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RNNR Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des ressources naturelles


NUMÉRO 053 
l
2e SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 31 mars 2015

[Enregistrement électronique]

  (1530)  

[Français]

     Bonjour et bienvenue à cette 53e réunion du Comité permanent des ressources naturelles.
    Au cours des deux prochaines heures, nous entendrons quatre témoins.

[Traduction]

    Nous avons ici Martin Olszynski, de la faculté de droit de l’Université de Calgary. Nous avons aussi Ian Miron, avocat, mais qui est ici pour le compte d’Ecojustice Canada. Et nous avons Robert Blakely, officier d’opération du Canada pour le Syndicat des métiers de la construction du Canada.
    Bienvenue à tous.
    Par vidéoconférence, de Calgary, nous avons Jim Donihee, chef de la direction par intérim de l’Association canadienne des pipelines d’énergie.
    Est-ce que vous nous entendez bien?
    Merci, monsieur Donihee.
    Nous avons deux heures pour cette réunion.

[Français]

    Je vais vous demander de porter vos écouteurs. Entendez-vous bien l'interprétation, monsieur Donihee?

[Traduction]

    Entendu. Merci.

[Français]

    Les témoins disposent d'environ sept minutes pour faire leur présentation.
    Monsieur Olszynski, vous avez la parole.

[Traduction]

    Merci, monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du comité.
    Je m’appelle Martin Olszynski. Je suis professeur adjoint à la faculté de droit de l’Université de Calgary. Mon exposé d’aujourd’hui portera sur ce qu’on appelle communément les dispositions du projet de loi C-46 relatives aux dommages environnementaux.
    J’ai commencé à m’intéresser à la question des dommages environnementaux et à écrire des articles à ce sujet il y a une dizaine d’années, lorsque la Cour suprême du Canada a, pour la première fois, ouvert la possibilité pour les gouvernements d’intenter des poursuites en dommages-intérêts dans ce genre de situation. C’était l’affaire Colombie-Britannique c. Canadian Forest Products Ltd. J’ai depuis écrit plusieurs articles à ce sujet, dont un en collaboration avec l’un des principaux économistes canadiens spécialistes des ressources naturelles, le professeur Peter Boxall.
    Je commencerai par expliquer rapidement la notion de dommages environnementaux. Je décrirai ensuite leur rôle et leur traitement dans le projet de loi. Enfin, je formulerai deux recommandations.
    En termes simples, on peut dire que les dommages environnementaux sont la compensation financière de la perte ou de la détérioration d’un actif environnemental public et des services qu’il fournit, par exemple une forêt, comme dans le cas de Canadian Forest Products, ou une région côtière, comme dans le cas du déversement de l’Exxon Valdez ou celui qui s’est produit dans le golfe du Mexique après l’explosion de la plateforme Deepwater Horizon.
    Les économistes spécialistes de l’environnement et des ressources naturelles répartissent ces torts en perte de deux sortes de valeurs: la valeur d’usage et la valeur de non-usage. Le résumé législatif du projet de loi C-46 définit ces deux valeurs en renvoyant à une publication d'Environnement Canada:
Les valeurs d’usage sont associées à l’utilisation directe de l’environnement, comme la pêche et la baignage dans un lac et la marche en forêt, ou à des utilisations commerciales comme l’exploitation forestière ou l’agriculture. Les valeurs de non-usage sont liées à la conscience de la pérennité de l’environnement (…) ou à la nécessité de laisser des ressources environnementales aux générations futures.
    Comme les membres du comité peuvent l’imaginer, l’évaluation des dommages environnementaux peut être une tâche difficile et complexe. Il faut d’abord faire appel à diverses disciplines scientifiques — l’écologie, la toxicologie, l’hydrologie — pour mesurer l’ampleur des torts, puis convertir ces données en termes financiers au moyen de notions économiques et de techniques d’évaluation environnementale.
    Selon le projet de loi C-46 les dommages environnementaux jouent en fait deux rôles distincts: un rôle punitif et un rôle de responsabilité civile. Pour ce qui est du rôle punitif, si un exploitant commet une infraction à la Loi sur l’ONE, le nouvel article 132 (proposé à l’article 37 du projet de loi, page 35) prévoit que le juge qui prononce la peine tienne compte des « dommages ou (…) risque de dommages à l’environnement » causés par l’infraction. Cette notion est définie plus précisément au paragraphe 4 comme étant la « perte des valeurs d’usage et de non-usage ». Par cette modification, la Loi sur l’ONE rejoint les rangs d’au moins 10 autres lois environnementales fédérales comportant des dispositions punitifs semblables. Quoique peu détaillée, cette formulation est à la fois simple et exhaustive.
    Les autres dispositions relatives aux dommages environnementaux, nettement plus opaques, s’inscrivent dans le contexte de la responsabilité civile. Selon le nouveau paragraphe 48.12(1) (proposé à l’article 16 du projet de loi, pages 6 et 7), il est question de trois types de dommages: à l’alinéa a), les « pertes ou dommages réels subis par toute personne (…) »; à l’alinéa b), les « frais (…) » de nettoyage; et à l’alinéa c), la « perte de la valeur de non-usage liée aux ressources publiques touchées » par le déversement.
    Autrement dit, il n’est pas vraiment question de dommages environnementaux dans cette partie du projet de loi. Leur disponibilité, du moins en partie, est implicite par renvoi à l’alinéa c), où on parle de « perte de la valeur de non-usage liées aux ressources publiques ». On ne renvoie pas explicitement aux valeurs d’usage, bien que certaines d’entre elles soient couvertes par l’alinéa a), comme je l’expliquerai.
    Il y a deux autres dispositions utiles dont je tiens à parler brièvement. Ce sont les nouveaux paragraphes 48.12(9) et 48.13(5). Le premier prévoit que seuls le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux peuvent intenter des poursuites pour la perte de valeurs de non-usage, tandis que le second prévoit que l’ONE n’est pas tenu de tenir compte de la perte éventuelle des valeurs de non-usage lorsqu’il calcule les ressources financières que les exploitants doivent réserver en cas de responsabilité absolue.
    Ma première recommandation serait donc de modifier la troisième catégorie de perte, dans les dispositions relatives à la responsabilité civile, pour y mentionner simplement les dommages environnementaux. On pourrait par exemple parler des « dommages environnementaux découlant du rejet (…) » et y associer un paragraphe supplémentaire définissant les dommages environnementaux, comme c’est le cas dans les dispositions punitives. Ce sont les dispositions les plus simples et les plus exhaustives, et je propose de modifier les dispositions relatives à la responsabilité civile en fonction de ce modèle de simplicité et d’exhaustivité. Non seulement cela simplifierait cet article, mais cela ne paraît nécessaire pour corriger ce qui semble être une omission dans le projet de loi.

  (1535)  

     Comme le comité le sait probablement, ce texte législatif reproduit presque terme à terme le projet de loi C-22, Loi sur la sûreté et la sécurité en matière énergétique, qui modifiait la LOPC dans le même esprit. On y trouvait déjà des dispositions sur les déversements et, plus précisément, une définition de l’expression « perte ou dommages réels ». Permettez que je la lise rapidement: « sont assimilées à une perte ou des dommages réels la perte d’un revenu, y compris un revenu futur, et, à l’égard des peuples autochtones du Canada, la perte de possibilités de chasse, de pêche ou de cueillette. »
    Cette définition, qui couvre assurément une partie des valeurs d’usage dont je parlais plus tôt, n’a pas été intégrée au projet de loi. Et, même si elle l’était, j’estime qu’il y aurait encore une lacune dans le texte législatif. Si vous le souhaitez, je vous en donnerai des exemples après mon exposé.
    Ma seconde recommandation serait que le gouverneur en conseil devrait être tenu, dans un certain délai, de prendre un règlement énonçant la procédure d’évaluation des dommages environnementaux ou qu’il y soit à tout le moins autorisé. Cette procédure donnerait lieu à une présomption de validité réfutable dans toute poursuite en dommages-intérêts de cette sorte, devant un tribunal judiciaire ou devant le tribunal d’indemnisation. Premièrement, comme je l’ai dit, l’évaluation des dommages environnementaux est un exercice difficile et complexe. La réglementation permettrait à toutes les parties de s’entendre et réduirait le risque de litiges inutiles. C’est pour cette raison que les lois américaines correspondantes, la CERCLA et la Oil Pollution Act, comportent des dispositions de ce genre et que des procédures sont prévues au titre de ce qu’on y appelle « l’évaluation des dommages causés aux ressources naturelles ». J’estime que cette règlementation représente la règle d’or dans ce contexte.
    Ma deuxième raison renvoie à l’esprit de prévention du projet de loi. Il existe une dizaine de lois environnementales fédérales comportant des dispositions sur les dommages environnementaux, et ça fait 10 ans que la Cour suprême a permis aux gouvernements d’intenter ce genre de poursuites, mais, que je sache, la Couronne fédérale n’a jamais rien tenté de ce côté-là. Peut-être est-ce que des témoins du gouvernement qui viendront plus tard pourront l’expliquer. Quoi qu’il en soit, cette réalité compromet, à mon avis, l’effet dissuasif auquel un système de responsabilité imposée par la loi comme celui qui est proposé dans le projet de loi C-46 est censé donner lieu.

  (1540)  

    Monsieur Olszynski, pourriez-vous en venir à votre conclusion maintenant?
    J’en suis à deux lignes près, monsieur le président. Merci.
    Pour terminer, je tiens simplement à dire que l’élaboration de ce genre de règlementation, qui devrait en principe être applicable à tous les systèmes fédéraux d’évaluation des dommages environnementaux dont je viens de parler, contribuerait beaucoup, je crois, à la consolidation de l’effet préventif de ce projet de loi.
    Merci de votre attention.
    Merci beaucoup, monsieur Olszynski.
    Le témoin suivant est M. Miron, d’Ecojustice Canada.
    Merci, monsieur le président, et merci à tous les membres du comité. Je suis heureux d’être ici aujourd’hui.
    Comme vous le savez peut-être, je suis avocat et je représente ici Ecojustice, c’est-à-dire le plus important organisme canadien de droit environnemental voué à l’intérêt public. Ecojustice s’est intéressé de près aux questions relatives aux pipelines dans tout le pays, ainsi qu’aux systèmes de responsabilité imposée par la loi, plus généralement dans le secteur énergétique. Ce sera l’axe de mon exposé.
    Je pense que nous sommes tous d’accord pour dire que le projet de loi C-46 est très nécessaire et, franchement, qu’il était grand temps. Cela dit, dans sa version actuelle, il comporte certaines lacunes importantes. Je vous parlerai de trois d’entre elles aujourd’hui.
    Premièrement, le plafond de responsabilité absolue est tout à fait insuffisant. Deuxièmement, on a besoin de précisions sur l’évaluation et le calcul des dommages au titre de la valeur de non-usage de ressources publiques, ce que j’appellerai ici les « dommages environnementaux ». Troisièmement, le projet de loi offre quelques nouveaux instruments intéressants pour obtenir des indemnités et remboursements en cas de déversement, mais le recours à ces instruments est le plus souvent discrétionnaire et non pas obligatoire.
    Dans sa version actuelle, le projet de loi traduit plutôt le principe selon lequel « le pollueur pourrait payer ». Il propose des améliorations modestes au système actuel, mais il ne concrétise pas complètement le principe du pollueur-payeur et il continue donc d’exposer les Canadiens à l’éventualité inadmissible de devoir assumer une partie des risques financiers associés à un déversement.
    Concernant le plafond de responsabilité absolue, le fait que le projet de loi intègre le principe du pollueur-payeur dans la Loi sur l’Office national de l’énergie est une mesure positive. Mais il limite ensuite la responsabilité absolue à un milliard de dollars en cas de déversement dû à la rupture d’un grand oléoduc.
    Le relèvement du plafond de responsabilité absolue à un milliard de dollars est certainement une amélioration par rapport au statu quo. Je dis « certainement » parce qu’il limite la responsabilité illimitée prévue dans la Loi sur les pêches au sujet de certains coûts d’intervention liés aux déversements. En cas de déversement majeur, un milliard de dollars ne suffit pas à couvrir les frais de nettoyage, sans parler de l’indemnisation des victimes au titre des dégâts provoqués ni de l’indemnisation des Canadiens en général au titre des dommages environnementaux. On a vu ce qui s’est passé au Michigan lorsque la ligne 6B d’Enbridge s’est rompue. Les frais de nettoyage s’élèvent jusqu’ici à 1,2 milliard de dollars. Et il y a encore du pétrole dans la rivière et encore du travail à faire.
    Par conséquent, le chiffre apparemment arbitraire d’un milliard de dollars limite indûment le principe du pollueur-payeur et permet aux pollueurs de faire assumer aux Canadiens une partie des risques financiers associés à un déversement.
    Passons rapidement à la question des dommages environnementaux. Je suis heureux de constater que le projet de loi prévoit une responsabilité au titre de la perte de valeur de non-usage. Il est absolument indispensable d’appliquer efficacement cette mesure, parce qu’un déversement de pétrole majeur ne peut jamais être complètement nettoyé et que la faune et la flore locales sont souvent tuées ou gravement endommagées avant même le début du nettoyage.
    Le projet de loi prévoit l’indemnisation au titre de ces dommages environnementaux, mais il ne donne aucune précision sur le fonctionnement de ce système. À mon avis, un gouvernement hésitera à réclamer des indemnités en l’absence d’indications précises. On aurait besoin, à titre minimal, d’un pouvoir de réglementation permettant de produire des directives et de combler cette lacune. J’invite instamment le gouvernement à organiser une consultation publique au sujet de ces directives.
    Passons aux nouveaux mécanismes de recouvrement: le projet de loi prévoit certains nouveaux instruments d’intervention et de recouvrement de dépenses ou d’indemnisation. Le recours à beaucoup de ces instruments est laissé à la discrétion de l’ONE. Beaucoup d’entre eux dépendent également de la désignation de l’entreprise par le Cabinet. La désignation est le produit d’une décision discrétionnaire qui permet au gouvernement, par exemple, de se charger des mesures d’intervention en cas de déversement ou de nommer un tribunal d’indemnisation spécialisé qui statuera sur les demandes de dommages-intérêts.
    Un mot encore sur ce tribunal: je tiens à rappeler que les dommages-intérêts accordés par le tribunal semblent être prélevés directement ou indirectement sur les deniers publics, probablement pour garantir un dédommagement rapide des victimes.
    Lorsque les deniers publics servent à indemniser les victimes d’un déversement, l’ONE a la possibilité d’essayer de récupérer le montant auprès du pollueur. Si celui-ci n’a pas assez d’argent, l’Office peut essayer de récupérer la somme auprès d’un sous-ensemble plus large d’entreprises du secteur pétrolier par le biais de frais et de droits. Mais, là encore, ces instruments sont discrétionnaires. L’ONE n’est pas tenu de les appliquer, et c’est inquiétant.

