Passer au contenu
Début du contenu

SECU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain
Passer à la navigation dans le document Passer au contenu du document






Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la sécurité publique et nationale


NUMÉRO 069 
l
1re SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 7 février 2013

[Enregistrement électronique]

  (0845)  

[Traduction]

    La séance est ouverte. Bonjour à tous.
    Le Comité permanent de la sécurité publique et nationale tient sa 69e séance en ce jeudi 7 février 2013.
    Ce matin, nous allons poursuivre notre étude sur les aspects économiques liés aux services de police au Canada. Nous sommes très heureux d'accueillir aujourd'hui, durant la première heure de notre séance, le sous-commissaire de la police fédérale, Mike Cabana. Il est accompagné de la surintendante Angela Workman-Stark, directrice de la réingénierie de la police fédérale. Le comité tient à vous remercier de votre présence.
    Je suis arrivé vers 8 h 15 ou 8 h 10, et nos témoins étaient déjà ici, assis à leur place et prêts à témoigner. Alors, merci beaucoup.
    Si vous avez une déclaration préliminaire à faire, nous nous ferons un plaisir de l'entendre. Ensuite, nous passerons au premier tour de questions.

[Français]

    Honorables membres du comité, bonjour.
    Je voudrais tout d'abord vous remercier de nous avoir invités à comparaître aujourd'hui devant vous afin de vous parler du programme de la Police fédérale de la GRC. J'aimerais aussi vous présenter la docteur Angela Workman-Stark, qui est responsable de l'équipe qui gère et qui coordonne la réingénierie des programmes fédéraux.
    Je vais d'abord vous présenter le programme de la Police fédérale ainsi que son mandat.
    La Police fédérale représente une activité centrale de la GRC. Elle s'exerce dans chaque province et territoire du Canada ainsi que dans divers emplacements internationaux. Le mandat de la Police fédérale de la GRC consiste à mener des enquêtes en matière de sécurité nationale, de lutte au crime organisé et à la criminalité économique, élaborer et favoriser l'échange de renseignements criminels, faire respecter les lois fédérales, mener des activités de développement international des capacités de liaison ainsi que de maintien de la paix. Elle doit aussi assurer la sécurité de représentants de l'État, des personnalités de marque, des missions étrangères, des aéronefs canadiens et assurer la sécurité lors d'événements majeurs.

[Traduction]

    En pratique, cela signifie que nous sommes responsables d'empêcher et de contrer un large éventail de crimes graves qui menacent l'intérêt national du Canada.
     Notre mandat est fort vaste. Il comprend, entre autres, les responsabilités suivantes: enquêter sur des actes extraterritoriaux de corruption de la part d'entreprises canadiennes pour violation de la Loi sur la corruption d'agents publics étrangers; rendre inopérables, par le biais du Centre antifraude du Canada, plus de 100 000 adresses de courriel par année que l'on présume avoir facilité la fraude par marketing de masse; intercepter des cargaisons de drogues internationales; oeuvrer auprès des jeunes partout au pays afin de réduire le plus possible leur implication, comme victimes ou délinquants, dans des crimes de nature fédérale, par exemple en matière de drogue, de terrorisme et de gangs de rue; perturber, avec l'aide de nos partenaires, un groupe criminel d'importance, comme nous venons tout juste de faire la semaine dernière lors d'une célébration du Super Bowl au nord de Toronto.
    Au cours des dernières années, les enquêtes qui relèvent de la police fédérale sont devenues de plus en plus complexes. Les menaces sont davantage internationales et multidimensionnelles. Les technologies et la mondialisation qui ont donné des moyens d'agir à beaucoup d'entre nous ont également augmenté le pouvoir des criminels.
     Les enquêtes criminelles ne peuvent plus se limiter aux frontières du Canada. Cela comporte son lot de défis lorsqu'il s'agit de mener des opérations à l'étranger. Il faut prendre en considération divers facteurs, comme les droits de la personne, la corruption locale, l'échange d'informations, les différentes normes légales, les normes de formation, les pratiques d'enquêtes distinctes, les problèmes technologiques et, bien entendu, les politiques organisationnelles. À l'étranger, il est plus difficile de déterminer avec qui travailler, à qui nous devons faire confiance et comment développer des relations afin de créer les conditions gagnantes nous permettant d'atteindre nos résultats opérationnels.
    Parmi les autres facteurs qui contribuent à la complexité des enquêtes fédérales, notons des normes plus strictes en matière de décisions judiciaires ainsi que la responsabilisation et la surveillance croissantes de la police. Nous nous efforçons constamment de répondre aux attentes de la population et de miser sur nos expériences, ce qui n'est pas facile dans un monde qui évolue si rapidement.
     Permettez-moi de vous citer un petit exemple. Il y a 15 ans, une autorisation en vue d'intercepter les communications d'une cible aurait mis en cause un ou deux numéros de téléphone et peut-être une adresse de courriel. De nos jours, une cible possède généralement plusieurs téléphones, plusieurs adresses de courriel, des appareils portables, dont certains comportent des mécanismes publics de cryptage, ce qui nous pose un défi de taille.
    La croissance du volume d'informations dans n'importe quelle enquête est ahurissante. Une récente enquête a donné lieu à l'interception de 350 000 conversations téléphoniques et de près d'un million de messages textes. Le temps requis pour compiler ces données, les analyser et faire démonstration de la preuve d'une façon claire et convaincante est bien évidemment considérable. N'oublions pas qu'en tout temps, la GRC mène en parallèle plusieurs enquêtes criminelles complexes de cette nature.
     Il est difficile de déterminer le coût moyen de chacune de ces enquêtes puisque chaque cas est bien différent. Nous sommes en train de mettre en place des mécanismes afin de mieux relier les projets aux résultats et aux coûts. Il sera intéressant, dans environ un an, de pouvoir évaluer cette information.

  (0850)  

    Théoriquement, nous reconnaissons que l'ampleur des efforts et des coûts est substantielle, et ce, des projets d'équipe de deux ou trois personnes dans le cadre de OPAPA qui, en 2010, a conduit au démantèlement d'un réseau de traite de personnes à Hamilton, à des projets plus vastes, comme COLISÉE ou OSAGE, qui ont mobilisé des douzaines d'enquêteurs sur de longues périodes et qui ont mené à plusieurs arrestations.
    À une plus grande échelle, il est raisonnable de dire que nos projets majeurs consistent généralement en des initiatives de plusieurs millions de dollars. Nous reconnaissons que nous devons nous assurer de rendre des comptes quant aux ressources que nous leur allouons.
    Nous reconnaissons depuis longtemps que les coûts élevés associés aux projets majeurs signifient qu'ils ne peuvent pas constituer notre unique approche envers la criminalité. Nous devons continuer à mettre de l'avant des façons novatrices de faire face aux menaces, et nous continuons à le faire, et ce, en améliorant l'intégration, en nous attaquant aux problèmes à leurs racines et en accroissant l'échange d'information. Nous avons entrepris quelques démarches prometteuses dans cette voie et nous pouvons tabler sur ces succès. Par exemple, la RICCO, la Réponse intégrée canadienne au crime organisé, est une initiative conjointe de l'Association canadienne des chefs de police et du Service canadien de renseignements criminels. Elle représente un progrès quant à l'atteinte du but longtemps recherché, à savoir la réelle coordination opérationnelle entre des organismes locaux, municipaux et fédéraux d'application de la loi. Je suis d'avis que les récents efforts par lesquels la RICCO s'est attaquée à quelques menaces très particulières illustrent la coopération efficace et efficiente qui est à l'oeuvre ainsi que les progrès accomplis vers une authentique intégration.
    Dans la même veine, l'opération menée par l'Unité mixte d'enquête sur le crime organisé dimanche soir, à Toronto, à laquelle j'ai fait référence il y a quelques minutes, démontre également la pertinence et la force de travailler de concert. L'UMECO représente un véritable exemple de collaboration par lequel huit organismes d'application de la loi se concertent afin de combattre des menaces persistantes.
    Laissez-moi vous mentionner un autre exemple où, avec nos partenaires, nous avons déployé des effectifs sur la scène internationale afin d'oeuvrer avec des partenaires étrangers dans le but d'empêcher des navires de passagers illégaux d'entreprendre un voyage dangereux vers les côtes canadiennes. Cet effort a permis de perturber de multiples projets, de sauver des vies et d'éviter de devoir mener des enquêtes nationales coûteuses.

[Français]

    Je vais vous donner un dernier exemple. En 2012, nous avons conclu une entente avec la police indienne afin de favoriser l'échange d'informations concernant l'expédition de précurseurs chimiques de drogues synthétiques. Ce cadre, qui respecte les droits canadiens de la personne, fait en sorte que les criminels peuvent de moins en moins exploiter de frontières afin d'éviter d'être décelés puis d'être poursuivis en justice par les autorités.
    Je voudrais conclure mes commentaires en m'attardant sur un changement majeur qui est en cours présentement au sein de la Police fédérale. Je parle ici de la restructuration de la Police fédérale.

  (0855)  

[Traduction]

    La raison d'être de cette restructuration consiste à définir des façons plus efficaces de réaliser les multiples facettes de notre mandat en constituant un programme de police fédérale souple et intégré, à même de faire face aux priorités opérationnelles de manière efficace.
    Cela signifie évoluer d'un modèle axé sur les produits et la division traditionnelle du travail vers un modèle tablant sur des secteurs d'expertise se concentrant sur la réalisation de six activités clés: répondre aux demandes de service, ce qui inclut les enquêtes mineures; conduire et appuyer les enquêtes majeures; repérer les nouvelles menaces par le renseignement; établir et exploiter des partenariats; sensibiliser la population et prévenir le crime; et, bien entendu, protéger les lieux, les gens et les biens.
    Ce changement favorisera une meilleure coordination des enquêtes de priorité nationale, une plus grande cohérence en matière de gouvernance et de surveillance, un meilleur établissement de nos priorités quant à nos activités et à nos ressources, un cadre plus rigoureux de mesure du rendement, de même qu'un engagement renouvelé et accru envers la primauté des opérations, ce qui incarne simplement une philosophie selon laquelle les résultats importent.
    Nous sommes bien conscients de l'ampleur de cet effort de réforme. Lors de sa mise en oeuvre, nous continuerons de nous évaluer et de consulter nos partenaires dans le domaine de l'application de la loi et au sein de l'appareil gouvernemental, et ce, aux niveaux local, provincial et national afin de nous assurer que nous demeurons dans la bonne voie.
    Manifestement, il reste beaucoup de travail à faire. Nous continuerons d'explorer de nouvelles façons d'amener les criminels devant la justice, d'interdire leurs moyens d'action et leurs méthodes et de perturber leurs opérations en ayant recours à tous les moyens dont nous disposons. Nous sommes déterminés à maintenir un service de police fédérale intégré et simplifié qui mène des enquêtes de façon ciblée et efficace.
    C'est ainsi que je termine ma déclaration préliminaire. Je serai ravi de répondre à toutes vos questions.
    Merci beaucoup.
    Nous allons commencer tout de suite la première série de questions. Monsieur Leef, vous disposez de sept minutes; allez-y, s'il vous plaît.
    Merci, monsieur le président. Je remercie nos deux témoins de leur présence.
    J'ai une petite question. Dans votre exposé vous avez dit que le partenariat entre le Service canadien de renseignements criminels et l'Association canadienne des chefs de police « représente un progrès quant à l'atteinte du but longtemps recherché, à savoir la réelle coordination opérationnelle... ». Et vers la fin de cette observation, vous avez dit « ... vers une authentique intégration ».
    Il y a des éléments importants à cet égard. Pourriez-vous nous dire quelle était la situation auparavant et ce qui vous amène à faire cette observation au sujet de la coordination opérationnelle? Qu'est-ce que cela évoque pour vous? Qu'est-ce que cela signifie sur le plan de l'amélioration de l'efficacité et de la rentabilité dans les services de police?
    Je vous remercie de poser la question. Je suis ravi d'avoir la possibilité de parler des activités de la RICCO.
    Les organismes d'application de la loi de partout au pays ne ménagent aucun effort pour garantir un certain degré de coordination, éviter les chevauchements et collaborer plus étroitement.
    Je crois que la création de la RICCO remonte à 2007. Ce comité a été créé pour fournir un cadre d'échanges aux organismes d'application de la loi qui n'est pas simplement un outil de coopération et d'aide, mais qui leur permet de mettre en commun des renseignements en temps réel, d'établir un ordre de priorité basé sur une évaluation des menaces et de discuter des plus grandes menaces à la sécurité nationale pour garantir leur élimination. L'objectif est de s'assurer qu'il y a un organisme d'application de la loi compétent qui a la responsabilité de déployer des efforts pour éliminer la menace en question.
    Pendant un certain nombre d'années, le travail de la RICCO a évolué au point où nous avons maintenant une seule évaluation des menaces, mais les discussions ont amené les organismes à collaborer pour les éliminer. Que ce soit à l'échelle locale, provinciale ou internationale, en échangeant l'information comme nous le faisons maintenant, nous constatons que même les menaces locales traversent, à tout le moins, les provinces.
    Je vous donne un exemple. Un de nos projets en cours mobilise 28 services de police et inclut 56 enquêtes qui sont coordonnées par la RICCO. Nous obtenons déjà des résultats sans précédent.

