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SECU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la sécurité publique et nationale


NUMÉRO 026 
l
2e SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 29 mai 2014

[Enregistrement électronique]

  (1540)  

[Traduction]

    Bon après-midi à tous. Je vous souhaite la bienvenue à la 26e séance du Comité permanent de la sécurité publique et nationale.
    Nous allons poursuivre aujourd'hui notre étude de la finance sociale.
    Pour la première heure de témoignages, nous accueillons M. Gianni Ciufo, associé et leader nord-américain, Services-conseils en financement corporatif chez Deloitte Canada. Nous nous excusons de commencer un peu en retard, monsieur, mais le calendrier parlementaire n'est pas ce qu'il y a de plus prévisible. Vous avez jusqu'à 10 minutes pour faire une déclaration, et nous allons ensuite poser des questions pendant presqu'une heure.
    Vous avez la parole, monsieur.
    Merci beaucoup. C'est un plaisir pour moi d'être ici.
    Afin de contribuer aux travaux du comité, je souhaite traiter dans ma déclaration liminaire de 10 minutes de certains facteurs sous-jacents susceptibles de favoriser la croissance dans le secteur de la finance sociale; déclencher certaines discussions sur son fonctionnement et ses avantages, notamment en ce qui a trait à la prévention du crime au Canada; et peut-être fournir certains renseignements provenant d'une étude de marché effectuée par Deloitte.
    J'ai des exemplaires en français et en anglais, dont vous pourriez vous prévaloir. Mes observations seront probablement assez claires pour que vous n'ayez pas à vous y référer, mais je vais vous les remettre volontiers si cela peut vous être utile.
    D'entrée de jeu, je précise que je suis partenaire chez Deloitte, à Toronto. J'ai étudié la question du financement privé, notamment la façon dont il appuie le développement des infrastructures et son incidence sur la prestation des services sociaux au Canada.
    Lorsqu'on se penche sur certains des facteurs sous-jacents qui favorisent actuellement la croissance de la finance sociale à l'échelle mondiale — et j'ose dire qu'à cet égard, le Canada n'est pas un chef de file sur le marché, mais il en deviendra probablement un —, on constate que les gouvernements font face à d'énormes défis financiers et qu'ils choisissent parmi diverses priorités, ce qui signifie qu'avoir accès à des capitaux et à du financement de l'extérieur peut les aider à aborder davantage de dossiers prioritaires et à répondre à d'autres besoins des contribuables.
    De nos jours, les contribuables s'attendent à plus. Ils s'attendent à ce qu'on se penche sur un plus grand nombre de problèmes, à ce qu'on facilite l'accès aux services gouvernementaux et à ce qu'on obtienne un meilleur taux de succès.
     Quand on examine les problèmes de société et la façon dont ils sont réglés par rapport à l'approche qui était employée auparavant —traditionnellement, les contribuables et les citoyens se tournaient souvent vers le gouvernement —, on constate que de nos jours, un grand nombre de ces problèmes sont souvent réglés par des acteurs du secteur privé, qui peuvent ainsi bénéficier de retombées économiques en plus de saisir l'occasion pour renforcer leurs images de marque, encourager les changements et les améliorations sur le plan social, et contribuer au développement de leur collectivité.
    Lorsqu'on observe le fonctionnement de la finance sociale en prenant, par exemple, les obligations à impact social, on constate que le gouvernement choisi un objectif social auquel il a réfléchi et intervient en conséquence. Il s'adresse à un intermédiaire qui propose des fournisseurs de services de toutes sortes et des bailleurs de fonds — qui sont potentiellement du secteur privé —, et qui les rassemble pour qu'en fin de compte, le coût de l'intervention et le rendement de l'investisseur soient inférieurs aux avantages associés aux économies réalisées et à l'évitement de coût dans potentiellement tous les ordres de gouvernement et tous les ministères.
    C'est sans aucun doute ce qui se fait dans le domaine de la prévention du crime où certaines responsabilités sont assumées par les municipalités, comme les services de police; certaines par le gouvernement fédéral, comme certains services correctionnels; et d'autres par les provinces.
    Parmi les avantages de cette approche pour le gouvernement, un des plus importants est d'ouvrir la porte à une nouvelle source de financement privé, ce qui lui permet de se prévaloir de solutions novatrices. Le secteur privé donne non seulement de l'argent, mais aussi des idées quant à la façon, si on peut dire, d'améliorer le problème social.
    Particulièrement dans le cas des obligations à impact social, le mécanisme employé permet au gouvernement de ne payer que pour des résultats positifs. C'est un outil très puissant.

  (1545)  

    En général, dans des programmes comme celui-ci, les résultats sont manifestes pour le public. Cela fait habituellement partie d'une bonne gestion.
    Les fournisseurs de service aiment cette façon de faire, car ils obtiennent ainsi une source de financement à long terme qui leur permet de mieux se préparer, de réduire leurs investissements, de croître en tant qu'organisations et de mettre l'accent sur les paramètres et les mesures de rendement pour être certains de respecter leurs obligations. L'investisseur peut ensuite être payé.
    Je pense que le dernier point que j'aimerais aborder est qu'à l'automne de 2013, Deloitte et le Centre d'investissement d'impact MaRS ont examiné et consulté 80 investisseurs potentiels du marché de la science sociale, à savoir des banques, des coopératives de crédit, des fondations et des particuliers bienveillants, et constaté qu'ils sont disposés à participer à ce marché et qu'ils cherchent des occasions de le faire. Cela suscite beaucoup d'intérêt, et nous commençons à voir un niveau de préparation élevé.
    Ils sont également disposés à accepter les interventions sociales et les objectifs du gouvernement qui englobent la prévention du crime, l'itinérance et l'éducation, et ils sont très ouverts à l'idée de réfléchir à la façon dont ils peuvent contribuer à la résolution de problèmes dans tous ces domaines. Ils sont conscients que la collaboration avec le gouvernement, les projets initiaux et la courbe d'apprentissage brusque poseront certains défis. Cependant, ils savent et comprennent qu'avec le temps, les coûts de transaction et le transfert des connaissances à cet égard devraient très bientôt être fréquents. Ils aimeraient participer en tant que consortium et considèrent que le rôle d'intermédiaire sera très important dans ce dossier.
    Mais je répète que cela suscite beaucoup d'intérêt, et que nous commençons à voir un niveau de préparation élevé alors que les investisseurs s'inspirent de ce qui se fait ailleurs dans le monde et qu'ils cherchent un projet pilote canadien qui connaît du succès et auquel ils pourraient participer.
    Voilà qui conclut mon exposé.
    Merci beaucoup, monsieur Ciufo.
    Nous allons maintenant faire un premier tour de questions de sept minutes.
    M. Maguire sera le premier à prendre la parole.

  (1550)  

    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Ciufo, merci de votre exposé. Bien entendu, je veux vous poser des questions sur l'ensemble du processus.
    Certains groupes avaient des réserves, mais vous venez tout juste de dire que selon certaines de vos études, si je ne m'abuse, 80 investisseurs potentiels manifestent beaucoup d'intérêt et seraient vraiment disposés à participer. Je me demandais si vous pouviez nous dire ce que vous entendez par « niveau de préparation élevé ». Pourriez-vous prendre une minute pour nous dire ce qu'il en est, ce que cela signifie? Se penchent-ils sur la façon dont ils pourraient se joindre à d'autres partenaires de l'industrie et à d'autres partenaires sociaux? Comment définiriez-vous un niveau de préparation élevé?
    Parmi les investisseurs que nous avons rencontrés, je crois qu'ils sont nombreux à avoir appris beaucoup de la récente évolution du marché canadien de l'infrastructure et à se sentir à l'aise par rapport aux risques des contrats fondés sur le rendement. Ces contrats se sont révélés efficaces dans ce marché, et ils voient donc d'éventuels avantages à reprendre cette façon de faire dans un marché où on offre entre autres des services visant à améliorer les conditions sociales. Cet un aspect de l'état de préparation: ils voient que le financement privé peut jouer un rôle en fonction des risques.
    L'autre aspect se rapporte à la compréhension des projets pilotes qui ont été mis en oeuvre dans d'autres pays, comme les États-Unis, le Royaume-Uni et l'Australie, dont les projets, comme par hasard, relèvent carrément de la prévention du crime et des domaines plus vastes de la justice, des services correctionnels, et d'autres domaines semblables. Ils visent entre autres à réduire le taux de récidive et à s'assurer que les jeunes à risque demeurent actifs et ne se retrouvent pas dans des établissements. Ils ont étudié ces projets et en ont tiré des enseignements, et ils envisagent de participer à des programmes similaires qui seraient mis en oeuvre au Canada et peut-être adaptés d'une certaine façon à un marché canadien qui n'a pas encore été créé.
    Merci.
    Un de vos articles publiés il y a quelque temps — vous en avez écrit beaucoup, et j'ignore si vous avez eu la chance d'en parler — était un article paru à Peterborough au sujet du Royaume-Uni. On tâchait de faire référence au fait que relativement peu d'argent était dépensé au Royaume-Uni pour aider les délinquants détenus à court terme à surmonter leurs problèmes.
    À votre avis, pourrait-on prendre une mesure de ce genre au Canada? La situation serait-elle la même? Quels chiffres pouvez-vous nous donner à ce sujet?
    Je crois que le taux de récidive au Canada est publié. Ce serait certainement une bonne chose de le réduire. C'est un excellent objectif social à partir duquel on pourrait mettre en oeuvre un projet pilote, pour diverses raisons. Il serait possible de structurer les populations échantillonnées de manière à bien comprendre le lien de cause à effet qui se rattache à vos programmes.
    Il faut toujours tenir compte de facteurs externes, mais, de façon générale, il est possible d'établir une population cible à partir de laquelle on peut être raisonnablement certain de connaître et de comprendre les répercussions potentielles d'un programme sur la population. Je crois que c'est important.
    C'est la réponse que je vous donnerais.
    Pendant la discussion, nous avons entendu certains témoins et députés de l'opposition nous faire part de préoccupations, au moins en ce qui a trait aux obligations à impact social et à certains autres programmes pour aider l'industrie privée à s'engager dans les domaines en question. On nous a dit que ce modèle attire des investisseurs qui veulent se servir des maux de la société pour faire de l'argent, si on peut dire.
    Pensez-vous que c'est le cas, ou que les investisseurs ont surtout en tête le bien commun plutôt que des gains financiers?
    Je pense que les investisseurs auront différents objectifs. Une banque commerciale pourrait ne pas avoir le même but qu'un fonds de pension ou un particulier qui s'intéresse aux objectifs sociaux de sa collectivité. Par exemple, un particulier pourrait vouloir réduire le taux de récidivisme dans sa collectivité, ou un employeur ou un fonds de pension pourrait souhaiter réduire le taux de chômage ou améliorer les compétences d'éventuels employés. Je pense donc que cela dépend des objectifs.
    Cela dit, je crois que la valeur ajoutée potentielle peut être un outil très puissant lorsqu'un intervenant aligne ses efforts sur les répercussions sociales d'un projet. Il veut un résultat positif étant donné qu'il est membre de la collectivité visée et qu'il souhaite qu'elle profite du rendement obtenu.
    Je pense qu'il serait sain que le Canada ait des obligations à impact social — n'oublions pas que ces obligations ne sont qu'un seul des outils de la finance sociale — pour qu'il y ait une véritable diligence raisonnable sur le plan commercial de la part de l'investisseur et du fournisseur de services, de manière à ce qu'on puisse examiner et évaluer la capacité du fournisseur à offrir les services concernés, à lui faire grandement confiance et à exiger qu'il réalise potentiellement moins de profits, ce qui représenterait une valeur ajoutée pour les contribuables.

