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SDIR Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Sous-comité des droits internationaux de la personne du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international


NUMÉRO 012 
l
3e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 4 mai 2010

[Enregistrement électronique]

  (1310)  

[Traduction]

    Je dois d'abord présenter des excuses. Je me trouvais à une séance de comité qui se prolongeait. J'ai oublié que je devais venir ici, à l'édifice de l'Ouest, et je me suis rendu à notre salle habituelle. Mon erreur nous a fait perdre un peu de temps.
    Nous accueillons aujourd'hui deux groupes d'invités, la Société bolivarienne du Québec/Hands Off Venezuela et le Cercle bolivarien Louis-Riel/Hands Off Venezuela. Je crois savoir que seuls deux des témoins feront une déclaration liminaire, soit Stéphanie Vaudry, de la Société bolivarienne du Québec, et Maria Páez Victor, du Cercle bolivarien Louis-Riel.
    Pourquoi ne pas commencer par l'exposé de Mme Vaudry? Nous entendrons ensuite l'autre témoin. Les questions des députés viendront après.

[Français]

    Je suis la présidente de la Société Bolivarienne du Québec. Notre travail est affilié à la campagne internationale « Pas touche au Venezuela! ». Notre but est de sensibiliser le public — principalement les mouvements ouvrier et étudiant — sur ce qui se passe au Venezuela. Notre tâche principale est de promouvoir les acquis sociaux de la révolution bolivarienne et la mobilisation contre l'agression des forces impérialistes envers le Venezuela.
     Récemment, Hands Off Venezuela et notre ONG, la Société Bolivarienne du Québec, ont fusionné. Des travailleurs, des étudiants, des Québécois, des Canadiens, des immigrants et des Autochtones font partie de notre mouvement. On parle plusieurs langues au sein de notre organisation, elle est plurielle. Je vais vous lire notre mission:
La Société Bolivarienne du Québec/Hands Off Venezuela est un organisme sans but lucratif, pluriculturel et autonome de diffusion et d'émancipation populaire, inspirée par le libérateur Simón Bolívar, de lutte internationaliste et anti-néolibérale et s'inspire des idéaux d'autodétermination des peuples latino-américains, de justice sociale, d'intégration latino-américaine et de respect des droits ancestraux des peuples aborigènes et de l’environnement.
    C'est notre organisation, en gros. On travaille surtout sur le plan de la diffusion de l'information.
    J'aimerais faire une brève mise en contexte de la situation au Venezuela. Dans ce pays, 40 ans avant l'élection d'Hugo Chávez, a été conclu le pacte du Punto Fijo. Deux partis politiques, le COPEI et l'AD, se partageaient le pouvoir en alternance, tous les quatre ans. Il y a eu de gros soulèvements au cours des années 1980. Il s'agissait des événements du Caracazo. Il y a eu une répression militaire assez importante qui a entraîné 3 000 morts.
     Peu de temps après, Hugo Chávez Frias s'est présenté aux élections. Il a remporté les élections en 1998. Hugo Chávez et son gouvernement se sont rapproprié les ressources naturelles du pays, surtout le pétrole, pour financer les programmes sociaux, notamment, au Venezuela. À la suite de son arrivée au pouvoir, l'opposition a tâché de le mettre de côté à plusieurs reprises. En 2002, il y a eu un coup d'État qui a duré trois jours. Il avait été fomenté par les élites vénézuéliennes et financé par la CIA, aux États-Unis. Le coup d'État a été appuyé amplement par les médias de l'opposition qui, pendant ce temps-là, présentaient des dessins animés à la télévision.
    En 2002, il y a eu un sabotage de l'entreprise pétrolière. Il y a aussi eu un référendum révocatoire en 2004. Une partie de la population vénézuélienne a présenté une pétition que plus de 10 p. 100 des gens inscrits sur les listes électorales avaient signée. Ils ont demandé un référendum révocatoire pour destituer le président. Ils ont échoué, l'appui au président ayant été de 58 p. 100. Depuis 2004, les médias, surtout, tentent de dire que le gouvernement vénézuélien est illégitime, appuyés en cela par plusieurs pays, dont le Canada et les États-Unis.
    Le mouvement actuel au Venezuela vise à améliorer les conditions de vie de la majorité de la population. Une constitution a été écrite par le peuple en 1999 et adoptée par une grande majorité. Plusieurs accords bilatéraux ont été signés avec différents pays d'Amérique latine. Cela a mené à la création de l'ALBA qui est, en fait, un accord entre différents pays qui échangent leurs connaissances sur le plan de l'intégration, de la solidarité et de la réciprocité. Ce n'est pas sur le plan militaire ou économique, c'est davantage sur le plan social et sur celui des connaissances. C'est un échange, ce n'est pas de la concurrence, contrairement par exemple à la ZLEA que nos gouvernements ont essayé de mettre en place, récemment.
    À la suite de toutes ces mesures, le Venezuela a connu beaucoup d'améliorations. De 1997 à 2009, le taux de pauvreté extrême est passé de 20,3 p. 100 à 7,2 p. 100, et le taux de pauvreté est passé de 50,4 p. 100 à 28,5 p. 100. Selon l'UNESCO, le territoire est libre d'analphabétisme depuis 2008.

  (1315)  