  (0900)  

    Excellent. Cela m'en dit plus long. Il y a maintenant une véritable coordination opérationnelle. Je crois comprendre qu'auparavant, la situation n'était pas aussi parfaite que nous l'aurions souhaité. Est-ce juste?
    C'est tout à fait juste.
    Vous avez dit que vous étiez en train de mettre en place des mécanismes afin de mieux relier les projets aux résultats et aux coûts. Vous est-il permis de parler de quelques-uns de ces mécanismes?
    Absolument. Notre capacité d'évaluer les résultats, notre rendement, a toujours comporté des difficultés pour les organismes d'application de la loi. Il est parfois très difficile de donner une explication de notre travail. Il y a beaucoup de travail à faire dans le contexte de la restructuration pour pouvoir non seulement établir nos priorités, mais aussi développer une matrice d'établissement des priorités, afin de nous assurer que nous gérons les dossiers par ordre de priorité, mais également que nous pouvons évaluer ce qu'il advient des dossiers. Le travail est en cours. On s'attardera à un certain nombre d'éléments. Bien entendu, il y a les coûts de l'enquête, le nombre d'arrestations, la décision rendue par la cour, mais aussi les changements et les répercussions sur l'évaluation de la menace nationale. Nous nous concentrons sur notre capacité à évaluer les perturbations engendrées dans chaque organisation en fonction du dossier.
    Angela Workman-Stark gère une bonne partie de ce travail.
    Je ne sais pas si elle veut ajouter quelque chose.
    Je pense que d'autres témoins vous ont dit que dans le milieu policier, tout le volet lié à la mesure de la performance n'est pas vraiment bien élaboré. Quant aux mesures à prendre, nous nous demandons vraiment comment évaluer les résultats des activités policières, plutôt que de parler d'un certain nombre d'arrestations, de perturbations. Comment pouvons-nous vraiment connaître les répercussions sur les préjudices et réduire leur nombre? On en parle depuis un certain temps. C'est l'orientation que nous prenons.
    J'ai juste assez de temps pour poser rapidement une autre question.
    Des représentants de l'Association canadienne des policiers et de l'Association canadienne des chefs de police nous ont parlé de ce thème récurrent, à savoir que les services de police de première ligne constituent l'organisme de prédilection.
    Y a-t-il des activités auxquelles participe la police fédérale qui devraient être retirées de son mandat? Par exemple, les services de police de première ligne diront qu'ils sont devenus des travailleurs sociaux et des travailleurs en santé mentale. Ils occupent une fonction fourre-tout dans la collectivité. En est-il de même à la police fédérale? Y a-t-il des volets que vous pourriez éliminer pour lesquels votre organisme est devenu l'organisme de prédilection?
    Pour quel volet pourrions-nous devenir l'organisme de prédilection?
    Pour quel volet pourriez-vous cesser de l'être?
    La restructuration consiste en partie à faire en sorte que nous nous attaquions aux plus grandes menaces pour les Canadiens. Cela fait partie de nos discussions sur l'initiative. Il est très risqué de ne plus participer à certains volets de la criminalité, car cela pourrait créer une faille qui profiterait aux criminels.
    Nous envisageons plutôt de ne cesser aucune activité. Nous établirons les priorités de sorte que nous nous attaquions à l'organisation. Nous ne nous concentrons plus sur les produits, mais sur les organisations. Le plus important à cet égard, c'est d'accroître le degré de coordination avec les services de police par contrat ou les services de police de première ligne afin d'éviter le chevauchement et la création d'une faille et de faire en sorte que nous comprenons bien les effets de nos actions.

  (0905)  

    Merci beaucoup.
    La parole est maintenant à M. Garrison. Allez-y, s'il vous plaît; vous disposez de sept minutes.
    Merci, monsieur le président. Bonjour aux témoins. Je vous remercie de votre présence.
    Puisque M. Leef a déjà posé ma première question, je vais passer à mes deux autres. J'ai une question plutôt générale et l'autre est plus précise. La première porte sur la sécurité nationale.
    Étant donné que la plupart des questions de sécurité nationale sont incluses dans le Code criminel, certaines personnes ont parlé d'un chevauchement possible entre les responsabilités de la GRC et celles du SCRS. Où se situe la frontière entre leurs responsabilités respectives, et comment gérez-vous ce possible chevauchement?
    De notre point de vue, la frontière est très claire et très bien définie. Les activités liées à la sécurité nationale de la GRC existent depuis de nombreuses décennies et datent d'avant la création du SCRS.
    Notre rôle, notre mandat, est clair. Il concerne les activités criminelles liées à la sécurité nationale. Le rôle du SCRS consiste à recueillir des renseignements afin de cibler les menaces à la sécurité nationale potentielles et d'en informer le gouvernement du Canada. Le nôtre est très différent. Il s'agit de mener des enquêtes, du point de vue des poursuites au criminel et de l'interdiction. Le rôle du SCRS consiste à recueillir des renseignements et à informer, mais je dirais que les deux mandats se complètent.
    Je pense que ce n'est un secret pour personne: il y a des accrocs entre le SCRS et la GRC. La sécurité nationale à la GRC fait partie des volets dont je m'occupe, et je dirais que les liens sont meilleurs que jamais. Nous avons de très bons mécanismes d'harmonisation pour faire en sorte que chaque organisme est au courant des activités de l'autre et qu'il n'y a pas de chevauchement et que nous avons les mêmes priorités.
    Vous comprenez les préoccupations. Vous parlez d'interdiction, ce qui vous mène aux aspects prospectifs de la sécurité nationale auxquels le SCRS est déjà censé travailler. Peut-on faire une distinction claire entre les activités internes liées à la sécurité nationale et la dimension internationale du SCRS?
    Il serait dangereux d'établir une distinction entre les deux. Il y a des activités criminelles liées à la sécurité nationale qui ont lieu à l'étranger qui ont des répercussions sur le Canada. La GRC est un organisme responsable, comme d'autres organismes fédéraux, et je suppose que l'une des idées fausses qu'il nous faut rectifier, c'est que le SCRS et la GRC sont les deux seuls organismes qui ont un rôle à jouer en matière de sécurité nationale. Bon nombre d'organismes fédéraux investissent des efforts en ce sens.
    Cependant, je ne crois pas que je ferais une distinction entre les volets national et international; la frontière n'est pas claire.
    Vous avez mentionné l'idée d'organisme responsable. Désigne-t-on vraiment de façon claire un organisme responsable dans la coordination des efforts pour la sécurité nationale?
    Oui, en ce qui concerne les poursuites au criminel et les enquêtes criminelles. Ce qui est un peu délicat, à défaut d'un meilleur terme, c'est de déterminer à quelle étape un dossier qui est sous la responsabilité du SCRS deviendra la responsabilité de la GRC. Comme je l'ai dit, il y a des mécanismes qui assurent qu'il y aura une transition et qu'elle se fera le plus vite possible.
    Chaque dossier est différent et doit être évalué séparément. Pour pouvoir dire qu'il y a une distinction nette et qu'on procède au cas par cas... C'est pourquoi nous avons créé des comités pour être en mesure de faire ces évaluations et déterminer à quelle étape chaque organisme devrait intervenir.

  (0910)  

    Je crois comprendre alors que vous avez des comités qui s'occupent des cas, mais existe-t-il un comité qui veille à la coordination à tous les niveaux?
    Il y a un certain nombre de comités. Vous avez raison en ce sens qu’il y a un comité qui s’occupe des cas. Il y a également un comité à l’échelle de la direction qui permet aux cadres supérieurs de se réunir régulièrement pour discuter des mesures utilisées ou du degré de coopération, afin de déterminer les changements éventuels à apporter.
    Bien entendu, les relations personnelles entrent en compte. Je communique régulièrement avec mes collègues du SCRS pour discuter de la façon dont nous pourrions améliorer les choses.
    Merci.
    Je vais maintenant aborder la question de la fraude commerciale, parce que nous avons souvent tendance à mettre l’accent sur les aspects criminels, y compris la criminalité de rue, la violence et la sécurité communautaire. Ces infractions font beaucoup de mal aux collectivités. Selon moi, c’est particulièrement notable dans les cas de fraude et de crimes commerciaux, en particulier dans les cas de fraude perpétrée contre des personnes âgées et d’autres infractions de ce genre.
    Je présume que ces questions font clairement partie de votre mandat. Je me demande si vous avez des observations générales à formuler concernant la difficulté de lutter contre la fraude commerciale.
    Voilà une excellente question qui se rapporte directement à notre discussion concernant les aspects économiques liés aux services de police.
    La complexité et le degré de fraude ont considérablement augmenté au Canada au fil des ans, ce qui a une incidence directe sur nos résultats financiers. Plus nous affectons de ressources à un dossier, plus les coûts grimpent et moins nous pouvons traiter de dossiers.
    Je pense que nous devons rattacher cette question à la matrice d’établissement des priorités que nous élaborons en ce moment. Nous ne nous occupons plus de la fraude. Nous nous concentrons sur la contrefaçon et les stupéfiants, et nous surveillons les organisations impliquées. Ces organisations criminelles offrent une multitude de produits. Pour être franc, elles participent à toute activité qui peut leur rapporter de l’argent. La matrice d’établissement des priorités distinguera les organisations les plus importantes, mais nous examinerons également les activités qu’elles exercent.
    Au fur et à mesure que nous utilisons ce nouveau modèle, je prévois que nous mènerons encore plus d’enquêtes sur la fraude que nous le faisons en ce moment.
    Merci beaucoup.
    Nous allons passer à Mme Bergen.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je vous remercie tous deux d’être venus.
    Monsieur le sous-commissaire, nous menons une étude sur les aspects économiques liés aux services de police en vue d’examiner les façons dont nous pourrions améliorer l’efficacité de ces derniers et de déterminer si le gouvernement fédéral peut fournir aux provinces et aux municipalités des modèles qui les aideraient à travailler conjointement à la réduction des coûts.
    Compte tenu de la complexité des enquêtes et du fait que, même à l’échelle locale, on demande aux services de police de faire beaucoup de choses, cet objectif est-il réaliste? Pouvons-nous réduire le coût des services de police sans réduire le nombre d’agents de première ligne qui assurent toujours la prestation des services et qui font toujours un excellent travail, pour lequel le Canada est renommé à l’échelle mondiale? Est-ce faisable?
    Absolument, il ne fait aucun doute dans mon esprit que cet objectif est réalisable.
    Je ramène toujours le sujet sur la réingénierie — et vous allez devoir m’en excuser —, mais c’est notre fleuron, et nous aimerions vraiment voir où elle nous mènera. La réingénierie n’a pas été entreprise en raison de la nécessité de réduire les coûts. Elle a commencé avant. Nous y travaillons depuis un certain nombre d’années.
    La situation économique actuelle nous a probablement obligés à prendre une attitude plus dynamique concernant la façon dont nous allons procéder, et cela nous a forcés à examiner certains de nos processus. Nous avons remarqué que d’importantes économies pouvaient être réalisées dans certains secteurs.
    Par exemple, nous sommes en train de civilariser un nombre considérable de postes à la Direction générale. Nous avons remarqué qu’il y avait beaucoup de recoupement dans nos processus. Nous nous employons à les éliminer en ce moment. L’entière structure de notre direction générale et la façon dont elle fonctionne sont en train de changer complètement, et nous avons commencé à redresser la structure vendredi dernier, si ma mémoire est fidèle. Nous avons été en mesure de réduire notre empreinte fédérale de 100 membres réguliers, à la Direction générale seulement.
    Je pense que les organismes d’application de la loi devraient considérer l’étude des aspects économiques liés aux services de police comme une occasion en or d’innover et de faire preuve d’imagination en ce qui concerne la façon dont ils exercent leurs activités.
    D’après les échanges que j’ai eus avec mes collègues de l’Association canadienne des chefs de police, je sais que c’est ce dont ils discutent et que c’est la lentille avec laquelle les aspects économiques liés aux services de police sont examinés.

