémoratives futures. Pourriez-vous nous parler du comment. Peut-être que quelques autres témoins voudront aussi intervenir à ce sujet. Quelle est la meilleure façon de rejoindre les jeunes pour faire en sorte que le genre de commémoration dont vous parlez soit embrassé par les générations futures?
    Monsieur Gregory, c'est à vous.
    Je vous remercie, monsieur.
    Notre expérience est limitée. Nous sommes au début d'un processus. Le premier Forum international sur la paix, la sécurité et la prospérité s'est tenu en 2019 et le dernier en février de cette année. Nous avons attiré 831 participants, provenant de 23 pays et de 22 collèges militaires. Bob Rae, notre ambassadeur auprès des Nations unies, y a pris la parole, de même que le sénateur Loffreda. De l'avis général, c'était un succès.
    Nous croyons pouvoir créer la plus grande conférence de paix au monde. C'est notre objectif. Nous pouvons y arriver simplement en faisant du porte-à-porte. Imaginez quelques-unes des plus grandes organisations qui font de la sensibilisation dans les écoles secondaires. Elles comptent moins de 1 000 enseignants dans leur base de données. Or, il y a 200 000 enseignants du secondaire au Canada. En fait, ce chiffre est un peu faible.
    Nous avons beaucoup de travail à faire pour créer une base de données d'enseignants en sciences sociales, en histoire, en éthique et en civisme. Pour rejoindre ces personnes, nous avons acheté une annonce qui paraîtra dans Canadian Teacher Magazine. Nous construisons une base de données grâce à un certain nombre de collaborations. Nous nous attendons à ce que chaque école exige énormément de travail de notre part.

  (1650)  

    Il y a beaucoup d'écoles qui s'en chargent elles-mêmes. Là où je me trouve, à Barrie, juste au nord de Toronto, le Simcoe County District School Board, par exemple, fait de réels efforts pour sensibiliser les jeunes. Quelques milliers d'entre eux sont allés à Vimy 100, par exemple. Si je vous ai bien compris, il s'agit simplement de canaliser toutes ces ressources vers un guichet unique d'où nous pourrons transmettre cette information aux écoles pour faciliter leur participation. Est-ce exact?
    Pour le guichet unique, je ne suis pas certain. Je pense qu'ACC a la possibilité de coordonner et d'orchestrer les ressources civiles. Seulement en Ontario et au Québec, par exemple, nous collaborons avec 13 des 22 différentes organisations civiles qui souhaitent participer à des commémorations, sans compter les amicales d'anciens combattants ou régimentaires. Il y a un très grand nombre de civils qui voudraient qu'on leur indique à qui s'adresser. Je pense qu'ACC pourrait regrouper de quelque façon ces organisations pour favoriser la collaboration.
    Je vais vous en donner un bon exemple.
    Soyez bref, je vous prie, car j'ai une autre question.
    Lorsque ACC finance une initiative de sensibilisation, il faut privilégier les organisations qui font preuve d'un souci de collaborer. Nous collaborons avec sept organisations différentes pour tirer le maximum de chaque dollar. Je pense qu'ACC devrait encourager cela.
    Merci.
    L'autre chose que nous entendons, c'est l'impact de la pandémie de la COVID sur les commémorations et la transition vers un environnement virtuel qu'elle a imposée à diverses organisations, comme les légions. Beaucoup ont constaté qu'elles étaient en mesure de faire cette transition.
    Je ne sais pas à qui adresser cette question. Peut-être à Mme Montague ou à M. Soulière. Pensez-vous que les commémorations en virtuel ou en mode hybride deviendront la réalité de l'avenir? Même après la pandémie, est-ce que cette façon de faire va s'imposer de plus en plus?
    Veuillez répondre brièvement, s'il vous plaît.
    Tout dépend de qui vous voulez atteindre.
    Je n'ai pas entendu dire qu'on utilisait les médias sociaux pour sensibiliser les jeunes. C'est pourtant essentiel. Si nous décidions d'utiliser les médias sociaux à des fins d'éducation, ce serait déjà un début. Pour les autres générations, il y a d'autres moyens de les atteindre.
    Nous avons constaté que nous atteignions de plus en plus nos membres par l'entremise des médias sociaux, bien qu'il s'agisse d'une population plus âgée. Les jeunes ne peuvent s'en passer, et c'est donc peut-être par là qu'il faut commencer.
    Merci.
    Merci, monsieur.
    Nous passons maintenant à M. Amos, pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à nos témoins pour leur dévouement. Nous vous remercions tous de votre service public exceptionnel. Nous vous sommes reconnaissants du temps que vous avez donné et de cette passion que vous avez vécue et, en quelque sorte, transmise aux Canadiens.
    J'ai quelques questions.
    J'aimerais commencer avec M. Harris, compte tenu de son parcours professionnel et des longues années qu'il a passées, sous de nombreux gouvernements successifs, à s'occuper de la question de la commémoration.
    Monsieur Harris, quelles leçons pouvons-nous tirer de vos quatre décennies dans la fonction publique et de votre expérience du défi de la commémoration? Qu'est-ce que vous avez appris après une vie de service dans ce domaine?

