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INDU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie


NUMÉRO 005 
l
3e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 25 mars 2010

[Enregistrement électronique]

(0900)

[Traduction]

    Bonjour, chers collègues. Soyez les bienvenus à la cinquième séance du Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie, en ce 25 mars 2010.
    Nous sommes réunis, conformément à l'article 108(2) du Règlement, pour étudier les règlements canadiens concernant les intérêts étrangers dans le secteur des télécommunications. Nous accueillons aujourd'hui trois témoins d'Industrie Canada: Mme Morgan, Mme McDonald et Mme Lévesque. Bienvenue à toutes les trois. Nous commencerons par une déclaration préliminaire de 10 minutes et passerons ensuite aux questions et aux commentaires des membres du comité.
    Madame Morgan.
    Merci, monsieur le président et merci de nous accueillir aujourd'hui. Je suis sous-ministre adjointe au secteur de la politique stratégique d'Industrie Canada. J'aimerais vous présenter Helen McDonald, qui est sous-ministre adjointe au secteur du spectre, technologies de l'information et télécommunications, et Mme Anne-Marie Lévesque, qui est notre avocate générale principale.
    Avant de répondre aux questions, j'aimerais aujourd'hui donner au comité un aperçu des restrictions imposées par le Canada à l'investissement étranger dans le secteur des télécommunications et expliquer un peu comment elles se comparent à celles d'autres pays, quelles études ont été faites sur le sujet et quelles en ont été les conclusions.

[Français]

    Le secteur des télécommunications, d'une valeur de 40 milliards de dollars, représente un élément clé de l'économie numérique de l'ère moderne et fait partie intégrante de l'ensemble de la société. Nous en sommes tous venus à compter sur l'accès Internet à large bande, sur les BlackBerry, les messages texte et la télévision par satellite.
    En raison de l'importance de ce secteur, nous devons nous assurer que, du point de vue de la réglementation, nous faisons notre possible afin que les Canadiens reçoivent des services innovateurs à des prix concurrentiels. En 2006, le gouvernement a donné des instructions de politique au Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes. Ces instructions visaient à compter le plus possible sur le libre jeu du marché et de ne réglementer les télécommunications que lorsque c'était nécessaire.
    En 2008, dans le cadre des enchères du spectre des radiofréquences, une partie du spectre a été mise de côté pour donner aux nouveaux venus la possibilité de déposer des soumissions uniquement pour favoriser une concurrence plus vive sur le marché des services sans fil.

[Traduction]

    L'objectif du gouvernement est de veiller à ce que les Canadiens puissent profiter d'une concurrence accrue et d'investissements plus élevés dans le secteur des télécommunications, pour offrir davantage d'innovation, des prix plus compétitifs et des services accessibles aux consommateurs.
    Ceci m'amène à notre sujet — les restrictions à l'investissement étranger dans les télécommunications. On craint que ces restrictions ne nuisent à la croissance et à la compétitivité de l'industrie au détriment des consommateurs et de l'ensemble de l'industrie.
    J'aimerais préciser d'emblée que, lorsque je parle de restrictions à l'investissement étranger dans le contexte canadien, je fais référence aux exigences législatives concernant la propriété et le contrôle canadiens, dont je parlerai en détail plus tard, mais qui prennent la forme de restrictions sur les actions avec droit de vote et sur le contrôle de fait détenu par des entités étrangères.
    Les restrictions formelles imposées par le Canada à la propriété et au contrôle des télécommunications sont relativement nouvelles. Même si elles ont été annoncées en 1987, elles n'ont été officiellement adoptées qu'en 1993. La décision d'adopter ces restrictions a été prise pendant les négociations de l'Accord de libre-échange Canada-É.-U., en fonction des restrictions imposées par les É.-U. et pour veiller à ce qu'elles puissent être maintenues dans l'ALE.
    En annonçant les intentions du gouvernement à la Chambre des communes en 1987, la ministre des Communications de l'époque, Flora MacDonald, avait dit qu'elles étaient nécessaires pour préserver la souveraineté nationale dans ce secteur vital de l'économie canadienne, pour des raisons de sécurité nationale et de bien-être économique, social et culturel.
    La Loi sur les télécommunications, qui contient ces restrictions, est entrée en vigueur en 1993. L'article 16 de cette loi stipule que les entreprises de télécommunication doivent appartenir à des Canadiens et être contrôlées par des Canadiens, et que pour respecter cette exigence, elles doivent satisfaire à trois critères: 80 p. 100 au moins des actions avec droit de vote doivent être détenues par des Canadiens; 80 p. 100 des membres du conseil d'administration doivent être des Canadiens; enfin, la société ne doit pas par ailleurs être contrôlée par des non-Canadiens, ce qu'on en est venu à appeler le critère du contrôle de fait.
    Ces dispositions, comme la plupart de celles de la Loi sur les télécommunications, sont administrées par le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes, qu'on appelle également le CRTC.
    La Loi sur les télécommunications est assortie d'une série de dispositions réglementaires contenues dans le Règlement sur la propriété et le contrôle des entreprises de télécommunication canadiennes de 1994. Ce règlement détermine qui peut être considéré comme un Canadien pour les besoins de la loi — par exemple, dans le cas de fiducies, de caisses de retraite et de partenariats. Dans le cas des sociétés par actions, le règlement exige qu'au moins 66 2/3 p. 100 des actions avec droit de vote soient détenues par des Canadiens et que la société ne soit pas par ailleurs contrôlée par des non-Canadiens.
    Je devrais signaler que les entreprises de sans fil sont visées par des exigences relatives à la propriété et au contrôle qui sont pratiquement identiques à celles de la Loi sur les télécommunications. Ces exigences découlent du Règlement sur la radiocommunication, en vertu de la Loi sur la radiocommunication. Il s'agit de la loi qui régit la gestion du spectre des radiofréquences et qui est administrée par Industrie Canada. Avant de délivrer des licences du spectre, Industrie Canada doit confirmer que ces exigences relatives à la propriété et au contrôle sont respectées.
(0905)

[Français]

    Le développement majeur qui a suivi en rapport avec ces restrictions des investissements a été, en 1998, l'Accord sur les télécommunications de base, dans le cadre de l'Accord général sur le commerce des services de l'Organisation mondiale du commerce. Le Canada était signataire de cet accord historique. Au moment des négociations, une pression considérable s'exerçait sur le Canada et sur d'autres pays pour les inciter à autoriser la concurrence étrangère sur leurs marchés. En fin de compte, la plupart des pays de l'OCDE se sont engagés à libéraliser leurs marchés, notamment en éliminant les obstacles s'opposant à la participation étrangère. Mais le Canada ne l'a pas fait. Nous avons accepté de libéraliser les services internationaux.
     Pour donner suite à cet engagement, en 1998, on a modifié la Loi sur les télécommunications en éliminant les restrictions à l'investissement dans le cas des stations terriennes de satellites et des câbles sous-marins internationaux.