  (0915)  

    Je suis contente de l’entendre parce que, selon moi, nous reconnaissons tous que les défis sont plus grands. Au début de vos observations, vous avez même fait allusion à la nécessité d’en faire plus, à la responsabilisation accrue et au fait que beaucoup de gens vous observent.
    Je me demande ce que vous pensez du développement des services de police locaux. Nous avons entendu différents témoins dire que les services de police locaux ou municipaux sont aux prises avec non seulement des crimes majeurs, mais aussi des crimes moins graves qui découlent de la maladie mentale et de la dépendance. Nous avons entendu parler de quelques bons programmes ou modèles qui sont en place pour gérer ces problèmes.
    Je sais que très peu de recherches sont menées en ce moment, et c’est là que nous avons décelé une lacune. Sur quoi vaudrait-il mieux que les services de police mettent l’accent? Serait-il préférable qu’ils se concentrent sur les problèmes moins pressants, comme le syndrome du carreau cassé — sauf que nous parlons maintenant du maintien de l’ordre, plutôt que de la lutte contre la criminalité ou de la réduction des coûts —, ou la technologie est-elle en train de changer, comme vous l’avez mentionné?
    Vous accomplissez beaucoup plus de travail à l’échelle internationale. Où, selon vous, l’accent devrait-il être mis? À l’échelle locale, en réduisant les coûts et en veillant à accroître l’efficacité des services de police, ou en continuant d’investir de fortes sommes et en trouvant des moyens d’être plus efficace à l’échelle provinciale?
    Voilà une question intéressante. Je soutiens que la question n’est pas tant de déterminer le secteur qui devrait être favorisé, mais plutôt d’atteindre ou de maintenir un équilibre approprié entre le travail à l’échelle internationale, les dossiers importants et les problèmes à l’échelle locale.
    Comme j’y ai fait allusion plus tôt, grâce à la RICCO, nous nous sommes, entre autres, rendu compte que les crimes à l’échelle locale — que vous avez qualifié de crimes moins graves, je crois — étaient directement liés à quelques organisations plus importantes qui exercent leurs activités dans notre société et qui ont une incidence sur elle. Parfois, je serais d’accord pour dire que c’est effectivement dans la lutte contre ces crimes que nous devrions investir, mais cela doit être fait d’une manière coordonnée. Il faut tenter de déterminer le point le plus faible d’une organisation criminelle et y parvenir. S’il se trouve à la première ligne, c’est là où nous devrions concentrer nos efforts.
    Je soutiens que nous devons nous assurer de maintenir un certain équilibre au cours du processus.
    Vous avez suscité mon intérêt lorsque vous avez parlé brièvement du changement que vous aviez apporté en cessant de mettre l’accent sur les produits. J’allais vous demander ce que vous entendiez par là, puis vous avez fourni quelques explications. Est-ce un principe? Je suppose que vous constaterez si cela fonctionne. Est-ce une tâche qui pourrait être évitée même à l’échelle locale ou, au contraire, est-il préférable que les services locaux axent davantage leurs activités sur les produits?
    Je pense que notre approche à cet égard — et elle se rapporte un peu à votre question précédente — consiste vraiment, encore une fois, à délaisser les produits, que ce soit les drogues, les produits de contrefaçon ou les problèmes liés à la propriété intellectuelle. Il s’agit vraiment d’adopter une perspective plus vaste à l’égard de la menace actuelle. En quoi consiste-t-elle? Quelles sont ses activités? C’est en examinant ces aspects, au lieu d’adopter une perspective beaucoup plus étroite, que nous accroîtrons notre productivité. Voilà quelques-unes des difficultés que nous avons connues dans le passé. N’ayant pas eu la possibilité d’examiner les enjeux d’une manière plus horizontale, nous avons manqué des occasions, et nous n’avons probablement pas travaillé aussi efficacement que nous l’aurions pu. Je pense que cette approche est plus appropriée.
    Si vous me le permettez, je vais ajouter quelque chose à propos de votre question précédente. Je pense que nous avons là une occasion en or de mettre tous l’épaule à la roue afin d’examiner les problèmes et de convier les universitaires à participer à la discussion concernant les secteurs dans lesquels les organismes d’application de la loi sont les plus efficaces, le type d’incidence que nous avons sur la réduction des méfaits et le rôle que jouent les différents organismes à cet égard, parce qu’il nous faut adopter une approche pangouvernementale à l’heure actuelle.

  (0920)  

    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant passer à M. Scarpaleggia.
    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie de votre présence. Votre exposé était très intéressant.
    M. Leef a volé la question de M. Garrison, et M. Garrison a volé la mienne.
    Nous examinons en ce moment une question très intéressante. Il semble que des changements seront apportés au sein de, disons la GRC, en vue d’embaucher peut-être des agents ou un plus grand pourcentage de civils. Est-ce ce que vous envisagez de faire dans les années à venir? Il me semble que, compte tenu de la complexité croissante des crimes, vous avez besoin d’un plus grand nombre de coordonnateurs, d’analystes, d’experts techniques, etc. Selon moi, si vous examinez les chiffres relatifs à la dotation sur une certaine période, vous remarquerez que la proportion de civils augmente, comparativement à celle des agents de police ayant reçu une formation traditionnelle. En convenez-vous?
    Je dirais que c’est une représentation assez exacte de la réalité. Je m’attends à ce que le pourcentage des différentes catégories d’employés change avec le temps. Nous observons déjà ces changements dans le cadre de la réingénierie. Il faut que la bonne personne dotée des bonnes compétences fasse les bonnes choses. Nous devons également tenir compte des capacités de certains de nos organismes partenaires, qu’ils s’occupent de l’application de loi ou d’autres choses, afin de nous assurer que nous éliminons tout genre de recoupements et que nous améliorons la coordination.
    Ces changements, en tant que tels, vous permettront-ils d’économiser de l’argent? Les salaires des employés civils de la GRC sont-ils inférieurs à ceux des agents de police traditionnels? En employant un plus grand nombre de civils, prévoyez-vous réduire vos coûts?
    Je crois qu’en théorie, ces changements réduiront nos coûts. Toutefois, les mesures que nous prenons en ce moment n’avaient pas un objectif économique au début. Elles n’étaient pas axées sur l’économie. Elles visaient, encore une fois, à garantir que nos agents d’application de loi étaient en première ligne des services de police fédéraux.
    Toutefois, au cours du processus, nous avons réalisé des économies. Certaines d’entre elles seront réinvesties dans la première ligne ou dans les services de soutien, tandis que d’autres serviront simplement à absorber notre déficit actuel.
    La GRC doit faire face à une réduction de son enveloppe budgétaire.
    Oui.
    En ce qui a trait aux autres ministères, le gouvernement a déclaré qu’il n’y avait pas d’inquiétude à avoir concernant les services de première ligne, car toutes les réductions visaient les bureaux d’appui. Il me semble que, dans votre domaine, les bureaux d’appui sont, de bien des façons, le véritable centre nerveux de vos activités. Il ne s’agit pas d’agents de police en patrouille, mais plutôt d’une bureaucratie d’analystes et d’experts qui repère les crimes interprovinciaux, internationaux, etc.
    J’ai du mal à réconcilier dans ma tête le fait que, d’une part, le budget de la GRC est réduit et, d’autre part, la complexité des crimes augmente.
    Si l’on examine les crimes financiers seulement, on constate qu’il faut des mois sinon des années pour parvenir au stade où il est possible de porter des accusations contre des personnes, car leurs activités sont très complexes. D’une part, il y a la complexité des transactions financières et, d’autre part, il y a toute la question de la contrefaçon qui connaît une véritable explosion en ce moment. J’ai vu les statistiques. Nous ne nous contentons plus d’imprimer des billets de banque dans des sous-sols — et quand je dis « nous », j’emploie le terme dans son sens royal. Nous suivons maintenant la contrefaçon de produits de consommation ou même de produits électroniques que l’on retrouve maintenant jusque dans l’électronique des aéronefs, etc.
    La mondialisation progresse. Personnellement, je considère les services de police un peu comme les soins de santé. Ce ne sont pas tant les salaires qui font augmenter les coûts, mais plutôt la complexité de l’industrie, si on peut l’appeler ainsi. Si l’on commence à rationaliser les soins de santé, quelqu’un en souffrira. Si, en dépit de la hausse des prix des médicaments, on décide de maintenir à leur niveau actuel les coûts du système de soins de santé, des gens mourront, car ils auront attendu trop longtemps avant de recevoir un traitement médical, par exemple. Je doute énormément que nous puissions réduire davantage les coûts du système policier à un moment où nous avons peut-être encore plus besoin de ses services.
    Vous avez parlé de réaliser des économies initiales, et je suis certain que vous avez raison, mais il s’agit peut-être simplement d’économies initiales qui ne pourront pas être répétées année après année, une fois qu’elles auront été réalisées. Dès qu’on a restructuré une organisation, on ne peut pas continuer de la restructurer annuellement pour économiser de cette façon. J’aimerais savoir ce que vous en pensez.

  (0925)  

    Je ne sais pas par où commencer.
    Vous disposez d’à peu près une minute.
    D’accord. Je vais tenter de répondre en une minute.
    La question que vous avez posée est, en fait, très complexe. Je ne crois pas qu’on puisse y répondre simplement, mais j’aimerais profiter de l’occasion pour clarifier quelque chose. Oui, la GRC fait l’objet de ce que certaines personnes qualifieraient d’importantes compressions budgétaires, mais cela n’a rien à voir avec les services de police fédérale et ce que nous faisons en ce moment.
    La police fédérale n’a pas été touchée par le plan d’action pour la réduction du déficit. Nous avons été exclus de cette équation. Cela étant dit, d’autres enjeux ont des répercussions négatives sur nous, dont les hausses salariales non capitalisées depuis trois ans qui nous forcent maintenant à mettre à pied environ 179 membres. Il y a une question d’abordabilité, et vous avez absolument raison de dire que la nôtre régresse.
    Que représentent les risques associés à cette abordabilité en régression, comparativement à la restructuration que nous effectuons en ce moment et à l’ensemble des économies que nous réalisons? Il se peut que vous ne partagiez pas mon avis, mais je crois que l’initiative que nous mettons actuellement en oeuvre nous permettra d’offrir un meilleur service aux Canadiens. La réingénierie ne se limite pas à la réduction du nombre d’employés ou à l’examen des catégories d’employés. Elle donne également à nos gestionnaires des régions le pouvoir d’affecter leurs ressources aux enjeux prioritaires et à la lutte contre la menace la plus récente.
    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant passer à M. Garrison et M. Rousseau qui se partageront le temps de parole.
    Oui, nous partageons le temps de parole, et je vais m’efforcer d’être très bref. Je veux revenir sur la question des crimes commerciaux. Soit dit en passant, en tant que députés, plusieurs d’entre nous ont observé ce que nos électeurs considèrent comme un problème de faillites frauduleuses.
    Je crois comprendre que les choses se passent comme suit: le surintendant des faillites remet les dossiers à la GRC afin qu’elle mène une enquête pour déterminer si la faillite est frauduleuse. D’après ce qu’on nous a dit, en raison d’une trop forte demande, la GRC n’enquête pas sur ces dossiers pour le moment, sauf si les biens ont une certaine valeur. Avez-vous des observations à formuler à ce sujet que vous pouvez rendre publiques?
    Si vous me le permettez, j’ai en fait deux ou trois commentaires.
    Je vais tout d’abord dire que vous avez tout à fait raison. Actuellement, il y a des évaluations en cours au sujet de ce que j’appellerais... Plus tôt, j’ai fait allusion à des demandes de service. C’est ce dont il est question ici. Nos gestionnaires doivent évaluer la gravité du dossier ou de la question qui leur est renvoyé et le comparer avec tout le reste.
    Deuxièmement, nous délaissons cet aspect. Encore une fois, nous délaissons l’examen des biens pour nous concentrer sur les organisations et les individus à l’origine de l’infraction criminelle. Si une faillite frauduleuse relativement mineure — et je mets l’accent sur « relativement » — permet en fait de porter un coup important à une organisation criminelle ou à un individu, le nouveau modèle d’établissement des priorités en tiendra compte. À l’avenir, c’est ce que nous ferons.

  (0930)  

    D’accord.
    Les temps changent. Les choses évoluent. Voilà pourquoi c’est important maintenant plus que jamais d’échanger avec tous nos partenaires, y compris le Bureau...
    Le surintendant des faillites?
    Oui. Le surintendant des faillites.
    Le président: Monsieur Rousseau.

[Français]

     Francis a posé une partie des questions que je voulais poser. Ça semble être la situation, ce matin.
    Ma question s'adresse à Mme Workman-Stark.
    J'ai étudié dans le domaine des ressources humaines, soit en organisation du travail. C'est un sujet où il est beaucoup question de temps, de mouvements, de rationalisation des services et des effectifs. Or dans bien des organisations où ces mesures ont été mises en application, celles-ci se sont avérées problématiques. On a constaté qu'elles avaient comme effet de priver les personnes d'éléments importants de leur travail en tant qu'êtres humains, par exemple leur intuition, leur spontanéité et leur créativité. Selon moi, ces aspects sont importants quand un agent doit évaluer des situations.
    Comment va-t-il être possible de réaliser cette restructuration tout en conservant ces aspects qui, à mon avis, sont importants dans le cadre du travail d'un agent sur le terrain?

