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SECU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent de la sécurité publique et nationale


NUMÉRO 046 
l
3e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 8 décembre 2010

[Enregistrement électronique]

  (1545)  

[Traduction]

    La séance est ouverte.
    Bonjour à tous.
    Nous sommes un peu en retard, et nous nous excusons auprès de Mme Morin. Il y avait des votes en Chambre, et comme tous les membres le savent, il est important que nous soyons présents lorsque des votes ont lieu.
    Nous vous souhaitons tous la bienvenue à la 46e séance du Comité permanent de la sécurité publique et nationale. Nous sommes le mercredi 8 décembre 2010.
    En deuxième heure, nous nous attendons à pouvoir passer aux travaux du comité. Durant la première heure, notre comité aura une séance d’information sur le Service canadien du renseignement de sécurité. Nous entendrons le témoignage de Mme Marie-Lucie Morin, ex-conseillère à la sécurité nationale auprès du premier ministre et secrétaire associée du Cabinet, qui comparaît devant nous aujourd’hui.
    Nous vous remercions de pouvoir comparaître devant nous aujourd'hui. Je veux également vous féliciter des nouvelles fonctions que vous occupez. Nous avons hâte d’entendre votre déclaration préliminaire.
    Nous allons passer à votre déclaration préliminaire, mais je vois que M. Holland lève la main.
    Je veux signaler quelque chose au sujet du deuxième point à l'ordre du jour. Si vous le demandez, je me demande s'il y aurait consentement unanime pour que nous discutions de l'étude sur la santé mentale et la toxicomanie durant la deuxième heure. Nous l'avons presque terminée. Nous voulions vraiment la terminer avant de partir pour le congé des Fêtes.
    Nous pouvons peut-être attendre jusqu'à ce que nous commencions les travaux de comité.
    Allez-y, monsieur Davies.
    Merci, monsieur le président.
    Par respect pour Mme Morin, qui prend le temps de comparaître devant nous aujourd'hui, même si elle est très occupée, et qui est venue de loin, je me demande si nous pouvons nous assurer de discuter une heure avec elle. Comme la deuxième heure n'est réservée que pour les travaux du comité, nous pouvons peut-être prendre une heure complète et ensuite réduire la deuxième heure à 45 minutes.
    Madame Morin, pouvez-vous rester une heure?
    Merci beaucoup.
    D'accord. Madame Morin, nous... Oh, je suis désolé. Allez-y, monsieur MacKenzie.
    Je sais que nous en avons parlé et que nous n'avons pas eu la confirmation sur ce que M. Holland a dit. De notre côté, nous avions demandé d'aller de l'avant avec notre motion qui vise à procéder à une étude article par article de notre projet de loi C-23B.
    Nous pourrons en discuter lorsque nous passerons aux travaux du comité.
    Allez-y, s'il vous plaît, madame Morin.
    Merci beaucoup, monsieur le président.

[Français]

    Membres distingués du comité, c'est un grand plaisir pour moi d'être avec vous aujourd'hui.

[Traduction]

    Étant donné que je n'ai pas préparé de déclaration préliminaire, je suis à la disposition du comité aujourd'hui. Je vous cède la parole, monsieur le président.
    Merci beaucoup.
    D'accord. Nous passons à notre première série de questions. Le sujet d'aujourd'hui découle d'une motion qui visait à ce que nous nous penchions sur le Service canadien du renseignement de sécurité.
    Monsieur Holland, vous disposez de sept minutes.
    Merci beaucoup. monsieur le président.
    Madame Morin, merci de comparaître devant le comité aujourd'hui. Je ne sais pas si vous suivez les travaux du comité. Comme vous le savez peut-être, M. Fadden a comparu devant le comité pour parler des propos qu'il a tenus à la chaîne de télévision CBC sur l'idée que certains élus municipaux étaient sous l'influence — peu importe ce que cela signifie — de gouvernements étrangers, et que les gouvernements étrangers exerçaient un contrôle sur des citoyens canadiens en tentant d'influencer la politique canadienne.
    J'ai eu l'occasion de sillonner le pays et de m'entretenir avec un grand nombre de groupes qui pensent que ces affirmations très générales ont un effet très négatif sur eux. Ils ont l'impression qu'on les surveille constamment et que des soupçons planent sur eux.
    En ce qui concerne ces propos, M. Fadden a dit qu'il avait parlé de ses préoccupations au centre — le centre étant vraisemblablement le BCP, et peut-être vous.
    Avez-vous discuté de ce type de préoccupations avec M. Fadden?

  (1550)  

    Merci de la question.
    Tout d'abord, je suis au fait de la séance à laquelle M. Fadden a comparu en juillet dernier. Au début de l'année 2010, M. Fadden m'avait bel et bien dit qu'il avait l'intention de me mettre au courant de problèmes concernant l'ingérence étrangère à un moment donné.
    J'aimerais ajouter que bien entendu, la question de l'ingérence étrangère n'est pas nouvelle. Il y a une raison pour laquelle on a prévu cette question dans la loi en 1984 pour ce qui est des pouvoirs du SCRS. Nous sommes conscients de la vulnérabilité de notre pays depuis très longtemps.
    M. Fadden a dit qu'il voulait vous mettre au courant. L'a-t-il fait?
    Il ne l'a pas fait à ce moment-là.
    À quel moment vous a-t-il mise au courant?
    M. Fadden a dit au comité qu'il m'avait mise au courant au début de 2010. Comme vous pouvez bien vous imaginer, lorsque j'étais conseillère à la sécurité nationale, on me mettait au courant de toute une série de choses, non seulement M. Fadden, mais également d'autres dirigeants de ministères et d'agences.
    Bien entendu, mais au printemps 2010, on vous a mis au courant de la préoccupation de M. Fadden, une préoccupation qu'il a tellement prise au sérieux, qu'il s'est adressé à la télévision nationale et a proclamé que c'était une menace pour le Canada. De toute évidence, au printemps, il a dû tenir un langage semblable et vous dire à quel point il prenait la question au sérieux.
    Lorsqu'il vous a mise au courant de cela, quelles discussions avez-vous eues avec le Cabinet du Premier ministre, des ministres ou même le premier ministre à ce sujet?
    Lorsque M. Fadden m'a mise au courant au début de 2010, je n'ai eu de discussions avec personne à ce sujet, car il s'agissait strictement d'un préavis. Je n'avais pas l'impression que je devais fouiller la question.
    Comme je l'ai dit, on me mettait au courant de toute une série de choses et, pour l'essentiel, on les mettait de côté et on attendait de recevoir de l'information. Ce serait la même chose s'il s'agissait d'une affaire de contre-terrorisme ou de toute autre affaire.
    Il s'est adressé à la télévision nationale et il a dit qu'il était vraiment urgent d'agir, qu'il y avait cette menace pour la sécurité nationale. Il arrive et il témoigne de cette grave menace. C'est le directeur de notre organisme de renseignement. La menace est tellement grave selon lui, que quelques mois plus tard, il s'adresse à la télévision nationale pour en parler.
    A-t-il présenté les choses de la même façon? Vous a-t-il souligné que cela présentait à son avis un réel danger pour la sécurité nationale de la même façon qu'il l'a fait à la télévision nationale? Le sujet a-t-il été clos avec vous?
    Tout d'abord, je ne suis pas d'accord pour dire que le directeur a présenté les choses comme s'il s'agissait d'une attaque sérieuse ou d'une menace pour la sécurité nationale.
    Mais il a dit que cela représentait une menace sérieuse et il l'a dit à la télévision nationale.
    Ce qu'il a dit, c'est qu'en général, nous sommes vulnérables à l'ingérence étrangère, qui pourrait représenter une menace. Nous pouvons y être vulnérables et nous le sommes.
    Alors, regardons le problème dans son ensemble, car vous avez dit qu'il existe depuis un certain temps. Quelles conversations avez-vous eues avec le Cabinet du Premier ministre ou n'importe quel ministre au sujet de l'influence étrangère que d'autres pays exercent sur le Canada?
    Si vous dites que c'est un problème qui existe depuis longtemps, quelles conversations avez-vous eues et quels conseils avez-vous donnés?
    Monsieur le président, quatre menaces ont été définies dans la Loi sur le SCRS, et je répète que l'ingérence étrangère en est une.
    Dans le cadre de notre travail dans le domaine de la sécurité nationale, on nous informe de façon continue de menaces qui concernent chacune des sources de vulnérabilité liées à la sécurité nationale du Canada.

