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CHPC Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent du patrimoine canadien


NUMÉRO 015 
l
3e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 13 mai 2010

[Enregistrement électronique]

  (1105)  

[Traduction]

    Assez parler de hockey; on n'en est qu'à mi-chemin de la série éliminatoire.
    Nous reprenons les travaux du Comité permanent du patrimoine canadien.
    Il s'agit de la 15e séance du Comité permanent du patrimoine canadien et nous nous réunissons aux termes du paragraphe 108(2) du Règlement. Le sujet inscrit à l'ordre du jour est l'étude des médias numériques et émergents: possibilités et défis.
    Pendant la première heure, nous allons entendre nos deux témoins: Tom Jenkins, président exécutif et administrateur en chef de la stratégie à la Open Text Corporation; et John Levy, président-directeur général de Score Media inc.
    Maintenant...
    Monsieur le président, une petite précision, s'il vous plaît. Allons-nous, aujourd'hui, être appelés à nous prononcer sur des motions?
    Non, aucune motion n'a été présentée.
    Je vous remercie.
    Monsieur Jenkins, vous avez la parole.
    Permettez-moi, avant de commencer, de vous remercier de m'avoir invité à prendre la parole devant vous.
    Je crois pouvoir dire, en regardant autour de cette table, que nous n'avons pas encore eu l'occasion de nous rencontrer. En effet, je ne fais pas vraiment partie du monde de la culture. Je suis Canadien, certes, mais je suis ingénieur, un technicien, donc, du numérique et c'est dans le domaine du numérique que j'ai effectué le plus clair de ma carrière.
    J'appartiens à une entreprise dont le siège est à Waterloo, mais qui a des établissements dans de nombreuses autres villes du Canada. Nous sommes la plus grande entreprise de logiciel du Canada. Ce qui est intéressant, ce n'est pas tellement le fait que nous soyons une entreprise de logiciel, mais que j'aie passé la plus grande partie de ma vie d'adulte à l'étranger. Nous faisons un milliard de dollars de chiffre d'affaires, mais 95 p. 100 de nos recettes proviennent de marchés extérieurs. Nous faisons partie de la catégorie de ce que certains appellent les entreprises 5/95.
    Depuis 25 ans, je travaille dans Internet au service des industries culturelles et des États. Nos logiciels sont chaque jour employés par probablement une personne sur trois se connectant à Internet. Nous comptons parmi nos clients BMW, la BBC, FOX News ou Canal 5, et leurs équivalents dans les diverses régions du monde.
    Tout cela m'a persuadé de faire porter mes efforts davantage sur le Canada, car je me suis rendu compte, il y a quelques années, que le Canada n'adoptait pas les technologies numériques aussi rapidement que les autres pays, ou bien ne le faisait pas de la même manière. C'est pourquoi j'ai décidé de m'impliquer dans plusieurs initiatives, dont le Canadian Digital Media Network, un CECR, c'est-à-dire un centre d'excellence en commercialisation et en recherche. Il s'agissait de réunir, à l'échelle nationale, divers types d'organisation, aussi bien des universités, que des entreprises et le secteur public, de s'entretenir des grandes questions qui se posent en ce domaine, et d'échanger les résultats des recherches entreprises.
    Ce qui est peut-être le plus remarquable, c'est que le centre est déjà parvenu à organiser deux conférences nationales. Je viens d'assister à la deuxième, la conférence Canada 3.0, qui a eu lieu à Stratford ces deux derniers jours. Ce qui m'a paru intéressant — et j'espère que cette précision vous servira d'encouragement — c'est que c'était comme participer à Woodstock. Je n'ai pas tout à fait l'âge d'avoir assisté à Woodstock, mais presque. J'ai rencontré à Stratford de nombreux Canadiens que ce domaine passionne énormément. Nous étions environ 2 000. La première année, nous attendions à peu près 500 personnes. Cette année, nous en attendions 1 000. Or, bien que nous n'ayons vraiment pas fait de publicité, du moins pas par les moyens ordinairement employés, nous avons attiré beaucoup de gens. Nous avons été en quelque sorte adoptés par contagion.
    Je voudrais aujourd'hui vous faire part de certains des propos que j'y ai recueillis. Il s'agit simplement de vous donner une idée de ce qui s'y est dit. Une documentation de fond pourra en outre vous être transmise, mais pas immédiatement, car la conférence s'est terminée il y a seulement deux jours. Étant donné qu'il s'agissait d'une conférence sur les médias numériques, tous les aspects « contagion » ou virtuels de la conférence sont à la disposition des Canadiens. Plus de 2 000 personnes ont saisi l'occasion de participer en ligne. Vous pouvez, si vous le voulez, consulter tous les tweets et les blogues. Tous les vidéoclips sont affichés sur les divers sites concernant la conférence.
    La documentation officielle va être préparée en trois vagues. Ni moi, ni le Canadian Digital Media Network ne prônons une ligne particulière. Nous tentons simplement d'entretenir la conversation sur l'impact du numérique. Dans les quelques jours qui suivent, les présidents de la conférence vont publier un communiqué qui sera, essentiellement, un résumé correspondant en gros à ce que j'entends vous présenter aujourd'hui. Dans un mois environ, le groupe rédigera un sommaire plus détaillé, d'une quarantaine de pages, pour résumer l'ensemble des débats de la conférence.
    Les 2 000 participants ont été répartis entre cinq séances thématiques, chacune animée par un président de séance. L'ensemble de nos travaux s'est déroulé sous le signe de la collaboration, ainsi que vous pourrez vous-mêmes le constater en prenant connaissance de la documentation que nous allons vous transmettre.
    Et puis il y a aussi un site virtuel qui accueille plus de 3 000 blogueurs collaborant dans le cadre d'un média social — un peu comme Facebook — pour essayer de cerner, de tout un éventail de points de vue, l'impact que le numérique est appelé à avoir sur notre pays. Des 2 000 personnes ayant assisté à la conférence, 500 étaient des jeunes inscrits à l'université ou en études secondaires. Sur le reste, un tiers environ provenait du secteur public, et un tiers du secteur privé — des milieux de la création, c'est-à-dire ceux qui façonnent ou utilisent les outils numériques — et puis un tiers encore émanant du secteur public.
    Un des sujets débattus est le fait que les participants estimaient, dans leur ensemble, que notre pays a besoin de se fixer un objectif que le numérique doit permettre d'atteindre. Nous l'avons dénommé, un peu naïvement peut-être, l'objectif lune. À la conférence, certains ont pensé que cela faisait trop américain, et qu'on aurait peut-être dû parler plus simplement d'étape suivante ou de quelque chose dans ce genre-là.
    Le fait est que pour susciter l'intérêt des Canadiens et faire comprendre tout cela aux illettrés du numérique, il serait bon effectivement que le pays se fixe un objectif. Il est clair que les avis peuvent être partagés quant à ce que cet objectif devrait être, mais nous avons au moins eu le mérite d'en discuter.
    Il convient de relever qu'un certain sentiment de frustration s'est aussi exprimé à la conférence — de la part de personnes qui sont déjà très impliquées dans le monde du numérique — et c'est d'ailleurs pour cela qu'elles se trouvaient là —, mais également un grand optimisme quant aux possibilités qui s'offrent à nous. C'est dire qu'il s'agit de sujets qui inspirent parfois un des sentiments un peu contradictoires.
    J'ai constaté en outre que les moins de 25 ans ne se voient pas tout à fait de la même manière que les plus de 25 ans. Ils sont, en effet, partagés entre le fait d'être Canadiens et le sentiment d'être aussi des citoyens du monde. Je ne suis pas spécialiste des sciences sociales, mais je pense que l'on pouvait déceler une différence d'optique par rapport aux personnes ayant plus de 25 ans.
    Il est clair aussi qu'il existe dorénavant une opposition entre les modèles d'entreprise traditionnels et les nouveaux modèles. Je fais notamment allusion au modèle dit de la longue traîne pour la distribution de certains produits, notamment les produits culturels. Il y a donc ces nouveaux modèles d'entreprise qui s'opposent de manière assez brutale aux modèles appliqués jusqu'ici.
    S'est également exprimée à la conférence une grande inquiétude que si nous ne prenions pas bientôt certaines dispositions en ce domaine, nous risquions de devenir sur le plan numérique, une colonie un peu comme nous l'étions il y a 40 ou 50 ans avant la création des trois conseils et les efforts que nous avons consentis au cours des années 1960 et 1970. Il y a donc cette profonde inquiétude car, d'après un des chiffres importants qui nous a été communiqué, selon la mesure employée, au Canada de 1 à 4 p. 100 du contenu est numérique, ce qui veut dire que de 96 à 99 p. 100 ne l'est pas. C'est quelque chose que j'ai moi-même pu constater lors de mes déplacements dans le monde. D'autres pays consacrent des efforts considérables au numérique, ce qui n'est pas le cas du Canada. Or, nous ne parviendrons pas à transmettre notre culture si nous n'employons pas davantage le numérique. Si vous avez moins de 25 ans, et que vous cherchez quelque chose qui se trouve dans un livre, c'est en ligne que vous allez le consulter.
    Nous avons, ici au Canada, longuement parlé de connectivité, mais si nous nous contentons de nous connecter à des contenus provenant d'au-delà de nos frontières, peut-être conviendrait-il de repenser très sérieusement les objectifs que nous nous sommes fixés.
    La littératie numérique n'a, elle, fait l'objet d'aucun débat. Or, il est clair qu'il nous faut instaurer un programme de littératie numérique, comme il y a 100 ans nous avons dû faire un effort d'alphabétisation alors que la population quittait les campagnes pour s'installer dans les villes où les gens devaient savoir lire pour occuper les nouveaux emplois.
    Nous avons, à la conférence, longuement débattu de cette question de l'objectif, certains l'envisageant sous l'angle de l'économie, et d'autres sous l'angle de la nation. Là encore, le débat a été passionnant.
    Je sais que vous avez pour la culture un intérêt particulier et j'aimerais donc ajouter que, contrairement aux efforts qui peuvent être engagés dans d'autres domaines... et je crois que c'est peut-être là l'essentiel. Dans le passé, avec les signaux de radio ou de télévision, on pouvait distinguer entre ce qui était culturel et ce qui était commercial. En ce qui concerne les lignes de téléphone, on pouvait discuter et dire qu'il s'agissait à la fois de quelque chose de culturel et de commercial. Mais, dans l'univers des données, avec ces bits et ces multiplets, que je transmette une chanson ou que je transmette une facture, le mode de transmission est le même.
    Cela revêt une importance essentielle non seulement au niveau de notre productivité, mais pour le Canada en tant que pays. Comment nous organiser numériquement? Il ne s'agit pas de quelque chose facile à définir. C'est même peut-être le plus important défi que nous pose le numérique, étant donné que son influence se fait sentir dans tous les domaines. En effet, l'impact du numérique ne touche pas uniquement un secteur de notre structure socio-économique. C'est pour cela qu'en ce domaine l'impulsion doit venir du centre et c'est peut-être un des principaux défis que cela nous pose.

  (1110)  

    Nous avons discuté, lors de la conférence, des avantages du numérique en matière de productivité, mais également des avantages que l'adoption du numérique présente pour notre système de soins de santé.
    Permettez-moi, pour terminer, de dire qu'à la conférence un consensus semble s'être dégagé autour de trois thèmes concernant l'univers numérique et ses conséquences au niveau de la culture. Les trois thèmes dégagés sont la connectivité, le contenu et la collaboration. Il s'est trouvé que cela donnait trois C, mais on entend par connectivité, la rapidité et la disponibilité; par contenu, on entend que ce qui n'est pas numérisé n'existe pas et par collaboration, on entend l'accès et la littératie numérique qui permettent d'employer les nouveaux outils.
    Je vais m'en tenir là. C'est très volontiers que je répondrai aux questions que vous voudriez me poser au sujet de mes activités et de ce que j'ai pu apprendre.

  (1115)  

