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LANG Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des langues officielles


NUMÉRO 090 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 12 février 2018

[Enregistrement électronique]

  (1530)  

[Français]

     Veuillez prendre place, s'il vous plaît.
    Conformément à l'article 108 du Règlement, nous poursuivons l'examen des programmes d'appui pour la littératie et la numératie au Canada.
    Aujourd'hui, nous avons le plaisir de recevoir Mmes Margo Legault et Linda Shohet.

[Traduction]

Bienvenue au Comité.

[Français]

    Je vous souhaite la bienvenue au Comité permanent des langues officielles.
    Nous ferons comme à l'habitude, soit des présentations d'une dizaine de minutes suivies d'un tour de table, au cours duquel les membres du Comité poseront des questions et feront des commentaires.
    Qui veut commencer?
    C'est moi qui commence.

[Traduction]

    Allez-y.

[Français]

    Voulez-vous que je commence par une introduction ou par des remarques?
    Vous pouvez commencer par votre allocution.
    Commencez par votre allocution.

[Traduction]

    Puisque je m'exprime au nom de la minorité anglophone du Québec, je vais vous présenter mon exposé en anglais. On m'a demandé de rester brève en espérant que nous aurons suffisamment de temps pour aller plus en profondeur lors des questions des membres.
    J'apporte beaucoup d'expérience dans ce dossier, car je participe dans ce secteur depuis plus de 30 ans. J'ai fondé le Centre d'alphabétisation et été directrice générale du Centre que bon nombre ont considéré pendant de nombreuses années comme étant le centre de recherche et de ressources le plus important au Canada, jusqu'à sa fermeture en 2015. J'ai mené des recherches et beaucoup écrit sur ce sujet pendant plusieurs années.
    Je viens tout juste de terminer une étude et de dresser un inventaire avec Marc Johnson sur l'alphabétisation et les compétences essentielles, ainsi que sur le besoin des populations de langue minoritaire en matière d'alphabétisation et de compétences essentielles. Nous donnerons des présentations sur le sujet dans deux semaines, dans nos communautés respectives, et je m'attends à ce que le bureau publie son rapport. Je ne peux pas discuter des recommandations qui seront formulées, mais je vais m'inspirer de certains des résultats, car l'étude a été menée au cours des six derniers mois de l'année.
    Le principal message que j'aimerais vous transmettre aujourd'hui, c'est que les services offerts actuellement ne permettent pas de satisfaire aux besoins de la communauté anglophone du Québec en matière d'alphabétisation et de compétences essentielles. Cette population est confrontée à plusieurs obstacles — certains semblables à ceux auxquels sont confrontés les francophones hors Québec, mais d'autres sont propres au Québec.
    Les changements stratégiques et en matière de financement adoptés par le gouvernement fédéral, notamment, ont eu des répercussions à grande échelle, car les groupes linguistiques minoritaires dépendent beaucoup du financement fédéral acheminé par l'entremise du Québec. Dans une certaine mesure, je dirais que le Québec a également le privilège de disposer d'un financement de base qu'il peut acheminer à ces groupes communautaires.
    Les groupes anglophones du Québec reçoivent un financement de base. Il est facile d'utiliser ces fonds pour masquer la réalité, car la réalité est que les fonds de base sont insuffisants pour vraiment permettre à ces groupes d'atteindre leur pleine capacité ou de servir les populations qu'ils sont censés servir. Je laisserai Margo vous parler plus en détail de cette question.
    L'autre répercussion majeure pour la communauté de langue officielle en situation minoritaire, et d'ailleurs pour toutes les organisations du pays, a été ressentie lorsque le gouvernement fédéral a décidé de mettre fin au financement de base pour cette activité, en 2014. À l'époque, le gouvernement a dit qu'il cessait de financer la recherche et les organisations pour se concentrer uniquement sur les projets utiles. Cela a eu pour résultat qu'en l'espace d'un an ou deux, 30 années d'effort au pays ont été effacées.
    La plupart des organisations principales offrant une infrastructure ont implosé — elles ont presque toutes disparu. Si je ne m'abuse, vous avez accueilli la semaine dernière des représentants de l'une de ces organisations, Le RESDAC. Je siège encore au conseil d'administration de cette organisation, mais celle-ci est sur le point de s'effondrer. J'espère au moins que sa mission sera reconduite.
    Presque tous les groupes anglophones ont disparu, sauf un qui n'est plus que l'ombre de lui-même. Cela signifie essentiellement qu'il n'y a plus de base sur laquelle s'appuyer pour mener des recherches ou offrir des occasions de réseautage ou même des espaces pour permettre aux gens de se rencontrer et de partager des pratiques exemplaires et des connaissances, par exemple.
    Beaucoup de connaissances et de sagesse collectives ont également été perdues. Ce qui s'est produit à l'interne au cours de la dernière décennie, c'est un rétrécissement de l'orientation stratégique du fédéral. Lorsque l'alphabétisation a été ajoutée pour la première fois au programme fédéral vers la fin des années 1980, à l'époque où le Secrétariat national d'alphabétisation a été créé, une vision très large a été adoptée en matière d'alphabétisation et d'apprentissage des adultes et liée à la citoyenneté et à la participation au sein de la société, de sa propre famille et du milieu de travail. Donc, une vision très large.
    Pendant de nombreuses années, ce sont les provinces qui ont affecté une grande partie du financement à l'échelle du pays par l'entremise d'ententes fédérales-provinciales. Des fonds étaient transférés aux provinces, mais les provinces offraient également un fonds de contrepartie. Beaucoup d'infrastructures, tant nationales que provinciales, dépendaient de ces ententes fédérales-provinciales.

  (1535)  