[Traduction]

    Cette grande libéralisation initiale de la participation étrangère aux marchés des télécommunications a été suivie par une libéralisation progressivement plus poussée de la part d'autres pays. L'OCDE actualise tous les deux ans les données à ce sujet dont les plus récentes remontent à 2008. Cette année-là, 18 des 30 pays de l'OCDE n'imposaient aucune restriction à la propriété étrangère dans leur secteur des télécommunications. Seulement neuf pays imposaient des restrictions importantes, dont six qui limitaient leurs restrictions à leurs anciennes sociétés d'État monopolistiques.
    D'après l'OCDE, le Mexique, la Corée du Sud et le Canada ont les marchés les plus fermés à l'investissement étranger. Toutefois, depuis 2008, le Mexique et la Corée du Sud ont commencé à assouplir leurs restrictions. Le Mexique autorise maintenant la propriété étrangère intégrale pour le sans-fil et un projet de loi visant à libéraliser le marché filaire a été présenté à son Congrès. La Corée autorise une participation étrangère de 49 p. 100 mais pourrait se libéraliser encore davantage dans le contexte de ses négociations commerciales en cours avec les États-Unis.
    De tous les pays de l'OCDE, le Canada possède maintenant le régime le plus restrictif à l'égard de l'investissement étranger dans les télécommunications. Un certain nombre de groupes se sont penchés sur cette question au cours des dernières années. Le premier à l'avoir fait est ce comité même, qui a procédé à un examen approfondi en 2003. Il a constaté que les télécommunications étaient un élément clé de l'économie mondiale du savoir. En ce qui concerne les restrictions, le comité a déterminé qu'elles freinent la productivité et la croissance économique du Canada, qu'elles empêchent de nouveaux venus du secteur des télécommunications d'investir et qu'elles inhibent la diffusion des nouvelles technologies de communications ainsi que l'accès des Canadiens à des services de télécommunication modernes.
    Le Groupe d'étude sur le cadre réglementaire des télécommunications s'est à son tour penché sur la question en 2006. On a demandé à ce groupe, présidé par Mme Gerri Sinclair (Ph. D.), d'examiner la politique cadre des télécommunications du Canada et de formuler des recommandations sur la manière de la moderniser pour rendre l'industrie solidement concurrentielle à l'échelle internationale. On a déterminé que, parmi les pays de l'OCDE, le Canada avait maintenu l'une des séries de règles les plus restrictives et les plus inflexibles à l'égard de l'investissement étranger dans le secteur des télécommunications. Ce groupe a accordé une attention particulière au secteur du sans-fil. Il a constaté que le Canada était l'un des rares pays de l'OCDE où il n'y avait pas de grand fournisseur de sans-fil international et il a conclu que la qualité, le prix et la disponibilité des services sans fil s'amélioreraient beaucoup si les restrictions relatives à l'investissement étranger étaient assouplies. Le groupe a recommandé une libéralisation graduelle, en proposant que les investissements étrangers dans les entreprises possédant moins de 10 p. 100 du marché canadien des télécommunications soient libéralisés immédiatement, et que la libéralisation de l'ensemble des télécommunications soit retardée jusqu'à ce que soit résolue la question du traitement des câblodistributeurs dans le contexte de l'examen des politiques canadiennes en matière de radiodiffusion.
    Plus récemment, le Groupe d'étude sur les politiques en matière de concurrence a présenté son rapport en 2008. Ce groupe s'est penché sur une large gamme de questions, pas seulement sur les télécommunications, mais il a formulé un certain nombre de commentaires au sujet de l'impact des restrictions imposées aux entreprises de télécommunications sur l'industrie. Il a constaté que ces restrictions influent sur les entreprises nouvelles ou existantes en les incitant moins à réduire ou à éliminer les sources d'inefficacité dans leurs méthodes de travail et dans leurs activités, en limitant les sources de financement, en faussant les structures de financement et en empêchant le transfert technologique. Le Groupe d'étude de la concurrence a fait écho aux recommandations du Groupe d'étude des télécommunications en recommandant une libéralisation graduelle.
    Avant de vous céder la parole, j'aimerais vous parler brièvement des difficultés particulières que suscitent ces restrictions pour le secteur des satellites. Comme vous le savez, le budget de 2010 a indiqué l'intention du gouvernement d'éliminer les restrictions existantes visant les satellites.
    Les fournisseurs canadiens de services par satellite font face à des difficultés immédiates. J'ai parlé des changements apportés en 1998 pour libéraliser les services internationaux. Depuis cette époque, un grand nombre de fournisseurs étrangers de service par satellite ont été approuvés pour offrir un service au Canada, en concurrençant directement des fournisseurs canadiens, comme Télésat. Cette situation est inéquitable parce que les fournisseurs canadiens doivent rivaliser avec ces fournisseurs étrangers, à la fois au Canada et à l'étranger. Le problème vient du fait que les fournisseurs étrangers ne font pas l'objet de restrictions à l'investissement, que ce soit au Canada ou chez eux.
    L'industrie des satellites est de portée internationale. L'élimination des restrictions à l'investissement étranger permettra aux entreprises canadiennes d'avoir accès au capital et au savoir-faire étrangers, d'investir dans des technologies nouvelles ou avancées et de développer des relations stratégiques mondiales qui leur permettront de faire des économies d'échelle et de participer pleinement sur les marchés étrangers.
(0910)
    Le discours du Trône contenait un engagement plus vaste et je cite:
Notre gouvernement ouvrira davantage le Canada au capital de risque et à l’investissement étranger dans les secteurs clés, notamment ceux des satellites et des télécommunications, donnant ainsi aux entreprises canadiennes un accès aux fonds et à l’expertise dont elles ont besoin.
    Cette question a des répercussions potentielles importantes à la fois pour ce qui est de la compétitivité de l'industrie des télécommunications et de la qualité et du prix des services offerts aux consommateurs. II est important que le gouvernement prenne le temps de consulter et d'étudier à fond les options avant d'agir.
    Merci beaucoup, monsieur le président, de nous avoir invités à comparaître aujourd'hui pour parler de cette question d'importance.
    Merci, madame Morgan.
    Nous allons entamer la période de commentaires et de questions avec M. Garneau.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    On est convoqués ici, aujourd'hui, en raison d'une motion de mon parti qui visait à aborder deux enjeux importants. Il s'agit d'abord de la décision prise par le gouvernement concernant Globalive. Le CRTC a jugé que le contenu de Globalive n'était pas suffisamment canadien, tandis que le gouvernement a pris position différemment. Alors, je veux certainement mieux comprendre cela, mais je ne vais pas vous poser ces questions moi-même, parce que j'espère pouvoir les porter devant le CRTC et, idéalement, les poser au ministre, plus tard.
    L'autre raison de notre réunion aujourd'hui est d'explorer la question de la propriété étrangère, et vous avez parlé de cela dans votre allocution.