  (1555)  

    J'ai devant moi le témoignage de M. Fadden. Il a dit ceci:
    De façon sommaire, je lui a dit que l'on avait quelques dossiers au Service touchant l'ingérence étrangère, que je pensais que cela devait impliquer des gens du milieu politique dans les provinces et qu'on était en train de finaliser le dossier.
    Il a dit ensuite ceci:
    Je lui ai demandé si elle pouvait réfléchir à la question et me faire savoir quelle serait la façon de procéder si, après avoir conclu nos dossiers, le gouvernement décidait d'aller de l'avant.
    Êtes-vous en train de dire que c'est vous qui avez décidé de ne pas aller de l'avant? Étant donné que d'énormes soupçons planent sur les collectivités, avez-vous recommandé de clore la question ou d'annoncer qu'aucun soupçon ne plane sur ces collectivités?
    Si l'on a décidé de ne pas aller de l'avant, que c'est vous, et vous seule, qui avez pris la décision, qu'en est-il des conseils que vous auriez donnés ou des conversations que vous auriez eues sur la possibilité de faire cesser cette rumeur qui laissait planer des soupçons sur un si grand nombre de collectivités canadiennes?
    Monsieur le président, tout d'abord, je ne comprends pas vraiment la question d'aller de l'avant ou de ne pas aller de l'avant, mais permettez-moi de parler des collectivités...
    Alors, permettez-moi de préciser.
    Dans son témoignage, M. Fadden a dit qu'il avait eu une conversation. À son avis, il fallait fouiller la question. Il avait l'impression que des politiciens étaient sous l'influence de gouvernements étrangers. C'est une allégation très explosive. Il a dit qu'il vous avait demandé de lui donner des directives sur ce qu'il fallait faire. Êtes-vous en train de me dire que vous n'avez rien fait, que c'est ainsi que cela s'est terminé, que vous n'avez eu de conversation avec aucun ministre? N'en n'avez-vous pas discuté avec le premier ministre ou un membre du Cabinet du Premier ministre?
    Permettez-moi seulement de me référer à la procédure, car il est question ici de notre sécurité nationale et de la conseillère à la sécurité nationale auprès du premier ministre.
    Je vais citer notre procédure:
    Il faut tenir compte, dans l'obligation de répondre aux questions du comité, du fait que les fonctionnaires sont censés fournir des conseils confidentiels à leurs ministres.
    On traite ensuite de l'importance de maintenir les deux.
    Je...
    Monsieur le président, à ce sujet — et s'il vous plaît, arrêtez mon temps...
    Nous le demandons.
    Monsieur le président, à ce sujet, on ne m'a pas répondu que c'était confidentiel; on m'a répondu qu'il n'y a pas eu de conversation, et de toute évidence, Mme Morin est libre de dire ce qu'elle veut.
    Je vais vous accorder plus de temps, monsieur Holland.
    Monsieur le président, j'aimerais parler de la question des collectivités, car c'est...
    Pouvons-nous discuter de ce premier point, s'il vous plaît? Encore une fois, l'allégation selon laquelle des politiciens sont sous l'influence de gouvernements étrangers est explosive. Il vous en a fait part. Il a dit devant le comité qu'il voulait qu'on lui donne des directives sur ce qu'il devait faire, ou sur qu'il fallait faire avec le dossier, et vous, vous avez décidé de ne pas aller plus loin?
    Monsieur le président, lorsque M. Fadden m'a approchée, qu'il m'a mise au courant au début de l'année, il voulait obtenir des directives sur la façon de procéder, si ma mémoire est bonne. Il voulait savoir de quelle façon nous procédons lorsque nous avons ce type de dossier, et je crois que nous avons parlé de la façon de procéder. C'est tout ce que je dirai à ce sujet.
    Merci, madame Morin.
    Nous passons maintenant à Mme Mourani. Vous disposez de sept minutes.

[Français]

    Merci, monsieur le président. Vous parlez français maintenant. C'est génial.
    Bonjour, madame Morin. Merci d'être présente aujourd'hui. J'ai plusieurs petites questions pour vous. D'abord, lorsque les gens du SCRS font des sorties médiatiques, l'entrevue et les lignes communicationnelles sont-elles autorisées par vous?
    L'imputabilité du SCRS revient au ministre de la Sécurité publique. En fait, les autorisations médiatiques passent davantage par cette instance. Cela étant dit, le directeur ou les chefs d'agence nous font très souvent parvenir, parfois à l'avance, une copie du discours, mais strictement par courtoisie.
    Au bout du compte, c'est le bureau du ministre de la Sécurité publique qui autorise les sorties médiatiques et qui étudie, avec les gens du SCRS, les lignes communicationnelles. C'est aussi lui qui vous en informe.