    Je vous remercie.
    Nous passons maintenant la parole à M. Levy.
    Je précise dès le départ que je ne suis pas à vrai dire un technicien, mais plutôt un sportif. Nous venons tout juste, Tom et moi, de nous rendre compte que nous habitons dans le même coin. Tom travaille à Waterloo — et c'est également là, j'imagine, qu'il vit, alors que moi, je viens de la ville qui n'a pas d'équipe de hockey, c'est-à-dire Hamilton. On a donc certains points en commun, d'autant plus qu'un des types de sa ville a presque réussi à doter Hamilton d'une équipe de hockey, ce dont nous nous souvenons tous.
    Il est agréable de voir tellement de chemises de sport dans cette salle.
    Une voix: Surtout les rouges.
    Une voix: Du calme, du calme!
    M. John Levy: Oh, vous savez, je viens de Hamilton, et donc je n'aime pas tellement les chemises bleues non plus.
    Des voix: Oh, oh!
    M. John Levy: Mesdames et messieurs les députés et collaborateurs du comité, bonjour. Je m'appelle John Levy. Je suis président-directeur général de Score Media Inc.
    J'aimerais vous entretenir aujourd'hui du devenir des médias numériques et émergents, des incidences de ce progrès sur les industries culturelles canadiennes, et de la manière dont les institutions fédérales pourraient aider les Canadiens et les industries culturelles de notre pays à profiter de cette évolution.
    Avant d'entrer dans le vif du sujet, je souhaite par contre vous dire quelques mots de Score Media et de mes propres antécédents, car cela fournira un peu de contexte à mes propos.
    Je suis, au sein de l'industrie canadienne des communications, un des rares à combiner l'optique d'un petit câblo-opérateur et celle d'un petit radiodiffuseur. Avant de fonder Score Media, à la fin des années 1990, j'étais en effet actionnaire majoritaire d'une entreprise appelée Cableworks Communications, une des premières entreprises de distribution de télévision par réseaux de câbles lancées au Canada. Cableworks en effet a été fondée par mon père en 1959. Elle a fini par avoir plus de 65 000 abonnés dans la région de Hamilton. C'est dire que j'ai grandi dans le secteur du câble et dans celui de la radiodiffusion et que j'ai pu assister au développement et à la transformation auxquels a donné lieu l'apparition des chaînes thématiques et de la télévision payante et les nouvelles technologies, y compris la transmission par micro-ondes, par fibres optiques et par satellite.
    Cableworks était également un des premiers fournisseurs de service Internet. Nous avions en effet lancé un FSI par accès commuté afin de nous préparer au déploiement des connexions Internet haut débit par câble qui s'est répandu en moins de 10 ans. J'aurai l'occasion d'y revenir un peu plus tard, mais je dois dire dès maintenant que cette prolifération de l'accès à Internet qui permet aux gens de se joindre instantanément et de se transmettre un contenu est, d'après moi, la transformation technologique sans doute la plus importante de notre existence.
    Score Media a fait de gros investissements afin d'assurer la pertinence de sa présence sur toutes les plates-formes médiatiques, car c'est là où se trouve en grande partie la clientèle des 18 à 34 ans. Score Media comprend le Score Television Network, une chaîne thématique de sport, d'actualités et d'information offerte à 6,7 millions de foyers au Canada; Hardcore Sports Radio, une chaîne de radio parlée à prédominance sportive diffusée dans toute l'Amérique du Nord par Sirius Satellite Radio; et Score Media Ventures, notre division des médias numériques qui s'occupe de notre site Web, thescore.com, de notre service mobile, sur lequel j'aurai l'occasion de revenir un peu plus tard, ainsi que de nos applications de télévision interactive.
    Nos nouvelles plates-formes et notre chaîne de télévision se développent toutes de manière satisfaisante, mais nous sommes particulièrement fiers de notre service mobile. En juin 2009, nous avons, en effet, lancé Score Mobile pour téléphones intelligents BlackBerry. Ce produit a beaucoup contribué à notre marque, à la fois ici au Canada, et sur le marché international. Notre Score Mobile version BlackBerry a été un énorme succès en Amérique du Nord, 70 p. 100 de nos utilisateurs habitant les États-Unis. Nous avons, depuis ce lancement, enregistré plus de deux millions de téléchargements, ce qui est un résultat tout à fait considérable pour une entreprise canadienne dans un secteur extrêmement concurrentiel. Notre Score Mobile version BlackBerry est en fait le numéro un mondial des applications sportives gratuites destinées au BlackBerry. Nous sommes très fiers de cela.
    Nous avons également eu beaucoup de succès avec notre application pour iPhone. Depuis son lancement, en juillet 2008, nous enregistrons plus d'un million et demi de téléchargements, dont plus d'un tiers émanant des États-Unis.
    Prises dans leur ensemble, ces applications génèrent — c'est comme cela que l'on mesure notre performance, et nous utilisons le même argument pour vendre de la publicité, sujet dont, là aussi, je reparlerai dans un instant — plus de 1,3 million de visiteurs uniques par mois et, tous les mois, nous enregistrons plus de 50 millions de visualisations de page.
    Nos nouvelles plates-formes de distribution font partie intégrante de nos activités et de notre stratégie de développement. Ce sont, à nos yeux, des plates-formes de développement à part entière, tant au Canada qu'à l'étranger.

  (1120)  

    J'ajoute que la progression de nos recettes traduit l'importance financière de ces nouvelles plates-formes. Plus de 10 p. 100 de nos recettes publicitaires proviennent de nos nouvelles plates-formes de distribution et nous prévoyons un développement exponentiel de ces revenus. Nos nouvelles plates-formes contribuent très sensiblement à notre bénéfice d'exploitation.
    Notre entreprise est axée sur l'innovation et pour maintenir notre avance, nous sommes en perpétuelle transformation. Face à la concurrence internationale, nous avons décidé de faire des technologies numériques et émergentes la pierre de touche de notre stratégie de développement.
    J'ai pris la liberté de consulter quelques-unes des questions qui ont été posées et je vais essayer d'y répondre par avance.
    D'abord, quelles sont, pour les industries culturelles canadiennes, les répercussions de ces nouveaux médias numériques et émergents? Ces nouveaux médias ont, il est clair, de très nombreuses conséquences, mais, d'après nous, la plus importante, en ce qui concerne les industries culturelles canadiennes, est que ces nouvelles technologies ont démocratisé la diffusion des connaissances et de l'autorité.
    Nul ne conteste que les obstacles à l'entrée des producteurs de contenu ont été éliminés. Toute personne souhaitant mettre ses connaissances en ligne et se constituer un auditoire peut dorénavant le faire sans avoir à persuader au préalable le traditionnel intermédiaire, en l'occurrence le radiodiffuseur. Chacun a maintenant un accès direct à son public, avec qui il peut, sans avoir à passer par les médias grand public, établir des liens de confiance et d'autorité. Cela ne s'est jamais vu.
    Il est donc essentiel que les entreprises et industries culturelles parviennent à profiter de ces nouvelles possibilités et ne restent pas prises dans leurs anciens schémas. The Score a, par exemple, pu profiter de ce phénomène en employant Internet pour découvrir de nouveaux talents. Je cite à titre d'exemples The Basketball Jones, un groupe de quatre comiques experts en basket-ball qui se sont attiré un nombre sensible de partisans en ligne qui apprécient l'esprit caustique de leurs balados et de leurs vidéos; Paul Brothers qui a remporté notre concours « Drafted », un nouveau type de recherche multi plates-formes destinée à trouver le prochain grand chroniqueur sportif du Canada. Nous avons organisé ce concours dans le cadre d'un partenariat avec Procter and Gamble; et puis, les blogueurs de la Score Sports Federation, qui réunit les meilleurs blogues sportifs du Canada.
    Les créations de ces individus constituent maintenant l'essentiel de notre contenu Web et si nous avons pu les amener à The Score, c'est parce que, justement, ils avaient employé Internet pour créer une marque et s'imposer sur le Web. C'est un fait que nous, en tant que radiodiffuseur, avons plus besoin d'eux qu'ils n'ont besoin de nous. J'espère qu'ils ne m'écoutent pas en ce moment. Il est vrai, cependant, qu'il y a un déplacement très net du centre de pouvoir et c'est pour cela que je dis que les connaissances et l'autorité ont été démocratisées de manière tout à fait inattendue. Les institutions culturelles doivent tenir compte de cette évolution, et l'épouser. D'après nous, toute institution qui refuse de voir dans Internet un nouveau champ de jeu ouvert et démocratique, sera rapidement écartée, et remplacée par ceux qui savent tirer pleinement parti des nouvelles possibilités offertes par cette ouverture sans précédent.
    Les nouvelles technologies transforment les médias en service public. Les progrès techniques donnent au public les moyens de manier lui-même les médias, d'y participer. Les médias traditionnels, destinés à un auditoire passif, perdant rapidement de leur intérêt aux yeux du public. Internet, par exemple, est le moyen parfait d'accueillir les réponses et de distribuer les récompenses. Notre entreprise peut, par exemple, savoir quels sont ceux qui répercutent le plus nos contenus, et quels sont les contenus qui s'attirent les partisans les plus fervents. Les nouvelles technologies permettent aux utilisateurs de dialoguer. C'est un véritable courant. Ceux qui nous suivent peuvent devenir des créateurs, et nos créateurs peuvent devenir des partisans. Il s'agit, là encore, d'un phénomène que nos institutions culturelles vont devoir épouser si elles souhaitent rester de la partie.
    J'aimerais, enfin, dire un mot au sujet des politiques que le gouvernement fédéral pourrait adopter afin d'aider les Canadiens et les industries culturelles du Canada à tirer profit des possibilités qu'offrent les médias numériques et émergents. Nous avons déjà évoqué la question devant le CRTC, l'organisme qui réglemente notre secteur.
     Nous estimons que le principe de base des politiques et des règlements relatifs au domaine des communications au Canada doit être la neutralité d'Internet afin que tous les producteurs de contenu, verticalement intégrés ou non à des fournisseurs de service Internet, puissent bénéficier de l'égalité des chances.
    Nous sommes, dans le domaine sportif, un acteur indépendant de petite envergure et nous avons dû pour cela faire preuve d'agilité face à des concurrents qui sont des géants des médias sportifs, des distributeurs verticalement intégrés dans un domaine où les ligues sportives jouissent souvent d'un énorme pouvoir de négociation leur permettant de disposer de leurs propres plates-formes.
    Dans un tel contexte, notre réussite est due au fait que nous respectons notre public, que nous sommes à son écoute et que nous diffusons un contenu authentique et honnête. Sans accès, cependant, nous n'aurions rien pu faire.

  (1125)  

    Lorsqu'il y a plus de 10 ans, nous avons lancé The Score en tant que chaîne thématique, les règles établies par le CRTC en matière d'accès et de diffusion des signaux prioritaires, a permis à cette jeune pousse de se faire entendre. Si notre droit d'être diffusé avait, il y a 10 ans, été laissé à l'appréciation des entreprises de radiodiffusion, aux distributeurs, notre voix indépendante n'aurait pas l'occasion de s'exprimer devant vous aujourd'hui.
    Dans cet univers de nouveaux médias, le développement organique et fulgurant d'Internet a créé un environnement où, avec un peu de créativité, des petites entreprises telles que Score Media peuvent créer une entreprise mondiale. Toute personne qui, n'importe où au monde, a accès à Internet, peut éventuellement rejoindre notre public. Cela dit, plus ça change, plus c'est la même chose. Aujourd'hui, la survie dépend essentiellement de l'accès. Or, au cours de ces dernières années, l'accès à Internet devient de plus en plus concentré aux mains de quelques-uns. Les FSI ont un pouvoir de vie ou de mort sur les créateurs de contenu dont l'accès au public dépend d'Internet. De nombreux FSI sont intégrés à des producteurs de contenu qui ont tout intérêt à exercer les pouvoirs dont ils disposent.
    J'ai voulu, dans le cadre de cet exposé, vous dire quelques mots de ce que nous faisons dans le domaine des médias numériques et émergents et des moyens qui permettraient de favoriser l'innovation au Canada.
    Je résumerai notre recommandation à l'intention du gouvernement fédéral en quelques mots. Épousez la démocratisation de l'information et de l'autorité à laquelle donnent lieu ces nouveaux médias, et préserve l'ouverture d'Internet. Les moyens que les fournisseurs de service Internet et fournisseurs de service sans fil ont de contrôler l'accès à Internet, soit en raison de leur intégration verticale, soit parce qu'ils ont tout intérêt à accorder la priorité à leur propre contenu, ou encore parce qu'ils ont conclu des accords avec de grandes sociétés de distribution à qui ils accordent un accès prioritaire, sont pour nous une source de préoccupation. Si nous souhaitons, dans l'univers de ces nouveaux médias, préserver la diversité de voix authentiquement canadiennes, on ne peut pas subordonner l'accès à Internet au paiement d'un droit d'entrée.
    Je vous remercie. C'est très volontiers maintenant que je répondrai à vos questions.
    Je vous remercie de vos exposés.
    Nous n'aurons pas, ce matin, suffisamment de temps pour deux séries de questions. Cela étant, je vais accorder à chacun sept minutes et ceux qui le veulent pourront partager leur temps de parole.
    D'abord, monsieur Rodriguez, vous avez sept minutes pour les questions et les réponses.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Merci aux témoins d'être ici aujourd'hui.
    Monsieur Jenkins, je vous poserai une question d'ordre général. Parmi tous les changements qui se produisent actuellement à une vitesse vertigineuse, quels sont les principaux changements qui vont toucher le monde des médias?

[Traduction]

    Je suis observateur dans un monde des médias dont il est un des acteurs.
    En tant qu'observateur de ce monde, ce qui me frappe le plus partout où je vais, que ce soit en Europe, en Amérique ou en Asie, est le fait que les entreprises de distribution se préoccupent énormément de ce qu'on appelle la « longue traîne ». Cela veut dire que lorsque vous vendez un encart publicitaire dans un journal, ou à la télévision, vous touchez des centaines de milliers de dollars ou 10 000 $, enfin une certaine somme. Mais, sur Internet, on entend par longue traîne le grand nombre de visualisations de ce contenu dans le temps, bien que la valeur de chaque visualisation soit en elle-même très faible.
    Il s'agit là de quelque chose d'extrêmement important pour toutes les entreprises de médias. Cela représente un énorme changement sur le plan du modèle d'entreprise, et cela quel que soit le cadre réglementaire.
    En tant qu'outilleur des médias, c'est cela qui m'a le plus frappé.

  (1130)  

    Monsieur Levy, en quelques mots s'il vous plaît.
    La situation a été complètement renversée. Il n'y a plus de contrôleurs d'accès. C'est maintenant l'utilisateur final qui contrôle tout. Tous ceux qui refusent d'épouser cette nouvelle situation seront à terme écartés. Ce sera comme ce qui s'est passé dans l'industrie du disque. En effet, les entreprises pensaient pouvoir contrôler à la fois le choix de musique et le mode d'écoute puis, tout d'un coup, ces mêmes entreprises ont fait faillite. C'est exactement ce qui est en train de se passer dans le secteur de la radiodiffusion.

[Français]

    Selon vous deux, est-ce qu'on a, au Canada, la main-d'oeuvre nécessaire et les capacités nécessaires pour former cette relève de demain?

[Traduction]

    Je réponds spontanément que oui, tout à fait, mais j'ajoute immédiatement quelques réserves. Nous avons la chance au Canada d'avoir une population avertie. Je ne vois pas très bien comment dire autrement. Les Canadiens sont aussi avancés que les autres peuples et je sais que partout dans le monde c'est comme cela que ça se passe. Oui, les Canadiens sont tout à fait acquis à ces nouveaux médias. Cela dit, un certain nombre de difficultés se posent en ce domaine au niveau des moyens, des outils qu'il faut donner à la population justement pour faire en sorte qu'elle ne prenne pas de retard. Nous occupons un vaste territoire relativement peu peuplé et cela crée des difficultés au niveau de l'accès. Pour un pays comme Singapour, la chose est simple. Il n'y aurait aucun problème si nous vivions tous dans un rayon de 10 kilomètres.
    Il n'y a donc aucune difficulté sur le plan du public, mais il nous faudrait une impulsion venant du centre, du gouvernement, afin de surmonter les difficultés qui se présentent au niveau de l'accès aux outils nécessaires. La numérisation est un dossier très important. La population a beau être numériquement alphabète, si l'on ne trouve pas en ligne des programmes qui sont l'oeuvre de créateurs canadiens...

[Français]

    Si vous permettez, cela m'amène à ma prochaine question. Vous avez mentionné qu'entre 1 p. 100 et 4 p. 100 de notre contenu est numérisé. Cela me semble très faible. À quoi faites-vous référence exactement?