[Traduction]

    Il y a un certain nombre de questions que j'aimerais vous poser au sujet de la propriété étrangère, car comme vous pouvez le constater, cette question particulière suscite des opinions marquées de part et d'autre.
    J'aimerais d'abord connaître la raison qui a motivé l'imposition de restrictions à la propriété étrangère en premier lieu. Permettez-moi de citer les principaux objectifs de la politique canadienne en matière de télécommunications: affirmer le caractère essentiel des télécommunications pour l’identité et la souveraineté canadiennes. Je crois qu'il est important de déterminer si les arguments invoqués lorsque la loi a été rédigée sont toujours valides. Je crois qu'il s'agit d'un exercice très valide.
    J'aimerais savoir si, dans le contexte de la Loi sur les télécommunications, vous êtes d'avis que si nous permettions davantage la propriété étrangère dans le secteur des télécommunications, cela risquerait d'influer sur notre identité et notre souveraineté.
(0915)
    C'est une question qui a fait l'objet de débats dans de nombreux secteurs de l'économie canadienne, et l'on dispose de bien des preuves, notamment au plan économique, qui montrent les avantages appréciables des investissements étrangers au Canada.
    Nous avons observé dans bon nombre de secteurs, dont celui des télécommunications, la libéralisation progressive, sur un certain nombre de décennies, de la réglementation sur les investissements étrangers, dans bien des pays et des secteurs.
    Nous avons notamment remarqué une libéralisation des télécommunications après 1998 dans la plupart des pays de l'OCDE. Nous avons vu pratiquement tous les pays européens lever la plupart de leurs restrictions sur les investissements étrangers dans les télécommunications. Bien que je ne sois pas une spécialiste de l'identité européenne, je crois pouvoir soutenir que du point de vue de l'identité, les Européens — les Français, les Allemands, les Anglais — ont tous, pour la plupart, levé ces restrictions sans qu'il y ait d'incidence négative sur leur culture ou leur identité.
    Les technologies des télécommunications sont un moyen de transmission. Ils permettent aux Canadiens de mieux communiquer entre eux, plus rapidement et avec plus de personnes en même temps. Les Canadiens et des personnes du monde entier profitent de cette capacité de communiquer l'un avec l'autre. Elle crée de nouvelles possibilités pour tout le monde en offrant les meilleurs services possibles au meilleur prix possible — et au plus grand nombre de personnes possible, pour leur permettre d'en profiter.
    Merci.
    Ceux qui se sont dits préoccupés, et certaines personnes qui s'opposent manifestement à ce qu'on accroisse la propriété étrangère utilisent souvent une expression que j'ai entendue à répétition, c'est-à-dire que les propriétaires du pipeline finiront bien par en contrôler le contenu. Est-ce que c'est, selon vous, mal comprendre la situation, ou y a-t-il une façon de séparer clairement les questions pour que l'on considère le pipeline comme un aspect et son contenu, vraiment comme une question distincte?
    Je crois qu'il est important d'être clair sur le fait que c'est la Loi sur la radiodiffusion qui réglemente la transmission du contenu au Canada, la disposition sur le contenu, et mon ministre a été très clair sur ce point: il n'est question ici ni de culture ni de radiodiffusion.
    Alors ce que vous dites c'est que si une société étrangère était propriétaire d'une entreprise de télécommunications, le fait qu'elle soit propriétaire d'une ancienne entreprise de télécommunications canadienne ne poserait pas une menace à l'identité et à la souveraineté culturelles.
    Permettez-moi de vous donner un exemple. Je crois que le secteur satellite dans lequel Telesat offres des services aux radiodiffuseurs canadiens, en est un bon. Telesat offre le mécanisme, le signal et l'espace satellites, aux radiodiffuseurs pour qu'ils diffusent leur signal aux Canadiens, mais ce sont ces entreprises de distribution de radiodiffusion, les EDR, qui sont régies par la Loi sur la radiodiffusion. Elles continuent à être régies, ainsi que le contenu qu'elles offrent, le contenu canadien qu'elles sont tenues d'offrir. Une question est celle du moyen de transmission et l'autre, la question distincte, est celle de la réglementation du contenu.
    Merci.
    J'aimerais en revenir à la préoccupation d'il y a longtemps sur l'identité et la souveraineté. Pourquoi croyez-vous qu'elle existait au départ et qu'elle n'est plus la question qu'elle était?
    C'est difficile pour moi de faire des hypothèses à ce sujet, étant donné que je n'ai pas participé au débat, mais je crois que la nature de ces débats a changé au fil des ans. Au Canada, nous avons eu de nombreux débats, sur plusieurs décennies, au sujet de ce que signifie la propriété économique pour notre culture et notre identité. Nous avons néanmoins tendance à privilégier une plus grande ouverture à l'égard des investissements directs étrangers dans tous les secteurs, ce qui nous a été profitable du point de vue économique. Je laisse aux autres le soin de juger de l'incidence que cela a eu sur la culture et l'identité.
(0920)
    Merci, monsieur Garneau.
    Je remarque que l'OCDE et les pays européens qui en sont membres ont libéralisé leur secteur, mais qu'ils offrent aussi à leurs radiodiffuseurs un financement par habitant trois ou quatre fois plus élevé que celui que nous offrons. Cela explique peut-être leurs politiques.
    Monsieur Cardin.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Avant de se pencher sur le décret de décembre et la décision du CRTC, je voudrais revenir sur l'enchère du spectre. Vous disiez plus tôt que: « Avant de délivrer des licences du spectre, Industrie Canada doit confirmer que ces exigences relatives à la propriété et au contrôle sont respectées. » Je vais vous poser trois questions, vous pourrez y répondre ensuite.
     Votre ministère vérifie-t-il, auprès du CRTC, si l'ensemble des soumissionnaires se conforme à la partie II de la Loi sur les télécommunications, si cette vérification est faite? Ensuite, advenant le cas qu'un soumissionnaire emporte sa part de soumission — disons 442 millions de dollars —, à qui va l'argent? Finalement, faut-il conclure que, si le soumissionnaire qui gagne sa soumission n'est pas défini comme étant canadien en vertu de la partie II, et qu'il a payé ces 442 millions de dollars au gouvernement, celui-ci devrait-il rembourser la totalité de sa soumission?