  (1545)  

     Dans l’esprit du principe pollueur-payeur, l’ONE devrait être tenu d’employer tous les moyens dont il dispose pour s’assurer que les contribuables ne soient pas les seuls à faire leur part dans les coûts associés à un déversement de pétrole. C’est plus particulièrement important ici puisque le projet de loi C-46 prévoit que des non-Canadiens pourraient s’adresser au tribunal d’indemnisation pour obtenir des indemnités. Il est évidemment inacceptable d’exposer les contribuables canadiens à ce genre de risque financier.
    Pour résumer, le projet de loi représente un pas de plus vers le modèle éventuel de pollueur-payeur, mais ses lacunes continuent d’exposer les Canadiens à un risque financier inadmissible en cas de rupture de pipeline.
    Je termine ici mes observations, sous réserve de questions de votre part. Je vous remercie de m’avoir permis de m’exprimer ici aujourd’hui.

[Français]

     Merci beaucoup, monsieur Miron.
    Nous passons maintenant à M. Blakely, qui représente les Syndicats des métiers de la construction du Canada.

[Traduction]

    Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité, je vous remercie de m’accueillir.
    Je suppose que les raisons de ma présence ici sont évidentes. Nous construisons des pipelines. Nous voulons en construire. Mais l’univers des pipelines, c’est plus que le simple fait d’aligner des bouts de tuyaux dans le sol.
    Un pipeline, c’est une infrastructure de liaison. C’est une sorte de service public, qui relie l’amont à l’aval, jusqu’à l’endroit où le produit extrait est traité. Pour nous, ça veut dire relier des milliers d’emploi très qualifiés et très bien payés, disons à Fort McMurray, et des milliers d’emplois très qualifiés et très bien payés, disons à Québec, si l’énergie va vers l’est, ou à Saint-John. Ce projet de loi nous intéresse vraiment.
    Faute de nouveaux pipelines, les entreprises qui en dépendent ne peuvent pas s’épanouir. Sans pipeline, on ne peut pas accumuler de gaz naturel ou de pétrole ou quoi que ce soit d’autre dans l’espoir que quelqu’un trouvera le moyen de le commercialiser. Le pipeline est et reste le plus sûr moyen de transport des hydrocarbures.
    Je n’ai pas en tête de vous suggérer d’en construire tout simplement parce que ça nous plairait beaucoup. La vérité, c’est que nous vivons ici. Les trains qui, à l’occasion, transportent du pétrole en passant par le centre de la plupart des villes de l’Ouest — je viens des Prairies — passent par le centre de nos collectivités. Ce sont nos emplois, mais nous ne sommes pas prêts à compromettre notre environnement pour quelques chèques de paye.
    Quand j’ai lu le projet de loi, je l’ai fait comme j’aurais lu une convention collective. Quand on vote pour ou contre une convention collective, on vote pour ou contre un certain nombre de choses qui s’y trouvent. Il y a des choses que j’aime beaucoup, d’autres que je trouve correctes, et d’autres qui auraient peut-être besoin d’être clarifiées. Tout compte fait, ce qui est proposé ici est au moins un compromis raisonnable qui pourrait nous être utile à long terme.
    Est-ce qu’on devrait clarifier certaines dispositions? Je ne suis pas avocat, alors j’adore lire ce genre de truc. Je ne vois pas vraiment de problème de principe entre les parties. Je crois que ce qu’il faut ici, c’est harmoniser, améliorer et examiner cette série de modifications, et essayer d’aller de l’avant.
    J’ai quelques suggestions. D’abord, il y a un certain nombre de dispositions qui prévoient que l’Office national de l’énergie, s’il le juge utile, doit faire certaines choses. L’une d’elles est de toujours utiliser la meilleure technologie possible. Nous sommes d’accord. Il faut utiliser la meilleure technologie, mais l’Office ne devrait pas préciser la technologie à employer.
    Nous sommes aussi d’accord avec l’idée que l’Office national de l’énergie devrait avoir suffisamment de ressources pour veiller à ce que les gens qui conviennent fassent ce qu’il faut au moment voulu.
    Pour ce qui est des dispositions permettant à l’Office national de l’énergie de prendre les commandes en cas d’incident, ça m’a fait réfléchir un moment. Dans une autre vie, j’ai été officier de marine. C’est parfois difficile d’imaginer, quand on est assis à son bureau, très loin du gars qui se tient sur le pont avec de l’eau qui arrive de partout, combien c’est difficile de prendre la bonne décision pour les gens qui sont sur place.
    Dans une certaine mesure, les exploitants de pipelines sont mieux placés que l’Office pour prendre des décisions. Cela dit, il devrait y avoir une disposition permettant à l’Office national de l’énergie d’intervenir si les gens ne règlent pas correctement les problèmes.

  (1550)  

    Concernant la question de la responsabilité absolue, le minimum d’un milliard de dollars, je n’y vois pas le retrait du droit découlant de la common law d’intenter des poursuites au-delà de la limite absolue pour faute ou autre chose.
    Nous sommes d’accord avec le principe du pollueur-payeur, et peut-être que certains des aspects discrétionnaires du projet de loi sont appropriés dans les circonstances. On a parfois besoin de gens comme ceux de l’Office national de l’énergie pour prendre des décisions raisonnables et raisonnées, et il faut qu’ils aient une certaine marge de manœuvre. Quand on a des vêtements qui vous vont parfaitement et qu’on prend 10 livres, il faut bien les ajuster. Peut-être qu’on peut faire des ajustements à l’Office national de l’énergie pour ça.
    Voilà ce que j’avais à vous dire. Je suis à votre disposition si vous avez des questions.

[Français]

     Merci beaucoup, monsieur Blakely.

[Traduction]

    Nous entendrons maintenant M. Jim Donihee, de l’Association canadienne de pipelines d’énergie, qui disposera de sept minutes.
    Monsieur Donihee.

[Français]

    Monsieur le président, je vous remercie de m'offrir cette occasion de vous faire part de quelques remarques.

[Traduction]

    Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité, je vous remercie.
    Je m’appelle Jim Donihee. Je suis chef de la direction par intérim de l’Association canadienne de pipelines d’énergie. Je vous remercie de me permettre de vous faire part de quelques observations.
    Permettez que je commence par vous donner un contexte. Les membres de l’ACPE exploitent 115 000 kilomètres de pipelines au Canada, dont une grande partie relève de la compétence de l’Office national de l’énergie. Nos membres transportent environ 97 % de tout le gaz naturel et le pétrole brut produit dans des exploitations terrestres, et nous en assurons le transport vers les marchés de consommation de façon très sûre depuis une soixantaine d’années. Par exemple, en 2014, nous avons collectivement transporté plus de cinq billions de pieds cubes de gaz naturel et 1,2 milliard de barils de produits pétroliers liquides. Ça représente environ 23 % des échanges commerciaux du Canada, et c’est donc une contribution extrêmement importante au tissu social de notre pays.
    De 2002 à 2013, nous avons enregistré un taux de sécurité opérationnel de 99,9995 %, et c’est vraiment exceptionnel, mais nous savons que ce n’est pas suffisant pour autant. Ce n’est pas assez. Nos chefs d’entreprise se sont engagés à une tolérance zéro aux incidents de pipeline, et nous y travaillons très fort.
    Le projet de loi C-46 tel qu’il est proposé fait écho aux convictions de notre secteur à l’égard du principe du pollueur-payeur, de l’excellence des mesures d’intervention en cas d’urgence, de la sécurité des pipelines et de la protection de l’environnement. C’est pour cette raison et pour convaincre les Canadiens que notre secteur est intégralement voué au transport sûr et socialement responsable de l’énergie par pipelines que l’ACPE appuie la réglementation proposée.
    Nos membres se soucient d’abord et avant tout de la sûreté des pipelines et de la prévention des incidents tout au long de leur cycle de vie. Ce souci s’est traduit par un investissement de plus de 1,4 milliard de dollars dans la seule année 2013 pour garantir la sûreté de ces pipelines. Nous prenons des mesures vigoureuses dans le cadre du programme de l’ACPE intitulé Integrity First, mode de gestion tenant compte de priorités cruciales dans l’exploitation des pipelines, à commencer par leur intégrité et le fonctionnement de la salle de contrôle. Le programme Integrity First, inspiré de l’initiative Gestion responsable de l’industrie chimique, donnera d’excellents résultats dans l’ensemble de notre secteur en raison de notre désir sincère de dépasser les exigences de la réglementation.
    Cette année aussi, l’ACPE fera encore un pas important en s’engageant à procéder à une enquête sur la culture de la sécurité parmi tous ses membres afin de s’assurer que nous nous intéressons à la dynamique humaine, tout aussi cruciale pour obtenir un rendement excellent.
    Nous participons activement à l’élaboration de normes, et ces normes, qui sont principalement établies par l’Association canadienne de normalisation, s’appliquent à nos activités, de la conception à la mise à la casse, en passant par la construction et l’exploitation des pipelines dont nous le privilège d’avoir la responsabilité.
    La meilleure technologie disponible est absolument indispensable à la façon dont nos entreprises fonctionnent. Grâce à des initiatives comme le Canadian Pipeline Technology Collaborative, dernière en date, nous cherchons à tirer parti des nouvelles technologiques par l’intermédiaire des établissements d’enseignement et par le biais d’une collaboration avec de nombreux partenaires gouvernementaux.
    Je crois qu’il est important de se faire une idée des engagements pris dernièrement par notre secteur d’activité. Il y a d’abord, par exemple, l’entente d’assistance mutuelle en cas d’urgence, mise en œuvre pour la première fois en 2014 et qui atteste que, de nos jours, chaque incident touchant un pipeline est la responsabilité de tous. Cette entente vise à tirer parti, et elle tire parti, des ressources de tous nos membres pour réagir de la façon la plus efficace et immédiate à tout incident éventuel.
    Outre cette entente, les membres de l’ACPE ont adopté un système de commandement des interventions commun à tous. Il traduit et améliore l’interopérabilité entre tous nos membres.

