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SECU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent de la sécurité publique et nationale


NUMÉRO 004 
l
3e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 23 mars 2010

[Enregistrement électronique]

(1530)

[Traduction]

    Nous sommes à la cinquième réunion du Comité permanent de la sécurité publique et nationale. Nous étudions le système correctionnel fédéral, plus particulièrement la santé mentale et la toxicomanie.
    Nous accueillons aujourd'hui trois représentantes du Service correctionnel du Canada.
    Madame Vallée, voulez-vous prendre la parole en commençant par vous présenter, vous ainsi que les personnes qui vous accompagnent?

[Français]

    Monsieur le président, j'avais demandé que quelqu'un du Centre correctionnel communautaire Martineau témoigne aujourd'hui et je voudrais savoir s'il y a des gens de ce centre parmi les personnes présentes. M. Préfontaine pourrait peut-être nous éclairer sur cette question.

[Traduction]

    Nous avons effectivement envoyé des invitations à toutes les personnes dont vous aviez proposé le nom. Le greffier vous donnera la réponse que nous avons reçue d'elles.

[Français]

    Madame Mourani, j'ai informé votre bureau au fur et à mesure qu'il y avait des développements. Les autres témoins que vous aviez suggérés pour aujourd'hui, soit la Maison Thérèse-Casgrain ainsi qu'Anne Crocker et Céline Mercier, ont décliné l'offre pour diverses raisons.
    Je suis au courant de cela. Ça va.
    Votre demande concernant le Centre correctionnel communautaire Martineau ainsi que votre liste de questions ont été transmises à Service correctionnel Canada et ce dernier a décidé, pour discuter des questions que vous aviez soulevées, d'être représenté aujourd'hui par Mmes Vallée,  Gaudet et Perreault.
    Est-ce à dire qu'on a refusé que des gens du Centre correctionnel communautaire Martineau soient présents aujourd'hui?
     Mme Vallée pourrait peut-être répondre à cela.
    En fait, comme le sujet de la santé mentale déborde du cadre du Centre correctionnel communautaire Martineau, nous avons fait appel à Mme Andrée Gaudet, qui est directrice associée du district de Montréal et qui a la responsabilité, entre autres, du CCC Martineau. Nous nous sommes assurés qu'avec l'information en notre possession, nous serions en mesure de répondre à toutes vos questions concernant le CCC Martineau. D'autre part, Mme Perreault, qui est coordonnatrice régionale et psychologue, peut également parler de toute la prise en charge des cas de santé mentale au CCC Martineau.
    D'accord. Merci.

[Traduction]

    J'espère que vous êtes rassurée.
    Madame Vallée, vous avez droit à une déclaration préliminaire d'environ 10 minutes. Nous poursuivrons ensuite la réunion. Merci.

[Français]

    Vous avez demandé une présentation rapide.

[Traduction]

    Je suis criminologue. Voilà près de trois ans que je travaille pour Service correctionnel Canada (ou SCC). Auparavant, j'étais sous-ministre déléguée au ministère de la Sécurité publique chargé des services correctionnels du Québec. J'ai aussi travaillé près de 20 ans dans la collectivité et au Québec.

[Français]

    Mesdames et messieurs, je vous remercie de cette invitation à comparaître devant le Comité permanent de la sécurité publique et nationale.
    Vos travaux sur le thème de la santé mentale et de la toxicomanie vous ont permis, récemment, de visiter bon nombre d'établissements au pays, plus particulièrement au sein de la région du Québec. Vous êtes venus visiter le Centre régional de santé mentale situé à l'intérieur du pénitencier Archambault ainsi que l'Unité spéciale de détention située à l'intérieur du Centre régional de réception. L'ensemble de ces visites vous a permis de bien saisir nos efforts et réalisations en matière d'intervention dans les domaines de la toxicomanie et de la santé mentale auprès des délinquants incarcérés. Toutefois, la garde des détenus ne constitue qu'un volet de la mission du Service correctionnel du Canada, et nous sommes heureux de pouvoir vous parler aujourd'hui des moyens dont dispose le Service correctionnel du Canada au sein de la communauté afin de veiller à la réinsertion sociale sûre et sécuritaire de nos libérés conditionnels dont nous assurons la surveillance en communauté.
    Le Service correctionnel du Canada accorde beaucoup d'importance au continuum de soins à apporter au délinquant dès son incarcération, et ce, jusqu'au terme de sa sentence. Dans certains cas, cela va même au-delà. La disponibilité et l'accessibilité à des ressources en communauté sont des facteurs importants de l'évaluation et de la gestion du risque associés à un délinquant, et le Service correctionnel du Canada les considère comme directement liés à la sécurité publique.
    Initialement, trois autres intervenants de la communauté devaient participer à la réunion d'aujourd'hui pour vous faire connaître les services en communauté relativement aux problématiques de toxicomanie et de santé mentale. Bien qu'ils n'aient pas pu répondre à votre demande, nous appuyons le fait que vous vous intéressiez aux services en communauté, étant donnée l'importance du partenariat avec ces organismes qui nous permet d'assurer pleinement notre mandat dans la communauté.
    Nous avons de nombreux partenaires dans la communauté et, avec eux, il est possible de former un véritable filet de sécurité autour des libérés conditionnels et ex-détenus, selon le niveau de risque estimé pour chacun d'eux. Évidemment, les forces policières contribuent à ce filet de sécurité, mais la présence d'organismes communautaires et de groupes bénévoles, de même que le travail de soutien en communauté sont des éléments tout aussi indispensables à une véritable sécurité du public. L'existence, le fonctionnement et l'efficacité de ce réseau de ressources sont malheureusement peu connus et c'est pourquoi nous insisterons principalement sur ces aspects au cours de cette courte présentation. Nous serons ensuite à votre disposition pour répondre à vos questions, et c'est pourquoi Mme Perreault, psychologue et responsable de l'Initiative sur la santé mentale en établissement, et Mme Andrée Gaudet, directrice associée et responsable de la surveillance des libérés conditionnels sur tout le territoire de Montréal et de la Rive-Sud, pourront compléter la présentation et répondre à vos questions.
    Avant de donner des détails sur les mécanismes par lesquels le service correctionnel assure le continuum de soins dans la collectivité, je crois qu'il serait à propos de revenir rapidement sur l'organisation de nos services en santé mentale. Vous avez vu, au Centre régional de santé mentale, que nous offrons des services intensifs, spécialisés en santé mentale, pour des détenus en provenance de tous les établissements de la région du Québec. Ils y sont référés lorsque les services offerts dans chaque établissement ne sont plus à même de répondre aux besoins des détenus en santé mentale. Il peut s'agir de cas suicidaires ou automutilatoires particulièrement aigus, d'une situation d'urgence psychiatrique, d'un besoin d'évaluation psychiatrique ou de traitements spécialisés à long terme. Chaque établissement dispose donc de services pouvant répondre aux besoins de leurs détenus en matière de santé mentale.
    L'Initiative sur la santé mentale en établissement, mise en place sur le plan national il y a maintenant deux ans, a d'ailleurs mis l'accent sur le dépistage des troubles de santé mentale à l'admission. On a maintenant un système informatisé de dépistage de troubles mentaux à l'évaluation initiale et sur l'évaluation exhaustive des besoins en santé mentale subséquente, ainsi que sur la prestation des soins primaires en santé mentale. À cet égard, dans la région du Québec, cette initiative a permis concrètement de mettre en place des équipes de santé mentale dans tous les établissements, c'est-à-dire 12 équipes à plusieurs endroits au Québec. Ces équipes sont constituées de professionnels spécialisés en santé mentale, de psychologues et d'infirmières en santé mentale. Elle a également permis de formuler les premiers constats de la prévalence des besoins en santé mentale au sein de notre clientèle carcérale, soit 15 p. 100 à l'admission chez les hommes et 58 p. 100 à l'admission chez les femmes.
(1535)
    Elle a aussi permis d'offrir des services de soins primaires en santé mentale à 19 p. 100 de la clientèle masculine incarcérée, soit à 575 délinquants au Québec; d'assurer la formation de notre personnel de correction et de notre personnel spécialisé, au Centre régional de santé mentale ou à l'établissement pour femmes à Joliette; de développer des plans de gestion clinique interdisciplinaires dans les dossiers de cas complexes en santé mentale, notamment pour les cas automutilatoires à répétition, et d'assurer, bien entendu, le suivi et la mise en place de ces plans.
    Enfin, grâce à l'Initiative sur la santé mentale en établissement, nous avons mis en place un système de suivi des services offerts en santé mentale, à titre pilote, dans deux établissements, soit Donnacona et Joliette, afin de mieux connaître nos besoins en matière de développement de nouveaux services.
    À partir du 1er avril, tous les établissements de la région du Québec auront ce système, ce qui veut dire que l'on sera en mesure de dire exactement combien, quand et qui a bénéficié des services en santé mentale, ce que l'on ne pouvait pas faire jusqu'à tout récemment.
    Reprenons maintenant le fil de notre continuum de services. Les établissements faisant face à des problématiques de santé mentale qui excèdent leur capacité locale peuvent donc référer ces cas au Centre régional de santé mentale. Là encore, bien que le service dispose d'une expertise et d'installations appropriées, certains cas requièrent des soins encore plus poussés et ils sont référés à l'Institut Philippe-Pinel de Montréal, un partenaire du Service correctionnel depuis près de 30 ans. Précisons également que l'Institut Philippe-Pinel constitue le second niveau de référence pour les femmes délinquantes. Il s'agit d'une unité nationale qui dessert l'ensemble des régions du Service correctionnel.
    Selon l'entente contractuelle qui nous lie, l'Institut Philippe-Pinel offre une capacité de 12 lits pour les délinquants sexuels — traitement spécialisé pour des délinquants présentant des besoins particuliers en santé mentale —, 12 lits pour les femmes délinquantes et 3 lits pour les besoins aigus pour les hommes. Dans tous les cas, les détenus qui séjournent soit au Centre régional de santé mentale, soit à l'Institut Philippe-Pinel, retournent éventuellement dans leur unité d'origine. En fait, le lien n'est jamais rompu avec l'équipe de gestion de cas locale et l'équipe de soins de l'instance où est référé le détenu ou la délinquante, et ce, conformément au principe de partage de l'information au moment opportun et du continuum de soins.
    Les besoins particuliers des délinquants ayant une problématique de santé mentale sont donc pris en compte durant leur incarcération, incluant leur préparation à la réinsertion sociale. Au moment d'envisager concrètement la réinsertion, de nouveaux professionnels se joignent à l'équipe de gestion de cas. Ainsi, l'Initiative sur la santé mentale, cette fois appelée « en communauté », tient un rôle majeur dans la planification de la remise en liberté des délinquants et des délinquantes qui présentent des besoins en santé mentale. Les équipes cliniques de cette initiative, infirmières et travailleurs sociaux, s'impliquent dans l'organisation des soins transitoires en santé mentale plusieurs mois avant une première remise en liberté potentielle.
    Les équipes de gestion des cas et les intervenants des deux initiatives sur la santé mentale travaillent de concert à l'identification des besoins en santé mentale et des besoins en matière de soutien afin d'assurer la remise en liberté sécuritaire. Essentiellement, leur travail consiste à déterminer le meilleur endroit pour qu'un délinquant entreprenne son retour à la société, et ce, en équilibrant d'une part l'intensité des besoins et, d'autre part, les ressources de l'individu et de son milieu. Une fois l'endroit — la ressource — déterminé, ils entreprennent alors une véritable préparation de terrain. Ils s'entretiennent avec les ressources communautaires, prennent contact avec les services environnants, la police, les organismes communautaires, les Centres locaux de santé communautaire et informent le délinquant, le préparant ainsi à sa transition en société.
    Actuellement, l'Initiative sur la santé mentale dans la collectivité assure le suivi de 76 libérés conditionnels. Bien entendu, un nombre plus élevé de délinquants présentent des besoins de santé mentale lors de leur remise en liberté. Toutefois, seule une portion de ce nombre nécessite l'encadrement de l'Initiative sur la santé mentale dans la collectivité. Ces 76 délinquants actuellement suivis présentent des besoins d'encadrement qui excèdent ce que les modalités régulières de remise en liberté peuvent leur offrir. Les démarches entreprises par l'Initiative sur la santé mentale dans la collectivité sont donc de même nature, mais plus intenses que celles effectuées pour la réinsertion des cas ayant des besoins de santé mentale moindres ou n'en ayant pas du tout.
(1540)
    Afin de réaliser son mandat de soutien à une réinsertion sociale harmonieuse, l'Initiative sur la santé mentale dans la collectivité a construit des liens avec des partenaires communautaires dont le mandat est la prise en charge, le soutien et la défense des droits des personnes présentant des besoins en santé mentale. Ces liens visent à rendre disponibles des ressources aux délinquants et délinquantes présentant des besoins en santé mentale. Les domaines ciblés par ces liens entre le Service correctionnel et les ressources en santé mentale vont des suivis psychiatriques et de l’adhérence au traitement, pharmacologique ou psychosocial, aux besoins en hébergement, en passant par la réinsertion au travail par l'entremise d'ateliers supervisés et de soutien dans les activités quotidiennes.