  (1600)  

    De façon générale, je dirais que c'est la façon de procéder.
    À votre connaissance, est-ce que les gens du SCRS peuvent se permettre de faire une sortie, sans toutefois accepter de faire une entrevue, et sortir des lignes médiatiques non validés par le Bureau du ministre de la Sécurité publique? Peuvent-ils faire cela?
    Dans ce cas, je crois savoir que l'entrevue de M. Fadden faisait partie d'un documentaire qui faisait état des 25 années du SCRS. Je tiens donc pour acquis que les autorités avaient donné leur accord.
    Si je comprends bien, la sortie de M. Fadden durant l'entrevue qui a été donnée à la CBC n'aurait pu se faire sans l'accord de son supérieur, qui est le bureau du ministre, finalement.
    Je ne voudrais pas être aussi définitive à ce sujet. Toutefois, je dirais que ça devrait être la pratique, généralement parlant.
    De même, par suite de l'autorisation de l'entrevue, les lignes communicationnelles sont établies en collaboration avec le bureau du ministre.
    Lorsqu'on accorde une entrevue, on ne connaît sans doute pas à l'avance les questions qui vont nous être posées.
    On en a quand même une petite idée.
    Peut-être pas nécessairement. Ça dépend vraiment des événements en cours, de ce qui s'est passé, et évidemment, aussi des objectifs de l'intervieweur. Vous savez, il y a une différence entre des autorisations que j'appellerais « génériques » et des autorisations extrêmement spécifiques.
    Je vous remercie.
    J'ai une autre question. Est-ce au moment où la sortie de M. Fadden a été diffusée — je ne parle pas du moment de la production de l'émission, mais de celui de sa diffusion — que vous avez, comme tout le monde, appris que deux ministres provinciaux et des élus de la Colombie-Britannique auraient été, conformément aux allégations de M. Fadden, des agents d'influence de pays étrangers, dont des pays comme la Chine? Ou plutôt, le saviez-vous avant?
    Je le répéterai, monsieur le président, il est clair que le phénomène d'interférence ou d'influence étrangère n'est absolument pas nouveau. Il a même été documenté dans des rapports annuels précédents du SCRS. Enfin, il a été documenté depuis le milieu des années 1980.
    En ce qui concerne ces cas biens spécifiques, est-ce que le Bureau du premier ministre le savait ou si vous avez appris cela un peu comme tout le monde? Je ne parle pas du phénomène d'influences étrangères, mais plutôt de ces fameux deux ministres provinciaux et de ces élus municipaux. M. Fadden sait qui ils sont. Est-ce qu'il vous en a informée?
    Monsieur le président, je préférerais ne pas parler des cas d'espèce, si possible, et m'en tenir simplement à dire que le phénomène d'influences étrangères nous est quand même bien connu.
    Vous ne répondez pas à ma question. Je ne vous demande pas de me donner des noms; je vous demande simplement si vous étiez déjà au courant de ce ce qu'on a appris à la télévision ou si vous l'avez appris au moment où vous l'avez vu à la télévision?
    Je répéterai que j'étais absolument consciente du phénomène et je préférerais ne pas commenter les cas d'espèce.
    M. Fadden nous a dit qu'il a remis au ministre, et donc par ricochet au Bureau du Conseil privé, son rapport contenant justement ces fameux cas d'espèce? A-t-il effectivement remis un rapport?
    M. Fadden avait indiqué au comité lorsqu'il est venu, je crois que c'était le 5 juillet, qu'il allait présenter un rapport, alors il l'a fait.
    Dans votre pratique, avez-vous trouvé cela un peu inusité que, à CBC, un chef du SCRS se permette de parler de ces sujets-là, des ces ministres-là, de lancer comme ça des allégations sans donner des noms? Avez-vous trouvé cela normal? Est-ce que, en tant que conseillère à la sécurité, vous n'avez pas trouvé cela un peu étrange qu'un chef du SCRS se permette de dire dans les médias qu'il y aurait deux ministres et des élus municipaux sous influence étrangère?

  (1605)  

    Monsieur le président, je pense que le directeur s'est expliqué devant le comité, il a bien partagé avec les membres du comité les circonstances qui ont fait que ses propos ont été rapportés dans les médias. Je n'ai pas vraiment grand-chose à ajouter à ses propos.
    En tant que conseillère — vous ne l'êtes plus —, mais en tant que personne ayant déjà été à ce poste-là, pensez-vous que le Canada serait bien servi d'avoir un chef du SCRS qui « placote » dans les médias et jette le discrédit sur la classe politique?

[Traduction]

    Merci, madame Mourani. Votre temps est écoulé, mais si vous voulez répondre, je vous permets de le faire.

[Français]

    Tout d'abord, je pense que M. Fadden n'a pas jeté d'ombre sur la classe politique, si c'est votre question.
    Également, je pense, encore une fois, qu'il s'est bien expliqué devant le comité. D'ailleurs, si je me souviens bien, il avait dit qu'il regrettait la « granularité » de ses commentaires.

[Traduction]

    Merci, madame Morin.
    Nous passons maintenant à M. Davies. Allez-y, s'il vous plaît. Vous disposez de sept minutes.
    Merci, monsieur le président, et merci, madame Morin, de comparaître devant nous. Comme nous avons demandé au ministre de la Sécurité publique de comparaître devant le comité pour répondre à des questions à ce sujet et qu'il a refusé, je suis ravi que vous soyez ici pour répondre à nos questions.
    Je veux commencer par une question brève. Lors de sa comparution devant le comité le 5 juillet, M. Fadden a dit qu'il donnerait son rapport au ministre de la Sécurité publique dans les 30 jours.
    L'a-t-il fait dans les 30 jours?
    En toute honnêteté, monsieur le président, je ne m'en...
    Quand avez-vous reçu le rapport?
    ...rappelle pas. Je ne me rappelle pas du moment exact où j'ai été informée.
    Je veux revenir aux propos de M. Fadden. Sur les ondes de la télévision publique, il a dit ceci:

    Il y a plusieurs politiciens municipaux en Colombie-Britannique et dans au moins deux provinces où l'on retrouve des ministres de la Couronne qui sont soumis, selon nous, à tout le moins, à l'influence générale d'un gouvernement étranger.
    Il a dit ceci:

    Dans le cas de ces gens, cela s'est développé au fil des ans. Ils n'ont pas vraiment caché leurs liens, mais ce qui nous a surpris, c'est l'ampleur que cela a pris au fil des ans. Nous voyons maintenant, dans deux ou trois cas, des signes qui indiquent qu'ils modifient réellement leurs politiques publiques en fonction de leurs liens avec ce pays en particulier.
    Je crois que cela donne une idée du caractère explosif de ces propos. Il a essentiellement accusé des représentants élus du pays de se plier aux exigences de gouvernements étrangers. Dans un sens, c'est une forme de trahison.
    Ma première question pour vous, c'est la suivante: quand avez-vous su que le directeur du SCRS, M. Fadden, avait commencé à croire que des politiciens canadiens étaient sous l'influence de gouvernements étrangers?
    Tout d'abord, monsieur le président, je suis en désaccord avec l'emploi du mot « trahison ». Je ne crois pas du tout qu'il soit approprié dans le cas d'ingérence étrangère.
    Comme je l'ai dit plus tôt, il ne s'agit pas d'un phénomène nouveau. Ce n'est pas pour rien que la loi de 1984 a prévu que le SCRS devrait se préoccuper de ce point faible. D'ailleurs, cette situation ne concerne pas que le Canada. J'aimerais...
    Madame Morin, je suis désolé, mais je vous ai demandé à quel moment vous vous êtes rendu compte de ce qui se passait.
    Je ne discuterai pas de cas précis, monsieur le président.
    Je ne vous demande pas d'en discuter. Je vous demande à quel moment vous vous êtes rendu compte des actions de M. Fadden. Vous étiez conseillère en matière de sécurité nationale, n'est-ce pas?
    J'ai en effet été une conseillère en matière de sécurité nationale jusqu'au 1er novembre de cette année.
    Quand vous êtes-vous rendu compte que le directeur du SCRS avait des raisons de croire que certains politiciens canadiens subissaient l'influence de gouvernements étrangers? C'est une question assez simple: quand?
    Monsieur le président...
    Madame Morin, laissez-moi consulter le Règlement, afin de clarifier la situation. Je vais vous accorder plus de temps pour permettre au greffier de se pencher sur la question.
    Dans le O'Brien, on peut lire :

... les comités acceptent ordinairement les raisons données par un fonctionnaire pour refuser de répondre à une question précise supposant l’expression d’un avis juridique, pouvant être considérées comme en conflit avec leur responsabilité envers leur ministre, débordant de leur domaine de responsabilité, ou pouvant influer sur des opérations commerciales.
    Ce sont les raisons énumérées. Je ne suis pas sûr qu'elles vous concernent, monsieur Davies, mais permettez-moi de vous rappeler, et de rappeler à notre témoin, que nous la laisserons choisir les questions auxquelles elle accepte de répondre, d'après ce qui vient d'être lu.
    Allez-y, madame Mourani.

  (1610)  

[Français]

    Monsieur le président, je vous remercie d'aborder ce sujet. Je vous avoue bien franchement que les questions qu'on pose... On n'est pas en train de demander des noms; on est en train de parler de choses publiques. J'ai posé la question et je n'ai même pas eu de réponse. On demande quand M. Fadden a déposé ce rapport, qu'il a dit lui-même qu'il allait déposer. On n'est pas en train d'inventer des choses; tout cela est public.
     Est-ce qu'elle était déjà au courant que M. Fadden allait faire des révélations aux médias?

[Traduction]

    D'accord, je vais prendre cela...

[Français]

    Ce ne sont pas des trucs de sécurité nationale, on n'est pas en train de demander où sont placés nos missiles ou je ne sais quoi, où est notre satellite. Vous comprenez, cela m'apparaît inacceptable! On est ici, on veut avoir des réponses, mais on est assez responsables pour ne pas poser des questions qui vont compromettre la sécurité nationale. Vous n'allez pas me dire que le fait de savoir quand M. Fadden a déposé son rapport est une question de sécurité nationale. C'est une question de transparence, monsieur le président, et ce n'est pas pareil. Merci.

[Traduction]

    Merci, madame Mourani. Monsieur Holland, votre intervention porte-t-elle sur le même rappel au Règlement?
    Continuez, monsieur Davies et nous allons ajouter un autre...
    Continuez, s'il vous plaît.
    Merci, monsieur le président. Je vais respecter ces restrictions, mais pour revenir à la question de savoir quand vous avez été informée du sujet, et à la lumière de ce que je vais dire, je pense que vous allez vous rendre compte que M. Fadden lui-même en a parlé. Je vous demande à quel moment il vous a informée qu'il entretenait des préoccupations à ce sujet. C'est ma seule question.
    Quelles sont précisément ces préoccupations?
    Les préoccupations selon lesquelles deux ministres et un élu municipal de la Colombie-Britannique subissaient l'influence de gouvernements étrangers.
    Je vais me référer au témoignage de M. Fadden. Il m'a laissé entendre au début de 2010 qu'il surveillait quelques cas. Il a ensuite continué son travail, et c'est tout.
    D'accord. Encore une fois, je vais citer un passage de l'entrevue de M. Fadden par M. Mansbridge à la SRC.
    M. Mansbridge a dit:
Eh bien, vous savez, je comprends le problème, mais que le directeur du SCRS insinue qu'il y a des politiciens au Canada, de même que des fonctionnaires, d'après ce que vous laissez entendre, mais sans les nommer, en étonnera plusieurs. En fait, vous savez, si j'étais un ministre provincial, je vous dirais: « Mais de qui parlez-vous, parce que nous sommes tous visés. »
    Ensuite, M. Fadden a répondu:
Mm-hmm. Je pense que c'est juste, et nous ne gardons pas l'information pour nous seuls. Dans le cas des ministres, nous sommes en discussion avec le centre sur la manière dont nous allons informer ces provinces.
    Ensuite, M. Mansbridge a demandé:
Qu'entendez-vous par le centre?
    Ce à quoi M. Fadden a répondu:
Désolé, le Bureau du Conseil privé, le ministère du premier ministre, s'interroge sur la meilleure façon de leur laisser savoir qu'il y a peut-être un problème.
    J'ai interprété les commentaires de M. Fadden comme voulant dire qu'il était sur le point de discuter de ses préoccupations avec le Bureau du Conseil privé. Au moment où il a fait ces commentaires, était-ce le cas?
    M. Fadden m'a laissée entendre, en janvier, qu'il avait des préoccupations à ce sujet. Je répète qu'il le faisait vraiment dans le but de discuter plus tard de la façon dont nous allions nous occuper de ces cas. Nous devons établir des procédures, et c'est l'essentiel de la conversation que nous avons eue...
    D'accord. C'était en janvier. Le 23 juin 2010, un ou deux jours après la diffusion de l'entrevue de la SRC, M. Fadden a déclaré: « Je n'ai pas informé le Bureau du Conseil privé des cas que j'ai mentionnés au cours de l'entrevue que j'ai accordée à la SRC ». Est-ce le cas? De janvier à juin, bien qu'il soit le directeur du SCRS, il ne vous a pas informée de ces cas?
    De janvier à juin, le directeur ne nous a informés d'aucun cas précis.
    D'accord.
    M. Fadden a fait plusieurs fois référence à la Chine dans ses commentaires. En voici un extrait:

Ils financent des instituts Confucius dans la plupart des campus au Canada. Ils les financent. Ils sont en sorte gérés à partir de l'ambassade ou des consulats. Personne n'est au courant que les autorités chinoises y sont mêlées. Ils organisent des manifestations contre... ils organisent des manifestations contre certaines politiques du gouvernement canadien qui concernent la Chine. Ils ont organisé des manifestations pour dénoncer les cinq poisons, comme ils sont appelés, c'est-à-dire la Taïwan, le Falun Gong et d'autres.
    Ces commentaires visant la Chine ont été diffusés la veille de l'arrivée du président Hu au Canada. Ils ont éclaboussé chaque Canadien d'origine chinoise en remettant en question sa loyauté au Canada. C'est ce qu'on me dit à Vancouver.
    Je vous demande si vous reconnaissez que les Canadiens d'origine chinoise en ont souffert et si vous êtes d'accord pour dire qu'on leur doit des excuses pour avoir mis leur loyauté en doute.
    Monsieur le président, je conteste l'idée qui veut que nous remettons en question la loyauté de n'importe quel groupe de Canadiens lorsque nous discutons d'ingérence étrangère. En fait, si ces activités sont menées, je ferais valoir que les communautés sont des victimes et qu'elles ne devraient pas se sentir visées.

  (1615)  

    D'accord.
    Voici ma dernière question. Vous avez occupé le poste de conseillère en matière de sécurité nationale auprès du premier ministre. L'avez-vous informé des préoccupations de M. Fadden et, le cas échéant, pouvez-vous nous faire part, de façon générale, de la réaction du premier ministre aux allégations de M. Fadden?
    Monsieur le président, je ne crois pas que ce soit approprié que je discute de conseils que j'aurais ou...
    D'accord.
    Merci beaucoup, madame Morin.
    Passons maintenant à M. MacKenzie.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, madame Morin, d'être présente aujourd'hui. Nous vous remercions d'avoir trouvé le temps de venir. Je suis certain que vous êtes assez occupée.
    J'ai eu l'occasion de jeter un coup d'oeil à votre notice biographique avant la séance d'aujourd'hui et j'aimerais vous féliciter pour les services que vous avez rendus au Canada. J'aimerais en parler un peu pour que les gens connaissent vos antécédents.
    Vous travaillez actuellement pour la Banque mondiale, et nous vous félicitons pour votre nomination. C'est un bel accomplissement national et personnel. Dans vos nouvelles fonctions, vous représentez non seulement le Canada, mais également l'île d'Antigua, les Bahamas, la Barbade, le Belize, la Dominique, la Grenade, la Guyane, l'Irlande, la Jamaïque et Saint-Kitts-et-Nevis — un grand nombre de pays. C'est juste de dire que vous représentez beaucoup de gens.
    Le 17 novembre 2008, vous avez été nommée conseillère en matière de sécurité nationale auprès du premier ministre et secrétaire associée du Cabinet. D'avril 2006 à novembre 2008, vous avez occupé le poste de sous-ministre du Commerce international. De décembre 2003 à avril 2006, vous avez servi à titre de sous-ministre déléguée des Affaires étrangères. Auparavant, vous avez occupé le poste de sous-ministre adjointe, Affaires internationales, et de déléguée commerciale en chef. Vous étiez la directrice générale, Développement du commerce international, politique et planification, de septembre 2001 à septembre 2003.
    Je remarque que vous avez aussi beaucoup d'expérience professionnelle à l'étranger. Vous avez été affectée à San Francisco de 1981 à 1984; à Jakarta de 1984 à 1986; à Londres de 1986 à 1990; et à Moscou de 1994 à 1997. En 1997, vous avez été nommée ambassadrice du Canada auprès du Royaume de Norvège avec accréditation simultanée auprès de la République d'Islande...
    Allez-y, monsieur Holland, avec votre rappel au Règlement, s’il vous plaît.
    Nous sommes tous touchés par l’intervention de M. MacKenzie et nous félicitons certainement Mme Morin pour son excellent curriculum, mais je me demande ce que cela a à voir avec notre étude.
    J’aimerais seulement démontrer aux députés de l’opposition que la témoin est très compétente et possède un immense bagage de connaissances en ce qui a trait aux affaires étrangères. C’est la raison pour laquelle vous vouliez qu’elle témoigne. Elle est ici pour vous dire, ou nous sommes certainement ici pour vous suggérer qu’elle a un énorme bagage d’expériences au sujet des affaires étrangères.
    Venez-en au fait et posez-lui une question.
    Poursuivez, monsieur...
    La plupart des gens ont été réticents à la laisser répondre. C’est ça le problème.
    Poursuivez, monsieur MacKenzie.
    J'invoque également le Règlement. Le comité n’a jamais mis en doute l’étendue des connaissances, de l’expérience, ou...
    Ce n’est pas un rappel au Règlement...
    Eh bien, c’est pertinent, par exemple, si M. MacKenzie examine la période de 1982 à 1984 à Jakarta, alors que nous sommes ici pour discuter de la question Fadden...
    Poursuivez, monsieur MacKenzie.
    Je m'excuse si vous ne voulez pas connaître l’étendue des connaissances de notre témoin, mais je crois que nous devrions tous être fiers de son cheminement.
    Je pose mes questions. Les services que vous avez rendus au pays ont été, en grande partie, dans les domaines des affaires étrangères et de la sécurité. Est-ce exact?
    Oui, tout à fait, et je me suis aussi occupée de questions économiques.
    Selon vous, comment évaluez-vous le SCRS par rapport aux autres organismes de renseignement?
    Je dirais, monsieur le président, que le SCRS fait très bonne figure par rapport aux autres agences de renseignement.
    Vous avez eu l’occasion de faire affaire avec les gouvernements étrangers et, dans certains cas, avec leurs services de sécurité.
    Tout à fait.
    Avez-vous eu affaire à d’autres organismes?
    Certainement, monsieur le président. En particulier, au cours des deux dernières années alors que j’étais conseillère en matière de sécurité nationale, j’ai eu l’occasion de côtoyer mes homologues des États-Unis, des pays européens et d’autres pays — en Asie, au Belize, ainsi de suite.
    Je dirais que nos services de sécurité et de renseignement sont absolument les meilleurs, et cela inclut, bien entendu, le SCRS.