  (1555)  

    La transparence est un élément absolument indispensable si l’on veut gagner et conserver la confiance des Canadiens. C’est pourquoi nous avons décidé de former un groupe de travail chargé du modèle commun qui permettra à tous les Canadiens d’avoir accès à toute l’information que nous pouvons fournir afin de gagner leur confiance, tout en protégeant les renseignements qui relèvent de la vie privée ou de la protection de l’infrastructure nationale. Ces renseignements sont toujours mis à la disposition des tous les intervenants d’urgence.
    Nous avons entendu les observations de M. Blakely au sujet de l’ONE et nous sommes convaincus que la surveillance exercée par un organisme de réglementation compétent est crucial pour les intérêts nationaux du Canada. Nous avons la chance d’avoir un organisme de réglementation solide, capable, dans les délais nécessaires, d’analyser nos projets en fonction d’éléments factuels et scientifiques.
    Cela dit et compte tenu, surtout, des nouveaux pouvoirs conférés par le projet de loi à l’ONE, nous pensons qu’il est extrêmement important que l’Office soit doté des ressources dont il a besoin et de la souplesse voulue pour utiliser les fonds nécessaires au recrutement des spécialistes dont il a besoin pour réaliser son mandat.
    Les entreprises membres de l’Association affichent des antécédents remarquables et une très faible fréquence d’incidents. Elles croient fermement dans le principe du pollueur-payeur et elles ont toujours veillé au rétablissement de l’environnement sans que la population en porte le fardeau financier, y compris les coûts relatifs à la perte de jouissance. Les membres de l’ACPE sont voués au respect de cette obligation et c’est pourquoi ils ont des plans d’urgence et d’intervention. Elles veilleront à remplir leurs obligations telles qu’elles sont énoncées dans le projet de loi.
    Nonobstant notre stricte adhésion au principe du pollueur-payeur et nos solides mesures d’urgence, nous sommes favorables au projet de loi, qui énonce les exigences applicables aux entreprises d’exploitation du pétrole brut en matière de responsabilité et d’indemnisation.
    Pour conclure, monsieur le président, j’aimerais proposer les recommandations suivantes concernant cette étape très positive.
    Les exigences découlant du projet de loi en matière de réglementation devraient être fonction des risques et tenir compte des antécédents avérés du secteur du transport par pipeline en matière de sécurité.
    Le gouvernement fédéral devrait continuer d’envisager les moyens de soutenir des initiatives multisectorielles, comme le CPTC, qui permettront de trouver, d’élaborer et de mettre en œuvre des connaissances scientifiques et des technologies de pointe. L’Association canadienne de normalisation reste un organisme très efficace pour l’élaboration de normes. Nous collaborons régulièrement avec elle et nous pressons le mouvement pour élaborer ces normes.
    Nous respectons énormément le rôle de l’ONE et nous estimons qu’il est vital pour le bon fonctionnement d’un secteur d’activité très responsable au nom des Canadiens. Nous sommes convaincus que l’ONE doit obtenir les fonds dont elle a besoin et jouir de la souplesse nécessaire pour s’en servir à remplir les obligations que vous lui imposerez en approuvant ce projet de loi.
    Voilà qui termine mes observations, monsieur le président. Je vous remercie de m’avoir permis de vous les présenter. Le secteur canadien des pipelines affiche des antécédents dont les Canadiens peuvent être fiers. Nous serons heureux de contribuer à contribuer au succès de notre pays dans les années à venir.
    Merci.

  (1600)  

[Français]

     Merci beaucoup, monsieur Donihee.
    Nous allons maintenant passer aux questions de la part des membres du comité. Nous allons commencer par des périodes de questions de sept minutes.
    Nous commençons par Mme Perkins, qui sera suivie de Mme Duncan et de M. Regan.
    Madame Perkins, vous avez la parole.

[Traduction]

    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je voudrais d’abord vous remercier tous de vos exposés aujourd’hui. C’est toujours très intéressant d’entendre des points de vue très différents.
    Je m’adresse notamment à M. Donihee: au sujet de votre rapport, je pense que nous devons féliciter le secteur de son taux de succès. Vous avez fait preuve de beaucoup de diligence. Un taux de 99,9 % sans déversement, c’est tout à fait remarquable.
    Je suppose donc que la première question doit être de savoir quand ce genre de chose se produit. Monsieur Donihee, comment les gens qui sont victimes d’un incident procèdent-ils actuellement pour obtenir des indemnités? Quelle est la procédure en vigueur et quel rôle y jouez-vous?
    La question est pour moi?
    Quel est votre rôle en cas de déversement?
    Le plus directement à l’heure actuelle, c’est l’Office national de l’énergie qui joue un rôle très important dans la surveillance et le suivi du système de commandement et de contrôle, le système de commandement des interventions dont les entreprises seraient chargées. Comme je l’ai dit tout à l’heure, les entreprises ont toujours réagi de façon très efficace, et, très honnêtement, elles n’hésitent pas à sortir leurs carnets de chèques et à régler les soucis immédiats des gens directement touchés. Elles les logent dans des hôtels. Elles assument leurs frais immédiats, et, comme je l’ai dit, elles s’occuperont des pertes de jouissance et feront faire les réparations nécessaires.
    Le projet de loi, pour nous, propose un mécanisme beaucoup plus délibéré par lequel les victimes pourront s’adresser à l’ONE ou, au pire, à un tribunal pour obtenir ce dont ils ont besoin.
    Vous avez formulé un certain nombre de recommandations à la fin de votre exposé, en commençant par celle-ci: « Les exigences découlant du projet de loi en matière de réglementation devraient être fonction des risques et tenir compte des antécédents avérés du secteur du transport par pipeline en matière de sécurité. »
    Pourriez-vous préciser ce que vous entendez par « fonction des risques »?
    D’après nous, une grande partie de la discussion pourrait se transformer en conversation sur les seules conséquences et non pas sur la probabilité de leur occurrence. Il n’est pas question d’écarter la question des considérations relatives à la responsabilité financière ni celle des coûts connexes. Mais je pense qu’il est également important de tenir compte de toutes les dispositions dont j’ai parlé concernant les progrès technologiques, nos antécédents extraordinaires, la solidité et la réputation de ces entreprises, et leur désir sincère de veiller à prendre les mesures qui conviennent en cas d’incident. Donc, la probabilité et les conséquences sont des éléments fondamentaux quand on s’interroge sur les sommes qu’il faut mettre de côté en cas d’intervention immédiate, afin de ne pas gaspiller, si j’ose dire, de ressources quand la probabilité est extrêmement faible.
    Cela ne diminue en rien l’engagement de ces entreprises à prendre les mesures qui s’imposent pour assumer tous les coûts et remplir toutes les obligations nécessaires.

  (1605)  

    Merci beaucoup.
    Monsieur Blakely, vous avez un parcours intéressant, d’abord dans la marine, et maintenant dans le domaine des pipelines…
    J’ai commencé comme tuyauteur.
    Vous avez commencé comme tuyauteur, incroyable! La boucle est bouclée, donc.
    J’aimerais revenir sur certaines de vos remarques concernant le rôle de l’ONE dans tout ça. Vous dites que la formulation de ce texte est peut-être un peu trop prescriptive. C’est bien ça?
    Permettez que je reformule. L’ONE doit avoir des ressources et il doit pouvoir régler les problèmes quand il doit le faire. Si l’Office est tenu d’assumer une fonction obligatoire, il doit avoir les ressources et les instruments nécessaires. S’il jouit d’une certaine marge de manœuvre, cette marge doit être clairement explicitée, de même que son motif.
    Si un tribunal n’a pas de pouvoir discrétionnaire ou si son pouvoir discrétionnaire se limite à dire « Donnez-moi le bébé ou coupez-le en deux », c’est un mauvais tribunal. Il doit pouvoir prendre des décisions créatives et sources de solutions.
    Et vous ne voyez pas intégralement cette possibilité dans la façon dont le projet de loi est rédigé actuellement.
    Si tout est obligatoire, il n’y a rien de complet. Il faut un pouvoir discrétionnaire, et il faut que l’ONE ait les moyens de l’exercer.
    D'accord.
    Vous pouvez lui donner tout le pouvoir discrétionnaire que vous voudrez, mais, si vous lui donnez 46¢ de ressources, elle ne pourra rien faire.
    D’accord, je comprends. Merci beaucoup.
    Concernant la technologie, vous parliez de toujours employer la meilleure et vous disiez: ne nous dites pas quelle est la meilleure.
    Exigez l’utilisation de la meilleure technique, mais ne l’imposez pas.
    N’imposez pas la technologie qu’il y aurait précisément lieu d’utiliser.
    C’est ça.
    Si on utilise la meilleure technologie, on doit l’utiliser correctement, mais c’est à l’exploitant de décider quelle est la meilleure.
    Comment est-ce possible…

[Français]

     Merci beaucoup.
    Je dois vous interrompre puisque la période de sept minutes dont vous disposiez est écoulée.

[Traduction]

    Merci beaucoup.

[Français]

    Madame Duncan, vous avez la parole. Vous disposez de sept minutes.

[Traduction]

    J’aimerais vous remercier tous les quatre d’être ici avec nous. Je sais que vous êtes des gens très occupés, et c’est toujours un plaisir de rencontrer M. Blakely dans l’avion entre Edmonton et Ottawa.
    Je reviens sur votre observation, monsieur Blakely, au sujet de la clarification de l’exercice du pouvoir discrétionnaire. Je pense que c’est une excellente remarque générale et je l’ai appréciée, dans certaines limites, bien entendu.
    Monsieur Miron, si je vous ai bien compris, vous êtes inquiet du nouveau paragraphe 48.12(5). Il prévoit plus d’un milliard de dollars d’indemnité si ce montant est prévu par règlement. Je me demande si vous pensez que le critère d’une extension au-delà de ce seuil devrait être précisé dans la réglementation et que la procédure devrait être ouverte, transparente et inclusive.
    Seriez-vous d’accord pour dire que, faute de réglementation en ce sens, nous n’aurions pas de certitude juridique quant aux conditions et circonstances dans lesquelles l’indemnité pourrait dépasser un milliard de dollars?

  (1610)  

    Dans le nouvel alinéa 48.12(5)a), qui est la disposition à laquelle je crois que vous renvoyez ici, on dit simplement qu’une somme supérieure peut être prévue par règlement. Sans autre précision. On n’explique pas dans quelles circonstances un montant supérieur pourrait être prévu ou prescrit par règlement.
    En fait, je parle du nouveau paragraphe 48.13(5).
    Le 48.13(5)?
    Oui. C’est à la page 10 du projet de loi. Tout près de ce dont vous parlez.
    Sous la rubrique des obligations financières?
    C’est ça.
    Pour l’essentiel, le projet de loi tel qu’il est rédigé prévoit qu’une entreprise doit réserver les ressources financières nécessaires au paiement éventuel de l’indemnité maximale, qui est d’un milliard de dollars pour une grande entreprise de pipelines.
    Le nouveau paragraphe 48.13(5) donne à l’ONE… je ne suis pas sûr de comprendre votre question.
    Je vous ai probablement égaré, vous aviez raison tout à l’heure.
    D’accord, désolé.
    J’ai une autre question au sujet de cette disposition.
    Je crois que vous avez dit quelque chose de très juste au début, à savoir que, oui, c’est le pollueur qui paie, mais que, quand on dit que l’indemnité maximale est d’un milliard de dollars à moins que le gouvernement détermine par règlement que ça devrait être plus, tant que cette réglementation n’est pas promulguée, on ne sait pas quels sont les critères applicables et on baigne dans l’incertitude juridique.
    On peut dire ça.
    Je dirais que c’est un aspect positif qu’il ne soit pas possible de réduire la responsabilité par règlement, contrairement à ce qu’on a vu dans certains projets de loi antérieurs.
    Maintenant, si on parle du paragraphe 48.12(9), il porte sur le recouvrement des pertes de valeur de non-usage.
    C’est exact.
    J’ai posé la question aux témoins du gouvernement et je crois, il me semble, aux témoins de l’Office national de l’énergie. Pensez-vous qu’il devrait y avoir une reddition des comptes publique sur les procédures employées par le gouvernement pour évaluer les pertes de valeur de non-usage et sur les modes de recouvrement et les effets de ces modes de recouvrement?
    Je crois que ça renvoie à la nécessité de clarifier la façon dont fonctionne ce système de dédommagement. On n’a même pas prévu le pouvoir de prendre un règlement concernant ces dédommagements. On pourrait probablement intégrer ça dans ce genre de règlement.
    Peut-être que quelqu’un d’autres aimerait prendre la parole à ce sujet. Peut-être que M. Donihee a quelque chose à dire puisque le gouvernement pourrait être appelé à demander un recouvrement, mais qu’on ne sait pas vraiment quand et comment il pourrait entamer ce genre de procédure.
    D’après ce que je comprends du projet de loi à ce stade, il y a responsabilité illimitée si l’exploitant du pipeline est jugé fautif.
    Il est en effet possible de demander le recouvrement de tout montant jugé nécessaire. S’il y a des dommages causés à des tiers, le projet de loi prévoit un plafond d’un milliard de dollars, mais il est clair qu’il reste possible de demander le recouvrement de coûts jugés nécessaires par le tribunal ou par l’Office.
    Monsieur Donihee, j’ai une autre question pour vous, et je l’ai posée aussi aux témoins du gouvernement et de l’Office national de l’énergie.
    La réglementation actuelle, et je crois que certaines modifications ont trait à cette question, la réglementation prévoit un système d’inspection gouvernementale, mais laisse également une large part d’auto-inspection aux propriétaires et exploitants de pipelines. Dans bien des cas, l’entreprise est autorisée à confier l’inspection à un consultant.
    Les témoins du gouvernement m’ont dit que les rapports établis par des inspecteurs privés ne sont pas mis à la disposition du public. Pensez-vous que ça pourrait être un facteur dans le fait que la population est moins convaincue que les pipelines font l’objet d’inspections valables?
    Le projet de loi prévoit une surveillance plus serrée, et je pense que le secteur des pipelines y est très ouvert. En tout cas, nous sommes très désireux, comme je l’ai dit dans mes observations personnelles, d’améliorer la transparence de nos activités parce que c’est ainsi que nous gagnerons et conserverons la confiance des Canadiens.
    La surveillance exercée par l’ONE et ses inspections font partie d’une procédure publique. Quand ces opérations sont confiées à des tiers et se déroulent dans le cadre des activités des entreprises, le contenu appartient aux entreprises.
    Je pense en fin de compte que, pour gagner la confiance des Canadiens, il n’y aurait guère d’objection à rendre publique la nature de nos activités. À mesure que se développe le programme Integrity First, dont je vous ai parlé, il y aura beaucoup plus de reddition des comptes publique à l’échelle du secteur, avec la possibilité, un jour, d’une reddition des comptes publique à l’échelle de chaque entreprise.