  (1555)  

    Soyez très bref, monsieur Maguire.
    Oui.
    Vous avez... [Note de la rédaction: difficultés techniques] un certain nombre de domaines, mais pourriez-vous en dire davantage sur le document intitulé « Payer pour obtenir des résultats » que Deloitte vient tout juste de publier?
    Le document qui porte sur les obligations à impact social.
    Oui.
    Le temps est écoulé, monsieur Ciufo. Si vous le désirez, n'hésitez pas à répondre à la question lors d'un autre tour ou lorsqu'un autre député aura la parole.
    D'ici là, nous allons maintenant passer à M. Garrison.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci beaucoup aux témoins d'être ici aujourd'hui.
    Je vais formuler certaines observations avant de m'adresser au témoin. Je ne veux pas manquer de respect aux divers témoins, mais elles concernent les priorités mal placées du comité.
    De nombreux témoins nous ont parlé de la finance sociale, et je ne dis pas que je m'y oppose, car, de toute évidence, elle donne beaucoup de bons résultats dans les collectivités. Par contre, nous pensons qu'il y a beaucoup d'autres questions urgentes sur lesquelles le comité doit se pencher dans le cadre de son mandat et que le gouvernement doit examiner.
    Pas plus tard qu'aujourd'hui, on nous a informés d'une affaire très pressante concernant les suicides au sein de la GRC. Le sous-commissaire a admis qu'aucune étude à ce sujet n'a été menée même si 16 suicides de membres actifs ont été documentés depuis huit ans et que, au cours de la même période, 13 retraités se sont également enlevé la vie. Nous perdons de trois à quatre membres de la GRC chaque année parce qu'ils se suicident, mais la GRC ne l'avait pas signalé. Aujourd'hui, nous avons demandé au ministre s'il avait réclamé l'établissement d'un rapport sur les suicides, et rien ne nous a laissé croire que c'était le cas.
    Ce taux de suicide, ce taux de décès, est très choquant. Il est plus élevé que chez les militaires et, la plupart des années, il excède également le nombre de membres de la GRC tués dans l'exercice de leurs fonctions. Par conséquent, le fait que nous n'avons pas porté attention à cela est une question beaucoup plus urgente que celles dont le comité a été saisi.
    Dans cette optique, je vais présenter un avis de motion. J'en ai une copie dans les deux langues officielles à l'intention du greffier. Voici la motion:
Que le Comité mène une étude sur la crise urgente de suicide parmi les membres de la Gendarmerie royale du Canada et que le Comité rapporte ses constats à la Chambre des communes.
    Je ne demande pas que nous discutions immédiatement de cette motion, mais je pense que le comité doit réfléchir très bientôt à ce qu'il fait et à la façon dont il utilisera le peu de temps qu'il lui reste pendant cette session.
    C'est bien, monsieur Garrison. Dans le cadre des travaux du comité, vous avez parfaitement le droit de le faire. Votre motion a été présentée en bonne et due forme. J'aimerais maintenant que vous reveniez au sujet dont il est question ici.
    D'accord. Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je tiens à vous présenter mes excuses. Cela n'a rien à voir avec les bonnes choses dont notre témoin va nous parler. Encore une fois, cela concerne nos priorités en tant que groupe.
    Mme Elizabeth Lower-Basch, de l'institut de Washington, D.C., nous a parlé de l'impact social et du paiement en fonction du succès. À la suite de l'étude qu'elle a réalisée, elle a conclu qu'en signant ces ententes, le gouvernement atteint un objectif qu'il aurait atteint à un coût inférieur s'il avait fait le travail lui-même. Le temps qu'il s'occupe des coûts d'infrastructure supplémentaires requis pour qu'un groupe privé s'en occupe et qu'il mette en place une sorte d'incitatif ou de rendement des investissements, selon elle, s'il avait voulu atteindre l'objectif, il l'aurait fait à moindre coût en procédant directement.
    Auriez-vous un commentaire à formuler là-dessus?

  (1600)  

    J'ai un commentaire fondé sur des observations ponctuelles plutôt que sur des études. Dans le cadre de mon travail auprès d'organismes du secteur public, j'ai remarqué une sorte de transformation; le gouvernement semble moins intéressé à fournir directement des services et plus intéressé à se concentrer sur le rôle fondamental des politiques, de la réglementation, ainsi que sur le bien-être de ses électeurs, dans certaines circonstances où il peut estimer avantageux de faire appel en leur nom à d'autres fournisseurs pour des services, du financement ou des compétences en gestion. C'est un outil disponible, et je crois que c'est avantageux dans certains cas, mais pas dans tous les cas.
    Il y a certes des exemples analogues dans d'autres secteurs de notre économie, par exemple dans le marché de l'infrastructure.
    Les députés de ce côté aiment laisser entendre que si nous soulevons ces questions, c'est que nous nous opposons au principe de financement social, et je tiens simplement à dire que pour moi, c'est la même chose que tout autre rôle caritatif. J'approuve les sociétés ou les groupes philanthropiques qui souhaitent investir dans le bien public, mais cela me préoccupe que le gouvernement finance cette initiative avec l'argent des contribuables, alors qu'il devrait faire lui-même ce travail. Si le gouvernement accorde ce financement, il n'y a aucun gain net.
    Comme je l'ai dit, d'autres pensent que cela entraîne une perte, car il en coûte plus cher de le faire par l'intermédiaire d'un tiers.
    C'est un excellent point. Je dirai bien respectueusement que de temps à autre, le gouvernement participe à des projets de finance sociale en soutenant, par exemple, certaines industries au moyen de prêts ou de subventions aux personnes à faible revenu ou sans revenu afin de renforcer l'industrie ou de maintenir les emplois dans une collectivité. Je laisse au gouvernement le soin de décider de la conception et de la mise en oeuvre de ces programmes, mais je dirais, selon leur proportion au Canada, tant au niveau provincial que fédéral, qu'il a peut-être un rôle à jouer. J'encourage également, si je puis dire, le comité à examiner d'autres types de finance sociale. Je pense par exemple aux microprêts, qui existent depuis des décennies et qui permettent à des personnes de lancer leur propre entreprise, à domicile ou non, et de subvenir à leurs besoins et à ceux de leur famille. Je trouve que c'est un outil très positif.
    Il vous reste 30 secondes.
    Il y a une autre chose qui nous préoccupe de ce côté, et c'est que certaines collectivités ne sont peut-être pas aussi avantagées que d'autres parce qu'elles n'ont pas d'organisations philanthropiques, ou que certains groupes de la population — nous avons entendu des personnes qui travaillaient auprès des délinquants sexuels — n'ont pas le même accès à ce genre de projets parce que l'on considère qu'il est moins intéressant et plus difficile de traiter avec eux.
    J'aimerais simplement savoir si vous avez un commentaire à formuler sur la sélection des projets.
    J'aime à penser que le Canada est une société bienveillante, que nous pouvons déterminer quelles personnes méritent de recevoir du soutien dans nos collectivités, et que nous reconnaissons les groupes touchés ainsi que ceux qui sont désavantagés du point de vue géographique ou socioéconomique. Ce sera toujours un problème, mais j'ai bon espoir que le Canada tendra la main à ces groupes et essaiera de les aider lorsqu'il les repérera.
    Merci beaucoup, monsieur Ciufo.
    C'est maintenant au tour de M. Richards.
    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie de votre présence. Je trouve vos observations très intéressantes jusqu'ici.
    Il semble y avoir certaines critiques de la part des députés d'en face au sujet du financement social; ils semblent le critiquer dans les deux sens. Ils semblent penser que le gouvernement consacrerait moins d'argent à la prévention du crime s'il empruntait cette voie, mais d'un autre côté, qu'il pourrait dépenser davantage parce que le secteur privé en tirera des profits, ou quel que soit leur argument. Je pense qu'ils passent à côté de la question.
    Dans le rapport intitulé Payer pour obtenir des résultats, que vous avez commandé et qui est rédigé par Tim Draimin, le directeur exécutif de Génération de l'innovation sociale, il y a un passage très intéressant. Je vais le lire parce qu'il est très bref, et je pense qu'il présente un argument de taille:
L'obligation à impact social est un merveilleux mode de financement social. Il permet notamment au gouvernement de catalyser des interventions préventives plutôt que de simplement rester pris à composer avec les conséquences. Ça réduit le risque que doit assumer le gouvernement:
    Et on présente ensuite cet élément clé:
si l'on ne produit aucun avantage positif, le gouvernement n'a aucune obligation de payer.
    En somme, ce qu'il dit, c'est que cela garantit l'atteinte de résultats, et c'est le but de l'obligation à impact social. Le principe, c'est que le gouvernement aura des partenaires avec lesquels travailler, et nous veillerons à ce que l'on obtienne des résultats avantageux pour les contribuables. Voilà l'élément clé que je vois ici.
    J'aimerais savoir ce que vous en pensez. Êtes-vous du même avis? Considérez-vous que c'est une façon de s'assurer que les contribuables en aient pour leur argent et que l'on obtienne des résultats? Selon vous, est-ce un modèle dont tout le monde pourrait profiter, pas seulement le gouvernement, en s'assurant que les contribuables en aient pour leur argent?
    Diriez-vous que ce serait une bonne description? Pourquoi?