    Ces ententes ont pris fin en 2007, année où le Secrétariat national d'alphabétisation a été dissous. Une nouvelle entité a été créée — le Bureau de l'alphabétisation et des compétences essentielles —, entité qui existe toujours.
    Au fil des ans, l'accent est passé d'un équilibre entre le milieu de travail, la famille et la communauté à un équilibre presque exclusif entre le milieu de travail, les emplois et l'aptitude au travail. Aujourd'hui, les efforts en matière d'alphabétisation financés par le fédéral se concentrent principalement sur le milieu de travail et l'aptitude au travail.
    Ce sont les communautés linguistiques en situation minoritaire qui ont été les plus touchées par ces changements, car une grande partie de leur financement provenait du fédéral ou des transferts fédéraux. J'espère avoir l'occasion de parler plus en détail de cette situation.
    Le Québec organise des activités prometteuses dont j'espère avoir l'occasion de vous parler. Le gouvernement du Québec mise beaucoup sur l'alphabétisation et l'acquisition de compétences. Il s'est engagé à accroître les niveaux d'alphabétisation lors des prochains sondages internationaux du PIAAC, en 2022. Nous ignorons quel sera l'impact pour les communautés linguistiques en situation minoritaire, mais de nouveaux fonds sont injectés.
    Je tiens à répéter que les anglophones ont un profil différent des francophones. Nous obtenons de meilleurs résultats que les francophones dans le cadre du PIAAC. Cela ne se traduit pas par un meilleur accès à des emplois ou à des occasions liées habituellement aux résultats du PIAAC. Le fait que nous obtenons de meilleurs résultats dans le cadre du PIAAC ne veut pas dire que les choses vont généralement bien.
    Nous sommes une communauté éparpillée. Le gros de notre population se trouve au Québec, mais la population a augmenté au cours des dernières années. De plus, le Québec et le gouvernement fédéral utilisent des critères différents pour recueillir les données relatives à notre population. Le gouvernement fédéral inclut ceux qui s'expriment dans la première langue officielle, alors que le Québec reconnaît uniquement ceux dont la langue maternelle est l'anglais. La différence entre ces chiffres devient une différence à long terme applicable au financement disponible.
    Je vais m'arrêter ici en espérant pouvoir revenir sur certains points plus en détail. J'aimerais vous partager des exemples très précis que nous avons entendus au cours des six derniers mois dans le cadre de notre collecte de données, car ils vous donneront un portrait d'une communauté qui paraît parfois plus vivante qu'elle ne l'est.
    Je vais laisser Margo vous parler de son secteur, car je crois qu'il s'agit d'un exemple concret. Ensuite, j'ajouterai peut-être une dernière chose.
    Merci, Linda.
    Margo, vous avez la parole.
    Merci beaucoup.
    Mon nom est Margot Legault. Je suis la directrice générale de Literacy Quebec, un réseau d'organisations provinciales pour l'alphabétisation en anglais.
    Notre mission consiste vraiment à communiquer avec les organisations communautaires d'alphabétisation et à les représenter. Literacy Quebec et ses 12 organisations membres sont reconnus par le ministère de l'Éducation. Nous recevons un financement de base pour nos programmes. C'est grâce à ce soutien financier que notre réseau a pu survivre aux compressions financières du gouvernement fédéral dont a parlé Linda, mais cela ne veut pas dire qu'il n'a pas été touché.
    Par exemple, en 2006, les ententes fédérales-provinciales donnant accès au financement de l'IFPCA n'ont pas été reconduites. Les organisations communautaires d'alphabétisation ont perdu l'accès à une source importante de financement leur permettant de créer des projets de renforcement de la capacité.
    Literacy Quebec tente de combler cette lacune en matière de soutien en sensibilisant les gens aux problèmes d'alphabétisation dans la province et en aidant à recruter des adultes ayant un faible taux d'alphabétisation, en participant à l'élaboration de ressources et de matériels, en offrant des possibilités de perfectionnement professionnel pour les praticiens en alphabétisation et en offrant des occasions de concertation.
    Ceci dit, nous travaillons dans le contexte d'une langue minoritaire dans la province, ce qui n'est pas toujours facile. De plus, nous travaillons avec des populations très vulnérables pour lesquelles l'impact de nos efforts ne peut pas toujours être mesuré par les niveaux de diplomation et les services de placement. Il peut être difficile de quantifier l'incidence que nous avons sur la situation d'un particulier. Je parle ici de briser l'isolement, de l'habilitation, de l'estime de soi et de la capacité à gérer sa propre santé et un budget et à naviguer dans leur environnement, et même, de voter.
    Les organisations en alphabétisation qui travaillent dans le contexte d'une langue minoritaire au Québec sont confrontées à des défis bien précis. Nous sommes responsables de très grands territoires. Nos 13 organisations membres sont censées couvrir toute la province. Donc, celle-ci a été divisée en régions. Évidemment, ces organisations sont incapables d'offrir des services pour toute la région. Elles doivent donc fixer des priorités et mener des interventions ciblées.
    De plus, les fonds que nous recevons sont insuffisants pour satisfaire à nos besoins. Donc, la plupart de nos organisations ne comptent en moyenne que 1,5 employé. Elles doivent également limiter leurs heures d'ouverture pendant la semaine.
    Nos membres créent et favorisent un sentiment d'appartenance chez les anglophones. Ils recrutent et forment des bénévoles pour devenir des tuteurs en alphabétisation. Non seulement s'agit-il pour les bénévoles d'une belle occasion, ceci leur permet également de contribuer à la vitalité de leur communauté. Ils offrent également aux apprenants adultes un environnement chaleureux, accueillant et libre de tout jugement. Ils peuvent ajuster l'apprentissage afin de répondre aux objectifs personnels précis de chacun des apprenants.
    Il est également important de souligner que nous ne travaillons pas en silo. À notre avis, il ne revient pas uniquement aux écoles, aux conseils scolaires et aux organisations communautaires d'alphabétisation d'améliorer les taux d'alphabétisation. C'est la raison pour laquelle nous sommes l'un des membres fondateurs d'un réseau d'alphabétisation. Ce réseau réunit diverses organisations à l'échelle de la province dans le but d'introduire des mesures structurelles permettant d'examiner les causes et conséquences d'un faible niveau d'alphabétisation.
    Notre réseau a été très heureux d'apprendre que le parti libéral reconnaissait l'importance essentielle des compétences en alphabétisation pour réussir dans la société d'aujourd'hui et qu'il comprenait le rôle essentiel que joue le secteur sans but lucratif dans le développement stratégique et la prestation de programmes.
    Merci.

  (1540)  

    Merci beaucoup.

[Français]

     Nous passons maintenant aux questions et commentaires.
    Madame Boucher, vous avez la parole.
    Je vais poser deux questions. En français, cela va bien, mais je vais essayer d'en poser en anglais parce que vous faites partie d'une communauté anglophone.
    Au Québec, on ne reconnaît pas la communauté anglophone comme une minorité. Pensez-vous que cela a une incidence relativement à l'argent qu'on vous transfère? C'est ma première question.

  (1545)  

[Traduction]