    La constitution de la révolution bolivarienne prévoit plusieurs droits pour le peuple vénézuélien. L'État vénézuélien a l'obligation de respecter et de garantir les droits de la personne en adoptant les moyens nécessaires pour les atteindre et en assurant la prestation des services qui y sont reliés. Par la suite, diverses missions ont été implantées au Venezuela.
    Je vais énumérer une série de droits et je donnerai aussi quelques exemples de missions et des apports sur le plan statistique.
    Il y a les droits de nationalité et de citoyenneté. En fait, 70 p. 100 des Vénézuéliens ne possédaient pas de documents d'identité et 90 p. 100 des sans-papiers provenaient des castes populaires. Le Venezuela a mis sur pied la mission Identidad qui a permis de donner 8 710 404 cartes d'identité à des citoyens du Venezuela, ce qui a permis à ces gens de voter et de faire leur devoir de citoyen.
    Il y a aussi des droits civils. Le gouvernement a investi énormément dans les médias communautaires, pour faire contrepoids au monopole des médias par l'opposition. Quatre-vingt-dix pour cent des médias sont privés au Venezuela. Il y a donc un changement qui se produit, on donne du pouvoir aux communautés. Elles ont le pouvoir de diffuser ce qui se passe dans leur entourage, de discuter et de prendre leur place dans la sphère publique. Il y a de la formation sur le plan de la caméra et de la radio. Ils ont aussi de plus en plus d'espaces radio et d'espaces communautaires.
    En ce qui a trait à l'orientation sexuelle, un projet de loi sur l'équité des genres est présentement étudié par le Parlement et a pour but de permettre le mariage des couples homosexuels. Il y a aussi la transmission de l'héritage entre les couples de même sexe.
    Parlons des droits politiques. Il y a eu 14 processus électoraux depuis 1998. Il y a eu plusieurs élections présidentielles, municipales et législatives. Il y a aussi eu plusieurs référendums. Il y a eu un référendum pour l'élaboration de la nouvelle constitution. Par la suite, il y a eu un référendum révocatoire. Cette proposition a été rejetée. Par la suite, il y a eu un autre référendum pour amender la constitution. La population a dit non la première fois, mais a accepté la deuxième fois. Le Venezuela accepte les échecs en ce qui a trait aux élections et aux référendums et répare ses erreurs ou tente de s'améliorer.
    L'actuel gouvernement du Venezuela est un gouvernement majoritaire. Il a obtenu plus de 60 p. 100 des voix. Afin de favoriser la participation des peuples à la politique vénézuélienne, des conseils communaux ont été mis en place. Cela veut dire que les gens d'une municipalité se réunissent, agissent en tant qu'instance politique et interagissent entre les communautés et l'État vénézuélien, le gouvernement vénézuélien. Des décisions sont prises. Ils ont aussi des budgets. C'est un peu comme une institution parallèle aux mairies municipales. Cela vise à donner du pouvoir aux communautés.
    En ce qui a trait aux droits sociaux et des familles, la mission Barrio Adentro, entre autres, est très populaire au Venezuela. Grâce à cette mission, des médecins cubains, en particulier, ont été envoyés dans les quartiers pauvres du Venezuela pour dispenser des services de santé gratuits, universels, spécialisés et modernes à la population vénézuélienne. Il y a aussi la mission SUMED, qui a permis la distribution gratuite de produits pharmaceutiques. De plus, la mission Miracle a permis d'opérer des gens qui avaient des problèmes de vision. La mission Negra Hipólita a permis de soutenir les toxicomanes et les sans-abris. La mission Madres del Barrio aide les femmes monoparentales sur le plan économique et en leur donnant de la nourriture.
    Au Venezuela, le taux de mortalité infantile a diminué de 7,7 p. 100 depuis 1998 et l'espérance de vie a augmenté de 1,7 an. D'autres missions sont apparues après la crise alimentaire de 2008. Par exemple, la mission MERCAL et l'entreprise publique PDVAL ont permis la distribution de nourriture à plus de 8 millions de personnes. Il y aussi le Plan Bolivar qui utilise les soldats de l'armée vénézuélienne pour construire des écoles et des maisons, distribuer de la nourriture et fournir des vaccins à la population vénézuélienne. Par exemple, le taux d'accès à l'eau potable est passé de 82 p. 100 à 94 p. 100, de 1998 à 2009. Le taux des personnes ayant accès au système de canalisation de l'eau potable est passé de 64 p. 100 à 84 p. 100.
     Comme je l'ai mentionné plus tôt, le Venezuela est libre d'analphabétisme depuis 2008. Le taux de diplomation a augmenté de 60 p. 100 au niveau préscolaire, de 91 p. 100 au niveau primaire et de 58 p. 100 au niveau universitaire. L'éducation est libre, universelle, gratuite et obligatoire aux niveaux primaire et secondaire.

  (1320)  

    Sur le plan économique, comme je l'ai dit plus tôt, la pauvreté extrême a diminué énormément. L'indice de développement humain a augmenté: il est passé de 0,6798 à 0,8263 depuis 2007. De plus, le coefficient de Gini — l'écart entre les riches et les pauvres — a diminué: il est passé de 0,98 à 0,393. À titre comparatif, en 1999, il était de 0,572 en Colombie et de 0,98 au Venezuela. En 2005 en Colombie, le taux du coefficient de Gini avait augmenté de 0,184. Il y avait donc plus de disparités économiques.
    Madame Vaudry, vous avez maintenant utilisé presque 11 minutes et on n'a pas beaucoup de temps pour les questions. Si vous voulez ajouter quelque chose de très important, vous pouvez le faire.
    Cela veut-il dire qu'ils ont perdu leur temps de parole?
    Oui, peut-être.
     Avez-vous terminé?
    J'ai d'autres choses à dire, mais je ne peux pas utiliser tout le temps.

[Traduction]

    Très bien.

[Français]

    Je peux vous remettre un document.

[Traduction]