  (1605)  

    Oui, je crois que ce serait une bonne description. Quand je travaille avec des clients du secteur public, je m'efforce de définir la valeur de plusieurs façons: sur le plan des dollars et des cents, de l'atténuation des risques, des retombées économiques, et de l'avantage social. Quand je songe aux possibilités liées à la finance sociale en général, mais plus particulièrement à un instrument comme les obligations d'impact social, je vois des éléments et un système qui pourraient, si on les appliquaient correctement dans le contexte canadien, produire des résultats avantageux au gouvernement, avec tous les autres aspects, pour les contribuables et pour les personnes touchées qui tentent d'améliorer leur situation.
    Je dirais donc que l'aspect relatif au paiement en fonction du rendement, dans les obligations à impact social, est très puissant — pas de rendement, pas de paiement. De plus, si les seuils sont établis de manière responsable et adéquate, ils peuvent être adaptés à la situation, de sorte que l'on peut adapter le résultat lié à la valeur au gouvernement. La mesure pose certains problèmes, mais l'information et la mesure posent toujours des problèmes dans les transactions de ce type, et ces problèmes peuvent être surmontés, selon moi.
    Je pense que dans une certaine mesure, cela rejoint ma prochaine question, car c'est en effet l'une des critiques que l'on entend au sujet du modèle actuel des programmes de prévention du crime. On ne dispose d'aucun outil concret pour mesurer les résultats. Diriez-vous, cependant, que l'obligation à impact social nous permettrait de trouver une meilleure façon d'obtenir des résultats plus définitifs que nous pourrions mesurer? Je pense que cela devrait faire partie du modèle de l'obligation à impact social. Il va de soi que s'il faut payer l'atteinte de bons résultats, il doit y avoir une façon de déterminer que les résultats escomptés ont été atteints. Je sais que vous en avez parlé brièvement dans votre réponse précédente, mais selon vous, s'agit-il de l'un des aspects positifs?
    Tout à fait. Je pense que les fournisseurs de service, pour un modèle comme celui-ci, seraient peut-être forcés d'élaborer de meilleurs outils de mesure du rendement, et de rendre des comptes de façon transparente à la population, ou de faire mesurer leur taux de succès, ce qu'ils ont accompli, par un évaluateur indépendant.
    Je dirais également que les obligations à impact social sont censées constituer des interventions proactives. Par exemple, on peut vérifier le taux de récidive, qui est un paramètre de mesure clair, mais on peut aussi retourner dans le système et vérifier, par exemple, les facteurs contribuant à un taux inférieur de récidive. Nous commencerions peut-être à considérer le niveau de scolarité ou le nombre de diplômés du système d'éducation au sein du système correctionnel comme un indicateur positif et un facteur qui contribue à faire baisser le taux de récidive. De tels éléments pourraient constituer un outil très puissant pour atteindre l'objectif social que l'on vise. Je suis donc d'accord.

  (1610)  

    Combien de temps me reste-t-il — environ une minute? Parfait, cela devrait suffire.
    L'une des premières questions qu'on nous pose, c'est s'il y aurait suffisamment de capitaux disponibles au Canada. Je pense que vous-même et d'autres personnes avez clairement indiqué qu'il semble y avoir beaucoup d'investisseurs qui souhaiteraient investir pour le bien collectif. Est-ce vrai? Cela intéresse-t-il beaucoup d'investisseurs? Vous le savez sans doute, compte tenu de votre travail.
    Oui. Étant donné que le Canada est un pays très conservateur sur le plan financier — et cela nous est favorable, à mon avis —, il y a assurément une volonté, dans l'ensemble de la communauté des investisseurs dont j'ai parlé tout à l'heure, d'investir dans des initiatives de ce genre. Par exemple, parmi les 80 investisseurs sondés récemment dans le cadre de notre étude de marché, il y en a deux qui étaient prêts à envisager des investissements de plus de 5 millions de dollars chacun, et ce, dès les premières étapes, lorsque le marché est très jeune au Canada. Je crois que c'est un indicateur positif. De plus, la plupart des investisseurs se disaient prêts à investir. Je pense que ces 80 investisseurs représentaient ce qu'ils appelleraient un réservoir de capitaux potentiels d'environ 30 à 40 millions de dollars, qu'ils étaient prêts à investir dans ce secteur. Ce n'est qu'un point de données; toutefois, cela m'indique que la réponse à votre question est oui.
    Très bien. Merci beaucoup, monsieur Ciufo, et merci, monsieur Richards.
    Monsieur Easter, vous avez la parole pour sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Ciufo, je vous remercie de votre exposé.
    À propos des 80 investisseurs sondés, quel rendement des investissements envisagent-ils pour les projets de finance sociale?
    Cela dépend vraiment de la situation. Je pense qu'un projet pilote sur les obligations à impact social au Canada qui serait viable, durable et bien conçu aurait un taux de rendement raisonnable qui correspondrait au risque sous-jacent de l'investissement — ou plutôt du prêt.
    Je crois que le Canada a un marché des services bancaires très bien développé et que nous devrions nous en inspirer. Une obligation à impact social prudente inciterait les investisseurs à faire preuve de diligence raisonnable par rapport au fournisseur de services potentiel, ce qui offrirait beaucoup plus de certitude sur l'atteinte des objectifs et des seuils de rendement. Et grâce à cette diligence raisonnable, le risque lié à l'investissement potentiel serait réduit et, par conséquent, un taux de rendement plus faible serait requis, proportionnel à la possibilité d'investissement.
    Croyez-vous que cet investissement pourrait aller jusqu'à la privatisation d'une partie du système carcéral au Canada?
    À mon sens, il n'y a aucun lien entre une obligation d'impact social et la privatisation de services publiques. Ce n'est pas l'objectif de l'instrument.
    Une étape ne pourrait-elle pas mener à une autre? Il y a des prisons à des fins lucratives aux États-Unis.
    Je dirais que les prisons aux États-Unis ont été privatisées bien avant que les obligations à impact social ne soient envisagées. Je n'associe pas les deux. On peut faire des liens potentiels de diverses façons, mais je les considère comme deux choses distinctes.
    Je comprends votre point de vue, mais j'ai du mal à établir un lien entre les deux.

  (1615)  

    Si, au bout du compte, la clé de cette proposition, ce sont les résultats; s'il y a de bons résultats et, comme récompense, un meilleur rendement des investissements, qu'arrive-t-il s'il n'y a pas de résultats, pas seulement si le gouvernement ne paie pas, mais si...? Ce que je crains, dans tout cela, c'est qu'il y ait un transfert de responsabilités vers le secteur public dans des domaines du système de justice pénale qui relèvent ultimement des gouvernements.
    Qu'arrive-t-il s'il n'y a pas de bons résultats, si les objectifs de rendement ne sont pas atteints?
    Le mécanisme de paiement et les seuils de rendement sont établis pour chacune des transactions. Mais au plus haut niveau, si les seuils ne sont pas atteints, le gouvernement exige un paiement moins élevé. Je crois que c'est raisonnable, d'un point de vue commercial. J'encourage le gouvernement à passer plus de contrats axés sur le rendement, où lorsqu'il obtient ce qui était prévu, il devra faire et il fera le paiement complet. Je crois également que le gouvernement du Canada n'a pas l'habitude de se soustraire à ses obligations; s'il concluait une entente pour recevoir des services et si les résultats étaient atteints, je pense que le gouvernement respecterait et devrait respecter l'obligation.
    Parmi les initiatives auxquelles vous participez au Canada, y en a-t-il qui ont actuellement recours à ce type de financement? Le cas échéant, quels en sont les résultats?
    Si vous examinez ce qu'il en est au plus haut échelon, vous constaterez que cela inclut des fonds privés. J'ai participé à 50 ou 60 transactions gouvernementales qui visaient la réalisation de projets d'infrastructures: des systèmes de transport en commun, des autoroutes, des écoles, des aéroports, etc. C'est du financement privé, et nous le voyons dans la majorité des provinces canadiennes; le gouvernement fédéral réalise des projets d'infrastructures grâce à des fonds privés.
    Par contre, cela concerne davantage les aspects économiques de la construction, au sens où on l’entend traditionnellement, que la finance sociale, n’est-ce pas?
    Pour ce qui est de la finance sociale, j’ai joué un rôle dans une obligation à impact social en Saskatchewan, dont la transaction a été conclue récemment. Le Canada ne compte pas beaucoup d’exemples en la matière.
    Merci.
    Merci, monsieur le président. Ce sera tout.
    Merci beaucoup.
    Madame Doré Lefebvre, allez-y, s'il vous plaît.

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur le président.
     Je vous remercie, monsieur Ciufo, d'être parmi nous aujourd'hui. Votre présentation était extrêmement intéressante.
    J'ai eu le temps de survoler le document sur les obligations à impact social que vous nous avez fait parvenir. C'était très intéressant.
    Comme mon collègue M. Garrison, je ne suis pas contre la finance sociale, mais je me questionne beaucoup. Je crois qu'à ce sujet, les témoins sont allés un peu dans tous les sens. À partir de Washington, on nous a dit qu'un financement direct, par le gouvernement, serait plus facile, mais qu'il faudrait aller voir du côté du secteur privé, ce qui, en fin de compte, coûterait plus cher. D'autres témoins nous ont dit craindre que le gouvernement se désengage sur le plan du financement. Enfin, il y a présentement au Québec un problème en matière de finance sociale. Des inquiétudes ont été soulevées concernant en particulier une fondation privée et son influence marquée sur les politiques sociales du gouvernement au pouvoir.
    Il y a donc beaucoup de questionnements et d'inquiétude. Il y a des projets pilotes dans plusieurs régions du monde, entre autres au Royaume-Uni. Il n'y a pas encore de résultats concrets, mais pour ma part, j'ai bien hâte de voir ces résultats.
    Cela dit, des témoins ont mentionné que pour certains aspects de la sécurité publique, il ne serait peut-être pas approprié d'appliquer le financement social.
    Êtes-vous de cet avis?

  (1620)  

[Traduction]

    Vous posez de bonnes questions. Je m’excuse, mais pour une raison inconnue je n’ai pas entendu l’interprétation de la première partie de votre question. Je m’excuse, mais je vais essayer d'y répondre au mieux de mes capacités.
    Votre observation est judicieuse, à savoir que nous n’avons pas pour l’instant beaucoup de données ou de résultats sur lesquels nous fonder pour tirer des conclusions éclairées dans tous les secteurs de la finance sociale. Dans le cas des microprêts, c’est vrai que ces outils éprouvés existent depuis des décennies. Pour ce qui est des obligations à impact social, vous soulevez un excellent point.
    Nous n’avons pas en main des données parfaites, et cela fait partie des problèmes dont vous faisiez état. D’après moi, nous avons la responsabilité d’examiner une situation et de nous demander, en pesant le pour et le contre et en nous basant sur les renseignements disponibles et nos connaissances, si c’est possible, si nous sommes convaincus que nous aurons des résultats aussi positifs sur le plan financier que sur le plan social, si nous pouvons y arriver d’une autre manière et s’il y a une bonne analyse de rentabilité à ce sujet. Si l’analyse de rentabilité est positive et que cela convainc le gouvernement, ces preuves et ces raisons sont suffisantes pour décider que c’est peut-être quelque chose que nous devrions essayer. Nous devrions essayer d’améliorer, chez certains groupes, le taux de diplomation, le taux de récidive ou le taux de rétention des personnes vulnérables.
    De plus, nous avons la responsabilité d’examiner objectivement le tout pendant et après les faits. Si les résultats ne sont pas positifs, nous en tirons des leçons et adaptons les programmes. Nous pouvons également décider que ce n’est peut-être pas un mécanisme efficace pour certains services ou certains secteurs. Je suis d’avis que nous avons évidemment la responsabilité d’aller de l’avant seulement si l’analyse de rentabilité effectuée est convaincante et fortement positive. Nous devons également évaluer la progression, faire des suivis et faire rapport de manière transparente des résultats aux contribuables.

[Français]

    Qu'est-ce qu'un investisseur privé peut retirer à investir dans des obligations à impact social? Je présume que dépendant du programme, il peut en retirer certains dividendes. Dans d'autres cas, cela peut avoir un effet positif sur la réputation d'une société ou d'un organisme privé. Qu'est-ce que l'investisseur privé va retirer principalement de ce type de financement?