  (1655)  

    C'est étrange; ma vraie expérience n'a rien à voir avec le poste que j'occupe ou mon rôle de coprésident du groupe de commémoration des Anciens Combattants.
    J'ai été musicien dans la Réserve pendant 32 ans. Quand on est musicien dans la Réserve, on se trouve à participer à beaucoup d'événements commémoratifs et de cérémonies du 11 novembre. J'ai été à Halton avec les Lorne Scots, puis à Toronto et enfin à Ottawa avec les Governor General's Foot Guards.
    J'ai été très étonné en juin 1994 à l'occasion de l'anniversaire du jour J. Un grand événement était prévu à Ottawa. On savait que Radio-Canada et la CTV allaient diffuser en direct de Normandie. Peut-être un peu par cynisme, je n'en suis pas certain, je prévoyais qu'une foule modeste et retenue assisterait à la sortie de la fanfare du Manège militaire de la place Cartier et à son défilé le long de la rue Elgin.
    Il n'en fut rien. Lorsque nous avons défilé dans la rue Elgin, la foule était dense, profonde de 10 rangs, et enthousiaste. Il en était de même dans la rue Wellington. Nous étions tous passablement étonnés, personne dans la fanfare — bon sang, à ce moment-là, j'étais historien en chef depuis 20 ans — n'avait deviné une telle réaction en cet anniversaire du jour J.
    L'année suivante, lorsque Radio-Canada et la CTV ont télévisé les célébrations du jour de la Victoire en Europe à Apeldoorn, c'était la même chose et cela n'a pas cessé depuis. On le voit à l'attention portée au 90e anniversaire de Vimy, à l'intérêt suscité par le décès du dernier survivant de la Première Guerre mondiale et du dernier combattant de la crête de Vimy et, plus important encore, au rassemblement des gens sur les viaducs de l'autoroute 401 à la suite de l'incident de tir fratricide en avril 2002. C'était tout à fait spontané.
    Je ne sais pas pourquoi cela s'est produit. J'en ai parlé à Tim Cook, intrigué lui aussi par ce phénomène. Nous ne savons comment l'expliquer. Je ne sais pas s'il y a eu une vague soudaine de culpabilité collective pour avoir ignoré les anciens combattants pendant longtemps, mais j'ai l'impression que ce désir de commémoration est durable.
    Contrairement à ce qui s'est passé avec les anciens combattants de la Première Guerre mondiale et de la Seconde Guerre mondiale, décédés avant que ce phénomène apparaisse — je n'essaie pas de le justifier ou d'en parler —, nous devons, pour les anciens combattants de la guerre de Corée, procéder sans tarder aux commémorations, avant qu'ils disparaissent et puissent constater cet enthousiasme nouveau.
    Merci, monsieur Harris. C'est un témoignage éloquent.
    Compte tenu des contraintes de temps, je vais changer de sujet et poser une question ouverte, brève.
    On a parlé de l'influence des médias sociaux et de l'importance d'établir des liens avec les jeunes. Que pensez-vous de l'idée d'atteindre les jeunes Canadiens par l'entremise des producteurs de jeux vidéo?
    Il reste tout juste le temps d'une très brève réponse.
    Monsieur Amos, nous nous penchons sur cette idée, pas nécessairement pour les jeux vidéo, mais pour des vidéos actives dans nos navires. Quelqu'un pourrait pointer son téléphone sur le navire et, aussitôt, suivre sur son téléphone le déroulement d'un combat naval de la Seconde Guerre mondiale. Les choses de ce genre, qui sont peut-être davantage applicables à certains éléments, seraient un moyen formidable d'amener les jeunes à voir comment ça s'est passé. C'est une idée.

  (1700)  

    Merci. Je crains de devoir vous interrompre.
    Je vois que vous avez levé la main, monsieur Gregory. Quelqu'un pourra peut-être revenir à vous à ce sujet.
    C'est maintenant au tour de M. Desilets, pour deux minutes et demie.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Ma question s'adresse à M. Sampson.
    Vous dites que les commémorations devraient passer après un traitement équitable et respectueux des vétérans et des vétéranes. Je vous demanderais de donner plus de précisions sur ce sujet pendant quelques secondes et de parler de l'exemple de l'Australie et de la Nouvelle-Zélande.
    Que pouvons-nous tirer de l'expérience de ces pays? Que font-ils mieux que nous?

[Traduction]

    Votre micro est en sourdine, monsieur.
    Et de plus je m'exerçais à parler français.

[Français]

     Monsieur Desilets, je suis désolé; je voudrais bien répondre en français, mais je n'ai pas le vocabulaire nécessaire pour le faire.

[Traduction]