[Traduction]

    Une étude a été à cet égard menée par le Canadian Digital Media Network et Bibliothèque et Archives Canada, l'organe d'archivage national. En vertu d'une loi du Parlement — je précise que je ne suis pas expert en la matière — après la Seconde Guerre mondiale, au début des années 1950, tous les livres, journaux, etc. produits au Canada devaient être mis sur microfiches. On a réussi à constituer de formidables archives. Le problème est que ces archives, en raison des moyens techniques employés, ne sont pas consultables par nos enfants ou par ce que je viens d'appeler les alphabètes numériques. Tout cela doit être mis à jour.

[Français]

    Si on se compare aux autres pays industrialisés, on a du retard à rattraper. C'est ce que vous nous dites.

[Traduction]

    De multiples avis ont été exprimés à cet égard. Les autres pays se lancent-ils dans la numérisation?
    Je tiens tout de suite à préciser que les autres pays éprouvent les mêmes difficultés que nous. Les mêmes problèmes se posent à eux. Ont-ils, par rapport à nous, quelques années d'avance ou quelques années de retard? Cela dépend. On peut dire que Digital Britain a compris la situation, et que la Bibliothèque nationale de France a très bien compris, que les Allemands comprennent aussi et que le gouvernement Obama a d'ores et déjà pris des mesures en ce sens.
    Je ne peux pas vous donner à cet égard de références précises. Tous les pays doivent actuellement relever ce défi. Certains commencent à réagir.
    M. Pablo Rodriguez: M. Simms a lui aussi des questions à poser.

  (1135)  

    Monsieur Simms.
    Je tiens à remercier nos invités.
    Monsieur Levy, permettez-moi d'abord de vous féliciter d'avoir retenu les talents du jeune Paul Brothers. Nous avons grandi ensemble. Il vient de ma ville natale, Bishops Falls. Je tenais simplement à le saluer en passant.
    D'après moi, vous vous trouvez dans une situation tout à fait particulière. Je travaillais autrefois au réseau météo, Pelmorex. J'imagine que votre situation à vous est analogue. Vous êtes, en effet, une petite entreprise travaillant dans le même secteur que les entreprises géantes. J'ai l'impression — et vous me direz si vous êtes d'accord ou non — que vous avez presque entièrement écarté l'idée de radiodiffusion, optant pour l'établissement d'un lien particulier avec un public précis. Cela exige peut-être un nouveau terme tel que « diffusion électronique » — je ne sais pas trop, mais par le truchement de ces nouvelles plates-formes, vous avez créé un lien direct avec un consommateur particulier. Dans la mesure cependant, où 10 p. 100 de vos recettes publicitaires proviennent des nouveaux médias, ne pensez-vous pas que cela est un peu risqué?
    Au contraire, ce n'est qu'un début. En effet, il y a seulement 18 mois, ce 10 p. 100 était 0 p. 100 et il y a 18 mois, je n'accueillais pas 1,4 million de visiteurs uniques. Je n'ai aucune surface médiatique. Tout ce que j'avais... et je n'entends nullement, en disant cela, diminuer ce que nous avons, car au Canada le réseau de chaînes de télévision est quelque chose de formidable qui continue à se développer et nous allons continuer à en tirer pleinement avantage. Mais tout cela se passe très soudainement.
    Nous constatons, dans l'univers numérique, une augmentation de 5 p. 100 d'une semaine à l'autre, au niveau du nombre de téléchargements, et de visiteurs uniques. Je suis absolument persuadé qu'au cours des deux à quatre prochaines années, nos recettes proviendront autant de nos activités en différé que de notre chaîne de télévision...
    En raison de ce lien spécial que vous parvenez à forger — c'est comme cela que je vois la chose — entendez-vous augmenter le revenu que vous procure chaque membre de votre public? Je ne dis pas du tout cela en mal; j'entends par cela que dans la mesure où vous adaptez la publicité à tel ou tel consommateur précis...
    Il y a deux points à noter. D'abord, le consommateur auquel nous nous adressons, les jeunes gens âgés de 18 à 34 ans ou moins, ne regardent pas la télévision comme nous le faisions lorsque j'étais jeune ou comme le faisaient la plupart des personnes présentes dans cette salle. Cela fait des années qu'ils ne regardent plus ces spots publicitaires de 30 secondes. Combien y en a-t-il, parmi vous, qui, depuis longtemps, utilisent la commande de télévision pour supprimer les messages publicitaires? Cela se fait depuis longtemps, mais c'est seulement maintenant, avec les nouveaux moyens de mesure, qu'on peut en être certain.
    Nous avons, en ce qui nous concerne, voulu faire en sorte d'avancer dans le même sens que le consommateur. Un public jeune, surtout celui des passionnés du sport, les jeunes gens de 18 à 34 ans — mais également des femmes, je tiens à le préciser — est attiré par les nouveaux médias. Cela a été notre première constatation.
    Mais notre deuxième constatation, celle qui nous a vraiment passionné, est que 60 p. 100 de tous les téléchargements que nous avons enregistrés proviennent de pays autres que le Canada. Cela nous permet avec notre marque, lancée au Canada... et je suis entièrement persuadé que, comme la marque de ce monsieur, nous allons parvenir à faire de cette marque née au Canada, une marque internationale.
    Monsieur Jenkins a-t-il le temps de répondre?
    Nous en sommes à presque neuf minutes. M. Jenkins aura sans doute l'occasion de répondre un peu plus tard.
    Monsieur Pomerleau, s'il vous plaît.

[Français]

    Merci monsieur le président.
    Merci à nos deux témoins.
    Monsieur Jenkins, vous nous avez dit avoir travaillé dans plusieurs pays du monde. Vous avez cité Singapour où, en comparaison du Canada, la situation est complètement différente. Singapour, c'est grand comme l'île de Montréal, et l'équivalent des trois quarts de la population du Québec y vivent. C'est donc un problème totalement différent. Vous avez aussi parlé de la France et d'autres pays.
    Vous nous dites que le Canada est perçu — enfin par vous, du moins, mais par nous aussi à bien des égards — comme étant largement en retard dans le domaine du numérique. Quelles sont exactement les différences entre les pays que vous avez visités et le Canada? Pourriez-vous nous citer quelques exemples et nous dire en quoi exactement les situations diffèrent? Est-ce que c'est en raison de la réglementation, de l'argent investi, des buts poursuivis?

[Traduction]

    Peut-être me suis-je mal exprimé. Je n'entendais pas donner l'impression que nous avons pris du retard. Nous n'avons pas encore suffisamment d'indices, effectivement, pour dire si nous sommes en retard ou en avance. C'est d'ailleurs pour cela que j'évoquais tout à l'heure la numérisation et la connectivité.
    La situation évolue très vite et il est donc difficile de se prononcer. Nous pourrions adopter, disons, une nouvelle stratégie d'investissement en matière de connectivité qui nous permettrait de nous hisser au tout premier rang des pays de l'OCDE. Cela exigerait d'importants capitaux, mais, comme pour CANARIE, etc., nous n'aurions pas à le refaire avant 10 ans.
    Au terme de ce cycle, nous donnerions à nouveau l'impression d'être en retard, mais il suffirait de faire un nouveau bond pour se retrouver encore une fois dans le peloton de tête.
    Mais pour l'instant?
    Pour l'instant, la situation n'est pas suffisamment nette. On peut, bien sûr, s'en tenir aux statistiques de l'OCDE. J'ai pris connaissance de ces statistiques et d'autres données aussi, et je trouve qu'elles ont quelque chose de trompeur. C'est pourquoi je ne pense pas que nous puissions nous baser sur un rapport de l'OCDE pour conclure que nous avons pris du retard ou de l'avance ou pour nous rassurer.
    Ce qui est vrai, c'est qu'il nous faut suivre le rythme. Ce qui est certain c'est que nous devons maintenir la cadence, que nous soyons en retard ou que nous soyons en avance, car la situation évolue très rapidement.
    Il faut savoir que, comme l'indiquent la plupart des rapports, le contenu numérique double tous les 30 jours — j'entends par cela le contenu numérique du monde entier. C'est dire qu'à l'été, tout, depuis les débuts de la civilisation, aura doublé.
    Le rythme est donc peut-être l'aspect le plus important de tout cela. Je ne dis pas qu'il faille faire abstraction du rang que nous occupons par rapport aux autres pays, mais l'essentiel est de maintenir le rythme.

  (1140)  

[Français]

    Vous avez aussi parlé de la possibilité que toute la question de la santé au Canada puisse être considérablement améliorée par l'utilisation de réseaux, de la numérisation, etc. Que voulez-vous dire exactement?

[Traduction]

    Nous avons une très bonne main-d'oeuvre, d'excellentes universités et de grands spécialistes de l'information, mais il nous faut des outils qu'aucune institution ou aucune organisation n'est en mesure de forger. En effet, il nous faut une impulsion qui provienne du centre, une autorité qui définisse les normes.
    Si, par exemple, nous souhaitions numériser tout, ou une grande partie du contenu canadien, sur quelles normes conviendrait-il de s'aligner? Comment procéderait-on? Il y a 50 ans, le Parlement avait décrété l'archivage sur microfiches, car cela correspondait à l'état de la technique. Cela nous a laissé de vastes archives constituées par les générations précédentes. C'est à nouveau ce qu'il nous faut faire et à nouveau il nous faut cette impulsion émanant du centre.
    Cela ne prendrait pas nécessairement de gros moyens financiers. En effet, les normes et les objectifs à définir exigent essentiellement du leadership. Je ne veux pas dire par cela que... et ce serait d'ailleurs d'après moi une grande erreur. Je suis en effet un tenant de l'économie libérale et je ne suis donc pas partisan d'une réglementation à outrance.
    Cela dit, nous avons besoin d'une impulsion. C'est ce que je voulais dire. Il nous faut définir des normes et des objectifs.

[Français]

    Monsieur Levy, comme dans le cas de beaucoup d'autres discussions tenues ici, je dirais que les opinions sont partagées moitié-moitié. Vous êtes de ceux qui nous disent qu'il ne faut pas toucher l'Internet, qu'il ne faut pas trop établir de règles, qu'il ne faut pas freiner le progrès et qu'il faut laisser la situation évoluer par elle-même. Or nous nous rendons compte qu'il y a de grands perdants, qui sont les vrais créateurs. Je ne parle pas de l'individu ordinaire qui fait de la création son hobby; je parle des gens qui ont choisi de faire de la création leur métier. Le travail de ces gens va souvent être copié, qu'il s'agisse de livres, de musique ou d'autres objets de création. Leurs oeuvres sont placées sur Internet et ils ne reçoivent jamais de droits d'auteur. C'est un problème fondamental. Je vois mal comment on peut régler cela sans imposer des règlements.
    C'est un point de vue un peu philosophique, mais l'idée de laisser ce marché complètement libre de toute réglementation me fait penser à ce que Montesquieu disait en parlant du faible et du fort, de la liberté totale qui asservit le faible et du droit qui le rend libre. Le droit est important, il l'est dans certains cas. Si on laisse les individus faire affaire avec Google, même avec des millions de dollars, ils se feront toujours avoir. Il faut des règles qui permettent à ces gens de toucher une rétribution pour leurs droits d'auteur. Qu'en pensez-vous vous-même?

[Traduction]

    Il y a, en fait, deux choses. Quand on parle de la liberté d'accès, on entend que cet accès doit être à la fois ouvert et transparent. Cette liberté d'accès doit être généralisée à l'ensemble du pays et ne pas être contrôlée par quelques-uns qui pourraient décider du contenu qu'ils vont laisser passer. Voilà ce que nous entendons par cela.
    La question que vous évoquez me semble entièrement différente puisqu'il s'agit plutôt du droit d'auteur et de la propriété du contenu. Je voudrais bien pouvoir apporter à cette question une réponse cohérente, mais ce n'est actuellement pas possible étant donné que la matrice est en pleine transformation. On assiste à une transformation soudaine des créateurs de contenu.
    Auparavant, les créateurs étaient peu nombreux et on pouvait savoir précisément qui ils étaient. Vu les moyens de diffusion, il était aisé de protéger les créateurs de contenu. Mais maintenant, les sources foisonnent. La situation est entièrement transformée et celui qui, dans son sous-sol, compose de la musique, et qui a un accès sans précédent au public, ne s'inquiète guère de savoir si l'on va copier ou non son oeuvre. Nous parlions tout à l'heure de ce nouveau type de lien avec le public et je pense à cet égard qu'il faut effectivement être au contact des nouveaux créateurs, car il n'est peut-être pas exact qu'il faille songer à le protéger comme nous songions auparavant à protéger les grandes marques de disque.
    Je ne connais pas la réponse. Tout ce que je sais, c'est que la matrice a été entièrement bouleversée.
    Permettez-moi de vous citer à cet égard un exemple.