[Traduction]

    Nous ne vérifions pas auprès du CRTC pour voir s'ils appartiennent à des Canadiens et sont contrôlés par des intérêts canadiens avant de leur permettre de présenter une soumission pour des licences du spectre. Un certain nombre d'entreprises sont de nouveaux venus. Elles élaborent des analyses de rentabilisation et des modèles de gestion et trouvent du financement. Au cours des dernières enchères, nous avions quelque 25 soumissionnaires, mais seulement 15 d'entre eux ont obtenu une licence. Nous avons ensuite examiné ces 15 entreprises pour déterminer si elles appartenaient à des intérêts canadiens ou si elle étaient contrôlées par eux.
    Comme vous pouvez l'imaginer, il faut un certain temps à une entreprise de se préparer à trouver du financement, à présenter une soumission qui est retenue et à continuer de chercher du financement et des partenaires et ainsi de suite; par conséquent, il y a un certain montant...

[Français]

    Ce que vous me dites, c'est qu'avant d'accepter des soumissions, vous ne vérifiez pas auprès du CRTC s'ils respectent la partie II. C'est non. Alors, à qui va l'argent? Le montant de 442 millions de dollars, par exemple, va à qui? Au gouvernement?

[Traduction]

    Je présume que vous parlez des revenus pour la mise aux enchères du spectre. Ils sont directement versés au Trésor. Alors oui, le financement revient au gouvernement. Avant de présenter une soumission, les soumissionnaires savent fort bien qu'ils doivent se conformer aux règles canadiennes régissant la propriété et le contrôle s'ils veulent obtenir une licence. La soumission peut donc être retenue, mais le soumissionnaire n'obtient pas de licence avant de satisfaire aux exigences de propriété et de contrôle canadiens.

[Français]

    Et si jamais on disait qu'il ne respecte pas la partie II, le montant de 442 millions de dollars serait-il remboursé au soumissionnaire?

[Traduction]

    Nous suivons les exigences de la réglementation sur les radiocommunications, pas celles de la Loi sur les télécommunications. À ma connaissance, nous n'avons jamais eu de situation dans laquelle nous avons eu à le rembourser, car après avoir payé pareil montant, l'entreprise est bien entendu très intéressée à se conformer aux règles qui régissent la propriété et le contrôle.
    Je pourrais vous fournir d'autres détails à ce sujet, mais je suis d'avis que si la soumission d'une entreprise était retenue et que cette entreprise n'arrivait pas à conformer sa structure de propriété, le gouvernement remettrait le spectre aux enchères, et s'il y avait une différence entre la première et la deuxième offre, l'entreprise en serait responsable.
(0925)

[Français]

    Comme dans le cas de Globalive, si la décision du CRTC avait été respectée par le gouvernement... Le CRTC savait que Globalive avait déjà payé 442 millions de dollars au gouvernement, lorsqu'il a rendu sa décision. On peut présumer qu'il n'a pas pris sa décision à la légère. Voici ce qu'on peut lire à l'article 116 de cette décision:
Nonobstant ces changements supplémentaires, il subsiste de grandes inquiétudes à l'égard du contrôle de fait qu'Orascom exerce sur Globalive. Dans le cas présent, le dossier indique qu'Orascom, un non Canadien:

détient deux tiers des capitaux propres de Globalive;

constitue la principale source d'expertise technique;

permet à Globalive d'utiliser une marque de commerce établie dans le secteur du sans fil.
    D'abord, croyez-vous qu'Orascom détient réellement les deux tiers des capitaux propres de Globalive? D'autre part, la volonté du gouvernement de modifier la Loi sur les télécommunications dans le discours du Trône ne reflète-t-elle pas, selon vous, une admission que le décret contrevient à l'esprit de la Loi sur les télécommunications?

[Traduction]

    Monsieur le président, j'aimerais tout d'abord faire remarquer qu'aux termes de l'article 12 de la Loi sur les télécommunications, le Parlement a conféré au gouverneur en conseil le pouvoir de modifier des décisions du CRTC. Dans ce cas particulier, le gouverneur en conseil a choisi de modifier la décision après avoir soigneusement examiné les faits et rigoureusement appliqué les exigences en matière de propriété et de contrôle canadiens. Le critère prévu pour établir la propriété et le contrôle canadiens comprend des exigences de droit et de fait.
    Peut-être que ce serait utile si je demandais à ma collègue, Mme Lévesque, d'expliquer ce que sont ces exigences et comment elles s'appliquent.