  (1615)  

    Je vous remercie.
    Est-ce que je vous comprends bien? Vous dites que les propriétaires et exploitants de pipelines seraient plus ouverts à l’idée de publier ces rapports d’inspection privés?
    Vous avez 10 à 15 secondes, monsieur Donihee.
    En effet, je crois que c’est à envisager, tout à fait. J’aimerais comprendre la nature de cette préoccupation et je me ferai un plaisir de soulever la question auprès des entreprises membres de l’ACPE.
    Merci beaucoup, monsieur Donihee et madame Duncan.

[Français]

     Nous passons maintenant à M. Regan, qui dispose de sept minutes.

[Traduction]

    Monsieur Donihee, comment devrait-on décider ce que doit être le plafond de responsabilité absolu? Quels devraient être les critères de calcul de ce plafond?
    Je pense que, en l’occurrence, le plafond a été fixé en fonction des pires situations que nous avons observées. Je crois qu’un autre participant a parlé du total des coûts liés à… appelons ça « le pire scénario », qui est arrivé à l’une de nos entreprises membres. Je pense que ça dépasse le milliard de dollars.
    Comme je l’ai dit dans mes observations personnelles, je pense que ces entreprises doivent assumer le coût lié à la réserve de ces fonds. Elles n’ont aucune intention, comme je l’ai dit, de limiter les mesures qu’elles seraient appelées à prendre.
    Mais je pense qu’il incombe à un bon gouvernement de tenir compte des coûts en fonction d’une perspective axée sur les risques, comme je l’ai dit plus tôt en parlant de probabilité et de conséquences, pour calculer les montants qui conviennent.
    Merci beaucoup.
    Peut-être que d’autres témoins, quand je leur poserai d’autres questions, voudront ajouter quelque chose à ça ou y répondre.
    Monsieur Olszynski, je crois que vous disiez que, au lieu d’utiliser la formulation « dommages pour non-usage », on devrait parler de « dommages environnementaux ». Est-ce que cette notion est définie ailleurs dans la réglementation?
    J’essaie de tirer les choses au clair. Est-il possible que les « dommages pour non-usage » soient une idée élargie des « dommages environnementaux ».
    À la première question, la réponse est oui, c’est ce que je propose, que, dans le nouvel alinéa 48.12(1)c) on indique plutôt « dommages environnementaux ».
    Comme j’ai essayé de l’expliquer dans mes observations, les dommages environnementaux pourraient constituer le budget le plus important. Ensuite, il y a deux catégories: la valeur d’usage et la valeur de non-usage. C’est l’univers des dommages environnementaux.
    Quant à la raison pour laquelle je renvoyais aux dispositions relatives à la détermination des sanctions, exactement, eh bien, il y a en fait dix textes législatifs fédéraux sur l’environnement où il est question de dommages environnementaux et où sont définies les notions de valeur d’usage et de valeur de non-usage. En fait, actuellement, la Loi sur l’ONE modifiée par le projet de loi comporterait cette définition, mais elle ne fonctionne que dans le contexte des dispositions relatives à la détermination des sanctions.
    Je crois que la raison pour laquelle c’est rédigé comme ça, dans le contexte des dispositions relatives à la responsabilité civile, est cette idée que, peut-être, les valeurs d’usage sont suffisamment traitées au nouvel alinéa 48.12(1)a), où l’on parle de « pertes ou dommages réels ». Je tiens à préciser que certains de ces dommages, probablement certaines valeurs d’usage, entrent probablement dans cette catégorie, mais certainement pas toutes. Il s’agit donc de s’assurer que c’est complet.
    Là encore, il faut se rappeler la restriction dont on a parlé tout à l’heure. Les dommages dont il est question au nouvel alinéa 48.12(1)c), là où je propose de parler de dommages environnementaux, ne concernent que les gouvernements. C’est conforme à la réglementation homologue d’autres pays. Cela garantirait essentiellement que ces dommages couvrent toute la série des dommages environnementaux, mais qu’il n’y aurait pas pour autant de double comptabilisation ou quelque chose comme ça.
    Qui devrait pouvoir intenter des poursuites pour dommages environnementaux?
    Je vais plutôt répondre à la question de savoir qui le fait actuellement. Le « qui devrait » est un peu plus compliqué.
    Dans d’autres pays, les États-Unis par exemple, ce pouvoir est généralement réservé aux gouvernements, c’est-à-dire au gouvernement fédéral et aux gouvernements d’État. C’est un peu plus vaste aux États-Unis parce que les administrations tribales sont également autorisées à intenter des poursuites. Dans la réglementation américaine, aux termes de la CERCLA et de l’OPA, il est question des fiduciaires, c’est-à-dire le gouvernement fédéral, les gouvernements d’État et les administrations tribales.
    J’ai déjà, en bloguant au sujet du projet de loi C-22 ou d’ESSA, suggéré qu’on pourrait élargir la catégorie pour reconnaître les administrations autochtones, les bandes indiennes, etc., au titre de ce genre de dommages sur leurs territoires. On pourrait aussi y inclure les municipalités. La catastrophe de Lac-Mégantic a provoqué, outre de tragiques pertes humaines, un désastre environnemental massif. Il me semble, franchement, que la municipalité devrait être habilitée à titre de représentante de la population.
    Essentiellement, pour essayer de revenir aux choses simples, je dirais que les gouvernements, aux différents paliers, sont les parties qui devraient pouvoir intenter des poursuites en dommages-intérêts.

  (1620)  

    Je vous remercie.
    Monsieur Miron, je me demandais si vous pourriez nous parler de l’interaction entre ce projet de loi et le paragraphe 42(1) de la Loi sur les pêches, qui prévoit une responsabilité absolue illimitée à l’égard des coûts d’intervention du gouvernement en vertu de cette loi.
    Certainement.
    Si le contenu d’un pipeline se déverse dans des eaux habitées par des poissons et cause des dommages à ces poissons, le paragraphe 42(1) de la Loi sur les pêches peut entrer en ligne de compte pour la responsabilité absolue de l’entreprise à l’égard des coûts d’intervention, et ce sans plafonnement. Le projet de loi C-46 en fait, referme cette option. Ces coûts ne sont plus recouvrables aux termes du projet de loi C-46.
    Je vous remercie.
    Monsieur Blakely, je crois que vous avez dit que l’ONE a besoin d’être autorisée à adopter des solutions créatives. Vous avez parlé de la nature du pouvoir discrétionnaire et de la capacité de l’Office.
    Pourriez-vous nous donner quelques exemples de la façon dont ça fonctionnerait et nous parler de ce qui, d’après votre expérience, pourrait fonctionner?
    Supposons qu’une entreprise annonce la construction d’un pipeline à travers un terrain difficile. Il faudrait donner à l’ONE le pouvoir d’aller voir et de trouver des gens capables de donner une opinion spécialisée. Qu’elle ait dans ses rangs des gens qui peuvent lui donner des conseils. Qu’elle puisse…
    Quand on produit des mémoires à l’appui d’un nouveau pipeline, il ne s’agit pas d’un beau petit dossier de 12 pages que tout le monde peut analyser. Ce sont des millions de pages de documents. Ce n’est pas juste une question de quantité. Ça doit être absorbé par quelqu’un qui est capable de dire: « Il y a une lacune ici, et là, et encore là. » C’est ce que, à mon avis, l’Office devrait pouvoir faire. On trouve de meilleures solutions en étant mieux à même de comprendre ce qui est effectivement demandé.
    Merci beaucoup, monsieur Blakely et monsieur Regan.

[Français]

     Nous allons maintenant passer aux périodes de questions et de réponses d'une durée de cinq minutes.

[Traduction]

    Nous commencerons par Mme Block, puis M. Trost prendra la parole.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je sais que la semaine dernière, j’ai dit, dans une séance à huis clos, que vous faisiez un excellent travail à la présidence de notre comité, et je veux que ce soit enregistré aujourd’hui. Je pense que vous faites un très bon travail aujourd’hui aussi.
    Je voudrais remercier nos témoins d’être venus nous voir. Leurs observations sont très intéressantes, et j’apprécie les recommandations qu’ils ont faites.
    Mes questions s’adressent à MM. Blakely et Donihee.
    Je vous entends bien quand vous dites qu’un pipeline est une « infrastructure de liaison », monsieur Blakely, et que la non-construction d’un pipeline impose des restrictions aux secteurs d’activité qui en dépendent.
    J’aimerais que vous nous parliez un peu plus ou que vous décriviez les sortes d’emplois qui sont créés dans le cadre de la construction et de l’entretien d’un pipeline, et peut-être nous dire à combien d’emplois on pourrait s’attendre compte tenu de certaines des propositions qui se trouvent devant nous en ce moment.

  (1625)  

    Le pipeline proprement dit est fabriqué par les membres de quatre métiers: les tuyauteurs, qui s’occupent du soudage et des raccords, et qui travaillent dans les stations de pompage et les installations; les opérateurs-ingénieurs, c’est-à-dire les gars qu’on voit sur les pose-tubes, les grues et les pelles rétrocaveuses, qui manipulent de l’équipement lourd; les camionneurs, qui conduisent les gros camions poseurs de sections de tuyau; et les ouvriers, qui s’occupent de poser les berceaux et qui sont vraiment les hommes à tout faire, du gars qu’on surnomme « band-aid » et qui s’occupe des premiers soins jusqu’aux petits boss, etc. Il y a un autre groupe qui s’occupe des rayons X ou ce qu’on appelle aujourd’hui système à commande de phase intégrée… peu importe. C’est devenu beaucoup plus compliqué que dans mon temps.
    Pour fabriquer un pipeline moyen de 300 kilomètres, il faut probablement prévoir deux ou trois étapes sur deux saisons et l’emploi d’environ 6 000 personnes. S’il s’agit d’un oléoduc, on aura des milliers de gens employés dans toutes sortes de métiers, des plombiers, des chaudronniers, des mécaniciens de chantier, des ferronniers, des tôliers, des spécialistes des isolants, des ouvriers, des monteurs d’échafaudages, des charpentiers, et, à l’occasion, le constructeur d’ascenseurs. Je devrais avoir une liste de tous mes collaborateurs, n’est-ce pas? On parle d’une soixantaine de métiers.
    Un pipeline transportant un million de barils, comme l’Énergie Est, a besoin d’une infrastructure qui coûte, disons, 10 milliards de dollars à construire. En gros, ces dix milliards se traduisent en 65 millions d’heures de travail de construction. Reprenons l’hypothèse des 6 000 employés, qui n’est pas une mauvaise estimation, ces 65 millions d’heures produiront des centaines d’emplois à temps plein, dont 40 % seront des métiers, pour le maintien du fonctionnement.
    Tous les deux ans, ou peut-être tous les ans selon l’endroit, environ 3 500 personnes se rendent sur place pendant 42 jours, essentiellement pour le reconstruire, et elles disparaissent ensuite.
    Pour nous, ces emplois ne sont pas négligeables. Ce sont des occasions en or. C’est l’occasion de former la prochaine génération de gens de métiers. Actuellement, au Canada, la main-d’œuvre du secteur de la construction est essentiellement composée de baby-boomers. Personne ne pensait qu’ils allaient un jour prendre leur retraite. Erreur. On va tous quelque part autour du 16 juin 2016. Il est question de remplacer, disons, 350 000 personnes et 40 % de nos cadres moyens et supérieurs d’ici sept ans. On a besoin de travail pour former la prochaine génération.
    Je suis en train de faire la morale, maintenant, mais c’est que ça me tient à cœur. Quand on y pense, les emplois associés au pipeline ne sont qu’un pâle reflet du nombre d’emplois créés en amont et en aval.
    D’accord.
    Je n’ai plus de temps?
    Ça fait déjà cinq minutes.
    Merci beaucoup. Vraiment.

[Français]

     Merci beaucoup.