  (1145)  

    En quelques mots, s'il vous plaît.
    Bon.
    En ce qui concerne la protection de la marque, nous partons, dans notre entreprise, du principe qu'en fait nous renonçons à notre marque. En effet, à moins que le public accorde à The Score la reconnaissance... Je n'entends donc rien faire pour protéger la marque. Je ne vais pas m'en prendre aux gens qui cherchent à s'en servir. Au contraire, je veux que les gens s'alignent sur notre marque, qu'ils l'emploient.
    Ce serait peut-être un point de départ en matière de réforme du droit d'auteur. Il s'agirait de changer notre manière de penser et de ne plus chercher à centraliser le contrôle. De toute manière, je ne vois pas vraiment comment nous allons parvenir à en conserver le contrôle.
    Je vous remercie.
    Nous passons maintenant la parole à M. Rafferty.
    Je tiens à vous remercier tous les deux.
    Ma première question s'adresse à M. Jenkins. J'ai assisté, il y a presque 20 ans, alors que je faisais de la radio, à la première conférence de radio numérique qui s'est tenue à Toronto. J'ai pris un vif intérêt à ce que vous nous avez dit tout à l'heure, notamment au sujet des comparaisons par rapport aux autres pays du monde, car il y a presque 20 ans, la question portait sur les moyens techniques, mais ce n'est plus vraiment le cas. Les questions à l'ordre du jour sont aujourd'hui la littératie numérique, et toutes sortes d'autres aspects de la situation.
    Cela étant, je voulais vous demander... même s'il est assez clair que vous n'êtes pas en mesure de nous dire si nous sommes en avance ou en retard, ou même si nous en sommes à peu près où en est le reste du monde, mais il est clair qu'on ne peut pas se permettre de prendre du retard. Compte tenu des techniques et de ce vaste éventail de produits dans le reste du monde, quels seraient, d'après vous, ceux qui seraient les plus utiles, notamment à nos artistes et au public spectateur?
    Je vous remercie d'évoquer la question.
    En tant qu'entrepreneur, je suis d'un naturel optimiste et j'ai donc confiance en ce qui se passe actuellement. Il y en a, par contre, qui voient tout cela d'un mauvais oeil.
    Notre pays ne compte que pour 2,5 p. 100 du PIB mondial. Notre population, en pourcentage, pour encore moins que cela. Il nous faut, d'après moi, tenir compte de cela quand on songe à, si vous voulez, nos moyens d'action, notre place dans le monde.
    Cela dit, nous avons de grands atouts. D'abord, il y a le multiculturalisme... Mes déplacements dans le monde m'ont permis de constater que notre pays fonctionne remarquablement bien. Je sais qu'au Canada il est fréquent d'entendre des critiques à cet égard, mais notre pays fonctionne remarquablement bien. C'est un fait. Vous qui vous êtes rendu dans d'autres parties du monde, le savez très bien.
    Cela nous offre donc de grandes possibilités. Lorsque vous songez à ce qui a été dit, notamment quant à l'importance des liens, j'estime que le fait que nous soyons un lieu de rencontre de nationalités si diverses, nous offre de grandes possibilités. Cela nous donne des moyens que n'ont pas normalement les pays ayant une population à peu près comparable à la nôtre.
    Songez-y: nous avons Open Text; nous avons Research in Motion; nous avons le Cirque du Soleil. Je pourrais vous citer d'autres exemples encore. Cela fait beaucoup d'acteurs majeurs pour un pays de cette dimension... Nous sommes un petit pays, mais la qualité de nos infrastructures, de notre enseignement et de notre communauté culturelle exerce, sur notre capacité, un effet multiplicateur. Ces atouts, auxquels s'ajoute notre accueil des diverses diasporas nous classent dans une catégorie à laquelle notre population, à elle seule, ne nous donnerait pas accès.
    C'est là qu'intervient le concept d'impulsion, la création de quelque chose, d'un ensemble d'objectifs ou d'une méthodologie visant à créer un environnement nous permettant justement de tirer profit de nos atouts. Or, nous avons de très puissants atouts.
    Je vous remercie.
    J'ai pris, monsieur Levy, un vif intérêt à ce que vous avez dit au sujet de la neutralité d'Internet. Pourrais-je vous demander de nous en dire un peu plus à ce sujet. Ce que vous en avez dit au CRTC et auquel vous avez fait allusion ici, me paraît important. Cela me paraît particulièrement important en ce qui concerne les FSI qui, tels que Shaw, ne véhiculent pas leur propre contenu... bien que maintenant, Shaw en ait, avec CanWest, acquis une source.
    La question de la neutralité d'Internet me paraît en effet très importante.

  (1150)  

    Je dirais, très schématiquement, qu'il s'agit simplement de faire en sorte que ceux qui exercent un contrôle sur Internet, ceux qui en contrôlent l'accès, ne manipulent pas la technologie pour s'avantager eux-mêmes et désavantager ceux qui n'ont pas le même pouvoir de contrôle. L'idée est tout à fait simple.
    Je ne conteste aucunement leur droit de mener comme ils l'entendent leurs affaires, car c'est un secteur d'activité difficile. Il y a la question des conduits, il y a la question de l'évaluation des coûts et il leur faut pouvoir tirer un bénéfice de leurs activités. Je dis simplement que leur réussite ne doit pas être aux dépens de ceux qui, autrement, auraient accès au public dans son ensemble.
    Il s'agit de parvenir à gérer une entreprise sans écarter de l'accès à Internet les centaines et centaines de milliers de fournisseurs de contenu — en effet, on ne parle plus de quelques-uns, mais du plus grand nombre — et de leur accorder au même environnement que vous, au même public, au même monde, l'accès dont vous bénéficiez vous-même.
    La règle est simple: accordez aux autres le même traitement qu'à vous-même; ne vous accordez pas un traitement préférentiel.
    Ainsi, en tant qu'entreprise de relativement petite envergure...
    M. John Levy: Très petite.
    M. John Rafferty: ... car c'est ainsi que vous vous qualifiez... même si, d'après moi, votre entreprise n'est pas si petite que cela.
    Ce que vous venez de dire au sujet de la neutralité d'Internet correspond-il, essentiellement, à votre intérêt bien compris, ou est-ce vraiment votre conviction?
    C'est une conviction. Comme je le disais tout à l'heure, j'ai éprouvé, en tant que petit câblo-opérateur, de grosses difficultés. Notre chaîne de télévision a eu, en outre, beaucoup de mal à obtenir l'accès à Internet.
    J'ai pu en tant que câblo-opérateur, faire passer ma chaîne par le canal 18, comme tout le monde, mais ceux qui n'ont pas cette possibilité se heurtent aux canaux prioritaires et sont petit à petit écartés, mais... D'après nous, il s'agit donc essentiellement d'éviter les traitements préférentiels.
    Il est clair que le CRTC est justement là pour éviter ce genre de choses. Ce que je dis, donc est, certes, dans mon intérêt, mais c'est en fait dans l'intérêt de chacun. Cette neutralité devient de plus en plus importante au fur et à mesure que l'univers numérique s'élargit car chacun doit maintenant pouvoir se faire entendre.
    Je vous remercie.
    Monsieur Del Mastro.
    Je tiens à remercier nos deux témoins.
    J'ai écouté vos exposés avec beaucoup d'attention et votre témoignage est, selon moi, le plus intéressant que nous ayons recueilli depuis l'audition de Jacob Glick, de Google. Il me paraît important de bien situer tout cela dans son contexte. C'est en effet de l'avenir qu'il s'agit, et non pas du présent.
    Il est clair que le comité et le gouvernement doivent réfléchir à l'avenir beaucoup plus qu'au présent. Or, à l'heure actuelle, on assiste à des changements continus. Les anciens modèles cherchent à se défendre. Ils se fondent pour cela sur d'anciens systèmes. Or, les nouveaux modèles sont et vont au-delà de nos frontières nationales et c'est en fait cela qui est à la base de cet énorme...
    Vous avez fait allusion à la longue traîne, sujet qu'avait évoqué Jacob Glick. J'ai lu un livre sur la question et il ne fait aucun doute que nous allons devoir revoir nos modèles et les adapter à l'avenir. Si notre comité entend faire des propositions dans l'intérêt des artistes, dans l'intérêt de la vie culturelle canadienne, afin de nous renforcer dans ces domaines, il va falloir tenir compte des idées dont vous nous faites part aujourd'hui.
    Vous nous avez un peu parlé, monsieur Jenkins, des jeunes de moins de 25 ans. Je ne sais pas si cela correspond à ce que vous avez pu vous-même constater, mais les formats habituels, la radiodiffusion hertzienne, manifestent encore beaucoup de vigueur, même si l'on s'aperçoit que les téléspectateurs modifient la manière dont ils captent les émissions. Le public continue à lire ce que les journalistes écrivent, mais il est en train de changer son mode de lecture.
    Selon vous, cela est-il vrai des diverses tranches d'âge? Le mouvement a commencé avec les moins de 25 ans, mais j'approche de la quarantaine et je m'aperçois que ce que vous disiez tout à l'heure s'applique également à moi. Les jeunes ont été les premiers à être attirés par les nouveaux modèles, mais le mouvement commence à s'étendre. Le mouvement n'est pas parti du sommet de la pyramide, mais de la base. Les jeunes ont recours...
    Oui, monsieur le président, je vous remercie. J'ai effectivement moins de 40 ans.
    Je constate, en effet, que d'autres tranches d'âge adoptent petit à petit les nouveaux médias et, contrairement à la manière dont cela se passait autrefois, le mouvement va s'étendre vers le haut et devenir de plus en plus facile à employer et de plus en plus accessible.

  (1155)  

    Je suis entièrement d'accord avec vous. J'aimerais vous dire un mot au sujet des constatations que nous avons pu faire car, lorsque nous ne traitons pas avec les industries de la culture, nous bâtissons des systèmes de connaissance pour des entreprises telles que BMW et Coca-Cola. Nous faisons cela pour des centaines de millions de personnes.
    Je recommande au comité d'inviter à prendre la parole devant lui quelqu'un qui a étudié la question, car de récentes recherches révèlent les changements intervenus dans le comportement des jeunes de moins de 25 ans. Leur cerveau n'est plus le même. La différence est physiologique. Les jeunes, ou les personnes de moins de 25 ans, n'ont pas la même capacité de mémoire que nous avions. Leur mémoire à court terme est beaucoup plus réduite, mais ils peuvent beaucoup mieux que nous réunir cinq ou six éléments d'information et les intégrer. Leur cerveau a changé.
    Vous avez sans nul doute raison. Cela a des répercussions sur la consommation médiatique, et le mouvement remonte vers le haut car, pour continuer à jouer un rôle dans notre société, pour demeurer productives, les autres tranches d'âge vont devoir améliorer leurs capacités d'assimilation.
    Permettez-moi d'ajouter quelque chose au sujet de ce que vous avez dit de Google. Il faut se rendre compte que le site Web auquel les gens ont le plus fréquemment recours n'est plus Google, mais Facebook. Cela est vrai depuis trois semaines. Il s'agit d'un domaine où la concurrence est particulièrement rude. La transition est constante.
    Vous auriez intérêt, lorsque vous réfléchissez à l'avenir, à voir les choses non pas dans l'optique d'un texte législatif adopté à un moment précis, mais sous l'angle d'un processus évolutif. Vous allez sans cela vous tromper, car la situation évolue très très vite.
    J'aimerais ajouter ceci pour confirmer ce que vous avez dit tout à l'heure. Cela est également vrai dans d'autres domaines. Il s'agit d'un sujet extrêmement sensible. Nous sommes très attachés au passé, aux choses auxquelles nous nous sommes habitués. J'aime le papier, j'aime lire mon journal. C'est un fait, cependant, que les modèles que nous avons connus sont en pleine mutation, et, dans l'intérêt du pays, il nous faut chercher à anticiper le changement.
    J'en suis conscient et je vais dire à ma mère, qui me dit constamment qu'elle ne se souvient de rien, qu'elle a en fait le cerveau d'un moins de 25 ans. Si sa mémoire à court terme lui fait défaut, c'est parce qu'en fait elle rajeunit.
    Pourriez-vous nous citer le nom de personnes qui effectuent ce type de recherches, ou pourriez-vous nous les faire parvenir par la suite?
    Très volontiers. J'en enverrai plusieurs à l'intention du comité.
    Cela me serait très utile.
    Monsieur Levy, vous nous avez parlé tout à l'heure des contrôleurs d'accès. Tout cela est du plus grand intérêt. On a eu, dans le passé, recours aux contrôleurs d'accès dans toutes sortes de contextes. Le CRTC est bien un contrôleur d'accès, non? C'est lui qui, au Canada, dicte les règles concernant le contenu. C'est lui qui fixe les règles applicables aux entreprises dans ce domaine. C'est lui qui délivre les licences de radiodiffusion. C'est lui qui contrôle l'accès aux actuelles plates-formes de distribution.
    Je ne veux pas vous faire dire ce que vous n'avez pas dit, mais vous avez tout à l'heure évoqué la possibilité, pour les Canadiens, pour la culture, et pour les entreprises telles que la vôtre de pouvoir agir dans le cadre d'un environnement libre, sans contrôleurs d'accès. Pourriez-vous nous en dire un peu plus à ce sujet?
    Je tiens d'abord à préciser...
    Je ne veux pas vous interrompre, mais vous avez environ une minute et demie pour répondre.
    Entendu.
    La question est effectivement importante, puisque j'ai régulièrement à me présenter devant le CRTC. J'entendais, par contrôleur d'accès, les entreprises, les parties qui font valoir leurs arguments devant le conseil. Le CRTC est aux prises avec ces divers problèmes. Il réfléchit aux moyens de réglementer l'action des contrôleurs d'accès, au lieu d'exercer lui-même ce rôle.
    Le CRTC essaie simplement d'établir des politiques et des règles en application de la Loi sur la radiodiffusion et tente de... Très honnêtement, si ce n'était pour le CRTC, nous ne serions pas ici aujourd'hui.
    D'après moi, pour le comité, la prochaine étape devrait être l'étude de la Loi sur la radiodiffusion. Il nous faut, je pense, réfléchir à un modèle adapté au XXIe siècle. Jusqu'ici, le CRTC était, si je puis dire, le caïd du bac à sable, mais le bac à sable se trouve maintenant en plein milieu de la plage, et l'environnement est beaucoup plus difficile à policer qu'avant.
    Je n'ai rien à ajouter à cela.
    Bon. Je vous remercie.
    J'aurais quelques commentaires à faire, mais cela peut attendre. Ces derniers jours, j'ai eu l'occasion de m'entretenir avec diverses personnes et j'en ai retenu quelques idées dont je vous ai d'ailleurs fait part, mais que je vais communiquer à nos analystes.
    Nous vous remercions d'avoir répondu à notre invitation et d'avoir, ce matin, pris la parole en premier. Votre témoignage est pour nous d'un réel intérêt.
    Nous allons maintenant suspendre la séance cinq minutes pour accueillir nos prochains témoins.

    


    

  (1200)  

    La séance est à nouveau ouverte.
    Oui, monsieur Rodriguez.

  (1205)  

    Je tenais simplement à m'assurer que nous avons prévu quelques moments pour réfléchir un peu où nous en sommes au plan de notre ordre du jour. Il me serait utile de disposer d'une liste des témoins prévus dans les quelques semaines à venir et de voir un peu comment nous allons nous organiser, car je crois qu'il ne nous reste que huit séances, dont deux consacrées à Lionsgate. Nous allons devoir décider si nous souhaitons remettre un rapport provisoire, car nous devrons, dans ce cas-là, transmettre à cet effet nos directives aux analystes.
    Monsieur Rodriguez, je viens d'apprendre, au cours de la suspension de séance, que le greffier du comité va préparer un document indiquant où nous en sommes au plan de notre ordre du jour et qui vont être nos témoins dans les semaines qui viennent.
    Bon.
    Madame Lavallée.

[Français]

    Je n'aurais pas voulu interrompre le comité, mais puisque c'est fait, j'aimerais dire deux choses.
     D'abord, il semble que M. Ménard, notre analyste, n'ait pas pu aller à la conférence Canada 3.0. J'aurais une suggestion à faire sur la façon d'obtenir l'information. Peut-être en avez-vous une, monsieur le président.
    La deuxième chose, c'est que le jeudi 27 mai, il n'y aura pas de réunion de comité — j'imagine que tout le monde le sait —, en raison de la présence du président mexicain. Il faudrait donc en tenir compte dans notre calendrier.
    Une voix: Pardon. Quand est-ce?
    Mme Carole Lavallée: Le jeudi 27 mai au matin, le président Calderón, du Mexique, viendra ici. Normalement, les travaux de la Chambre ne commence qu'à 14 heures. Il n'y aura pas de comité le matin, parce que le président va se présenter à la Chambre le matin. Dans cette optique, il faudrait peut-être prendre 10 minutes à la fin pour considérer toutes ces choses.