[Français]

    J'avais quand même posé une question très précise quand j'ai demandé si vous croyiez qu'Orascom détenait effectivement deux tiers des capitaux propres de Globalive.
    Vous savez sans doute que, présentement, il y a un challenge juridique de la décision du gouverneur en conseil concernant le contrôle canadien de cette compagnie. On doit donc limiter nos commentaires à ce qui est du domaine public pour ne pas porter préjudice au gouvernement devant les tribunaux. Alors, les commentaires que l'on fera aujourd'hui devront se limiter à ce qui est du domaine public. Vous comprenez bien la situation dans laquelle on se retrouve.
    C'est comme de me dire que vous croyez qu'effectivement, la compagnie détient les deux tiers des capitaux propres, mais que les actions ne sont pas nécessairement toutes des actions votantes.
    Dans le décret et la décision du CRTC, on explique un peu la situation de Globalive au moment où la décision a été rendue. En ce qui concerne le test de jury, c'est-à-dire le contrôle de droits ou le contrôle des actions votantes, le CRTC et le gouvernement sont du même avis: la compagnie est effectivement, en droit, contrôlée par des Canadiens. Le prochain test est un test de contrôle de fait. Il y a donc toute une série de jurisprudences qui a mené à un test de contrôle de fait. Le contrôle de fait est la capacité pour un investisseur, par exemple, d'influencer les activités quotidiennes d'une organisation, d'une compagnie dans ce cas-ci. À la lumière des faits qui se retrouvent dans le dossier de Globalive, le gouvernement a été d'avis, et c'est ce qui est reflété dans le décret, que la compagnie étrangère, Orascom, n'a pas la capacité de contrôler les activités journalières de Globalive, qu'elle a peut-être un degré d'influence de par son investissement financier mais que cela n'égale pas un contrôle de fait tel qu'exigé par la jurisprudence.
    Merci, monsieur Cardin et madame Lévesque.
    Monsieur Lake, vous avez la parole.

[Traduction]