[Traduction]

    Au tour maintenant de M. Trost pour une période de cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Blakely, nous allons vous occuper encore un peu.
    Je crois que vous avez soulevé un point assez intéressant sur lequel j’aimerais qu’on revienne. Vous avez dit qu’une personne assise à son bureau peut avoir une perspective un peu différente de celle de quelqu’un qui est sur le pont avec de l’eau qui arrive de partout.
    Dans le domaine des pipelines et compte tenu du projet de loi que nous examinons aujourd’hui (là encore, je parle de généralités), pourriez-vous nous donner un exemple concret de ce que vous voulez dire pour quelqu’un qui n’a jamais travaillé sur un pipeline?
    Le pipeline proprement dit, ce que nous faisons pour le construire?
    C'est ça.
     S’il y a quelque chose qui tourne mal à ce stade, ce n’est pas un bien grand mal puisque le pipeline est encore vide. Si vous allez à Calgary, mettons au Centre de contrôle des opérations de TransCanada — ils ont un centre de contrôle parallèle à Okotoks — c’est comme si on était sur le pont du vaisseau spatial Enterprise. Ils peuvent vous dire ce qui se passe au moindre endroit du pipeline à peu près en temps réel. S’il y a un pépin, ils ont un certain nombre de systèmes automatiques qui ferment tout, réacheminent ou font ce qu’il faut ou alors ce sont les gens présents sur place qui interviennent. Après ça, des ouvriers de l’exploitant vont sur place pour s’occuper du confinement du déversement. La personne sur le terrain — dans la marine, ce serait le commandant sur place — a probablement une meilleure idée de ce qui se passe que le gars à son bureau quelque part. C’est ce que je voulais dire.

  (1630)  

    Ce que vous souhaitez, c’est une modification législative qui donnerait plus de pouvoir discrétionnaire à la personne sur le terrain. C’est bien ça?
    Il faut que quelqu’un décide si l’exploitant réagit correctement. Je dirais que 95 % des exploitants de M. Donihee sont des gens sur qui on peut compter et qui tiennent leurs engagements. Il y a aussi des gens qui ont parfois des problèmes. Il faut que quelqu’un ait le pouvoir discrétionnaire de dire: « Hé, il y a un risque ici. Et voilà les conséquences. Ces gens n’ont pas des antécédents très solides. Peut-être que je vais prendre les rênes. »
    Avez-vous une recommandation précise à formuler sur la manière dont ça pourrait être inséré dans le projet de loi?
    Il faudrait que j’y réfléchisse. Je peux écrire quelque chose. Je ne suis pas très bon rédacteur — c’est pour ça que je fais ce que je fais, probablement, mais je vais essayer de rédiger quelque chose, et je vous l’enverrai.
    Très bien.
    Je m’adresse à vous, maintenant, monsieur Donihee.
    L’une des questions que nous avons posées après votre témoignage antérieur portait sur les répercussions économiques de ce projet de loi sur le secteur d’activité. À juste titre, on nous a dit que ça varierait selon l’entreprise parce que la situation de l’une est très différente de l’autre. Je me rends compte que c’est probablement à cause du contexte, mais pourriez-vous nous donner une réponse plus précise que les autres témoins — je crois qu’il s’agissait de représentants de Ressources naturelles Canada — concernant l’avenir du secteur. Je comprends bien que la perspective varie selon l’entreprise, mais pourriez-vous nous donner une idée de l’ampleur des répercussions économiques de ce projet de loi sur les entreprises membres de votre Association?
    J’aimerais également donner suite à la question du système de commandement et de contrôle si on a le temps à la fin de cet échange.
    Je dois dire que, pour l’instant, nous attendons d’autres consultations préalables à l’adoption du projet de loi, mais que diverses entreprises s’interrogent sur les mécanismes financiers qui permettront de garantir une réserve d’un milliard de dollars ou du montant qui sera prévu considéré comme immédiatement nécessaire. En fin de compte, nous avons besoin de précisions pour le savoir.
    Ce que je peux dire, c’est que tous les membres de l’Association canadienne de pipelines d’énergie sont d’une telle envergure et ont des antécédents financiers qui remontent si loin — avec de solides bilans et des actifs comme les pipelines proprement dit, qui valent des milliards de dollars — qu’ils en seront capables. Mais pour ce qui est des conséquences financières précises, on n’a pas encore assez d’information pour déterminer le genre de mécanismes qu’il faudra mettre en place pour garantir à l’Office national de l’énergie qu’il y aura des réserves suffisantes.
    Si je peux me permettre de faire une brève remarque au sujet du système de commandement et de contrôle dont parlait M. Blakely, je dirai comme lui que je rends hommage à mes antécédents. J’ai servi 28 ans dans l’armée de l’air. Je pense qu’il est extrêmement important de comprendre que le coût de préparation est très élevé. Notre entreprise a déjà l’obligation d’être préparée, et on peut le constater à voir les quelque 300 exercices d’intervention d’urgence effectués l’année dernière, et personne ne connaît leurs systèmes comme eux. Je crois, en fin de compte, que vous voulez être sûrs que les entreprises ont ce qu’il faut pour exercer commandement et contrôle sur ce dont elles sont responsables. Ce qu’on veut dire, je crois, c’est qu’on ne voudrait pas que l’ONE intervienne trop vite. Mais, si une entreprise est jugée irresponsable, elle doit intervenir immédiatement.
    Merci, monsieur Donihee. Je dois vous arrêter ici.
    Merci, monsieur Trost.
    Madame Leslie, vous avez cinq minutes. Ce sera ensuite au tour de Mme Crockatt.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Miron, j’ai quelques questions pour vous. Je reviens sur votre idée que le « pollueur pourrait payer »: ça me parle. Vous avez dit que, quand on dépasse le milliard de dollars, les coûts de nettoyage et d’indemnisation incombent aux Canadiens.
    Pour moi, tout ça fait partie du contexte d’une ou deux choses différentes.
    Le premier contexte, pour moi, c’est le rapport publié en 2011 par le commissaire à l’environnement. Le commissaire s’est intéressé au transport de matières dangereuses par pipeline et a conclu qu’il y avait peu de preuves que l’Office national de l’énergie veille à ce que les entreprises s’occupent effectivement de corriger les lacunes de leurs pratiques et que, pire encore, l’ONE ne vérifie pas si les entreprises ont effectivement des manuels de procédures d’urgence. Ça me fait donc penser à Enbridge et à Kalamazoo et au fait que les organismes de réglementation américains ont associé la réaction au déversement de Kalamazoo aux Keystone Kops.
    Je pense que les deux se recoupent. Si on n’a pas vraiment de manuel de procédures d’urgence, qu’est-ce qui se passe et qu’est-ce qu’on va faire? Plus les mesures d’urgence tardent à venir, plus les dommages environnementaux sont importants et plus les coûts de nettoyage, et éventuellement d’indemnisation, augmentent.
    Ma question concerne le projet de loi C-46 et le fait de tirer parti de l’expérience des cas de déversement connus. Combien ont-ils coûté en frais de nettoyage? Quelles sortes de dommages ont-ils causées? Dans quelles proportions les entreprises et les contribuables, par le biais du gouvernement, ont-ils assumé ces coûts? Combien de demandes d’indemnité sont restées sans solution? Pouvez-vous nous aider à inscrire le projet de loi C-46 dans le contexte de ce que nous savons des déversements?

  (1635)  

    Comme je l’ai dit plus tôt, on sait que Kalamazoo coûte déjà plus d’un milliard de dollars et que ce n’est pas fini. Selon une étude récemment effectuée par l’Université Simon Fraser, le coût éventuel d’un scénario catastrophe pour l’expansion du pipeline Trans Mountain de Kinder Morgan est de plus de 5 milliards de dollars, et, en cas de déversement plus ordinaire, d’au moins un milliard de dollars.
    On parle des coûts de nettoyage?
    Il faudrait que je vérifie, mais je crois que ce sont les coûts de nettoyage, pas les indemnités. Mais je peux me tromper. Il faudrait que je vérifie.
    Avez-vous de l’information sur les coûts des déversements connus et savez-vous combien les entreprises ont payé comparativement aux contribuables ou aux gouvernements?
    Je n’ai pas ces chiffres à l’esprit, excusez-moi.
    D’accord, pas de problème.
    Je pense aux entreprises qui ne sont pas en mesure de remplir leurs obligations en termes d’indemnisation, aux entreprises qui n’ont pas accès à ce genre d’actif. Pouvez-vous nous éclairer un peu à ce sujet?
    Je crois que c’est en quelque sorte un pur hasard que ce soit une grande entreprise qui soit à l’origine du déversement de Kalamazoo, parce qu’elle dispose effectivement de ressources financières suffisantes. Même chose pour le déversement en mer, dans le golfe du Mexique, on a vu que BP avait des ressources suffisantes, quoique, aujourd’hui, on se demande si ses filiales américaines ont ce qu’il faut. Je pense qu’il y aurait lieu de s’inquiéter en cas de déversement important.
    Pour en revenir à l’idée que le pollueur pourrait payer, dont vous avez parlé, comment… je cherche vos mots, on ne sait pas comment procéder pour obtenir une indemnisation. M. Blakely fait remarquer dans son analyse du projet de loi qu’on a probablement éliminé le « droit découlant de la common law d’intenter des poursuites ».
    C’est ce qui m’amène à votre observation que la réglementation n’est pas très claire quant aux étapes suivantes. Pourriez-vous nous en dire un peu plus?
     Oui, je suis d’accord avec M. Blakely: non seulement on préserve, mais on codifie le droit découlant de la common law d’intenter des poursuites pour faute ou négligence. Ce que ça veut dire, c’est qu’on pourrait attendre 20 ans avant de recevoir un paiement, comme on l’a vu dans l’affaire Exxon Valdez, où l’entreprise a réussi à contester la faute, à contester la négligence à coups d’avocats et à faire traîner l’affaire devant les tribunaux.
    Savez-vous ce qui s’est passé dans cette histoire en fin de compte? Certaines des victimes sont mortes avant d’avoir touché un sou. Elles ne sont pas mortes des effets du déversement. Elles sont mortes de vieillesse.
    Je ne crois pas qu’il soit indiqué de s’en remettre à la common law, parce que ces exemples montrent que ça n’aide pas les gens à obtenir leurs indemnités.

  (1640)  

[Français]

     Merci beaucoup, monsieur Miron.
    Les cinq minutes dont vous disposiez, madame Leslie, sont écoulées.

[Traduction]

    Madame Crockatt, vous avez cinq minutes.
    Merci beaucoup aux témoins. On soulève des choses très intéressantes.
    Je sais que Mme Leslie a posé cette question à un autre participant qui n’a pas pu y répondre.
    Je me demandais, monsieur Donihee, si vous pouvez nous parler des coûts associés aux déversements au Canada et nous donner une idée de l’importance moyenne et des coûts moyens d’un déversement.
    Je suis désolé, je n’ai pas de chiffres exacts en tête, moi non plus. Je me ferais un plaisir de vous faire parvenir des chiffres représentatifs.
    Ce que je peux dire, c’est que, si on prend l’exemple du déversement de Kinder Morgan en 2011, je crois, qui était le résultat d’une grève chez une tierce partie, l’entreprise a rempli toutes ses obligations sans hésiter et elle a réparé tous les dommages causés, aussi bien sur les propriétés personnelles, comme des maisons, que les dégâts mineurs causés en bord de mer.
    Vous nous avez déjà parlé des risques tout à l’heure, et je pense que cette réglementation en tient compte, mais vous vouliez être sûr que nous comprenions le rapport entre risques et conséquences.
    Un témoin de l’ONE que nous avons entendu plus tôt nous a dit qu’il y a 6,7 déversements de pipeline par année au Canada. Est-ce que ça correspond à vos renseignements?
    Les chiffres dont on parle diraient régulièrement, comme je l’ai dit dans mes observations, que, entre 2002 et 2013, il y a eu en moyenne 3,75 incidents par an. Quand on parle de pipelines, comme les oléoducs, et c’est vraiment de ça qu’il est question dans le projet de loi, le chiffre est un peu moins de 2 par an durant la période de 2002 à 2013.
    Donc, où se situe le risque de déversement?
    Il faut comprendre que la plupart de ces déversements étaient très petits. Pour atteindre le seuil de ce qu’on appelle un incident important, il faut un déversement de plus de 50 barils de pétrole, et il n’y a eu que deux cas de déversement important durant toute cette période. L’un de ceux qui se sont produits entre 2002 et 2013 a représenté plus de 50 % du volume total. Il faut donc évidemment être prêt pour ce genre de situation, et c’est ce que fait le projet de loi, je crois. Mais il faut aussi reconnaître qu’on ne veut pas, comme je le disais tout à l’heure, délaisser des actifs au titre des coûts associés à la grande majorité de ces déversements qui, bien que supérieurs à 50 barils, ne sont pas énormes par rapport au volume total des déversements.
    Pensez-vous que les Canadiens comprennent ce que veut dire ce pourcentage de 99,9995 % et qu’ils ont un sentiment différent du risque couru? Je pense qu’on tourne autour de cette question, et ce projet de loi vise essentiellement à réduire le risque au minimum si jamais il devait se produire un déversement, mais je voudrais seulement que vous nous expliquiez en quoi c’est peu probable, si tel est votre avis.
    Je crois vraiment qu’il est très peu probable qu’un déversement se produise. Je suis d’accord avec vous, ce chiffre est incompréhensible pour les Canadiens, et ce qui compte vraiment à leurs yeux, c’est l’idée que, quel que soit le nombre de déversements, s’il y en a un sur leur propriété, c’est un de trop. Nous sommes d’accord, et c’est pourquoi nous faisons tout pour nous assurer qu’il n’y aura pas de déversement et pour que, s’il devait y en avoir un, nous soyons en mesure de réagir immédiatement et très efficacement.
    Nous collaborons beaucoup plus avec les collectivités aujourd’hui. Nous allons sur le terrain et nous prenons des mesures pour améliorer la confiance des Canadiens. Ça veut dire que nous devons être fiables. Nous devons être crédibles. Nous devons comprendre clairement leurs intérêts et leurs préoccupations et nous devons en tenir compte de façon très rapide et authentique. Nous devons les écouter et les convaincre qu’un déversement est très peu probable.