[Traduction]

    Puis-je vous interrompre un instant? Allez-vous lire tout le rapport que vous avez déposé?
(1545)
    Presque. Ça va?
    Puis-je simplement obtenir la permission du comité pour vous permettre de terminer? Normalement, nous accordons 10 minutes.
    Êtes-vous d'accord pour la laisser terminer? Il y en a probablement pour encore sept ou huit minutes.
    Bon, le comité semble d'accord.
    Monsieur le président, je n'ai vu que deux mains levées. Ce n'est pas que je ne trouve pas l'exposé intéressant — bien au contraire — je veux m'assurer que nous aurons l'occasion de poser des questions.
    Vous êtes le seul à vous opposer.
    Je suis d'accord avec lui. Nous aurons besoin de plus de temps pour les questions.
    Bon alors, si vous pouviez conclure en quelques minutes.
    Monsieur MacKenzie.
    Monsieur le président, de notre côté, cela ne nous dérange pas; tout ce qui plaira à nos amis d'en face. Mais nous serons sortis d'ici à 17 h 15, j'espère.
    D'accord.
    Faisons un autre comptage. Combien aimeraient qu'on la laisse terminer son rapport?
    D'accord. Si vous pouviez conclure d'ici quelques minutes.
    D' accord.

[Français]

    Je serai brève.
    On vous a parlé de l'Initiative sur la santé mentale en établissement, du lien avec la communauté et le travail de partenariat réalisé avec plusieurs organismes communautaires afin d'assurer l'intégration des délinquants. On vous a parlé aussi des équipes qui existent dans la communauté, des travailleurs sociaux, des infirmières, etc. On fait aussi affaire avec des médecins et des psychiatres.
     Au Québec, il y a quelque chose de particulier. Il s'agit du Centre correctionnel communautaire Martineau. Il s'agit d'une institution appartenant au Service correctionnel du Canada. Cet établissement est situé dans le Nord de Montréal et opère en collaboration avec la communauté. Il est important que les centres correctionnels communautaires s'assurent que leurs services ne sont pas offerts en rupture avec la communauté. On travaille avec des comités consultatifs de citoyens qui sont essentiellement composés de bénévoles de la communauté environnante où on opère. Ils nous permettent de mieux saisir les besoins de la communauté et d'ajuster nos services.
    Au Centre correctionnel communautaire Martineau, pour les 60 p. 100 de délinquants, il y a environ 28 places, sauf erreur. De celles-ci, 24 sont occupées par des hommes et 4 par des femmes. Certains de ces hommes ont des problèmes de mobilité réduite. Ils sont en fauteuil roulant et ils ont besoin de certains soins médicaux particuliers. Ces 24 places pour hommes sont pour des gens ayant des problèmes de santé mentale. C'est la même chose pour les femmes. Au CCC Martineau, 60 p. 100 de la clientèle masculine arrive du Centre régional de santé mentale. Nous avons assuré un suivi, intégré nos services et assuré ceux-ci grâce à un plan d'intervention clinique suivi jusque dans la communauté. Il faut aussi comprendre qu'au CCC Martineau, contrairement à d'autres CCC, il y a du personnel spécialisé sur place 24 heures sur 24, sept jours par semaine, pour assurer la prestation des services. On retrouve des infirmières, ce qu'on appelle des conseillers en comportement clinique, des agents de libération conditionnelle, des psychologues, des agents de correction. La clientèle est rencontrée régulièrement pour qu'on puisse la suivre, ajuster la médication et s'assurer que les plans de réinsertion sociale sont bien suivis.
    Je n'irai pas plus loin, je n'aborderai pas la question de la toxicomanie. Si on se fie aux questions que le greffier nous a fait parvenir, la santé mentale semble être ce qui vous intéresse le plus. C'est un élément fondamental de la réussite du CCC Martineau, car c'est le seul endroit où on peut vraiment assurer une continuité. Il n'y a pas de rupture de services pour les cas de santé mentale. On développe aussi des liens avec d'autres organismes communautaires qui pourront poursuivre le travail au-delà de notre mandat.
    Je vous remercie.
(1550)

[Traduction]

    Merci.
    De toute évidence, vous en aviez beaucoup à dire. Nous pouvons lire votre rapport, mais sans plus attendre, passons au Parti libéral.
    Monsieur Holland, voulez-vous commencer?

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins de leur présentation.
     Il y aura certainement une augmentation de la population carcérale à cause des nouveaux projets de loi à la Chambre des communes. Le ministère prévoit-il augmenter les ressources pour les personnes ayant des problèmes de santé mentale ou des problèmes de drogue?
    Pour le moment, on est encore en train de faire les analyses de l'impact des projets de loi sur la population carcérale. Sur une base régulière, le Service correctionnel du Canada fait l'évaluation des besoins de modifications des infrastructures ou d'adaptation des infrastructures en fonction des besoins des contrevenants. C'est la même chose pour la santé mentale. Un peu plus tôt, je vous ai parlé de nouveaux outils d'évaluation qui sont maintenant utilisés dès l'admission des nouveaux détenus. Au fur et à mesure qu'on aura des informations beaucoup plus précises sur la nature des besoins des délinquants, on devra adapter nos interventions.
    M. Don Head était au comité la semaine dernière. Il a dit que la population augmentera certainement. Vous inquiétez-vous qu'il n'y ait présentement aucune planification pour augmenter les services, même si on sait bien que la population augmentera?
    Pour le moment, on n'est pas inquiets. Chaque année, on fait des évaluations de notre population parce qu'on a évidemment besoin de le savoir pour le financement. On revoit les augmentations de population, on établit des moyennes et on est toujours prudents parce qu'on peut parfois les surestimer ou les sous-estimer. Donc, on n'est pas vraiment inquiets.
    Cependant, il n'y a jamais eu une situation comme celle-là.
    À l'heure actuelle, il y a plusieurs projets de loi à la Chambre des communes qui ont une grande implication pour les prisons. Il y aura certainement une grande augmentation de la population. S'il n'y a aucun plan pour des services de santé mentale, je m'en inquiète certainement. Par exemple, que pensez-vous du double bunking? Excusez-moi, je ne connais pas le mot en français. Il y a là un enjeu. Le ministre a dit que ce n'est pas un problème de permettre le double bunking, même s'il y a une convention internationale.

[Traduction]

    Le Canada est signataire d'une entente internationale des Nations Unies interdisant cette pratique. Pourtant, nous en parlons encore maintenant. D'après vous, quelles seraient ses répercussions sur la santé mentale?

[Français]

    On n'est pas encore rendus à cette étape. Les projets de loi ne sont pas encore adoptés. De notre côté, c'est toujours à l'étude. Au fur et à mesure que les choses se concrétiseront, comme on l'a toujours fait par le passé, le service correctionnel adaptera ses services et reverra sa planification au niveau des infrastructures.
    La question du double bunking est un élément qu'on surveille le plus possible. Quand on a à y recourir, il est certain qu'on fait les analyses des besoins des délinquants. Donc, pour le moment, on n'est pas inquiets.
    À votre avis, quel serait l'impact du double bunking si le ministre décidait que c'était la seule option pour le gouvernement? Le ministre disait, la semaine dernière, que ce n'était pas un problème pour lui. Quel est l'impact sur les enjeux en matière de santé mentale, par exemple?
(1555)
    Je répète la même réponse.
    Il faut faire les analyses de ces projets de loi avant de vraiment déterminer quel sera l'impact, que ce soit sur le double bunking ou sur l'ensemble des services aux détenus. Donc, on attendra d'avoir les analyses en main.
    Y a-t-il des discussions avec les fonctionnaires ou avec le bureau du ministre à propos de la planification pour les nouvelles prisons ou les nouveaux espaces pour les prisonniers?
    Je ne pourrais pas vous le dire. Je m'occupe de la région du Québec.
    Je comprends.
    Il y aura une augmentation de la population. Il est certainement logique qu'il y ait une discussion à cet égard. Quelle est la façon de gérer la situation s'il n'y a maintenant aucune discussion?
    Toutes les fois qu'il y a des changements dans la population carcérale, des analyses sont faites et, par la suite, des discussions se tiennent avec le gouvernement en place. C'est certain que s'il faut aller chercher des fonds supplémentaires, cela va devoir se faire ultérieurement. C'est toujours fait sur la base d'analyses rigoureuses.

[Traduction]

    Merci.
    Je cède maintenant la parole à Mme Mourani.