    Merci, monsieur le président.
    Et merci aux témoins de comparaître aujourd'hui.
    Il s'agit d'une conversation très technique, et je songe aux consommateurs qui voudraient peut-être en savoir plus long et demander, par exemple, quelles seront les répercussions sur les choses qu'ils utilisent tous les jours. Nous avons parlé d'ouvrir la porte à plus d'investissements étrangers, mais si vous êtes un consommateur canadien et que vous essayez de suivre cette conversation, sur quels secteurs cette décision pourrait-elle influer? En quoi changera-t-elle leur vie?
(0930)
    Si l'on regarde les avantages d'une plus grande concurrence et d'un accroissement des investissements étrangers directs, on a déterminé, en général, que lorsqu'on examine tous les secteurs au fil du temps, les investissements étrangers directs donnent deux types d'avantages.
    Le premier est que les investisseurs étrangers apportent un capital. Ils apportent des technologies et des nouvelles technologies. Ils font venir des gens. Ils apportent un savoir-faire pour contribuer à accroître la productivité. Ce capital profite au pays hôte de l'investissement étranger direct.
    Le deuxième est que les investisseurs étrangers accroissent la concurrence. Les investissements étrangers directs font en sorte que les entreprises nationales soient plus compétitives. Ils les font innover. Ils exercent sur elles de la pression pour qu'elles réduisent l'inefficacité, qu'elles baissent leurs prix et qu'elles accroissent leurs offres.
    Lorsque nous examinons l'industrie des télécommunications en particulier, il y a eu un certain nombre d'études à ce sujet, notamment une de l'OCDE, qui a montré que les consommateurs des pays qui ont libéralisé la participation étrangère ont profité de meilleurs services et de prix moins élevés qu'ailleurs. Une des choses que nous voyons certainement au Canada est, par exemple, que dans l'industrie du sans-fil, la pénétration des services sans fil est beaucoup moindre qu'aux États-Unis. C'est un marché très semblable avec des clients semblables, mais 85 p. 100 des foyers américains ont un téléphone cellulaire ou autre dispositif sans fil contre 60 ou 65 p. 100 des foyers canadiens.
    En comparant avec le reste du monde, on peut démontrer que le Canada a des points à améliorer tant du point de vue du prix que de la disponibilité des services.
    Je veux parler brièvement du rapport de Red Wilson. Il contenait des recommandations exhaustives à l'intention du gouvernement.
    Je me demande si vous pourriez nous donner un aperçu de certaines de ces recommandations du point de vue du secteur des télécommunications, plus précisément ce qui a déjà été accompli. Qu'a-t-on fait pour donner suite à ce rapport? On y a fait beaucoup allusion.
    Bien sûr. Le groupe de Red Wilson a été formé pour examiner les questions de concurrence dans l'économie canadienne. Si le groupe a été mis en place, c'est, je crois, parce qu'on était d'avis que le monde change rapidement et que le Canada doit demeurer concurrentiel. Le groupe de Red Wilson a été chargé d'examiner une gamme de secteurs pour voir ce que nous pourrions faire avec notre cadre réglementaire et législatif et notre cadre stratégique pour veiller à ce que l'industrie canadienne ait la meilleure chance d'être concurrentielle à l'échelle mondiale.
    Le groupe de Red Wilson, comme vous l'avez indiqué, s'est penché sur un certain nombre de secteurs, et on a pris un certain nombre de mesures immédiatement ou peu de temps après à partir des recommandations de ce groupe, par exemple, pour modifier la Loi sur Investissement Canada, moderniser la Loi sur la concurrence et réduire les restrictions visant les investissements d'intérêts étrangers dans les transports aériens.
    Le groupe a également formulé un certain nombre de recommandations en ce qui touche les télécommunications. Il a, essentiellement, repris les recommandations de 2006 du Groupe d'étude sur le cadre réglementaire des télécommunications, qui préconisaient une approche graduelle à l'égard de la libéralisation des restrictions visant les investissements étrangers dans le secteur des télécommunications. Il s'agit de recommandations formulées par le groupe de Red Wilson, et l'engagement du gouvernement dans le discours du Trône et le budget se rapportait aux recommandations que le groupe a formulées précisément au sujet des télécommunications.
    D'accord.
    J'ai une autre question. Nous avons beaucoup de discussions techniques. Nous en avons déjà un peu parlé. Encore une fois, pour quelqu'un qui veut se pencher sur la question et étudier la transcription de notre discussion d'aujourd'hui et qui n'a pas de connaissances, d'expertise, dans ce domaine, pourriez-vous faire la distinction entre la Loi sur les télécommunications et la Loi sur la radiocommunication? Je sais qu'il y a des discussions au sujet de la Loi sur la radiodiffusion, bien que je ne croie pas que les changements dont nous parlons s'y rapportent. Peut-être que vous pourriez faire la distinction entre ces lois pour le citoyen moyen qui suit cette conversation. Je crois que pour le citoyen moyen, c'est du pareil au même.
(0935)
    La Loi sur les télécommunications régit l'offre de services de télécommunications, ce qui, je crois, est aussi clair que de la boue, mais en gros, il s'agit des services téléphoniques, des services Internet haute vitesse que vous recevez chez vous et des services sans fil. Ils sont réglementés comme des services de télécommunications. La Loi sur les télécommunications réglemente ces services que les consommateurs reconnaîtraient comme étant ceux qu'ils reçoivent.
    La Loi sur la radiocommunication réglemente notre façon d'utiliser le spectre. Le spectre est ce qui permet aux signaux d'être diffusés. Le spectre est ce qu'utilisent les fournisseurs de services sans fil, par exemple. Voilà pourquoi, dans le cas des enchères de services sans fil, toute entreprise désireuse d'offrir des services téléphoniques cellulaires aux Canadiens doit utiliser le spectre. Le ministère de l'Industrie réglemente l'utilisation du spectre parce qu'il s'agit d'une ressource publique, et il est très important qu'il n'y ait pas d'interférence entre ses utilisateurs. Il revient au ministre de l'Industrie d'attribuer ce spectre aux utilisateurs, dont les entreprises qui offrent des services téléphoniques cellulaires.
    Merci, madame Morgan.
    Merci, monsieur Lake.
    Monsieur Thibeault.
    Merci, monsieur le président.
    Merci d'être ici aujourd'hui, d'avoir fait un excellent exposé sur une question aussi complexe et de nous aider à comprendre une partie de ce qui se passe.
    On a suggéré que l'entrée d'entreprises étrangères dans le marché des télécommunications pourrait en accroître la concurrence en permettant d'offrir des prix plus compétitifs et un meilleur choix, notamment dans les marchés où il y a un duopole. Mais si l'assouplissement des règles qui régissent la propriété étrangère entraîne la prise de contrôle et la fusion d'entreprises canadiennes en opération, il est possible qu'il n'y ait aucun changement. Comme diverses études l'ont révélé, les prix des services téléphoniques sans fil au Canada comptent parmi les plus élevés au monde. Industrie Canada a-t-il examiné différents modèles de marché des télécommunications autour du monde, notamment dans les pays qui offrent les services sans fil les moins chers, pour voir comment on assure une concurrence efficace? Comment allons-nous garantir une concurrence efficace?
    Merci, monsieur le président.
    Il s'agit évidemment d'une question très complexe, et il faudra du temps au gouvernement pour étudier des options particulières, des modèles particuliers, et aussi pour proposer un processus et un calendrier de consultations auprès de l'industrie pour déterminer la voie à suivre dans ce dossier.
    Je crois qu'en général, lorsque nous nous tournons vers l'étranger, nous voyons différents modèles réglementaires. Différents pays ont différents réseaux de télécommunications qui comportent des éléments très différents, ce qui les incite à opter pour des modèles réglementaires différents. Dans le cas des investissements étrangers en particulier, la vaste majorité des pays membres de l'OCDE ont complètement levé leurs restrictions sur les investissements étrangers, mais un petit nombre d'entre eux les maintiennent pour leurs fournisseurs de services téléphoniques titulaires. Au fil du temps et de l'espace, nous pouvons observer qu'après avoir levé les restrictions — en d'autres termes, si l'on compare la situation du Canada avec celles des autres — nous pouvons voir que la majorité des autres pays de l'OCDE ont au moins un fournisseur étranger de services sans fil dans leur marché. Dans les documents économiques, il arrive souvent qu'on les appelle concurrents perturbateurs, c'est-à-dire ceux qui sont dans le marché et qui s'attachent à offrir des services simples et peu coûteux aux consommateurs. C'est ce que nous voyons dans d'autres pays.
    Il est clair que ce n'est pas seulement une fonction des restrictions visant les investissements étrangers. Les télécommunications sont régies par un cadre réglementaire complet. Par exemple, en décidant de mettre de côté du spectre dans l'option sans fil avancée pour les nouveaux venus, le gouvernement a reconnu les avantages potentiels pour les consommateurs d'encourager les nouveaux concurrents à pénétrer le marché canadien.
(0940)
    Merci.
    Vous avez parlé un peu de la concurrence étrangère. Le ministère a-t-il examiné les mesures de protection des consommateurs qui sont offertes aux États-Unis, par exemple, ainsi que les garanties de service de base et le plafonnement des prix de base qui existent dans d'autres pays, afin d'assurer l'abordabilité et l'accessibilité pour tous les Canadiens?
    Le CRTC s'est effectivement penché sur certaines de ces questions. Il a annoncé qu'il tient une audience sur les obligations en matière de service universel. Certains pays considèrent cela comme un moyen de s'assurer qu'à un prix réduit, les consommateurs, par leurs paiements, peuvent aider à subventionner la prestation de services à coût très élevé. C'est un système qui est en place pour les télécommunications avec le téléphone ordinaire, mais il reste à déterminer si l'on devrait l'étendre au réseau à large bande.