  (1620)  

    Au cours de cette période, vous avez travaillé non seulement pour le présent gouvernement, mais également pour le gouvernement précédent, et vous avez reçu des affectations des deux gouvernements. Est-ce exact?
    Oui.
    La relation que vous avez réussi à forger en a été une de... Parlez-nous-en. Dans le cadre de vos interactions avec les représentants du gouvernement précédent et du gouvernement actuel...
    Je crois avoir maintenu un haut niveau d’intégrité. Cela a été un véritable privilège d’avoir servi le Canada, surtout au cours des sept dernières années, avant de quitter mes fonctions de sous-ministre. Non seulement je crois que le SCRS est un excellent organisme, mais j’ajouterais aussi que je crois que la fonction publique canadienne est un modèle à l’échelle mondiale.
    Dans le cadre de cette étude, mes collègues d'en face ont souvent parlé d’ingérence politique. Étant donné que vous avez travaillé pour les deux gouvernements, pourriez-vous me dire si vous avez été témoin d’ingérence politique de la part du gouvernement actuel ou du gouvernement précédent?
    Pas à ce que je me rappelle.
    Vous étiez en mesure d’accomplir les tâches associées à votre travail.
    Tout à fait.
    Nous parlons souvent au Canada, entre autres, des organismes de surveillance qui s’occupent du SCRS. Je sais que mon temps est presque écoulé, mais j’aimerais en parler davantage un peu plus tard.
    Lorsque vous étiez dans d’autres pays, vous souvenez-vous du type de surveillance faite par les organismes de ces pays et comment cette surveillance se compare-t-elle avec celle du Canada?
    Je dirais que la structure de surveillance que nous avons sur nos organismes, en particulier sur le SCRS, est aussi, voire plus, rigoureuse que dans bon nombre d’autres pays, monsieur le président.
    Compte tenu de cela, il semble que — et j'ai certainement entendu des Canadiens le dire — l'ensemble du problème concerne la politisation. Je ne m'attends pas à une réponse.
    Dans d'autres pays, selon vous — et c'est peut-être bien une question injuste —, comment agiraient les responsables par rapport à ce que nous considérons ici comme un problème?
    J'ai mentionné auparavant que le problème précis d'ingérence étrangère est bien connu dans beaucoup de pays. Je ne crois pas que ce serait une surprise si le sujet venait à être discuté. En fait, les autres pays en parlent assez ouvertement.
    J'ai eu l'occasion d'en discuter au cours de mes consultations bilatérales. Ce n'est certainement pas une notion inconnue. Un grand nombre de pays y sont vulnérables.
    Merci, monsieur MacKenzie et madame Morin.
    M. Kania a la parole.
    J'aimerais revenir en arrière et établir certains faits. Au début de l'année 2010 — en janvier, selon votre réponse —, M. Fadden a communiqué avec vous et a soulevé des inquiétudes au sujet de certains politiciens qui seraient sous une influence étrangère. Est-ce exact?
    M. Fadden m'a fait part de sa crainte générale concernant l'ingérence étrangère. En gros, il a dit qu'il m'en reparlerait une autre fois.
    Comme je l'ai mentionné, l'objectif de ce préavis était de discuter du processus.
    Après cet échange de janvier 2010, quand vous en a-t-il reparlé?
    Au sujet du processus?
    Quand a-t-il communiqué de nouveau avec vous pour reparler de la question?
    Permettez-moi de répéter ceci: l'idée générale de l'ingérence étrangère n'est pas nouvelle. Elle fait partie de l'éventail de vulnérabilités dont nous nous occupons dans le domaine de la sécurité nationale. En ce qui concerne les cas en question, je crois que M. Fadden a dit au comité qu'il ne m'avait pas informée au moment d'accorder l'entrevue.

  (1625)  

    C'est une question précise. J'aimerais que vous y répondiez.
    Il a communiqué avec vous en janvier 2010 au sujet de ce problème. Quand a-t-il de nouveau communiqué avec vous à cet égard?
    Honnêtement, je ne m'en souviens pas, mais je n'avais pas été informée des cas précis avant qu'il n'accorde l'entrevue.
    Dans sa lettre du 31 août 2010, il dit: « Le discours proposé au RCMI avait été examiné par le personnel du cabinet du ministre ainsi que par celui du bureau de la conseillère à la sécurité nationale (CSN). »
    Il dit que vous aviez examiné son discours avant qu'il le prononce. Est-ce exact?
    Ce n'est probablement pas moi qui l'aie examiné personnellement; c'est plutôt mon personnel qui l'a fait. Je suis au courant que deux ou trois lignes portaient sur l'ingérence étrangère.
    En lien avec cela, il dit aussi qu'avant de se rétracter le 23 juin 2010, il avait de nouveau consulté votre bureau. Avez-vous également examiné ses commentaires avant qu'il ne se rétracte?
    Je n'appellerais pas cela une rétractation; c'est plutôt une explication. Je crois que M. Fadden nous a envoyé une lettre. En fait, je crois que vous lui avez demandé en juillet s'il m'avait parlé au moment où il s'est expliqué. Je me rappelle que M. Fadden m'a appelée pour me dire: « J'ai accordé cette entrevue et je crois qu'il serait bon que je précise un ou deux éléments. »
    En janvier 2010, M. Fadden vous en parle. Selon ce que vous nous dites, il n'a pas soulevé de nouveau la question avant la période qui précédait son discours. Donc, au cours de ces mois, vous ne vous êtes pas reparlés.
    Au cours de cette période, j'aimerais savoir si vous avez averti le ministre, le cabinet du ministre, le premier ministre ou le Cabinet du Premier ministre de ce que M. Fadden vous avait informée.
    M. Fadden a dit: « Il y a plusieurs politiciens municipaux en Colombie-Britannique et dans au moins deux provinces où l'on retrouve des ministres de la Couronne qui sont soumis, selon nous, à tout le moins à l'influence générale d'un gouvernement étranger. »
    Ensuite, il a ajouté: « Nous ne gardons pas l'information pour nous. Dans le cas des ministres, nous sommes en discussion avec le centre sur la manière dont nous en informerons ces provinces. »
    Ce que j'aimerais que vous me disiez, comme deuxième partie à ma question, c'est s'il vous a déjà communiqué ou a déjà communiqué à votre bureau, au Cabinet du Premier ministre ou au cabinet du ministre les noms des personnes qu'il visait par ces allégations, et si c'est le cas , si vous étiez d'accord avec ces allégations et si des politiciens municipaux et provinciaux sont sous une influence étrangère. Autrement dit, ses commentaires étaient-ils exacts?
    Tout d'abord, je ne veux pas laisser les membres du comité avec l'impression que M. Fadden et moi n'avons eu aucun échange entre janvier et juin. J'aimerais dire que, de par la nature de mes fonctions et dans le cadre de mes activités, j'ai bien entendu eu bon nombre de rencontres avec les représentants des services de sécurité et de renseignement. Je tenais à ce que ce soit dans le compte rendu.
    En ce qui concerne les noms et le reste, je ne crois tout simplement pas que ce soit approprié de ma part de discuter des dossiers. Par conséquent, je n'en parlerai pas.
    Merci beaucoup, madame Morin.
    Retournons maintenant à M. MacKenzie.
    Merci, monsieur le président.
    J'avais dit que j'aimerais vous parler brièvement de l'organisme de surveillance. Selon moi, il est important que notre comité et les gens qui nous regardent peut-être à la maison sachent que le SCRS a un comité de surveillance appelé le CSARS. L'honorable Gary Filmon, un ancien premier ministre provincial, préside le Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité, plutôt connu sous le sigle CSARS.
    Voici une citation de M. Filmon:
Je vous dirai d'abord qu'ayant servi près de neuf ans au CSARS — période durant laquelle j'ai été régulièrement en contact avec de nombreuses organisations aux mandats similaires — je suis convaincu que le modèle canadien est et est reconnu comme étant l'une des fonctions de surveillance les plus solides au monde. Cela ne veut pas dire que le CSARS est à l'abri des changements et des améliorations, mais simplement qu'il constitue un outil efficace pour aider à faire en sorte que l'agence du renseignement de sécurité du Canada, le SCRS, rend bien compte de ses activités.