[Traduction]

    Je répète que le greffier du comité va nous transmettre un document, ce qui nous permettra de décider en conséquence. Je sais que nous avions envisagé de rendre une sorte de rapport provisoire. M. Jenkins nous a dit aujourd'hui qu'il nous obtiendrait les comptes rendus de la conférence 3.0 qui s'est déroulée ces deux derniers jours à Stratford. Lorsque ces rapports nous parviendront, je resterai en contact afin de m'assurer qu'ils sont transmis aux membres du comité. Nous nous y sommes pris un peu tard, pour envoyer M. Ménard à cette conférence. La prochaine fois, nous nous y prendrons plus tôt.
    Je vous remercie.
    Je souhaite maintenant la bienvenue à nos prochains témoins. Nous accueillons, en effet, Alain Pineau, de la Conférence canadienne des arts; et Catherine Edwards, porte-parole de la Canadian Association of Community Television Users and Stations, ou CACTUS.
    Nous vous saurions gré de limiter à 10 minutes la présentation de vos exposés.
    Nous allons demander à M. Pineau de prendre la parole en premier.

[Français]

     Membres du comité, mon nom est Alain Pineau. Je suis le directeur général de la Conférence canadienne des arts, le plus ancien et le plus vaste organisme-parapluie du secteur de la culture, des arts et du patrimoine au Canada.
    La CCA a pour mandat de contribuer à un débat informé sur toute politique ou réglementation à l'échelle fédérale qui touche à ce vaste secteur d’une façon ou d’une autre. Nous nous réjouissons de voir que le débat sur la nécessité de développer une stratégie numérique nationale est enfin sur la place publique. Nous sommes préoccupés qu'il ne porte pas seulement sur les enjeux économique mais également sociaux et culturels.
    Le débat actuel porte trop souvent sur les infrastructures et leur financement, et pas suffisamment sur ce qui est véhiculé par les nouvelles plateformes, ou sur les intérêts de ceux qui développent les contenus, culturels ou autres. Nous nous réjouissons donc que vous, dans un premier temps, et le gouvernement, cette semaine, ayez élargi la conversation et que vous vous préoccupiez de ces aspects fondamentaux du débat.
    L’arrivée des technologies numériques a changé la façon dont les artistes produisent et la relation des institutions avec leurs publics. L’interactivité bouleverse les modèles d’affaires et modifie les modes de consommation des produits culturels.

[Traduction]

    Le secteur des arts et de la culture accueille sans réserve les nouvelles possibilités offertes par les technologies numériques. De nombreux artistes y ont recours pour produire des oeuvres scéniques, parfois en alliant les nouvelles technologies aux moyens artistiques traditionnels.
    Mais outre l'utilisation de technologies numériques dans le domaine de la création artistique, il convient également de réfléchir aux répercussions qu'ont, au niveau de la promotion et de la diffusion des oeuvres, les systèmes de distribution à large bande, Internet et le service Internet sans fil. Le numérique permet dorénavant aux artistes ainsi qu'aux galeries et aux musées d'exposer les oeuvres. Certains artistes et certaines institutions techniquement en pointe parviennent ainsi à atteindre le public beaucoup plus rapidement et de manière beaucoup plus efficace qu'avant. Internet offre de nouveaux moyens de capter l'attention du public, de faire connaître les artistes et leurs oeuvres, et éventuellement d'enregistrer les commandes.
    Rappelons tout de même que la démocratisation des outils de production soulève des questions essentielles concernant le statut professionnel des artistes et des journalistes. Il est maintenant relativement plus aisé de produire des oeuvres d'art et de les diffuser. Les médias comptent de plus en plus sur les images et autres documents fournis par des membres du public qui peuvent transmettre leurs reportages au moyen d'appareils portables à usages multiples.
    L'intérêt de cette évolution est qu'elle encourage la création et la participation. Son inconvénient est qu'elle risque d'entraîner une dépréciation des oeuvres produites par des professionnels talentueux, avec une baisse de la qualité et, pourrais-je ajouter, les risques auxquels cela expose les moyens d'existence des créateurs.

  (1210)  

[Français]

    Plusieurs l’ont déjà dit avant nous, le développement d’une stratégie numérique canadienne doit s’appuyer sur une nouvelle loi sur le droit d’auteur. Il est urgent de reconnaître l’importance de la propriété intellectuelle de ceux qui développent des contenus et de créer un environnement numérique encourageant la création, la dissémination et la protection des oeuvres. Nos artistes veulent partager leurs créations sur les plateformes les plus larges possibles, mais ils doivent pouvoir le faire dans l’assurance qu’ils recevront une juste compensation pour leur travail, que ce soit pour la distribution en ligne ou pour le transfert sur d’autres instruments médiatiques.
    À ce chapitre, nous appuyons l’extension du présent régime de copie privée. Il ne s’agit pas là d’une taxe, mais d’une façon aussi efficace que possible de permettre à tous les Canadiens d’acquérir le droit de choisir l’appareil de son choix pour accéder aux produits culturels acquis légitimement, tout en assurant que l’artiste est compensé pour son travail. Il s’agit d’une mesure complémentaire importante pour appuyer la création du contenu qui ne saurait cependant remplacer le besoin fondamental d’une protection des droits des créateurs par l'intermédiaire d’une mise à jour de la loi.
    Un autre aspect des nouvelles réalités concerne le fait que plusieurs utilisateurs peuvent prendre le travail d’un artiste et recréer de nouvelles oeuvres. Une fois que l’oeuvre a pénétré dans l’univers numérique, il est possible d’en faire ce qu’en anglais on appelle un mash-up. Il est important qu’en développant une stratégie numérique nationale, le gouvernement inclue une politique novatrice qui protège les droits des auteurs sans pour autant décourager la créativité que leurs oeuvres peuvent générer à leur tour.

[Traduction]

    Quelques mots maintenant au sujet de la formation.
    Le commissaire de l'Office national du film, Tom Perlmutter, vous a entretenus de ce sujet l'autre jour, dans le cadre de son éloquent appel à l'adoption d'une stratégie nationale en matière numérique. Pour affronter la concurrence dans un marché ouvert, les artistes et les administrateurs artistiques doivent dès maintenant acquérir de nouvelles connaissances. Ceux qui savent manier les moyens de commercialisation numériques, et les médias sociaux auront plusieurs longueurs d'avance lorsqu'il s'agit de promouvoir, de présenter et de professionnaliser leur pratique artistique. Il va donc falloir accorder davantage d'importance à la formation des jeunes artistes et des jeunes créateurs, afin de leur inculquer, non seulement les nécessaires connaissances numériques, mais également les éléments de base de l'entreprenariat.
    Une économie de la connaissance est une économie qui ne manquera jamais de matière première. Étant donné les départs à la retraite, il nous faut dès maintenant investir dans des programmes de transfert des connaissances, des programmes de mentorat et d'apprentissage dans les industries culturelles et dans les arts.
    Une stratégie nationale en matière numérique doit également promouvoir la littératie numérique au sein de la population du Canada. C'est pour cela que la CCA est partisane de l'établissement de centres communautaires multimédias, idée proposée par la Canadian Association of Community Television Users and Stations.
    Je suis heureux de constater que sur ce point, nous sommes sur la même longueur d'onde. Nous ne nous étions pas entendus sur ce point à l'avance.
    Nous y voyons, d'après nous, un des piliers d'une stratégie numérique nationale réellement démocratique et il conviendrait, d'après nous, de faire figurer cette idée dans votre rapport.
    Les Canadiens ont droit à leur culture, et ce droit est reconnu par les politiques publiques au titre desquelles, depuis des années, le gouvernement souscrit des accords internationaux conclus dans le cadre des Nations Unies et de l'UNESCO. Au cours des 50 dernières années, les gouvernements qui se sont succédé ont mis en place divers mécanismes de soutien afin d'offrir aux Canadiens, et aux populations des autres pays, les divers produits et services issus de notre culture.
    Le nouvel environnement numérique rend de telles politiques plus importantes que jamais. Le gouvernement doit mettre en oeuvre tous les moyens dont il dispose, qu'il s'agisse de soutiens financiers directs, de réglementation ou de mesures fiscales.
    Ainsi que les représentants de l'ACTRA et de l'Association canadienne de cinéma-télévision l'ont affirmé dans le cadre de leurs exposés, les politiques en vigueur doivent être adaptées aux nouvelles réalités. C'est bien pour cela que la CCA prône l'augmentation des investissements publics dans les oeuvres de créateurs canadiens, par le truchement d'institutions telles que Radio-Canada, Téléfilm, l'Office national du film, ou le Conseil du Canada, ou par l'intermédiaire de nouveaux instruments tels que le Fonds des médias du Canada. C'est également pour cela que depuis plusieurs années déjà nous demandons que l'actuel régime de redevances applicable aux radiodiffuseurs par ondes hertziennes, aux câblodiffuseurs et entreprises de diffusion par satellite, soit étendu aux nouvelles plates-formes de distribution telles Internet et la distribution sans fil.
    Nous demandons en outre au gouvernement de s'en tenir, dans toutes ses négociations commerciales, à sa position officielle voulant que par rapport à l'ensemble des biens et services, les biens et services culturels fassent l'objet d'une exception, faute de quoi le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux n'auront plus les moyens de mettre en oeuvre ou de modifier les politiques culturelles qui ont permis le développement de nos secteurs des arts et de la culture.
    Cela m'amène à mon dernier point, la question de la propriété étrangère.
    Depuis plusieurs décennies, la politique culturelle du Canada repose sur le principe que la propriété et le contrôle effectif de nos industries culturelles par des intérêts canadiens permettent d'assurer que la population a accès à davantage d'oeuvres canadiennes. Il a été jugé plus facile de réglementer l'activité d'entreprises appartenant à des Canadiens que d'entreprises appartenant à des intérêts étrangers. Il est en outre probable que, comparé aux oeuvres de non-Canadiens, les idées et les récits émanant de créateurs canadiens soient davantage conformes à notre histoire, à nos traditions et à nos valeurs.
    L'absence de réglementation de l'industrie du cinéma est le meilleur exemple des conséquences néfastes d'une industrie culturelle essentiellement aux mains d'intérêts étrangers. La politique canadienne en matière de distribution cinématographique ne fait, au niveau des principaux distributeurs, aucune distinction entre les droits de distribution sur le marché canadien et les droits de distribution sur le marché nord-américain. Cela étant, les distributeurs étrangers exercent un contrôle étroit sur la plupart des films distribués au Canada. Les films étrangers, en l'occurrence les films américains, occupent, dans les régions anglophones du Canada, plus de 98 p. 100 du temps d'écran, la situation étant à cet égard légèrement meilleure au Québec.
    La question de savoir s'il serait sage d'ouvrir le secteur des télécommunications aux investissements étrangers avec le risque de voir ce secteur éventuellement tomber aux mains d'intérêts étrangers, est actuellement controversée. L'argument avancé est qu'en augmentant la concurrence, on abaissera les prix au consommateur. L'objectif est certes louable, mais il y a de bonnes raisons de craindre les conséquences d'un tel moyen détourné de modifier, dans le domaine de la culture, des politiques en place depuis longtemps.
    Le rapport 2008 du groupe d'étude sur les politiques en matière de concurrence recommandait l'assouplissement des restrictions quant aux investissements étrangers dans les secteurs des télécommunications et de la radiodiffusion « dans le sillage d'un examen des politiques touchant la radiodiffusion et la culture, y compris le volet investissement étranger ».
    Qu'il me soit permis de douter que les quelques séances du Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie, où les témoins disposent de 10 minutes pour présenter un exposé et de cinq minutes pour répondre aux questions, constituent un examen satisfaisant des politiques en matière de culture et de radiodiffusion.
    Prenant la parole devant le Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie, le président du CRTC a récemment déclaré que:
toute libéralisation des règles de propriété étrangère au chapitre des télécommunications doit bien tenir compte des objectifs sociaux et culturels de la Loi sur la radiodiffusion... en raison de l'importance du secteur des communications sur le plan économique, tous sont essentiellement d'accord pour dire
    — j'ajouterais à cela l'importance culturelle et stratégique de ce secteur —
que des intérêts canadiens devraient en garder le contrôle.

  (1215)  

    Les accords conclus par le Canada en matière de commerce international entraînent peut-être une restriction de la liberté d'action du Canada en matière de politiques culturelles. Le chapitre 11 de l'ALENA reconnaît en effet aux investisseurs étrangers le droit d'actionner le gouvernement canadien et de demander à être indemnisés des mesures, y compris celles prises par des organismes de régulation tels que le CRTC, qu'ils estiment contraires aux droits qui leurs sont garantis aux termes de l'ALENA. Le CCA s'inquiète beaucoup du fait que le gouvernement canadien a proposé l'adoption d'un tel mécanisme de règlement des différends dans le cadre des négociations globales actuellement en cours avec l'Union européenne.
    Pourquoi cela nous inquiète-t-il? D'abord, la CCA relève, en ce qui concerne l'ALENA, que l'exception culturelle ne s'applique qu'aux industries culturelles qui existaient lors de la conclusion de l'accord. Il est important de noter que cela ne comprend pas le secteur des nouveaux médias, tels que la télévision interactive, les jeux électroniques, etc.
    Deuxièmement, dans ce domaine, les droits reconnus au chapitre 11 pourraient être invoqués dans deux hypothèses. En cas de modification des règles concernant les télécommunications, une entreprise étrangère investissant dans une entreprise canadienne de câblodistribution ou de radiodiffusion pourrait structurer l'opération de manière à la faire correspondre très exactement aux nouvelles règles en matière de télécommunications. Au cas où le CRTC souhaiterait s'opposer à cet investissement, l'entreprise pourrait actionner le gouvernement au titre du chapitre 11, faisant valoir l'inégalité de traitement dont elle a fait l'objet par rapport à un concurrent direct intervenant sur le même marché.
    Enfin, dans l'hypothèse où des entreprises étrangères seraient autorisées à prendre des participations dans notre secteur de la radiodiffusion, ou y entreraient de force, les règles et règlements actuels concernant la production et la distribution de contenu canadien pourraient voir confirmer leur validité dans la mesure où ces sociétés étrangères prendraient pied sur un marché soumis déjà à un cadre réglementaire. Mais, si le CRTC ou le gouvernement tentait de mettre cette réglementation à jour afin de l'adapter à un nouvel environnement, les compagnies étrangères disposeraient d'un argument de poids pour intenter un procès au titre du chapitre 11.
    Voilà pourquoi les négociations en matière de commerce extérieur nous inspirent de telles réserves.