[Français]

    Merci.
    Tout d'abord, je voudrais vous remercier d'être présente ici et de votre témoignage.
    Un peu en complémentarité avec ce que M. Holland vient de dire, selon vous, combien y aurait-il d'agrandissements prévus au Québec relativement aux constructions à venir?
    Pour le moment, je n'ai pas ces chiffres-là, madame Mourani, et je n'ai pas cette planification-là.
    Toutefois, à votre connaissance, y aura-t-il des agrandissements, des rénovations?
    Des rénovations, il y en a toujours parce qu'on a besoin d'adapter nos infrastructures. Je pense que quand vous êtes venue...
    Oui, il y en avait d'ailleurs, tout à fait.
    Il y en avait. On en prévoit d'autres, notamment pour le Centre régional de santé mentale. Certains établissements peuvent être plus ou moins désuets sous certains aspects. Étant donné les sommes qu'on a investies récemment dans la sécurité, on réalise qu'il faut adapter, par exemple, l'entrée des établissements. Comme vous avez vu, on installe des détecteurs de métal, de nouveaux dispositifs technologiques qui requièrent un peu plus d'espace. Donc, on modernise cet aspect.
    Concernant les agrandissements, avez-vous de l'information?
    Pour le moment, on n'a pas ces informations.
    Je voudrais aborder un autre point. À la page 9 de votre présentation, vous faites état de chiffres concernant les récidives. Si je comprends bien ce que je lis, et je peux me tromper, ce sont des récidives qui se sont produites durant la liberté surveillée de la personne. Donc ce sont des récidives et non des suspensions, si je comprends bien.
    Ce sont des récidives, mais il faut comprendre que, notamment pour les cas d'ordonnance de surveillance de longue durée, si une personne ne respecte pas une ordonnance sans qu'elle ait commis un crime ou un délit, le fait de ne pas respecter cette ordonnance de surveillance de longue durée est considéré comme une récidive.
    C'est considéré comme une récidive. Donc cela comprend autant un bris de condition qu'un crime.
     J'aimerais que vous me donniez des chiffres, que vous nous les fassiez parvenir par écrit. Pouvez-vous nous envoyer la ventilation en pourcentage, ou en chiffres, non seulement des suspensions et des bris de condition — bien sûr, suspensions et bris de condition ne sont pas toujours liés, mais tout de même —, mais aussi des vraies récidives en matière de criminalité, selon les crimes. Bien sûr, on emploie le mot « récidive », mais est-ce une récidive dans un crime de même ordre, ou bien voit-on une dégradation ou une gradation dans la criminalité? Je ne sais pas si vous avez ces chiffres-là.
    Je ne sais pas si on peut être aussi précis, mais on peut certainement vous donner des chiffres en fonction des récidives violentes ou non violentes.
(1600)
    C'est déjà très bien.
    D'autre part, Mme Gaudet, j'ai compris que le CCC Martineau est le seul — mais je peux me tromper — au Québec qui a cette spécificité de ne s'occuper que des cas de santé mentale. C'est bien cela?
    Donc le Centre correctionnel communautaire Martineau est un exemple de CCC qui traite à l'extérieur des personnes atteintes de différents degrés de troubles mentaux qui sont sous la responsabilité du Service correctionnel du Canada.
    Le centre va traiter des cas qui ont des problèmes de troubles mentaux et qui ont besoin d'un service d'hébergement spécialisé.
    Des personnes qui ne peuvent pas être chez elles parce qu'on risquerait d'avoir un risque beaucoup trop important. C'est cela?
    Oui, ou qui ont des besoins élevés qui font en sorte qu'elles ont besoin de ce type d'encadrement.
    Au CCC Martineau, qui est le seul endroit au Québec à s'occuper de cas de santé mentale, continue-t-on de recevoir tout profil criminel, soit des agresseurs sexuels, des pédophiles, en plus de la problématique de santé mentale?
    Oui, les critères sont associés à la problématique de santé mentale et n'excluent pas la criminalité.
     Ce point-là est assez particulier puisque le Centre correctionnel communautaire Martineau est situé à deux ou trois minutes de marche d'une école et d'une grosse garderie. Je vous avoue que c'est une grande préoccupation dans le comté, bien que je sache pertinemment que le CCC Martineau est très efficace et que c'est un très bon organisme. Je n'ai absolument rien à dire. Il est dans mon comté, c'est pour cela que je le connais bien. J'ai rencontré deux fois le directeur. Il me connaît aussi très bien. Donc, on a un très bon suivi. Je n'ai absolument rien à dire.
    Cela dit, après deux ministres de la Sécurité publique — nous en avons un troisième actuellement —, deux questions et trois années, pensez-vous qu'on puisse accepter d'avoir, au CCC Martineau, des pédophiles comme M. Bégin qui était sur notre territoire? Ces personnes, qui ont des problèmes de santé mentale, qui viennent du Centre régional de santé mentale — ce sont parfois de gros cas — ne sont pas des enfants de choeur. Je parle en tant que citoyenne. Pensez-vous que c'est acceptable qu'elles se retrouvent au CCC Martineau à côté de nos enfants, de l'école et de la garderie? C'est une nouvelle garderie qui vient d'ailleurs d'ouvrir: elle compte presque 50 enfants. Qu'en pensez-vous?
    Je vous dirais que toutes les ressources en communauté — qu'on parle de CCC ou de centres résidentiels communautaires — accueillent des délinquants pour lesquels on a mis en place un dispositif de gestion du risque. Le CCC Martineau n'a pas une plus grande concentration de cas de pédophilie; il a une concentration de cas ayant des problèmes de santé mentale. Pour le CCC Martineau, bien entendu, on a mis en place une mécanique de surveillance de ces délinquants extrêmement serrée.
    Vous avez vous-mêmes visité le CCC et vous aurez constaté qu'ils ne peuvent pas sortir seuls. Ils doivent être accompagnés par un intervenant du CCC. Et cela durera le temps nécessaire pour bien évaluer la capacité de la personne à...
    À pouvoir sortir seule...
    À pouvoir sortir seule, mais pas seulement ça. On veut aussi assurer la sécurité des gens dans la communauté.
    On y va donc par étape. C'est long, c'est de l'encadrement, mais c'est la meilleure façon d'y arriver. Ce qu'on croit, c'est que...
    Je comprends tout cela.

[Traduction]

    Votre temps est écoulé.
    Pouvez-vous m'accorder une minute de plus?
    Vous avez déjà pris une demi-minute de trop.
    Veuillez être très brève, d'accord?

[Français]

    D'accord.
    Vous comprenez que les gens qui habitent dans les environs envoient leurs enfants dans ces garderies ou à l'École secondaire Marie-Anne tout près, fréquentée par des jeunes filles de 14 ans et 15 ans. Vous comprenez que la population ne dispose pas de toute cette analyse criminologique qu'on peut faire. C'est donc très préoccupant pour eux de recevoir sur leur territoire des personnes non seulement qui ont des problèmes de santé mentale — ce qui serait gérable —, mais qui, en plus de cela, ont des déviances sexuelles graves, prenons le bel exemple de M. Bégin. Il ne s'agit pas de pédophiles qu'on peut contrôler; ce sont des gars qui ont commis des actes très graves qui se retrouvent là-bas et au Centre régional de santé mentale.
(1605)

[Traduction]

    Il reste du temps pour une réponse brève. Avez-vous une réponse?

[Français]

    On comprend les préoccupations de la communauté et c'est pour cela que le Service correctionnel du Canada a mis en place toutes sortes de mécanismes pour consulter la communauté et aussi pour les intégrer, notamment par les comités consultatifs de citoyens. La problématique criminelle est difficile à comprendre pour les citoyens, et on le conçoit. Cela fait donc partie de notre mandat d'aller expliquer comment cela se passe et comment on les encadre.
    En pratique, madame Mourani, je vous dirais que c'est beaucoup plus sécurisant de savoir qu'ils sont encadrés 24 heures sur 24, qu'on peut les « monitorer » si nécessaire et qu'on peut les ramener en établissement plutôt que de les remettre en liberté sans encadrement. C'est aussi un service clinique en ce sens qu'ils ne sont pas laissés à eux-mêmes et qu'ils sont vraiment suivis régulièrement, pas seulement en ce qui concerne le risque, mais aussi en ce qui concerne leur état de santé mentale. Si on stabilise leur état de santé mentale, on aide vraiment à réduire tout le risque.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    La parole est maintenant à M. Davies.
    Thank you. Merci beaucoup.
    Heureux de vous revoir, madame Vallée. Vous pouvez me répondre en anglais ou en français, comme bon vous semblera.
    Comme vous le savez, nous étudions les toxicomanies et la santé mentale. Je vais donc consacrer mes questions à ces sujets.
    À la page 10 de vos remarques, vous donnez des statistiques sur les personnes qui suivent des programmes de traitement de leurs toxicomanies dans les établissements. À l'intérieur de la période que vous indiquez, de 2009 à 2010 — période qui se rapproche de l'exercice financier dans notre langage parlementaire —, 420 délinquants ont entrepris un programme correctionnel en toxicomanie et 326 l'ont mené à terme. Vous parlez d'un taux de réussite de 78 p. 100. Ce taux est mesuré à l'achèvement du programme, je suppose.
    Une voix: C'est à la fin du programme.
    M. Don Davies: Je me demande si vous rassemblez des statistiques sur la sobriété ou la non-utilisation à long terme, des statistiques qui nous permettent de mesurer, un an, trois ans ou cinq ans plus tard, l'efficacité des thérapies.
    Nous n'avons pas ces statistiques avec nous, mais, de fait, nous conservons des statistiques sur la réussite à long terme — pendant cinq ans, dix ans.
    Parlez-vous de rechute, de récidive dans la toxicomanie?
    Oui.
    Oui, nous avons des statistiques. Une partie de notre population revient derrière les barreaux, de sorte que nous savons ce qui se passe chez elle. Mais la plus grande partie ne revient pas, et nous n'avons pas de statistiques sur elle. Mais, de fait, nous pouvons effectivement trouver des statistiques pour vous.
    Beaucoup de délinquants bénéficient d'une libération conditionnelle dans la communauté. Je suppose que vous conservez des statistiques sur un grand nombre de personnes qui ont quitté l'établissement, mais qui restent en liberté conditionnelle.
    Parlez-vous de statistiques sur la période allant de la fin du programme jusqu'au moment où la sentence est purgée, que ces personnes succombent ou non à la toxicomanie? Est-ce ces statistiques que vous voulez connaître?
    Oui, je pense qu'elles nous intéresseraient. Si 80 p. 100 des délinquants admis dans les institutions ont des problèmes de toxicomanie, si j'en crois votre exposé, il nous faut donc, entre autres choses, découvrir si les programmes que nous leur offrons sont efficaces à long terme.
    Voulez-vous être au courant de l'entretien?
    Je voudrais bien, si c'est possible. Merci.
    À la page 9 de votre exposé, vous avez des statistiques sur les taux de récidive. Deux choses m'ont frappé. La première est le taux si faible de récidive chez de nombreuses personnes. Je pense que vous avez dit que, en 2008-2009, d'après les statistiques de Service correctionnel Canada, seulement 0,74 p. 100 de tous les délinquants sous supervision avaient récidivé. Pour un profane comme moi, c'est un taux très faible.
    Il s'agit des délinquants ayant des besoins en santé mentale.
    Dans le bas de la même page, on constate, dans le sous-groupe des délinquants ayant des besoins en santé mentale sous supervision, que six d'entre eux, soit 1,48 p. 100, ont récidivé. Peut-être y a-t-il erreur. Je suppose que le taux de 0,74 p. 100 concerne tous les délinquants. C'est ce qu'on lit. Ce n'est pas seulement pour les personnes ayant des besoins en santé mentale. C'est l'ensemble des délinquants.
(1610)
    D'accord.
    Au-dessous, le taux de 1,48 p. 100 concerne les personnes ayant des besoins en santé mentale. Quelle coïncidence! Ce taux est exactement le double de celui qui précède, si je compte bien. Deux fois plus de personnes qui ont des besoins en santé mentale récidivent. C'est 1,48 contre 0,74 p. 100. On devrait s'attendre, il me semble, à ce que les personnes ayant des besoins en santé mentale soient une population plus éprouvée.
    Pouvez-vous nous dire quelles idées SCC pourrait avoir pour aider à abaisser le taux de récidive chez des personnes ayant des besoins en santé mentale? Ce taux est manifestement plus élevé que dans la population normale.
    Je devrai vérifier les statistiques. Vous avez la version anglaise et moi j'ai la version française.
    Oui, vous avez raison.
    Nous devons nous assurer de stabiliser les délinquants sur le plan clinique et, également, avec l'aide de médicaments. Ce que nous trouvons difficile, notamment, c'est de nous assurer qu'après leur libération et après la fin du mandat, ils continueront de prendre leurs médicaments et que le réseau que nous avons mis en place pour eux subsistera. C'est pourquoi il est si important pour nous de non seulement avoir, par exemple, le CCC Martineau, où nous dispensons des services spécialisés, mais de nous assurer que, à la fin du mandat, ils auront l'appui de la collectivité. C'est ce qui fera une différence dans le taux de réussite des délinquants.
    Avez-vous des propositions pour le comité sur les ressources précises qui, d'après vous, pourraient être mises en place dans la collectivité pour aider les gens ayant des besoins en santé mentale? Je suis d'accord avec vous: il faut s'assurer qu'ils prennent leurs médicaments, mais quelles autres ressources, dans la collectivité, aideraient à prévenir leur récidive?
    Par exemple, au CCC Martineau, nous avons des partenariats avec des organismes communautaires qui peuvent appuyer le délinquant dans sa recherche d'un emploi. Ce n'est pas facile pour le délinquant qui a des problèmes de santé mentale. Toutefois, ces organismes peuvent les aider. Nous avons en outre des ateliers de réinsertion par le travail. Nous avons noué un partenariat avec des ateliers, parce que la réinsertion ne dépend pas seulement de la supervision de SCC, mais, également, de la capacité des délinquants à établir des rapports positifs avec le travail et avec un réseau de groupes de soutien.
    Par exemple, dans la région de Québec, nous avons les aumôniers. Ils fournissent bénévolement un appui aux cas de santé mentale. Ils sont disponibles le samedi soir; c'est un endroit spécial que les délinquants peuvent fréquenter. Ils peuvent aller voir des parties de hockey, accompagnés par des bénévoles. Ils ont donc le sentiment d'appartenir à une communauté et ils savent qu'ils peuvent être appuyés. Ils peuvent aussi compter sur une infirmière ou un médecin, qu'ils peuvent appeler. C'est la même chose dans d'autres régions. L'une des plus grandes difficultés que nous éprouvons, c'est d'établir une continuité entre nos services et les services provinciaux de soins de santé. C'est seulement ainsi que nous établirons un véritable continuum de services, parce que, à la fin du mandat, nous ne pouvons plus accompagner les délinquants. Nous tenons beaucoup à cette continuité.
    Merci.
    J'ai une explication sur les statistiques que vous avez citées, à la page 7 du texte anglais. Est-ce que ces statistiques s'appliquent à tout le Canada ou seulement à vos établissements au Québec?
    Elles s'appliquent aux établissements du Québec.
    Au Québec seulement. Merci.
    Madame Glover.