Comme vous le savez sûrement, le CSARS a vu le jour au même moment que le Canada a créé le SCRS, son service civil de renseignement de sécurité. Avec l'adoption de la Loi sur le SCRS en 1984, le Canada est devenu un des premiers gouvernements démocratiques du monde à établir un cadre juridique détaillé pour les activités de son service de sécurité. Tout aussi important, la Loi sur le SCRS prévoyait un cadre obligeant le SCRS à rendre compte de l'exercice de ces pouvoirs — un cadre qui, dans son intégralité, a résisté à l'épreuve du temps.

Plus précisément, la Loi sur le SCRS définit le mandat de l'État et les limites du pouvoir dont il dispose pour mener ses activités de renseignement de sécurité. Elle décrit également la façon de surveiller le travail effectué par le service au moyen d'un système rigoureux de contrôles politiques et judiciaires, y compris deux organes — munis chacun d'un mandat distinct — chargés de surveiller le nouvel organisme.
    Il s'agissait d'une citation de M. Filmon.
    J'aimerais attirer votre attention sur les propos de M. Filmon, parce qu'il est important de comprendre le contexte dans lequel le SCRS exerce son mandat. Je crois que nous sommes tous d'accord pour dire que le personnel du SCRS travaille avec dévouement à la protection des intérêts du Canada en matière de sécurité nationale et à la sécurité des Canadiens. Il est aussi clair que le travail du SCRS est effectué conformément aux lois applicables et respecte les droits de la personne.
    Selon mes souvenirs du témoignage du 11 mai, le SCRS est, en fait, l'un des services de renseignement les plus surveillés au monde.
    Pourriez-vous nous expliquer comment cette surveillance aide en fait le SCRS à bien accomplir son mandat?

  (1630)  

    Tout d'abord, permettez-moi de dire, monsieur le président, que je suis d'accord avec les propos de M. Filmon. Je dirais que nous sommes en fait très chanceux que des Canadiens très talentueux veulent bien siéger au CSARS, qui est un organisme unique qui remplit très sérieusement son mandat. Cet organisme examine les activités du SCRS afin de s'assurer que tout est fait dans les règles de l'art.
    Je suis tout à fait convaincue, monsieur le président, en raison des deux années au cours desquelles j'ai eu le grand privilège d'agir à titre de conseillère en matière de sécurité nationale, que le CSARS est un excellent organisme de surveillance pour le service.
    En raison de la présence de nos organismes de surveillance, s'il y a quelque chose que mes collègues considèrent comme nuisible, le CSARS a l'autorité d'examiner les activités du service. Comme c'était le cas à leur création en 1984 et comme vous l'avez constaté au cours des dernières années, ces organismes existent pour s'occuper de ces dossiers.
    Oui, ces organismes sont là.
    Lorsque vous avez répondu à certains députés, votre opinion était que vous communiquiez régulièrement avec un certain nombre d'organismes et de personnes au cours de cette période pour vous occuper d'une multitude d'éléments.
    Tout à fait. Parmi les fonctions de la conseillère en matière de sécurité nationale, monsieur le président, si c'est ce que l'honorable député sous-entend, il faut présider à de nombreux comités. Tous les ministères et tous les organismes qui s'occupent des questions de sécurité nationale étaient représentés au sein de ces comités.
    Merci beaucoup.
    Retournons du côté du Bloc.
    Monsieur Gaudet... Allez-y, madame Mourani.

[Français]

    Madame Morin, on a reçu une lettre de M. Fadden en réponse à des questions du comité. Il semble dire qu'il ait consulté le cabinet du ministre, les membres de son personnel ainsi que votre bureau pour clarifier ses remarques relativement à son entrevue à CBC. Est-ce exact?

  (1635)  