[Traduction]

    C’est une excellente question.
    Les investisseurs privés cherchent peut-être seulement à en tirer un rendement du capital investi. C’est possible qu’une banque commerciale finance un tel outil. Par contre, l’investisseur profite davantage du gain social qui en découle: la contribution à la société et l’amélioration de son image. Les organisations réinvestissent normalement dans la collectivité où elles engrangent des profits; elles font des dons de bienfaisance. C’est ce qui se passe en général dans le cas des entreprises canadiennes.
    Je crois que les investisseurs qui normalement en tireraient seulement un rendement du capital investi profiteraient également de leur contribution à des actions positives dans leur collectivité et de l’amélioration de leur image et de leur marque de commerce et l’apprécieraient. Les investisseurs chercheraient de telles occasions. Cela se voit généralement dans le principe du triple résultat: contribuer à de bonnes mesures sociales, aider l’environnement et devenir un participant responsable dans le marché canadien.

  (1625)  

    Merci, monsieur Ciufo.
    Monsieur Payne, allez-y. Vous avez cinq minutes, s’il vous plaît.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Ciufo, merci de votre présence.
    Je trouve très intéressant le sujet des obligations à impact social. En consultant la documentation que vous nous avez remise, j’ai l’impression que Deloitte s’intéresse à la question et compte parmi les entreprises à la fine pointe en la matière.
    Vous avez déjà communiqué avec plus de 80 organisations qui sont disposées à fournir des fonds. Je crois que c’est un très bon signe.
    Vous avez mentionné plus tôt qu’une obligation à impact social a été émise en Saskatchewan. Du point de vue de la population, cette province est très petite. J’aimerais que vous nous parliez de cette obligation à impact social. Quand cela s’est-il fait? À quels résultats vous attendez-vous?
    J’en serai ravi.
    Nous agissions à titre de conseillers pour la province en ce qui concerne une obligation à impact social de très petite envergure, comparativement à ce qui se fait ailleurs, qui était à peine dans les sept chiffres. Les objectifs sur le plan social étaient d’aider, en particulier dans les Premières Nations, les mères vulnérables et leur famille à être en sécurité, de les soutenir durant leur séjour dans un foyer sûr, de soutenir la famille et de faire en sorte, avec un peu de chance, que les enfants ne se retrouvent pas en foyer d’accueil et qu’ils restent dans un environnement sécuritaire avec une cellule familiale unie et fonctionnelle où on les incite à aller à l’école. Voilà le résultat espéré dans le cas en question.
    Il s’agit d’un très petit projet pilote, ce qui était connu et reconnu par les investisseurs et le gouvernement. Par contre, c’était délibéré. Les participants ont jugé que c’était une manière prudente, selon leur analyse, de procéder dans ce domaine et de trouver des moyens de lever des fonds privés à cet égard. Je ne connais pas la date précise à laquelle la transaction a été conclue, mais je présume que cela s’est fait dans les dernières semaines.
    D’accord. Pouvez-vous nous nommer les investisseurs?
    Oui. Je crois que c’est du domaine public. Si je ne m’abuse, les investisseurs étaient une coopérative de crédit canadienne et une famille de la collectivité. Ils se sont regroupés et ils ont chacun investi le même montant, je crois.
    En connaissons-nous l’échéancier?
    Je crois que l’échéancier est de cinq ans. Il y a peut-être une année de plus pour nous assurer d’évaluer adéquatement les résultats, mais l’échéancier est d’environ cinq ou six ans.
    C’est très intéressant.
    J’ai aussi vu que, dans la documentation que vous nous avez fournie, vous avez en fait un aide-mémoire pour assurer la réussite. Pourriez-vous nous dire quelques mots sur cet aide-mémoire, parce que je considère que c’est un aspect très important? Évidemment, vous utiliseriez cet aide-mémoire en compagnie d’institutions financières ou d'autres organisations qui investiraient des fonds dans un certain programme.
    À mon avis, il est vraiment important d’évaluer la situation pour nous assurer que c’est logique sur le plan financier et que le projet aura fort probablement une analyse de rentabilité solide et positive. Les résultats réels ont de grands effets et ont une grande valeur. Si l’on tient compte de l’ensemble des données, je suis d’avis que c’est une analyse de rentabilité convaincante. Voilà l’un des principaux domaines.
    Il faut aussi faire preuve d’une très grande prudence en ce qui concerne l’évaluation des résultats et comprendre que, si les jeunes restent à l’école, cela entraîne de nombreux avantages positifs, dont ceux sur le plan financier, dans l’ensemble des administrations publiques et de la collectivité. Il faut travailler d’arrache-pied pour savourer les économies et passer outre les barrières artificielles que nous érigeons entre les diverses organisations et les divers ministères, et ce, même à l’intérieur d’un même gouvernement.
    Je crois qu’un autre gage de succès est d’adapter l’initiative et de cibler une population dans laquelle vous êtes vraiment confiants que le programme financé aura l’effet positif escompté, ou non, et la relation ne doit pas être précaire. Voilà certains éléments.
    Je prétends qu’il est aussi important que le commanditaire du secteur public soit bien au courant du dossier avant de lancer le tout et qu’il dispose des compétences à l’interne pour accomplir ces choses et être adéquatement conseillé quant à la meilleure façon de structurer le programme, de l’administrer, d’en évaluer à la fin les résultats et d’en faire rapport pour garantir une entière transparence.

  (1630)  

    Merci beaucoup, monsieur Ciufo.
    M. LaVar Payne: Oh, j’avais encore beaucoup d’autres questions. Merci beaucoup.
    Le président: Merci, monsieur Payne. Je vous remercie, par contre, de votre intérêt.
    Au nom du comité, je vous remercie chaleureusement de votre exposé, de votre présence et de vos réponses à nos questions. Nous vous en sommes très reconnaissants, monsieur Ciufo.
    Le comité suspend ses travaux une ou deux minutes le temps d’accueillir ses prochains témoins.

    


    

    Le comité reprend ses travaux.
    Nous entendrons deux représentants de l’organisme Finance for Good. Nous accueillons Denise Hearn, qui est agente d’élaboration des programmes, et Lars Boggild, qui est également agent d’élaboration des programmes.
    Je vous laisse le loisir de décider ce que vous voulez faire au sujet de votre exposé. Vous avez 10 minutes à vous partager. Nous passerons ensuite aux séries de questions. Merci.
    Allez-y.

  (1635)  

    Premièrement, monsieur le président, mesdames, messieurs les membres du comité, merci de nous donner l’occasion de témoigner devant votre comité aujourd’hui. En tant qu’organisme, nous vous en sommes très reconnaissants.
    Aujourd’hui, j’ai l’intention de concentrer mon exposé sur ce que nous faisons en tant qu’organisme, le paysage dans le domaine de la finance sociale en ce qui a trait à la prévention du crime et certaines initiatives dont nous sommes témoins au Canada.
    Ma collègue Denise traitera du rapport entre le système de justice — en particulier la prévention du crime — et certaines contraintes de faisabilité qui s’appliquent vraiment dans le cas du financement social, ainsi que du grand intérêt que nous constatons de la part de fournisseurs de services: ce qu’il en est et ce qui l’explique.
    En ce qui concerne ce que nous faisons en tant qu’organisme, à ma connaissance, nous sommes le seul organisme canadien qui a été créé dans le but d’agir à titre d’intermédiaire en ce qui concerne les obligations à impact social. À ce titre, nous cherchons à utiliser les mécanismes en vue de permettre aux collectivités canadiennes d’investir dans la prévention en tout genre.
    Comme je l’ai mentionné, notre organisme agit principalement à titre d’intermédiaire en ce qui concerne les obligations à impact social, et nous avons vraiment deux fonctions distinctes.
    La première est de travailler directement avec les organisations, qui sont généralement des organismes sans but lucratif, en vue de les amener à pouvoir utiliser de tels mécanismes, à conclure de telles ententes et à recevoir du financement. C'est quelque chose de temporaire, mais nous travaillons de concert avec les organismes en vue de surmonter divers défis, comme l’évaluation des résultats, l'attribution des effets, le modèle de financement, etc. Ces mesures en amont sont vraiment nécessaires si des priorités stratégiques ou des domaines d'intérêt, y compris la prévention du crime, recoupent vraiment un domaine social qui est tout aussi capable de prendre les rênes et d'arriver à offrir de tels résultats.
    L'autre fonction d'un intermédiaire est que nous collaborons avec les organismes sans but lucratif, les gouvernements qui passent une telle commande et les investisseurs en vue de structurer le plan, d'aider à lever les fonds requis, d’évaluer les résultats et de superviser la mise en oeuvre relativement aux obligations à impact social. C'est une fonction qui est plus continue, et cela se poursuit tout au long du cycle de vie d'une obligation à impact social.
    J'essaie seulement d’expliquer ce que nous faisons.
    Comme Gianni le disait plus tôt au sujet du paysage en ce qui concerne la prévention du crime, il existe de nombreux modèles de financement social. Les obligations à impact social n’en sont qu'un exemple, mais il s'agit de loin de ce que nous faisons principalement. Par conséquent, nous croyons qu'il reste encore beaucoup d'innovations possibles en matière de nouvelles structures en vue de permettre des investissements et d'obtenir des résultats sociaux et environnementaux.
    Comme on vous l'a déjà expliqué, une obligation à impact social comporte en fait deux éléments. Il y a premièrement une entente de paiement à la réussite; le gouvernement s'engage à payer ce qui est inscrit dans l’entente, à condition que certains résultats soient atteints. Le deuxième élément est en fait le financement en soi: l'affectation du fonds de roulement dès le départ pour que les organisations et les organismes sans but lucratif soient en fait capables de concrétiser le programme sur le terrain pour obtenir les importants résultats escomptés sur le plan social.
    Par conséquent, la majorité des activités liées aux obligations à impact social à l'étranger se concentre en fait déjà sur la réduction de la criminalité. Selon nos données, il y a trois obligations à impact social en cours qui mettent exclusivement l'accent sur la réduction du taux de récidive: au Massachusetts; à Peterborough, au Royaume-Uni; et à New York.
    Il y en a trois autres qui visent des résultats mixtes et qui ciblent des éléments comme la réduction du taux de récidive ou du taux criminalité, ainsi que des aspects comme la création d'emplois. Il y en a aussi une autre en préparation en Israël.
    Nous pouvons donc voir qu'il y a tout un réseau dynamique d’échange de pratiques. C’est en croissance. C'est encore un petit secteur, mais c'est en croissance pour ce qui est de ces outils. Ensemble, ces sept obligations à impact social représentent des investissements sociaux privés d’environ 72,2 millions de dollars canadiens qui visent en gros à réduire le taux de criminalité et le taux de récidive et à essayer d'entraîner des changements sociaux positifs pour les prisonniers ou les délinquants de tout acabit.
    Qui plus est, dans le cadre du recensement de ces initiatives, nous avons constaté que les gens sont de plus en plus à l'aise avec ces outils d'investissement. Certains mécanismes qui étaient peut-être utilisés par le passé pour les rendre moins risqués le sont de moins en moins, et la valeur globale des investissements faits au moyen de ces outils augmente. Cela nous indique que les gens sont de plus en plus à l'aise avec de tels moyens et qu'ils sont disposés à investir davantage.
    Au Canada, comme vous l'avez entendu, il y a pour l’instant une obligation à impact social, qui met l'accent sur les mères vulnérables et leur famille. La majorité des activités liées au développement, comme cette obligation à impact social en Saskatchewan, ont été menées par des autorités provinciales, et je pense que c'est important de souligner que des gouvernements de diverses allégeances politiques s'intéressent beaucoup à ce concept. En Nouvelle-Écosse, où nous sommes situés —à Halifax —, les néo-démocrates provinciaux, soit l'ancien gouvernement, voulaient en fait être le premier gouvernement au Canada à avoir recours à une obligation à impact social. En Ontario, un gouvernement libéral a lancé un appel d'idées en la matière, et les progressistes-conservateurs albertains se sont engagés à adopter des approches novatrices, y compris des obligations à impact social, à l'égard des défis sur le plan social.