  (1645)  

     Nous avons la responsabilité, en tant que gouvernement, de protéger l’espace public et de protéger les emplois publics. Je crois que M. Blakely en a bien donné la mesure aujourd’hui. À cet égard, comment jugez-vous le projet de loi C-46?
    Monsieur Donihee, en 10 à 15 secondes.
    Nous sommes en faveur du projet de loi. Le secteur des pipelines dans son ensemble représente environ 25 000 emplois au Canada, et 100 milliards de dollars de recettes par an pour notre gouvernement. C’est absolument indispensable à beaucoup de programmes sociaux, quand on pense que le secteur a versé 1,1 milliard de dollars de taxes foncières et d’impôt sur les sociétés l’année dernière et que ça a notamment servi à financer toutes sortes de programmes sociaux et à favoriser le bien-être de collectivités… Ces chiffres ne sauraient pourtant justifier qu’on accepte un déversement. Nous prenons des mesures vigoureuses pour veiller à ce que ça ne se produise pas.
    Merci beaucoup.

[Français]

     Merci beaucoup.
    Je vais poser les prochaines questions pour une période de cinq minutes.
    Monsieur Donihee, j'ai une brève question sur les définitions. Lorsqu'on parle de rejet — ou en anglais derelease —, quelle est la définition précise de ce terme? Est-ce que la définition est légale?
    Par ailleurs, lorsqu'on parle de 99,9994 % du pétrole qui se rend à destination dans l'état actuel des choses, s'agit-il du pétrole, du gaz naturel et de toute l'énergie qui est transportée par les pipelines?

[Traduction]

     Je vais commencer, si vous permettez, monsieur, par la question de « l’échappement ». Quand on parle de ça, je ne suis pas sûr que cette notion soit définie dans la réglementation. Quand on parle d’échappement, on parle, par définition, de l’échappement involontaire d’un produit. Autrement dit, notre mission dans la vie consiste à garder le liquide noir dans le tube, et c’est ce à quoi nous travaillons délibérément.
    Au sujet du chiffre que j’ai mentionné dans mes observations, monsieur le président, c’était 99,9995, et c’est la moyenne combinée du gaz et du pétrole. Ça diffère d’environ 0,0001. Le facteur de fiabilité du pétrole est très légèrement supérieur à celui du gaz, mais les deux sont presque impossibles à mesurer en termes de seuil critique.

[Français]

    Merci beaucoup.
     Comme il me reste environ trois minutes, j'aimerais poser des questions à M. Olszynski, à M. Miron et, si j'en ai la chance, à M. Blakely et M. Donihee.
    Il semble que ce projet de loi constitue une amélioration générale par rapport à la situation actuelle, mais que plusieurs dispositions manquent grandement de clarté. J'aimerais savoir si vous croyez que le projet de loi constitue un pas en arrière dans un sens ou à dans un autre?

[Traduction]

Voyez-vous des inconvénients à quelque aspect que ce soit de ce projet de loi? Si vous deviez y apporter une ou deux modifications majeures pour le clarifier, quelles seraient-elles?
Monsieur Olszynski d’abord.

[Français]

    D'accord. Je vous remercie.
     Je vais répondre en anglais puisque, de cette façon, ce sera plus rapide.

[Traduction]

    J’en resterais à mes deux modifications. Je pense que, en un sens, elles simplifieraient le projet de loi. Je crois qu’elles concrétisent essentiellement le même objectif.
    La première sert simplement à clarifier le vocabulaire relatif aux dommages environnementaux.
    La deuxième recommandation, qui exigerait ou du moins permettrait de prendre un règlement prescrivant la procédure d’évaluation des dommages environnementaux, est très importante à mon avis. En fait, la réglementation actuelle, si elle fait quelque chose, ce projet de loi interdit au gouverneur en conseil de prendre ce genre de règlement à l’égard du tribunal d’indemnisation. Je n’en vois pas bien la raison: pourquoi le tribunal d’indemnisation serait-il empêché d’accorder des indemnités pour ces dommages? Je pense que cette partie devrait être supprimée. Je parle du nouveau paragraphe 48.48(2). Et, là encore, c’est un règlement qui devrait établir une procédure profitant au secteur privé, au gouvernement à toutes les parties, dans l’esprit du modèle américain.

[Français]

    Monsieur Miron, qu'en pensez-vous?

[Traduction]

    Je crois aussi qu’il faut clarifier les choses au sujet des dommages environnementaux ou de la perte de valeur de non-usage d’une ressource publique. Comme je l’ai dit dans mon exposé, je pense que certains des nouveaux instruments dont l’ONE peut se servir pour garantir le recouvrement des coûts en cas de déversement devraient être obligatoires. Je ne pense pas que ce devrait être un objet de pouvoir discrétionnaire étant donné que le projet de loi vise ostensiblement à mettre en œuvre le principe du pollueur-payeur.

  (1650)  

[Français]

    Merci beaucoup.
    Je vais brièvement m'adresser à M. Blakely, mais je vais poser une question différente.

[Traduction]

    Je vais emprunter la voie de la facilité: je vais y réfléchir un moment. Il y a deux ou trois choses, oui, qui pourraient être clarifiées, mais vous demandez les deux principales. J’aimerais y penser et vous donner une réponse raisonnée.
    Merci beaucoup. Vous pouvez faire une présentation au comité.
    Je voudrais vous poser une autre…
    Nous avons une présentation. Le traducteur est arrivé un peu plus tard que d’habitude.

[Français]

     Nous allons alors la recevoir.
    J'ai une brève question qui s'adresse à vous, car il ne me reste que 30 secondes.
    Les projets actuellement sur la table, que ce soit Énergie Est, Trans Mountain ou évidemment Keystone, sont parmi les plus gros projets de pipeline ayant jamais été entrepris. C'est une game différente par rapport à ce qui se faisait auparavant.
    De quelle manière les normes de sécurité devraient-elles être abordées pour faire face à des projets aussi gigantesques par rapport à ce qui existait auparavant?

[Traduction]

    Vous savez…
    Je ne suis pas sûr de comprendre ce que vous voulez dire, monsieur, quand vous parlez de normes de sécurité.
    Comment devrait-on aborder la sécurité dans le cas de projets beaucoup plus grands que ce que nous avons connus jusqu'ici au Canada? Comparé à ce qui existe, on peut parler de mégaprojets.
    Peut-être que M. Blakely pourrait répondre brièvement.
    Vous savez, beaucoup de projets ont été réalisés ces derniers temps au Canada, la plupart des gens n'y prêtent pas attention, mais ces projets se chiffrent en milliards de dollars.
    Quant à savoir si les projets sont tellement gros qu'il nous faut des procédures différentes, je ne le crois pas. Je crois que nous avons au Canada les exploitants et les entrepreneurs parmi les plus avertis du monde...
    Je dois vous interrompre, mais merci beaucoup.
    ... et les meilleurs gens de métier.

[Français]

    Nous poursuivons la période de questions avec Mme Perkins.

[Traduction]

    Vous disposez de cinq minutes.
    Merci.
    Avec tout cela, après avoir parlé de réalités multiples, de celles du terrain aux aspects juridiques, nous avons découvert Kalamazoo et les enseignements qui en ont été tirés. C'est probablement l'un des pires déversements de pétrole de l'histoire aux États-Unis, d'après ce que nous savons.
    Nous avons eu beaucoup de chance, car l'industrie pipelinière a fait son devoir et fait en sorte que nos pipelines soient sûrs. Quelles précautions environnementales ont été proposées à la suite des enseignements de Kalamazoo? Jusqu'à quel point l'efficacité des mesures de sécurité pour les pipelines Canadiens a-t-elle été améliorée grâce à ces enseignements?
    Je voudrais d'abord entendre M. Blakely, puis M. Donihee. Merci.
    Je dirais que la manière dont les pipelines sont surveillés et la technologie employée ont beaucoup changé à la suite des événements de Kalamazoo.
    Bien.
    Monsieur Donihee.
    Je dirais que ce terrible incident a marqué un tournant. Cela arrive dans beaucoup de secteurs, que ce soit l'accident de la navette spatiale Challenger ou le terrible accident des deux 747 qui sont entrés en collision à Tenerife. Cet incident, comme la tragédie de Lac-Mégantic, a été un tournant pour le secteur des pipelines.
    Depuis, nous avons adopté une pratique de gestion des salles de contrôle qui sera autoévaluée par tous nos membres cette année. Ils vont s'interpeller les uns les autres pour s'améliorer par le truchement du programme L'intégrité d'abord, qui est un programme extraordinaire.
    Nous avons aussi commandé auprès de la Société royale du Canada, une des institutions scientifiques les plus réputées au monde, une étude sur les propriétés du pétrole au contact de l'eau pour que nous puissions rapidement évaluer son comportement et voir si les techniques de récupération dont nous disposons sont de premier ordre, si elles sont les meilleures au monde, et pour que nous puissions mener à bien la récupération dans le cas improbable où un déversement se produirait un jour.
    Merci.
    Voici une question de suivi que j'ai posée dans la plupart des débats sur ce sujet. Elle concerne les aspects environnementaux des franchissements de cours d'eau par les pipelines. Est-ce que la pose d'un plus grand nombre de vannes d'arrêt à proximité de lieux particulièrement sensibles sur le plan environnemental, ou de rivières, a été envisagée pour la construction de nouveaux pipelines ou pour la réhabilitation de pipelines existants?

  (1655)  

    Oui, mais cela fait plusieurs années que c'est en cours de toute façon.
    D'accord.
    Il s'agirait de vannes d'arrêt activées à distance.
    Elles sont contrôlées à distance; il n'y a pas besoin de se rendre sur place.
    Bien, donc cela pourrait être immédiat et permettre de limiter les dégâts environnementaux.
    Je crois que c'est un point très important pour la plupart des collectivités. Les gens ne veulent pas que quelque chose arrive à leurs rivières et que cela touche leurs pêches et tout ce qui s'en suit.
    Je vous remercie beaucoup d'avoir dit cela parce que vous êtes les premiers à avoir pu répondre à cette question. Tout le monde jusqu'ici était dans la conjecture, mais aujourd'hui nous avons une affirmation; je vous en remercie.
    Il y a aussi le fait que la Marine et l'Aviation royale sont visées et, tout à l'heure, j'ai entendu quelqu'un parler du Enterprise, mais je ne sais pas où cela nous mène aujourd'hui... Beaucoup, semble-t-il, évoluent dans des milieux fortement réglementés, et il qui travaillent avec ce secteur, ce que je trouve formidable.
    Merci beaucoup.
    Il vous reste 30 secondes.
    Non, c'était ma montre. Elle a sonné.
    Je me chronomètre.
    Merci beaucoup, madame Perkins.
    Nous allons passer aux cinq minutes suivantes avec Mme Duncan.
    Mes questions s'adresse à M. Donihee.
    Vous jugez raisonnable, je suppose, que la sûreté des pipelines ne soit qu'un des facteurs de confiance du public envers les pipelines existants ou nouveaux. Il est bon que nous proposions une loi qui, espérons-le, garantira une augmentation et une amélioration des inspections et de la sûreté, mais aussi des réponses et des indemnisations plus rapides.
    Cependant, je suis certaine que vous et votre association, de même que vos entreprises membres, avez pris note du rapport du groupe de travail qui vient de sortir et qui recommande de donner davantage la parole aux Premières Nations pour tous les projets liés aux ressources, y compris les pipelines, et de leur accorder une plus grande part des bénéfices. Cela fait écho au rapport Eyford qui a identifié l'échec du gouvernement à résoudre la question des revendications territoriales des Premières Nations comme étant l'un des obstacles clés à l'approbation des futurs pipelines.
    J'aimerais entendre votre avis là-dessus, et savoir comment se situe selon vous la législation sur la sûreté des pipelines par rapport aux autres enjeux majeurs auxquels sont confrontées vos entreprises.
    Si vous permettez d'utiliser le mot « confiance » dans le sens de « sentiment de sécurité », je dirais que nous abordons vigoureusement ce concept, avec tout ce qu'il recouvre en termes de concepts, de crédibilité, de fiabilité et d'intimité, et de prépondérance des relations sur les intérêts de l'entreprise... Pour ce qui est des relations, il est vital que nos entreprises aient de très bonnes relations avec tous ceux avec qui elles ont à faire, avec tous les Canadiens, y compris bien sûr les Premières Nations.
    Nous avons, par exemple, mis en place une norme ou un protocole éthique pour les administrateurs fonciers, afin que leurs opérations soient communes et fondées sur des valeurs et que les points de service honorent ces engagements.
    Il est clair que les Premières Nations ont un droit absolu à bénéficier, comme tous les Canadiens, du travail entrepris par les pipelinières. De leur côté, chacune de nos entreprises développe des relations très fortes avec les Premières Nations et examine les manières dont celles-ci pourraient bénéficier beaucoup plus directement du travail des pipelinières.
    Nous avons eu le privilège de rencontrer le nouveau chef national de l'Assemblée des Premières Nations. La relation a commencé sur des bases très positives et nous nous réjouissons à l'idée de poursuivre ce dialogue à l'avenir.
    Merci beaucoup.
    J'ai déjà abordé avec le comité et le gouvernement les questions liées à l'incident dont je vais vous parler.
    Il y a plusieurs années, il s'est produit une importante rupture sur un pipeline d'Enbridge à Wrigley, dans les Territoires du Nord-Ouest. Cet incident a été découvert par un trappeur. En fait, il avait été alerté par un ours très agité.
    Il est clair que, dans cette affaire, ni l'entreprise ni l'ONE n'avaient repéré la fuite, tant et si bien que le pétrole a continué de se déverser. La Première nation a été très choquée parce que personne ne l'a contactée pour qu'elle participe de façon constructive au processus.
    Je voudrais savoir quels enseignements vous avez tiré de ce déversement et de la réponse apportée, si vous allez mettre en place de meilleurs processus de repérage des déversements et de meilleurs mécanismes d'intervention, et si vous travaillerez avec les communautés touchées.