    D'accord
    Vous dites également que votre communauté est plus forte sur papier qu'elle ne l'est en réalité. Pourriez-vous nous fournir plus de détails à ce sujet?
    Puis-je répondre d'abord à votre deuxième question?
    Si vous le voulez.
    Je vais revenir encore une fois aux propos de Margo. Je vais vous donner deux exemples, tous les deux tirés de l'étude que nous avons terminée récemment. Le premier exemple est que, sur papier, nous avons des lignes de référence au Québec, Info-Alpha et Info Apprendre, qui sont censées être bilingues. Ces services sont soutenus par le gouvernement du Québec, par l'entremise du ministère de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur, et administrés par la Fondation pour l'alphabétisation. Ces lignes de référence ont également leur propre site Web. Lorsqu'on appelle ces lignes de référence, on entend des messages en anglais, puis on est censé être transféré à plus de 600 centres de services à l'échelle du pays.
    Nous avons communiqué avec le directeur des services afin de savoir combien d'appels Info-Alpha avait transférés l'année précédente à des centres de services. De façon générale, Info Apprendre concerne l'éducation des adultes. Il peut s'agir d'adultes au niveau du cégep ou universitaire. Le directeur nous a répondu que sur les 886 appels transférés par Info-Alpha entre le 1er avril 2016 et le 31 mars 2017, 7 % avaient été placés par des anglophones. Cela se traduit par 62 appels. Il ne pouvait pas nous dire à quels centres ces appels avaient été transférés. Il croyait qu'ils avaient été transférés à des organisations communautaires, soit les membres du groupe de Margo, les 13 organisations.
    J'en ai parlé à Margo, qui était l'une de nos informatrices, tout comme huit autres directeurs généraux. Chaque année, Margo recueille des données auprès de ses membres. Je lui ai demandé combien d'appels Info-Alpha avait transférés l'an dernier à ses membres, et elle m'a répondu: aucun. J'ai confirmé cette information en venant ici, car cette information est incluse dans mon rapport et dans ce document.
    J'ai également interrogé le directeur au sujet d'Info Apprendre. Sur les 1 863 appels reçus au cours de l'année, 16 % avaient été placés par des anglophones, ce qui se traduit par 298 appels. Il ne pouvait pas me dire où ces appels avaient été transférés. Il m'a tout simplement dit qu'ils avaient été transférés au bon service, sans pouvoir me dire où et à quelle organisation. Nous avons pu vérifier auprès des organisations communautaires, car elles recueillent ces données. C'est le premier exemple.
    L'autre exemple concerne probablement le réseau auquel faisait référence Margo, car l'une des choses que j'ai découvertes en m'entretenant avec les directeurs généraux, c'est que les sites Web de ces lignes de référence dressent une longue liste d'activités et de services offerts. J'ai trouvé cela très intéressant. Or, en réalité, très peu de ces activités sont offertes pour la même raison qu'a soulignée Margo, soit le manque de ressources. Donc, la liste représente toutes les activités qui pourraient être offertes ou qui ont déjà été offertes, mais seulement deux ou trois de ces activités sont offertes par année, selon les besoins de la communauté.
    L'autre chose qui n'était pas claire, c'est le nombre de ces services offerts aux adultes. Le financement de base auquel Margo faisait référence est offert aux organisations communautaires et assujetti à peu de conditions. Ces fonds aident ces organisations à remplir leur mission, soit satisfaire aux besoins de la communauté. Encore une fois, plusieurs de ces organisations offrent des services, comme des programmes parascolaires pour les enfants et un soutien aux jeunes de la communauté. Elles n'offraient pas toutes des services aux adultes. Certaines offraient des ateliers une ou deux fois par année, car le nombre de participants aux ateliers permettait de gonfler les chiffres sur lesquels elles font rapport, car il s'agit de l'une des mesures sur lesquelles elles peuvent faire rapport. Ce sont là deux exemples.
    Est-ce que cela vous donne une idée de la situation? Sur papier, ce sont des services incroyables. Treize organisations reçoivent un financement de base et offrent toutes ces activités et tous ces services. Il y a un service de référence qui est censé orienter les gens vers les services appropriés, mais en réalité, ce n'est pas le cas. En passant, la réalité est la même pour les centres d'emploi. Les services d'emploi pour les jeunes ont mené une étude cette année sur les centres d'emploi du Québec. Sur les 158 centres, seulement quelques-uns avaient la capacité nécessaire pour offrir des services bilingues.

  (1550)  

[Français]

     Madame Lapointe, vous avez la parole.

[Traduction]

    Merci beaucoup d'avoir accepté notre invitation.
    Je vais vous poser mes questions en français, mais soyez bien à l'aise de me répondre en anglais.
    Vous avez parlé du financement et du fait qu'auparavant, ces fonds étaient utilisés pour le milieu de travail, famille,

[Français]

l'employabilité et la communauté. Maintenant, vous n'avez du financement que pour les volets travail et employabilité. Vous avez perdu le financement relatif aux deux autres volets. Quel effet cela a-t-il?
    Vous me demandez quel est effet de cette perte de financement des volets famille et communauté, n'est-ce pas?
    Oui, c'est cela.

[Traduction]

    Les fonds fédéraux ne sont pas destinés à des activités visant à combler les besoins des familles et des collectivités. Margo a souligné que, dans bien des cas, les besoins en matière de littératie ne sont pas uniquement liés au monde du travail et à l'employabilité. Les besoins touchent l'accès aux soins de santé et la citoyenneté. D'autres sont liés à la capacité de jouer un rôle actif dans la société, aux nouvelles technologies, à la façon dont nous avons structuré nos activités, notamment les programmes gouvernementaux. Un nombre considérable de services gouvernementaux sont offerts actuellement, et les gens sont dirigés vers un site Web. On les invite à consulter le site Web s'ils veulent plus de renseignements. Eh bien, si les gens n'ont pas les moyens technologiques, ils se trouvent exclus, et c'est très fréquent.
    Si vous cessez de financer les activités liées aux besoins des familles et des collectivités, la majorité de ces besoins ne seront pas comblés; les autres le seront par l'intermédiaire d'autres sources. Dans nos discussions avec divers organismes, nous avons appris que le personnel consacre beaucoup de temps — 50 % de son temps ou plus — pour recueillir les fonds nécessaires à l'organisation d'activités axées sur les besoins de la communauté, mais avec des résultats modestes.

[Français]

    Un peu plus tôt, vous avez dit que ce qui restait de Literacy Quebec n'était qu'une coquille. D'après ce que j'ai compris, tous les organismes ont disparu.
    Combien d'organismes qui travaillaient à améliorer la littératie au Québec ont disparu?

[Traduction]

    Je dois revenir en arrière quelque peu. La coquille, ce n'est pas cet organisme. On comptait six organismes nationaux avant que le gouvernement fédéral ne réduise le financement de base.

[Français]

    Parlez-vous d'organisations nationales au Québec??
    Je parle d'organisations pancanadiennes.
    Au Québec plus précisément, combien y en avait-il?
    Ce n'était pas des organisations nationales, mais pancanadiennes.
    D'accord.
    Nous utilisons le terme « pancanadien » parce qu'au Québec, le mot « national » désigne le Québec.

[Traduction]

    J'ai appris cela en 1986. J'ai été nommée au Conseil supérieur de l'éducation.
    À l'époque, les choses n'étaient pas envoyées en ligne; on m'a donc envoyé un énorme dossier pour que je me prépare; on y trouvait une multitude de discussions sur la

[Français]

politique nationale. J'étais très naïve et j'ai pensé que cela concernait le Canada.