    Oui, M. le directeur a communiqué avec moi pour me dire qu'il avait en tête d'émettre une clarification de ses propos. Il voulait rétablir les faits, parce qu'il avait dit qu'il m'avait déjà fait un breffage sur les cas d'espèce, et ce n'était pas le cas.
    Si je vous comprends bien, lorsqu'il a donné une entrevue à CBC, il a parlé de cas d'espèce sans donner des noms, et vous n'étiez pas au courant desdits cas d'espèce.
    J'ai dit que M. Fadden a dit qu'il m'avait déjà présenté une séance de breffage sur ces cas d'espèce et je pense qu'il est clair qu'il a dû émettre une clarification en disant que...
    Ce n'était pas le cas.
    ... à ce moment-là, le dossier n'était pas complété.
    Actuellement, ces cas d'espèce sont dans un rapport. Vous l'avez reçu, comme vous avez dit. Est-ce que le Cabinet du premier ministre appuie ce rapport?
    Je pense qu'il n'est pas approprié, monsieur le président, que je fasse part des conseils ou les réactions des ministres et du premier ministre relativement à quelque dossier de renseignement que ce soit.
    Je vous avoue, madame Morin, que cette situation est grave. Le chef du SCRS dit qu'il a remis un rapport autant à son ministre de la Sécurité publique qu'au premier ministre par votre entremise et que, dans ce rapport, il serait question d'élus de provinces, de ministres de provinces et d'élus municipaux qui sont aussi des agents d'influence de pays étrangers. S'il affirme une telle chose dans un rapport, moi, en tant que citoyenne, je m'inquiète énormément et, en tant que députée, je m'inquiète encore plus en pensant que ces gens sont encore là, qu'ils sont encore au pouvoir.
    Que fait le Bureau du premier ministre, quelles actions allez-vous poser? S'il y a vraiment des agents d'influence dans des bureaux ministériels, il faut que la GRC fasse enquête, il faut que ces gens soient déférés devant les tribunaux. Toutefois, si ces allégations sont non fondées, il va falloir que le Bureau du premier ministre agisse pour laver la réputation de tous ces ministres et de tous ces élus en Colombie-Britannique qui sont salis par des allégations larges, vastes et non précises. Qu'allez-vous faire?
    Monsieur le président, on ne parle pas d'allégations vastes et larges. Je le répète, il n'y a pas d'ombre jetée sur toute la classe politique. On parle de cas d'espèce. Le service s'est déchargé de ses obligations, les cas sont clos.
    Je comprends. Ma question est très précise: la GRC va-t-elle mener une enquête? Y a-t-il une demande à ce propos?
    Je n'ai aucune information établissant que la GRC mènerait une enquête.
    Le fait que vous n'ayez aucune information ne veut pas dire que la GRC ne mène pas d'enquête. Vous n'êtes pas au courant?
    Non, absolument pas.
    J'ai encore une autre question. D'après ce que vous m'avez dit, j'ai compris que vous et le Bureau du premier ministre n'étiez pas au courant des allégations que ferait M. Fadden lorsque celui-ci a accordé son entrevue à CBC. Est-ce que je me trompe?
    Je répéterai que la question d'influences étrangères n'est pas nouvelle. Je répéterai que cela fait partie des questions dont nous traitons de façon régulière dans le cadre de nos discussions. Est-ce que j'étais au courant qu'il y avait cette menace et cette vulnérabilité au Canada? Oui, j'étais au courant.
    Mais ce n'était pas cela ma question.

  (1640)  

[Traduction]

    Madame Mourani, votre temps est écoulé. Aviez-vous terminé votre réponse?
    D'accord. Poursuivons avec les députés ministériels.
    Allez-y, monsieur MacKenzie.
    Merci, monsieur le président.
    Certaines questions semblent être différentes, mais il serait juste de dire que lorsque nous accueillons des gens au Canada, ces derniers essayeront de nous influencer à certains égards, comme nous le ferions aussi si nous étions à l'étranger. Cela ne se ferait pas d'une manière subversive ou à la manière d'un espion ou toute autre chose du genre, mais je crois qu'il est juste de dire que même lorsque nous visitons d'autres pays en vacances à titre personnel, nous sommes influencés ou nous essayons d'influencer.
    Certains des éléments qui ont été mentionnés ici semblent être ce à quoi la plupart des Canadiens semblent s'attendre à voir quotidiennement, pas seulement au Canada, mais aussi dans le monde.
    J'ai travaillé dans le domaine des relations internationales pendant des décennies, littéralement. Dans le cadre de ces activités, il est tout à fait normal que nous cherchions à expliquer notre point de vue et parfois à nous assurer que nos interlocuteurs adoptent le même point de vue que nous sur des enjeux. Tout cela est accompli de manière évidente dans le déroulement normal de relations bilatérales.
    Je m'attends à être démarchée à cet égard par mes interlocuteurs étrangers. J'ai démarché des interlocuteurs étrangers dans le but de les convaincre de mon point de vue. Il ne s'agit très manifestement pas du genre d'activités dont il est question ici.
    Je crois que M. Fadden a remis une lettre au comité datée du 31 août afin de répondre à certaines questions qui avaient été posées lors de la séance du 5 juillet. Avez-vous eu l'occasion de voir cette lettre?
    J'en ai une copie ici.
    Il dit dans le deuxième paragraphe:

... je confirme que j'avais préalablement discuté de ces deux événements, de manière générale, avec le ministre, et que j'avais reçu son aval à cet égard. Le discours proposé au RCMI avait été examiné par le personnel du cabinet du ministre ainsi que par celui du bureau de la conseillère à la sécurité nationale (CSN). Je souligne que, bien entendu, aucune des paroles que j'ai prononcées pendant la période de questions n'avait fait l'objet d'un tel examen.
    Ce commentaire est-il juste en ce qui concerne votre bureau?
    Oui.
    D'accord.
    Lorsque le comité a demandé à M. Fadden si le SCRS avait déjà accordé une entrevue télévisée, il a affirmé très clairement qu'il n'a pas révélé de détails hors caméra ou préalablement à l'entrevue à la CBC, mais il a aussi précisé que son prédécesseur avait reçu un correspondant de la CBC, Brian Stewart, en mars 2009. Donc, lorsque M. Fadden a accordé une entrevue à la CBC, il n'était pas le premier directeur du SCRS à le faire.
    C'est exact.
    Je présume qu'il est juste de dire que nous nous attendons, de temps à autre, à ce que certains directeurs de nos organismes fassent des apparitions publiques.
    Je crois que c'est important et sain que nous discutions publiquement des questions de sécurité nationale. Il est important que les Canadiens soient au courant du contexte mondial de la sécurité. J'aimerais commencer par là, parce que je crois fortement que les menaces à la sécurité nationale du Canada sont entièrement associées au contexte mondial de la sécurité. Il est important que les hauts fonctionnaires — et bien entendu les élus — parlent des vulnérabilités et des risques.
    Cela se fait dans bon nombre de pays. Vous savez peut-être qu'il y a deux mois, avant que je quitte mes fonctions, le directeur du service de renseignement du Royaume-Uni a prononcé un discours sur la place publique pour brosser un tableau de toutes les vulnérabilités et de toutes les menaces qui pèsent sur la sécurité nationale du Royaume-Uni. Cela se produit assez souvent dans d'autres pays — sans parler, bien entendu, de nos voisins américains, dont le Congrès entend assez régulièrement parler des menaces à la sécurité nationale.

  (1645)  

    Merci.
    Merci beaucoup.
    Madame Morin, je tiens à vous remercier d'être venue aujourd'hui. Je vous remercie d'avoir été disponible pour nous à trois occasions différentes, dont lors d'une séance qui n'a, malheureusement, pas été tenue un jour normal de séance.
    Au nom du comité, je vous souhaite la meilleure des chances à la Banque mondiale. Je crois que c'est une excellente réalisation pour vous, mais également pour le Canada qu'une personne d'expérience comme vous soit nommée à un tel poste. Merci d'être venue.
    Merci beaucoup.
    La séance est suspendue.
    [La séance se poursuit à huis clos.]
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