    Pour commencer, je crois qu'il revient à M. Soulière de répondre à votre question concernant les hommes et femmes ex-militaires. Il en a parlé. Je crois que leur traitement est le même pour ce qui est des opérations de service actif. Je ne suis pas au courant de disparités entre hommes et femmes.
    Quant à votre question sur l'Australie et la Nouvelle-Zélande, je suis très heureux de vous donner des explications. J'aimerais d'abord rappeler que le 11 novembre est le jour du Souvenir, où il s'agit d'abord de commémorer le sacrifice de ceux morts au combat. Malheureusement, le 11 novembre, nous avons tendance à parler un peu également des anciens combattants, ce qui altère quelque peu le sens premier du 11 novembre, qui demeure le jour du Souvenir.
    Je propose que nous regardions ce qui se fait chez nos partenaires en Nouvelle-Zélande et en Australie. Chaque année, il y a une journée où on célèbre les anciens combattants. Bien sûr, il y a aussi le jour du Souvenir, le 11 novembre. Mais on y a institué récemment la Journée commémorative de l'ANZAC, qui est l'occasion pour les anciens combattants de partout au pays de se rassembler pour commémorer leur service et de défiler à l'aube dans toutes les grandes villes d'Australie et de Nouvelle-Zélande. Tout le monde participe à cet événement. C'est un événement marqué par la fraternité d'armes. Tous les anciens se rassemblent. Ils défilent ensemble. Ensuite, bien sûr, les civils qui se rendent compte de ce qui se passe viennent aussi assister au défilé.
    Pour revenir à vos observations sur la réaction des Canadiens, monsieur Harris, les Canadiens éprouvent une profonde sympathie pour leurs anciens combattants et ils veulent en savoir plus sur ce que nous faisons. La difficulté, c'est que nous n'avons pas toujours le mécanisme ou les moyens de communiquer efficacement avec eux.
    De tels événements, comme un rassemblement d'anciens compagnons d'armes ou une commémoration semblable à la Journée commémorative de l'ANZAC, s'implanteraient probablement très bien au Canada, vu la similitude de nos cultures. De plus, j'ai mentionné que si vous espérez me voir assister à un événement commémoratif et y représenter les anciens combattants, il faudra forcément que ce soit quelque chose où règne une certaine camaraderie, où j'aurai l'occasion de rencontrer d'autres anciens combattants.
    Merci, monsieur.
    Merci, monsieur Sampson.
    Madame Blaney, vous avez deux minutes et demie.
    Merci.
    Monsieur Harris, dans le cadre de ce processus, on a parlé de l'importance de consigner l'histoire des gens qui ont servi pendant qu'il est encore temps. Ce dont vous venez de parler, qu'il faut connaître toutes ces histoires, est réellement important. Bien entendu, le Musée de la guerre fait un remarquable travail pour recueillir ces histoires et mettre en œuvre des moyens pour les présenter afin que les gens puissent les entendre, les comprendre et s'en inspirer.
    Pourriez-vous nous parler du travail que vous faites pour recueillir les histoires.
    Pour ce qui est des activités de la Direction, sa principale responsabilité est de rédiger l'histoire officielle des déploiements canadiens. Dans ce cadre, nous menons des entrevues aux fins de rédaction de l'histoire officielle, ce qui signifie, à long terme, que ces histoires individuelles seront racontées.
    Je sais que le mémorial virtuel du ministère des Anciens Combattants, qui se ressource sans cesse du fait que les gens sont invités à y contribuer, est également important. Le programme de la Défense nationale d'identification des victimes de la guerre n'est pas une activité de commémoration à proprement parler, mais nous avons constaté, lorsque nous réussissons à identifier les restes d'un militaire porté disparu depuis la Première ou la Seconde Guerre mondiale, que ces histoires ont un grand retentissement. D'après ce que j'ai entendu, cela pousse des écoles locales ou d'autres organisations à demander à leurs élèves de choisir des soldats et de tenter de raconter leur histoire.
    Il n'y a pas de répertoire central alimenté par ceux qui mènent des entrevues, pour ainsi dire, abritant la collection de toutes ces entrevues. À cet égard, je pense que, pris ensemble, le travail du Musée de la guerre, du ministère des Anciens Combattants, ce que nous faisons à la Direction de l'histoire et du patrimoine et ce qui se fait dans certaines universités, comme l'Université du Nouveau-Brunswick, revient en quelque sorte à constituer graduellement un catalogue.

  (1705)  