[Français]

     Bonjour et bienvenue à tous les témoins. Je suis contente de vous revoir, madame Vallée.
    Je voulais seulement clarifier quelque chose avant de poser mes questions. Mme Mourani, je crois, a parlé du CCC Martineau. Ai-je bien compris qu'une garderie pour enfants a été ouverte après que le CCC Martineau eut été bâti?
    Mme Johanne Vallée: Oui.
    Mme Shelly Glover: Cela nous amène à nous demander pourquoi on créerait ou construirait une garderie près du site d'une institution comme le CCC Martineau, en sachant ce que c'est et sans avoir fait tout ce qu'on pouvait pour apaiser les inquiétudes.
(1615)

[Traduction]

    Je suis convaincue que nous devons attribuer du mérite à la population de cette ville. J'imagine qu'elle a fait ses recherches avant d'installer une garderie à cet endroit. Je suis donc convaincue qu'elle avait le sentiment qu'elle ne serait pas victimisée.
    Avez-vous des incidents à me raconter qui concernent le CCC Martineau? Quelqu'un dans la communauté a-t-il été offensé par les crimes odieux qu'on nous a décrits? Avez-vous eu des incidents?
    Auxquels la garderie aurait été mêlée? Non.
    Dernièrement, nous avons approché la directrice de la garderie pour inviter un membre de son conseil d'administration à faire partie de notre comité consultatif des citoyens pour le CCC, parce que, vraiment, je comprends leurs craintes et leurs préoccupations. Mais je suis convaincue que nous pouvons expliquer aux gens comment nous fonctionnons et comment nous pouvons nous assurer qu'ils ne subiront aucun problème.
    De fait, chaque fois que nous libérons un délinquant dans la communauté, partout au Canada, pas seulement au Québec, nous avertissons la police, et la police ainsi que la communauté autour du CCC sont prévenues de son arrivée. Elles sont ainsi en mesure de contrôler la situation.
    D'accord. Je voulais une explication. Je pensais avoir mal entendu.
    Dernièrement, dans la province d'où je viens, j'ai eu une célébration avec la société Momentum Healthware Inc., qui produit des logiciels pour différentes situations de prestation de soins de santé et qui, avec de l'aide du gouvernement du Canada et du programme d'aide à la recherche industrielle du Conseil national de recherches du Canada, a mis au point un système de suivi électronique qui permet aux personnes souffrant de problèmes de santé mentale de bénéficier du continuum de soins.
    Avez-vous des dossiers de santé électroniques qui vous permettent d'assurer ce continuum de soins, lequel, nous sommes tous d'accord, est très important?
    Nous poursuivons notre travail sur le dossier de la santé mentale, mais SCC planche sur la question et s'aligne sur une solution électronique. Cela nous permettra de partager des renseignements, de faire des suivis et d'assurer le continuum de soins, mais nous sommes encore loin du but. C'est très complexe, parce que nous avons besoin d'un logiciel puissant. C'est aussi très compliqué. Il faut que ce soit bilingue.
    J'ai assisté à sa démonstration. C'était fantastique. Je crois dans l'utilisation de toutes les ressources qui sont parties prenantes à ce problème et qui veulent aider les personnes qui souffrent de maladie mentale. Je vous recommande d'examiner ce logiciel.
    Je veux passer à une autre question, parce que, pendant notre tournée, il s'est produit quelque chose de très intéressant. M. Davies et moi avons rencontré une femme, qui ne voulait pas comparaître devant tous les membres du comité, parce qu'elle était nerveuse: elle souffre de problèmes de santé mentale et, aussi, de toxicomanie. Nous avons passé quelque temps avec elle et nous lui avons demandé ce qu'elle pensait de son établissement. Elle a loué les programmes, et les services qui étaient disponibles.
    Je lui ai demandé ce qu'elle aurait à dire aux parlementaires. Si nous pouvions améliorer les choses, quel serait son message? Sa réponse m'a étonnée: « C'est facile: Que les conséquences soient plus importantes pour les personnes qui, en dedans, fabriquent de l'alcool, parce que je suis toxicomane et que mon traitement, mes programmes et les choses que j'essaie de réaliser pour moi-même sont menacés par la conséquence, qui est une amende de 5 $ ».
    Quelles sont les conséquences, en prison, dans vos établissements, dans toute l'organisation de Service correctionnel, pour les personnes qui, dans l'organisation, font de telles choses? Que pouvons-nous faire pour aider cette femme? Quelles sont les conséquences pour quelqu'un qui, par exemple, est surpris à fabriquer de l'alcool dans vos établissements?
(1620)

[Français]

    Ça dépend. On pourrait avoir recours à la cour disciplinaire, des privilèges pourraient être suspendus ou des droits de visite pourraient être annulés, il pourrait y avoir des amendes. Cela dépend vraiment de la situation et, évidemment, du dossier de l'individu. Cela varie. Je n'ai pas de détails spécifiques, mais on pourrait vérifier ce que l'on fait en ce qui a trait à la consommation de drogues ou d'alcool.
    J'aimerais savoir quelle est la conséquence la plus sévère. En fait, j'aimerais connaître toutes les conséquences possibles.
    Travailliez-vous pour le système correctionnel ou judiciaire il y a plusieurs années, alors que les provinces ont fermé les portes des institutions provinciales spécialisées dans les problèmes de santé mentale? Quelqu'un, ici, a-t-il travaillé dans le temps de l'ancien système? J'aimerais que l'on fasse la comparaison entre l'ancien système et celui d'aujourd'hui, car je pense que cela a eu une influence.
    Ça fait longtemps. Cela a commencé il y a plus de 30 ans et ça s'est fait de façon graduelle. Je peux parler du Québec. Puisque cela a été fait de façon graduelle, il est difficile pour nous de faire la comparaison. Cela a été fait par étapes. Nous ne sommes pas assez vieilles.

[Traduction]

    Nous ne sommes pas assez vieilles pour cela. Désolée, nous n'avons pas ce privilège.

[Français]

    Chez nous, je crois que ça fait 18 ans que l'on a fermé les portes de la dernière...
    Pensez-vous qu'il y a un avantage à ce qu'il y ait des institutions, pour les personnes atteintes de problèmes mentaux gérées par les provinces, c'est-à-dire pour arrêter ces personnes avant qu'elles ne deviennent des criminels? On a entendu beaucoup de témoins dire que si seulement on avait identifié les problèmes mentaux de ces personnes avant que le crime ne soit commis, on aurait pu éviter qu'elles soient incarcérées dans une prison fédérale.
     Êtes-vous d'accord sur cela?

[Traduction]

    Ce sera la dernière question.
    Allez-y.

[Français]

    Il existe plusieurs perspectives relativement à la façon de gérer les cas de santé mentale. Doit-on les criminaliser ou non?
    Le gouvernement a mené des consultations et le Service correctionnel du Canada travaille avec les services correctionnels des provinces et étudie cette problématique de la santé mentale au sein du système correctionnel pour adulte. Il vaudrait peut-être la peine de vérifier auprès du comité de ce que l'on appelle les responsables des services correctionnels, pour voir où ils en sont dans leurs délibérations.
    Évidemment, je ne les ai pas en main présentement, mais il y a aussi les analyses des tribunaux spécialisés en santé mentale. De tels tribunaux existent à différents endroits. Au moment où un individu doit comparaître devant le juge, on examinera la problématique de la santé mentale et on décidera si on aura recours au système de justice criminel dans ce cas. Énormément de recherches sont faites à propos de ces tribunaux. Ces recherches sont relativement récentes. Je pense que ça vaudrait la peine de regarder ce qui ressort de ces recherches.

[Traduction]

    Merci.
    Monsieur Kania, s'il vous plaît.
    Monsieur le président, Mme Mourani a demandé qu'on lui accorde un peu plus de temps. Je vais donc lui donner celui qui me revenait.