[Traduction]

    Merci beaucoup de votre question. Il ne s’agit pas d’une nouvelle question.
    Oui?
    Des voix: Oh, oh!
    C’est vrai. Ce n’est pas la première fois. L’origine de cette question est vraiment cette expertise.
    L’un des aspects que nous avons examinés en allant de l’avant... De plus, à titre informatif, à ce sujet, nous avons eu l’occasion de vraiment explorer des moyens de faire les choses autrement. J’arrive à votre question; au lieu de réduire, par exemple, de 20 p. 100 et d’amputer l’appareil, nous avons eu l’occasion de vraiment examiner comment faire les choses autrement.
    En ce qui concerne les ressources humaines, il est en fait question de modifier nos structures et nos modèles pour vraiment explorer la possibilité de créer des communautés de pratique. Cela concerne vraiment les communautés de pratique relativement à la gestion de la connaissance, à savoir un endroit où des gens offrent des possibilités en ce qui a trait aux crimes financiers, à la sécurité nationale, aux crimes graves, au crime organisé, à la police internationale ou aux services de renseignements et qui leur donne un cadre pour vraiment s’investir et être créatifs. C’est un aspect qui sera essentiel à l’avenir: trouver des moyens novateurs de percer le milieu criminel.
    C’est quelque chose de nouveau, et je crois que c’est de loin supérieur à ce que nous avions par le passé. Nous avons vécu un véritable cloisonnement; par conséquent, l’innovation et la créativité se sont limitées à un secteur précis. Voilà ce qui devra en fait changer pour concrétiser un tel type de système. Les évaluations sont absolument contestables, mais c’est quelque chose que nous surveillerons au cours des années à venir.
    Merci beaucoup.

[Français]

    Ma deuxième question s'adresse à M. Cabana.
    Je peux dire qu'il y a quatre corps policiers dans mon comté, qui est situé près des frontières. On y compte six points d'entrée. Il y a l'Agence des services frontaliers, la GRC, la Sûreté du Québec et, à l'occasion, des corps policiers municipaux.
    J'aimerais savoir comment la restructuration et la prochaine réduction de 190 millions de dollars vont affecter les services et, surtout, les responsabilités de chacun. Comment va-t-on départager cela et quel effet domino les réductions de services et de ressources vont-elles déclencher? Déjà, quand je parle à des agents sur le terrain, je constate que les ressources sont assez limitées.
    De quelle manière ces mesures vont-elles affecter le moral des troupes, qui sont pourtant si fières de leur travail?

[Traduction]

    Soyez très bref, s’il vous plaît.

[Français]

    Pour ce qui est des troupes et de la GRC, l'information qu'on reçoit, c'est que les troupes sont excitées. Je cherche le bon terme français. Elles sont engagées dans les changements qu'on veut faire.
    Elles sont enthousiastes.
    C'est exact. Elles sont enthousiastes. Je vous remercie.
    Elles voient la possibilité et la flexibilité que cela va leur donner quant au travail quotidien qu'elles accomplissent.
    Pour ce qui est de nos agences partenaires, il y aura peut-être certains ajustements qui devront être faits. C'est pour cette raison qu'on discute avec eux et qu'on les tient au courant de l'évolution de notre processus pour s'assurer que lorsqu'on procède aux changements, cela ne crée pas un écart dont personne n'assumerait la responsabilité.

  (0935)  

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Monsieur Hawn, allez-y, s’il vous plaît.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci aux témoins de leur présence.
    Monsieur le sous-commissaire, vous avez dit qu’il n’y avait pas d’ébauche de réductions concernant les services de police de première ligne, et c’est bien. Vous avez parlé de la latitude et des économies possibles à cet égard.
    Pour revenir brièvement à l’analyse des soins de santé, je crois que dans le système de soins de santé nous avons de formidables technologies de pointe que tout le monde veut, alors que des solutions moins technologiques peuvent très bien faire l’affaire.
    Est-ce comparable au type de latitude à laquelle vous faisiez allusion au sujet des services de police? Vous n’avez pas tout le temps besoin de technologies de pointe, et les services de police de base seront parfois tout aussi efficaces et moins dispendieux.
    C’est une question intéressante. Je vais essayer d’y répondre. Ce ne sera peut-être pas exactement pertinent, mais voici des éléments que nous examinons.
    La latitude est le pouvoir qu’ont les enquêteurs de lutter contre une organisation criminelle par n'importe quel moyen. Par le passé, les enquêteurs en matière de drogue luttaient contre les organisations criminelles en fonction de leur implication dans le trafic de narcotiques. Ce ne sera plus le cas. Les enquêteurs pourront le faire par n’importe quel moyen.
    La latitude veut également dire que les gestionnaires peuvent tenir compte du rendement du capital investi, pour le dire ainsi, entre lancer une enquête criminelle en bonne et due forme ou peut-être aborder l’organisation criminelle d’un point de vue complètement différent.
    C’est possible qu’une poursuite ne soit pas la solution et n’ait pas le plus grand effet. Si l’individu n’est pas citoyen canadien, la déportation serait peut-être une meilleure idée ou encore une enquête pour fraude fiscale réalisée par un autre ministère.
    Il devrait y avoir une certaine flexibilité dans les outils à la disposition des enquêteurs. Je crois que nous en tirerons des avantages réels.
    Parfait.
    J’aimerais revenir à l’aspect international et recueillir vos commentaires au sujet de l’importance de la présence accrue du SCRS sur la scène internationale. Les questions portaient notamment sur l’organisme responsable et ce que cela changeait. Vous pourriez, par exemple, nous expliquer les étapes d’une opération visant à démanteler des activités de traite de personnes en Thaïlande. Vous pourriez expliquer comment le tout débute et comment l’opération passe du SCRS à la GRC à un autre organisme quand on arrive au Canada. Enfin, quelles sont les répercussions sur les services de police au Canada?
    Combien de temps me reste-t-il?
    Vous avez environ deux minutes et demie.
    Il est difficile de prévoir comment démarrerait l’enquête, particulièrement en ce qui a trait à la traite de personnes. J’imagine que nous serions très probablement l’organisme responsable au départ. En présumant que le SCRS y prendrait part... Je suis en fait favorable à ce que le SCRS augmente sa présence sur la scène internationale. Selon moi, tout le monde en bénéficie. Tout le pays en tire profit. Présumons que par l’entremise du réseau international du SCRS, des enquêteurs détectent des menaces potentielles à la sécurité nationale ou des menaces terroristes et qu’ils lancent une enquête et obtiennent des renseignements, à savoir que des gens se dirigeraient vers le Canada ou faciliteraient l’immigration clandestine de gens au Canada. Il y aurait alors des discussions à la table de coordination pour déterminer les outils et les capacités que nous pourrions utiliser en vue de peut-être empêcher l’immigration ou de peut-être la perturber, ou de lancer une enquête et de traîner les gens impliqués devant les tribunaux.
    C’est évidemment moins dispendieux pour le Canada d’intervenir à Bangkok qu’à Vancouver.
    Absolument. C’est ce que l’expérience tend à démontrer.
    Oui. Bien sûr.
    Encore une fois, en ce qui a trait à l’aspect international, la GRC participe à de nombreuses opérations internationales aux côtés des Forces canadiennes en Afghanistan, par exemple, ce qui n’est pas donné.
    Quelle est l’importance de ce genre de missions pour la GRC en ce qui a trait à l’acquisition d’une capacité globale dans le cadre d’une opération de combat comme en Afghanistan ou d’une mission comme en Haïti?
    Ces missions sont extrêmement importantes pour un certain nombre de raisons. Premièrement, cela nous donne l’occasion de propager sur la scène internationale la culture et certains principes auxquels la société canadienne tient énormément et de peut-être, nous l’espérons, arriver à les transmettre et à les inculquer aux autres nations.
    Du point de vue de la criminalité, nous aidons les autorités nationales, et les missions nous permettent d’obtenir une certaine stabilité et une certaine capacité en luttant contre la criminalité sur leur territoire, ce qui peut en fait empêcher cette criminalité de faire son entrée au Canada. Encore une fois, c’est extrêmement important.

  (0940)  

    Merci beaucoup.
    Monsieur Rafferty, allez-y, s’il vous plaît.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci aux témoins de leur présence.
    J’aimerais ramener la discussion aux services de police traditionnels. Nous avons parlé de fraudes et de la police internationale. J’aimerais aborder les services de police autochtones, votre soutien aux services de police des Premières Nations dans les provinces et votre travail dans les provinces et les territoires. Par contre, les territoires sont un élément distinct, parce que c’est la GRC qui s’occupe des services de première ligne. Nous allons exclure le Québec et l’Ontario de la discussion, parce que l’OPP s’efforce tant bien que mal de prendre le relais à cet égard.
    La GRC a beaucoup fait dernièrement et dans les dernières décennies pour réaliser des économies. Par exemple, on ne déplace plus autant les agents ou on ne le fait plus sur une courte période.
    Laissez-moi d’abord parler de ce que vous faites dans les provinces et de votre rapport avec les services de police des Premières Nations. Je sais par expérience que les services de police des Premières Nations connaissent des difficultés, et des témoins nous en ont également parlé. En quoi la restructuration aidera-t-elle à nous assurer que les services de police des Premières Nations sont efficaces et que vous êtes en mesure, en tenant compte de vos propres réductions budgétaires, de fournir le soutien dont ils ont besoin, en particulier dans le Nord de l’Ontario où un sous-financement chronique des services de police des Premières Nations a forcé l’OPP à prendre leur relais? L’OPP ne le fait d’ailleurs plus, parce que l’organisme n’en a plus les moyens.
    Auriez-vous un commentaire à faire au sujet de la restructuration et de la façon dont cela fonctionne? Je vous pose la question à tous les deux.
    C’est une question difficile, particulièrement si on fait abstraction du Québec et de l’Ontario.
    Les fonds concernant notre rôle et notre soutien relativement aux services de police des Premières Nations proviennent en fait des crédits autorisés par la Chambre des communes. Au Québec, en Ontario et même dans le reste du pays, à bien des égards, la latitude ou l’avantage de la restructuration pour les services de police des Premières Nations proviendraient de l’établissement des priorités et de notre capacité d’avoir une meilleure vue d’ensemble de ce que nous pouvons faire pour les aider à lutter contre les organisations criminelles qui se livrent à des activités sur leur territoire.
    En Ontario et particulièrement au Québec, nous avons une relation très solide avec les services de police des Premières Nations. Ils font en fait partie de certaines unités mixtes. Il y en a en fait une au Québec qui scrute précisément les activités des organisations criminelles sur le territoire des collectivités des Premières Nations.
    Voilà pourquoi j’ai de la difficulté à vous donner une idée de ce que la restructuration apporterait à l’échelle du pays.
    Je pense également aux aspects économiques et financiers liés au sous-financement chronique de certains services de police des Premières Nations au Canada et à la GRC qui doit prendre leur relais dans des provinces. Si nous prenons seulement les demandes de service et le soutien que vous offrez, alors que vos propres budgets sont amputés, j’ai l’impression que c’est de mauvais augure pour les aspects économiques au pays.
    Je ne peux pas vous contredire à cet égard, mais comme je l’ai mentionné, à mon avis, je ne suis malheureusement pas la meilleure personne pour aborder toute la question des réductions possibles de nos services de police contractuelle.
    Voici par contre ce que je peux vous dire. Comme le gouvernement et le ministre l’ont déjà rappelé à plusieurs reprises, les répercussions de certaines réductions sur les services de police de première ligne seront tout au plus minimes.
    Vous avez fait allusion aux services administratifs. Ces services n’incluent pas nécessairement les analystes du renseignement. Cela concerne davantage certaines procédures administratives de l’organisation.
    Je me risquerais à dire que le ministre a tort...
    Quelle surprise!
    ... lorsqu’il dit que les aspects économiques ne seront pas touchés. Dans la réalité, la GRC prend de plus en plus le relais pour les services de police autochtones et aux Premières Nations, parce que nous avons un autre service de police qui est mal financé. Je ne le comprends pas.
    Vous avez tous deux parlé de possibilités. Donc, quelles possibilités la restructuration apporterait-elle en ce qui a trait aux services de police autochtones et des Premières Nations?

  (0945)  

    Veuillez être très bref.
    Pour ce qui est de nos services de police contractuelle, les possibilités sont vraiment minimes. En ce qui concerne les collectivités autochtones en Ontario et au Québec, la relation est déjà bien en place. En ce qui a trait à la collaboration et à la coordination accrue avec eux en vue de lutter ensemble contre le crime organisé, c’est déjà le cas, et cela se poursuivra.
    Merci beaucoup.
    Nous vous remercions de vos témoignages. Nous avons déjà entendu cela auparavant. Entre 1997 et 2007, les coûts des services de police sont passés de 6 à 12 milliards de dollars.
    Même si M. Scarpaleggia a dit que ce n’était pas seulement les salaires et le personnel qui étaient visés par les réductions, cela représente tout de même de 80 à 85 p. 100 des coûts globaux des services de police. Nous voulons donc nous assurer de trouver, dans d’autres secteurs également, des façons d’assurer plus efficacement la sécurité des Canadiens.
    De plus, si vous avez des suggestions ou d'autres éléments que vous aimeriez ajouter à vos témoignages, je vous prierais de nous les faire parvenir; nous les consignerons.
    À mon avis, nous constatons de la part de tous les partis une compréhension générale que nous devons être plus efficaces dans la prestation des services. Même les services de police le reconnaissent, et je vous remercie d’être venus témoigner en vue de nous aider à comprendre un peu plus le sujet.
    Nous allons suspendre les travaux quelques instants. Nos prochains invités témoigneront par vidéoconférence.