    Oui, vous nous avez effectivement remis un document, et il couvre une grande partie de la matière.
    Nos règles ne nous permettent pas de distribuer les documents qui sont dans une seule des langues officielles. Ils doivent être d'abord traduits. Le greffier n'a donc pas pu distribuer le vôtre. Mais si un député ou l'autre veut venir voir un des documents, les voici. Vous avez la liberté de voir le document qui a été remis.
    Cela dit, peut-être pourrions-nous entendre Mme Victor. Je vous en prie.
    Monsieur le président, pourrait-on faire remarquer aux témoins qu'il faudrait ralentir un peu le débit. Cela faciliterait la tâche des interprètes.
    Je sais que je parle trop rapidement.
    Je crois que les interprètes se sentent un peu...
    Très bien.
    Bonjour à tous les députés. C'est un honneur de pouvoir adresser la parole au comité. Merci beaucoup de me donner cette occasion.
    Le sous-comité étudie la situation des droits de la personne dans la République bolivarienne du Venezuela. C'est une tâche difficile, pour n'importe quel pays, de se faire une opinion tout à fait exacte de la situation des droits de la personne dans un autre pays, car les statistiques ne sont pas toujours disponibles ni comparables et les faits anecdotiques ne sont pas représentatifs. Les médias nationaux comme ceux du Venezuela ne facilitent guère les choses, car ils sont en grande partie contrôlés par des adversaires déclarés du gouvernement élu et ils sont liés aux médias internationaux.
    Même des journaux canadiens de bonne réputation ont succombé à leur campagne de désinformation. Ainsi, le Toronto Star a été rappelé à l'ordre par le Conseil de presse de l'Ontario pour avoir publié sur le Venezuela des articles qui accusaient des manquements importants aux normes d'un bon journalisme.
    À cause de cette campagne intentionnellement partiale, on peut comprendre que les Canadiens et leurs honorables représentants se fassent une idée incomplète et inexacte de l'état des droits de la personne au Venezuela. Nous comparaissons pour vous communiquer de l'information de sources diverses et vous faire part de notre expérience de première main, car la décision que le Parlement du Canada prendra peut-être au sujet des droits de la personne au Venezuela pourrait avoir des ramifications importantes pour les deux pays et même pour toute l'Amérique latine, et nous ne voudrions pas que cette auguste institution soit victime de distorsions médiatiques.
    Permettez-moi d'esquisser le contexte. Bien que Stéphanie en ait parlé, je tiens à signaler que la dernière constitution, celle de 1961 n'avait à peu près rien à voir avec la pratique du gouvernement. La torture, la censure, les disparitions d'opposants, les assassinats, le recours à la police secrète et la suspension des droits civils étaient chose courante sous l'administration des quatre présidents précédents, et surtout en 1989, car 3 000 personnes ont été massacrées dans les rues par l'armée parce qu'elles avaient participé à une protestation spontanée contre les hausses de prix imposées par la Banque mondiale. La communauté internationale et les médias ont accordé peu d'attention à cet épisode, et ils ne se sont pas portés à la défense des droits des Vénézuéliens à l'époque.
    Les Vénézuéliens qui ont traversé cette sombre période jugent l'administration Chávez à la lumière de ce qui a précédé. De nombreux sondages récents ont montré que les Vénézuéliens ont beaucoup de respect pour leur démocratie et sa capacité de résoudre les problèmes, et leur taux de bonheur est très élevé.
    Tout a commencé par la constitution de 1999, qui a placé les droits de la personne au centre du droit et de la politique, question sur laquelle on n'insistait pas jusque-là. Pourquoi? Parce que ceux qui ont été torturés et emprisonnés par les gouvernements précédents sont devenus des partisans du président Chávez et ont participé à la rédaction de la constitution. Ils se sont assurés que les droits de la personne seraient au cœur de la primauté du droit et de la pratique du gouvernement. Le terme « justice », par exemple, figurait trois fois dans la constitution précédente et on le trouve 30 fois dans la nouvelle.
    Stéphanie a parlé des droits civils et sociaux, du droit à l'alimentation, au logement et à l'emploi, à un environnement propre et à la santé. Pour les Vénézuéliens, la constitution n'a rien d'ennuyeux. Au contraire. On la vend dans les rues, les gens l'ont sur eux et ils en discutent. On la respecte beaucoup et maintenant, même l'opposition la tient en haute considération. Par contre, presque personne ne lisait la constitution précédente.
    Un constitutionnaliste a dit:
Il existe un large consensus au Venezuela et chez les observateurs étrangers: le Venezuela a l'une des constitutions les plus « avancées » [...] comportant, parmi toutes les constitutions du monde, certaines des protections les plus complètes des droits de la personne.
    Il existe des problèmes clés, dont les médias. L'histoire de l'Amérique latine le montre largement: les médias ont été aux mains d'oligarchies qui ne permettent pas l'usage des médias aux citoyens ordinaires. Ce fut particulièrement le cas au Venezuela, et depuis l'élection du gouvernement actuel, les médias privés ont renoncé à tout effort pour offrir des reportages équilibrés et respecter les normes journalistiques.
    Au Venezuela, la grande majorité des stations de radio et de télévision appartiennent à ceux qui ont joué un rôle crucial dans le coup d'État de 2002, qui a renversé pour 24 heures le gouvernement élu, kidnappé le président et a été sur le point de l'assassiner

  (1325)  

    Au Venezuela, les médias privés forment l'opposition. Ils se sont substitués aux partis d'opposition ordinaires. C'est pourquoi le coup d'État de 2002 a été considéré comme le premier à avoir été monté par les médias. D'après ma propre expérience, tous les hispanophones que j'ai amenés au Venezuela ont été consternés par les critiques, par les critiques virulentes du gouvernement qui paraissent dans les journaux et qu'on entend à la télévision et à la radio, tout cela avec une pleine liberté d'expression. Le gouvernement n'a fermé aucune station de radio ou de télévision par la force ou de façon illégale. La seule station de télévision qui a été fermée est celle qui a été saccagée et fermée par les partisans du coup d'État, en 2002.
     Quatre-vingt-quinze pour cent de la télévision et de la radio appartiennent à des intérêts privés, mais, au lieu de les censurer ou de les fermer, le gouvernement a accordé une plus grande liberté d'expression. Aujourd'hui, la radio et la télévision communautaires sont présentes dans de nombreux endroits où on n'aurait jamais pu l'espérer, dans des quartiers pauvres des villes, des localités rurales et, surtout, des villages indigènes.
    Une nouvelle loi sur les télécommunications a été adoptée, et elle s'inspire de lois semblables à ce qui existe au Canada, aux États-Unis et en Europe. Elle réglemente l'heure et le contenu des émissions pour enfants et pour adultes. Elle rend possibles les médias communautaires et interdit les propos racistes, sexistes et incendiaires ainsi que l'incitation à la violence et à la haine. Ce genre de loi n'existait pas jusque-là.
    L'opposition a combattu cette loi avec véhémence et a organisé des manifestations où deux étudiants ont été tués par des tireurs non identifiés. Tous deux étaient des partisans du président Chávez. Il est très décevant que la violence, lorsqu'elle est le fait de l'opposition, n'attire que peu d'attention au niveau international.
    La question de Radio Caracas est déjà résolue. Cette entreprise refusait de s'inscrire, de payer ses droits et de se conformer aux droits sur les télécommunications. En février, cependant, elle s'est inscrite.
    Je voudrais dire un mot du système judiciaire. Par le passé, il avait la pire réputation qui soit. Des gouvernements antérieurs ont refusé de le réformer, même si la Banque mondiale les incitait à le faire. Sous le président Chávez, il y a eu une série de réformes progressives en 1999, en 2004 et en 2005. Il est très difficile de transformer un système judiciaire et d'éliminer la corruption. Autrefois, seuls ceux qui avaient les moyens pouvaient étudier le droit et obtenir les services d'un avocat. Tout cela a changé.
    À propos du juge, il n'arrive jamais au Canada qu'un juge soit emprisonné. Il est donc normal que cet incident ait été important ici, mais je tiens à signaler que ce juge a été mis sous garde de façon légale. À la différence d'autrefois, la loi est la loi et elle s'applique à tous, même aux juges. L'article 266 de la constitution explique comment on peut inculper un juge d'un crime. Les juges peuvent être suspendus si le procureur général, l'ombudsman des droits de la personne et le contrôleur général déclarent tous qu'ils ont commis une faute. La question est ensuite soumise à l'assemblée nationale, qui peut démettre un juge de ses fonctions par un vote des deux tiers. Il importe de signaler, et je voudrais que vous en preniez note, que ni le juge ni le banquier qui a volé des millions n'étaient des membres de l'opposition. Ils n'étaient pas actifs politiquement.
    Il y a eu une réforme de la police, réforme très importante, car le crime est un problème dans toute la région. Je voudrais que vous sachiez que, pour la première fois en 40 ans, il n'y a pas de police secrète au Venezuela. Grâce à la nouvelle police nationale et à la nouvelle loi, les forces policières ont été modernisées: formation en police communautaire, déontologie, connaissances en prévention du crime et formation portant sur les droits de l'homme. En octobre 2008, pour la première fois, 5 000 policiers ont reçu une formation spéciale sur les droits de l'homme grâce à un cours de deux ans. Je tiens à ajouter que les forces policières ne peuvent avoir de minutions réelles pendant les manifestations ou les grèves.
    Je voudrais également parler de l'Association interaméricaine de la presse, qui a publié un rapport le mois dernier pour dénoncer les violations des droits au Venezuela. Cette même association a omis de condamner le coup d'État de 2002 ou la fermeture de la station de télévision. La Fédération latino-américaine des journalistes...