  (1640)  

    Donc, de nombreux motifs sont à l'origine de cette diversité des intérêts. Les obligations à impact social peuvent être un outil d’apprentissage, un mécanisme qui nous permet de réaliser efficacement la recherche et le développement dans le domaine social. L’échelle est assez rigoureuse, sans le coût politique et public de l’échec. La souplesse de ce financement permet également ce qu’on appelle « l’innovation en cours de processus », et les fournisseurs de services peuvent réagir au cours du processus de mise en oeuvre dans le but d’améliorer le rendement.
    Les obligations à impact social permettent de prendre plus de risques selon une mesure qui correspond aux grands enjeux sociaux. Dans certains cas, on reconnaît que le gouvernement a tenté de relever de nombreux défis par le passé et qu’il n’a pas la capacité de le faire seul; il juge prioritaires ces mécanismes pour répondre aux besoins. Ils représentent aussi un outil d’investissement dans un contexte budgétaire restreint.
    Dans le cadre de nos échanges avec de nombreux gouvernements provinciaux, nous avons constaté qu’ils comprenaient ceci: bien que toutes les formes d’investissement dans la prévention soient très précieuses, on dépense déjà beaucoup d'argent dans les soins actifs, que ce soit en matière d'incarcération ou de traitement judiciaire. Il y a donc un besoin pour ce qu'on appelle le « capital de rapprochement » pour la prévention, et les obligations à impact social peuvent répondre à ce besoin. Elles peuvent permettre ce rapprochement.
    Nous savons que certains se préoccupent de la possibilité que le gouvernement cherche à se soustraire à ses responsabilités. En tant qu'organisation consacrée à ce domaine, nous voyons d'un bon oeil cette responsabilisation quant aux résultats. Certains craignent qu'on tire profit des problèmes sociaux, mais nous reconnaissons que le rendement financier représente une compensation des risques. C'est une compensation associée à la tolérance au risque dans le but d'entreprendre des projets novateurs, ce qui est très important.
    Certaines personnes s'inquiètent qu'on fasse une sélection choisie des enjeux faciles. Je crois que nous devons faire une distinction entre les enjeux actuels et les enjeux futurs, et que nous devons tirer profit de certains domaines plus faciles à comprendre comme la justice et la prévention de la criminalité pour élargir la portée de ces outils afin qu'ils servent à des domaines plus difficiles à mesurer ou à suivre. C'est bien comme cela.
    On craint que seuls les grands centres urbains bénéficient de ces projets. Comme l'a fait valoir Gianni, les contraintes de faisabilité relatives aux coûts de transaction peuvent rendre difficile l'utilisation de ces instruments au sein des très petites populations. Nous croyons qu'il est possible de rassembler des petites populations pour réaliser un projet plus important ou... À Perth, en Écosse, on a réalisé un très petit projet d'obligation à impact social. La collectivité et les entreprises locales y ont participé; c'est possible dans cette mesure.
    Dans l'ensemble, il est possible de faciliter la croissance dans ce domaine. Les exigences en matière de développement sont importantes et nous les connaissons bien. Je suis certain que Denise va notamment parler de la notion de clarté quant aux intentions et aux objectifs du gouvernement, de sorte que les organisations comme la nôtre et les fournisseurs de services, y compris ceux avec lesquels nous travaillons, connaissent leur public.
    Il y a aussi le financement du développement, car les coûts de démarrage sont assez importants pour le secteur social. Dans de nombreuses autres administrations, notamment au Royaume-Uni, on reconnaît qu'il faut répondre à ce besoin.
    Enfin, il y a la question des données et de l'information. Le Royaume-Uni est un bon exemple à cet égard. Pour les projets d'obligations à impact social, on a préparé une trousse d'outils qui présente les coûts prévus par le gouvernement, de sorte que les organisations comme la nôtre et les organismes à but non lucratif avec lesquels nous travaillons puissent réaliser une analyse de rentabilité pour aller de l'avant.
    Je vous remercie beaucoup de m'avoir invité à témoigner devant vous aujourd'hui.

  (1645)  

    Il ne vous reste que 30 secondes.
    Madame Hearn, vous pouvez prendre ce temps pour nous donner votre avis. Bien sûr, vous pourrez faire d’autres commentaires pendant la série de questions.
    Bien sûr. Je vais prendre un moment donc pour vous parler de mon intérêt premier dans ce domaine: les fournisseurs de services.
    Les investissements à long terme sont la principale raison pour laquelle ces organisations jugent ce modèle très crédible et intéressant. Dans le cadre du système de subventions actuel, elles sont tenues de mettre en oeuvre les programmes année après année et de suivre les mesures de façon annuelle seulement. Il est donc très difficile pour elles de prouver les objectifs à long terme qu'elles souhaitent atteindre avec leurs clients. Ce modèle leur donne l’occasion d’améliorer les mesures à long terme au sein de leur organisation. Nous y accordons une très grande importance. C’est aussi illimité, ce qui permet aux organisations d’atteindre leurs objectifs tout en s’éloignant de la mentalité axée sur les extrants pour se concentrer sur les résultats au sein du secteur social.
    Nous croyons que les OIS constituent un moyen d’insuffler cet important changement philosophique au sein du secteur social. Bien sûr, elles ne représentent pas le seul moyen, mais nous croyons qu'elles peuvent catalyser cette reformulation à grande échelle — je dirais — des résultats que nous tentons d’obtenir au sein du secteur social.
    Merci.
    Merci beaucoup. J'apprécie la concision de votre réponse.
    Monsieur Norlock, la parole est à vous pour sept minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je remercie également les témoins de leur présence. Nous avons d’intéressants sujets à aborder.
    Pour vous donner plus de temps, madame Hearn, j’aimerais que vous nous parliez davantage des fournisseurs de services et des résultats. J’aimerais que vous compariez, si c’est possible — parce que je présume que vous l’avez déjà fait —, les résultats des programmes gouvernementaux et ceux obtenus par les personnes qui ont recours...
    Je ne parle pas seulement des obligations à impact social; comme vous l’avez dit, il y a d'autres outils. J’aimerais qu’on aborde l’ensemble des finances sociales en ce qui a trait à l’étude du comité sur la prévention de la criminalité. Vous pourriez nous parler de certaines différences et de la valeur des diverses approches relatives à la prévention de la criminalité.
    Bien sûr. Je crois qu’en fin de compte, les divers intervenants — non seulement du domaine des obligations à impact social, mais aussi du domaine des finances sociales en général, qu’il s’agisse du secteur public, privé ou social — visent tous l’atteinte d’objectifs similaires, c’est-à-dire des collectivités plus saines et sans criminalité, dans le cas présent. Bien sûr, étant donné la diversité des bénéficiaires des programmes de prévention de la criminalité, les organisations de mise en oeuvre devront répondre à divers besoins.
    Je crois qu’un des avantages de ce type de modèle, c’est qu’il nous permet de désigner un objectif précis, qu’il s’agisse de réduire le récidivisme ou d’éviter aux mineurs d’être confrontés au système de justice, dans le cas présent. Par la suite, le financement destiné à l’atteinte de cet objectif est illimité. La façon dont il est utilisé au cours de la mise en oeuvre du programme n’a pas d’importance, tant que cet objectif précis est atteint.
    Je crois que cela donne lieu à plus de souplesse, de diversité, d’innovation et de créativité dans le cadre du financement des programmes.
    Merci beaucoup.
    Est-ce que vous convenez que les gouvernements utilisent une chose très précieuse? Ils utilisent l'argent des contribuables, le vôtre et le mien. Ils hésitent à prendre des risques et ont établi des programmes de réduction de la criminalité.
    Supposons qu'un gouvernement veuille utiliser l'argent des contribuables pour la prévention de la criminalité, ou pour n'importe quel genre de programme, et qu'il veuille être certain d'obtenir les résultats mesurables souhaités en peu de temps. Les gouvernements investissent dans la prévention de la criminalité, établissent des programmes et embauchent... Vous savez, beaucoup de gens au gouvernement veulent réussir et font d'autres choses.
    Mais en ce qui a trait à la collaboration avec un autre secteur, qu'il s'agisse d'un organisme à but lucratif ou non, reconnaissez-vous que les mesures utilisées pour le financement social...? En règle générale, on vise des résultats sur trois à cinq ans et on les mesure à la fin de cette période. Habituellement, les paramètres sont établis en fonction de résultats sur cinq ans. Êtes-vous d'accord que ce risque en vaut la peine?
    J'aimerais que vous nous parliez de la réduction de ces risques. Je remarque que le directeur financier de Finance for Good a dit qu'il tentait de réduire les risques associés à certains projets comme les OIS.
    Cela fait beaucoup, et vous avez probablement trois minutes pour y répondre.