  (0945)  


  (0945)  

    Bienvenue de nouveau à la 69e séance du Comité permanent de la sécurité publique et nationale.
    Nous poursuivons notre étude sur les aspects économiques liés aux services de police au Canada. Pour la deuxième heure, nous avons deux témoins par vidéoconférence. Nous n’en avions pas encore eu jusqu’à maintenant.
    Notre premier témoin se trouve à Burnaby, en Colombie-Britannique; nous avons Curt Taylor Griffiths qui est professeur à l’école de criminologie et coordinateur du programme d’études en techniques policières de l’Université Simon Fraser à Vancouver, au Canada. Il témoigne à titre personnel. À Vancouver, il est actuellement 6 h 45. Il arrivera donc avec nous sous peu. On m’a informé que M. Griffiths est considéré comme un spécialiste dans le domaine des services de police, de la justice communautaire et réparatrice, des services correctionnels, de la réforme judiciaire et du développement social. Il a coécrit divers livres, divers travaux de recherche et divers articles.
    Le deuxième témoin se trouve à Carbondale, en Illinois; nous accueillons également par vidéoconférence Joseph Schafer qui est professeur agrégé au Centre d’études sur la criminalité, la délinquance et les services correctionnels de l’Université du sud de l’Illinois, à Carbondale. Il est président de la Society of Police Futurists International; il est membre du Futures Working Group; et il est futuriste en résidence au département des sciences du comportement de l’Académie du FBI à Quantico, en Virginie. Ses recherches se concentrent sur le leadership policier, le pouvoir discrétionnaire de la police, les organisations policières et l’évaluation des programmes.
    Nous vous remercions de nous aider dans notre étude sur les aspects économiques liés aux services de police au Canada.
    Bienvenue, monsieur Schafer. Nous débuterons par votre exposé.

  (0950)  

    Merci, monsieur le président, et merci aussi aux membres du comité de me donner l'occasion de témoigner devant vous aujourd'hui. Je sais que vous avez déjà entendu des témoignages importants et instructifs, alors je serai bref compte tenu du temps limité dont nous disposons et par souci de ne pas répéter des points que vous avez déjà entendus.
    Les questions d'économie, de viabilité, de coûts et de valeur liées aux services de police sont d'une importance capitale lorsque l'on envisage l'avenir des services de sécurité publique d'une nation. Malheureusement, j'estime que ces questions n'ont généralement pas été prises en compte. Il est plus courant d'injecter des ressources dans les services de police ou autres organismes de sécurité publique ou d'en retrancher sans bien comprendre la façon de maximiser les avantages et de minimiser les inconvénients lorsque ces types de démarches sont nécessaires.
    En conséquence, nous n'avons pas vraiment une idée claire de la bonne façon de procéder pour faire en sorte d'utiliser au meilleur escient possible les fonds publics affectés à la sécurité publique. À mon avis, les aspects économiques liés aux services de police sont d'abord et avant tout des questions de coûts et de valeur. Les coûts sont faciles à comprendre et relativement faciles à mesurer. J'ai raison de croire qu'ils motivent bien des conversations concernant les aspects économiques des services de police et qu'ils sous-tendent fréquemment les décisions budgétaires dans ce domaine.
    Cela dit, les coûts ne donnent pas aux décideurs tous les renseignements dont ils ont besoin pour faire leur travail avec toute la diligence voulue. Les discussions concernant l'aspect économique des services de police doivent aussi tenir compte de la valeur. C'est une question plus subjective mais, en général, quelle est la valeur ou le rendement de l'investissement de fonds destinés à couvrir les dépenses en matière de sécurité publique?
    Ce matin, je me limiterai à cinq thèmes. J'aimerais vous faire remarquer que mon orientation est certainement conditionnée par ma perspective américaine sur la question; il se peut qu'elle vous soit utile par moments et à d'autres, pas. Mon travail, qui consiste à examiner les questions futures s'agissant des services de police, influe aussi sur mon orientation. Je vous encourage, dans le cadre de vos travaux, à ne pas simplement tenir compte de la réalité économique actuelle du maintien de l'ordre et de la sécurité publique au Canada, mais à aussi prendre en compte la façon dont ces réalités peuvent se manifester à l'avenir, situation qui peut parfois être diamétralement opposée à la situation actuelle.
    Premièrement, les mesures du rendement dont nous disposons dans le domaine du maintien de l'ordre sont utiles, même si elles sont imparfaites et d'une portée limitée. Elles ne nous donnent qu'une petite partie des renseignements concernant la capacité des agents de police et des organismes d'influencer les collectivités qu'ils desservent. Bien qu'il soit relativement facile de cerner d'autres indicateurs de rendement qui peuvent nous permettre de bien comprendre l'influence des services de police sur les collectivités, comme la peur de la criminalité, un sentiment de sécurité parmi les citoyens, la prestation de services judiciaires, ces indicateurs sont difficiles à mesurer tant au plan pratique que fiscal.
    Deuxièmement, en regardant les États-Unis, on peut trouver de nombreux exemples de collectivités perturbées qui ont réduit sensiblement les services de police au cours des cinq dernières années et dont les taux de criminalité violente ont monté en flèche. Parallèlement, on peut aussi trouver des exemples d'organismes qui ont fait des réductions de personnel semblables et qui n'ont pas connu une hausse importante de la criminalité grave. La question de savoir si ces distinctions sont une conséquence dans la première administration ou s'il y a d'autres conséquences, comme une hausse des cas de désordre public ou des crimes mineurs est discutable. Il n'existe pas toujours de lien manifeste entre le nombre d'employés d'un poste de police et le taux de criminalité. La réduction de la criminalité, qu'elle soit liée au nombre d'employés ou à d'autres considérations, se fait en fonction de la composition d'une collectivité, des capacités et des compétences d'une force policière et, par-dessus tout, de la façon dont les ressources policières sont orientées et utilisées.
    Là où je veux en venir est que le fait d'augmenter ou de réduire le nombre d'employés en tant que tel n'influe peut-être pas directement sur les taux de criminalité et les cas de désordre public subséquents. Nous croyons comprendre que le lien entre le nombre d'employés et la criminalité est lacunaire. Nous avons besoin d'acquérir plus d'expérience en la matière et de recueillir plus de preuves pour mieux comprendre. Je ferais remarquer que nos connaissances à cet égard se fondent en grande partie sur les données relatives aux zones urbaines. La dynamique pourrait être toute autre dans les administrations qui desservent des petites collectivités rurales ou des Premières Nations. Nous ne le savons tout simplement pas.

  (0955)  

    Troisièmement, il est important que l'on ne juge pas seulement la réussite en fonction du taux de criminalité lorsque l'on aborde l'aspect économique des services de police. Les services de police ont des résultats moins évidents, comme ceux de susciter et de maintenir la confiance du public, de donner un sentiment d'appartenance, de créer un environnement dans lequel les gens se sentent raisonnablement en sécurité et d'offrir aux citoyens des services gouvernementaux de qualité qui répondent à leurs besoins et à leurs attentes.
    Tous ces éléments sont très difficiles à mesurer et, les difficultés économiques que nous avons récemment éprouvées, du moins aux États-Unis, ne montrent pas clairement si les changements récents au budget et à la dotation ont influé sur ces éléments intangibles.
    La valeur tirée des investissements du gouvernement dans la sécurité publique se trouve peut-être au-delà des taux de criminalité et des cas de désordre public signalés. À mon avis, nous ne voulons pas d'une collectivité dont les citoyens sont objectivement en sécurité, mais vivent dans la peur et ne font pas confiance à leurs services de police.
    Quatrièmement, je crois qu'on m'a demandé de témoigner aujourd'hui, car l'un de mes domaines de spécialisation porte sur les études futures relatives aux services de police. Prévoir l'avenir n'est pas un processus qui vise strictement à faire des prédictions; il s'agit plutôt d'un processus pour nous aider à prendre de meilleures décisions dans l'immédiat. Dans les faits, c'est un type de planification stratégique.
    Par souci de concision, je dirais qu'une implication importante des études de l'avenir est le fait qu'on a observé que lorsque les groupes amorcent des discussions concernant l'aspect économique des services de police, il est crucial qu'ils ne tiennent pas toujours pour acquis que les changements futurs seront constants et même linéaires.
    Je vous encourage à examiner plusieurs questions. Par exemple, quels sont les enjeux et les possibilités qui émergeront s'agissant de la perpétration et de la prévention des crimes futurs? Quand, où et comment est-il probable que les citoyens souhaitent bénéficier de services de maintien de l'ordre, situation qui pourrait être très différente de celle que l'on voit aujourd'hui? En quoi les technologies émergentes créeront des enjeux et des possibilités pour ce qui est d'offrir des services de sécurité publique de qualité et aussi de répondre aux besoins auxiliaires, comme la formation et l'éducation du personnel policier? Comment les différences générationnelles entre les personnes qui se trouvent actuellement sur le marché du travail et celles qui y entrent pourraient-elles changer les valeurs et motivations du personnel policier?
    Comment les changements sociaux et technologiques pourraient-ils se manifester dans la façon dont les citoyens souhaitent accéder aux services de police? Aujourd'hui, nous pourrions être portés à croire que la plupart des citoyens préféreraient voir un agent de police en personne lorsqu'ils signalent une expérience dont ils ont été victime. En 2025, par exemple, la victime typique d'un crime pourrait être tout à fait satisfaite de signaler son expérience par voie électronique ou même au moyen d'un système d'intelligence artificielle. Si tel est le cas, cela a des implications de taille pour la prestation de futurs services policiers.
    Comment les transformations émergentes aux plans technologique et social influeront-elles sur les coûts auxiliaires des services de police? Par exemple, comment pourrait-on utiliser les technologies éducatives pour harmoniser le moment où le personnel de police sera formé et la façon dont il le sera?
    Le cinquième et dernier point que j'aimerais soulever est que cette conversation ne devrait pas simplement porter sur la réduction des services de police, du personnel de police ou des deux. Elle devrait tenir compte d'autres façons acceptables d'offrir les services et de les faire offrir par d'autres personnes que le personnel assermenté. Il pourrait s'agir d'utiliser la technologie pour faciliter des échanges entre les policiers et les citoyens qui ne soient pas toujours directs ou en personne. Il pourrait s'agir de faire appel à du personnel civil et bénévole.
    Si l'on envisage cette solution, il ne faudrait pas se borner à ne confier que des tâches ingrates au personnel non assermenté, comme on le fait habituellement. Les civils et les bénévoles pourraient avoir les qualités idéales pour assumer certaines des tâches et des mandats les plus exigeants auxquels les services de police moderne sont confrontés.
    Bien que nous devions mettre ces stratégies en oeuvre avec circonspection, nous devons aussi reconnaître qu'il est possible qu'elles ne puissent pas toujours être appliquées dans les petites administrations en milieu rural.
    J'aimerais insister sur le fait que les coûts ne devraient pas être la seule considération lorsque l'on envisage ces types de transformations. Le comité doit déterminer si le public sera bien servi et raisonnablement satisfait de pareils changements. Estimera-t-il que les services de sécurité publique qu'il reçoit lui en donnent pour son argent?
    Je terminerai en formulant trois petites suggestions.
    Premièrement, je vous encourage à amorcer cette tâche en faisant preuve de clairvoyance. Ne présumez pas qu'il y aura une continuité quant au moment, à l'endroit et à la façon dont les opérations policières seront menées. Ne présumez pas que les attentes du public en matière de sécurité resteront les mêmes. Ne présumez pas que la motivation et les compétences des policiers seront stables. Ne présumez pas que, dans 20 ans, la nature et le nombre de crimes seront les mêmes qu'il y a 20 ans. L'avenir nous offre à la fois des défis et des possibilités. Soyez conscients des défis et trouvez des façons de tirer parti des possibilités.