  (1330)  

    Madame Victor, je dois vous signaler que vous en êtes à dix minutes. Je voudrais que nous ayons un peu de temps pour les questions et réponses.
    Puis-je terminer par une dernière phrase?
    Je vous en prie.
    Je voudrais conclure en disant que c'est avec consternation que nous avons appris qu'un député avait traité le président Chávez de dictateur brutal. Nous tenons à vous faire remarquer que les Latino-Américains savent fort bien ce que sont les dictateurs brutaux: ils ont fait la guerre à leurs voisins, ont fait disparaître des milliers de personnes, déplacé des peuples indigènes, entretenu une police secrète, torturé, emprisonné ou tué des gens à volonté et agi avec le mépris le plus total pour la primauté du droit.
    Rien de tout cela ne se produit dans le Venezuela du président Chávez. Le Venezuela n'est pas une dictature. Nous n'avons jamais vu une dictature brutale accepter de perdre un référendum par une marge de 1 p. 100.
    En toute déférence, nous conseillons au comité, s'il veut comprendre la situation des droits de la personne dans la région, d'étudier également le bilan de la Colombie et du Honduras.
    Merci beaucoup.
    Merci.
    Étant donné que la séance a débuté en retard, non à cause des témoins ou des députés, mais parce que je suis arrivé en retard, je propose que nous poursuivions les délibérations un peu après 14 heures. Mais je voudrais savoir si M. Hiebert est d'accord, puisque c'est lui qui doit poser la dernière question, je crois.
    Il posera ses questions en premier. Ce doit donc être d'accord.
    D'accord, monsieur Sweet. C'est très bien. Merci.
    Je présume que c'est acceptable pour tout le monde.
    Nous avons le temps pour des interventions de sept minutes, mais une seule par parti. Vous êtes libres de partager votre temps comme bon vous semble.
    Nous allons commencer par les libéraux.
    En matière de droits de la personne, il est vrai, habituellement, que tous les pays ont des motifs de préoccupation. Je suis un peu inquiet du fait que la très grande majorité des interventions des témoins, aujourd'hui, soient tellement favorables à Chávez qu'il est fort difficile de poser des questions de quelque substance.
    Il y a eu de nombreux rapports provenant de plusieurs organisations des droits de la personne dignes de confiance qui ont dénoncé la concentration du pouvoir entre les mains de M. Chávez et la contraction de l'espace laissé à l'opposition. Il y a également la fermeture de stations de radio et de télévision de l'opposition. On intimide aussi les dissidents.
    Il y a encore les propos tenus par des représentants respectables du MAECI qui sont venus nous présenter un exposé et par plusieurs autres témoins qui sont sur le terrain. Pourtant, je n'ai pas entendu un seul mot à ce sujet. Il est donc très difficile de poser des questions, puisque tout va si bien au Venezuela.
    D'après vous, y a-t-il eu des incidents en dehors de ceux qui sont imputés à l'opposition? On dirait que tous les problèmes sont attribuables à l'opposition, et non au gouvernement. Percevez-vous quoi que ce soit de préoccupant, en ce qui concerne aussi bien la concentration du pouvoir et que l'intimidation de l'opposition?

  (1335)  

    Il y a de très graves problèmes au Venezuela, qui est un pays en développement. Il y a des problèmes de criminalité. C'est pourquoi j'ai parlé de la police. Les paramilitaires colombiens causent des problèmes. Ils franchissent régulièrement la frontière et commettent des atrocités, et ils collaborent avec des gangs criminels. Il y a de terribles problèmes de narcotrafic. Récemment, l'ONU a dit que le Venezuela était l'un des pays où on confisque le plus de drogues à ces bandits, à ces meurtriers qui apportent des drogues dans le pays.
    J'essaie de vous faire comprendre que, malgré toutes les difficultés qu'il peut éprouver, le gouvernement essaie de régler les problèmes. Le pays ne choisit pas de ne pas les voir. Tous les pays ont des problèmes, même le Canada. Nous pourrions parler de choses qu'il n'y a aucun intérêt à aborder ici, mais ce que j'essaie de vous dire, c'est qu'il s'agit d'un gouvernement qui... Par le passé, les gouvernements étaient impitoyables avec leur population, mais celui-ci essaie de résoudre les problèmes du pays.
    Je ne suis pas d'accord non plus pour dire que certaines des organisations qui ont fait des rapports contre le Venezuela sont dignes de confiance. L'Association interaméricaine de la presse n'est pas une association de journalistes, ce n'est pas une ONG ni une organisation universitaire. Elle regroupe les propriétaires de journaux, et ils sont très puissants.
    Je voudrais que vous écoutiez ce que disent les journalistes latino-américains. La Fédération latino-américaine des journalistes a déclaré que l'Association interaméricaine de la presse « a été complice de barbarie et a été à l'origine du déraillement de processus démocratiques. Elle n'a aucune autorité morale, puisqu'elle a appuyé certains des coups d'État les plus sanglants des dernières décennies. »
    Cette association n'a jamais condamné le coup d'État survenu au Honduras, ni l'assassinat, le mois dernier, de six journalistes dans ce même pays.
    Quant à Human Rights Watch, un rapport récent de cet organisme a rejeté une lettre ouverte signée par 100 des experts de l'Amérique latine les plus distingués en Amérique du Nord et en Europe et disant que Human Rights Watch « ne respecte pas les normes les plus élémentaires de savoir, d'impartialité, d'exactitude ou de crédibilité ».
    Vous pouvez constater que des personnalités très puissantes se dressent contre le Venezuela. Nous craignons fort que cela ne ressemble beaucoup à des campagnes qui ont eu lieu dans d'autres régions du monde avant que de terribles conflits ne soient déclenchés contre les pays en cause.
    Oui, il existe bien des problèmes analogues à ceux de tous les pays en développement, mais nous croyons ce que croient les Vénézuéliens, ce qu'ils ont montré aux élections et dans les sondages. Les après les autres, les sondages internationaux ont montré que les Vénézuéliens sont parmi les Latino-Américains qui ont le plus grand respect pour leur démocratie, et ce sont eux qui, dans cette région, croient le plus que leur gouvernement a la capacité de résoudre leurs problèmes. En fin de compte, c'est ce qui importe le plus: ce que les Vénézuéliens croient, ce pour quoi ils votent, ce qu'ils disent dans ces sondages internationaux.