[Français]

    Je vous remercie de votre attention, et je répondrai à vos questions si vous en avez.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Nous passons maintenant à Mme Edwards. Madame Edwards, vous avez la parole.

[Français]

    Avant de commencer, je regrette sincèrement que notre présentation ne soit pas disponible en français. Ça fait trois semaines que nous avons des consultations intenses avec le CRTC. Nous sommes une petite organisation bénévole et citoyenne, et ce n'était tout simplement pas possible. Toutefois, je serais absolument ravie de recevoir vos questions à la fin en français, si vous préférez, et d'y répondre dans la même langue.

  (1220)  

[Traduction]

    Je remercie le Comité permanent du patrimoine canadien d'avoir invité le CACTUS. J'aborderai les questions 4 à 6 de votre mandat, qui traitent de l'accessibilité aux médias numériques et émergents.
    Notre proposition est la même, mais plus courte, que celle qui a été présentée devant le CRTC lors de son examen de la télévision communautaire il y a deux semaines. Nous apprécions la valeur que vous avez attribuée à la télévision communautaire indépendante dans la motion que vous avez adoptée le 30 avril. Comme cette motion ne portait que sur le Québec, j'apprécie la possibilité de vous présenter notre vision d'une télévision communautaire indépendante pour tous les Canadiens et de l'accès aux médias numériques et émergents par l'entremise de ces organismes.
    Pour ceux d'entre vous que je n'ai pas eu l'occasion de rencontrer en personne, la Canadian Association of Community Television Users and Stations représente les canaux de télévision communautaires qui diffusent par la voie des ondes, par câble et par Internet, les Canadiens qui l'utilisent et la regardent, de même que la majorité des Canadiens qui, à l'heure actuelle, n'ont pas accès à un tel canal.
     Comme vous le savez, les médias numériques ne sont pas vraiment nouveaux. Les ordinateurs sont monnaie courante dans les foyers canadiens depuis les années 1980; ils ont d'abord servi à stocker des textes au format numérique, puis des graphiques et des photographies. Internet comme moyen de partage de l'information s'est développé dans les années 1990 et les formats numériques pour stocker des documents audio et vidéo sont devenus disponibles à peu près à la même période.
    La nouveauté est sans doute le degré de convergence entre les ordinateurs et les technologies audiovisuelles. C'est le désir de partager davantage d'information audiovisuelle sur une grande largeur de bande qui pousse à la hausse la demande d'accès à la large bande. L'autre changement d'importance à l'horizon est, bien sûr, le passage officiel à la télévision numérique, qui alimente le contenu de production en haute définition, l'achat de postes de télévision numériques et de récepteurs numériques. Il y a aussi la perte possible de la diffusion par ondes hertziennes pour les collectivités canadiennes comptant moins de 300 000 habitants.
    Avec ce changement, la dernière distinction entre l'ancien service analogique et le nouveau service numérique disparaîtra. On pense que de plus en plus de gens regarderont la télévision sur Internet, mais personne ne sait vraiment si on pourra répondre à une telle demande, même en large bande.
    Avec tout ce que l'on dit au sujet de la bande passante et des plates-formes de distribution, il est facile de perdre de vue le contexte. Le média est toujours créé selon les formats de base qui avaient cours au XXe siècle: texte, audio, images fixes et films. Les nouvelles plates-formes comme Internet accroissent la probabilité que ces médias se combinent et interagissent entre eux, mais le média de base — et la nécessité pour les Canadiens d'avoir une formation pour l'utiliser — demeure le même.
    « L'éducation aux médias » fait référence à la capacité d'interpréter les médias et de créer des médias pour soi-même. Par exemple, nous enseignons aux enfants non seulement à lire, mais également à écrire. Dans leur réflexion à long terme, les décideurs se sont toujours préoccupés des retombées des nouvelles technologies médiatiques pour le grand public, à la fois en tant que créateur et consommateur de contenu. Il est largement reconnu que l'invention de la presse de Gutenberg a accru le niveau d'alphabétisation dans la culture occidentale. Les bibliothèques publiques sont devenues courantes à compter du XIXe siècle.
    Avec l'invention d'appareils pour enregistrer le son et l'image au XXe siècle, les gouvernements et les citoyens progressistes ont cherché à avoir accès à la radio et à la télévision. Les premières stations de radio communautaire ont vu le jour dans les années 1930. Les premiers canaux de télévision communautaire ont ouvert dans les années 1970, ici même au Canada. C'est peut-être parce que les premières caméras vidéo tombaient en panne fréquemment que leur entretien et la gestion de ces canaux de télévision étaient laissés aux câblodistributeurs, qui se dotaient d'une infrastructure pour la distribution de télévision locale.
    Tous les pays ont suivi notre exemple dans les années 1980 et 1990, et lorsque le prix et la complexité du matériel de télévision ont commencé à diminuer, les collectivités elles-mêmes ont commencé à posséder des canaux de télévision communautaire. Au Canada, il n'y a que de rares endroits où la collectivité est propriétaire de son canal communautaire, y compris au Québec comme votre motion le mentionne. Il y a également sept diffuseurs de télévision par ondes hertziennes répartis au Canada et deux coopératives de câblodistribution dans les Prairies qui offrent des services locaux, c'est-à-dire une poignée à peine.
    Mais la radio et la télévision sont des médias traditionnels. Qu'ont-ils à voir avec l'accès public aux nouveaux médias et aux médias numériques? Les Canadiens ont besoin de savoir-faire pour créer de nouveaux messages médiatiques et de la technologie pour atteindre les auditoires cibles, et il y a une hiérarchie des connaissances et des coûts pour obtenir ces formes d'accès.
    La lecture et l'écriture sont considérées comme si essentielles qu'on les enseigne à l'école. Pour créer un programme de radio ou un message audio, vous devez savoir non seulement écrire le scénario, mais également interviewer des invités, enregistrer le son et faire l'édition et le montage. Pour créer un programme de télévision ou un message vidéo, vous devez comprendre des choses comme les angles de caméra, l'éclairage et le cadra. Tout comme le niveau des compétences requises s'élève pour produire un texte, un document vidéo et un document audio, ainsi en va le coût. Bien que le prix des caméras numérique ait diminué, tel n'est pas le cas des microphones, de l'équipement d'éclairage, des studios d'enregistrement et du matériel nécessaire à la transmission.
    Bien que n'importe qui puisse capter des images brutes à l'aide d'un caméscope et les poster sur YouTube, il existe tout de même des barrières multiples à franchir pour la personne moyenne dans l'environnement des nouveaux médias. Il y a des barrières de connaissance pour produire des messages efficaces. Il y a des barrières de production technologique pour capter des événements civiques ou culturels qui exigent des studios, de l'éclairage, de multiples caméras et des équipes. Il y a aussi des barrières technologiques de distribution pour accéder à des auditoires, particulièrement des auditoires locaux, si le document vidéo est disponible uniquement parmi des millions d'autres sur YouTube. Il peut aussi y avoir des obstacles à la distribution et au coût si l'auditoire cible ne peut avoir accès à Internet à haute vitesse ou ne peut se l'offrir.

  (1225)  

    Enfin, comme l'ont mentionné d'autres présentateurs, il y a des obstacles juridiques si vous ne voulez pas céder les droits d'auteur à YouTube ou à d'autres agrégateurs de contenu à but lucratif.
    Les éducateurs canadiens reconnaissent depuis près de 20 ans que la définition d'alphabétisme doit être élargie pour englober tous les médias, y compris l'audio, le vidéo et la plate-forme Internet elle-même. Grâce au Regroupement des associations canadiennes d'éducation aux médias, ou RACEM, l'éducation aux médias, y compris les rudiments de la production multimédia, font partie du programme de langue partout au Canada depuis 2002.
    Puisque les nouveaux médias et les outils numériques continueront d'évoluer, il faudra des ressources dans les collectivités où les Canadiens de tous âges — même si vous avez déjà 40 ans — peuvent à la fois se familiariser avec les nouveaux médias et les utiliser pour distribuer des messages. Il s'agit d'une bibliothèque multimédia du XXIe siècle et d'un réseau de distribution, si vous voulez.
     Dans la plupart des régions du pays, le modèle de gestion par câble de la télévision communautaire domine toujours et pose malheureusement problème. Les données du CRTC montrent que plus de 70 p. 100 des sommes versées par les abonnés à la câblodistribution pour payer l'expression de la vie communautaire sont utilisées pour des programmes produits sur le câble et qui font la promotion de leur marque. Plus des deux tiers des quelque 300 canaux communautaires qui existaient à un moment ont été fermés. La consolidation dans l'industrie de la câblodistribution a mené à la centralisation des ressources plutôt qu'à une nécessaire décentralisation pour favoriser une stratégie numérique inclusive. Une fois de plus, les Canadiens qui habitent les régions rurales sont exclus.
    Finalement, le câble comme plate-forme de distribution est passé d'un taux de pénétration de plus de 80 p. 100 il y a une décennie à tout juste 60 p. 100 aujourd'hui. Ainsi, la câblodistribution n'est plus universellement accessible, particulièrement dans les régions rurales qui ont un faible taux d'accès à Internet à haute vitesse, et elles pourraient même perdre la télévision gratuite par voie des ondes.
    Comme c'est le cas des bibliothèques, les centres de formation aux nouveaux multimédias doivent faire l'objet d'une gestion publique et d'une reddition de comptes, être librement accessibles pour la collectivité et diffuser leur contenu sur toutes les plates-formes.
    Notre vision de l'accès aux nouveaux médias et aux médias numériques par tous les Canadiens est fondée sur la politique de télévision communautaire existante et sur la modernisation de cette politique. L'argent que les Canadiens versent déjà pour un accès communautaire pourrait être attribué à des centres de multimédias exploités par la collectivité qui donneraient accès à toutes les technologies des médias au fur et à mesure où elles deviennent disponibles.
    En se servant de la main-d'oeuvre disponible dans la collectivité, il y aurait moyen de générer le contenu local qui est devenu si onéreux à financer pour les secteurs public et privé. Cela permettrait de distribuer le contenu gratuitement aux câblodistributeurs et sur le Net en passant par la voie des ondes. Dès que les collectivités auraient leurs propres infrastructures de transmission — ce que possèdent déjà quelques-uns de nos membres — elles pourraient offrir de retransmettre gratuitement la télévision par la voie des ondes sous forme numérique si elles le souhaitent, et d'autres nouveaux médias, y compris Internet sans fil et la télévision mobile au fur et à mesure de leur disponibilité.
    Les sommes versées l'an dernier par les abonnés à la câblodistribution, qui ont dépassé les 130 millions de dollars, sont suffisantes pour financer 250 de ces centres. Cela représente au moins un centre pour chacune des collectivités de plus de 10 000 habitants, les bureaux de quartier supplémentaires dans les villes de plus de 500 000 habitants et environ 50 centres dans les milieux ruraux. Ces installations permettraient de rejoindre plus de 90 p. 100 des Canadiens.
    Une partie importante de notre stratégie est de tabler sur l'infrastructure existante. Par exemple, vous avez pu entendre dire qu'il y a déjà plus de 3 000 portails Internet gratuits à l'échelle du pays — des sites de PAC — qui ont été financés par Industrie Canada depuis les années 1990. Plusieurs sont situés dans les bibliothèques et les centres communautaires, selon ce que nous envisageons, et permettent déjà d'enseigner des compétences pour l'utilisation d'Internet, y compris les multimédias. Ainsi donc, notre vision réunit de tels organismes qui évoluent déjà dans le même sens au fur et à mesure de la convergence des technologies.
    Pour conclure et aussi pour répondre à votre question six, nous recommandons d'abord que le CRTC réaffecte les fonds provenant de la câblodistribution à des centres multimédias appartenant à des collectivités et exploités par elles pour favoriser l'expression locale en créant des fonds indépendants, entièrement transparents et responsables.
    Deuxièmement, nous recommandons qu'une fréquence hertzienne soit réservée aux collectivités dans tous les marchés afin qu'elles puissent bénéficier d'une nouvelle technologie de diffusion au fur et à mesure de leur disponibilité. À l'heure actuelle, nous ne savons pas si c'est le CRTC, Industrie Canada ou Patrimoine canadien qui pourrait agir en ce sens, et nous demandons votre aide pour clarifier la situation.
    Troisièmement, les radiodiffuseurs publics et privés qui choisissent d'abandonner la transmission dans les collectivités de moins de 300 000 habitants après le mois d'août de l'an prochain devraient être invités à donner un accès gratuit à perpétuité à leurs tours de transmission et à leurs équipements afin que les collectivités qui le souhaitent puissent profiter de l'offre d'une télévision à diffusion publique, y compris la télévision communautaire.