  (1000)  

    Deuxièmement, gardez à l'esprit qu'il faut parfois beaucoup de temps pour corriger des erreurs lorsqu'il est question de sécurité publique. La décision de ne plus envoyer de premiers intervenants sur les lieux d'un crime pour prendre un signalement pourrait être assez impopulaire au fil du temps, mais il est probable que les conséquences de cette erreur soient minimales et relativement faciles à corriger. En revanche, une décision qui fait en sorte que les comportements délinquants émergents chez les jeunes ne sont pas pris en mains pourrait engendrer une génération de contrevenants futurs, ce qui pourrait prendre des années à corriger.
    Enfin, même si les ressources sont limitées, je vous encourage, en tant qu'universitaire, à continuer de chercher des solutions fondées sur des preuves et à demander l'évaluation fondée sur des preuves de tout changement qui est fait. En 1936, le sociologue Robert Merton a rédigé une dissertation classique dans laquelle il a parlé de ce qu'il qualifiait de « conséquences inattendues du changement social calculé ». Ce que cela signifie dans votre cas, c'est qu'il est important de laisser les preuves et l'expérience guider vos choix. À l'avenir, il sera aussi important d'utiliser des preuves pour faire en sorte que les changements donnent les résultats escomptés. Et par-dessus tout, lorsque l'on cherche à surveiller les résultats, il importe de chercher des choses inattendues, de chercher à détecter les erreurs qui ont peut-être été commises et les avantages inattendus dont on a bénéficié.
    Je félicite le comité et ses membres d'avoir entrepris cette tâche importante et ardue. Je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de m'adresser à vous aujourd'hui. Je serai heureux de répondre à toutes vos questions.
    Merci beaucoup, monsieur Schafer.
    M. Griffiths est maintenant avec nous. Je l'ai présenté tout à l'heure. Du moins je pense qu'il est avec nous. Il semble avoir quitté les lieux. Ce n'est pas grave. Monsieur Schafer, merci. Nous avons essayé d'organiser une vidéoconférence, mais nous avons eu des difficultés avec l'audio à Burnaby, en Colombie-Britannique. Monsieur Griffiths était avec nous, mais il vient de partir. Je crois que nous allons pouvoir reprendre. Peut-être qu'ils sont allés dans une autre pièce; je n'en suis pas certain.
    Nous allons passer à la première ronde de questions.
    Monsieur Schafer et membres du comité, si M. Griffiths revient, je vais probablement faire une pause à ce moment-là et lui donner la parole.
    Monsieur Norlock, pourriez-vous commencer, s'il vous plaît?
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci à vous, monsieur Schafer, d'avoir pris le temps de témoigner devant nous.
    J'aimerais commencer par faire référence au témoin précédent. On s'est demandé s'il est ou non possible de réaliser des économies dans une force policière déployée dont certains postes ont été coupés. J'ai fait partie d'une force policière déployée. Nous avons réussi à le faire en combinant les services administratifs de trois détachements au sein d'une petite administration. Vous pouvez réduire le nombre d'employés de soutien et de postes civils auxiliaires tout en gardant le même nombre d'agents de première ligne sur le terrain.
    Dans la biographie que j'ai lue et certaines des questions que vous avez traitées, ce qui m'intéresse particulièrement ce sont les diverses formes de justice pénale et, bien sûr, le nombre d'années de service d'un agent de police. Avant de quitter la police il y a une douzaine d'années, le système de justice pénal de l'Ontario était en train d'adopter un régime de justice réparatrice. Je pense qu'il trouvait sa source dans le cercle de vie des Maori de Nouvelle-Zélande. Il préconisait l'humiliation positive. La victime et la personne au comportement antisocial étaient envoyées dans la même pièce. Elles ne passaient pas par le système de justice pénale. Cela corrigeait le comportement quasi criminel ou antisocial de la personne et réduisait donc les coûts.
    Je me demande si vous vous êtes penché sur cette question dans le cadre de vos études.  

  (1005)  

    Je ne dirais pas que j'ai de l'expertise personnelle en la matière. Je pense en général que votre évaluation est correcte. Si nous pensons notamment aux personnes qui en sont à leur première infraction ou qui commettent des délits mineurs, il se peut que la façon de réaliser des économies au plan de la sécurité publique soit de cerner des programmes non conventionnels qui permettront de réduire la criminalité à long terme. Elle pourrait nous permettre de réaliser des économies quand les contrevenants ont leurs premiers démêlés avec la justice, mais aussi de réduire leurs risques de récidive, ce qui permettrait donc aussi de réaliser des économies à long terme.
    Merci.
    J'ai aussi remarqué qu'en janvier dernier, vous aviez assisté au Sommet sur les paramètres économiques des services de police. Pouvez-vous nous dire quel était votre rôle à cette occasion et quelles pratiques exemplaires vous avez tirées de ce sommet, s'il y a lieu, ou formuler des suggestions? Vous en avez déjà formulé dans vos remarques liminaires. Je me demande simplement si vous avez autre chose à ajouter, notamment en ce qui concerne votre participation au sommet en janvier.
    Oui, monsieur.
    Selon moi, j'ai fait à peu près la même chose que je fais aujourd'hui: j'ai parlé de prévoir l'avenir, de ne pas simplement s'attendre à une progression linéaire des problèmes dans le milieu de la sécurité publique, et d'être conscient tant des défis que des possibilités émergents.
    Pour ce qui est des commentaires que j'ai formulés tout à l'heure, des exemples très représentatifs de ma vie universitaire normale sont les changements rapides et radicaux dans la façon d'offrir aux gens des occasions d'apprendre, de se servir de la technologie pour réaliser des choses qu'ils auraient été incapables de faire il y a seulement quelques années dans les universités et les écoles secondaires.
    Ce n'est qu'une question de temps avant qu'il soit logique de se pencher sur ces types d'idées et de se demander si nous pourrions optimiser les aspects auxiliaires de la sécurité publique en offrant des séances de formation en ligne au lieu de les offrir en personne à plusieurs douzaines d'employés en même temps. Les possibilités que nous pourrions voir dans ce domaine, même dans les deux ou trois prochaines années, sont à des années-lumière de la façon dont la plupart des gens perçoivent l'éducation et la formation en ligne les 10 ou 15 dernières années. Le milieu sera radicalement différent.
    Je crois que, contrairement à ce que nous pensions de l'éducation en ligne — qu'il s'agissait d'une piètre alternative à la formation en personne —, en réalité, nous allons découvrir des possibilités très intéressantes qui pourraient à la fois rehausser la formation et réduire considérablement les coûts.
    Merci beaucoup.
    J'ai remarqué quelque chose dans les renseignements que j'ai à votre sujet, et je me demandais si vous pouviez nous signaler des forces policières, aux États-Unis ou peut-être dans des pays européens, qui ont des structures semblables à celles que nous avons au Canada et aux États-Unis, mais surtout au Canada. Comment ont-elles composé avec l'aspect économique des services de police face à des modèles de financement stagnants... Lorsque je dis « stagnants », je veux parler de modèles de financement qui sont relativement constants ou qui ne croissent pas de façon exponentielle. Comment ont-ils été capables d'ajuster leur prestation de services tout en maintenant un haut niveau de productivité? C'est-à-dire élucider des crimes et répondre aux attentes de la collectivité, qui, comme vous le savez, ne sont pas toujours les mêmes.
    Je me demandais si vous pourriez donner des exemples à nos chercheurs et peut-être vous prononcer immédiatement parce qu'il est possible que nous convoquions des représentants de ces forces policières ou de ces services de police comme témoins supplémentaires.

  (1010)  

    Soyez bref, car il nous reste environ 30 secondes.
    Oui, je peux certainement y penser et vous fournir d'autres noms.
    Un service qui me vient à l'esprit, avec lequel j'ai eu des échanges, est le Colorado Springs Police Department. Il a une structure fiscale très exigeante qui accroît ses réductions budgétaires. Il a mis en place, selon moi, des stratégies très innovatrices pour régler ces types de questions.
    Merci beaucoup, messieurs Schafer et Norlock.
    Nous allons maintenant entendre Mme Doré Lefebvre.

[Français]

    Vous avez sept minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci beaucoup, docteur Schafer, d'être présent à cette séance du Comité permanent de la sécurité publique et nationale. Vos commentaires sont grandement appréciés.
    Ma première question est liée à la recherche et l'innovation. Plusieurs des témoins qui ont comparu devant le comité ont dit qu'il serait peut-être important d'investir dans la recherche et l'innovation et de créer un ministère ou une agence nationale où il serait bon que les bonnes pratiques soient accessibles à tous les services de police, qu'ils soient urbains ou ruraux, partout au pays. Je sais qu'il y a plusieurs agences de recherche et d'innovation aux États-Unis.
    Selon vous, serait-ce une bonne façon de transmettre l'information entre les différents services de police? Ces types d'agences fonctionnent-ils bien? Est-ce bien utilisé aux États-Unis?

[Traduction]

    En effet, je pense que vous pourriez également établir une distinction dans le cadre de votre discussion au sujet des efforts qui sont déployés pour mettre sur pied un bureau central en matière de recherche, qui constituerait un moyen de centraliser les renseignements disponibles de divers organismes. En consultant des délibérations précédentes, on constate que le comité a été informé que des discussions ont eu lieu au sujet du site Web CrimeSolutions.gov.
    Le centre du maintien de l'ordre axé sur la résolution de problèmes permet à des organismes de faire profiter à d'autres des projets de recherche et d'expérimentation de petite envergure qu'ils ont achevés. Les données sont ensuite recueillies et compilées pour que d'autres organismes puissent tirer des leçons. Je pense que c'est une façon relativement peu coûteuse de centraliser les connaissances.
    L'autre façon correspond peut-être davantage à l'approche de notre National Institute of Justice et aux méthodes qu'adopte notre gouvernement fédéral pour financer et appuyer la création de nouvelles connaissances. Je pense qu'il est important de savoir qu'il y a une distinction. Ces deux activités sont certes très importantes, mais lorsque les conjonctures économiques sont difficiles, il peut être encore plus difficile d'investir massivement dans la création de nouvelles connaissances. Si l'on voulait adopter une approche légèrement plus austère, on pourrait simplement créer un mécanisme au moyen duquel les organismes pourraient échanger sur leurs expériences et sur les pratiques exemplaires.

[Français]

    Je vous remercie beaucoup.
    J'ai une brève question en lien avec la privatisation des services de police. Vous êtes peut-être plus familier que nous avec ce type de fonctionnement. Comment voyez-vous la privatisation des services de police?
    Je sais que cela se fait plus fréquemment aux États-Unis. Cela fonctionne-t-il bien? Proposeriez-vous une telle mesure?

[Traduction]

    Il faut aborder la privatisation avec beaucoup de circonspection. À l'évidence, les coûts de fonctionnement de tous les organismes du gouvernement et de la fonction publique peuvent être quelque peu exorbitants et ne sont peut-être pas aussi modérés que dans une société privée. À mon avis cependant, il y a aussi du vrai dans le dicton populaire selon lequel on en a pour son argent. Je pense parfois que la privatisation — qui est de plus en plus courante aux États-Unis, quoiqu'il y ait encore une combinaison de sociétés publiques et privées —, même si elle permet de réaliser des économies, réduit également la valeur. Cela nous amène au sujet subjectif que j'ai mentionné incidemment tout à l'heure, à savoir qu'il est un peu propre à chacun de décider s'il est disposé à accepter un service de qualité moindre en échange d'une réduction des coûts pour ce service.
    Je pense que des économies peuvent certainement être réalisées mais, pour ce faire, il faut s'attendre à ce que du personnel moins formé, moins équipé, moins préparé et moins instruit s'acquittera des tâches. C'est certainement fonction de ce que nous espérons que les gens fassent. Nous pouvons voir des exemples aux États-Unis d'efforts de privatisation très réussis. Lorsqu'il s'agit de tâches discrètes, précises et restreintes en matière de maintien de l'ordre qui correspondent davantage à des fonctions réservées à des agents de sécurité, il est peu logique qu'un agent assermenté, équipé, en uniforme et à temps plein s'acquitte de ces tâches. Quant à savoir si des agents de sécurité privés devraient assumer des fonctions plus vastes en matière de patrouille pour assurer la sécurité publique et le traitement des incidents, je pense que c'est une question beaucoup plus complexe.

  (1015)  

[Français]

    Je vous remercie beaucoup.
    Au début de votre intervention, vous avez parlé d'approches plus collaboratives entre les services de police et, si j'ai bien compris, les différents services sociaux.
    On a perdu l'éclairage. On ne vous voyait plus.

[Traduction]

    Oui, je pense que je suis demeuré assis trop longtemps.

[Français]

    Il a été question de collaboration entre divers services, notamment les services médicaux, sociaux et policiers.
     Selon vous, est-ce que cela pourrait être utile dans le cadre de la lutte contre les gangs de rue? Est-ce que cela pourrait contribuer à éloigner les jeunes de la criminalité? Croyez-vous que l'on devrait mettre l'accent sur cette approche?