  (1340)  

[Français]

    Puis-je ajouter une chose? Je serai brève.

[Traduction]

    À vous, s'il vous plaît, madame Vaudry.

[Français]

    J'aimerais parler de la concentration des pouvoirs et de la réduction de l'espace démocratique. En ce qui a trait à la concentration des pouvoirs, comme je l'ai dit plus tôt, des conseils communaux ont été mis en place avec la nouvelle constitution de 1999. Le but est de donner le pouvoir au peuple.
    Eh bien, votre idée semble déjà faite, donc je ne suis pas...

[Traduction]

    Allez-y.

[Français]

    J'ai fait une recherche approfondie. Dans les villages, les gens participent à des conseils communaux et sont élus pour participer à ces conseils. Ils ont des budgets participatifs, un peu comme ce qui a été popularisé au Brésil, pour développer leurs propres projets dans leurs communautés. Comme je l'ai dit plus tôt, des projets d'économie de l'eau ont été réalisés, des médias communautaires ont aussi été mis en place, tout comme des initiatives locales.
    Sur le plan de la réduction de l'espace démocratique, comme je l'ai dit, des médias communautaires ont pris beaucoup de place. C'est le peuple qui produit son information et qui la diffuse. Ce ne sont pas des médias avec une idéologie fermée pronéolibérale qui la diffusent. Ce n'est donc pas quelque chose qui est extérieur à la population qui nous entre dans la tête et qu'on avale par la suite. Est-ce la démocratie, se faire dire quoi penser?
    Là-bas, les gens réfléchissent, mettent des choses en avant et les publicisent. Aucune chaîne de télévision n'a été fermée. La licence du réseau RCTV internacional a même été suspendue, parce qu'elle n'a pas respecté la loi de responsabilité sociale en radio et télévision, la Ley Resorte. C'est un peu comme le CRTC ici. Dernièrement, une personne de ce réseau a dit en ondes que la solution pour le Venezuela était militaire et réclamait de passer directement à l'insurrection. Est-ce qu'on permettrait une telle pratique ici?
    J'ai le regret de vous dire que les huit minutes allouées sont écoulées.
    Madame Deschamps, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Vous représentez deux organisations qui dénoncent ce qui se passe au Venezuela. Vous êtes sur place pour recueillir l'information. Vous pouvez aussi voir les avancées qui sont réalisées. Madame Vaudry, vous avez fait état de plusieurs avancées, tant sur le plan social que sur le plan économique, réalisées depuis l'arrivée au pouvoir de M. Chávez.
    Depuis 2002, soit depuis le coup d'État, ce que la communauté internationale ressent par rapport à la situation du Venezuela est que la société est de plus en plus polarisée. Entre autres, vous avez dit que 80 p. 100 des médias sont privés. Pourtant, on nous rapporte que l'on compte peu de médias indépendants au pays et que la vision de la réalité vénézuélienne est confuse. Entre autres, l'association Human Rights Watch craint beaucoup le contrôle exercé par le gouvernement sur le contenu médiatique au Venezuela. On nous rapporte beaucoup de cas de corruption et on dit que le système judiciaire est à la solde du gouvernement.
    Vous travaillez et vous êtes présents sur le terrain. Dites-nous de qui vient cette image du gouvernement vénézuélien que l'on reçoit.

[Traduction]

    À propos des médias, d'abord, je peux vous donner les chiffres réels pour que vous puissiez juger vous-mêmes. Il y a 656 stations de radio privées, 243 stations communautaires et seulement 79 stations appartenant à l'État dans tout le pays.
    Quant aux stations de télévision, il y en a 65 qui sont privées, soit 60 p. 100, 37 communautaires, c'est-à-dire 35 p. 100 et seulement six qui appartiennent à l'État dans tout le pays.
    Soit dit en passant, la télévision et la radio communautaires n'ont rien à voir avec l'État. Le gouvernement n'est pas présent. Ce sont les localités qui s'en occupent, et l'État ne leur dicte pas leur conduite. Si des gens disent qu'il n'y a pas de médias privés, voilà les chiffres.
    Mais le système judiciaire est important, car le système judiciaire du Venezuela a été appelé la Cendrillon des pouvoirs du pays, car il avait la pire réputation qui soit à cause d'une corruption systémique et, comme je l'ai déjà dit, les gouvernements antérieurs ont refusé de le réformer.
    Il est très difficile d'éradiquer la corruption dans le système judiciaire, mais, lorsque le gouvernement essaie de le réformer, l'opposition crie au scandale et prétend que c'est de l'intervention et de la politisation. Tout cela a changé. Il y a maintenant un large accès à la justice, au fond. On n'atteint jamais la perfection recherchée, et il faudra probablement une nouvelle génération d'avocats et de juges pour exercer un contrôle complet, mais, par exemple, les juges étaient autrefois élus par ceux qu'ils connaissaient, par le parti ou par des amis. Maintenant, un comité parlementaire composé de membres de la société civile et de parlementaires choisit les juges, après plusieurs présélections et processus. Auparavant, personne ne savait comment les juges étaient nommés.
    Le système judiciaire...

  (1345)  

[Français]

    Je vais certainement manquer de temps.

[Traduction]

    Je suis désolée.

[Français]

    J'aimerais poser une question. À qui profite le fait que l'on perçoive que la société n'a pas évolué avec l'arrivée de M. Chávez?