[Français]

    Merci.
    Madame Vallée, je voudrais revenir au CCC Martineau. En quelle année a-t-il été créé?
    Je pense que ça fait au-delà de 10 ans, madame Mourani.
    Ça fait 10 ans ou au-delà de 10 ans?
    Il existe depuis janvier 2000.
    En fait, il existait avant, en tant que CCC, mais en janvier 2000, le Service correctionnel a décidé de le spécialiser en santé mentale.
    Vous dites qu'il existait avant. En quelle année a-t-il été créé?
    Je ne pourrais pas vous le dire. Je n'ai pas ces données sous la main.
(1625)
    C'était il y a 40 ans, 50 ans ou beaucoup moins?
    C'est plus récent.
    Est-ce qu'il existait pendant les années 1920, à votre avis?
    Il n'y avait ni CCC ni centre résidentiel communautaire pendant les années 1920.
    Tout à fait.
    Je voudrais revenir sur ce que disait plus tôt Mme Glover. D'ailleurs, je suis d'accord avec elle. J'ai fait des représentations auprès de mon arrondissement. Je me suis dit qu'il était inacceptable qu'une garderie soit située près d'un CCC. Or l'école existe depuis 1922.
     Comment se fait-il que les autorités responsable de cela aient décidé de construire un CCC à côté d'une école qui existe depuis 1922? Je peux vous confirmer que la première aile de l'école existe bel et bien depuis cette année-là. L'école était donc déjà là avant l'établissement du CCC.
    Je ne cherche pas vraiment à savoir lequel des deux établissements a été le premier à être créé. Mon but est plutôt de répondre à Mme Glover et de lui montrer que la question est toujours très pertinente vu que la protection des enfants semble un point important.
     Nous connaissons la dynamique actuelle du quartier. Une école y a été construite bien avant la création du CCC et, de plus, il y a une garderie. Je ne remets pas en cause le fait que le CCC reçoive des personnes atteints de problèmes de santé mentale. Ce que je remets en cause et ce que la Commission scolaire de Montréal remet en question également, c'est uniquement la présence de pédophiles.
    Pouvez-vous me confirmer, de même qu'aux parents de ce secteur dont les enfants fréquentent l'école, qu'il n'y aura jamais d'incident? Je parle ici des enfants de cette école, des jeunes filles qui passent par là, et ainsi de suite. Pouvez-vous me confirmer qu'il n'y aura jamais d'incident?
    Madame Mourani, nous ne pouvons malheureusement pas le confirmer pour aucun de nos délinquants. Que l'on parle de pédophiles ou de délinquants ayant commis d'autres types de délits graves, nous ne pourrons jamais confirmer ce genre de chose. Nous pouvons par contre vous confirmer notre engagement à bien choisir les détenus qui sont référés à ces endroits et notre engagement à bien les encadrer.
    J'apprécie votre honnêteté.
    En définitive, vous dites que vous ne pouvez pas nous confirmer un risque zéro. Le risque est toujours là. Vous comprenez par conséquent la préoccupation des gens de vouloir avoir recours à la prévention. Tant mieux si des mesures sont prises pour éviter une catastrophe, mais allons-nous attendre qu'il s'en produise une pour agir? Je vous avoue bien franchement qu'à mon avis, ce n'est pas à votre niveau que ça se passe. Ce n'est pas vous qui émettrez une directive relativement au CCC. Ça va se faire à un niveau plus élevé, et je respecte cela.
    Je vais donc passer à un autre point, si vous me le permettez, monsieur le président.
    On a visité l'USD. J'ai trouvé l'endroit très intéressant et aussi très sécuritaire. C'est très bien comme cela. Je ne remets pas en doute cet état des choses. Par contre, nous avons demandé à voir la zone d'isolement, mais ça n'a pas été possible parce qu'un événement se passait. Une question me chicote. Dans un lieu aussi sécuritaire, les détenus sont seuls et ne se voient presque jamais les uns les autres. On m'a dit qu'ils passaient environ 23 heures sur 24 dans leur cellule. Quand ils suivent des programmes ou des cours, ils sont derrière une vitre pare-balles. Ils n'ont donc de contact avec personne, à part peut-être avec les gardiens qui les font entrer et sortir. Il y a même un mur au milieu, entre les cellules, qui les empêche de se voir.
    Pourquoi les met-on en isolement alors qu'ils sont déjà si isolés? Je n'ai vraiment pas compris. L'USD est déjà un isolement en soi.

[Traduction]

    Nous avons le temps pour une courte réponse. Vous avez écoulé votre temps.

[Français]

    Ils sortent, à l'occasion. Ils ont des aires communes. Je ne sais pas si vous l'avez remarqué, mais il y a des aires communes que partagent les détenus se trouvant du même côté. Il s'agit d'un petit groupe. Je ne me souviens plus exactement du nombre de personnes qu'il compte. Il se peut que des incidents surviennent, à l'occasion, que des détenus refusent d'obtempérer à l'ordre d'entrer en cellule, par exemple. On est alors obligé d'utiliser du poivre, notamment. Il peut y avoir de la friction à certains moments. C'est rare, mais ça peut arriver. Les détenus arrivent de partout au Canada. On essaie évidemment de gérer les incompatibilités, mais c'est parfois un peu volatil. Il y a alors un peu de friction, d'où l'isolement.
(1630)

[Traduction]

    Merci.
    Monsieur McColeman, s'il vous plaît.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais remercier les témoins d'être venus aujourd'hui. Merci pour le temps que vous nous accordez et merci pour vos connaissances.
    Comme préambule à ma question, sachez que nous ne sommes pas obsédés par le nombre de détenus. Ce qui nous obsède, c'est de nous assurer que nous fournissons aux détenus les meilleurs services possibles de santé mentale et de lutte contre les toxicomanies.
    Sur ce point, j'aimerais faire une observation sur la page 11 de votre rapport. Les statistiques, telles qu'elles m'apparaissent, sont tout à fait impressionnantes, en ce qui concerne les résultats que vous obtenez avec le continuum de soins que vous exposez. Je me contenterai de vous renvoyer à la page 8 de votre rapport, où il est question des équipes qui y participent: des infirmiers, des conseillers en comportement, des agents de libération conditionnelle, des psychologues et des agents de correction qui examinent les cas aux deux semaines. Ces équipes doivent être louées pour les résultats qu'elles obtiennent.
    Ma question concerne davantage ce que nous pouvons faire de plus. C'est la raison d'être de notre présence ici, de notre étude. Que pouvons-nous faire de plus pour obtenir des résultats positifs? Je pense que c'est une question qui, d'une certaine manière, est double. Ayant été un intervenant, dans ma communauté, sur des problèmes de santé mentale, je pense, que, tout compte fait, les services que nous fournissons pour réinsérer les gens dans la communauté, par rapport à la population ayant des problèmes de santé mentale et qui ne sont pas des délinquants... Dans une situation comparable, nous accomplissons un travail fantastique.
    Vous arrive-t-il de comparer les résultats obtenus avec des criminels que l'on réinsère dans la communauté aux résultats obtenus avec des personnes ayant des problèmes de santé mentale et qui finissent bien dans la communauté?
    Il me faudra consulter de nouveau les statistiques que nous avons. Voulez-vous maintenant savoir si les délinquants ayant des problèmes de santé mentale seront plus enclins à récidiver? Est-ce ce que vous voulez savoir?
    Non, je ne m'intéresse pas vraiment tant à la récidive qu'aux résultats positifs par lesquels ces personnes ont surmonté les difficultés qu'elles éprouvent en matière de santé mentale.
    Oui, parce qu'ils ne guérissent jamais.
    Nous devons faire le suivi. C'est le projet de toute une vie pour eux. Voilà pourquoi nous devons renforcer les liens avec les organismes et les ressources provinciales de santé mentale, parce qu'à la fin de leur mandat, ces individus auront besoin de l'aide des organismes de santé mentale.
    Ce que je sais, toutefois, c'est que nous avons l'impression — et je devrai vérifier les chiffres — qu'à l'heure actuelle, le problème que nous avons avec les délinquants souffrant de maladie mentale est qu'ils reviennent derrière les barreaux. Leur liberté est suspendue plus souvent que celle des autres délinquants.
    Je ne sais pas si cela vous intéresse.
(1635)
    Oui.
    Le problème, c'est que lorsque vous retournez dans la collectivité, vous êtes confrontés à tous les agents de stress, qui ont un impact énorme sur les gens aux prises avec des problèmes de santé mentale. Cet impact se répercute sur la motivation, la fidélité au traitement et l'acceptation de la maladie. Parfois, ils ne comprennent pas ce que nous attendons d'eux. Parfois, c'est tout simplement qu'ils ne comprennent pas les règles en vigueur dans un centre correctionnel communautaire ou un établissement correctionnel communautaire. Et, parfois, ils se retrouvent dans une situation de manquement aux conditions simplement à cause de cela. Leur liberté est suspendue et ils retournent derrière les barreaux parce que, pour l'instant, c'est le seul moyen dont nous disposons.
    C'est un problème énorme que nous avons avec les gens aux prises avec des problèmes de santé mentale. La situation tient simplement au fait qu'ils ne comprennent pas, et nous cherchons toujours à rajuster leur prise en charge dans la collectivité. Ils ne récidivent donc pas plus que les autres, mais leur liberté est suspendue plus souvent simplement à cause de cela. C'est un manquement aux conditions, attribuable seulement au fait qu'ils ne comprennent pas ce que nous attendons d'eux.
    Parfois, ils reprennent l'automédication, parce que, pour quelqu'un qui souffre d'un problème de santé mentale, la toxicomanie est une pente glissante facile à prendre; parce que l'automédication fait qu'il est plus facile de lutter contre cela et parce qu'elle masque la maladie mentale. Ils retomberont donc dans la toxicomanie et ils abandonneront leurs médicaments. Ils ne comprennent pas ce que nous attendons d'eux mais ce n'est pas parce qu'ils ont une tournure d'esprit antisociale. Ils ne comprennent pas, c'est tout.
    Vous dites dans le dernier paragraphe que les courtes peines sont de plus en plus fréquentes. Vous parlez également des mesures que le système pourrait peut-être prendre pour aider les délinquants purgeant de courtes peines dans nos établissements. Une bribe de phrase ressort à la fin de votre exposé dans laquelle vous dites: « assurant ainsi que les délinquants obtiennent les bons programmes, au bon niveau d'intensité et au bon moment ». Voilà qui est parfaitement approprié à notre discussion sur la façon de trouver des moyens pour améliorer le système.
    Avez-vous des réflexions que vous aimeriez nous communiquer pour que les services soient fournis à un meilleur moment aux détenus?
    Nous allons procéder différemment pour la prestation des programmes correctionnels. Nous allons travailler par domaine. Nous aurons une approche intégrée qui sera plus efficace.
    À l'heure actuelle, il y a des chevauchements dans nos programmes; nous aurons donc une approche plus intégrée qui sera axée sur les domaines d'intervention. Dans différents programmes correctionnels, les mêmes domaines sont ciblés par tous les professionnels qui travaillent à ces programmes. L'approche sera donc plus intégrée. Elle se fera par domaine, et nous pourrons mettre plus de gens dans les programmes. Selon les résultats de recherche, il est très important d'apparier le niveau de risque avec le niveau d'intervention. Pour les délinquants à risque élevé, un programme d'intensité élevée fonctionne mieux. Nous devons donc choisir des interventions en conséquence et nous y tenir. Si le délinquant est condamné à une courte peine, nous devons procéder plus rapidement, nous devons entreprendre les programmes dès le début de la peine.
    Merci. Nous devons en rester là pour l'instant.
    Monsieur Desnoyers