[Traduction]

    Je répète que ce n'est pas certain à 100 p. 100. Il y a des stratégies qui ne se sont pas révélées efficaces. De nombreuses stratégies ont été fructueuses, où nous n'avons pas rejeté les responsabilités uniquement sur le dos des policiers au moyen d'une approche de collaboration plus intégrée pour lutter contre la délinquance, les activités des gangs, la violence en milieu urbain et la toxicomanie, ainsi que pour répondre aux besoins des personnes atteintes de maladie mentale. La collaboration de la police avec d'autres intervenants communautaires et des spécialistes dans les domaines de la santé, de l'éducation et de la sensibilisation du public peut donner des résultats très positifs. Je pense qu'il est très important d'explorer des façons de penser non traditionnelles pour trouver des solutions à ce type de problèmes.

[Français]

    Merci.

[Traduction]

    Merci beaucoup, monsieur Schafer.
    Nous allons maintenant entendre M. Payne, pour sept minutes. Allez-y, je vous prie.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur, de nous avoir fait part de vos connaissances.
    Dans votre déclaration préliminaire, vous avez parlé de la notion d'en avoir vraiment pour son argent, comme je l'appelle. Je pense que vous l'avez qualifié de rapport qualité-prix. Vous avez mentionné un secteur des services de police de Colorado Springs. Je pense que vous avez dit que c'était un bon corps policier qui fait de l'excellent travail. Je sais que vous êtes prêts à envoyer de l'information, mais je m'interroge sur certains points.
    Premièrement, pourriez-vous nous fournir un peu plus de détails à ce sujet?
    Deuxièmement, savez-vous si d'autres corps policiers échangent des pratiques exemplaires et, le cas échéant, lesquels? Serait-il bon pour nous au Canada de nous pencher sur ces forces ou sur celles d'un autre pays que vous connaissez?
    Absolument. Je serai mieux en mesure de vous donner le nom d'organismes précis lorsque j'aurai eu la chance d'examiner des documents après la séance d'aujourd'hui.
    La seule mise en garde que j'ai faite dans ma déclaration préliminaire et que je vais répéter est la suivante: Ce que nous savons de l'expérience américaine provient ordinairement d'organismes d'assez grande taille ou en milieu urbain, peut-être pas de Chicago, mais d'une banlieue de Chicago. Ce que nous savons sur ces questions dans des municipalités de plus petite taille, dans des régions plus rurales, et ce qui pourrait être efficace ou non dans les territoires des Premières Nations, c'est une toute autre histoire, je pense. Nous devons faire attention, tant aux États-Unis qu'au Canada, de ne pas tenir pour acquis que ces expériences s'appliqueront dans tous les cas.
    En ce qui concerne Colorado Springs, j'ai eu l'occasion de visiter cette communauté il y a environ un an et demi. L'une des questions qui a donné du fil à retordre aux services de police, c'était celle des compressions budgétaires radicales et de l'effet domino qu'aurait une réduction du nombre de patrouilleurs.
    Ils ont réagi en créant des solutions de rechange pour gérer des priorités courantes mais faibles, ce que l'on qualifie souvent d'infractions à faible solvabilité. Les vols dont la valeur est inférieure à un montant donné, les cas où il n'y a aucun témoin ni de preuve médico-légale et les crimes de ce genre ont malheureusement peu de chances d'être résolus. Au lieu d'envoyer un agent en uniforme lorsqu'un incident est signalé, on encourage les citoyens à se rendre sur un site Web pour discuter avec un agent qui est en service réduit à la station de police et qui remplira un rapport par téléphone. D'après leur expérience, ce type d'incidents peut bien souvent être réglé sans être obligé d'envoyer un policier sur place. Cependant, le personnel de ce service vous mettra sans doute en garde que même si les policiers ont fait du bon travail et ont pu s'assurer que les patrouilleurs peuvent se concentrer sur les crimes graves et violents, on craint d'avoir sacrifié dans une certaine mesure la qualité du travail dans les infractions mineures contre les biens pour privilégier le travail à l'égard des crimes graves et violents.
    Je peux certainement mettre votre personnel en contact avec certaines personnes de cet organisme avec qui j'ai travaillé. Je suis convaincu qu'elles seront ravies de vous parler de leurs expériences.

  (1020)  

    D'accord.
    Savez-vous si d'autres organismes échangent des pratiques exemplaires dont nous pourrions peut-être bénéficier?
    Oui, je pense que des efforts sont déployés. L'Association internationale des chefs de police s'est penchée sur ces questions. Le Police Executive Research Forum, ou PERF, a préparé des publications et a examiné quelques-unes de ces questions également. Je ne suis pas certain, mais à première vue, je soupçonne la Fondation de la police d'avoir étudié le dossier aussi. Ce sont là trois bons points de départ, même si je suis persuadé que j'oublie en ce moment d'autres efforts qui sont déployés.
    D'accord.
    Monsieur, pourriez-vous décrire les tendances actuelles relativement aux taux de criminalité aux États-Unis et l'incidence qu'elles ont eue sur les services de police? Ces tendances sont-elles comparables à celles au Canada?
    Je pense que le taux de criminalité au cours des cinq dernières années, à la suite du ralentissement économique, a défié le raisonnement conventionnel des criminologues. Au début de la récession, on a beaucoup discuté du fait que l'on prévoyait que la criminalité augmente sensiblement et que s'en était finie de la période de 15 ans et plus caractérisée par une baisse de la criminalité.
    Règle générale, c'est plutôt le contraire qui est survenu. Nous avons enregistré un taux de criminalité stable, dans certains cas, ou en baisse. On pourrait certainement citer de nombreux exemples pour réfuter cet énoncé. C'est une affirmation très générale. On peut trouver des sources qui ont tendance à procéder au cas par cas et à dire, « Eh bien, les vols dans cette communauté ont augmenté de 15 p. 100 au cours de la dernière année ». Ce ne sera pas une affirmation qui s'applique à tous les cas, mais nous n'avons pas vu les contrecoups et les conséquences.
    Je vais répéter une chose que j'ai dite dans ma déclaration liminaire. Nous ignorons encore certaines choses. Premièrement, nous ne savons pas encore s'il y a clairement eu une incidence sur la satisfaction des citoyens, sur la peur de la criminalité et sur le sentiment de sécurité. Deuxièmement, il est peut-être encore trop tôt pour dire si l'abolition de certains programmes et initiatives pour les jeunes — je ne pense que nous le sachions ou en ayons une idée pour l'instant — pourrait donner lieu à une génération future de contrevenants qu'on n'éloigne pas des mauvais choix. Lorsque les gens s'engagent dans cette voie, si nous n'avons pas les bonnes interventions et les systèmes de détection précoce en place, la situation peut très rapidement échapper à notre contrôle. Je ne pense pas que nous puissions dire aux États-Unis que nous allons échapper aux problèmes associés à ce ralentissement économique.
    Merci beaucoup, monsieur Schafer.
    Nous allons maintenant entendre M. Scarpaleggia. Allez-y, je vous prie.
    Vos remarques étaient très intéressantes, monsieur Schafer.
    Pour répondre au dernier argument que vous avez soulevé au sujet de l'économie et de la criminalité, ne serait-il pas juste de dire que la criminalité entraîne plus de répercussions à long terme, dont bon nombre sont d'ordre économique? Par exemple, le problème du chômage chez les jeunes qui subsiste depuis de nombreux cycles économiques donne parfois lieu à une sous-classe criminelle liée aux gangs et à une sous-culture de la drogue.
    On a du mal à comprendre intuitivement que si une personne est mise à pied à l'usine locale de GM, elle ira soudainement dévaliser une banque ou peu importe. Diriez-vous que les répercussions se font sentir plus à long terme et sont, comme vous le dites, peut-être endémiques, et que si nous ne réglons pas rapidement le problème du chômage chez les jeunes, nous finirons par créer un problème persistant qui pourrait ne disparaître qu'avec une population vieillissante?

  (1025)  

    Tout à fait. Je commencerai par dire que je ne suis pas un expert dans ce type de recherches sur l'économie et la criminologie qui sont menées à l'échelle macroscopique. J'estime que notre expérience passée aux États-Unis avec la criminalité en période de ralentissement économique nous porte à croire que les conséquences devraient être plus manifestes qu'elles ne le sont. On peut certainement soutenir que les effets se feront sentir plus tard. Le lien n'est pas direct. Cela n'a rien à voir avec le père de famille qui perd son emploi à l'usine de GM. Ce qui importe, c'est ce qui se passe lorsqu'il perd son emploi, n'arrive pas à s'en trouver un autre, sombre dans la dépression et l'alcoolisme et néglige son fils, qui finit par faire des mauvais choix plus tard.
    Vous avez tout à fait raison lorsque vous dites que nous devons faire bien attention de ne pas croire que nous avons esquivé le problème aux États-Unis, pour ainsi dire, simplement parce que nous ne voyons pas les résultats immédiats. C'est un ensemble de liens très complexes, dont bon nombre ont des effets à long terme et sont très difficiles à démêler ou à corriger.
    Merci.
    Vous avez mentionné l'idée d'avoir recours à des volontaires civils. Vous avez fait valoir l'argument, peut-être prématurément, que vous ne parliez pas uniquement de créer des groupes de surveillance de quartier, que vous pensiez que des volontaires bénévoles pourraient assumer un rôle plus complexe, pour ainsi dire, dans le maintien de l'ordre. Pourriez-vous nous donner de plus amples détails là-dessus?
    Oui. Aux États-Unis, nous avons tendance à penser que les bénévoles accomplissent des tâches subalternes, et c'est généralement ce que je dis lorsqu'on parle des forces policières américaines. On a tendance à penser que les bénévoles sont mobilisés lorsqu'il y a des festivals communautaires et qu'il faut une personne pour assurer la surveillance à une barricade et bloquer la circulation. Ce n'est pas une tâche qui exige des compétences particulièrement pointues, mais c'est important. Nous avons tendance à croire que les bénévoles sont ceux qui accomplissent les tâches subalternes liées à la sécurité et à l'ordre public et qui aident dans les tâches administratives très faciles.
    J'ai entendu dire que ces dernières années, des organismes aux États-Unis ont formé des bénévoles civils pour recueillir des preuves médico-légales sur des lieux de crimes afin de pouvoir affecter le personnel formé à des incidents plus graves. Vous avez des cambriolages où les preuves médico-légales sont assez simples à recueillir: photographier les lieux, appliquer la poudre pour prendre les empreintes digitales, vérifier s'il y a des marques d'outils, ce genre de choses. En demandant à des civils d'assumer ce genre de tâches peu prioritaires pour ces crimes moins graves qui sont nombreux et qui monopolisent énormément de ressources, le personnel formé peut ainsi se concentrer sur les crimes violents plus complexes.
    Je ne suis pas certain dans quelle mesure le milieu juridique s'est penché pour vérifier l'admissibilité des preuves dans les tribunaux américains. Cela nous ramène au rapport qualité-prix et à la question de savoir si nous sommes disposés à compenser les économies réalisées.
    Oui, car les preuves sont indispensables et vous devez donc vous assurer que les personnes qui doivent rendre des comptes...
    Absolument.
    ... les experts qui recueillent les preuves, j'imagine.
    Il y a toute la question des indicateurs, qui semble être très complexe. Comment mesurez-vous l'incidence du maintien de l'ordre? Est-ce uniquement en termes de PIB perdu? Comment mesurez-vous l'incidence d'un crime où une grand-mère de 95 ans qui s'est fait voler ses économies de toute une vie doit déménager dans le sous-sol de sa fille, et ainsi de suite? Ce doit être l'un des aspects les plus difficiles: élaborer des indicateurs solides et significatifs sur lesquels on s'entend pour dire qu'ils mesurent les répercussions. J'imagine que c'est l'une des plus grandes difficultés.