[Traduction]

    L'opposition. L'opposition, qui contrôle les médias maintenant et depuis des années, a des liens avec l'étranger. Les propriétaires des médias connaissent les autres propriétaires, et c'est de là que vient l'information qui arrive au Canada. Saviez-vous que le Canada n'a aucun reporter de ses grands journaux ou de la SRC sur place, au Venezuela? Tous reçoivent l'information par l'entremise des médias étrangers, aux États-Unis.
    Et il y aussi le mot magique que nous venons de prononcer: le pétrole. Si le Venezuela n'avait que des pommes de terre et des carottes à vendre, personne ne se soucierait de ce qui se passe là-bas.
    Non.
    Le Venezuela n'est pas loin des États-Unis. Il est très facile d'obtenir du pétrole, et le Venezuela en a toujours vendu aux États-Unis. Le pétrole ne se mange pas. Il est dans l'intérêt du Venezuela de vendre son pétrole à qui veut le payer, mais c'est une question de contrôle.
    Je dois vous dire et vous prévenir que les États-Unis ont établi 14 bases militaires et navales en Colombie et 11 au Panama. Ces cinq dernières années, on a dénombré 71 bases militaires et navales en Amérique latine. Je vous préviens, très estimés et nobles députés, que ce que nous craignons le plus, et c'est l'une des raisons de ma présence, c'est le risque de guerre dans la région à cause de ces bases militaires. Nous nous demandons ce qu'elles font là. Si elles sont là pour lutter contre le narcotrafic, il leur faut des hélicoptères capables de se déplacer facilement. Or, ce sont des bases capables d'accueillir d'énormes avions C-17 qui peuvent traverser la région sans ravitaillement. À quoi doivent-ils servir?
    Je ne suis pas spécialiste du militaire, mais ce genre de chose a beaucoup effrayé non seulement le Venezuela, mais aussi tout l'UNASUR. En ce moment même, les présidents de l'UNASUR, organisation qui regroupe tous les présidents de l'Amérique latine, entament des entretiens. Ils sont tous très inquiets de la présence de troupes et de bases étrangères dans une région où elles étaient absentes autrefois.
    Lorsque les choses semblent intrigantes, je vous demande de bien vouloir penser au pétrole et aux intérêts de ceux qui transmettent cette information fausse sur un pays qui a des difficultés, mais qui ne ménage aucun effort pour régler les problèmes ordinaires du sous-développement.

  (1350)  

    Merci, madame Victor.
    Nous allons maintenant passer à M. Marston. Je vous en prie.
    Dans vos deux exposés, j'ai senti de la crainte. Elle était palpable dans cette salle, pendant que vous nous parliez. D'abord, je n'ai pas compris que vous aviez peur de nous, les nobles députés, comme vous dites.
    J'ai un peu peur.
    Maintenant, je comprends que vous craignez pour les progrès qui ont été réalisés dans ce pays-là
    J'ai trouvé l'attitude du comité très troublante, car j'ai eu l'impression que beaucoup de députés étaient mal disposés à votre égard avant même que vous ne preniez la parole. J'ai vu des gens utiliser leur BlackBerry, ne pas écouter vos exposés, etc. J'ai trouvé cela choquant et très décevant. J'aurais voulu que la séance soit télévisée pour que les gens puissent voir cela.
    Il est vrai que beaucoup d'information transmise au Canada par les médias relève de la désinformation orchestrée. À titre de président du Hamilton and District Labour Council, j'ai souvent rencontré au groupe de travail latino-américain des ressortissants de la Colombie, du Honduras, de l'Amérique du Sud et, sous certains aspects, ce qu'ils racontaient étaient pire que ce que vous venez de décrire. D'après ce que vous nous dites, le Venezuela a franchi une étape et il est dans la voie de la démocratisation, ce dont il faut tenir compte, si ce que vous dites est exact.
    Les conseils dont vous avez parlé ressemblent à ce qu'on observe à Cuba également. Il y a un certain temps, nous avons consacré une étude à Cuba. J'ai été interloqué.
    J'ai une série de questions à vous poser. Le message que vous avez essayé de nous transmettre est très complet. Nous avons eu des problèmes de médias chez nous également. Lord Thomson of Fleet et Conrad Black étaient propriétaire des médias, qu'ils dominaient au Canada. Je serai poli en disant que leurs idées n'étaient pas favorables aux travailleurs. Mais, Dieu merci, c'était loin d'être aussi grave que ce dont vous avez parlé. Partout, la démocratie est très fragile. Nous avons vu à quel point, lorsqu'il y a eu une tentative de coup d'État au Venezuela, et le nom de Chávez a été noirci partout dans le monde... Cela obéit à un plan prescrit par quelqu'un. Dès qu'on entend le mot « pétrole », on a tendance à...
    En 1979, en Arabie saoudite, j'ai rencontré des Américains qui se trouvaient dans une base militaire secrète, dont l'existence a été révélée à la guerre du Golfe. Je ne suis pas étonné. Le nombre de bases est horrifiant, si vos chiffres sont exacts. C'est une évolution vraiment frappante. Une chose qu'on a observée ici et qui m'inquiète est que le gouvernement cherche moins à financer des activités en Afrique et s'oriente plutôt vers l'Amérique du Sud. J'espère que cela n'a rien à voir avec ce que nous avons entendu aujourd'hui.
    Une chose pique ma curiosité. Vous avez parlé d'organisations diverses et signalé que l'armée vénézuélienne distribuait des médicaments et bâtissait des écoles. Est-ce un rôle important pour elle en ce moment? Est-ce sa raison d'être. C'est extraordinaire. Nous avons l'habitude de voir notre armée prêter main-forte en cas de catastrophe, mais est-ce que c'est une fonction constante de l'armée vénézuélienne?
    Camilo et moi pouvons répondre à cette question.
    En ce qui concerne les médias vénézuéliens, j'ai pris part au mouvement de solidarité du Venezuela après le coup d'État de 2001. J'ignore si vous vous en souvenez. À CNN, on pouvait voir cette image classique des partisans de Chávez qui étaient censés faire feu sur des manifestants non armés. Il y a un documentaire primé, intitulé The Revolution Will Not Be Televised, qui a été produit par deux journalistes irlandais. Tous les membres du comité devraient regarder ce documentaire, car il a été monté de toutes pièces par RCTV. Si on reculait la caméra, on pouvait voir que c'était un montage. Voilà le genre de manipulation médiatique qui a cours. Voilà pourquoi nous avons défendu la révolution vénézuélienne, la population vénézuélienne.
    Camilo Cahis, mon camarade ici présent, est allé récemment à une manifestation où les militaires vénézuéliens étaient présents. Je crois qu'il peut témoigner.