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Bienvenue.
    Dans les centres correctionnels communautaires, on parle de milliers de délinquants sous votre responsabilité, soit à l'interne, soit en libération conditionnelle, soit en semi-libération, etc. Mes questions portent sur le nombre habituel de délinquants pris en charge, sur une base permanente, par chaque personne qui travaille dans ces centres communautaires. Quelle est la norme?
    Ensuite, lorsque la personne se retrouve à l'extérieur, lorsqu'elle part du centre en libération conditionnelle, cette norme change-t-elle? L'agent correctionnel, ou la personne qui s'en occupe, reçoit-il une aide supplémentaire en ce qui a trait à l'accompagnement, et encore plus à mesure que la situation progresse?
    Monsieur Desnoyers, vous me mettez au défi. Ha, ha!
    Je n'ai jamais fait le calcul des ressources de cette façon. Je peux vous dire qu'actuellement, dans la région du Québec, on a 3 331 détenus — et cela peut varier d'un jour à l'autre, selon le nombre qu'on a libérés et incarcérés — qui sont vraiment en établissement, dans les pénitenciers, et on a environ 2 100 libérés conditionnels dans tout le territoire du Québec. Pour superviser ces 5 000 et quelques individus, on a environ 4 105 employés au Québec répartis de la façon suivante : 1 882 agents correctionnels — et cela varie également de jour en jour, mais c'est toujours une moyenne —, 203 infirmières, 85 psychologues et 102 agents de programme, agents de libération conditionnelle. Je n'ai jamais fait le rapport de cette façon, mais c'est sûr que dans les pénitenciers, il faut comprendre une chose — et je le dis toujours aux gens qui ne les connaissent pas bien —: c'est comme un hôtel, 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, avec les services alimentaires et tout ce que cela signifie en fait de garde, tant dans le pénitencier qu'à l'intérieur de son périmètre.
    En centre correctionnel communautaire — outre le CCC Martineau pour les soins spécialisés où il y a du personnel spécialisé: une infirmière 24 heures sur 24, 7 jours sur 7—, c'est sûr que le rapport va être un peu plus bas. Par contre, il y a toujours une surveillance 24 heures sur 24 qui est assurée dans tous les centres correctionnels communautaires. On a des agents de libération conditionnelle, des agents de programme, dans les centres correctionnels communautaires. Quand je parle de « centres correctionnels communautaires », je parle vraiment de tout ce qui se fait en communauté, en surveillance.
(1640)
    Lorsqu'une personne se retrouve à l'extérieur, j'imagine que c'est la même règle pour les femmes que pour les hommes, en ce qui a trait aux services et au personnel. C'est la même règle pour les Autochtones aussi, j'imagine. Il n'y a pas de règles différentes.
    Il n'y a pas de règles différentes en ce sens. Il y a des règles différentes au point de vue du nombre d'employés, qui va varier.
    C'est sûr que plus d'employés vont travailler dans un établissement à sécurité maximale, comme les pénitenciers de Donnacona et de Port-Cartier par exemple, parce que ce sont justement des établissements à sécurité maximale.
    D'accord. Lorsqu'une personne quitte l'établissement pour retourner dans la communauté... Vous avez mentionné un partenariat entre des organismes communautaires.
    Y a-t-il une grande rotation de ces organismes et est-ce qu'on maintient le même service que celui donné en centre communautaire? J'imagine qu'en santé mentale, comme vous le disiez tout à l'heure, il doit y avoir une suivi important à faire en ce qui a trait à la médication, etc.
    Toutefois, lorsqu'on parle d'organismes communautaires, des coupes importantes ont été souvent faites et des organismes sont donc disparus. Cela n'a-t-il pas créé des situations plus difficiles pour votre service, en ce qui a trait à la capacité de maintenir les services?
    Je poursuis dans le sens d'une question que mon collègue du Parti libéral vous a posée tout à l'heure. Des projets de loi soumis actuellement à la Chambre des communes vont sûrement entraîner un recomptage à la hausse du nombre de délinquants. Vous avez dit que vous êtes en train d'étudier cela et de faire des analyses. Est-ce que c'est possible d'avoir copie de ces analyses?
    Je vais d'abord répondre à votre première question. Pour ce qui est des organismes communautaires qui travaillent en partenariat avec le Service correctionnel, je dirais que le Service correctionnel du Canada a d'excellents partenariats avec les organismes communautaires.
    Je vais vous parler du Québec. Le partenariat avec les organismes communautaires existe certainement depuis plus de 40 ans, et ce, dans tout le territoire du Québec. Au Québec, on a ce qu'on appelle « une entente tripartite », qui engage à la fois le gouvernement du Québec, le gouvernement fédéral et les organismes communautaires. Or cette entente tripartite prévoit des normes de service pour justement s'assurer d'une qualité de service, qu'on parle d'un centre correctionnel communautaire ou d'un centre résidentiel communautaire. Les centres résidentiels communautaires appartiennent à la communauté et sont gérés par des conseils d'administration bénévoles. Toutefois, à l'intérieur de ces organismes et de ces maisons, ce sont des professionnels qui donnent les services: des criminologues, des travailleurs sociaux et des psychologues.
    Je crois que le financement accordé aux organismes communautaires pourrait être augmenté, et cela fait partie des discussions qu'on a constamment avec eux. Toutefois, le niveau de financement nous a permis de stabiliser les organismes communautaires au Québec. On a donc des partenariats tel celui avec le YMCA de Montréal, un partenaire d'affaires et d'encadrement de nos délinquants dans la communauté depuis plus de 35 ans.

[Traduction]

    Vous devez conclure ici. Excusez-moi, mais votre temps est déjà dépassé de deux minutes.
    Allez-y, monsieur MacKenzie, s'il vous plaît.

[Français]

    D'accord, mais la dernière question que j'ai posée par rapport... Je ne veux pas qu'elle me parle des analyses, je veux qu'elle m'envoie une copie des analyses.

[Traduction]

    Excusez-moi, mais vous n'avez plus de temps. Nous devrons revenir à vous plus tard.
    Allez-y, monsieur MacKenzie.
(1645)
    Merci, monsieur le président.
    Je veux apporter une précision: mon ami et moi avons compris que vous êtes beaucoup trop jeune pour savoir quand les établissements provinciaux ferment.
    Je suis très content d'avoir cette information parce que je crois qu'elle est très valide. Comme l'a dit mon collègue, nous voulons savoir ce que nous pouvons faire pour améliorer la situation dans les prisons concernant les problèmes de santé mentale et la toxicomanie. Dans les visites que nous avons faites au Canada et dans d'autres pays, nous avons constaté que la fidélisation des professionnels de la santé semble très difficile. Il semble qu'il est encore plus difficile de conserver ces professionnels dans les établissements situés à l'extérieur des régions urbaines, parce que ces gens cherchent à travailler dans les villes.
    Pourriez-vous nous donner des détails, en français ou en anglais, sur les mesures qui sont prises au Québec pour d'abord recruter des professionnels et ensuite les garder dans ces régions?
    Au Québec, nous sommes dans une bien meilleure position que le reste du Canada pour recruter le personnel infirmier, le personnel infirmier spécialisé en santé mentale, les psychologues, les psycho-éducateurs et les autres spécialistes de la santé mentale dont nous avons besoin. Il est toutefois très difficile de recruter des gens pour l'Établissement de Port-Cartier qui est un établissement à sécurité maximale. Des délinquants aux prises avec des problèmes de santé mentale sont incarcérés à cet établissement, alors il n'est pas facile de recruter des gens. Cependant, nous sommes dans une bien meilleure position.
    En fait, pour les initiatives de santé mentale en établissement, nous avons pu recruter... Nous avons 24 spécialistes de la santé mentale que nous avons pu ajouter à notre personnel régulier au cours des deux dernières années. Nous avons été très chanceux au Québec de recruter ces gens. Nous avons eu la même chance pour nos initiatives de santé mentale mises en oeuvre dans la collectivité.
    Une bonne façon de garder les gens en poste — il est très facile parfois de les recruter, mais nous voulons les conserver —, c'est de diversifier leurs tâches. Il y a la formation. Il y a l'adaptation à la culture de l'établissement également, parce que travailler en milieu correctionnel lorsque vous êtes un spécialiste de la santé mentale n'est pas toujours facile. Nous travaillons donc sur la culture. Nous formons nos gens. Nous leur donnons la possibilité de modifier leur charge de travail et de travailler avec d'autres gens.
    Notre situation au Québec semble donc bonne.
    Pouvez-vous nous dire s'il est plus facile de faire cela lorsque vous êtes proches d'une région urbaine, par opposition à une région...
    C'est beaucoup plus facile. Nous avons des rapports avec les universités et nous pouvons prendre des étudiants en stage. Alors oui, c'est plus facile.
    Il semble qu'il est beaucoup plus facile de nouer ce genre de partenariat lorsqu'il y a des universités et des partenaires dans la collectivité.
    Oui, parce qu'il y a également de nombreuses possibilités de partenariat.
    Lorsque vous avez des spécialistes, comme des psychologues, qui travaillent dans un établissement du Nord du Québec, il est important de les appuyer et de veiller à ce qu'ils ne soient pas isolés des autres spécialistes de leur domaine. Comme organisation, nous devons établir ce genre de partenariat pour les attirer et les conserver.
    La situation du système de santé rend également les choses difficiles. La concurrence est très forte — par exemple, à Port-Cartier, nous avons un établissement et un hôpital qui, tous les deux, recherchent des médecins, du personnel infirmier, et des psychologues, ce qui fait qu'il y a concurrence sur le marché pour attirer ces gens.
    La situation est très difficile. Je pense qu'en nouant des partenariats, nous serons dans une meilleure position pour fidéliser les gens et stabiliser la qualité des services fournis aux délinquants. C'est là une des grandes priorités que nous avons.
    Nous devons stabiliser l'équipe. Nous avons eu une discussion avant de venir ici et il en est ressorti que le défi consiste non seulement à embaucher des gens mais également à stabiliser l'équipe. En raison du vieillissement de la population, beaucoup de gens quittent l'organisation à l'heure actuelle et nous avons embauché beaucoup de nouveaux employés. Les jeunes savent qu'ils peuvent travailler là-bas et qu'ils ont toutes sortes de possibilités.
    Voilà le genre de discussion que nous avons parfois avec les gens des ressources humaines — ce que nous pouvons faire, ce qu'ils peuvent faire pour nous aider, les façons novatrices de gérer les ressources humaines.
(1650)
    Est-il juste de dire que l'important pour les gens n'est pas seulement la rémunération, mais aussi le mode de vie?
    Bien sûr. Si vous terminez vos études à l'Université d'Ottawa et acceptez de travailler à Port-Cartier, si vous ne connaissez pas la communauté et avez de la difficulté à vous y intégrer, cela aura certainement un impact.
    Le même genre de scénario se répète dans les communautés qui sortent de la norme — ou plutôt les petites communautés où on a de la difficulté à attirer des médecins.
    Effectivement. À l'Établissement de La Macaza, on avait beaucoup de difficulté à attirer des psychologues, alors on a créé un partenariat avec l'Université du Québec à Trois-Rivières. On met de l'avant le fait que, si vous voulez vivre dans la nature et près de Mont-Tremblant, vous pouvez le faire en travaillant là-bas. De plus, on maintient une bonne relation avec l'université, de sorte que les psychologues exerçant à La Macaza ne sont pas isolés et qu'ils peuvent travailler avec leurs confrères de l'université. Je crois que nous devons reproduire ce modèle ailleurs.
    Merci.
    Passons au Parti libéral.
    Monsieur Wrzesnewskyj.
    Je cède mon temps de parole à Mme Mourani.
    Madame Mourani.