  (1030)  

    Absolument. Je suis tout à fait d'accord avec vous sur ce point. Il s'agit d'acquérir une compréhension vraiment précise de l'économie qui dépasse les simples données sur les salaires et les avantages liés aux répercussions du crime, et aussi de mesurer, au-delà du taux de criminalité, l'influence moins tangible de la police et des responsables de la sécurité publique.
    Vous avez aussi dit que la privatisation réduit la valeur. Pouvez-vous nous expliquer ce que vous voulez dire par là?
    Je ne dirais pas nécessairement qu'il en irait ainsi dans toutes les situations, mais je pense que dans certains cas, la privatisation est une bonne idée et peut entraîner des économies.
    Nous avons aussi vu l'expérience aux États-Unis où, à long terme, on a déterminé que la privatisation était coûteuse, ou plus coûteuse que si on avait simplement laissé les choses sous contrôle gouvernemental. On commence à en voir des exemples et des preuves aux États-Unis, dans le cas de la privatisation des prisons et des pénitenciers.
    Merci beaucoup.
    Merci beaucoup.
    Je devrais aussi mentionner — ce que j'ai peut-être déjà fait — que nous ne passerons pas aux travaux du comité.
    Nous revenons à M. Rafferty.
    Merci beaucoup, monsieur le président. Cette discussion est fascinante.
    Merci d'être ici, monsieur Schafer.
    Je dois faire un commentaire sur les questions de tous les intervenants. Elles sont vraiment de très grande qualité. J'apprends beaucoup.
    Une des choses dont vous avez parlé était de poser des questions sur ce que nous réserve l'avenir. Lorsqu'on pense à l'avenir des services de police, j'ai un peu de difficulté à faire des prédictions. Je regarde peut-être trop de science-fiction. Je n'arrive qu'à penser au film Les robots.
    Vous avez mentionné certaines questions que vous poseriez. Si je vous demandais de penser à l'avenir, à votre avis personnel, quel genre de choses pourrait se produire au sein des services de police dans 10, 20 et 50 ans? Que devrions-nous étudier?
    Un des enjeux auxquels j'ai fait allusion dans cette question était lié aux attentes du public sur le moment, l'endroit et la façon dont les services de police sont offerts. De plus, je pense que pour la plupart des gens de plus de 25 ou 30 ans, la notion selon laquelle nous n'aurions habituellement pas de contact avec un policier en chair et en os lorsque nous sommes victimes d'un crime, mais plutôt des communications par l'intermédiaire d'un ordinateur, d'un téléphone ou de quelque autre genre de dispositif de télécommunications relié à un système informatique géré par l'intelligence artificielle pour signaler le fait qu'on est victime est une notion difficile à imaginer et à comprendre, et c'est probablement à l'antithèse de l'idée traditionnelle que l'on a sur l'interaction des citoyens avec le gouvernement.
    Les jeunes d'aujourd'hui grandissent de plus en plus dans un monde moins axé sur le contact en personne et où l'on a davantage recours à la technologie comme mode de communication. Dans 10 ans, lorsque de telles technologies seront plus accessibles, peu coûteuses et d'une très grande qualité sur le plan technique, ces gens, lorsqu'ils arriveront à l'âge adulte, pourraient être indifférents au fait d'avoir à signaler le fait qu'ils ont été victimes par l'intermédiaire d'un système informatique qui peut comprendre ce qu'on lui dit et poser des questions complémentaires plutôt qu'à une personne, comme dans le cas du cambriolage dont j'ai été victime, par exemple. Par conséquent, nous ne devrions pas nécessairement présumer que le public s'attendra toujours à être servi en personne par un patrouilleur qui pourra valider le fait qu'on a été victime d'un crime.
    Peut-on prévoir, à votre avis, que la nature du crime demeurera inchangée à l'avenir? Autrement dit, ce que nous voyons aujourd'hui n'a pas toujours existé dans le passé et n'existera peut-être pas dans le futur. Je pense maintenant à l'incidence sur les coûts, en particulier, pas seulement par rapport à la technologie, mais peut-être pour d'autres aspects.
    Je crois que cela dépend quelque peu de l'idéologie d'une personne. Il y a une école de pensée selon laquelle tout crime est un vol, fondamentalement; si quelqu'un me vole, on me vole, et je vis ce vol. Si quelqu'un m'agresse, mon intégrité physique et mon sentiment de sécurité diminuent. Si une personne est tuée, il y a perte de vie et donc une perte de productivité et d'interaction. On pourrait affirmer sans crainte que même s'il y a certainement une grande évolution des méthodes employées par les gens pour commettre des crimes, fondamentalement, la criminalité découle toujours du même ensemble de circonstances avec lequel nous avons composé dans le passé, c'est-à-dire le vol et le vol qualifié, les agressions et les crimes à caractère sexuel et des choses de cette nature. Les circonstances et les détails peuvent varier, mais fondamentalement, on peut faire valoir qu'il s'agit toujours des mêmes problèmes de criminalité que nous avons eus dans le passé.

  (1035)  

    J'ai une autre brève question qui est directement liée à l'économie. Lorsque vous pensez à l'avenir, étant donné tous les changements qui peuvent survenir dans l'économie et dans le monde, croyez-vous que les services de maintien de l'ordre pourraient devenir moins coûteux?
    Je pense que c'est probablement une question de savoir dans quelle mesure nous voulons répartir ce coût. Je crois qu'il pourrait y avoir une politique comptable dans laquelle on indiquerait que si nous équilibrons certains aspects des services de police, que nous en confions la responsabilité au secteur de la santé mentale et que nous demanderons l'aide de ces organismes de services communautaires pour la mise en oeuvre d'une stratégie de réduction des activités des gangs, il serait possible de réduire le budget des services de police. Cependant, ce qui est le plus difficile à comprendre en ce qui a trait à l'investissement global en sécurité et en prévention de la criminalité pourrait demeurer inchangé, même si, encore une fois, cela sous-entend une certaine constance du nombre de policiers. Si la technologie évolue au point où d'importants volets des opérations policières peuvent être accomplis par l'intermédiaire de la technologie plutôt que par des personnes, il serait possible de réaliser de très grandes économies si nous n'avons plus besoin d'un grand nombre de gens, d'importants segments d'une force parce que nous avons d'autres façons d'offrir le même service.
    Merci beaucoup, monsieur Rafferty.
    Monsieur Gill.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais aussi remercier M. Schafer d'être disponible et de nous aider dans cette importante étude.
    Monsieur Schafer, je me demande si vous pourriez nous indiquer dans quel secteur les forces policières pourraient trouver des économies et nous faire part de vos recommandations à cet égard. Avez-vous des recommandations personnelles sur les secteurs qui vous semblent prometteurs?
    Je serais quelque peu réticent à m'aventurer trop loin dans ce débat puisque je ne fais partie d'aucun corps policier ni de services de police canadiens, sachant que même s'il existe beaucoup de parallèles entre les services de police américains et canadiens, il y a aussi d'importantes différences.
    Cela dit, je pense que la réponse sera probablement assez différente dans le cas d'importants corps policiers — la GRC et les corps provinciaux — comparativement à certains services très petits et les services de police des Premières Nations, où l'on ne pourrait trouver que très peu d'économies.
    Les pratiques fondées sur des données probantes constituent à mon avis un important indicateur qui nous permet de nous assurer que les pratiques que nous adoptons et que nous considérons comme essentielles produisent vraiment les résultats souhaités. Si nous pensons qu'elles n'offrent pas un rendement suffisant, certaines pratiques, même si elles sont utiles, pourraient faire l'objet d'un examen quant à savoir s'il est nécessaire de continuer d'affecter du personnel ou d'assumer ce genre de rôle et de responsabilité. Cela pourrait se faire sous forme de services communautaires précis ou de services de prévention de la criminalité, d'unités ou de programmes qui pourraient être offerts par un organisme important. Cela pourrait même soulever des questions quant à savoir s'il est logique de demander aux services de police de s'occuper de certaines questions d'ordre communautaire étant donné leur gravité relative par rapport aux autres tâches confiées aux services de police et au temps qu'il faut y consacrer.
    Même si j'hésite à faire une liste des tâches et responsabilités précises dont il serait question, je pense qu'il y a des façons d'aborder le débat, au demeurant très complexe.
    Pourriez-vous aussi parler de vos recommandations sur la façon d'offrir des services de sécurité publique de qualité à une époque où les ressources financières sont limitées et de sabrer les dépenses de façon vraiment logique?

  (1040)  

    Dans une certaine mesure, je pense que cette institution et le travail qu'elle fait constituent de très importantes étapes à cet égard.
    Je cherche à savoir dans quelle mesure il conviendrait d'avoir des discussions à ce sujet avec les citoyens pour savoir ce qu'ils en pensent. Je me demande souvent, par rapport aux services offerts dans n'importe quel ministère et que le personnel de ces ministères considère comme essentiels, c'est-à-dire que ce sont les tâches que demande le public, si le public leur accorde vraiment autant de valeur. Le public croit-il vraiment qu'ils ont autant d'importance? Le public souhaite-t-il que nous maintenions ce service, particulièrement dans des temps difficiles, connaissant les coûts relatifs?
    Je pense qu'une des façons d'obtenir des réponses à ce genre de questions est aussi de trouver des façons de consulter les gens du public et les membres de diverses communautés pour savoir ce qui leur tient à coeur, ce qu'ils croient important et ce qu'ils veulent voir, c'est-à-dire leur idée de ce que seraient des services de police de qualité.
    Merci beaucoup, monsieur Gill.
    Merci beaucoup, monsieur Schafer.
    Avant de retourner à M. Garrison, j'aimerais poser une petite question.
    Nous avons un peu parlé de la façon dont différentes autorités ont réduit les coûts. Je peux vous raconter une anecdote.
    Je devais avoir une rencontre avec un sergent d'état-major et la réunion a été reportée parce qu'il devait faire un trajet d'une heure et demie pour comparaître devant le tribunal. La réunion n'a pas eu lieu. Plus tard, j'ai appris qu'il avait conduit jusqu'à Edmonton et que la personne — le défendant, je suppose — ne s'est pas présentée. Le sergent d'état-major a voyagé deux heures pour s'y rendre, deux heures pour en revenir. Il a dit que c'était la deuxième fois que cela se produisait dans ce dossier.
    Manifestement, il y a un coût énorme associé au fait de demander à un sergent d'état-major de la GRC de parcourir une telle distance et de consacrer autant de temps en vain, parce que la personne ne se présente pas.
    D'autres ministères jouent sans doute un rôle dans la mise en oeuvre des compressions, dans ce cas, pas seulement pour ce qui est de l'application de la loi, mais aussi du système judiciaire. Y a-t-il des études qui démontrent de quelle façon on peut réduire les coûts dans d'autres ministères? Nous avons déjà entendu parler de l'incidence énorme de la santé mentale sur le coût des services de police. Connaissez-vous des études qui pourraient aider le comité à réduire les coûts dans d'autres secteurs, comme la justice, par exemple?
    De mémoire, je ne saurais le dire, mais je pense qu'il s'agit sans aucun doute d'un élément essentiel à la discussion. Il est peut-être un peu plus difficile de répondre parce que c'est lié aux pratiques d'autres organisations.
    Je ne me rappelle pas qu'il y ait eu des études à ce sujet aux États-Unis.
    Merci.
    Monsieur Garrison.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je sais qu'il nous reste peu de temps; par conséquent, je vais omettre mon préambule partisan à cette question.
    Des voix: Bravo!
    M. Randall Garrison: Monsieur Schafer, dans vos suggestions, vous parlez de solutions fondées sur des preuves. Je me demande si vous avez des exemples particulièrement pertinents, soit positifs, soit négatifs, de solutions qui ont été adoptées et qui étaient ou non fondées sur des preuves concluantes.
    Oui. Je pense qu'aux États-Unis, on trouve un large éventail d'exemples où l'on étudie de façon générale les questions de prévention de la criminalité et de sécurité publique. Je crois qu'en raison du décalage pour la production des données probantes émanant de la recherche par les chercheurs, les données liées à cette série de questions précises sur la question de savoir si certains changements fondés sur la situation économique pourraient permettre d'obtenir des résultats concluants ne sont pas encore facilement accessibles.
    Je pense que certains aspects dont vous parlez peuvent probablement être trouvés sur le site CrimeSolutions.gov, notamment le centre de maintien de l'ordre axé sur la résolution de problèmes et d'autres entités vouées à la coordination des pratiques exemplaires, parce que le coût fiscal est souvent abordé dans ces discussions.
    Si je vous demandais de nommer un ou deux services de police des États-Unis qui ont été particulièrement novateurs pour régler ces questions liées aux coûts, y a-t-il un ou deux exemples qui sont, à votre avis, des exemples de pratiques exemplaires et avant-gardistes à cet égard?
    Sans doute, en fonction de l'expérience que j'ai eue avec ces gens, je pense que Colorado Springs est un très bon modèle, en partie parce que leurs expériences n'ont certainement pas été une panacée. Ils ont vraiment travaillé fort pour régler certaines questions de régie interne importante quant à savoir s'ils devaient sacrifier la valeur d'un secteur pour préserver celle d'un autre. À mon avis, c'est plus honnête et plus normatif. Je serais quelque peu sceptique à l'égard d'organismes qui font croire que c'est vraiment facile et sans douleur.

  (1045)  

    Merci beaucoup.
    Merci.
    Monsieur Schafer, nous tenons à vous remercier d'avoir témoigné. Le temps est écoulé. Nous avons eu des problèmes avec le dispositif audio, dans le cas de notre témoin de Vancouver, vous avez pris la relève et avez répondu à l'ensemble des questions plutôt qu'à la moitié. Nous sommes reconnaissants de votre expertise. Nous vous remercions de vos suggestions sur les endroits que nous devrions étudier. Vous avez parlé de Colorado Springs plusieurs fois. Merci.
    Aussi, si vous connaissez d'autres études ou si, en répondant à une question, vous aviez le sentiment que vous auriez pu en parler davantage — je vous ai peut-être interrompu — nous vous invitons à envoyer ces informations au comité, si cela ne vous dérange pas. Nous vous sommes reconnaissants d'être venu ici aujourd'hui.
    Ce fut un plaisir. Merci beaucoup à chacun d'entre vous.
    Merci.
    Le temps est écoulé. La séance est levée.
Explorateur de la publication
Explorateur de la publication
ParlVU