  (1355)  

    Je suis canadien, et c'était mon premier voyage au Venezuela. Je suis rentré il y a environ une semaine. Pour quelqu'un qui vient d'un pays comme le Canada, le rôle des militaires au Venezuela est absolument étonnant. Dans les pays d'Amérique latine, d'Afrique ou d'ailleurs, dans le monde en développement, le dispositif militaire fait peur parce qu'il sert à réprimer la population.
    Il s'agissait d'un ralliement pour célébrer le bicentenaire de l'indépendance du Venezuela, le 19 avril. Il a attiré plus d'un demi-million de personnes. Le ralliement comprenait un défilé militaire. Le plus étonnant s'est produit après le ralliement: les soldats sont descendus de leurs chars ou de leurs avions et ont commencé à se mêler à la foule, discutant avec des participants et les serrant dans leurs bras. Moi qui étais un étranger au Venezuela, j'ai pu discuter avec deux, trois ou quatre soldats et leur demander ce qu'ils pensent de la révolution et de ce qui se passe dans leur pays. Il était étonnant de pouvoir discuter avec des simples soldats de la situation politique dans leur pays, et ils s'exprimaient très librement. Ils faisaient monter des enfants sur les chars. Il n'y avait aucun crainte, comme si l'armée et la population ne faisaient qu'un.
    Pour répondre à votre question, monsieur Marston, je dirai que l'armée a un rôle très intéressant au Venezuela. On a l'impression que c'est une armée du peuple, issue de lui et qu'il n'y a aucune solution de continuité entre les masses et les forces armées au Venezuela. Les militaires donnent leur aide, surtout dans les barrios, au Venezuela, et il y a eu une innovation, car l'armée donne même à de simples travailleurs de la formation dans le maniement des armes et une formation militaire. J'ai discuté avec un travailleur qui est président à l'usine de valves. Il m'a dit que tous sont encouragés à prendre part à la révolution pour pouvoir se défendre en cas d'invasion par la Colombie. Comme les autres témoins l'ont dit, c'est là une menace très réelle.
    De la part de la Colombie?
    Effectivement.
    C'est une menace très réelle. Les 14 bases militaires en Colombie, la base de Curaçao, celles de Panama font planer une menace très réelle, et la population le sent. Les simples travailleurs ont l'impression d'être menacés et encerclés, mais ils veulent défendre leur pays. Ils ne vont pas se soumettre. Cette révolution, les Vénézuéliens la ressentent dans leur âme. Elle leur appartient.
    Je vais devoir vous interrompre. Le moment semble s'y prêter. Nous dépassons un peu les huit minutes pour une question de sept minutes.
    Avant que vous ne remettiez le chronomètre en marche pour un autre député, me permettriez-vous de demander une précision? M. Grant a parlé d'un documentaire qui a été monté de toutes pièces par des médias d'information. Il a dit de qui il s'agissait, mais je n'ai pas bien saisi.
    Pourriez-vous vérifier qui est l'auteur de ce faux documentaire?
    Monsieur Grant.
    Je crois savoir que c'était RCTV, n'est-ce pas?
    Radio Caracas Televisión.
    Il a été rediffusé par CNN, puis par le département d'État américain. Cela a servi à justifier le coup d'État de 2002. On prétendait que des partisans de Chávez faisaient feu sur des manifestants non armés. Les militaires sont intervenus pour rétablir l'ordre, apparemment, et le département d'État américain a ensuite reconnu le régime des auteurs du coup d'État, mais ce régime a été renversé par le peuple deux jours plus tard.
    Comme le temps est compté, nous allons passer à la prochaine question.
    Ce sera vous, monsieur Sweet, ou M. Hiebert?
    On a laissé entendre, si j'ai bien compris, que le taux d'analphabétisme avait été ramené à zéro en 2008. C'est une affirmation renversante. Je ne crois pas que même le Canada puisse se vanter d'un taux d'analphabétisme nul. Y a-t-il des preuves?

  (1400)  

[Français]

    En fait, l'UNESCO a dit que le Venezuela était libre d'analphabétisme.

[Traduction]

    Sensationnel.
    Je devrais commencer par poser des questions fondamentales, ce qui est toujours bien quand on essaie de comprendre la perspective des gens.
    Vous êtes une organisation sans but lucratif, exact? Combien d'employés avez-vous?

[Français]

    On n'a pas d'employés, on est des bénévoles, des militants.

[Traduction]

    Avez-vous une source de revenus?

[Français]

    Non, sauf quand on organise des événements, des gens collaborent avec nous à la porte. On vend de la documentation qu'on écrit, des cahiers.

[Traduction]

    Recevez-vous des fonds de l'État au Canada ou d'un autre gouvernement?

[Français]

    Non.

[Traduction]

    Aucun financement gouvernemental. D'accord
    En proposez-vous un?
    Non.
    Nous n'avons pas d'argent.
    Nous n'avons pas d'argent non plus.
    Bien entendu, les préoccupations que nous entendons... Sans les rencontrer directement, il faut croire les gens sur parole, jusqu'à un certain point. Leur crédibilité est en cause. Vous avez fait beaucoup d'affirmations sur des organisations vouées aux droits de la personne qui ne font pas du travail de qualité et au sujet de distorsions médiatiques de la réalité. Certaines affirmations qui ont été faites sont difficiles à écarter, lorsqu'elles viennent de sources diverses.
    Vous avez beaucoup parlé des révisions de la constitution. Je tiens d'une source apparemment impartiale qu'une loi a été adoptée, prévoyant des peines de 60 jours à 30 mois de prison sans libération sous caution pour insulte au président
    J'ai la constitution ici même, si vous voulez vérifier.
    Non, il s'agirait d'une nouvelle loi qui ne ferait pas partie de la constitution. Dites-vous que cette loi punissant les insultes au président est une invention?
    Puis-je répondre?
    Est-ce une invention?
    C'en est une.
    Comme j'ai beaucoup de questions, je vais...
    Non, c'est une invention. Nous avons maintenant au Venezuela une nouvelle loi identique à celle que vous avez ici, comme je l'ai déjà dit. L'incitation à la haine est interdite. On ne peut tenir des propos sexistes ou racistes à la télévision... Ça va?
    D'accord. J'ai beaucoup de questions et peu de temps. J'ai entendu votre réponse. C'est une invention, ce n'est pas vrai.
    Oui.
    D'accord.
    Nous avons ici une information selon laquelle, le ministre de l'Intérieur et de la Justice du Venezuela, Tarek El Aissami, aurait déclaré en octobre 2009 que la police commet de 15 à 20 p. 100 des crimes dans le pays, y compris les crimes les plus violents. C'est ce que dit un ministre du gouvernement: la police commet le cinquième des crimes, et même les crimes les plus violents.
    Ce n'est sûrement pas de la désinformation. Cela vient du gouvernement du Venezuela. Admettez-vous que c'est un sujet d'inquiétude.
    Bien entendu. C'est pourquoi il y a nouvelle loi sur la police et une nouvelle force policière nationale. Les forces policières étaient très divisées. Il y avait des maires et, dans une ville, par exemple, celle de Caracas, il y avait cinq ou six maires, et chacun avait ses forces policières qui étaient en somme leur propre petite armée. Beaucoup de maires s'opposaient au gouvernement, mais certains en étaient partisans. Il y avait donc beaucoup de conflits.
    Oui, le ministre a entièrement raison. C'est pourquoi le gouvernement a légiféré et créé une force policière moderne et nationale. Il y a maintenant une académie que les agents doivent fréquenter, et ils apprennent à assurer la police communautaire. Ils doivent étudier les droits de la personne.
    Il faudra un certain temps. On ne jette pas à la porte tous ses policiers d'un coup pour les remplacer par des nouveaux.
    Normal.
    Vous admettez donc que la violence et la corruption dans les forces policières sont un sujet d'inquiétude.
    Oui, bien entendu.
    Vous avez parlé de l'incapacité des organisations vouées aux droits de la personne de décrire avec exactitude ce qui se passe. Cela arrive peut-être, mais affirmer que toutes ces organisations qui observent le Venezuela font un travail incomplet ou travestissent la vérité...