[Traduction]

    Je me suis présentée à la table et j'ai fait un commentaire sur la politique canadienne; le président a dit:

[Français]

« Madame, vraiment, le mot "national", ici, veut dire le Québec. »
    Alors, disons qu'il y avait six organisations pancanadiennes.
    Merci.
    Vous avez aussi dit souhaiter faire

[Traduction]

    « des exemples précis ».
    Des exemples précis; très bien. Il y a certainement celui d'Info Québec.
    Je veux vous donner un exemple concret. L'organisation appelée YES, Youth Employment Services, n'offre aucune activité d'alphabétisation des adultes; elle est axée sur l'employabilité, mais elle regroupe tous les fournisseurs de services. Je dirais que l'un des résultats intéressants de l'étude que nous venons de compléter était que les gens de YES se sont montrés ouverts à l'idée que des gens de la communauté de l'alphabétisation participent à leurs rencontres, parce qu'ils estiment qu'il faudrait plus de partenariats. J'espère que cela se concrétisera.
    Lors d'une réunion à laquelle j'ai assisté, en novembre, une collègue est venue parler de nouveaux développements — de nouvelles initiatives stratégiques — à Emploi-Québec. La documentation avait été publiée un mois auparavant, environ, mais seulement en français. Cette femme, une francophone, assiste aussi aux réunions du côté anglophone.

  (1555)  

    Elle a demandé à une personne qui était à la table:

[Français]

« Est-ce que cela va être disponible en anglais? »

[Traduction]

    On lui a dit que non. Lorsqu'elle a demandé pourquoi, une autre personne a répondu: « Nous n'y avons pas pensé. » C'est une anecdote intéressante, parce qu'il n'y avait là aucune malice ni mauvaise intention; on n'y avait pas pensé.
    J'attire votre attention sur les conclusions d'une étude sur les centres d'emploi réalisée par YES. Elle a eu lieu l'été dernier dans cinq régions du Québec, à l'extérieur de Montréal, donc dans des régions qui n'ont pas nécessairement une importante communauté anglophone. On a constaté, pour la ville de Québec et sa région, qu'il y avait 56 centres d'emploi, dont un centre anglophone et huit centres bilingues. En Gaspésie, sur 31 centres, il y avait un centre anglophone et trois centres bilingues. Les centres bilingues n'étaient pas toujours en mesure de fournir des services adéquats en anglais. Désigner un centre comme « bilingue » ne signifiait pas pour autant qu'il offrait les services. Les anglophones que nous avons rencontrés en Gaspésie et dans certaines régions éloignées ont indiqué avoir demandé à quelqu'un de les accompagner, pour agir comme interprète, afin d'obtenir des services d'emploi. Il y avait beaucoup de commentaires.
    L'autre exemple qui me vient à l'esprit se rapporte peut-être un peu plus à votre question. Au Québec, il y a des pages en anglais sur les sites Web d'un bon nombre de programmes gouvernementaux, mais pour d'autres, il n'y a rien, ce qui ne veut pas dire que les anglophones n'ont pas accès au financement. Les anglophones peuvent demander de financement, mais tout doit se faire en français.
    Merci, Linda.
    Nous passons maintenant à François.
    Merci beaucoup d'être ici. Je vois que vous êtes très passionnée.
    Premièrement, je crois savoir que le Centre for Literacy a fermé en 2015 parce qu'il n'a reçu aucun financement après 2014, qu'il y a maintenant Literacy Quebec.
    Notre organisme existe depuis 30 ans.
    Il existait déjà, mais je veux dire...
    Nous étions tous les deux actifs au Québec.
    D'accord.
    Lorsque le Centre for Literacy était ouvert, quelle était la différence entre vos rôles respectifs? En quoi ses objectifs étaient-ils différents de ceux de Literacy Quebec? C'est la première question.
    Deuxièmement, vous avez longuement discuté du fait que le service bilingue pose problème, parce qu'on a souvent tendance à négliger l'une des deux langues. Nous le savons aussi, parce que c'est pareil avec le français. Il y a ce qu'on appelle

[Français]

«  par et pour »

[Traduction]

    la communauté, ou « by and for ». Selon vous, quelle est l'importance d'adopter ce même modèle pour la communauté anglophone du Québec?
    Literacy Quebec appuie les organismes communautaires d'alphabétisation. À l'époque, le Centre for Literacy nous fournissait de précieux renseignements, notamment des études, mais notre rôle consistait plutôt à appuyer les praticiens en alphabétisation sur le terrain. La fermeture du Centre for Literacy a été une grande perte, car il s'agissait d'un mécanisme qui nous permettait d'avoir une perspective plus large sur l'alphabétisation. Nous sommes très axés sur l'alphabétisation communautaire.
    Quant à la question sur le bilinguisme, Literacy Quebec représente les organismes communautaires d'alphabétisation de la province. Une bonne partie de notre travail consiste d'abord à mieux faire connaître la littératie et son incidence sur la vie quotidienne des gens, puis à faire savoir que nous sommes un organisme d'alphabétisation anglophone qui offre des services. Souvent, dans le cas des populations vulnérables, les gens en viennent à établir un lien de confiance avec les gens des organismes communautaires d'alphabétisation. Nous devenons alors le premier point de contact pour toutes sortes de choses, par exemple un problème lié à un bail ou à l'accès aux soins de santé ou aux services sociaux. Nous les aidons à obtenir des services en anglais.
    Je cède la parole à Linda.

  (1600)  

    Je pense que la réponse de Margo est un bon point de départ.
    Premièrement, nous faisions partie des six organismes pancanadiens. Il existe deux niveaux au pays. Margo travaillait au sein d'un organisme provincial. Elle représente les fournisseurs de services; elle collabore avec eux et les appuie. Son organisme est un organisme-cadre qui regroupe les fournisseurs de services de la communauté, sur le terrain. C'est à cela que sert le financement.
    Nous sommes un centre de recherche et de ressources. Nous n'avions pas du tout le même rôle.
    Actuellement, aucun organisme n'assume le rôle du Centre for Literacy.
    Non, pas en ce moment, où que ce soit au pays.
    C'est le vide; cela manque à la communauté.
    Oui. C'est un manque pour le pays.
    Vous a-t-on invités à participer aux consultations d'EDSC sur l'alphabétisation et les compétences essentielles? Je sais qu'il y aura des consultations avec les francophones; vous a-t-on invités?
    Oui.
    Quels commentaires comptez-vous faire? Pouvez-vous me résumer vos besoins?
    Linda présentera les conclusions de ses recherches, ce qui comprendra la liste des activités d'alphabétisation des anglophones au Québec. Je pense qu'une infrastructure est essentielle et qu'il faut créer des occasions pour consolider ce qui se fait déjà dans le domaine. Il serait en outre très utile d'établir des pratiques exemplaires et de rétablir le volet recherche qui a été perdu.

[Français]

     C'est excellent.

[Traduction]

    Lors de leur comparution la semaine dernière, les représentants du RESDAC ont indiqué qu'ils ne veulent pas rétablir ce qui existait auparavant. Il pourrait être possible de recréer quelque chose comme le Centre for Literacy, mais différent. Je veux savoir si vous discutez avec le RESDAC et si vous avez... Je sais que vous êtes membre de...

[Français]

    J'en suis encore membre.