[Français]

     J'ai une petite question sur l'isolement préventif. Lors de notre tournée, on a parlé à différents intervenants. Beaucoup d'entre eux nous ont dit que l'utilisation de l'isolement, dans les cas de santé mentale, n'était pas vraiment une bonne idée. Je parlais avec l'aumônier de l'USD, je crois. Il me disait que d'une part, l'isolement était une catastrophe pour les personnes ayant des problèmes de troubles mentaux, car cela les aggravait. Parfois, des personnes arrivaient à l'USD sans problème de santé mentale, mais devenaient dingues au bout d'un moment. C'est ce qu'il m'a dit. Lorsque j'ai questionné la psychiatre qui était présente, elle a hésité sur ce point.
    J'aimerais donc savoir si Mme Perreault, qui s'occupe des psychologues et des psychiatres, et Mme Vallée peuvent me dire si l'isolement est vraiment efficace sur le plan du traitement.
    Votre question est très complexe. Vous venez de parler de l'USD. À l'heure actuelle, il y a 20 délinquants en isolement préventif à l'unité spéciale de détention et 2 de ces personnes ont des problèmes de santé mentale. L'isolement, la privation de stimulation, est une variable contextuelle importante, qui peut contribuer à la désorganisation de certaines personnes qui ont des besoins en santé mentale. Par contre, cela aide d'autres personnes.
    On travaille sur cette question, et le nombre de délinquants ayant des besoins en santé mentale et qui se trouvent en isolement préventif diminue. Il y a décroissance. Grâce à la mise sur pied de nouveaux services en santé mentale en établissement régulier, on travaille à contrer l'utilisation de l'isolement préventif comme façon de régler les problèmes. On fait plutôt une proposition thérapeutique différente. Il s'agit de soins infirmiers en santé mentale. L'approche psychologique et la participation de l'agent de libération conditionnelle sont combinés dans ce dossier. À l'heure actuelle, le nombre de personnes qui se trouvent en isolement préventif parce qu'elles ont des problèmes en santé mentale est en décroissance. C'est un de nos buts.
(1655)
    Cette décroissance a-t-elle lieu depuis longtemps?
    L'Initiative sur la santé mentale en établissement a deux ans. Il s'agit d'une décroissance graduelle.
    J'aimerais ajouter une chose. On constate l'apport de l'Initiative sur la santé mentale en établissement. Elle a été adoptée en 2005 ou 2006, mais les ressources sont arrivées plus tard. En effet, il a fallu du temps pour embaucher le personnel, le former et développer un véritable esprit d'équipe multidisciplinaire. Maintenant, on voit des résultats très concrets, dont celui-là.
    Si je comprends bien, vous partez de la prémisse qu'une personne atteinte de problèmes de santé mentale doit être mise en isolement le moins possible. C'est pour cela que vous avez créé cette initiative.
    En effet, c'est un des résultats attendus. Il y en a beaucoup d'autres, comme l'adhérence au traitement, une meilleure compréhension de la maladie, une meilleure gestion des symptômes, etc. Le fait que les individus ne se trouvent plus en isolement préventif parce qu'ils ont des problèmes de santé mentale est certes un des objectifs visés. Nous sommes en train de l'atteindre graduellement. En effet, l'isolement préventif n'est pas leur place. Il ne s'agit pas d'un lieu tranquille, comme un spa. On n'y est pas bien. Pourtant, certains individus en isolement préventif ne voulaient pas en ressortir car leurs problèmes de santé mentale étaient confortables. Dans le cas d'autres personnes, c'était totalement désorganisant. C'est pourquoi je vous dis qu'on ne peut pas dire que c'est bon, cela dépend des cas. Cependant, maintenant que les délinquants défont le cycle de l'isolement préventif parce qu'ils ont des problèmes de santé mentale, ils ne désirent plus y retourner, car ils ont trouvé un autre type d'encadrement, ils ont trouvé de l'aide.
    Est-ce typiquement québécois ou est-ce ainsi dans tout le système canadien?
    Il s'agit d'une tendance pancanadienne que de trouver refuge en isolement préventif pour gérer ses symptômes et passer inaperçu, pour qu'on nous laisse tranquille.
    Je parle de l'initiative de...
    Oui, c'est pancanadien, avec les mêmes objectifs.
    Un de ces objectif est, notamment, qu'il y ait le moins de cas possible en isolement.
    C'est l'un des effets que l'on veut voir. En fait, c'est un objectif. C'est l'un des effets directs que peuvent voir les agents de correction: moins d'usage de la force et moins de placement en isolement préventif pour ces gens. C'est un des effets préventifs que l'on peut voir rapidement.

[Traduction]

    Vous devez conclure.

[Français]

    Comment faites-vous pour gérer la loi que vous devez gérer, et la loi québécoise sur la santé? Vous devez gérer deux lois, si je ne me trompe pas. Comment faites-vous cela?
    On ne peut pas répondre à cette question en cinq minutes. À partir du moment où quelqu'un n'est plus apte à consentir au traitement, n'a plus toute sa tête et ne peut consentir au traitement, la loi provinciale s'applique. À ce moment-là, les médecins, les psychiatres et les psychologues ont d'autres devoirs professionnels. Tant que quelqu'un est apte au consentement, a toute sa tête, et refuse le traitement, on peut respecter l'ensemble de nos pratiques. Toutefois, lorsque quelqu'un n'est plus apte à cela, les lois provinciales entrent en jeu. C'est une question très complexe.
    Je le sais. Je vous remercie.

[Traduction]

    Merci.
    Monsieur Norlock, s'il vous plaît.
    Je vous remercie beaucoup, monsieur le président, et je remercie les témoins d'être venus.
    J'ai quelques questions à poser sur différents sujets. Ma première question est liée au témoignage d'une très bonne personne, reçue ici il y a peu de temps, qui a réglé une bonne partie de son problème de dépendance et qui aide d'autres personnes aux prises avec un problème semblable. J'ai été intrigué quand nous avons discuté avec elle de la méthadone et du traitement à la méthadone. Elle a dit que l'usage de ce produit est une des raisons pour lesquelles elle est devenue dépendante de l'héroïne. Je me demandais simplement si vous aviez eu des cas semblables. Employez-vous le traitement à la méthadone et avez-vous constaté ce genre de renversement de la situation dans votre établissement?
    Je devrai vous répondre à un autre moment. Excusez-moi, je n'ai pas ce genre d'information.
    Vous n'utilisez pas ce traitement?
    Nous utilisons la méthadone, mais nous ne pouvons pas répondre à votre question.
    Vous ne connaissez pas son efficacité?
    Nous connaissons son efficacité. Cependant, je croyais que vous parliez de provoquer un effet contraire.
    En effet, c'est un élément de ma question. Toutefois, en général, quels sont les résultats du traitement? Sont-ils positifs? Croyez-vous qu'il y a d'autres options, ou ce traitement fait-il simplement partie des moyens dont vous disposez?
(1700)
    Nous n'avons pas de chiffres à ce sujet avec nous. C'est une bonne question. Nous devrons vous répondre plus tard. Nous avons recours au traitement à la méthadone. Le traitement fonctionne bien et il aide bien des gens à ne plus consommer de drogue.
    Je n'ai pas besoin des chiffres. Je n'ai besoin que de votre opinion générale...
    D'accord. Le traitement marche. Il fait partie de notre trousse d'outils, si je puis dire, et il donne de bons résultats dans notre établissement, mais aussi dans la communauté lorsque nous devons superviser des délinquants. La méthadone est probablement un des meilleurs moyens que nous avons pour gérer la dépendance à la drogue. Il reste que les toxicomanes ont besoin d'un certain soutien. On doit s'assurer qu'ils recevront ce soutien, que du personnel infirmier s'occupera d'eux et qu'il y aura un suivi. Autrement dit, c'est un peu comme en santé mentale — si les personnes arrêtent le traitement, c'est une autre paire de manches. Malgré tout, je dois dire que le traitement fonctionne assez bien.
    Je vous remercie beaucoup.
    Parlons brièvement de l'isolement. Je sais que c'est habituellement un moyen de dernier recours. On voit maintenant l'isolement d'un mauvais oeil; mais je me souviens avoir rencontré un détenu lorsque nous sommes allés à l'Établissement de Dorchester qui nous a dit qu'il allait parfois voir le médecin ou le psychologue pour demander s'il pouvait être seul un bout de temps. On considérait alors que c'était un placement en isolement. J'ai l'impression que c'était plutôt sain pour la personne qui savait qu'elle en avait tout simplement besoin.
    Selon ce que me disent les employés et les délégués syndicaux d'un établissement de ma circonscription, je sais aussi qu'à certaines occasions, il faut isoler une personne parce que les employés sentent que leur sécurité est menacée. Il semble y avoir une différence — et je peux comprendre cette différence —, parce qu'un témoin nous a dit qu'il n'y avait plus d'isolement à son établissement et qu'on avait beaucoup de difficulté à faire accepter aux employés l'abolition totale ou graduelle de cette mesure.
    Je me demandais quelle était votre expérience à ce sujet.
    Vous avez raison. D'un point de vue clinique, il faut parfois qu'on laisse quelqu'un seul, en raison de ce que nous appelons la pression thérapeutique, quand l'intervention est trop intense; la chose est largement avérée par la recherche. Or, le moyen doit faire partie d'un plan, c'est ce que la personne aux prises avec des problèmes de santé mentale essaiera de faire avant de demander d'être placée dans une cellule individuelle avec ses effets personnels. Si les autres stratégies ne fonctionnent pas, elle pourra se retirer dans sa cellule si elle le désire. On fermera la porte et on la surveillera pendant un certain temps. Ensuite, l'équipe de santé mentale rencontrera la personne pour savoir si ce temps à l'écart a été bénéfique, s'il fait partie d'un plan et si on refait la même chose la prochaine fois.
    Par contre, cette mesure n'est pas ce qu'on appelle un isolement au plan juridique. Il s'agit d'un traitement clinique volontaire. Tant que ce moment à l'écart a été décidé par la personne, qu'il fait partie d'un plan qu'on veut essayer et qu'il est suivi d'une évaluation, on parle de traitement. Donc, on a besoin de ce moyen. Ce temps d'arrêt est nécessaire pour bien des gens souffrant de problèmes de santé mentale. En effet, vous avez raison. Cela dit, il ne s'agit pas d'isolement. On ne retire pas les effets personnels à ces gens. On ne place pas ces personnes dans une rangée où sont isolés des détenus qui ont dérogé aux règles internes, et qui pourraient être très dérangeants. Ces détenus en veulent au système, alors ils sont turbulents. C'est pourquoi leur proximité pourrait être très perturbante pour quelqu'un qui a des problèmes de santé mentale.
    Madame Vallée, des employés syndiqués vous ont-ils dit que, dans certaines circonstances, ils croyaient que l'isolement était nécessaire à leur sécurité ou à celle d'autres prisonniers, ou encore à celle de la personne elle-même?
(1705)
    C'est un des moyens d'intervention que nous avons quand le personnel et des détenus sont menacés. Parfois, nous n'avons pas le choix; nous devons recourir à l'isolement. Mais encore là, il faut surveiller la personne placée en isolement. Il ne faut pas la laisser seule, il faut comprendre exactement ce qui a motivé son comportement et y réagir dans le plan correctionnel. Malheureusement, l'isolement... C'est comme pour l'établissement: on peut dire qu'on n'aime pas les pénitenciers, mais la nature humaine est telle qu'on doit parfois mettre des gens hors d'état de nuire. La situation est la même dans un établissement.
    Vous avez dépassé votre temps, monsieur Norlock.
    Voilà qui met fin à nos interventions.
    Est-ce que le Parti libéral a d'autres questions à poser? Plus de questions.
    Le Bloc québécois a-t-il d'autres questions?
    Monsieur Desnoyers, de combien de temps avez-vous besoin? J'essaie simplement d'indiquer à M. Davies s'il a d'autres...