  (1405)  

    Oui.
    Il doit y avoir un élément de vérité, car ces organisations nous parlent par exemple d'exécutions illégales, de conditions carcérales atroces, d'arrestations et de mises en détention arbitraires, d'un système judiciaire politisé — nous en avons discuté — et d'attaques contre l'indépendance des médias. Il doit y avoir un peu de vérité, puisque tant d'organisations disent la même chose.
    Je suis très heureux que vous soyez là pour donner votre point de vue, mais êtes-vous prêts à admettre qu'il y a des problèmes de respect des droits de la personne au Venezuela? Ou croyez-vous fermement qu'il n'y en a aucun?
    Voulez-vous que je réponde?
    Je crois qu'il y en a. Il y en a sûrement, mais il faut considérer le Venezuela dans tout le contexte de la région. Si vous comparez le Venezuela et les améliorations considérables apportées depuis l'élection du gouvernement Chávez par rapport à ce que faisaient les gouvernements antérieurs, qui ont tué 3 000 personnes à Caracazo, où les habitants des barrios avaient peur de la police, par exemple, il faut avouer qu'il y a eu un net progrès. Il faut aussi comparer le Venezuela à la Colombie, et aussi au régime issu d'un coup d'État au Honduras. C'est très important.
    Ce sera votre dernière question.
    Très bien. Merci, monsieur le président.
    Vous dites que oui, il y a des problèmes de respect des droits de la personne, mais que la situation, si on la compare à celle du passé ou à celle du reste de la région, demeure acceptable?
    Les problèmes s'atténuent.
    Ils s'atténuent.
    Ils ne sont jamais acceptables.
    D'accord, mais vous avouez donc que, pris isolément...
    Tous les pays ont des problèmes de respect des droits de la personne.
    Puis-je...
    Même le Canada en a.
    Diriez-vous que les problèmes du Canada sur ce plan sont comparables?

[Français]

    Puis-je donner un exemple? Ce sera bref, mais c'est relié...

[Traduction]

    Voilà qui met fin aux questions que nous pouvons poser. Je propose maintenant de laisser à Mme Vaudry puis à Mme Victor la possibilité de faire leurs observations, et cela terminera cette étape de nos travaux.
    Madame Vaudry, s'il vous plaît.

[Français]

    J'aimerais donner une brève réponse. Vous avez demandé de faire une comparaison avec le rôle du Canada. Vous connaissez probablement le SCRS, le Service canadien du renseignement de sécurité. Il harcèle les mouvements sociaux. Je ne sais pas ce qu'il en est des autres groupes, mais ceux qui appuient la révolution bolivarienne au Venezuela, mes amis, se font harceler dans leur maison, se font menacer de se faire mettre à l'extérieur du pays s'ils ne collaborent pas, se font dire que leurs enfants pourraient avoir des problèmes. J'ai des amis qui se font harceler par les services secrets ici, au Canada. Est-ce normal?
    Je ne propose pas au peuple québécois ou canadien de s'insurger et de faire un coup d'État. Je milite en fait pour la révolution bolivarienne et la publicité de tout ce qui se passe là-bas, pour démystifier, pour faire contraste avec ce qui se passe dans les médias de masse ici, au Canada.
    Ce que font les services secrets du Canada ne devrait jamais avoir lieu ici.

[Traduction]

    Allez-y, oui.
    Je me limiterai à quatre derniers points. D'abord, le gouvernement vénézuélien n'a pas fait la guerre depuis celle de 1811-1825, la guerre de l'indépendance. Les militaires et le gouvernement en sont très fiers. C'est pourquoi l'armée sert maintenant à faire des choses constructives, à aider la population.
    Deuxièmement, lorsque des gens viennent vous dire qu'il y a des assassinats au Venezuela, je vous implore de trouver quelle est la source, de demander qui a été tué et où est le corps, où sont ceux qui pleurent le disparu. Cette accusation revient sans cesse, et je demande où sont les morts. Trouvez les sources. Je ne dis pas que c'est toujours une erreur, que ce ne sont que des mensonges, mais je vous prie instamment de vérifier la source des renseignements.
    Troisièmement, ceux qui qualifient le président Chávez de dictateur traitent de menteur et de gredin le président Jimmy Carter des États-Unis, car lui et le Carter Centre, ainsi que 300 observateurs étrangers sont allés voir comment se déroulaient les élections au cours des 11 dernières années. Ces élections ont été les plus surveillées dans le monde par la communauté internationale. Ceux qui disent que le président Chávez a été élu de façon irrégulière traitent le président Carter de menteur.
    Voici la dernière chose que je voudrais vous montrer. Voici dans quoi on vend le riz. Dans celui-ci, c'était le sucre. On vend des haricots, et tout cela dans des établissements subventionnés par l'État, mais on ne voit nulle par le visage du président Chávez ni des symboles de son parti ou du gouvernement. Ce sont des articles de la constitution et ils sont abordés dans un programme d'éducation populaire qui inculque aux gens l'idée qu'ils ont des droits qu'ils peuvent réclamer au gouvernement. Il y a le droit à l'éducation. Le droit à la culture. Désormais, la culture des Noirs, des anciens esclaves, est acceptée aux côtés de celle des différents groupes ethniques. On informe la population au sujet de ses droits, et je ne connais aucune autre dictature brutale qui agit de la sorte.
    Je peux vous laisser cela, si vous le voulez. Encore une fois, je vous implore, messieurs, s'il vous plaît...

  (1410)  

    Merci.
    Je suis désolé de vous interrompre, mais les députés doivent être de retour dans les trois minutes à la Chambre des communes, dans un autre édifice, pour assister à la période des questions, qui débute à 14 h 15.
    Je tiens à remercier les témoins de leur participation.
    Je précise simplement pour qu'on sache à quoi s'en tenir, que les objets qui ont été montrés sont deux sacs de plastique qui contenaient du riz, je crois.
    Du riz et du sucre.
    Nous allons les accepter comme éléments de preuve.
    Merci beaucoup à tous. Nous vous sommes reconnaissants d'avoir bien voulu comparaître.
    Nous allons lever la séance.
    Merci beaucoup. Nous vous sommes reconnaissants.
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