    Merci.
    Excellent. Merci beaucoup.
    La parole est maintenant à M. Davidson, pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Bonjour à tous. J'adore parler d'histoire.
    Les témoins n'étaient pas présents au dernier appel conférence, quand j'ai montré la photo de mon grand-père qui a été recréée au Musée de la guerre.
    Monsieur Woodburn, voici mon oncle Bert. Il naviguait sur une corvette qui a été coulée dans l'Atlantique Nord. Voici mon oncle Don, mitrailleur de queue, dont l'appareil a été abattu le 23 juillet au-dessus de la France. Il a été caché par la Résistance française pendant un an, jusqu'à la fin de la guerre.
    Chers collègues, je m'excuse de soulever de nouveau la question que voici.
    Monsieur Harris, comme je suis nouveau au Comité, vous êtes le premier témoin du MDN que j'ai l'occasion d'interroger.
    Il y a une mère décorée de la Croix d'argent qui travaille pour moi. Son fils a été tué au combat en 2010, en Afghanistan. C'était horrible.
    Il y a deux ans, elle en a été avisée par lettre, deux jours après le fait, du dévoilement du monument commémoratif du conflit en Afghanistan. Personne encore n'a pu m'assurer que les familles des soldats morts au combat, en tout cas ceux tombés en Afghanistan, sont avisées lorsqu'un dévoilement a lieu.
    Je me demande si vous connaissez le processus qui a été mis en place à cet égard parce que je n'arrive pas à trouver la réponse.
    Malheureusement, je n'ai rien eu à voir avec l'inauguration du monument commémoratif de Kandahar au complexe Carling du QGDN.
    Toutefois, pour ce qui est du Monument commémoratif national de la mission en Afghanistan, qui sera érigé en face du Musée de la guerre, je sais qu'Anciens Combattants Canada prévoit d'être inclusif. Cela ne se fera pas sans longs préavis.
    Merci, monsieur Harris. Je vous en suis reconnaissant. Cette journée a été plus qu'affligeante pour moi, et assurément pour Mme Collier.
    Monsieur Harris, j'aime beaucoup votre enthousiasme et j'ai écouté avec plaisir votre description de la réaction de la foule à l'anniversaire du jour J. J'aimerais bien voir deux ou trois Lancasters survoler la rue Wellington quelques jours par année, pour exprimer la fierté des Canadiens. Le spectacle des Snowbird dans les petites villes l'été dernier a été une grande inspiration pour les Canadiens.
    Monsieur Harris, à l'approche de son anniversaire en 2023, diriez-vous que la sensibilisation et la reconnaissance des Canadiens quant à la contribution canadienne à l'opération Husky et à la campagne d'Italie sont ce qu'elles devraient être?
    Je ne savais rien de l'opération Husky au départ. Je n'avais entendu parler que de l'escadron Husky, composé de transporteurs lourds pendant la Seconde Guerre mondiale. Je n'avais aucune idée qu'une opération Husky avait eu lieu en Italie. Comment pouvons-nous mieux faire passer ce message?
    Permettez-moi de vous illustrer la situation. J'ai exercé des pressions sur la SRC pendant sept ans — je dis bien sept ans — pour qu'elle fasse quelque chose pour accroître sa couverture. Le 30 juillet 2013, nous avons eu droit à un reportage d'environ deux minutes et demie, suivi d'un alligator qui mangeait des balles de golf en Floride. Le film d'ouverture faisait voir les Américains à Okinawa. La couverture de l'opération Husky a été lamentable.
    Je dois féliciter ACC et nos ambassades. L'an dernier, le ministre s'est rendu non seulement à Ortona, mais aussi à Agira. On peut affirmer que c'est, si loin que remontent nos dossiers, la deuxième fois qu'un ministre des Anciens Combattants s'y rend.
    Je me suis engagé pour 2028. Je peux vous dire que cette marche du souvenir et de la paix, pour peu que nous puissions convaincre les Canadiens qu'elle mérite le titre de « camino canadien », aura pour résultat d'aviver l'imagination des Canadiens et de les inciter à visiter ce champ de bataille où, en 28 jours, 562 hommes sont tombés et 2 310 autres ont été blessés.
    Je me propose de mettre pleins feux sur l'opération Husky d'ici 2023.

  (1710)  

    D'accord. J'aime beaucoup votre enthousiasme, monsieur Harris. Assurez-vous de nous tenir au courant.
    Je n'y manquerai pas. Merci, monsieur Davidson.
    Je vous en serais reconnaissant.
    Merci, monsieur le président.
    Merci.
    La parole est maintenant à M. Samson, pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci pour tous les exposés que nous avons entendus aujourd'hui. Merci aussi ceux et celles qui ont servi ou qui contribuent directement à la reconnaissance de nos hommes et femmes en uniforme.
     Je tiens à saluer mes collègues de la Nouvelle-Écosse, bien sûr, MM. Brown et Woodburn, et à les remercier du travail qu'ils ne cessent d'accomplir ici en Nouvelle-Écosse pour faire connaître la carrière du Sackville.
    Je tiens également à vous remercier, monsieur Harris, pour vos 42 années de recherche. C'est très important. Nous en avons besoin pour notre étude. Vos renseignements seront essentiels.
    Je remercie également mes collègues représentant les retraités fédéraux, avec les grandes questions de qui, de quoi et de comment qu'ils ne manquent pas de poser. Ce sont des questions qui importent grandement dans notre étude.
    Monsieur Gregory, je vous suis reconnaissant de votre travail auprès des jeunes. J'en suis très impressionné. C'est très important pour nos recherches à l'avenir.

[Français]

     Monsieur Sampson, je crois que vous êtes natif de la Nouvelle-Écosse. Je ne sais pas si nous avons un lien de parenté ou pas, mais c'est un plaisir de vous rencontrer.

[Traduction]

    Je vous remercie tous de ces renseignements. J'ai trois petites questions.
     Je vais commencer avec mes collègues de la Nouvelle-Écosse. Vous avez parlé du Sackville. J'ai une toile du Sackville dans mon bureau. Elle me vient d'un ancien combattant. J'en suis très fier, et chaque fois que je visite le navire, j'en reçois une forte impression.
    Vous avez parlé de célébrations. Très rapidement, il est essentiel que tous soient au courant de la bataille de l'Atlantique. Comment sera-t-elle célébrée, non seulement en Nouvelle-Écosse, mais dans le Canada atlantique et dans l'ensemble du Canada?
    Merci, monsieur Samson.
    Je dirais que ce sera certainement une grosse affaire ici en Nouvelle-Écosse, notamment à Halifax. Chaque année, du moins quand il s'agit d'une année normale, nous organisons un grand événement, très couru, devant le monument aux marins, qui s'élève sur le front de mer.
    Je dirais que c'est la même chose qu'à Ottawa, où il y a un défilé imposant et une cérémonie devant le Monument commémoratif de guerre du Canada. Je connais aussi Victoria, où un assez grand nombre de personnes — de grandes foules — viennent assister à la cérémonie.
    Je ne sais pas trop quelle est l'ampleur de la commémoration de la bataille de l'Atlantique ailleurs au Canada.
    Vous pourriez peut-être nous faire parvenir des renseignements à ce sujet à l'approche de la fin de notre étude, vu sa grande importance. Il faut que tous les Canadiens aient conscience de l'importance de cette bataille.
    Ma deuxième question s'adresse à MM. Harris et Sampson. À votre avis, comment pouvons-nous mieux appliquer l'optique du service de la paix pour valoriser notre participation à d'autres conflits armés? La Première Guerre mondiale, la Seconde Guerre mondiale et la guerre de Corée ne posent, bien entendu aucun problème à cet égard, mais pour les autres conflits armés, comment pourrait-on faire mieux valoir le service de la paix?
    Nous allons commencer avec M. Harris, puis nous passerons peut-être à M. Sampson très rapidement.