  (1230)  

    Encore une fois, j'aimerais mentionner que deux de nos membres le font déjà. Ils retransmettent des signaux éloignés provenant des secteurs public et privé en plus d'offrir un service communautaire. Il est donc possible de le faire au plan financier pour les petites collectivités. L'une de ces collectivités ne compte que 1 000 personnes.
    J'accueillerai vos questions au nom de CACTUS.
    Merci.
    Encore une fois, nous ferons un tour de table d'une durée de sept minutes.
    Scott commencera, puis je suivrai.
    D'accord, mais ce n'est pas sept minutes chacun.
    M. Pablo Rodriguez: Non?
    Le président: Nous avons un peu dépassé notre temps la dernière fois.
    Oui, M. Simms et M. Rodriguez peuvent partager leur temps, mais le temps total est de sept minutes.
    Monsieur Simms.
    Je serai bref, madame Edwards. Je m'en tiendrai à ma ville natale, dans toute la mesure du possible, parce que je veux être plus ciblé. J'apprécie ce que vous avez dit au sujet des sites PAC, des multimédias, de la télévision par voie des ondes, les raisons fondamentales, et ainsi de suite. Permettez-moi de vous poser la question suivante.
    Dans ma collectivité, dans ma circonscription, nous avons un accès communautaire par l'entremise de l'une des grandes compagnies qui y sont établies. Ces stations organisent des parties de bingo pour recueillir des fonds. Elles diffusent des bulletins de nouvelles qui reflètent assez bien la vie de la collectivité. Récemment, le format a changé. Il y a eu une levée de boucliers, puis elles sont revenues à leur point de départ, elles ont modifié leur décision.
    J'essaie de vous dire que je ne connais pas grand monde dans ma région qui se plaindrait d'une compagnie qui offre un service de câblodistribution communautaire, qui leur appartienne. Quelle serait votre intention en vue d'améliorer ou de créer un accès supplémentaire dans ma collectivité?
    Il ne s'agit pas d'un énoncé de politique de quelque manière que ce soit. Tout ce que je veux savoir, c'est quelle est votre vision des choses? Ou qui a-t-il de faux?
    Premièrement, nous ne sommes pas du tout contre le fait que les canaux soient offerts par l'entremise du câble si les compagnies veulent bien continuer de les offrir et que les gens apprécient le service qui leur est offert. Nous croyons cependant qu'il serait plus transparent pour elles de revenir devant le CRTC et de demander une licence du type qu'elles souhaitent, qui serait plus similaire à celle d'un radiodiffuseur privé local.
    Dans l'exemple que vous venez de donner, vous avez dit que votre câblodistributeur local donne un reflet de la collectivité dans le bulletin de nouvelles, qu'il a modifié le format et qu'il y a eu levée de boucliers. Vous parlez d'un modèle descendant de programmation où c'est la compagnie de câblodistribution qui décide ce qu'elle produira. Encore une fois, il n'y a rien à redire de cette approche, puisque c'est ce que font les radiodiffuseurs privés. Ils cherchent à produire des programmes que les gens veulent regarder.
    Mais tel n'était pas le but de ces canaux au départ. La Loi sur la radiodiffusion dit clairement qu'il doit y avoir des secteurs publics, privés et communautaires. L'argent — 2 p. 100 des revenus des câblodistributeurs — devait permettre aux collectivités de faire leur propre production. C'était la seule fenêtre dans le système de radiodiffusion qui devait être ouverte aux gens ordinaires.
    Il n'y a donc aucune raison pour qu'un canal à accès entièrement ouvert ne puisse coexister avec un canal par câble, ce qui devait être fait avec les fonds perçus au départ. Cela ne pose aucun problème. Si les gens de notre collectivité aiment le service, il n'y a aucune raison qu'ils ne puissent continuer d'en profiter.
    La plupart des gens au Canada ne savent pas que ce droit existe, parce qu'il s'est écoulé une douzaine d'années depuis que nous avons eu une télévision à accès communautaire dynamique et saine au Canada. Il ne viendrait même pas à l'idée de la plupart d'entre nous d'appeler leur câblodistributeur pour lui dire « Je voudrais faire un programme », parce que nous n'en avons pas vu sur les ondes depuis fort longtemps, sauf dans de toutes petites régions au Canada comme je l'ai mentionné. Nous croyons donc qu'il y a suffisamment d'espace dans le système pour que tous ces modèles coexistent.
    Il y a aussi un autre problème avec le modèle de câblodistribution. Vous avez parlé de ceux qui dépensent l'argent recueilli auprès des abonnés du câble pour donner une image de la vie locale. Ces gens ont adopté un modèle professionnel qu'ils ont tendance à payer. lls ont consolidé leurs ressources dans les grands centres où se trouve tout leur personnel de production, ce qui — nous le savons — est beaucoup plus coûteux que de travailler avec des bénévoles, puis ils rediffusent leurs programmes en région.
    Je ne sais pas quel est le pourcentage dans votre collectivité, mais il y a déjà eu 30 services indépendants et différents au Nouveau-Brunswick. En raison de l'attribution de licences sur une base de zone, c'est-à-dire que le CRTC autorisait les câblodistributeurs à consolider d'assez petites licences, à l'époque où il y avait un studio dans chaque région; il a favorisé la consolidation. Aujourd'hui, il n'y a plus que six studios dans l'ensemble du Nouveau-Brunswick au lieu de 30, et ces studios réunissent un service à l'échelle de la province.
    Indépendamment de la question de savoir si des émissions sont produites par des professionnels ou par des bénévoles, on retient qu'il y a eu consolidation. Nous assistons donc au même type de perte du reflet de la collectivité locale dans le secteur des canaux communautaires comme c'est le cas dans les secteurs public et privé, où les studios dans les petites collectivités ont été fermés.
    Outre le fait que notre proposition aborde les besoins de formation pour accroître les compétences pour l'utilisation des nouveaux médias numériques et l'accès à ces médias, elle aborde aussi la réduction considérable de la programmation locale que nous observons partout au pays.
    Je le sais parce qu'à l'époque où je travaillais, j'ai été coordonnatrice bénévole chez Shaw Cable à Calgary...

  (1235)  

    Je pense que je suis en train d'utiliser son temps, alors vous pourriez peut-être résumer votre propos.
    Bien sûr.
    Avec huit membres du personnel, nous produisions 40 heures de programmation nouvelle par semaine. Vous ne pouvez faire cela avec un modèle professionnel.

[Français]

    Monsieur Pineau, il me reste deux minutes. Je vais vous poser trois questions très rapidement, et je vous demanderai de me répondre le plus rapidement possible.
    Vous nous dites que le développement d'une stratégie numérique canadienne doit s'appuyer sur la nouvelle Loi sur le droit d'auteur. C'est bien, mais comment fait-on cela? Comment détermine-t-on les priorités de cette nouvelle loi? Ce sont des questions très vastes, je le sais. Comment fait-on pour avoir plus de contenu canadien dans les nouveaux médias, et non pas moins?
    Troisièmement, plusieurs disent que ce n'est pas grave de céder à des intérêts étrangers ce qu'on appelle le contenant, en autant qu'on protège le contenu. Mon opinion est que ce n'est pas vrai, parce que lorsqu'on contrôle le contenant, on contrôle en partie le contenu. Pouvez-vous parler rapidement de ce sujet? Il s'agit de trois questions faciles.
    En effet, ce sont trois questions très faciles. Pour la première, je vais invoquer un amendement quelconque de la Constitution canadienne qui dit que je ne peux pas répondre à cette question dans les 30 secondes que vous m'accordez. La question est très complexe, et on pourra y revenir.
    Je vais simplement aborder la troisième question, au sujet du contrôle de nos infrastructures culturelles et numériques, et je crois que ce sujet est très important. On a parlé, lors d'une séance précédente, de gatekeepers. Je pense que cette notion est également très importante. Si on se préoccupe des gatekeepers pour le contenu à l'intérieur du Canada, on a encore plus raison de s'en préoccuper quand les centres de décision sont à l'étranger. C'est la raison pour laquelle nous disons qu'étant donné l'univers convergent, on ne voit pas comment on peut ériger des murs entre le tuyau et ce qui passe dedans. Actuellement, ce sont les mêmes propriétaires, les mêmes infrastructures, et on croit vraiment que la menace des traités internationaux est très importante. On ne croit pas que l'exemption culturelle, aussi valide qu'elle le soit, soit suffisante pour assurer la liberté des gouvernements canadien et provinciaux de légiférer en matière d'art et de culture de toutes sortes de façons.
    Quand on ouvre la porte à des contestations devant les cours à la suite d'actions qui sont prises parce qu'elles nuisent à des intérêts étrangers, je crois qu'on joue à la roulette russe du point de vue culturel.
    C'est ce que je pense aussi. Merci.

[Traduction]

    Merci.
    Madame Lavallée, je vous en prie, vous disposez de sept minutes.

[Français]

    Merci beaucoup. Alors, vous aurez l'occasion de vous expliquer plus longuement, monsieur Pineau. D'abord, ce matin, j'étais au Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie où il y avait, comme témoin, le ministre de l’Industrie, Tony Clement, qui a justement parlé de la propriété étrangère. Essentiellement, il a dit que séparer les télécommunications de la radiodiffusion était possible. C'est difficile, à son avis, mais ce n'est pas impossible.
    Pour ma part, je crois que c'est impossible. La radiodiffusion est maintenant partout, et nos sans-fil, qui ne sont assujettis qu'à la Loi sur les télécommunications, font de la radiodiffusion et font des choix culturels immensément importants. Il nous a dit aussi qu'on pouvait traiter chaque secteur séparément. Il y a cette difficulté.
     Je dois dire que même s'il n'y avait pas un débat sur la propriété étrangère à ce comité, il reste que ce débat doit se faire, peut-être même ici au Comité permanent du patrimoine canadien, car on ne peut plus dissocier les télécommunications de la radiodiffusion. Il faut donc fusionner les deux lois. Le CRTC parle aussi de la Loi sur la radiocommunication.
    Je laisse vous exprimer à ce sujet, monsieur Pineau.
    En ce qui nous concerne, nous disons que c'est important de tenir ce débat de façon ouverte et complète, non par petits morceaux, parce qu'on est actuellement en train de changer des politiques culturelles de longue date. Ça se fait par l'intermédiaire d'un amendement à la Loi sur les télécommunications qui se retrouve dans un projet de loi omnibus sur le budget. En conséquence, dans les circonstances actuelles, ça passe forcément.
    On dit qu'il est important d'avoir ce débat. À ce sujet, il y a des gens des deux côtés de la clôture. Je parlais, la semaine dernière, à quelqu'un qui croit que c'est important de revoir la Loi sur les télécommunications et celle sur la radiodiffusion et de les évaluer ensemble fondamentalement. Il y a d'autres gens — et des gens éminents, dont je lisais les opinions la semaine dernière lors d'une conférence qui a lieu ici, à Ottawa —, qui disent que ce n'est pas nécessaire, qu'il y a assez de flexibilité. Il faut avoir ce débat. Ce qui est en train de se passer, c'est qu'on « ouvre la porte de la grange » et après, on va se demander si on a bien fait. C'est ça, le danger.

  (1240)  

    Parmi les éminentes personnes qui s'expriment sur le sujet, n'avez-vous pas remarqué que celles qui disent qu'on peut donner accès aux télécommunications à la propriété étrangère, c'est le genre de personnes qui n'a aucun intérêt ou qui en a très peu envers le développement culturel?
    Si vous dites que ce sont les propos du ministre de l'Industrie, oui, évidemment. Ce n'est pas sa préoccupation; c'est la préoccupation de M. Moore.
    On était contents de voir qu'il y avait trois ministres impliqués dans l'annonce faite lundi, dont le ministre du Patrimoine et le ministre des Ressources humaines et du Développement des compétences Canada, parce que tous ces secteurs sont extrêmement importants dans le développement d'une stratégie numérique.
    Ce qui nous préoccupe cependant, c'est que le débat est formulé surtout en termes économiques. Ce qu'on vous dit, c'est qu'il y a des termes culturels et des termes sociaux. Mme Edwards représente une partie importante de la dimension sociale d'une stratégie numérique. Pour notre part, nous venons ici pour l'appuyer et aussi pour dire que, du côté de la culture, il est important d'avoir ce débat.
    L'économie c'est important; la culture fait partie de l'économie, mais la culture dépasse l'économie.
    La semaine dernière, des représentants du Groupe Nordicité Ltée sont venus témoigner et ont présenté une étude sur l'élaboration d'une stratégie globale du numérique. Malheureusement, ils n'ont pas été assez explicites dans leurs conclusions. Leurs conclusions suggéraient la création d'un panel qui serait formé de plusieurs personnes de plusieurs ministères du gouvernement et qui se rapporteraient directement au premier ministre.
    Par ailleurs, lundi matin, trois ministres, à la tête desquels se trouve Tony Clement, le ministre de l'Industrie, mènent une consultation sur le numérique. Pensez-vous qu'un panel — ou une task force, pour utiliser un terme anglais —, composé de plusieurs personnes éminentes provenant de plusieurs ministères pourrait d'ores et déjà se mettre au travail? Vous savez que le Canada est très en retard quant à une stratégie numérique.
    Très en retard par rapport à d'autres pays, oui semble-t-il. J'entendais le témoin précédent dire que ça dépendait. C'est difficile, c'est une course constante, on est sur un tapis roulant.
    La France est déjà en train de faire la mise en oeuvre.
    Oui, je pense qu'il est urgent d'avoir une stratégie globale qui couvre tous les aspects.
    Je m'excuse, j'ai perdu le début de votre question.
    Essentiellement, le Groupe Nordicité Ltée propose un panel formé de...
    Ah oui, sur le mécanisme.
    Autrefois, on aurait fait une commission royale d'enquête, et, comme l'univers n'évoluait alors pas très rapidement, deux ou trois ans plus tard on aurait pu avoir des suggestions qui étaient pleines de bon sens. Dans le système actuel, le mécanisme est trop lourd.
    J'ai eu l'occasion de discuter avec un certain nombre de personnes de ce concept que le gouvernement a utilisé, par exemple, dans le cas du blue-ribbon panel sur les accords de contribution et les bourses. Ça donne des résultats. Il y en a eu un sur les télécommunications. En autant que le panel soit équilibré quant aux différents points de vue qui sont à considérer. C'est un mécanisme qui est plus léger, cela pourrait être un panel qui aurait un mandat limité à un nombre de mois et qui ferait une consultation nationale.
    C'est bon d'avoir une consultation jusqu'au 9 juillet, mais ça demeure quand même un peu... Oui, c'est une partie du casse-tête, mais je pense qu'on a besoin de digérer tout ça.
    Me reste-t-il encore du temps?

[Traduction]

    Vous avez encore une minute.

[Français]

    Parfait.
    Plus tôt, Mme Edwards évoquait Gutenberg — je crois qu'en effet beaucoup de choses partent de là. À plusieurs moments de l'histoire, on a vécu ce genre d'accélération de la technologie — dans le cas de l'imprimerie, c'est peut-être un peu fort —, une accélération des moyens de diffusion. On en vit une autre actuellement. Il reste que les principes sont toujours les mêmes.
    Actuellement, dans le débat sur le numérique, j'ai l'impression qu'on en profite pour empiéter sur les droits d'auteur des artistes. Avez-vous des commentaires à faire à ce sujet?
    Je ne sais pas si c'est délibéré, mais on semble les oublier. Il faut absolument en tenir compte. Le sujet est assez complexe. Je faisais allusion à la « déprofessionnalisation », dans une certaine mesure. Il faut en tenir compte. On a des définitions fonctionnelles actuellement de ce qu'est un artiste professionnel, un créateur professionnel. On a des systèmes d'octroi du Conseil des arts, par exemple, qui sont basés là-dessus.
    On a toute une mécanique qui est là, qu'on a développée au cours des 50 dernières années. Il ne s'agit pas de jeter le bébé avec l'eau du bain; il s'agit d'adapter les choses et de retourner au principes fondamentaux. Pour notre part, c'est ce qu'on dit toujours. Si vous retournez aux principes fondamentaux de la loi qui ont mené au système de diffusion qu'on a actuellement, vous allez trouver les réponses.