  (1650)  

    Pouvez-vous poser une question précise, monsieur Norlock? Vous en avez posé plusieurs.
    Non, ma question précise... en général, les programmes de financement social.
    Est-ce que nous convenons que cela vaut le coup? Bien sûr, tout à fait. En ce qui a trait à la réduction des risques, en raison de leur nature, ces populations représentent des transactions risquées... désolée, des efforts de collaboration auxquels nous participons.
    Voulez-vous faire un commentaire à ce sujet?
    Oui, j'aimerais seulement ajouter une chose: dans le cadre des projets d'obligations à impact social qui ont été mis en oeuvre ou même dans le cadre de l'élaboration de nouveaux projets, nous reconnaissons que le modèle de prestation est axé sur les résultats. On ne pense pas seulement aux activités. Il y a la capacité d'assumer les coûts opérationnels indirects, les systèmes de mesures, la mesure du rendement, qui nous donnent plus de souplesse quant aux rétroactions qu'obtiennent ces organisations sur le terrain.
    Pour vous donner un exemple très simple, dans le cas de Peterborough, au Royaume-Uni, le premier projet d'obligation à impact social comptait sept partenaires. C'était déjà beaucoup, mais au cours de la première année, leur nombre est passé à 11, parce qu'ils ont reconnu qu'il y avait de nouveaux besoins, d'autres domaines et d'autres fournisseurs qui pouvaient offrir des services rapides à l'appui des résultats souhaités. C'est la différence, presque philosophique, que l'on constate au fil de l'utilisation de ces nouveaux instruments.
    Il vous reste une minute.
    D'accord, en une minute, dites-nous pourquoi les gouvernements voudraient se détacher des anciennes méthodes traditionnelles pour réduire la criminalité, et pourquoi participerait-on au financement social?
    C'est votre entreprise, votre intérêt. Faites votre travail de vente. Dites-nous comment vous faites, le plus rapidement possible.
    Tout d'abord, je tiens à dire que nous ne pensons pas du tout que les finances sociales ou les OIS remplaceront la structure existante. Elles se veulent tout simplement une source supplémentaire d'afflux de capital dans le système, et visent à mettre à l'essai de nouveaux projets et idées novateurs. Si un organisme de service a su faire ses preuves et est déjà financé par le gouvernement, il faut continuer de le financer. Nous ne voudrions pas le remplacer par une obligation à impact social. Si ce même organisme souhaite faire une mise à niveau de son programme ou tenter quelque chose de nouveau et quelque peu risqué qu'il n'a jamais tenté auparavant, pour une population plus difficile, c'est là où l'obligation à impact social peut être un bon outil pour éviter au gouvernement de prendre le risque.
    Merci beaucoup, votre temps est écoulé.
    Monsieur Garrison, vous avez la parole pour sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins de leur présence aujourd'hui. Je sais que vous étiez présent lorsque j'ai fait mon exposé sur les priorités du comité, et j'ai toujours... M. Norlock se plaît à dire que nous sommes idéalistes. Parfois, j'ai l'impression que nous pensons que tout ce que le gouvernement fait pour prévenir la criminalité est un échec, alors que le taux de criminalité est à la baisse. Aussi, nous recevrons la semaine prochaine des témoins qui nous parleront de la stratégie de prévention de la criminalité et de ses réussites. Je suis donc très heureux de vous entendre dire que vos mesures visent à compléter celles déjà établies, et je crois qu'il est important de garder cette perspective en tête.
    Mes questions portent sur la gouvernance et la reddition de comptes. Je vais vous parler de ce qui se passe dans ma collectivité.
    Nous avions depuis longtemps un programme d'emplois pour les jeunes offert par le groupe Spectrum, un organisme communautaire sans but lucratif et non confessionnel. Le groupe a présenté une soumission dans le but d'obtenir un nouveau contrat et a perdu au profit d'un organisme confessionnel, qui offre maintenant les services. Les membres de la collectivité sont inquiets, puisque cet organisme confessionnel n'est pas ouvert à tous.
    Je crois qu'il en va de même pour les projets d'obligations à impact social, qui sont essentiellement réalisés par des intérêts privés, même s'ils sont philanthropiques. Comment pouvons-nous veiller à ce qu'ils offrent des services à tous les membres de la collectivité?

  (1655)  

    Le processus d'approbation publique fait partie de la solution. Le projet d'obligation à impact social ne peut pas être réalisé sans qu'un commissaire public consente à payer pour les résultats. Il y a donc cette vérification finale, du moins, à une certaine étape de la reddition de comptes, pour engager le secteur public.
    Mais je crois qu'il est tout aussi important de garder en tête que ces outils et l'espace de financement social visent l'atteinte de résultats. Tout comme les marchés de capital traditionnels réussissent très bien à investir en fonction du risque, ces outils visent l'atteinte de résultats. Donc, pour les investisseurs d'une fondation qui s'intéresse à la réduction de la criminalité, par exemple, les outils comme les obligations à impact social constituent une partie du portefeuille d'exploitation qui leur permet de développer des connaissances beaucoup plus rigoureuses sur l'efficacité de ces interventions et, si elles sont efficaces, ils peuvent réinvestir ce capital dans des mesures utiles grâce aux paiements en fonction des résultats. Ces outils permettent de réaliser beaucoup plus d'activités pour des interventions plus efficaces.
    Je pourrais simplement ajouter une remarque. Je pense que l'une des préoccupations que les gens ont, c'est que les investisseurs auront certains pouvoirs ou une certaine autorité sur la mise en oeuvre des programmes de sorte à être en mesure d'influencer la prestation de ces services selon leurs préférences personnelles.
    Ce n'est pas du tout le cas. En tant qu'organisation intermédiaire, nous estimons que l'une de nos principales fonctions consiste à être la partie neutre qui favorise la signature d'ententes entre ces trois groupes d'intervenants — l'organisation, les investisseurs et le gouvernement. En raison de la façon dont la structure de gouvernance est établie, je pense qu'il serait difficile pour des intérêts privés d'influencer la prestation des services.
    Mais si l'on revient à l'exemple dans ma collectivité, nous avons des programmes qui ont déménagé dans un espace normalement considéré comme étant hostile par la moitié des jeunes clients, en raison de leur orientation sexuelle ou d'autres caractéristiques personnelles. C'est donc parce que le programme avait déménagé dans un espace privé — bien que je ne critique pas du tout les administrateurs, qui ont promis que le programme serait accessible à tous. Mais il ne semble pas être accessible à tous les clients parce qu'il a déménagé d'un espace public à un espace privé.
    Nous avons également eu dans notre collectivité une organisation principalement dirigée par les Premières Nations, mais son financement n'a pas été renouvelé, et le contrat a été confié à un groupe privé pour offrir le même service. Le problème, c'était que nous avions travaillé pendant des années au sein de la collectivité des Premières Nations en tenant compte du point de vue des Premières Nations. Je pense que le contrat a été confié à un autre groupe parce que l'organisation disait vouloir atteindre de meilleurs résultats, mais on est en train de perdre la sensibilisation aux réalités des programmes autochtones, ce qui n'existe pas dans l'organisation privée.
    Pour répondre brièvement, je dirai dans un premier temps qu'un déménagement dans un espace privé qui est moins inclusif risquerait de donner lieu à de pires résultats, à tout le moins pour certains sous-groupes de la population, dont peut-être pour ceux qui n'ont pas participé à ce genre de programmes.
    Donc, ce que les outils tels que les contrats d'impact social peuvent faire, s'ils sont bien conçus — et c'est une mise en garde, un « si » —, c'est de veiller à ce que l'architecture de mesure qui sert à évaluer les résultats tienne compte de ces facteurs. Pour réduire la criminalité notamment, il est important de prendre en considération la différence entre les multirécidivistes — ceux qui commettent très souvent des infractions — et ceux qui ont commis leur première infraction. Si l'on se fonde uniquement sur une mesure binaire — que les personnes aient commis des crimes ou non —, on pourrait simplement décider de travailler avec les cas les plus faciles. Ce genre de sélection nous préoccupe. Mais si l'on peut concevoir l'outil de manière à tenir compte de la fréquence des infractions, alors on aura un incitatif à travailler avec les individus qui sont les plus difficiles à traiter.
    De même, la sensibilisation aux réalités culturelles pourrait être un facteur prépondérant dans le piètre rendement de ces nouveaux programmes financés. Cette orientation vers les résultats, le rendement et l'efficacité, et le fait de savoir si c'est vrai ou non — la sensibilisation aux réalités culturelles est sans doute très importante pour votre comité plus particulièrement — pourrait être un outil, et les contrats d'impact social pourraient en être un autre pour constituer une base de connaissances de façon très rigoureuse et crédible.

  (1700)  

    Vous avez une minute et demie.
    Dans l'exemple dont je viens de parler qui concernait les Autochtones, ce que l'organisation dit, c'est qu'elle obtient les pires résultats parce qu'elle traite avec des groupes aux prises avec de grandes difficultés, qui ont été éprouvés par les pensionnats indiens et qui ont des problèmes d'alcoolisme et de toxicomanie. Elle dit avoir été comparée à tous les autres organismes qui s'occupent de groupes beaucoup moins à risque et moins difficiles. Cela nous ramène à la préoccupation, à laquelle vous avez donné suite, que des organismes sélectionnent les cas les plus faciles de la population pour pouvoir réduire plus facilement les risques et améliorer le succès.
    Merci beaucoup, monsieur Garrison.
    Nous allons maintenant commencer avec Mme James. Vous avez sept minutes, s'il vous plaît.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à nos deux témoins de comparaître devant le comité cet après-midi.
    Je voulais revenir à un point que vous avez soulevé dans vos remarques liminaires. Vous avez clairement indiqué que le gouvernement paiera un montant précis calculé en fonction de certains résultats du rendement. Je voulais poser une question à cet égard. Les contrats d'impact social, par exemple, ou n'importe quel autre type de finances, pourraient-ils être adaptés au niveau des résultats du rendement? Par exemple, un contrat pourrait être basé sur un certain pourcentage de prévention de la criminalité ou de réduction du taux de récidive, mais quand vous obtenez de meilleurs résultats, vous améliorez le rendement du capital investi. Est-ce souvent utilisé?
    Nous voyons des modèles qui sont utilisés, et ceux-là ne le sont pas. De façon générale, l'idée d'avoir de nombreux seuils ou même une forme de paiement du rendement continu — pour tel pourcentage, on obtient tel rendement — peut être et a été utilisée. La réponse courte est oui. Il y a des exemples. Il existe également des cas où il n'y a qu'un simple seuil. Il y a les deux, et il y a des raisons pour utiliser les deux. Plus particulièrement, lorsqu'on a des groupes très difficiles, il pourrait être sensé de n'avoir qu'un seul seuil pour que vous puissiez faire preuve de diligence raisonnable.
    Donc, le rendement des investissements pourrait être fondé sur le risque pour un projet ou un groupe donné. D'accord.
    Dans votre déclaration liminaire, vous avez également parler de votre rôle en tant qu'organisation intermédiaire, à savoir que vous travaillez avec des organismes sans but lucratif pour les aider à déterminer les mesures à présenter aux investisseurs. Nous parlons des cibles et nous veillons à atteindre les résultats escomptés. Comment faites-vous pour élaborer des mesures tangibles pour divers projets? Comment déterminez-vous si un projet est fructueux ou non? Y a-t-il un précédent fondé sur des données probantes, ou est-ce quelque chose que vous avez sorti de votre chapeau par magie?
    C'est certainement la prépondérance de la preuve. Nous examinons les cas où il y a généralement un ensemble de preuves — qui va en grandissant idéalement — et une organisation qui cherche continuellement à améliorer son rendement. Toutefois, la question plus générale entourant la faisabilité est un dossier que nous sommes ravis d'étudier. Nous avons produit des documents sur les cadres de faisabilité pour les contrats d'impact social plus particulièrement, et même si nous ne les avons pas apportés, je me ferai un plaisir des les transmettre au comité.
    L'idée, c'est que le cadre fournisse un prisme à travers lequel nous pouvons évaluer s'il y a de fortes chances que ces interventions et ces programmes deviennent des contrats d'impact social éventuels, afin que nous connaissions le risque que prend une organisation dans le cadre de cet effort de développement — car il y a des risques pour le secteur des services sociaux également. Nous examinons des cas où il y a ce type de culture. Nous nous penchons aussi sur des cas où une structure des coûts est en place dans le secteur en général, tels que la prévention de la criminalité, où la personne positive et les résultats sociaux — notamment que les délinquants ne récidivent pas — concordent fortement avec un résultat économique positif et un coût plus faible pour la réadaptation notamment, par opposition à l'incarcération.
    Merci.
    À la réunion de mardi, je crois qu'un autre témoin a dit que la prévention de la criminalité ne devrait pas être uniquement la responsabilité du gouvernement, de la GRC ou de la police locale. Souscrivez-vous à cette déclaration et à la philosophie selon laquelle les efforts de prévention de la criminalité devraient davantage être déployés à l'échelle communautaire pour que nous puissions tous y contribuer?