  (1700)  

    Je crois que vous pouvez constater, au vu des enseignements de ce cas en particulier — je n'en connais pas tous les détails — et de ce que vous pouvez vérifier de nos jours, comme vous auriez pu le voir récemment au Manitoba avec ce problème d'essence et la façon dont cela a évolué, que l'entreprise arrive très vite sur le terrain. Les personnes qui doivent être informées sont très clairement identifiées dans les plans d'intervention d'urgence.
    Pour ce qui est de votre dernière question, nous nous attendons à ce que les Premières Nations, qui ont un amour profond et éternel de la terre, participent de façon volontaire à la surveillance de l'environnement autour des pipelines, de sorte que les signalements devraient être plus rapides. Et puis, leurs interventions immédiates devraient être plus évidentes que par le passé.
    Quant aux leçons apprises, il faut contacter les médias, dire aux gens ce qui se passe, prouver que nous sommes capables d'apporter une réponse très efficace et, comme je l'ai dit tout à l'heure, il faut comprendre les éléments essentielles au maintien d'une relation de confiance durable et se montrer ouverts et transparents relativement à l'efficacité de notre réponse.

[Français]

     Je regrette, madame Duncan, mais votre période de cinq minutes est écoulée.
    Je cède maintenant la parole à Mme  Block, pour cinq minutes également.

[Traduction]

    Merci beaucoup monsieur le président.
    Je vais reprendre là où je me suis arrêtée après ma dernière question.
    Mais je voudrais d'abord répéter que j'ai apprécié une remarque qu'a faite M. Blakely quand il a dit: « La vérité, c'est que nous habitons ici ».
    Que nous soyons législateurs, régulateurs ou actionnaires d'une entreprise, de ceux qui construisent les pipelines ou qui travaillent pour ces entreprises, nous habitons tous ici et nous désirons tous nous assurer que les projets ne soient approuvés que s'ils sont sûrs pour les Canadiens et sûrs pour l'environnement.
    Avant cette loi, notre gouvernement avait imposé de nouvelles amendes pour les entreprises enfreignant nos lois environnementales. Ces amendes se voulaient autant d'outils que l'ONE pourrait utiliser pour s'assurer que les entreprises soient pénalisées en cas de non-respect des réglementations ou des ordres de l'ONE.
    Les mesures prévues dans cette loi s'appuient sur ces dispositions existantes en les améliorant et en les clarifiant. Par exemple, les entreprises qui exploitent de gros oléoducs de brut seront pleinement responsables jusqu'à un milliard de dollars. Je voudrais souligner que, si une entreprise devait être déclarée négligente ou fautive, sa responsabilité serait également illimitée. Cela devrait éliminer toute incertitude résiduelle quant à savoir qui est responsable des coûts de nettoyage et des préjudices si un incident se produit.
    Monsieur Donihee, quelle est votre expérience de l'industrie, des membres de votre organisation? Avez-vous constaté que les entreprises sont prêtes à nettoyer et à restaurer l'environnement après un déversement, qu'elles sont prêtes à en assumer les coûts?
    Dans une incarnation antérieure, quand j'étais directeur de l'exploitation à l'Office national de l'énergie, et encore aujourd'hui, à l'Association canadienne de pipelines d'énergie, je me dis que les entreprises sont volontaristes. Je suis entièrement d'accord avec ce que vous dites, les entreprises membres, que j'ai l'honneur de représenter, partagent le désir de garantir que nous exploitons le système de pipelines le plus sûr possible au bénéfice de notre pays.
    Elles ont effectivement assumé. À l'expérience, tant à l'ONE qu'aujourd'hui à l'association — et je crois que le soutien que nous apportons à cette réglementation le prouve aussi — je peux dire que nous acceptons nos responsabilités, et que nous faisons tout ce qui est en notre pouvoir pour garantir que le gouvernement n'aura jamais à s'en servir.
    Merci.

[Français]

    Madame Block, il vous reste deux minutes.

[Traduction]

    Je vais poursuivre là-dessus.
    Il a été souligné que nous avons un bilan de sécurité positif à 99,999 %. Cette loi a été déposée pour s'appuyer sur ce résultat et l'améliorer.
    Rapidement, pensez-vous que cette loi va renforcer notre bilan de sécurité?

  (1705)  

    Oui, je pense que cette loi va s'inscrire en complément de ce bilan de sécurité et du travail entrepris par les PDG membres de l'association qui tiennent à parvenir à une exploitation sans zéro accident, parce que c'est la chose à faire, autour du programme L'intégrité d'abord, qui ressemble beaucoup à l'initiative du programme de gestion responsable et parce que ces PDG souhaitent sincèrement faire davantage que simplement se conformer aux règlements.
    Merci.

[Français]

     Merci, madame Block.
    Nous allons maintenant entamer le troisième tour de table.
    Monsieur Trost, vous disposez de cinq minutes.

[Traduction]

    Merci, monsieur le président.
    De tout ce qui a retenu mon attention dans des témoignages précédents, il y a eu le débat sur le droit de poursuivre en common law. Il y a quelques avocats de ce côté salle et très peu au comité, alors je voudrais qu'on me dise quelle est la norme dans ce type de situation au Canada.
     Nous avons eu un bon exemple avec l'Exxon Valdez qui nous a montré que les choses peuvent prendre 20 ans. Donner un exemple américain à un groupe de Canadiens profanes ne veut pas dire grand-chose, car nous savons que les Américains ont un système qui est parfois un peu étrange, même si nous avons la common law en commun.
    Imaginons que quelque chose se produise après l'adoption de cette loi et que l'incident soit passible d'une action en justice. Quel type d'activité pourrait-on poursuivre en vertu de cette nouvelle loi? Je sais que ce ne sont que des suppositions, mais cela permettrait de donner aux profanes qui composent ce comité une idée de la durée et de la nature du processus dans lequel nous nous engagerions le cas échéant.
    On nous demande de voter une loi assortie de procédures juridiques. Je suis géophysicien et nous disposons de diverses autres compétences autour de cette table; donc pour être tout à fait franc je ne saisis pas complètement toutes les implications.
    Beaucoup semblent se dire: « Nous pouvons enseigner quelque chose à ce monsieur. » — alors, qui veut commencer à parfaire mon éducation juridique?
    Sans aller jusque-là, je ferais de mon mieux pour répondre à votre question.
    Pour le moment il n'y a pas beaucoup de contentieux dans ce cadre. Il s'est produit un déversement en Alberta récemment, le déversement de la société Plains Midstream, il y a eu, dans ce cadre, une application réglementaire, mais il n'y a pas eu de poursuites en vertu de la common law pour dommages environnementaux.
    Comme je l'ai dit dans mes remarques, bien que la Cour suprême du Canada ait ouvert la porte pour que le gouvernement puisse engager des poursuites afin d'obtenir réparation pour des préjudices environnementaux dans des cas comme le Mont Polley, Plains Midstream ou Lac-Mégantic; les gouvernements successifs ne l'ont jamais fait au Canada.
    Dans les cas de préjudices privés, ce qui est le plus fréquent, les particuliers ont la possibilité — avec ou sans cette loi — d'engager des poursuites pour préjudices subis. La loi ne change rien.
    Je suis d'accord avec M. Miron pour dire qu'il s'agit essentiellement d'une codification du régime de common law et nous n'avons pas vu de cas dans lesquels des organismes gouvernementaux fédéraux ou provinciaux engagent des poursuites judiciaires pour des dommages environnementaux. Ces dommages environnementaux deviennent donc, avant tout, des externalités. C'est principalement nous, nos collectivités et nos générations futures qui assumons le coût.
    Mais assiste-t-on à des poursuites judiciaires privées? Ce sont des événements assez rares. Nous regardions les chiffres. Je ne sais plus combien il y a chaque année de...
    Vous devez avoir un intérêt pour lancer des poursuites, un intérêt direct. Je ne peux pas lancer de poursuites parce que quelqu'un a nui à quelqu'un d'autre ou à l'environnement, car ce ne sont pas mes intérêts. Si on inonde ma ferme, alors là c'est mon intérêt.
    Donc, dans les cas antérieurs, cela revient-il à dire que très peu de personnes avaient des intérêts directs alors? Est-ce parce que le Canada est un grand pays — voyons les choses en face — et que ces pipelines traversent peut-être essentiellement des terres publiques, etc.?
    Ce sont des zones reculées, mais je peux vous donner un exemple qui vient encore une fois de ma province d'origine. Actuellement, en Alberta, il y a une action en justice qui a été entreprise contre Encana, pour contamination des eaux souterraines lors d'opérations de fracturation hydraulique.
    Actuellement, on prévoit que cette instance durera 10 ans. Pour vous donner une idée de ce qui se passe et de ce pourquoi je suis très en faveur, par exemple, de règlements établissant un processus pour évaluer ce genre de préjudice, il a surtout été question de requêtes préliminaires, déposées à la fois par le gouvernement et par les deux parties gouvernementales qui ont aussi été poursuivies dans cette affaire et qui sont accusées de négligence.
    Le principe de base, dans ce contexte, c'est qu'il existe une grande incertitude scientifique concernant la quantification de ces événements, qu'il y a un terreau très favorable précisément pour le genre de litige interminable que nous avons vu dans le cas de l'Exxon Valdez.

  (1710)  

    L'exemple de la fracturation hydraulique est injuste, parce que certaines personnes disent que la fracturation hydraulique a telles et telles conséquences, tandis que d'autres disent le contraire. Les avis divergent assez fortement là-dessus. Si un pipeline se rompt et que votre parcelle est inondée de pétrole, ce n'est pas compliqué...
    Dans un tel cas, cela serait beaucoup plus rapide que si j'étais dans une situation...
    Oui, eh bien...
    Pour être clair, je ne commentais pas les mérites de ce litige. J'y faisais référence pour vous donner un exemple de ce genre événement
    Du point de vue de la quantification des préjudices environnementaux, c'est peut-être un peu plus simple. Cela ne me réjouit pas de le dire, mais je crois qu'en règle générale la quantification de ces préjudices et leur évaluation sont très difficiles.
    Merci beaucoup, monsieur Olszynski.
    Merci beaucoup, monsieur Trost.
    Monsieur Choquette, vous avez cinq minutes.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
     Je remercie le témoin de sa présence et de son témoignage.
     J'ai manqué la première heure de séance, alors veuillez m'excuser si je répète certaines choses.
    Je proviens du Québec où les gens sont très préoccupés par les projets de pipelines. Présentement, il y a un projet de pipeline de TransCanada et l'inversion de la Ligne 9. Au Québec, les gens sont directement visés par ces projets.
    On entend souvent dire qu'il semble les gens ont de la difficulté à s'exprimer. Les gens touchés par le projet disent qu'il est difficile de s'exprimer.
    Le projet de loi contient bien sûr des éléments intéressants. Toutefois, il semble qu'il manque quelques points. Par exemple, on parle du droit de consulter au plan environnemental. Il y a des droits environnementaux liés à la consultation, comme ceux par rapport aux Premières Nations. Je pense que c'est aussi le cas par rapport à la population en général.
    Le projet de loi répond-il aux besoins liés à la consultation? La Loi canadienne sur l'évaluation environnementale a été amendée, ce qui fait en sorte que les consultations au sujet des évaluations environnementales sont plus difficiles.
     Messieurs Olszynski et Miron, pouvez-vous nous en dire davantage quant au respect de ce droit touchant les consultations? Quelles sont les difficultés à cet égard?