    Certains pays d'Europe parlent d'un droit universel. Puisque l'Internet est si important, les États devraient peut-être avoir l'obligation d'assurer la prestation de ce service. Dans leur plan de mise en place d'un réseau à large bande, les États-Unis ont indiqué qu'ils voulaient que tous les Américains aient accès à un réseau à large bande à prix abordable et ils proposent de puiser dans leur fonds de service universel pour cela, en le limitant au même montant. Les pays tentent donc par différents moyens d'examiner les prix, l'abordabilité et, comme Marta l'a mentionné, la façon d'encourager cette expansion, dans toute la mesure du possible, grâce aux forces du marché.
    Nous avons constaté que dans le vaste secteur de la technologie, la propriété détermine où la recherche et le développement auront lieu. Le morcellement et la vente des compagnies étrangères de la division de Nortel ont entraîné un important recul dans la recherche et l'innovation en matière de technologies sans fil au Canada, recul que certaines personnes qualifient d'irrémédiable, en raison du fait qu'il y a tout juste quelques années, Nortel était l'entreprise du secteur privé qui investissait le plus dans la recherche et le développement. Le ministère a-t-il examiné l'incidence de la propriété étrangère sur les dépenses en recherche et développement ou sur l'emploi dans le secteur de la technologie sans fil au Canada?
    Nous pourrions répondre à cette question, mais seulement en ce qui a trait à Nortel.
    Il va sans dire que nous examinons de très près ce qui se passe dans l'ouest d'Ottawa en ce qui concerne les divers achats d'actifs. Nous voulons nous assurer que les emplois bien rémunérés dans la recherche et le développement restent au Canada et que nous maintenons une masse critique. D'après les divers achats d'actifs par différents groupes, je crois qu'environ le tiers des employés n'ont pas été repris par les nouveaux acteurs.
    Je commence aussi à entendre dire que la situation de l'emploi dans la région d'Ottawa n'évolue pas autant que l'on pourrait penser. À l'éclatement de la bulle des entreprises point-com, en 2000-2001, beaucoup de gens qui quittaient Nortel et d'autres compagnies ont créé leurs propres entreprises ou ont été embauchés ailleurs. Nous savons donc qu'il y a d'autres firmes dans l'ouest de la ville qui embauchent des employés de Nortel.
    Ce n'est pas parce que Nortel est parti qu'il n'y a plus rien au Canada. Bien des nouveaux acheteurs ont déclaré vouloir faire de l'ouest d'Ottawa un centre d'excellence afin de maintenir une forte présence en recherche et développement. C'est quelque chose que nous examinons et que nous tentons d'encourager avec les gouvernements provinciaux — afin de nous assurer de garder le plus possible les emplois ici.
    Merci beaucoup, monsieur Thibeault.
    C'est maintenant au tour de M. McTeague.
    Je tiens à remercier les témoins de leur présence aujourd'hui.
    Cela peut sembler une question de troisième ou de quatrième génération, mais étant donné que j'ai siégé au comité à maintes reprises depuis 1995, certaines choses me sont familières. J'ai parfois manqué un ou deux rapports; j'étais du mauvais côté.
    Fido, Clearnet... Je me rappelle qu'une entreprise de ma circonscription, Clearnet, avait soumissionné avec succès, en 1995-1996, et fait l'achat du spectre convoité, avec beaucoup de capitaux à sa disposition, à la vente aux enchères. La question est toujours de savoir si l'investissement étranger est vraiment nécessaire. Ce sont des sommes importantes qui sont rendues disponibles. La question porte sur la propriété étrangère, le contrôle ou non des actions avec droit de vote.
    Je me demande simplement, parce que nous semblons donner l'impression qu'il y a d'importantes restrictions à l'investissement étranger, mais c'est en fait, si je ne m'abuse, simplement en fonction des actions avec droit de vote. S'agit-il bien des restrictions existantes? La dette d'une entreprise peut être en principe contrôlée en totalité par un investissement étranger, n'est-ce pas?
(0945)
    Dans les lois, il n'y a aucune limite aux investissements financiers étrangers dans une entreprise canadienne. Il y a deux questions de contrôle soulevées dans la loi, cependant: la première porte sur les actions avec droit de vote et la seconde, sur le contrôle de fait. Vous avez donc raison de dire qu'il n'y a pas de limite aux sommes qu'une entité étrangère peut investir au Canada.
    Je pense que l'une des raisons pour lesquelles nous sommes ici aujourd'hui, c'est pour déterminer comment le contrôle de fait est défini et exercé dans la pratique. Je crois que nous ne serions pas ici aujourd'hui si ce n'était de cela.
    Quelles mesures votre ministère prend-il pour clarifier cette question, s'il doit y avoir une modification à la Loi sur les télécommunications?
    Selon le gouvernement, il n'y a eu aucun changement dans l'application du test de contrôle de fait. Il a été question clairement du test dans la jurisprudence, et la cause de la compagnie aérienne Canadien, qui a été jugée par la Cour d'appel fédérale en 1993, est le principal cas répertorié dans la jurisprudence.
    Je dirais simplement ceci: la difficulté à appliquer le test de contrôle de fait tient au test lui-même. On doit examiner l'ensemble des faits et déterminer s'il y a contrôle. On ne parle pas de contrôle de droit, mais de contrôle de fait. Il ne s'agit pas d'une science exacte, mais d'une évaluation subjective des faits. La loi n'a pas changé. L'application de la loi non plus. C'est ce que le gouvernement a déterminé dans la décision Globalive.
    Madame Morgan, vous avez parlé tout à l'heure d'une étude sur les pays de l'OCDE et la libéralisation des télécommunications. Je vous en remercie.
    Pourriez-vous nous dire de quelle période il s'agit? A-t-on observé la situation en général ou examiné des aspects précis? Parlons-nous d'avantages à court terme pour les consommateurs, avec des points d'interrogation quant aux implications à long terme pour les consommateurs et la concurrence?
    Je me ferai un plaisir de vous fournir un exemplaire de cette étude. D'après ce que j'ai compris, l'étude porte sur une période précise, comme c'est normalement le cas. On aurait examiné les impacts de la libéralisation dans le passé. Mais de toute évidence, cela a été fait à une période précise.
    Madame Morgan, nous espérons pouvoir entendre Red Wilson et ceux qui faisaient partie de la commission. Je pense que la raison d'être de cela était de reconnaître qu'au Canada, à bien des égards, les industries semblent fortement concentrées et qu'il y a une absence de concurrence, malgré les mesures qui ont été prises au cours des 20 ou 30 dernières années, ou même depuis la Commission royale Macdonald, pour libéraliser d'autres marchés.
    Le ministère a-t-il envisagé la possibilité que des entités étrangères puissent soudain faire l'acquisition des tours et des infrastructures actuelles qui ont été construites au fil des ans grâce au financement public? Il s'agit peut-être d'une stratégie de vente à un prix inférieur au coût d'acquisition pour une période temporaire au cours de laquelle on se retrouve avec seulement un ou deux joueurs dominants, qui choisissent une ou deux régions du pays et laissent simplement les autres sans service adéquat, et de toute évidence sans un minimum de concurrence. Autrement dit, la situation pourrait être bien pire dans 5 à 10 ans qu'elle ne l'est actuellement.
    Je crois qu'il serait important de reconnaître que les règlements relatifs aux investissements étrangers ne sont qu'un élément du cadre de réglementation, ainsi que du cadre stratégique qui régit les télécommunications, la prestation des services de télécommunications au Canada. Nous avons le CRTC, par exemple. Il y a l'attribution des bandes de fréquence en vertu de la Loi sur la radiocommunication. Il y a la Loi sur la radiodiffusion. La question des restrictions à l'investissement étranger n'est qu'un aspect du cadre de réglementation, mais le gouvernement et le CRTC disposent d'autres outils réglementaires pour assurer la prestation des services aux Canadiens, et ces services resteront évidemment en place jusqu'à ce que le Parlement décide de les examiner, même si les restrictions à l'investissement étranger étaient levées.
    Merci beaucoup, monsieur McTeague.
    Monsieur Brown.
(0950)
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je crois qu'en 2003, le Comité de l'industrie s'est penché sur la propriété étrangère. Que contenait le rapport? Exposait-il en détail les avantages de la libéralisation de l'industrie des communications?
    Oui, c'est vrai que le comité, en 2003, a produit un rapport sur le sujet, et dans ce rapport, on formulait un certain nombre de recommandations. On abordait la question des restrictions à l'investissement étranger de différents points de vue et on formulait de nombreuses recommandations concernant les exigences quant au minimum de propriété canadienne, les changements dans les exigences sur la propriété et le contrôle canadiens, ainsi qu'un examen plus approfondi de la structure de gouvernance pour les télécommunications et la radiodiffusion sur le plan de la convergence technologique.
    Selon vous, y a-t-il une différence entre les services à large bande et les services de télécommunications?
    Le mot télécommunication est souvent utilisé de façon très générale pour parler du téléphone ou du cellulaire... La large bande, c'est la capacité d'avoir accès à Internet sur votre téléphone intelligent, votre ordinateur portatif ou votre ordinateur de bureau, avec des extraits vidéo ou le fonctionnement multitâche; c'est une certaine capacité et une résistance. Donc, si vous créez un réseau cellulaire, vous ne pouvez pas simplement l'utiliser pour l'accès Internet sans que certaines modifications aient été effectuées par les entreprises de télécommunications.
    Permettez-moi d'être un peu plus précis. Prenons la compagnie Rogers, une entreprise de télécommunications sans fil, de service à large bande et de radiodiffusion; diriez-vous qu'elle devra peut-être se départir de certains actifs de radiodiffusion pour profiter davantage des possibilités de propriété étrangère?
    Je crois que le ministre Clement a dit très clairement que l'engagement d'examiner la question des restrictions à l'investissement étranger ne s'étendra pas à la culture et à la radiodiffusion.
    Très bien, merci.