[Français]

    Monsieur le président, je voudrais m'assurer d'une chose. Suite à ma dernière intervention, Mme Vallée nous a parlé d'analyses qui ont été faites relativement à divers projets de loi qui risquent de faire augmenter de façon substantielle le nombre de délinquants. J'aimerais avoir une copie de ces analyses.

[Traduction]

    D'accord. Vous avez pris acte de la demande. Merci.
    Monsieur Davies, avez-vous d'autres questions ou êtes-vous prêt à conclure?
    Je serai bref, monsieur le président.
    Je dirais rapidement que je m'intéresse à la question de l'isolement, et je ne crois pas qu'il soit pertinent d'en parler en général, car les détails sont importants. Conviendriez-vous avec moi que l'isolement cellulaire à long terme — selon ce que j'ai entendu des témoins — n'est pas un mécanisme carcéral pertinent? Êtes-vous d'accord?
    Nous devons avoir l'isolement à l'oeil pour éviter son application à long terme. Voilà pourquoi j'ai indiqué que c'est une mesure de dernier recours et qu'il ne faudrait pas imposer l'isolement à long terme. Dans notre région, un comité régional sur l'isolement se réunit régulièrement pour analyser chaque cas. Parfois, il arrive que les prisonniers, pour diverses raisons, ne veulent pas quitter l'isolement, que ce soit parce qu'ils ont peur des autres ou qu'ils ont des dettes. Il faut régler ce problème. Nous devons veiller à ce que l'équipe de gestion de cas rencontre ces personnes régulièrement et nous devons trouver des solutions de rechange à l'isolement.
    Si c'est le cas et que quelqu'un ne veut pas recourir à l'isolement, il n'est sûrement pas nécessaire d'enfermer quelqu'un dans une cellule vide. J'ai déjà vu des cellules d'isolement: quatre murs de ciment et rien d'autre. Si la personne qui se retrouve là-dedans veut fuir une dette, à quoi bon la garder dans une pièce qui n'offre absolument aucune stimulation?
    Ce que je veux dire, c'est que parfois, la personne concernée ne veut pas quitter la cellule d'isolement. C'est ce que je voulais dire.
    Nous sommes confrontés à divers défis sur le plan de l'isolement. Il s'agit parfois de personnes ayant une maladie mentale. Dans ces cas, on ne parle pas de cellule d'isolement, mais bien d'isolement clinique, parce que la personne doit pouvoir se reposer et être laissée seule, à l'écart du reste de la population. C'est une situation qui peut se présenter.
    Parfois, nous recourons à l'isolement pour gérer des problèmes de comportement ou de discipline. C'est une situation différente, assujettie à d'autres règles. Nous devons également nous assurer de pouvoir gérer la situation, même si la personne est agressive. Nous ne pouvons laisser les personnes en isolement à long terme sans les surveiller. Nous devons gérer la situation et chercher des solutions de rechange. Devrions-nous envisager un transfert, une réintégration graduelle dans une aile de l'établissement, un changement de secteur? Il faut trouver d'autres solutions.
    Il y a ensuite un petit nombre de prisonniers qui, pour diverses raisons, ne veulent pas être en contact avec le reste de la population, et ils resteront en isolement. Nous devons aller vers eux et essayer de comprendre pourquoi ils ont si peur de rester avec le reste des prisonniers. Que pouvons-nous faire? Parfois, nous trouvons un autre prisonnier qui pourra agir en qualité de pair; nous tenterons alors de convaincre la personne d'aller vivre avec le reste de la population. Nous continuerons de suivre cette personne.
(1710)
    Merci.
    Je laisse la parole à monsieur MacKenzie.
    Merci, monsieur le président.
    Si vous me le permettez, j'aimerais revenir à la question de la méthadone, parce que je crois que c'est, de toute évidence, un outil très important, comme vous l'avez d'ailleurs fait remarquer. L'une des questions que nous nous sommes posées, c'est comment réussir à faire abandonner la méthadone aux personnes qui en prennent. Nous avons substitué ce produit aux opiacés. J'étais présent, l'autre jour, lorsque notre témoin a indiqué qu'elle suivait un traitement de méthadone après son accouchement. D'après ce que j'ai compris, la méthadone a servi d'analgésique au cours de la Deuxième Guerre mondiale.
    Tout ce que nous faisons, c'est remplacer un opiacé par de la méthadone. Mais si nous n'avons aucun moyen d'aider les gens à abandonner la méthadone, ne perpétuons-nous pas un problème à long terme? À moins qu'il n'y ait pas lieu de s'inquiéter?
    Je le répète, je ne suis pas spécialiste de la méthadone.
    Certaines personnes qui en consomment réussiront à l'abandonner graduellement et n'en auront plus besoin. Je suppose que c'est là l'objectif visé. Mais certains devront en prendre pendant longtemps. Tout dépend de l'importance du problème de dépendance et des ressources dont la personne dispose. C'est une question fort complexe, et je n'ai pas de réponse satisfaisante à vous donner. J'en suis profondément désolée. Nous savons que certaines personnes qui consomment de la méthadone sont moins violentes. Elles ne consomment pas d'autres drogues, ce qui a un effet sur leur comportement. La méthadone contrinue donc à assurer la sécurité à l'intérieur et à l'extérieur.
    Je ne peux en dire plus. Si vous avez besoin d'information sur la méthadone, je...
    Je crois que d'autres témoins viendront parler de la question; je me demandais simplement si votre expérience personnelle vous avait mise en contact avec cet aspect.
    Nous avons également eu vent d'un problème de trafic de méthadone dans l'un des établissements. Les responsables insistent maintenant pour que les personnes qui reçoivent de la méthadone restent dans... S'agit-il d'un seul et même problème?
    C'est le même problème.
    Nous tentons de nous assurer que la personne concernée reste sous supervision dans la pièce et prend bel et bien la méthadone. Malheureusement, ici encore, la nature humaine entre en jeu. Si ces personnes ont un problème de toxicomanie ou veulent faire rapidement de l'argent, elles essaieront effectivement de trafiquer de la méthadone. Je ne crois pas que ce soit chose fréquente. Par contre, il est vrai que nous devons les superviser.
    Ce n'est pas qu'une question de sécurité; cela concerne également les soins de santé. Une personne qui prend de la méthadone doit rester sous supervision pendant une certaine période pour être sûrs qu'elle va bien. Nous pouvons donc combler ces deux besoins. C'est une question de sécurité et de santé.
    Est-ce que le nombre ou le pourcentage de personnes qui arrivent à l'établissement avec un problème de consommation d'opiacés, ayant une dépendance ou suivant déjà un traitement de méthadone est assez stable?
    Nous vous fournirons les chiffres.
    Merci.
    J'aimerais également parler de l'isolement.
    Nous savons que bien des gens qui ne travaillent pas dans les établissements ont une opinion sur ce que nous devrions faire au sujet de l'isolement, de la ségrégation ou peu importe comment cela s'appelle. Chose certaine, nous nous sommes rendus en Norvège et en Grande-Bretagne, deux pays qui, selon d'aucuns, font bien mieux que nous à cet égard. Je doute fort que ce soit le cas. Lorsque nous nous y sommes rendus et avons commencé à examiner les choses plus en profondeur, nous avons constaté qu'on y utilise des installations semblables aux nôtres, et c'est souvent pour les mêmes raisons que nous.
    Je sais que dans les établissements que nous avons visités au Canada, certaines personnes souhaitent demeurer en isolement pour garantir leur sécurité. Je crois qu'il y en avait plusieurs à Kingston. Si ces prisonniers se retrouvaient avec le reste de la population carcérale, je ne sais pas comment nous réussirions à les protéger, et je crois que, de toute évidence, ils se le demandent aussi. J'ai appris tout récemment qu'un prisonnier a intenté des poursuites parce qu'il n'avait pas été bien protégé.
    Savez-vous ce que nous pourrions faire pour réintégrer certaines de ces personnes au sein de la population carcérale, alors qu'elles ne veulent pas y aller pour des raisons de sécurité?
(1715)
    Il ne fait aucun doute qu'il faut gérer la population.
    Nous le faisons à l'échelle régionale à l'aide d'un comité régional de gestion de la population. Régulièrement, avec l'appui des agents de sécurité et de renseignements, nous réunissions de l'information sur la population pour nous assurer que la cohabitation de divers types de prisonniers n'entraîne pas de problèmes plus graves. Nous gérons donc cet aspect.
    En outre, à l'échelle locale, dans les établissements, il faut gérer la population pour être sûr qu'il n'y a pas trop d'incompatibilité entre les prisonniers. Ici encore, on recourt à toutes sortes de stratégies pour réduire le niveau d'isolement. Il est vrai que parfois, ces personnes ont peur; mais il arrive que ce soit pour des mauvaises raisons, à cause de leur perception de la population ou de leur difficulté à s'intégrer. Il faut aider ces personnes et assurer un suivi. Voilà pourquoi, au Québec, certains établissements offrent un programme de jumelage avec des pairs, dans le cadre duquel certains prisonniers en aident d'autres à se réintégrer dans leur section.
    Nous ne pouvons nous passer de l'isolement, mais c'est un aspect que nous devons surveiller.
    Je crois qu'il est juste de dire que la direction et le personnel des établissements aimeraient trouver d'autres solutions, mais que parfois, ils ne disposent pas des moyens nécessaires, peu importe ce dont il s'agit. Ils utilisent tous les outils à leur disposition, mais parfois, il faut tout simplement trouver un endroit pour tenir quelqu'un à l'écart des autres.
    Est-ce exact?
    Je ne crois pas que ce soit fréquent.
    Non, mais cela arrive, comme nous l'avons vu en Angleterre. Ils nous ont dit exactement la même chose, quand on voit une salle prévue à cette fin. C'était la même chose en Norvège.
    Nous allons devoir lever la séance. Les cloches retentissent.
    Nous vous remercions énormément d'avoir pris le temps de témoigner devant nous. Nous vous avons posé beaucoup de questions, et les choses ont été rondement. Une fois de plus, merci.
    La séance est levée.
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