  (1715)  

    Je pense que le ministère des Anciens Combattants a décidé de se concentrer sur des régions géographiques du monde sur un cycle de cinq ans et de ne pas répéter la même chose chaque fois. Si l'accent est mis sur le Moyen-Orient, par exemple, ce sera peut-être la Force d'urgence des Nations unies qui aura la priorité au premier tour, même si l'engagement canadien dans son ensemble sera couvert, mais au prochain tour, ce sera peut-être notre intervention en Irak qui sera retenue et, au tour suivant, ce pourrait être notre mission sur la frontière entre la Jordanie et Israël.
    Je pense que l'idée de parcourir le monde géographiquement selon un cycle répétitif, mais en changeant chaque fois le lieu particulier de notre présence, mettra en évidence le grand nombre de déploiements qui ont eu lieu.
    Merci. Je pense que c'est aussi une très bonne approche.
    Monsieur Sampson, vous pourriez peut-être nous dire ce que vous en pensez.
    Certainement, monsieur Samson, mais je veux dire, aux fins du compte rendu, que je suis du côté des Sampson de la Nouvelle-Écosse qui sont les plus beaux.
    Je dirai tout d'abord que je suis d'accord avec M. Harris. Je pense que ce que fait Anciens Combattants Canada est très bien, mais je tiens à souligner l'absence de système de classification des missions. Mis au compte du service de la paix, notre présence au Rwanda a été classifiée comme mission de maintien de la paix, ce qu'elle n'était pas. C'était une intervention humanitaire. Comment alors la classifier?
    Pourquoi le conflit en Afghanistan n'est-il pas tenu pour une guerre? Je viens de présenter la pétition e-3217 à M. Brassard pour que la guerre du Golfe soit reconnue comme telle, faute d'avoir un système de classification des missions. Elle a été un grand succès. Les Canadiens étaient très inquiets.
    À mon avis, l'absence d'un système de classification des missions permettant de définir précisément la nature des missions est le problème clé.
    Merci.
    Me reste-t-il du temps, monsieur le président?
    Non, je vous ai même laissé le dépasser un peu.
    Inutile donc de négocier sur ce point.
    Merci.
    En effet. Désolé.
    La parole est maintenant à Mme Wagantall, pour cinq minutes.
    Merci encore, monsieur le président.
    Cette réunion est des plus intéressantes. Merci beaucoup à tous.
    Je veux raconter, puisqu'il est question de commémorer la bataille de l'Atlantique, une petite histoire personnelle. À mon premier printemps comme députée, j'ai reçu tout un choc en assistant à la commémoration. La cérémonie sur la pelouse avait été retardée. Il pleuvait. Il faisait froid. Il m'a fallu des heures pour m'en remettre par la suite. Mais les anciens combattants ont refusé les parapluies qu'on leur tendait, simplement refusé. Les regardant, je me répétais sans cesse: « S'ils peuvent le faire, je le peux aussi. » J'avais en tête les images d'eux sur les eaux glacées de l'Atlantique et des épreuves qu'ils ont subies. Je ne sais pas comment nous pouvons expliquer cela aux jeunes Canadiens. Je regrette que, depuis que nous sommes députés, nous n'ayons pas eu l'occasion de revivre cette expérience.
    Je reviens à ce que M. Sampson a déjà dit, que nous, députés, devons comprendre ce que vivent les membres de nos forces armées. Je le sais, jusqu'à un certain point... Je crois que M. Sampson m'a dit une fois: « Non, vous ne voulez pas savoir; vous n'avez pas à le savoir. » Bien sûr, il y a des situations que nous n'arrivons pas à gérer, mais le simple fait d'avoir ce niveau de reconnaissance...
    Monsieur Sampson, encore une fois, vous avez parlé des problèmes entourant la guerre du Golfe, puis celle de l'Afghanistan. Les Canadiens sont d'avis que ce sont toutes des guerres. Si vous pensez autrement, détrompez-vous: ce sont, bien sûr, des guerres. Lorsqu'on vous apprend que tel ou tel conflit n'est pas considéré comme une guerre, vous vous demandez naturellement pourquoi on fait ces distinctions. Au Rwanda... Ce qu'on m'a dit de la situation, c'est que nous étions dans une dynamique de maintien de la paix.
    Nos soldats sont confrontés à des choses horribles, quelles que soient les circonstances dans lesquelles ils se retrouvent. Pourquoi mettez-vous tant d'ardeur à maintenir ces distinctions sémantiques?
    Parce que c'est absolument impératif pour les anciens combattants. Les anciens combattants sont très intelligents et ils sont très soucieux des détails. Nous sommes obligés de nous familiariser avec les politiques en vigueur. Nous sommes obligés de suivre les instructions permanentes d'opération. Dans le monde militaire, tout répond à une logique, exception faite de l'absence d'un système de classification des missions. Comment se fait-il que nous ayons des instructions pour les exercices de défécation dans nos combinaisons chimiques, qui nous précisent comment procéder quand nous portons ces combinaisons, mais que nous n'avons absolument aucun moyen de communiquer clairement aux Canadiens, aux députés et aux anciens combattants ce que nous leur demandons?
    Dans le cas du Rwanda, tout a changé du jour au lendemain en 1994, alors que nous étions déjà sur le terrain: nouvelles règles d'engagement, nouvelle mission. Tout a changé. En tant qu'anciens combattants, nous étions perplexes. Nous ne savions absolument pas ce qui se passait. Je tiens beaucoup à ce que le problème soit réglé pour les jeunes Canadiens qui acceptent le risque de s'enrôler dans les Forces armées canadiennes.