  (1245)  

    Merci.

[Traduction]

    Merci.
    Monsieur Rafferty, vous avez sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à tous les deux d'être venus.
    J'ai une question pour vous deux, mais je commencerai peut-être par M. Pineau concernant la propriété étrangère.
    Nous avons entendu dire que les restrictions à la propriété étrangère pour les compagnies de télécommunications sont en voie d'être levées. Croyez-vous qu'il est possible d'établir des pare-feu autour de la programmation et du contenu culturels de ces sociétés gigantesques comme Shaw, par exemple, pour maintenir l'indépendance de leurs services de télécommunications par rapport aux services de radiodiffusion?
    Je ne suis ni avocat ni organisme de réglementation. J'aimerais bien voir de quelles lois il s'agit. Nous parlons de type de règles et comment cette question pourrait être abordée.
    Si nous ne sommes pas très prudents, c'est par le biais des négociations commerciales avec l'étranger que nous risquons de jeter le bébé avec l'eau du bain. C'est le risque que nous courons.
    Nous donnons peut-être l'impression de crier au loup et qu'il n'arrivera rien, mais cela s'est déjà produit au moins une fois dans le secteur culturel, en 1997 avec l'ALENA, lorsque UPS a contesté les programmes canadiens d'aide aux revues. Le Canada a trouvé moyen de se sortir de l'impasse et de créer quelque chose d'autre qui respecte les paramètres établis.
    Je cite ce cas à titre d'illustration. On m'a dit qu'il y avait eu de telles contestations par des compagnies privées dans le secteur environnemental, par exemple, qui est très important.
    Quand je dis qu'il faut être prudent concernant la réglementation touchant le secteur culturel, j'ajoute qu'elle affectera tous les secteurs d'activité. Nous devons être très prudents avec ce que nous ferons de notre souveraineté en tant que nation dans ce secteur.
    Peut-être avez-vous une brève pensée au sujet des compagnies qui doivent faire face à l'obligation de se départir d'un secteur d'activités qui affecte la culture, afin de transférer la propriété de leurs activités de télécommunications à des propriétaires étrangers. Pourrais-je avoir votre point de vue personnel sur cette question?
    Eh bien, je n'en ai pas. Vous me prenez au dépourvu parce que je n'y avais jamais réfléchi dans cette perspective.
     Nous avons autorisé la concentration de la propriété au cours de la dernière décennie ou peut-être au cours des 15 dernières années, par souci d'efficience et de concurrence. Le véhicule et le contenu sont de plus en plus difficiles à distinguer, de sorte que nous perdrions peut-être un peu d'avantages concurrentiels, mais qu'il pourrait y avoir d'autres façons de tenter de prévenir le danger que nous pressentons.
    Je vous le dis à titre personnel seulement.
    Merci beaucoup, monsieur Pineau.
    Madame Edwards, de quelle manière les centres de programmation communautaire ou les centres multimédias comme celui que vous proposez pourraient-ils améliorer l'éducation en matière de communication numérique des Canadiens? Je pense en particulier à une circonscription comme la mienne qui est très vaste, qui est à majorité rurale et qui n'a pas les infrastructures nécessaires pour que cela se produise. Aimeriez-vous commenter sur la culture numérique et sur ces centres?
    Notre organisme travaille déjà à l'élaboration d'un plan — il a soutenu notre présentation devant le CRTC — avec, par exemple, l'Association canadienne des bibliothèques. Nous voulons travailler avec des centres communautaires et avec des coopératives vidéo et de film qui existent déjà; il y en a plus d'une centaine au Canada. Nous voulons donc travailler avec des organisations existantes qui offrent déjà ces services, mais qui n'ont pas nécessairement accès au réseau de distribution. Les bibliothèques publiques ont souvent des portails Internet gratuits et offrent une formation limitée pour l'utilisation d'Internet. Encore une fois, elles ne disposent pas d'installations qui permettraient aux gens d'enregistrer des assemblées publiques locales et les diffuser.
    Comme je l'ai mentionné, il y a présentement des fonds dans le système pour l'expression communautaire, qui permettraient d'étendre ce genre de centre multimédia aux régions rurales.
    Quelle est la population de votre circonscription, à titre d'exemple?
    Nous couvrons un très vaste territoire. Il y a un centre plus large en périphérie, mais le reste de la circonscription est relativement peu peuplé, de l'ordre de 27 000 à 28 000 habitants répartis dans...
    Pour l'ensemble de la circonscription?
    ... le reste de la circonscription.
    Pouvez-vous aller d'une extrémité à l'autre de la circonscription en automobile en une demi-heure?

  (1250)  

    Non, il faut environ cinq heures.
    Par conséquent, la population est très répartie.
    Il y a des fonds disponibles pour environ 50 autres centres régionaux. Ce que nous envisageons dans un cas comme celui-là serait d'avoir une installation équipée d'un studio complet, d'un centre de formation et d'un laboratoire informatique où les gens pourraient accéder à Internet. Pour desservir les régions périphériques, il pourrait n'y avoir qu'une caméra et un local de montage et des ordinateurs dans un centre communautaire ou une bibliothèque existante. Il ne s'agirait peut-être pas d'un studio complet, mais il permettrait de transmettre du contenu qui serait facilement téléchargeable grâce à Internet vers un centre de distribution régional. Il existe donc différentes stratégies pour tenir compte des collectivités de tailles différentes.
    L'objectif est de rejoindre 90 p. 100 des Canadiens afin qu'ils puissent se rendre à l'un de ces centres et avoir accès à des outils et à une formation à moins de 30 minutes en empruntant les transports en commun. Il y a suffisamment d'argent pour le faire.
    Nous n'avons pas de service de transport en commun là où nous sommes.
    Est-ce qu'il me reste un peu de temps, monsieur le président? D'accord.
    L'ère Internet nous montre combien de gens interagissent personnellement avec leurs sources médiatiques comme Facebook et Twitter et ce genre de choses. Comment votre proposition contribuerait-elle à favoriser une approche plus interactive à la programmation communautaire?
    Traditionnellement, la télévision communautaire avait pour mandat de desservir les collectivités et elle a innové avec les tribunes téléphoniques à la télévision et l'utilisation de caméras mobiles dans la collectivité lors d'événements communautaires. Même à l'époque qui a précédé Internet interactif, le secteur de la télévision communautaire repoussait toujours les frontières de l'interactivité.
    Un exemple de la transformation qui s'est opérée, grâce à Internet, nous est fourni par Headlines Theatre, à Vancouver, une troupe de théâtre qui fait une utilisation des plus avancées de la télévision communautaire. Cette troupe présente des pièces d'une durée de 20 minutes préparées dans la collectivité autour de thèmes comme les sans-abri et l'accoutumance à la métamphétamine, pièces qui sont présentées dans un théâtre. Les gens peuvent intervenir dans le cadre de la pièce et se présenter sur scène et participer à la recherche de solutions. Les pièces sont également rediffusées sur le canal communautaire local afin que les gens qui sont à la maison puissent appeler et influencer le résultat. Ils diront à un acteur « Pourquoi n'essaies-tu pas cela? », et l'acteur le fera sur scène. Les dirigeants ont ajouté une composante Internet — diffusée sur le Web — afin que les gens partout dans le monde qui sont également aux prises avec le problème des sans-abri, de l'accoutumance à la métamphétamine et d'autres problèmes dans les grands centres puissent taper et transmettre leurs suggestions à partir de l'autre bout du monde et les voir se matérialiser sur scène.
    Puisque le mandat et les intérêts sont de permettre aux organisations communautaires d'oeuvrer mieux que d'autres intervenants pour trouver de nouvelles applications pour les nouveaux médias. C'est leur travail.
    Merci.
    Le dernier à poser des questions sera M. Galipeau. Je vous en prie, allez-y.

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je vais d'abord m'adresser à M. Pineau, que je connais d'ailleurs depuis quelques années.
    Juste pour me remettre dans le contexte, puisque cela fait longtemps qu'on a discuté de cette question, je voudrais savoir ceci: votre organisme compte combien d'adhérents? Est-ce que ce sont des individus, des sociétés d'État, des sociétés privées?
    On compte actuellement environ 570 membres, dont 200 sont des individus qui appuient le travail que l'on fait. Les autres sont des organismes, et je peux vous en nommer quelques-uns. La plupart des gens qui sont venus ou qui viennent devant vous sont des représentants d'organismes qui sont membres de la conférence. On est un organisme-parapluie. Par exemple, il y a la Royal Opera Canada, l'ACTRA, la Canadian Actors' Equity Association, du côté anglais, l'Association canadienne des musées, l'UDA, du côté des syndicats. Il y a aussi l'APFTQ, l'Association des producteurs indépendants. Il y a donc des organismes qui sont eux-mêmes des fédérations, des syndicats ou des associations professionnelles. La CAPACOA est un de ceux-là, en ce qui a trait aux présentateurs. Il y a le Regroupement des centres d'artistes autogérés du Québec, la Canadian Dance Assembly, du côté du Canada, la Vancouver Arts Advocacy Alliance, la Saskatchewan Arts Alliance. C'est une représentation très variée d'organismes membres de la CCA qui appuient le travail national qu'on fait et qui le reflètent également à leurs membres.
    Pour ce qui est du financement, ce sont vos adhérents qui font...
    Le financement de la Conférence canadienne des arts vient dans une proportion de 60 p. 100 d'un accord de contribution avec le ministère du Patrimoine canadien, qui reconnaît ainsi notre travail. Il n'y a rien de ça qui s'applique à notre travail de représentation publique. C'est pour notre travail de recherche et de reportage. Le reste vient du membership et de revenus autogénérés.
    Je veux savoir si, selon vous, l'accès généralisé à Internet favorise ou réduit la consommation de contenu canadien.
    Théoriquement, il devrait la favoriser. Quand on parle de réglementation ou d'adapter la réglementation à l'univers numérique, à Internet, au wireless et tout ça, on ne préconise certainement pas les mêmes remèdes qui s'appliquaient dans une autre technologie. Ce qui est important aujourd'hui, c'est de rendre le contenu disponible et, pour que cela se fasse, il faut qu'il y en ait, d'abord et avant tout.
    En ce qui a trait à toutes les formes d'appui financier possibles — directes, indirectes, privées, publiques —, on est en faveur de cela pour générer du contenu canadien. La loi du marché ne s'applique pas à notre culture. On le sait, c'est reconnu depuis longtemps. On est trop petits et étendus sur un trop grand territoire.

  (1255)  

[Traduction]

    Madame Edwards, avez-vous quelque chose à ajouter à cela?
    Je pense que nous devons être très prudents en ce qui a trait aux pratiques de gestion du réseau qui pourraient établir une discrimination allant à l'encontre du contenu canadien dans le futur. Par exemple, du point de vue du secteur communautaire, qui offre un libre-accès et qui est le niveau de production de base si vous voulez, il faudra à long terme et pour le bénéfice de ceux qui regardent la télévision sur le Web, demander aux FAI de libérer de l'espace gratuit sur leur serveur ou quelque chose du genre pour les collectivités, afin de réduire les obstacles à l'accessibilité.
    Par conséquent, il faut donc suivre l'évolution dans le temps. Quelqu'un d'autre ici aujourd'hui a dit qu'il s'agit d'un objectif mobile. Il faut simplement garder un oeil ouvert sur tous ces petits facteurs qui soit aident, soit nuisent à l'accès pour tous.

[Français]

    Ça rejoint le commentaire d'un témoin précédent. Son nom m'échappe. Il parlait de l'importance...
    C'était M. Levy, dont le nom se traduit en français par « redevance ».
    Voilà qui est très à propos.
    Ça rejoint ce qu'il disait sur l'importance de s'assurer que les gatekeepers jouent le jeu honnêtement et qu'un organisme réglementaire établit des principes fondamentaux. La réglementation n'est pas nécessairement une mauvaise chose. Ça dépend de la façon dont elle est appliquée.
    D'accord. Est-ce que l'émergence des nouveaux médias ralentit la création de contenu?
    Non, je pense plutôt qu'elle l'accélère. Comme je le disais dans ma présentation, elle soulève beaucoup de questions qui doivent être résolues, par exemple sur le statut professionnel des gens, sur ce qui s'applique et à qui, sur les droits, les redevances et la propriété intellectuelle.
    On m'a posé la question plus tôt, mais il était impossible d'y répondre dans ce contexte. Il reste que bientôt, on devrait avoir un projet de loi à se mettre sous la dent. Comme tous les autres participants, on aura alors l'occasion d'émettre tous les commentaires nécessaires.
    Dans le cadre de votre présentation, vous avez parlé de l'English Canada et du Québec. Où se trouve l'English Canada? Est-ce qu'Embrun et Shawville font partie de l'English Canada?
    Il est très difficile d'utiliser un langage qui exprime les distinctions, parfois géographiques, que l'on voudrait faire. Dans ce cas-ci, j'aurais peut-être pu parler de marchés francophones ou de marchés anglophones. Ça dépend du sujet. J'ai longtemps été responsable des situations régionales relatives aux francophones hors Québec à Radio-Canada, et je connais les difficultés du langage associées à certains sujets.
    On pourrait parler de marchés à prédominance anglophone. En matière de télévision communautaire, ils sont plus mal en point que ne le sont les marchés francophones du Québec, même si ces derniers laissent à désirer. Je profite de l'occasion pour préciser, au sujet de la description qu'a faite M. Simms de sa station communautaire et de la satisfaction de sa communauté, que je suis bien content pour eux, mais que selon toutes les preuves qu'on a sur cette question, sa situation est minoritaire. Je ne pense pas que les gens du Nouveau-Brunswick feraient ce genre de témoignage sur le contenu local, étant donné qu'ils n'ont maintenant qu'une station pour toute la province.
    Monsieur le président, je vous remercie beaucoup.

[Traduction]

    Merci.
    Je remercie nos témoins de leurs excellentes présentations et de leurs réponses extraordinaires. Je remercie aussi les membres de notre comité qui ont su poser de bonnes questions.
    Sur ce, la séance est levée.
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