[Traduction]

    À mon sens le projet de loi C-46 en lui-même ne prévoit pas tellement de consultations. Je suis conscient qu'il y a des efforts supplémentaires, en dehors de la loi, qui ont été proposés par le gouvernement en ce qui concerne la consultation des Premières Nations. Ce projet de loi n'est pas un projet de loi sur l'évaluation environnementale. C'est un projet de loi sur la responsabilité. De mon point de vue, c'est tout l'enjeu de ce projet de loi. C'est le principe du pollueur-payeur. Je n'y vois pas tellement de place pour la consultation.
     Je suis d'accord avec ces remarques. Je crois que, dans certains cas, lorsqu'il est possible de prendre des règlements, par exemple... La consultation est inhérente à la réglementation et lorsque des règlements sont publiés dans La Gazette du Canada il y a des phases durant lesquelles le public fait des commentaires, et ce genre de choses. Dans cette mesure, une partie de la réglementation demandée ici impliquera une consultation publique ultérieure, et c'est une bonne chose.
    Je crois que, plus ces consultations seront promulguées et préparées, et mieux ce sera.

[Français]

    Monsieur Donihee, vous avez proposé quelques recommandations. À la recommandation no 4, vous mentionnez que pour que les nouveaux pouvoirs de l'Office national de l'énergie soient efficaces, cet organisme de réglementation aura besoin d'un meilleur modèle de financement. Il semble que les crédits alloués actuellement et les restrictions imposées par le Conseil du Trésor quant à la façon dont ils sont employés sont trop contraignants et ne permettent pas de maintenir ou d'accroître l'expertise.
    Pouvez-vous nous en dire davantage à propos de cette recommandation? Que vouliez-vous dire exactement à ce sujet? Quels seraient les besoins liés à une amélioration à cet égard?
    Monsieur Choquette, je vous remercie de la question.

[Traduction]

    Tout d'abord, pour avoir eu, dans une précédente vie, le privilège de travailler à l'Office national de l'énergie en tant que directeur d'exploitation, je dirais que l'ONE est un employeur indépendant. Il a un certain niveau d'indépendance.
    Les financements qu'il reçoit pour ses opérations proviennent à 90 % de coûts remboursés par le secteur industriel, donc on peut dire que ce secteur, comme je l'ai dit dans mon témoignage, reconnaît clairement le bénéfice qu'il y a à avoir un régulateur fort et à quel point c'est essentiel.
    Là ou l'ONE est à la peine, très franchement, c'est quand il se voit imposer des niveaux de rémunération qui sont courants dans la fonction publique, mais qui n'aident pas tellement l'ONE qui est installé à Calgary et qui est en concurrence pour employer des personnes ayant des compétences techniques de très haut niveau. Il a des difficultés à être compétitif, en ce qui concerne ses pratiques en matière d'embauche et de rémunération, pour recruter des personnes compétentes et pour les conserver.
    Je crois que l'une des principales recommandations que je pourrais faire, soit garantir l'existence d'un Office national de l'énergie fort, bien financé et souple, en mesure de fournir le travail de qualité en matière de supervision, de capacité et de compétence que les Canadiens attendent.

  (1715)  

[Français]

     Merci beaucoup, monsieur Choquette.
    Nous passons maintenant à M. Regan, pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie tous les témoins qui sont ici aujourd'hui ainsi que le témoin qui participe à la réunion par l'entremise de la vidéoconférence.

[Traduction]

    Je voudrais notamment soulever la question du financement de l'ONE, car, selon le Budget principal de 2015-2016, le financement de l'ONE pour la réglementation des pipelines, des lignes électrique, du développement énergétique et ainsi de suite, a baissé, passant de 81,7 millions de dollars en 2013-2014 à 76.8 millions de dollars pour 2015-2016. Soit une baisse de 4.9 millions de dollars et d'environ 6 %.
    Étant donné que le projet de loi C-46 confère un certain nombre de responsabilités supplémentaires à l'ONE et davantage d'autorité, ne trouvez-vous pas étrange que son budget diminue au lieu d'augmenter? Quel effet cela aura-t-il sur la confiance qu'a le public dans la capacité de l'ONE de faire en sorte que nos pipelines soient les plus sûrs au monde?
    Monsieur Donihee, voulez-vous commencer?
    Je suis désolé mais je ne connais pas bien les tendances de ces budgets. Il serait peut-être préférable que vous interrogiez des membres de l'ONE. Comme je l'ai dit tout à l'heure, à mesure que ces responsabilités supplémentaires incombent à l'ONE, il est clair qu'il faut exiger un financement additionnel, surtout pour avoir une meilleur souplesse en ce qui a trait à la capacité d'attirer et de maintenir en fonction un personnel très qualifié dans un contexte très concurrentiel, même en temps de crise.
    Merci.
    Monsieur Blakely.
    À l'expérience, je sais qu'avec moins on ne peut faire que moins. Si vous voulez donner plus de responsabilités aux gens et que vous attendez un meilleur niveau de service pour mieux servir les Canadiens, alors il faut du financement.
    C'est vrai.
    Monsieur Miron.
    Je suis tout à fait d'accord avec ces remarques. Réduire le financement, puis attendre davantage de services me semble illogique.
    Monsieur Olszynski, avez-vous quelque chose à ajouter?
    Je suis d'accord avec les autres témoins à ce sujet.
    Permettez-moi de vous interroger au sujet du risque pour les contribuables en cas de déversement catastrophique. Je pose la question parce que, actuellement, si une entreprise de pipelines n'est pas en mesure de payer l'intégralité des coûts associés au déversement, il y aura bien sûr des impayés. Avec le projet de loi C-46, nous disposerions d'un régime où le Trésor ferait appel aux contribuables. Il serait sollicité pour couvrir les impayés.
    La question est de savoir, je suppose, s'il est juste que les contribuables courent ce risque, bien qu'il semble y avoir des mécanismes permettant à l'ONE de recouvrer toute compensation qui pourrait être versée. Pensez-vous que cet aspect du projet de loi devrait être modifié et, si oui, avez-vous des suggestions?
    Monsieur Olszynski, je commencerai par vous.
    En ce qui concerne ces dispositions, pour l'essentiel, elles ressemblent à celles que nous avons aux États-Unis et au Superfund que nous avons là-bas. L'objectif est vraiment de mobiliser des fonds rapidement, même lorsque l'exploitant ne peut ou ne veut pas le faire; il faut faire face aux enjeux. Je crois que la principale différence réside dans la nature discrétionnaire de la manière dont ce fonds sera provisionné. Je crois qu'aux États-Unis, c'est surtout grâce à une taxe prélevée sur les exploitants qui font partie d'une communauté réglementée définie. Cela fonctionne en partie comme cela ici, mais ça semble un peu plus discrétionnaire.
    Donc si vous voulez vous assurer que ces fonds soient réapprovisionnés, que le Trésor le fasse... et que les contribuables Canadiens ne paient pas pour la plus grande partie de ces incidents, alors vous devez rendre ces recouvrements obligatoires.

  (1720)  

    Il me reste une minute.
    Quelqu'un d'autre souhaite-t-il apporter un commentaire? Merci de lever la main si vous voulez ajouter quelque chose.
    Je dirais simplement que je suis d'accord avec ces remarques.
    Je dirais les choses autrement. Une entreprise de pipelines a des actifs, qu'ils soient dans les pipelines, ou ailleurs, ou dans les contrats de transport, quel qu'ils soient. Ces actifs devraient être exigibles.
    Merci beaucoup.
    Merci beaucoup, monsieur Regan.
    Nous avons le temps de poser une dernière série de questions.
    Madame Crockatt.
    Merci beaucoup monsieur le président.
    Je voudrais aller un peu plus loin. Nous avons beaucoup parlé des risques pour les Canadiens et de la manière dont ce projet de loi leur évite de devoir assumer les risques dans le cas improbable d'un déversement de pétrole lié à un pipeline, mais je voudrais parler des avantages qu'il y a pour les Canadiens que cette loi permette que l'activité se poursuive.
    Je voudrais vous entendre, monsieur Blakely, au sujet du projet de l'oléoduc Keystone XL. Doit-il se poursuivre? Quels en seront les avantages pour les Canadiens?
    En gros cela signifie que nous devons construire et entretenir une ressource capable d'acheminer 800 000 barils par jour jusqu'à la côte du golfe du Mexique. J'aimerais beaucoup construire cela.
    Quels seraient les avantages pour les Canadiens, s'ils pouvaient construire cela?
    Cela signifierait des emplois, une sécurité pour les programmes sociaux, et la capacité de financer ce que nous faisons, de former une main d'oeuvre en conséquence et d'apporter une sécurité économique à l'Amérique du Nord. Ce sont des buts plutôt louables. Nous continuons d'importer d'importantes quantités de pétrole. Peut-être que nous n'avons plus besoin de le faire. Peut-être que nous pourrions être la Forteresse Amérique du Nord et...
    Nous libérer du pétrole algérien?
    Eh bien [Inaudible] savions que beaucoup de gens ne nous aiment pas et n'aiment pas notre mode de vie.
    Monsieur Donihee, je vous pose la même question? Quelles sont les retombées sur le plan des emplois d'un projet comme Keystone, et quelle la place de ce projet dans notre conversation d'aujourd'hui?
    En fin de compte, qu'il s'agisse de Keystone... et je voudrais suggérer que les autres projets, qui prévoient un acheminement vers l'est ou vers l'ouest, sont encore plus importants pour nous parce que, en réalité, nous enregistrons actuellement une perte de l'ordre de 50 millions de dollars par jour en ce qui concerne la valeur de nos ressources qui sont acheminées vers un marché unique — notre bon voisin du sud, qui profite en ce moment de cette subvention aux dépends du Canada. Comme l'a dit M. Blakely, il est crucial que le Canada se ménage des possibilités d'accès à d'autres marchés pour qu'il soit sûr que nous bénéficierons de la pleine valeur de nos ressources.
    Il y a 60 milliards de dollars de projets proposés pour les prochaines années et 25 000 emplois actuellement dans le secteur. Vous avez entendu M. Blakely évoquer le très grand nombre d'emplois créés, au moins au cours des phases de construction. L'an dernier, 100 milliards de dollars de ressources ont été transportées, même en tenant compte du rabais, ce qui contribue énormément au tissu social de notre nation. Il nous faut trouver un moyen d'y parvenir. Il incombe au gouvernement de créer les circonstances et aux entreprises de faire le travail comme il faut.
    Je crois que cela répond à ma question. Merci monsieur le président.

[Français]

     Merci beaucoup, madame Crockatt.

[Traduction]

    Vous pouvez poser une petite question.
    Cette question a été souvent soulevée par tous les témoins. J'ai particulièrement apprécié votre témoignage. Ce projet de loi prévoit la promulgation d'un grand nombre de règlements. Sans eux, il y encore de nombreuses incertitudes légales sur la nature exacte de ce que sera le régime.
    Je demande au gouvernement et à l'Office national de l'énergie si oui ou non ils ont déjà discuté entre eux, et avec le secteur de l'énergie. Cela semblerait logique au début de la rédaction des dispositions réglementaires. J'ai l'impression que, quand j'étais sous-ministre adjoint, lorsqu'on proposait un régime législatif entièrement nouveau, on réfléchissait aussi à la réglementation à mettre en place pour donner corps au projet de loi, mais aussi au genre de recrutement et de formation dont on allait avoir besoin pour mettre en oeuvre ce nouveau régime d'une façon efficace et constructive.
    J'aimerais avoir votre avis là-dessus; n'importe lequel d'entre-vous. J'ai apprécié les remarques de M. Donihee qui ont été très honnêtes. C'est bien de savoir que vous avez autrefois travaillé pour l'ONE, vous connaissez les besoins.
    Je voudrais juste savoir si vous êtes d'accord et si vous partagez mes préoccupations. Je ne peux me baser que sur ce que le gouvernement et l'ONE nous ont dit, à savoir que rien n'a été fait pour le moment au sujet de cette réglementation. N'est-il pas logique d'accélérer la promulgation des règlements nécessaires, dans le cadre d'un processus consultatif, en sorte que nous sachions enfin ce que sera ce nouveau régime réglementaire?

  (1725)  

    Plus vite nous commencerons, mieux cela vaudra pour nous.

[Français]

    Monsieur Donihee, vouliez-vous prendre la parole?

[Traduction]

    Nous avons indiqué avec force notre soutien au cours de la préparation du projet de loi. Comme un large éventail de parties intéressées, nous avons le privilège d'être consultés. Nous avons hâte que le projet de loi soit adopté et nous nous réjouissons de continuer cette consultation afin de préparer la réglementation elle-même.
    [Difficultés techniques] ... le plus tôt sera le mieux, afin de combler ces lacunes, y compris au sujet des dommages environnementaux.
    Je recommande vivement la consultation du public lors de l'élaboration de ces réglementations.

[Français]

     Merci beaucoup, madame Duncan.
    Messieurs Olszynski, Miron, Blakely et Donihee, je vous remercie de nous avoir accordé ce temps et d'avoir partagé votre expertise et vos réflexions avec nous.

[Traduction]

     Merci beaucoup à tous les membres du comité. Nous reprendrons le 21 avril pour le début de notre examen article par article du projet de loi C-46.
    Bon congé et à bientôt.
    La séance est levée.
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