  (1720)  

    C'est sur ce point-là, cependant, que vous dites que vous seriez disposé à modifier votre attitude à l'égard des événements de commémoration...
    Tout à fait.
    ... que ce n'est pas dynamique.
    Oui, certainement.
    Je pense qu'il est important d'établir cette classification. Pour dire les choses clairement, tout ce que nous avons fait depuis 1941 l'a été aux termes de résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies. Nous sommes informés très précisément de la situation sur le terrain et de ce qui était attendu de nous. Toutefois, ce qui se passe, c'est que les choses s'embrouillent quand la Défense nationale tente de transmettre cette information aux Canadiens.
    D'accord, c'est parfait. Merci. Je voulais vraiment des éclaircissements.
    Pour ce qui est de notre marine et de notre aviation... Il y a une base de Moose Jaw. Nous sommes très fiers de ce que nous avons en Saskatchewan, que très peu de gens connaissent. Il y a aussi, je crois, le NCSM Unicorn, à Saskatoon. C'est un édifice, mais les gens s'y entraînent comme s'ils étaient sur un navire. Il paraît que les garçons et les filles des Prairies font d'excellents marins, habitués qu'ils sont aux vastes horizons, aux vagues qui courent sur les champs, à ce genre de choses.
    Je suis montée à bord du NCSM Fredericton. Or, je n'ai aucunement, mais pas du tout, le pied marin comme une fille des Prairies est censée l'avoir. Je n'ai jamais été aussi malade de ma vie. Cependant, j'ai trouvé l'expérience formidable. Je me préoccupe parfois de... Nous avons l'armée de mer, l'armée de l'air et l'armée de terre. En faisons-nous assez pour montrer notre reconnaissance envers la marine et l'aviation? Je pense que nos soldats de l'armée de terre qui ont à combattre face à face sont parfois... Je ne dis pas que nous devrions dévaloriser de quelque façon que ce soit leur effort, mais je me demande si nous devrions en faire davantage pour vraiment connaître et comprendre notre marine et notre aviation.
    Veuillez répondre brièvement, s'il vous plaît.
    Je m'excuse d'avoir pris tant de temps.
    Je vais intervenir.
    On déteste opposer un élément des Forces armées canadiennes à un autre. Je dirais que les batailles qui se sont déroulées en mer sont loin des yeux et, dans une certaine mesure, loin du cœur. Je déteste dire les choses ainsi. Un des luxes qu'un soldat peut avoir, c'est de retourner à l'endroit où il a combattu, de se souvenir et de revivre ce qui s'est passé là-bas, de vraiment marquer un lieu sacré. C'est autre chose pour un marin, et c'est très difficile. Il n'y a pas d'endroit où aller; c'est en mer.
    C'est là que des monuments comme le Sackville prennent toute leur importance. Comme le disait M. Sampson, c'est un lieu de rassemblement, exactement comme le monument au marin dans le parc de Point Pleasant.
    Merci.
    Désolé, monsieur Woodburn.
    Merci.
    Je dois activer les choses.
    Monsieur Casey, vous avez cinq minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci à tous nos témoins.
    En cinq minutes, je n'aurai le temps que de quelques questions, probablement. Je tiens à souligner le travail que vous faites.
    En tout cas, l'Association nationale des retraités fédéraux a un chapitre actif ici à l'Île-du-Prince-Édouard, en grande partie, je dirais, à cause du nombre de retraités de l'administration centrale du ministère des Anciens Combattants. Vous savez sans doute qu'il n'y a qu'un seul ministère fédéral dont le siège se trouve à l'extérieur de la région de la capitale nationale. Les employés et les retraités occupent une place extrêmement importante dans notre province et notre économie. Je vous remercie du travail que vous faites. Votre chapitre ici à l'Île-du-Prince-Édouard se porte très bien.
    Pour nos invités d'Halifax, nous commémorons aussi la bataille de l'Atlantique ici, à Charlottetown, chaque année. Le type qui s'en occupe, imaginez-vous donc, est un gars de l'aviation qui s'appelle Dan Miller. Depuis quelques années, on remarque une nette augmentation de la participation à cet événement en particulier.
    J'ai une question pour vous, monsieur Gregory. Mais avant, je tiens à vous féliciter, monsieur, en votre qualité de civil et d'homme d'affaires, de vous consacrer avec autant de passion au souvenir de ceux et celles qui ont donné leur vie.
    Si je peux me soustraire à une obligation de comité permanent demain, j'assisterai à une cérémonie de remise du Médaillon des Forces canadiennes pour service distingué. Comme vous le savez, c'est un honneur que les militaires font aux gens comme vous qui ne sont pas membres des forces armées, mais qui travaillent fort pour les appuyer. Il y a aussi le fait que vous êtes colonel honoraire. Je sais que c'est une distinction réservée aux partisans les plus dévoués et les plus intègres, ce que nous avons tous pu constater ici.
    C'est fascinant, le travail que vous faites et la façon dont vous le présentez. J'ai deux questions pour vous, mais je ne pourrai probablement en poser qu'une seule.
    Vous avez parlé de la marche du souvenir et du Forum international sur la paix, la sécurité et la prospérité, ainsi que de la commémoration de l'opération Husky. Pouvez-vous nous parler du degré de soutien fédéral que vous avez reçu pour chacune des trois initiatives? Que pourrions-nous et que devrions-nous faire d'autre?
    Je comprends ce que vous dites au sujet de la collaboration et du besoin de la valoriser. Je pense que chacun des projets que vous avez mentionnés mérite d'être appuyé en soi. Pourriez-vous nous en parler, s'il vous plaît?