[Traduction]

    Pouvez-vous être bref? Je dois passer à l'intervenant suivant.
    Oui.
    Êtes-vous en communication avec le RESDAC?
    Oui, bien sûr, car je siège au conseil d'administration.
    Ah, vous siégez au conseil d'administration.
    Oui.
    Merci.

[Français]

    Merci, monsieur Choquette.
    Monsieur Arseneault, vous avez la parole.
    Je vous remercie, monsieur le président.

[Traduction]

    Madame Shohet, madame Legault, je vous remercie d'être ici. En tant qu'Acadien du Nord du Nouveau-Brunswick, je trouve rafraîchissant d'entendre que les anglophones du Québec ont le même problème que nous.
    Dans votre exposé, madame Shohet, vous avez dit qu'il existe 13 organismes d'alphabétisation Québec. Pourriez-vous revenir brièvement là-dessus?
    C'était Margo.
    Certainement. Nous avons 12 organisations membres qui reçoivent du financement de base du ministère de l'Éducation pour l'alphabétisation des anglophones.
    Vous avez indiqué qu'il était presque impossible d'intervenir partout sur le territoire québécois et que vous avez dû cibler certaines régions plus que d'autres. Je viens d'une région rurale... Pour vous donner une idée, ma circonscription ressemble beaucoup aux côtes de la Gaspésie, et la majorité est francophone.

  (1605)  

    Ce n'est pas ce que j'ai dit.
    On compte de petits groupes de collectivités anglophones, des collectivités très vigoureuses. Sur le plan de l'alphabétisation, constatez-vous des différences entre les communautés anglophones des régions urbaines, comme Montréal, comparativement aux collectivités des Îles-de-la-Madeleine ou de la péninsule gaspésienne?
    Il y a évidemment une bonne densité de population en milieu urbain. Cela dit, qu'on soit en milieu rural ou urbain, il est très difficile d'entrer en contact avec les adultes ayant un faible niveau d'alphabétisation. Je dirais que leurs réactions sont très différentes. En milieu rural, certains de nos membres envisagent d'établir des noyaux satellites. Ils ne peuvent se déplacer; ils ont un bureau central et ils songent à former des gens de commissions scolaires ou d'organismes communautaires pour qu'ils puissent donner des cours d'alphabétisation. Ils transmettent le savoir, étant donné qu'ils ne peuvent se déplacer partout sur le territoire. Ils trouvent des façons d'offrir des services aux gens à distance.
    Dans les régions éloignées.
    Exactement.
    Toutes les communautés anglophones de la région urbaine de Montréal ont leurs propres grandes institutions: journée d'étudiants, quotidien, hôpital universitaire, etc. Ces institutions sont bien loin de Port-Daniel, à l'extrémité est de la Gaspésie. Entre vous et moi, l'alphabétisation est un moyen pour freiner l'assimilation, et les forces d'assimilation sont beaucoup plus fortes à Port-Daniel que dans les communautés anglophones de Montréal.
    C'est en effet ce que nous constatons. Il est difficile de faire de la promotion et la sensibilisation par l'intermédiaire des médias, et ce, même à Montréal. Les bulletins d'information de nombreuses municipalités de banlieue n'ont plus d'espace pour du contenu anglophone, tandis que d'autres n'ont que la couverture arrière. Même nos membres de Montréal ont de la difficulté à diffuser l'information. C'est un problème récurrent.
    Il n'y a pas que cela. Sur le plan des disparités, si vous consultez les enquêtes sur la vitalité qui sont réalisées tous les deux ou trois ans, vous verrez que l'enquête de 2015 a démontré que les anglophones de l'est de Montréal ont beaucoup de difficulté à accéder aux services. Le nombre de services et l'accès varient d'une partie à l'autre de Montréal. Dans certains secteurs, on peut aussi être assez isolé.
    Diriez-vous que la région urbaine de Montréal et l'extrémité est de la péninsule gaspésienne ont des besoins identiques ou semblables en matière d'alphabétisation?
    Je ne dirais pas que la situation est semblable, mais je crois qu'il s'agit d'un mythe lorsqu'on dit que la question des langues officielles en situation minoritaire n'est pas aussi importante dans les centres urbains. Cela demeure tout aussi important; c'est ce que nous constatons. Même nos centres situés à Montréal peinent à atteindre les anglophones et à promouvoir leurs services par l'intermédiaire des médias traditionnels.
    En ce qui concerne les lacunes liées à l'alphabétisation, le fait d'être en milieu urbain ou en milieu rural n'a aucune importance.
    Je n'irais pas jusque-là, mais l'intensité peut varier.
    Même des gens qui habitent sur l'île de Montréal me disent que dans certains secteurs, ils ont de la difficulté à trouver des livres anglophones à la bibliothèque municipale locale. Cela semble inconcevable, mais cela arrive. Cela nous ramène à ce que disait Linda: théoriquement, la communauté anglophone est très forte, mais lorsqu'on regarde la réalité sur le terrain, des problèmes subsistent.
    L'autre aspect est peut-être le fait que dans les grandes régions urbaines, les immigrants cherchent à obtenir des services en anglais. Sur le plan politique, ils passent par des programmes de francisation. Ils reçoivent des services en français.
    Ils n'ont pas le choix.
    Exactement. Or, beaucoup d'entre eux ont l'anglais comme langue maternelle ou langue seconde. Ils cherchent donc tout de même à obtenir des services en anglais. C'est très compliqué.
    Beaucoup d'organisations anglophones ont notamment fait valoir que leurs clients qui ont l'anglais comme langue seconde transfèrent les compétences acquises en français. Ils s'intègrent quand même au Québec, ils font tout de même partie de la société québécoise. Au début, si vous servez les gens dans la langue dans laquelle ils sont à l'aise de communiquer et que vous les appuyez, ils feront la transition. Vous faites alors partie de la solution, et non du problème.

  (1610)  

[Français]

     Merci, madame Shohet.
    Monsieur Vandal, vous avez la parole.
    Je vais céder mon temps de parole à M. Lefebvre.
    Il n'y a pas de problème.
    Monsieur Lefebvre, vous avez la parole.

[Traduction]

    Madame Shohet, merci d'être ici aujourd'hui. Vous êtes très intéressante.
    Je vous remercie de m'avoir invitée.
    En 2014, lorsque le gouvernement fédéral avait réduit le financement, il avait dit qu'il financerait les projets utiles seulement.
    Les projets utiles, oui.
    Ce sont les mots que vous avez utilisés.
    Non, c'est Jason Kenney qui a dit cela, pas moi.
    D'accord, excusez-moi.
    Croyez-vous que votre organisation, dont le financement a été réduit, atteignait les résultats souhaités?
    Je vais répondre à cette question avec nuance.
    Bien sûr.
    Je crois qu'on aurait pu mieux faire les choses. Je crois que nous étions rendus au point, à l'échelle pancanadienne, où il fallait le reconnaître. Nous voulions établir un nouveau modèle de collaboration. Nous travaillions

[Français]

au moyen des langues.