[Français]

    Madame Lavallée, voulez-vous prendre la parole?
    M. Cardin veut absolument terminer sa question.
    C'est bien.
    Toutefois, je me réserve les trois dernières minutes.
    Il n'y a pas de problème.
     Allez-y, monsieur Cardin.
     Je crois qu'on a le temps.
     Je m'adresse aux gens du ministère. Lors de notre dernière rencontre, j'avais demandé une réponse écrite relativement à l'effet sur la concurrence, suite au décret du ministre de l'époque, Maxime Bernier. J'espère qu'on aura cette réponse.
     J'aimerais savoir, monsieur le président, s'il serait possible que les gens du ministère reviennent pour l'autre heure qu'on n'aura pas aujourd'hui.
    Compte tenu du fait qu'ils répondront à l'invitation, je vais laisser l'autre partie des questions à Mme Lavallée.
    Nous ferons le suivi.
    C'est mon tour?
(0955)
    Oui.
    D'accord, merci.
    Madame Morgan, la phrase que j'aime le mieux, de toute votre présentation, est la dernière. C'est celle où vous dites que le gouvernement va prendre son temps pour consulter et étudier à fond les options avant d'agir. Le problème est très important.
    La différence entre les télécommunications et la radiodiffusion, que vous avez présentée plus tôt, n'est plus évidente. Les télécommunications sont la tuyauterie et la radiodiffusion est ce qui passe dedans. Celui qui contrôle les tuyaux contrôle ce qu'ils contiennent; celui qui contrôle l'accès contrôle le contenu. C'est de plus en plus évident en ce qui concerne les téléphones sans fil, etc. Je ne vous ferai pas un dessin, ce serait une insulte à votre intelligence. On sait que la sonnerie, par exemple, est l'oeuvre de musiciens. Ce sont eux qui décident de la langue utilisée et on peut même, avec notre téléphone, regarder une vidéo. Même le groupe Wilson, dont vous citez l'étude, dit à la première page que c'est de plus en plus difficile de faire la différence entre les télécommunications et la radiodiffusion. Plusieurs personnes vont sans doute venir dire ici que c'est impossible. Il y a des gens qui le pensent et qui le disent.
    Vous faites également la comparaison avec l'Union européenne mais, malheureusement, on n'est pas dans la même situation qu'elle. Le Canada — et le Québec dont la superficie est si fois celle de la France — est un vaste pays avec d'autres problèmes, à côté d'un empire culturel extrêmement imposant et divertissant. On est dans une situation où il faut protéger notre culture. Il faut la protéger dans nos appareils de télécommunication, entre autres, et de toutes les façons.
    Avant de vous poser ma question, je ferai une parenthèse, car c'est tellement évident que vous avez mis la charrue devant les boeufs. Vous avez décidé d'appliquer la loi que vous désirez avant même de l'adopter. Ça va à l'encontre de toute évidence que Globalive était en effet contrôlé par Orascom.
    À quel genre de mesures songez-vous actuellement, pour votre futur projet de loi, qui assouplirait la propriété étrangère dans les télécommunications, pour protéger la culture québécoise et canadienne?
    Ce sont des questions très compliquées et les décisions qui y sont liées auront beaucoup d'impact. Mon ministre a dit clairement que nous allons prendre notre temps, qu'il faut vraiment que le gouvernement considère toutes les options et conséquences. Il a aussi été clair: on ne touche pas à la culture ni à la radiodiffusion, on s'occupe de la question des télécommunications.
    J'ai un commentaire à faire, madame Morgan. Vous dites que vous ne touchez pas à la culture, mais c'est la culture qui vous touche. Vous ne pouvez pas dire que vous ne vous en occupez pas. Elle est omniprésente, elle est dans les appareils de télécommunications. Même M. Wilson, l'auteur de l'étude dont vous parliez dans votre présentation, a écrit il y a deux ans qu'on ne peut plus faire la différence entre les télécommunications et la radiodiffusion, que c'est de plus en plus difficile. Alors, comment allez-vous faire pour protéger la culture?
    Le gouvernement doit prendre son temps pour étudier toutes ces questions, mais il est clair que nous ne révisons pas des questions de culture et que nous ne touchons pas à la radiodiffusion, en ce qui concerne les engagements pris dans le discours du Trône et dans le budget.
    Alors, si je comprends bien, vous avez l'intention de ne rien faire?
    Merci, madame Lavallée, madame Morgan.

[Traduction]

    Je tiens à remercier nos témoins, Mme Lévesque, Mme Morgan et Mme McDonald, d'être venues.
    La séance est levée.
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