  (1725)  

     Tout d'abord, merci d'avoir posé la question.
    Je peux vous dire que je fais tout mon possible pour ne pas en demander plus au ministère que ce dont j'ai absolument besoin. Je crois que nous pouvons mobiliser les Canadiens et, ce faisant, les amener à se sentir utiles et ne pas hésiter à prendre leur argent. Je suis sérieux. Lorsque les gens envoient 100 $ ou 150 $, ils sont plus intéressés à participer, alors je n'ai aucune gêne à cet égard.
    Pour l'opération Husky, vous savez, j'ai dû recueillir plus de 648 000 $, et 157 Canadiens ont payé près de 5 000 $ pour être dans ce cimetière en même temps que moi. Mais la CBC n'a pas fait de documentaire pour nous; la RAI l'a fait, la télévision nationale d'Italie. Elle a produit un documentaire de 22 minutes sur la contribution canadienne à l'opération Husky, qui est diffusé quatre fois par année. Nous n'avons rien de tel au Canada, alors les gens des Anciens Combattants pourraient faire beaucoup plus pour m'aider.
    Je vais leur demander — et croyez-moi, ils ont été très, très généreux à mon égard. Quand je demande quelque chose, nous l'obtenons. Par exemple, en 2013, ils m'ont donné 62 000 $, que j'ai versés à l'Université du Nouveau-Brunswick pour produire un livret. Je leur demande maintenant de m'aider à contribuer à l'histoire du Canada, avec un livre tout à fait unique. Trois auteurs canadiens et trois auteurs siciliens vont raconter chaque jour la bataille telle que vue de part et d'autre, en faisant ressortir le coût civil de la guerre. Nous pensons que ce sera très efficace.
    Les panneaux de signalisation nous coûtent 40 000 euros. J'ai à peu près garanti de les payer, mais bon sang, si jamais... Cela pourrait vraiment nous aider.
    Pour les commémorations de 2023, rien que pour la scène, où... En 2013, nous avons tout payé. Les gens du ministère sont venus, le ministre était là aussi, mais nous avons tout payé.
    Merci.
    Rien que pour les scènes montées au cimetière et à l'endroit où nous avons donné notre concert devant 4 000 personnes, les coûts s'élevaient à 10 000 $ ici et à 20 000 euros là-bas. Nous tirons le maximum du moindre sou. C'est pourquoi je dis qu'il est important pour l'avenir de miser sur ces organisations qui ont des racines dans des pays étrangers. Qu'il s'agisse du Centre Juno Beach, qui est une excellente organisation, ou de Valour Canada chez nous, il faut miser sur ces organisations qui fonctionnent surtout grâce à des bénévoles. Tous ceux qui travaillent avec moi sont des bénévoles, alors...
    Merci, monsieur Gregory. Je suis désolé, mais je dois vous interrompre. Je veux au moins laisser un peu de temps...
    Merci.
    ... à quelques questions encore, et nous devons conclure bientôt.
    Monsieur Desilets, vous avez la parole pour deux minutes et demie.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Ma question s'adresse à M. Harris.
    Chaque conflit est important, et toutes les interventions auxquelles participent les Forces armées canadiennes méritent d'être connues, valorisées et mises en lumière.
    Or, pour des raisons évidentes, certains conflits occupent plus de place que d'autres dans ce qu'on pourrait appeler les « grands romans nationaux » des Québécois et des Canadiens.
    Selon vous, dans le cadre des commémorations, certains conflits sont-ils oubliés ou sous-estimés?