[Traduction]

    Nous travaillions en collaboration avec les divers groupes linguistiques, le CDÉACF, le RESDAC, le centre... Nous nous réunissions et nous parlions des façons d'accroître la collaboration.
    Est-ce que, à mon avis, le Centre d'alphabétisation atteignait les résultats souhaités? Nos résultats étaient assez bons. Est-ce que l'ensemble du secteur atteignait les résultats que nous souhaitions atteindre? En partie oui; mais ils auraient pu être meilleurs. On travaillait pour cela.
    Merci. La façon d'obtenir des données est importante, aussi.
    La façon de les obtenir, oui.
    La façon d'évaluer les données pour ensuite trouver des façons de s'améliorer.
    Oui, je suis d'accord.
    C'est ce qui manquait, entre autres. Êtes-vous d'accord avec moi?
    Oui.
    La collecte de données et l'évaluation...
    Je crois que c'est plus profond que cela.
    D'accord.
    Je crois que le problème dans le secteur était en partie créé par les interventions du gouvernement fédéral.
    Le gouvernement fédéral poussait les organisations à miser sur l'emploi et l'employabilité pour obtenir des fonds pour l'alphabétisation. Ainsi, toutes les organisations — sans égard à leur mission ou à leur mandat — ont commencé à intégrer ces éléments à leurs propositions. Après trois ou quatre ans, le gouvernement a dit: « On dirait que vous faites tous la même chose. »
    La même chose.
    Mais le langage utilisé était celui des bailleurs de fonds fédéraux.
    C'est intéressant.
    Je pourrais faire une tout autre analyse. Ce n'est pas simple.
    Sur le plan pragmatique et pratique, quelles mesures précises le gouvernement fédéral peut-il prendre pour accroître l'alphabétisation dans le Québec anglophone?
    Je vais revenir sur les propos de M. Choquette. Je ne crois pas que ce qui s'en vient ressemblera à ce qui a été fait avant. Ce qu'il y avait avant est disparu. Je crois qu'il faut faire un certain effort pour ne pas perdre ce qui existe encore, parce que nous avons perdu beaucoup de services dont nous aurions encore besoin; ils ne sont plus là.
    Si l'on peut récupérer certaines choses, alors il faudrait le faire, mais je crois qu'à l'heure actuelle, il faut travailler avec les réseaux et structures existants dans les provinces. Au Québec, plusieurs organisations ont déjà les réseaux, les structures et la confiance de la population. Si l'on pouvait les réunir d'une manière ou d'une autre, on pourrait probablement établir une nouvelle infrastructure qui n'aurait peut-être pas besoin du soutien dont on a eu besoin par le passé.
    Merci.
    Ce qui est intéressant au Québec — je ne sais pas si c'est Margo Legault ou Mme Shohet qui y a fait allusion dans son discours préliminaire —, c'est que la province vit des changements. Il y a une plus grande ouverture. On a nommé une ministre responsable des...
    C'est exact.
    ... des anglophones? Madame Weil.
    William Floch est le directeur.
    Qu'en pensez-vous? Comment cela peut-il vous aider et améliorer les relations entre le gouvernement provincial et le gouvernement fédéral en ce qui a trait au financement?
    Je crois que c'est un geste très positif et j'espère qu'on ouvrira la voie à un dialogue renouvelé entre le fédéral et le provincial, ce qui n'est pas beaucoup arrivé au cours des dernières années. Je crois que c'est une des possibilités.

  (1615)  

    Madame Legault, votre organisation souhaiterait que le nouveau ministère appuie l'alphabétisation des anglophones du Québec. Comment pourriez-vous y arriver?
    Madame Weil a tenu des consultations dans les régions rurales et nos membres y ont participé pour expliquer la situation des anglophones dans ces régions. Nous croyons qu'il s'agit d'une étape très positive qui nous permet d'exprimer nos préoccupations à une porte-parole.
    Je veux vous poser la question à nouveau, pour être certain, parce que le Comité transmettra un rapport à la ministre responsable. Quelles sont les recommandations que vous souhaiteriez voir dans le rapport à l'intention de la ministre?
    Voulez-vous commencer?
    Je n'irai pas dans les détails parce que certaines de nos recommandations se retrouveront dans le rapport que nous préparons pour le Bureau de l'alphabétisation et des compétences essentielles, dans deux semaines. On m'a demandé de ne pas parler des recommandations.
    Lorsqu'elles seront rendues publiques, pourrons-nous...
    Bien sûr, mais cela revient à ce que j'ai dit plus tôt. Je crois qu'il y a quelques entités dans la province. Celle de Margo aborde l'alphabétisation de façon directe. Les conseils scolaires... Il y a un réseau de centres d'apprentissage communautaires au Québec, qui est très important pour la population, et qui compte 86 centres dans diverses écoles de la province. Ces centres sont très bien situés; ils ont la confiance de la population et ils ont l'expertise requise. Ils n'ont pas pu faire grand-chose pour les adultes et leur alphabétisation au cours des dernières années en raison d'un manque de financement. Les infrastructures sont là, donc si vous pouviez établir des partenariats avec les fournisseurs de services, les conseils scolaires... il y a beaucoup d'éléments isolés à l'heure actuelle.
    Merci.
    Je cède maintenant la parole à Alupa.
    Merci, monsieur le président et bonjour, mesdames. Nous vous remercions de votre présence ici aujourd'hui.
    Je tiens à vous dire que si vous souhaitez qu'on intègre vos recommandations à notre rapport, vous pouvez les transmettre par écrit au Comité.
    J'ai rencontré Jean-Marc Fournier il y a un mois et demi et je lui ai demandé si le Québec aidait directement les groupes francophones en dehors du Québec. Y a-t-il d'autres provinces qui envoient de l'argent aux groupes anglophones du Québec pour vous aider?
    D'autres provinces?
    Oui. Avez-vous établi des relations avec d'autres provinces?
    Nous recevons des fonds du gouvernement fédéral, oui, mais pas des autres provinces...
    C'est intéressant. D'accord. Même s'il y a une affiliation religieuse ou autre? Vous ne recevez pas de fonds de qui que ce soit d'autre?
    Pas...
    Pas de la province ni du gouvernement, mais d'un autre groupe... Il n'y a pas de transfert d'aide, de personnes, d'argent ou de ressources?
    Une certaine participation, oui, mais pas d'aide.
    D'accord. Une participation...?
    Par exemple, le Centre d'alphabétisation tenait un institut annuel. Toutes les provinces du pays y envoyaient des représentants, et payaient pour leur participation.
    Je comprends.
    Ce n'était pas gratuit. Les provinces payaient pour y participer. Je ne dirais pas qu'elles nous donnaient de l'argent, parce qu'on leur offrait un service. C'était un échange de connaissances. Les provinces y participaient et collaboraient avec nous, mais le centre n'était pas considéré à titre d'organisation québécoise.
    Je vois.
    C'était une organisation pancanadienne aux fins du financement. C'est ce que j'ai dit. L'organisation de Margo est québécoise...
    Je crois que ce pourrait être une avenue intéressante. Ce serait logique et juste, parce qu'il y a neuf... et une province bilingue, le Québec, bien sûr... Il y a huit provinces anglophones, qui devraient prendre soin des anglophones du Québec, à mon avis.
    Personne n'a encore abordé le sujet.
    Je vais leur en parler.
    Des voix: Oh, oh!
    M. Alupa Clarke: J'ai une autre question, semblable à celle de M. Arseneault. Certains alarmistes, ou souverainistes, diront qu'à Montréal, les francophones disparaissent et que les anglophones prennent de plus en plus de place, mais j'aimerais aborder le sujet de la numératie sur l'île de Montréal. Vous avez dit que la numératie des groupes anglophones minoritaires du Québec se détériorait dans toute la province. Est-ce le cas des anglophones de Montréal? Y a-t-il une différence entre les anglophones de l'île de Montréal et ceux du reste de la province en ce qui a trait à la numératie?