  (1705)  

    Je crois fermement que ce doit être un effort de collaboration entre toutes les couches de la société. De toute évidence, lorsqu'on parle des contrats d'impact social relatifs à la prévention de la criminalité, on parle d'indicateurs très facilement mesurables pour évaluer la réduction de la criminalité et du taux de récidive. Bien entendu, de nombreux efforts communautaires contribueront à réduire la criminalité. Par exemple, nous examinons l'émancipation des enfants qui sortent des foyers d'accueil à 18 et 19 ans. Les statistiques sont catastrophiques lorsqu'on pense au peu de soutien qu'ils reçoivent à leur sortie du système, à leurs interactions avec le système judiciaire et aux risques qu'ils deviennent sans-abri.
    Puisque l'on se penche non seulement sur les contrats d'impact social, mais aussi sur les initiatives de finances sociales, je pense qu'il est important de nouer le plus de partenariats possibles dans la communauté pour contribuer à régler certains de ces problèmes sociaux très complexes.
    Il me reste du temps, n'est-ce pas, monsieur le président?
    On s'inquiète au sujet des investisseurs qui songent peut-être, comme vous l'avez dit, à sélectionner les cas ou les secteurs les plus faciles où du financement ou des capitaux sont probablement disponibles, et des grandes villes par opposition à des communautés rurales ou éloignées, ou même des régions défavorisées qui ont différents profils démographiques, par exemple.
    Mais en fait, le gouvernement ne se contente pas de dire qu'il versera du financement social, et puis tout le monde est emballé. Le gouvernement peut fixer des paramètres liés aux régions, à la démographie ou même à des projets qui correspondraient à ce qu'il cherche.
    Corrigez-moi si j'ai tort, mais il incomberait à l'organisation intermédiaire de trouver les organismes sans but lucratif qui peuvent offrir les services et ensuite les investisseurs pour concrétiser les projets.
    Puisque c'est quelque chose qui n'a pas encore été fait, le gouvernement a encore son mot à dire sur les endroits où les projets seront menés. Je veux m'assurer que nous ne laissons pas entendre que les communautés plus démunies, où les organisations disposent de peu de financement, seront laissées pour compte.
    Le premier témoin nous a également dit qu'il avait 80 partenaires du secteur financier qui sont intéressés à participer à ce genre d'initiatives. Un grand nombre de ces institutions financières ne sont pas uniquement situées dans une grande ville. Elles sont de partout au Canada.
    Vous pourriez peut-être faire une observation à ce sujet.
    Ce que je vous dirais, c'est qu'il y a certainement des cas où un contrat d'impact social peut être l'initiative du fournisseur de service, où un organisme sans but lucratif peut reconnaître que c'est quelque chose qu'il veut vraiment faire.
    De même, dans bien des cas, les contrats d'impact social sont administrés par l'État, notamment dans le cadre d'appels d'offres qui définissent ces paramètres: la population, l'endroit, les communautés et les raisons pour lesquelles c'est une priorité stratégique.
    Nous avons vu les deux processus. Jusqu'à présent, la demande de propositions plus officielle est plus répandue aux États-Unis qu'au Canada.
    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant entendre Mme Doré Lefebvre, pour sept minutes.

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur le président.
     Je vous remercie, madame Hearn et monsieur Boggild, d'être parmi nous aujourd'hui. C'est très gentil de votre part de nous décrire ce que vous faites au chapitre du financement social.
    Je ne sais pas si vous êtes en mesure de nous donner des détails vraiment précis à ce sujet, monsieur Boggild, mais au début de votre présentation, vous avez dit être en train de réaliser un projet en Saskatchewan. C'est bien cela?

[Traduction]

    Il y a un contrat d'impact social [Note de la rédaction: inaudible] en Saskatchewan, mais ce n'est pas le nôtre.

[Français]

    D'accord.
    Pour ce qui est des social impact bonds dans lesquels vous êtes impliqués, j'aimerais savoir comment fonctionne la structure de financement à cet égard et ce que les investisseurs en retirent. J'ai déjà posé cette question au témoin qui comparaissait juste avant vous. Vous avez probablement entendu sa réponse. Quoi qu'il en soit, j'aimerais bien savoir comment vous fonctionnez.
     Qu'est-ce que les investisseurs retirent de tout cela? S'agit-il d'avantages monétaires, de dividendes ou plutôt d'un rayonnement pour les investisseurs?

  (1710)  

[Traduction]

    Les investisseurs de partout au Canada dans les modèles de financement avec lesquels nous avons interagi dans l'élaboration des contrats d'impact social sont principalement des investisseurs qui ont un intérêt pour les causes sociales. Ce sont des gens dont les activités ont une valeur nette élevée et qui se préoccupent beaucoup des problèmes dans leur communauté. Ce sont des piliers et, dans certains cas, des entreprises commerciales ou des institutions financières.
    De façon générale, ils reçoivent un rendement financier qui est habituellement proportionnel au risque qu'ils perdent tout l'argent qu'ils investissent pour améliorer le rendement. Si les résultats ne sont pas atteints, alors ils perdent ce qu'ils ont investi.
    Toutefois, nous observons cette situation parce qu'étant donné que ce sont des investisseurs qui ont un intérêt pour les causes sociales — et c'est très vrai en ce qui concerne les contrats internationaux d'impact social —, le taux de rendement attendu par rapport au risque encouru est ce que la communauté financière qualifierait de « concession ». Les gens acceptent un rendement moindre que ce que l'on obtiendrait normalement dans un marché pleinement commercial car ils reconnaissent la valeur du bien commun, mais aussi le fait que ce sont des scénarios où le secteur public, le gouvernement, tire de grands avantages.

[Français]

    Voulez-vous dire que les investisseurs sont prêts à prendre plus de risques en investissant dans la finance sociale, par exemple dans les obligations à impact social?

[Traduction]

    Oui, je crois qu'ils prennent un gros risque. Dans bien des cas, ils acceptent plus de risques qu'ils l'auraient fait en contrepartie d'un rendement comparable dans un marché commercial, mais c'est parce qu'ils ont un intérêt pour les causes sociales et sont soucieux de générer des retombées sociales positives dans leurs communautés.
    J'aimerais ajouter une chose. Ce que nous constatons, du moins chez les investisseurs privés dont les actifs ont une valeur nette élevée, c'est qu'ils s'intéressent... En raison d'une certaine lassitude des donateurs, les investisseurs ne veulent plus faire que de la philanthropie. Ils veulent investir de manière à pouvoir potentiellement récupérer leur agent, puis à le réinvestir dans une autre mission sociale. C'est donc une façon pour eux d'accumuler de l'intérêt sur leurs capitaux pour multiplier les répercussions qu'ils ont sur la communauté.

[Français]

    Est-ce à vous, en tant qu'intermédiaire, que l'investisseur est redevable, ou est-ce directement au gouvernement?

[Traduction]

    Les investisseurs qui sont parties à un contrat d'impact social sont régis par les modalités des contrats qu'ils signent.

[Français]

    Qui surveille la façon dont ça fonctionne? Est-ce vous, en tant qu'intermédiaire, ou est-ce plutôt le gouvernement? Est-ce davantage vous?

[Traduction]

    C'est habituellement une organisation intermédiaire qui s'occupe de la surveillance qui est effectuée entre-temps, pendant que le contrat d'impact social est mis en oeuvre. Toutefois, ce sont presque toujours des tierces parties qui sont responsables de ce que rapportent les résultats, les seuils de résultats qui génèrent des bénéfices. Nous faisons donc appel à une firme indépendante pour effectuer une vérification et valider ce qui s'est passé — ce n'est donc pas une entité gouvernementale, notre organisation ou des personnes qui n'ont pas investi.

[Français]

    Je pose souvent la question suivante aux témoins. Vous avez dit que, dans votre domaine, il y avait un certain montant alloué pour la sécurité publique. Il y a des programmes. Des témoins ont dit qu'il était possible d'investir dans la sécurité publique au moyen des obligations à impact social, comme en finance sociale en général.
     Est-ce qu'il y a des limites à ce sujet? Y a-t-il des aspects de la sécurité publique pour lesquels on ne devrait pas recourir à la finance sociale?

[Traduction]

    Pour répondre brièvement, en tant qu'organisation, nous avons des politiques internes pour nous guider vers l'idée qu'il y a des secteurs, surtout dans les services d'urgence de toutes sortes, où nous croyons que ce genre de tolérance plus élevée au risque peut être inappropriée pour la gravité des dommages potentiels que subiront les groupes vulnérables.

[Français]

    Qu'entendez-vous par là? Pouvez-vous me donner des exemples?

  (1715)  

[Traduction]