  (1730)  

[Traduction]

    Il est difficile de répondre à cette question.
    Je dirais qu'à ce jour, tout ce qui s'est passé depuis la Corée n'a probablement pas été reconnu à sa juste valeur. Je ne saurais dire pourquoi. Peut-être que cela n'a pas été aussi spectaculaire que les deux grandes guerres mondiales et la guerre de Corée. Je pense qu'à l'avenir... bien que je sois d'accord avec M. Sampson sur la question de catégoriser les conflits et les prestations auxquelles ils donnent droit, mais j'aurais beaucoup de difficulté à dire que le Moyen-Orient a été plus important que Chypre ou plus important que l'application des accords de Genève, ou que le Laos, le Cambodge ou le Vietnam.
    La commémoration sert à honorer le service et le sacrifice, et chaque déploiement exige du service et du sacrifice. Les chiffres sont peut-être plus élevés pour certains conflits que pour d'autres, mais le principe demeure, et je serais bien mal à l'aise de devoir établir un classement. C'est la reconnaissance du service et du sacrifice qui compte, peu importe l'endroit.

[Français]

     Je vous remercie.
    Je vais reprendre votre idée. Mon oncle a perdu la vie en prenant part à la guerre de Corée. Je cours après les commémorations qui ont pu exister, mais il n'y a pas grand-chose. Mon père ne m'en a jamais parlé, même s'il était à l'affût de cela.
    M. Sampson aimerait peut-être répondre à cette question.

[Traduction]

     Je crains que vous n'ayez largement dépassé votre temps, monsieur Desilets. Je suis désolé. J'essayais de vous caser tous deux à la fin, vous et Mme Blaney, alors soyez indulgent avec moi.
    Madame Blaney, vous avez deux minutes et demie.
    Merci.
    Je vais poursuivre avec vous, monsieur Sampson. Vous avez été très éloquent dans votre témoignage d'aujourd'hui. Vous avez parlé notamment de l'absence de reconnaissance du service spécial. La définition qu'on en donne peut peser lourd, puisque les anciens combattants du Rwanda reçoivent 40 % de moins que les autres pour leur pension.
    Quel type de reconnaissance faudrait-il accorder, d'après vous? Vous avez dit quelque chose d'extrêmement profond: je ne veux pas aller à des manifestations de reconnaissance à moins d'être avec les gens avec qui j'ai servi. Il est important pour nous d'entendre cela. Quelle sorte de commémoration aurait la profondeur nécessaire, et qu'est-ce qui irait de pair avec?
    Merci beaucoup de la question, madame Blaney. Je vais d'abord répondre à M. Desilets.
    La mission rwandaise a été passée sous silence au gouvernement du Canada et à la Défense nationale pendant 25 ans. Il est impossible que nous ayons servi sous le général Dallaire et que personne ne sache ce que nous avons fait. C'en était au point où le traumatisme devenait de plus en plus pénible pour les Canadiens qui essayaient de raconter leurs histoires, et qui se faisaient traiter de menteurs dans certains cas, parce qu'il n'y avait pas d'archives à la Défense nationale. Nous en avons discuté avec M. Harris et nous allons collaborer avec lui pour régler ce problème.
    Monsieur Desilets, j'ai pris part à une petite mission en Iran en 1988. Nous étions seulement 250 Canadiens à y prendre part. Ce n'est qu'un autre exemple. On n'entend pas parler de ces missions-là parce qu'elles sont modestes.
    Je suis d'accord avec vous, monsieur Harris: il n'est absolument pas question de classer les missions, mais il est certain que nous devons...
    La mission au Mali n'était pas une mission de maintien de la paix. C'était une mission de lutte contre le terrorisme en vertu du chapitre 7 de la Charte des Nations unies. L'État islamique n'a pas demandé aux Canadiens de venir en gardiens de la paix, ce qui est une exigence. Comment peut-on appeler cela une mission de maintien de la paix à moins de vouloir rassurer les Canadiens qui seraient tentés d'en faire?
    Madame Blaney, cette précision est importante pour les anciens combattants, tout comme la camaraderie qui doit être présente dans tout ce que nous faisons une fois devenus anciens combattants. Toute initiative menée dans cet esprit de camaraderie qui amène les Canadiens à comprendre franchement et ouvertement ce que nous avons fait dans ces missions à travers le monde est très bénéfique pour nous sur le plan psychologique, parce que nous avons l'occasion de nous faire entendre, mais aussi pour les Canadiens.
    Ma famille ne comprend même pas ce que j'ai vécu, parce que le gouvernement du Canada n'écrit rien sur nos missions. C'est un fait.

  (1735)  

    Ce sera le dernier mot.
    Je remercie les membres du Comité de leur patience. Je suis un peu en retard aujourd'hui, mais nous avons commencé en retard, alors je vous en remercie. Je voulais donner à tout le monde sa juste part de questions.
    Merci beaucoup à tous nos témoins d'être ici aujourd'hui et de contribuer à notre étude. Le fait que j'aie dû interrompre quelques-uns de mes collègues et quelques-uns d'entre vous montre bien que nous pourrions sans doute y aller encore pendant une heure avec nos questions. Il y a beaucoup de choses à dire à ce sujet, et je pense que nous aurons encore des discussions très fructueuses.
    Chers collègues, la prochaine réunion aura lieu le 10 mai. Ce sera la dernière sur la commémoration.
    Merci à toute l'équipe à Ottawa grâce à qui nous pouvons tous nous faire entendre.
    La séance est levée.
    Merci beaucoup, tout le monde.
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