  (1620)  

    Voulez-vous répondre à cette question, Margo?
    Il faudrait que je fasse une recherche là-dessus.
    Je dirais honnêtement que je n'ai pas examiné les chiffres sur la numératie.
    Si vous pouviez le faire, j'en serais très heureux...
    Je pourrais le faire, mais...
    ... J'aimerais voir une certaine analyse.
    ... Je ne peux pas vous répondre aujourd'hui parce que je n'ai pas étudié la situation attentivement.
    D'accord.
    Je trouve aussi intéressant que vous parliez de littératie et de numératie, parce qu'au Canada, on parle habituellement d'alphabétisation et de compétences essentielles. C'est très rare qu'on utilise les termes littératie et numératie.
    D'accord. J'ai utilisé les termes du Comité.
    Ce sont ceux utilisés dans d'autres pays, mais ce n'est pas habituel ici. Ce sont les mots qu'on utilise en Europe.
    De nombreux immigrants viennent à Montréal, Dieu merci, et bon nombre d'entre eux parlent anglais, naturellement. L'apprentissage du français est un défi important pour eux. Je me demande où ils se situent en ce qui a trait à la numératie et à la littératie. Aussi, comment cela aide-t-il les groupes minoritaires anglophones sur l'île de Montréal? Si vous avez quelque chose à dire à ce sujet, nous aimerions l'entendre.
    Encore une fois, je serai heureuse de faire une recherche là-dessus, mais je n'ai pas suffisamment de connaissances pour en parler.
    D'accord. Toujours en ce qui a trait à la numératie, vous avez dit que les groupes anglophones disparaissaient au Québec. Est-ce aussi le cas des groupes de numératie anglophones des autres provinces? Y a-t-il des groupes de numératie anglophones dans les autres provinces?
    Je ne suis pas certaine de comprendre...

[Français]

     Dans les autres provinces, y a-t-il des groupes dont le but est d'améliorer la littératie et la numératie des anglophones?

[Traduction]

    Je suppose que non...
    Parlez-vous du rendement des anglophones des autres régions du pays?
    Oui. Est-ce qu'il y a des groupes de numératie ou des associations, des organisations ou des programmes gouvernementaux?
    Oui, dans chaque province.
    D'accord.
    Vous parlez d'organisations comme celle de Margo? Oui.
    D'accord. Ces groupes sont des organisations gouvernementales...
    Non, ce sont...
    ... dans d'autres provinces. Sont-ils bien financés? Est-ce qu'ils sont efficaces?
    Ils sont habituellement financés par le gouvernement. Est-ce que c'est ce que vous voulez savoir? Oui.
    Est-ce que certains de ces organismes ferment leurs portes?
    Bon nombre d'entre eux ont dû fermer leurs portes parce qu'ils n'étaient plus financés par le gouvernement fédéral.
    L'organisme Literacy Alberta a fermé ses portes. En Ontario...
    Est-ce que vous dites que le gouvernement provincial ne finance même pas les organismes qui travaillent dans sa propre langue?
    Pas suffisamment.
    Je vois. C'est surprenant.
    Il n'y avait pas assez d'argent en Ontario pour que l'organisme reste ouvert. Compétences essentielles Ontario, la coalition de l'Ontario, a fermé ses portes.
    L'organisme de Terre-Neuve-et-Labrador a fermé ses portes, comme bon nombre d'autres.
    Pourquoi?
    L'organisme n'avait pas assez d'argent. Une grande partie du financement des infrastructures provenait du gouvernement fédéral. Les fonds fédéraux permettaient aux organismes de rester en vie. Toutes ces coalitions établies dans les diverses provinces étaient principalement financées par le gouvernement fédéral. Les provinces contribuaient aussi, mais ce n'était pas suffisant.

[Français]

C'était nécessaire, mais pas suffisant.
    Monsieur Samson, vous avez la parole.

[Traduction]

    Nous vous remercions de vos présentations.

[Français]

    Je les ai beaucoup appréciées.

[Traduction]

    Elles nous donnent un autre point de vue et nous permettent de mieux comprendre la situation.
    Je veux être certain de bien comprendre: l'une d'entre vous a dit que le financement de base avait été éliminé; vous avez ensuite dit que vous receviez toujours un financement de base. Pouvez-vous m'éclairer? Est-ce que les fonds viennent du gouvernement provincial ou du gouvernement fédéral?
    C'est le ministère de l'Éducation du Québec qui assure le financement de base du groupe de Margo.
    C'est provincial.
    Oui, c'est provincial. C'est la seule province à fournir du financement de base de ce genre, alors c'est quelque chose d'unique. Cela ne s'adresse pas qu'aux anglophones, mais à environ 185 groupes du Québec.
    Oui, il y a 127 organismes d'alphabétisation, dont 13 de langue anglaise.
    Vous avez aussi dit que les minorités avaient été particulièrement écorchées par les compressions. Pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet?
    Oui. C'est que les groupes minoritaires n'avaient pas vraiment d'autres ressources pour compenser. Quand le couperet est tombé, cela a signifié la fin de bien des programmes. C'était la principale source de financement pour eux, alors ils ont dû abandonner leurs activités. Il n'y avait pas d'autres ressources à leur disposition.
    Les minorités seront toujours les plus touchées par ce genre de mesure.
    C'est ce que je crois.
    Je voulais simplement entendre vos explications.
    Quand l'ancien ministre a déclaré que le gouvernement n'allait financer que les projets utiles, comment les gens sur le terrain ont-ils accueilli cette nouvelle?
    Nous n'étions pas très heureux. C'était insultant, parce qu'en coupant notre financement, on nous disait, indirectement, que tout ce que nous avions fait ne servait à rien, que nos services n'aidaient personne.
    Comment les changements apportés au financement ciblé ont-ils permis d'améliorer les services offerts aux groupes minoritaires?
    Ils n'ont rien amélioré.
    Pourquoi donc?