    D'accord. Par exemple, nous pensons qu'il serait peut-être inapproprié d'utiliser un contrat d'impact social pour offrir des soins d'urgence. Nous voudrions que ce service soit géré d'une manière très uniformisée pour que nous sachions et puissions avoir entièrement confiance qu'il sera disponible lorsque les gens en ont besoin. Ces approches novatrices de tolérance plus élevée au risque ne sont pas forcément appropriées dans certains secteurs.
    Merci beaucoup, madame Doré Lefebvre.
    Passons maintenant à M. Maguire; vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, encore une fois, de vos exposés.
    Il s'agit ici d'examiner la prévention du crime pour réduire la criminalité et s'occuper des gens à risque.
    Selon vous, à quels secteurs cette mesure s'applique-t-elle le plus au Canada? Où obtiendrions-nous le plus de résultats, je suppose, parmi les secteurs de prévention du crime dont vous tiendriez compte?
    De toute évidence, en ce qui concerne les services de soins actifs, qui sont assortis des indices économiques les plus élevés, je crois que les coûts d'incarcération entreraient en ligne de compte. Il existe d'ailleurs un précédent à l'échelle internationale, comme nous l'avons dit à plusieurs reprises. En fait, la toute première obligation à impact social au Royaume-Uni et aux États-Unis visait ce domaine précis. Alors, je pense qu'il serait facile et évident de commencer par là.
    Je ne sais pas si vous vouliez ajouter quelque chose, Lars.
    J'ajouterais, à titre de précision, que nous reconnaissons la rigueur des cas que les organisations nous présentent, notamment en ce qui concerne les délinquants toxicomanes. Cette catégorie de détenus affiche des taux de récidive très élevés, en partie à cause de la nature de leurs problèmes de dépendance, ce qui est souvent le cas. Il serait donc bien de fournir des mécanismes de soutien et des programmes de réadaptation axés sur les besoins particuliers de ces gens.
    Par ailleurs, comme Denise l'a dit tout à l'heure, il y a le cas des jeunes qui, à leur sortie des foyers d'accueil ou des environnements institutionnalisés, doivent faire une transition très brusque vers des environnements non contrôlés, ce qui fait augmenter leur probabilité de récidive. Nous avons également examiné des questions comme la violence conjugale et les possibilités de réduire ce risque dans des collectivités où ce problème a pris, dans certains cas, des proportions épidémiques.
    Merci.
    On a soulevé la question de savoir qui surveille votre rôle de courtier intermédiaire dans ces processus. Je ne cherche pas tant à savoir qui assure la surveillance et le contrôle, mais plutôt si vous pensez que la participation de courtiers intermédiaires comme vous, tout au long du processus, multiplie les possibilités de jeter un regard aux investisseurs qui voudraient justement investir dans le programme d'obligation à impact social. Les investisseurs ont beau avoir une idée de ce qu'ils veulent faire ou dans quoi ils veulent investir, mais vous pourriez avoir une perspective beaucoup plus générale des secteurs où ils pourraient être d'un plus grand secours.
    Je renchéris: il est vrai que la participation de courtiers intermédiaires peut donner aux investisseurs l'assurance que le cas initial a été élaboré avec rigueur et de façon semi-indépendante, à tout le moins, depuis le début du processus. Je pense qu'il importe également de signaler qu'il y a une gouvernance continue liée à la mise en oeuvre d'une obligation à impact social et à la production de rapports validés au regard des activités menées tout au long du cycle de vie de l'obligation à impact social, rapports destinés aux investisseurs et au gouvernement, sachant que cette gouvernance est assurée par une organisation dont les intérêts ne sont pas exactement les mêmes que ceux du fournisseur de services. Il est possible de gérer le rendement de base durant le cycle de vie et d'aider à fournir un soutien rapide en faisant intervenir d'autres organisations. Ainsi, une organisation pourrait se rendre compte que d'autres services seraient vraiment complémentaires aux mesures en vigueur, et le courtier intermédiaire serait à même de mobiliser toutes ces ressources au plus vite.
    Je dirais rapidement que vous semblez être très spécialisés dans le domaine des obligations à impact social, mais quels sont les autres aspects que vous avez examinés? Tenez-vous compte d'autres mécanismes? Nous en avons parlé au comité, et je suppose que vous les connaissez bien. Jouez-vous un rôle là-dedans aussi?

  (1720)  

    À l'origine, nous étions la seule organisation chargée de ce modèle au Canada, parce que nous avions reconnu une lacune dans ce domaine. Pour l'instant, il n'y a pas d'autres organisations qui répondent au besoin très précis que nous avons cerné; nous avons donc commencé à nous occuper des obligations à impact social en guise de validation de principe dans le milieu général de finance sociale. Nous avons participé à d'autres projets de finance sociale, mais les obligations à impact social constituent, en quelque sorte, notre projet phare à ce stade-ci.
    Merci beaucoup.

[Français]

Monsieur Rousseau, vous avez la parole. Vous disposez de cinq minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.

[Traduction]

    Je vais parler en français, si vous n'y voyez pas d'inconvénient.
    Des voix: Oh, oh!

[Français]

    En définitive, on est en train de développer un nouveau marché et on veut nécessairement qu'il génère un rendement. En effet, quand on finance un projet, qu'il soit à caractère social, communautaire ou autre, on veut qu'il génère un rendement. Qu'il se chiffre à 5 %, 10 % ou 15 %, le rendement est ce que veulent les investisseurs.
     Dans le cadre de vos projets qui sont déjà en cours, à quel rendement les investisseurs s'attendent-ils en termes de taux d'intérêt et de retombées?

[Traduction]

    Cela varie beaucoup selon le projet. Dans le cas de toute obligation à impact social, lorsqu'on songe aux répercussions économiques des résultats qui sont produits, il est entendu que la valeur de ces résultats sera divisée entre le gouvernement et les investisseurs privés qui ont fourni les capitaux.
    Dans les cas où l'intervention s'avère très rentable — c'est-à-dire lorsqu'un projet permet d'obtenir des résultats très solides en échange de très peu de capital initial —, il va de soi que le rendement est plus élevé, et l'inverse est vrai aussi. Toutefois, pour être un peu plus précis, d'après ce que nous avons observé de façon générale, les intervenants semblent tolérer un taux de rendement qui se situe entre 5 et 12 % environ. C'est la tendance générale.

[Français]

    C'est à peu près le même taux que pour les autres obligations et les autres outils destinés à générer un rendement.
     Dans ma région, notamment dans mon comté, les groupes sociaux et communautaires qui réalisent des programmes, entre autres les travailleurs sociaux et les travailleurs de rue, craignent que les investisseurs imposent des critères de performance. Ils s'inquiètent à l'idée que cela puisse créer de la pression dans un environnement où les conditions de travail sont déjà difficiles.
    Pourriez-vous formuler des commentaires à ce sujet?

[Traduction]

    Je pense que c'est une préoccupation valable, mais j'ajouterais que, d'après ce que nous avons constaté à l'échelle internationale, les organismes de services sociaux délaissent de plus en plus leur système de mesure actuel; ce n'est pas tant qu'on soit confronté à des pressions accrues pour générer des résultats, mais qu'on dispose d'un meilleur système de mesure. Par exemple, dans beaucoup de programmes d'emploi en vigueur, on affirme qu'il y a, disons, 40 participants à un programme de formation professionnelle, mais on n'arrive pas à dire combien d'entre eux ont réellement décroché un emploi et pendant combien de temps ils l'ont gardé. Je suis sûre que bon nombre d'entre eux réussiraient; toutefois, dans le contexte actuel, on assiste à une transition d'un système de mesure à l'autre.
    Une obligation à impact social permet à une organisation de mieux faire connaître ses modèles de réussite grâce à la mise en oeuvre d'un meilleur mécanisme de collecte et de mesure des données.
    J'aimerais ajouter, très brièvement, que même les organismes sans but lucratif du secteur social — et ils ne sont pas tous admissibles ou nécessairement désireux de participer, ce qui est correct — comprennent que les moyens qui peuvent être liés aux obligations à impact social leur permettent d'améliorer leur rendement et d'investir dans des outils afin de pouvoir transformer leurs efforts en résultats concrets.

  (1725)  

    Il vous reste 30 secondes.

[Français]

    Mon comté comprend surtout des communautés rurales. Il y a peu de centres urbains. Il faut tout de même qu'il y ait un intérêt, en termes d'investissement, pour les projets réalisés dans des communautés rurales. J'espère que vous comprenez un peu la situation.

[Traduction]

    En tout cas, c'est ce que nous essayons de faire. Nous chercherions à déterminer en quoi les obligations à impact social pourraient améliorer la situation dans l'immédiat et, certainement, dans l'avenir. Comme il s'agit d'un tout nouvel outil, les coûts sont très élevés, mais nous nous attendons à ce qu'ils diminuent au fil du temps. Les organisations comme la nôtre essaient tout simplement de s'améliorer afin d'atteindre ces résultats plus efficacement. À mesure que nous nous améliorerons dans ce domaine, nous serons en mesure de travailler avec des collectivités de plus petite taille pour rendre cela viable.
    Merci, monsieur Rousseau.
    Passons maintenant au dernier intervenant, M. Richards.
     Merci.
    J'ai quelques questions à poser.
    Dans le préambule à sa question, un des membres de l'opposition a laissé entendre tout à l'heure que certains groupes risquaient de ne pas profiter des obligations à impact social — notamment les Canadiens autochtones. C'est ce qu'on a voulu suggérer.
    Pour ma part, je conteste cette affirmation. Je ne vois pas pourquoi les membres des Premières Nations ne pourraient pas bénéficier de ces mesures. J'aimerais savoir ce que vous en pensez.
    Selon vous, les obligations à impact social offrent-elles beaucoup de possibilités dans le domaine des programmes destinés aux membres et aux jeunes des Premières Nations? Y a-t-il une raison de croire le contraire? Et quand on parle de programmes adaptés à la réalité culturelle, si ces projets génèrent des résultats, les obligations à impact social ne pourraient-elles pas servir à procurer des avantages aux Autochtones?
    Oui. En fait, dans bien des provinces avec lesquelles notre organisation collabore et interagit, on manifeste un intérêt à l'égard de cette question, qu'il s'agisse d'Autochtones qui risquent parfois d'avoir des démêlés avec la justice pénale ou, dans d'autres cas, de programmes ciblés comme le développement de la petite enfance chez les Autochtones. Nous avons également examiné les lacunes en matière de scolarisation au sein de diverses collectivités autochtones.
    Il y a donc une diversité, mais je suppose qu'en gros, oui, ce sont des outils qui peuvent servir à répondre aux besoins de cette population, notamment parce qu'il est possible de bien les définir.
    D'accord.
    J'ai remarqué que vous étiez, tous deux, dans la salle durant la première partie de la séance. Permettez-moi de relire très brièvement la fin d'une citation, parce qu'on y explique une des raisons pour lesquelles les obligations à impact social sont si positives: « Ça réduit le risque que doit assumer le gouvernement: si l’on ne produit aucun avantage positif, le gouvernement n’a aucune obligation de payer. »
    Cette citation met en exergue deux points que je considère d'une importance cruciale. D'abord, il y a une utilisation optimale de l'argent des contribuables, ce qui est important. Ensuite, c'est l'idée que nous assurons des résultats, ce qui est d'autant plus important. Quand on parle d'assurer des résultats, on insinue, en réalité, l'idée de venir en aide aux gens. On parle de changer des vies. Voilà ce qu'on entend par « résultats ». C'est plus qu'un simple mot. Cela signifie qu'on améliore la vie des gens et qu'on leur accorde une aide considérable.
    Si c'est le cas, ne vaut-il pas la peine, à tout le moins, de mettre à l'essai les obligations à impact social pour avoir l'assurance que nous pouvons obtenir les meilleurs résultats possible pour les Canadiens à risque?
    Oui, c'est bien notre conviction.
    D'accord.
    Vous n'avez rien d'autre à ajouter?
    Je me contenterai de dire que c'est vraiment une des raisons pour lesquelles nous nous levons chaque matin.
    Des voix: Oh, oh!
    Absolument, et nous vous en sommes reconnaissants. Nous valorisons le travail que vous faites. Nous sommes d'avis que ces mesures permettent assurément d'obtenir des résultats positifs. Nous saluons les efforts que vous déployez et nous vous remercions de votre présence ici aujourd'hui pour témoigner devant nous et répondre à nos questions.
    Merci beaucoup.
    Merci beaucoup de nous avoir invités.
    Merci beaucoup.
    Madame Hearn et monsieur Boggild, merci infiniment de votre contribution aujourd'hui. Nous vous sommes reconnaissants d'avoir pris le temps de venir nous faire part de vos réflexions aujourd'hui.
    Je remercie également tous les membres du comité de leur contribution.
    La séance est levée.
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