  (1625)  

    C'est pratiquement du financement ponctuel. Selon les projets financés à ce jour... Premièrement, on vous a probablement dit qu'une grande partie des sommes allouées par le Conseil du Trésor au Bureau de l'alphabétisation et des compétences essentielles n'ont pas été dépensées. C'est donc dire que des fonds réservés à l'alphabétisation et aux compétences essentielles dorment dans les coffres chaque année. C'est la première chose.
    Deuxièmement, ce financement n'est pas destiné précisément aux groupes linguistiques minoritaires. J'imagine que les représentants de la RESDAC et de la COFA vous en ont déjà parlé, mais dans ses dernières années de mandat, le gouvernement précédent a commencé à verser à différents groupes une bonne partie des fonds réservés aux projets « pour et par » les groupes minoritaires, qui ne recevaient plus rien. Je ne sais toutefois pas à quel point les choses ont changé depuis.
    Le gouvernement s'était défendu en niant que ces fonds étaient réservés aux groupes minoritaires; le seul critère était de desservir la population de la minorité linguistique. Donc, si un autre groupe arrivait en disant que 10 % de ses projets servaient la minorité linguistique, le gouvernement utilisait une partie des fonds réservés aux activités des groupes de minorité linguistique pour financer ce nouveau projet.
    Il y a eu une érosion subtile du financement.

[Français]

    Vous avez dit qu'il y avait eu des compressions en 2014 et en 2006.

[Traduction]

    En effet.

[Français]

    Vous avez parlé de 2006.

[Traduction]

    Qu'est-il arrivé en 2006?
    En 2006, il y a eu une refonte complète des politiques. En 2007, le Secrétariat national à l'alphabétisation a été remplacé par le Bureau de l'alphabétisation et des compétences essentielles.
    Et cela a été utile ou problématique?
    Cela a été problématique, car le mandat du bureau est encore plus restreint qu'il ne l'était.
    C'est aussi à ce moment que les ententes fédérales-provinciales ont pris fin; pas en 2014, mais en 2007. Il n'y a pas eu d'entente fédérale-provinciale depuis 2007.

[Français]

     Il y a une expression chez nous, en milieu minoritaire, pour dire que lorsque les temps sont difficiles financièrement, ce sont les minorités qui souffrent des compressions. On dit que quand il y a moins d'eau dans le lac, les animaux qui s'y abreuvent se regardent différemment.
     Il est évident que, depuis 2007, nous souffrons davantage, et il faut rappeler que les conservateurs étaient au pouvoir en 2007 ainsi qu'en 2014 lors des compressions. Nous avons donc du travail à faire.
     Je vous remercie.
    Merci beaucoup.
    Merci, monsieur Samson.
    Nous allons passer à M. Généreux.
    Je vous remercie, mesdames.
    Il y a eu des compressions ou des changements de politique parce que la façon de financer les organismes a été modifiée pour devenir du financement par projet. La semaine dernière, les gens du ministère nous ont dit qu'à cause de la situation du Réseau pour le développement de l'alphabétisme et des compétences, le RESDAC, ils étaient en train de revoir cela.
    Madame Shohet,  cela fait 30 ans que vous êtes dans le domaine. Quelles ont été les conséquences du changement de financement effectué il y a à peu près deux ou trois ans? Qu'est-ce que cela a changé sur le terrain?

[Traduction]

    Je crois que cela s'est fait en douce, dans certains cas. Pour d'autres, je reviens aux réponses données précédemment.
    La nouvelle politique fédérale étant plus pointue, les organisations ont dû elles aussi modifier leurs activités; cela a changé la nature de leur travail. Le nouveau réflexe était de dire: « Impossible de lancer un projet de recherche sur l'alphabétisation familiale, parce qu'il ne sera pas financé. » On tentait de trouver des fonds ailleurs, mais s'il n'y en avait pas, le projet était rayé du calendrier.
    Margo a parlé brièvement d'un sujet qui n'a pas été abordé aujourd'hui. Pendant cette même période, à la lumière des résultats de l'enquête internationale, le gouvernement fédéral a choisi de mettre l'accent sur les personnes de niveau 3, qu'on considère comme le niveau de littératie nécessaire pour bien fonctionner dans notre société. Le gouvernement a ainsi annoncé aux organisations que le financement irait aux projets s'adressant aux personnes qui pourraient passer du niveau 2 au niveau 3 assez rapidement. Les intervenants sur le terrain vous diront que ce virage a eu pour effet d'exclure ceux qui avaient le plus besoin d'aide, c'est-à-dire les personnes ayant d'importantes lacunes et qui auraient bénéficié le plus d'une intervention.

  (1630)  

[Français]

    La semaine dernière, j'ai essayé d'obtenir une réponse claire à une question très simple. J'ai demandé si c'était à la suite d'une commande politique que le fonctionnement de base avait été modifié pour devenir un fonctionnement par projet, et la dame qui était ici nous a répondu qu'elle n'était pas en poste à ce moment-là.
    Selon vous, est-ce que le fait de changer le financement de base pour un financement par projet répondait à une commande politique? À mon avis, il est important de savoir si c'est le gouvernement de l'époque qui a décidé de faire cela. Il y a eu des conséquences et nous pouvons en parler, mais si les fonctionnaires ont décidé de le faire sans que le pouvoir politique le demande, il serait important que nous le sachions.
    Êtes-vous en mesure de nous dire si c'était une commande politique ou non?

[Traduction]

    Je crois que c'était une décision interne. Globalement...

[Français]

    Ce sont les fonctionnaires qui avaient pris cette décision.

[Traduction]

    ... on a écarté...

[Français]

    J'ai demandé si on était en mesure d'évaluer véritablement le fonctionnement du financement, ou quels étaient les outils d'évaluation qui ont permis de dire que cela ne fonctionnait plus et qui ont fait qu'on a décidé d'aller de l'avant. Dans d'autres ministères, on fonctionne encore avec le financement de base.
    Oui.
    Est-on en train de nous dire que le financement de base ne fonctionne plus et qu'il est préférable d'opter pour le financement par projet?

[Traduction]

    Je vous dirais que nous n'avions pas les mesures appropriées pour le déterminer. Je ne crois pas que nous puissions le savoir.

[Français]

    Je vous écoutais tout à l'heure dire que la vie est une chose, mais que la réalité en est une autre, et que les données ne sont pas si probantes. C'est facile de faire parler des chiffres.
     Oui.
    C'est la vérité.
    C'est tout en ce qui me concerne.
    Je vous remercie.
    D'accord. Merci beaucoup.

[Traduction]

    Merci beaucoup, Linda et Margo, pour votre exposé. Et merci d'avoir pris part à cet échange avec nous.
    Merci beaucoup de nous avoir invitées.

[Français]

    Nous allons suspendre la séance quelques minutes.
    [La séance se poursuit à huis clos.]
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